Lettres ornées, bandeaux et culs de lampe gravés sur bois (Notes)
Dans son avis au lecteur, l'éditeur explique que l'ouvrage de Scipion Dupérier* a rapidement été épuisé en raison du succès de ses ventes et que pour satisfaire la demande, il a accepté de lancer cette 3ème réimpression à titre posthume. Pour ne pas être accusé de vanité (lui ou l'auteur ?), il s'empresse d'ajouter que cette réédition a surtout permis de corriger les innombrables erreurs des deux premiers tirages.
Pourquoi un tel succès de la part d'un lectorat très spécialisé ? Il existait à l'époque très peu de recueils de jurisprudence rédigés en français, surtout de cette importance (plus d'une centaine de questions examinées dans cette recension) et de cette qualité, et c'est pour cette raison que S. Dupérier, avocat au Parlement (il sera même le doyen des avocats) augmentera encore sa notoriété déjà acquise par son habilité à traiter les affaires.
D'autant plus qu'il ne se contente pas de collecter la jurisprudence mais il l'analyse et la discute. Dans cet exemple en matière de recouvrement de créance, le délai de prescription de 30 ans s'applique-t-il à un héritier particulièrement distrait et négligeant de ses propres intérêts ? S'ensuit une discussion et la citation de sources qui font autorité, comme ici, le Code Justinien, corpus de droit civil et première compilation du droit romain du 6e siècle (en latin, codes et jurisprudences également consultables sur Odyssée).
La prescription de 30 ans : les juristes ne sont pas des poètes, le temps fait bien à l'affaire
Un succès également parce que beaucoup d'affaires avaient pour objet des litiges liés aux successions sous toutes leurs facettes : héritages, décès, dots, condamnations à perpétuité (parfois aux galères), rentes, divorces et remariages, dettes et créances, intérêts, prescriptions, donations, etc... Pour espérer remporter leurs procès, les gens fortunés n'hésitaient pas à recourir aux meilleurs avocats, ceux bien formés, bons connaisseurs des arrêts rendus par la justice et convaincants dans leurs plaidoiries.
Toute cette jurisprudence, même si elle ne représente qu'échantillon de toutes les affaires passées et ne concerne qu'une frange de la population - l'enjeu de toutes ces affaires est avant tout patrimonial - nous replonge dans les mœurs de la France de la première moitié du 17e siècle (sous réserve d'une transcription exhaustive, les arrêts les plus anciens cités remontent à 1512 et, pour la période la plus documentée, le plus récent évoqué date de 1641).
* cf notice sur S. Dupérier :
Oeuvres de Scipion Du Périer. Tome 1 à 3 - Questions notables et maximes de droit, avec des Observations, 1759