Les voyages au long cours ne sont jamais sans risque : on peut être victime d'une appendicite, d'une viande avariée, du scorbut ou du béribéri, d'un virus inconnu, d'une chute stupide... Quand il y a un médecin à bord, pas de problème : il ne peut jamais être bien loin. Depuis le 4 août 1819, une ordonnance impose à tout navire marchand de plus de vingt hommes d'équipage la présence d'un chirurgien.
Mais quand l'équipage est trop réduit pour en justifier la présence ? D'autant plus, intérêts du commerce obligent, nombre de navires qui partent en mer pour de longues périodes, parfois plus d'une année, comptent moins de vingt marins...
Pas de médecin à bord ? Pas de panique, il y a le capitaine
Heureusement, cette même ordonnance de 1819 a tout prévu : tous les bâtiments marchands qui n'ont pas un médecin embarqué sont tenus d'avoir à leur bord un coffret de médicaments et un manuel d'instructions médicales. Seul maître à bord après Dieu, il revient au capitaine d'assurer les premiers soins à l'équipage ou aux éventuels passagers malades ou blessés.
Pour établir un premier diagnostic, la capitaine n'a nul besoin d'être féru de médecine : il lui suffit de consulter ce précieux manuel de premiers secours baptisé
"médecin de papier".
Le médecin de mer est en papier
Pour établir le bon diagnostic, le manuel essaie de couvrir les cas les plus courants : inflammations, plaies, ulcères, exanthèmes, tissus anormaux, fièvres, blessures, et toutes les pathologies liées aux systèmes respiratoire, circulatoire, digestif, nerveux... Les voyages pouvant être très longs, le manuel prévoit même les accouchements et présente quelques recommandations obstétriques.
Le remède : dans le coffret de médicaments
(ne pas l'oublier de le remplir et l'emporter lors l'appareillage)
Le
médecin de papier se termine par les indications thérapeutiques supposées être les plus appropriées : saignées, ventouses, pansements, actes de chirurgie, et proposent quelques solutions médicamenteuses assorties de conseils d'hygiène de base.
Dans le document présenté ici, la section réservée aux soins paraît particulièrement maigre : une cinquantaine de pages, soit moins de 10% du manuel. Si certaines observations et consignes médicales sont précises et sûrement précieuses, d'autres relèvent du simple bon sens (lutter contre la malpropreté pour réduire les infections, par ex.) ou de la simple incantation (il est recommandé de consommer des produits frais en cas de scorbut : au milieu de l'océan ?).
En cas de problème médical grave, même accompagné de son rassurant
médecin de papier, on devine l'effrayante solitude et la responsabilité que devait assumer alors le capitaine. Les réflexions aujourd'hui menées en matière de voyages interplanétaires accordent une très grande importance à la question de la santé et de la sécurité des équipages et l'abordent d'une façon évidemment très différente (télémédecine, doubles compétences réparties, encyclopédies embarquées, etc.).