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LMU]
&
AftREST
DU PARLEMENT,
Du 2 Mai 1 7 6 8 .
Extrait des Regijlres du Parlement.
€
E jo u r, les Chambres affèmblées, les
Gens du Roi font entrés , & Me. JeanAndré Le Blanc de Caftillon , Avocat Général
dudit Seigneur R o i, portant la parole, onc
dit :
M E S S IE U R S ,
Le Bref émané au fujet des Edits du Prince
de Parme, fous le nom du Souverain Pontife ,
mais fabriqué par les Officiers de fa C our,
ôc fuggéré par les Jéfuites, ne nous a d'a
bord été connu que par la fuppreflîon ordon
née à Paris & à Touloufe.
La proximité d'A vignon, qui fèmbloic
A
�jA W Z k
2
devoir hâter la didrif^ucion de cette piece
en Provence, a vraifemblablemem contribué
à -la rendre plus tardive : on y a prévu les
fuites d'une entreprife qui infulte aux droits
des Souverains &c des Nations, au nom de
tant de Rois , à un Prince digne d'intérelîèr
tout l’univers & de trouver par-tour des ven
geurs. Ces fuites ne pouvoient être appréhen
dées que du petit nombre de perfonnes parmi
lefquelles le myftere de ce Bref étoit renfermé.
A peine a-t-il vù le jour , que les partifans de la fameufe Société, &c ceux des
prétentions de la Cour de Rome , ont été
déconcertés ; ils n'ont pù voir qu’avec peine
la ’ doétrinc ultramontaine fe produire hardi
ment , fans les pailliatifs dont l’ufage eft: indifpenfable dans un fiecle éclairé ; démentir
par cet éclat imprévu l’affurance avec laquelle
ils publioient que cette Cour nous laide jouir
de nos maximes ; venger elle-même la M agif
rrature des noms calomnieux donnés à fes dé
marches, & juftifier des allarmes qu'on ofoit
traiter de déclamations vaines, &c de fauftès
fuppofitions.
Ceux qui font plus attachés aux prétentions
du Miniftere de Rome , qu’initiés dans fes
myfteres, ont craint que fa hauteur n’eut
trompé fa politique, & qu’elle n’eût hâté la
perte de la Société en voulant la reculer.
Dansuaç conjon&me auffi critique, ils n’onc
i
pu lui marquer leur attachement que pat
l’étonnement 8c le dlence. Ils l’ont enfin rom
pu ce filence, au moment qu'ils ont cru voir
quelque jour à donner le change fur les
motifs du nouveau Bref.
Après ce qui a été dit par les grands M igiftracs qui ont parlé avant nous , s'il peut
nous refter quelque chofe d'utile û faire , c’ed
de montrer le faux des exeufes qu'on multi
plie en vue d’affoiblir ou de détourner l'indi
gnation générale : on voudroit faire oublier
la démarche , 8c replonger les efprits dans
le calme pour préparer fans oblfacle de nou
veau^ orages.
Le premier artifice confifte à préfenter cette
affaire comme un démêlé particulier des Cours
de Rome 6c de Parme , dont le fujet eft:
étranger aux divilions qui ont autrefois agité
le Sacerdoce & l'Empire. On ofe appuyer
cette idée de l'un des traits les plus révoltans du Bref, celui qui approprie au Pape le
titre de Souverain des Etats de Parme: Des
E dits ont été p u b liés, dit le B ref, dans notre
D uché de Parme ç r d e P la ifa n ce, &c la puiffance dont ils font émanés y eft: traitée d ’il
lé g it im e , de préten d ue J u rifd ittio n royale ( i) .
( i ) In Ducatu noftro Parmcnfî & Placentino à îfaxuiari
illegitimà poteftate Edi&a . .. prodiifte . . . . Regiar ,
ut vocant , Jurifdittionis . . . . Regia:, ut appelhru ,
Jurifdiftionis. . . afTcrta: Regia: Jurifdi&ionis. Êref,
A ij
�4
Ces paroles n’indiquent, félon les émifTàires
cachés, qu'une querelle féodale du fuzerain
au valîal.
En fuppofant, contre la vérité connue , que
l ’Etat de Parme fut féudataire du St. Siégé,
le (eul droit de fuzeraineté donna-t-il jamais
celui de réformer les loix d’un Etat, & même
de fe l’approprier , en traitant d‘illégitim e la
Puidànce qui le gouverne?
Une telle prétention ne feroit, dans un
Seigneur véritablement fondé en fuzeraineté ,
qu’un aéle d’ufurpation tyrannique , capable
d ’éteindre le droit réel : elle aveniroit ceux
d’entre les Souverains , qui feroient réellement
féudataires du St. Siégé, de dépouiller une
qualité fur laquelle on fonderoit des projets
ambitieux : elle ne pourroit paroître étrangère
aux autres Souverains. L’hiftoire leur a ap
pris que cette prétention d ’un droit de fu
zeraineté fur certains Etats catholiques , n’a
fouvent été pour la Cour de Rome que le
voile d’une ambition plus haute, le prétexte des
aétes de cette Suprématie univerfelle qui menaçoit également toutes les Couronnes,mais qui
n’ofanc les attaquer toutes à la fois, étendoic
le joug de l’une à l’autre par divers moyens :
que d’autres fois la même ambition agiflant
plus à découvert, excitoit dans les Etats de
violentes tempêtes, qu’un Souverain ne pou
voir calmer qu’en offrant de tenir ces mêmes
5
Etats en foi & hommage du St. Siégé. Si la
pollcflion a pu conferver quelque part ce
droit , ou pour mieux d ire , tenir lieu de
droit malgré le vice de fon origine , elle ne
peut priver les Souverains de la faculté de
rompre le joug au moment qu’on veut l’ag
graver , & fur-tout lorfqu’on le fait fervir
à relïufciter le pouvoir du Pape fur le tempo
rel , dont leurs ancêtres s’étoient propofés
d ’éteindre la prétention par ce facrifice.
Telle eft la fource la plus commune de ce
fingulier vaflèlage, à l’égard d’un Siégé q u i,
établi pour être le centre de l’unité tk des
refpeéls de la chrétienté, eft lui-même rede
vable aux bienfaits des Souverains de la por
tion de l’Empire qu’il a réunie au Sacer
doce (i).
Le Pontife qui remplit ce Siégé , ne peut
jamais confondre le pouvoir inné, qui, fuivant l’exprefTion d’un Pere de l’Eglife , le
rend fucceflèur univerfel de Pierre , avec le
( i ) Peuvent-ils ne pas fc fouvenir qu’ayant été Iongtems pcrfécurés , retenus prifonniers , envoyés en ex il,
tantôt par les Empereurs de Conftantinople ou pat
les Exarques de Ravenne , tantôt par les Rois des
Lombards, Pépin & Charlemagne les ont non feu
lement affranchis de cette fervirude, mais ils leur
ont donné par pure libéraliré ce qu’on appelle au
jourd'hui le Patrimoine de Sc. Pierre ? Mr. Talon ,
flaidoy. fu r la Bulle d'innocent X I , concernant les
franebif. i t i i .
�6
pouvoir acquis, qui dans Rome le rend fucceflèur en partie de Conftantin ( i j , non en
vertu de la donation fabuleufe de cet Em
pereur , mais en vertu des dons de Pépin &
de Charlemagne. Il ne peut étendre aucun
de ces pouvoirs hors de leur fphere, ou les
dénaturer en les mêlant dans l'ufage, fans intérelTer tous les Souverains ; ôc la Cour de
Rome ne fçauroit ufurper fur aucun Monar
que , lans offenler en général la Souveraineté,
toujours folidaire entre les R ois, quant à Pattribut eflèntiel qui la fait relever de Dieu feul.
Mais ce 11’eft point à la prétention abfurde & bornée d'un droit de fuzeraineté fur
l'Etat de Parme que le Bref s'arrête , c'eft:
au titre bien plus flatteur de Légiflateur fuprême des Etats chrétiens , qui réduiroit tous
les Princes catholiques , non à la fimple qua
lité de féudataires, mais à une fouveraineté
précaire.
Sous ce point de vue, qui eft le vrai, les
émiflaires de cette C our, ne pouvant excufer une démarche qu'ils ne veulent pas improuver, fe réduifent à faire partager aux
Edits de Parme le blâme auquel ils ne peu
vent fouftraire le Bref.
Ces Edits o n t, difent-ils, en diminuant
( 0 In his fucccflïfti, non Petro , fed Conftantino. D iv. Bernard, lib. 4. de confid. cap. 3.
7
les droits des Eccléfiaftiques d'Italie, excité
dans la Cour de Rome un mécontentement
qu'elle n'auroit point exhalé à l’égard de
Nations plus privilégiées : comme fi l'indé
pendance des Couronnes 8c de la légiflation
de chaque Etat, n’étoit pas le droit commun
des Empires &c l'eflènee même de la fouveraincté. Ils ajoutent que le Bref ne va pas
jufqu’à la menace de la dcpofition , qui cons
titue le caraélere le plus fâcheux du pouvoir
direét ou indireél fur le temporel des Rois mais n’y a - t - i l d'entreprife que dans ces
Bulles qui afpiroient à renverfer tout d ’un
coup les Trônes, 8c feroit-il permis de fer
mer les yeux fur les atteintes portées aux
principes fondamentaux du gouvernement po
litique ?
C'eft à l'aide de femblables exeufes , que
des démarches non moins repréhenfibles n'onc
pas toujours été repouflees avec allez de vi
gueur , 8c que la Cour de Rome croit pou
voir , fans fe compromettre , reproduire de
tems en tems un fyftême qu'on auroit pû la
forcer d'abandonner.
Ce fyftême varie fon a&ion 8c fon langage
fur les combinaifons de la politique. Grégoire
V I I le publioit fans détour , 8c Boniface
VIII ofa fanétifier par des allégories l'affreux
principe des deux glaives réunis dans la même
main. Ces Papes 8c quelques-uns de leurs
�s
fucceflcurs, ont même déployé le glaive ma
tériel , & rempli l'Univers de Troubles & de
fédicions : les tems font encore trop près de
nous. Il eft vrai que ce glaive paroît erre ren
tré dans le fourreau ; mais les Ultramontains
I'aflimilent au glaive pris fur les Philiftins,
q u i, enveloppe dans un drap & ca ch é dern e r e l'Ephod , ne devoir fe déployer que dans
les grandes occafions , que pour une viéloire
allurée j & par un mélange bizarre de fuperflition & d'atrocité, ils ne défendent à
l’autorité ecclélîaftique que d’en ufer par des
mains fa cerd o ta les, & lui permettent d'en difpofer, en déléguant les exécuteurs des fenrences de privation des Couronnes, executio
ad altos pert/net : c’elt le mot unanime.
Veut - on les prellèr par l'exemple de la
primitive Eglife, obéidânt à la puidànce per
sécutrice , & préférant le martyre à la rébel
lion ( i )-, ils ofent attribuer cette conduite,
& les Saintes maximes qui lui Servirent de
baie , au défaut de fo r ce s fu jfiftn tes pour repouffèr la tyrannie, v ires E cclejia non fu pp ctebant
(1)
Mr. Fleury remarque, apres Tertullicn «5c les
autres P. P. de l’Eglife , que l'antiquité chrétienne a
obéi k des Princes hérétiques, infidèles & perfécuteurs, quoique Us Chrétiens fujfent ajfez puiffans pour
s'en défendre. Fleury, infiit. au droit ecclef. tom. i.
eh. i j . p. u t .
/ 9
( i ). L’efprit de rébellion n’attendoic
donc que l'occalion d'éclater ! Ainfi l'on verfe
fur le Chriftianilme n ai liant l'opprobre ( z )
des Pharifiens, & de cette morale renouvellée depuis deux Siècles > qui s'accom m odant
au tem s , aux lieux & aux per fonnes , fe main
tient par le défaveu d'clle-même : l’incrédule
n'a pas manqué d'emprunter de l'Ultramontain la calomnie la plus capable de dégra
der la religion. Vires non Juppetebant ! pa
role funefte , à laquelle on reprochera tou
jours d’avoir fait blafphémer le Nom de
tebant
( r ) Nos contrâ dicimus eos ( Reges hxrcticos vel
infidèles ) tu i lie tolctatos , propteteà quod ad eos
dejiciendos vires Ecclefid non fuppeteOant ; potuifle
autem Ecclefiam fi vires adfuillenc , imo veto etiam
dcbuijfe Regibus illis imperium . . . . abrügaie , mfi
caufa aliqua efiet cur hxc abrogatio in tempus commodius difFerenda viderctur. Bellarm. de potefi. furmn.
Pontif. in temporal, cap. zo. p. 190 & 109.
Ea tune eranc tempora ut pociùs ad martyrium
fubeundum Epifcopi parati clTç deberenc : at ubi vidit
Ecclefia fiaac potelfari locum aliqucm aperiri , vel cum
ipforum Principum fpirituali utihtate , vel certè fine
detrimento 6c pemicie populorum , non fibi defuic.
Fr a n c , r o m u l u s in apo lo g . cap. s.
( i ) Pejfimeque mereri de chrilhanâ religione, qui
poftrema a’tate dixerint Apoftolis , Martyribus, Patribus , Romanis deniquè Ponrificibus , civili potef-1
tari advèrfantibus , noccndî vires , non auterti voluntatem atquc animum defuifle. Bojfuet defenf. decl*
Cler. {allie. part. f . lib. 4. cap. 17. p.
" ’
t::
�10
Dieu ( i ) , d'avoir voulu introduire entre l'Evangile 6c la Tradition le contraire perfide
de deux préceptes, dont l'un rendu public
pour former des profélites ne précheroit que
ioumiiTîon , l'autre plus caché, 6c dit à l'o
reille, autoriferoic le loulévement dans les
rems de force.
Par cet aveu commun à tous les défen
deurs du pouvoir des Papes fur le temporel,
nous fommes avertis que l'ufage du pou
voir peut s'interrompre , fans que la doctrine
foudre. Le langage peur être adouci 6c palljé, le fonds eit toujours le même ; 6c quoi
que cette doétrine ne foie point portée dans
les Bulles ôc Brefs aux excès dont ces dé
fendeurs ne rougi fient p as, le principe eff:
renouvellé par des monumens de prefque
tous les Pontificats , les plus modernes même
6c les plus figes. C'cfi: que les Officiers de
la Cour de Rom e, lur qui la grandeur fpiricuellc du St. Siégé ne fçauroic fe réfléchir ,
uniquement occupés d'aggrandir fon pouvoir
temporel, trompent la vertu des Pontifes,
tandis que l’intrigue qui les environne ê c Ja
politique permanente de cette Cour leur fait
violence.
Au furplus, M eilleurs, le Bref que nous
fc.-'ia ^ :’a *<
[v -, f
•'
( i ) Blafphcmafç fecifti ioijqiicps Domini pro^cc,
verbum hoc. i . RtçHtn, cap. i t . v . 14.
•
4
it
vous apportons , ne fe borne pas, comme ceux
qui font émanés des derniers Papes, à une
réclamation vague de ce faux pouvoir , dé«
nuée d ’entreprife ; le dernier Bref d t dirigé
contre un Prince augufte ; il réalife , il ap
plique le pouvoir en abrogeant les Edits de
ce Prince.
Le fujet 6c le prononcé du Bref, le genre
des menaces & des peines , le principe d’où
il les dérive , la forme de la publication,
tout caraétérife l’ufurpation la plus violente
des droits temporels. C ’eft le pouvoir in
direct & même d ireét, exercé fur la légiflation civile , appuyé de l'abus le plus criant
du pouvoir fpirituel , 6c muni de l'excom
munication. Si les effets ultérieurs que la
Cour de Rome attribue à ces cenfures, ne
font point développés par le Bref, ils s'y
trouvent contenus comme l’effet dans fa
caufe.
Obfervons d ’abord que s’il avoit pu fe
gliflèr dans les Edits de Parme , quelque difpofition contraire aux droits de l’ordre eccléfiaffique , cet abus du pouvoir ne fçauroic
juAifier les voies d'abrogation & de caflation, qui ne peuvent appartenir au Pape à
l'égard des loix civiles.
Les Souverains peuvent être furprii jufqu'à,enfreindre la difeipline canonique : qùel
eft alorsj le devoir des Minières de l’au-
B ij
�torité fpirituclle ? L'indépendance naturelle des
Gouvememens , ce l'efprit de paix inhérent
au Chriftianifme , nous le difent alTèz ; mais
apprenons - le de 1Eglife elle-même : ils doi
vent ( fans cefïer d'intercéder auprès du Sou
verain pour la réglé 8c pour le plus grand
bien fpiricuel ) tolérer l'infraétion, lorfqu’elle
n'eft pas de nature à affe&er la fubflance de
la religion : il ne leur eft jamais permis de
combattre , ni par une loi oppofée , ni par
des cenfures doctrinales, ni par des exhor
tations à la défobéiflànce, la loi civile qu'une
préférence même injufte de l'intérêt politique
auroir déterminée.
Cette réglé de conduite , qu'il cft h utile
de rappeller dans un fiecle où elle a foufferc
des atteintes marquées , eft tracée par l’e
xemple des Conciles 8c des Papes ( i ) , 8c par
ticulièrement de St. Grégoire le grand : tan
tôt il fe rend le miniftre de l'exécution d'une
loi de l'Empereur M aurice, quoiqu'il la juge
( i ) Leges qux Canones infringunt cfïc quidem
nulla* ipfo jure ; fed nec Pontifices nec Synoium
cecurneoicam hoc fibi arrogade , uc cas Decretorurn
fuorum auétoritace refeinderent -, verùm id à Principibus exorade. IJ docuit Photius Tyri Epifcopus fuo
exeraplo ; ipfaqae Synolus Calcedonenfis , qux refcripcum de Mecropoli Beryti dacum adverfus Canoqes , à Judicibus refein den lum ede profeda eft. Marc*
fie concord. Sacerd, er Lnper, lib. i , cap, il*
.
«3
contraire à l'intérêt de la religion 6c à la vo
lonté même de Dieu ( i ) : tantôt 8c dans une
autre occafion, il déclare au même Empereur
que h les coups d'autorité qu’il fe propoloit
de frapper contre un Evêque ( dont cet Em
pereur iouhaitoit la dépolition ) , ne bleilent
pas l'ordre canonique, il y fou fer ira , 8c que
dans le cas contraire, il tolérera en filence ,
parce qu'il s’agiftoit d’un fait où la foi n’étoic pas attaquée ( z ). Réglé fi abfolue , il
( i ) Ego judioni fubjeftus . . . . legem per diverfas partes tranfmitti fecï . . . . Lex ipia omnipotenti
Deo minime concordat. GREGORIUS M. AD 1 MPERAT. MAURIT.
Noa fibi tribuit fan<ftus Gregorius magnus , indireâx poteftatis nomine , uc legem abroger animarum utilitati parum congruam. BOSSUET DEFENS.
CLER. GALLIC. tom. i. part. i. lib. t. cap. S. p.
i
08.
St. Grégoire fe contenta de fupplier l’Empereur
Maurice de révoquer la défenfe qu’ii avoir faite , de
confacrcr au fervice de Dieu tous ceux qui étoienc
engagés dans fes troupes , Sc ce grand Pape voulue
rendre cette fupplication plus favorable , en publiant
la loi de l’Empereur avant que de fe plaindre de fa
difpofition. Difcours de Mr. le Premier Préjident du
Parlement de Paris au Roi en l'année 1691 , au fu jet d'un Bref d'Alexandre Vllî.
(t) Nos tantummodo in depoGcione talis viri non
faciat petmifeeri. Quod vero ipfe fecerit , fi canonicum eft , fequimur ; fi vero canonicum non cft ,
in quantum fine peccato noftro valemus , portamus.
Paroles de St. Grégoire le grand , rapportées dans Marfa , liv . 4. chap. z i.
�14
néceffaire à la paix de l’Eglife & de l’Etat,
qu elle faifoit partie de l'ancienne profefTïon
de foi que les Papes adrefloient à Sc. Pierre
après leur éle&ion ; ils s'engageoient à une fage
tolérance, que Mr. de Ma.ca appelle même
du nom de connivence, à l'égard de toute in
fraction de la difcipline canonique qui ne contiendroit pas une grieve ofenfe de la f o i & de
la religion ch-etienne (/).
Fa«ftum nempè tolérât (Grcgorius M. ) in quo fides
son Udebatur. Ataica , de eoncordiâ Sacerdotü (sr Irnp e r ii , ibid.
( ») Si qur veto emerferiot contra canonicam difciplinam, communicatione filiorum mcorum fanda:
jromanx Ecdcfix Cardinalium ( cum quorum confilio , diredione , & rcmemorationc minifteriam
roeum gcram & peragam ) emendarc aut patienter
(excepta fidei & chriftianat rcligionis gravi offenfione) tua & Beatiftîmi Coapoftoli tui Pauli procurant^
inteiceftione, tolerare , lacrofque Canones & facrorum
Pontificum conftituta , ut divina & cœleftia man
data , Deo auxiliante , cuftodirc. £ Diurne Ecclefu
romani.
Qax à me toto capite dida funt ità velim intelligi , fi de Jurifdidione tantum agatur , & de
difeiplinâ ecclefiafticà. Nam fi his contcntionibus
Tides chriftian* Ixderetur, omnia pericula oppetenda
potiùs eftent Epifcopis , quàm ut prx focordiâ, aut
metu , nefariis cooatibus aftentirentur , âut conniverent. Sed exceptione ilia adhtbita poffunt cormiventiam fuam tueri , rortianorum Pontificum exemplo , qui in profdîïone quam port elcdiütiem fdam
B. Pctro nuncupabânt, Canones quidem & Décréta
à fc obfetvatum iri pollicebantur -, fed infra&iooei
*5
L’hiftoire eft remplie de ces exemples , Sc
îorfejue des P rinces ont blejfe les droits & l<*
d ifc ip lin e de V E g life , les Papes les plus fa in ts
n ’ont pas cru pouvoir employer d ’autres a>ynes
contre leurs lo ix , tjue celles des fu pp licatio n s
■ çr des remontrances ( i ).
La voie de caftàtion employée au nom du
Pape à l’égard d'une entreprise de la Puiffance féculiere, auroit toujours l’inconvé
nient de fuppofer une fupériorité direéte de
puiflànce à puilîànce , qui ne peut exilter en
aucun cas. ( z ) Le devoir d ’obéir à l’auto
rité fpirituelle dans les préceptes du iâ lu t,
foumet à cette autorité le Prince en qualité de
fidèle, mais il ne lui foumet pas la puifïànce,
ab aliis fadas , aut cmendatum , au t, excepta fidei
caufà , toltrstum iri. Quæ conniventia pneipue profi
ta nda eft iis rebus , quas imperio (y aucloritate fua
Principes gerunr. Marca , de eoncordiâ Sacerdotü &
irvperii , lib. 4. cap. i l .
Eft ergo primum didum quod ad Regem pettinec
fine requiütione providerc Ecclcfix regni fu i, extra
articulas fidei. Difcours de Pferre Regis , Doâeur de
la Faculté de Paris , du 31 mai 1395 . Preuves de
la nouvelle hifloire du Cenc. de Confi. p. 37,
(1 ) DWcours de Mr. le Premier Préfident du Par
lement de Paris au Roi en u6yi contre un Bref
d’Alex^fidte VIII.
( t ) Si l’on fouffroit que les Papes puflent cafter
des Edits, des Déclarations & des Arrêts qui porrent le nom du Roi . . . . ce feroît leur donner une
pui(Tance fur le xomporcl des Rois. Difcours de Me.
de ham igntfi^ A w s * t , du x i fév rier t f p i .
�i6
parce que la puilTànce en qui l'Etat entier
eft concentré ne feauroie
être foumife, ni à
>
un membre de l'Etat, c'eft-à-dire , à l'Eglife
nationale , ni à l'autorité du Pape. De-là les
aélcs Iéçillatifs d'un Souverain ne fçauroient
fournir à ce Pontife matière de caflation :
une pareille forme , quel que pût en être le
prétexte, feroit encore plus fufpeéte de la
parr d’une PuilTànce qui nourrit en effet une
prétention de lupérioriré temporelle, & com
me elle y réunit encore celle de l'infaillibi
lité , elle pourroit à ces deux titres abroger
les loix les plus régulières.
Des Edits contraires à l'ordre établi félon
la réligion reçue dans l'Etat ( s’il pouvoir en
émaner de tels d'un Prince chrétien ) feroient
allez nuis d'eux-mêmes ; ils mettroient les
iujets au cas du précepte d ’obéir a D ieu plu
tôt qu'aux hommes. L’Eglife ne fçauroit per
dre le droit de maintenir le dépôt de la foi,
auquel fe trouve lié l’ordre eflèntiel de la
hiérarchie , <$c de déclarer la doéfrine avec
toute l'autorité attachée à fon miniftere, fans
craindre les obftacles humains. Sur tout autre
genre d'infraélion , la tolérance eft due au
iefped de la PuilTànce publique* & à la paix
des Empires.
Mais C\T loin d'entreprendre ou d’innover,
les loix du Prince ne font que pourvoir à
la tranquillité publique, régler ou prévenir
.
des
*7
des démêlés de jurifdiélion , reftraindre
des privilèges ou des exemptions q u i, fondés
fur le droit humain , peuvent être modifiés
ou même révoqués, l'Eccléfiaftiqüe fujet doit
plus que la fimple tolérance ou obéifîànce pafà
five ; il doit foulcrire &C coopérer, s'il le
faut, à l'exécution de la loi ( 1 ), & la Cour
de Rome doit refpetfter la puilTànce qui a
prononcé , loin de pouvoir la contredire.
Le Prince à qui dans l'enceinte de fon Em
pire rout eft dévolu, non a titre de p ro p riété,
dit Marca , mais par droit de fou vera / n eré, le
Prince à qui feul appartient la jurifdiélion ex
térieure ôc proprement d ite, c'eft-à-dire, l'au
torité munie du pouvoir dè contrainre, J ans
lequel il rfeft point de ju rifd i.ïlion parfa/te , eft
cenfé pofféder tout ce qui relativement à cette
jurifdiétion peut être controverfé : le redore Sc
la décifion finale de c«s controverfes ne peu
vent donc appartenir qu’à lui (z ). Telle eft
(1) Parebat intérim Grcg. M. ac legem ad alios
julTus tranfmittebar. Boffuet , deftnf. Cltr. Gallic. tom.
1 . part. 1. rit. 1. cap. 8. pag. 108.
(1 ) Cum Principum conditio (ît melior , ex ré
gula juris civilis, canonici St naturalis ; in pari enim
caufa rrulior eft conditio ejus qui polîîdet, inouic
Jurifconfultus. In his autem controverfiis , quis dubitarc poteft , quin Princeps ad quem omnia perti
nent , imperio etlî non dominio , pofftdtre jus illud
JvrifdiBionis controrverfa ccnfeatur ! M arca, de conternia Sncerd. CT Imper, lib."4. cap. t l .
c
�iS
la réglé de tous les Empires, de tous les Prin
ces chrétiens, depuis Conftantin & Juftinien
jufqu’à nos jours (i). Les Jurifconfulces meme
d’Italie ont reconnu que le Souverain eft feul
juge dans fa propre caufe ( i ) , feul juge de
fa compécence , &c les Papes ont fournis au
jugement des Souverains & de leurs repréfentans ce qui pourroit leur être furpris contre
les loix. ( 3 )
S’il en étoit autrement la majefté de l’Em
pire seclipferoit au gré des miniftres de l’au
torité fpirituelle, non feulement du premier
In contcntionibus de JurifdiéUone ecclefiaft. & fxculari , ultimnm judicium aiïeritur fupremx Curix
regni. Marc» ibid. num. 9.
( 1) Ad nos negotium , tam ab Epifcopo quam à
Judice , referatur , ut nos hoc cognofcentcs , qua
nolis xidentur , Jubeamus. Novell, 11$.
(2.) Pocèft e(Tc judex in ptoprià causa. Glojf. marg.
in canon. nos fi incompetenter. Cauf. z. qu. 7. Alexan
der de lmola
15" alii.
Le Roi ne tient la puiftance temporelle que. de
Dieu feul ; il ne peut avoir de Juges de Tes droits
que ceux qu’il établit lui-meme. Fleury , injlit. au
droit eccléf. tom. t. ch. 15. pag. 117.
»
(? ) De Capitulis vel prxceptis imperialibus vefrris . . . . irrefragabiliter euftodiendis . . . . nos confervaturos modis omnibas profnemur. Léo IV Lothario
A ugufl 0 , cap. de capitul. diflinci. 10.
Nos h incompetenter aliquid egimus , & in fubditis juftx legis tramitem non confervavimus , vcfrro, ac MifTorum veftrorum , cunéla volumus emendari , judicio. Léo IV Ludovico Auguflo , cauf. 1. qu.
7. can. 41.
*9
d’entr’eux , mais encore de chaque Prélat qui
prétendroit repréfenter lui feul, vis-à-vis de
fon propre Souverain, tout le miniftere fpiiituel : chacun d’eux, au lieu de refpeéter les
bornes que Dieu a marquées avec la préciCon nécelTaire pour foumertre tous les efprits,
pourroit retoucher fans ceflè à ccs bornes im
muables pour accroîcre fon pouvoir : l’efpece
de fouveraineté propre à l'Eglife, n’étant plus
limitée aux objets fur lefquels elle eft infail
lible , & qui incéreftènt le falu t, détruiroit
celle de tous les Monarques ; ce ne fcroitplus
déformais à l’interprete infaillible de l’Evangile
& à l’organe de la Divinité, ce feroit à l'hom
me , &c fouvent à fon propre fujet, ou à une
puilfance étrangère dans l'ordre temporel, que
le Souverain rendroit obéilîànce.
Que deviendroient alors ccs maximes de
religion &: d’Etat, que le Pape ne peut être
tout enfem ble Roi ç r P rêtre ( j ) , que l'E glife
eft dans l'E tat & que l'E tat ne peut être dans
l'E glife (z ), que le corps de l’E glife eft d iv ife en
deux perfon n es, la S acerdotale (fr la Royale
(1 ) Rex 8c Epifcopus fimul efle non poteft. Hincmar ad Adrianum II.
(t) Non enim Rcfpublica eft in Ecclefià , fed Ecde
fa eft in Republicâ. Optatus Milevitanus.
Ecclefia eft in Impcrio , id eft , per Imperii provincias fparfa , ex civibus conftat , 8c fub patrocinio
Regum degit, M arta , de concordià Sacerd. & Imper
lib. 4. cap. xx. n. 6,
c ij
�20
( i ) , qu'il eft gou vern é par l’a u to rité des Pon
tifes & par la puijfance des Rois ( i ) , qu’enfirt
on ne onffre point que les M in ières d e la re
ligion prononcent fur les lim ites ou s'étend l'au
torité royale dans les chofes eccléfiaftiques ( 3 J.
Nous aurions rétrogradé de plulîeurs fiecles,
& nous rentrerions dans les ténèbres des fiecles
du moyen âge , où les Papes faifoient rendre
compte aux Souverains de tout ce qui avoit
rapport aux droits temporels de leur Clergé;
où des Evêques appuyés par les Légats >érigeoient en dogme dans des aftèmblées ( 4 )
toutes leurs prétentions de jurifdi&ion coac
tive , 8c converudoient leurs privilèges en im
munités facrées ; où des fujets cités devant
les Tribunaux de l'E tat, pour avoir exécuté
des Bulles deftruéfives de nos Libertés, déclinoient la jurifdiétion royale ; où des Pré
lats appelles devant leur Souverain, pour fe
défendre contre Paccufation d'entreprife in
tentée par le Miniftere public, déclaroient à
(1 ) Principaliter itaque totius fanftx Dei Eccle(ix corpus in duas eximias perfonas , in facerdotakm fcilicer , 8c regalem , &c. Cône. T arif 6. cap. 3.
(1) Ità Ecclefiam difpofîtam efTe, ut pontificaït auctorïtatt & regali potejlate gubernetur. Conciliant a i
ThéoJ. •vill. anno 844.
(3) Notes fur Fevret, tom. 1. lir. 1. ch. 6.
(4 ) Concile de Bourges tenu en 117 6 , & préÉdé par le Cardinal de Ste. Cécile, tom. 11. part.
1. des Conciles, pag. 1018.
2I
leur Roi qu'ils ne l'inftruifoient que pour
écla irer fa con fcicn cc y fans préten dre fu b ir au
cun ju gem en t d e fa p a r t , tir lu i fo u m ettre les
attes émanés d e leu r a u torité ( 1 ).
Tout efi bou leverfé par ce B r e f , 8c par le
feul titre qui nous apprend que des Lettres
émanées de l'autorité fpiricuelle, ca jfen t, ann u llcn t, abrogent les Edits d'un Souverain (z).
Mais par où ces Edits ont-ils pu mécontenter
la Cour de R om e, au point de l'engager à
franchir toutes les bornes ? Ils règlent les
difpofitions faites en faveur des gens de main
morte , 8c celles des fujets qui fc vouent à
l'état religieux ; ils foumettent aux contribu
tions de l'Etat certains biens acquis par les
Eccléfiaftiques depuis l'époque fixée par les
terriers ou cadaftres de Parme; ils établiflent
un Magiftrat confervateur , 8c des Commiffaires chargés de maintenir la Jurifdiélion
ro yale, de veiller fur le régime extérieur des
corps eccléfiaftiques & des monafteres, fur
la confervation de leurs biens, fur les dépenfes de l'entrée en religion ; ils affurent
l'exécution des legs pies, la portion congrue
des Pafteurs , la difci^line extérieure ou la
décence du culte extérieur dans ce qui eft
(1) ProtefUtion des Evêques dans la conférence
de Vincenes en 1319.
(1 ) Litteræ in forma Brevis quibus abrogantur
& caifamur nonnulla Edifta. . . . Bref,
�11
relatif à l’ordre public ; ils renouvellent la
défenle fi ancienne & li autorifée, à tous
étrangers , de pofleder des bénéfices dans l’E
tat fans l’aveu du Souverain ( i ) ; ils défen
dent encore de faire juger fans fa permi/ïîon,
hors du lein de l’Etac 5c chez l'étranger, les
caufes litigieufes dés Eccléfiaftiques %ils main
tiennent l’ufagc du P la cet, E x equatur, ou
L ettres d ’attache pour l’exécution des Refcrits
de Rome, ulage fondé fur le droit des gens
5c commun en Italie : l’Auteur du traité Ju s
B elgarum en a rapporté des preuves de tous
les Etats. Ce font matières toutes civiles, que
le Décret royal d’Eipagne appelle avec raifon
purem ent temporelles.
Si quelques-unes peuvent s’appeller mixres,
ce n’eft que dans un fens très-impropre , 5c
fous un rapport éloigné. D’ailleurs l’autorité
civile toujours décifive 5c prédominante dans
les matières mixtes, c’cft-à-dire, dans les ma
tières où l’inréiêt d’Etat eft mêlé , ne peut
être contredire par l’autorité fpirituelle ; elle
ne doit révendiquer dans ces fortes de ma
tières, que le point de religion 5c de confi
dence , que le côté par où elles font purem ent
fp iritu elles, comme l’antorité qui les réclame ;
5c ce partage fi /impie feroit de facile exé(O Non ergo Italo conferendum eft benefîcium
in Hifpaniâ , auc in Britanniâ , aut è contra. Conc.
Cardinal, jubepte faulo 111, exhibitum ftnno 1538.
23 •
cution, fr cette autorité , qui fc dénomme
elle - même fpirituelle , ajouroit qu’elle l’eft
purem ent : mais cette limitation importante ,
confacrée par les Théologiens ( 1 ) 5c les Ca
nonises , par nos Ordonnances 5c par l’Edit
même de 1^9 y , eft écartée avec foin , 5c
traitée d’indifférente par l’Ultramontain, quoi
qu’on ne puiffe l’omettre fans rouvrir la porte
à l’ufurpation de ces matières mixtes, 5c fans
donner un prétexte d’y fai^re intervenir le
Pape , puiffance étrangère quant au temporel.
Quel fyftême, qui méconnoît dans les
Souverains catholiques une autorité que l’Eglife a reconnue dans les Princes perfécuteurs , ou dans ceux qui ne lui accordoient que la tolérance, avec cette dif
férence néanmoins que l’Eglife perfécutéc ne
pouvoir avoir des rapports ou des intérêts
mêlés avec ceux de l'Etat qui la rejettoit ,
avec une terre ennemie , où fon culte étoit
proferit, où elle ne fçavoit comment chante-r le cantique du Seigneur- ( 2 ) ; que l’Eglifc fimplcment tolérée n’étoit liée à l’Etat
que par le devoir de fe conformer aux loix
(1 ) Le fondement de nos Libertés eft que la puiffancc ccclcfiaftique eft parement fpirituelle. Fleury,
injlit. nu droit eccléf. rom. 1 . ch. 15. pajr. 139.
(1 ] Quomodô cantabimus canticum Domini in
terri aliéna ? Ffalm.
v , 4.
�. *4
qu'elle y avoir apportées , 8c d’obferver la
police 6c la paix publique ; au lieu que l’Eglife efl aujourd’hui incorporée à l’Empire
par voie d’alliance 6c de confédération.
Cette alliance multiplie les rapports , 8c
confequemmenr les matières mixtes formées
du mélange conrinuel des intérêts refpeélifs.
Dès-lors il a fallu que pour conferver l’in
térêt d'Etat, qu’un zele Outré auroit pu quel
quefois compromettre,le Souverain acquît fur
la fociété adoptée le droit d’rnfpe&ion le plus
étendu ; que pour attacher le même Souve
rain à l’intciêt de l’Eglife , la religion le nom
mât fon protecteur ; 8c que le Chef vifîble
de l'Eglife univerfelle n'employât fon au
torité qu’à faire refpecter , dans toutes les
parties de ce grand tout, le Législateur tem
porel.
Chaque Eglife nationale, qui comme corps
myftique n’eft qu’un membre de l’fglife uni
verfelle , 6c comme corps politique, un mem
bre de l’Etat, a du fc rapporter à l’arbitrage
du Souverain , du foin de concilier les in
térêts des deux fociétés, ■à moins qu’il ne
s'agiflè de l'inllitution divine 6c de la nécef
licé du falur. La fociété religieufe a dû reconnoitre dans la fociété civile , plus an
cienne , plus puiflànte , & donc elle venoit
faire partie, l'autorité néceflàire pour affûter
l’union ,
l'union , Ôc le Souverain efl demeuré maître
de taire prévaloir l'intérêt d'Etat dans tous
les points de difeipline où il fe trouve mê
lé ( i ) , à la charge d'en répondre à Dieu
feul.
La loi de la reconnoiflànce ( i ) ajoutoic
encore au devoir naturel des Miniftres de la
réligion , de chercher dans toutes leurs démar
ches l’avantage de la Patrie, qui les a engen
drés comme citoyens, 8c adoptés comme chré
tiens ; de s’Attendrir à l’exemple de l’HommeDieu fu r la Cité ( 3) ; de fe fouvenir que
leur première exiflence efl celle" de citoyen ;
de refpeéter les mefures prifes par le Sou
verain pour la profpérité temporelle de fes fujets ( 4 ) j 6c le Pape , puiffance pleinement
étrangère quant au temporel, qui n’a avec
les différentes Eglifes nationales que le lien
de l’unité eccléfiaflique, dont il efl le centre,
(1 ) Dans les points de difeipline qui concernent
l’intérêt de l’Etat & la fociété civile , c’eft le Sou
verain & le chef du Corps politique , qui eft l’ar
bitre de l’intérét de l’Etat. G ilett fu r F tv re t, tomé
1. tiv. 1. ch. y. pag. 1 6 3.
(1 ) Obfecro îgitur primum omnium ficri obfccrationes , oiationes , poftulatkmes , gratiarum actiorcs , pto omnibus hominibus. frim a fa u li ad
Tmcfth. cap. 1. ytrf. ï .
(3 ) Et ut appropinquavit, videns civitatem fle*
vit fuper iilam. Luc. cap. 19.01.41.
( 4 ) U t quietam & tranquill& m v itam agam ue»
frim a fa u li ad limoth. cap. a. v . a,
P
�26
peut moins que perfonne contredire les aétes
légilU tifs, qui allurem l'ordre public en re
ulian t ces matières mixtes.
Nous n'iniiftons pas davantage fur des vé
rités connues, à l'égard defquelles nous avons
déjà eu l'occafion de nous expliquer ; elles
font partie des droits inaliénables de la Sou
veraineté. Un Hiftorien, qui a écrit la vie
de Jean II Roi de Portugal, a d it , avec tous
les publicités, que le Prince fouffriroic vai
nement l'atteinte qui leur feroit donnée ( i ) ,
il ne peuc les détacher de fa Couronne à la
quelle ils font attachés de la main de Dieu
meme.
Tels font cependant les droits révendiqués
par les Edits de Parme , à n'en juger même
que par l'expofé dû Bref, quoique les Dé
clarations des Souverains d’Efpagne 6c de
Parme nous affurent que la fu b jia n ce de ces
E dits a été altérée par le Bref, ainfi que l’hiftoire des négociations.
Contre des Edits fi jutes la voie de plainte
ou de repréfentaûon ( fi Rome s’y fut réduite)
eue été indifcrcce, téméraire , 6c dangereufe :
elle auroit manifeté le deflein d'attirer aux
étrangers le temporel de l'Etat, en s'élevant
contre la défenfe de leur conférer des béné( i ) Non liccre Régi taie jus à fe abdicare , in
pracjudicium regni & lubdicorum. Aug. Manuel. in
v it* Joann. IA
î?
fices ; le defïèin de méconnoitre 6c l'autorité
du Proteéteur né de la religion , de celle du
M agitrac politique, qui fuftiroit pour autorifer un Prince , quelque religion qu'il profelle , à porter cette défenfe , 6c d'ébranler
par ce moyen la maxime que la puijfance
d e VE glife ne s'étend point fu r le tem porel ,
maxime dont la même défenfe e t une conféquence immédiate, félon la remarque de Mr.
l'Abbé Fleury ( i ) ; enfin le defïèin d'établir
l'indépendance de droic divin des perfonnes
6c des biens eccléfiatiques, que les Ultra
montains enfeignent ( a ) contre tous les prin
cipes , 6c de pouffer cette indépendance jufqu'au détriment & à la ruine même de l'E
tat ( 5 ). Qui ne voit qu'une telle indépen( i ) Fleury , inftit. au droit eccléf. tom. x. ch. 2f.
P*g- 13 J.
C’eft comme chef du Corps politique que l’Em
pereur Confiance défendit de promouvoir aux ordres
les Officiers comptables ; c’eft en cette même qua
lité que Charlemagne défendit d’entrer dans l’ordre
ecclélîaftique fans le confentement du Prince, & que
le Roi Charles VII exclut les Aubains des bénéfices
eccléfiaftiqucs. Gtbert fu r Fevret , liv . 1. chap. 5.col.
x6}.
( t ) Clericos . . . . decretis fummorum Pontificum,
fe quod ma jus eft , divino jure exemptos fuiffe. Bellarm. de poteft. fumm. Pont if. in temporal, cap. 34 ./><*£.
1? 1‘
(3 ) Les biens confacrés à Dieu ne Jaiflenc pas
d'être des biens temporels , dont la confeiyation
D ij
�2$
dance fer oit déjà , pour les Tujets que le Bref
déclare exempts , un commencement de mo
narchie ( i ) , 6c pour la Cour de Rome ,
qui ne réclame cette indépendance d'une clalîè
de fujets, qu'en vue de les réferver à fa pro
pre puiffànce, un moyen de partager &: même
de dominer celle de l'Etat î
Les autres prétentions du Bref vont en
core plus loin : celle d'attirer les per Tonnes
& les caufes eccléfiaftiques hors du fein de
l'E tat, au lieu de déléguer la caufe in p a rtib u s, & la prétention de faire exécuter , mal
gré les Souverains , les loix qu'elle voudroit
impofer à leurs fujets , ou peut-être à euxmêmes , in tro d u isit le joug d’une monarchie
univerfeile.
Mais la Cour de Rome ne s’efl: point bor
née à réclamer ces droits auffi dangereux que
faux, elle fe les eft arrogés avec autorité ■
>&£
l'abolition qu'elle prononce des Edits achève
d e blejfer U S ou vera in eté dans les prin cipes de
importe à l’Etat ; de même les perfonnes çonfacrée$
à Dieu ne laiffenr pas d’ette hommes , & des ci
toyens fournis comme les autres au Roi & à la puiffance féculiere , en tout ce qui regarde le temporel ,
nonobftant les privilèges qu’il a plu au Souverain
de leur accorder. Fleeery. itoftit. au droit eccléf. tam*
%. e h r i j . pag. x $t.
► ( i ) L’abus & l’extcnfîon erceffive des privilège*
Æroit ane aurre forte d’entreprife lut la pui (Tance
temporelle. Fleury ibidem.
29
la législation. En voyant une autorité impuif.
fante à l’égard du moindre objet temporel,
vouloir ufurper la légiflation civile , c’eft-àdire , ce qu'il y a de plus augufle dans la
temporalité , il faut s’écrier avec T ertujlien,
com m ent ce qui nJefi perm is contre perfonne ,
p o u rro it-il l’êtr e contre ceu x que D ieu a f a i t
f i gra n d s ( 1 ) ?
On a déjà remarqué que le Bref s’appro
prie tous les vices de la Bulle In can a Dom in i , en s'y référanr nommément ( 2). Cette
Bulle eft devenue fameufe dans tout l'uni
vers catholique , par le cri général qui s’é
leva contr'elle, &C parmi nous , par les fages
mefures que vos peres oppoferenc aux ten
tatives réitérées d'un Prélat de cette Pro
vince.
La première tendoit à traiter les Magiftrats comme excom m uniés en v er tu de cette
B u lle : le Prélat n'ofant publier une cenfure,
avoir défendu verbalement aux ConfefTèurs
de les abfoudre ; il étoit imbu de ce faux
préjugé que le for pénitenciel auroit le pri
vilège de mettre un pareil attentat à l'abri
de toute pourfuite. Ces cenfures verbales fu
rent non-feulement déclarées abufives & fea n (1 ) Quod in neminem licec , fortê nec ipfuna
qui per Deum tantus eft. Tertullien , apolog. cap. 3^.
( t ) Præfertim iis cooftiturionibus quae In caend D<\~
mini legi & promulgari folcnt. . . . Bref,
�.
.
,3 0
daleufies f mais le Prélac fat obligé, fous des
peines , à les rétratfter, & à remettre fon
procès-verbal de révocation au Greffe de la
Cour ( i ) : il obéit.
Par la fécondé tentative , le même Prélat
voulut donner autorité à la Bulle , en la faifant publier : deux hommes célébrés, Guil
laume Du Vair 8c Nicolas Fabrv de Peirefc
firent échouer l'entreprife. Cette Bulle ne
fut pas moins l'objet des précautions des au
tres Etats catholiques ; elle n'eft reçue dans
aucun : ce fait eft de nouveau attefté dans
les décrets , manifeftes 8c lettres au - defTiis
de tout éloge , que le nouveau Bref a fait
éclorredans les Cours d'Efpagne & de Parme,
8c dont nous tenons à honneur d'employer
quelquefois les paroles. Le nouveau Bref eft,
à certains égards , plus exceffif que la Bulle ;
il porte plus ouvertement les caraéteres du
pouvoir direét fur le temporel ; il s'étend
plus loin que le pouvoir indirect, auquel on
voudroit quelquefois perfuader que les Of
ficiers de la Cour de Rome ont réduit leur
ftyle : ceci nous a paru digne de remarque,
8c mérite d'être expliqué.
( i ) Arrêts du Parlement de Provence de l’année
contre Paul Hurault de l’Hôpital , Archevêque
d’Aix. Tom. i. des preuves des Libertés de l'Eglifi
i Soi
G allie, pag. 6%. & fu iv .
Arrêt du iflême Parlement de l’année i 6 n . lbii,
tom. x. part. 4. pag. 135.
31.
Le pouvoir indiredt, il eft vrai , autorife
le Pontife a obliger le P rince de porter une loi
c iv ile ou de la rétra éler j il a le double pri
vilège de faire palier une matière fous le reffort de l'autorité eccléfiaftique , ou en décla
rant qu’elle eft fpirituelle de fa nature, ou
en évoquant , 8c comme on ofe le dire , en ca nonifiant une matière civile ( 1 ) ou com m une
pour fe l’approprier : mais ce dernier privi
lège n'a lieu que lorfqu'il s'agit du bien cffentiel de la religion >8c le pouvoir indirect
ne s’étend, fu r le tem porel que par a ccid en t ( z ) ,
c’eft le caraétere par lequel on le diftingue
du pouvoir direéfc.
Le principe eft faux , parce que le Souverain
n’eft comptable qu'à Dieu de l’ufage du pouvoir
légiflatif, 8c même de celui qu'il exerce dans
l’adminiftration extérieure de l'Eglife que D ieu
a confiée a fia g a rd e ( 3 ). Il eft faux encore ,
(i )Poftc Pontifïcem materiam aliquam quafi refervare uc folum canonica fit non folum declarando . . . . quandô materia . . . . ex jure divino fpiritnalis
eft , fed etiam . . . . fibi appropriare materiam com~
rminem. Suarés > de legibus > lib. 4. chap. 11. ». x i,
MS( i ) Hic ufus inditeélæ poteftatis folum habet l o
cum quafi per accidens. Suarés , defenf. fide't , cap. 11.
(3 ) Cognofcant Principes fæculi debere fc Deo ra tionem reddere propter Ecclefiam , quam à Chrifto
tuendam accipiunt, . . . Ilie ab eis rationem exiget ,
qui torum poteltati [nam Ecclefiam credidit. Concil.
Èarifi. e r tan. Principes , eaufi. 1 3 . qu. 5.
�31
parce que le rapport d'une matière vraiment
temporelle Sc de toute loi humaine avec la
confidence, n’en altéré pas l’efïènce & ne les
foufhait point à la puillànce féculiere. La
loi , qui eft elle-même la confidence publi
que , doit avoir ce rapport efïèntiel par le
quel elle efl jufte , &c qui lui donne le pou
voir d'obliger les fujets par le lien intime
de la confcience ( i ) , fans leur foumettre
néanmoins l'autorité de la loi. Si le prétexte
du rapport des loix à la confcience, Sc à cette
religion dont la morale univerfelle ne laide
rien d’indifférent dans nos aéfions , avoir
le pouvoir de fpiritualifer le temporel, ce
principe conduiroit à priver entièrement la
puiffance féculiere du droit de faire des
loix : la Magistrature fuprême auroit été tranfportée à l’Eglife dans fa fondation , fon ré
g n é oppofé à celui de Jefus-Chrift feroit de
c c monde.
Il n'eft pas moins certain que la modifi
cation apportée au pouvoir direél par l'in
vention du pouvoir indirect, n’eft qu'appa
rente , parce que ce pouvoir n'ayant d'autre
règle que le difeernement arbitraire des loix
utiles
( i ) Sübditi eftote , non folum propter iram , fed
& propter confcientiam. Taulüs àd Rom. t'ap. 13.
Lex htitnana obligat
CJ in foro confcientiae. D.Thom.
1.
qu. poS art. i.
33
utiles 8c des loix nuifibles à l’intérêt de la
religion, le Pontife demeureroit aufli maître
de la législation des Etats par le pouvoir ind ireé t, qu’il le feroit par le pouvoir le plus
diredt.
Il faut cependant avouer que cet adoijcif»
fement paroifToit mettre une partie des loix
civiles à l’abri de toute réformation de la
part de l'autorité eccléfiaftique ( 1 ) , celles 9
par exemple , qui appartiennent évidemment
à l’autorité du Magiftrat politique , qui n'em
pruntent rien de l'autorité de proteétion réfervée aux Princes Chrétiens, ou du moins
celles qui n’ont avec la confcience que le
rapport général de toutes les aébions de la
vie & de tout être moral.
Si l'on pouvoit prendre quelque confiance
à ce correctif.mis au pouvoir diredl, & croire
que l’ambition eut voulu férieufement fe li
miter elle-même ; fi l’on pouvoit féparer par
des nuances deux fylfêmes qui partent du même
deffein , & qui vont au même but ; fi l'on pou
voit oublier que le pouvoir indiredt ne doit le
jour qu’à la néceifité de calmer les Nations
(1 ) Potertas indire&a , licct fufficiat ad corrigcrtdas interdùm vel abtogandas leges civiles , quando
vergerc polTunt in perniciem animarum , non taînen propric ad fereodas & ftatuendas leges civiles,
prxfertim merè pofitivas , & formaliter loquendo,
Suarez , de leg. lib. 3. cap. è. n. 6 . pag-t
£
�34
révoltées par les excès du pouvoir direét ; fi
la France en particulier pouvoit oublier que
-le détour du pouvoir indircét ne fut imaginé
«que pour atïèrvir la Couronne qui avoir mieux
défendu fes droits , 3c la Nation la plus jaloufe de fes Libertés , nous dirions que le
^pouvoir direét &c le pouvoir indirect difFerrent dans la théorie , en ce que le pouvoir
direét menace plus universellement les loix
.purement temporelles, au lieu que le pou-voir indireét menace fur-tout les loix réla-rives à l'exécution des Canons, les loix éma
nées fur les matières mixtes , dont il étend
la fphere , en confondant ce qui eft mixte
par le fonds des chofes , avec ce qui ne l’eft
qu'improprement ; ce pouvoir indireeft ne s'é
tend gueres fur les loix purement temporel
les , que lorfqu'il les accufe de choquer les
bonnes m œurs (i).
Le précexre eft à la vérité fufceptible d'une
extenfion arbitraire , mais il laiflè du moins
fubfifter dans les Etats un ordre de loix 3c
une puiftance légitime ; il ne donne point à
ilom e une puiflance abfolue fur la tempora
lité. On pourroit meme dire que le pouvoir
indireét , en réformant une loi à raifon
d'un intérêt fpirituel , ou d'un préjudice
( i ) Si lex civilis in propria materiâ fit contra
bonos mores, vel inférât periculum animæ. Suar&z.,
de iegib. lib . 6. cap. 16. n. 3. p. 446.
de religion que le Souverain peut n’avoir
pas apperçu , n'arguë pas toujours l'autorité
législative d'incompétence 3c de défaut de
pouvoir -, mais le nouveau Bref attaque le
pouvoir dans fa fourcc ; il n’abroge pas Am
plement les Ediis comme pouvant nuire par
contre-coup au bien de la religion, il les
abolit par la plén itu de de puijfance ( 1 ).
Vainement diroit-on que le Bref fe fonde
fur ce que les Edits de Parme pourvoient à
des objets propres à la puiftance eccléfiaftique ( 2 ), 3c que ce prétexte exclut tout ufage
du pouvoir dircét : mais la voie de caftàtion
3c d'abrogation, qu'on y emploie , fuppofe
d'elle-même la Supériorité temporelle 3c di
recte , 3c le pouvoir indéfini d'enlever à la
temporalité une matière reconnue civile. Le
Bref donne dans cet excès ; il étend l'ufurpation au-delà du cercle des matières mixtes ;
plufieurs des réglemens qu'il abolit font du
nombre de ceux que l’Eglife a tant de fois
acceptés , ou même follicités auprès des Sou
verains , Soit dans les pays où elle a été re
çue , foit dans ceux où elle n’étoit que to
lérée.
Le motif fpirituel allégué dans le Bref ne
(x ) Poteftatis plenitudine . . . . revocamus, caflamus , annullamus & abolemus. . . . Bref.
( i ) Ad ecclefiafticam poteftatem omnino fpe&ant
& pertinent. . . . Bref.
E ij
�i*
..
fçauroit changer 1a nature de l’ufurpation ; il
ne prouve pas qu’on aie voulu ne faire va
loir que l'autorité indirecte. Le pouvoir di
rect , ainfi que l’indireét, nous eft repréfenté
comme fpirituel dans fon principe , dans fa
fin 6c dans fes motifs ; il dérive du pouvoir
des Clefs , il fait partie de la charge paftorale ; 6c l'Ultramontain nous die que tout ce
que le Pape ordonne dans ce genre eft un
précepte fu m a tu rel & r e la tif a l'ordre fu m a tu r e l, qu'il émane du Pape non en qualité
de Souverain immédiat 6c temporel, m aïs en
qu alité de Vicaire de J . C. { i ). L’un 6c l’autre
pouvoir, direét ou indirect, fe fonde également
fur la fubordination de la fin temporelle à la
fin fpirituelle, qui dans le fyftême entraîne
la fubordination de la puifiànce civile à la
puilîànce eccléfiaftique. Si quelque chofe diftingue ces deux pouvoirs, c’efi: que le pou
voir direct n’ordonnera du temporel qu'à raifon d’un rapport fenfible à l’intérêt de la
réligion , au lieu que le pouvoir indircét, qui
ne voit rien dans la temporalité 6c dans la
(O Quod facit Papa facit apoftolicâ , ici. eft,
fpiriruali poteftarc , ut Cbrifii Vicarius , non ut Princeps terrçnus. Bellann. de potefi. fumm. Pontïf, in
temporal, cap.
pag. 37.
Semper fupcrnataralitcr prascipit , id eft , fub ratione fupernaturafi , & in ordine ad finçryi fuperpaturalcm. Suarez , de legib. lib. 4, cap. S .n . 4. pag,
W»
...................................... 3 7 . . . ^
:
légifiation civile qui ne puiflè intéreiïcr les
conlciences, rien qui ne préfente un bien ou
un mal m oral, faifit ce rapport univerfel pour
tout attribuer à l’autorité fpirituelle, du moins
pour tout rappellér à elle félon les occur
rences.
Lors donc que la Cour de Rome abroge
des loix civiles , c’efi: bien moins par le mo
tif donné à l’entreprife , que par la qualité
de la loi abrogée , qu’on doit juger fi elle
a prétendu ufer du pouvoir direét ou fimplement de l’indireét:; 6c toutes les fois qu’elle
prononce fur des loix , 6c pour des objets
vifiblement temporels, fans pouvoir alléguer,
avec la moindre apparence de raifon, un in
térêt prochain ou un préjudice elTèntiel de
religion, c’eft: le pouvoir direét qui efi: mis
en œuvre.
La première des Bulles ln cœna Domini
ouvroit fans doute un vafte champ à l’ufurpation , en attirant à la jurifdiétion eccléfiaftique les caufes tem porelles connexes aux fp ir itu elles f 1 ) ; mais elle fembloit laifler aux
Princes ce qui eft manifeftement ôc purement
temporel. Le Bref efi: plus exceffif; une par
tie au moins des loix qu’il abroge porte fur
cet ordre de chofes ; d’ailleurs le motif fpi
rituel n’eft pas le feul allégué, on y fait
( 1 ) Spirituales vel fpiriiualibus annexas caufas*
Jiulle Confucvcrunt de Paul 111 de l'an 1J36.
�. ,3 8
concourir l’autorité de pleine puilTance &c
d’abrogation. C’eft encore une fois l’exercice
du pouvoir d ireét, de ce pouvoir à l'ombre
duquel Boniface VIII par fa Bulle Vnam Janctam s’appliquoit à lui-même ce paffage de
Jérémie , j e ta i éle v é au-de(fus des E mpires er
des Souverains ( i ).
C ’eft là cette prétention que Pierre de
Bofc , rempliftant du tems de Boniface VIII
le miniftere public de France, que Pierre de
Bofc, avoué de l’Ordre eccléliaftique, de la
Nation , ôc du Souverain , dénonçoit à l’Eglife
comme une erreur manifcfte. Nous rappelions
ces traits fans peine, parce que nous ne ju
geons pas des intentions de Rome par les
excès du nouveau Bref ; mais nous pouvons
alTurer que ce Bref, par lequel font abrogées
tant de loix civiles qui embraftent les objets
les plus vaftes de l’adminiftration, pafte les
bornes du pouvoir indireét. Bellarmin ne
l'auroit pas confeillé : nous trouverions des
armes pour le combattre dans les ouvrages de
cet Auteur, tels qu’ils fortirent de fa plume,
avant que le Décret >qui les mit au catalogue
des livres défendus, l’obligeât à fe rapprocher
davantage du pouvoir direét.
Un Jéfuite qui a écrit la vie de ce CarCi) Eccc conftitui te hodie fuper gentes & fuper
régna , ut evcllas , & deftruas , & difperdas , fit
diffipes , & aedificcs, fie plantes. Jerem, i . 10.
3?
d in al, prétend qu’après la mort de Sixte V
fes ouvrages furent tirés de l’Index ( i ). Com
ment a-t-on ofé publier, fous le nom du plus
modéré des Pontifes, un acte que l'inventeur
du pouvoir indireét auroit défavoué ? Ce n’eft
point ici une conjecture , la preuve eft écrite
dans les recueils des loix de toutes les na
tions chrétiennes. Des Edits femblables à
-ceux de Parme ont été rendus pendant la
vie de ce Cardinal ,
après lu i, par nos
Rols & par d’auties Souverains , fans que
la Cour de Rome s’en foit formalifée. Ce
pendant le pouvoir indirect étoit alors dans
fa force ; ôc puifqu’il a refpedté ces Edits,
c’eft donc aujourd'hui le pouvoir direét qui
les attaque.
Il n’eft aucune nation qui n’ait à le pré
cautionner contre le miniftere d’une Cour
aulli perfévérante dans fon but , que diverfe
dans fes moyens ; aucune qui n’ait éprouvé
autrefois les mêmes outrages &c de plus grands
encore , aucune qui doive fe croire à l’abri
d'une prétention dont le principe eft univerfel,
& qui fe releve dès qu’elle celle d’être com
primée. L’état des forces politiques eft la
feule mefure des entreprifes ou des égards ,
il réglé les rems de calme & d’orage, il
preferit le mouvement & le repos.
( i ) Vie de Bellarmin par le P. Fuligati, ch, n .
fag, 14$, fit fuiv.
�4°
La France, il eft v ra i, s'eft vue libre dans
des tems où d'autres Nations étoient fous le
joug ; clic a plus d'une fois forcé cette Coin*
a reconnoître publiquement que le Roi de
France n a point de Supérieur dans le temporel
( i ) ; mais l'Ultramontain veut trouver dans
les titres où cette reconnoi(Tance eft confignée,
une véferve en faveur du Pape d ’ex ercer cafuellem cnt a raifon de certaines cau fes une ju r ifdic.
tion tem porelle ( i ) , ou de juger à raifon du pe,
c h é , ce que la Cour de Rome reconnoifloit ne
pouvoir ju g e r a raifon du f i e f ($ ) ; & le pré
texte du péché qui peut fe rencontrer par
tout , a fourni long-tems un principe d'attraeftion univerfelle de la jurifdiélion tempoporelle à l'autorité eccléfiaftique.
A
( i ) Cum Rex fuperiorem in temporalibus mini
me recognofcat. Cap. Per venerabilem , extra. Qui
filïi fine legitimi.
Cum Germani , Angli , aliique in temporalibus
colla fubJidiilenc , Franci cxiftimabanc fuper alia
régna hujus regni dignitatem , ac libertatem , à
Regibus ac Majoribus fuis fuifte dtfenfam. Bo(juct,
def. Cler. Gai lie. tom, i. part', i. lib. 3. cap. 14. pag,
310.
(1) Verùm etiam in aliis regionibus, ccrtis eau*
fis infpeciis , temporale/n junfdi&ionem cafualiter exer*
cemus. Cap. Per venerabil. extra. Qui filii fiat legi-
timi.
(3 ) Non cnim inteodimus judicare de feudo....
fed decernere de peccato , en jus ad nos pertinet cenfura , quam in quemhbet cxercerc poilunms. Cap.
N o v it. extra. Ve judiciis.
4*
A la faveur de ce principe , cette Coût
s'entremettoit par elle-même, ou par les Evê
ques qu'elle regarde comme Tes délégués,du.
droit politique de. du droit privé. Elle foumettoit également à fon pouvoir les plus
grandes de les plus petites chofes, fous pré
texte de fe conformer à la loi divine qui
ordonne de ju g e r fa n s acception de perfonnes
les petits & les gra n d s. ( 1 )
Quelle afturance pourrions-nous prendre fur
l'aveu qu'elle a faic de l'indépendance de la
Couronne, s'il étoit v ra i, comme l'Ultramontain le prétend, que les déclarations qui accom
pagnèrent cet aveu contenoient ces uéferves
captieufes, & préparoientde loin les germes du
pouvoir indireét,que Bellarmin fit enfuite éclorre dans un moment de befoin ? Ce nouveau nom,
moins faflueux que celui du pouvoir direâ:,
bleftà d’abord les défenfeurs de la toutepuiC*
Tance de la Cour de Rome; ils s'écrièrent que la
doctrine de Bellarmin otoit au V icaire de J. C.
en terre une partie de fon a u to rité ( 1 ) ; mais
on reconnut bientôt l'utilité de ce palliatif.
C'étoit à la France agitée par la L igu e,
(1 ) $ed forfan dicetùr quod aliter cum Regibus,
&z aliter cum aliis eft agendum. Cæterutn fetiptum
novimus in lege divinâ. Ira magnum judicabis ûc
parvum , nec eric apud te acccptio perfonarum. Cap.
P io v it, extra. Ve judiciis.
(1 ) Vie de Bellarmin pat le Pcrc Fuligati,
£
�..
. 4 *
m ais dont l’efprit national efl: toujours foulevc
a l’idée du joug ultram ontain, que Bellarmin
tendoit ce nouveau piege, qui commence par
confirmer l'aveu de l'indépendance des Sou
verains dans le temporel, 6c qui mene à la
dépendance effeélive par un chemin plus
oblique.
Ce fut dans un tems de malheur ÔC de
deuil pour la Nation , qu'il y fit paroîcrc fon
traité de la puiflance des Papes fur le tem
porel, où il rappelle le fyftême déjà tracé
dans de précédens ouvrages. Ce Cardinal
étoit lié d'intrigue avec le Cardinal du Perron
& avec d'autres Prélats prévenus contre nos
maximes; les preuves de cette correfpondance
font imprimées. Il faut avouer que le piege
a réuflfi longtems : Boflüet a fouvent exprimé
la douleur qu'il refiènroit, en voyant un nom
bre de Do&eurs François livrés à l’adulation.
( i ) Les traces de cette erreur fe retrouvent
encore dans des ouvrages modernes , qui en
veloppent les myfteres du pouvoir indireéb;
& la Cour de Rome, pénétrée du fervice renCiï Nos non fugit multos , etiam Gallos , in
porterions x v i adulationem abreptos» Defenf. Cler.
ùtaUir,. rom. t. -part. 3. lib, i\ . cap. 10. pag. 19 0 .
Quibus curæ erat occultis machinarionibus . . , .
ahfolutam poteftatem tueci . . . . Galliam obftare fuis
Conciliis fenriebanc , idque aulicis artibus agebanc
ut apud nos- cjceoeptie adalatoriae fcntenci* irreperent,
Xd. tom. impart. 1 . lib. 6. cap. 14,
>43
a
-du par Bellarmin 5 eft prête à ériger des au
tels à celui qu'on avoir cenfuré du tems de
-Sixte V. Mais depuis un certain tems elle
redoute la vigilance de nos Souverains 6c de
leurs Magiftrats , 6c nous accorderons que
dans un Bref concernant la France , elle eût
évité le ftyle du pouvoir direéb Elle n’oleroit
même y publier fans détour la doétrine du
pouvoir indireét ; nouveau motif qui doit re
doubler l’attention des autres Souverains *
fans rallentir celle de la France.
Les Nations étrangères n'oublieront jamais
que la Cour de Rome a voulu plus d’une
fois les empêcher de jouir de l’hommage qu'elle avoir rendu à l'indépendance de la
Couronne de France. La même compilation
où l’on trouve la Clémentine M c r m t , qui dé
roge à la Bulle Unam fanttam de Boniface
VIII à l'égard de la France , renferme la Clé
mentine Romani Pontifiais qui traveûit les
pcomefiès de protection , que d'autres Sou
verains ont faites à l'Eglife de Rome , en
ferm en s de fid é lité ( 1 ) ; on diroit que cette
-Cour regarde comme plus poiïible, a l'égard
des autres Nations , le rétablifièment du joug
.qu’elie voulut impofer a toutes.
La France n'a garde de prétendre des difi(1 ) Cæterum , quin juramenra hiqufniodi fidelitatis exirtanc , à reno Romanis Principibus non
fuir haCtenùs htfitatutn. Clement. de jurçjttr and0.
F ij
�44
tindions fur l'indépendance que la loi natu?
relie & fociale , que lJEvangile & la Tradi
tion a îùrenc également à tous les Gouvernemens de l'univers. Chaque Nation peut dire
comme la nôtre : L'indépendance &c la fupériorité font le droit du Roi qui nous go u
vern e , nous avons un S ouverain qui nous
j u g e , & qui efi tel que ceux des au tres ■Na*
tions (i). Les Edits de Parme n’ordonnant
rien qui ne foie établi dans tous les Empires,
les loix de tous les Souverains fc voient au
jourd’hui frappées du même coup , & le Bref
toléré feroit devenu un ade de paifible polfellion de la fuprématie univerfelle. Pouvoit-on mieux la réalifer , qu’en abrogeant
des loix purement civiles &c communes à tous
les Etats chrétiens ? ‘
La Cour de Rome veut bien ne plus cenfurer aujourd'hui ceux, q ui, à l'imitation de
Bellarmin, appelleront fon pouvoir temporel
du nom de pouvoir indired ; elle acceptera
même avec reconnoiflance les détours de ceux
q u i, fous des noms encore plus déguifés,
établiront la même doctrine. Mais elle ne re
nonce à rien : Sc h elle étale aujourd'hui en
Italie les principes du pouvoir dired , tan( i ) Hoc eric jus Regis qui imperaturus eft vobîs . . . . Rex erit fuper nos . . . . & erimus nos quoque ficut omnes gentes , & judicabit nos Rex noftcr.
ï. Regum,
cap.
8. num. i l . i?. 10.
45
dis qu'elle réferve pour d'autres Nations le
fubterfuge du pouvoir in d ire d , elle n’a
bandonne aucun de fes principes.
En faut-il d’autre preuve qu’un Bref de
l’année 1 7 4 5 , fuivant lequel il faut reconnoîcre au moins le pou voir in d iretl ? Elle fe
réferve donc de reprendre le pouvoir d ired ,
qui n’attend , comme l’autre, que le tems &
les occalions. Elle pourra s’expliquer de nou
veau , comme au tems de Sixte quint , en
tre ces deux dodrines. Si les tems redevenoient orageux , elle pourroit ranimer la dé
finition publiée par Boniface VIII dans la
Bulle Vnam fa n îta m , l’aflocier même à la
Bulle In cœna Domim , dans cette publica
tion annuelle, dont l’objet eft d’entretenir
dans l’efprit des peuples une impreHion de
refped pour la dodrine du pouvoir abfolu.
Les défenfeurs du pouvoir indired feroient
peut-être traités alors comme Bellarmin le
fut d'abord, ôc comme l’ont été fes adverfaires les défenfeurs de nos Libertés , prefque tous vidim es de leur zele pour nos an
ciennes maximes ( 1 ). La fagelïè des Pontifes
éloigne ces dangers ; mais comment compter fur
(1 ) Hoc certè non diffitemur , cum plerique Rîcherium pelTîmè haberenc , qupd antiqua Décréta
coleret , multos co exemplo faille detetritos ne ea
apertè tuetentur. Def. Clcr. Gallic. tom. 1. part* i ,
lib. 6. cap. 15. pag* 511,
�46
un avenir tranquile , lorfquc le Miniftere de
Rome ofe , dans le fîecle le plus éclairé , ra
nimer Tes prétentions , 6c même les accroî
t r e , en reprenant vis-à-vis d ’un Souverain le
ilyle du pouvoir direét ?
On ne fauvera pas le Bref, en dilant que
le Prince n’y eft pas menacé de la dépofîtion : le droit de dépofer eft déclaré , pour
peu qu’on attente à la fouveraineté : l’abro
gation des loix du Prince , 6c t’injonétion
qu'on lui fait de les rétraéter , fuppofent le
droit de punir le refus ÿ elles préparent, ou
plutôt elles contiennent une forte de dépofition. Le Prince n’eft fouverain qu'autant qu’il
eft législateur, 6c tous les Monarques feroient
dépofés de fa it, s'il avoient au-delfus d’eux
une puifiance réformatrice de leurs loix , &
autour d'eux des peuples excités à défobéir
à ces mêmes loix par fintérêt du falut.
En quels tems fom m es-nous, Meilleurs!
lorfque la Cour de Rome dépofoit fi har
diment les R o is, elle prétextoit ordinaire
ment le p éril im m inent de la fo i ; elle feignoit
de n'agir que d ’après le v œ u d ’une N ation ,
<le lui laiftèr le choix du fuccefteur , de ne
vouloir point exercer la législation dans les
Empires : ainfi parlent les apoiogiftes du pou
voir indirect. Mais Si Rome peut impuné
m ent fe rendre l'arbitre des loix civiles, elle
eft plus avancée que jamais. Pourquoi s'obf-
47
tineroit-t-elle déformais à renouveller ces feandaleufes tentatives de dépofition ? Elle n’ôtera ni ne transférera les Couronnes , mais
elle les ufurpera pour elle-même , en ufurpant la législation où réfide le caraétere de
la Souveraineté. Dans le fyftême du Bref,
Rome ne laifleroit aux Rois le nom de Sou
verain, que pour régner fur les Nations &c
fur les Rois eux-mêmes, par le double pou
voir de faire exécuter fes loix dans l’Empire
fans l'attache du Souverain , 6c d'abolir en
core arbitrairement toutes celles qui pourroient émaner de lui. N’eft-ce pas remplir
avec moins de bruit 6c de p é ril, peut-être
avec plus d'avantage, le régné univerfel que
Boniface VIII a vu figuré dans Jérémie (i) ?
Dans quels termes cette étrange abolition
des Edits eft-elle prononcée • La Loi 6c le
Législateur y font également outragés ; la
puiftànce fouveraine y eft de nouveau trai
tée d ’illégitim e , non plus dans ce fens abfurde des premières paroles du Bref, qui
fuppofent le Pape feul Prince temporel de
Parm e, ( 6c qui partent moins du defîèin
d'ufurper, que de l'efprit d ’injure dont les
promoteurs du Bref font animés ) , mais dans
( i ) Sic de Ecclefiâ & ecclefiafticâ poteftate verificatur vaticinium Jeremiæ : Ecce confticui te hodie fuper gentes & régna > & cxccra <3uæ fequuntur.
Huile Unam fanftam,
�49
48
ce fens plus général &c plus cligne de l’am
bition de cette Cour , que la puiüance des
Roi eft effectivement illé g itim e , lorfqu'elle
difpofe lur les mêmes objets que les Edits
de Parme j qu’elle eft fur-tout illégitim e &
in com p éten te, lorfqu’elle prétend ftatuer fur
le temporel des Eccléliaftiques , ou fe refufer à l’exécution aveugle de tous les aétes
qui peuvent émaner de la Cour dé Rome ( i).
L’abrogation feule de l’Edit de VExequat u r , en autorifant l’introduéfcion de routes
les loix de Rome avec leur exécution p a rée,
fourrier l’autorité de l’Etat à une léçifiation
indéfinie 8c fupérièure. L’abrogation des au
tres Edits porte aux mêmes conféquences >
mais quand l’ufurpation tentée par Je nou
veau Bi ef auroit quelques bornes , le prin
cipe qu’on lui donne n’en reçoit aucune. La
légiflation effentiellement incommunicable à
une puilfance étrangère , peut-elle être fubordonnée en quelque point, fans être anéan
tie ,
( i ) Illegitimam poteftaterrr in Ecclcfîas , arque
perfonas , & bona EcclefîafHcorum cxcrcentcs . . . .
ne Eubditi . . . . in nullo extero Tnbunali agere vcl
rueri pofiint, ni(î prius ab eàdem fccubiri îllegitimâ poccftate venià impetratà . . . . tandem ne quo
libet . . . . Bulla . . . . exequi poiïîc nifi impettato
Exequatur . . . . Illegitimam poteftatem in perfo*
nas , res , bona , & jura Ecclcfiaram yel Epifcoporum ac Rcgularium. . . . Bref,
..
.
tie, 8c ce qui eft plus fo rt, dégradée?
Quelle eft la loi qu’on pourra déformais
fouftraire à la fupéiionté réclamée par U
Cour de Rome , fi elle a pu l’exercer fuc
des loix liées à l’eftènee même ôc à la sû
reté des Gouvernemens ? Le même principe
conduiroit à lui foumettre à plus forte raifon les loix des tèftamens «Sc des contrats, à
î; ai fon du ferment , ou du prétexte plus in
défini du péché. On prouveroit facilement
(&! là preuve a déjà été donnée par les JBÿêque$ qui alfifterent à la fameufe Conférence
de Vincennes tenue en 1 3 1 9 ) , que le fat-uc
8c la confcience des fidèles font plus intéreffés dans ces fortes de loix > qu’ils ne. le font
dans des loix d’adminiftration. LTautotit^i
qui croit pouvoir réformer le droit public
3c politique d’un E tat, refpe<ftera--E - elle Iç
droit civil 8c privé .*5 En un mot,olenpréteîxtc
d u mélange de fpiritualité dans céttaihesîna*'
tieres, 8c de leur rapport à l’intérêade -la relu
gion , ( prétexte qui eft la four ce- de$ jentreprife sd ii pouvoir indircéf ] i & la.prétention plus
uni v^rj elle du pouvoir dire61 fur le^ objets pucernent,terpporels , qui n’qtit aveplft œqfçleficç
que le rapport le plus éloigné > ne lailtent plus
de bbrnts polfibles aux entreprifes : la corijon&ure plus ou.mOjins favorable fixera le
degré de l’ufurpation.- .
"f. ,
Nous avons dit-quelle Brçf ajoute i l’ac*
G
�5°
tentât fui: le temporel, l'abus le plus criant
du glaive fpirituel : permettez - nous , Meffieurs, de confidérer le Bref fous cet afpeéh
Nous fommes bien moins attachés à faire
connoître l’excès d'une entreprife qui a ré
volté les plus (impies , qu'à développer tous
les rapports du fyftême ultramontain , & à
montrer combien ce fyftême deftruétif de
tout principe d'ordre & de sûreté publique,
doit être furveillé.
Les Magiftrats qui ont exécuté les Edits
de Parme, & à l’égard de qui une loi fon
damentale dans tous les Etats a in terd it Pu.
fa ge des cenfures , y font frappés d’excommu
nication , accufés d'avoir attenté au pouvoir
& à la liberté de l'Eglife. Si l'on s'en fut
tenu là , nous dirions que toute incompétence
propofée par l’autorité fpirituelle , eft néceffairement commune aux Rois tk à leurs Of
ficiers. Les Ultramontains & les Eccléfiaftiques;,
qui ne font point affèz en garde contre leurs
maximes, l’ont dit fî fouvenc ( 1 ) !
On a feint quelquefois de ne réclamer
(t) Per feculare autem judicium non intelligunfjr iedicia folùm Judicam inferiorum , fed eriam
fuprerro*um , cum omnia fine aque fecularia. Bellarm.
de potefl. Summ. Vontif. in temporal, e, $y. pag. 187.
Sacerdotes exemptos efTe non folùm à poceftate
Tudicum inferiorum , fed cciam ab ipftus Principis
imperio. là. ibid. pag. 18 tf.
Ut ntque ad ipfius Priocipis Curium dcYOceatur j
-1 *
l'indépendance qu'à l’égard des Tribunaux,
au lieu d’imiter le Pape Léon IV , qui foumettoit ah ju gem en t du P rince & de fi*
rep> efenians tout acte contraire au* loix ,
& de fe conformer à l’Evangile qui ordon
ne d’être fournis au Souverain ç r à ceux
cju il en voie. ( 1 ) Les Rois qui ont fenti le
piege d’une diftin&ion fi nouvelle , l'ont improuvée dans les termes les plus durs ( 1 ) :
ils ont accueilli par-tout les remontrances des
grands Tribunaux ( 3)3 ils ont mis la perfonne de tous leurs Officiers à l’abri des
cenfures que l’efprit de rivalité faifoit éclorre,
non cnim effet pleniffima immunitas , fi principale
Poteftati. effent obnoxii. ld. ibid.
Ac . . . . non folùm exemptos effe , dùm Cleriei
funr , à poteftate Judicum inferiorum , fed ab ipfis
trincipum legibus quoad coaéhoncm ateinet. ld. ibid.
pag. 187.
( 1 ) Subjeéti igitur eftote . . . . five Régi quafi
præcellenti , five Ducibus , tanquam ab eo miffis . . . .
quia fie eft yoluntas Dci. Prima Pétri , cap. 1 . v .
13. 14. 15.
(1 ) Manufcrits de Dupuy, n. 376.
Mercure jéfuirique , pag. 878.
(3 ) On ôteroit à vos Parlemens la connoifTance
des droits de votre Couronne , que les loix & établiffcment du Royaume leur ont donné, & la rappellant à votre Perfonne , fous prétexte de votre
autorité plus abfolue , l’on vous en prive &: de vos
droits entièrement , & précipite-t-on votre Etat SC
votre Perfonne à un évident danger. Remontr. du
Parlement d'A ix de 1614.
G ij
�w
qui interrompant le cours de la Juflice , &
rendaut l’état des tribunaux incertain, livroient
les. nations au trouble.
, Toure injure qui tend à punir le zele des
Magiffcrats pour les loix du Prince & pour
la défenfe de Tes droits, retombe fur la perfonne même du Souverain de qui ils tien
nent leu r. pouvoir , M a gifra tu s pars corporis
R egis : leur d ign ité fa it une portion d e la jten ve. Pour mettre le comble au {caudale , l'excommünication a été perfonnifiée au Prince
de Parme par l’exprefïïon réitérée jufqu’à
l’affe&ation , des perfonnes cjui ont befoin de
la mention la plus fp écia le ( i ) , par la déro
gation aux induits & p rivilèges accordés 3 dit
le Bref, a toutes perfon'nes revêtu es de toute
d ign ité eçcléfiaflique ou tem porelle (z) , par la
rélation que le même Bref exprime , en deux
endroits diffère ns , aux B ulles des Pontifes
prédéceffcttrs ( 3 ) , & qui peut défigner, avec
( 1 ) Aliaquc quxeumque . . . . etiam fpecificam &
individuam mentioncm & exprelfionem requirentia . . . . feu alîàs fpecificâ & individuâ mentione &
expreffione di gni . . . . étiam fpecialiflimâ mentione
dignos. . . . Bref.
( i ) Non obftaBtibds . . . . privilegiis . . . . quibufliber perfonis quàcumque ccclefiafiicâ vcl mundanâ
dignitate fulgentibus . . . ■.ac fpecialem exprelfionem
xequirentibus.......... Bref. 1
(3) Romanorum Pohtificuni prxdccefTorum noft
trorum veftigiis ac cx’emplis irihftentes .; . . . &
coruradem Pontificum romaûôrtfm prædecefforum nof-
53.
la Bulle In cœna D omini , ces Bulles encore
plus ambitieufes qui fufpendoient les deux
glaives fur toutes les têtes couronnées ; enfin
par la dénomination exprcfTè de tous ceux
qui ont f a i t ou pu b lié les Edits ( 1 ).
La majefié inviolable des Rois , le titre
de proteébeurs de l’Eglife imprimé fur leur
front de la main de Dieu , l’horreur du fehifme , & la crainte de compromettre les Eglifes nationales, qui n’ont point reçu en par
ticulier les promelîès de perpétuité faites à
l’Eglife univerfeile , tout affranchit les Rois
de l’excommunication. ( 2 )
trorum conftitutionibus firmiter inhérentes, cenfuras . . . . apoftolicis ConOitutionibus, ac præfcrtim
litteris die Cerna; Domini fingulis annis legi & promulgari foliris, inflîftas. . . . Bref.
( 1) Eos omnes qui Edifia , Décréta . . . . ediderunt,
promulgarunt , Sic. Bref.
(r ) Multitudo non eft excommunicanda ncc Princeps. Maxime tirée de St. Thomas , St. Augujlin , la
glojfe du chap. X III de St. Mathieu.
Le Roi ne peut être de préfent , ni à l’avenir ,
aucunement , ne pour quelque caufe que ce foie, fujec
aux excommunications & cenfures apoftoliques. Arrêt
du Parlement de Paris du 30 janvier 1{49 , CT Arrêt
d'rnrégiflrement des Lettres-patentes du Roi Henri 1Y ,
qui lèvent les défenfes portées par les Arrêts rendus
contre le Nonce Landriano.
On ne doit point trouver étrange fi nous foutenons que nos Rois ne peuvent être excommuniés,
puifque l’on en vient à de fi damnables conféquen»
ces. ïithou fu r l ’art. 15. des Libertés de l’Lgl, G allie.
�La défenfe d'excom m unier la m ultitude
s’applique avec plus de force au Chef de
la fociécé , que le Roi des Ross a referme à
fon ju g e m e n t, fuivant le langage de l'anti
quité chrétienne , &' d’Yves de Chartres ( i ):
Je puis dire ici après St. Auguftin , j e ne propofe
point une chofe nouvelle ni ex tra ord in a ire, mais
ce cjue toute EEgliJe pratique. ( i )
L’Eglile ne prononça jamais des cenfures,
même contre les Empereurs Ariens. Les Evê
ques de France ont plufieurs fois écrit aux
Papes, que le Souverain ne devoit pas être
excommunié. Les Canons & les Capitulaires
portent le refpeét du à la perfonne des Rois
jufqu’à ordonner que , f le Roi reçoit un ex
comm unié en fa g r â ce ou l'adm et a fa ta b le,
l’Eglife veut bien le recevo ir a fa communion.
Cependant fans égard pour des maximes
auffi lacrées , & pour celle qui défend de
Cet article eft bien prouvé au cinquième chapitre
des preuves •> l’on y peut néanmoins ajouter l’article
de l’Alîemblée de St. Germain , 1583, qui porte:
Le Roi ne peut être excommunié par aucun. Id. fur
l'art. 16. des Libertés.
Lorfque ces Princes ont porté des loit contraires
au fervice de Dieu , lorfqu’ils favorifoient les en
nemis de la foi , ces faints Pontifes ont-ils menacé
leur têtes facrilegcs des foüdres de l’Eglife ? Difcours
du Procureur gtnér. du parlement de Paris. Ecole du
droit civil & canon, i£8z.
(1) Yvès de Chartres, épit. 71.
(1) St. Auguftin , liv. 3. contra Eptfi, Parme».
prodiguer les cenfures à raifon des droits tem
porels ( 1 ) , le Bref m aintient, par l’excom
munication lancée contre un Souverain, l’uiurpation faite iur lui - même du pouvoir
légiflatif.
Eft-ce pour diminuer l’indignation que de
voit exciter cette partie du Bref, que le rédac
teur de cette piece a d’abord feint de croire qu’il
n’excommunioit qu’un poiïelleur illégitim e ? ou
eft-ce pour éviter de le reconnoître ôc de le
dénommer Prince , qu’il lui applique les
cenfures fous le nom générique de ceux qui
ont fa i t les E dits ? Laquelle de ces deux
injures paroîtra plus attroce, celle qui méconnoït la puilTànce en la traitant d ’illégitim e,
ou celle qui la foumet à l’excommunication?
Mais l’une & l’autre injure eft dans le Bref.*
la fouverainecé y eft méconnue & déniée
( 1) Dans une difpute purement politique la Bulle. . . .
ui menace d’excommunication . . . . eft nulle de plein
roit. En cette occalîon les foudres du Vatican n’onc
rien de redoutable , ce font des feux paflagers qui
s’exhalent en fumée , & qui ne font de mal & de
préjudice qu’à ceux qui les ont lancés. Mr. Talon,
3
Plaidoy. fu r
la
Bulle concernant les franchifes en
1688.
C’eft un abus intolérable que, dans une matière
purement profane , le Pape fe ferve des armes fpirituelles . . . . qui ne doivent être employées que.. . .
pour des chofes graves & importantes qui regardent
le faluc des âmes. ld. ibid.
�dans la perfônne du Prince de Parme , &
l’autorité dJexcommunier les Souverains y ell:
mile en principe.
Que fera-ce (î nous confidérons cette audacieufe cenfure, dans le rapport intime qui
lie la prétention d’un pouvoir fur le tempo
rel avec les efets inévitables de l’excommunication , & avec ceux que le,fyfl:ême ultra
montain y ajoute
L’excommunication , quoique dénuée par
elle-même de tout effet civil , ne peut qu’o
pérer un préjudice civil dans tout Etat où
la religion e(V reçue 3 tk la circonfpeéfcion
dans l'ufage des cenfures eft peut être l’ar
ticle le plus important du paéle focial qui
unit l’Eélife
& l’Etat.
O
Qui ne connoît les maux que l’un & l’au
tre ont refleuris par les excommunications
lancées pour des intérêts temporels , <k plus
encore par l’excommunication des Souverains,
avant même qu’on eut perfuadé au,x Papes
q u ’ils pourvoient ajouter à cette peine qclle
de la privation du feeptre ? La dépofition
s’opéroit prefque d’elle-même par la rébellion
des fujets, ou par l’abandon du Prince
«excommunié. \ {
L’extcnlion vicieufe qu’on donna au pré
cepte de fuir les excommuniés > borné dès
d'origine à la défenfe d'avoir avec eux aucun
com m erce de religion , acheva de tout confon
dre
>
dre ( i ) ; on voulut voir dans ce précepte
l'iriterdiélion de tout commerce civil avec
l’excommunié , & pour lui la déchéance de
toute autorité ( i) . On a laide fubfîfter dans
la compilation de Gratien un texte attribué
fans doute fauffèment à Urbain II , & re
connu très-pern icieu x , fuivant la remarque
de Van-Efpen dans fon commentaire fur Gra
tien , qui déclare ne point répurer homicides
ceux q u i, par z~elc pour l'E glife , auroient don
né la mort aux excommuniés ( 3). L’Evangile
en ordonnant de traiter l’excommunié com m e
m i pajcn , le reconnoît membre de la fociété
civile, qui fubfifle en effet parmi les payens,
& dont l’exiftence &c lés droits Jont indcpenclans de la religion dans l ’ordre politiq u e (4) 3
(1) A communione orationis &: conrcntus & omnis fanEii commercii relegetur. Tcrtull «polog. c. 39.
(z ) Cum facri Canones ir.ter excommunicationis
effedhis ponant nonfolùm privationem Saeramentorum
& fuffragiorum, fed etiam commercii civilis : item
pri'vationem & fufpenfîonem jurifèiftionïs & abfolitùonem fubditorum à f.delitàte. Bellarm. de potift.
fumtn. Vonlif. in temporal, c. 33.
z£?.
(3) Non enim eos homicidas arbirramur quos
adversùs excommunicatos , zelo catholicæ tnatris
ardentes , aliquos corum trucida/Tc contigeret. Ca
non. Ex communieat orum -, cauf. 13. cfUi 5.
(4 ) Eft ergo Imperium, feu Civile'régimen , religioni fubordinatum , & ab câ pendet in ordiqi^
morali , non autem in ordine politico . feu quôd
attinet ad jura focietatis humanae ; cùm hoc pof-
‘
H ' vr ' '
�r .
,
58
8c l’onofoit prétendue que la fociété religieufe,
en retranchant le fidele de Ton fein , peut
ôter à la fociété civile fes membres & même
fon chef.
Cette horrible cxtenfion une fois admife ,
contre les notions fondamentales de tout or
dre ( i ) , fut la première bafe de l’ufurpation d’un pouvoir fur le temporel, ôc fit
éclorre les Sentences de privation des Cou
ronnes ( i ). Le tems a diflîpé de finiftres
préjugés, mais le miniftere de Rome n’a que
trop ïouvenc manifefté le defir de faire pré
valoir , dans l’elprit des peuples, la crainte
de fes cenfures fi.tr le devoir de l’obéillance
au Souverain.
tremo ordine 6P religio e? imperium fine fe in vi
tera ejfe pofftnt. Defenf. decl. Cler. G allie. tom. r.
part. i. ,lib. i. fetf. i. cap. y. p. 131.
(1) VafTallus domino etiam excommunicato tenetur debitum rcddcre. Hugo in Can. Nos fanclorum , cauf. 15. qu. 6.
(r ) Hoc illud argumentum cft , qno uno Gregorii
VII temporibus viros bonos doâofque permotos fuifTe
videbimus , ut ab Henrici IV regis excommunicati
obedientià recedcrenc . . . . fed errore manifefto.
Defenf. Cler. Gallic. tom. 1. Hb. 1. fect. 1 . c. 14. p.
161.
Grégoire VII fonda cetce prétention principale fur
l’excommunication. On doit éviter les excommu
niés . . . . ne pas même leur dire bon jour , fui*
vant l’Apôtre -, donc un Prince excommunié doit être
abandonné de tout le monde ; il n’efl: plus permis
de lui obéir, &c. Fleury , dife. 3. ». 18.
59
Cette m axim e, en la féparant même des
effets civils qu'on attribuoit à l'excommuni
cation , renferme tout le venin du pouvoir
indireéfc ou direéh La défenfe faite a
fujets d’obéir aux loix eft une difpenfe effective,
ôc même une interdiction du devoir de fide
lité qui confifte dans l'obcilTànce aux loix.
La Cour de Rome jette dans une nation
le germe du plus grand trouble, lorfqu’elle
met fous l’anathême ôc le Chef de l’Etat, &
l’Etat entier, en peine de fon obéiflànce à
la loi. Le Bref arrive à cet excès ; il excom
munie quiconque aura ex écu té la loi , q u i
conque m im e en aura reconnu l’a u to r ité ,
ou aura com paru en conféqtiencc devan t les
Tribunaux de l’E tat. ( 1 ) Ce dernier trait
enchérit encore fur la première Bulle In cœna
Jdomini : elle punit, il eft vrai, la prétendue
ufurpation du Magiflrat , qui attire à fon
tribunal les caufes qu’elle feint de regarder
comme connexes aux caufes fp iritu elles 3 elle
punit auiïi le recours volontaire des parties
au même T ribunal, mais elle n’étend point
( 1) Omnibus verô perfonis . . . . interdicimus . . . .
ne præfata Ediéïa . . . . quovifmodo exequantur vcl
iis obtempèrent . . . . multôque minus . . . . laïcalis
Tribunalis foro fefe fubjicere audeant vel praTumant . . . . cum notorii & explorati juris fit eos omnes . . . . vel per fe ipfos exequentes, atquc illegitimam poteftatem . . . . faélo agnofeentes , cenforas
ecclefiafticas. . . . eo ipfo incurrifle. . . . Bref.
H ;y
�6o '
l'anathême furie fujet q u i, cité au Tribunal
de fon Prince, n’ofe décliner fa jurifdidfcion,
& qui ne le pourroit fans s'expofer à la
vindicte publique : c'eft vouloir ébranler les
fondem ent d’un E tat, expofer la perfonne fa crée des Rois à l’en vie , d la haine des peu.
p ies, & aux dangers qui fm v e n t telles paffions.
( 1)
L ’excommunication portée par le Bref eft
perpétuelle , elle eft tranfmife aux fttcceffen rs.
Le Bref n'offre l'abfolution de la cenfure que
fous la condition , aulli indécente qu’impolfible , de la révocation des Edits , ou d ’une fa iiffa élion convenable fa ite au St. S iégé (i) : pour
quoi cette finguliejre alternative ? A-t-on voulu donner à entendre que la Cour de Rome
( i ) Remontrances du Parlement d’Aix , de 1614.
Ils diffameront leur nom d'irréligion & d'impicté , & par ce moyen effaçant l’amour Sc le refpcét
du cœur des fujecs , ébranleront l’obéiffauce Sc pro
duiront des effets fcmblables à ceux dont les hiftoires font toutes pleines. Rtmontr, de 1614..
( i ) Nec à cenfuris. . . . abfolvi , & liberari poffe . . . . incapaccs effe , qui abfolutionis bcncfïcium
confequantur, doncc fuprà diéta Décréta , Ordinationes , Mandata , Ediéta . . . . retraéhverint , rc«
vocavcrint. . . . vcl aliàs . . . . S. Sedi fatisfaétionem
in przmiffis præftiterint. . . . neenon illorum fueeeffores in officiis à retraélatione , revocatione . . . .
Decretorum , Ediftorum , aliorumque przmifforum
per fe ipfos facienda , vel aliàs débita & condignâ
I c c k û x , ac nobis & diébe Sedi, fatisfa&ione , &c.
Bref.
6l
n'a pas befoin que le Prince rétraéte des
Edits déjà révoqués par l’autorité du Pape ?
Le Miniftere de Rome ofe foumettre à une
réparation la majefté du Souverain qu'il a
outragé : il fuppofe le St. Siégé offenfé, &
l’offenfe lui-même en fe confondant avec lui.
Faut-il ajouter que , dans les maximes ul
tramontaines, la contumace dans l'excommu
nication, ou la négligence de fe faire abfoudre dans l'année, rend fufpeét d'héréfîe , nam
contum acia bœrefts eft ( 1 ) j que l'hérétique
eft privé de plein droit de toute jurifdiction ( z ) \ que le droit d iv in oblige en ce
cas le bras fécn lie-r d obéir an bras fp iritttel ( 3) ?
Ces conféquences ne font pas expliquées
(1 ) Après avoir excommunié un Prince & mis
Ton Etat en interdit , s’il méprifoit les cenfures ,
comme il faifoic le plus fouvent , on l’accufoit de
ne pas croire la pniflance des Clefs , Sc dès-lors on
le tenoit pour hérétique. On jugeoit de meme de
tout particulier qui foujfroit un an d’excommuni
cation fans fe mettre en devoir de fe faire abfoudre. Fleury , dife. 7. 7 7 . 8.
(1) In cafu hærelïs privari etiam dominio. Bellarm, de potejl. Summ. Fontif. in temporal. c. 33. p.
170.
(3 ) In talibus enim de jure divino & humano
brachium temporale fpirituali obedire tenetur ; ma
xime qui in excommunicatione perftitit ultra annum.
Bertrand. Cardin. S. Cltment. adverf, magifir. Petr.
de Cugneriis.
�62
par le B ref, 5c font encore plus éloignées
de l'intention des Pontifes des tems préfens;
mais elles font inhérentes au fyftême , elles
font développées au befoin par les émiffaires
de la Cour de Rome. La déchéance de la
fouveraineté eft peut-être infinuée par les
claufes du Bref, qui expriment une excom
munication encourue par le feul fait des Edits,
cenfuras eccleÇiaJhcas eo ipfo in cu rrijfe : elle
l'eft encore par d'autres claufes , qui réfè
rent ce Bref à tant de Bulles ( i ) où la dépofition
eft aufti déclarée encourue de plein droit. Telle
eft entr'autres la Bulle de Paul IV , du 15
février 1 5 5 8 , munie de fon feing, 5c du
confcntement des Cardinaux, confirmée par
Pie V , qui déclare que tous les P réla ts, R ois}
Empereurs , qui tomberont dans l’héréjie &
dans le fch ifm e , feront p riv és ipfo faéto de
leurs D ign ités, Ju rifditlion s , Royaumes, Em
p ires, les déclare incapables d'y être ja m a is ré
tablis , & les livre au bras fécu lier.
Que veut dire le Bref, lorfqu'il déclare en
courue la privation de tous les p riv ilèges ac
cordés par les Pontifes prédecejfeurs ( 2 ) ? Que
(x) Romanorum Pomificum prædeceflorum noftrorum veftigiis ac exemplis infiftentes .
& co
ru mdem Conftituuonibus , ac præfertim . . . . Cocnae
Domini . . . . firmiter inhérentes. . . . Bref.
(1 ) Omnium & quorumeunque pdvilegiorum ,
lignifie encore la claufe qui porte que le
Bref aura tout fon effet, nonobflant la réglé
qui défend, de p r iv er le tiers du droit a cq u is,
er nonobflant tous S ta tu ts & coutum es qui
fero ien t m ême munis du ferm en t ( 1 ) ? Quels
font ces fermens auxquels le Bref déroge ,
5c qui ne peuvent avoir été prêtés que par
des fujets ?
Les prétendues entreprifes qui ont fourni
la matière de cette excommunication , font
aux yeux des Ultramontains autant de chefs
d'héréfie 5c de voies de fch ifm e , dont l'impu
tation faite par le Pontife eft , fuivant d'au
tres Bulles , une notification fuffîfante de la
déchéance du droit de régner. La maxime
de YExequatur renouvellée par les Edits de
Parme, 5c cenfurée par le Bref, a fouvent
été déclarée exécrable , h érétiq u e, par cette
C our, 5c particulièrement’ en 1 7 1 5 . L’imgratiarum & indultorum , fîbi à nobis feu à Ro
manis Pondficibus quomodolibet forfan concdforum
ami/lion is pœnas eo ipfo incurrifle. . . . Bref.
(1 ) Non obftantibus præmiflîs , ac quatcnùs opus
fît , noftrâ & Cancellarié apoftolicæ régula de jure
quarfito non tollendo , aliifque Conftitutionibus &
Ordinationibus apoftolicis , neenon quibufvis etiam
juramenro , confirmatione apoftolicâ rel quâvis fîrmitate aliâ roboracis ftatutis . . . . aliifque quibullibet
perfonis , etiam quâcumque ecclefiafticâ vel mundanâ
dignitate fulgentibus . . . . concdïis , ediélis, fa&is;
&Ci Bref.
�^4
munité établie indiflinélement par le même
Bref à l'égard des biens & des per Tonnes
eccléfiafliques, Sc fondée fur la parole di
vine , n'a pu être violée par les Edits fans
héréfie. Tous les reproches du B ref tendent à ce but : l'excommunication y cft fon
dée fur le violement prétendu des loix préexillantes de l'Eglife , & appuyée par l'auto
rité irréformable qu'on arroge au Souverain
Pontife : c'eft ici le myfterc profond, le prin
cipal reffort du pouvoir fur le temporel,
ôc le grand danger de ces fortes de Brefs.
Il importe de pénétrer & d'apprécier par les
fyftêmes connus 3 & par l'hiftoire , ce ftyle
romain qui , fous des claufes enraflées &
en apparence confufes , mais très - d 1 ino
tes dans les vues des rédacteurs, deftine
chaque mot à conferver une branche du fyftême ultramontain, ôc met le fyftême entier ôc tous les détours de la politique ro
maine à l'abri du dogme.
Pour tromper le fentiment inné qui dé
voue le citoyen ôc le chrétien su refpeét de
la Puiftànce fouveraine, il falloir lier à la
religion le pouvoir direét ou indireét, c'eflà-dire , l'enfeignement le plus capable d’allarmer la religion & de confondre la raifon:
il falloit la fubjuguer fur un point où il étoit
impoflible de la perfuader , & fur monter,
par le préjugé d'une autorité infaillible , l'impreflion
6i
preflion du précepte ôc de l'exemple de foüiniflîon aux puiftànces , donné par J. C. ôc
fuivi par les Papes jufqu'à Grégoire VII.
Quelle entreprife , ôc comment réufîir ? chofe
étrange ! les ultramontains avouent que l'E
criture Sainte, où tonte véutécft enfeïgnée ( i) >
ne renferme pas le myflere d'un pouvoir fur
le temporel ( z ) , ce myftere qui auroit de
mandé une révélation d'autant plus expreftè
qu'il choque davantage les lumières natu
relles ; il eft ( difent-ils ) implicitement ren
fermé dans le pouvoir des Clefs : mais le
pouvoir des Clefs borné à la régie des âmes
rejette de lui-même la conféquence.
.Au défaut de l'Ecriture, ils ont eu re
cours aux Conciles ( 3 ) , non à ceux des pre
miers tems où leur condamnation a été pro
noncée d'avance , mais à des Conciles poftérieurs ôc mal interprétés. Le développement
de ce myflere auroit donc été réfervé aux
derniers tems (4), à la différence des m yf( 1 ) Docebit vos omnem veritatem. Joann. 16. 13.
( 1 ) Potcftatem Summi Pontifias extendere fe ad
temporalia , ac præfercim ad régna & imperia, exprvlsè in Scripturis non legimus.' Bellarm. de potefi.
Summi Fontif. in temporal, c. 1 1 . p. 143.
( 5 ) Credimus camen quia Ecciefia in Conciliis
gencralibus fie docet inteiligeûda efle ilia verba Doin in i, TIBI DABÜ CLAVES. là. ibtd.
( 4 ) Sic grande illud chriftianæ ' religionis arcanum . . . . Chriftus ac ptimi adminiftri Apoftoli cofr»
�66
teres de la religion qui font nés avec elle.
L ’Eglife primitive s’eft crue obligée de les
expofer avec fimplicité aux Empereurs & aux
Aïagiftrats païens , devant qui [es Aiiniflres
dévoient être amenés, pour fervir de témoignage
à eux & aux Nations (i) ; & l'on veut que
ce myftere , ou plutôt ce funefte fe c re t, aie
été caché aux Princes chrétiens par une réti
cence perfide , &c même par la publication
de la doétrine contraire.
Les Ultramontains n'ont pu fe didîmuler
l'obftacle que leur préfentoit la fainteté du
Chriftianifme , à qui Xamour de la patrie
tient encore plus qu'a l'humanité ; ils ont re
douté ces grandes vérités enfeignées par l'E
vangile , que les Jlpctres n’ont reçu de pottvsir que fur les chofes qui intérejfent le fa lu t,
(i) parce qu'ils n'ont été envoyés que pour
prêcher le régné de Dieu (3 ); que l'Eglife ne
décide fur la f o i , qu'en déclarant ce qui eft
compris dans la loi originelle (4), 6c ne peut
ticcfcunt. Defenf. Cler. Gallic. tom. 1. part* 1. lïb. 1.
fect. î . cap. 17. p. 1f 1.
( 1^ Ad Prxfides & ad Reges ducemini in teftijnonium illis* Math. 10. 18.
(1 ) Sacçrdos &: Pontifex vcflcr in his qux ad Deum
perrinenc > prxfidebir. 1. Paralip. 19. n .
Omnis . . . . Pontifex . . . . confticuitur in iis quæ
funt ad Deum. Heb. $. 1.
( 3 ) Et miût illos prædicare regnura Dei. Luc,
9- *-•
(4 ) Unus eft Legifiator & Judex. Jacob. 4. n .
<>7
devenir contraire a elle-même dans fes décifions ( \ ) \ que dans l'Eglife la nouveauté eft
toujours fauffe & profane (z) 3 que la T radi
tion ne peut s'interrompre, ni les articles de
Foi s'accroître ; qu'on ne croit dans l'Eglife
que ce quo n y a toujours cru , quod ubique,
quod. fem per, quod ab omnibus \ que tout ce
qui trouble la p a ix ne peut être la religion (3),
Ils n'ont pas moins fenti l'inapplication de
quelques C on ciles, où après bien des liecles on
n'a commencé à prononcer fur des objets tem
porels qu'avec l'aveu des Souverains ,que d'a
près leurs propres loix , ou dans l'efpérance
d'une confirmation prochaine (4). Ils fçavenC
que les Aflemblées conciliaires tenues en Fran
ce , & dans lesquelles ces objets ont été trai
tés >étoient autorifées de la préfence des Souve-
(1) Ecclefia nunquam errât, nec fibi contradicit.
Dpilt. fynodal. Bafil.
( r ) Id efTe dominicum & verum quod fit prius
traditum , id autem elfe extraneum & falfum quod
fit pofterius immidum. Tertullicn.
(3 ) Cum omnibus hominibus pacem liabentes.
Rom. n . 18.
Itaque qux pacis funt fe£lemur. Rom. 14. 19.
(4) Décréta de rebus temporalibus à Conciliis etiarn
œcumenicis prolata , rata funt vcl irrita, prout Principum vel confenfione admirtunrur , vel difienfione
rcfpuuntur : Nedum ad Clavium divinam poteflatem
& ad fidei invariabilem regulam pertinere polTint.
Defenf. Cler. Gallic, tom. 1. part. 1. lib. 4. cap. 11.
?• 3U*
1 ;j
�68
iains ou de leurs re pré (entans ( i j t c e peu
de paroles, que nous venons de dire , con
tient <5c réfute en même tems toute la chi
mérique tradition des Ultramontains. Que
leur reftoie - il pour établir l'édifice d'un pou
voir temporel ? l’enleignement de quelques
Papes ambitieux ; mais cette autorité le re*
eonnoifibit alors faillible , 8c ne pouvoir four
nir un préjugé décilif.
La fainteté des mœurs de pluficurs Pon
tifes leur avoir acquis, dans l'opinion géné
rale , une forte d’infaillibilité humaine &C
perfonnelle *, aucun d'eux ne la croyoit atta
chée à la Chaire. Les plus hardis uturpateurs du temporel ne fe l’étoienc point arro
gée , 8c leur mort avoit devancé de plu(icurs fiecles l'incroduétion de cette nouvelle
prérogative.
69
Grégoire V I I , qui le crut maître de dé
trôner les R o is , n’attribua qu’à l'Eglifc le
don de ne p ou voir errer ; il a écrit que les
Papes étoient im peccables en v ertu des m érites
d e S t. P ierre ( 1 ) } 8c par un excès de préfomption il o(à confirmer ce privilège par fa
propre ex périence (2) , il n’alloit pas jufqu’à
les croire exempts d’erreur , 8c incapables
de la profelTèr de bonne foi. Il faut que l’o
pinion de l'infaillibilité foit bien étrange ,
puifqu’ellc ne s’étoit pas offerte à des efprirs
afièz enthoufiafles pour imaginer l’impeccabilité. Mais il eût été trop dangereux de pro
duire à la fois deux prétentions aulTi capa
bles d ’allarmer la religion
8c les fociétés ,
o
que celle d’ un pouvoir abfolu fur le tempo
rel 9, 8c celle de l’infaillibité. C'eût
écé déJ
velopper tout le plan d'une monarchie abfolue au fpirituel 8c au temporel.
La Cour de Rom e avoit déjà ufurpé dans
la d ifeipline, «5c allervi en partie l'autorité
Quare qui ralia Pontificiæ poteftati per fefe innata , non autem concefftone , aut confenfione tHcità,
*vel exprefsa civllis poteftatis , qnrfita dfe dixerit,
prorsùs ineptiat. Id. tom. i. part. i. lib. 4. pxg.
33G
(1) Car auflî eft-ce la vérité que ces Conciles reconnoiflant prendre autorité par nos Rois , déter*
minoienr indifFéremcnent ce qui concernoic tar.c la
police féculicre qu’ecclcfiaftique. Recher ch. de Pafquier , liv. 3. chap, 1 1.
Autrefois en ce Royaume les deux Jurifdi&ions
f i ) Quod romanus Pontifcx , fi csnonicè fuerit
ordinatus , meritis Beati Pétri indubitanter cfficitut
fanftus. Dittat. Gre%. Vil.
( t ) Ne de tanta poteftate genus humanum aliquid iniqni metuerct , docebat Grcgor. VII ad apofrolicam Scdem rite ordinatos meritis Beati Pétri
meliorcs effici, atque omnino fan&os. Addebat Gregor. licet experimento fcïannts nempe Papam fanc-
Rois, jDit TilUt.
b llcb
eccléliaflique & temporelle étoient par enfemble concordablement adminiftrccs fous & par l’autorité des
tum effe quod haclenus nemo pr&fuj7ipferat. Defenf.
Cler. Gallic. tom. 1. part. 1. lib. 2. [tel. 1. cap. n *
�71
ëpifcopale , par la foumiflfion aux appels p ro
prcment dits des Conciles provinciaux à R o
me , par une réferve indéfinie qu'elle s'étoic
faite des caufes m ajeures, par l ’attribution
d'une jurifdiétion immédiate fur les autres
Eglifes , Sc fur-tout par la converfion du
droit de difpenfe des Canons en un droit
de dififipation , 5c j'ofe d ir e , d'infradfcion.
( i ) Ce n'étoit plus cette autorité réglée
qui fe déclaroit (oumife aux Canons ( i ) , &
qui faifoit confifter au droit de les faire
obferver une des principales prérogatives de
la primauté que l'inftitution divine attache
à la Chaire de Pierre.
Cette première ufurpation, introduite par
la fabrication des faufïès Décrétales , avoit
devancé celle du pouvoir fur le temporel}
l'une 5c l'autre excitoient déjà bien des plain
tes : on auroit achevé de tout révolter en
proclamant le Pape infaillible 5c la puiflance
ufurpatrice fe feroit vue accablée de toute
l'autorité de PEglife Sc de l'Etat. Il falloir
( i ) On crut que les Papes ne pouvoient mieux
faire paroître leur puiffance , qu’en étendant fans
bornes le droit de difpcnfer des Canons , au lieu que
pendant mille ans ils en avoient ufé avec une ex
trême circonfpcétion. Fleury , infiit. tom. i. ch. i.
/-• 17-
( t ) Contra ftatuta Patrum conderc aliquid vcl
mutare , nec hujus quidem Sedis potefl; aucioritas.
Cnn. contra , cauf. 15. qu. 1.
A
d’ailleurs ménager les Evêques : quelques-uns
avoient pu êcre flatrés par i’établilîèment d ’un
pouvoir fur le temporel exercé par le pre
mier d’entr'eux , 5c à l'ufage duquel Rome
les reconnoidoit alors aflociés } ils avoient
eux-mêmes donné le premier exemple , d’a
bord en Efpagne ôc enfuite en France , de
l'excommunication lancée contre les R o is ,
qui conduifoit à une dépofition de fa it, ou
à l'abdication de la Couronne } ôc c'eft par
cet exemple que les Papes s'étoient autorifés. ( 1 )
(1) Les Evcques prétendirent juger les Rois, non
feulement dans le tribunal de la pénitence , mais
dans les Conciles. Dès auparava+u le huitième fiecle je trouve un attentat notable fur la dignité roya
le , que je compte pour le premier : c’eft la dépofition
de Vamba, Roi des Vifigots en Efpagne, l’an £81.
Les Papes , croyant avec raifon avoir autant & même
plus d’autorité que les Evêques , entreprirent bientôt
de régler les différons entre les Souverains , non pat
voie de médiation & d’interceffion feulement , mais
par autorité , ce qui étoit en effet difpofer des Cou
ronnes. Fleury , dife. 5. n. 10.
Memoranda nobis eft depofitio Ludovici Pi i , Imperatoris & Erancorum Regis, non modo proceribus
ac militibus , vcrùm etiam Epifcopis . . . . ea quee
à Rege imbecilli atque à feditiofis Epifcopis inaudito cxemplo funt gefta , ut nulla & irrita conteront
potuerunt . . . . Ebbone Rhemenfi , feeleris hortatorc,
hæc omnia nulla , irrita , abfurda , impiis conatibus
effe gefta , magno bonorum omnium luétu. Defenf.
Cler.Gallic. part. 1. lib. 1 , cap. 1 1 . p .ix ÿ . 230. 131.
�71
C e ne font point les Pontifes de R o m e ,
ce n’eft pas le corps des premiers Pafteurs,
qui dirigèrent cette progrellion fucceflive
cPentreprifes , dont la fabrication des faulïes
Décrétales prouve le defiein , &c l’hiftoire
l’exécution *• l’efprit qui y préfidoit habitoit
dans un petit nombre de politiques , un zele
mal entendu de religion échauflfoit tout le
relie. L ’Eglife avoit beau conferver la pureté
de fa tradition &c de fon langage , la mé
thode fcholallique inventée à peu près au
même tem s, prêtoit à l’erreur le fecours de
les dangereufes fubtilités -, l’illufion fe communiquoit à tous les états de la fociété civile,
6c l'ignorance enture du droit public fournit
une exeufe prefque générale. ( i )
Cependant tant que l’infaillibilité demeuroit concentrée dans le corps de l’Eglife , le
pouvoir direél ou indireél de Rom e étoit
mal alluré} les Souverains recouroicnt au
Concile général contre ces dépolirions que
l’Eglile entière n’eût jamais ni le pouvoir, ni
la volonté d’ordonner , mais qu’elle peut pu
nir ( z ) , 6c les Papes avoient eux-mêmes à
craindre
( i ) Totus ferè orbis in fummâ juris publici igrioratione verfabatur. Defenf. Cler. Gallic. tom. i, part,
x. lib. 6. cap. t8. p. ^$ i .
( r ) Si nous inter jettons appel au Concile futur. . . ,
c’cft parce q#e non feulement les dédiions des Par
pes, mais leur perfonue même, quand ils manquent
; 73
craindre la dépofition de la part du Concile.
Cette crainte &: l’impatience d ’affurer la dou
ble monarchie lur 1Eglife 6c fur les nations ,
fir ent naître , non pas encore l’infaillibilité ,
mais la prétention de la fupériorité du Pape
fur le Concile , dans les cas où il 11e s’agiroit pas de la foi. Ce n’étoit point allez
pour affiner les grands delfiins de la Cour
de R o m e , parce qu’alors m êm e, 6c julques
vers les tems de Léon X , il fut reconnu que
le Pape pouvant errer dans la doctrine , le
Concile lui étoit fupérieur en matière de décifion fur le dogme.
Cette exception fe trouvoit marquée par
par les textes inférés dans la compilation,
d’ailleurs fi fautive , de Giatien ,, nifi Pa
pa fo r e t
a
fid,e d evin s ( 1 ) , nifi m andatum
à leur devoir dans le gouvernement de l’Eglife , eft
foumife à la corre&ion & à la réfqrmation du Con
cile général en ce qui regarde tant la foi que la dilcipline.Talon, plaid. fur la Bnl. concernant les franeb. t688.
(1 ) A nemine eft judicandus , nifi deprehendatur
a fi de devins. Car}. Si Papa , diftinïï. 40.
Si audoritas quarrirur , orbis major çft urbe. Cc.n.
L<gtmn$ , diftinft^v 3.
Sratura Concilii prxjudicant ftatutis Papx , fi contradicant. Glofi. ibid.
Ubi de fide agitur , {pne Synodus piajor eft Papâ.
Çlojf. in can. Anafiafius , difiinft. 19.
Si romanus Pontifç* qpod doçuerunt Apoftoli <fiftruere niteretur , non fçntepciam dicerc, fe<i mugis
trrajfe convinceretur. Gan. Cum quidam
K
�1S
74
hœrejîm continèret : elle fat conftatée par toute
la conduite que le Pape Eugene IV tint dans
le tems de fes démêlés avec le Concile de
B ile , par la foumidion expreflè ( de ce Pape)
aux décidons du Concile de Confiance , par
l'approbation qu'il donna aux premières fe fi
lions du Concile de Bâle, par diverfes Bulles
émanées de lui pendant la tenue de ce Con
cile , & meme par la Bulle Deus novit ( t ) ,
quoique cette Bulle , ouvrage des flatteurs
les plus outrés de la puiflance du P ape, &c
communément attribuée au Cardinal de la
Tour-Brulée, foit d’ailleurs telle que ce Pape
la défavoua.
L ’ancienne profelTîon de foi des Papes
qu’on a changé , &c l’ancien Bréviaire romain,
dont on a fupprimé tous les exemplaires qu’on
a pu fe procurer , contenoient auflTi l’aveu
de leur faillibilité , &c renouvelloient l’ana
thème prononcé contre Honorius par un Con
cile général. Tous ces monumens fubfiftoient
L'
r Quoi Papa: obediendum fit in omnibus , in Spi
ritual ibus & in his quæ ad animam fpe&ant, nifi
contra fidem prohibita Tint. Becr. innoc. IV. lib. i.
fit. 4. fol. 33.
Nemini licet de Papa: faélo judicare . . . . nid mandatum hærefitn contincret. Becr. Innoc. IV. lib. 5. tit.
39. fol. Î9S.
(1 ) Nid fortè quae ftatuenda forent eatholicam dde m refpicerenc . . . . quia tune Concilii fententia cffe t potius attendenda. Bulla . Béas novït.
encore, & le Décret de Grade» y ajoute
ceux de plufieurs décidons erronées ou contradiéloires de divers Papes. Tous les Ultra
montains des quatorzième & quinzième fiecles,
défendeurs du nouveau fyftême de la lupérioriré des Papes fur le Concile , déclaroient
fans peine qu’il pouvoir- arriver qu’un Pape
confacrât l’erreur par une définition , & que
le jugement du Concile étoit préférable au
lien. ( 1 )
Cet aveu fe retrouve jufques dans des
propofitions cenfurées à la fin du quinzième
fiecle , comme attribuans d’ailleurs au Pape
une autorité exorbitante : telle eft la propofition de Jean d’Angeli ; il fut condamné
pour avoir dit que le Pape ne peut être re
pris , quoiqu’il ajoutât cjttiL poavoit l’être en
cas d ’béréfie ( 1 ). AulTî les flatteurs des Papes
n’avoient d’autre reflource que de différer la
(1 ) Quatuordccimo & quindecimo Scculis non
modo Alliacenfem , Gerfoncm , Toftatum , 8c alios
pios fanélofque viros innumerabiles, fed etiam Joannem à Turre-crematâ ejufque confortes , qui Eugenio
IV adverfus Bafileenfem Synodum tanto fc ftudio adjunxiflent, id pro certo pofuifle quod à romano Tontifice falfa & erronea definiri pejfint, ejufque judicio
Concilii judicium anteponi oporteat. Befenf. Cler.
Gallic. tom. 1. part. 3. lib. 10. cap. 33 . p. 146.
(z ) In nullo Papa reprehendi poteft , nifi in ma
ter iâ h&refis. Propof. n . de Jean d'Angtli > cenfurie
en Sorbonne l’an 1481.
K ij
�76
tenue des Conciles , de difputer fui* la
canonicité de l’afièmb'lée, de s’attribuer le
pouvoir abfolu de transférer ou de di(Toudre les Conciles. Ils élevoient toutes ces dif
ficultés , parce que le Concile} reconnu par
eux-mêmes fupérieur dans les chofes de la
foi , auroic pu condamner comme autant
d ’erreurs ces deux nouveautés , dont l’une
élevant le Pape au-deflus des Canons & du
C on cile, à la réferve des caufes de la foi,
les rendoit maîtres de la difcipline de l’Eglile , Sc l’autre leur attribuent un pouvoir
fur le temporel des Rois. Les efforts par
lefquels la Cour de Rom e tentoit d’éluder
l ’autorité de chaque Concile en particulier,
étoient autant d’aveux de l’obligation d’obéir
à fes décidons fur la fo i, & conféquemment
de la faillibilité des Papes. La fupériorité du
Concile étoit donc la dermere digue qu’on
pouvoir oppofer à ce torrent qui alloit tout
entraîner. Elle fut enfin ébranlée -, les Papes
fe déclarèrent infaillibles 3 féduits par de per
fides adulateurs qui fans doute abuferent de
leur vertu meme, en leur faifant en vifager,
dans cette prérogative, un remede plus
prompt aux erreurs qui pourroient s’intro
duire dans l’Eglife.
On ne voulut pas voir que cette infailli
bilité des Papes ne peut s’accorder avec celle
qu’ils n’ont ce fie de refpeéfer dans l’E glife -,
77
que le concours de deux Tribunaux infailli
bles dans la Chrétienté , l’un compofé du
Pape &: des Evêques, l’autre du Pape fe u l,
ne fçauroit être adm is; qu’aucun de ces T ri
bunaux ne pouvant être vraiment tk propre
ment infaillible , qu’autant qu’il efi: fupérieur
à l’autre , il faut nécellairement opter ( i ) ;
que la fupériorité ne peut dès-lors apparte
nir qu’à l’Eglife , dont l’infaillibilité efi; cer
tainement révélée , & fait partie de la foi
enfèignée par les Papes eux-mêmes ; que
c’efi: à l’infaillibilité certaine de l’Eglife à
prévaloir fur l’infaillibilité au moins douteufe du Pape ; que celle-ci devient , par
le feul doute & par le défaut d’une ré
vélation reconnue , pleinement inutile aux
Chrétiens ( i J , infuffifante pour regler la foi
( i ) Tout le monde demeurant d’accord qu'il faut
qu’il y ait une fubordinarion , dès que l’on avoue
que le Pape n’cft point au - defïus du Concile, il
faut qu’il foit au-defTous , & fournis à fes déd
iions & à l’obfervation des Canons. Difcou',s du P.
G. du Parlement de Paris , prononcé dans l’Ecole du
Droit Canon
C iv il en 16 8i.
( t ) Quid fit dubia infallibilitas ne quidem intelligi poteft ; quô enim pertinet infallibilcm effe ,
qui non certô infallibilis agnolcatur ? Nam Chriftus in Ecclefiâ fuâ raie munus ordinariuin nemini
conceflcrit , nifi Ecclefiæ profuturum > atqui .profuturum non eft , qùod non ipfi Ecclefiæ reveletur,
vel non icà reveletur ut à Conoiliis atque à Pontificibus, motâ faltem quæftione , agnofei ac défi-
�qui fuppole un fondement afiuré ( i ) ; que
propofée comme certaine elle devient plus
dangereufe , en faifant dépendre la créance
commune de l’opinion d'un feul Pontife tou~
jo u rs acceffible aux foiblejfes de Phum anité (2),
& en expofam les fideles à prendre pour ré
glé de créance une décifion fautive ( 3 ) ;
que cette infaillibité fupprime au m oins, par
le fait & par le non ufage, l'autorité de l'Eglife & le jugement des Evêques , qui feroic
toujours prévenu , fuppléé , abforbé par le
jugement du premier d'entr'eux ; qu’elle dé
pouille les Evêques de la qualité &: des
fondions de juges de la foi , que la religion
nous oblige de reconnoître en eux , pour les
réduire à la qualité d'exécuteurs des Décrets
de Rome.
Une autorité qui fe déclaroit infaillible au
bout de quinze fiecles , devoit d'ailleurs avoir
une autre garant de fa prétention qu'elle-
niri queat : quod enim non fuerit ità revelatum ,
inrolutum potiùs quàm revelatum dixerim. Boffuet,
append. ad defeof. Cler. Gallic. lib. 3. c. 1 1 . p. 104.
(1) In caufis fidei judicium inniti debet infalli*
bili regulx. Gerfoo , de exam. doclrin.
(x) Omnis Pontifex ex hominibus afTumptus . . . .
& ipfe circumdatus eft infirmitate. Ad Hebr. c. 5.
1. 2.
( 3 ) Alioquin ftaret cafus in quo obligarentur
homines alfentire contra fidem. Gerfon, de exam»
doft.
79
même j <k ne pouvoit
que le Tribunal ancien
profeEè l'infaillibilité 3
veauté la condamnoic.
paux défenfeurs avoue
en réclamer d’autre
de l'Eglife dont elle
enfin fa feule nou
Un de fes princi
qu 'elle ne peut être
dém ontrée par aucun tex te de PE critu re ou
des Conciles ( 1).
L'infaillibilité mairquoit même de ce m îfërable prétexte , par lequel les Ultramon
tains veulent exeufer le non ufage du pouvoir
iiadireét : la prudence , difent-ils , en interdifoit l'ufage dans l'état de forblelîè des pre
miers tems. Mais rien n'empêchoit les Papes
de fe déclarer infaillibles, s’ils l'étoient réel
lement ? Pourquoi les Papes fufpendoient-ils
eux-mêmes leurs jugemens dogmatiques j u f .
cpWk la d é cifo n du Concile plén ier , ou jufqu'à
ce qu'ils fufiènt parvenus à la réunion des
fufFrages de l'Eglife difperlee , au confcm tm ent de toute la fra tern ité ( 2 ) > Mais que
peuvent les confidérations les plus fimples
(1 ) Neque immérité dixifle Duvallium nullos efTe
Scripturx locos, nulLa Ecclcfiæ décréta, quibus Pontificis five fuperioritas (îve infallibilitas dcmonftrecur. Defenf. Cler. Gallic. append. lib. 3. cap. 10. p,
s o i.
Il cire Daval. Part. 4. q. 7. £? 8.
( i ) Sr. Leon , Pape.
Qux per unanimitatem de fide ftatuta funt. Idem.
Sentcntias totius otbi Domini Sacerdotum. Paroles
du Pape bmplice.
�8o
contre la préoccupation du propre pouvoir?
elle prévalut enfin , & l'infaillibilité préconifée mit pour un tems à l'abri des foudres
de l’Eglile la prétention du pouvoir fur le
temporel ; elle parut même le confacrer dans
l'opinion de plufieurs Do&eurs catholiques
de divers pays : l’Inquifition , fous qui tout
tremble > étouffa toutes les lumières , & fit
taire la raifon ; la crainte parla le langage
diété par l’adulation.
Il relfoit une difficulté à vaincre : on oppofoit aux Ultramontains, que des matières
temporelles ne peuvent devenir l’objet d'une
décifion eccléûaftique ; que l’autorité du Pape,
en la fuppofiant infaillible , doit fe renfermer
dans fon partage , & que l’autorité purement
Spirituelle n’a plus de caraétere , lorlque fous
ombre de doctrine elle ufurpe la tempora
lité ; que les aéfes émanés des Papes en fa
veur de cette prétention , ne font point des
décifions, mais des entreprises.
Les Ultramontains ont franchi ce dernier
obftacle , d’abord en niant que cette auto
rité fait purement fpirituelle ( $c quiconque
lupprime cette addition effentiellc eft, qu'il
le veuille ou non , Ultramontain^. Pierre de
Cugnieres réduifoit tout à ce point -, il prétepdoit , cj.it Mr. Fleury , que la puiffdncc de
V fylife était purement fpirituellei Les Ultra
montains difoient encore que le Pape ne pou
vant
Si
vant errer , il eft le Juge infaillible des bor
nes de fon pouvoir ( i ) , & que le doute qui
confifile à qualifier de fpirituelle ou de tem
porelle une matière conrroverfée , forme une
quefifion route doctrinale.
Par ce moyen , le pouvoir fur le tempo**
rél , & l’ufage même de ce pouvoir, fonc
également fournis à la décifion infaillible du
Pape; c’eft le moyen court de fpiritualifer touc
le tem porel, fk de forcer lès confidences fuperflitieufes à déférer à tout genre d’entreprifes;
Rien n’d J plus o u tré, mais il faut l a v o u e r, rien n’eft plus fyftématique. L ’aurorité du Pape ne pouvoic prévaloir fur le tem
porel , qu’en y étendant fon infaillibilité. La
puifîànce féculiere peut régir l’ordre public
fans être infaillible , la raifon & la prudence
humaine fuffilent pour donner une réglé à
tout ce qui n’eft que temporel : mais l’auto
rité fpirituelle ne pourroit agir en fouveraine fur des objets à raifon defqucls elle ne
feroit pas- infaillible, & fa fouveraineté dans
l ’ordre de la religion eft fondée fur fon in
faillibilité ; par-tout ailleurs elle ne pourroit afpirer à captiver les efprits , ôc à pré-
( i ) Attende poflrcmo dubitationem de poteftate
Papa- , an ad temporalia fe extendat , non efle dubirationem de re ten porali , fed de re fprituaït &
fupernaturali. Bel!arm. de pot eft. fumm. Font if. in
temporal, c. 31. p. 16 0 ,
L
�«1
valoir fur la puiflance publique : de-là la nécellicé où l'on s'eft vu d’appelleu l'infaillibilité
du Pape au fecours de l'ufurpation temporelle.
La plûpart des Ultramontains ont pour
tant laide aux Souverains la redource de contefter , non le fonds du pouvoir temporel ,
mais l'application de ce pouvoir aux faits
particuliers, de prétendre que la religion du
Pontife aéré furprife, 8c de propofer à cet
egajrd des doutes refpeétueux. Plulieurs ont
txclu de l'infaillibilité les queftions qui font
du rellort de la politique , de la rai (on 8c
de la prudence ; mais lorfqu’il faudra détermi
ner en dernier reffort, fi l’objet décidé ou
révendiqué par le Pontife èfl: civil , politi
que ou mixte , à quelle autorité faudra-t-il
s'en rapporter ? D ’ailleurs ceux même des
'Ültramomains qui limitent l’infaillibilité aux
objets de la dotbrine cr des mœurs , enfeignent
qile Dieu ne peut permettre cjue le Pape abufe
de fon pouvoir, au point d.'apporter de grands
irctubles (i). Tous s'accordent encore à dire
que le Pape ne peut errer en abrogeant com
me manvaife , une loi qui fer oit bonne (2.) ;
par ce feul mot toutes les loix civiles font
(1 ) Ità ut grave aliquod damnucn inferret Ecclefiæ per abufum poteftacis. Suarez. , de legibus , L
4. c. 9. §. <>• p* 2-4 1 »
( t ) Pontifex non poteft errare abrogando legero ,
Tel feprobando tanquam malum quod bonum cft.
Suarez, de legibus , /. 6. c. 35. §. 7. p. 445.
s5
de nouveau compromifes : Pentreprife fera
donc toujours refpectée -, & quand elle ne feroit qu’un fujet de perplexités pour les conf.
ciences timides , 011 fçait aflèz qu’en matière
d'autorité fouveraine 8c d'obéilTànce , le doute
feul fait tout tourner à l'anarchie ( 1 ) , Sc ne
p eu t, comme l'ont obfervénos Peres,exiftery^^
cogitation d'injures (2). Mais le d o u te, après
to u t, auroit-il jam ais, dans le fait, d ’autre
J u g e , que celui en qui le fonds du pouvoir
infaillible feroit une fois reconnu ? il n’en coùteroit au Miniftere de Rome qu’un B ref con
firm atif, ou explicatif du premier fur lequel
le doute fe feroit élevé.
Cependant pour ne rien omettre de ce qui
pouvoir rendre cetre doétrine funefte 8c d'un
ufage continuel, on la fortifia par ces autres
maximes qu'on a tenté d ’accréditer jufques
dans notre France , que l’obéifïànce abfolue
( 1 ) Jam fi refpondeant. . . . tamen revocari pofie
in dubium in pardcularibus. fa<ftis judic.ii æquitatem , nihilo fecius imperia flu&uabunc , & qu-ç
turbæ futurre fint nemo non vidée ; cum ubi
regia nucat auftoriras , extremum periculum , ipfbmque , quo nihil exidofius , anarchiae malum,
reipublica: immineat , auc podùs adfic. D efenf
Cler. Gallic. tort). 1. part. 1. lib, 1. fttt. 1. c. x*
94(x ) Remontrances de MM. les G. D. R. fur la
harangue du Cardinal du Perron. Libertés de l’Eglift
Gallic. tom. 1. p. 59.
L ij
�due au Pape ci ans les chofes douteufes
que b foum ifïiôn, même celle du cœur &
de l’e fp rit, eft due à l’autorité fur les objets
à l’égard defquels l’infaillibilité peut être conteftée. On y a même propofé dans les fameufes thefes de C lerm ont, l’infaillibilité dans
les faits non révélé^ , opinion dont les plus
grands Evêques du dernier fiecle dévoilèrent,
par une Lettre écrite à Louis le G ran d , le rap
port intime avec les prétentions fur le tem
porel (z). Tant que l’infaillibilité fera tolé
rée , le pouvoir fur le temporel ne fera point
profcrit : cette prétention rendue fî odieufe
par les guerres de religion, auparavant in
connues dans le monde, ne fubfifte plus au
jourd’hui que par l’infaillibilité.
Les Ultramontains ont cependant été frap
pés du reproche fait à leur doétrine , de renr
dre un feul homme l’arbitre des loix de tou
tes les Nations, & de l’accabler d’un fi pé-
nible fardeau : mais ils ont tourné ce repro
che au profit de l’infaillibilité. Ils ont répondu
que ce pouvoir étant confié à celui qui ne
peut e rrer, il ne fçauroit être un fujet d’allarmes , &c voici la progrefïion de leur délire.
Dieu n’auroit point, difent-ils, pourvu à la
sûreté de fon E g life, s’il n’avoit pas établi
une puifiance qui contînt les Rois dans leur
devoir. Ils s’objeélent à eux-mêmes que les
Pafteurs , qui pris féparément peuvent errer ,
auraient eux -memes befoin d’une autre puiffance
c/ui les réprimât , mais ils mettent ordre à
to u t, ék l’infaillibilité du Pape eft le grand
moyen que la faacjfe de Dieu a choifl, & qui
fait difparoître tout inconvénient (1). Ainfi
par un cercle vicieux l’infaillibilité, qui étoit
venue appuyer le pouvoir diretft , s’eft étayée
elle-même de ce pouvoir , elle le compte par
mi fes preuves : Dieu n’auroit point chargé
une autorité faillible d’un pouvoir auftï vafte,
elle eft donc infaillible.
( i ) Si pendebas anipii & dubitabas car in re dubia rc judicem conftituifti . . . . ccrtè Deus in rébus
débits £5* obfcuris rcmittit homines ad Saccrdotcm.
(1 ) Non effet fufficienter proyifum FccLfîx , fi
non effet in câ poteftas quae Reges & Principes poffet in officio continere. . . . Dices hoc argumento
probaretur neceffariam effe ali^m porefiacem qux fpirituales Panores contineat in officio ; nam etiam
iIIi errare poffunt . . . . & ideo altiori modo providit
Chriftus Ecclefîæ . . . . nam quoad do&rinam & prxcepra morum talem affiftentiam fuo Vicario promifit ,
qt in his errare non poffet , ità ut grave aliquod
damnum inferret Ecclcfï.e pet abufum poteftacis. Sua
rez, , de legibus , lib. 4. c. 9. ». 6.
Bellarm. de potef l . fumm. Pont if. in temporal. c.
jp. t6o.
j i
.
( i ) Ç’eft une dourine contraire aux principes de
la religion, aux intérêts de Votre Majefté, & à I4
fureté de votre Etat. Lettr. de dix - neuf Evéq. à
Louis XIV) rapportée dans l'ouvrage de Gerbais , de
faufis majoribus. Ce traité a été compofé par ordre
j u Clergé.
�U
L a raifon la moins éclairée auroit au
contraire reconnu , que l’aflèmblage de tous
les pouvoirs fur une feule tête n’eft que
plus formidable ; que tout eft en péril,
fi un feul homme préfide au foin de tou
tes les chofes divines ôc humaines ( i ) , ôc
les décide avec une autorité irréformable
par l'infaillibilité, ôc irréfiftible par l'attribu
tion d’un pouvoir temporel. Mais cette réu
nion des pouvoirs e ft, aux yeux de l’Ultramontain , un grand myftere ; on donne com
me le contre-poifon du pouvoir indireét,
l’infaillibilité qui en fait la force & le princi
pal danger -, car que ne pourroit entrepren
dre , ôc que ne pourroit pas obtenir des peu
ples, une puilfance réputée infaillible, ralfurée ôc enhardie par le fentiment intime de cette
infaillibilité, expofée à l’adulation qui ftit
■ partout la pttiftance , comme Vombre le corps (i).
( i ) Quod fi cogiterons hujus doétrinæ autores
quàm fummum Pontificem extollant, quàmque ab
omni poteftate etiam Concilii abfolvant , tùm vero
inrelligemus qualc fit illud ipiperium , quod univetfum orbem in temporalibus æquc ac fpiritualibus
complc&atur > & de omnibus imperiis atque negotiis fummâ & indeclinabiii auétoritate decemat. Defenf. Cler. Gallic. torn. i. part. i . lib. i. feft. i. eap.
i . p. 94.
( 1 ) Principatum orancm fequitur adulatio. Con~
cil. Cardinal, jubente Paulo U l , exhibitum amt
M 3*.
..
N ih il eft cjttod credere de fe
JSlon pojftt, cum landatur^ Dis aejua poteftas.
Pour le bonheur des Nations , la piété des
Pontifes , éclairée par les nouvelles lumières de
leur fiecle ôc par les malheurs des fîecles précédens, a fulpendu le cours des grandes entreprifes fondées fur cette doétrine ; elle leur
•infpirera le délaveu de la doétrine même ,
unique moyen d’établir la sûreté des Nations
fur un fondement folide.
Dans cet état des chofes , les plus modé
rés des Ulcramontains font devenus les plus
dangereux ; ils ont atténué la doétrine pour
la conferver , Ôc feignant d adoucir le pou
voir ind ireét, ils l’ont comme confondu dans
l’infaillibilité par un nouveau détour le plus
adroit de tous.
Le Pape , difent-ils, lie dépofe pas les R o is
par voie de puiflànce, il déclare feulement
qu’ils; font au cas d’être dépofés ; il ne délie
pas les fujets du ferment de fidélité, il les
déclare déliés. C ’eft dans ce fens qu’ils expli
quent les exemples les plus révoltans des dé
portions des Souverains.
Un texte de Grégoire V II ajouté à la com
pilation de G ratien , avoir, en rapportant le
fait de la prétendue dépofition d’un R o i ,
employé le terme Depofttit (1) ; la gloflè adou-
( 0 A regno depofnit. Can. Alitts, caaf. 15. qtt. 6 *
�88
tit le mot qu'elle réduit à une limple approbation donnée pa le Pape à la depofiri n , drponentibus conje nfit ( i ) ; d'autres afîoibli(Tènc
encore le mot , 3c fubftituent le terme de (im
pie avis à celui de confcntcment ou d'approbatïon. On veut donc que le Pape puiflè , dans
le cas d’une préccndue atteinte portée par le
Souverain aux droits de la religion , être confulté par les peuples fur le projet de dépolîtion , comme premier Cafuifle de la, chrétienté
(z) , & comme remplilïànt le miniftere le plus
capable de diriger en pareil cas une Na
tion. Mais le recours au Pape fur un tel ob
jet feroit déjà une rébellion confommée de
la part des iujets, Sc comme l’a dit le Mi
niftere public , une confultat ion criminelle ( 3).
La Ligue ne fut bien fortifiée , que lorlqu’oiï
fut parvenu à obtenir de la Cour de Rome
une Bulle approbative qu’elle avoir long-tcms
refusée , & ce n’eft que du préjugé de l’in
faillibilité & de l’obéiflancc aveugle, que cette
Ligue , l’opprobre des derniers ficelés > em.
prunta l’audace de fe nommer la fiainte
'Union.
L ’Ulo amomain
(1) Dicicur depofuiife qui deponentibus confcn-
lît- Cloff. ibid.
(1) Origine de la grandeur de la Cour de Re
nie par l’Abbé de Vercoc. Pag. i£.
(3 ) Difcours du P, G. du Parlement de Paris à
l'A (Tetablée de Sorbonne en i 6$t.
89
L ’Ultramontain veut encore que le Pàp<?
puille s’exciter de lui-m êm e, & prononcer ,
non en m aître, mais en Juge y qu’il y a lieu
à la dépofition , & que le ferment des peu
ples a ce fie d’obliger. Bellarmin â expliqué
le moyen fi dangereux d’une déclaration ju
diciaire fi) fans renoncer néanmoins au droit
de dépofer par voie de puiffance, & le R o i
hérétique, & même le R oi inutile.
Le Pape peut enfin ( ôc c’eft ici le dernier*
fubrerfuge des Ultramontains) , le Pape p eu t,
fans déclarer le Prince déchu de la Couronne
ou les fujets abfous de leur ferm ent, faire
dériver tous ces effets de la feule imputation
d’héréfie , ou de l’excommunication lancée
contre le Souverain , & de fa négligence à
pourfuivre fabfolution. Mais pour rendre im*
pofifible la demande de l’ abfolurion, ces for
tes de Brefs exigent, comme condition, la
renonciation aux droits de la Couronne , &C
la révocation des loix que le pouvoir fur le
(1 ) Difpcnfac Pontifex in votis & juramcncis quo
rum folutio de jure divino efl . . < . non quod
fit ipfe limer jus divinum , fed quia interpretatur
Ii)co placerc ut in tali vel tali.cafu juramentum
aut vocum relaxerur. Bellarm de potefi. famm. Pon~
tij . in temporal, c. 1 1. p. 104.
Déclarât obligationem & promiftîonem fui (le vel
faétam effe illiciram , ut cum abfqlvit populos 4
juramento fîdclitatis przftico Prinçipi hacrctico , vel
qui pofteà in hærefîm lapfus eft. i d e m , c. 17. p. 137.
M
îî:
�9°
temporel aura rejettées fous le nom du pouvoir des Clefs.
L'imputation d*héréfie , incapable de faire
perdre les droits civils 8c fur-tout le droit
de régner , devient cnluite fi arbitraire dans
l'application, que ce prétexte fuffiroit pour
rendre toutes les loix civiles 8c même toutes
les Couronnes chancelantes. Il aboutit enfin
à faire d’une matière temporelle un point d’hcréfie [ i ] , à traveftir des entreprifes caraétérifées ou des prétentions exorbitantes en ac
tes de religion , à prétendre que tout ce que
le Pape fait contre un R o i hérétique eft à
l’abri du foupçon d’in ju fice [ i ] , &; à mettre
fur le compte de l’Eglife même ces jugemens
que le Pape a , dit-on, prononcés ex Cathedrd [ 3 ] .
( i l Hxrefis nomen tam diffuse patet ut ad omnem caufam lata ioterpretatione facile dcducatur, «juo
ambiguo verbo involvi fublimes Poteftates publica
tranquillitas non finit. Defenf. Cler. Gallic. part. 1.
lib. 4. c. 18. p. 363.
Sic à tempérait lite ad hxrefis quxftionem controverfia deducitut. id. tom. i . part. 3. lib. 10. cap. 30.
( r ) Qux fufpicio injuftitix fuboriri poteft. Bellamy
de potefi. fumm. Pontif. in temporal, c. 31. p. 16 1.
(3 ) Id fccerunt ex cathedra in Concilio . . . .
qui dicit non e(Te obediendum Vicatio Chrifti ità
præcipienti , univetfam condemnat Ecclefiam. Bdiarm. de potefi. fumm. Hontif. in temporal. r.j3i. p.
a jï.
91
Ce nouveau détour, qui diminuoit en ap
parence le pouvoir fur le tem porel, l'a ren
du plus redoutable en le rapportant à une au
torité facrée. Le pouvoir temporel étoit plus
choquant 8c moins capable de faire illulion ,
préfenté fous fon véritable nom 3 il eft devenu
impofant 8c plus propre à fubjuguer les confciences timides , lorfqu'il a femblc fe borner
à déclarer 8c à interpréter la loi divine. Il
enleve aux Souverains ces frivoles reflources ,
que l'Ultramontain leur faifoit valoir en leur
permettant d'alléguer que le Pape a pu être
furpris dans le faic particulier ; il a parlé
comme interprète de la loi d ivin e, 8c tout
eft dit.
Si l’on cVaint de révolter les efprits, en dé
clarant la dépofition d'un Souverain , on fe
contentera d'abroger des loix , 8c de les décla
rer contraires au droit divin 3 on cachera le
pouvoir attribué au Pape de s’approprier une
matière civile par voie de puiftànce , 8c l'on ne
fera valoir que l'autorité, qui déclare que la
matière efi de foi fpirituelle , 8c qu’elle n'a pû
être ufurpée par le P rin ce, fans mettre la
main à l'encenfoir. Les deux maniérés d'ufer de ce pouvoir , conduifent également au
but d'ufurper 8c de troubler le régime tem
porel 3 celle qui agit par voie de puiftànce
y arrive plus directement, mais moins furement 3 la fécondé y parvient avec plus d'art
M ij
�ç,l
8c plus de force réelle , parce que la décifion
•
93
eft roujours infaillible. Je dirois volontiers
au premier Romain , auteur de ces fubtilités : '
C ’eit donc vous , qui par tous ces détours
avez appris à Rome le moyen de reconqué
rir l'U nivers, de redonner des loix à tous les
peuples de la terre , de de (ubftituer un nou
veau code uiiiverfel à celui des Cefars :
Tu , regere imper 10 populos, Romane , me7nento :
H a tibi erunt artes.
Ce n’eft pas moi , Meilleurs , qui applique
aux Ultramontains ce vers de V irg ile , ils ont
eux-mêmes ofé fe l’approprier, Se n'ont pas
vu qu’il ne peut fervir qu’à peindre la gran
deur de leurs projets 8c l’artibce de leurs mo
yens.
Le même détour qui fert à établir la fupériorité du Pape fur le temporel , eft em
ployé à établir l’indépendance des Clercs &
de leurs biens de toute autorité civile. Le
Pape a pu indifféremment, ou les exempter
de fon autorité, ou les déclarer exempts de
droit divin ( i ) ; 8c fi l'on demande pour
quoi les Eccléfiaftfques ont réclamé fi tard
cette indépendance, pourquoi ils ont reçu
cette exemption comme un privilège 8c lin
bienfait, on répondra encore , vires non fuppetebant, les faints P ères s'efforcaient d’intro
duire cette dottrine peu a peu (\). Quelle in
jure pour les Peres ! 8c que faine Ambroife
étoit éloigné de cette duplicité , lorfqu’il difoic : Toulez.-vous n’étre point afujetti a Cefa r , ne pojf tdez. aucun des biens de ce monde ;
f vous voulez, ne rien devoir au Roi de la
terre , abandonnez, tout tir fuivez. Jefus-Chrif.
Depuis que l’infaillibilité croit avoir confommé l’ufurpation du pouvoir tem porel,
on voit dans les Décrets de Rom e ces deux
pouvoirs marcher toujours enfem ble, de à
l’appui l’un de l’autre. Le pouvoir fur le
temporel ne s’eft pas feulement glifîe dans
les claufes des Bulles doéhinales, mais dans
les cenfures, où des propofitions rélatives
aux points les plus importans de nos Liber
tés, ont été plus d’une fois confondues avec
des propofitions concernant la doéhine 8c la
morale , comme également foumifes à la décilion infaillible du P ape, 8c comme dignes
de partager le même foupçon d’erreur.
Par une réciprocité de conféquence, tous
les Brefs de réclamation , ou d’exercice du
pouvoir tem porel, empruntent le langage
d octrin al, 8c fe .produifent fous les aufpices
Ci) Potuit & volait fummus Poncifex illos ncitntre , Aut jure divino exçmptos declarare. idem , c<
( i ) Sanéti Patres paulatitn eàm ( exemptioncm )
explicare atquc introducere nïtebantur. idem , c. 4.
35» b
b Mî-
�94
95
d une autorité irréformable. Le pouvoir d'a
broger les loix civiles y eft toujours fondé
fur le droit divin , -toujours référé à la tra
dition des Clefs faite à St. Pierre Sc à Ces
fuccefteurs , aux droits, aux devoirs attachés
à la charge p a f orale ( i ). Les loix civiles qu’on
y attaque y font toujours mifes en opposi
tion avec les oracles infaillibles de l’Eglife,
dont on veut que les Bulles des Papes faffent partie. L'excommunication y eft pronon
cée , non comme une peine arbitraire ou
nouvelle , mais comme une peine néceftàire
& déjà encourue. Ces loix temporelles y font,
d’une part, annullées par un a£te de plein
pouvoir , & de l'autre , déclarées, au nom de
Dieu même, nulles d'une nullité vifcérale.
Les mêmes Brefs diftinguent les deux pou
voirs quant à leur fonétion propre , pour que
chacun d'eux trouve fa place, & les raftèmblent pour affurer le coup qu'on veut porter.
C'eft l'autorité de fuprématie fur les Légiflateurs chrétiens, qui dans ces Brefs remplit
la fonébon de cafter Sc d'abroger , non feulement la loi qui eft accu fée de nuire à la
religion , mais la loi accu fée de nuire à l’in
térêt temporel des Eccléfiaftiques d’un Ro
yaume, à tous leurs privilèges, au droit que
la Cour de Rome voudroit s’attribuer d'appeller de toutes les parties du monde les
îujets pour les faire plaider devant fes tri
bunaux , ou au droit d'enrichir les étrangers
de la dépouille des autres régions , en les
nommant aux bénéfices. L'autorité de décifion
ô c de déclaration vient confirmer l’ouvrage
de la première; elle lui fert de garant; elle
en confacre le principe de l’application ; elle
aftùre le difeernement de ce qui dans les
loix des Princes a paru u tile, ou nuifible au
fàlut des âmes ; de ce qui eft encore plus
tranchant, elle définit l'incompétence de la
puiftance civile fur la matière controverfée
qu'elle enleve à la temporalité ; elle conftate
la nullité préexiftante de la loi abrogée , Ion
oppofition au précepte divin, & à la conftitution de l'Eglife. L'entreprife acquiert ainli
tout- le poids d'une décifion définitive, q u i
revendique la foumiffion la plus entière. On
ne pourra plus s'y refufer , fans ébranler
les fondemens de la religion, & fans aggra
ver fur foi-même les cenfures déjà encou
rues. Tel eft le fruit de ce m élange bizarre d e
m otifs Spirituels & d ’in térêts purem ent tem porels
( i ) , qui s'eft rencontré plus d'une fois dans
les entreprifes de la Cour de Rome. Tel eft:
( i ) Ad ea remedia quæ paftoralis offiçii noftri
ratio poftulabat,. . . Bref.
( i ) Origine de la grandeur de. Cour de R om e
par l’Abbé de Vertot, p. n .
�le ftyle de ces fortes de Brefs, Sc notamment
de celui que de vaines apologies nous for
cent d’analyfer : on y a raffemblé les pré
cautions les plus fufpeétes, & toutes les claufes abufives qui font difperfées dans les mo• deles.
En fuivant la méthode ufitée, le Bref a
joint à l’appareil d’un pouvoir direét exercé
lue la législation civile , l’appareil du pouvoir
vraiment fpirituel. On y voit les deux auto
rités féparèes quant au principe & à la fonc
tion propre à chacune d'elles , mais réunies
quant à l’effort.
Le pouvoir fpirituel du Pape y eft d’abord
exprimé en des termes qui infinuent en fa
faveur la fupériorité indéfinie fur l’Eglife univerfelle , qui n’eft en d’autres termes que
l’infaillibilité lorfqu’on n’en excepte pas com
me autrefois les caufes de la foi. Le Bref
infinue aufft la jurifdiétion immédiate de
Rome fur les Eglifes particulières , par la
claufe motu propno , Sc par d’autres encore
plus exprefiès; cette prétention part des mê
mes fources, Sc fait dériver du Pape la jurifd iâion des Evêques. ( i ) Le Bref étale enfin
la
( i ) Dicendum eft hanc poteftatem legiflativam
non dan immédiate a Chrifto, fed per fummum
Pontificem , ncque efle de jure divino , fed de humano. Suarez. , de legibus, lib. 4. c. 4. n. 6. p. 114.
97 plus
la prétention encore
droit de propriété ou
de la Cour de Rom e
des Eccléfiaftiques, Sc
décriée , d’un
de domaine éminene
fur tout le temporel
généralement fu r leurs
d roits & leurs biens, ( 1 )
Pour donner plus de force au B r e f, on
déclare qu’il eft intervenu du confeil 6c mêfne du confentement de quelques Cardinaux,
(*)
Le confentement des Cardinaux que les U l
tramontains modernes traitent de luperflu ( j ) ,
de même que leur confeil , mais que les pre
miers Ultramontains
regardoienc
comme une
_
O
condition nécelïaire pour rendre la déciûon
infaillible, 6c fans laquelle on ne peut jamais
attribuer une décifion au Sc. Siégé ; ce con
fentement fi négligé dans les derniers tem s, Sc
(1 ) Nos qui ex commifli nobis divinitùs paftoralis muneris debito , ccdpftafticx libercar\s vindices , neenon omnium Romanæ , aliifque inferioribus
Ecclefiis , auc quibufve perfonis & ecclefiafticis bonis
compctencium jurium aft'yrtores in terris à Domino
conftituti fumus. . . . Bref.
(1) Motu proprio , ic ex certâ feientrâ \ ac ma*
turâ delibetationc habita cum nonnullis Ven. Fratribus noftris S. R. E. Cardinahbus , de corum confilio
Sc aftenfu , & c. Brcf.
(3 ) Cmum eft in folo Pontifice efle poteftatem
abfolutam fertndi leges , idcpque pofle valide illas
ferre fi»e confenfu & fine coajfiio Cardinaliuin , jicèt
ex honeftate ac decentiâ id regulariccr non facia;.
Suarez. , de legibus , lib. 4. e,
3. $. J4.
p. x i),
N
�9$
meme dans des Bulles générales où il étoic indifpenfable , eft allégué dans un B ref de ce caraétere , pour lui concilier le crédit que don
ne l'aveu du facré College. Nous foinmes
bien perfuadés que le Sénat refpeétable de
l'Eglife de Rome n'a point de part à celui-ci;
<qu'il n’imitera jamais les Cardinaux qui mu
nirent de leur foufeription la Bulle de Paul
IY de 1 5 5 S j dont le nouveau B ref renou
velle en partie les principes , & que fon avis
( s'il étoit demandé ) feroit conforme au fa
meux confeil de réformation donné par les
Cardinaux à Paul III.
Les Edits font accufés par le B r e f, d'oppolidon aux loix de l’Eglife & a [es plus
faintes loix ( i ) , aux Conciles généraux ,
aux faints Décrets ( i ) , aux Conflitutions apojloliques ( 3 ) , que la prévention pour
l'infaillibilité du Pape place ici au même
rang tk éleve au même degré d'autorité que les
faints Décrets. Ces Edits font cenfurés par
les notes atroces d ’iniques , de reprouvés, de
(x) Ipfas denique fandiflimas Ecclefiæ Ieges, inftirma & poteftatem roanifeftè lardant & violent . . . .
Bref.
(r) Nocnon generalium Conciliorum decrctis , facrorum Canonum difpofit'onibus , contra violacores
ccclefiafticæ libertatis. . . . Bref.
f (3) Et eorumdcm romanorum Pontificum prardecefforum noftrorum conftitutionibus . . . . generalium
Conciliorum decretis, & apoftolicis conftitutionibüs .. . . Bref.
téméraires, donnés par un attentat pu?ii]j
( 1 ) pernicieux, calomnieux , t endans au fehifme , féparans le troupeau du Pafleur , oppri-,
mans la jurifdittion ecclcfaflique, deftruétifs
de la hiérarchie , rendans l'Eglife cfclave,
je t tans les âmes , dont le Chef de l'E g life doit
un compte rigoureux a D ie u , dans les plus
grands périls, tendans à la ruine de ceux qui
ont obéi a ces memes Edits , & même de ceux
qui ne s'y oppofent pas ( 1 ). Le peuple n'efb
pas feulement difpenfé d ’obéir , il efi tenu de
défobéir ; ôc tel eft en effet, félon l'Ultra-
(1) Omnino nulla , irrita, invalida, iniqua , injufta > damnaca , reprobara , inania , temeraria , &
à non habentibus poteftatem damnabilicer attentata. . . . Bref.
(1) Edidum . . . . coutumcliofum atque calumniis
refertum , deindè vero perniciofum atque tendens
ad fchifma , quod Chrifti fidèles â fupremo Ecclefiæ
Capite , oves à Paftore evertere , & quafi feparaie ftu-'
det, ecclefiafticam jurifdidionem opprimit, & fane
tiftïmè ftabilitam hierarchiam infringit, quod Eccle
(iara Dci , quæ libéra eft , facit ancillam . . . . tùm
etiam in ipforum Magiftratuum , Judicum , Ofticialium , aliorumque tàm mandantium quàm exequentium , aliifque favorem & auxilium quoquo
modo præftantium , aut approbantium , & cnm
poftïnt , non impedientium , nec corrigentium pernicicm , ac proptereà in fcandalum plurimorum ten
dant , & Chrifti fidelium animas , de quibus diftridam
Deo reddituri fumus rationem , in graviftima pericula
conjecerinr , &c deplorandis malis involvere pejgant...
Bref.
N ij
�IOO
•
•
tnontain , le pouvoir de tout Décret émané
de Rome ( 1 j. On déclare, au nom du Pon
tife , qu^’il ne pourroit ga rd er un plus long fi-
len ce fu r une f i violen te attaque fa it e a l’Eg l i f e , fans en trahir les droits & la lib e r té ,
fans fie rendre coupable d ’une défertion honteufe
de la caufe d e Dieu ( i ) . Qu'auroit-on dit de
plus contre un Edit qui violeroit la foi
chrétienne , ou qui déclareroit la perfécution?
Faut-il que tout Edit qui reftraint des privi
lèges temporels , ou qui arrête le pouvoir
arbitraire, prenne à des yeux prévenus la
forme du Type de Confiant & des loix por
tées dans des fiecles d'erreur ?
Croira-t-on qu'un aéte , dont le fonds &
le ftyle même font pleins de hauteur & d'a
mertume , foit donné comme le devoir indifpenfable de la fer v itu d e apoflolique ( 3 ) >
Ce n'eft point ainfi qu'eût parlé le Pere com
mun des fideles-, il fçait que c ’efi par les fa its
bien plus que par les p a roles, que le C hef v i(1) Non folùm non tenetur populus illi parcre,
fed tenetur non parère. Bellarm. de potefi. fumm.
îonttf. in temporal, c. 31. p. 1^7.
( x ) Ne in tantâ Ecclefiæ oppugnatione diutiùs
Tilentes , otiofi ac dcûdes . . . . prodiræ ecclefiafticae
libertatis, defertæque rurpiter Dei caufe , neenon
JKgligentiæ in tuendis ac defendendis hujus apoftolicæ Sedis juribus , rei eflficiamur. . . . Bref.
( 3) Ne . . . . incumbcnti nobis apoftolicæ fervitutis
officio deefle yidcamur.. . . Bref.
IOI
fible de VEglifc fie m ontre dign e du titr e - d e
fe r v ite u r des fer v iteu rs de D ieu , de ce titre
qui place le centre de la charité Ôc de l'hu
milité chrétienne au faite de la grandeur fpirituelle : S ervorum D ei f e r v u s , non verbo f f e d
opéré & v erita te.
Le prononcé du B ref déploie encore trèsdiflinélement les deux genres d ’autorités ; l’une
de décifion Sc de doctrine, q u i, dans l'ordre
de la religion & du falut , déclare que nul
des fujets n'a ni d û , ni pû reconnoîrre le
pouvoir des Edits : cette première autorité
juge & décla re , déclarant us ( 1 ) , c’eft le point
de doélrine & de confcience, c'efl: l'autorité
Spirituelle qui cenfure &c réprouve avec l'in
faillibilité attachée à fon caraélete : l'autre
de puiflàncc direéte, qui fu r abondam ment, &c
pour le feul intérêt du pouvoir fur le tem
porel , caffe néanmoins & abolit , en tant que de
befoin , ces mêmes Edits, quoique déjà déclarés
nuis de droit divin. Cette fécondé autorité ne
déclare pas , elle v e u t & ordonne , volu m u s
& m andamus ( 1 ) ; c’efl: dire aflèz ouverte-
( 1) Præfata omnia & fingula Edifia . . . . omnino
nulla . . . . nu 11inique roboris ac momenti , vcl effîcacia? elfe , & ab initio fui (Te , & perpetuô fore ,
neminemque ad illorum obfervantiam tencri , imo
nec ea à quopiam obfervari pofle , vcl potuifle . . . .
tenore præfentium declaramus. . . . Bref.
( z ) Et nihilominiis ad majorem & abundantio-
�IO3
10 2
ment que fi les Edits ae font point nuis de
droit divin , Rome n’a pas moins le droit
de les abolir ; qu’elle peut appliquer à Ton
pré , cette puiflànce alternative qui s’empare
de la même matière , tantôt en la déclarant
fpirituelle , tantôt en fe la réfervant quoique
temporelle ; qu’elle jouit du pouvoir direél
qui s’exerce fur des Edits même qui ne feroient ni incompétens , ni rendus par entreprife fur l’autorité fpirituelle , ni contraires
à un intérêt direét Sc prochain de religion.
Enfin l’une & l’auire autorité prononce &
agit fous la dénomination répétée Sc ap
propriée à chacune d’elles , de pleine puif.
fance \ c’eft la plénitude de puijfance qui
dans le même Bref d’abord déclare nuis , Sc
enfuite annulle , abolit les mêmes Edits [ i ] ;
les deux voies d’abrogation Sc de déclaration
de nullité font gravées fur le frontilpice du
rem cautelam , & quatenfis opus fit , ilia omnia 8c
fingula . . . . damnamus , reprobamus, caflamus , irriramus, annullamus & abolemus, viribufque 8c cffedu penitùs & omninô vacuis ; & pro damnatis ,
reprobatis , revocatis , calfatis , irritis , nullis , invalidis 8c abolitis , viribufque & effedu penitùs &
omnino vacuis , femper haberi volumus 8c manda*
mus. . . . Bref.
( i ) De apoftolica; poteflatis plenitudine . . . . tenore præfentium dedaramus . . . . 8c nihilominùs.,.,
poteflatis plenitudine.. . . cafTamus.. ..abolem us....
& pro caflatis . . . . abolitis . . . . haberi volumus Sc
mandamus.. . . Bref.
Bref [ 1 ] ; le plein pouvoir au fpirituel Sc au
temporel eft l’annonce du titre Sc le réfultat
du Bref entier.
C ’eft par le même cfpric, Sc pour appli
quer tout l’effort des deux pouvoirs, que le
B ref enjoint, du ton le plus abfolu , la défobéijfance , foit aux Eveques , foit aux L a ï
ques ( 1 ) ; que la même excommunication,
qui d’abord eft déclarée encourue par des ma
ximes de droit certain & notoire, cxplorati
ju r is ( 3 ) , eft d’une part référée aux cenfures de la Bulle ln cœna D om ini, ou des au
tres Bulles confirmatives du pouvoir fur le
tem porel, Sc de l’autre ,aux cenfuresdes faints
Canons Sc des Conciles généraux ( 4 ) , qui
( 1 ) Littcrae in forma Brevis , quibus abrogantur 8c cafTancur , ac nulla 8c irrita declarantur nonnulla E dida, 8cc. Bref.
(z) Quocircà Ven. Fratribus F.pifcopis . . . . prcecipimus Sc mandamus , ne Edida . . . . hujufmodi exeeutioni mandari permutant ; omnibus verô . . . . tara
laids , quàm EcclefiaOicis five fircularibus , prohibemus , atque interdicimus , ne prarfata Edida . . . .
quovis modo exequantur , y c I iis obtemperenc , Sic.
Bref'
,
.
..
.. . -
(3) Casterum , cùm notorii Sc cxplorati juris fit »
eos omnes . . . . cenfuras ecclcfiafticas . . . . eo ipfo
jncurrifTc , Sic. Bref.
(4) Cenfuras ecclefiafticas à facris Canonibus ,
generalium Conciliorum decretis, 8c apoftolicis Conf*
titutionibus , ac præfertim litteris . . . . Coenæ Do
mini , fingulis aanis 8c promulgari folicis, infli<>
Cas. . . . Bref.
�104
n’ont trait qu’aux objets fpirituels , ou qui
n’ ont été déployées pour des objets d’une au
tre nature > que du confentement au moins
tacite des Souverains.
L a prétention d’obliger à l’exécution du
B ref les Evêques , tous les fujets de l’Etat
de Parme , & le Souverain lui-même, par une
fimple publication faite au Champ de Flore ,
(i) eft encore un aéfce de monarchie direéle
& univerfelle, & même un genre de defpotifme ignoré jufqu'à ce jour ; & fous un au
tre point de vue, elle indique qu’il s’agit ici
de la Foi , qui oblige le fidele aullitôt qu’elle
eft connue. Cette claule éleve le B ref audefîus des Décrets des Conciles généraux qui
ont toujours été publiés dans la chrétienté,
Sc les Apôtres ont été envoyés par toute la
terre pour publier l'Evangile.
Dire avec le Bref que la publication n’a
point été ordonnée pour l'Etat de Parme ,
parce qu'elle n'auroit pu être ex écutée a v ec stL
ru é ( 1 ) , n’eft-ce pas nous rappeller malgré
nous
( 1 ) Volumus illas ( praefentes Litteras ) . . . in acie
Campi Floræ de Urbe, ur moris cil , affigi 6c publicari , ficque publicatas 8c affîxas , omnes (JT fingulos , quos illæ concernent , penndè artlare 6c
afficere , ac fi unicuique eorum nominatim 8c perfonaliter intimatæ fuilîenc. . . . Bref,
(1) Cum autem cxdem . . . . prxfentcs Litreræ in
dicione Parmenû . . . . ucqucant tutè publicari.. . ,
Bref.
I0 f
nous cette politique ultramontaine, à qui
il ne manque que le tems & l'occafion
pour pouffer fes entreprifes, vires non fuppetebant, & nous avouer prefque qu’on ne
doit jamais fçavoir gré au Minifterc de R o
me du point auquel il paroît s’arrêter , ni
prendre pour une borne mife à l’ambition les
ménagemens forcés auxquels il s’aflujettit
quelquefois.
C'eft donc au Champ de F lo re , ce
champ fam eux, d'où Rome prétend lier
les Rois &c les Evêques &c délier les
fu je ts, qu'on a vu de nouveau ptiblier ce
fyftême d’une autorité abfolue au fpirituel
& au temporel, retracé dans chaque difpofîtion du Bref. Les effets attribués à l’excom
munication de plein d r o it, la perpétuité de
cette excommunication tranfmife aux fucce£
feurs , l'imputation d'entreprife & de con
travention à la loi divine , la rélation ex
primée aux Bulles qui prononcent la dé
chéance du droit de régner contre les Sou
verains , auteurs de pareils E d its , nous of
frent l'équivalent d'une dépofition effective ,
tandis que le même B re f, par l’injonétiort
absolue qu'il dirige aux Evêques, par l’attri
bution qu'il fait au Pape d'une jurifdiétion
immédiate fur les Eglifes particulières , & d'un
droit de domaine éminent fur les droits , les
biens & les perfonnes de l'Ordre eccléfîaftique,
O
�6
renferme un autre genre d’ufurpation fur les
T vê q u es, lur le C le rg é , fur l’Eglife univer
se lle . C ’eft ici une de ces injures communes
\au Trône 8c à l^Epifcopat, de qui Philippe le
bel écrivoit au Pape Clément V , que les E vê
ques (fr les Souverains ne pourraient la tolêrer fans manquer a leurs fermens ( 1 ) .
Qu’il eft facile , après c e la , de rétorquer
le reproche fait aux Edits de Parme , de ren
dre captive l’Eglife que Dieu a créée libre ,
8c que ce reproche eft déplacé dans la bouche
des Ultramontains, au nom de qui le Car
dinal Caïetan 5c Laynés , parlant aux Peres
de Trente, ont dit que l’Eglifc eft née cap
tive du Pape ( i ) , c’eft-à-dire , dans un état
où la Synagogue ne fut jamais vis-à-vis de
fes Pontifes.
Ce reproche n’eft qu’une récrimination ufée
des Ultramontains convaincus eux - m êm es,
eux feuls, du projet d’affervir l’Eglife 8c l’Em
p ire , & d’attenter aux droits même de la
Divinité , en tranfportant à un leul homme
le pouvoir que Dieu a déclaré n’appartenir
qu'à lui,-le pouvoir de dépouiller les Prêtres
(D Nec Prælati talem injuriam meruerunt, nec
Kex falvo fuo juramento poifet hoc tolerare. Phi
lippe It Bel à Clcment V. Natalis Alexander bijl. f&~
culi X I ? , differtat. io.
i . art. i.
( t ) Ecclefia utpotè fer va natx parcicipandi jure
caret. Caïetan, deauÛorù. Papa & Conc. c. i.
107
de leur gloire , & de renverfer les Grands de
la terre : ducit Sacerdotes inglorios & Optïmates fupplantat (1). Mais ce pouvoir ter
rible , Dieu n’en ufera à l’égard de fon Eglife
qu’en terminant les tiecles ; l’homme veut
en jouir dans le tems , & ne craint pas , pour
y parvenir , d’employer à ce projet de défi
trùttioti une puiftance jufte 8c fainte , qui lier
voudrait jamais que ce qu’elle p e u t, Yédifi
cation, Syftcme d’autant plus dangereux, qu’en
exigeant des Miniftres de l’autorité fpirituefle
l’efprit de fervitude envers la Cour de R o
me , il leur infpire celui d’indépendance en
vers les Rois.
D’après ce fyftême , les Eccléfiaftiques fe
raient, à l’exclufion du Souverain, les Juges
de l'étendue de leurs privilèges , 8c des ma
tières civiles qu’il plairait au Miniftere de
Rom e d’affeéter à la fpiritualité. Si les Pré
lats euffènt prêté l’oreille à ces leçons, cette
Cour aurait formé dans chaque Empire au
tant d’Empires diftin&s qu'il y a de Diocefes 8c de Paroiftès 5 elle aurait inftitué dans*,
tous les lieux du monde chrétien des puiffances inférieures à la tienne, 8c toutefois
fupérieures à celle de l’Etat (2).
( 1 ) Jo b , ch. ir. v. 19..
(1) Dicendum eft poteftatem ccclefiafticam , non,
folùm efle in fe ncbiliorem , fed etiam fuperiorem,
Sc habere fibi fubordinatam & fubje&am poteftater’»
O ij
�io8
Les Nations ne peuvent oppofer à cet amas
d’inventions ultramontaines, qui fous des
noms variés confervent depuis fept fiecles
un fyftême uniforme , que le principe aulïî
fimple que fécond de l’unité de la puifiance
publique dans chaque Etat. Il importe plus
que jamais de fe fixer à ce principe , & de s’é
loigner de tout langage capable de l’obfcurcir : on peut meme dire que cette unité eft
un principe convenu ; les deux fyftêmes , qui
divifent l’Ultramontain des autres Cathodi
ques, le prennent également pour bafe.
C ’efl: à l’impoffibilité d’admettre dans un
E tat, à raifon du même objet, deux pouvoirs
égaux fans y introduire l’anarchie , & d’ac
corder aux Eccléfiaftiques une indépendance
fans fupériorité ( état inconnu fur la terre de
puis la formation des fociétés ) , qu’eft due
l’invention d’un pouvoir fur le temporel. Elle
ramene enfin, par des moyens plus ou moins
obliques, l’unité & le dernier redort à l’au
torité fpirituelle qu’elle établit, dans tous les
Gouvememens, puilfance publique > au lieu
d ’avouer que cette puijfance n'efi autre que
la puijfance temporelle de qui dépend l'ordre
public (i),
ejivilcm , . , . hoc elfe vernm non folùm de poreftate
kaç prout eft in Papa , fed etiam prout eft in quo
libet Epifcopo. Suarez, de legib. lib. 4. cap. 9( x) Requiftoiie de M. Gilbert de Voiûns du 10.
IO9
Le fyftême ultramontain fe réduic en der
nière analyfe à réclamer lui-même ce prin
cipe d’unité , pour la tranlporter de la
perfonne du Souverain à celle du Pape ;
il fuppofe , en premier lieu , que Dieu étant
la fource de tout pouvoir & la réglé de
tous les Jugem ens, l’autorité judiciaire &
légidative doit appartenir , en prem ier, à
la puilfance fpirituelle , comme à celle qui
tient de plus près à Dieu : c’étoit la bafe
du (yftême des Evêques, dans la Conférence
de Vinçennes [ 1 ] . En fécond lie u , il dé
février 1731, contre un Mandement de M. l’Evêque
de Laon.
Divioæ 8c humanæ leges ftatnerunt ut . . . .
facientes fciflùras in fandâ Eccleliâ , non folùm
exiliis , fed ctiam proferiptione rcrum & dura euftodiâ , per publiras poteftates debeant cocrceri. Pelag.
Tapa , epift. î . CT 3. ad Narfeten. Concil. Labb. tom.
5. col. 791 er 793.
Principibus poteftas publica committitur. D. Tho
mas 1. 1. qu. 66. a. 8. in c. & ad $.
Publies? poteftati, Defenf. declar. Cler. Gallic. part.
I. lib. 1 . feft. 1 . cap. 1 1. p. 14 1.
Vous voilà donc convaincus de la poireftion où étoit Céfar de la puiffance publique 8c de votre affujettiffement , & de celui de tout le peuple. Bojfuet >
médit, fur l'Evangile , tom. 1. p. 40^.
( t) llle ad judicandum videtur aptior & convenientior , qui eft Deo proximior, cum ipfe fît ré
gula , 8c diredor omnium judictorum. Proverbiorum
8. Per me legum conditores jufta decernunt. Libell.
Bertrand. Cardïnalïs S. Clcment. adverf. magiftr.
�HQ
tourne à l’unité d’une puillance politique , ce
que l’Evangile dit par - tout de l’unité chré
tienne <k myftique , formée par les liens de
la f o i , de la charité Sc du gouvernement
économique de l’Eglife.
C ’eft ainfi que le Pape Innocent I II , les
Evêques qui allifterent à la même Conféren
ce , & après eux Baronius, fondoient fur ces
paroles de l’Evangile , vos autem genus electum 3 regale facerdotium [ i] , qui n’ont trait
qu’au peuple fidele &: au régné fp iritu el, domus fpiritualis, . . . gens fanÜa , populus acejttijitionïs, l’idée d’une put fan ce royale atta
chée a l’autorité faccrdotale [ i ] . Un feul com
mandant à tous & fur tous les o b jets, &c l’ obéiffance commune des peuples & des Rois
expliquées en ce fens, conllit-uent, fuivant
ce Pape , l’unité du Pafteur Sc du troupeau.
[3] Un de fes plus faints Prédécelïèurs , fc
Tetrnm de Cugneriis. Preuves des Libertés de l’Eglife
Gallicane, tom. 1. p. 30.
(1) 1. Pétri ,'C. 1. z>. 5. e? 9.
(2.) Quod de regali Sacerdotio à Petro proditum
Baronius eo transfert ut facerdotalis apud Chriftianos au&oritas etiam de republici regali quâdam auctoritate décernât, tanquamad Pontifices piopriè, non
autem ad omnes Chriftianos diéhim fit. Boffuet, defenf. Cler. Gallic. 10m. 1. parti r. lib. 1. fefr. 1 . cap.
37.. p. i8a.
( 3 ) Rex regum & Dominus dominantium Jefus'
CKriftus facerdos in æternum fecundùm ordinem Met*
' chifedech , ità regnum & facerdotium in Ecclefià
III
renfermant dans les idées du régné fpirituel,
n’avoic vû dans le même texte > que les mem
bres de Jefus-Chrifi appellés du nom de race
royale & facerdotale. Tous ceux qui ont voulu
'ufurper , ont reftraint l’univerfalité du texte
.aux Minières de la rejigion.
Le Bref revient à ce faux point de vue
-d’unité politique , lorfqu’il reproche aux Edirs
de Parme d’avoir tranfportc à la puiffance fé ■ culie-re [ dans des matières temporelles ] Vobéiffance due aux loix du S t. Siège (1).
Mais cette puillance politique & elîèntielîe-
ftabilivit, Ut facerdotium (îc regale . . . . unum prxficiens univerlîs , quem fuum in terris Vicarium ordinavit , ut ficut ei fleéticur omne genu cœleftium ,
terreftrium , & etiam inrernorum , ita îlli omnes
obediant & intendant , uc fit unum ovile Sc unus
Paftor. Hune itaque Rcges fæculi propter Deum adeo
venerantur , ut non reputenc fe rite regnare nifi ftudcanc ei devotè lèrvire. Innoc. III. iib. 16. epifi. 130.
apud Baluz. tom. 1 . pag. S10.
Sed petfonæ ecclefiafticæ funt Deo proximiores,
cum fint eledlae in populum peculiarem Deo , de
quibus dicitur prima: Pétri 2. Vos efiis genus electum , régale facerdotium , gens fancta , populus acquifitionis , ts'e. Ergo conveniens eft quod Ecclcfia
poiîîc de talibus judicare. Ltbell. Bertrand. Cardi
nal is S. Clement. adverf. Magiflr. Petrum de Cu
gneriis. Preuves des Libertés de l’Eglife Gallicane f
tom. 1. p. 30.
( 1 ) Ab omnibus debitam hujus ( fandlx Sedis )
•mandatis , decretis , ac legibus obedientiam fxculaii
poteftati fubjicit. . , , Bref,
�111
ment une , le Bref la communique en fous-ordre
aux Evêques. Il divife dans l'Eglife le pouvoir
de contredire les loix civiles entre la puiffance elïèntielle du Pape & celle des Evê
ques , qu il réduit vis-à-vis de la première à
une puilïance miniftérielle & fubalterne , qui
de toutes les extrémités retentit au même
centre. Il fait donc prévaloir fur la jurifdiction innée du Souverain la jurifdiétion des
Evêques, & fur toutes, la puilïance unique
devant qui toutes les autres doivent , fuivanc
l’exprelfion d’innocent III , fléchir le genou.
La bafe de l’édifice ultramontain eft renverfée, fi l’on ramene l’unité de puilïance pu
blique à la perfonne du Prince temporel
Ne craignons pas que cette unité de la
puilfai.ee publique puilïè déroger aux droits
du Miniftere facré , à l’unité de pouvoir qu’elle
pofiède à fon tour dans l’ordre de la reli
gion , de même à fa prééminence fur tout au
tre genre d’autorité.
Le Pape Symmaque mettoit les deux pou
voirs fpirituel de temporel au même rang
d’honneur , certè acjualis eft honor ( i ) , il eût
pu dire davantage. L ’autorité fpirituelle , U
plus refpeftable qui [oit fu r la terre , eft d'un
ordre plus relevé que l’autorité civ ile , mais
nullement
( i) Symmaq. 6. apolog. ad Anafi. tom. 4. Concil,
i l 98.
nullement fupérieure ( 1) : l’Ultramontain mêmë
reconnoît qu’entre deux autorités diftinéles,
la prééminence ne fuffiroit pas pour donner
la (upériorité (2).
Cette religion fainte, qui foumet les Rois
à l’Eglife comme les m oindres de leurs fu je ts
(3) > oblige fes Miniftres à refpeéler en eux
cette puilïance elïentiellement une , qui pour
voit à la tranquilité publique , qui fous ce
rapport veille fur leurs actions ex térieures t
rnerne eccléÇiafttejues (4) , qui par droit de pro
tection réprime l’infradfion manifefte des Ca(1 ) Combien qu’aux feuls Prélats & Miniftres de
l'F.glile foie commife la fpiritualité , qui eft la plus
digne charge du faluc des âmes , & interdite aux
Rois & Princes temporels , toutefois en leur domi
nation temporelle eft comprife toute la police pu
blique , de laquelle la première parr eft la protec
tion , garde & confcrvation de l’ordre & difeipline
de l’état eccléfiaftique. D« Tillct.
Comme ez chofes qui concernent la religion ils
ne doivent rien avoir au-deftus d’eux , auftî en l'or
dre, police , & gouvernement de votre Erac , ils doi
vent être entièrement fournis à vos loix &c à vos Magiftrats. Remontrances du Parlement d’A ix de l’an 1614.
( 1 ) Quamvis oftenfum eft ecclèlïafticsm poteftatem
efte excellentiorem in perfeétione , non indè infertur
clic fuperiorem in fubordinationc & propriâ jurifdictione : nam poteft facultas una elle minus perfeéfa
quàni alla , & non illi fubje&a vel fubordinata. Sua
rez , de legib. cap. 9. §. 1. es" 1 . p. 140.
(3) Paroles de la Déclaration de 1717.
( 4 ) Super attioncs externas etiam eeelefîafticas,
jus Belgarum
cite à
Bull,
recept.
P
�*î4
'
rons dans les caufes purement fpirituelles ( f ) y
fans préjudice de l'autorité naturelle de l’Eglife fur le même o b je t, 8c qui réparant l'aiv
rentat commis envers les faints Decrets, tient
toutes chofes dans l’état légitima (z).
L'unité de la puiflance publique laiffe à
l'Eglife fon pouvoir légiflatif : elle n'en exclud que le pouvoir coaCtif, incompatible avec
le cara&ere de la religion qui rejette la con
trainte (3), à moins de vouloir changer l'effence des chofes , & accorder , comme dit
Syoefîus, les contradictoires , fociare infociabilia ; incompatible avec le pouvoir des C lefs,
qui ne peut avoir que des fujets eflentiellement libres, les âmes (4), 8c qui à l’exemple de
(O Dans les caufcs purement fpirituellcs , quoi
que l’Eglife eût reçu de Dieu l’autorité néceffaire pour
en connoîrre, ils tombent cependant dans l’abus
lorfqu’ils contreviennent aux faints Décrets & Conftitutions eccléfiaftiques ; en ce cas là , l’appel com
me d’abus eft un droit de proteûion Sc non de dé
volution. Gibert fur Fevret > tom. t. liv. I. ch. 3*.
pag. 16 1 . (St 16 1.
(r ) Ut omnia in eo ftatu efle jubeatis in qu»
fucrunt ante omne judicium. S. Léo , epift. ad Tbeod.
39. ffip. t.
” 5
3Dieu m êm e, n’agit que dans l'ordre du mérite
& de la liberté (1) ; incompatible avec le caraCtere des loix de l'Eglife formées fur la loi
primitive à laquelle elle o b éit, où toute la
doCtrine eft révélée, où la difeipline fonda
mentale eft établie , 8c dont l'efprit dirige les
loix de difeipline nouvelle que les révolu
tions des ficelés demandent ; incompatible
enfin avec la nature des peines fpirituclles que
l'Eglife prononce , &: dont l'excommunication
eft le comble 8c le dernier terme. C es peines
n'appartiennent point au genre vraiment coac
t i f , par la raifon profonde qu'en donne l’Abbé
Fleu ry, qu elles confftent plutôt à s'abflenir &
h refufer , qu'a fa ir e quelque chofe de p o ftif
(z). Qu'on juge par ce principe d'un B ref qui
qui les fait fervir à l'ufurpation des droits tem
porels, 8c qui les inflige à la Puiflànnce fouveraine.
L Eglife oblige la confidence de ceux qu’elle
retranche de fon fiein à fuir fies aflcmblées ;
mais fans l’appui de la puiflance temporelle ,
mais contre une réfiftance ouverte, elle n'auroit elle-même que la reflource de la fuite ,
que l’Evangile lui trace à l'égard de la Cité
où elle leroit troublée, fugite in aliam (3).
(1 )
l’abus
(i)
z. ch.
(3 )
Traité des deux Puiffances , ou maximes fur
par Mr. l’Abbé de Foy.
Fleury „ inftic. au droit eccléfiaftique , tom.
18. p. 17;.
Math. cap. 10* v , 13.
P ij
�i \6
Loin de pouvoir contraindre extérieurement
les excommuniés , elle fe verroit elle - mêmç
réduite, par leur préfencc obftinée 5 à inter
rompre le facrifice , fi le Souverain ne forçoit les excommuniés à fuir devant elle 3 &C
à exécuter au dehors l’obligation que leur
impofe au dedans la cenfujre : ils ont même
le malheureux pouvoir de ne pas la refpecter intérieurement, de perfifter dans leur éga
rement ; & fi dans cet étgt ils confervent du
moins la foi au pouvoir des Clefs 3 c'eft pa r
leur propre ju g e m e n t , ainfi que par fon pror
pre poids, que la cenfure les co n d a m n e ( i),
La cenfure , bien différente des peines
temporelles qui produifent un mal irrépa
rable , eft une peine m éd icin a le 8 c un
moyen de falur, La fourmilion ou le re
pentir offrent encore à la liberté un fujet
de mérite ou de démérite. La contrainte ex
térieure & civile qui dompte le rebelle a été
réfervée , dans la fondation même de l’Eglife ,
à la puilfance protectrice qu’elle a reconnu
dans les Princes chrétiens , comme nécefiaire
à fon avancement ( i ) s lorfque le R oi d u Ciel
a p ris pou r a lliés les Rois d e la ter re (3), & que
(1) Cun> fit proprio jijdicio condemnatus. Laul,
ad Titttm , cap. 1 . n. 1 1 .
( i ) Ssepè per regnum terrenum cœlefte regnum
proficit. Can. 7. Conc. Larif. ann. 819.
( 3 ) Cccleftem Regem focdcratos habere Reges
terratum. Sixt. epifi. ad j oann. Antiocb.
117
le tems prédit par le Prophète , où ils deyoient être les nourriciers de l’E glife, eft arri
vé ( 1 ).
De là vient que la domination eft exclue
de l’Eglife comme inutile , étrangère 8c même
nuifible à la fin qu’elle fe propofe , qui n’eft
que le bonheur fpirituel de l'homme , 3c aux
moyens pleins de douceur ôc de charité qu’elle
emploie.
L’interdi&ion de la domination fi expreftè
dans l’Evangile ( 1 ) , n’eft ni un fimple pré
cepte d’hum ilité, ne dittu m fold h u m ilitate
putes y non etiam v e n ta te f j ) , ni une interdic
tion de la domination illégitime qui dégénéreroit en tyrannie , 3>c que toute puifiance ré
glée rejette (4 ) , ni une défenfe d’ufurper le
temporel, la fouveraineté , la légifiation ci
vile : cette défenfe exclud , il eft vrai , l'idée
de la jurifdiCtion parfaite 5 le droit de coac(1 ) Erunt Reges nutritii tui. ifaï. 43. 13.
( z ) Sciris quia Principes gentium dominantut
corum . . . . non ità erit inter vos. Math. 10. if-. 16.
Reges gentium dominantur eorum, vos autem non
fie. Luc. 1 1 . 13. 16. Marc. 10. 41. 43.
Neque ut dominantes in Cleris. 1. Vctr. 5. 3.
Non quia dominamur fidei veftræ. i . Cor. 1. 13.
(3 ) St. Bernard.
(4) Mis verbis de légitima Regum automate Chriftus a g it, non verô êe tyrannicâ cum de iis Regi
bus loquatur qui bençfïci à populis fticerentur. Mareu , de concord. Saccrd, Ç? Imper, lie , l» cap. 16<
m m , 6, pag.
�♦
1ï8
tîon pour faire exécuter les jugement ( i ) , îe
pouvoir d'enlever au fujet le domaine de Tes
aéles extérieurs ; Jefus-Chrift a dénié à Tes
Miniftres cet attribut de la puiflànce publi
que , de la domination même légitime , &
que l'Ecriture appelle bicnfaifante : Reges Pen
tium dominantur eorum , & qui potejfatem habent fuper eos benefci vocantur ( 2 ). Mais il
ne leur a jamais défendu d'entreprendre furla puiflànce elle-même 5c fur fes loix ; cette
idée étoit trop contraire à l'efïènce de la reli
gion , pour avoir befoin d'une défenfe fpéciale.
Son divin Fondateur n'a , pour ainfi dire,
interdit le régné temporel qu'à lui - même
auteur & maître de la nature & de tout pou
voir , c'eft de lui feul qu'il a dit que fon
Royaume n’eft pas de ce monde ; il vouloit
condamner par fon propre exemple, l'opinion
de plufieurs Juifs qui refufoient aux Empe
reurs infidèles toute autorité fur le peuple
élu 3 mais cette opinion ne fut jamais celle
de fes difciples : il vouloit confondre la ca
lomnie , qui lui imputoit le deflêin d'ufurper
la Royauté terreftre , & refufer l'homma
ge de ceux qui la lui déféroient, igno
rants qu'elle étoit contraire au but de fa
( 1) Traité des deur Puiffances, ou maximes fur
l’abus par Mr. l’Abc de Foy.
( t ) Luc. i l . 2 y.
'
I I9
million j il vouloit enfin > en répondant aux
queftions inlîdieufes du Ju ge inique auquel i l
avoit bien voulu Je liv r e r , reconnoître en fa
perfonne une puiflànce publique émanée de
D ie u , dans le tems même que par un effet
de la per million divine il l'employoit contre
l'Homme-Dieu ( 1 ) .
Mais Jefus-Chrift n'a pas eu befoin de dé
fendre un règne temporel à fes Difciples
pleins de fon efprit ÔC nés fujets fidèles des
Empereurs j il ne leur a parlé de la puilTànce
publique , que pour les exhorter à donner aux
autres l'exemple de la plus parfaite foumiifion.
Quelle eft donc la domination qu'il leur
interdit ? c'eft la domination dans le gouver
nement fp iritu el, la domination fur la conf.
eience des fideles, non dominamttr fidei veflras
(2 ) , la domination fur le troupeau, pafeite
gregem D ei non coaftè fed fpontaneè ( 3 ) , la
domination entr'eux, non it'a erit inter vos..,
ncque ut dominantes in Cleris ; & ce qui le
dém ontre, c'eft que ce précepte leur fut
donné pour la première fois au fu jet de la
queftion qui s1étoit élevée pour fçavoir qui étoitt
le premier d’entr’eux (4 ).
( 1) Non haberes poteftatem adversùm me ullam jni fi tibi datum effet defuper. Joann. c. 1?. n. 11,
(2) 2. Co^inih. 1. 23.
(3) 1. Petr. c. f. v. x,
(4 ) Faéta . . . . content 10 inter eos quis eorum ri-
�i 16
Ce que Je fit s-Clsrifl a defiera d'établir (en pro«
hibant la domination ) , c efi la différence des
Empires & des Gouvernement du monde , d’avec
celui q u il venoit déformer ( i ) ; d’appiendre à
les difciples que leur autorité n’efl: qu’un miniftere, ficut qui minifirat [z] ; vox Dominï
efi... dominatio interdicitur, ïndicitur rninifiratio [ $ ] ,& qu’ils ne font que miniflres,économes,
difpcnfateurs [4] ; d’apprendre à tout le monde
chrétien qu’il ne fa u t pasjuger de la confiitutioit
du gou vernement de l’Eglife , par celle du régné
temporel [ 5 ] ; que les loix eccléfiaftiques, qui
lient la confcience des fideles lors même qu’el
les ne contiennent pas un fimple renouvelle
ment du droit naturel & d iv in , n’ont pas
cependant alors ce cara&ere de fouverain cm*
pire (6 ) qui eft légitime & nécciïaire dans
les
deretur effe major , dixit amerri eis , Reges gentium
dominantur eorum . . . . vos aurem non lie. Luc.
1 1 . i f . 16.
( 1 ) BolTuct, méditation fur l’Evangile , tom. 3.
fag. 14 t.
f l ) L u c , îo. 17.
( 3 ) St. Bernard.
(4) Miniftros Chrifti & difpenfatores myftcrioram
Dei. 1. ad Corinth. c, 4. a;, r.
(5) Ecclefix à Deo conftiturae & guberi atx , non
ex mundani regni ratione , fed ex Deî revelatione,
atque ipftus Ecclcltx decretis ex Patrum rraditione
xftimemus. Defenf. deelxr. Cler, Gallic. lib. 6. cap. 18.
(6) 1 q eo difetiraen yerfatur quod Regibus fummo
lit
les loix civiles 3 que le gouvernement de 1*£U
glife fondé fu r la charité ( 1 ) , & dont l’objet
efl; de renouveller l ’homme intérieur ( 1 ) , ré
pugne à tout genre de domination.
Ce nefi pas qu'il n’y ait un ordre dans
l ’E g lilc , & que perfonne n’y foit élevé en autorite aù-dejfus des autres ; mais cette autorité
efi une fervitude , & Jefus-Chrift avertit celui
meme qu’il avott déjà défigné tant de fo is
pour être le premier , que leur admmifiratiort
èfi en effet Une fervitude ( 3 ) ne forte , dit Orïiinperio multa peragete Iiberum fît . * . * ità ut verus
dominatus fit penès Reges , non autem penès Sacer
doces . . . . ex quo fequitur leges ecclefianicas quai
de rebus jure naturali vel divino non veritis . . . . fetuntur non nccefTîrate , fed voluntare , rton timoré corporali , fed dileétione fubje&orum nid debere . . . .
In legibus ecclefiafticis quæ jus naturale aut divinum non exequuntur , fummum ulud imperium locum non habec. M arca, de concord. Sacerd. (y lm~
pOr. lib. 1. cap. 16. num. 6. 7. p. 198. 199.
( 1 ) Fleury, inftit. au droit eccléf tom. i . ch*
1. p. 17.
( i ) Reges gentium dominantur eorum, e?c. vos aulem non fie. Qüæ duo docet Ecclefîa: miniftros : prirtium quidem > Apoftolos eorumque fuccefïores omni
temporali poteftate & jurifdiéHone carerc : fecundum, poceftarem illam fpiritualem quam habent, non
elle acminii aut imperii poreftatem , fed manfuetudinis & charitatis ; quia fcilicct terrenae poteftatis
efl exreriora rantnm adminiftrare , fpiritualis veto
proprium eft inrerioris cordis aflcdium flcdleie. D«*>
ptn de ant. Ecclef. diCcip. disert. 7. §. 3. p. 441.
,
(4) BofTuet, méditât, fur l’Evungi tom. 1. p. 33.
a
�122
gène , qui videntur habcre aliquem in Ecclef i t principatum , dominentur fratribus ( i ).
Voilà ce que ['Ultramontain ne veuc point
entendre : prévenu que l’autorité de l'Eglife
eft toute monarchique , il a fouvent calomnié
auprès des Rois les défenfeurs de nos ma
ximes , comme f i , en déniant cette pure mo
narchie de l’Eglife , & en foumettant les
Papes au Concile , ils donnoient atteinte à
l'autorité vraiment monarchique du Souverain.
Un Théologien célébré, député par le Con*
cité de Bâle à Charles V I I , repouftoit cette
calomnie par la différence de la forme conftitutive du gouvernement temporel qui a fur
les peuples la domination, d'avec le gouver
nement fpirituel qui n'a rien de commun avec
le premier, où le Pape n'eft point M a ître,
mais M in ière , Chef & membre tout enfemble , & fournis à l’univerfalité des premiers
Pafteurs ( i ).
( i ) Origene.
(2)
Nec ullarenus Tune audiendi qui ad alliciendum Reges & Principes dicunt , quod fi Concilia
generalia portent corrigcre & deponere fummos Pontifices , pari ratione quod populi haberent corrigere
& deponere Principes fasculares. Qui cnim taüa di
cunt, manifeftè atittoriratem Conciliorum deftruunr,
non plus tribuentes auftoritatis ipfi congrégation!
Ecclcfia: , quàm uni comfnunirati fæculari. Clarè
quoque negant Conc’lium liabere auftoritatem à
Chrifto immediatè , cùm ipfum fie comparant communitati fæculari, quac noo habec au&oritacem à
1* 3 .
L a domination interdite eft la domina
tion dans la conduite des âmes , la domina
tion du premier Pafteur fur les E vêq u es, pre
mier de droit divin , mais en même tems
collègue ( 1 J , & plus encore la domination
fur les Canons & fur les réglés de l'Eglife
qui doivent au contraire dominer fu r les P a f
teurs ( 1 ) .
Cette défenfe condamne toute ufurpation
fur le facerdoce & fur la liberté chrétienne,
& toutes ces nouveautés de jurifdiélion im
médiate du Pape fur les Eglifes particulières,
de fupériorité fur l'Eglife univerfelle , d'infaillibilicé ; ce n’eft que par une jufte appli
cation ôc par une forte d'argument à fortiori,
Chrifto corrigerai aut puniendi Principcm fuum . . . .
Et hoc etiam apparct ex faeris Scripturis, cùm Çhrfftus ipfe artîgnans di$èrcntiam inter hoc 8c ftfud ,
dicat : Reges gentium domin antur eorum , vos autem
non fie : & Beatus Petrus in Canonicà dicit de Paftoribus : non ut dominantes in Cleris , fed forma fafti
grtgis. Do&ores quoque lucide déclarant, quomodoPa
pa non eft dominus rerum Ecclefiar, fed qa,inifter. Valdc quoque extraneupi eft , & à Tcritate alienpm ,
dicerc, quod non plus fpiritualitatis reperiatur in
congregatione légitima Ecclefia» , quàm in una communitace fteculari. Thom. de Corfellis Dçft. Pfirtf. ann.
J440. Preuv. des Libert. ckap. 11. p. 23.
(.1) Te vero non dominum Epifcoporum , fed
unum ex ipfîs. Div. Bernard, ad Evgep. de epnfderat. I. 4. e. 7.
(2) Dominentur pqfiis rçgufÆ , oqn régulas dominemur. St. Celefin , Pape,
�IZ 4
que la difenfe de dominer dans l’ordre fpf»
ritu el, fuppofe la défenfe plus ancienne , inhé
rente à la nature même du Sacerdoce & de
l ’Empire , ( & pour laquelle il ne fallut jamais
un précepte fpécial ) de troubler l’ordre tem
porel , de fcinder l’unité de la pui (Tance
publique , & d’ufurper la légiflation civile,
Le Chriftianifme, qui eft venu apporter fur
la terre une perfection inconnue à la nature,
qui veut que Tes feCtaieurs ne ceftent de
îendre à la perfection , eftote perfetti ( i ) ,
qu’ils foienr la lumière du monde ( i ) , & ne
cherchent que (e régné de Dieu ( 3 ) , qui exige
fur-tout que l’homme de Dieu foit p arfait,
Tit perfeftus fit loomo Del (4 ) , a rendu plus
étroit à l’égard des Miniftres de la religion
le devoir d’être fournis au Souverain ; mais
il ne leur a pas fait l’injure de leur défendre
de s’ériger un thrône au-deffus du fien & de
les fuppofer capables d’un pareil attentat :
Dieu dont la prefcience eft infinie ne l’a ce
pendant point annoncé.
L ’unicé de la puiftance publique , inftituée
de Dieu créateur de l’ordre focial avant que
le Dieu Rédempteur eût paru fur la terre ,
& confacrée de nouveau par la religion chré( ï ) Math. 5. î i .
(r) Vos eftis lux raundi. Math. f. 14.
( î ) Quærite primùm regnum Dei. Math. 6. 33.
^4) z. Ad Timoth. 3. 17.
'M
tienne , eft reconnue par ce grand précepte „
omnis anima Potefatibus fulltmtoribus fubdita
f t (1).
On ne peut trop avertir que l’Ecriture ne
parle ici , fous le nom de Puijfances (upcrieures , que des gouvernemens humains -, qu’elle
a fi peu en vûe l’autorité fpirituelle, qu’au
contraire elle comprend les Miniftres du Sa
cerdoce parmi ceux qui doivent obéir j que
le précepte parle à tout homme, au Prêtre ,
à /’Evangélifte , à Psîpotre [ z ] , qui doivent
également garder la fujétion \ c’eft le terme
qui cara&érife l’efpece d’obéiffance ou de dé
pendance propre au fujer [ 3] , &r qui réunit à
la néceffité d’obligation & de con\cicnoe qu’impofent les loix eccléfiaftiques & civiles, la
nécellité à.'exécution : neceffitate fubditi efote.
Ainfi ont parlé fur ce texte les plus célé
brés Peres de l’Eglife , St. Auguftin , St. R e
née [4 ], tous les anciens Papes , dont les pa( 1) St. Paul, épir. aux Rom. c. 13.
tz) Omnis anima-, oftendit enim quod ifta imperentur omnibus ; . . . etiam fi Apoftolus fît , fi
ïvangelifta , fi Propheca. Div. Chryfojt. homel. 13.
în eptfi. ad Rom.
( 3) Nec fimpliciter dixit Apoftolus obediat, f e i
fu bdita fit. Div. Chryfojt.
(4) Quod autem ait : omnis anima Totefiatibus
fublimioribus fubdita fit , non efi enim potejias nifi
à Deo , reétifïîmè admonet , ne quis ex eo quod à
Domino fuo in übertatera vocatus eft, faétus Chrif-
�127
ï 16
rôles recueillies dans le corps du Droit ca
nonique , déclarent que l'E c r it u r e les foumet
comme les autres fu jets aux Puiflances [ i ] ,
nos Rois dans des lettres adreflees aux Sou
tenus , excollatur in fuperbiam & non arbitretur
in hujus vitæ itinere fervandum effe ordinem fuum >
ut Potefiatibus fublimioribus , quibus pro tempore rerum temporalium gubernatio tradita efl , exiflimet
non fc efTe fubdendum. D iv. Augufl. lïb. expof. quo•
rumd. propof. ex epifl. ad Rom.
Ad utilitacem gentium ttrrenum regnum pofmirn
efl à Deo . . . . & fecundùm hoc
niftri’ , qui tributa exigunt à nobis ,
fervientes , & que. funt Poteflates , à
funt. Iren. contr. hs.r. lib. 5. cap. 14.
Et nos in poteftate fumus. Gregor.
Dei funt Miin hoc ipfum
Dco ordinaeæ
Naz. orat. ad
Prtfid. irat. er pop.
( 1 ) Quibus C Regibus ) nos etiam fubditos efTe
faeræ Scripturæ præciptunt. Pelag. Papa 1 . ad Childebert. Garn. ditirn. Preuv. des Libertés, tom. z. ch.
1. n. 1.
Satagendum cfl , ut pro auferendo fufpicionis
feandalo , obfequium confeffionis noflræ legibus miniflremus : quibus nos etiam fubditos effe faeræ Scripturx præcipiunt. Can. Satagendum , Cauf. 15. qu. 1.
Potejlas fuper omnes homines dominorum meorum
pietati coelitùs data efl . . . . cui f Deus ) ei & omnia
tribuit, & dominari eum non folqm militibus , fed
etiam Sacerdotibus. Gregor. magn. ad lmperator. Alaurit.
Cependant ces grands Papes ne faifoient pas dif
ficulté d’appellet les Empereurs , leurs Seigneurs ; au
cuns fujets de ces Princes ne leur rendaient plus de
relpeél. Difc. du P. G. du Parlent, de Par. pcole dtp
Droit C ivil (y Canon. j6 8t.
verains Pontifes [ 1 ] , & pour abréger une
Tradition qui ne finiroit pas , le Clergé de
France, qui dans fa Déclaration de 1 6 8 2 ,
loin de ramener ce texte de f Apôtre en preuve
de fa propre autorité ou de celle de l’Eglife
allez établie par tout l’E van gile, fe compte
lui-même parmi ceux à qui l’Apôtre prefcric
T’obéi (Tance envers les PuifTànces.
L "article premier de cette déclaration fon
de fur ce palfage de St. P a u l , & fur le de
voir d’obéiffance qu'il impofe à tous, la li
mitation du pouvoir de l’Eglife aux chofes
fpirituelles , & l’exclufon d’un pouvoir direét
ou indirect fur le temporel (2). L a lettre écrite
»
( x ) Et Apoflolus voluit ferviri Regibus , voluît
honorari & non conculcari Reges , Regem inquic
honorificate , & ircrùm , omnis , inquiens , anima Potefatibus fublimioribus fubdita fit. Reddite ergo om
nibus débita , 8c paulô fuperius , ideo necejfitate fubditi ejlote , non folum propter tram , fed (fr propter
confcientiam. Carolus Cal vus ad Hadrian. z. Cenfure
contre Vernant.
( z ) Ipfîque Ecclefîæ , rerum fpiritualium & a i
afternam falutem pertinentium , non autem civilium ,
ac temporalium , à Deo traditam poteflatem , dicente
Domino : regnum rtteum non ejl de hoc mundo , &
irerùm : reddite ergo qtts, funt C&faris C&fari, £5*
qtu funt Dei Deo ; ac proindé flare apofloîicum illud : omnis anima Potejlatibus fublimioribus fubdita
fit : non efl enim potejlas nifi à Deo : que, autem
fu n t, a Deo ordinatâ funt. jtaque qui poteflati refif i t , Dei ordinationi refifir. Reges ergo 8c Principes in
lemporalibus nulli ccclcfiafticæ poieftati Dei ordina-
�I 28
1
par l’Afîèmblée du Clergé aux Evêques du
R oyaum e, divine, comme les anciens Conci
le s, le gouvernement de la répub'ique chré
tienne entre le Sacerdoce 8c les Puififiances
ftiblimes ; elle renvoie au texte de l’Apotre cité à la marge, pour indiquer la fource où elle puife l’exprellion de Puififiances
ftiblimes, 8c déligne celle de l’Eglile fous le
nom augufte de Sacerdoce , nom fi éminent
par lui-même , & le plus convenable pour
elle , lorfqu'elle fe trouve placée vis-à-vis
de la Pui fiance fouveraine [ 1 ]. Cette lettre
s'exprime comme St. Ifidore rappellé dans le
Canon Principes , & dans un Concile de Paris,
(z) comme le Pape Gélafe , qui dans un texte
contacté à caraétérifer les deux pouvoirs,
appelle celui du Pontife du nom d 'autorité
facree, 8c celui du Prince du nom de puifil
fiance , autoritas facra Pontifcum & refaits Potefas [ 1 ] , comme le Concile de Thionviile,
ita Ecclefam difpoftam efife ut pontifiea li auctontate & regali poteflatc gubernetur. Ce lan
gage étoit le plus commun dans l'antiquité ,
il a fubfifté encore après Pintroduétioii des
prétentions ultramontaines. Innocent III, foUverain Pontife , 8c Prince temporel de l'Etat
qu'on nomme ccclcfaflicjue ou Patrimoine de
St. P ierre , voulant parler de ces deux pou
voirs réunis fur fa tête , donne au premier
le nom d'autorité du Souverain P o n tife, 8c
au fécond , celui de Puififiance du Prince fibuverain (z). Bofiuet enfin, le rédacteur , Pin
te. prete 8c le défenfeur de la Déclaration de
1 6 8 z , publie par-tout que la m a jeféd u Siégé
apofiolique n dffranchififioit point les Papes de ce
précepte (3) : ce fens unique du texte eft fixé
par la Tradition , il eft décifif.
Les Ultramontains ont très-bien vu qu'ils
ne pouvoient parvenir à foultraire les Minifi*
Jacrée
tione fubiici . . . » polTc. Defienf. decl. Cler. Gallic.
an». 1 6 S i . art. i .
( i ) Cùm refpubüca chriftiana , non Sacerdotio tan
tum , fed etiam R c ç o m & fubhmiorum 1 otefiatum
imperio gubtrnetur. Epift. C onventûs C le ri Gallic»
ann . 1 6 8 1 . p. i. in fine.
( z ) Intrtt Ecclcfiam Potefiates necelTariæ non effent , ni H ur quod non prarvalet Sacerdos efficere
per doét rin x lcrm on em , Potefias hoc im pieai per difeiplinæ terrorcMn. . . . Ipfam que d ifc ip lio a m quant
E c ck fîa; humilitas exercere non p rx v a le t cervicibus
ruperborum , Potefias principe lis im ponar , èc ut vcnerationem meteatur vïrtutem Potefiatts impertiat,
Canon. Principes , eaufi. 1 3 . q», 5,
( 1 ) C a n o n . D u o funt > diftinét. 9 3.
( 1 ) Id aucem in p a tr im o n io Beati Pétri libère
pcreit ap o fto lica Sedes efficere , in quo & fu m m i
fcntificis auftoritatem exercer & fiummi Prihcipis exeq u u u r potefiatem. Cap. Per veneralilem , qui fil U
fint legitïmi.
( 3 ) M a g iftru m fequunrur A poftoli , & Paulus , omnïs ( inquit) anima Porefiatibus fiublimioribus fiubdita
fiit. C a y illa n tu r a d y e i f a r i i . . . . q u a ü non Poncifices
R
�130
ttcs de l’autorité fpirituelle aux premières pa*
ïoles du texte qui déclarent un devoir uni\erfel à. la puiflànce , &c éluder le fameux ar
gument , omnis anima , ergo vejlra , qu’en les
comprenant dans l’autre partie du même tex
te , c’eft-à-dire , parmi les puiflances pour
qui l’Ecriture exige l’obéi (Tance.
Pour rendre le texte commun aux deux
Puiflances, ils ont abufé du terme pluriel
twtcftatibus, quoiqu’il n’exprime que les dif
férentes puiflances entre qui l’empire de la
terre a été fucceiTivement partagé -, cela eft
évident par le texte même , qui ajoute tout
de fuite, tantôt au fingulier , tantôt au plu
riel , que la puiflànce vient de Dieu (1) ; que
les Princes, c'eft-à-dire, ceux qui poflèdent
la puijfance ne font à craindre qu'aux mcchans ;
que pour ne pas craindre la puijfance, il fuftit
de faire le bien -, que le Prince eft le M in if
tre de Dieu , ou que les Princes font les M i~
niftres de Dieu ( z ). Le Chapitre s’applique
Paulus , his dittis , complexus fit , omnis anima ,
quod & Chryfoftomus hic & rcs ipfa indicat . . . .
puro ergo non excipi apofiolicam poteftatem. Defenf.
Cler. Gai. 10m. 1. part. 1. lib. 1 . fj[ . z. cap. 1 5. p. 1 50.
( 1 ) Omnis anima Potepatibus fublimioribus fubdita fit , non eft enim poteflat nifi à Deo. Paulus,
tpifl- ad Rom.
(2.) Nam Principes non funt timori boni operis,
fed mali ; vis autem non timere Poteflatem , bonum
fac. . . . Dei enim mmifter eft tibi in bonum . . . *
131
dans tout Ton contexte au feul Prince tem
porel , à celui de qui i) efl: dit au même lieu
qu’il ne porte pas le g la iv e envam , que la
vindicte lui appartient 1 8c que le trib u t, la
crainte 8c Thonneur lu i font dus (1). St. Paul
s’interprete lui-même , en ordonnant ailleurs
d ’être Tournis aux Princes , aux Puijfances ( 1 ) ,
termes fynonimes. L ’Ecriture défigne par-tout
les R ois Tous le nom univoque de Puijfances
fupérieures, furéminentes t in fublimate conftituti.
L ’Ultramontain abufé encore d’un trèspetit nombre de partages d'Auteurs eccléfiaf.
tiqu es, qui ont fait de ce précepte d’obéir
aux Souverains une application de convenance
8c de iimple analogie au devoir d'obéir aux
Supérieurs eccléfiaftiques, au lieu d’établir ce
devoir fi certain par d'autres textes de l’E
vangile.
C ’efl: ainrt qu’on a voulu renverfer la T ra
dition qui n'avoit vu dans ce même texte
que l’autorité temporelle : Bellarmin Te voyant
vaincu par ce partage, a dit que les Princes
Dei enim minijler eft..........Miniflri enim Dei funt
in hoc ipfum fervientes. Paul. Epifi. ad Roman.
( 1 ) Non enim fine caufa gladium portât . . . .
vindex in tram ei qui malè agit . . . . cui tributum , &c. ibid.
‘ (z ) Admonc illos Principibus gy Potejlatibus fubditos efTe. Paul. Epijl. ad Titum 3.
R ij
�131
n’ y font pets feuls compris ( 'i) : d’autres avant
ôc après lui , moins habiles à détourner le
feus du texte , n’ont trouvé d’autre moyen
que celui de l’altérer par l’infidélité des ponc
tuation s & des tradu&ions \ l’exemple avoit
été donné fous Boniface V III. On en eft venu
jufqu’à défigurer entièrement le texte , en lui
faifant dire des deux PuilTances , non pas ce
qu’il a dit des PuilTances du fiecle > qu’ elles
font établies ou ordonnées de D ie u , ou fimplement que la Puijfance efi ordonnée ou ré
glée de D ieu , ce qui ne lui ôteroit rien de
fon indépendance & du droit de n’être comp
table qu’à Dieu feul ; mais on a fait dire au
texte, des deux PuilTances mifes enfemble
& comparées l’une à l'autre , qu’elles font
ordonnées ou régléef de Dieu } c’eft-à-dire , ré
glées entr’elles. Par ce moyen , on donne
lieu de renouveller l’abus que la Bulle Vnam
fanttam , & fes Commentateurs avoient fait
du même texte , pour prétendre qu’il établit un
ordre entre les deux PuilTances, Sc qu'il -ne
■ peut y avotr d'ordre entr’elles que par la fournijfion de Vune à l’autre (2) ; on revient tou-
(O Per fublimiores Potcftates Principes intelligt
voluit , fed non [otos : maluit enim doftrinam fuam
Apoftolus generalibus verbis concipere, & proponer
ie , ut pluribus piodefTct. Bellartp. de potefi, flumrti,
fo n tïf. in temporal.
( a ) Nam cùm dicat Apoftolus > non efi potefias
133
jours à déplacer l'unité politique qu’on en->
leve au Souverain dans l’ordre temporel pour
la tranfporter au Pape (1).
BofTuet, qui fans doute avoit pénétré toun'tji à. Dco , que autem funt a Deo , ordinata fiant :
non autem ordin.ua ejficnt , nifi gladius effet fub
gladio , & raoquam inferior reduceretu r per alium
in fiuprema. Bull. Unam fldnftam , de major, tr* obed.
p. 10 9.
Quicumque igitur huic poccftati à Deo fie ordi nate refîftit. Bull. Unam fian£tam.
Et eft declaratio ejus , quod Apoftolus dixerat.
Dicebatur enim per Apoftolum , poteflates à Dco
fiu n t, CT ordinale, fiant. Cum ergo dubitari poffet ,
quo ordine crdinate Ju nt poteflates , boc dubium
fiolvit dicens , quod oportet eas , ut res relique font
in univerfo , ordinatas effe , quia infima per m edia,
infieriora per fiupcriora ad ord.inem rcducunlur. Glolfa
ibid.
( x ) Non eft in Pontifice duplex poteftas , fied
unx , quae diredftè refpicit fpiritualia , & confequen-
ter extenditur ad temporalia -, hxc autem extenfio
folùm elfe poteft propter fubordinacionem temporalis poreftatis ad fpiritualem . . . . Quamvis in co
( corpore Ecclcfîx ) fînt plures poteflates feu magiftratus , neeelfe eft ut inter Ce habeant fubordinationem , ita ut ad unum aliquo modo revocen tu r
propter rationem fa&arn ; ergo vel fpiritualis po
teftas fubordinatur temporali , vel è contrario. Primum dici non poteft ; nam ut ibidem ex Paulo
affert Pontifcx , quæ à Deo funt , ordinata funt ;
effet autem perverfus ordo , fi fpiritualia fubje&a.
effent temporalibus ; ergb fiecundum neceflario dicen ».
dum efi. Suarez', de legib . lib. 4. cap. 9. §. 9. p.
14 1.
�*34
tes ces fubtilités, fentit la ncceftîté d'écarter
à jamais les fauffes interprétations -, il dit
formellement que dans le chapitre 1 3 de
l’Epître de St. Paul aux Romains , cet Apô
tre ne parle pas de l’ordre que Dieu a établi
entre les deux Puiflances , mais de l’établiffement des Vuiffances qu’il a prépofèes aux gouvernemens civils ( 1 ) .
( t ) Secunda propofitio , ea potefias inter infidèles
ejl a Deo. Hanc quoque confuentur omnes -, eft enira
Apoftoli dicentis > non ejl potefias nifi à Deo : qu&
autan funt , a Deo ordinats. funt : itaque qui re
fiflit poteflati, Dei ordinations refiflit. Loqui autera
eum de civils poteflate fequentia docent , ubi gladium ac vindiAam publicam , veétigal, tributum ,
civilis poteftatis inftrumenta & juta commémorât:
ergo es. poteflates, quas Paulus à Deo e(Te , à Deo
ordinatas efle docet , funt Reges ac Principes.
Neque omittendum id , quod quidam objiciunt :
à Deo ordinatas dici poteftates >quod fub di^niore
minus digna , civilis fciliccc fub ecclefiaflicâ a Deo
ordinata fit ; aliter enim non conflare ordinem. Velùm eo ratiocinio non utitut Apoftolus , neque is
locus poflulabat, ut de illo erdine dijfer eret -, fed ita
agit Paulus, ut ordinatas intelligantut à Deo ilia:
poteflates quae civilibus prasfint officiis , quod fint à
Deo conftitutx : unde præmittit > non efl potefias
nifi à Deo : cui conuexum illud que, autem fu n t, a
D eo ordinats funt , & infert : itaque qui refiflit
poteflati , Dei ordinations refiflit •. & fubditi eflote
van tantum propter nam , fed etiam propter confcientiam. Jam & de ordinc pbilofophari placct , alibi
philofophandum, bic quidem ex Apoftolo confiât
quae civilibus præfmt poteflates, eas etiam inter ia-
‘ 35
,
Selon l’interprétation ultramontaine, les
Prêtres ne font plus dans l’univerfalité des
hommes à qui l’Apôtre dit d obéir , de là
l’exemption de l’indépendance de droit divin;
ils font même , dans le texte , la première des
deux Puiiïances envers qui l’Apôtre preferit
l'obéiflànce, c’eft plus que l’indépendance ,
c’eft la fupériorité qui confomme l’ufurpatio n , Sc par une fuite néceffaire , la Puiffance civile, qui dans la même interpréta
tion n’eft que la fécondé des deux que le
texte a en vue, rentre dès-lors à l’égard de la
première , dans la claflè générale de ceux à
qui l’Apôtre ordonne d’obéir. Quel eft le réfultat de tant de fubtilités? le renverfement
total de la doctrine de l’Apôtre, L ’Eccléfiaftique à qui l’ Apôtre ordonne, ainfî qu’à tous
de même plus qu’à tous ( à caufe du devoir
de l'exemple ) d’obéir & de payer le tribu t,
en fera exem pt, de le Prince portera le glaive
envain : fes défenfeurs auront beau dire qu’il
11’a point de fupérieur tem porel, de que fa
puiffance vient de Dieu , on l’accordera fans
peine , de Boffuec remarque que tous les U l
tramontains l’avouent, confîtentur omnes ; mais
on ajoutera que cette origine ne lui ôte pas la
dépendance du pouvoir des C lefs, où fe troufïdeles à Deo conflitutas, ç$r ordinatas ej(fe. Bofluet,
defenf. decl. Cler. G allie, tom. l . part. I . lib. 1 .
feÜ* x. cap. 1 . p. ix 6 .
�136
Ve inclu s, félon eux, le principe d ’un pou»
voir tem porel, qui doit fe déployer pour l'in
térêt de la religion, Sc l'on dira que le Prin
c e , quoique Miriftre temporel de Dieu , doit
dépendre du Vicaire univerfel qu'il a établi
fur la terre (i).
Les Ultramontains poulTeront leurs aveux en
core plus loin \ ils accorderont au Prince une
entière indépendance dans le tem porel, quant
à l'origine 8c à l'exercice ; mais cette indépen
dance ils la feront celfer dans les matières
mixtes, dont ils réfervent à l'autorité fpirituelle le réglement arbitraire : ils reconnoîtront dans le Prince une indépendance de
toute fupériorité proprement d ite , mais non
pas de l’autorité qui déclare ce qui eft ou
îfcft pas matière m ixte, de cette autorité qui
reprend
( i ) Quamvis non habeat in temperalibtis fuperiorem aliquem temporalem , habec tamen fupcriorcra
fpiritualem cujus poteHa^ ad temporalia etiani fc
extendit ; ideo deponi à fummo Pontifice ut Chrijli
Vicario poteft. Bellarminus de potejl. fumm. Pontif.
in temporal, c. zz. p. zio.
Itiamfi conceâertmus, Rcgem efle immédiate conftitutulu à Deo & ab illo folo poteftat m haberc,
quod tamen non concedimus . . . . refponderet fanctus Thomas Ecclefiam habere autotiratem à Deo,
per fuum ReAorem & Paflorem , auRrendi poteftatem in certis cafibus illis quibus Deus cam dé
clic. Bellarm. de potejl. fumm, Pontif, in temporal,
C. ZI. p. ZOJ.
T3 7
reprend , par voie de déclaration doârin alc
& d'enfeignemenc, ces matières mixtes 8c vélatives à l'ordre public qu'elle s'approprioic
autrefois par voie de puidàncc.
Dans des tems plus reculés 8c même au
fort des premières entreprifes, on étoit plus
/impie &:de meilleure foi : on vo it, fous Louis
Je Débonnaire ( i ) , Thegan Chorévêque con
damner par ce feul texte de l'A p ô tre, la
perfidie d'Ebbon , Archevêque de R h e im s,
envers fon Souverain : Pourquoi ( lui difoit Je
Chorévêque ) avez.-vous méprifé le précepte
apoftolique qui vous ordonne d ’etre fournis aux
Puiffances, qui déclare que la puiffance vient
de D ieu , q u d fa u t craindre Dieu & honorer
le R o i? En vous éloignant de ce précepte,
vous avez prouvé que vous ne craignez., point
D ie u , CT* que vous rihonorez, pas le Roi ( i ).
Ci) La vertu, la piété, la débonnaireté de Louis
le Pieux . . . . ne put pas empêcher qu’il ne fouffrit en fa perfonne les plus grandes hontes & in
dignités qu’on pui/Te imaginer , & de la main de
plusieurs Prélats de Ton Royaume , fans que l’hofineur & le refpeél de Charlemagne Ton pere, qui
en avoit élevé & établi la plupart, lui pût de rien
fervir. Remontrances du Parlement d’A ix de 1614.
(z ) Crudelis , cur non intellexiûi præcepta Domini, non efl fer-vus Cut>ra Dominum fuum ? Quamobrem contempfîfti præcepra apoftolica , omnibus
Potejlatibus fuperioribus fubditi eftote , non eit poteftas nifi à Deo ? & irerum aliàs dicit : Deum tïtnete, Regem honorificate , eu veto ncc Regem ho-
s
�I38
T elle cft auflfi la penfée de Pierre de Blois
qui , s’appuyant Pur l'Epitre de St. Paul aux
Rom ains, &: fur les Décrets même de Gratien , voyoit les Souverains de la terre , &
Dieu même, offenfés par l’ufurpation d'une
jutifdiétion temporelle ( i ). Un autre Arche
vêque de Rheim s, cédant à l’évidence de ce
grand principe de l’unité de la puiflànce publi
que & de l’autorité prédominante du Souve
rain dans les matières m ixtes, s’accufoit luimême de perfidie
d’infidélité , pour l’avoir
méconnue en ordonnant C le rc , fans la permiffion du Prince , un de les fu jets, contre
la réglé & l’ufage qui exigoit cette permiffion préalable pour tout Laïc qu’on vouloir
norafti , nec Dcum timuifti. Thegan. v id . Duchenc.
». 44. p. 181.
Summo omnium applaufu Theganus Chorepifcopus, vit optimus arque fan&iflîmus, ejus acvi fcriptor , in Ebbonem fie eveétus cft. D$fenf. Cler. Gallic.
part. 1. lib. z. p. 131.
(1) His & durioribus dignî fumus , qui jurifdiBionem aliénant & nobis omnîno indebitam ambitione temerarià ufurpamus ; nam & in corpore De
cret orum , er in Epifiola ad Romanos, haec verba meminilTe legimus : Sunt quædam enormia flagicia qux
potiùs per mundi Judices quàm per Re&ores Sc Judices Ecclefiarum vindicantur . . . . verumtamen in
hac jurifdidione malediéH quam ambiuosè & fuperbè præfumimus , Deum ojfendimus. (s? Dominant
Regent, viamque in Clericos malignandi rutiftimain
Laicis aperimus. Retri Rlefenfis epift, 73.
faire pafter à l’état éccléfiaftique : pcrfdia ac
infdelitatis crimine in regïam M ajfjlatem
arguor rnc dctincri ( 1 ).
Qu’on reflitue au texte de l’Apôtre foi' véri
table fens, & toute cette indécente conrroverfe
finira, de même que le reproche fans celle
renouvellé par ces fortes de Brefs, de trans
porter aux loix du Souverain Pobéijfance re
fermée a celles du Pape. L ’unité de la puiffance publique une fois fixée, affranchiroit
les Souverains de cette infpeétion fupérieure
que la Cour de Rom e veut exercer fur la
légifiation ,
qu’elle communique en fousordre aux Eccléfiafliques leurs fu jets, en fe
réfervant* néanmoins fur eux l’autorité du
maître fur le d ifc ip le, pour confommer
l’afièrviflèment de tous à fa feule puilîànce.
Quoique la Cour de Rom e femble depuis
un certain tems fe réferver , à titre de caufe
majeure , les aétes de jurifdiétion qu’elle fe
permet à l’égard des Rois , elle reconnoît
cependant dans les Evêques, &: principalement
dans l’Evêque diucéfain du Prince , le droit
d'obliger le Souverain 'a porter ou a rétracter
une loi civile , félon qu’elle eft utile ou
nuifible au falut des âm es, de l’y obliger
non pas feulement par les confeils de la pé
nitence , mais dans le for extérieur & par
( 1 ) Adalberonis Rhemenf. Archiep. epifi.
Sij
�140
Vexcommunication. Le Pape le peut , difenti l s , puifque chaque Eveque le peut : Cogéré
Imperatorem ad legem ferendam . . . ntAtnfeftè
ofrcndtt pojfe Epifcopnm inter dum potefiate
tctnpora.il uti ; çr f i Epifcopus qmlibet id po
teIl . quant'o magis Pnnceps Epifcoporum ( i ).
D'ailleurs les Evêques doivent conferver la
doctrine , 8c le pouvoir indirect eft une
doétrine certaine au jugement des Ultra
montains. Enfin toitfe queftion , qui préfente à décider fi une matière eft fpirituelle
ou temporelle , forme félon eux une quef
tion purement théologique ; ce difeernement
appartient donc , de leur aveu , aux Evêques
comme au Pape , quoique dans un moindre
degré d’autorité. Voilà bien des principes
deftinés à faire entrer tous les miniftres de
l’autorité fpirituelle en partage d’un pouvoir
coactif, exercé fur le Souverain lui-même &
fur fes loix : 8c Voilà où nous conduiroit le
Bref.
Les maximes qu’il établit, celle même qui
rejette la néceffité du placet ou de Yexequat u r , pourroit aufifi être réclamée en faveur
de tous les jugemens de difeipline eccléfiaftique , de tous les aétes de jurifdidtion des
Paffceurs : ils pourroient, à l’exemple de la
Cour de R.ome , difputer au Souverain le
( j ) Sellarm. de potefl, fum m . Fontif. in temporal.
141
pouvoir d’en fufpendre l’exécution .* le droit
ne fçauroiu dépendre uniquement du rang ÔC
de la dignité, plus ou moins éminente, de
celui qui croira avoir à fè plaindre des entreprifes de l’autorité féculiere.
Des Evêques ne déployeroient pas au
jourd’hui les cenfures contre leur Souve
rain , mais il pourroit s’en trouver qui
confondroient les limites du Sacerdoce 8c
de l’Empire ; 8c le droit de limiter arbi
trairement l’autorité royale , eft la plus
dangereufe des ufurpations, elle les renfer
me 8c les furpaffe toutes : ce droit emporte
celui de réfifter aux loix du Prince fur les
matières m ixtes, ou fur les matières tempo
relles qu’on aura prifes pour mixçes, de Les
combattre par des loix oppofées , de fubftituer à la voie de repréfentation les voies
d ’enfeignement , de décifion , d’expofition ,
d’inftru&ion, q u i, employées en matière tem
porelle ou mixte contre l’autorité des loix
civiles ou contre leurs principes , érigent la
défobéiflànce en précepte.
L ’imputation d’entreprife fur le Sacerdoce,
qui conduit à l’idée des cenfures encourues
de plein de droit contre les auteurs dè l’entreprife , fuffit pour aliéner les peuples par
l’effrayante perfpeélive d’un péril fubhftant
pour la religion. C ’eft l’effet que l’on doit
craindre toutes les fois que la religion eft
�M*
invoquée à l'appui de la réfiftancc aux loix
civiles > foie dans les grandes , Toit dans les
petites ebofes ( i ) , & la route eft toute tra
cée par le Bref.
Il avertit les Evêques que leurs propres
droits de ceux de tous les Eccléfiaftiques fé-»
culiers de réguliers font blcfles ; il leur notifie
le prétendu violement de leur jurifdi&ion ;
il les rappelle à l’indépendance des perfonnes
de des biens eccléfiaftiques j il leur montre
la hiérarchie renverfée > l'Eglife rendue capti
ve des Rois de la terre , er livrée à la plus
violente attaque, Dieu meme intereffe dam
cette caufe. Il leur défend l’obéiïTance , il leur
défend même le fupport en déplorant le fort
de ceux qui ne s’oppoferoient pas à l’exécution
desj Edits j il affocie les Prélats inférieurs au
devoir d'une réfiftance ouverte ; il les preffe
à la fois par leur propre intérêt, par la loi
de l’obéiflance au St. Siégé, de par le cornCi) Et ne devez fouffrir en aucune occafion , pour fi
petite qu'elle fo it, qu’ils entament votre autorité,
laquelle pour fi peu qu’elle foie brccKée cft aifée à
entr’ouvrir , ne plus ne moins que les digues &
chauffées qui foutiennent la mer 8c les rivières, les
quelles ne fe minent pas fitôt par l’impéruofité des
flots ou poids de l’eau qu’elles foutiennent , com
me par quelque petite ouverture que fera un raf
d’eau ou autre petit animal , qui les perçant donne
cours inévitable au torrent qui les emporte. Remontr.
du Parlem. d'Aix 1614.
143
mandement le plus abfolu ( 1 ) : que refte-t-il
que de leur ordonner, comme autrefois, de
déployer le glaive fpirituel de toutes fès fui
tes ( 1 ) ? Qu’on mette à exécution le fyftême
du Bref, des Edits pourront être enfreints,
condamnés, diffamés dans un Etat par quel
que Miniftre indiferet de l’autorité fpirituelle
que les autres ne pourront contenir \ elle
feule réclamera fur tous les objets qui ont
fait la matière des Edirs , le titre de puiffance abfoiue ; celle du Souverain fera feule
étrangère dans fes propres Etats fur des points
qui touchent à l’ordre public, de recevra ce
nom de l'autorité qui fe reconnoit étrangère
fur la terre , de à qui les Rois ont ac
cordé le pajfage ( 3 ).
( 1 ) ïncompctentem atque ille^itimani poteftafera in Ecclefias atque perfonas & bona Ecdefiafticorum excrccntes . . . . ecclefiafticam jurifdiéHonem
opprimic . . . . Ecclefiam Dei quae libéra eft, facit
ancillam.......... in pr&judicium.......... Arcbiepifcoporum & Epifcoporum jurium . . . . emanata. . . . . Ne
proditA etcleftuflicA libertatis , defertæque turpiter
Dei caufar, rci cÆciamur . . . . Epifcopis pr&cipimus
8c mandamus ne Ediifta............. executioni mandari
permutant. . . omnibus . . . prohibemus . . . ne . . . .
obtemperenc.......... Bref.
( 1 ) Canon Autoritatem , cituf. 1 ç. qu. é.
( 3 ) Confircntes quia peregrini 8c hofpites funt fuper rerram. H&br. 1 1 . 13 . 14. 1 6.
Chriftiani intelligebanc Imperium rômanum , hofpuam in terris, arque peregrinam complcxum Ec-
�144
il eft vrai , Meilleurs, le Décret royal
d’Efpagne indique le . remede à ces entrepiifes : Quand de pareils Decrets naiffent du mi
lieu de l’Etat 3 on doit y remédier par la force.
Mais fans parler des obftacles qui peuvent
s’élever au dedans & au dehors par la clé
mence èc la piété des Souverains , par l'in
trigue , par le crédit, Sc même par le fendment que l’ autorité fouveraine a de fa propre
force , il feroit toujours trille d'avoir à répri
mer les dépofitaires d'une autorité que tout
oblige à faire refpeéter } &c dans ce combat
des deux autorités, le véritable Souverain fut
fouvent celui qui peut maîtrifer les confciences
( i) , celui qui peut combattre l’enfeignement
public de l’Etat par l'inftru&ion fecrete , par la
terreur des cenfures encourues de plein droit,
celui qui peut confacrer l'ufurpation en la
liant à la religion fous les noms les plus impofants. Dans d'autres tems la Cour de Par
me auroit eu tout à ctaindre des fuites d’un
Bref qui ébranle l'obéiffance des fojets parles
plus terribles menaces , qui comble d’élo
ges ceux d'entre les fujets qui auront réfifté
aux téméraires efforts des Aiagifrats exécuteurs
des
clefiam. Bojfuet, dtfenf. Cler. Callic. tom. r. part. i.
lib. z. cap. 3 1. p. 14 4 .
( 1 ) Us ne font rien moins que Rois clans vos
Provinces. Remontr. du ïarlemtnt d'Aàx de 1614.
M J
des E dits, $c qui leur auront refufé Pobéif,
fance en conformité des conflit ut ions canoni
ques ( 1 ) : le Bref les force tous à défobéir
& à contredire ( 2 ) ; il porte l'anathême juf.
ques fur ceux qui reconnoitront de fa it l'au
torité des Edits & celle du Magiftrat politi
que fu r les biens & les perfonnes des Ecclcflafliques ( 3 ) -, il prohibe non feulement de
recourir , mais même de fe foumettre au
Tribunal féculier, & à la difpofition des Edits
qui défend de le décliner ( 4 ) : n'eft-ce pas*
( 1 ) Qui temerariis eorum aufibus quoquo modo
reftiterunt , & juxta canonïcarum Sanctionum nortnam obedire reeufarunt. Bref.
( 1 ) In ipforum Magiftratuum aliorumque tam
mandantium quam confulentium , erequentium . . . .
Et cum polïent non ïmpedïenùum nec corrigentium
pcrniciem. Bref,
( 3 ) Eos omnes qui . . . . Editta . . . edidetunt promulgârunt , vel illis uli fuerunt vel alios quofcumque preediétorum executioncm procurantes, vel
per fe îpfos exequentes, atque illegitimam poteGtatem fupradiétorum Magiftratuum , Judicum , Officialium , Confervatorum , & Superintendentis aflert*
jurifdi&ionis , in perfonas, res , bona CT ju ra l e clef arum , v e l JLpifcoporum , Br&latorum ac régulanutn fafto agnofeentet. Bref.
(4) Adjeétis contra EccleGaï leges & inftituta
duriflimis condicionibus . . . . laicum forum non declinandi . . . . omnibus . . . . petfonis . . . . prohibemus atque interdicimus , ne præfata Edifia . . . . . .
quovismodo exequantur vel iis obtempèrent aut obtemperare faciant , multoque minus præfati Magif-
T *
�14 6
Comme on l’a remarqué en Efpagne, autorifer
le foulevemcnt ?
Mais fous un Prince qui a reçu avec le
jour l’art de régner , & dont les jeunes
aimées donnent un nouveau prix à fes ver
tus , fous un miniftere habile , fous un
Clergé pieux ôc éclairé , tout eft demeu
ré fidele dans l’Etat de Parme , & l'on
a pu reprocher avec raifort aux Officiers
de la Cour de Rome d’avoir entrepris
vainement de rendre inutile l'acceptation
que le Clergé & le peuple avoient faite des
Edits.
Le Roi d’Efpagne jouit auffi de la fatisfaétion de n’agir que d'après le fentiment gé
néral des Evêques de fon Royaume, Ne dou
tons pas que la même unanimité ne fe trou
ve dans tous les Etats catholiques : les re
cueils de nos Libertés font remplis d'exem
ples de la ferme réfiftance des Evêques aux
entreprifes des Papes ; ils s'indignoient tous
contre ceux qui engageoient à violer les Ca
nons l’autorité chargée de les faire exécuter
dans l’Eglife ( 1 ) ; <3c lorfque pendant la te*^ '*
• -Vi (
,
tratûs aut eiufdetn Minifhorum , feu altcrius laicalis Tribunalis foro feft fhbjicere audeant vel prs.fumant. B n f.
(O Gqlliàrum conique Vt&rnles univerfi parîter detenantes , quoniam nimitim indecens videbatur ut is
qui a^oftolicam regebat Sedcm apoflolicuna prirai-
147
nue du Concile de Trente on flattoit la Cour
de Rome de l'efpérance d'amener les Evê
ques françois à favorifer la prétention de la
fupériorité du Pape fur l’Eglife , le Cardinal
de Lorraine avertifloit, par une lettre écrite,
pour être montrée au Pape > que de penfer que
nul Prélat s'y accorde ce [croit une folie (1 ).
Le Pape Pic IV céda à des inftances Ci vives,
& renonça au projet de faire renouveller
dans ce Concile la formule de celui de Flo
rence, que les Prélats françois rejettoient com
me pouvant être détournée au fens ultramon
tain. Ce trait de fagefle, que î ’hiftoire a loué
dans ce Pape , auroit été fuivi d’une imitation
confiante, fans les nouveaux efforts des flat
teurs de la Cour de Rome. Le fruit de la
derniere entreprife doit être d’ouvrir tous
les yeux, de faire fentir tout le prix de nos
maximes , &: le danger des moindres affoibliffemens,
L ’anathême déclaré contre le Prihce de
Parme fe réfléchit fur tous les Souverains;
il eft lancé pour le même fu je t, qui fuivant
la Bulle In corna Domini, & les autres que le
Bref indique en termes généraux , fait en
courir l’exçommunication.
tùs ac canonicum tranfgrediebarur tenorem. Rodulpb
Glabert. lib. i . cap. 4. ap. Duchênc.
( 1 ) Lettr. du Cardinal de Lorraine, Mémoire pour
fcryir à l ’hift. du Conc. de T ren te, p.
T ij
�I4§
Les Princes , ce font, Meffieurs, les paro
les de vos prédéceffeurs , [pavent allez qu’ils
ne doivent pas feulement obfcrver au gouver.
nement de leur Etat ce qui efi convenable au
préfent , mats tenir une réglé qui les ajfure
en toutes faifons (i). Et l’un des plus puilfans
Monarques de l’Europe, a déjà die à l'occafion du Bref, que le Prince temporel a le droit
de réffter d la puijfance fpirituelle , lorfqu’elle
veut le troubler dans la jouijjance de [es
droits.
Cetce maxime que l’Efpagne appuyé du
fuffrage de deux Ecrivains eftimés , quoique
prévenus d’opinions ultramontaines , ell fi cer
taine j qu’elle n’a pu être conteftée par les
Ecrivains jéfuites , & puifqu’ils font les vrais
promoteurs du B ref, il eft jufte de les oppofer à eux-mêmes : ce qui peut paroître fingulier , c’eft que cet aveu fut diété par un
raffinement d’ultramontanifme , par un effet
de cette fainte horreur que la Société a pour
nos maximes, 8c qui eft fi fortement expri
mée dans le manuferit dénoncé ces dernieres
années au Parlement de Bourdeaux.
Les Ultramontains 8c les Jéfuites ont craint
de rendre l’autorité de la Cour de Rome
odieufe , s’ils la pouftoient jufqu’à priver les
Souverains du droit de défenfe contre des
Ci ) Remontrâmes du Parlement d’Aix de l'année
J 6J 4.
M
9
entreprifes capables de troubler la sûreté de
leur Etat. Il falloitdonc un remede au moins ap
parent, & l’on vouloir fur-tout exclure le recours
à l'autorité du Concile : les Princes la réclamè
rent autrefois , non pas comme compétente fur
les droits de leur Couronne [ i ) , mais comme
la plus capable de ramener les peuples à leur de
voir , 8c de guérir la fuperftition : le même
motif a rendu ce recours redoutable aux en
nemis de nos maximes ; ils ont mieux aimé
autorifer dans des cas extraordinaires la réfiftance de fait (i). Le premier Dorfteur Fran
çois , qui ofa enfeigner en Sorbonne l’infailli
bilité du Pape , 8c condamner les appels au
( 1 ) Concilium œcumenicum poftulatum arque ad
id appellatum edam ad regni tuenda jura ; non,
quoi ju ra regia in Synodi poteftate ponerent , fed quod
ea defenfuros adversùs Bonifacii minas Concilii generalis præfidium cueretur. Defenf Cler. Gallic. tom.
1. part. 3. lib. 10. ch. 15 . p. 13 0 .
( i ) Etfi inrerdum fine graviora & clarè injufta, jure
defenf onis poflunc homines fe tueri, non tamen jure
rindicadonis aut punidonis. Suarez de legibus, /. 4.
c. 9. n. 6.
Non quod aliquis pofiît efie judex Papar, aut in il
ium autoritatem habeat, fed per modum defenfonis.
Cuilibet enim efi: jus ad icfifiendum injuria? & impediendum defendendumve. Caietan, de authoritat.
Pap. c. 7. vid. Diana Refol. moral. 1. part, truft.
de immunit. Ecclef. refolut. 17 . Molina de juftït. (y
jure tom. 1. traft. 1 . difput, 3 1 . concluf. 4,
�I 50
Concile , fuivit ce plan ( i ).
Cette préférence que nos François ont trai
tée de bizarrerie ( i ) , & qui G elle étoit
bien fériéufe mériterok ce reproche , n'eft que
le fruit d'une profonde politique. Les Jéfuites , en faifant cet aveu , ont compté que la
fuperftition & l’intrigue qu'ils avoient foin
d’entretenir par-tout , défarmeroient les Na
tions , & qu'il ne refteroit aux Souverains,
fous le nom du droit de défenfe, qu'un
moyen ftérile.
Peut-être dans un fiecle où les devoirs des
peuples font mieux connus, les mêmes hom-i
mes parleroient un autre langage \ &c s'ils
ofent dans ce moment fuggérer à la Cour
de Rome des Brefs qui renouvellent des dé,
mêlés capables d’attirer fur [es propres Etats
les plus grands malheurs (5), c'eft que le plus
grand trouble eft nécetfaire à leur état prefent : ils fe font jettés dans cette étrange ex
trémité , de vouloir que la religion s'expote
(O Non obedire mandatis Pontificis i imo fi aliter
fibi fucurreie non poftint , ftrenuc prudenter que refiftere. D«tm l, de Rom. Fontif. fart. 4. quefi. ultim.
p. 6t6 edit. 16 14 .
( i ) An ergo læfos Principes , ftrenuc rem gerete, quàm conciliare iudicium expedlare malinr , ipfl
dijudicent. Defenf Clerc. Gallic. tom. i . fart. 3. lib.
10 . c. 30. p. 138.
(3) Requifitoire de M. Seguier, Avocat général
au Parlement de Paris , pour la fupprelTion du Bref,
M*
pour eux , ou , s'il étoit pofbble , qu'elle pé
rit avec eux, contre la foi confiante des promeflès.
Quant à nous François , infiruits des vérités
de la religion dans les fources les plus pures ,
fortifiés dans nos devoirs par les exemples de
nos prédéccjfeurs (1) , nous croyons avec l'Eglife Gallicane, & avec tous ceux qui nous
ont précédés dans l'exercice du miniftere pu
blic , que ces fortes de Décrets de Rome
étant nuis par eux-mêmes, l'appel au Concile
efi fuperfiu (i) ; mais que le Souverain, qui
peut repouffer par le glaive matériel l’abus du
pouvoir fpirituel (3), peut aufli employer le
fccours des Conciles nationaux qu'il a feul
le droic d'aftembler , & celui des Conciles
généraux q u i, de l'aveu de tous les Théolo
giens du monde , peuvent dans des cas ex( 1 ) Difcours de M. le Premier Préfidcnt du Par
lement de Paris au R o i, contre un Bref d’Alexan
dre VIII. 7 mai \6 $\.
( r ) Sic ipsâ per fe nota nullitate contenti appellationem ad Concilium cccumenicum fuperfluam
cenfuerunt. Defenf. Cler. Gallic. part. 1 lib. 4. eap.
ï*- P• * .
(3) Licitum eft Principi abufum gladii fpiritualis
rcpellere eo modo quo poteft etiam per gladium materialem , præcipuè ubi gladii fpiritualis ufus vergit
in malum reipublicæ cujus caufa incumbit, aliter
cnim gladium line caufa portât. Joannes fariftenfis.
38
�M 1 ,
traordinaires être aftemblés au refus Sc con
tre la volonté du Pape ( i ). Un Concile
peut déraciner l'erreur qui attaque les
droits des Couronnes, 8c menacer des pei
nes canoniques quiconque ofe les ufurper
(T). Le droit de l’autorité laïque eft de
réprimer l'attentat par d'autres voies ; celui
de l’autorité fpirituelle eft d'éclairer 8c de
défabuler les efprits.
Les Cours 8c le Miniftere public ont fouvent pris la liberté de propoler au Souve
rain leurs vues fur les mefures à prendre con
tre
( i ) Sanè non Parificnfis privatîm, fcd tota Théologorum tS Canonifiarum Schola proficctur certos elle
cafus , eofque extraonàinarios , in quibus Concilia
generalia fine Romano Pontifice celebrari poflînt. D«fenf. Cler. Gallic. part. 3. tom. 3. lib. 8. c. 18. p.
Quintum rcmedium eft convocarc Concilium ge
nerale > quæ convocatio cflet facienda per Cardina
les fi ipfe Papa id nollct congregarc , aur per altos,
illis negligentibus. Cardin, de Turrc-cremata fummp
de Pcclef. I. i . c. 106.
( 1 ) Nous pouvons y avoir recours , mais avec cette
précaution pourtant que nous ne prétendons point que
des objets temporels puiffent jamais être la matière
d'une coritroverfe fujette au Tribunal & à la Jttrifdiciion eccléfiajlique. . . . Il n’eft point de puifiancc
fur la terre qui puifTe donner des bornes a l’auto*
xité du Roi. Mr. Talon , difeours fu r les fran*
thifes t 1688.
! 53
t-re des entreprifes de ce genre , & ont meme
déterminé, fous fon bon plai/ir , celles qui
peuvent appartenir à leur autorité : on en
trouve des exemples fous tous les régnés, &
particulièrement fous ceux de Philippe le Bel
Sc de Louis le Grand ( 1),
Nous fommes bien éloignés de vouloir in
diquer des voies capables d’affliger un Pon
tife qui dijftperoit tout: le mal d ’un feul de fes
regards, li l'intrigue ne lui déroboit tout. Ja
mais il n’y eut fur la Chaire de Pierre plus
de droiture 8c de piété, mais elle ne fut ja
mais environnée d’autant de féduétions Tous
les moyens de repouflèr l’entrepri'.e font donclégitimes, &c tous pouiroient devenir nécef.
faites , fi l’on s’obftinoit à lui prêter le pou
voir 8c le nom du Pape : les aéfes poftèffuires du pouvoir fur le temporel , doi
vent d'autant moins être négligés , qu'ils
le font multipliés fous le Pontificat le plus paifible. Que n'eùc-on pas entrepris fous un Pon
tife ambitieux , û l'on a tant ofé fous le pieux
Clément XIII !
Ce n’eft pas à nous de prévoir ce que les
Souverains croiront devoir , & à la répara
tion authentique de l’affront fa it à la Dignité
royale} de à la néceflîté de délivrer le Pon( 1 ) Requérons que le Roi foie fupplié Je défen
dre à fes iujets d’avoir aucun commerce à Rom e,
& d’y envoyer aucun argent.' id. ibid.
V
�. .
J J 4
tife de l’intrigue qui l'aflfiege : nous ne per
cerons point le voile refpeétable qui couvre
leurs deffeins, & nous fommes allurés de reconnoîcre , dans tout ce qui émanera d’eux ,
l’ouvrage de leur puillànce &c de leur amour
pour le St. Siégé. Confondre par une difeuffion exaéte du Bref les exeufes perfides des
partifans de fes maximes , 8c lui oppofer le
bouclier des nôtres , voilà notre partage.
Leur dernier artifice eft de faire envifager
ce Bref comme le fruit d’une intrigue paflagere excitée par les Jéfuites : mais qui dit
ces chofes? peut-être les Jéfuites eux-mêmes,
toujours changeans , toujours méconnoilfables, 8c capables , lorfqu’il le faut, de s’aceufer pour fe fauver ou pour faire preuve
de crédit ; peut - être encore des Ultramon
tains qui ne font pas Jéfuites, efpece qui de
vient aujourd’hui fi commune , qu’on ne pourr o it, fans calomnier les Jéfuites , les croire
feuls inftrumens de l’ambition du Minillere
de R e m e , 8c juger d’eux, comme fi le fyftême ultramontain étoit né avec la Société,
ou prêt à expirer avec elle.
Dévoués au vrai par état 8c par fentiment, nous reconnoifïons que le dernier Bref
ne peut avoir pour auteurs que ceux qui dé
voient leur exiftence 8c leurs privilèges aux
maximes renouvellées par le Bref j ceux , qui
ont fait de l’ultramontanifme la matière d'un
vœu de réligion ; ceux, dont les Bulles font
remplies de claufes toutes femblables à celles
du Bref ; ceux, qui ont incorporé à leur Inf.
ticut la Bulle In cœna Domini (i)'y ceux, qui
ont furpris à la religion de Clément XIJI la
Bullc slpofiolicum , confirmative de l’Inftitut,
8c l’étrange Bref adreffe au Roi d’Efpagnc,
ail fujet de l'Edit d’expulfion des Jéfuites.
,
Pourquoi ferions - nous étonnés de voir
cette Société conferver encore un crédit
dans R o m e, lorfqu'en France où elle s'eft
toujours regardée comme fouffrante ( randis
qu'elle s’applaudifloit de fleurir ou de régner
ailleurs ) , elle a pu trouver des vengeurs
de fa difgrace, ériger en faveur de l'Inflirut,
8c contre les maximes qui ont décidé fa
profeription , des monumens affligeans qui ,
fans les mefures prifes par le Souverain 8c
par les Magiftrats, auroient compromis les
jugemens, les loix , l’autorité légiflative y fufciter enfin des accufacions publiques d'entreprife fur la hiérarchie, 8c d'erreur dans
la f o i , contre les membres de la Magiftrature, 8c des orages au Corps entier.
La France refpiroit à peine qu'on a vu le
flambeau de la fédition allumé en Efpagne,
8c des intrigues tramées dans toute l’Europe
�1 56
contre l’augufte Maifon de Bourbon : la flè
che vole &: revoie de Rome à toutes les Cours
du monde chrétien , & prend dans toutes une
forme différente : le Bref eft la derniere œu
vre de cette Société , il indique lui - même
fes auteurs.
La Cour de Rome auroit-elle tonné fur des
Edits , la plupart rendus depuis trois ans,
conformes à des Concordats pufles entr’elle &
la Cour de Parme , formés fur le modèle
d ’Edits femblables qui fubfillent en Italie fans
concradiélion} D ’où peut venir le long filenc e , dont cette Cour paroît s’inculper ellemême [ i ] par le Bref ? Pourquoi ce mépris
des offres fi fatisfaifantes de la Cour de Par
me , de ces offres que le dénouement lemble
accufer d’un excès de condefcendance ? Pour
quoi enfin cette rupture lubite ? Les faits ré
pondent :• les Jéfuites, au tems des premiers
Edits de Parme, n’éroient pas encore profciits de tous les Etats où régné la Maifon
de Bourbon , ils l'écoient loi fque le Bref a
paru ; ces deux époques motivent le filence
de trois années Si l’éclat imprévu qui a fuccédé.
U falloir à la Société détruite en France
une querelle de religion -, après l’avoir vai(x) Diuturniori longanimitate indulgentes...........
nimiùm fané pet nos nue ufque toletata . . . . diutius filcotes, otioG. ac defides, &c. Bref,
' , , M7
nement cherchée dans les prétendues ufurpations de la puiflance féculiere en matière
de vœux Si d’inftituts, elle ianima, fur un
objet plus général , des divifions éteintes ;
elle finit aujourd’hui par reproduire, à l'aide
du nouveau Bref , le germe ancien de tou
tes les difeordes , la prétention du pouvoir
fur le temporel, Si la Cour de Parme de
vient le théâtre de cette querelle, parce qu’on
efpere que le lien étroir qui unit le Prince
de Parme aux Couronnes de France , d’Efpagne Sc de N aples, rendra la querelle plus
générale. Ce n’efl: que dans une fubverfion
totale que cette Société , née pour détruire
( i j , cherche fon falut ou fa confolation.
Mais qu’importe que les Jéfuites aient dic
té le Bref, le monument exifte-t-il moins? Il
auroit du être défavoué, comme le furent des
lettres du Pape Adrien II à Charles le Chau
ve , Si comme un de ces aües extorqués , furpris , ou fabriqués par des mains étrangères
( i ) ; ce Bref n’eft cependant que l’écho fidcle
de tant de Bulles antérieures à Pétabliflèment
de la Sociécé, ou émanées des Papes q u i,
C i ) Magis ad deftru&ionem quam ad ædificationem. Décret de Sorbonne de l’an 1554.
( r) Litteræ delatæ vobis vel fubreptæ , vel à nobis infirmantibus extortæ , vel a qualibet perfonâ
eonfifti. Epifl. 34. Adrian. II. ad Carolum Cnlvum.
tom. 8, Concil. p. $37 .
�loin d’être guides oui Tes inspirations, auroient defiré de pouvoir en délivrer la chré
tienté.
Le pouvoir fur le temporel a été retracé
dans un B re f, fous le pontificat du Pape le
plus éclairé, le plus ami de la paix, Benoît
X IV ; on y lit que l'ouvrage compofé par
Bolîuet pour la défenfe des quatre articles
de 16 8 1 , ne fut épargné à Rome que par
égard pour fon nom ; &c l'on voudroit qu'il
nous fut permis de négliger la cenfure plus
hardie, qui n’épargne pas le nom des Sou
verains! Si dans une conjonélure particulière,
les Officiers de la Cour de Rome ont laifié
aux Jéfuites le foin d'être les promoteurs du
nouveau Bref, eft-ce allez pour croire que
ce fera le dernier aéle pofTelToire du pouvoir
fur le temporel ?
M ais, dit-on enfin , leur profeription va
devenir univerfelle, à ce prix tout peut etre
oublié : comme fi l'on pouvoit faire ache
ter aux Souverains le décret d'extinélion
de l’Ordre par l'acquiefcement à fes ma
ximes , réali fées par le Bref. Que Rome
punifTe cette Société d’avoir tant de fois méprifé ou compromis l'autorité de fes Ponti
fes, l'intérêt de fa gloire &C de fa propre fu
reté concourt avec celui de la religion.
Nous n'avons pas la témérité de donner
des confeils à celui que Dieu a prépofé pour
inftruire les fidèles, ou des leçons de politi
que à une Cour fi éclairée fur fes intérêts;
mais que Rome daigne confidérer combien
elle avoir à craindre pour elle-même d'une
Société dans laquelle tant d'Evcques, de Magiftrats, de Jurifconfultes, de Théologiens
n'ont vu ( avant même que l'expérience eût
parlé contr'elle ) qu'une Seéte qui devoit être
exterminée : elle fut jugée dès lors d'au
tant plus dangereufe , qu'elle s'attribuait une
origine plus relevée, 8c que s’annonçant com
me defeendue du Ciel , elle fembloit ren
fermer des femences de fchifme, vouloir établir
pour elle feule un nouveau régné , contre
défenfe & la. malédiction prononcée par l JEvan
gile ( 1 ) , & concentrer en elle l'Eglife (2.J .
la
( 1 ) Jcfuiræ ifti , ut majus Ç? augufl tus CeCe haberc principium gloriantur, ira majores fpiricus colligunt , & majora fefc brevi fa&uros ipeûant 6c
ja & an t. . . . fibi folis novum regnum erigere, idque
ftipe fimplicium , cjuod vetat er maledicit Chriftus.
Dumoulin in confult. fuper eotnmod.
incommod.
nova, fréta feu. faétitia rtligionis Jefuitarum,
( t ) Hi cavcant an hareticorum more , penès fc
Ecclefiam exiftere mentiantur. Melchior Cano de loe.
theolog. lib. 4. cap. 1 .
U t ...........Collegium novum erigat, quin ctiam
Eccleftatn novam. Moiinaeus Confil. fuper cormnoi.
v e l incommodis nova fefta feu factif ia religionis Je
fuitarum.
Et tèmble qu’ils fe veulent dire feuls faire Cf
conflitutr l ’Eglife. Avis d’Euflachc du Bellay.
�i6o
“
I
L ’Inftitut originaire , inadmiflible dans tout
Etat policé , à ne confidérer même que le
danger infcpauable des vues d'une perfection
outrée, ou d'un projet fi vafte , qu'il demande
pour ceux qui font chargés de l’exécution un
pouvoir fans réglé ôc des fondions illimitées,
fut fuivi de changemens q u i, en ôtant tout
le bien envifagé par le Fondateur , lui fubftituerent la plus ténébreufe politique , une
morale fyftématique ôc néceffaire au nouveau
régime , ainfi qu'à l’apologie d’une conduite
qui achevoit d'expliquer l’énigme des Conftitutions. On voit dans l'Inftitut le germe de
la morale ôc de la conduite -, on retrouve
dans la conduite l’Inftitut ôc la morale mis
en adion ôc perfonnifiés j on reconnoît dans
l'enfemble un fujet de trouble ôc de péril
univerfel.
Le fanatifme ordinaire eft moins dange
reux -, c'eft un délire de l'imagination qui ad
met l’infpiration de bonne foi *, il eft fans
réglé ôc fans conduite, il eft auftere, il
outre les vertus, il tend au fublime ôc au
merveilleux.
Le fanatifme de la Société, purement po
litique dans le régime , a un principe d'am
bition infatiable , une direction fuivie & tour
née à l’accroiftement temporel : il a pour mo
yen de domination ôc de conquête , une doc
trine G perverfe, qu'elle emploie à détruire
ou
161
ou à corrompre la nature, la religion deftînée à la perfectionner : il mêle indifféremment
les moyens divins ÔC humains ; il afpire à tout,
ôc ne refpeCte rien ; il a de quoi fe rendre
redoutable à Rome même. L ’éclairciflement de
ce point fourniroit le fujet d’un ouvrage intéreflant ; je l’aurois entrepris fi les forces de
ma fanté étoient égales à mon zele , ôc (i
j'avois à ma portée tous les livres néceflaires
aux preuves de détail. Quelques réflexions
fimplcs découvrent aux efprits attentifs, com
bien la Cour de Rome s'oublie ôc fe trahit
elle-même , en accordant à l'importunité des
Jéfuites proferits, tant de Bulles ôc de Br^s
qui la compromettent avec toutes les Cou
ronnes.
Rome connoît mieux qu’aucune Puifîance
les attencars de cette Société, le fcandale de
fes rebellions aux ordres du St. Siégé , aux
Vicaires apoftolîques refufés en Angleterre ,
ailleurs perfécutés ôc même immolés.
Les preuves de leurs crimes font dépofées
dans fes archives, ôc leur procès eft inftruir:
Rome cependant fe tait ôc fe raffûte , parce
qu'elle croit pouvoir en tout tems renverfer
d’un fouffle l’ouvrage de fes mains : elle le
peut fans doute dans ce moment, c'eft-à-dire,
après la profeription ordonnée par des Mo
narques puiflants dans la plus grande partie
de l'Eu iope, ôc fujrtouc après leur expulfîon
X
�1 64
Ut horpmes & les Anges ( i ) , chargé du foin
de communiquer la perfection au prochain
( i ) , qui conltitue le caraétere du cKviftiaiiilme &c là fonétion propre de l'EgÜfe -, lorfqu’il dit enfin qu'il a été établi par des mo
yens tout divins [ 3 ] , que les loix 8c la
(truéture entière de la Société ont été révélées,
& que l’Inftitut a été infpiré 6c même diété
à fon Fondateur [ 4 ] ?
Si l’on peut croire ( fur la foi d’une tra
dition fufpeéle ) que le Fondateur lui-même
s’eft flatté de cette infpiration ( 5 ) , Benoît
X IV , fi indruit des réglés des canonifations,
a remarqué qu'// peut arriver a des Saints
Gum nec in hominibus nec in tpjis Angelis
nullum exercitium officiumque fublimius reperiri pof-ÛJ. eBpifi. Pr&pofitorum generalïum , Antuerpie, apud
Meurfium.
( i ) Ordinatut non modo ad perfe&ioncm acquirendam, fed etiam exercendam & communieandam,
& ex vi votorum fuorum , quod illi proprium efi ,
ad hoc obligatur. Sucrez, , p. 410. n. 5.
( 3 ) Sociecas quæ mediis humanis inftituta non
tfi. Conflit. p. 10. num. 1. p. 445;,
(4) Dominus Deus ideam tetam Societatis noftræ
tùm exteriorem , tùm etiam qua: ad interiorem vittutum forroam pertiaerex , ci ( Ignatio ) canquam
papiti & fundatori communicavit, Brœmium Vires*
(erdi in exereïtïa , p, 133,
D isante Maria.
q
( j ) In hac Societate , cujus mibi nonnullam pço«arationem ac cutam Dominas tradidit. Inftir. tom,
%.ip. 1 Ç6. mm.
io .
.................. .....
l6 5
.
d’etre fcduits par le pouvoir de /’imagination
au point de prendre leurs propres idées pour
une révélation ( 1 ) : ce grand Pape le prouve
par des doctrines 8c des exemples.
Les Jéfuites font allés plus loin ; ils ont
en quelque forte continué le privilège de
Pinfpiration aux fuccefleurs de Sr. Ignace 5 ils
doivent voir Jcfus-Chrijl préfent dans la perfonne du Général ( z ) ; ils lui ont encore
attribué, en qualité à’interprete de la volonté
divine [ 3 ] , une forte d’infaillibilité [ 4 ] ,
ou du moins une autorité abfolue à fes déci
dons , à fes ordres ; ils doivent y adhérer
comme aux dogmes de la foi catholique,
écouter fa voix comme celle de Jefus-Chrift,
exécuter les pommandemens avec une fou(1) Ficri benè poteft ut aliquis Santtus ex præconceptis opinionibus aut ideis in phantaftâ fixis ,
aliqua fîbi à Deo revelara putet quæ à Deo revelata non funt. BenediCtus X IV . de béatifie. CT canoniz. Sanftor. lib. 3. cap. ultim. num. 7.
(1) Subdici verô . . . . Præpofto in omnibus ad
inflitutum Societatis pertinentibus parère femper teneantur, & in co Cbriftum veluti pr&fentem agnofcant, Sc quantum decet venerentur. 1. Bulle appro
bative de l’Inftit. donnée par Paul 111 dans U mois
d’ottobre 1^40. tem• *• de Vlnfitt. p. f.
(}) Divins, voluntatis interpreti. Infiit. tom. 1. p*
16$. num. 9.
(4) Intelligentia ne fallatur ad Superioris intelHgenriam conformanda eft. Ibid.
■ î M*
•"
< ‘
<'* *'4
�1 66,
million aveugle, impétueufe , indélibérée [i].
Dans les Conftitutions > les maximes vertueufes du Fondateur , les tempéramens po
litiques , & les dérogations des fuccefîèurs,
font préfentés comme également révélés : les
exercices fpirituels, vifiblement altérés & rem
plis de réglés dangereufes , font alîociés au
même privilège [ i ] : le bien &c le mal com
mandés par l'Inftitut font fi extrêmes, qu’ils
fuppofent également l'infpi ration : les vertus
héroïques Ôc les aétions défendues y font
mifes en précepte ; l'un ôc l’autre tient au
fanatifme : le vœu de religion, par exemple,
( i ) Non intueamini io perfonâ Superions hominem obnoxium erroribus arque miferiis , fed Chriftum qui eft fapientia fumma . . . . qui nec decipi
poteft , nec vos vult ipfe dccipere, itaque Superioris vocem ac julfa non fecus ac Chrifli voeem erc ip ite .,..u t ftatuatis vobifeum ipfisquidquidSuperior
præcipit ipfius Dei præccptum efïc & voluntatem,
atcjue ut ad credenda qu& calbolïca fidts proponit coto
ammo afïenfuque veftro ftatim incumbitis , fie ad
ea facienda quæcumque Superior dixerit cœco qnodam impetu voluntatis parendi cupidæ (ine ulla prorsùs
difquifitione feramini. Epifl. S. Ignatii de virtute obedientU , Inftit. tom. i . n . 1 6.(3“ 18. p. 1 6<j.
Illius perfonam refert cujus fapientia falli non po
teft , fupplebitque ipfe qnidquid miniftr© defueiit,
fiv e trobitate aliifque ornamentis carear.
( t) Ex unftione Spiritüs SanEti . . . . Ignatius cornpofuit : hs.c Çunt lumina qUA ei Dominus in ipfo pri
mo converfionis fertore infpiravit. Proemium diieétoui
în excrcitia, n. i. p. 433.
167
qui doit avoir le bien pour objet, y effc porté
jufqu'à l'obligation de iuivre toujours le
leur ôc le plus parfait 3 ce vœu (upérieur aux
forces humaines u'efl point légitime, s'il n'efl:
émis par une infpiration fpéciale [ 1 ] , qu’il
eft Ci dangereux de fuppofer légèrement ; ÔC
Jorfque ce vœu de perfection , ce dévoue
ment aux voies extraordinaires e ft, comme
par l’Inftitut, rélatif à la volonté d'un tiers,
il lui attribue Je privilège encore plus dan
gereux d’être infpiré pour la conduite des
autres.
Mais de grands Magiftrats ont démontré
que le Général, fous prétexte de conduire
aux vertus héroïques , peut ordonner des
épreuves criminelles , qu’il peut obliger fes
fujets à des aétes contraires à la loi divine ôc
naturelle [ 2 ] , d tout: genre d’aftion com( 1 ) Votum cfficiendi femper qnidquid perfeflius
Intelligerec , hoc votum validum non fuifTe , nid
quia emifîum eft à fandtâ Therefïà , Deo edocente
8c confiante , ut aiunc Greg. X IV. & Urban. V III.
ex iis verô quæ fpeciali Sandti Spiritüs infpiratione
fiunt non valet illatio ad ca qui fiant de vitâ communi. Tournely de voto , & tous les Auteurs.
(i)Eofdem rentandoad majorcm ipforum utilitatem
fpiritualem eo modo quo Dominus Abraham tentavit•
Conft. part'. 3. decl. in cap. 1. tir. 5. p. 376.
Si hanc fïduciaro Supcrioribus præberent ut * * traordinaria non numquam in ipfis earum rerura
exempta edere poflcnc, quaî humanâ hac prudeotiâ
�1 68
mandée comme pouvant être utile an corps
de la religion, & que f ordre doit cire accep
té comme émané de la main du Seigneur [ i ].
Celui qui commande & celui qui exécute
agilTent donc également en infpirés \ ce qui
conftitue le plus dangereux caraétere du fanatifme, dont le propre eft de juftifier tous
Tes excès par une inspiration imaginaire ou
fuppofée ( i ).
On peut donc conjeéturer que cette So
ciété
niti minime videantur , quibus Deus ipfe in Super'tore agnofeatur. lnfl. de obedient. tom. t. cap. 4. n.
9. p■ i 5>7 :
Sic egiGe credendus eft Abraham filium Ifaac immolare jufïus . . . . quod obedientiæ genus ipfis interdùm miraculis divinicùs comprobarum videmus....
eft igirur hæc ratio fubjiciendi proprii }üdieü, ac
fine ullà quæftione fanciendi 8c collaudandi apud
fc quodeumque Superior jud'eric . . . . imitanda om
nibus in rébus quæ cum peccato manifefto corqun&æ
non funt. lnfi. tom. x. n. 18. p. 165.
( 1 ) Sic enim obediens rem qnameumque cui eum
Superior ad auxilium totius corporis religionis velit
impendere , cum animi hilariratc deber exequi , pro
certo habens quod diyinæ ajoluntati rel'pondcbit. Conjl.
part. 6. cap. 1. num. 1. p. 408.
'
Semper autem eric fubditi mifïionem fuam , ut
de manu Domini, hilati animo fufeipere. Ibid. part.
7 . deel. in cap. x. lit. F. p. 418 .
( t ) îanatici homines inftin&um Dei meniiuntur.
Drfenf. C1er. Gallic, part. 1. lib. i, fect. x. c. 10.
-,ï40*
1 6<p ciété a cru s'être confacrée elle-même ; pluÜ
dangereufe depuis qu’elle a cédé de le croire
Tans ceder de le publier, &c depuis que lé
régime devenu purement politique a conti-f
nué de couvrir Tes reflorts 6c des attentats dtf
Voile de la religion.
Le gouvernement de la Société eft une efr
pece de théocratie : la Société déclare qu'elle
li'auroit pas eu befoin de Conflitut ions écri
tes , parce qu'elle compte que la fagede de
Dieu qui l'a fondée la gouvernera (1) , & la
théocratie eft néceffairement préfuppofée dans
un Ordre qui n'a point de réglé proprement
dite [1] f ou dont la réglé écrite, mais toute
mobile, dmulée , contradictoire, laide toute
l'autorité à la réglé vivante, au régime aétuel.
Si l'établidement des Jéfuites & le corps
de leurs loix ont été formés par une com
munication immédiate avec la Divinité , ils
ont un prétexte de les dire indépendans dé
toute autorité humaine, & à l'abri de la prof,
cription la plus authentique ; fi leur million!
eft célefte, elle eft irrévocable j û leurs loix
( 1 ) Quamvis fumma Sapientia . . . . Dei quæ confervarura eft gubernatura atque promorura . . . . ut
earn dignata e/t inchoare , ex parte ajero noftrd in
terna char 'ttatis . . . . lex , cjuam Sanflus Spiritus ferrbere . . . . folet , pottus cjuam ulU Confiitutiones ad
id adjutura fit. Prœmium Conftic. n. 1, p. 357.
( ij Zyppcus refponf. iur. canon.
Y
�17 0
font l’ouvrage de J. C . , Ton Vicaire ne peut
le détruire.
Il eft vrai que la police d’un Inftitut n’eft
qu’un point de difcipline particulière toujours
variable , & que celle de l'Inftitut des Jéfuites porte ce cara&ere ; mais la révélation fpéciale dont ils fe glorifient, auroit toujours
l’effet d’imprimer aux loix effentielles de l’Or
dre , un caradtere d’immutabilité, ou de con
centrer ( à l’exclulion des Papes ) le droit de
changer ces loix dans le régime qui a le dépôt
de cette révélation s & d’attribuer à ces changemens même une infaillibilité de direction j
le moindre effet du préjugé de la révélation
fera d’affurer l’indépendance
la perpétuité
du régime 3 & de remplir fes Testateurs de
cette opinion fanatique.
Toutes ces idées de million divine , de
révélation & d’infpiration, feroient peu dangereufes par elles-mêmes -, mais les Jéfuites les
annoncent comme canonifées par les Bulles,
(i^qui confirment jufqu’à l’obligation impo
li i ) Spiritu Sanclo , ut piè creditur , afiati , jàm
dudùm è diverfis mundi regionibus difeedeates , ia
unum corivenerunt , & focii effc&i . . . . Domino iofpirante. Bull. Regbnini Puni. III. lnfiit. tom. i. p. 6.
Ad quem finem Spiritus Sxnftus Y qui bonæ mé
morisé Ignxtium Loyolam , ipfius Societatis injlitutorem , ejufque focios excitavit , medix eùxm pnclara ,
maximèque oppottuna bujus Sedis minifterio , eis trihuit atquc confurnavit , gublicarura fcilicèc ptsedi-
l?l.
fee à tout Je fui te de voir J . C. préfetit dans
cacionum verbi Dci minifierii atjufcumque , &C.
Bull. Quanto frucluofius Gregor. XIII. lnfiit. tom. i.
P- 75-
Quaproptcr Societatis corpus in fua membra> otdinem , & gradus idem Ignatius , divino infiinftu
ità duxit difpontndum. Bull. Quantb fructuofiius Gregor.
XIII. Inflit. tom. i. p. y 6.
Ipfius inftituta , tanquam fundamenta cjus praelidii quod catholicæ religioni impendunt , immoca
atque inconcuffa , aliorum criam romanorum Pontificum exemplo , debemus apoftolicà au&oritate tu6ri : quorum rel. reg. Paulus III. & Julius eciam IIL
Conftitutiones , & laudabile di£læ Societatis Inftitutum confirmarunt : Paulufque idem eam ipfam ab
omni quorurr.cumque Ordiuariorum jurifdidtione exemit : quo Inftituto per Paulum IV. examinato > &
à Synodo Tridcntina commendato , Pius V. item prxdeccflbr nofter Socictatem ipfam Ordinem elle mendicantem declaravit. Bull. Âfcendente Domino Gregor.
X III. lafiit. tom. i. p. 78.
Quaproptcr Societatis corpus in fu * membrx es*
gradus idem Ignatius divino infiinttu ita duxit difponendum. Bull. Xfcendente Domino Gregor. XIII.
lnfiit. tom. 1. p. 79.
Infticutum . . . . approbarum & confîrmatum , &
in priftïno candorc, quo di&a Societas à bonx mé
morisé Ignatio Loyola , illius inftitucorc 8c fundatore,
Sanfto Spiritu inspirante , dccoratum , adversùs ma
las quorumdarn quæ fua finit , non quæ Jefu Chrifti,
quserentium impugnationcs & calumnias , apoftolicâ
auttoricate, pœnis ctiam adhibitis confèrvatum. Bull.
Quantum religio Paul. V. lnfiit. tom. 1. p. 1 1 1 .
Iifdemque modis féliciter progrediantur , Sc crcfcant , quibus à fundatoribus , Domino infpirante, atque hac Sanclâ Sede approbante , primùm fundati
Y ij
�, , «7 *
Ï a fterfinne eu Général [ i] , & qui approu*
vent les Conflitutions où ces prétendons font
développées, ainfî que dans les Exercices fpirituels on a même afFedté de revêtir que'r
ques-unes de ces Bulles des caraéleres ap
pareils de l'autorité infaillible ôc du Juge
ment ex Cathedra 3 ils ont , par exemple, fait
définir en particulier la validité de leurs vœux,
de cet engagement dénué de toute récipro
cité , la légitimité &c la néçeffité de }a forme
monarchique du régime , Sc généralement tous
les points de l'Infîttut qui avoient été criti
qués (i) : leurs Auteurs difent que la décla
rant. 'Bull. Ecclefu çatholics. Greg. XIV- Infiit. tom.
I ..p. IOI.
( 1 ) Et in illo ( Prxpofico ) Chriftum veluti prafentem agnofeant. Bull. Regimini Bnul. III. Infiit.
tom. i. p. 7.
I^on folum PrxpofitQ in omnibus ad inflitutum
Societatis pertinenttbus , parère femper tencantur;
fed in illo Cbrifium •veluti pr&fentem Agnofeant ?
& quantum dccet venerentur. Bull. Expofcit debitum
Ju lii ///. ibjd. p. 13 .
(z) Licèc aliàs Inflitutum prxdidurrj „ privilégia
& conflitutioncs ipfîus Societatis confirmaverimu$
Sf. dedaraverimus , motu proprio flaruentcs co s, qui
biennio novitiatûs perado , tria vota tametfi fimplicia , emiferunt, elfe vprè & propriè rcligiofos ;
cum prçcepto , ne quis h&c in dtebium revocare aqr
deac ,
cpm irritante , & aliis Decrctis . . . . Quia
tarneq non déficit temçrçria quorumdam audacia
qui , pofl dedarationcm , decretum prxcepcum
interdielum noftrum . . . . . multa ex p rx d id is, &
173
ration de la validité de leurs voeux efl une dé-#
finition de fo i, & la derniere Bulle yJpofiolicutn
a prefque donné dans cet écueil : c'eft ainfl
qu'ils fe flattent d'avoir intérefle à la confervation de l'Inftitut, l'autorité qui fe dit infortafsc alia ad Societatis inflitutum ac vivendi fotiP3m expedantia , labefadare , fed 8c ipfa apoflolica Décréta ac prxcepta publicè , & ex Cathedra ,
aufu temerario impugnare . . . . non erubefeant, difpurantes , &: prxdida in dubium revocantes..........
nos de apoflolicæ potefiatis plenitudine dccernentes ac prxcipicntes , privato fenfu locutos Briffe,
ac tatiquam privatos Dodorcs errare potuilfe ; iraô
vero 8c de fado ob falfam fupradidorum informationem erralfe . . . . flatuimus atque decernimus ,
8cc. Bull. Afcendcnte Domino Gregorii XIII. Conflit,
tom. 1. p. 8 1. 81.
Quibus cùm glolfatorcs, 8c obtredatores hujufmodi fuâ falsâ dotlrinâ favere pergunt..........prxjnilfas omnes & quafvis alias illis fîmiles alfertiones çopera dida: Societatis inflitutum , vel quomodolibep in illius prxjudicium pronuntiaras aut feript3< , falfas omnino ,
temerarias -e/fe 8c cenferi
debere . . . . ne quis cujufcumquc flatiis , gradûs 8c
prxcminentiæ exiflat , d id x Societatis inflitutum ,
conflitutiones , vel etiam prxfentes aut quemvis
earum , vel fupradidorum omnium articulum , vel
aliud quid fupradida concerncns , quovis difputandi , vel etiam veriratis indagandx quxfito colore ,
diredè vel indiredè impugnare , ■ vel eis eontradiçere audeat . . . . . . . contradidorcs per eenfurds
ecclefiafiicas , & alia juris (ST fa â i remédia opportuna , appcllatione poflpofitâ compefcendo. Bull.
Afcendcnte Domino Cregor. XIII. Infiit. tom. 1 . p.
8*. 83.
�174
faillible , & de l'avoir rendue impuiflante
côntr'eux ; auffi ont-ils pouffé au-delà de tou
tes les bornes l'opinion de l'infaillibilité du
Pape dans l'approbation des Inftituts reli
gieux , & combattu le fçavant Melchior Cano
qui rejette cette extenfion abfurde de l’in
faillibilité.
A la tête de l'édition de Prague , les Jéfuites ont placé le Bullaire à côté de l'Evan
gile , pour appliquer le fceau de l'infaillibi
lité à ces Bulles qui forment la première par
tie du recueil, & pour divinifer en ‘quelque
forte l'Inftitut &c les privilèges ; & ce n’eft pas
fans objet qu'ils ont obtenu ce privilège le plus
étrange de tous ,de pouvoir de leur feule auto
rité changer ou détruire leurs Conflitutions & s'en
donner de nouvelles , fans recourir a /’autorité
du St. Siège , enfin de rétablir fous une date
arbitraire tout ce qui pourroit être abrogé,
& révoqué par la fuite , meme fu r la de.
mande des Souverains (i).
( i ) Eas ( conftitutiones ) mutarc , alterare , cafJa re , & alias de novo condere poffunt , quæ fimul ac
conditæ erunt, automate apoftolicâ confirmatæ cenfeantur. Compend. privileg. verbo Confit ut. §. i.
p. i88.
Et tam hadenùs fadas , quàm in pofterum facicndas Conftitutiones ipfas , juxta locorum & temporum , ac rerum qualitatem & varietatem , mutare,
alterare, feu in totum cafTare , & alias de novo con
dere podinc & valeant ; quæ poftquana mutatæ, al-
.*75
Tant de précautions inouïes n’ont pu par
tir que du deflein de rendre l'Inftitut fupérieur à toute réformation : tantôt ils ont conteratæ , feu de novo condit& fuerint, eo ipfo apoftolica audorirate præfata , confirmatæ cenfeantur.
Bull. InjunHum nolis Paul. III. Injlit. tom. i p. io.
Ad quorumvis Impcratorum C? Regum infantiam . . . . fed femper ab illis exceptas , & quotics illæ emanabunt totics in priftinum fatum reftitutas, repoliras & plenarïe redintegratas , ac de
novo concédas efTe & cenfcri debere. Bull. Superna >
P- 94 Nec fub quibufvis fimilium vel difïimilium gratiarum revocationibus , fufpenfionibus , limitationibus ,
modificationibus , derogationibus , aut aliis contrariis difpofitionibus comprehendi , fed ab illis fem
per excepta , & quories emanabunt , toties in priftinum , & eum , in quo antea quomodolibet eraot,
flatum reftituta , repofita , & plenarie redintegrata ,
ac de novo etiam fub data per Societatem , illiufque Prapofitum generalem , & alios fuperiores præaidos quandocumquc eligendâ , de novo concéda,
ac etiam confirmata & approbata , validaque, efficacia , & illibata , etiam abfque eo , quod defuper
à diftâ Sede illorum ulterior reftitutio , revalidatio , confirmatio feu nova concedio impetranda fit.
Bull. Ec clef a Catholica Gregor XIV. Infiit. tom. l .
p. 104.
Dcccrnentes , eafdcm præfentes, nullo unquam
temporc . . . . fub . . . . derogationibus per quofeumque
romanes Pontidces , prædecedores noftros , ac etiam nos
&c. . . . minime comprehcnfas , fed tanquam in divini cultûs favorem , & fidei augmentum & propagationem concédas, femperque & omninô ab illis exceptas , & quociès illæ emanabunt, totics in
�17 6
trevenu. aux. Bulles des Papes par des cfiatvi
gemens dans les vœux qui dévoient être in
variables, 8c par l'établifiement du droit de
renvoyer de la Société les Jéfuites profès ;
tantôt ils ont contefté au Pape le droit de
révoquer leurs privilèges (1) ; ils ont pré
paré des moyens de furvivre à la profcrip-*
tion la plus authentique, 8c d’oppofer un
jour Rome à elle-même, dans le cas où elle
leur deviendroit contraire.
Les Jéluites, qui difent le Pape infaillible,
en
priftinum & validilTimum fhtum rcditutas , repor
tas & plenarïe redintegratas , ac de novo ctiam fub
quacumque pofleriori (V nova data . . . . quandocumque eligendas . . . . inviolabiliter obfervari. Bull.
Quantum rcllgio Taul. V. Inftit. tom. i.p . 1 1 3. 114.
( 1 ) Les Jéfuites allèguent en fécond l i e u . . . .
que leurs privilèges leur ayant été accordés par le
Saint Sicge à caufè de leurs grands fervices, il
faut les confidérer comme un contrat , & ainfi leur
donner plutôt le nom de pattes que de privilèges;
ce qui fait , difent-ils , qu’ il n’eft pas au pouvoir
de votre Sainteté de les révoquer.
Ils ajourent qu’il y a une claufe dans ces privi
lèges , qui porte que quand on y déroçcroit mot pour
mot , ils ne peuvent toutefois être révoqués, & que
par conféquent Votre Sainteté ne le ffuuroit faire,
ainfi que Paul V l’a ordonné dans fa Bulle
Quantum religio. Lettre du bienh. Jean de Palafoi
au Pape Innocent X .
Tamquam in divini cultùs favorem & fidei augmentum & propagationcm concédas. Bull. Quantum rt.
%'<>, p. 114 .
en ont-ils moins ré fi(lé à une foule de Dé
crets de Rome , 8c même aux Bulles de Clé
ment XI contre l'idolâtrie chinoife 8c les ri
tes malabares ? Seroient-ils plus dociles à celle
qui prononceroit l'extindtion de leur Ordre ?
L'infaillibilité qu'ils ont défendue n’arrêteroic
point leur réfittance à un Décret de profeription, ils la feroient même fefvir à foutenir
que les Bulles approbatives de l’Inftitut font
irréformables, comme réunifiant tous les caraéteres
du Jugement
infaillible 8c èx Cathe^
O
dru. Le Pape qui le proferiroit n'auroic
parlé que comme Dodtcur particulier , 8c l'infaillibilité cefie dans ce cas, de l'aveu des
Ultramontains : la Bulle d'extinction feroic
le fruit de la violence, de l'erreur, de la furprile , le Pape auroit été mal informé , 8c
s'il falloir poüfièr les chofes plus loin , ce Pa
pe feroit hérétique , comme tous ceux qui
leur ont été contraires , 8c fuivant leurs Au
teurs 8c d'autres Ultramontains, l'hérclîe opéré
de plein droit la déchéance de la Papauté ;
ils difputevoient au befoin fur la canonické
de fon éle&ion , 8c renouvelleroient le feandr.le des Thefes foutenues à Alcaia : on y
agicoit la queltion , s'il ctoit certain qu'un tel
Pape, c'eft-à-dire, le Pape à qui ils en vouloient, étoit vraiment Pape.
Les refiources ne peuvent manquer à des
hommes qui ont des principes pour tous les
Z
�17 $*
tems, des règles pour toutes les confciences,
qui fçavent rendre douteufe la venté meme,
(1) Pourquoi déféreroient-ils aux Décrets de
profeription ? Ils regardent l’approbation de
leur Ordre comme irrévocable, comme fimplement déclarative de la million qu’ils tien
nent de Dieu même. Leur première Congré
gation tenue en 1 5 5 8 , prouve qu’ils avoient
un Provincial delà Province de France (2.),
dans un tems où ils n'avoient obtenu, ni de
l’autorité fpirituelle , ni de l’autorité tempo
relle , aucune forte d’approbati-on, ou de to
lérance même par forme d’épreuve ; ils 11’y
étoient connus que par des Décrets flétrifiàns:
aujourd’hui même on a tout fujet de croire
que la Société conferve dans les lieux d’où elle
a été profente, un régime
des Supérieurs;
ils n’ont dépouillé que l’habit de Jéfuite,
figne indifférent & équivoque dans un Ordre
qui ne fe caraélérife par aucun trait certain,
<k qui admet des Jéfuites externes.
Quelle confiance peut prendre Rome en
une Société dont les prétentions font fi vaftes , Sc qui les abdiqueroit envain , puifqu'elle ne connoît pas le lien du ferment ?
( i ) Lettre du Bienheureux Jean de Palafox au
Pape Innocent X .
( t ) Fuit eleftus . . . . in Afïiftentem Pafcafius
Provincixlis GallU. Decret 1 Congregat. Infiit.
tom. 1. p. 4fg.
Broët
. .
17-9
Qui peut même fçavoir , fi l’ambition de
cette Société fe terminoit à confirver le
degré de puiflince auquel elle étoit parve
nue ?
Une Société qui fe dit promife $c nécc(Taire
à l’Eglife ; qui fait de Ja caufe celle de la
religion ; qui a nié la néceffité des Conciles
ôc celle même de l’Epifcopat ; qui a foutenu
qu’il fuffiroit à l’Eglife d’être régie par des
Vicaires apoftoliques ; qui fe vante d’avoir
fuccédé aux Apôtres «Se aux Difciples de Jefus-Chrifi:, les premiers repréfentés par les
Profès des quatre vœux, les féconds par le?
Profès des trois vœux & par les Coadju
teurs fpirituels ; qui dit que l’état de Jéfuite
eft pins utile à l ’Eglife çr plus parfait que
celui déEvêque ( 1 ) ; qui a ufurpé fur eux
non feulement les chofes qui font du pouvoir
qu’on nomme de jurifdittion , mais ençorç
celles qui tiennent au pouvoir de l’Ordre ( 1 ) ;
qui a fixé le centre de fon unité à Rome
( 3 ) , d’où le régime délégué dans tout l’u(1)
Quod uberiores perceptura fît fruftus Ecclefia
Chriffi ex nojlris non ’Ep'tfcopis , qtiàm Rpifcopis.
Suarez de Relig. Soc. Jef. p. 615. & Ribadeneira vît a
Ignatïi , Lugduni 1595. lib". 3. cap. 1 4 . ^ .1 9 8 .
( O Avis d’Euftache du Bellay.
(3) Et uc locus magis convcniat ad communtcationem capitis cum fuis membris , conferrc plurimum poteil uc Præpof. gctieralis magnâ ex parte
Roms, refideat, ubi cum aliis omnibus locis Socie-
Z ij
�i8 o
divers des Prédicateurs deflinés à enfeigner
le peuple & le Clergé, même par le mintfiere
de fes Cl res tonfurés ( i) , ou des Inqiïiftours
de religion Sc d'état ( z ) p qui dit que (on
Fondateur a été envoyé dans cette Capitale
du monde chrétien par une révélation fpéciale , ego vobis Roms, propitius cro , pour y
régler avec le fuccefTeur de Pierre le cours dès
chofes divines er humaines ( 5 ) -, qui veut que
fon Général repréfente St. Paul l'Apôtre des
nations qu'elle a pris pour modelé de fon apof
tolat (4 ) ; qui méconnoît dans les Bulles où
fa doctrine eft cenfprée, l’infaillibité du Pape
tatis .faciliori utetur commercio. Conjl. part. S. cap.
s. n. 7. p. 414.
( t) Cnilibet vefirum . . . . ubiaue locorum Clero
& populo vetbum Dci prædicandi , proponendi Si
interpretandi, Bull. Cum inter cunftas. Infl. tom. 1.
( î ) Illos vero ex fratribus feu fociis prædi&is , qui
ad prædicandum Crucem , vel ad inquirendum con
tra h&reticam pravitatem , feu ad alia fimilia negoria deputaci fuerint , Ignatius , & alii illius fucçeffores Praepofici Generales diétæ Societatis pro tçmpote exiftenres , removere , feu revocare , Sc tranfiftre . ipfifquc quod fuperfedeant injungere , ac alios
illorum loco fubftituere valeant. Bull. Licet debitum
JPaul. III. tom. 1. p. if.
( 3 ) Peçrum Chriflus caput Ecclefiôe
tium Sociecati, & utrumque Romæ
præelfe yoluit. Imago prim. f&culi p.
(4) Suarez de r:lig. Societatis Jefu
7.
H* h
5*
J°7‘
dédit , Igna-
rerum fumme,
83. 84.
, lib. ^. cap.
181
qu'elle fait valoir pour tontes les autres Bulr
les; qui permet en 1644 qu'un de fes P10fcfleurs ( 1 ) réduife la primauté du Pape à
une inftitution humaine, à une conceffîon de
l'Eglife Sc des Empereurs, attribue au Pape,
vingt années après Sc par des thefes publi
ques, la même infaillibité dans les faits qu'à
Jefns-Chrift, applaudit, 1 8 ans encore après,
par l'effet d'une politique pa/îagere, aux quatre
articles de 1 6 8 1 , en haine du Pape Innocent
X I , Sc après la mort de ce Pape, fait ( pour
renverfer cette doétrine en France ) un effort
fi terrible, qu'il a tout ébranlé; qui s’arroge
le pouvoir d'autorifer fes membres à profefTer des dotlnncs contraires h celles que tient
l'Eglife , & qui les oblige dans ce cas à foumettre leur fentiment , non à l'Eglife, mais
a la Société ( z ) ; qui a mérité, parmi plu( 1 ) Le Pcre Erard Bille , Profeffeur à Caën.
( i ) Interrogetur an habuerit vel habcat conccptus alicuos vel opiniones ab iis differentes qua: communiùs ab Ecclefiâ Sc Doéloribus ab eâdem approbatis tenentur............. nurn pararus fît ad judicium
fuum fubmittendum fenticmlumque ut fucrit conflitutum in Societate, de hujufmodi reins fentire opportere. Exam. cap. 3. n. 1 1 . p. 344.
Si quis aliquid fentiret quod dilcreparet ab eo
quod Ecclrfta Si ejus Doéfores communiter fenriunt,
dûum fenlum definitioni ipjius Societatis débet f.ibjiccre . . . . in opinionibus in quibus catholici Doctores variant inter Ce vel contrarii funt , ut conrorfnitas etiam in Societate fie , curandum eft. Confi. part.
3. decl. in cap. 1. lit, O. p. 375.
�18 2
fieurs reproches du Clergé de France, celui
de manquer de fidélité pour L’E g life, 5c par
conféquent pour Ton Chef (i) ; qui ponant
le nom de Jcfius çfr l'étendart de la Croix,
autorife les facrihces offerts aux Idoles, per
met d’enfeigner à la faveur du probabilifme,
de l’ignorance invincible , 5c de la confcience
erronée , que c’elt un bonheur & un avan
tage d'ignorer meme l’cxifience d'un Dieu le,
gifiateur ( i ) , 5c n’exige de ceux qui croient
en lui , que de ne le point hdrr ; qui atta
que par la plume des Hardouin 5c des Berruyer les myfteres de notre foi , 5c inftruic
les fïdcles , par la plume de Pichon, à les
prophaner j qui fe prétendant fufeitée de Dieu
même pour combattre l’hérélie , perfécute le
Catholique 5c fe ligue contre lui avec l’hé
rétique , lorfque fa politique le demande :
une Société d’hommes , ju ifs avec les ju ifs,
paj/ens avee les pajens ( 3 ) , qui tient à tout,
5c ne fc lie à rien-, q u i, ilolée fur la terre
5c toute concentrée en elle-même , eft fans
affeSlion 5 fans paix ( 4 ) , 5c même fans droit
i8 3
des gens ; qui par la diverfité & changement
de heu Je rend bonne & mauvaifie ( 1 ) ; qui
reçoit dans fon fein le foible d'efiprit , l'infiame 5c /’homicide 5 en qui l’on reconnoîcroit
quelques dons particuliers de Dieu ( 2 ), tandis
qu’elle peut renvoyer les Profès pour une
eauje exempte de péché , fine pcccato , 5c
même pour une caufe antérieure à la profiefifion ( 3 ) j qui convaincue de plufieurs atten
tats , ne rougit d’aucun ; qui , fiere même
de l’opprobre, ofe ( s’il faut en croire l’im
primé d’une derniere Congrégation inféré
dans quelques exemplaires de l’édition de
Prague ) publier par une allufion indécente
à fon expulfion du Portugal , que fia gloire
( 1 ) Remontrances du Parlement de Paris de l’an
née 1604.
Ci) Si cernercrur aliquod ex lais impedimentis
in homine , quia taiibus Dci douis ornatus effet,
ut pro ccrto haberctur Socictatem ad Dei & Domini noftri obfcquium ejus opéra admodùm juvari
poffe , fi ille fummo Pontifier , vel ejus Nuntio ,
vel fummo Pœnitentiario fupplicaret fibi concedi ,
ut in Societatem non obftantibus conilitutionibus
admitti poffet , Præpofito ejus generali non répug
nante. Confi. decl. prima pars. tom. 1. in cap. 3.
p. I61.
Cæterum fi in eo dona aliqua Dei illuftriora cerncrentur , ille qui examinandi munere fungitur ,
antequam eum dlmittat , rem cum fuperiore con
férât. Examen general, déclarât, de lnjiit. tom. 1 .
in cap. 1. p. 343.
( 3 ) Suarez, de relig. Sociétal. Jefi. tom. z. p. 778,
�î &4
ne peut are terme par aucun revers (i);q u i
porte dans la pratique la morale régicide,
non pas pour un prétendu intérêt de reli
gion , ni en vertu d'une Sentence cccléfiajlicjue,
ou de la mijfîon que reçoivent les Croifès
luivant i’atfreufe méthode de l’ancien direc
toire de l'Inqüifition , dont parle M. Servin,
où fe trouve décrite la maniéré de faire fecrétement le procès aux Rois ( z ) , mais pour
I>• ' A
1 interet
( i ) Si forte, Deo ità permittente , placeat (quæ
adoranda confiliorum ejus ratio cft ) ut adverfis
exerceamur , Dcus adhérentes fibi , atque intimé
coojun&os non deferet. . . . quamobrem illud femper Superiorcs omocs cogitent , ex eorum vigilaotià pendere Socictâtis decui ac famam , nullo unquatn caru , nullo infortumo ob[caran dam.
( i ) Alrerum ( proccdendi mockim.) fecretum &
ocultum , quo Reges 8c régales perfonas clanculurri
c indiélà causa damnant . . . . quibus ex locis lècretis certo difeimus , in officio Inqnilitionis Reges
capitis damnari. Diredorium autem lnquifitorum demonftrat hoc clanculum fieri . . . . ut enim cxecutio
iententié lnquifitoram facilior c expeditior evadat.
Inquiluores quoddam genus vilium c ignatorum
homipum inftituunt , qui . . . . in eum finem Crucem affamant , c plerumque alio gravi crimine func
obftridi . . . . . atque Inquiluoribus Jolo nutu obftquunttir j utque omnes ad execution'.ni hujus clandeftinæ fententiæ contra Reges cxcitentur , declaratur,
quod candcm etiam induigenriam confcquentur, quicumque zelo fidei Inquilitoribus auxiliarentur . . . .
ad Reges Sc Principes chriftianos impiicandos, quotiès ità videbitur . . . . Jefuitls male affeclis crg'a aliojiem Principem. Apoiog, pro Gerfon. p. 199.
5
5
5
5
18 5
l'intérêt le plus illégitime, mais pour appn«
yer fa rébellion à un commencement de réformation ordonnée par le Souverain Pontife
dans le Portugal , mais pour confcrver le
négoce immenfe qu elle allie avec lé voeu de
-pauvreté: une telle Société, Meilleurs, n'efteîle pas fufpecte d'avoir ambitionné pour
cile-même cette monarchie univerfelle qu'elle
feinr d'adorer dans la Cour de Rome ? La
plus grande gloire de cette Cour peut - elle
avoir été la fin derniere d'une Société pour
qui la plus grande gloire de Dieu n'eft qu’un
moyen d’agrandillement ?'
Le premier plan des fuccefïèurs de Sr.
Ignace étoit vraifemblablemenc réduit à faire
dominer Rome fur l'Eglife Sc fur l’Empire,
pour y régner eux - mêmes fous fon nom .*
mais le tems , en ajoutant au régime de
nouveaux degrés de force Sc de corruprion,
a pu lui ouvrir une nouvelle carrière. Un
Ordre rel que nous venons de le dépeindre,
ou plutôt tel qu'il s'annonce lui-meme, effc
capable de tout ofer : nous ajoutons qu'il efl
armé de moyens pour roue entreprendre.
Plus a rapporté ce qu’ont faic ceux de cette Com
pagnie en l’an 1 5 7 7 ; & leurs déportemens confor
mes au pouvoir déclaré au Directoire de 1‘lnquifttion
imprimé à Rome l’an 1 5 , dont il a roté les lieux
d’où l’on tire un argument qu'ils font Inquifiteurs
fecrers. Plaid, de Serçfin , liv. 1. Plaid, 3?. pag. 3 4 1,
fol. I.
�ger à Ton tout le facrifïce de la vie de ceux
de (es lu jets qui croiront à la fauflè affurance du lalut promis à tous ( i ) , ou à la
dourine qui fanétilîe le meurtre ordonné
pour le bien de la religion ( 2 ) : un Corps,
dont les membres font form és, comme les
tes magnas in divino fervitio aggrediendas . . . . non
propter çontradi&iones, lieçt à magnis
potentjbus excitatas animum defpondendo.......... nec profperis efferri nec adverfis dejici animo fefe permitt a t , paraiiffimus , cum opus effet} ad mortern pro Societacis bono in obfequium J . C ........... fubeundam.
Confi. tom. i. part. 9. ch. x. ». 5. p. 435.
Jurent.... ut quidpiam de noftri Inftituti ratione non
immutetur curaturos pet quofeumque , in Bulla Gregotii XIV. non permiffos . . . . certus ni(ï id utili
ser exequatur fe nec bono Societatis pro qua fanguinem fundere partit us elle debet , nec proprix confcientix fatisfadiurum. Tom. 1. decret. <j. Congreg. p.
559-
( 1) Quibus de rebus noftri rccrcationis temporc
colloqui poffent . . . . de fecuritate eorum qui in
Societate vivunr. tom. x. \nfir. 13 . cap. y. n. 13.
f-
319-
Prxfertim cùm in noftrâ Societate piè crcdatur
omnes falvandos effe , revelatione , ut fertur, fac
ta S. EranciCeo Borgix. Theologia fpecul. er mor. P.
Marini , tract. 3. difput. 5». fect. 1 . n. xx.
Cet ouvrage a été imprimé à Yenifc en 1710.
L'auteur étoit Confeffeur du Roi d’Efpagne. L’ou
vrage contient d’ailleurs les maximes les plus repréhenfibles.
(2) Erit opus religionis illud homicidium. Ve
Rhodes tom. 1. tract. 2. difput. x. de acid', htpian, qu&fl. x. Uct. z. p. 324. col. 1,
anciens Rom ains, à foujfrir & a faire de
grandes chofcs\ qui prend part à tous les événemens de l'Eglife 6c de l'Empire, 6c à tant
d'affaires publiques & privées ; qui entretient
des correfpondances plus multipliées que cel
les d’aucun gouvernement, 6c toujours myftéricufes ( 1 ) : un Corps où les talens bril
lants, mais fur-tout ceux du gouvernement
ÔC de la politique tiennent lien de tout, <$£
font préférés aux connoifïànces de l’état re
ligieux ( 1 ) 3 qui donne des inftruélions fur
le talent de gouverner &c fur l'art de fe con
duire dans les Cours 3 qui traite avec les
grands & les petits 3 qui épie les fecrets
des Etat? &c des familles j qu’on peut
foupçonner d'avoir mis la confeffon parmi
les moyens dont il fe fert pour péné
trer les caratteres qu’il a intérêt de con( 1 ) In rebus qux fecretum reqqirunt explicandis ,
Lis vocabulis utendum erit ut ea incelügi nifi à
Superiore poflînt, modum autem prxfcriptum genefaJis Sic. tom. x. Infiit. p. iz6.
Si quid Cerijjendum effet de rebus qux externorum
aliquem attingerent, ita fqribatur ur eriam fî lirterx in ejus manus inciderent offendi non poflit.
Ibid. n. x
p. 127.
(2)
Si mediocritatem attigeric & prxclara ad gubernandum rel concionandum talenta habuerit. Infini,
tom. x. pag. 172. C S. t? §. 1 1 . p. 173.
Si in aliquo imparis dociriru tam illttfiria gpbernandi concionândiye talenta crant. Congreg. 1 3. decret.
X /»• 667.
�190
noître ( 1 ) 3 qui a des lujets forcés à lui dé
couvrir , par des ouvertures de confcience
périodiques, les replis les plus cachés de
l’ame , & formés à une délation mutuelle (i),
à laquelle ils s'engagent avec renonciation au
droit que tous les hommes ont à leur reputation, des fujets dont l'exiftence eft précaire
& amovible , des fujets innombrables & itivifibles depuis les places les plus importantes
de l’Eglife &c de l'Empire jufqu'aux états les
plus médiocres de la fociété civile , des fujets
inconnus au Pape, connus du feul Général,
exempts des Supérieurs médiats , & réfervés
à fa feule autorité ( 3 ) , des fujets liés par
191
des profeiTions clandeftines, qui ne (ont pas
même incompatibles avec l'état du maria
ge , des fujets renvoyés en apparence, mais
encore Jéfuites 3 des aggrégations qui ne
forment avec la Société qu'un efprit de
qu'une etme , vouées auffi à l'obéiflance au
Général ( 1 ) , foumifes en divers lieux à des
promelïès & même à une forte de veeux (1),
où l'on publie un enfetgnement pour Ie peuple
(fi mi autre pour les citoyens confidércibles, od
l'on donne aux enfans des impreffions finiftres
( 3 ) , de à tous les affiliés les mêmes affarances de falut que dans la Société (4 ).
fervarc poflet. Confi. part. 8. declar. in cap. 1. lit.
L. p. 4 15 .
(1) On enjoint aux Congréganiftes une parfaite
docilité pour les ordres & les avis qu’ils recevront
du Général , ou de ceux qui les gouvernent en fon
nom. Pancarte trouvée dans les Congrégations.
Supremo non Societatis magis quant Sodalitatum
omnium ?noderalori. Hifi. Provinc. Societat. Jefu Germania, decad. 8. ». 537.
393(z) yelnti votis quibufdam fe devincientes proL ’Inftitut contient une foule de textes fur la mafefîî
funt. Manuale Congreg.
nifeftation de confcience , fur la délation mutuelle
(3) A lla imæ plebi , ali a Patriciis 8c Senatoriavec l’abdication du droit à fa propre réputatioü.
bus aprius proponunrur. Imag. prim. ftculi. p. 5 6 1.
La citation de ces textes multipliés meneroit trop
M. Servin rapporte qu’il y avoir dans les Con
loin ; on en a encore fuppfimé plusieurs , foit <h
grégations des enfans qu’on n’avoit jamais ptt for
l ’Inftitut, foit de la Morale fur les différens objets t
cer a prier pour Henri IV , quoiqu’on les menaçât
pour ne pas groflîr l’ouvrage déjà trop long.
(3)
Geocralis quofdam ex ptivatis & PtæpofitH de les jecter dans le feu. Plaid, de Servin en 1 6 1 1 .
p. 100.
localibus yel Re&oribus fuæ obedientiæ proxime n•
(4 ) Nihil hoc Jnftituto vel ad tutelam Ci occupetur certiùs hoc continentur præûdia quibus de- 1
( 1) Diligcntia ad eos qui ingrcdi volunt magis cog»
nofcendos adhibenda haec e f t .......... juvabit et'iam ad
hoo ipfum fi fréquenter ad Confeffionis Sacramtn•
lum in Ecclefiâ noftrâ aliquandiù acceflerit antequam
domum ingrediatur. Confite, part. 1 . déclarât, in
cap. 4. lit. D.
( 1 ) Nihil ei claufum nec confcientiam quittent profriam tenendo. Conflit. part. 4. cap. 10 . num, 5. p.
�ïÿ l
Un Corps qui a des fources de richeflc &
de puiflance bien fupéricures à celles de la
Cour de Rome , un pouvoir plus a&if que
le fieu , une influence plus immédiate fur les
confidences , une communication bien plus
étendue avec tous les genres d’hommes;
qui porte jufqu’au preftige l’art de ga
gner leur confiance , de flatter , de remuer
toutes les pallions ; qui fonde fon empire
fur l’ignorance 8c l’obéiflance aveugle dont,
par le mioiftere de fes Directeurs, il fait
un devoir aux fldeles -, qui leur cache les li
vres de la loi divine, pour erre lui-même
leur légiflateur ; qui par l’empire qu’il exer
ce fur les dévoués ( i ) , peut les plier à
tout fentirrient favorable ou contraire à l’au
torité du Pape , 8c les rendre comme lui
fuperftitieux ou rebelles envers la même au
torité , félon qu’il importe à l'intérêt du mo
ment ; un Corps ainfi organifé a pu fans doute
fe propofer une ambition plus relevée que
celle de demeurer l’inftrument perpétuel de
la puiffance de la Cour de Rome , 8c parole
avoir voulu fe mettre en état de régner
O feul un
jour
fendatur nfferaiurqrie ffilus fempiterna. tmag. pnm.
fæcul. p. 414.
( r) Socictati devotorum. Bull. Omnipot. peig. 90.
Bull. Super»n, pag. 9 1, Bull. Romanorui» , /><?£*
91<
jour fur les débris- de toute autorité. Ce
Corps avoir du moins le but général d’en
treprendre, Sc d’envahir tout ce que les circonftances pourroient offrir à la foif de dor
miner, peut-être même de fupplanrer, de
fuppléer , d’ufurper , l’autorité pontificale,
plutôc que de fe laiflèr abattre 8c de foufcrire à fa deftruétion.
Leur Inftitut, il eft vrai , par la défenfe
qu’il fait à fes membres d’accepter les di
gnités , paroîc exclurre le deflèin d’envahir
les places éminentes de l’Eglife ; mais ce
même Inftitut, où rien n’eft (table 8c fincere,
jufqu’à ce qu'on appelle les points fondamen
taux de l’Inftitut, ftihftantiqlia Inftitut », où
tout eft au contraire fufceprible d’explication,
de difpenfe, de changement, permec aux
membres d’accepter les dignités avec l’aveu
du Général , à la charge d’une obéiflance
continuée à fes confeils , 8c donne la même
faculté au Chef avec l’aveu de la Société,
Quel befoin avoient d’ailleurs les Jéfuites de
rechercher les dignités ? Ils peuvent les atti
rer dans leur Ordre , en recevant des Evê
ques 8c des Cardinaux fous l’obeïjfqnce du
Gfnéral, avec le caraétere de vrais Jéfuites,.
& employer leur crédit à faire parvenir aux
dignités eccléfiaftiques 8c féculieres ceux quJils
nomment externes ( 1 ) , 3c qui font peut-,
( 1 ) Aut illorum ( excernorum ) quemquam a4
Bb
�194
être aufïi des Jéfuites ils ont écrit que la
Papauté n’eft pas comprife dans la renoncia
tion aux dignités ( i ) , & que le Pape peut,
après même Ton élection , vouer PobélflTânce
au Général ( i ) : toutes ces réferves n’onteiles rien de myftérieux î
Rome femble avoir juftifié ces conjeéture s, prelîenti leurs deftèins, Sc marqué une
jufte défiance, en obfervant de ne point éle
ver à la Papauté les Cardinaux Jéfuitcs, de
peur que la Thiare ne demeurât fixée dans
leur Ordre ; mais malgré cette précaution elle
ne peut s’aflurer de rien à cet égard , s'il eft
vrai que les Papes peuvent, avant ou après
leur élection 3 prêter ce voeu d'obéiflance au
Général (3). Suarez propofe une diftinétion
ecclefiafticas aut ficulares dignitates promoverc (ludcant, fine exprefsà reverendi Patris noftri facultare
quam foli Generali Congregatio voluic refervaum.
Çongreg. 7. Decret. 13. p. 591 . (y can. 18. p. y iu
( î.) Suarez de Relig. Societads Jefu , p. 614. num.
i l . ufque ad 15 .
( 1 ) Idem , l. 10. c. 3. num. 19. p. 466.
( 3 ) Car (î , félon les ordonnances de vocre Ré
glé , vos Pcres font un vœu particulier par lequel
ils promettent que s’ils font élevés aux premières
dignités de l’ Eglife , c'cft-à-dirc , à celles du Car
dinalat ou de L* Papauté meme , ils ne feront rien
ue par l’avis de leur Général , ou de quelqu’un
e la Compagnie député par lui pour cet effet , n’eftcc pas foumettre , par un ambitieufe précaution , le
Chef de l'Eglife à une perfonne qui n’a nulle au: 3 n :.i: monp
r
ur-: . » )
3
‘ d Cl
,
.*95
lubtile entre Pobéiflànce qu'un Pape voueroit
au Général, & le vœu du vrai Jéfuite ; mais
l'Infticut dit que le nom de la Société comprend
tous ceux qui vivent fous l’obéijfance du Gé
néral ( 1 ) ; c'eft le caraétere conflitutif du
Jéfuite ; il eft même Punique; tout le furplus
de llnftitut n'eft que variation , illufion, femblant: les Jéfuites enfin fe glorifient d'avoir
des Papes parmi leurs Congréganiftes ; Gré
goire XV étoit de ce nombre ( z ) , & Jouvenci comptoit en 1 7 1 0 fept Papes qui
avoient été membres des Congrégations (3) 1
torité dans la hiérarchie . . . . rendre le feigneur lé
gitime efdave de fon vaffal, & aftrcindrc l’Epoufë
du Fils de Dieu à confulter plutôt les mouvemens
de votre Société intéreiTée , qu’à écouter les oracles
du Saint Efprit ? qui peut douter que des perfonnes
qui forment ces confpirations fur une Puiflance
toute facrée , foient plus modérées dans l’entreprife
d’une fouveraineté temporelle ? Pafquier.
( 1 ) Societas , uc ejus nomen ladlhmè accipitur,
omnes eos qui fub obedientiâ Praepofid generalis vivunt . . . . compleédtur. Confl. part. 5. decl. in cap.
1 . p. 40t.
In . . . . perfonas fub ejus obedientiâ degentes, ubilibet commorantes , etiam exemptos, etiam quafeumque facultates habentes , fuam jurifdiédonem exerceat
Bull. Licèt debitum Paul. III. Inflit. tom. 1. p. 14.
( 1 ) Nos qui dùm in minoribas verfabamur in
ter Sodales Congregarionis . . . . adfcripti. Bull. Alias
pro pfirte. Inflit. tom. 1. p. 145.,
(3) Jouvenci hift. Societ. part. 5. lir. 1. num3 1. p. 345.
B b ij
�cet Ordre étend par-tout Tes conquêtes &
veut tout embràllet dans Tes liens.
A qdoi donc afpiroit cette Société ? Où
devoit (e terminer cette ambition effrénée ?
vouloit-elle réunir la Thiare au Généralat, 8c
faire de tous les Jéfuites autant de Vicaites apôftoliques , ou prendre feulement des
mefures poür avoir toujours un Pape choili
parmi les membres de la Société , comme elle
avoit tenté en Portugal de faire dépendre l'élisibilité a la Couronne de la, qualité de Jcfuiie (i f i Par ce dernier arrangement, le.Pon
tife fupérieur en apparence au Général dans
l'ordre hiérarchique extérieur, lui feroit de
meuré fournis par le vœu d’obéifiance , 8c auÿoit pu remplir le College des Cardinaux &
ï ’Epifcopat de Jéfuites connus 8c inconnus.
Quoiqu'il en foit , cette Société qui joint
a une ambition profonde une audace dérnefu.
rée, qui n’annonçoic que malheur 8c divi
sons aux peuples j qui s’eft jouée de la na
ture entière 8c de Dieu même , dont elle
porte orgueilleufement le nom, étoit capable
de profiter d'une grande divilion dans l'E
gide , 8c de la faire naître au moindre foi
çon de difgrace , de former une fede
part , ou de fe dire la véritable Eglife,
( i) Pafquier, Recherch. de la France, liy. 3. p,
34 1 .
»
I9 7
fuffifante à la propagation de la foi pour la
quelle elle eft inftituée, à la continuation
de l'Apoftolat ( 1 ) , 8c à toutes les fondions
hiérarchiques : fes Millionnaires n'ont-ils pas
dit aux peuples crédules qu'il n'y a de chré
tiens que les Jéfuites, 8c réalifé tout l’abus
de l’ufurpatio.n du Nom de l*Eternel ? la,
Société entière n'a-t-elle pas agi comme Eglife
nouvelle , comme S e d e , en apportant dans
la chrétienté un nouveau corps de religion
deftrudif de la dodrine 8c de la morale de
l'Evangile ?
Dans le même tems où Melchior Cano
avertifloit les Rois de prévenir le rems où
ils voudraient lui réfifler. 8c ne le pourroient
pas ; dans le tems où fon troificme Général
( St. François de Borgia ) frappé de voir
dominer dans la Société , l'ambition, l'orgueil
. . . . (ÿ* une pajfion fans bornes pour les biens,
temporels, prévoyoit que bientôt il n'y aurait
plus perfonne pour la réprimer , un de fes
( 1 ) Secundum autem (punâum) eft fpeculari quo,
pafto ipfe mundi Dominus uniyerfi elcdos Apoftolos , Difcipulos & Miniftros alios per orbem ruittac
qui omni bominum generï , flatui et conditior.i, doctrinam facram ac falutiferam impertiant.
Aufcultare concionem Chriftt exhortatoriam ad
fervos & amicos fuos omnes in opus talc defiinatos . . . .
& infuper fi divini obfequii ratio & elettio cælefiis
eo ferat ad fe&andam aéiu ipfo veram paupettatem,
Exercit. fpir. pag. 406. col.
x.
�19 8
membres les plus diftingués difoit en Efpagne :
le jour viendra, que notre Compagnie s’efforcer*
de prévaloir contre l’Eglife de Dieu ( 1 ).
Les promefîès faites à l’Eglife ne permet
tent pas de croire que cetce Société fut ja
mais parvenue à éclipfer ou à remplacer le
corps des Pafteurs, ni à interrompre la per
pétuité d'un Chef vifible dans l’Eglife & l'or
dre des fucceflèurs de St. Pierre j mais elle
ponvoit exciter les plus grands troubles, elle
pouvoir menacer Rome des plus facheufes
révolutions , fi les Souverains ne lui eulïent
rendu le fervice de démembrer le Coloffe :
une partie de nos conjeétures fur le but
ultérieur du régime peut être incertaine,
mais plus ce but paroît impénétrable , plus
il doit être fufpeét à Rome ; elle avoir du
moins à craindre que l’Ordre n’osât furvivre
clandeftinement à fa profeription , fut - elle
émanée de l’autorité du Pape, préparer fon rétablifiement par des intrigues pratiquées chez
toutes les nations, & par des moyens prefqu’aufii funeftes que le rétablifiement mêmev
La Cour de Rome 11’a pu fe réfoudre à
foufFrir les Jéfuites dans fon fein qu’ils ont
déchiré , qu’en cotnpenfation des fervices
qu’ils lui rendoient dans les autres Etats-, elle
( 1) Ce dernier trait c(t rapporté dans la requête
de Lanuza au Roi Philippe fécond.
*99
a ,pû encore êcre touchée de ceux qii’ils ren
doient à la religion par le miniftere d'une
partie de fes membres, qui n'étant point ini
tiés aux myfteres du régime , îk aux détours
des Conflitutions cachées à la pluparc des
fujets , ou qui 11’étant point imbus des
grandes erreurs de la morale , n’ont fuivi
que leurs vertus &c leurs talens : ces fervi
ces n’honorent que les particuliers, le régime
n’a fçu que nuire, & par les maux qu’il a
faits, & même par la maniéré dont il a opéré
les biens auxquels il avoir paru fe dévouer.
Un mélange de faux enfeignement defuperftition a corrompu toutes fesi -jhftruétions > &
l’efprit de politique , de violence, de cruauté,
s'eft rencontré dans toutes fes œuvres. Rome
étoit peut-être' de tous les pays catholiques
celui auquel les Jéfuites étoient le plus à char
ge, & de tous les gouvernemens , le moins
libre de les proferire.
Leur expulfion de plufieurs Royaumes ca
tholiques les dépouille de ce crédit univerlel
qui les rendoit à la fois utiles & formidables
à cette Cour ; on lui reprochoit vainement
les marques de la protection perfévérantc
qu’elle accordoit aux Jéfuites, elle ne pouvoic
adors la retirer toute entière ; cette impuiffance eft prouvée par la conduite & les re
grets de plufieurs Papes : mais depuis que
les Jéfuites font chafles d’un aulïi grand nom-
�200
bre de lieux, & par-tout connus , tout le mon
de chrétien femble adreder de nouveau à la
Cour de Rome ces paroles de St. Bernard:
Pourquoi êtes-vous infenfiblç aux murmures de
tonte la terre ? cjti 'o ufque murmur univerfâ
terra Aut dijfitnulas, -aut non advcrtis ? cju'o
ufcjtie dormit as (i)? Le tems de rendre cet
important fervice à la religion eft enfin arrivé.
Rome qui voit les Princes chrétiens profcrire par leur feule autorité la Société com
me criminelle, l’Inftitut comme abufif; Ro
me qui peut craindre d'être forcée par le
droit des gens à dépouiller les fauteurs de
la morale régicide qu'elle détefte , d'un relte
d'exiltence fcandaleux & nuifible, fera bien
tôt fubir à cet Ordre le fort qu’eut fous Paul
III un Ordre fondé par le nommé Baptifte
de Creme , &: auparavant approuvé par ce
Pape : la fage Venife avoir donné le fignal
par un Edit d'expulfion de l'O rdre, Rome
porta le dernier coup , &: condamna auffi fa
doctrine (2). Les Jéfuites doivent s'attendre
à
0
( , Div. Bernard, ad Eugenium Papam , lib. 5. de
conlîdcrat. c. 2.
( 1 ) Paulus III Ôrdinem quem in Italia frater Baptiftâ Cremenfis in ftittfitlitteris fuis probajfe dicitur.
At nupcr & Otdo ille à Venctis eft cdnflo publico
expjpfus ,
Baptiftsc do&rina , cui iUiüs Orcfnis
homine? adhætpbant.jRomæ eft condemnata. Melch.
„
Caho âé lôc. fbeotog lib.
.
cap. 5
201
à cette double condamnation, & celle de
doétrine eft déjà portée par une foule de cenfures émanées du St. Siégé. Mais encore une
fois, Rome elt tropintérelfée à hâter l'extinc
tion de la Sociécé, pour nous la faire ache
ter par un honteux filence fur le dernier Bref,
&c nous deviendrions contraires â nous-mêmes,
en tolérant dans un Bref de Rome l'exécution
des principes donc nous n'avons pu fupporttr la théorie dans un Inftitut réeulier.
L'Ordre des Jéfuites fera éteint, mais le
miniftere de Rome renoncera-t-il aux préten
tions ultramontaines ? Elles ont dévancé l'Ins
titut puifqu’elles l'ont fondé , elles peuvent
donc lui furvivre. Eft-on porté à les aban
donner, lorfqu'on les confacre toutes les an
nées par la publication folemnclle de la Bulle
In cœna Domini, & qu'on les retrace tous
les jours par les claufes inférées dans tous
les Refcrits généraux & particuliers ?
Les Jéfuites, il eft v r a i, avoient porté jufqu'aux dernières horreurs les conféquences de
la doctrine du pouvoir fur le temporel, mais
ccs conféquences ont été avouées par d'autres
qu'eux , elles font contenues dans le princi
pe : le Prince deCondéen donna la démonftracion à Louis le Jufte , Bolfuet y applaudie
t>: lui donne une force nouvelle dans tout le
cours de fon ouvrage ; il prouve que l'erreur
du pouvoir indireét , d'où ces confequences
Ce
�20 2
découlent ncceffairement, met dam le plus grand
péril l3autorité & les jours des Souverains ( i),
Quant à l’opinion de l’infaillibilité du Pa
pe , les Jéfuitcs l’ont trouvée établie , ils
l’ont favorifée , ils l’ont étendue , parce qu’ils
vouloient mettre l’approbation donnée à leur
Inftitut par la Cour de Rome , à l’abri de
toute variation -, mais fi l’on excepte la der
rière extenfion donnée à l’infallibilité par rap
port aux faits non révélés, dont les Jéfuites ont
été les promoteurs, après avoir (outcnule prin
cipe contraire fousClement VIII en vue de fauver une doébrine favorite & un Auteur pré
cieux à l’Ordre (i) , tout ce que les Infailli
bilités ont écrit de plus outré fe retrouve dans
des livres auxquels la Société n’a point de part:
qu’arrivera-t-il donc après leur deftruclion ?
on verra peut-être plus de réferve de la part
( i ) Horrenda atquc ipfis adverfariis deteftanda
confequuntur , à quibusdam admittuntur ,
nec nifi extirpatâ radïce rcfecantur............. horrec
animus referre caetera quae deindè confequantur. . ..
lvaec in regio Confeiïu , pro fui officii ac generis dignitate, primus regii Sanguinis Princeps pari in Sedem apoftolicam ac regiam Majeftatem obfcrvantia
di xi t . . . . quae quidem fi fateamur Pontificibus dari,
fatis intelligimus quam vario in diicrimine non
modo Regum auftoritas/ëd etiam 'vita verfetur. Defenf.
Cler. Gallie, part. 1. lib. 10 . feft. i . c. 3. p. 95.
& 96.
7ieceJJario
(z) Hift. Congrcg. de auxil. Lovanii 1701.
595* 5^8-
des Ecrivains qui traiteront ce fujet ; ils cou
peront les branches nouvelles du fyftême pour
conferver le tronc ; ils adouciront le langage,
& l’erreur fera peut-être plus dangereufe , dé
pouillée de cette écorce groiEere qui lui fert
prefque de contrepoifon. N ’eft-ce pas à l’ex
cès des alertions des Jéfuites contre la mo
rale de l’Eglife & celle de l’Etat, à leur perfévérance dans des doéhines abandonnées par
d ’autres Ordres religieux, &: vraiment fyftématiques dans le leur , qu'on doit le chan
gement de tant d’efprits qu’ils avoient fafeinés? Que dis-je P il a fallu des malheurs Sc
des forfaits pour déterminer les Nations à
frapper ce grand coup.
Dieu, qui veille fur la chrétienté, ne nous
a éclairés qu’en aveuglant les Jéfuites ; ils
fe font refufés aux moyens qu’on leur
offroit de fe fauver ; ils ont préféré la perf.
peélive de leur deftruétion , à une réfor
mation dont un efprit d’indulgence faifoit
chercher la polTibilité ; ils couroient de par
tout à leur perte &c fe précipitoient , pour
ainlî dire, au-devant du fort qui les attendoit ; ils n’ont répondu aux accufations les
plus graves que par de nouveaux crimes, &C
ont mieux aimé juftifier leur profeription
que de mettre un frein à leurs vengeances ;
ils feront donc détruits par toute la terre :
mais ce feroit s'abufer étrangement que d'ima-
C c ij
�10 4
gîner que l'Eglifc délivrée d’eux n’aura plus
de combats à livrer, plus d’abus à réformer ;
il lui refiera le foin allez vafle de réparer
les breches faites à fa difcipline avant qu'il
y eût des Jéluites , Se les ruines de tout ce
qu'ils ont détruit. Notre efpérance eft dans
la piété des Papes qui gouvernent l’Eglife ,
dans le St. Siégé toujours diftinél de la Cour
de Rome , Se moins expofé aux furprifes que
la perfonne du Pontife ( i ) , dans le facré
College , dans les Evêques de l'univers ca
tholique , dans la protection des Souverains,
qu’on tente vainement de traveftir en ferment
de fidélité, ou de réduire au devoir de fé
conder , de fervir , Se de n’agir qu'autant
qu'elle eft réclamée ; fon droit eflèntiel eft
de rappeller , autant qu'il cfl pollîble , dans
la difcipline extérieure l’ordre établi par
les faints Décrets ( z ) , fans avoir befoin
( i) A liu d funt fedes , aliud praefidentes. St. Leon.
Papa fluit , Papatus flabilis eft. Gerfon.
( z ) Uno verbo concludam : fi Imperator cum toto
îibi fubje&o Concilio . . . . repetierit facios Canoncs
antiquos ac fandtiffimas prifeorum obfervationcs, &
quidquid illis ebviaret, unà cum toto Concilio dccerncret tollendum elfe & Canonibus Tandis ftridififimè obediendum, ro go , quis chriftianus dicerc polTet
jbi aliquid prætcr poteftatem & audotitatem attentatum ? Cardin, de Cufa , Concord, catbolic. 1. 3. c,
40.
'
Ad antiqua femper nui nos opportet , præcipuum*
id fuit Gallotum ftudium in Concilio Ttiden-
2-Of
d ’être excitée ( 1 ) , Se d'appuyer de tout fort
pouvoir l'autorité des premiers Canons formés
■ par l'cfpnt de Dieu & confacrés par les refpcùls
de tout l1univers.
Le derpier Bref apprend à la chrétienté ,
que des prétentions auflî dangereufes pour
l’Eglife que pour l'Empire fub/iflent, Se nous
avons moins à combattre la nouvelle entreprife que le fyftême général : l'eflèntiel eft
de pénétrer la caufe de l'obftination à le
reproduire , Se de chercher les moyens de le
proferire fans retour, Se le grand bien de l'a
bolition de l’Inftitut eft de préparer celle du
fyftême qui lui donna le jour. Permettcznous, Meilleurs , quelques réflexions , qui
feront comme le fruit Se le réfultat de la
difcuffîon à laquelle nous avons cru devoir
nous livrer.
La Cour de Rome , dont la politique fut
toujours de ne point reculer , s'v eft encore
tino ; itaque Otatores Regis, id præ aliis omnibus,
xnandatum acceperant : in Ecclefi.î reformandâ primum id videri tit ad Ecclejig. initia redeatur , H t
EcclcftA Jlatus ad originis fur. puritatem quam ma
xime accedat. Bofluer.
( 1 ) Ut non folum interpellai UT rogati Principes
minifterinm fuum ad ohfcrvationem Canonum commodare poïïint , fed etiam ex ojfvio in eam curam
incumbcre teneantur. Marca , de Concordiâ Sacerdot.
CT Imper. I. ix, cap. 10. n. 1.
�ic6
affermie, Sc pour ainfi dire condamnée, de
puis quelle a adopté l’opinion de l’infaillibi
lité du Pape : le mot d’infaillibilité une fois
prononcé , il faut ou le rétraéter , ou ne fe
rétraéler fur rien ; une feule innovation de
vient la fource &c l’appui de mille autres, &
l’autorité qui fe donne pour irréformable ne
peut ni fouffrir d'être réformée, ni fe réfor
mer elle-même : plutôt que de s’y réfoudre,
le miniftere de la Cour de Rome épuifa tou
jours tout ce que la patience, l’art de la
négociation , &: la fubtilité des interprétations
peuvent fournir de reffources : de là tant de
paix défavantageufes ou fimulées, & comme
l’a dit la Cour de Parme , tant de négocia
tions tramées en longueur par de faujfes efpérances \ la Cour de Rome fçait même fe
relever de fes propres condamnations.
La ferme réfiftance , pratiquée du tems de
Philippe le Bel , procura la rétraélation & le
biffement de quelques Bulles de Boniface VIII :
la Bulle Unam fanftam fut plus ménagée ; elle
fut révoquée par la Clémentine M e ru it, mais
la révocation fut conçue de maniéré qu’elle
paroît n’êcre accordée qu’à l’égard de la
France, quoique la première Bulle fut éma
née en forme de loi générale , &c même de
définition -, & ce n’eft pas fans deftèin que la
nouvelle Bulle fut placée dans 1a compilation
207
des Clémentines fous le titre de privilegïtt
La dernière reftource de la Cour de Rome
eft de laiffèr aux Souverains, à titre de conceffion & de privilège, les droits dont elle n’a pu
parvenir à les dépouiller ; ainfi la réglé qui 11e
permet pas d’excommunier les Souverains a écé
convertie en fimple privilège émané des Papes,
tandis que le privilège clérical, accordé par
les Souverains aux Eccléfiaftiques, a été ap
pelle Droit commun , &c que le droit com
mun qui les autorife à punir feuls les crimes
de leurs fujets eccléfiaftiques , ou pour par
ler comme Juftiniea, à punir feuls tout délit
(1)
Meruit charifïimi filii noftri Philippi RegÎ9
Francorum illuftris , finccræ affeétionis ad nos & Ecclcfiam romanam integritas , & progenitorum fuorum præclara mérita, meruerunt : Meruit infuper regnicolarum puritas., ac devotionis finceritas , ut tara
Regem , quim regnum favore benevolo profequamur.
Hinc cft , quod nos Régi , & regno per dejinitionem , & declararionem bonæ merooriæ Bonifacii
Papa: VIII. prædecefloris noftri qux incipit, XJnam
fanftam , nullum volumus vel intendimus præjudicium generari ; ncc quôd per illam Rex , regnum,
& regnicola: prælibati ampliùs Ecclefiæ fine fubjefti
romans , quam anreà exirtebant : fed omnia inteiligantur in eodem elTe (latu , quo erant ante definitionem pra:fatam : tàm quantum ad Ecclefiam , quàm
ctiani ad Regem , regnum , & regnicolas fuperiùs
nomioatos. Clément* Meruit , tit. de privilcg. f>*g.
338.
�208 .
qui n’eft point eccléftafiique ( i ) , a etc dé
nommé privilège ( i ) :. il n’y a pas jufqu a
l’indépendance de la Couronne que la Cour
de Rome n’ait voulu traveftir en privilège,
lorfqu’elle a été Forcée de la reconnoitre de
nouveau par la Clémentine M eruit , après
l’avoir limitée par d’autres textes , à l’aide *
des réferves adroites d'une j urifdiüion ac
cidentelle a raifon du péché.
L ’Ultramontain méconnoît aujourd’hui dans
cette Clémentine le caractère d’une loi dé
rogatoire de la Bulle Vnam fanftam ; il dit
que la Fécondé Bulle confirme au contraire
la doétrine de la première 3 qu’en rétabliffant
( i ) Si de criminibus conveniamur fîquidem civilibus hic quidem competentes Judices . . . . fi
verô ecclejîajticum (it deli&um . . . . Epifcopus hoc
difeernat. Novell. 83. pr&fat. & c. 1.
( i)
a cnim non dicuncur privilegiata5 quia Prin«
ceps iple libi refervaverit , quando pvivilegium
exempiionis Clericis concelTit ; fed dicuntur privilegiata quia privilegio Sedis apofiollcA indulrum eft
Regibus Francorum , ut ea delida cognofcerc poffinc. Bellîivm. de potefi. fumm. Pontif. in temporaiib;
cap. 35. p. 190.
C’cft ce qu’ils nommèrent cas privilégies ; cai;
comme le privilège clérical avoit pailé en droit
commun , on regarda comme un privilège cette
relhidion que l’on y apporca , quoiqu’en effet elle
ramenât l'ancien droit commun. Fleury lnjlit. ati
droit ccclef. rom. 1. ch. 14. p. 14 1.
111
209
finit toutes chûfes dans l ’état c/ui a précédé f
elle indique que la Bulle de Boniface VIII
n’étoit que déclarative de l’obligation ïmpofee de tout tems ( 1 ) : d’après cette idée
Léon X par la Bulle Paflor Aternus, a renouvellé
la Bulle Vnam fanttam , / ans préjudice de U
Clémentine M eruit ( 1 ) , au lieu de laiffer
la première dans l’oubli, 6c l’Ultramontain
lui attribue aujourd’hui le caraétere d’une
loi de l’Eglife, à la faveur d’une prétendue
acceptation tacite des Eglifes étrangères ;
cette erreur de fait entraîne les conféquences les plus contraires à nos maximes.
Elle fuppofe d’abord que l’indépendance
des Couronnes eft une queflion foumife à
l’autorité eccléfiaftique ; c’eft le dangereux fyfitême du procès-verbal de la Chambre eccléfiaftique de l’année 1 6 1 4 , rétraélé en 1 6 8 1 ;
elle fuppofe encore que les Eglifes étrangè
res ont adhéré à la faufïè doétrine de la Bulle
Vnam fanftam, ou que l’acceptation tacite fe
forme par le feul filence d’une partie des
( 1 ) Neque obftat quod definitio hujus Dccretalis videtur efle revocata à Clémente V in extra
vagant , M eru it, de privilegiis : neque enim Clexnens V Extravagantenj Bonifacii revocavit, fed
admonuit eam nihil novi definivilfe, fed antiquani
obi gationcm declarctffe , quam habent homines ad
obediendum & fubjacendum apoftolica? Sedi. Bellarm.
de potejl, fum. P ontif. in temporal. cap. 3. p. 44.
U) Tom. 14 . Concil. p. 3 13 ,
Dd
�ÎIO
Eglifes , fans conformité d’enfeignëment ci>
rre les premiers Pafteurs, quoique cette con
formité , confangttirritas d o ü rin a , aperta qne[tio , ubique confenfus, foit, fuivant le témoi
gnage de l'antiquité retracée par Bofluet, le
vrai caraétere de l'acceptation tacite & de
fait. Elle fuppofe enfin ( 8c cette dernieve
fuppofition mettroit lâ Cour de Rome en état
de tout entreprendre ) que le fimple filence
ou l'ion-réclamation des Eglifes étrangères
fur les Décrets les plus ambitieux de cette
Cour , a fufti pour leur imprimer le carac
tère d'une décifion infaillible , malgré la ré
clamation exprefiè de l'Eglife Gallicane, 8c l'on
fe met en droit de compter pour rien > dans
Tous les cas femblables , cette portion illnjirt
de IF g life univerfelle [i].
Lorfque la France fe contenta de la Clé
mentine M e-ruit, au lieu d'exiger une rétrac
tation formelle du principe établi par la Bulle
Vnam ÇanBam, elle ne prévoyoit pas les in
terprétations fubtiles qui dévoient un jour obfcurcir le fens de la Clémentine, 8c faire re
vivre la première Bulle.
( i ) Quod objiciunt caeterarum Pentium confenfione nos premi , ac pofle à Pontifice fecurc damnari Galliam , decreto -ex noftris quoque dogmaubus tôrius Ecclefiæ confenfu valituro ; tanquàm lcclefia Gallicana , tanta Ecclefiæ pars , caque florentiflima , nihil fit (fc. Çorollar. défenf. Cler. G.illic, o.
i i . />. 3 i l .
2i r
Quant à la Bulle In cœna D om ïni, la Cour
de Rome a laide dire à la France que cette
Bulle ne la regarde pas , qu'elle eft infourcnable à Jon égard , 8c cependant cette Couç
y compte toujours , & n'a donné aucune fatisfaélion aux Souverains, qui ont tous ré
clamé.
La même politique élude les décidons les
plus refpeétables : que d'efforts n'ont pas fait
les ultramontains, pour répandre des nuages
fur la définition du Concile de Confiance,
8c pour ébranler les quatre articles du Clergé
de France de i6 8 z \ La Cour de Rome, qui
ne recule jamais , veut aufli que tout plie
devant elle ; elle a eu l'art de furprendre
plus d'une fois des démarches capables d'é
nerver la Déclaration de 16 $ i , ou même
de la mettre en oubli : qu'il feroit à defirer
qic , pour les réparer , on rendit par
tout de nouveaux hommages à une doéfrine
qui fait la sûreté commune du Trône &: de
l'Epifcopat !
Les démêlés qui précédèrent cette Décla
ration célébré, n'étoient pas comparables à
ceux que fait naître le dernier Bref: cette
démarche ne fut de la part de la Frarice ,
comme nous l'apprenons des aétes de ce tems,
qu'une précaution prife contre des entreprifes que la rupture furvenue entre les Cours
de Rome 8c de Frapçe pouvoient faire ap-
�lïî
préhender ; l’entreprife moderne réclame les
mêmes précautions de la part de toutes les
Nacions, & la publication de la doéhrine das
quatre Articles dans toute l’Eglife fera le feul
ï'emede efficace : c’eft ici le dernier objet fur
lequel nous croyons devoir nous expliquer &
le plus important ; le Miniftere public a de
tout tems exprimé devant les Tribunaux les
vœux qu’il forme pour l’afferrniflèment de nos
ma\imes.
Les deux points fondamentaux de nos Li
bertés , qui font l’incompétence du pouvoir
des Clefs fur le temporel, & la fupériorité
de l’Eglife univerfelle fur le Pape , forment
le Droit commun de la chrétienté ( i ).
•
,
l’ancienne liberté de /’ Eglije univerfelle çr la
difciplinc des Conciles ( 1 J
l’an
cienne pureté des Canons efi le fondement des
Libertés de l’Eglife Gallicane
• en général
(5). Si l'on pepe
reprocher à la Françe de s’en être écarcée ,
c’eft uniquement par la tolérance de divers
droits inconnus à l’antiquité dont elle lai/ïè
jouir le Pape , &c par quelques nouveautés
que cette tolérance a entraînées comme re-
i
( i ) Ce que nos peres ont appel lé Libertés de l’Eglife Gallicane , ne font point palfe-droits ou pri
vilèges exorbitans , mais plutôt franchifes naturel
les & ingénuités ou droits communs . . . . Ces Li
bertés bien confidérées fe trouveront dépendre de
deux maximes fort connexes que la, France a tou
jours tenu pour certaines : la première eft que les
Papes ne peuvent rien commander ni ordonner,
foit en général ou en particulier, de ce qui con
cerne les chofes temporelles........... La fécondé,
a’en France la puiftance abfolue & infinie n’a point
e lieu , mais eft retenue & bornée par les Ca
nons . . . . Et in hoc maxime confiait libertas Ecclefu Gallicane,. . . . De la fécondé maxime dé
pend . . . . que le Pape . . . . reconnu pour chef
& premiej de toute l’Eglife m ilitante, & Pere
commun de tous Chrétiens . . . . toutefois n’eft eftimé être pai-deflus le Concile uniyerfcl > mais tenu
3
2 13
Au-delà de ces deux points, il en eft en
core d’autres que l’Eglife de France a fçu ,
mieux que les Eglifes étrangères, fauverdes
ufurpations de la Cour de Rome, & ceuxlà , quoique moins intérefïàns ne font auffi
que franchifes naturelles & ingénuités ( 1) , ou
aux Décrets & Arrêts d’icelui , comme aux Commandemens de l’Eglife. Libertés de l'Eglife Gallic.
art. t. 3. 4. S- 6. CT 40.
Toutes les Libertés gallicanes roulenc fur ces deux
maximes : Que ^a puiftance donnée par J . C. à
fon Eglife , eft purement fpirituclle , & ne s’étend ,
ni directement , ni indirectement , fur les chofes
temporelles ; Que l a plénitude de puiftance qu’a le
Pape , comme chef de l ’Eglife , doit erre exercée
conformément aux Canons reçus de route Eglife ÿ
& que lui-même eft fournis au Jugemenc du Con
cile univerfel , dans Jes cas marqués par le Con
cile de Conftance. Fleury lnft. au droit ecclef. tom.
l . ch. 15 . p. n 6 .
( i ) Du Tiller.
( z ) Patru.
( 3 ) Arrêt du Parlement de Paris de 1703,
�U
4
medes devenus nécefïahes pour prévenir les
abus qui pouvoient naître dans l'exercice de
ces droits. La France , malgré Ton attention
à retenir fa liberté naturelle , eft encore fort
éloignée de la liberté de l’Eglife primitive 3
en faut-il d’autre preuve que l'ufage fubfiftant
de la Prévention & des Annates ?
Cependant l’Egliie étant une, & la puiffance publique ayant par-tout les mêmes droits,
la liberté des Nations eft égale, ou du moins
le droit de reprendre vis-à-vis de Rome une
liberté uniforme elf par-tout égal : les Ul
tramontains l’ont fouvent reconnu , en to
lérant les mefures prifes par tous les Gouvernemens contre les innovations qui cho
quent les mœurs , droits 6c ufages des Na
tions.
Il exifte chez tous les peuples une loi d’obéiffance raifonnable (i) preferite par l’Evan
gile , une liberté chrétienne qui cft un bien
fait de la religion ( i ) , & des voies établies
pour arrêter l’ufurpation [3]. Les antres N a ( 1 ) Rationabile obfequ'mm xiejlrum. Epift. Pauli ad
Romanos , c. 1 1. 1.
(2) Prctio empti cftis, nolite ficri fervi hominum. 1. Corinth. 8. 13 .
Ne clàm pauladm amittatur Iibertas quam donavit nobis fanguine fuo Dominus nofter Jefus Chriftus omnium hominum liberator. Conc. Epbcf. art. 7.
tom. 3. Concil. p. 801.
(3) An foli Galli funt qui ex antiquis n o yellif
I
fions ont employé des moyens équivalons atlx
nôtres , pour Je défendre des entreprifes de la
Cour de Rome : Nenife lui a réfifté fort fouvent 3 en Efpàgne on a retenu des Bulles fans
en permettre l’exécution 3 l ’Allemagne neJouf.
fre pas que l ’on contrevienne au concordat
germanique 3 chaque pays a fes anciens ufag 's [4].
Mais il faut l’avouer, ces moyens peuvent
fouvent être inefficaces , ou même être ren
dus fufpeéts par les partifans de l’autorité
îrréformable du Pape 3 ils ne fçauroient du
moins fufFire dans des conjonétures critiques ,
fi on laifToit fubfifter plus long-tems dans les
Eglifes étrangères le moindre nuage fur l’er
reur du pouvoir indirect ou le préjugé de
l'infaillibilité du Pape , & fi l’on y toléroit la
réferve encore plus abufive du Jugement en
première inftance à Rome des caufes de la
fôi ; toutes ces nouveautés menacent égale
ment le pouvoir fouverain , la liberté des peu
ples , l’autorité des Evêques qu’elles laifTènt
prefque fans miniftere 3 les Libertés particu
lières font peu allurées lorfqu’elles ne font
que ea retinenc quæ ufu probata publiez upilitatî
paciquc congruant , quin ipfe Anonymus eâ in re
omnium gentium ttjuam ejfe libertatem. Defcnf. Cler.
Gallic. tom. i . p. 3. /. 1 1 . t. 14. />. 296.
( 1 ) Fleury , inftic. au droit eccléf. tom. 1 . chap.
24. p. 224.
,
�2 I6
pas appuyées fur les deux grands refforts de
la liberté générale.
C'eft dans cette idée que le Cardinal dé
Lorraine difoit, que la fupériorité du Con
cile fur le Pape , intérejfe la conservation des
privilèges dit Royaume , qu’elle efl un des prin
cipaux appuis de nos Libertés 3 &C Bolïuet s'é
lève avec force contre ceux qui avoient crû
que la maxime de la fupériorité du Concile
fur le Pape n'eft pas néceffaire à la défenfè
de la vraie Liberté de l'Eglife : fans cette
bafe toute liberté efl illujoire ; rutila efl, mfl
Concihum (latuas potiori poteflate ejfe ( i ).
Mais pourquoi les autres Etats la négligeroient-ils ? la tradition des Eglifes étrangères
fait partie des principales preuves que les
defenfeurs de nos Libertés ont recueillies,
& nos maximes ont été enfeignées par toute
la terre ( i ) : il fut même un tems ou les
Eglifes étrangères n'élevoient pas, vis-à-vis de
leur Souverain , les prétentions qu’on ofoit
élever en France. La Conférence de Vincennes en fournit une grande preuve.
Les
( i ) Dcfenf. Clcr. Gallic. tom. z. part. 3. lib. 1 1 .
cap. 1 5. p. z8o.
(z ) ln omnibus Ecclefiis vulgatiflimam extitifle, &
à Scriptoribus pietate & doétrinâ praftantifTimis uni
que terrarum publiée & cum laude efTe defenfam.
jîppendix ad defenf, Cler. Gallic. lib. x. c. 8. p. Z4.
i i it
.
ijj
Les Evêques y faifoient valoir une jurîf*
diéfion temporelle annexée au pouvoir de£
Clefs ; ils réclamoient le droit divin & hu
main 3 ils appelaient à leur fecours cette
maxime de la Bulle Unam fanüam , que les1
deux glaives appartiennent a PEglife 3 qu'elle
a le droit ci7 la difpofltion du glaive mate
riel 3 que la PuilTànce féculiere n'a que l ’e
xécution , ôc qu'elle doit tenir ce glaive aux?
ordres de la Puijfance Spirituelle 3 que le1
principe du chapitre N o v it de ju d ic iis ( par
lequel le Pape revendique f a raiSon du péché,
l’exercice d'une jurifdiébion temporelle qu'il
n'a point a raijon du flcS ) eft commun à
tous les Evêques dans l ’étendue de leurs Dio cefles quoique le texte ne parle que du Pape
,
( 1J. Pierre de Cugniere leur oppofoit que
les Evêques des autres nations ne réclarnoient pas un pareil droit 3 ceux de France
l’avouoient & répondoient que cette préroga*
(1) Q u i a verurh eft quod duo funt g la d ii ; i f t u i
didtum eft E c cle fîx , 3c verum eft quod jus & p o teftas iftoru m dtiortim gladiorum efl pénis Pcclcfiam ,
iiccc execiitio g la d ii m arerialis fit penès fec u lares.
Libell. Bertrand. Cardinalis S. Clement. adverf.
inagifir. Petrum de Cligneriis. Preuve des libertés
to m . 1. p. 38 . ln talibus enim de jure dïvino &
humdno brachium temporale fpirituali obedirc tenetur. lbid. pkg. 4 1 . C liect caput Novit loquatuf
in Papa t idem ejl in aliis EpiScopis in fuis Dicé»
ceps. ld. ibid. p.' 49.
Ee
�1 18
leur étoit néGeliaite , &: qu’elle illuf.
( i ). Les Nations étran
gères ne refuferont pas de Cuivre leur propre
exemple j 8c celui de l'Allemblée de 1681,
qui voulut éloigner à jamais du royaume les
five
troit le Royaume
troubles que celte doSirine y avoit f Jouvcnt
excités fous le voile de la religion ? Debuimus
omnibus împerii tumultibus populorumque motibus obviant ire , in eo préfet tim regno in quo
tôt ohm fpecie religionis perdneUiones exortx funt (i).
C’eft dans un Concile de Tolede que fut
lancé l’anathême contre les fujets, & fur-tout
( i ) Se<l forte adhuc dicctur , quare hoc fibi vindicat Ecclefia Gallicana , cum a lis, Eccleji& fibi in
aliis regionibus hoc minime vindicare nofeantur.....
ad quod faciliter refpondcri...........imo hoc redundut in magnum nobilitatem regni £9* Régis.
Si ergo Praelati regni non haberent iilud ]us ,
fed tolleretur ab c is , iam perderct Rex 8c regnum
\inam de conditionibus per quam multitm nobilitat:cr , feilicet Pr&latorum folemnitatem . . . . Coocludo
ergo tamquam probacum de jure divino , na-tura.it ,
canonico & civi!i , confuetudinc & ptivtlegio . quod
]us cognofcendi in talibus Ecclelîx competcte poteft , & competit Ecclelix G a llic an s.......... Item ,
non miretur rcgalis dignitas , h in regno Francis
nobiliori mundi hsc prerogativa Ecdefiis debeatur :
In hoc enim fua nobilitas es" potentia decoratur,
Libell. Bertrand. Cardinalis S. Clément, adverf. ma*
giltr. Pctrum de Cugneriis. Preuves des Libertés,
tom. x, p. 31. & 37-
U) Epiftola Ckri Gallic. i6 îi.
2 19
contre les Miniftres de la religion qui attenteroient à la fouveraineté des Rois , & qui
manqueroient au ferment de fidélité (1).
Un autre Concile de Tolède inféré dans
le Décret de Gratien, reconnoît la nécellité
du recours au Prince contre les abus des Pré
lats. S i autem À ietropolitanus ta lia g é r â t, Régis
hxc au n b u s in tim a re non différant. On retrouveroic les memes témoignages dans les tems
modernes : ce fonc des traits de lumière &c de
fidélité qui éclatent au milieu des tems d’obfcui cillement ; c’eff: l’ancienne Tradition qui
rompt, au premier inftant de liberté, les chaî
nes forgées par le defpotifme fpirituel du
Miniftere de Rome.
La prétendue immunité de droit divin des
perfonnes & des biens eccléfiaftiques a été
combattue par Covari uvias, fçavant Evêque
Efpagnol [1], & par une foule de Do&eurs
(1) Quicumque ex nobis vel totius Hifpanix pofulis , facramentum fidei fu& quod pro patr/x gentifque Gothorum fiatu , Vel confervatione Regix falutis ,
pollicitus efl , temeraverit , aut pottflxte regni exuerit , anathema fit in confpeïïu Dci Fatris CT Angelorum , atque ab Ecclefiâ catholicâ quam perjurio profanaverit , efficiatur extraneus , cum omnibus impie tatis fux fociis , quia oportet ut una poena teneat
obnoxios quos fimilis error invencrit impiiextos. C011cil. Tolctan.
( t ) Si jure divino abfquc humants conftiturionibus res effet examinanda , refpondendum foret in
hifee temporalibus, ntc Clericos, nec eorum rcs à
E e ij
�220
etrangers. La fupériorité du Concile fur lç
Pape n’a pas eu de plus célébrés défendeurs
que le Cardinal de C ula, Zarabella ou le
Cardinal de Florence (ij, l’Evêque de Pa
ie rie , Toftat, Evêque d’Avila, prodige de
fcience , appelle communément &: même par
Bellarmin , flupor rnundi, k l'biftoire nous a
tranfmis les noms des grands Evêques Efpagnols , Allemands, Vénitiens, qui combatti
rent au Concile de Trente , de concert avec
les Evêques françois , les efforts des Légats
du Pape ôc des Jéfuites , qui vouloient faire
définir par ce Concile les prétentions ultra
montaines. Il n’y a point d’Eglife nationale
qui ne puifiè s’honorer de monumens femplables à la Déclaration de 16 8 z j il n’y en
Jurifdiâione fxculari immunes cfle. Covarruv. tom.
%. cap. 31. p. 456.
( 1 ) Aliud Papa , aliud Sedes apojlolica , & Sedem
errare non pofTe : quod intelligcndurn videatur ,
accipiendo Sedem pro totâ Ecclefiâ.......... Ecclefiam
jomanam fèu Sedem apoftolicam vocari , non Papam
folum , fed Papam cum Cardinalibus . quos intec
& Papam fi fuerit difeordia , uc nunc evenic , congregandam totam Ecclefiam , id eft , totam congregationem catholicorum , & principales miniftros fidei fcilicet Prxlatos , qui totam congtegationcm
jepræfentent , & agendum apoftolico more , arque uc
in actis feribitur , Concilium convocandam > undè
illud Apoftoli (s3 Seniores ; & infpa : Vifum cft Sptritui SanBo & nobis. Zarabell. tractat. de fehifm^
eàit. Argent, p. 556. 557. 558. 559.
221
a point qui en y fouferivant 11e pût dire com
me le Clergé de France , qu’elle conferve le
dépôt qui lui a été tranfmis par fes Peres,
accepta à patribus [1].
Nos maximes, qui font du nombre de celles
fur lefquelles l’Eglife a été fi long-tems unius
la b ii , ne fe font obfcurcies dans quelques
pays que par la contrainte où les ont tenues
les Tribunaux de l’Inquificion. On enfeignoit
encore du tems d’Adrien V I, & il enfeignoit
lui-même à titre de vérité certaine, que le
Pape peut propofer P erreur par un Décret (1) j
parvenu à la Papauté , Adrien VI faifoit im
primer les ouvrages où cette véricé efi; éta
blie.
Les premiers défenfeurs de l’infaillibilité ,
plus modérés que les derniers , avoient du
moins refpeélé le fenriment qui la rejette :
tel cft le Doéleur Viéloria ($ )3 cité fur un
(1) Declaratio Cler. Gallic. in fine.
(1) Si per Ecclefiam romanam intelligirur Caput
ejus , purà Pontifex , certum cft quod poftit errare
eciam in iis quæ tangunt fidem , h&refim per fuam
determinationem auc decretalem afferendo. Adrian.
in 4. [entent, q. de confirmât.
( 3 ) De comparatione poteftatis Papx eft duplex
fenrentia : altéra . . . . quôd Papa eft fuprà Concilium : altéra eft communis fenrentia Parifienfium Sc
multorum aliorum Dodorum in Thcologiâ & Canonibus . . . . quôd Concilium eft fuprà Papam. Frantifeus de Victoria releci. 4. de poteft. Paps. & Concil.
Vl.
�223
112
autre objet dans la requête préfentéc au Roi
d’El pagne contre le nouveau Bref par Mef
fleurs les Procureurs généraux, & le Doc
teur Navarre rapporte les deux fentimens oppofés, de manière à faire entendre de quel
coté il auroic penché s’il eût été plus libre,
(p) Il eft tems de s’expliquer, de fe réunir &
de rendre tout fon éclat -à la définition ex*
prefle, par laquelle l'Eglife allèmblée à Conftance a reconnu la fupériorité du Concile fur
le Pape , «Sc coridamné d’avance l’infaillibili
té , qu’on n’avoit pas encore imaginée au
tems de ce Concile.
Les Souverains auroient pu étouffer cette
opinion dès fa naiflance , & ils l’auroient pu
de leur feule autorité , ne fut-ce que par ce
motif fi intéreffant pour eux , que cette doc
trine tranfporte à un fevil l’obéiffance qu’ils
n’ont vouée qu’aux oracles de l’Eglife univerfellejmais aujourd’hui plus que jamais nous
pouvons dire apiès Mr. Talon, que la doc
trine de P in fa illib ilité , qui ruine abfolument
les Libertés de PEglifc Gallicane , établit -par
une [une néceffaire la puifjance abfolue des
Papes y même [tir la temporalité des Rois parce
;
,
( 1) : que
feroit devenue la France, Ci ce Pape avoir
été réputé & s’il setoit cru infaillible?
Le nouvel accroiiïement qu’on a donné à
cette infaillibilité, en la rendant tout enfemble fpirituelle & temporelle , en la faifant
fervir à confirmer la doctrine du pouvoir
même direét, & à juftificr l'application de
ce pouvoir aux cas particuliers ; l’ufage tout
récent qu’en fait le dernier Bref, pour arro
ger au Pape un pouvoir fupéricur à celui de
l’Etat, & pour infliger des peines aux Sou
verains qui refuferont de foumettre à la Cour
de Rome leur légiflation , qui eft leur Cou
ronne , ne permettent plus de différer de
proferire cette opinion.
Ce qui vient de fe paflèr doit réveiller
l’attention des Evêques , des Nations , &£
c’eft le moment de fe fouvenir de ces pa
roles mémorables du rapport fait à l'Aflemblée de 1681 , quavcc cette opinion de Vin
fa illib ilité , qui prête un appui aux attaques
livrées à l'indépendance du pouvoir des Rois,
on ne pourroit être franpois &
( 1 ) Non eft confilium in præfentiâ éefinire propter illam difeordiam maximam Romanorum & Pai i f . . . . altéra vero placuit Panormitano qui pro
Parificnfbus
quam frec^nentïus nojlri fequuntur*
eft ,
Martinus Navarrus.
,
que les Papes font y quand i l leur p la ît deS
points doélrinaux de ces mêmes prétentions fu r
la temporalité des Rois & fu r leurs perfonnes
facrées comme a f a it Boniface y j l l
même chrétien
U ).
(1) M. Talon.
( i j Yous voyez , Meffeigneurs, à quoi vous porte-
�14
ïi4
Le Prélat qui s’expliquoit ainfi fut, par Cci
mœurs Sc par fa fcience , le modelé 3c l'une
des grandes lumières du Clergé ; fon rapport
loué par Boffuet ( i ) , inféré dans les a&es
de l’Aftèmblée de 1682. , eft une fécondé dé
claration plus étendue de cette Afiembléc
l’avis qu’il donne eft comme le lignai de la
réunion des Etzlifes
contre une introduction
o
suffi funefte, & puifque la doétrine du pou
indireét, auquel celle de l’infaillibilité eft
liée, renverfe les fondera ens de la fociété (z),
nous difons qu’avec cette doctrine confidérée dans tous fes rapports , non feulement
on ne peut être français, mais qu’on ne pourro it, dans quelque part du monde que ce
fo it, être lujet éc citoyen ; on ne peut aVec
elle être que Jéfuite. Le dévouement à l’in
faillibilité 3c à l’obéifïànce aveugle qui en
eft
voir
refit cette infaillibilité : car potirroit-on être TranO* même Chrétien en fourenant une opinion fi
oppofée aux paroles exprefies de J . C. , fi contraire
à la do&rine de Tes Apôcres ? Gilbert de Choifeul du
Tleffis Vraflin , Evêque de Tournai. Rapport fait a
l'Ajfcrnb\ée de 16 8 1. p. 7 1 .
( 1 ) Ipfumque adeo Tornacenfcm Epifcopum , tan-
f o is
verfum cœrum fua Cf rollegarum [enfin referentem.
Boffuet in pr&fatione append. ad defenf. Cler. G al lie.
■A
22 J
eft le fruit, eft le vœu de l’Inftitur de ne fervir
que Dieu & le Pape , ou même celui des Profès
des quatre vœux. Paul III en portoit ce juge
ment lorfqu’il fe refufoit à l’approbation de
l’Inftitut, jufqu’à ce qu’on lui eût promis 1’obéiffance fans bornes, qui fuppofe l’infaillibilité.
Mais pour un vrai Jéfuite, la créance de
l’infaillibilité du Pape eft, ainfi que tous les
vœux de la Sociéré , fubordonnée aux reA
tridfions artifîcieufes de l’Inftitut, à l’autorité
immédiate du régime, au motif fupérieur de
la gloire de l'Ordre , ôc au fanatifme d’un
Inftituc qui fe dit révélé ; au lieu que dans les
particuliers imbus de la dcxftrine de l’infailli
bilité , ôc qui ne font pas Jéfuitcs, le dévoue
ment à l’infaillibilité termine à la Cour de
Rome l’hommage de cette obéiftance aveugle,
qui renferme une forte d’abjuration des droits
de la liberté chrétienne & des devoirs du fujetj
& c’eft là ce qui fubfifteroit après l’extinétion
de l’Ordre des Jéfuites.
Le tems eft paffé ou l*on pouvoir avec
plus de bonne foi regarder cette infaillibilité
du Pape comme un fujet de controverlè ;
les preuves de la fauftèté de cette opinion
ont été portées jufqu’à l’évidence. Le Car
dinal Orlî qui a entrepris de réfuter Boftuet,
avoue que d ’habiles Théologiens de Romey après
avoir examiné férieufement fon livre , jugèrent
que la caufe des Ultramontains ne pouvoit plus
�22$
déformais être regardée que comme une caufc dé fefpérée , & qu’il ne reftoit plus que de l’a»
ban donner ( i ).
On dira fans doute que dans cette fuppofnion le péril a celle , & que craindre une
chimere c'eft la réalifer. Cette objection eft
l'artifice le plus lîngulier des prétentions ul
tramontaines \ on voudroit leur faire un droit
de tolérance ou d afyle du décri même où
elles parodient être tombées : mais ceux qui
s’obftinent eux-mêmes à réallfer cette redou
table chimere , peuvent-ils inculper notre perfévérance à la combattre ?
A quelque nombre qu'on veuille réduire
les partifans de bonne foi qui relient à cette
doétrine, ce feront autant de fujets fur qui
les jEtats ne fçauroient compter dans les tems
de trouble , qui peuvent par leur réunion
former un parti & faifir l'occafion de fe
rallier à d'autres , qui enfin toutes les fois
que la prétendue autorité infaillible aura
marqué du fceau de l'erreur la réfiftance à
fes entreprifes , réclameront le précepte de
( i ) Ipfe enim & R o m s & alibi plures a u d iv i,
nec malos , nec indo&os > auc imperitos, qui BofïuetiaDo opéré pervôluto , nec indiligenter, ut cis
■ videbatur , expenfo , caufam hanc non ultra à ro
manis Theologis fuftinendam , fed veluti conclamatam ey depbr/ttam , dimittendnm ejje centrent :
nihil eflTe quod perfpicua: veritati objici poflit. Carâin. Orfî fc irreformab^Rom, Rontif. judic. in
fatione, x d
i i 7
la loi naturelle
divine , d’obéir d Dieu
. Le procédé de ceufc
qui veulent réduire à une question indiffé
rente la fupériorité de l'Eglife univerféllc fur
le Pape , arrêtée dans HH Concile œcuménique,
ne peut ( fuivânr la'- remarque d'un habile
Jui ifconfulte ) avoir d*autre caufe que le deffein
de former tin parti■ dans un E tat ( i). Là feule
autorité infaillible qui peut s’a ccorder avec la
fureté de l'Etat, eft l'autorité de l'Eglife dont
Dieu s’eft rendu le garant par fa parole 6 ôc
qu'il a borné par finftitution aux chofes fpirituelles.
{.
Si les Officiers de la Cour de Rome font
fincérement attachés à fes prétentions, il im
porte de déraciner cette erreur contagieufe;
s'ils la profeftènt contre leur propre convic
tion , cet entêtement annonceroit de leur
part des vues fufpeétes.
On peut efpérer de réduire ceux qtfi ne
s’obftinent que par préjugé, & l’on doit mé'nager leur foiblelTe,; mais les opinions ,qui
peuvent troubler l’Etat n’ont aucun drojt à
la tolérance , Ôc l’obftination qui tient à un
faux point d’honneur , à la politique , à l’am
bition , ne mérite aucun égard : ce neft pas
alors .la confcience ôc le retranchement impéôc
plutôt qu'aux hommes
»(Y)
l’Eglifê ^Câllic. toin. i. p.
Libertés de
Sc 1 7 1 .‘ édit, â i ï f f x C
F fij
�i* 8
( i ) que l'on
force , c’eft la duplicité ; la plupart des Ul
tramontains ne nous débitent plus les Ulu
lions de leur efprit, mais celles de leur cœur,
'uïftonem cordis f u i loquuntur ( i ) , plus coupa
bles encore d’ufurper le nom des Pontifes,
qui livrés à eux-mêmes n’auroient pas eu la
préfomption de fe croire infaillibles»
Toutes les fois que les Papes ont parlé par
leur1 propre efprit » ils n’ont témoigné que
la crainte d ’avoir f a illi ; Grégoire XI retraite
par fon teftament les erreurs contraires a U
fo i catholique qui pourroient lui avoir échap
pé (y ); & Pie IV, dans un tems où l’opi
nion de l’infaillibilité s’étoit déjà introduite,
déclaroit en plein Confiftoire , qu’il ne dou
nétrable de U liberté du coeur
tait pas que lu i & fes prédécejfeurs n’enjfent
pu errer
(4). Un femiment intime avertit l’hu-
(0
Paroles de M. de Fenelon , Archevêque de
Cambrai.
(a) Jerem. 13 . 16.
(3 ) Proteftamur . . . . quod fi in Confiftorio . . .
aliqua dixerimus erronea contra catholicam fidem
feu forfitàn adhærendô aliquorum opinionibus conirariis fidei catholica , feienter , quod non credimus ,
vel ctiam ignoranter . . . . ilia exprefsè & fpecialiter revocamus , deteftamur , & habere volumus pro
non dittis. Tejlament. Grtgorït X L Spicileg bâ
chery. p. 7 3 8
(4) Neque enim. fur» dubius quin ego & antedjfores met alifuando fa lli potuerimus., lia s 1 K
....
.
.
inanité de fa propre foiblefïè , & les préju
gés j qui peuvent encore (ubfifter parmi des
Do&eurs éclairés , céderont toujours à l'inftruétion ; ce qu’il faut craindre, c’cft le pré
jugé répandu parmi les peuples qu’on ne peut
allez affermir dans l'obéiflance aux loix, &
préferver de la fuperftition.
On dira peut-être que la raifon s’éclaire f
ôc que la foi commence à s’épurer de cet al
liage fuperftitieux qui obfcurciflbit, dans quel
ques efprits, le devoir de la fidélité aux Sou
verains i mais autant la raison s’éclaire , au
tant les mœurs ont dégénéré : l’efprit d’intri
gue eft plus répandu que jamais ; l'intérêt
choifît les opinions, & contrefait la convic
tion : des fentimens qu’une piété crédule embraflôit autrefois aveuglément, font devenus
l'objet des faux refpeéls de l'adulation ; on
a même vu des laïcs allier l'irréligion avec
le plus grand zele pour les prétentions ul
tramontaines , dont ( au moins en qualité de
citoyens ) ils devroient être aliénés : fi le peu
ple vient à foupçonner de duplicité ceux qui
font au-deflùs de lui, il fe précipite dans
l’irréligion, le plus terrible des fléaux ; & fi
au contraire il ne pénétré pas l'artifice , il
demeure fuperftitieux de bonne fo i, & peut
Le Laboureur, additions aux mém, de Caftelnau.
tom.
».
p.
417. 41 S.
�iy o
devenir fanatique toutes les fois qu’on vou
dra l’échauffer. Eh ! Meilleurs, pour produite
les plus grands trouble dans un Etat eft-il
nécelîàiie de pervertir la multitude ?
Il n’eft que trop facile d’àccréditèr parmi les
{impies le préjugé de l’obéiflànce aveugle , ou
d’une obéiflànce ablolue au Pape dans les chofes
doutcnfcs \ n’avoit-on pas exigé du tems de
Louis le Grand , en faveur de ce principe , des
foufcriptions clandeflihes que le gouvernement
arrêta ? Le vulgaire grolTier & parèlfeux > lé
vulgaire qui ne choilit pas , qui imite éc fuit,
fut toujours incapable de difculïion ; lès dé
marches de la Maglftrature pourroient le con
tenir , mais on a l’art de les empoifonner ,
en les attribuant a un fonds d’indifférence
pour la religion, ou a un manque de re£
peéfc pour l’autorité du St. Siégé, &c au
deflein de troubler l’intelligence qui doit
régner entre le Sacerdoce & l’Empire : là
PuilTànce fouveraîne ne peut réclamer fes
droits , qu’on ne crie que l’Eglife efb perfécutée : le mouvement qui s’éleva du terris
de Pierre de Cugnierés contre les ufurpations
des Eccléfiaftiques, étoit compté parmi les
époques de perfécution, in ilia pçrfecmiohè
tjnam bahutt Ecclefa Galticdna ,'difoit le Car
dinal Bertrand.
Quel parti prendfoit lé vulgaire égare pat
ces fuggeftions ? il commenceroit par perdre
*
3*
la confiance aux Magillrats, & bientôt il Ce
défieroit auffi des loix que les Souverains oppofent aux mêmes entreprîtes : il ne connoît
ni les droits de la puilïànce publique, ni
ceux de la liberté chrétienne, peut-être même
n’eft-il pas utile qu’il les connoilTè à fonds ;
il ne fçait pas que les plus zélés défenfeurs
de cette liberté font ceux qui ont le plus
refpcélé ce premier Siégé de la chrétienté,
qui 11e voit au-delTus de lui que l’Eglile univerfelle ou le Concile, c’eft-à-dire la repré
sentation du nom chrétien [ 1] ; il ne voit pas
que les Officiers de la Cour de Rome agio
tent feuls en ennemis du St. Siégé, lorfque
par de faudes prérogatives ils en diminuent
la majejlé fous prétexte de la relever (2.), ôc
préfèrent pour lui
ces chimères de putjjance à
incontefaU e (
3 ).
Les tems préfens ne nous laifïcnc que des
craintes éloignées ; mais puifque l'expérience
fa grandeur folidc
du pajfé infpire toujours des craintes légitimes
( 1 ) Univerfale Concilium reprefentationem catholicA ZcclefiA habere poteftatem immédiate à Chrifto ,
& e!Te omni rclpeétu tam fuprk Papam quàm Sedem apoftolicam. Nicol. de Cufa Concord, cathol.
( 1) Scdis apoftolicac principatum extollunt in
fpeciem , reipfd déprimant , invidiamque tantum non
veram autoritatem conciliant. Corollarium defenfionis Decl. Cler. G allie, h. 7. p. 308.
( 3 ) Difcours de M. le Procureur Général du Par
lement de Paris, dans l’Aflemblée de Sorbonne en
i6 ti.
�232
pour VAvenir , z7 efi de la prudence d*ajfurer
ces vérités f i importantes a l’Eglife & a l'E
tat y même fous le régné d'un Roi dont la putfifiance & la religion rendent les précautions
inutiles
[i]. Ceux qui dirigent le fyftême
ultramontain épient l’occafion de rétablir l’an
cien joug j ils fçavent la préparer & la fai(îr; on leur oppofe vainement alors les an
ciennes proteftations d’obéiflance , ils répon
dent , vires non fiuppetcbant.
Dans la bouche de l’Ultramontain par choix
&c par intérêt, ce mot exprime une politi
que fombre qu'il a fubftituée à la prudence
chrétienne y & q u i, comme nous l’avons dit
au commencement de ce difeours, ofe prendre
pour garant l’Eglife primitive ; mais l’Ultramontain de bonne foi parle’aufli le même lan
gage 3 tant eft grand le pouvoir de l’illufion !
Des Prélats pieux & même éclairés pour
leur (iecle , répondoient dans la Conférence
de Vincennes aux exemples de foumiflion du
Sauveur du monde , que Jefius-Cbrifi & les
slpôtres, uniquement occupés du foin d'infitruire , de convertir , de fiauver les peuples ,
étoient peu attachés à l’exercice de la jurifidittion y qu'ils avoient fiuivi la réglé du Sage
tracée dans l’Ecriture , qui dit que tout ce
efi permis n’efi pas toujours d propos , & qae
dans toute affaire il fau t choifir le tems &
les
( i ) idem.
:
.
2 33
tes crrqonfiances ; mais que depuis qûe le Tellpie franco is s'étoit fournis, par la grâce de Dieu 9
a la religion chrétienne , l’Eglife s’attache à
punir les délits & d rendre de jufies Jugemens (i) : l’adulation perfide des fiecles fuivans
a produit des railonnemens encor plus étran
ges. Je demande qui fomente l’irréligion, ou
de ceux d’entre les Ultramontains qui fe fonc
aveuglés jufqu’à fuppofer dans le fein du
Chriftianifme une autorité, qui nourriflànt
lourdement le projet de s’afTujettir toutes les
autres, régleroit le droit par la force, & les
entreprifes* fur l’apparence du fuccès ; ou de
ceux qui , pour affranchir de cette calomnie
la religion , le St. Siégé, la Cour de Rome
elle-même incapable d’entrer dans cette cons
piration , ont dit humblement au Chef vifible
de l'Eglife ce que difoient les Cardinaux à
Paul III , & ce que tant de grands hommes
V
( i ) Quia Chriftus & Apoftoli ab inirio toraliter
(îrant noftræ faluti & convcriîoni, ac eruditioni intenfi , parum circa cujafcumcjue Jurifd\Rionis exercitium
infifiebant. Actendentes illud prima ad Corinth. 6. omniit mibi licent , fed non omnla expédiant , & illud
Ecclef. 8 . omni negotio tempus efi ta1 opportanitas :
fed nunc per Dei gratiam torus populus Gallicanus
colla fidei chriftianae fubmiGc , tnerito Ecclefid infiflic
circa deliftorum punitionem , & juftorum judiciorum
red. itionem. Libcllus Bertrand. Cardinalis S. Clement.
ttdterf. magifir. Petrum de Cugnerùs. Libertés de
l’Eglife Galiic. tom. i. p, 30.
G g
�*3 5
w
ont redit à Tes fucceffeurs : Otez de la Chaire
de Pierre ces tâches , tollantur ha macula,
retranchez ce poids inutile 8c dangereux d'un
faux pouvoir fur les droits temporels; prof,
crivez une doélrine qui ne s'efl jamais montrée fans remplir l'univers de guerres er de car
nage ,
qui n'a attiré a l'Eglife ç r au St.
Siégé que l ’envie , la haine çft le fchifme (h) ;
renoncez à cecte infaillibilité, qui ne pou
vant être d'aucune utilité à l’Eglife , par cela
feul qu'elie n'y eft pas reconnue , ne peut
qu'embarralfer & nuire.
Décriée dans tous les pays où l'on com
mence à s'éclairer , encenlée ailleurs par
une piété mal entendue ( i ) , ou même
profeffée par contrainte , l’infaillibilité ne
fcauroit honorer la primauté de Pierre, donc
Vhonneur véritable réfde dans l honneur de
PEglife universelle , dans l'intégrité & la
force du pouvoir des Evêques
( 3 ). L'intérêt
( O Do&rinam qux quoties exequenda prodiit, to
ries orbem chriftianum infandis bel lis & caedibus cruentayit. Aptend. ad defenf Cler. Gallic. cap. 13 . p. 1 n .
Nihil Sedi romans praeret invidiatn arque odia ,
nibil rôti Ecclefix præter bella , cxdes , fehifmau
pcperciunt. Idem.
'(i') At pietas non eft inflarc 8c cragerare verbis
Pétri privilégia. Append. ad defenf. Cler. Gallic. cap.
13 . p. n i .
(3) Honor meus eft honor univerfalis Ecclefix ,
meus honor eft fratrum folidus yigor. Gregorm
epift. 30. a i Etilogium.
folide eft de revenir à l’autorité rcglce par les
Canons ( i ) , à cette autoricé vénérable, qui
toujours dirigée par l'amour des réglés, non
par celui de la puiflance, n'attireroit que des
refpeéts finceres ( 1 ) , 8c jouiroic d’une in
faillibilité effective : qu'on cari fie la fource de
ces difputes qui bien loin d ’augmenter le post
voir des Pc ées , ne fervent qu'a faire reclperr
cher l'origine de leurs ufurpat ions , qui diminuent
la vénération des peuples plutôt que de l'accroitre (},)■ > 8c
l’Eglife affranchie des obftacles que la politique 8c l’adulation oppofent
aux pieux defTèins de fes Pontifes, pourra
entreprendre la réformation des abus qui font
dépouillée d’une partie de fon premier luftre(f).
Ces abus font étrangers
au Sie^e
O
O
8c
à ce-
M ihi injuriam facio fi fratrum meorum jura
perturbo. Gregor. magn. tom. 1 . lib. t. epift. 48.
( 1 ) Hinc apoftoliex poteftacis ufum moderandum
per Canones . . . . atque id pertinere ad amplitudinem apoffolicæ Scdis. Declar. Cler. Gallic. art. 3.
( 1 ) Harc habens & exerccns apoflolica Sédes tancà
antiquitùs auftoritate viguic, ut pofteà fidens dixerim , ïmmihuta magis qudm a:iha ejfe videàtut.
Corollar. defenf. Cler. Gallic. c. 9. n. xo. p. 31 3.
( 3 ) Requifiroire de Air. Talon en 16S8.
(4 ) Ex hoc fonte , Sandle Pater , tanquam ex
cquo trojano irrupere in Ecclefiam Dei tor abufu-s
& ram graviflimi morbi, quibus mine confpicimus
cam ad defperationcm ferè falutis laborafle. Conùl.
Cardinal, jubente Pmilo III exhibition arm. 1 53s.
G s ‘j
�ils font tels qu'ils
auroient déjà renverfé tout gouvernement
qui
îre feroit fondé que fur l’inftitution humai
ne ( 1 ) : le fidele inftruit n'y voit qu’une
trifte preuve de la vérité d’une religion que
le mélange des menfonges des hommes n’a
pu détruire ; mais le vulgaire peut en pren
dre des ombrages : toutes les fois que l’hom
me né fujet à l’erreur voudra ufurper ce qui
n’appartient qu’à Dieu ( da toutepuifTance au
fpirituel & au temporel ) , il en viendra bien
tôt à être plus puijfant que Dieu , qui peut
tout excepté le mal ( 1). Quel fujet de ten
tation pour le peuple, qui juge de. la religion
par les dehors , qui juge , s’il eft permis dp
le dire, du Dieu que nous adorons, par
l’homme qu’il ne doit que refpeéter !
L a vraie religion doit fe conferver (jr s'é
tendre par les mêmes moyens qui Vont établie
(3); c’eft en fe montrant telle qu’elle eft,
ennemie de la domination, amie de l’autorité
(1) Tollantnr hx maculx quibus , fi daretur qu if
piam aditus in quâcumque hominum republicâ aut
ïcgno , confeftim auc paulô poil in pr&ceps rueret,
nulloque paifto diutiàs conftare poflec , & tamen
putamus nobis licerc , ut per nos in chriftianam
jempublicam inducantur hzc monfira. idem.
(1) Omnia posent, etiam illicita , (y fie plqs
quàm D chs. Cardin. Zarabella , traciat. de fehifrn.
f . <>6o.
(3) Fleury , jdifcouis 6. p. 14.
.237
légitime , qu’elle a triomphé du paganifmç,
Si nous defirons de voir tomber le fyftême ultramontain , & rappeller par-tout les
anciennes réglés, c’eft pour voir reftituer
cette religion l’une des grandes preuves de fa
divinité , celle qui eft gravée dans la nature
de fes préceptes d’union & de fociabiliré. Il
eft connu qu’en matière d’utilité publique &
générale, l’utile fut toujours le vrai : la
yehgion à de quoi convaincre la raifon par
tous les genres de preuves3 fes myfteres l’é
tonnent , mais ils ne la rebutent pas; fa mo
rale 1attire par un charme invincible 3 les
inventions humaines , que les flatteurs de la
puiflancc ont apportées , & que l’Eglife rejecta toujours, ne fçauroie’nt ébranler une foi
éclairée , mais elles font le fcandale des
foi blés, feandalum pufllorum.
L’intérêt de cette religion fainte & le re
pos des Etats, à qui Rome fera toujours céder
des intérêts perfonnels , demande aujourd’hui
trois chofes dignes de fixer l’attention géné
rale : la première , que l’enfeignement de
toures les Eglifes redevienne unanime ( 1 ) fur
Ja matière des quatre Articles de i68z 3 ce
font les fentimens de VEglife univerfelle pen-
<
236
lui qui 'e remplit ; mais
(1) Ex omnium f&cstloYum traditione afTerimus, 8c
inter res judicatas , port Conftantienfia & Bafileenfîa
jprobati/Tîma Décréta , referimus. DefenJ. Cler. Gallic.
1om. z. port. 3. lib. 10. cap. 30. p. 138.
�( i ). La fécondé,
que l’on conferve à cette dodtrine le degré
d'autorité qui lui eft propre, elle appartient
à la révélation. Nous ne parlons point ici
de nous-mêmes, nous retraçons l’enfeignement de ceux qui ont reçu la million & le
caraétere pour indruire ; la fureté de l’Etat
intéredee à cette doétrine , fudît pour nous la
rendre certaine , 8c nous autorife à remarquer
que l’Eglife de France l’a toujours reconnue
à ce titre.
Les quatre Articles appartiennent a la révé
lation ; d’abord par leur propre nature ; cette
matière touche , d’une part, à la bafe de l’or
dre focial , que Dieu ne peut avoir aban
donnée aux variations de l’efprit humain 8c
aux préjugés de quelques Minidrcs ambitieux,
après avoir déclaré à l'univers qu’il n’étoit
pas venu comme Roi temporel , mais comme
Roi des âmes , Rex Chrifius c/uod mentes regat [ 2 ] ; c’eft allez pour rejetter par-tout le
pouvoir indirect : de l’autre , cette même ma
tière touche à la conhitution de l’Eglife,
dont les membres ne peuvent demeurer in
certains fur le Tribunal fuprême à qui il apdant fes onz.e premiers fcclcs
( i ) Difcours de Mr. le Procureur Général au Par
lement de Paris , prononcé dans l’Ecole du Droic
civil 8c canon, en l’année 16 8 1.
( i ) Auguji. in Joarm. trait. 5 1. num. 4. tom. 3.
fart. 1. p. 63 y.
239
partîent de loumettre les efprits, 8c qui ne
peut partager avec fon Chef vilîble l’infaillibi
lité exclulive , la lupériorité univerfelle ÔC
individble que Dieu a attachée aux .dédiions
du Corps des premiers Fadeur s , die Ecclejùt
[ 1] ; c’ed allez pour rejetter par-tout l’in
faillibilité du Pape.
Mais fi l’on conlîdere nos maximes de plus
près, l’indépendance des Couronnes 8c du
pouvoir légiflatif de l’Empire ed à la fois une
vérité fociale 8c une vérité révélée : fous le
premier point de vue, elle n’a pas befoin du
fuffrage des hommes , le Minidre de la réligion lui doit hommage comme fujet, 8c
ne peut par confequent en délibérer comme
Padeur.
C’ed par ce morif que Louis le Grand
n’accepta la Déclaration du Clergé de 1682 ,
quoique bornée a une profellion éclatante du
devoir d ’être fournis aux Fuijfances , qu’avec
une forte de protedation , ou pour mieux
dire, de précaution capable d’éloigner à ja
mais l'idée d’un pouvoir fublîdant dans l’Eglife , pour foumettre ce point à fon Juge
ment [2]. Ce fut encore par les ordres du
(1) Marli. 18. 17.
(z) Bien que l’indépendance de notre Couronne
de toute autre puifîance que de Dieu , foit une vé
rité certaine & inconteftable . . . . nous n'avons pas
laijfé de recevoir avec plaijir la Déclaration que les
�24I
14 0
le
dur
de
déclara
feulement
qtt on ne peut agiter ce point dans le Royaume
comme une qutfiion problématique, fans crime de
lez.e-majcfle ,mais enCoreque ce nepourroit être
la matière d‘une deliberation du Clergé de Fran
ce , ni de F Eglife enticre a qui Dieu 'réa donné
aucun pouvoir fur ce fujet ( i) .
Monarque, que Mr.
Parlement
Paris
Procureur General
non
Sur ce point important d’où dépendoit l'e
xigence meme des fociétés , Dieu n’a point
laide (ubfifter les obfcurités réfpedlables qui
couvrent les Myfteres de la religion , & qui
peuvent exiger l'interprétation des Pafteurs ;
il a voulu affermir par lui-même cette vé
rité , parce qu'elle entroit dans fes dedans
pour la durée du monde vifible qui ne peur
1ubfifter fans elle, pour ta conversion future
des Empereurs, pour l’adoption de fon Eglife
dans l’Empire , qui devoit être à la fois l’ou
vrage de fa toutepuiflance & du choix libre
des Souverains : ce que la Cour de Rome
a voulu leur enlever , eft le gage de l'alliance
des deux fociétés religieufe ôc civile.
La
Députés du Clergé de France, aiîemblé par notre
permiflion , nous ont préfentée. Préambule de l'Edit
dé i 69 t.
[ i ] Difcours de Mr. le Procureur Général au Par
lement de Paris , dans l’Aflemblée de l'Uaivcditc
en l'année i6 S i.
La sûreté, que la religion eft venue don
ner aux Souverains , ne fait pas feulement
partie de la révélation , elle fait partie des
proméfiés, qui l’onc faite refpeéter & régner ;
elle entre même dans l’ordre de 1a million
de J. C. qui apportant une loi de paix,
dont il a confié le dépôt à fes Minières, a
prononcé, non pas à leur égard, mais pouc
lui-même, l’exclufion d’un régné temporel,
ôc leur a donné le modèle d une obéillànce
plus parfaite aux Souverains, que celle des
autres hommes. C’eft fous ce lecond poinc
de vue d'une vérité révélée, que l’indépen
dance des Couronnes intérefîe le Pafteur ; il
ne peut ni la juger j ni l'obfcuicir, il doic
la publier, la développer & la défendre toute
opinion dire&ement ou indirectement contraire
à cette vérité , l’eft aujft a P Ecriture ffinte ;
[1] celle du pouvoir indireét fut déclarée nou
velle yfaujfe , erronnée, & digne d’autres qua
lifications encore plus fortes, qu’on a réunies
dans la farneufe cenfure de la Sorbonne de
l’année 1616 [2.]. BolTuet a remarqué que la
.
.>
*
[ 1 ] Fleury, inftit. au droit eedéf. com. 1 . chap.
i j . p. 118 .
( 1 ) Novam , falfam , errontam , verbo Dti contrariam , Poncificiae Dignitad odium concilianrern ,
fehifmati occafionera præbentem , fupremae Regain
autoricad à Deo folo dependenti derôgintem,
Priocipum infidelium & hæredcorum conreifioaem
Hh
�242
Déclaration de FAlTemblée de 1(382, quoiqu’exprimée en des termes plus doux , s’accorde parfaitement avec la cenfure de Sor
bonne
ctim cenjura Santarelli
lie et verbis mitioribus fumma conveniunt ;
proferite
par les notes les plus fétrijfantes
contre Santarel :
ajoute que cette dodtrine doit être
il
( 1 ). Le
Clergé de France a diftingué parfaitement dans
la Déclaration ces deux points de vue, de
vérité fociale ôc de vérité révélée ; il com
mence par reconnoîcre l’indépendance des Cou
ronnes , la limitation du pouvoir de l’Eglife au
fpirituel, & le devoir d’obéir aux PuiÜànces r
comme une maxime nécejfaire à la tranquilité
publique , il la déclare enfuite conforme a la
parole de Dieu , il conclud qu’à ce double
titre elle doit être regardée comme un prin
cipe abfolu , duquel on ne peut s’écarrer,
publier tr anquillit ati neccffariam . . . . verbo
Dei . . . . confonam, omnin 'o retinendam ; de
e’eft ainfi qu’il remplit l'hommage dû par
des fujets à la loi primordiale de toute fo-
iinpedientem , pacis publica: perturbativam , regnorum, ftatuum , rerumque publicarum everfivam ,
fubditos ab obedientia & fubje&ione avocantem ,
est ad faftiones , rebelliones , feditioncs & Principum
parricidi* excitantem. Cenfura Santarelli dis 4 april.
1 Cté[ r l Plané rejiciendam , nçtjfque atrocibus conflgendam.
C 1er. Qallic, p. h J ib . 4. c. 1 S./>. 365,
H TT
243
ciété , de l'hommage dû par desPafleurs à la
révélation , ou plutôt au caraétere efTenriel
de la religion , à celui de la million de
l'Homme-Dieu & à la fidélité des prom-fiés
de paix avec lesquelles la religion s’eft an
noncée : les titres
fous lelquels
le Clergéde
France a pioduir fa doctrine, qualifient affez l’opinion contraire, & Bolfuer rejette les
faux fcrupules de ceux qui , pour fe difpenfer de la cenfurer , préeextoient, après le Car
dinal du Perron , la crainte de paroître accufer d’erreur le St. Siégé qui ne l’a jamais
confacrée [1].
[ 1 ] Non illi metuerunt, quod Perronius Cardinalis , nimio caufæ fuæ ftudio , in illâ orarione immi*ere dixerat : ut G fententia de deponendis Regibus
cenpurâ notaretur , Sedes apoftolica aberàlfe à fide ,
imo ipla à multis jam fæculis cecidiiTe videretut
EcclcGa ; non i d , inquam , metuerunt. Satis enim
intclligcbant , illos qui cam fententiam fecuti effent , non eam amplexatos, ut dogma fidei, uti à
nobis luculentilïimè demonftratum eft : neque veto
ignorabant præftandam Theologis ipfam Ecclefiaeromanse fidem , non etiam rnagnoruin quamlibet virorum, aut romanorum quoque Pontificum opiniones
certis temporibus natas ; neque iis prasjudicari adversùs veritatem ac majorum do&rinam : neque cnim
fi Papias , Juftinus , Irenæus > aliique Apoffcolici viri
ac fandi Martyres mille annotura regnum approbarunt , communifquc ea primis fieculis fententia ferebatur j ideo nunc 'vetamur rejicere eam , ut evangelicA apofiolic&que doclrin& contrariam ! quant0 minus
eas, qu& poftremis [ acuIîs opiniones fuccreverunt. Défi
H h ij
�r^ 4 4
Quant à l’Infaillibilité ( opinion plus mo
derne que ce’le du pouvoir indirect , avec qui
d’ailleurs elle s’eft identifiée en (e dévouant à
l’affermir ) , elle a été traitée plus durement
encoie par Gerfon, par le Cardinal de Lor
raine, par les autres Docteurs qui l’ont com
battue, par Bofluet qui rapporte & approuve
leurs exprefTions, par le Clergé de France
qui appuyé la maxime contraire fur Vautorité
inébranlable du Concile de Confiance , &
par tous les Magiftrats du Royaume: c’eft,
difent-ils, une vérité non feulement révélée,
mais qui jouit de toute l'autorité de la cbofe
jugée 3 c’eft une vérité définie [i] , elle ne
l’a pas été implicitement ou par voie de conféquence , mais exnrejfément , parce que la fupériorité du Concile fur le Pape , fixée irré
vocablement à Confiance, emporte néceffairement la faillibilité du Pape ( 2) ; & nous
avons déjà remarqué que cette faillibilité
étoit alors avouée des Ultramontains , qui ne
Cler. Gallic. tom. ï . part. 1. Ub. 4. cap. \6. p. 360.
[ 1 ] A nobis non nova proferri, fed à majoribus
quæfita , imo èliam définith. Coroll. defenfi Cler.
Gallic. ». n . p. 3 1 1 .
[t] Res inter judicafas pridem ex dlûis de Conftandenfi Concilio effe repofitam : dices confecutionem iftam à nobis deduétam , non autem rerr. ipfam à Concilio definitam ; reponïmus , non confecutionem , fed rem tpfttm. Dcfenf. Cler. Gallic. tom. 1,
lir. 7. cap. i.
*41
réclamoient la fupériorité en faveur du Pape
fur le Concile , qu’avec l’exception des caufes de la f o i , à l’egard defquelles le Concile
étoit univerfellement reconnu fupérieur.
Les Ulrramontains , en ramenant dans une
partie de i'Eglife l’opinion condamnée à Conftance , en y ajoutant le nouvel excès de l’in
faillibilité du Pape , qui détruifoit jufqu'à
l’exception reconnue de leurs Maîtres en fa
veur du Concile , ne fongerent d’abord qu’à
fe défendre de l’accufation d’e rreur, quoi
qu’elle fut dirigée feulement contre l’opinion
& non contre les défenfeurs à qui elle n’im
pute que l’erreur qu’on nomme matérielle ;
ils bornèrent leurs premiers efforts à juftifier
leur fyftême ; ce n'eft que depuis un fiecle
qu’ils ont à leur tour qualifié nos maximes
d’erronnécs. Cette audace eft un nouveau
motif de ne rien relâcher de nos droits, de
publier les quatre Articles avec les caractè
res qui élevent la vérité au-defTus de l’opi
nion incertaine & flotante. La vérité doitelle être défendue avec moins de zelc que
l’erreur, & peut-elle lui céder, par une ti
midité déplacée, l’avanrage de l’argument
du plus sûr dont’les Ultramontains ont tant
de fois abuféf
Dans l'état aétuel des deux fyftêmes oppofés , la catholicité & la sûrecé n’appartien
nent pas moins aux Ultramontains qui er-
�246
rem de bonne foi , qu’à nous ; la certitude
& la vérité font du côté de l’Eglife Gallica
ne j elle remplit tout ce qui eft dù aux ré
glés de l'unité, en ne comptant point nos
maximes parmi les points qu’on nomme ar
ticles de foi , parmi les vérités dont la profeflion eft néceftaire au laluc j elle n’accufe
point la foi de ceux qui ont le malheur de
les méconnoître, 5c qui n’ont point percé le
nuage élevé par les inventeurs du fyftême ;
mais elle regarde comme fauffes & contrai
res a la décifion du Concile de Confiance, l'o
pinion de l’infaillibilité du Pape 5c les conféquences qui en (ont irréparables. C’eft fur
ce principe que fut dreffee, dans le dernier
fiecle, la fameufe cenfure de la Sorbonne
contre Jacques Vernanc 5 c Amédée Guiméneus.
L’Eglife de France , en confervant avec plus
de foin que les autres le dépôt des vraies
maximes, n’auroit pu , fans ufurper la puiffance réfervée à l’Eglile univerfelle , déployer
les cenfures perfonnelles contre les adverfaires
de la même doéfrine : cette doéfrine , quoi
que définie , eft retombée pour plufieurs dans
une efpece d’obfcurciftemcnt , à la faveur des
doutes qu’on a fait naître- fur le fens ou fur
l’cecuménicité du Décret du Concile de Conf
iance ; elle s’eft bornée à déclarer que l’au
torité & le fens de ce Décret reconnus par le
S t. Siège
,
147
Çj
confirmés fa r
l ’Eglife univerfelle
révoqués en doute
la pratique de
[ 1 ] , ne fçauroicnc être
[ 1 ].
Tout le monde chrétien obéit en effet à
la décifion du Concile mais l ’homme ennemi
fema de nouveau la zjscanïe
,
[ 3 ]. Les premiers
concradiéieurs e'toient inexculables , & l’on
auroit pu, dès l’origine, condamner les maî
tres de ce nouvel enfeignement ; on a du
tolérer les difciples, 5c ménager même jaC
qu’à un certain point l’opinion , depuis qu’elle
s’eft: formée des partifans nombreux 5 c refi*
peélables mais on ne doit fupprimer aucun
des titres dûs à la vérité ; c’eft à l’Eglife
univerfelle de renouveller la décifion du Con
cile , ou plutôt elle n’a pas befoin de la re
nouveler , nihil ulterius pofi hac definiri pofi
[ 1 ] A Sede apoftolicâ comprobata, ipfoquc romanorum Tontificum c.c totiics 'Ecclefis. ufu confirmâta.
Dedarat. Cler. Gallic. ann. i6 8 r. art. 1.
fz ] Ncc probari à Gallicana Ecdcfia qui eorura
Decrecorum , quafi dub’u fini autoritatis ac minus
approbata , robur infringanc , auc ad folum fehifmatis cempus Concilii di&a detorqueant. Déclarât.
Cler. Gallic. arm. i68z. art. 3.
Neque jam revocari pojfint in dubium quar Patres
Gallicani fua dcclaratione complexi. Coroll. Défenf,,
Cler. Gallic. n. 5. p. 104.
[3] Omnes confenferunt de fuperioritatc Concilit
generalis fuper Papam , licèc inimicus homo iterùm ruperfeminavit zizania. Joan. de Tarai. Carthuf. Monarch. Goldafi. tom. 1 . f . 1575-
�248
ftbile efi , cum i f a ja m femel dectfa j i n t
[ 1] ;
il fuffit de s’entendre &c de fe réunir, & l’on
pourra déployer enfuite les cenfures contre
ceux qui s’obflineroient encore après l’entiere
réunion des fuffrages des premiers Pafleurs.
Le Concile de Confiance n’avoit point
muni fa décifion de la peine de l’anathème,
& l’Eglife , dans Tes décidons même les plus
folemnelles , ne la prononce pas toujours ;
mais il a prononcé au nom de l'Efprit Saint ,
il a exigé de tous l’obéifTance à fa décifion,
& nommément du Pape qu'il menace des
peines de la défobéiffance [1]. Rien ne man
que à cette vérité de ce qui peut en conftater la certitude. Rome y fouferira comme
elle foufcrivic au Concile de Confiance par
le Pape qui y préfidoit &c par fes fuccefleurs :
Immot a confinant fanEla œcumcnicss Synodi
Confantienfs a Sede Apofolicâ comprobata ,
ipfoque
[ 1 ] Paroles de l'Empereur Théodofe dans le Con
cile de Calcédoine.
[ i ] Harc fanda Synodus Conftantîenfis . . . . in
Spiritu Sando légitimé congregata, ordinat , difponit , ftacuit , dccernit 8c déclarât ut fequitur , &
primo : Quod ipfa Synodus poteftatem à Chrifto
immédiate habet , cui quilibet cujufcumque ftatûs
vçl dignitatis , etiam fi Papalis exiftat , obedire teBetur in his quæ pertinent ad fidem, 8cc.
Item déclarât quod quicumque cujufcumque conditionis , ftatâs & dignitatis, et'mm fi Papalis, qui...
præceptis hujus faerse Synodi, & cujufcumque alte-
249
ipfoque romanorum Pontfficum ac totius Ec*
clef a ufu confirmât a Décréta [ 1 ].
Ce langage du Clergé de France efl aufïî
celui de l'Etat : il exige qu'on s'y conforme
pour l’intérêt de fa fureté, & pour obéir
lui-même à la décifion des Conciles ; il re-4
jette l’infaillibilité du Pape à titre de nou
veauté de d'erreur (1 ) ; il publie que Pu4f
fcmblée du Clergé de France n'a pas prétendu
former une décifion déune controverfe douteux
fe , mais rendre un témoignage public & au
thentique d’une vérité confiante, enfeignée par
tous les Peres de l ’Eglife , déterminée par
tous les Conciles, ç j notamment par ceux de
rius Concllii generatis légitime congregati. . . . .
obedire contumaciter contempferit , ni(i refîpuerit ,
iohdigns. pœnitenttA fubjicintur , isr débité puniatar ,
etiam ad alla juris fubfdix , fi opus fuerit , rccurfendo. Concil. Confiantienf. Self. 4. & 5.
[ 1 ] Déclarât. Cler. Gallic. 168t. atr. i.
[ t ] La Sorbonne a expliqué fes fentimens , 8c
condamné coures ces nouveautés , comme dis crtcurs qui ns peuvent éviter la cenfure. Difcours de
Mr. Talon fur les Ades de Sorbonne de 1653.
Les fix proportions , qui viennent d’être lues 8c
expliquées par l'organe du Doyen , contiennent non
feulement la condamnation de tout ce qui pouvoit
établir quelque fupériorité du Pape fur le temporel ,
biais auffi de cette chimere d’infaillibilité , & de cette
dépendance imaginaire du Concile au Pape. Difeours de Mri Talon fu r les articles de Sorbonne de
166).
Ii
�25 o
Confiance ç r de B afie q u i ne nous ont pas meme
la ijfé la lib erté d'en douter ( i).
U a troifieme point , qui fuit des deux
premiers, eft que ces vérités doivent être af
fermies par des études puifées dans des fources pures, & qu'elles ne doivent pas être re
léguées dans l'E c o le (z), mais être rendues,
pour ainfi dire, populaires.
L'Edit de 16 8 1 ne s'eft pas borné à affurer l'enfeifinement de cette doctrine dans
les Univerfités , il enjoint a u x E vê q u e s d'em
ployer leu r autorité pour les f a i r e enfeigner
dans r étendue dp leurs diocefes (3) ; «c toute
5
vérité enfeignée dans l’ Evangile a comme-lui
le droit d’être publiée fur les toits, prœ dicate
[ i l Mr. T a lo n , plaid, fur les franchifes , du z6
décembre 1688.
Mais enfin le Concile de Confiance ne nous a pas
même laiffé l.z liberté de douter d’une vérité qu’ il a
fi piécieulcment établie , e la. fupériorïté des Con
ciles fur les Papes étant certaine , c’eft une fuite nécefïa ire qu’on peut en ccrtaios cas recourir d fon
autorité , pour réformer leurs jugement. Difcours de
M de Hurlai , Procureur Général , prononcé dans une
aéff ml lee de l’Univerfté de Paris le 8 d’ottobre 1688.
oit il alla par ordre du feu Roi au fujet de l'appel
au Conrile futur interjette par ce Magiftrat.
[ i ] Ncque confulcum id crat ad fcholam referre
tantum noflram de Conciliorum potioM poteflate fentenriam, quæ Conftantienfibus Canonibus innicatut.
Defenf. Cler. Gallic. part. 3. lib. 1 1. p. t8o.
C3] Edic de r é g i. arr, z. 3. 4. 5. & 6,
5
î ‘> \ ,
fupra tefta : celle-ci a été préchée dans les
Chaires ; Gerfon , à la tête d’autres Docteurs,
publioit dans fes fermons la fupériorité du
Concile fur le Pape, il vouloir que cette vé
rité fo n d a m en ta le fut expofee aux yeux de
tous dans les lie u x les plus éminens , & g r a
vée dans toutes les E glifes [1]. Ce feroit une
faulfe piété de vouloir cacher aux peuples
la réglé de leurs devoirs & de leur obéiffance j l’Eglifè & l'Etat ne doivent pas être
privés d’un fecours qui leur eft néceftâire.
Les annales de la: Nation prouvent que dans
les rems d’encreprifes , la fidélité des peuples
a toujours dépendu du degré de faveur ou
de diferédit des opinions ultramontaines dans
le Royaume ; je dirai plus , une répugnance
d ’inftindt pour les maximes ultramontaines
ne fuftit pas pour affurer le repos des Peu
ples , le fentiment inné qui les repoufie doit
être fortifié par l’inftruêtion. La doftrine de
Grégoire VII qui, fuivant la remarque d’ un
Hiftorien contemporain (2 ) > rem plit d'éton[1] Confcribenda prorsùs e(Te mihi videretur in
eminentioribus lotis , vel infctilpenda per omnes Ecclefias faluberrima hæc dererminatio , lex , vel régula ,
îanquàm direélio fundamentalis. Gerfon , fertno de
Viaggio Reg. Romanornm.
[1] Cujus rci novitatem eo vebementius indignatione
motum fufeepit Imperium , quo numquam ante hxc
tempora hujulmcdi Scntencum in Priocipem RoI i ij
�v(ment le monde chrétien, Sc fat pour l’E
glife un fnjet de lacmes, eut cependant le
pouvoir de divifer 6c de troubler le Sacer
doce 6c l'Empire. Le Clergé de France , con
vainc.! de la néceffité de répandre la connoifla'ice de nos maximes , avoit prévenu les
defirs Sc l'Edit de Louis le Grand , en déter
minant , dç concert avec Sa Majefté , l’envoi
des quatre Articles dans toutes les Eglifes >comrne autant de Canons immortels dignes d’être
propofcs aux refpefts de tous les fidèles ( i ) ,
Sc cette doébrine acquerra un nouveau droit
à la prédication commune , lorfqu’elle aura
été par-tout rétablie, 6c reconnue de tous, fé
lon le degré d'autorité que le Clergé fe glorifioit en 16 8 1 de lui avoir confervé en France
avec une religion incorruptible , ab Ecclejia Gailicana perpétua rcligione euflodita [ i] ,
înanorum promulgatam noverat. Oth. Erif. lib. 6 ,
bifi. cap. 3z. 35.
Lego & relego Romanorum Regum & Imperatorurn gefta , & nufqttam imvenio quemquam antè
hune f Hcnricum W. ] à Romano Pontifice excommunicatuin , vcl Rcgno privatum. id. de Gejl. Trid.
1. c. 1. p. 407.
[ 1 ] Et quos ad vos mittimus Do&rinæ noftræ
articuli fidelibus vcneraodi , & nunquam intermorituri , Ecclefix Gallicanx Canones evadaot. Epiff.
Çlcr. Gallic, ad univerfos Ecclef. Gallic. Fr&fules,
amo 1682.
L^d Déclarât. Clcr. Gallic. ann. i68z\ art. 2.
1
2)3
La lumière ch aujourd’hui autîi vive dans
les Eglifes étrangères, qu'elle l’a jamais été
fur tous les points intérefiàns de do&rine ,
de morale, de difeipline j le feul préjugé qui
fembloit nous divifer fe difïipe, les monumens
de fcience Sc de fidélité qui nous viennent
de l’Allemagne , de l'Elpagne, du Portugal
6c de toutes les parties de l’Eglife catholi
que , font autant de gages du retour à l'u
nanimité : la France verra avec joie les au
tres Nations reprendre, avec les deux maximes
capitales de nos Libertés, qui font conhitutives dans l’Eglife 6c dans l’Etat, les Libertés
particulières dont l’ufage peut être, commun
à toutes , puifque le principe eh commun
fi).
En attendant ce moment dehré , un Evê
que de France a ouvert la voie la plus utile
à la confervation de ce dépôt , en décla
rant qu’il n’admettroit perfonne aux Ordres
facrés (ans s’être alluré de la conformité de fa
doétrine avec celle de la Déclaration de i 6 $ i ,
Sc cette dodlrine eh d’une Ci grande autorité
qu’on pourroit exiger des preuves de la lou[ 1 ] Quale jus fi reliquæ genres vindicare fibi vcHnt , nihil profedô prohibemus. Dcfenf. Cler. Gallic.
tom. x. part. 3. liv . 1 1 . cap. 12. p.
Cæterar chriftianx genres eommuni nobifeum lifccrtate gaudeanc , non invidemus. Defenf.cltr. Gallic.
tom, 2. p, 3. liv . i i . cap. 22. p, 25)3.
�mî(ïîon aux quatre Articles & à l’Edit qui en
ordonne la publication, foit pour l’admifïion .
aux Grades , foit pour l'entrée dans l'état re
ligieux Se pour la promotion aux Ordres.
Il efi connu que le Souverain peut, com
me Magiftrat politique , régler les conditions
extérieures Se politiques du pafiage de l'état
féculier à l’étac eccléfiafiique, qui s'exécute enfuite d’une permiiïïon aujourd’hui tacite & gé
nérale, autrefois exprelTe Se. particulière du Sou
verain ( i ) : il peut fur-tout exiger dans ce chan
gement d'état les épreuves nécclîaires pour pré
venir tout abus dans l'exercice du miniftere; il
peut enfin , comme protecteur de l'Eglife, éloi
gner de fon Etat toute opinion qui , comme
celle de l’infaillibilité du Pape , porte un carac
tère de nouveauté & d’oppofition aux déd
iions de l’Eglife Se aux loix confiantes de la
hiérarchie ; les Evêques, -autorifés par leur minffiere à prendre tous les moyens de conferver
la faîne doBrzne (s) , ont aufifr le pouvoir d’é
tablir dans l’ordination la réglé qu'un Evê
que particulier, appuyé fur les loix généra
isi] Ut nullus faecularium ad Clericatus officium
firæfumat accedere, ni(î aut cum Regis jujfione aat
titm Judicis voluntate. Synod. Aurel, r. c. 6 .
De liberis hominibus qui ad Dei fervitium fe
tradere volunt , ut priùs hxc non facianc quàm à
nobis petitâ liccntiâ , &c.
[ i ] Ut potens fit exhortari in doftrinâ fana. i.
«d Tïtum c. \ * v . 9 •
les, a cru devoir fe preferire à lui-même.
Les Magifirats enfin peuvent par de fages
avis concourir à un aulïî grand bien : jamais
la Magiftrature n’eut tanr de beloin de l'ap
pui des Souverains , Se jamais elle ne leur
fut plus nécefiàire : l'Eglile Gallicane a plus
d ’une fois réclamé ce (ecours, Se téuni à l ’ap
pel au futur Concile des entreprises de la Cour
de Rome , le recours au Souverain dans fa
Cour [i],
La. Décoration du Clergé de 1 681 compte .
parmi nos Libertés les mteurs 3 ufuges & cou
tumes du Royaume Se de l’Eglife de France
[ i ] : les Libertés de l’ Eglife Gallicane n’appar
tiennent pas au Clergé fcul , mais au Souve
rain , à l’Empire, à la Nation, ainfi qu’au
Sacerdoce : elles font le bien du citoyen com
me du fidele, le bien de tous les Ordres,
de tous les individus de l’Etat, dont l’enfemble forme l’Eglife Gallicane A: dont nos Libertés
confervent également les droits [3] ; c’cft du
f i ] Ad facrofanélam Synodum univerfalem . . . .
ad fupremum Dominum noftrum Rcgem & fupremarn Curium Pirlumenti. Appel du Chapitre de l’E
glife de Paris en 149t.
[ 1 | Valero etiam recula, mores, & inftituta 1
Re^no & Ecclefiâ Gallicanâ reccpta. Déclarât, de
J68z. art. ?.
I G San&a mater Ecclefiâ fponfa Chrifti non_folùm es. Glericis , fed etiam ex Laicis , imô facrâ
teftante Scripturâ , ficuc eft unus D om inus, îina fi-
�préjugé contraire , qui concentre dans le Cler
gé les Libertés & le nom même de l’Eglife
Gallicane, qu’eft né l’efprit d’oppolition de
quelques Eccléfiaftiques à cts Libertés facrées.
Bolfuet a faic valoir, parmi les monumens
de la doétrine qu'il avoir à défendre , les
Edits rendus par nos Rois contre les premiè
res ulurpations des droits temporels , ceux
des Empereurs , des Rois d'Efpagne & de
tous ceux de l’Europe contie des tentatives
plus modernes , ceux de la République de
Vende dans (es démêlés avec Paul V , les
Arrêts des Patlemens , les démarches fai
tes par Pierre de Bofc , par Jean Dauvet,
& par d’autres célébrés dépohtaires du minifteie public , contre des Bulles , Brefs , Thefes
des , unnni baptifma , fie à primo judo ad ultimutn
ex omnibus Chnfti fidelibus una elt Ecclefia ipfl
Chrillo , quam ipfe à firvitute p.ccaii per mortem
fu?.m liberavir > cjuâ lïberttte gaudere voluit omnes
illos , tàm Iziros quàm clcricos. lir aétis inter Bonif.
VIII & Philip. Pulc. p. 3. 4.
Ici ur Libertates Ecclcfiae Gallicanæ munera poteflatis utriufique tàm ccclefiathcæ , quàm civilis ,
cettis quibuldam hinc indè Eu tous circumfcriptà
completlantur Quare longe à propofito aberrant qui
Eccieliam Gallicanam Clero coercent. Latior cft illius
ügnificatio , quæ Laicos , ipfûmque Rcgem compte*
prehendic. Mxyca , de concord. Sacerd. cr Imper, hb*
l . cap. 1, p. 83.
2 ^
Tes ultramontaines & livres de même genre;
& particulièrement l’ Arrêt du Parlement de
'Paris qui condamne, avec le livre de Bellarm in, tous les aéles de la Doétrine ultramon
taine étalés dans ce livre : il prend la peine
de faire obferver combien cet Arrêt étoit ap
prouvé de la puiflance fouveraine, lors même
qu’elle accordoit a u x conjonctures, & a u x in*
trigucs de l'a d u la tio n , des ordres dejlinés à en
arrêter l*exécution [ 1 ] : par-tout cet illuk
tre Défenfeur de nos maximes reconnoîc Je
droit & le devoir des Parlemens de proferire
tout ce qui tend à les combattre ou à les
obfcurcir ; il caraélérife ces Corps par l’éloge
de leur zele perfévérant pour la religion , le
Roi & la patrie , P a r i amen ta , ut religioni ,
tta R égi revnoque f i d a , &c. [z], Combien ne
fe feroit - il pas indigné, s’il eût alfez vécu
pour voir qu’on ait ofé rendre fufpe&es leur
( 1 ) His ergo confona adversùs Bellarmini librum
Scnacus decrevcrat , cujus decreci Cardinalis Perronii
opéra rufpcnfa cft à fupremo Regis Confilio executio ufqtie ad Regis bencplacitum , tlecretumque id
ea eft forma , qui Rege præfenre decerni folet. . . .
Datum ergo temporibus ut rcs in fufpenfo haberetur , neque quidquam aliud potuit impctrari. . . .
Plerique hoc obtentu veterem Gallis vigorem in~
ft in i 't, & gtifeere adulationem dolebant. Defenf. Clcr.
Gallic. tom. 1. liv. 4. c. 13. p. 354.
( 1 ) Defenf. Cler. Gallic. parc. x. Hb. 3. c. z8. p.
316.
K k
�2.5 B
religion <Sc leur fidelité, ôc renouvellcr dans
des libelles le nom odieux de la SeSle des
Parlementaires ? Ce nom fut donné, dans le
tems de la Ligue , aux Magiftrats qui fauvoient de la fureur de ce tems les mêmes
maximes que nous défendons des piégés plus
couverts réfervés à nos jours.
Mais la mort de ce grand homme a été
l’époque des nouvelles atteintes que la doc
trine de l’ Eglife Gallicane a reçues, dans ce
fiecle, de la parc des Ultramontains; elles
recommencèrent par un Bref de la Cour de
Rome de 1706 , qui dépouilloic les Evêques
du caraétere augufie de Juges de la foi [ 1 ] 9
& qui a été fuivi de nouvelles tentatives mar
quées à différentes époques.
BolTuet avoit pénétré le fonds de nos ma
ximes , il connoilïoit la précifion du langage
& l’importance de ces cxpreflions confacrées
que rien ne peut remplacer : ceux qui ont
écrie .après lui n’ont pas tous été aufTi exaéls ;
la démonftration feroic ai fée à donner par le
parallèle qu'on pourroit faire du langage an
cien avec le langage moderne qui , dans ce
fiecle feulement, s'eft glilfc en divers ouvra
ges , où cependant chacun veut avoir parlé
le tangage françois ? & croit être en droit
CO Venerari & exequi difeant , non difeutere aut
judicare præfumant. Bref du 31 août 1706.
de prétendre que des expreffions vifiblement
fufpeéles, & fubftituées au langage de l’E
tat , foient regardées comme équivalentes à
celles des Gerfon , des Marca, des Boffuet,
ou du moins comme indifférentes.
On verroit par cet utile parallèle une
déclinaifon d'abord infenfîble de l'ancienne
auftérité du langage, bientôt rendue plus ra
pide , aboutir à rendre enfin nos maximes
méconnoilfables & comme étrangères parmi
nous , à y naturalifer même une partie des
idées ultramontaines.
Les Eccléhafliques trouveroient dans ce pa
rallèle une réglé d'exadfitude pour les cenfures
théologiques des opinions ultramontaines, &
les Magiftrats, une réglé des Jugemens qui
les flécrifTènt par des qualifications civiles; on
y trouveroit encore un préfervatif contre cette
foule d'opinions nouvelles deftruétives de la
réglé établie par le quatrième article de la
Déclaration de i68z , q u i, pour rendre la
décifion du Pape irréformable, exige que le
confentement de l'Eglifc intervienne ( 1 ) , ôc
par la lettre de i'Aflèmbjée du Clçfgé, qui
reconnoît que y? par la diverjité des fcntrmçns
des Eglifes il s'élève quelque difficulté cotiftdé[1] Nec tamen irreformahile effe judicium , nift
Ecclcfæ confenfus acce/Terir. Déclarât. C(er. Gqlliç,
de Ecclef potejl. art. 4.
�i6o
rable, il cfl nécefaire alors , comme le dit St,
Léon, d’appeller de toutes les parties du monde
un plus grand nombre de premiers PafieUrs ,
& d’ajfembler un Concile general qui d/JJipant
ou appaifant tous les fujets ’de diffention , ne
laiffe plus rien de douteux dans la fo i , ni
rien dJaltéré dans la charité [ i ]•
Le premier Doéteur françois, qui ofa pu
blier en France l'opinion de l’infaillibilité du
Pape' ( i ) , avouoic que cette infaillibilité
n étant pas de f o i , il falloir en revenir dans
Ja pratique à la néceffité d'une acceptation de
l'Eglife , pour donner à la décifion du Pape
le degré de certitude qui captive l'entende
ment [5]. Des Ecrivains qui font venus après
[ 1 ] Si qua autem ex Fcclefiarum difTenfione gra
vis difficultas emerferit , major , ut loquitur Léo
magnus, ex loto orbe Sacerdotum numerus congregetur , generalisque Synodus celebretur , qua omnes offenfiones ita aut repcllat , aut mitiget , ne ultra aliquid fit vel in fide dubium , uel in charitate divifum. Epift. Conventûs Cler. Gallic. ann. i 6 îz .
f i ] C’efl: le Do&eur Duval que Bofluet inculpe,
& dont il attribue la conduite à des motifs par
ticuliers qu'il dit ctre connus de tout le monde. Defenf. Cler. Gallic. pr&vix dijfçrt. n. 17. C’elt un de
ces ennemis domefi’iques de nos maximes , que le
Royaume a eu le malheur d'élever quelquefois dans
fon fein. Difcours de M. le P. G. au Parlement de
Paris , prononcé dans la Faculté du droit civil &
canonique en 16 8 1.
£3] Definitioncs Poncifîcis non eiïe de fide , do-
l6 l
lui , ont été forcés de dire que la décifion
du Pape eft faillible juiqu’à l'accepration des
premiers Pafteur? ; mais ils ont altéré & pres
que fupprimé les caraéteres efTenciels d'une
acceptation réelle.
Ces nouveaux fyfièmes , auffi utiles à la
Cour de Rome que celui de l'infaillibilité,
tendent à confacrer, par le feul filence des
Eglifes étrangères , tour ce que la Cour de
Rome a déjà entrepris & voudroit entre
prendre fur les droits des Souverains, & fur
la hiérarchie ; on lui ôte l'infaillibilité fpéculative,on lui conferve l’infaillibilité prati
que : les Ultramontains l’ont démontré par
des traités exprès, ils en font un (ujet deloges pour ceux d’entre les François qui onc
dénaturé nos principes, & concouru avec
eux à ebranler jufjues dans leurs fondement
des Libertés défendues avec tant de z,ele par
nos peres [ 1 ] , & un fujet de reproche pour
ceux qui leur font demeurés fideles.
Le meme parallèle feroic connoître tous
nec univerfalis Ecclefia , quam de fide cft errare
non polie, cas accepravcrir. Duval. de fuprem. Pontif.
potefiat. qu&fi. j . p. 308.
[ 1 ] Ecclefia: Gallicane décréta , & Libertatcs à
majoribus noftris tanto ftudio propugnatas , earumque fundamenra facris Canonibus & Patrum traditione nixa mulri dirnere moliuntur. Declar. Cler.
Gallic. ann, i6Sz.
�i6 i
les nouveaux détours du, pouvoir indired :
les uns rentrent dans le fyftême du Car
dinal du Perron , qui vouloit que la queftion
fut regardée comme problématique ^ & c’eft:
prefque le dire , que de refufer de reconnoître l’indépendance des Couronnes, comme
une vérité qui appartient à la révélation : les
autres rentrent dans l’idée deTournely qui ,
feignant d’attaquer le pouvoir indirect, mé
nage à l’autorité eccléfiaftique un moyen de
le reprendre , en infinuant qu’il peut être la
matière d’une délibération ou jugement eccléfiaflique ; c’eft réduire la Déclaration du
Clergé de France à n’être qu’un titre incer
tain , révocable , tk replonger les Etats dans
la dépendance & le péril : les autres enfin
rentrent dans le fyftême d’ufurpation des
matières mixtes, c’eft le pouvoir indireâ: re
produit fous un autre nom ; il enfeigne le
moyen de reftreindre arbitrairement l’autorité
du Souverain , &c d’étendre fans mefure l’au
torité eccléfiaftique.
On ne fe contente pas de la faire préva
loir fur la Pui(lance publique dans le genre
des matières mixtes , ce qui forme déjà la
plus dangereufe entreprife ; on y ajoute le
pouvoir indéfini, tantôt de déclarer purement
fpirituel ce qui eft mixte , tantôt de pronon
cer indiftin&ement, & en vertu du pouvoir
des C le fs, fur les objets fpiritucls &c tem-
1 6J
porels qui fe trouvent réunis dans la même
matière , quoique toujours aftèz diftin&s pour
que chaque Puiffance y exerce fes droits, ou
de confondre ce qui dans le même objet ap
partient à PEglife par l’inftitution divine,
avec ce qui appartient au pouvoir acceffoire,
dont les Princes ont pour de juftes caufes
fortifié fon pouvoir naturel borné aux eaufes purement fpirttuelles (1); tantôt enfin d’appeller mixte ce qui n’eft que temporel, & ce
dernier excès eft le pouvoir diretft.
De jeunes Eleves formés à ces maximes
qui , comme l’a remarqué feu M. l’Evêque
de Soiftons , tiennent aux erreurs les plus ré
volantes , peuvent y former les autres confi
dences. Le préjugé vague d’une fubordination
de la loi civile à la loi eccléfiaftique dans
un nombre indéfini de cas , faifiroit peu à
peu tous les efprits. L’ufurpation lente qui
dépouille peu à peu la puiftance &: qui la
m ine, l’ufurpation déguilée qui la trompe,
produifent des effets plus furs que l’ufurpa( 1 ) Caufas eccleftaficas communiter dividunt Ca
nonisa. tn ecclefiaflicas meras > C? non meras. Meras
'vocant , quA funt taies ex naturâ Ittâ independtnter
ab omni pofitivâ conflitutione , aut eonfuetudine :
non meras , qui quamvis [tnt ex naturâ fuâ tem
porales er profana , juflis tamen de caufis refervatA
funt ecclefiajlicis Judicibus. Van-Efpen Jus ccclef.
unir. tora. 1. part. 3. rit. 1 . cap. 1. n. i,p . ié .
�264
tion violente , qui n'elt propre qu’à révoltes
ro.
L'opinion qui s’établit d'après l’impreffion
de l’exemple , ou d’après l’habitude d’un lan
gage équivoque & nouveau , fufîir pour opé
rer une diminution de la puiffance , qui perd
toujours en réalité ce qu'elle perd dans
l’opinion générale ; ce préjugé , s’il étoit une
fois accrédité, ne pourroic-plus être- déraci
né ; la moindre altération dans le langage
produit celle des principes , & celle-ci cor
rompt enfin le fentiment de fidélité On s’ac
coutume à voir des entreprifes femblables à celle
du dernier Bref avec indifférence , & cette in
différence couvre quelquefois un penchant fecret 3 mais vif, pour les prétentions ultramon
taines , & pour l’intrigue qui les fait fublifter.
Les Eglifes étrangères voient aujourd'hui
combien
( 1 ) Et ne devez fouffrir en aucune occafîon ,
pour fi petite qu’elle foit , qu’ils entament votre
autorité . laquelle pour fi peu quelle foit brêchéc,
eft ailée â enrrouvrir , ne plus ne moins que les
digues & chauffées , qui foutiennent la mer & les
greffes rivières , Icfquclles ne fe ruinent pas fitoc
par l’impétuofité des flots , ou poids de l’eau qu’el
les foutiennent , comme pat quelque pence ouver
ture que fera un rat d’eau , ou autre vêtit animal >
qui les perçant donne cours inévitable au torrent
qui les emporte. Remontrances du Parlement d’Aï x
de l'année 16 14 , tom. .1. p. 16$. des Libert. As
l ’Egl. Gallie.
l6 5
combien on abufê contre nous & contr’eb
les de leur fîlence ou non - réclamarion ,
qu'on veut faire prévaloir à la définition
exprelfe de l'Eglife affemblée à Confiance. Le
nouveau Bref établie fur elles, comme fur les
Souverains , le pouvoir abfolu ; nous pouvons
cous dire avec les Peres d'un ancien Concile
de Rheims, f i la nouvelle Conflitntton doit
remporter fur les Canons & les anciens Dé
crets , a quoi ferviront les lo ix , puifque tout
f e r oit déformais au pouvoir d'un feul ( î ) > ÔC
nous devons n'avoir tous qu’un fentiment &
qu'un langage : c’eft le vœu qui termine la Dé
claration de 1 681 , ut idtpfum dicamus omnes
fimufque in eodem fenfu & eddem fententiâ.
Plût au Ciel que le Bref, concre l'inten
tion de fes promoteurs, devînt l’époque de
la réformation toujours defîrée par l'Eglife,
& après laquelle foupiroit Sr. Bernard lorfqu’il écrivoic au Pape Eugene, qui me don
nera de voir avant que de mourir l’Eglife de
Dion telle que dans les premiers jours !
Cette réformation , qu i, fuivanc l'inflruction donnée aux Ambafîàdeurs du Roi au
Concile de Trente, confifte à reprendre Us
( 1 ) Si romani Pontificis nova Conftitucio promulgatis Jegibus Canonum vcl Decretis priorum
præjudicare poteft........ quid profunc leges coaditaf
cum ad umus arbitrium dirigaatur. Concil, Rki
tnenf
,\~i .
LI
�1 66
commencement de VEglife , afin de ramener
l'état eccléfiafiujue le plus près cjue l'on pourra
de [on origine [ i ] , auroit été conduite à
fa perfection dans ce Concile fans l’obftacle des prétentions ultramontaines. La pro~
tcftation par laquelle le Cardinal de Lorrai
ne déclara , au nom de tous les Evêques de
France , ne pouvoir regarder comme fuffifantc
la réformation ordonnée , & ne foufcrire que
dans l'attente d'une réformation entière, lorfique les tems pourrotent le permettre [ i ] , conf( i ) Inftruétion donnée à Mr. de Lanfac. Mém.
du Concile de Trente, p. 173.
( 1 ) Cum his corruptiffimis temporibus (y moribus,
imelligam non pojfe en , quibus maxime opus e jl,
frotlnks adhiberi remédia , intérim affentiri O" pro
p r e ea qn& nunc fiunt décréta : non quod ea judicem Lacis efle ad integram açrotantis ReipublicaChrifiiane, curationem , fed quod fperem his prias lenioribus fomentis adhibitis , cum graviora medicct*
menta pati' potnerit Ecclefix , Pontifices maximos,
.......... efficaciora inveniens remédia , ut in ufum
veteribtrs, jam dik abolitis , revocatis Canonibus ,
VT maxime quatuor veterum illorum Conciliorum
<qu& , quantum fieri poterit , obfcrvanda ejfe cenfeo ;
vel fi expedire videbitur , frequentiori Conciliorum
teumenicorum celebratione , morbum ab Ecclefiâ propulfans eam fus, prifiind refiituat fanitati. Hanc autem meam mentem V [entent iam , tum meo , tum
omnium GaÜia Epifcoporum nomine , in afta refer ri
•volo , & ut id fia t , à Notariis peto CT pofiulo. Cardinaiis à Lotharingiâ. Mémoires du Concile de Trente.
P*
57X.
tate à jamais le vœu de l’Eglife Gallicane,
La Magiftrature, à l'exemple & fous les
ordres du Souverain , a marqué le même in
térêt à ce grand ouvrage de la réformuion,
qui intérefïe en effet, avec le Clergé , le corps
entier de l’Eglife, compofée non feulement des
Aîinifires de la religion, mais de tous les fidè
les. Mais puifque la pleine réformation efl ar
rêtée par l’intérêt du fyftême ultramontain ,
la profeription de ce fyftêmc doit être le pre
mier pas vers cette réformation néceffaire à
la chrétienté, & par confequent utile à Rome
qui' en effc le centre : le zele pour le rétablit
fement des anciennes réglés fut toujours le
gage d’un attachement (încere à l’Eglife &
au St. Siégé (h).
Si la Cour de Rome s’y refufe pour conferver l'ombre d’un faux pouvoir qui lui
échappe, elle doit craindre le terrible pronoflic de St. Bernard, parlant au Pape Eu
gène, de Durand Evêque de Mende, inftruifant le Pape Clement V qui ailoit préfider au Concile de Vienne , enfin des Car
dinaux confultés par Paul III fur la réfor
mation de l'Eglife : Rome , difent-ils, perdra
tout, f i elle veut tout ufurper & réunir la
( 1 ) Quo quifque ftudiofior eft
co magis cordi haberc Ecclefia:
Apoftolicæ majeftatem. Defenf
1 . part. 3. lib. 1 1 . cap. 14. p.
antiqux difcipliruc,
Catholicæ ac Sedif
Cler. Gallic. tom.
179.
�268
domination avec l'Apoflolat [ i ] - c’eft à-dire
qu’elle perdioit dans les Etats catholiques tout
ce qui n’eft pas fondé fur les promettes qui
ne peuvent manquer , tout ce qui ne lui eft
point acquis par l’inftitution divine ou par
la plus ancienne Tradition.
Mais l'attachement des fidelesaux jades pré
rogatives que la difcipline a ajoutées à la pri
mauté de droit divin , nous fait regarder cet
événement comme impoiïible, &c Rome efl: fans
doute plus touchée de la crainte de voir affermir
dans leur égarement les peuples infidèles ou
hérétiques , rebutés par les dangers du pou
voir arbitraire au fpirituel & au temporel,
Le brait de ces chofes a pajfé jufqu’d eux , difoient avec douleur les Cardinaux confultés
en . i 5 $ 8 ; que votre Sainteté en croie notre
témoignage fondé fur une expérience certaine,
c’efl l 'a ce qui expofe notre religion a la déri( i ) Planum cft , Apoftolis interdicitur dominatus ; ergo tu Se tibi ufurpare aude , aut dominans
apoftolatum aut apoflôlicus dominatum plané ab
alterutro prohiberis , fi utrumejue fimul habere -voles ,
■ perdes utrumque. Div. Bernard, de confid. ad Eugenium Papam.
Ecclcfia romana fibi vindicat univerfa , undc tijnendum efl quod univerfa perdat , ficut habetut
exemplum de Ecclcfia Grarcorum , quæ ex hoc ab
Ecclefix romanx obedientià dicltqr receflîlïe. Tract,
de mod. Conc. gener. celebrandi per Guïllelm. Durand,
fyifcop. Mimât, tit. 7. part. 7. p. 69.
2 6 ()
fion des infidèles [ ij. Tous nos prédécettèurs >
en retraçant ces paroles [1] , ont cru fervir
le St. Siégé , & même la Cour de Rome; peutt-elle trop fe défier de l’encens empoifouné
de ces maîtres corrompus, qui ont abufié de
leur efpnt & de leur fcicnce , pour détour
ner à leurs fins l’autorité toujours fainte &
les intentions toujoufs droites des Ponti
fes ?
Telle a été, difoic Mr. Talon, la fource
des maux prefqu1incurables dont iE glife efi
affligée , & le prétexte le plus fpécieux des
héréfies & des fchifmes qui fie font élevés dans
le dernier fiecle : nous ajoutons avec lu i,
(\\i encore a préfent la feule idée de l'infailli
bilité y & de la puijfance mdirette fur le tem
porel des Princes , efl un des plus grands obftaclés qui s'oppofent a la conversion des par(i> Et manaffe harum rerum famam ad infidè
les ufcjue ( credat Sanébitas vcftra feientibus ) qui ob
bitnc pr&cipué caufam chriftianam religionem déri
dent , adeo ut per nos ( per nos intpuimus ) nomen
Chrifii blafphemetur inter genres. Concil. Cardinal.
Sec. de emendanda Ecclefia ann. 1538.
( 2. ) Voilà l’origine des prétentions qu’ont eues
les Papes de dominer abfolument fur l’Eglife , &
la fource funefte des abus qui ont altéré la pureté
de fa difcipline , feandalifé les Minières de Dieu
Se fait blafphcracr fon faint Nom parmi les N a
tions. Difcours de Mr. le Procureur Général au Par
lement de Paris , prononcé dans l'Ecole du droit civil
canon en l’année 1681.
�1JO
ticuliers & des Provinces entières (i). L'Afi.
femblée de 1 6 8 1 , en publiant les quatre Ar
ticles, fe propofa fur-tout d'enlever ce pré
texte aux ennemis de la religion catholique ,
& de les ramener dans le fiein de l1unité [*].
Le dernier fchifme , produit par une ré
formation fauflè ôc erronnée , a ranimé les
defirs de tant d'hommes illuftres pour une
réformation légitime , Ôc pour l'abolition du
pouvoir indireéb ÔC de l’infaillibilité du Pape.
Plufieurs fieclcs auparavant , Ôc dans un terns
où cette infaillibilité n’étoit pas connue , l ’e
xemple du fchifme des Grecs infpira le plus
grand zele pour cette réformation fans
cefle éludée , ôc les délais firent préfager
( i ) Requifitoire de Mr. Talon de l’année 1688.
( 1 ) Hxretici quoque nihil prætermittunt , quo
eam poteftatem , quâ j ax Ecclefiæ continetur , invidiofam & gravem Regibus 8e populis oftencent ,
iifque fraudibus fîmplices ariimas ab Ecclefias1 marris
Chriftiquc adeo communione diflocient : q tu ut in
commoda propulfemus , nos Archiepifcopi , Sec. D é
cla râ t. C le r. G a llic . ann. 1 681 .
Quandoquidem verô non modo tenemur Catholicorum paci ftudere , fed ctiam procuranda eorum
réconciliations , qui a Chrifli fponsd fegregati , adul
tère conjunfti fu n t , (f? à promiffis Ecclefie feparati j
adhuc ea ratio nos impulit , ut eam aperiremus,
quam veram elfe arbitramur Catholicorum fententiam. Sic enim faélum iri fperavimus , ut in fu©
fehifm ati. . . . diutiùs non perfeverent. Epijl. Con
ven us Cler. Gallic. ann. 16 8 1. pag. 5©,
171
de nouveaux fchifmes par le même Durand
Evêque de Mende, ôc enfuire par le Cardi
nal Julien ; il écrivoit à Eugene IV , que
fi on ne hdtoit la réformation, il s'éleveroit
après rhéréfie de Boheme une autre héréfie plus
dangereufe ; que les e/pnts des hommes fem-,
bloient vouloir enfanter quelque chofe de tra
gique , & qu'on regarderait la Cour de Rome
comme la caufe de tous les maux , pour avoir
négligé d’j apporter le remede néccjfaire [ 1] .
On nous allarme aujourd’hui par la perfpective de plus grands malheurs , ôc l’on veut
nous faire entrevoir dans ce fiecle une pente
à l’incrédulité; quel moyen refte - t-il donc
aux hommes pour prévenir ce fléau, que d'é
loigner du milieu de nous les opinions fuperftitieufes, les abus de la domination dont l’in
crédule triomphe , & de remplir enfin le vce»
perpétuel de l’Eglife en rapprochant tout de
la perfc&ion des premiers rems, ad antique
femper nïti nos oportet [1]. Cette confpiratioa
générale des Eglifes pour le retour aux réglés
primitives, étonneroit l’incrédule, elle le re
gagnerait peut-être , ôc pour nous fêrvir de la
penfée de St. Chryfoftome , il ri j aurroit point
d'incrédule , f i nous étions tous chrétiens de
( 1 ) Epifl. prima Juliani Cardin, inter ope»
Æneæ Sylvii.
( 1 ) Defenf. Cler. Gallic. tom. 1 . part. 3, liv. l U
cap. 13. p. x76.
�Z J
1
la manière que nons devons Vôtre [ i ].
Le premier des Apôtres, dans la même épître qui recommande la foumijfion aux Sou
verains ( cette fourmilion qu'on s’efforce d'a
néantir par le pouvoir indircét & par l’in
faillibilité) , femble avoir parlé pour nos tems,
& a laide à fes fuccelTeurs une grande inftruélion , lorfqu’il a die que cette foumijfion ,
Cr le bon exemple qu'elle donne , font le vrai
moyen de réduire au flence des hommes té
méraires , qui calomnient le Chriftianifme
parce qu'ils le méconnoilfent : Subjeüi igitur eflote . . . . f v e Régi quaf pracellenti ,
f v e Ducibus tanquam ab eo miffis . . . quia
fie efl voluntas D e i, ut benefacientes obmutefcere faciatis imprudentium bominum ignorantiam . . . . omnes honorâte yfraternitatem diligite , Deum timete , Regem honorifeate [x ].
Il eft tems de finir , Meilleurs, &c nous
n’avons plus qu'à nous féliciter de voir qu’à
l’occafion du dernier B re f, on ait fixé darts
divers Parlemens de France l'ufage de vifter
tous les Brefs & Refcrits particuliers de Rome,
toujours remplis de claufes contraires aux droits
de l'Eglife & des Couronnes. Vous feavez
avec quel zele vos peres ont défendu le droit
d'A nnexe,
( 1 ) Nemo profeélô Gentilis effet li iplî ut oportet Chriftiani elfe curaremus. Div. Chryfofl.
(a) Prima Pctri, c. x. y. 13. 14. 15. 17.
27$
à'Annèxe , qui exprime en d'autres termes là
maxime de l'Exequatur , 8c duquel François
premier difoit qu'/ï concerne grandement Vautorité, puijjance & prééminence du Roi. L ’e
xercice de ce droit remonte aux tems les plus
reculés ; fon origine qui le lie à la conftitution fondamentale de la Provence, lelon la
quelle aucun ordre émané hors du pays ne peut
être exécuté fans paréatis, l’a toujours rendu
très-précieux.
Une réflexion fimple s’eft offerte à nous :
Lorfque le Pape Léon X reconnoilfoit par un
traité formel la légitimité de ce droit d'Annexe, fondé fur le droit des gens; lorfque
lui-même follicitoit le Parlement de Provence
par divers Brefs , dont le dernier efi: figné
du Cardinal Sadolet , d’accorder l'Annexe à
fes Refcrits, hortamur in Domino ut débita
executioni demandare permittatis , il étoic bien
éloigné de prévoir que la Cour de Rome
déclareroit en 17X5 U même maxime exé*
crable e7 hérétique, 6c qu’en 1768 un Bref,
après l'avoir déclarée fehifmatique , punirok
l'ufage de ce droit par une excommunication
portée contre les têces couronnées.
La renaitfànce des lettres & prefque de la raifon , donc ce Pontife partage la gloire ayeç
François premier, prometcoit aux tems qui alloient fuivre , des lumières capables de Uilfiper
les anciennes ténèbres, quel tems choifit-onpoar
M m
�en répandre de nouvelles ! Mais à quoi ne fautil pas s'attendre, en voyant dans un fiecle
éclairé raflembler en un feul Bref toutes les
erreurs amaflees dans ccs fiecles informes, où
fuivant la remarque de M. Fleury, on avoir
bien moins à s'étonner des prétentions des
Papes, que de U crédulité des Princes Sc
des peuples ?
Pour arrêter le progrès d'une dotlrine fi dan
ger eufie , nous répandrons, s'il efi befioin , jufiqu'a' la derniere goute de notre fiang : ainli
partait à Louis le Grand Mr. le Premier Préfident du Parlement de Paris , au fujet d'un
Bref d'Alexandre VIH. Le Cardinal de Lor
raine rendoit le même témoignage a la Nation
entière , lorfqu’il faifoit allurer le Pape Pie
ÎV cyion ficroit plutôt mourir les François que
de les obliger à renoncer au femimenr de la
fupériorùé du Concile & de la faillibilité du
Pape ( i ). Combattre de tout fon pouvoir
( i ) Rcftc*à cette heure le dernier des titres que
l ’on vent mettre pour Notre St. Pcre , pris du Con
cile de Florence : & ne puis nier que je fuis Fran
çois , nourri en l’Univetlire de Paris , en laquelle
on rient l’autorité du Concile par-deflus le Pape ,
font cenfurés comme hérétiques ceux qui tiennent
le contyuire : qu’en France on tient le Concile de
> ConH-apce pour général en tontes fes parties , que
l ’on fuit celui de Bafle , & rienr-on celui de Flo
rence pour non légitime > ni général , & pour ce
l'on fera plutôt mourir les François que d’aller au
*75
tout ce qui peut compromettre la liberté de
l’Eglife & l'autorité des loix, c’eft le devoir
folidaire & le vœu unanime de la Magifbature françoife , 6c chaque Magiftrat, à l’e
xemple des Athéniens, dont le fermenta mé
rité d’être tranfmis à la poftérité, doit pouvoir
dire de lui-même : Je défendrai ç j je protégerai
ma patrie çfr ma religion . . . je ne commuerai
jam ais aux entreprifies de ceux qui mépriferoient les loix } mais au contraire je vengerai
fe u l, ou conjointement avec les autres, les
affronts que l'on pourra faire a la fiainteté de
la République 3 j ’en prends a témoin les Dieux
vengeurs du parjure. Tel fut le pouvoir de
l’amour de la Patrie &c de la religion natio
nale fur un peuple qui , comme le lui re
prochoit Sr. Paul, rendoit ce culte au Dieu
qu'il ignoroit ( i ). Les fermens du Magiftrat
chrétien ont pour objet le culte du Dieu qui
e fi, & cette religion qui n'eft ni de choix,
ni bornée à un peuple particulier, mais don
née à tout le genre humain.
En maintenant toute l'autorité des quatre
Articles de i68z contre un Miniftere entre
prenant, en s'attachant à découvrir le venin
plus ou moins caché des doctrines contraic.ontraire. Lettr. du Cardin, de Lorraine
Mémoires du Concile de Trente p. 550.
dans les
( 1 ) Quod ergo ignorantes colitis hoc ego aaflumio vobis. Aét. Apofi. cap, 17. num. 13.
M m ij
�177
t e s , les Magiftrats fervent des vérités que
l’Eglife Ga licane j au tems du Concile de
T rente, pn fefîoic à titre d’article néccffaire,
& qu’elle affirmoit a ferment ( i ). Elles font
auffi partie du ferment que nos Rois prêtent
à leur facre , de conferver nos Libertés ? &
du ferment de fidélité qui dévoue la Nation
à fes Souverains : les Magiftrats qui fe confacrent à la défenfe de ces vérités acquittent
donc à la fois leurs propres fermens, ceux
de la Nation , & ceux du Monarque; il en
a charge'leur confciencc , il a confié le dépôt
facré de nos Libertés à leur zele ; qui pourroit le blâmer ou le ralentir ! Animés des
mêmes fentimens que vos prédéceffeurs , ils
ne demandent pour eux que la liberté de
continuer à défendre l'autorité Royale avec
■ peine , haine & envie ( i ).
Nous nous bornons , Meilleurs , à requé
rir la fuppreffion de ce B r e f, quoique di
gne de fubir les dernieres flétrillures impri
mées à d’autres Brefs peut-être moins excef( i ) Tum Ferrerias qualî pro cçrtiflimo pofuic
Concilium fupra Romanum Pontificem efle..........
ïcclefiam Gallicanam non modo id fentire , fed
■ profiter!
jttrejurando dffirmare tnncfuam artïculum
nçcefzrium ; idque jure optimo ex Conftanticnfis
Concilii autoricate. PaUvicinus, hifior. Conc. Trid.
lib. 9. eap. 1 4 .
[ r ) Remontrances du Parlement d’Aix de l’année
îffi^. >
Cifs ; mais nous fuivons des exemples refpec<
tables dont le motif eft manifefte , c’eft qu’il
eft réfervé. aux Souverains, dont la Majcftc
eft blefiee, d'apporter à l’entreprife la plus
inouie, les vrais remedes qui ne font que
dans leurs mains.
Eux retirés.
Vu l’Imprimé intitulé : SanBiffimi Dominé
nofri Clemcnûs PP. X III Lit ter& in forma
Brc vis , qui bus abrogantur & cajfantur , ac
pulla
irrita declarantur nonnulla E difia
7n Ducatu Parmcnfi çfi Placenttno édita , //bertati, immumtati, & jurifdiflioni eccleftafiicA
prajudicialia. Roma M . D CC. L X V III. ex
Typograph/a Reverenda Caméra Apofioltcœ, con
tenant huit pages petit in-folio, commençant
par ces mots : Alias ad Apoflulatus noflrt no
tifiant , 8c finiftànt à la huitième page par
ces mots : Datum Rom& apud S . Mariam M a
jor cm , fub annulo Pifcatoris , die 30 januarii
176 8 , Pontifieatûs nofri anno dccimo , ligné,
A.Cardinalis Ntgronus, 8c au-deflous mention
de l’afEche 8c publication le premier février
176 8 en divers lieux de Rome; les conduirons
par écrit laiftees fur le Bureau , lignées Ripert
de Monclar : oui le rapport de Me. Jofeph de
Boutalîy, Chevalier , Marquis de Châtcaularc,
Seigneur de Roulfet 8c de Fuveau, Confeil-
�ler du R o i, Doyen en la C o u r: tout con
sidéré.
L A C O U R , les Chambres affemblées , a
ordonné & ordonne que ledit Imprimé fera
& demeurera fupprimé ; a fait & fait inhi
bitions &c défenfes â toutes perfonnes de quel
que état, dignité Sc qualité qu'elles foient ,
Soit laïques, foit eccléfiaftiques , féculicres,
ou régulières, Imprimeurs, Libraires, Col
porteurs , ou autres, de faire imprimer , diftribuer, vendre ou autrement donner publi
cité audit Imprimé , à peine d'être procédé
extraordinairement contre eux comme rebel
les au Roi &c criminels de leze-majefté -, en
joint à tous ceux qui en auront des exem
plaires de les apporter au Greffe de la Cour
pour y être Supprimés ; ordonne que le préSent Arrêt fera imprimé & affiché par-tout
où befoin fe ra, & que copies collationnées
d'icelui feront expédiées au Procureur géné
ral du Roi &c envoyées aux Sénéchauffées
du RefTort , pour y être ledit Arrêt lu , pu
blié & enrégiftré; enjoint à Ses Subftituts d'y
Tenir la main , St d'en certifier au mois. Fait
à Aix en Parlement, les Chambres afièmblées , le 1 mai 1 768. Collationné. DE RE~
GINA.
A A I X , chez Efprit David, Imprimeur du
R oi & du Parlement. 1 768.
ERRATA.
Age 10 , ligne 18 , la politique permanente de cctce
Cour , lifez t la politique permanente de leur Cour.
Pag. xi , ligne 1 7 , attribue à ces cenfures , lifez ,
attribue à Tes cenfures.
Pag. 1 6 , ligne j , les attes légiflatifs d’un Souverain ,
lifez , les attes légiflatifs du Souverain.
Pag. 1 6 , ligne 6 , fournir à ce Pontife , lifez , four
nir au Pontife.
Pag. 1 4 , ligne 1 6 , dans toutes les parties, life z ,
dans les différentes parties.
Pag ‘
ligne 1 6 , qu’on juge par ce principe, lifez,
qu’on juge fur ce principe.
Pag. 117 , ligne 18 , cette défenfe exclud , lifez , la
défenfe de la domination exclud.
Pag. 114 , ligne 14 , l’homme de Dieu, ces mots doi
vent etrt en lettres italiques.
Pag. 130 , lignes t er 3 , un devoir univerfel à la puifiance , lifez > un devoir univerfel d’obéir à la puif-
fance.
MS > ligne z i , & d’erreur , lifez, d’erreur.
Pag. 1 85 , ligne 1 6 , mais détournée, ajoutez , pat
le régime.
AUX
NOTES.
5 5 » ligne 9 , chap. X III de St. Mathieu , lifez,
enap. VIII de St. Mathieu.
Pag. 109, ligne 7 , ad Narfeteo , lifez , ad Narferem.
1 1 1 » ligne 1 1 , prirnæ Pétri, lifez, prima Pétri.
^aZ*
> ligne 4 , fetuntur , life z , feruntur.
Pag. 1 5 0 , Ugne 1 , prudenter que, lifez , prudenterque.
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Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Arrest du Parlement [de Provence] du 2 mai 1768, extrait des registres du Parlement
Subject
The topic of the resource
Parlement de Provence
Jurisprudence avant 1789
Description
An account of the resource
Pièce concernant l’expulsion des jésuites : voir Mémoires du Président d’Eguilles
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Le Blanc de Castillon, Jean-André
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES 134684
Publisher
An entity responsible for making the resource available
E. David (Aix-en-Provence)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1768
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
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Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES_134684_Arret-Parlement_vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
278 p.
17 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Provence. 17..
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/142
Église et État -- Provence (France) -- Ouvrages avant 1800
Parlements -- France -- Ancien Régime -- Provence (France) -- Ouvrages avant 1800