Cette collection La plupart des volumes annuels proposent une Table générale des matières et un index des noms des personnes.
La CCIMP se doute qu'elle n'est ni le centre du monde ni l'Etoile du Berger mais elle sait qu'elle est au cœur de tout le commerce maritime de Marseille : elle en a même fait sa devise depuis la fin du 16e siècle.
"Quot cursus immota regit : elle guide tout en restant immobile"
Et de la constance, elle n'en manque pas. Vieille habitude de la maison et avec une régularité d'un métronome, elle multiplie les publications régulières qui rendent compte de toutes ses activités : compte rendus de travaux, conférences, bilans statistiques du commerce et des activités portuaires, bilans comptables de son propre budget, assemblées générales, conseils d'administration, et pour finir, ce qui peut être considéré comme le témoignage vivant de toutes ces publications, les correspondances qu'elle entretient avec ses différents partenaires : ministères, administrations locales (mairie) et départementales (Conseil Général), décideurs politiques et économiques, capitainerie, armateurs, opérateurs de transports maritimes et ferroviaires, douanes, compagnie des docks et des entrepôts, métiers liés à la manutention portuaire, entreprises de transformation, de réexpédition et de transit, instances en charge de l'aménagement du territoire, enseignement technique et professionnel, et même la liste des revues de sa bibliothèque (depuis 1922). De tous ces documents et ces courriers adressés et reçus, il ressort que la CCIMP est une mécanique de lobbying infatigable qui ne cesse de demander, conseiller, proposer, réclamer, alerter, aider, subventionner, expertiser, prospecter, évaluer, soutenir, orienter,...
Cette stabilité a l'avantage de donner des éléments de comparaison sur le long terme tout en livrant des données liées à l'actualité : par ex., en 1919 apparaît une rubrique
Subsistance et ravitaillement imposée par l'état du pays après la 1ère Guerre Mondiale. Compte tenu de son importance stratégique majeure, un bulletin spécial est consacré à la situation au 1er sept. 1921 des travaux en cours d'exécution et des travaux projetés dans les ports.
Plan du port de Marseille (1921)
On peut voir que la CCIMP est clairement engagée dans de très lourds investissements d'infrastructure à un point tel qu'elle paraît se substituer à la puissance publique. Dans ce rôle de quasi délégation, elle n'hésite pas à réclamer le soutien financier direct de l'État (certains travaux sont d'utilité publique).
L'ancien carénage et le pont transbordeur qui enjambait le port à son entrée (1921)
Au détour de documents sur les projets d'infrastructures portuaires, on peut trouver des informations plus légères mais très instructives sur la physionomie de la ville de Marseille comme ces anciens canaux destinés au carénage qui donnaient au quadrilatère occupé aujourd'hui par la place Etienne d'Orves une atmosphère particulière.
Les reflets vénitiens du quai canal Jean Ballard (Pl. E. d'Orves)
Le canal avait été récupéré par la ville lors de la fermeture de l'Arsenal des galères : délaissé et trop encombré, il devient insalubre et finira par être comblé en 1927 par crainte de la propagation de maladies.
Le Canal de la douane, en forme de U faisait la jonction E. d'Orves - Vieux Port
La CCIMP ne perd jamais de vue les grandes infrastructures plus éloignées de la Joliette comme le très ambitieux projet d'aménager le Rhône d'une vingtaine de barrages hydro-électriques le long de la quasi-totalité de son parcours sur le territoire français (elle entretient des relations régulières avec la Chambre de commerce de Lyon).
Projets de barrage sur le Rhône (1928)
En plus de l'Étang de Berre, la Chambre de Commerce portera toujours le plus grand intérêt au Rhône, consciente de l'avantage qu'offre le transport fluvial en termes de tonnage : la vallée du Rhône est le seul axe qui permet d'acheminer de forts volumes de marchandises vers Lyon et Paris et plus encore, vers les grandes villes de l'Europe du Nord. Mais la voie navigable est lente et perd un peu de son attrait dans les rubriques du Bulletin concurrencée d'abord par les chemins de fer (19e siècle) puis le siècle suivant par le nouveau
port aérien de Marignane (la rubrique change de titre pour devenir
Ports maritimes et port aérien).
À partir de 1920, apparaît en début de bulletin la liste des services extérieurs de la CCIMP qui montre son implication précoce dans la formation professionnelle et l'enseignement technique :
- Bureau unique des conditionnements - Textiles et Bois (créés en 1858 et 1910)
- Institut d'enseignement technique supérieur, rattaché à la Faculté des Sciences (fondé le 24 juillet et 18 septembre 1917)
- Cours coloniaux (fondés en 1899)
- Section du Haut enseignement commercial
- Institut Colonial (fondé le 30 juillet 1906)
- Cours de mécaniciens (fondés en 1887)
- École supérieure de commerce (fondée 1871)
- École pratique de commerce (créée 5 avril 1934)
- École d'ingénieurs
- École d'électricité industrielle (prise en charge du 8 juillet 1937)
- École Courbet - secours aux gens de Mer de la Méditerranée (prise en charge 1937)
Consciente qu'il faut adapter les métiers à l'évolution des sciences et techniques et élever le niveau de qualification professionnelle pratique et théorique, son intervention dans les programmes pédagogiques ne cessera de s'affirmer : de 5 services affichés en 1920, on passera à 11 (dernière liste de 1939), avec un effort particulier sur l'enseignement supérieur en connexion avec le monde universitaire, que ce soit par l'intervention d'enseignants de l'université venant d'Aix et de Marseille, par la création directe d'écoles ou par leur prise en charge financière.
Si la CCIMP est très impliquée en amont dans les circuits d'import/export nécessaires à l'approvisionnement et aux débouchés des industries locales, elle ne se désintéresse pas des questions liées au commerce, au marché et à la consommation. L'un des très rares graphiques que propose la revue au cours de ses vingt années d'existence montre que la grande crise financière des années 1929 & 1930 a profité à la distribution qui a consolidé ses marges au détriment du portefeuiille des ménages. Toute ressemblance avec d'autres périodes bien connues serait purement fortuite...
Le prix du commerce de gros et de détail (1929-1931)
Dans son dernier bulletin, son optimisme dans l'avenir ne faiblit pas : elles sollicite l'autorisation d'acquérir, pour le prix de 3.000.000 de francs, un immeuble industriel (dit immeuble Velten) rue Bernard-du-Bois à Marseille, en vue d'installer un atelier-école pour la métallurgie. En réponse, le Ministre du Commerce, en accord avec celui de l'Education Nationale, informe le Préfet qu'il lui donne cette autorisation et le prie de lui notifier d'urgence la présente décision. Nous sommes en septembre 1939...