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LISTE DES MEMBRES
COMPOSANT LA
SOCIÉTÉ LOCALE DES BOUCHES-DU-RHONE.
BUREAU ET COMMISSION ADMINISTRATIVE.
Président : M. Seux, profess. à l’Ecole de Médecine, méd. en ch. des hôpit., Marseille.
Vice-Président : M. Bernard (Marius), chirurgien en cbejf des hôpitaux, Marseille.
Secrétaire : M. L aurens (Louis), Marseille.
Trésorier : M. Blanchard (Camille), Marseille. '
COMMISSION ADMINISTRATIVE.
M M.Broquier chirurgien en chef des hôpitaux, rb e f des trav. anato m iq u es, Marseille.
Rivière de la Souchère, médecin en chef d e s h ô p i t a u x e t d u c h . d e fer, Marseille.
Verne, Marseille.
Candolle. Marseille.
Mittre (Théophile), Marseille.
Bouisson, médecin-adjoint des hôpilaux, Marseille.
Combalat, chirurgien-adjoint des hôpilaux, Marseille.
Solari, Marseille.
Lisle, médecin en chef de l’asile des aliénés, S a in t-P ierre.
ChapplaiD, chirurgien en chef des hôpitaux et profess. s u p p l.à l’Ecole, Marseille
Chauméry, Marseille.
Imbert, médecin eu chef de l'hôpital. Arlps.
U rp a rt, médecin en chef de l’hôpital, Arles.
Bouflficr, Marseille.
B ourgarel ch iru rg ie n adjoint des
h ôpitaux, Marseille.
Boyer (Edouard), Marseille.
C am pan, Arles.
C artier, Arles.
C artoux, Marseille.
Chabert, Maillanne.
C harrières, médecin en chef de l ’asile
de S aint-R em y.
Chevillon aîné, Marseille.
Chevillon je u n e, Marseille.
Clappier, Vitrolles.
Collin, Marseille.
Coste # , direct, de l’Ecole et prof
de clinique ex terne, Marseille.
D’A stros, médecin en chef des hô
pitaux, Marseille.
De Possel, La Ciotat.
Despine, Marseille.
Diouloufet, Marseille,
Dubreuil, direc teu r de l’Institut o r
thopédique, Marseille.
Duval, Arles.
Dusilliet, Marseille.
F abre (Augustin), Marseille.
F auchier. S ainl-Cannat.
Garsin, Marseille.
G asquet fils Marseille.
Gautier. Marseille.
Gay, Arles.
G ibert, médecin du chemin de fer.
G irard (Jules) £ , professeur à l’E
cole, Marseille.
G irard (Agricol), Eyguières.
Goy, Marseille.
G ru n e r, Marseille.
Isn ard , Géménos.
Jeanselm e, Cuges.
Jo u rd an . Marseille.
Lacliaux, Marseille.
Lafitte. Arles.
L am bert, Marseille.
L arché, Marseille.
L au ren t (A.), Marseilie.
Lesnez, Saint-H enri.
Magail (Alexandre), professeur a d
jo in t ù 1 Ecole, Marseille.
Marloy, Auriol.
Martin (Alexandre), Marseille.
Maurel, Marseille.
Maurin, Marseille.
Ménéeier, Marseille.
Mérentié. Marseille.
Méli, Marseille.
Moustier, Sainte-M arie.
Nicolas, m éd. de l’octroi, Marseille.
Ode, Arles.
Pally, Marseille.
Payai), Arène.
P elle g rin . Marseille.
Pirondi (Sirus) # , chir. cansult. des
h ô p ., prof, a d j . à l’Ecole, Marseille.
Rampai (Louis), professeur adjoint à
l’école, méd. de l’octroi,M arseille.
Reboul, Marseille.
Redlich, Marseille.
Rey (Adrien), Marseille.
Rivalz, Marseille.
R ondart. Salon.
Rossignol. Arène.
Sauze, méd. en ch. de l’asile des alié
nés et ■e la prison cell., Marseille.
Sicre, Saint-M arcel.
Teissier, Marseille.
Villard, méd. adj. des hôp.,M arseille
PRÉSIDENT HONORAIRE.
M .B artoli, professeur à l’Ecole de médpcirre et chirurgien en chef des hôpitaux.
CONSEIL JUDICIAIRE.
MM. Verne, avocat à Marseille.
Chataud, avocat à Marseille.
MEMBRES SOCIÉTAIRES.
MM. Am albert, Marseille.
A rm ieux, Roquevaire.
Aubin. Marseille.
A udiberl, Puyloubier.
Bally. Marseille.
Baraillier, Marseille.
Barthe, Marseille.
Behm, Marseille.
Berlié, Eyguières.
Bernard (Alexandre), Marseille.
Blanc. Marseille.
Blanchard (S .-L .), M arseille.
Le Conseil de Rédaction laisse à chaque au teu r la responsabilité de ses artic le s.
— L ’acceptation d un article n’implique ni approbation ni im probation.
L’U n io n m é d ic a le d e l a P r o v e n c e accepte l’échange avec les jo u rn a u x
et les publications de médecine.
�A NOS CONyRtîKBS,
CONDITIONS ET MODE DE PUBLICATION.
L’U n lo u m é d ic a le d e la P r o v e n c e p a ra îtra le l*r de
chaque mois p a r livraisons d ’une ou deux feuilles.
Chaque livraison contiendra : — 1° une partie officielle : c o m p te s rendus, procès-verbaux ou com m unications des Sociétés aya n t a d h é ré
à no tre publication ; — 2° une partie non officielle : travaux p a rtic u lie rs
professionnels ou scientifiques, r e v u e s , b ib lio g ra p h ie s , v a r i é t é s ,
nouvelles, etc.
L’abonnem ent est de 6 f r a n c s par an.
On ne s ’abonne que pour un a n . — L ’ab o n n e m e n t p a r t du
ja n v ie r
de chaque année.
Les m em bres de l’Associalion des B o u c h es-d u -R h ô n e reçoivent le
Journal m oyennant un suppiém ent de cotisation de i fra n c s.
Les membres des Sociétés locales voisines qui a u r o n t ad h é ré à n o tr e
publication jo u iro n t des mêmes avantages.
P our tout ce qui concerne le Jo u rn a l, s ’a d re sse r au S e c ré ta ire de la
rédaction, r u e C h â t e a u -R e d o n , 12. [Affranchir .)
Dans son assem blée générale du
août dernier,l'A ssociation
des m édecins dit départem ent des B ouch es-d u -R h ô n e a décidé
la fondation d’un journal.
E n prenant celle délibération, l’assem blée générale a com pris
tous les avantages, toutes les ressources d’avenir qui peuvent
en résu lter.
Ju sq u 'à p résen t, l’association n ’existait pour ainsi dire q u ’en
théorie. U ne fois par an seulem ent, convoques en assem blée
générale, les m em bres de l'association pouvaient espérer trouver
lieu de discuter ou d’ém ettre des m otions quelquefois im por
tantes. E t dans ces assem blées dont l’ordre du jo u r est
généralem ent très rem pli, toute étude sérieuse et patiente devient
im possible. En créant une feuille p é rio d iq u e , l’assem blée
générale a voulu avoir une arène toujours libre dans laquelle
seront élaborées et travaillées d ’avance des questions qui alors
pourront être décidées en parfaite connaissance de cause. Elle
appelle ainsi chacun h la participation de l’œ uvre com m une.
La com m ission adm inistrative, en publiant chaque mois le
com pte-rendu de ses séances, m ettra tous les m em bres au cou
ran t des affaires qui in téressen t la so ciété; et ainsi se fera un
échange continuel d'idées et de relations en tre tous les m em bres
de l’association, ju sq u 'à ce jo u r isolés et par cela m êm e con
dam nés à l’im puissance.
O rgane de l’association, le journal sera destiné aux questions
professionnelles. N om breuses etdilficiles,ces questions pourront
obtenir une solution plus rapide si clics sont bien connues et
discu tées.
Le charlatanism e et l’exercice illégal de la m édecine, cette
lèpre de la fam ille m édicale, celte exploitation im m orale de la
B élise Humaine ;
�«
La révision des honoraires des m édecins requis par la ju stice;
Les faits de responsabilité m édicale, sont au tan t de questions
générales qui intéressent le corps tout entier et a 1 élaboration
desquelles nous ne saurions rester étrangers.
A côté de ces questions vastes, il en est d ’autres plus res
treintes p eut-être, mais tout aussi im portantes, parce q u e lle s
touchent plus directem ent les intérêts des m em bres de l'asso
ciation.
La prem ière et la plus im portante est, sans co n tred it, celle
des sociétés de secours m utuels ; ces sociétés existent n o n -se u
lem ent à Marseille, mais dans toutes les localités du départe
m ent et des départem ents voisins. Le journal sera une enquête
ouverte où chacun apportera son dire, et de l’ensem ble de toutes
les opinions sortira un m ode de fonctionnem ent plus favorable.
Viennent après des questions qui ont égalem ent leur im por
tance: telles que le service des vaccinations dans les villes et
les campagnes ; le service médical des indigens dans les can
to n s ...., etc.
Dans beaucoup de départem ents, ces services sont rég u lière
m ent organisés. A M arseille, les adm inistrations des hospices
et des bureaux de bienfaisance y suffisent. Mais dans beaucoup
de localités du départem ent et des départem ents voisins cette
organisation est encore incom plète.
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Nous ne pouvons aujourd’hui que signaler ces différentes
questions. Elles constituent autant de désiderata dont la solu
tion- n ’est pas impossible ; mais cette solution ne peut être
obtenue q u ’avec l’étude et la persévérance de chacun.
Du reste, en créant un journal périodique, l’association des
Bouches-du-R hône n’a fait que suivre l’im pulsion donnée déjà
par d ’autres, et a leur exem ple, elle convie a sa coopération les
sociétés locales des départem ents voisins; suivant cette idée, elle
a donné au journal le titre de : Union Médicale de la Provence ;
et nous som m es persuadés que nos confrères de V aucluse, du
Var, des Basses-A lpes et des A lpes-M aritim es répondront à
5 -
notre appel. Ils com prcm honi com m e nous l'im m ense avantage
qui résulte d ’un échange perm anent de relations. Nos colonnes
seront ouvertes a leurs travaux officiels ou particuliers, au même
titre que pour nos propres sociétaires.
La direction du journal a été confiée à un Com ité de Rédac
tion , pris m oitié dans la com m ission adm inistrative et l’autre
m oitié parm i les m em bres de l’association. Ainsi com posé, ce
com ité rep résen te réellem ent les intérêts de l'association, et ses
efforts sont assurés pour m ener a bien l’œ uvre difficile qui lui
est confiée. Il accueillera avec reconnaissance tous les travaux
qui lui seront adressés. Dégagé de tout in térêt p erso n n el, il
s’attachera su rto u t a faire preuve d’im partialité et de conciliation.
N otre publication sera donc consacrée à la défense des inté
rêts professionnels. Mais la science aura aussi porte ouverte.
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Les articles scien tifiq u es, o b serv atio n s, m ém oires, revues et
articles b ib lio g rap h iq u es, ajoutant à l’in térêt de notre feuille,
trouveront place sans l’absorber tout entière.
Enfin, quelques variétés et nouvelles tiendront nos lecteurs
au courant des petites chroniques de notre m onde médical.
Tel est, chers confrères, le program m e que nous avons
dû vous exposer. Pour le m ener à bonne fin, nous n ’avons be
soin que de deux choses : votre bienveillant accueil et votre
coopération. N ous com ptons su r toutes les deux.
Le Comité de Rédaction.
�U N IO N M ÉDICALE
DE LA PROVENCE
Assemblée Générale du 24 août 1863.
Celle réunion qui avait lieu a M arseille, dans une salle de
l'U nion des A rts, em pruntait un caractère particulier d’im por
tance aux nom breuses et intéressantes questions qui figuraient
a l’ordre du jo u r et aussi parce qu elle tém oignait du r veil de
la société dont des circonstances particulières avaient pendant
trop longtem ps paralysé l’essor et suspendu les travaux.
E taient p résen ts: MM. B ernard, vice-président qui occupe
le fauteuil ; Laurens, secrétaire, B lanchard, tré so rie r, S eu x ,
B roquier, B ouisson,Solari , V erne, Candollc, Com ballat, M ittre,
Nicolas, Chapplain, M énécier, Collin, Im b ert, Goy, A. F ab re,
Barallicr, M érentié, Chauméry, Lislc, A rm ieux, Pally, Behm ,
K ondart, G au tier, Jeanselm e , A. B e rn ard , L arché, P iro n d i,
Ballv, A. M artin, D espine, Rey, Chevillon aîné.
MM. Berlié d’Eyguières et A udibert de Puyloubier s’excusent
par lettre de n ’avoir pu se rendre à la réunion.
P lusieurs m édecins étrangers à l’association assistent a la
séance, ainsi que MM. V erne et Chataud, avocats, m em bres du
Conseil Judiciaire.
M. B ernard, vice-président, annonce h l’assem blée q u ’il doit
l’honneur de présider celte réunion a l’absence de M. Bartoli
et a sa dém ission de ses fonctions présidentielles; il est chargé
de faire connaître a ses confrères la déterm ination qu’a dû
prendre M. Bartoli, par suite de telles circonstances qui ne lui
p erm ettent plus de consacrer tous ses soins à la société, com m e
par le passé; il en exprim e tous ses regrets et ne doute pas q u e
Rassem blée to u te entière s’y associe. T o u tefo is, M. Bartoli
reste m em bre dévoué d’une œ uvre q u ’il a largem ent co n trib u é
a fonder. Passant ensuite en revue les diverses questions portées
a l’ordre du jo u r, l'honorable vice-président fait appel û la
bienveillance de Rassemblée et réclam e toute son attention pour
que les résolutions prises soient les plus conform es au but
principal que poursuit l’association, l’am élioration des intérêts
m oraux et m atériels de la profession m édicale.
M. le secrétaire a la parole pour la lecture du com pte-rendu
des actes et des travaux de la société depuis la dernière assem
blée générale.
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—7 —
Messieurs
et chers
Coxfrères,
Il m ’est encore échu cette année l’honneur de prendre la pa
role dans cette solennelle circonstance et de vous p résen ter le
com pte-rendu des actes et des travaux de la société locale des
Bouches-du-R hône.
J'ai essayé dans ce travail d ’être aussi b ref que possible, vou
lant me créer un titre h votre bienveillance; l’ordre du jo u r de
cette séance est d ’ailleurs trop chargé pour que je fatigue in u
tilement votre attention et les im portantes questions qui vont
vous être soumises seront l’objet de com m unications spéciales
de la part de confrères dont la parole éloquente et plus autorisée
que la m ienne vous dédommagera largem ent de l ’aridité et des
imperfections de ce com pte-rendu.
Voilà plus de deux ans que nous ne nous étions pas réu n is en
assemblée générale ; l’année d ern ière, cette réunion n e p u t
avoir lieu à cause de circonstances particulières et il en est
résulté une longue suspension de nos travaux qui avait pu ins
pirer quelques inquiétudes sur la m arche régulière de n o tre
société. Le conseil général de l’association générale avait m êm e
été péniblem ent im pressionné de notre silence ; je m e hâte d ’a
jouter, m essieurs, qu’il applaudit à notre réveil et q u ’il form e
des vœux pour que les médecins des B ouches-du-R hône s’asso
cient efficacement au grand m ouvem ent professionnel qui de
tous côtés agile le corps médical.
Depuis notre dernière assem blée et au m ois de janvier 1 8 6 5 ,
nous avons perdu, p a rla m ort, un de nos confrères ju stem en t,
aimé de tous ceux qui fo n t connu; praticien m odeste et in stru ite
Guynaud de Saint-H enry est descendu dans la tom be à un âge
peu avancé, emportant les regrets unanim es de la population
auprès de laquelle il exerçait si honorablem ent la profession
médicale. Associons nos regrets à ceux de ses concitoyens et
conservons religieusement son nom dans nos annales et dans
notre souvenir.
Je suis plus heureux en ayant à vous annoncer les adhésions
d’un assez grand nom bre de nouveaux m em bres. Ce sont :
MM. D usilliet, de M arseille, MM. Fabre A ugustin, M arseille
Sauze
«
Duval, d ’A rles,
Vil lard
«
Chabert de M aillanne,
Chapplain
«
C harrière de S lnl-R em y,
Melchior Robert «
Berlié d ’Eyguières,
D’Astros
«
A udiberl de T rets,
Gautier
«
Rondart de Salon,
Sirus Pirondi
«
F auchier de Slol-C annat,
Ménécier
«
De Possel de la C io tat.
Despine
«
Le B ureau vous propose !a l’unanim ité leur adm ission, je ne
doute pas de votre em pressem ent et de votre bonne volonté à
ratifier la décision du B ureau. J ’aperçois parm i nous plusieurs
de ces honorables confrères, quelq u es-u n s m êm e viennent de
loin pour prendre part à nos délibérations. Je crois être l'in ter
prète de vos sentim ents en leur disant à to u s: Soyez les bien
venus.
En outre de ces d ix -n eu f dem andes, le Bureau en avait reçu
deux autres q u ’il n ’a pas ju g é a propos de prendre en considé
ration et de vous proposer. J ’ai le bonheur de vous annoncer
aussi une précieuse acquisition, celle de M. le docteur Lisle,
m édecin en chef de l’asile des aliénés, m em bre de la société
centrale lorsqu’il habitait Paris et qui est, de droit, m em bre de
la Société locale des B ouches-du-R hône, depuis que la confiance
de l’adm inistration l a appelé à la direction de l’asile de S ain tPierre, à Marseille. Par ces adm issions, le chiffre de notre p er
sonnel se trouve porté à 92.
Depuis notre dernière réunion, une dem ande de secours a
été faite au Bureau par un m em bre de la société qui se trouvait
dans une position critique. Une som m e de soixante francs a
suffi pour sortir d ’em barras ce confrère m om entaném ent gêné.
Le Bureau n ’a pas hésité à la lui accorder, se fondant sur les
dispositions de l’article 21 des statu ts ainsi conçu: « Le socié
taire n’a droit au secours q u ’après avoir fait partie de la société
pendant trois années consécutives; cependant, si avant l'expi
ration de ce délai, il est fait une demande suffisamment mo
tivée,un secours exceptionnel peut être accordé. »
Sans doute la prévoyance et la m utualité sont la base de notre
institu tion , il faut avoir donné pour recevoir; nos statuts lais
sent cependant la voie ouverte à la bienfaisance.
MM. les docteurs S eux, M érentié et B roquier ont bien voulu
se charger de vous faire des rapports spéciaux sur les im portantes
questions form ant les paragraphes 5, 5 et 7 de l’ordre du jo u r
de cette séance, je n ’ai pas h m ’en occuper et je passe à la ques
tion du charlatanism e et de l’exercice illégal de la m édecine;
j'ai à vous parler d ’abord des résultats obtenus.
Dans votre d ern ière assem blée, vous aviez adopté les résolu
tions suivantes :
1° L ’association est d ’avis de poursuivre énergiquem ent le
charlatanism e et l'exercice illégal de la m édecine.
2 “ La com m ission adm inistrative est invitée a prendre toutes
les m esures q u ’elle jugera utiles dans ce but et spécialem ent
pour obtenir une répression judiciaire.
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3* L’assemblée émet le vœu qu'une dem ande soit faite en son
nom , à M. le Sénateur chargé de l’adm inistration du dép arte
ment des B ouches-du-R hône, pour le prier de faire cesser les
annonces et les affiches qui sont de nature h trom per la crédulité
publique et notamment celles qui ont pour but de p rô n er des
rem èdes secrets ou des traitem ents em piriques convenables
pour toutes sortes de maladies.
Votre commission a voulu rem plir son m andat et elle croit
l’avoir fait avec indépendance, et je dis m êm e avec succès.
Les résultats obtenus se rapportent à trois chefs principaux :
1. Les affiches médicales dont nous avons obtenu la su p
pression.
2. La vente des remèdes secrets ;
5.
L’exercice illégal proprem ent dit de la m édecine et dé la
pharm acie.
S ur le 1er chef, h la date du 17 avril 1862,1a pétition que
vous nous aviez chargé de transm ettre à M. le S énateur, chargé
de l’administration du départem ent, lui était adressée en votre
nom par votre Président et votre secrétaire. Le 2 9 avril, nous
recevions la réponse suivante:
M onsieur le Président,
J'ai l’honneur de vous inform er q u ’cn suite de la pétition que
vous avez adressée à M. le S énateur, chargé de l’adm inistration
du départem ent des B ouches-du-R hône, le 17 courant, dem an
dant la suppression des affiches m ensongères que certains char
latans répandent à profusion à Marseille pour exploiter la créd u
lité publiq u e, ce m agistrat a décidé le 26 de ce mois q u ’aucune
de ces affiches ne serait plus placardée sur les m urs de la ville.
J'ai, de mon côté, donné des ordres précis à m es agents afin
qu'ils puissent em pêcher l’apposition de ces alliches et j ’ai en
même temps prévenu les afficheurs q u ’ils seraient poursuivis
conform ém ent aux lois, s'ils affichaient une alliche quelconque
sans mon autorisation.
Agréez, M. le Président, l’expression de m es sen tim en ts
très distingués.
Le com m issaire central,
Marsal.
P u is, quelques mois plus tard, les affiches ayant rep aru ,
quoique sous une forme plus m odérée et plus décente, nous
avons fait une nouvelle dém arche auprès de M. le S énateur et
nous en avons reçu la réponse que je vais avoir l’h o nneur de
vous lire :
M arseille, le 14 décem bre 1861.
M o n sie u r ,
J’ai reçu la lettre par laquelle vous m ’avez signalé certains
individus com m e exerçant illégalem ent l’art de g u érir ou pre
nant le titre de m édecin sans en avoir le droit.
Je ne puis que vous rem ercier de cette com m unication. J ’ai
donné les ordres nécessaires pour la répression de ces abus et
M. le com m issaire central a été invité en m êm e tem ps a p o rter
une attention particulière su r les affiches que certains industriels
font apposer dans la ville de Marseille.
Recevez , M o n sieu r, l’assurance de m a considération dis
tinguée
Le S énateur, chargé de l'adm inistration d u
départem ent des B o u ch es-d u -R h ô n e,
DK MAUPAS.
A M onsieur Bartoli, Président de l’Association des M édecins
des B ouches-du-R hône.
Ainsi donc su r ce point victoire com plète cl nos regards ne
sont plus offensés par ces m ensongères réclam es qui avaient
trop longtem ps outrag * la m orale publique elle-m êm e.
Ce résultat, vous le voyez, m essieurs, nous le devons au p re
m ier m agistrat du départem ent dont la sollicitude sait s’éten d re
ii tous les intérêts. Je vous propose de consacrer par nue déli
bération spéciale notre reconnaissance pour le service im p o rtan t
ren d u par cet ém inent fonctionnaire à la dignité de n o tre p ro
fession.
P our la vente des rem èdes secrets, quatre ju g em en ts, rendus
su r les poursuites de M le procureur im périal, ont consacré
l’application de la loi qui la prohibe. Vous savez que l’an n o n ce
ou la vente des rem èdes secrets,quels q u ’ils soient, sont form el
lem ent interdites et que l’on entend par rem èdes secrets tous
ceux dont la form ule n'est pas inscrite au codex , ou qui n ’ont
pas été approuvés par l’acad m ie de m édecine ou autorisés par
le m inistre de l’agriculture et du com m erce.
E nfin, pour l’exercice illégal de la m édecine et de la pharm a
cie, je puis vous donner le relevé exact des condam nations pro
noncées pendant le dernier exercice ; elles s’élèvent à 2 4 et
com p ren n en t un total de 26 8 0 fr. d ’am ende et d’un m ois et 16
jo u rs de p rison, plus les dépens, soit une m oyenne de 115 fr.
d ’am en d e et de deux jours de prison. La condam nation m axi
m um a clé pour l’am ende 650 fr. et pour l’em prisonnem ent un
m ois. La condam nation m inim um a été de 25 fr. d’am ende.
*
�— 11
« N ous devons signaler un arrêt de la Cour de Colm ar, du
c)7 m ai 1862, qui nous parait violer les principes essentiels.....
il eût été déféré à la Cour Suprêm e, il eût été inévitablem ent
cassé. Deux fem m es de Belfort étaient poursuivies pour co n tra
vention a la loi du 19 ventôse an X I, parce q u ’elles vendaient et
conseillaient un spécifique pour les douleurs dont l’emploi était
tout extérieur. La cour les a ac quittées par le m otif que les laits
relevés ne constituaient pas l’exercice illégal de la m édecine.
Mi Me Amiral ajo u te; Cet arrêt est contraire à la Ju risprudence
et notam m ent aux arrêts de Cassation des 2 4 décem bre 1852 et
27 mai 1854 ; toute im m ixtion quelconque dans f a r t de guérir,
tonie prescription d’un rem ède externe ou in tern e, inoffensif
ou non, constitue incontestablem ent l’exercice illégal. N ous ne
nous <tendrons pas davantage sur un point certain, nous avons
dû seulem ent signaler l’erreu r de la cour de Colmar pour éviter
que son arrêt ne soit su iv i.... etc., e tc ...
N ous ne devons pas reg retter d ’avoir pris condam nation si,
com m e on nous l’assure, le courant de m alades qui se portait
chez M ... se porte ailleu rs; et si c’est chez un m édecin, tant
m ieux, la santé publique a retrouvé ses garanties et le résultat
que nous poursuivions a été o b ten u ...
J ai encore à vous parler d’un autre in su ccès; c’est dans une
poursuite intentée par M. le P rocureur Im périal de Tarascon,
contre un sieur R ... exerçant à Arles en com pagnie d’un offi
cier de sain é, le nom m é G ... et en récidive de laits qui lui
avaient valu une prem ière condam nation.
C ontre to u te atten te, le tribunal de Tarascon qui avait déjà,
l’année précédente, condam né cet em pirique, l a acquitté dans
cette deuxièm e poursuite et nos confrères d’Arles intervenant
aux débats com m e parties civiles ont été condam nés aux dépens;
su r l’appel du m inistère public et de la partie civile, la cour
d ’Aix a sanctionna la décision des prem iers juges. N ous avons
adressé su r cette affaire un rapport très détaillé au conseil gé
néral de l’association générale en lui dem andant la m arche à
suivre pour faire cesser les faits dont les m édecins d’A rles se
préoccupent à si ju ste titre ; nous espérons recevoir incessam
m en t une réponse.
Ces deux m alheureuses affaires ont porté à nos finances un
assez rude coup ; m ais cependant en présence des résultats con
sidérables obtenus dans l’ensem ble de la cam pagne, il n’y a pas
trop beu de se plaindre.
M aintenant, m essieu rs, que re ste -t-il à faire? Les principes
qui nous ont arm és contre lex ercice illégal et le charlatanism e
sont toujours debout ; ils ont reçu la sanction de 1 expérience
cr. i
S u r les 21 individus, nous rem arquons une sage-fenune
donnant des c o n s u ltio n s et vendant des rem èdes; trois officiers
de santé vendant des rem èdes ; deux pharm aciens donnant des
consultations, un herboriste, un vétérinaire, un charretier, un
cultivateur, un pédicure, un tailleur de pierre, un rentier, une
rentière, un porteur de contraintes, un p rêtre, etc. ; vous le
voyez, m essieurs, tout le monde s'en est m êlé.
A celle énum ération, il me serait facile d 'ajo u ter encore
quelques nom s d'individus qui ont échappé par la fuite aux
poursuites dont ils étaient l'objet.
Notre société est intervenue com m e partie civile dans deux
de ces poursuites. La l ro fois contre un nom m é Lépine, phar
m acien-chim iste, se disant o p h talm o lo g iste «pii, après avoir
été déjà condam né en 18(50, avait cru pouvoir continuer sa
pratique illégale en ouvrant une pharm acie et en s ’adjoignant
comm e complice un médecin étranger, autorisé à exercer eu
France. Ces précautions n ’ont pas em pêché de nouvelles pour
suites et cet industriel a fini par disparaître de la scène après
uue seconde condam nation.
Dans la 2"10 affaire où nous som m es intervenus, le tribunal
de Marseille avait alloué les dépens ( our tous d om m ages-inté
rêts ; sur notre appel, la Cour lmp riale d’Aix a réform é le
jugem ent de Marseille, sur l'habile plaidoirie de Me M istral,
avocat, et les conclusions de notre avoué, M* G ras, et a adjugé
200 fr. de dom m ages-intérêts, ag ravanl ainsi lu peine infligée
par le tribunal correctionnel.
Mais, Messieurs, je vous entends me dire : vous nous parlez
à la ise de vos succès et vous oubliez peut-être vos éch ecs? Je
vous ai com pris, je vais vous parler de l'affaire I..... C’est vrai,
un jugem ent du tribunal de Marseille et un arrêt de la C our
Im périale d Aix ont établi, contre notre croyance, «pie M .... ne
faisait pas la m édecine..... Si nous nous som m es trom pés, nous
n'étions pas seuls dans l’erreur ; M. I avocat-général qui a porté
la parole devant la Cour dans cette affaire, a pris des conclusions
qui nous ont été de tout point favorables
Mais je ne veux et je ne dois pas en trer dans plus de détails;
quand la justice a parlé, il est de notre devoir de nous incliner.
Nous aurions pu, il est vrai, recourir à une troisièm e ju ri
diction, celle de la Cour Suprêm e et notre pourvoi eût eu les
plus grandes chances de succès; c’est du m oins l'opinion de
Me Paul Andra!, le savant et zélé conseil de l'association g é n é
rale qui, à propos d ’un arrêt de la Cour de Colm ar dont l’ana
logie avec celui de la Cour d’Aix parait frappante, s’exprim e
ain si, page 152 de l’Annuaire de 1865 :
�— 13 —
et le baptême dit feu Nous devons leur rester fidèles ; ce sont
toujours les intérêts de la santé publique qui nous sont confiés,
c'est toujours pour nous un devoir de les défendre.
Et proclam ons-le hautem ent, nous ferions taire ici volontiers
notre ressentiment bien légitime d’ailleurs, contre les atteintes
graves portées à nos intérêts et à la dignité de notre profession
par ces vils spéculateurs qu’on nom m e charlatans, si nous
n ’avions aussi pour mission de sauvegarder la société contre leurs
condamnables et dangereuses pratiques.
Continuez à votre commission le mandat que vous lui avez
déjà donné; elle ne faiblira pas plus dans l'avenir que par le
passé, à b accomplissement de sa tâche.
D’ailleurs, la voie est facile, elle est toute tracée, soit par
l'association générale, soit p a rle s autres sociétés locales; nous
n avons pas à aller au delà , mais aussi nous ne devons pas re s
ter en arrière.
En terminant ce que j ai ii vous dire sur le charlatanism e, je
dois vous signaler un résultat obtenu ces jo u rs derniers. Plu
sieurs d’entre vous avaient sans doute rem arqué celle boutique
du Cours où, sous le couvert d ’un diplôm e de docteur et d.e la
main d'une femme ignorante, se débitait à tout venant l’électri
cité, ce précieux, mais terrible agent thérapeutique. I a boutique
a été fermée à la suite d’une enquête ordonnée par M. le p ro
cureur impérial et sur notre réclamation.
A notre ordre du jour, figure une proposition relative à la
distribution gratuite de l'annuaire de l’association générale.
Cette publication olfre le plus vif intérêt, c’est le code de n o tre
association ; il est utile de la populariser. Q uelques sociétés
locales la distribuent gratuitem ent à tous leurs m em bres. V otre
bureau, saisi d’une proposition pareille, n ’a pu s'y associer, vu
I état de pénurie de nos finances, m ais il vous recom m ande l’ac
quisition de cet intéressant recueil dont des exem plaires seront
tenus à votre disposition par votre secrétaire.
Enfin, Messieurs, notre réunion se term inera par le ren o u
vellement d’une partie du bureau.
M. Bartoli a donné sa démission de Président; plus que p er
sonne, j ’ai été témoin de son dévouem ent à notre œ uvre, et plus
que personne, je com prends les regrets que sa retraite laissera
parmi vous
Le Président est nommé par l’E m pereur, mais l’assem blée a
le droit de présentation.
M. Chevillon jeune a cru devoir donner aussi sa dém ission
de m em bre de la commission adm inistrative ; vous regretterez
certainem ent la déterm ination prise par notre honorable confrère
qui se trouve dès lors à rem placer.
O utre cette vacance, il y en aurait deux autres aux term es
des statuts qui portent à 12 le nom bre des conseillers qui n ’a
été que de 10 ju sq u ’à présent. Il a paru utile au B ureau, dans
sa séance du 22 août, de vous proposer d ’y pourvoir, à raison
des attributions m ultiples qui incom bent à la com m ission.
E t en lin , m essieurs cl clicrs confrères, l’état de ma santé ne
me p erm ettan t pas de continuer m es fonctions de secrétaire,
je vous prie d’agréer, avec ma d ém issio n , tous m es regrets de
ne plus pouvoir coopérer aussi activem ent que par le passé à
la grande œ uvre dont je désire rester un adhérent dévoué.
Me voici arrive au term e de m on travail. Le Bureau aurait
pu vous faire encore d’au tres com m unications qui certainem ent
vous auraient intéressés, m ais aujourd’hui, l’ordre du jour parait
suffisam m ent chargé et à chaque jo u r sullil sa tâche. Et d ’ail
leurs, chacun de nous a droit d’initiative pour form uler scs
propositions et ses vœux.
Le cham p est vaste, en effet, et si nous le cultivons coura
geusem ent et avec persévérance , il se couvrira , soyons en
convaincus, d’abondantes et de riches m oissons.
O ui, m essieurs, I association tiendra tout ce qu’elle a prom is
et clic vous rendra avec usure pour votre dévouem ent et votre
fidélité à son drapeau, tout ce que vous êtes en droit de lui de
m an d er: assistance, protection, m oralisation.
Ce com pte-rendu reçoit l'assentim ent de l’assem blée.
Avant de donner la parole à M. Seux pour la lecture de son
rapport sur le projet de création d’une caisse de retraite , M. le
P résident consulte l'assem blée au sujet des propositions d ’ad
m ission des nouveaux m em bres qui ont été faites par M. le
secrétaire au nom du bureau. Ces propositions sont accueillies
sans la m oindre opposition.
M. Seux expose que la prem ière idée de la création d ’une
caisse de retraite, ayant été ém ise par la Société locale de la
G ironde , le Conseil général de l’Association générale s’en est
ém u et a élaboré un projet qui est m is à l'étude dans toutes les
sociétés localeset qui sera soum is à la délibération de la prochaine
assem blée générale annuelle , tandis que la société d e là Gironde
sollicite la création de caisses locales devant s’alim enter par
une cotisation supplém entaire obligatoire, et qu elle fixe à huit
francs par an.
L’Association générale propose une caisse centrale q u ’elle
dote i° par une prem ière mise de fonds de 3 0 .0 0 0 IV., fournie
par la caisse de ! Association générale ; 2° par un prélèvem ent
annuel de 6 ,0 0 0 IV. sur la m êm e caisse ; 5° par le versem ent
�—U —
15 -
annuel de l’excédant de l’avoir de l’Association générale au delh
de la somme de 50,000 fr., qui constituera le m axim um de son
fonds de réserve.
La Société de la Gironde et le Conseil général de l’A ssociation
générale com ptent l’une et l'autre sur des dons et legs laits au
profit de la caisse de retraite et sur les intérêts accum ulés des
capitaux qui y seront versés. — L ’honorable rapporteur propose
une caisse locale, indépendam m ent de celle que l’Association
générale pourra créer, si elle le juge utile ; mais au lieu d ’une
cotisation supplémentaire obligatoire , il adopte , à l’exem ple
de la Société locale du Cher, une cotisation supplém entaire
facultative, il a la conviction intim e que tous ceux qui le po u r
ront, ajouteront à leur cotisation annuelle, l’un un peu plus,
l’autre un peu moins, chacun selon la m esure de ses forces.
La communication de M. Seux donne lieu à une discussion à
laquelle prennent part plusieurs m em bres de l'A ssem blée, et qui
se term ine par la prise en sérieuse considération du rapport et
du projet qui le suit et son renvoi à une assem blée générale
ultérieure.
M. M érentié avait été invité par la com m ission adm inistrative
à faire un rapport sur les sociétés de secours m u tu e ls, co n sid é
rées dans leurs relations avec le corps m édical. Celte question
qui intéresse a ju s te titre tous les m édecins, parce q u e lle touche
à la fois aux intérêts moraux et m atériels de la profession, a été
soumise par l’association générale à une vaste en q u ête dans
toutes les sociétés locales ; ce sont partout les m êm es doléan
ces, partout les mêm es griefs : Extension de l’association des
classes ouvrières aux classes aisées ; rém unération des soins
médicaux insuffisante et souvent dérisoire ; m onopole du service
médical au profit de quelques privilégiés et au détrim ent de la
profession toot entière ; difficultés du service, par rapport aux
distances dans les grandes villes et aux exigences des sociétaires
qui ne sont que trop souvent en raison inverse avec l’infériorité
de la rém unération, etc., etc.
Partout on a aussi cherché des rem èdes a cet état de choses ;
diverses solutions ont été proposées. Le rapporteur voudrait que
l’entrée des sociétés lut réservée aux classes ouvrières et n éces
siteuses ; il est partisan de la pluralité des m édecins ; à côté du
système de l'abonnem ent, seul mode adopté a Marseille, il vou
drait qu on essayânaussi du paiement par visite qui lui parait
mieux sauvegarder la dignité professionnelle.
•
11 affirme d une m anière énergique le droit q u ’ont les m éd e
cins de lutter contre les atteintes portées a leurs intérêts par les
sociétés de secours m utuels.
Ce droit, M. Davenne l’a proclam é hautem ent dans son rap
port de l’année dernière ; les sociétés m édicales ont le droit de
traiter de puissance à puissance avec les sociétés de secours
m utuels, sans q u ’on puisse leur opposer le reproche de coali
tion, etc.
Il est tem ps d'aviser et le m eilleur moyen d’arriver h une so
lution dans celte question com m e dans tant d ’au tres, c’est l'en
tente des m édecins, c’est l’association.
Caveant consoles, s’écrie en term inant l’honorable rappor
teur.
C elte lecture est écoulée et accueillie avec la plus vive
sym pathie.
La discussion qui s’ouvre sur ce rapport, se term ine par le
renvoi à une com m ission spéciale qui devra étu d ier sérieuse
m ent la question.
La parole est donnée à M. Broquier pour la lecture de son
rapport sur le projet de création d un journal.
M. B roquier expose les m otifs qui ont suggéré à la com m is
sion l’idée de la fondation d’un journal. Les considérations qu'il
lait valoir ont été développées à la préface.
Il propose pour dim inuer les charges qui incom beront à la
caisse de l’association d’adm ettre les annonces, à l’exem ple de
plusieurs journaux de P aris; su r la proposition de quelques
m em bres, l’assem blée générale rejette celte proposition.
L es autres propositions du rapport sont m ises aux voix et
adoptées :
1. La société locale des B ouches-du-R hône crée un journal ;
2. Ce journal portera le titre Union jnédicale de la Provence,
5. 11 paraîtra une fois par m ois, par num éro d 'u n e feuille
d ’abord, et deux feuilles s’il y a lieu.
L II sera sous la direction d ’un com ité de publication ;
5. Le com ité de publication sera com posé de six m em bres,
pris m oitié dans la com m ission et m oitié parm i les m em bres de
l’association ;
6. Le prix de l’abonnem ent sera de 6 fr. par an. Les m em bres
de l'A ssociation le recevront m oyennant un supplém ent de co
tisation de 4 fr.;
7. L’excédant des recettes com m e le déficit incom bera à la
caisse.
L’ordre du jo u r appelle ensuite le renouvellem ent d’une
partie du Bureau.
M. Seux, m édecin en chef des hôpitaux et professeur à l'école
de m édecine, est désigné com m e le candidat a la présidence en
rem placem ent de M. B arloli, par 21 suffrages, sur 50 volants.
�— 10 —
M. Bernard, chirurgien en chef des hôpitaux, en a réuni 15.
MM. Lisle, Ghapplain et Chaumery sont nom m és m em bres
de la commission administrative.
M. le secrétaire retire sa démission sur la dem ande qui lui en
est faite par un assez grand nom bre de ses confrères.
Il y avait encore à procéder h la nom ination des m em bres du
comité de publication du journal, mais vu l’heure avancée, l’as
semblée délègue ce soin à la commission adm inistrative.
Enfin, avant de se séparer, l'assem blée voulant donner un
témoignage de sa reconnaissance et de ses regrets à M. B artoli,
président démissionnaire, qui a contribué d’une m anière si ellicaceà l’organisation de la Société et qui n ’a cessé d ’en servir les
intérêts avec zèle et dévouem ent, crée en sa faveur et lui confère
le titre de président honoraire.
La séance est levée à sept heures.
NÉCROLOGIE.
Le corps médical de Marseille a fait tout récem m ent une
perte très regrettable. M. le docteur Melchior R obert, professeur
suppléant à l'école de m édecine, chirurgien en chef des hôpi
taux, m embre titulaire de la Société Im périale de M édecine et
de l'Association générale des m édecins — arrondissem ent de
Marseille — a succombé jeune encore (43 ans), à une longue
et douloureuse maladie , alors qu'il arrivait enfin a recueillir
le fruit de ses études, de son expérience et de son intelligente
activité.
Issu d’une famille honorable du départem ent des BassesAlpes, après s’être fait rem arquer au collège par d 'h eu reu ses
dispositions cl une application soutenue, M. Melchior Robert
commença ses études médicales à Marseille et figura avec d is
tinction parmi les élèves internes de notre H ôtel-D ieu. A yant
plus tard concouru à Paris pour l’internat, il réussit et fut e n
voyé à l'hôpital de la Pitié, dans le service de Lisfranc, où sa
coopération ne lu t pas inutile (dans les lim ites de ce qu'on pou
vait exiger d ’un jeune interne des hôpitaux) à la publication
des prem iers livres du Précis de Médecine opératoire de l’habile
chirurgien en chef de la Pitié.
Ce n ’est toutefois q u ’à 1' hôpital du Midi et sous la direction
im m édiate de M. Ricord, que notre reg retté confrère révéla ses
tendances et ses aptitudes pour la spécialité qu'il devait em
brasser avec autant d ardeur que de succès. Doué d ’une im agi
nation assez, vive, et prom pt à s’enthousiasm er , il eût été
difficile à M. M elchior R obert de se soustraire à l'influence
fascinatrice d ’un enseignem ent auquel les esprits les plus pré
venus, voire m êm e les plus sceptiques, n ’ont jam ais pu rester
indifférents. A ujourd’hui encore, loin du théâtre où l’école du
Midi a joui de ses plus beaux et plus légitim es triom phes, la
parole de M. Ricord a un pouvoir peu ordinaire su r son audi
to ire ; m ais ceux-là seuls qui ont adm iré et applaudi cette
parole dans la période com prise entre 1832 et 1 8 6 0 , peuvent
avoir une idée de l’entrainem ent doctrinal qui était dévolu, sans
réserve, à un pareil m aître.
Dès son arrivée à l’hôpital du Midi, M. M elchior R obert ne
chercha donc pas à s’affranchir de 1 influence du chef d ’école
pour lequel, à l'exem ple de tant d’au tres, il éprouva bientôt
au tan t d ’adm iration que de dévouem ent. Ce dévouem ent et
celte adm iration ne se sont jam ais dém entis depuis. E l ,
chose digne de rem arq u e, de tous les disciples d e M . R icord,
M. M elchior R obert était le seul p eu t-être qui, ju sq u ’à son
dernier jo u r, se fût refusé à une réform e sérieuse des anciennes
croyances de l’hôpital du Midi. C ’est ainsi qu il était resté
uniciste alors q u eM . Ricord ne l'était plus.
Parm i les quelques publications de M. M elchior R obert, la
d ern ière et la plus im portante est, sans contredit, son Nouveau
Traité des maladies vénériennes qui a paru en 1861 et qui
reproduit, avec de nom breuses et im portantes additions , le
prem ier ouvrage de l ’auteur publié en 1855. Ces additions en
�ont fait un travail nouveau , <|iie l’on peut considérer com m e
un des plus complets sur la m atière ; exception faite pourtant
du livre de Vidal (de Cassis) : encore un ancien élève de notre
Hôtel-Dieu, dont la haute intelligence et la valeur scientifique
n’ont été sérieusem ent et loyalement appréciées que lorsqu’il ne
pouvait plus, h ‘las! recevoir le prix de ses labeurs.
M. Melchior R obert, nom m é en 1859, professeur su p p lé an t
à fécole de médecine et de pharm acie de M arseille, devait au
concours son admission comme chirurgien des hôpitaux civils
de la même ville. Il inaugura honorablem ent 1ère des co n co u rs
en 1856 ; et nous ne saurions m ieux peindre la bonté et la
loyauté de son caractère qu’en publiant le fait suivant dont il
nous est tout particulièrem ent perm is d'allirm er l’ex actitu d e.
A c e concours de 1856, deux seuls candidats s’étaient fait
inscrire ; et si l'on reconnaissait à M. Melchior R obert une
instruction de bon aloi, on n ’ignorait pas que son com pétiteur
possédait, avec non m oins d’instruction, une grande facilité
d’élocution et une certaine m éthode pour bien et élégam m ent
exposer ses idées.
Une circonstance pourtant assez im portante dans l’espèce,
— puisqu’il s'agissait d’un concours de chirurgie, — pouvait
encore ram ener les chances en faveur fie M. M elchior Robert ;
c ’était sa dextérité naturelle, et une connaissance aussi exacte
que variée des procédés opératoires.
Eh bien! quelques jours avant d 'e n tre r en lic e , les deux
candidats voulant répéter à l'am phithéâtre les principales o p é
rations que l’urne du jury pouvait leur dem ander, M. M elchior
Robert se chargea lui-m êm e de diriger la m ain, m oins expé
rim entée que la sienne, de son com pétiteur, fournissant ainsi et
tout spontaném ent les arm es avec lesquelles on pouvait le
battre,et sans songer que son avenir à lui se trouvait engagé dans
le com bat. Fort heureusem ent , il n ’y eut pas de vaincu ■
les épreuves furent telles que le jury dut désigner ex œquo
les deux candidats au choix de l’adm inistration ; et ils furent
nom m és tous les deux.
Voilà com m ent M. M elchior R obert com prenait et pratiquait
la confraternité ; et on pensera com m e nous que de pareils
exem ples ne peuvent ni ne doivent rester dans l’oubli.
En I8G0, M. M elchior Robert fut appelé au conseil m unici
pal de M arseille par 1!2,Ô00 suffrages. A im ant l’ord re autant
que le progrès, et «loué d'un caractère assez heureux pour se
contenter de tout progrès réel, fut-il lent, notre reg retté con
frère apporta toujours un concours loyal et éclairé à l’adm inis
tration. Aussi a -t-o n trouvé tout naturel que M. le m aire de
Marseille n ’ait pu se conform er trop scrupuleusem ent aux
dernières volontés de M. Melchior R obert qui avait exprim é le
désir q u ’aucun discours ne fût prononcé sur sa tom be.
Au nom de ses concitoyens, l'honorable M. Rouvière a voulu
dire un dernier adieu à son ancien collègue; et dans cette triste
circonstance son cœ ur a trouvé des expressions dont la fam ille
et les am is de M. Robert garderont un reconnaissant souvenir!
S -P .
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
Les concours annnels de nos hôpitaux pour la nom ination des
élèves in tern es et externes,ont eu lieu dans le m ois de décem bre.
O nt été nom m és :
Internes : MM M athieu, Chevalier, M arcorelles , L om bard,
d ’H urlaborde.
E xternes : MM. Jaillieu, T raslo u r, R evertégat, B ru n , Nicolas,
Poucel, Isoard.
— M. Isoard, élève in tern e, so rtan t d’exercice, a été nom m é
chirurgien interne à l’hospice de la C harité.
�— M. le docteur Broquier a été nom m é chirurgien en chef
des hôpitaux, en remplacement de M. R obert, décédé.
LES MÉDECINS ET LES SOCIÉTÉS DE SECOUES MUTUELS
— Par décret du IN novem bre, ont été nom m és P résid en ts
des sociétés de Prévoyance et de Secours m utuels, agrégées à
l’association générale des m édecins de France :
Pour le département des B ouches-du-R hône, M. le do cteu r
Seux, professeur à l'école de m édecine, m édecin en chef des
hôpitaux de M arseille, en rem placem ent de M. Bartoli ,
démissionnaire.
Pour le départem ent d° Vaucluse, M. B onrbousson, chevalier
de la Légion-d’Honneur.
Pour le départem ent du Var, M. Théus, m em bre du Conseil
Général.
A propos du
— Un travail sur les relations des m édecins avec les sociétés
de Prévoyance et de Secours m utuels, a été lu dans le conseil
d’adm inistration par notre confrère le docteur M ittrc. Les p rin
cipales dispositions de ce travail ont reçu l’approbation du
conseil et celle des présidents form ant le grand-conseil des
sociétés. Dans un de nos prochains num éros, nous publierons
ce travail et nous ferons connaître les résultats que nous aurons
obtenus.
— Par jugem ent du tribunal civil (cham bre correctionnelle),
en date du 27 novembre dernier, le nom m é Garibo A n to in eCharles , tailleur à Endoum e, quartier S aint-L am bert, a été
condam né à trois mois de prison et 15 fr. d am ende et aux frais
pour exercice illégal de la in ?decine. La poursuite avait été in
tentée à la suite d’une plainte déposée au parquet par le
bureau de l’association.
Appel a été interjeté. Nous donnerons connaissance de l'a rrê t
de la Cour.
Le Comité de Rédaction.
— lmp. Via1, me T iar» . 8
RAPPORT DK S. E. EK MINISTRE DE L’INTERIEUR.
Le Corps Médical suit avec beaucoup d ’intérêt le développe
ment des Sociétés de secours m utuels qui, sous I im pulsion
puissante du gouvernem ent, se sont m ultipliées d ’une m anière
considérable. Associés eux-m êm es, les m édecins com prennent
l’im portance de celte grande idée d'association, et appellent de
leurs vœux le m om ent où, unis dans une m êm e famille, ils ne
laisseront plus une infortune sans la soulager. Mais ce n’est
pas seulem ent leur association propre qui les in téresse, ils
sont partie intégrante de toutes les sociétés de secours m utuels,
ils sont le centre autour duquel elles viennent se grouper.
Le jo u rn al, organe de l'association des m édecins des Bouchesd u -R h ô n e, ne pouvait laisser passer, sans y attacher l'im p o r
tance qu'il m érite, le rapport si rem arquable que Son Excellence
le M inistre de l'In térieu r vient d'adresser à Sa Majesté l ’E m pe
reu r, et qui se trouve contenu dans le Moniteur du v in g t-h u it
décem bre.
Le prem ier résultat constaté est le développem ent progressif
des sociétés. Au 31 décem bre 1802, on com ptait 4 ,5 8 2 sociétés
de secours m u tu els, 172 de plus que l’année précédente à la
m êm e époque. Le nom bre des associés s est augm enté de
5 5 ,0 9 8 m em bres, dont 4 ,8 9 0 honoraires et 2 8 ,8 0 8 partici
pants. Le total des m em bres était à la m êm e époque de 0 3 9 ,0 4 4 ,
dont 75,881 honoraires et 5 0 5 ,1 6 5 participants, divisés en
4 7 8 ,8 5 5 hom m es et 8 0 ,5 0 8 femmes.
Si nous considérons les habitudes qui ont prévalu dans notre
ville, nous devons croire que la statistique donnée par le Moni
teur est incom plète, et que les chiffres indiqués sont loin de
*
�- 25 représenter la somme loLilo dos individus co n stitu an t le per
sonnel des sociétés. La plupart des associations tonnées a Mar
seille, pour fournir des secours aux populations ouvrières, ne
portent comme associé que le chef de la famille. En. e lïe t, lui
seul verse la cotisation, lui seul, pendant les tem ps de m aladie,
reçoit une indem nité, mais la famille participe dans une certaine
mesure aux bénéfices de f association. Elle reçoit les visites du
médecin et, si elle ne compte pas comme charge sociale , elle
devient l él ment le plus on ce u x , si on la considère au
point de vue des soins m alicaux.
Cette adjonction de la famille augm ente d’une m anière fort
im portante le chitlre des individus composant le personnel des
sociétés. P our l'apprécier même approxim ativem ent, il faudrait
connaître le nombre des sociétés dans lesquelles les fam illes
sont comprises et celles dans lesquelles on ne com pte que le
chef, que l’ouvrier. Mais là où la famille est com prise, et c’est
ce que l'on rencontre dans la plupart des sociétés marseillaises,
il faut que le nom bre des participants sc m ultiplie par q u atre et
par cinq, suivant le nom bre d enfants dont se com pose ch aq u e
ménage.
Chaque société com prend en moyenne cent v in g t-tro is p e r
sonnes. Le traitem ent des m édecins qui y sont attachés s’élève
également en moyenne à 255 francs par an. Par conséquent c'est
une somme de 2 francs que paye au rn decin chaque sociétaire,
en défalquant les m em bres honoraires. Cette rétribution déjà si
minime s’am oindrira encore là où la famille entière fera partie
de I association. Elle dim inuera encore lorsque les m em bres
honoraires viendront, eu prolitant du bénéliee que l’association
leur confère, réclamer les soins du m édecin de la société.
Le nom bre des malades a été de I f2 ,0 2 8 , soit du quart envi
ron des associés. Les frais de maladie sc sont élevés à 8 francs
par malade, et si l’on exam ine le nom bre de jo u rn ées de m ala
dies propres au chef de famille, on voit qu ’elles se sont élevées
à 2 ,8 7 7 ,9 9 2 , et com ptent pour 35 centim es, relativem ent aux
frais tie médecin.
L'exem ple que les m édecins ont suivi tém oigne hautem ent
tpi ils sont sym pathiques aux idées d association. Avec une rede
vance légère, l’ouvrier est certain de couvrir toujours la dépense
que va en traîn er une m aladie plus ou m oins longue. Il n ’a plus
à calculer su r ce terrible inconnu, non seulem ent pour lui, mais
encore pour sa fem m e et ses enfants. Bien p lu s, la cotisation est
pour lui un placem ent. Q ue la m aladie le retienne dans son lit,
il reçoit im m édiatem ent une indem nité qui en m oyenne a été de
1 franc 10 centim es par jo u r. Ces résu ltats sont trop avantageux,
trop im portants pour q u ’ils n ’appellent pas la faveur de to u s;
aussi voyons-nous, par le nom bre si considérable des m em bres
honoraires, com bien les chefs d ’usines, d ateliers, favorisent ces
tendances à l’association dans la classe ouvrière.
La sym pathie réelle que nous ressentons pour les sociétés de
secours m utuels ne peut nous em pêcher d ’exam iner la position
q u ’elles font an m édecin. N ous ne dirons rien qui ne soit adm is
de tout le m onde, en constatant les sentim ents de philanthropie,
de charité qui sont répandus dans le corps m édical. Que le m é
decin s’appelle Velpeau, N élaton, T rousseau. Rayer ou bien
que son nom soit le plus obscur parmi nos confrères, tous con
sacrent aux soins des indigents une partie fort im portante de
leur tem ps. Ce sont les visites de 1 hôpital, des bureaux de b ien
faisance, de la M iséricorde, etc., etc. Dans ces établissem ents,
créés pour le soulagem ent des individus soum is à la bienfaisance
p u b liq u e, les services sont g ratu its, et les adm inistrateurs qui
les dirigent savent que l'indem nité qu elles allouent au médecin
couvre à peine les frais q u ’il est obligé de faire pour se tran s
porter dans ces établissem ents hospitaliers, ou bien au dom icile
des m alades pauvres.
Mais ce sont là des p au v re s, des gens qui ne possèdent rien,
qui ne trouvent des secours q u ’à l'aide des sacrifices que s'im p o
sent les com m unes, les d ép artem en ts, les associations de bien
faisance. A ces pauvres, à ces m alheureux, les soins du m édecin
n ’ont jam ais m anqué. Mais ce dévouem ent, cette abnégation, ce
�désintéressem ent, à quel degré doit-il clrc nais au service des
sociétés de secours m utuels ?
Les associations ouvrières, par le fait même de l’asso ciatio n ,
se soustraient h la prem ière condition de l’indigence, l'iso le
ment. Certain d ’être soutenu par se* collègues, l'associé n ’a
plus h craindre la terrible perspective d ’une longue m aladie,
dévorant ses économ ies. Le médecin ne se trouve plus en p r é
sence de la m isère, de l’indigence, il n ’a pins h prodiguer ses
soins à litre de charité. Un contrat doit s’établir en tre lui et
la société; quelles en seront les bases? Elles devront se tro u v e r,
d’une part dans la position financière du client et. d ’au tre p a rt,
dans l’appréciation des services rendus. A l'o u v rier, il faut des
soins intelligents, dévoués Au m édecin, de la considération et
une rém unération équitable. Il ne faut pas que la position réci
proque des parties soit changée, et que celui qui est le m obile
principal de l’association en supporte seul les charges. Il ne
faut pas que I indigence, si indigence il y a , soit la part du
m édecin.
Les sociél s a leur enfance, alors qu'elles se trouvent d ans
les em barras pécuniaires du début, réclam ent à bon droit tous
les secours de leur m édecin; clics touchent ju sq u ’à un certain
point a l'indigence; elles n ’ont pas de réserve. Le m édecin
alors ne doit point leur m archander ses secours. Elles peuvent
lui dire, d’ailleurs, que formées d ’individus dans la force de
l’âge, elles réclam ent peu son intervention. Mais quand a rri
vera la vieillesse, quand le nom bre des m aladies s accro îtra,
que, d ’autre part, les ressources de l’association se se ro n t
accum ulées, à son tour, l’association doit puiser d ’une m an ière
équitable dans la caisse sociale et rém unérer des secours d ev e
nus plus indispensables et plus nom breux.
Le» associations ne sont déjà plus dans U enfance.car les fonds
de réserve, déduction faite des som m es versées à la caisse des
retraites, s’élèvent à la somme de 25 m illions. En présence de
ces résultats si avantageux, ne d evons-nous point réclam er
pour le m édecin une rém unération équitable? En parlant ainsi,
loin de nous la pensée de vouloir trouver pour le m édecin un
élém ent de spéculation dans l’association ouvrière, mais nous
savons aussi qu'il doit trouver dans l’exercice de sa profession
les élém ents d ’une existence honorable. Il ne faut pas qu'un
labeur pénible ne le conduise qu’à la gène.
L’in térêt du corps m édical est inséparable de celui des m as
ses. On a bien souvent discuté I existence des deux ordres de
m édecins : docteurs et officiers de san té, et l’un des principaux
argum ents mis en avant pour la conservation de ces d ern iers
est l'im possibilité pour un grand nom bre de petites com m unes
de fournir des ressources suffisantes à celui qui aura fait des
éludes longues et dispendieuses du doctorat. Q ue I association
se répande dans les cam p ag n es, dans les com m unes ru rales, et
cela arrivera tôt ou tard , car c ’est dans l’in térêt des populations,
quelle sera la position du M édecin ? C om m ent tro u v era-t-il à
vivre là où une population, le m ettan t au niveau des associa
tions a c tu e lle s , lui donnera 2 Ir. par associé? C 'est là un
danger dans l’avenir pour les populations, mais déjà pour les
m édecins la faiblesse de la rém unération est une cause de gêne
et de déconsidération.
C onstatons que les soins donnés par les m édecins ont été
couronnés d ’un excellent résu ltat, car la m ortalité ne s ’est élevée
q u ’à 1,15 pour 100.
L 'institution des pensions de retraite est en progrès. L a s
sem blée générale de l’association des m édecins est en trée dans
la voie de celle institution si utile, en votant la création d ’un
fonds spécial pour les pensions de retraite.
Son Excellence le M inistre exam ine ensuite une question
vitale pour les associations : le renouvellem ent des présidents;
il observe que les présidents nom m és par I E m p ereu r n ’ont pas
été renouvelés depuis leur nom ination, et paraissent investis
d’une sorte d ’inam ovibilité. Le zèle du plus grand nom bre ju s
tifierait ce p riv ilèg e; m ais une nouvelle in v estitu re ne peut
�qu ajouter à leur autorité, tandis que la cerliln le de ne jam ais
être rem placés peut entraîner des inconvénients m ajeurs.
Plusieurs, arrivés à l'âge du repos, dem andent eux-m êm es à
être remplacés.
l a présidence des sociétés de secours m utuels est, en effet,
un des élém ents les plus im portants du succès de ces associa
tions. A ce titre, elle doit présenter des conditions prévues par
Son E xcellence, et qui sont en germ e dans son rapport.
La nomination de l’homme, revêtu de celte prem ière d ig n ité ,
doit être l’expression de la m ajorité de l’association ,
librem ent exprim ée par l'assem blée générale. De m em e
que les m em bres de la société ne peuvent être adm is par la
commission adm inistrative, à plus forte raison les présidents
doivent-ils être élus par tous les m em bres réunis U ne élection
faite au domicile individuel de chacun, par une signature a p
posée soit aux statuts, soit au règlem ent dans lesquels le choix
du président devient un article accessoire, serait évidem m ent
une nomination captée et qui m anquerait de sincérité. L’é lec
tion doit donc être toujours le fait de l ’assem blée g énérale.
La durée du m andat du président, fixée à cinq ans, nous
parait rem plir les conditions les plus favorables. Ce laps de
temps suffit pour établir la stabilité dans la d irectio n ; la réélec
tion, d ’ailleurs, serait la récom pense de celui qui aurait fait
prospérer l’association. L’expiration des cinq ans est le term e
n atu rel, régulier, du pouvoir de l’hom m e qui n’aurait pas rem
pli les espérances q u ’on aurait fondées sur sa gestion.
Un président à vie est un danger pour les sociétés. Elle
établit une trop grande indépendance pour le président, relati
vem ent aux associés; on n ’aura plus contre lui, ainsi que le dit
Son Excellence,alors q u ’il ne sera plus a la hauteur de sa lâche,
que la dem ande de sa destitution. Qui oserait, sans les m otifs
les plus graves, réclam er de sem blables m esures?
L’association languira parce q u ’il n ’y aura plus de confiance
dans la tête El les hommes les plus zélés, ne voulant pas a ssu
mer sur eux la responsabilité rie la dem ande d ’une destitu tio n
devenue n é c e s sa ire , s ’élo ig n ero n t, et l'adm inistration sera
vouée aux plus incapables
Le gouvernem ent de l’E m pereur a parfaitem ent com pris
q u ’il est pour toutes les positions un m om ent où l'hom m e doit
se reposer, c'est l’heure de la retraite? Pourquoi les présidents
des sociétés fo rm eraien t-ils une exception à cette règle g é n é
rale si utile. C ertes, ou peut récom penser leurs services en les
nom m ant présidents h o n o raires; mais quand I âge viendra, (pie
les facultés s ’affaibliront, si les pouvoirs sont illim ités, com m ent
faire com prendre à ces vieillards qu’ils sont nuisibles à ces
associations, qu'ils co n sid èren t com m e leur œ uvre et q u ’ils o n t
fondé, p eu t-être. Ne sera i on pas alors dans celle dure a lte r
native de sacrilier les in térêts de l’association ou d ’exiger
de son président une dém ission pénible.
La présidence à vie ne saurait donc être acceptée. L aisser
au président un tem ps d ’exercice suffisant pour faire tout le
bien q u ’il peut avoir conçu : autoriser la réélection ; fixer le
term e de l’exercice actif a so ix an te-q u in ze ans. T elles sont
les conditions qui nous paraissent utiles aux sociétés , pour
lesquelles la présidence est une fonction et non pas un litre.
M. le M inistre term ine son rapport en recherchant les m e
sures a prendre pour au g m en ter le nom bre des sociétés. —
C’est là évidem m ent m ie œ uvre profitable à la population qui
sans être dans l indigence, vit cependant de son travail jo u r
nalier. E spérons que la com m ission qui étudie, sous la direction
du M in istre, to u tes les qu estio n s qui in téressen t les sociétés
de secours m utuels, exam inera les rapports du corps m édical
avec les associations. Ue cet exam en (ait par des hom m es éclai
rés cl d é s in té re s sé s, il ne peut m anquer de so rtir des reg le
m ents qui satisferont aux besoins des associations sans sacrifier
les in térêts m atériels et m oraux des m édecins qui leur prodi
guent leu rs soins.
l ) r ClIAPPLAlN.
�LA LÉSION RÉNALE EST ELLE CAUSE 01 EFFET
DANS L'ALBUMINURIE?
P a r le U r F A IIIIE , d e M a rs e ille .
En 1827, un médecin anglais, Richard B right, découvrait les
relations intimes et à peu près constantes qui unissent trois phé
nomènes morbides : lanasarque, la présence de l’album ine dans
les urines et certaines lésions rénales.
C'était l’époque où com m ençait le règne des doctrines o rg aniciennes. Une lésion*anatom ique étant reconnue, on ne m an
quait jamais de lui subordonner un ensem ble m orbide : la m ala
die de Bright fut donc instituée; la lésion rénale en fut, m algré
les protestations de Bright lui-m êm e, considérée com m e le
caractère essentiel et la cause nécessaire. Telle est l’opinion
universelle naguère, aujourd'hui générale, des m édecins fran
çais.
Plus tard, l’hum orism e protesta par la voix des chim istes, qui
• cherchèrent à disculper le rein en accusant le sang.L e vitalism e,
par sa prédilection pour la préexistence des troubles fonctionnels
et la clinique, par ia constatation de causes diverses et de m ala
dies primitives qui enlèvent à la prétendue maladie de Bright
son essenlialilé, furent aussi portés à battre en brèche la néphrite
albumineuse.
A ujourd'hui donc, une grande question se présente. A peine
soupçonnée par une foule de m édecins, mais longuem ent p ré
parée par une nom breuse série de travaux sé rie u x , elle offre à la
fois l im portance scientifique qui excite Uintérêt et l'im portance
pratique qui commande* I attention.
C ette question, la voici :
« L album inurie et l an asarq u e, phénom ènes reconnus par
tous consécutifs, sont-elles sous la dépendance de la lésion
rénale? — Ou bien la lésion rénale ne serait-elle que la consé
quence de l album inurie qui proviendrait alors de tels ou tels
désordres dans les fonctions nutritives? »
Tel est le problèm e que nous allons som m airem ent exam iner
dans ce travail. 11 exigera une double étude : l’une, historique,
nous m ontrera sous quelle quantité de points de vue divers la
question la plus sim ple en apparence peut être envisagée et par
com bien d ’étapes successives une doctrine doit passer pour arri
ver a son expression d ern ière; l’au tre, purem ent critique, sera
destinée à exposer et en quelque sorte h peser les argum ents
su r lesquels s’appuient les deux solutions rivales.
1.
De ces solutions, la prem ière, celle qui fait dépendre l’albu
m inurie de la lésion rénale, est celle qui tout d abord, c’est-à dire sous le règne exclusif de l’anatom ie pathologique, a reçu
le plus grand nom bre d ’adhésions. Elle est passée par deux
phases successives. La période des recherches an atom iques, fai tes
h l’œil nu, a pour expression la plus parfaite l’ouvrage de
M. Rayer et aboutit à l'adm ission d’une néphrite album ineuse.
La période des investigations m icroscopiques offre com m e tra
vaux saillants les recherches de Jonhson en A ngleterre, de
F rerich s en A llem agne, de Becquerel et V ernoiscn France, et
com m e résultat principal, avec quelques variantes dans l’in ter
prétation du m écanism e, la doctrine de la transsudation.
A l’A ngleterre devait appartenir l’honneur de recevoir et de
suivie la prem ière im pulsion. Au m ém oire de B right, fondé sur
vingt-trois observations et dix-sept autopsies, succédèrent bien
tôt les travaux de Christison, de G regorv, d H am ilton et d’au
tres encore. Dans tous, sauf dans celui d ’H am ilton, se m anifes
taient déjà deux tendances : d’une part, l inllucnce attribuée à la
lésion rén ale; d’au tre part, la distinction entre l’album inurie
passagère et la m aladie de Bright proprem ent dite.
C’est dès celle époque et sans doute sous cette influence
qu ’apparaissent en F ram e les prem iers travaux. Ils sont dus à
l’école de M. Rayer. La thèse de M. Tissot ouvre la série en
1835. V iennent ensuite et très prom ptem ent la thèse de M .D ésir,
le m ém oire de Sabatier, où la dénom ination de m aladie de
�Bright est employée pour la prem ière fois; la thèse de M. M onassot, où les altérations rénales sont divisées en six form es,
mais où aussi l'album inurie n’est plus considérée com m e le
symptôme nécessaire, pathognom onique de la lésion rénale. Les
recherches de M. G cnest, celles de M. Bouillaud, engagent
encore plus dans la voie qui aboutit a la distinction d une
album inurie passagère, sans altérations rénales et d 'u n e alb u m i
nurie perm anente ou maladie de Bright, liée à une catégorie
spéciale de lésions du rein.
«
En vain Martin-Solon protesta-t-il contre l’influence nécessaire
attribuée à la lésion rénale dans les cas d’album inurie confirm ée;
en vain invoqua-t-il à l’appui de ses propres observations celles
qu’avaient recueillies, en A n g leterre, Graves et G regory; sa voix
ne fut pas écoutée, son travail fut m êm e décrié, et, deux ans
plus tard , en 1840, le magnifique ouvrage de M. Rayer venait
d o n n era la doctrine de ses adversaires la sanction la plus écla
tante et la plus parfaite expression.
Distinction d une album inurie passagère, accident com m un
de maladies diverses, et d'une album inurie perm anente ou m a
ladie de B right, tenant à certaines lésions chi rein. Division
clinique de la maladie de Bright en deux form es, l’aiguë et la
chronique; division anatom ique de ses lésions en six form es.
Te^le est la doctrine qui, aujourd’hui encore, dom ine en F ra n ce,
bien qu’elle soit âgée de 23 ans.
C ependant, une maladie si im portante ne pouvait trouver
longtemps le m icroscope indifférent et inactif. L ’A llem agne,
comme de raison, enfanta les prem iers travaux. En 1837, V a
lentin publia les résultats de ses recherches. Il lut b ien tô t suivi
.par Gluge, Hecht, lienle, Sim on, Ileller, R einhardt, E rerich s,
tandis qu’en France MM. Becquerel et V ernois étudiaient le
même problèm e.
Les opinions ont varié sur la nature de la lésion. L es uns,
avec R einhardt, ont cru reconnaître une inflammation dilfuse ;
d autres, comme H ccht, une cirrhose du rein ; d au tres encore,
tels que Jonhsor. , une dégénérescence tantôt granuleuse cl
tantôt graisseuse. Mais, quant au m écanism e, les m icrographes
s ’accordent presque tous à expliquer le passage de l’album ine
dans les urines par une transsudation du sérum que déterm ine
soit la congestion des reins, soit la desquam m ation épithéliale
des tubuli.
R einhardt et E rerichs insistent davantage sur l’im portance de
la congestion ; Becquerel et V ernois attrib u en t la principale
influence au détachem ent des cellules épithéliales ; m ais au fond,
com m e l’a fait rem arquer le docteur Jaccoud dans son excel
lente th è se , la doctrine des m icrographes peut être appelée
théorie de la transsudation et se form uler en trois équations.
A lbum inurie passagère — congestion rénale et détachem ent
épithélial.
Maladie de B right aiguë — infiltration des tubuli par des m a
tières album ineuses condensées.
Maladie de B right chronique — m étam orphoses de l’exsudât
des tubuli et atrophie de l’organe.
E ntre l’album inurie passagère et la maladie de B right, il n’y
a donc, pour les m icrographes, que des différences de degré.
Voila donc les solutions données au problèm e par les doctrines
qui ont placé dans le rein l’origine du mal ; par l’anatom ie patho
logique a l’œil n u , qui n’a aspiré q u ’à constater la lésion sans se
ren d re com pte du m écanism e ; par la m icrographie qui a cherché
de plus à expliquer dans la lésion le m écanism e de l’album i
nurie.
Plus com plexe que les théories anatom iques, la doctrine, qui
considère les troubles des fonctions nutritives com m e cau ses, et
les altérations rénales com m e conséquences de l’album inurie,
p résente un intéressant spectacle à celui qui exam ine d ’un œil
philosophique l'h isto ire de sa constitution. — L’on voit d’abord
des théories diverses qui se juxtaposent et quelquefois se com
battent sans lien apparent qui les u n isse; on les dirait tout à fait
étrangères les unes aux au tre s; chacune d ’elles croit donner le
�- 32 dernier inol de la science et se m ontre im puissante en face des
laits; entre ces prétentions contradictoires, l’esprit cherche en
vain une solution qui le satisfasse. Puis apparait un travail de
synthèse qui englobe tous les faits dans une généralisation s u
périeure; chaque théorie prend possession d’une part de vérité;
tous les matériaux trouvent leur emploi et leur place, et l’édifice
s’élève.
Si nous voulons suivre en détails celte doctrine dans son o ri
gine et ses développements, il nous faut rem onter ju sq u ’aux
prem iers écrits de Bright lui-m êm e. Bright lu i-m cm e l a pro
fessée ; mais la puissance de l'anatom ie pathologique était alors
si grande qu’on n ’entendit pas ou qu ’on ne com prit pas ses pro
testations réitérées, et il a fallu la profonde érudition du docteur
Jaccoud pour rétablir la vérité sur ce point historique. B right,
contrairem ent à ce que tout le monde a cru ju sq u ’en ces d ern iers
tem p s, a considéré la maladie comme prim itivem ent fonction
nelle. Ce trouble fonctionnel, quel e s t-il? Le m édecin anglais
ne le dit pas clairem ent, mais il nous a sem blé désigner la fonc
tion rénale.
C’était l’opinion que soutenait A nderson, en 1833.
(La suite au prochain numéro).
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
S tatu ts de la Caisse des P en sion s V ia g è re s
d'A ssistance.
Le Conseil général,
Vu les articles 6 (g 7 ) et i 0 des Statuts de l’A ssociation
générale ;
Vu l’article 2 de l’arrêté du M inistre de l’intérieur, approbatif
de ces S tatuts, en date du 31 août 1838 ;
Vu l'article 8 (§2) du décret organique du 20 m ars 1832, su r
les Sociétés de secours m utuels ;
Considérant qu’un des premier» besoins de l'A ssociation a u
quel il im porte de pourvoir est la fondation d ’une Caisse pour
- 33 s e rv i'd e s pensions viagères, dont l’obienlion sera subordonnée
;i de i conditions déterm inées par un règlem ent spécial ;
A rrête les dispositions suivantes :
Article premier. — En exécution des a r iieles 6 et 40 des
S tatuts de b Association générale de prévoyance et de secours
m utuels des m édecins de F rance, il est créé une Caisse dans le
but de servir des pensions viagères d ’assistance dont l’im portance
et les conditions d'attribution sont ci-ap rès déterm inées.
Art. 2 . — La dotation de la Caisse de pensions viagères
d’assistance est form ée :
I Par une prem ière m ise de fonds de 5 0 ,0 ' 0 IV. fournie par
la Caisse de l’Association g én érale;
2" Par une som m e de 0 ,0 0 0 fr prélevée annuellem ent su r la
Caisse de I Association générale, à titre de subvention, ii la cond lion toutefois que le fonds de réserve de l’Association restera
toujours d au m oins 5 0 ,0 0 0 .
5 Par le versem ent annuel de l’excédant de l’avoir de l’Asso
ciation générale au delà de la som m e de 5 0 ,0 0 0 fr. qui consti
tuera le m axim um de son fonds de réserv e;
4° Par le produit de> dons et legs laits a l’Association générale
au profit de la Caisse de pensions viagères d ’A ssistance;
5° Enfin par les intérêts accum ulés de tous les capitaux versés
à ladite Caisse.
Art . 5 . — fo u tes les som m es appartenant à la Caisse de
pensions viagères d ’assistance seront placées a la Caisse des
D épôts et Consignations pour porter intérêt au com pte particu
lier intitulé : Compta de la Caisse de pensions viagères d'assis
tance de l /ssociatinn générale des Médecins de France* et
capitalisées avec les intérêts ju sq u ’au 1er janvier 1878, époque
où com m encera le service des pensions, com m e il est dit ciaprès.
Art . A. — D’ici au 1er janvier 1878 , l’Agent com ptable
de l’Association dem eurera chargé de toutes les opérations de
com ptabilité de la Caisse de pensions viagères dans ses rapports
avec la Caisse des Dépôts et C onsignations, et ce, sous l’autorité
et avec la signature du Président de l’Association générale.
A rt . 5. — Lorsque com m encera le service des pensions, un
D irecteur de la Caisse de pensions, choisi parm i les m em bres de
l’Association sera nommé par le Conseil général.
Les fonctions de D irecteur de la Caisse de pensions sero n t
g ratu ites, la nature et la durée de ces fonctions seront déterm i
nées par un règlem ent spécial arrêté en Conseil général.
A rt . 0 .— U ne com m ission de surveillance com posée de trois
�- 36
m em bres de l'Associai ion générale est instituée h I t‘fT«*t de
prendre connaissance de toutes les op rations de la Caisse de
pensions et d ’en faire rapport au Conseil général à la lin de
chaque année
Tous les six mois au moins et plus souvent si elle le dem ande,
l’Agent com ptable ou le D irecteur qui doit lui succéder, lui
fournira un état de situation «le la ('«lisse avec les pièces ii
l’appui
Les m em bres de la Comm ission de surveillance sont nom m és
par le Conseil général pour trois ans ; ils peuvent être réélus.
A rt . 7. — Les frais d adm inistration de la Caisse de pensions
sont à sa charge.
Art . 8. — Dans quinze ans. soit à d ater du 1er janvier 1878.
lorsque la dotation de la Caisse de pensions aura été délinilivemunt constituée, il pourra être accordé, dans les lim ites des
revenus de la Caisse des pensions viagères aux S ociétaires fai
sant partie de I Association depuis dix ans au m oins, qui se trou
veront sous les rapports de l’âge, des inlirm itésou de la m aladie,
dans une des catégories suivantes :
1 Les Sociétaires octogénaires ;
2" Les Sociétaires atteints de maladie ou d infirm ités incurables
qui les m ettent dans l’im possibilité absolue de se livrer à l’e x e r
cice de la m édecine;
3* Les Sociétaires âgés d e 63 ans au m oins attein ts d ’infil m ités
graves.
A rt. 9. — Le taux des pensions sera de 6 0 0 fr. par an an
m oins, et de 1,200 fr. au plus.
Art . 10. — Les pensions ne seront accordées par le Conseil
général que sur la dem ande du Bureau de la Com m ission adm i
nistrative de la Société à laquelle appartient le S ociétaire qui la
réclam e,et sur l’avis de la Commission de surveillance de la Caisse
de pensions.
Art . I I . — En aucun cas, l’aptitude à l’obtention d ’une p en
sion viagère ne peut constituer un droit.
C'est au Conseil général q u ’il appartient de décider, selon les
circonstances qu’il apprécie, s'il y a lieu ou non de l’accorder.L a
pension cessera de plein droit du jo u r où le S ociétaire, pour un
motil quelconque, ne fera plus partie de I A ssociation.
Art . 12. — T outes les difficultés qui pourraient s'élèv erait
sujet de l’adm inistrai ion de la Caisse de pensions, ou du service
des pensions, seront jugées par le Conseil général et sans appel.
A rt. 13. — Les dispositions de l’article 2, qui ont pour but
de créer les m oyens de constituer la dotation de la Caisse de
pensions, pourront être modifiées lorsque b* Conseil général
jugera que le capital «le cette Caisse est suffisant pour satisfaire
a ses besoins, cl dans le but d instituer les au tres fondations
d assistance prévues par l’article 6 des S tatuts de l’Association
générale.
Art . I I . — Au m om ent où com m encera le service des pen
sions, un B èglem ent, arrêté en Conseil général, déterm inera le
mode d ’exécution des présentes dispositions.
A r t . 13. — En cas de dissolution de l’A ssociation, tous les
fonds appartenant il la Caisse de pensions feront reto u r il la
Caisse de I Association générale.
Dans sa séance du 2 novem bre 1863, l’A ssem blée generale de
l’Association a donne sa sanction à ces S tatu ts, qui ont été égale
m ent approuvés par un arrêté de Son Excellence M. le M inistre
de L Intérieur.
R étrib u tio n des M éd ecins des B u rea u x
de B ien fa isa n ce.
La lettre suivante, adressée par M. le préfet du Nord à MM.les
sous-préfets, m aires cl m em bres des bureaux de bienfaisance de
son départem ent, est un acte dont nous ne saurions nous m on
trer trop reconnaissants. Elle t. m oigne d’une bienveillance et
d ’un esprit de justice dont nous aim ons â esp érer que l’exem ple
no sera pas perdu pour les adm inistrateurs qui auront â traiter
de sem blables questions :
« M essieurs,
« Mon attention a été appelée su r la situation peu rétribuée
des m édecins des bureaux de bienfaisance. C ependant, les ser
vices que ren d en t,d an s les cam pagnes, les m édecins des pauvres
sont d une im portance trop grande, et ces praticiens sont en
général trop dévoués pour qu'il ne soit pas désirable et ju ste
qu ’il leur soit alloué une rém unération plus en rapport qu’elle ne
l'est ‘souvent avec ces services ri avec les ressources des établis
sem ents charitables et des com m unes.
« Je vous im ite donc, M essieurs, â exam iner, au m om ent de
la form ation des budgets des bureaux de bienfaisance, ce q u ’il
serait possible de faire 1» cet égard. Si les ressources dont peu
vent disposer ces adm inistrations font défaut, je verrais avec
plaisir l’intervention des conseils m unicipaux, et je m 'em presse
rais d ’ouvrir les crédits qui me seraient dem andés.
�« Je connais d'ailleurs tout voire zèle et la saine appréciation
que les commissions adm inistratives apportent dans l'em ploi des
ressources des bureaux de bienfaisance. Je m e borne donc à
vous signaler un besoin généralem ent senti et qui m 'a paru
devoir appeler votre attention.
« Je vous prie, M essieurs, de me faire connaître les décisions
qui auront été prises, soit aux budgets prim itifs, soit par voie
de crédits supplém entaires, en faveur des m édecins, pour la lin
de novembre au plus tard, alin que je puisse en ten ir com pte en
réglant les budgets de 1864.
« Agréez, etc.
Le Préfet du Nord,
« V allon. »
Une des questions (pii préoccupe le plus l'associai ion médicale
est celle de 1 exercice illégal de la m édecine ; la société locale
des B ouches-du-R hône, depuis sa fondation, n'a cessé de s'o c
cuper avec activité de cette question qui intéresse à un si haut
point toutes les classes de la société. Aussi e st-c e avec le plus
grand plaisir que la commission adm inistrative a, dans sa séance
m ensuelle du 7 janvier, entendu son président, ren d an t com pte
des visites du prem ier de l an, lui faire part des excellentes dis
positions dans lesquelles il avait trouvé l au to rilé judiciaire,
relativem ent à la répression du charlatanism e. M. le président
du tribunal civil ne dem ande q u ’une chose, c'est q u ’on ne m an
que pas de signaler à M. le procureur im périal tous les faits
d'exercice illégal. En conséquence, la Commission adm inistrative
prie avec instance tous les m em bres de I association, tous les
m édecins, de lui signaler les laits qui parviendraient à Inu
connaissance; elle s’adresse eu particulier aux m édecins des
petites localités, à ceux des cam pagnes où l'on ren co n tre tant de
guérisseurs sans diplôme.
Aidée par l autorité judiciaire, l’association m édicale a déjà
obtenu des résu ltats; mais il reste beaucoup à faire M ettonsnous donc à l’œuvre avec courage, et nous arriv ero n s peu à peu
à détruire cette lèpre qui fait tant de mal. qui en traîn e après
elle des m alheurs que nous som m es bien des fois appelés à
réparer, le plus souvent, il est vrai, beaucoup trop tard p o u r les
victim es de ce honteux et déplorable trafic qui se cache sous
toutes les fîgurest.oujours au nom de l’hum anité.
L° Comité de Rédaction.
lmp. V|»l(roe Thlor«. H
DANS L’AMiUMINURIG?
l'ai* I«* l e I A K H IC, «le M me' mcIII c .
SUITE ET FIN.
Mais, dès 1830, Elliolson professait dans ses leçons cliniques
que ce q u ’il im porte le plus au m édecin d'étudier et de suivre
dans la m aladie de B rig h l, c'est I état général de l’économ ie
dont les autres phénom ènes ne sont «pie la m anifestation exté
rieure.
Eu 1831. W illiam Prout insistait sur l'influence du défaut
d'assim ilation des m atières album inoïdes.
En 1837, V alentin plaçait la m aladie de Brighl parmi ces m a
ladies générales dans lesquelles une quantité anorm ale d'album ine
est séparée du san g ; le rein, ici chargé de l’élim ination, en
éprouverait des altérations consécutives.
C 'est l’idée que G raves soutenait en 183 8 , faisant a Brighl un
reproche bien gratuit et lui prêtant l’opinion contre laquelle il
n ’avait cessé de protester.
Un peu plus tard, Owen Rees considérait le sang com m e le
siège prim itif de la maladie.
P uis apparurent les travaux des physiologistes su r les m éta
m orphoses des alim ents azotés. En 1843, Lehm ann étudiait
Einfluence de leur quantité su r la production de l’u rée.E n 18 5 4,
B ernard et B arresw ill recherchaient le passage dans l’urine des
m atières non assim ilées; F ourcaull dém ontrait de son côté le
passage des m êm es m atières dans la sueur et rattachait m êm e
l'album inurie à la suppression des fonctions cutanées.
A ussi, com m e conséquences de ces travaux , se produisirent
bientôt deux théories de l album inurie qui ont lixé quelque peu
l’attention.
M. Mialhe attrib u a l'origine du mal a une accum ulation de
principes aqueux, due soit il la suppression de la su eu r, soit à la
dim inution des globules ; sous cette influence devait se produire
1 altération de l'album ine et le passage'a travers divers tissus,
�notam m ent celui du rein, d'une album ine altérée. M. Mialhd Int
réfuté par M. Becquerel et d ’autres chim istes qui trouvèrent
une identité parfaite entre l'album ine du sang norm al, celle du
sang des album inuriques et celle des urines.
M. Mialhe pouvait avoir tort chim iquem ent ; cliniquem ent il a
ju sq u ’il certain point raison. Souvent on a eu occasion de constater
des faits comme ceux que le docteur Sem m ola, de N aples, dans
une com m unication récente à 1' Vcadémic de M édecine (27 août
1861 , résum ait dans les propositions suivantes : album inurie
dépendant d une altération des fonctions cu tan ées; lésions ré
nales consécutives; heureux ell’e ts du rétablissem ent des fonc
tions de la peau.
La théorie de M. Ed. Robin se rattache égalem ent à la tran s
formation des m atières album ineuses. D ’après cet au teu r ,
brûlées dans le sang, elles donneraient com m e résidus norm aux
de celle com bustion l’urée et l’acide urique élim inés p a r le s
urines: une com bustion incom plète serait la cause de l’alb u m i
nurie.
L’idée d’une com bustion des alim ents azotés a été réfutée par
MM. Mialhe et Liebig. Ces m atières sont bien certainem ent des
principes de réparation et non de respiration ; s’il en était au tre
m ent, le m oindre trouble digestif sullirait pour com prom ettre la
rie. Mai s si la com bustion des m atières azotées n ’est rien m oins
que prouvée, leur transform ation est positive. Ce que M. R obin
a dit de la com bustion se trouve vrai pour la transform ation ;
cet auteur est passé tout ii côté de la vérité.
Différent est l’aspect sous lequel beaucoup plus ta rd , en 1801,
M. llam oii (de la Sai llie) envisageait le problèm e. Son travail,
présenté à la Société de M édecine de la Seine, avait pour but de
dém ontrer la nature névrotique de l’album inurie. C ependant,
cette théorie nouvelle est m oins éloignée des précédentes q u ’on
ne le croirait d’abord. Elle a, com m e scs soeurs ainées, son point
de départ et son prem ier appui dans la physiologie expérim entale,
car elle invoque 1 album inurie artificielle que M. Cl. B ernard a
30 ~
produite en piquant le quatrièm e ventricule ; elle aussi repose
sur les transform ations subies par les m atières album ineuses,
m ais en insistant sur I influence récem m ent étudiée du systèm e
nerveux sur ces transform ations.
Ju sq u ’ici, nous ne trouvons que des solutions vagues ou in
com plètes de la question. Elliolson nous parle d ’une maladie
générale; V alentin, G raves, Owen liées supposent une altération
du sang dont ils n ’indiquent clairem ent ni la nature ni le m ode
de production.D ’au tres, éclairés par la physiologie, reconnaissent
des troubles de la vie nutritive , m ais ils ne voient q u ’un côté du
problèm e et se m o n tren t exclusifs; c’est ainsi (pic Fourcault et
Mialhe accusent uniquem ent une suppression de la transpiration,
q u ’Ed. Robin se concentre dans une transform ation mal com
prise des m atières album inoï les, que M. H am on se com plaît
dans les déviations im prim ées au m ouvem ent n u tritif par le sys
tèm e nerveux.
W illiam P rout est le seul qui ait entrevu dans la question des
horizons plus vastes. En m êm e tem ps q u ’il dém ontrait par des
expériences les ciïets de la digestion intestinale su r la quantité
d album ine excrétée par l'u rin e, il accordait une grande part
d ’influence a la digestion interstitielle.
A cette théorie encore vague et incertaine, M. G uider devait
donner à la fois plus de précision et plus d étendue. En 18oo,
dans des leçons inédites dont le docteur Jaccoud s'est fait un
scrupuleux devoir de reproduire l’expression doctrinale dans ses
notes à la clinique de G raves, M. G uider considéra com m e
pouvant produire l’album inurie tous les élém ents du processus
n u tritif q u ’il divisa en quatre chefs :
N ature des alim ents ;
^ Prem ières voies,
T roubles digestifs
f F o ie;
T roubles de la respiration ;
v A ssim ilation,
T roubles de la nutrition proprem ent d ite ....
....
' D ésassim ilation.
�-
40
— 41
Ce qui « é ta it qu’un aperçu dans les leçons de M. G uider est
devenu une véritable doctrine dans la thèse de M. Jaccoud, où
la question a été longuem ent et savam m ent d iscu tée, où les
théories diverses que nous avons m entionnées ont été enveloppées
dans une généralisation plus vaste, où enlin des arg u m en ts nom
breux et puissants servent de base à la proposition suivante, ex
pression dernière ei probablem ent définitive de la d o ctrin e :
« L 'album inurie reconnaît pour cause une déviation du type
« normal des m ouvem ents n u tritifs; cette déviation consiste en
« une perturbation passagère ou durable dans les phénom ènes
« d ’assim ilation et de désassim ilation des m atières album i« noïdes. »
Pour tous ceux qui sont au courant de la science, il faut évi
dem m ent ou adm ettre la lésion rénale com m e prim itive ou se
ranger à cette dernière solution. M alheureusem ent, elle a été par
plusieurs ou m éconnue ou mal com prise.
Elle a été m éconnue, car les opinions de M. Sem m ola et
celles de M. H am on, (pii ne saisissent q u ’une partie des élém ents
q u ’elle em brasse, lui sont antérieures com m e date m orale bien
qu elles lui soient postérieures com m e chronologie.
Elle a été mal com prise, car M. Bazin dans son traité de la
scrofule, et M. A beille, dans son récent ouvrage, paraissent la
confondre avec la théorie beaucoup plus restrein te qui em p ri
sonne la cause de 1 album inurie dans une altération du sang.
Il im portait donc de répandre, dans les lim ites de nos m oyens,
la connaissance de celle doctrine, pour éviter un [dus grand
nom bre d anachronism es scienliliques. Il im portait de m ettre en
lum ière la question il laquelle elle prétend rép o n d re, question
capitale et sur laquelle cependant plusieurs ouvrages su r l'album i
nurie, sans en excepter le dernier traité de M. A beille, si riche,
d'ailleurs au point de vue clinique, ne font que glisser plus ou
moins légèrem ent N ous avons passé en revue les so lutions qui
en ont été données ; nous allons m aintenant exam iner les arg u
m ents divers sur lesquels s’appuyent ces solutions.
IL
Les deux doctrines contradictoires qui se trouvent en présence
ayant passé par plusieurs phases successives, il faut évidem m ent
les prendre dans leur expression dernière qui est aussi le dernier
term e de leurs progrès. N ous avons donc à rechercher si l’alb u
m inurie provient de la congestion rénale et de la desquam ination
épithéliale des tubuli, ou bien si, au contraire, elle peut être
produite par des troubles divers des m ouvem ents nutritifs.
Les argum ents invoqués de part et d ’autre nous paraissent
pouvoir se ranger dans trois catégories distinctes :
La prem ière catégorie est la plus pauvre; elle com prend les a r
gum ents qui nous paraissent m iliter en faveur de la congestion
des reins et de la desquam m ation des tubuli.
N ous trouvons en prem ière ligne le tém oignage de la physio
logie expérim entale. Robinson fait la ligature de la veine rénale
et produit l’album inurie. D 'un autre côté, dans des expériences
récentes, résum ées par lui dans les archives, en septem bre
d ern ier, le professeur P anum . de K iel, déterm ine 1 em bolie du
m êm e vaisseau et arrive au m êm e résultat. La congestion san
guine peut donc être réellem ent cause d album inurie.
La tension sanguine peut aussi lui donner naissance, car R o
binson a obtenu des urines album ineuses en injectant une cer
taine quantité d'eau dans le systèm e veineux.
On ne doit cependant pas s’exagérer les résultats de ces expé
riences. L 'album inurie n'a été produite que par une obstruction
com plète de la veine rén ale; une sim ple congestion n ’a pu la
d éterm in er; il a fallu une congestion forcée.De m êm e, l’injection
de l’eau dans le systèm e veineux et la tension sanguine qui en
était la suite n ’a am ené le passage de l’album ine dans l'urine
q u ’à la condition d'être très brusque et très abondante.
L expérim entation physiologique est donc parvenue à ces
résultats, non pas en im itant les conditions m orbides, m ais en
les exagérant. Moins intense que la congestion par oblitération
veineuse, la congestion par asphyxie est cependant plus forte
�42 ~
encore qu'une sim ple congestion pathologique, et p o u rtan t, dans
trois cas d’asphyxie, M. Abeille a cherché vainem ent de l'album ine
dans les urines. D’ailleurs, n ’est-ce pas une congestion type que
celle qui signale le début d ’une néphrite sim p le? Elle n ’est ce
pendant pas suivie d ’album inurie.
Donc, tout en tenant com pte des résu ltats fournis par la
physiologie expérim entale, il ne faut leur accorder q u ’une valeur
m odérée.
Quelques faits de pathologie viennent aussi au secours de la
doctrine anatom ique.
M entionnons d’abord l’album inurie des fem m es enceintes :
Là se trouvent réunies, du m oins en apparence, toutes les
conditions favorables à une tension sanguine g én érale, à une
congestion sanguine du rein. Les fem m es sont dans cet état que
MM. Beau et Cazeaux ont si bien reconnu être une pléthore
séreuse. De plus, à m esure que 1 utérus se développe, il tend à
com prim er directem ent ou indirectem ent le systèm e de la veine
cave inférieure. Ce n'est pas tout, il gène par son volum e l ’abais
sem ent du diaphragm e qui, d’après les im portantes expériences
de M. Poiseuille, agit puissam m ent su r la circulation veineuse
en rem plissant le rôle d ’une pompe aspirante. C ette gène ap
portée à la circulation veineuse générale par le développem ent
de l’utérus m érite, je crois, d 'être m ieux m ise en lum ière. Elle
contribue à expliquer la nécessité de la saignée chez quelques
femmes enceintes, en m êm e tem ps qu elle me parait ex ercer une
intluence adjuvante su r quelques phénom ènes pathologiques de la
grossesse, tels que les varices, la céphalalgie, l’éclam psie, peutêtre même l’album inurie.
Ainsi donc, les conditions désirées par I école anatom ique
pour la production de l'album inurie se ren co n tren t gén éralem en t
chez la femme enceinte. A rgum ent de valeur dont il ne faut pas
cependant s’exagérer l’im portance, car la fem m e subit à cette
époque une grande révolution dans sa vie nutritive ; son sang a
évidem m ent éprouvé des modifications profondes ; m ais voici
— 43 —
qui est plus grave : l’album inurie peut fort bien se développer
dans les prem iers tem ps de la grossesse, alors que l’utérus n’est
pas volum ineux.
*
L'influence de la congestion rénale sur l’album inurie des
fem m es enceintes est donc possible dans certains cas com m e
cause déterm inante ; probable dans un plus grand nom bre com
me cause adjuvante ; dans aucun cas elle n’csl dém ontrée.
L’album inurie scarlatineuse offre en apparence plus de prise
a la théorie anatom ique, car elle lui perm et d ’invoquer à la fois
la congestion e t la desquam m ation épithéliale.
Par m alheur, la congestion viscérale est surtout un phéno
m ène du début et l’album inurie est un phénom ène tardif. Q uant
à la desquam m ation, il faudrait, pour que son action fut dém on
trée, (pie chez tous les album inuriques celle desquam m ation fût
constatée et que, d ’au tre p a r t, dans tous les cas où sc produit la
desquam m ation, fl y eût album inurie : double proposition que
contredisent les faits observés par B. Bell, W ilks, G illespie,
e tc ., etc ...
En résum é, il est dém ontré q u 'u n e congestion extrêm em ent
forte et une augm entation brusque et considérable de l’élém ent
aqueux peuvent produire artificiellem ent .l'alb u m in u rie, qui est
alors d ’origine rénale.
Mais, hors ce cas, où ces conditions sont forcées, il n 'est pas
prouvé q u ’elles puissent par elles seules produire l'album inurie;
il est seulem ent probable qu elles ont quelquefois une influence
adjuvante.
Dans une seconde catégorie, nous rangeons les argum ents
q u ’à n o tre sens chacune des deux doctrines peut interpréter en
sa faveur.
C’est un fait certain (pie là perturbation des fonctions cu ta
nées, soit par le froid soit par une m aladie, a souvent pour
conséquence l’album inurie.C ongestion des reins, diront les uns;
troubles dans la n u tritio n , c 'est-à-d ire dans l’élim ination et la
transform ation dos m atières azotées, répondront les autres, avec
tout autant de raison.
�CJt
M'
— 4V —
—
Les affections du cœ ur produisent certain em en t des c o n te s
tions dans le rein comm e dans le foie et les au tres viscères;
mais elles déterm inent aussi des troubles nu tritifs <|ui peuvent
être accusés b d’autant plus ju stes litre s, que c ’est d ordinaire
dans la*période de cachexie cardiaque que rn lh u n iin u ric se
produit.
L'influence des accès de dyspnée su r la com position album i
neuse de Lurine a etc constatée par M. H a m o n , ce (pii ferait
pencher com plètem ent la balance du côté de la congestion, si les
maladies thoraciques où I on observe le plus souvent l'album i
nurie n’étaient la phthisie et les catarrhes c h ro n iq u e s, affections
où la vie nutritive est profondém ent,altérée.
La question est la m êm e pour l'album inurie de l'alcoolism e,
m anifeste surtout dans ces cas chroniques où les soupçons pla
nent a peu près autant sur la cachexie (pic su r la congestion et
sur l’altération vasculaire.
Même difficulté pour cette album inurie satu rn in e d o n t, dans
un travail publié dans les A rchives, m on ami A uguste Ollivier
vient de dém ontrer l’existence; cependant, des observations
qu’il a publiées, il résulte qu on doit accuser m oins la cachexie,
absente chez plusieurs su je ts , que l'altération rénale produite
par l'élim ination du plomb.
Q u'on se tourne m aintenant du côt • des m aladies aiguës , on
rencontre I album inurie du choléra où la tendance aux exsuda
tions séreuses n’est pas m oins prouvée que les congestions
viscérales ; ou bien encore l’album inurie d iphthéritiqoe où le
trouble profond de I hém atose, où la tendance générale aux
exsudations plastiques sont encore m ieux dém o n trés que les
congestions viscérales par asphyxie.
Dans tous ces cas, il nous sem ble im possible de prononcer
entre les deux doctrines ; nous serions porté à cro ire q u ’elles
ont l une et l’autre b m oitié raison.
Mais il existe une troisièm e catégorie d ’arg u m en ts qui me
paraissent plaider en faveur d<* i album inurie par troubles de la
nutrition
4o
—
Il en est qui sont déduits de faits anatom iques. Et d ’abord on
peut rencontrer les lésions de B right sans album inurie ; B right a
vu deux cas de ce g enre ; citons, parm i les m édecins qui en ont
observé, F orget, G faves, M onneret et su rto u t W ilks, qui en a
constaté plusieurs en exam inant les reins dans toutes lesaulopsies.
Ce prem ier argum ent, décisif en apparence, n’a pas pour moi
grande v aleu r; les faits ne m e paraissent pas assez nom breux,
le contrôle n ’est pas encore assez fréquem m ent répété pour q u ’on
se sente autorisé a en déduire cette conséquence extrêm em ent
grave qui en découle forcém ent, a savoir que les troubles de la
sécrétion urinaire dans l’album inurie se bornent a favoriser le
développem ent d une altération qui peut se produire dans d 'au
tres circonstances. J aim erais m ieux adm ettre qu e, dans ces cas,
ou l’album inurie a été guérie et la lésion qui en était la consé
quence a persisté en raison de son incurabilité, ou qu e, com m e
dans d’autres faits que j ’ai eu occasion d’observer, l’urine conte
nait au lieu d’album ine de l’album inose, que ne précipite pas
l’acide n itriq u e, que précipite le tannin.
Plus nom breux et plus concluants sont les faits où l’on a cons
taté l’album inurie sans lésions rénales. C’est sur leur existence
q u ’est fondée la grande distinction de M. Bayer et de son école
en album inuries passagères, par causes diverses, et maladie de
B right proprem ent dite. D ’autre p art, des m icrographes habiles,
tels (pie W ilks, G illepsie, Basham , W ed l, B raun, reconnaissent
q u ’il y a des cas où le m icroscope ne leur a rien révélé.
L’école anatom o-pathologique concédera donc qu’il existe des
album inuries sans altérations rénales, mais elle m aintiendra que,
quand l’altération du rein e x is te , elle est cause et non pas effet.
(Test l’opinion la plus accréditée en France, c’est celle b laquelle
se range M. A beille, qui m aintient la vieille division des album i
nuries en passagères et chroniques. Mais cette division m êm e
sert b m ontrer l'arb itraire de l’opinion su r laquelle elle repose.
D ans quelle catégorie, par exem ple, placera-t-on l’album inurie
scarlatineuse? Tantôt elle est passagère et sans lésions apparen
tes ; tantôt elle est plus durable et on la voit se développer avec
�ces lésions que le m iscroscope constate d'abord , que l’œil verra
plus tard. Passagère, l’album inurie est sans lésion ; chronique,
elle s’accompagne d ’altérations rén ales; conclusion naturelle, la
lésion du rein est la conséquence de l’album inurie.
Il en est de même de l’album inurie des fem m es enceintes,
qui est tantôt éphém ère et tantôt p erm anente, où le rein est
tantôt intact et tantôt atteint des lésions de B rig h t, constatées 1)
l’œil nji, com m e l a fait L cudet, et au m icroscope, com m e l a
fait le professeur Braun.
Que cependant les adversaires de l’anatom ie pathologique ne
triom phent pas trop \ite ; des altérations du rein peuvent exister
et en m êm e tem ps échapper soit aux recherches de l’œ il, soit
aux investigations du m icroscope. Telle est, à son d éb u t, cette
dégénérescence amyloïde récem m ent étudi e en A llem agne et à
laquelle Virchow attribue un grand rôle dans la production de
l'album inurie; il faut alors, pour la révéler, un réactif chim ique,
la teinture d iode. Cette lésion étant adm ise, il resterait à dé
m ontrer q u e lle est prim itive, ce (pii n est nullem ent probable,
car la dégénérescence album inoïde n ’a g uère é t ; constatée que
comme conséquence d ’autres états m orbides et dans le cours des
cachexies. 1:11e est d’ailleurs encore trop peu connue p o u r q u ’on
en tienne grand com pte.
Q uant aux lésions bien connues, il est une circonstance qui,
mieux que leur apparition tardive, tend à prouver q u ’elles sont
l ellet et non la cause de l’album inurie ; c’est l'augm entation ou
la continuation du passage de l'album ine dans les urines pendant
la période moyenne de la m aladie, alors que la congestion a dis
paru, pendant les dernières périodes, alors que les eanalicules
s’oblitèrent et que le rein s’atrophie; c’est aussi l'in term itten ce,
ce sont les variations notables de l’album inurie à des époques
où ces variations ne peuvent plus être attribuées à lu congestion
et où les lésions rénales sont bien perm anentes.
Ces lésions, d ailleurs, occupent ordinairem ent les deux reins,
contrairem ent à la néphrite et aux lésions prim itives des reins,
qui sont d habitude unilatérales.
L ’anatom ie pathologique des liquides fournit aussi son tém oi
gnage. M. Jaccoud a trouvé des llocons album ineux dans le
sérum , qui est louche ; il en a aussi cherché et trouvé dans les
selles; enfin, il a rencontré de l’album ine en plus grande abon
dance que d ordinaire dans le liquide céphalo-rachidien. Cet
argum ent a une grande valeur en ce qu ’il prouve une tendance
générale dans l’économ ie a la transsudalion des m atières albu
m ineuses.
La physiologie aussi a été interrogée. Il sem blait à priori
q u ’elle devait répondre que le rein, destiné a l’élim ination des
substances album inoïdes, est chargé de donner aussi passage a
l’album ine qui, pour une raison diététique ou m orbide se trouve
non employée dans le sang. E t en effet, les expériences de CL
Bernard prouvent q u ’on peut rendre des anim aux album inuri
ques par un régim e album ineux. Ces résultats se trouvent con
formes aux observations d eD u p u y tren et T hénard et de M .Rayer,
qui ont vu l'album ine augm enter, sous l’inlluence du régim e
azoté, dans l’urine des diabétiques où on la rencontre assez sou
vent. Cette influence du régim e a été égalem ent constatée par
MM. G uider, Luton et Ilarnon. Ce d ern ier au teu r a vu aussi la
proportion d ’album ine augm enter par l'action de la m usculation
volontaire, ce q u ’explique la com position azotée des libres m us
culaires.
Ces argum ents paraissent irréfutables. N on m oins concluante
est l’expérience de Cl. Bernard qui, eu piquant le quatrièm e
ventricule, a produit ici la diabète, la l’album inurie.
Celte dernière affection peut donc se développer sons l’in
fluence du systèm e nerveux. Ce qui le prouve encore, c’cst l’o b
servation de M. Abeille qui a vu une album inurie passagère inti
mem ent liée a une névralgie.
Mais nous voila sur le terrain de la clinique. La clinique a -telle d ’autres argum ents a faire valoir en faveur de la doctrine qui
considère l'album inurie com m e la conséquence de troubles
n u tritifs? Oui sans doute.
Elle nous soum et d’abord ses renseignem ents étiologiques
�-
48 —
qui nous m unirent celle affection se développant sous l’inlluenre
prolongée d’une mauvaise n o u rritu re, dans des lieux froidset
hum ides, au milieu des conditions hygiéniques de la misère.
N ous la voyons aussi apparaître dans les affections qui, comme
la lièvre typhoïde et le typhus, portent les p lus graves atteintes
au mouvement nutritif, dans les cachexies paludéenne, syphili
tique, m ercurielle, dans la cachexie d artreusc, d ’ap rès M. Bazin
(pii en a signalé aussi la fréquence dans la cachexie scrofuleuse,
en lui attribuant, il est vrai, pour causes directes les altérations
du rein, bien q u ’il sache m ieux que personne que la scrofule est
rem arquable par les grandes déviations qu elle im p rim e au mou
vement nutritif.
Voilà les causes ordinaires de l’album inurie, et nous devons
reconnaître qu’elles sont fort peu capables de produire la conges
tion rénale.
Quelques cas de guérison rapide tendent égalem ent à prouver
que l'album inurie ne dépend pas des lésions de B right.M .T rous
seau, dans sa clinique, cite trois album inuries confirm ées qu il a
vu g u érir; chez le prem ier sujet, la m aladie de B right fut chassée
par une épilepsie; elle le fut chez les deux au tres p ar une hémor
rhagie célébrale. Dans un de ces cas, l’alb u m in u rie était si in
tense qu’on ne donnait au malade pas m êm e un m ois de vie, et
cependant la disparition eu fut brusque. Il n’est pas probable que
les altérations du rein aient été ainsi escam otées.
Enfin, après avoir exposé les ai gu m onts q u ’on p eu t invoquer de
part et d’au tre,q u ’il nous so ilp erm isd c hasarder nos conclusions:
La congestion et la desquam m ation rénale, d ’une p art, des
troubles divers de la nutrition, d 'au tre part, peuvent concourir à
produire l’album inurie ; m ais, en règle g énérale, un rôle beau
coup plus im portant et souvent isolé, surtout pour les cas d al
bum inurie grave et p erm an en te, doit être attrib u é aux troubles
de la nutrition ;
E t, conclusion pratique :
C'est donc contre eux q u ’on devra d irig er les resso u rces de
l'hygiène et les recherches de la thérapeutique.
E x tr a it du R e g istr e des D élib éra tio n s
de la C om m ission a d m in istra tiv e.
La Com m ission adm inistrative se réunit le prem ier jeudi de
chaque m ois; depuis la dernière assem blée g én érale, indépen
dam m ent de ses réunions m ensuelles, elle en a eu plusieurs
au tres, m otivées par des circonstances urgentes. N ous donnons,
aujourd’hui, un résum é succinct de ses travaux.
Elle a reçu l’adhésion des confrères, dont les nom s suivent :
MM. de Possel, de la Ciotat ; G irard, d’E y g u ières; Marloy,
d'A uriol ; Blanc, A m albert, M aurin, Bourgarel et Pellegrin, de
M arseille. L eur adm ission a été prononcée à l’unanim ité.
Dans la dernière assem blée générale de la société, deux q ues
tions im portantes, soum ises à ses délibérations, n’avaient pu
recevoir une solution utile et avaient été renvoyées à plus am ple
exam en : nous voulons parler de la caisse des retraites, et des
rapports des m édecins avec les sociétés de secours m utuels.
Le rapport présenté à l’assem blée générale par M. le docteur
S eu x , su r la création d une caisse de retraites, ayant été pris en
sérieuse considération , la com m ission adm inistrative s’esl
occupée d’une m anière toute particulière de cet intéressant pro
blèm e, et a consacré à son étude plusieurs séances. Elle avait,
d’ailleurs, à faire connaître son opinion à l’Association générale
qui avait m is la question à l’étude dans toutes les sociétés locales
et qui devait en délibérer dans son assem blée annuelle des 1er
et *2 novem bre dernier. — L’accueil fait au principe a été cha
leureux dans toutes les société locales ; mais dans son applica
tio n , des divergences se sont produites. Deux ordres d ’idées
bien différents se sont trouvées en présence ; pour les uns,
l’aptitude à la pension de retraite ne pouvait être considérée
com m e un droit acquis; pour les autres, au contraire, le droit
devait être inscrit dans les statuts com m e un principe fonda
m ental. La com m ission adm inistrative des B ouches-du-R hône
fut unanim em ent du dernier avis.
L’A ssociation générale a d élib éré; les deux opinions ont
trouvé dans le sein de celle assem blée des interprètes éloquents
et consciencieux, et le débat s’est term iné par une transaction ;
la création d ’une caisse de retraites proprem ent dite a été ajour
née, et les statuts proposés sont devenus ceux d’une caisse
spèciale sous le nom de caisse des pensions viagères d'assis
tance : N ous renvoyons pour plus am ples détails à l’annuaire de
180-1.
�Ôf>
En piésence de ce résultat, la Com m ission, frappée des avan
tages incontestés de la création d une véritable caisse locale des
retraites, s'est demandée s il ne serait pas opportun d’y songer
dès m aintenant. Elle s’est prononcée pour l’uflirm ative et elle a
m is la question a I ordre du jour. P lusieurs propositions ont
déjà été formulées soit par des m em bres de la com m ission, soit
par d'autres m em bres de la société; la question sera mûrement
étudiée: chacun peut fournir les docum ents qu'il croit utiles, soit
directem ent, soit par la voie du journal qui sera to u jo u rs P arène
ouverte au bon vouloir et à l’initiative de tous.
Uue autre question, dont la Com m ission adm inistrative a en
à s'occuper aussi, est celle des Sociétés de secours m utuels. Un
rapport lui a été fait à ce sujet au nom d ’une com m ission spéciale
qui a proposé au service médical de ces sociétés quelques am é'
lioraüons sérieuses. Ces am éliorations ont été acceptées et par
la Commission adm inistrative et par le G rand Conseil des socié
tés ; elles offrent donc les m eilleures chances d ’être m ises eu
pratique ; le travail dont nous parlons devant être publié dans un
prochain num éro, intégralem ent ou au m oins dans ses disposi
tions principales, il nous parait inutile d ’y insister aujourd’hui.
Dans sa séance du 5 novem bre 1803, la Com m ission a donné
son approbation au règlem ent que le com ité de publication du
journal avait élaboré et adopté. Ce règlem ent est purem ent
d’ordre intérieur.
Dans plusieurs de ses réu n io n s, le Conseil d ’adm inistration a
reçu diverses com m unications relatives à des faits d’exercice
illégal de la médecine. Les unes sc rapportaient à des laits isoles
on mal définis dont bonne note a été prise cependant ; d ’autres,
au contraire, ont révélé des faits plus sérieux, dont l’un surioui
s'est présenté dans des conditions de gravité telles (pie la Com
mission en a éié émue et a dû le déférer à l’au to rité judiciaire.
La répression du charlatanism e et de l’exercice illégal de la
m édecine continuera d ’être l’objet de la sollicitude la plus vigi
lante de la part de la Commission, qui saura éiro lidèle au m an
dat qu elle a reçu de lA ssem bl e générale. C’est, d’ailleurs, un
des buts de I Œ u v re, qui <loi! maintenir par son influence mo
ralisatrice i exercice de Ï art dans les voies utiles au bien public
et conformes a la dignité de la profession.
Dans la réunion qui suivit le décès du docteur M elchior Ho
bert, et en ouvrant la séance, M .S c u x , p résid en t, qui occupait
le fauteuil, paya en quelques mots partis du cœ u r un ju ste tribut
d éloges et de regrets à la m ém oire de ce distingué confrère,
m em bre de la Société depuis I , mois d ’août d ern ier seulem ent.
Séance m ensuelle du 3 m ars 1864.
M. S eux , président, occupe le fauteuil.
La Com m ission prononce b adm ission, aux term es de l’art. A
des S tatuts, des honorables confrères dont les nom s suivent :
MM. les docteurs Lauzet, N itard-R icord, Ollive, J. Roux, Sau
vât et V an-G aver.
M. le docteur Rondard, de Salon, m em bre de la S ociété, a
adressé une brochure intitulée : De i Association universelle des
Médecins et de son Importance nationale , et qui se term ine pa.i
une proposition capable , suivant l’au teu r, de donner a toutes les
familles des médecins une position digne du rôle que nous som
mes appelés à remplir dans le monde !
M. le Secrétaire est chargé de faire un rapport sur la com
m unication de M. R ondard. N ous donnerons ce rapport, s’il y a
lieu, dans notre prochain num éro.
La Com m ission a ensuite été saisie de diverses plaintes contre
l’exercice illégal de la m édecine et de la pharm acie par des reli
gieuses de différents ordres. Suivant I exem ple donné par un
très grand nom bre d ’autres sociétés locales, et en particulier par
celles du F inistère, du M orbihan et du D oubs, la com m ission
adm inistrative a décidé à l’unanim ité q u 'u n e lettre relative à ces
faits serait adressée à Mgr l'archevêque d’Aix et à Mgr l’évêque
de M arseille.
Il a été décidé aussi q u ’un fait très grave d ’exercice illégal de
la m édecine et de la pharm acie, reproché à un em pirique de
M arseille, serait déféré à M. le P rocureur im périal.
Enfin, un m em bre de l’A ssem blée a fait la proposition sui
vante :
Q ue penserait la Com m ission adm inistrative d’un m em bre de
la Société qui aurait recours à la publicité ( affiches ou
journaux), notam m ent pour faire connaître qu'il se livre à
telle ou telle spécialité?
Suivant l’auteur de eette proposition, o utre son im portance
générale, elle offre encore un intérêt i\ actualité immédiate ou
très prochaine. Cette question im pressionne vivem ent les m em
bres présents à la séance, qui décident de la prendre en consi
dération cl de la porter à l’ordre du jo u r de la plus prochaine
réunion.
�-
52 -*
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
Dans sa séance du 15 février, l'adm inistration des hospices a
procédé h I installation des deux nouveaux ad m inistrateurs nom
més par arrêté de M. le S énateur : M. B ernex, renom m é pour
cinq ans, et M. Charles R oux, négociant, nom m é en remplace
ment de M. Eug. Rozan, dont les fonctions étaient expirées.
M. le maire présidait la séance. Il a exprim ■ les reg rets que
faisait naifre la retraite de M. Rozan, dont l'intelligence et la
prodigieuse activité étaient si bien appréciées (h* ses collègues.
La rigueur des règlem ents s'opposant à une réélection , on ne
pouvait lui trouver de plus digues successeurs q u e M. Bernex,
déjà à I œuvre depuis un an, et M. C harles R oux, dont les ser
vices adm inistratifs antérieurs sont garants du zèle et du dévoùraent qu'il apportera dans ses nouvelles fonctions.
L'im portance qu’ont acquis les établissem ents hospitaliers
nécessite une surveillance d ’un travail de chaque jo u r. Aussi,
nous sommes heureux de le constater, l'ad m in istratio n , secouant
la torpeur et la som nolence m aheurcusem ent tro p habituelles
aux com m issions, a plus travaillé et plus fait depuis quelques
années, que jam ais auparavant. N ous lui devons la restauration
de la Charité, l’achèvem ent de l’hôpital de la C onception, la re
construction de notre vieil H ôtel-D ieu, dont les proportions
grandioses dom inent l'ancien M arseille. — Les soins intérieurs
n ’ont pas été négligés ; le régim e alim entaire, le service des ma
lades, celui des infirmiers ont été l’objet de délibérations impor
tantes, et enfin, l’organisation du service m édical a consacré le
m aintien de l’institution des co n co u rs, un m om ent ébranlée. —
Pour être juste, nous devons dire que M. Eug. Rozan fut l'un
des plus ardents défenseurs de cette institution à la fois si vantée
et si décriée, mais qui, du m oins, a l’avantage de ne jamais
laisser le choix s’égarer com plètem ent.
Un charlatan, exerçant la profession de tailleur dans l'un des
quartiers les plus populeux de n otre ville, a été désigné à la
Commission adm inistrative, com m e se livrant à l’exercice illégal
de la m édecine cl de la pharm acie. Sa spécialité est la vente et
l'adm inistration du rem ède Leroy. La C om m ission a décidé
q u ’une plainte sera portée au parquet avec les faits à l’appui.
Le Comité de Rédaction.
Marseille,— luip. Via!, rue TbJars , 8.
— 53 —
JU R ISPR U D EN C E M É D IC A L E .
E x e r c ic e i l l é g a l de la m é d e c i n e . — A c t i o n c iv ile des m é d e c i n s . —
P r é j u d ic e m o r a l.
Par un arrêt célèbre du 7 mai 1860, sanctionné par un arrêt
de la Cour suprêm e du 16 août suivant, la Cour de Lyon a adm is
com m e base de l’action civile des m édecins, en dehors du p ré
judice m atériel, le préjudice m oral que leur cause l’im m ixtion
de gens indignes dans l’exercice de leur profession.
Q uelques décisions nouvelles sont venues récem m ent confir
m er les principes posés par la Cour de Lyon. N ous en trouvons
deux très im portantes, m entionnées dans le rapport fait par
M. P. Amiral sur l’exercice illégal de la m édecine, dans la d er
nière assem blée générale de l’Association générale (2 novem bre
1865).
La prem ière ém ane du tribunal d’A rcis-sur-A ube :
« ..... A ttendu (pie l’art. 1er du Code d ’instruction crim inelle
porte que l’action en réparation du dom m age causé par un crim e,
un délit ou une contravention peut être exercée par tous ceux
qui ont souffert de ce dom m age ;
« Q u’un m édecin, porteur d’un diplôm e q u ’il a conquis par de
longs travaux et à grand prix, a un intérêt moral et m atériel à
ce que les individus étrangers à l’art de gu érir ne s’ingèrent pas
dans l’exercice de cet art ; que, dans le cas particulier, cet intérêt
est d’autant plus im m édiat que F ... (/’empirique poursuivi)
aurait exercé dans le département où sont établis les dem an
d eu rs... »
Ce jugem ent adm et, en principe, le préjudice moral com m e
base de l’actio n ; en tout cas, il adm et com m e recevables tous
les m édecins du départem ent.
La Cour d ’A m iens a encore été plus explicite dans son arrêt
du 16 janvier 1863 :
« A tten d u ..... q u ’on ne peut m éconnaître q u ’il y ait dans la
concurrence illicite faite aux hom m es de l’art par des em piriques
la source d’un préjudice m atériel souvent difficile à préciser en
chiffres, m ais suffisant pour que chez les m édecins un légitim e
i
�54
-
intérêt soit engagé et autorise leur p o u rsu ite, quand l’exercice
illégal a eu lieu dans la localité qu'ils habitent ; m ais q u ’à un
autre titre leur action est nou m oins justifiée par la déconsidéra
tion que ces pratiques et ces p rétendues g uérisons je tte n t su r le
corps médical, par les com paraisons blessantes et in ju stes qui en
résultent, et que sous ce rapport le préjudice m oral a tte in t dans
une m esure et dans des lim ites relatives chacun de ceux qui
loyalement exercent 1 art de g u érir, après s'ê tre soum is aux
épreuves et garanties exigées par la loi..... »
Postérieurem ent au rapport de M. P. A m iral, et à la date du
30 janvier 1864, le tribunal correctionnel d ’A n g ers, dans une
poursuite exercée par M. le procureur im périal co n tre un em pi
rique, a reçu l'intervention, com m e parties civiles, de quatre
m édecins, parmi lesquels se trouvaient le p résid en t, le viceprésident et le secrétaire de V Association m édicale du departe
m ent de M aine-et-L oire, et
« Considérant que les intervenants, ès-qualités q u ’ils agissent,
dem andent des dom m ages-intérêts pour le préjudice m oral et
matériel qui leur a été causé; considérant que B ..., en exerçant
illégalement la m édecine sans avoir fait des études spéciales et
sans avoir subi aucune des épreuves qui sont la garan tie des
connaissances indispensables à l’art de g u é rir, a porté un pré
judice moral aux intervenants; que ceu x -ci, au lieu d’être
estim és com m e ayant consacré leur vie a des travaux difficiles et
souvent dangereux, alin d obtenir leurs diplôm es, seraien t bien
tôt considérés par les populations com m e des hom m es ayant
acquis un privilège, non par des études nécessaires, m ais par
1 accomplissement de form alités légales tout à fait inutiles au
point de vue de la science ;
« Attendu que B ... a ainsi jeté de la déconsidération su r la
profession de m édecin, en s’im m isçant illégalem ent dans l'exer
cice de la m édecine et de la chirurgie ;
« Considérant que les intervenants habitent dans l’arrondis
sem ent d A ngers. et q u ’en o u tre du préjudice m oral ils ont eu
à subir un préjudice m atériel;
« Qu'eri effet, B ... n’a pas nié avoir reçu des salaires pour
les opérations qu i! a pratiquées, et que, quelles q u ’aient pu être
ces rém unérations, il y a eu préjudice m atériel pour les m édecins
de l’arrondissem ent ;
« Que si les intervenants ne peuvent prouver le chiffre exact
des dom m ages-intérêts par eux soufferts, c’est aux m agistrats
*
— 55 —
qu’il apporti ml d ’exam iner s’il y a exagération dans la dem ande,
d'apprécier le préjudice et d ’en fixer la réparation ;__
« ..... Condam ne B ... a l'i IV. d’am ende envers les hospices
d'A ngers pour eliaqiir contravention établie par les débats, soit
2 10 IV. [seize contraventions) ;
« Le condam ne a 400 IV. de dom m ages-intérêts envers les
parties civiles..... »
A ces decisions im portantes, nous en ajouterons deux autres
ren d u es, l’une par la Cour d ’Aix, et l’autre par le tribunal cor
rectionnel de M arseille.
N ous reproduisons l’arrêt de la Cour d ’Aix (14 m ars 1862).
« A ttendu que le pharm acien P ... ayant acquiescé au ju g e
m ent qui le condam ne pour exercice illégal de la m édecine à
M arseille, et appel n avant été relevé de ce jugem ent (pie par les
m édecins, parties civiles, qui se plaignent de n'avoir obtenu
que les dépens du procès pour tous dom m ages-in té rets, il ne
s’agit plus que de savoir s’il y a lieu d accorder aux plaignants
quelque au tre indem nité ;
« A ttendu, à cet égard, q u ’en supposant qu il n ’y ait eu de la
part de P ... que les quatre contraventions constatées par le
jugem ent, cette concurrence illégale a nécessairement porté aux
m édecins de..Marseille un double préjudice, un préjudice m até
riel et un préjudice moral en éloignant d eux une partie de
leurs pratiques et en menaçant leur profession d'abus compro
mettants ; qu'il faut donc que ce double préjudice soit réparé,
but qui ne saurait être atteint par une sim ple adjudication des
d ép en s; qu'on a tort en cela d ’opposer aux plaignants la m inim ité de leur in térêt individuel et la difficulté d’apprécier cet
intérêt au m ilieu du grand nom bre des m édecins ; q u ’on doit
faire cette appréciation sans se préoccuper de l’intérêt de ceux
qui ne se plaignent p as, et m êm e en ne considérant le préjudice
q u ’en lui-m êm e;
« A ttendu, quant h ce, que la som m e réclam ée est évidem
m ent excessive, et qu’une som m e de deux cents francs parait
suffire à la réparation du préjudice causé par les contraventions
dont P ... s’esl rendu coupable;
<( La Cour, ayant tel egard que de raison à l appel des parties
civiles, et faisant ce que les prem iers juges ont m a ta propos
refusé de faire, condam ne P ..., avec contrainte par corps, à
�-
ne -
— 57 —
payer aux plaignants, agissant en leur nom personnel et dans un
intérêt collectif, la som m e de deux cents francs à titre de dom
m ages-intérêts, confirm e le surplus de ce d o n t est appel ;
« Et condamne P ..., etc. »
La décision du tribunal correctionnel de M arseille est h la
date du 13 mai 1861 et a été rendue sous la présidence de
M. G am el; elleoffre une particularité très rem arq u ab le: à défaut
de préjudice m atériel, le préjudice m oral a sulli po u r justifier
l’intervention des m édecins parties civiles et pour m otiver une
allocation de dom m ages-intérêts.
« A ttendu que l'intervention des parties civiles est recevable,
«pie tous docteurs en m édecine ou officiers de santé exerçant
légalement à Marseille ou dans la banlieue ont droit et intérêt
à poursuivre la réparation du préjudice que leur cause une
concurrence illégale; que ce préjudice est plutôt moral que
m atériel..... »
Dans l’espèce, il s agissait d ’une fem m e poursuivie par M. le
procureur impérial pour exercice illégal de la m édecine et qui se
bornait il ordonner des herbes et a prescrire le plus souvent des
pratiques bizarres et superstitieuses.
Tout
p h a r m a c i e n qui d é liv r e des m é d i c a m e n t s
com posés,
san»
o r d on n an c e du m é d e c i n , e st p a s sib le d ’u n e a m e n d e d e 5 0 0 fr.
Nous lisons dans plusieurs journaux de m édecine :
«< Le secrétaire de l’Association de prévoyance e t de secours
m utuels des m édecins du départem ent de la L oire no u s com
m unique la copie d un jugem ent rendu par le trib u n al de SaintE tienne (10 octobre i8 5 5 j, et confirm é par la C our impériale
de Lyon. »
La question jugée présentant de l’in térêt, nous croyons devoir
reproduire le dispositif du jugem ent :
« A ttendu que le prévenu a cautérisé à diverses reprises les
plaies au gosier du témoin M ..., entendu ;
■M B
à
« A ttendu qu ’il a, en outre, rem is à ce m êm e tém oin des
fio les, les unes pour gargarism es , les au tres pour l’usage
in terne ;
« A ttendu (pic le tém oin, non-seulem ent atteste la réalité des
faits, m ais encore reconnaît parfaitem ent le prévenu pour être
l auleur des opérations et la personne qui lui a rem is les m édi
cam en ts;
« A ttendu <pie la cautérisation de la gorge constitue de la
part du prévenu un acte de m édecine chirurgicale, accompli
sans qualité et punissable, aux term es de l’article 3 5 de la loi du
19 ventôse an xi ;
« A ttendu, en ce qui touche la délivrance des m édicam ents,
qu'il im porte d ’abord d ’en préciser la n atu re, afin de savoir s’ils
appartiennent à la catégorie de. ceux qui peuvent être vendus
sans ordonnance ;
« A ttendu que le tém oin, il est vrai, n ’indique pas leur con
tenu, m ais «pie le caractère de la m aladie ne perm et point de
douter que les m édicam ents fournis n ’aient été com posés d ’agents
d ’une certaine im portance, com binés et dosés par le prévenu ;
« A ttendu (pie les rem èdes dont s'agit étaient com posés
et de la n atu re de ceux qu i, aux term es de l’article 32 de
la loi du 21 germ inal an xi, ne peuvent être débités sans
ordonnance ;
« A ttendu que, il est vrai, l’article 32 se borne à la défense
sans édicter de pénalité, mais que cet article ne fait que rep ro
duire dans la loi organique une interdiction déjà existante et déjà
punie, et (pi on doit en conclure (pie ce n ’est lii q u ’un rappel
d’une disposition ancienne toujours subsistante, disposition que
la loi du 21 germ inal a généralisée, en étendant à toute la France
sa partie jusque-là restrein te dans le ressort de P aris;
« Q ue l’arrêt du 23 juillet 1748 est donc applicable ;
« P ar ces m otifs,
« Le T rib u n al, jugeant correctionnellem ent,
« Vu l’article 55 de la loi du 19 ventôse an xi,
« Vu l’article 52 de la loi du 21 germ inal an xi et l’arrêt du
règlem ent du P arlem ent de Paris, du 2 5 juillet 1748,
« C ondam ne A ... à quinze francs d’am ende pour exercice il
légal de la m édecine, à cinq cents francs d’am ende pour déli
vrance et débit de m édicam ents com posés sans ordonnances de
docteurs ou d ’officiers de santé.
�— 59 —
« Le condam ne en outre aux dépens par co rp s, liquidés à
onze francs vingt-cinq centim es, outre et non com pris le coût
et accessoires du présent jugem ent »
H O P I T A L D E LA C O N C E P T I O N .
S E R V I C E DE M . LE P R O F E S S E U R
S E U X.
Pleurésie. — Bruit de frottement remarquable par son in
tensité — Observation recueillie par J . Marcorellcs, interne
du service.
Quand M. Seux prit le service, le I er jan v ier 186 4 , était cou
ché. au n* 8 de la salle S aint-Jean-B aptiste, le nom m é Pazolle
P ierre, âgé de 15 ans, profession de m ineur, e n tré à Lhôpital
le 21 décem bre 1865.
Ce m alade, d une constitution autrefois ro b u ste, m ais affaibli
aujourd hui par la m isère, n ’a eu, dans sa vie, q u 'u n e lièvre in
term ittente il y a vingt ans et, il y a cinq ans, des douleurs rhu
matism ales qui cessèrent peu de tem ps après leu r apparition. Il
n ’a jam ais eu de m aladies vénériennes. Son père est mort à
l’âge de 50 ans ; sa m ère vit encore.
Le 18 août 1805, après un bain froid prolongé, il se sent un
frisson violent ; il se repose le lendem ain, et le 2 0 reprend son
travail. Le malade dit avoir eu ce jo u r la une toux sèche, de la
gêne dans la respiration et un pend expectoration. Le 2 6 du même
mois, une douleur assez vive, au dessous du m am elon gauche,
vient com pliquer son étal, et m algré le m alaise q u 'il éprouve, il
continue son travail ju sq u ’au 18 décem bre. H o rs il s ’alite, et son
état ne s'am éliorant pas, il se décide, le 21 d écem b re, a venir à
l’hôpital.
M. Seux, à son arrivée dans le service, co n state les phéno
m ènes suivants: am aigrissem ent, pas d e lièvre, toux sèche sans
expectoration ; le malade dit entendre dans le côté gauche de la
poitrine un bruit qu il com pare au frottem ent du cuir.
Le thorax ne présente aucune déform ation h la vue
Si l’on applique la main h gauche et en avant de la poitrine,
on sent un frottem ent rude et très intense qui se m anifeste
pendant l’inspiration et l’expiration, m ais plus fort pendant
L inspiration. Celte sensation de frottem ent est insignifiante en
arrière.
La percussion fait découvrir une légère subm atité en avant ;
en arrière et â la partie inférieure une m atité plus prononcée.
À l’auscultation on entend, en avant, jusques sous la cla
vicule, un bruit de frottem ent très intense ayant grande analogie
avec du parchem in que l’on froisserait. Ce bruit s ’étend ju sq u ’à
la partie inferieure et latérale; â la partie postérieure, il est plus
faible.
A la base de la poitrine, en arrière, on entend un peu d ’égo
phonie : absence de la respiration en ce point.
A d ro ite, I auscultation et la percussion ne donnent rien de
particulier.
Le malade a une légère d y sp n ée; il n a pas de douleur de
côté, l’appétit est bon ; pas de diarrhée ni de constipation.
La percussion et l’auscultation ne font rien découvrir du côté
du cœ ur. Les urines sont norm ales ; le systèm e nerveux n ’offre
rien a signaler.
D iagnostic : pleurésie en voie de résolution.
P our hâter celte résolution, M. Seux prescrit : 2 gram m es de
nitrate de potasse et 12 gouttes teinture de digitale pour un litre
de tisane de chiendent et un vésicatoire. Le malade prend cette
tisane ju sq u ’à sa sortie.
Le 9 janvier 1864, le vésicatoire est sec, les sym ptôm es s'a
m endent.
Le 15, la respiration est libre, la toux dim inue. Le b ruit
de frottem ent , il y a quelques jours si intense , s’entend
m oins, m ais le m alade en a toujours la sensation : l’égophonie
est m o in d re; l’appétit a augm enté. Application d ’un second vé
sicatoire.
Le 2 1 , le m alade n’entend plus le b ruit de fro ttem en t; à
l’auscultation, on l’entend encore fort légèrem ent et seulem ent
en avant. En arrière, la m atité a com plètem ent disparu ainsi que
l’égophonie.
Le 2 5 , la m ain ne perçoit plus la sensation de frottem ent que
l’oreille p eu t encore apprécier, quoique très légèrem ent.
�Le 30, le malade se sentant bien, dem ande son exéal, qui lui
est accordé.
M. Seux nous a fait rem arquer que ce cas de p leu résie était
digne de fixer l’attention, h cause de celte triple condition du
bruit de frottem ent entendu par le malade lu i-m êm e, perçu par
la main de l’observateur et reconnu par l'oreille. De plus, ce
bruit que l'on perçoit ordinairem ent h la partie m oyenne latérale
ou postérieure du thorax, était d 'u n e intensité très rem arquable,
particulièrem ent en avant, dans toute la h au teu r du côté gauche
de la poitrine, jusque sous la clavicule, et il s'en ten d ait dans les
deux temps de la respiration.
Ces différentes conditions m éritaient d ’être signalées.
NOUVELLES ET VARIÉTÉS
i
Nos lecteurs voudront bien nous p erm ettre de reproduire les
lignes suivantes em pruntées au feuilleton de Y Union médicale,
du 1 2 m ars, qui apprécie dans les term es les plus flatteurs
l’Union médicale de la Provence.
cnBOBriQCE départevteytale. — Salut à un homonyme !
« On a dit et l’on répète sans cesse q u ’il n ’y a plus de place
en m édecine pour de nouveaux jo u rn au x , et néanm oins, au m é
pris et comme au déli de celle assertion p u blique, il en apparaît
toujours sur le modèle des anciens et su i\a n t les m êm es erre
m ents. Trop souvent, hélas! leurs au teu rs paient chèrem ent
cette im prudence ou cette audace, et, nées n o n -v iab les, ces
feuilles vivent ce que vivent les roses ; leu r éclosion n ’est que
le triste prélude de leur chute prochaine. En voici une du moins
qui, m ettant cet enseignem ent à profit et évitant les sentiers
battus, vient de se créer à Marseille dans une voie nouvelle et
peu explorée ju sq u ’ici : c'est VUnion médicale de la Provence.
Organe officiel de la Société locale des m édecins du départem ent
des B ouches-du-R hône et de toutes celles qu i, agrégées a l'A s
sociation générale des médecins de France , voudront lui confier
la publication de leurs actes, ce journal s'appuie spécialem ent
sur le grand principe de l’Association pour le développer, le
vivifier et en favoriser l’application. M ensuel, par livraisons
d’une ou deux feuilles, il contiendra avant tout les com ptesrendus, procès-verbaux ou com m unications de ces sociétés, et
le surplus sera réservé aux travaux professionnels et scientifi
ques. Le docteur Chapplain constate ainsi dans ce prem ier nu
m éro l’extension et la richesse croissante des Sociétés de secours
m utuels, signale leurs conditions de succès et de prospérité, et
en m ontrant que les services m édicaux en sont la base et toute
l’économ ie, fait ressortir la ju stice de rétrib u er équitablem ent
les m édecins, ce qui est bien plus convaincant et pérem ptoire,
en faveur de nos droits, que tant de déclam ations faites a cet
égard.
« En réalisant ainsi sous la form e la plus utile et la plus fé
conde au succès de l’Association m édicale en province deux
conditions essentielles h sa propagation : une publicité périodi
que et l’alliance intim e de la science avec les intérêts profession
nels, \' Union médicale de la Provence donne un exem ple salu
taire, q u ’il serait désirable de voir suivi au m oins dans les p rin
cipaux centres. E lle ouvre com m e une ère nouvelle, et m ontre
q u e, bien comprise, l’A ssociation doit être le palladium de la
profession. Toutes les am éliorations, les progrès professionnels
peuvent être obtenus sous son égide. N on, ce n ’est pas seule
m ent « un m orceau de sucre que le gouvernem ent a m is dans
notre bouche pour la ferm er a toutes nos plaintes, » com m e l’a
dit avec plus d’esprit que de vérité un ém inent critique ; car,
avec ce bonbon, l’exercice illégal, le charlatanism e peuvent être
réprim és et vaincus ; les Sociétés de secours m utuels, les éta
blissem ents charitables et toutes les institutions ayant à recourir
aux lum ières de la m édecine, peuvent avoir a com pter avec elle; si
par une union intim e, une solidarité étroite de tous les m em bres
honorables de notre profession et une vigilance continue de cha
cun en particulier autour de lui, pour le redressem ent de nos
griefs, la dignité et l’honorabilité professionnelles, nous savons
faire valoir et respecter nos droits, nos prérogatives avec justice
et m odération, com m e il convient à un grand corps. O ui, l’as
sociation peut tout cela, com m e de nom breuses décisions
judiciaires et adm inistratives enregistrées dans ses annales le
prouvent déjà, et sont des gages de succès dans l’avenir. Beau
coup de m édecins, beaucoup trop, nous le savons, préféreraient
un rôle passif et s’en rem ettraien t volontiers au gouvernem ent
�—
62
—
pour leur faire ce lil de roses ; m ais il n'est plus possible aujour
d'hui de conserver cette illusion ; au tres tem ps, a u tre s m œurs;
l'action individuelle est la condition du succès dans les Sociétés
m odernes ; chacun en a la responsabilité devant les hommes
comme devant Dieu, et doit la faire valoir en conséquence ; la
victoire est h ce prix. L ’aliéner, c ’est s'a m o in d rir, abdiquer et
s’annihiler.
« Si tous les m édecins prenaient ainsi en m ain avec résolution,
courage et intelligence la ju stice «le leur cause so u s la protection
de l'Association qui leur est perm ise et offerte, ils obtiendraient
bientôt la réalisation de leurs vœux, et l'A ssistance q u ’elle con
sacre leur serait donnée com m e par surcroît ; car sous ce vocable
tout se trouve, il ne s'agit que de le ch erch er. D es esp rits pré
venus on inaltentifs n ’y ont vu à tort que l' A ssistance pécuniaire;
l'examen et la solution de toutes les questions professionnelles
s’v rencontrent de m êm e, en restant dans h* cham p de la légalité,
comme le m ontre si bien le nouveau jo u rn al, qui nous inspire
ces réflexions. Soyez donc la bienvenue, L'rnon médicale de la
Provence ; nous vous souhaitons su eeèset prospérité*. Instruisez,
éclairez les m édecins su r ce principe fécond de T Association,
pour qu'ils s y rallient tous ; entretenez, vivifiez le feu sacré, et,
m essager de la bonne nouvelle, en la faisant m ieux com prendre,
vous la ferez accepter. »
Nous rem ercions le spirituel et savant co llab o rateu r de \ Union médicale de ses éloges et de ses en co u rag em en ts. Ce
bienveillant accueil nous touche d’autant plus q u ’il nous vient
d'un journal si haut placé dans l’opinion publique, si rem arqua
ble par son esprit de justice et «l’im partialité, si dévoué à la grande
cause de l’Association médicale qui a inspiré n otre m odeste pu
blication et qui la soutiendra.
Oui. nous avons l'espoir que notre feuille vivra, si elle peut
com pter su r le dévouem ent et le désintéressem ent de la grande
m ajorité, nous voudrions dire de l'unanim ité de nos confrères
des B ouches-du-R hône ; com bien son im portance s ’accroilraitellc encore si les sociétés locales voisines lui ap p o rtaien t leur
coucou rs.
— 63
Conform ém ent a la décision prise par la Com m ission, dans
sa dernière séance , MM. les président et secrétaire de la
Société ont adressé à M onseigneur l'archevêque d'Aix la lettre
suivante :
« M onseigneur,
« Les sociétés m édicales instituées dans toute la France s'oc
cupent, avec la plus vive sollicitude de toutes les questions qui
intéressent la santé publique et l’honorabilité de la profession
m édicale: au prem ier rang de ces im portantes questions se place
l'exercice illégal de la m édecine et de la pharm acie.
« Cet exercice illégal (h* la m édecine et de la pharm acie se pré
sente à elles sous deux aspects bien différents : c’est, d ’un côté,
un scandaleux trafic, com m is par des charlatans éhontés qui
n 'o n t d’autre souci que de rem plir leur bourse au détrim ent des
trop crédules m alades. C ontre lui, les associations m édicales
sont sans pitié, elles défèrent sans hésitation les coupables a la
justice, et les annales des tribunaux fourm illent, dans ces d er
nières années, des nom breuses condam nations obtenues.
« Mais h côté de ce vil cl indigne charlatanism e vient se pla
cer m alheureusem ent aussi l'exercice illégal com m is par des
ecclésiastiques ou des religieuses, dont le zèle et la charité
dépassent trop souvent les lim ites posées par la loi pour la
sauvegarde de la santé publique.
« I e dévouem ent et la charité ne sauraient suppléer aux
connaissances spéciales que la société a exigées de ceux a qui
elle a confié plus particulièrem ent le soin des m alades. Et l’on
voit ainsi un zèle respectable dans sa source, devenir funeste
dans ses résultats.
« Les m édecins qui sont les tém oins jo u rn aliers de ces p rati
ques illégales et dangereuses ne pouvaient m anquer de s’ém ou
�—
64
—
voir également d’un pareil état de choses, m ais ici la voie à
suivre était toute différente. Ils ne pouvaient o u b lier q u ’ils
rencontrent souvent chez les religieuses et les ecclésiastiques des
auxiliaires précieux, lorsque ce concours ne prend pas le carac
tère d'une com plète substitution d’action.
« Aussi, dans les cas de ce g en re, ce n ’est plus à la ju stice que
les Sociétés médicales dem andent le redressem ent de pareilles
illégalités, elles s'adressent avec confiance aux ém in en ts prélats,
placés à la tête des corporations religieuses et du clerg é, et ce
n'est pas en vain q u elles font appel à leur haute sagesse pour
m odérer les entraînem ents d’une charité souvent plus zélée
qu'éclairée.
« Dans cet ordre de faits, nous pourrions, M onseigneur, vous
citer de nom breux docum ents avec des nom s illustres et des
dates précises. Il nous suffira de vous dire que le C orps Médical
de France a pu lire souvent et avec une profonde reconnaissance
de fort belles et fort sages |« ro les ém anant de l’épiscopat ; il a
adm iré surtout une très récente circulaire de Son E m inence le
cardinal M athieu, archevêque de Besançon.
M onseigneur, la Société locale des m édecins des B o u ch es-d u Rhône, agrégée à l’Association générale des M édecins de France,
dont nous avons l’honneur d être auprès de vous les très res
pectueux interprètes, a été saisie elle aussi de faits sem blables à
ceux dont nous venons de vous faire un exposé g énéral.
« Elle a déféré à la justice les charlatans p ro p rem en t dits,
mais c’est à votre haute sagesse, M onseigneur, qu elle vient si
gnaler les faits qui sont reprochés par nos C onfrères de la ville
d Arles aux religieuses de Saint-V incent-de-P aul de cette ville
et aux religieuses de l’hôpital de Tarascon.
« N ous avons l’honneur de m ettre sous les yeux de V otre
G randeur un extrait de la lettre qui nous a été adressée par des
confrères d A rles............................................. (Suit la lettre.)
Ces faits sont parfaitem ent précis, ils pourraient être plus
particulièrem ent spéciliés, si besoin était. L honorabilité bien
connue et incontestée des signataires de cette lettre, que nous
relatons, leur donne un caractère d’authenticité com plète.
« Tels q u ’ils so n t, ils paraîtraient certainem ent à Votre G ran
deur tout aussi sérieux q u ’ils nous l'o n t paru 'a nous m êm es.
T outefois, en les po rtan t à votre connaissance, M onseigneur,
nous n ’avons nullem ent la prétention d’invoquer auprès de vous
la loi qui protège nos droits contre des em piétem ents profes
sionnels, de quelque côté qu'ils viennent, mais en venant porter
très respectueusem ent nos plaintes a Votre G randeur, nous
préférons ne tenir que de votre bienveillance et de votre haute
sagesse le redressem ent d ’abus dont nous serions d’ailleurs
m oins em pressés de nous plaindre s'ils ne pouvaient devenir un
danger sérieux pour la santé publique.
« N ous avons la ferm e confiance que vous daignerez en ordon
ner la cessation, ainsi que de tous ceux qui, dans le m êm e ordre
de faits, pourraient être com m is par les personnes placées sous
votre haute juridiction.
« Veuillez en agréer, m onseigneur, l’expression anticipée de
notre très respectueuse gratitude.
« N ous avons l’ho n n eu r d ’être, M onseigneur, etc. »
— M onseigneur l’archevêque d’Aix a daigné avec le plus
grand em pressem ent faire à cette lettre la réponse suivante :
Aix, le 17 m ars 1864.
M onsieur le P résident,
Je n’ai aucune connaissance de ce qui a donné lieu aux plain
tes form ulées contre les sœ urs de S aint-V incent-de-P aul d'A rles
et de Saint-T hom as de Tarascon. Je fais écrire aux supérieures
de ces deux établissem ents pour q u ’elles veillent il ce que l’on
�— 66 oa sorte pas des limites de la légalité, cl dans ma prochaine
visite daus ces deux villes j exam inerai par in o i-m érae ce qui
s'est lait par rapport aux consultations, petites opérations et
ventes de rem èdes, qui vous ont été signalées. Je ne doute pas
que les abus, s il y en a, ne soient facilem ent réform és.
Recevez, Monsieur le P résident, l’assurance de ma considé
ration très-distinguée ;
7 G eorge, archevêque d ’Aix.
— Le 7 m ars dernier, VI. Rayer, président «le l’Association
générale, et M. Paul \ mirai. l'un des conseillers judiciaires de
I Association, ont obtenu une audience de S. Exc. M. le ministre
de la justice, et ont eu 1 honneur de lui rem ettre un Mémoire
sur plusieurs cas graves d ’exercice illégal de la ni «lecine, signa
lés au Conseil général par la Socié té locale de la G ironde.
M. Rayer et M. Amiral ont. de plus, rappel ' à l'attention de
M. le garde des sceaux les plaintes unanim es du corps médical
sur 1 insuffisance des honoraires attribués aux m édecins requis
par la justice, et sur la nécessité de la rév ision des tarifs «édictés
jiai' le décret de 1811.
M. le m inistre s’est m ontré très atten tif à la double exposition
«pii lui a été faite, et a prom is, avec une gran d e bienveillance,
de prendre en sérieuse considération la com m unication qu’il
venait de recevoir.
— Dans une des dernières séances de la C om m issitm ^dm inistrative de la Société centrale, nous avions rem arq u é l'adm ission
de M. V elpeau,président d<* l’Association des M édecins d«* la
Seine, fondé par Orfila.
A cette occasio n , nous nous étions livré à un petit tra
vail de comparaison entre l«*s iisl«*s des m em bres «le la Société
centrale et de ( Association de la Seine et nous avions trouvé
sur chacune d’elles les m êm es nom s en très grand nom bre ;
-
07
-
la plupart des dignitaires de l’une figurent su r la liste de l’au tre,
et réciproquem ent. Cet état de choses nous frappa, et l’agréga
tion de l’Association des m édecins «le la Seine nous apparut pro
chaine ; aussi notre surprise n'a pas été trop grande quand nous
avons appris par 1’ Union médicale du 2 avril «pie cette agrégation
était devenue un fait accom pli.
En poursuivant les réflexions qui nous étaient ainsi suggérées
p a rle nouveau titre to u t m odeste que le célèbre chirurgien de
la Charité ajoutait à ceux si nom breux et si brillants que nous
lui connaissons, nous reportions notre pensée su r un fait ana
logue «pii se passe dans les B ouches-du-R hône : a côté de l’A s
sociation m édicale existe le Com ité médical ; celui-ci est plus
ancien et plus riche q u ’elle, et de plus, il est reconnu d ’utilité
publique par décret im périal; m ais, pour être ju ste, on accordera
à 1 Association m édicale un avantage, celui de son agrégation h
l’Association générale des m édecins de F ra n c e ; cet avantage
rachète largem ent l’infériorité de son âge et de sa situation
financière; à I exem ple «le ce qui s’est passé dans les Associations
centrale et de la Seine, chaque jo u r am ène a l’A ssociation m édi
cale quelque adhésion nouvelle de la part de Confrères faisant
partie du Com ité m édical, tout com m e des m em bres de l'A sso
ciation m édicale peuvent grossir les rangs du Comité médical.
Dans les adm issions nouvelles prononcées par la Commission
adm inistrative dans sa dernière séance, un exem ple précieux
«les faits «pie nous avançons nous est fourni par l'adhésion â nos
statu ts de M. le Dr M artin, professeur honoraire de l’Ecole de
m é d ecin e, chirurgien consultant des hôpitaux « p ii, m em bre
fondateur du Com ité m édical des B ouches-du-R hône, s’est rallié
avec le plus grand em pressem ent â une institution dont il a su
apprécier le b u t protecteur et m oralisateur.
Poursuivons ju sq u ’au b o u t notre com paraison. Le Comité
m édical suivra- t-il l’exem ple «pie lui donne I Association de la
S ein e? E spérons-le !...
�— 68 —
DK LA MALADIE D ES TRICHINES (TRICIHNIAS1S).
Séance de la Commission Administrative du 7 avril.
PRÉSIDENT M. SFUX.
La commission a prononce l’adm ission de sept nouveaux
m em bres qui sont : MM. A ubert, A uphan, G iraud (Jules),
m édecin en chef de l’Asile de S ain t-P ierre, L iautaud, Martin,
professeur honoraire de l’Ecole et ch iru rg ien consultant des
hôpitaux. Offand, Philippon.
Elle a reçu com m unication de quelques faits d ’exercice illé
gal de la m édecine qu elle a décidé de déférer à M. le Procureur
Impérial.
Enfin, elle s’est occupée d ’une question très im p o rtan te d ho
norabilité et de dignité professionnelle «pic le défaut d'espace
nous oblige à nous contenter d indiquer.
Le Comité de Rédaction.
-------- —egfccgxfa»*----------
A VIS.
Les m édecins des Bouches-du-R hône qui ne font pas encore
partie de la Société recevront, avec ce n u m éro, un acte d adhé
sion qu’ils voudront bien renvoyer à M. le secrétaire.
Chaque appel que nous faisons à nos C onfrères augm ente
notre nom bre ; espérons que bientôt pas un seul médecin
honorable n ’osera avouer qu il est resté étran g er au grand m ou
vement qui tend à réunir en un seul faisceau la fam ille médicale
tout entière.
Tout médecin des B ouches-du-R hône, V ar, V aucluse, AlpesM aritimes et Basses-Alpes à qui le journal sera adressé et qui
ne l’aura pas renvoyé ou n'aura pas donné avis de son refus
d’abonnem ent avant le 1er mai, sera considéré com m e abonné.
DarteiU*.— Icopr Vial, r. Tblarr, K.
Parm i les entozoaires qui peuvent d o nner lien, chez l’hom m e,
h des altérations pathologiques, est venu se ranger, d rpuis
quelques an n ées, le Trichinia spiralis. Cet anim al, dont la pré
sence, dans l'épaisseur du tissu m usculaire, a été reconnue par
M. C ruveiIhier, par M. Lébert, paraissait donner lieu h des
altérations dont l’autopsie pouvait seule donner co n n ais
sance. P endant la vie, celle intoxication des m uscles sem blait
devoir passer com plètem ent inaperçue. C’était par hasard, dans
les am p h ith éâtres, su r des sujets destinés aux dissections, que
le docteur H ilton, qu Ovven avaient trouvé les prem iers élé
m ents des études qu'ils ont faites sur ce ném atoïde. Les sujets
qui avaient succom bé paraissaient devoir le term e de leur
existence aux m aladies ordinaires, fièvres typhoïdes ou autres.
M. L ébert annonçait dans son grand ouvrage d ’anatom ie patho
logique «jue la présence des trichines dans l'organism e ne
donnait point lieu h des accidents sérieux.
De 1835 à 1865, l'étude des trichines était purem ent sp é
culative au point de vue m edical, c ’est un fragm ent détaché de
l'u n e des sciences accessoires, de l’h*stoire naturelle. Oxven,
Virchow étudient les m igrations et le développem ent de l’an i
mal. Mais voilà qu’en m êm e tem ps paraissent un très grand
nom bre de m onographies, en A llem agne, en A ngleterre. Le
Trichinaspiralis n ’est plus un animal insignifiant pour le m éde
cin, pour le praticien, c’est un ennem i de l’espèce hum aine, il
va p ren d re rang parmi les entozoaires qui m enaçenl non pas
seulem ent la santé, mais la vie de l’hom m e ; il fait de n om
breuses victim es, des familles entières sont détruites par sa
présence dans l'organism e. M. L aségue, dans les Archives de
médecine, après avoir consacré, en décem bre 1862, un article
à étudier les caractères de la trich in e, reprend dans le m êm e
journal l’étude des épidém ies diverses auxquelles elle a donné
lieu, en A llem agne su rto u t.
Il ne saurai! en trer dans nos intentions de donner à l’article
5
�que nous consacrons a ces nouveaux hôtes une étendue trop
grande, nous voulons contribuer h répandre les connaissances
qui ont été acquises. Nous voulons appeler l’attention des pra
ticiens sur une maladie nouvelle qui n ’est peut-être inconnue
parmi nous que parce qu’on n’a pas encore appris à la distinguer
des autres altérations de l’organisme. Nous renverrons, pour
des détails plus complets, aux deux remarquables articles de M.
Laségue et aux diverses monographies, pour la plupart publiées
en langues étrangères, (pii traitent de cette nouvelle maladie.
La maladie qui nous occupe est caractérisée par la présence
d'un entozoaire (
Trichinia spiralis)
dans les
muscles de
l'homme.
Quels sont ces nouveaux hôtes? Ils sont décrits par Virchow
de la manière suivante :
La trichine est contenue, comme on le sait, dans un kyste
qui parait ins ré entre les fibres primitives du muscle. La forme
du kyste est ronde ou ovalaire, les deux extrémités sont arron
dies ou aplaties, on même s’allongent en pointe ; suivant que la
forme arrondie ou allongée prédomine, les kystes apparaissent
comme des petits points, des granulations ou des vésicules, ou
comme de petites stries qui contrastent avec la coloration
rouge des muscles par leur transparence ou leur couleur grisâ
tre. La forme ovoïde allongée est la plus commune, surtout
lorsque la substance musculaire est résistante et bien dévelop
pée ; elle tient évidemment a la pression exercée par les fibres
musculaires.
Dans la plupart des cas, les kystes sont grisâtres, sinon
blaucs, opaques, et leur opacité est produite par des dépôts
calcaires. Le dépôt calcaire n ’a pas là la même signification que
pour les cysticerques et les échinocoques, il n ’indique pas la
mort de l’animal ou sa prochaine transformation crayeuse et il
n'est pas rare de trouver dans les capsules incrustées l ’intérieur
libre et l’animal vivant. Les acides acétique et chlorhydrique
dissolvent les sels de chaux avec un petit développement de
gaz. L ’infiltration calcaire, qui débute par les extrémités, s’étend
rarement d'une manière uniforme sur toute la surface.
La structure de ces kystes a été l'objet de recherches nom
breuses. Luschka distingue une enveloppe externe qui donne
la forme à la capsule, et une couche interne. La première com
posée de tissu connectif avec des vaisseaux, serait un produit
d’inflammation ; la seconde appartiendrait en propre à la t r i
chine. Il est vrai qu’on trouve, à la périphérie des kystes, une
petite masse de tissu cellulaire vascularisé, renfermant assez
souvent de la graisse, et qui n’a rien de commun avec le kyste
lui-m êm e. V irchow n’a jamais pu arriver à isoler la membrane
interne dont Bristowe et Raynev nient également l'existence,
il n’en admet pas moins que la cavité intérieure est arrondie ou
ovoïde, et que les prolongements paraissent formés par un
tissu solide composé découches concentriques superposées, et
se prolongeant plus ou moins sur la continuité du kyste. Les
diverses couches ne contiennent ni granules ni cellules, et
consistent en fibres allongées, fusiformes, assez analogues, à la
coupe, aux corpuscules des cartilages. On peut donc considérer
le kyste comme un produit homogène. Est-il le résultat d ’une
réaction? appartient-il à l'organisme de l’animal, c’ est ee qu'il
est jusqu’à présent impossible de décider.
Le fait de la présence d’une membrane interne celluleuse,
ou pour mieux dire d’un épithélium, n’ est pas sans importance.
On pourrait, en effet, en inférer que le kyste tout entier est un
produit de nouvelle formation appartenant à b organisme de
l’homme. Ajoutons comme un des éléments utiles à la solution
de cette question histologique, qu'on rencontre parfois deux on
trois animaux enfermés dans la même capsule.
Luclika avait constaté dans l ’intérieur du kyste, indépendam
ment de Llie lm in ilie , une masse de granules élémentaires et de
petits corpuscules ronds ou allongés, qui ne peuvent être que
des noyaux avec un ou deux nucléoles. Ces noyaux ou cellules
ne se produiraient, suivant Bristowe, qu’après la mort de
l ’animal ou tout au moins peu de temps avant.
Quant à l ’animal lui-m êm e, l’extrém ité la plus ténue répond
certainement à la bouche et la plus épaisse à l ’anus. Le ver ne
se meut pas seulement quand il est extrait de la capsule; mais
il exécute môme dans le kyste quelques mouvements qu’on
détermine aisément à l ’aide d’ une solution faible de potasse
caustique. Ces mouvements consistent en un raccourcissement
ou un allongement de la spirale, en quelques déplacements
�-
72
-
latéraux rie Pextrémité céphalique, et aussi en quelques oscil
lations du canal digestif. Bristowe a remarqué avec raison que
l'animal s'enroule toujours dans le même sens.
La structure intérieure de la trichine laisse encore beaucoup
de points h éclaircir, et si les éléments qui la composent ont été
h peu près décrits de la même façon par les observateurs, il s’en
faut qu'ils leur donnent tous la même signification. M. Davaine,
qui a beaucoup insisté sur 1 anatomie du kyste, mentionne
très brièvement celle de l'animal qu’il contient ; sans être
aussi exclusifs, nous nous bornerons 'a de courtes indications.
Le ver présente un tégument distinct, un oritice buccal et
anal, un canal alimentaire qui va directement de I un à Laulrr,
et en outre, un tube existant dans son tiers postérieur qui se
relie probablement a la fonction reproductrice. Le tégument
est transparent, homogène, indiqué par deux ligues fines, parrallèffis ot finement dentelées; immédiatement au-dessous de
l’ enveloppe tégumentaire est. une couche trois ou quatre fois
plus épaisse, composée d’une matière transparente jaunâtre,
dont la portion externe est dépourvue de structure, tandis que
l'interne est semée de petites granules. Les orifices buccal et
anal sont l’un marqué par une dépression conique ou par mie
petite papille, l’autre par une simple dépression. Le tube intes
tinal, très distinct dans les deux tiers supérieurs, est plus
difficile â discerner dans le tiers inférieur; quant au tube ou â
la glande qui représente l ’organe de la génération, il n ’occnpe,
comme nous l’avons dit, que le tiers inférieur de l ’animal et se
termine par une tache pigmentée, et parait répondre an type de
l’organe sexuel femelle.
Suivant l ’époque â laquelle on examine les sujets, on trou
vera les trichines dans le tube digestif, ou bien en voie de
-
7
*
_
blanc partout, tant leur nombre est considérable, d’autres foi s
certains muscles fourm illent de ces animaux quand d’ autres
n’en présentent pas. Virchow en a rencontré dans tous le s
muscles rouges, le cœur excepté
Virchow a étudié chez les lapins la progression des trichines.
Ce fut avec le tissu musculaire infecté chez l ’homme qu’il fit
ses premières expériences qu’ il a soumises h l ’Académie des
sciences, dans la séance du 2 ju ille t 1860.
« Peu d’heures après I ingestion des muscles malades, les
« trichines dégagées des muscles se trouvent libres dans l ’esto« mac ; elles passent de Ih dans le duodénum et arrivent ainsi
« plus loin dans l’ intestin grêle pour s’y développer. Dès le tro i« sième ou le quatrième jour,on trouve des œufs et des cellules
« spermatiques, tandis que les sexes sont devenus distincts.
« Bientôtaprès les œufs sont fécondés et il se développe dans le
« corps des trichines femelles, de jeunes entozoaires vivants.
« Ceux-ci sont expulsés par l’orifice vaginal, et je les ai retrou« vés sous forme de petits
(ilaires dans les glandes
mésentéri-
« ques, et surtout en nombre considérable dans les cavités
« séreuses, particulièrement dans le péritoine et le péricarde;
« ils avaient, selon toute apparence, traversé les parois in« tesliuales. En continuant leurs migrations, ils pénètrent dans
« l ’intérieur des faisceaux musculaires prim itifs. »
Quel sera le nombre de ces animaux sur le sujet qui va leur
servir de demeure? Virchow 1 apprécie de la manière suivante:
Une trichine mère à l ’état adulte renferme environ 100 petits
vivants; elle produit,de plus, de nouveaux œufs et peut demeu
pérégrination se dirigeant vers les organes dans lesquels elles
rer à l ancre dans l ’intestin pendant un mois. En comptant
vont se fixer, ou bien complètement établies dans le tissu mus
200 petits par mère et en admettant 5,000 trichines ingérées
culaire où elles présentent les conditions que nous venons
dans les quelques bouchées de viande infectée, on arrive au
d’ énumérer.
chiffre d’un m illion de petits allant s’in filtre r dans les muscles.
La distribution des entozoaires n’est pas toujours la même,
soit relativement aux muscles atteints, soit pour le nombre de
sujets qu’ils contiennent. Tantôt les muscles sont pointillés de
Heureusement les trichines ne sont pas â l ’abri d’une mort
prématurée.
J. C.
La suite au prochain numéro.
�—
De ï Association Universelle des Médecins et de son importance
nationale, par le docteur A. R o ndard , (Je Salon , membre de
l'Association Médicale des Douches-du-Rhône.
COMPTE-RENDU
Présenté à la Commission A dm inistrative dans sa séance m ensuelle
du 9 m a i,
par le docteur L. L A U R EN 8, secrétaire de l ’A ssociation.
M essieu r s ,
La commission administrative a reçu l ’hommage d’ une
brochure intitulée :
De l'association universelle des médecins
et de son importance nationale.
Son auteur est M. A. Rondard, docteur en médecine a Salon
et membre de notre société.
Cette publication se termine par une proposition qui est,
suivant notre honorable confrère, destinée à créer des richesses
suffisantes pour assurer le bien-être et la sécurité à tous les
médecins.
La perspective est séduisante et capable de solliciter toute
votre attention ; mais comme si elle était de nature h soulever
tout d’abord un peu d’incrédulité, ce n’ est pas, ajoute M.
Rondard, le fruit d’ un rêve d ’une nuit d’ été, mais le résultat
de mûres et sérieuses réflexions. M. Rondard est, en effet, un
praticien réfléchi et in s tru it, ayant beaucoup étudié les ques
tions professionnelles pour lesquelles il semble avoir une
prédilection particulière et qui n’est pas nouvelle, puisque dès
l ’année 1846, il avait publié plusieurs articles sur l'association
médicale dans un journal qui paraissait alors a Marseille, les
Archives médicales du Midi.
La publicaiion dont j'ai à vous entretenir est une manifestation
de plus de cette préoccupation presque générale dont les
questions professionnelles sont en ce moment l’objet parmi
nous et qui se révèle dans la presse, dans les sociétés médi
cales, dans les conversations entre confrères. Cette préoccupa
tion est devenue bien légitime -e n présence des causes
d’amoindrissement dont notre profession est chaque jo u r la
victime et en présence aussi des exigences toujours croissantes
de la vie matérielle et d’ une civilisation de plus en plus dévo-
75
—
ranto. Les nécessités de îa situation sont devenues telles qu elles
semblent nous autoriser à avouer que si la médecine est un
sacerdoce, elle est aussi un an, une industrie et qu après
tout le prêtre doit vivre de l ’autel. E l d’ailleurs, n’est-il pas
vrai que pour m aintenir l ’honorabilité professionnelle au niveau
élevé que lui assigne la grandeur de la fonction sociale que le
médecin a à rem plir, il est indispensable que la relation qui
doit exister entre les services rendus et leur rémunération
matérielle, soit mieux en harmonie avec les besoins de la vie
et les convenances de la profession. Nous le savons tous, la
pureté de l’àme se ternit trop souvent au contact de la misère
et le besoin de vivre fait souvent fléchir la moralité la plus
sévère. Ne pourrait-on j>as citer tels médecins qui n’ont lailli
à la dignité professionnelle que parce qu’ils avaient éprouvé les
poignantes angoisses de la détresse. Ils ne se sont certainemen l
pas jetés de gaité de cœur dans cette ornière boueuse du char
latanisme où ils ont prostitué leur robe et leur diplôme.
C’est ainsi que l ’ont pensé sans doute ces médecins émi
nents, nos mailres dans la science et dans la profession; pour
eux la fortune n ’a pas de rigueurs et ils ont cependant porté la
plus vive sollicitude sur ces questions de l’ordre matériel qu’ il
n’ y a pas bien longtemps encore, on eût à peine osé indiquer,
sous le vain prétexte de respecter la dignité d’un corps pauvre
il est vrai, mais noble et lier.
C’est un des heureux résultats de l’association générale
d’avoir pu poser ces problèmes professionnels qui émeuvent
le corps médical et il y a tout lieu d’espérer qu’il aura suffi
pour les résoudre, d’avoir substitué aux efforts impuissants de
l’individu isolé, cette force collective dont la puissance est
presque sans limites :
Celle espérance, je la partage avec notre confrère, M.
Rondard, qui l’ exprime dans maints passages de son travail.
Je n’ai pas l’intention de vous donner une analyse même
rapide de la première partie de l’œuvre de notre confrère et de
le suivre dans les développements pleins d’intérêt, exposés
dans un style entraînant et imagé, où il nous démontre l im
portance de l ’association h son point de vue général et comme
une loi primordiale instituée par l ’auteur de toutes choses pour
la conservation et le développement des œuvres de la création.
Après cette étude générale de l’association et passant a son
application au corps médical, M. Rondard nous montre les
médecins heureux et honorés quand ils ont connu les lois de
ce principe fécond et bienfaisant; ils étaient pauvres, déconsi
dérés, assimilés même aux esclaves, quand divisés par les dis-
�[mies des sectes ou par des haines jalouses, ils ont cessé d’être
une corporation unie. Aussi, notre honorable confrère s’est
félicité de voir le gouvernement réalisant les aspirations arden
tes du corps médical, autoriser par un décret qui a déjà cinq
ans de date, la formation de noire grande association.
Toutefois, il se demande quelle est la cause qui retient
encore dans l'isolement un grand nombre de médecins, ceux
surtout qui, par leur position de fortune modeste, ont le plus
besoin d'aide et de soutien. « Les médecins pensent sans doute
que l’association ne peut pas assurer leur bien-être et celui de
leur famille. La cotisation volontaire est un moyen qui parait
suffisant aux autres classes de travailleurs, mais parmi nons,
ceux qui sont le plus intéressés à créer le fonds de prévoyance
sont précisément ceux qui peuvent plus difficilement le former.
A ce point de vue, l ’association ne peut porter ses fruits qu’à
l ’aide de la bienfaisance du petit nombre envers le plus grand.
Les fortunes bien établies sont une exception pour les médecins.
Eh bien ! dans ce cas, I?. caisse de la société medicale se trouve
alimentée par une sorte d'aumône, circonstance gênante pour
les uns, humiliante pour les autres. •)
«J'entends demander de tous côtés, nous dit encore M. Rondard, par les membres les plus zélés de l ’association, q u ’on
établisse pour tous les médecins une caisse de retraite. Ce vœu
est assurément bien légitime. Mais cela est évidemment im
possible dans l'état actuel des choses. L ’association n’a pas
encore fait nailre ces revenus capables d’assurer une retraite à
chaque membre. Nous étions pauvres avant d’être unis, nous
ne sommes guère plus riches depuis notre union.
,
,
Cependant
je le reconnais nous avons fait un grand pas vers le but que
nous désirons atteindre. Nous n'avons plus qu'à introduire
dans l'association, un autre élément indispensable pour créer ,
endehors de la clientèle, une source inépuisable et capable d'ali
menter le fonds de prévoyance. »
Ici, M. Rondard aborde l’exposition du projet qu’ il a conçu
et qu il vous propose. Il pense que les 20,000 médecins de
France pourraient former entre eux une vaste société commer
ciale dont les bénéfices seraient suffisants pour donner l ’aisance
à tous, même à ceux qui actuellement n’ont que les misères de
la vie en partage.
C’est la, vous le voyez, Messieurs, une grande idée Elle vaut
bien la peine que nous nous y arrêtions quelques instants.
Et d’abord, à notre époque industrielle, en présence des
merveilleux résultats qu a donnés I association du capital et du
travail, il était tout naturel de se demander s’il ne conviendrait
pas que le corps médical prit part également à ce mouvement
général qui est devenu si fécond et se servit, lui aussi, du
commerce, de l ’industrie, du travail associé au capital pour
donner à ses membres le bien-être matériel que le culte de la
science seul ne lui refuse que trop souvent.
Les prémisses posées par notre confrère pour justifier sa
proposition ont un fonds de vérité incontestable. Les atteintes
portées à nos intérêts matériels et moraux par des causes que
nous connaissons tous, ont fait naître une situation périlleuse
et il est urgent de chercher un remède à des maux dont nul ne
conteste la gravité. Le charlatanisme, l’exercice illégal de la
médecine, les dures conditions faites au corps médical par les
sociétés de secours mutuels, la concurrence entre médecins,
I avilissement des honoraiies, etc., sont autant de chancres
dévorants qui menacent et compromettent la profession médi
cale. Mais le moyen proposé par M. Rondard est-il acceptable
et possible, du moins pour le moment?
Je ne méconnais pas les facilités qu’auraient les médecins
pour faire le succès de bien des entreprises et tous les jours
nous voyons notre patronage sollicité par un grand nombre
«1 industriels qui attendent et retirent de nous profil et fortune ;
mais n ’est-ce pas précisément parce que la faveur que nous
accordons à telle industrie, à un médicament nouveau, à un
établissement thermal, à une denrée alimentaire même, n’ est
pas inspirée par 1 intérêt, que le public a foi daus notre recom
mandation.
De deux choses l ’une, ou les objets recommandés seraient
des objets de consommation médicale, et alors notre action
serait gênée et entachée de soupçons légitimes ; ou bien, c’est
en dehors des exploitations médicales proprement dites que
mous fixerions nos choix, et dans ces cas, n'y a u ra it-il pas une
situation trop insolite et trop étrange dans cette influence que
les médecins chercheraient h exercet à leur profit.
Je ferai encore une objection au projet de M. Rondard et
elle me parait grave. La constitution d’ une grande société avec
un capital im portant, me semble bien difficile à réaliser d’ emblée, soit par l’impossibilité où un grand nombre de médecins
serait de faire l ’apport social statutaire, soit par la répulsion
qu’un pareil projet exciterait chez d’autres non encore convertis
aux idées que notre confrère cherche à faire prévaloir. La
proposition de M. Rondard aurait plus de chances de succès
si elle devait s’accomplir entre un petit nombre à qui la clien
tèle laisse des loisirs, pouvant disposer de fonds suffisants pour
entreprendre telle opération industrielle ou commerciale couve-
�—
78
noble et t|ni auraient en outre des aptitudes spéciales. La com
binaison limitée d’ abord h quelques-uns pourrait se généraliser
plus lard et accroître son importance avec le nombre des
associés.
Je ferai une dernière observation a la pensée de notre
honorable collègue et je la tire «les difficultés elles-mêmes de
la marche de l’entreprise ; sans doute son organisation mûre
ment étudiée serait soumise à des règles précises et de grandes
sociétés ont pu trouver des lois et des statuts sons l’empire
desquels elles fonctionnent adm irablement, mais on m'accor
dera aussi que l’exercice du commerce, la conception des
opérations qui en sont l’objet, le contrôle des m ille détails de
leur exécution , nécessitent des aptitudes particulières que
l’ habitude et des éludes spéciales n’auraient peut-être pas
suffisamment fait contracter aux médecins, à ceux surtout qui
seraient plus spécialement chargés des affaires de la société.
Celle inexpérience des affaires serait difficilem ent rachetée
par la probité, le dévouement, la bonne volonté, qualités qui,
nous pouvons le proclamer avec un légitime orgueil, ne sont
pas rares dans le corps médical.
Vous voyez. Messieurs, que dans l’ exposé des réllexions que
m’a suggérées le travail de M. Rondard , je me suis peu pré
occupé de la question des principes purs qui veulent que le
médecin se consacre entièrement a son art, et de l ’incom pati
bilité si non légale, du moins morale, qui existe entre le sacer
doce médical et les spéculations commerciales et industrielles,
Le moment serait d’ailleurs mal choisi pour empiéter ainsi sur
un domaine qui n’est pas le nôtre et lorsque le médecin cher
che à faire respecter le privilège que lui donnent la loi et des
études spéciales, serait-il bien venu a usurper un terrain qui
n'est pas le sien ; lorsqu'il cherche à expulser les marchands
du temple, doit-il h son tour faire entrer le négoce et la spécu
lation dans le sanctuaire qu il veut défendre entre les atteintes
du dehors.
J’ai évité aussi de vous parler des mauvaises chances et des
risques d'une vaste entreprise commerciale. Nous, surtout qui
dans notre cité, sommes les témoins journaliers desmerveilleux
résultats que donnent le commerce et l ’industrie,nonsne devons
pas oublier aussi que trop souvent de grands naufrages et de
grands désastres viennent jeter la stupeur dans notre place ;
que le commerce a des écueils que les pilotas les plus expéri
mentes ne [arviennenl pas toujours a éviter et je me sens saisi
d’une émotion profonde, en songeant que si notre maison com
merciale en était réduite a une liquidation malheureuse, nous
—
79
—
aurions du même coup inlligé une tache indélébile au drapeau
de la considération médicale (pie nous voulons tenir bien haut.
Je me suis surtout attaché à vous démontrer les difficultés
sérieuses que me paraît devoir rencontrer dans la pratique la
grande pensée de notre confrère et qui sont de telle nature
qu’ une société locale ne peut les résoudre définitivement.
M. Rondard n’en mérite pas moins vos plus sincères re n ie rciments et toutes vos félicitations pour ses efforts. L ’affectation
spéciale qu’il propose d’un prélèvement sur les bénéfices de la
grande société qu’il voudrait fonder, au profit des médecins
sans ressources, de nos veuves et de nos orphelins, pour la
création d’asiles de retraite et pour d’autres institutions de
bienfaisance, suffirait seule pour justifier toutes vos sympathies
et votre gratitude pour un confrère aussi dévoué et animé de
sentiments aussi confraternels.
Mais il doit rester quelque chose de plus du travail qui vous
est soumis et nous pouvons en tirer dès maintenant les con
clusions pratiques suivantes :
1° Nous puiserons dans la communication de M. Rondard et
dans le tableau malheureusement trop réel qu’ il nous fait du
malaise de notre profession, un m o tif de plus pour persévérer
dans les elïorls (pie nous faisons pour en dim inuer les causes et
peut-être même les éteindre complètement. Ces causes, je vous
les ai énumérées dans le cours de celte discussion et je n’y
reviendrai pas, me réservant d’ailleurs de vous en parler plus
au long, lors de notre prochaine assemblée générale, en vous
rendant compte des travaux de notre société, pendant l’exercice
courant ;
2° Nous ferons de l’idée générale de notre honorable collè
gue une application spéciale h laquelle personne, je l ’espère du
moins, ne lera d’ objection, en entourant de toute notre sym
pathie et de notre patronage les femmes , les veuves et les
orphelins des médecins qui, par suite de la mauvaise fortune,
se trouveraient dans la nécessité de recourir a l ’exercice d’ une
profession commerciale ou industrielle ;
3° Si le moyen pratique qui vous est présenté aujourd’hui
vous paraît devoir rencontrer des obstacles contre lesquels vous
ne voulez pas vous heurter, du moins pour le moment, ne se
ra it-il pas possible d’en trouver un autre qui devienne aussi un
élément puissant pour grossir notre fonds de prévoyance.
M. le docteur Chapplain appelait, il n’y a pas bien longtemps,
votre attention sur la possibilité de former entre les médecins
une Société d’assurances mutuelles ou a primes fixes. Les
primes payées par le corps médical h des Compagnies d’ assit-
�81
rances qui relirenl de leurs opérations des bénéfices importants
ne pounaient-elles pas servir à Constituer entre les médecins
une assurance mutuelle, et les excédants entre les sinistres et
les recettes ne pourraient-ils pas grossir d ’une manière assez
notable notre caisse de secours et servir au soulagement de
bien des misères confraternelles Vous avez accueilli cette idée
avec faveur; ne serait-il pas opportun de la m ettre h l’étude?
Et comme du choc des idées ja illit la lum ière , à côté de celte
idée et comme conséquence de l'attention éveillée par M. Rondard sur ces grandes questions , il pourrait surgir d’autres
combinaisons qui n'auraient pas contre elles les objections
dont j'a i été peut-être trop prodigue aujourd’hui
Ne serait il pas convenable d’appeler sur ces questions plei
nés d’intérêt, l ’attention du conseil général de I' Association
générale et de lui demander s'il ne penserait pas qu il pût être
fait au corps médical une application honorable des principes
économiques qui oui presque métamorphosé la société en créant
des ressources naguères encore ignorées.
M. Rondard termine ainsi l ’hommage qu’il vous fait de son
travail.
« Puissiez-vous,très honorables confrères,n’accorder que des
boules blanches à la thèse que je viens de soutenir devant vous,
et me faire connaître le résultat de votre vote, afin de fêler en
famille , comme autrefois, la réception désirée. » Ces boules
blanches dont l'heureux souvenir nous reporte à nos premiers
pas dans la carrière médicale, vous ne les refuserez pas à M.
Rondard et en lui portant les remerciments et les félicitations
que vous lui accorderez par un vole unanime, vous me per
mettrez en ma qualité de secrétaire de l ’ Association, de l’assu
rer en votre nom, qu'il a pris parmi nous une place honorable
et qu’il sera dans nos réunions confraternelles, toujours et pour
tous, un collègue estimé et aimé.
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
Conseils de discipline. — Depuis longtemps, le corps médi
cal réclame avec instance l ’organisation des Conseils de disci
pline. — Voici en quels termes le
s’unit
aux réclamations générales :
Montpellier Médical
Organisation de conseils de discipline nommés par les médecins
et jug< anl les médecins d’après les presr/iptions d’un code profession-
net adopté par eux : tel est le vœu général que, bien des fois, nous
avons entendu formuler autour de nous et auquel nous nous rallions
de tout notre cœur. Si la corporation des avocats est si honorable,
si elle se défend avec tant de dignité, d’énergie et de succès contre
des empiétements ou des agressions venues du dehors, elle le d< it
à ses conseils de discipline. Pourquoi nous, médecins, en resterionsnous plus longtemps privés? N'avons-nous pas le même intérêt à
veiller sur nous-mêmes, et à repousser les injures venues de la part
des profanes? Ne nous le dissimulons pas, nous sommes sérieuse
ment menacés. Le défaut de confraternité, le charlatanisme, l’exer
cice illégal de la médecine, sont pour nous des plaies bien vives et
bien saignantes. Les médecins des villes, et surtout les médecins de
Montpellier, où sont si anciennes et si enracinées les traditions
d’honorabilité médicale, se doutent très peu de l’étendue du mal.
Mais il suffit d’aller dans les
pour y apprendre les détails
que nous n’ayons rencontré
le savoir et l ’honorabilité ne
petits centres et dans les campagnes
les plus navrants. Ce n’est pas certes
une foule de praticiens modestes dont
le cèdent en rien à ceux des praticiens
des villes. Mais, nous les prenons eux-mêmes à témoin, ne connai sent-ils pas une foule de faits déplorables? Trouve-t-on toujours
entre les membres de la famille médicale pratiquant au même heu,
d’excellents sentiments de confraternité? Soni-ils disposés à se
prêter de mutuels secours? Ne les voit-on pas trop souvent rivaux,
adversaires, ennemis implacables? La plupart des villages ont leurs
et leurs
, qui se détestent sans savoir pourquoi et
qui sc persécutent uniquement pour assouvir des vengeances alter
natives et jamais apaisées. Les médecins savent-ils toujours se tenir
guelfes
gibelins
en dehors de ces haines intestines? De là, des ruptures presque
scandaleuses, une concurrence déplorable et sans dignité, une dé
considération sans remède ; de là aussi, et cette conséquence est
fort regrettable, une notable diminution des avantages pécuniaires
attachés à uns profession qui devrait donner à tous ses membres,
sinon le luxe, du moins une complète aisance. Certes, dans les
préoccupations du médecin, la question des honoraires ne tient pas
le premier rang; mais prétendre qu’elle np doit pas tenir un rang
très important, serait un mensonge ou une duperie.
�—
Que faudrait-il pour Dire cesser (ks abus aussi fâcheux ? S’entendre. Le jour où les médecins d'un canton seront d’accord, la
position du plus petit deviendra supérieure à cille de celui qui y est
aujourd'hui le plus grand. Que faudrait-il encore? Un conseil de
discipline qui se bornât le plus souvent à des avertissements secrets
et amicaux; mais qui, devant des fautes obstinées, fût armé de
l autorité la plus sévére.
Demandons avec instance, donc, la création de conseils de dis
cipline, mais demandons-les uniquement pour faire l ’opinion pu
blique et sans espoir de les obtenir de longtemps encore. Pour le
moment, une seule compensation nous est offerte : c’est la création,
le maintien et la prospérité des sociétés de secours mutuel.
Aussi sommes-nous, pour noire part, essentiellement sympathi
que à toute idée d’association enlie médecins......
(Montpellier Médical, avril
1864).
Honoraires médicaux. —
A la suite d ’un rapport remarqua
ble, présenté à la commission générale de l ’Association des
Médecins du Rhône, par une sous-commission , composée de
MM. Diday, J. Bonnet, Baclielet et Rougier sur la question
inquiétante , mais délicate et dangereuse des honoraires,
les résolutions suivantes ont été adoptées p a rla Commission
générale dans sa séance du 6 avril :
I* La Commission générale émet le vœu que les membres de
l ’Association des médecins du Rhône, en dehors des circonstances
où les seins doivent être absolument gratuits, se refusent à toute
condescendance qui sérail de nature à déprécier la pratique médicale;
2* Elle leur rappelle que si le désintéressement est dans certains
cas un devoir, il n’est pas moins obligatoire d’observer, dans les
autres cas, les usages reçus relativement aux honoraires, et qu il
vaut mieux refuser des services que de subir des exigences qui por
teraient atteinte aux traditions et a la dignité de la profession ;
3* Elle les engage à n’mtenter directement aucune action judi
ciaire en recouvrements de leuis honoraires; mais elle les invite
expressément à lui soumettre préalablement toutes les contestations
qu’ils peuvent avoir avec leurs clients ;
4° Elle exprime le dé>ir qu’aucun médecin sociétaire ne fournisse
son concours individuel et n’apporte l ’autorité de son nom dans
aucune demande judiciaire formée par un médecin membre eu non
de l’Association ;
5° Enfin rite exhorte ses confrères à recourir à elle dans toutes
les circonstances douteuses ou délicates, et elle leur ofirc l’appui
m
constant de ses délibérations et de son autorité pour prévenir i l
régler les difficultés dans lesquelles se trouverait engagé leur intérêt
professionnel.
v
E xercice illégal de la médecine. — Par jugement du
tribunal correctionnel de Marseille, en date du 7 avril 1864,
la dame Greffe, veuve Sarra, garde-malade, a été condamnée,
à deux fois, 15 l'r. d'amende et aux dépens, pour exercice
illégal de la médecine (deux contraventions).
— Par jugement du même tribunal, en date du 2 mai cou
rant, le sieur Barberi, tailleur h Marseille, a été condamné
pour blessures*par imprudence, vente de remèdes secrets et
exercice illégal de la médecine, à quinze jours d’emprisonne
ment, 25 l'r. d’amende et 300 l'r. de dommages-intérêts en
faveur de douze médecins de Marseille, parties civiles.
Nous rendrons compte de cette affaire dans notre prochain
numéro.
P ublicité par voie d affiches et journaux. — Dans sa
réunion du 7 avril, la commission administrative de l'Associa
tion médicale des Bouches-du-Rhône a décidé qu elle ne
pourrait tolérer, de la par! des membres de la Société, aucune
espèce de publicité par affiches et journaux. La seule publicité
qui convient a la dignité professionnelle est la publicité scien
tifique, celle qui se produit par des publications sérieuses ou
par des conférences et des cours publics.
Toute autre publicité aurait trop !es allures du charlatanisme
pour quelle ne soit pas sévèrement blâmée par une association
qui a pour but de combattre ce chancre social.
Séance de la commission du 9 m ai.— Présidence de M. S e u x .
A l ’occasion du procès-verbal, une cxceplion au principe
absolu de l ’interdiction de la publicité a été proposée en faveur
des dispensaires gratuits. La proposition a été prise en consi
dération et sera mise à l ’ordre du jour de la prochaine réunioo.
Admissions. — Ont été admis à l’ unanimité : MM. Dumas,
d’Eyragues; Gamel, directeur de l ’établissement hydrothéra
pique à Marseille; Guinet, de Peyrolles; Marion, de Fontvieille;
Pélissier (Albert), de Saint-Remy.
La commission a entendu ensuite la lecture du rapport de
M. le secrétaire, sur l ’ouvrage de M. Rondard, et lui a donné
son entière approbation (voir plus haut).
�—
84
DE LA MALADIE DES TiUCHINES (TIUCI1INIASIS).
—
— Nous avons reçu, sous le litre (T
médicale,
Appel a la sympathie
(iSuite et fin.)
un prospectus signé des noms les plus honorables
parmi les médecins de Paris. Nous regrettons (pie le défaut
Quelle est l’origine de ces animaux ? Comment arrivent-ils
dans le corps de l’homme? Quel est l’animal servant à notre
d’espace ne nous permette pas de le publier tout au long.
Un médecin, aussi intéressant par ses malheurs que par sou
honorabilité, disent-ils, a fait appel à nos sentiments de mutua
lité et de solidarité pour chercher les moyens de publier un
ouvrage dont il est l’auteur et dont son défaut de fortune ne lui
permet pas de faire les frais d impression.
Cet ouvrage est le récit fait par lui-m êm e des ‘diverses phases
d'une névropathie cruelle dont il a été atteint lors de l ’épidémie
de choléra de 1832 et qui prit son origine dans le dévoûment
professionnel de notre collègue-.
nourriture qui devient le véhicule de la trichine? Pendant
longtemps on l’a ignoré. Les premières recherches ont été faites
chez des sujets qui avaient succombé el chez lesquels on n'avait
pas reconnu, pendant la vie, la présence des entozoaires.
Virchow avait pris ces muscles et étudié sur des lapins le
développement des animaux sans savoir comment ils étaient
arrivés dans le corps de l ’homme. Depuis lors, les cas d’intoxi
cation se sont multipliés el nous pouvons indiquer d ’une ma
nière certaine l’origine de la maladie et appeler l ’attention des
autorités qui veillent b la salubrité publique :
Pour notre science,dont la base est l’observation,une histoire
publiée par un homme qui avait en lu i toutes les connaissances
caveant consules.
Le professeur Zenkcr a pu retrouver le reste des trichines
qui avaient infecté sa malade et jeter ainsi un grand jo u r
voulues pour la rendre réellement scientifique, est une bonne
sur la marche de cette affection. La malade avait été trans
fortune.
portée de sa campagne de Dresde, et, renseignements pris, on
Le
Testament médical
de M.
le docteur
Dumont
de
trouva que, quelques semaines auparavant, on avait abattu un
Monteux a déjà subi l'examen de l ’Académie impériale de mé
porc renfermant des trichines ; que le jambon et les saucisses
decine et a été le sujet d’un rapport étendu et très favorable de
faits avec la chair de cet animal en contenaient un grand nom -
M. Bally. Il sera lu avec avantage par tous les médecins. Mais
bre ; qu’enfin le boucher qui avait écorché le porc et mangé des
qu’ il nous soit permis de placer à côté de Lintérêt scientifique
trichines fraîches avait, comme plusieurs autres personnes, pré
la question de mutualité. M. le docteur Dumont a eu une bonne
senté des phénomènes rhumatismaux ou typhoïdes plus ou moins
pensée en s’adressant à ses collègues. L ’appel des hommes
graves, mais la personne transportée avait seule succombé.
illustres qui l’ont étayé de leur haute valeur scientifique el
Depuis ce premier fait, un grand nombre d ’autres sont venus
morale sera certainement entendu. Il n est pas un médecin qui
démontrer que le porc était l ’animal qui, prim itivem ent conta
ne veuille contribuer, par une faible obole, à réparer les torts delà
miné, devient l’élément de l’intoxication de l’ homme.
fortune envers un confrère qui, brisé par la maladie, trouve en
core le moyen le plus digne de parvenir : le travail.
La maladie débute dans la ville de Leipsig le 7 novembre
1863. M. le professeur W agner constate que le premier sujet
avait mangé, vers le milieu d ’octobre, des saucisses fumées.
Le Comité de Rédaction.
Marteille. — lmp. Vitl, rue Tliiart, 8.
Le 5 décembre, cinq personnes tombent malades après avoir
mangé, dix jours auparavant, de la viande crue avec des
oignons. Le 8 décembre, deux femmes sont atteintes après
6
�—
86
—
avoir mangé, le 28 novembre, un cervelas cru. Deux jours plus
lard, une fille ayant inangé d’un saucisson suspendu h côté du
cervelas est atteinte. Le mari, qui n’a pas participé au repas,
—
87
—
montrés dans la presque totalité des faits dont on a donné
l'histoire, qui paraissent appartenir en propre à l ’intoxication
par les trichines ; ce sont l'œdème et les douleurs musculaires.
n’ éprouve pas d’accidents. D autres encore tombent malades,
L ’œdème n’est point généralisé, il occupe ordinairement la
et tous quelques jours après avoir mangé de la viande de porc
face, les paupières, et ne s’étend ordinairement dans les autres
préparée de diverses façons.
parties du corps, aux pieds particulièrement, que dans la période
Dans l'ile de Rugei), vingt individus, au rapport du docteur
W cotzel, ayant mangé de la même charcuterie, tombent mala
des; la viande, examinée au microscope, contient des trichines.
A Corbach, trois membres de la même famille sont atteints
dans les mêmes conditions. Les muscles de l ’animal, examinés
par le professeur Zenker, contiennent des trichines.
ultime de la maladie. L ’œdème débute ordinairement d ’une
manière subite.
Les douleurs musculaires sont le symptôme le plus intense
et le plus caractéristique.
Nous ne pouvons mieux faire, pour les décrire, que de rap
porter une partie rie l ’observation publiée par Friericb en 1862 :
A Quedlinbourg, on abat un porc malade ; h u it jours après,
(< Le malade se plaint surtout d’une douleur extrêmement
quatre personnes de la famille du propriétaire de l ’animal tom
« violente et qui s’accroît par la pression et même par le
bent malades, et l’épidémie se continue tant que l ’animal n’est
« loucher dans les muscles des extrémités, de la nuque et du
pas complètement consommé.
« cou. Ces parties lui semblent raides, bien que le mouvement
A Calbe, la maladie atteint trente-huit personnes, sur les
quelles huit succombèrent, et on apprit que toutes avaient pris
de la viande chez un seul boucher.
En faut-il davantage pour démontrer l ’origine de l ’épidémie?
« des membres puisse s’opérer lentement dans les articulations
« sans augmenter sensiblement la souffrance.
« soûl d une
Les muscles
remarquable élasticité ; ils ont la dureté du
« caoutchouc et sont comme turgescents. Le malade déclare
Les faits démontrent d’une manière positive que c’est dans la
« que ses membres sont augmentés de volume ; il n’est pas en
viande de porc que l’on rencontre les trichines.
« état de se redresser sur son lit, et, s’il essaye de le faire, il
Il ressort des di verses observations que la viande fraîche et crue
« éprouve à la fois de la raideur et de la douleur dans la région
est celle qui expose le plus à l’intoxication par ces entozoaires.
« inguinale...... H u it jours après, l 'affection musculaire eonti-
Ils sont détruits dans la viande qui a subi une coction suffisante
« nue, les moindres mouvements dans le lit sont devenus
ou bien qui a été fumée d’une manière convenable et qui a été
« intolérables, I articulation des coudes est légèrement fléchie,
conservée pendant assez longtemps avant d ’être consommée.
« douleurs violentes quand on essaye de redresser les bras, les
Les diverses épidémies qui déjà ont été décrites et dont
« membres inférieurs sont tendus. »
nous venons de citer seulement les plus im portantes, permet
Les détails contenus dans l’observation de Frierich expriment
tent de tracer les symptômes qui caractérisent la présence des
parfaitement le caractère des douleurs musculaires. Suivant
trichines dans l’ organisme. Parmi ces phénomènes, il en est
l’ expression de M. Lasègue, les malades paraissent atteints d'un
qui sont communs à toutes les affections aigués affectant la
rhumatisme aigu sans que les articulations soient développées.
forme typhoïde et qui ont contribué plutôt il je te r de l ’obscurité
Après avoir exposé les altérations générales des muscles,
dans le diagnostic qu’il l'élucider. Il en est d’autres qui se sont
leur développement, les phénomènes de douleur dont ils sont
�SS le siège, il est important de noter les altérations fonctionnelles
—
80
périodes d ’évolution : 1° les trichines ingérées séjournent dans
qui sont la conséquence du siège des altérations musculaires.
l'intestin sans pénétrer dans les muscles; 2* elles engendrent
La raucité de la voix survient lorsque les muscles du larynx
des petits vivants qui s’enfoncent dans le tissu musculaire ;
sont envahis par les helminthes. La respiration deviendra labo
5° les helminthes des muscles s’y développent sans y pulluler.
rieuse, la mastication pénible, la déglutition impossible, lorsque
Ces subdivisions, rationnelles en théorie, ne sont pas parfai
les fibres des muscles du thorax, du pharynx ou de la mâchoire
tement tranchées dans la pratique, car pendant que les trichines
seront altérés par la présence des trichines.
pénètrent dans les muscles,il en estqui demeurentdans l ’intestin.
Les deux phénomènes que nous venons d’étudier ont été
Les auteurs ont admis la division en deux stades. C’ est la
constants ; il en est d ’autres qui n’ont été décrits que dans
méthode adoptée par Vogel et que M. Lasègue a suivie pas a
quelques cas particuliers.
pas en ces termes :
Frierich a constaté la présence d ’une éruption qui parut
1re
stade.
En général on n ’observe pendant les premiers jours
d'abord appartenir à la miliaire et dont le siège était la poitrine
qui suivent l’ infection aucun symptôme, tout au plus de légers
et le ventre. Plus tard parurent des pustules entourées d’une
troubles gastriques, rarement de la diarrhée, et c’est seulement
auréole rouge et contenant un liquide laiteux ; a une époque
dans les cas de catarrhe intestinal survenant au début qu’on
plus avancée de la maladie, les pustules devinrent plus grosses,
peut espérer trouver quelques trichines dans les garde-robes.
quelques-unes atteignirent le volume d'un grain de chénevis.
2 me
stade.
Les embryons s’attachent à la paroi intestinale et
Au niveau de l’épine de l’omoplate, il se forma une tache noire,
la perforent, il en résulte une irritation intestinale qui, chez les
un véritable sphacèle de la peau dans l'étendue d’un pouce et
animaux, peut prendre des proportions extrêmes, mais qui chez
demi de long sur un pouce de large. Celte tache était doulou
l'homme dépasse rarement une entérite légère caractérisée par
reuse et entourée d’un cercle rouge ; au milieu et répondant à
la contraction spasmodique de l’intestin avec constipation.
la partie moyenne du muscle sus-épineux droit existait un
Dans les cas les plus intenses, la fièvre éclate avec les carac
furoncle de la grosseur d'un pois dont on fil sortir un pus brun
tères de la fièvre gastro-typhoïde et toutes ses conséquences,
et consistant. Dans ce pus, examiné au microscope, on trouva
moins les accidents cérébraux qui sont très rares.
une grosse trichine bien développée.
La diarrhée a été notée surtout dans la première période de la
maladie, alors que les helminthes sont encore contenus dans
Dans les cas de moindre gravité, le tout se réduit à de la
fatigue, du malaise et un léger gaslricisme.
A mesure que les trichines cheminent au milieu des divers
l'intestin ; elle n’est pas constante, parait au contraire d’une
tissus, après avoir quitté le tube intestinal, elles provoquent
manière intermittente et se présente sans témoigner d’ une
dans leur parcours des irritations qui varient suivant leur
phlegmasie intestinale.
nombre et les tissus avec lesquels elles sont en contact. De là
Les sueurs abondantes, profuses, ont été constatées dans un
grand nombre de cas par F iicrich , Zonker, Behrends, etc.
les sensations douloureuses d’aspect rhumatismal et les troubles
de la petite circulation. On explique ainsi l’œdème ; mais,
Si nous examinons actuellement la marche de l'affection et
quelle que soit la valeur de l ’interprétation, l’œdème si carac
le mode d’après lequel se groupent les symptômes que nous
téristique, si habituellement constaté, occupe d ’abord la face et
venons d’examiner, nous trouvons que W irchow admet trois
ne se répand que plus tard sur d’autres parties du corps. Les
�—
00
—
muscles envahis deviennent roides, douloureux, difficiles à
des sujets qui avaient succombé. Les maladies avaient été
mouvoir et surtout à étendre.
classées parmi les affections typhoïdes, rhumatismales, et quel
Si la maladie a encore plus de gravité, les symptômes mus
culaires redoublent, le malade semble souffrir d ’un rhumatisme
quefois parmi les maladies des organes pulmonaires,
alors
qu’ un épiphénomène survenant vers les poumons ou la plèvre
articulaire aigu, bien que les articulations soient libres. Les
entraînait la mort. Mais depuis que l ’attention a été appelée
extrémités restent immobiles, demi-fléchies, dans la crainte des
d ’une manière plus positive, que les épidémies se sont m u lti
souffrances qu’ entraîne chaque mouvement. Fièvre plus on
pliées, le diagnostic est devenu certain, car on a pu soumettre
moins vive, h forme typhoïde, accélération «lu pouls, élévation
à l'examen microscopique de petites portions de muscles enle
de la température, sueurs profuses ; dégoût pour les aliments,
vées aux malades, soit pendant leur vie, soit après leur mort.
troubles de la n u tritio n , faiblesse, am aigrissem ent, signes
Que dire actuellement du traitement ? Cette partie de lu
d'anémie et d ’hydrémie. A ces accidents, viennent souvent
science n’ est point encore laite. Mais s'il n’est pas encore au
s ajouter une diarrhée rebelle, le décubitus, des congestions
pouvoir des médecins de pouvoir indiquer a l ’aide de quels
pulmonaires avec hémoptysie, des pneumonies lobulaires, des
moyens on peut guérir I homme infecté, il est de leur devoir
épanchements dans la p lè vre , et les manifestations de la
d’appeler l’attention de tous et de prévenir les désastreuses épi
pyémie.
démies dont l’Allemagne a été affligée.
Le trichiniasis peut se term iner par la m ort qui survient
La Société des Médecins de Berlin a nommé une commission
ordinairement entre la troisième et la quatrième semaine. Elle
chargée d’ étudier la question. Le docteur Rigel, rapporteur,
peut cependant arriver avec une grande prom ptitude et la
propose de rechercher les moyens de mettre le public en garde
maladie ne durer que cinq ou six jo u rs. Dans un grand nombre
contre le danger de l’infection, de réclamer l ’établissement
de cas, des pldegmasies localisées, pleurésies, pneumonies,
d’ abattoirs pour les porcs et de provoquer de nouvelles recher
sont l’accident qui entraîne la terminaison fatale.
ches par l ’inspection de la viande de porcs livrée au commerce.
Les épidémies décrites ne présentent point encore une masse
Il propose une sorte de manifeste à toutes les classes de la
de faits suffisants pour établir une proportion quelque peu
société pour les éclairer sur le danger qui les menace, et l ’as
certaine, relativement à la gravité de l'intoxication qui nous
semblée, accueillant le Mémoire, décide qu’une invitation sera
occupe. Celles de Leipsig, de Magdebourg, de Calbe compleot
trente-huit individus, sur lesquels huit succombèrent. Dans
l ’épidémie de H ctts le d t, sur cent trente sujets atteints, on
compte près de trente victimes. Tous les sujets tombés malades
dans l ile de Rugen, au nombre de douze environ, guérirent.
Dans une autre épidémie dans les mêmes localités il y eut
deux morts sur vingt malades.
Le diagnostic a laissé beaucoup à désirer dans les premiers
temps où l’on a observé cette maladie. Elle n ’a été reconnue
que dans les amphithéâtres, quand on a procédé à l ’autopsie
adressée à tous les journaux politiques du nord de l’Allemagne
afin qu’ils reproduisent ce document.
C’est donc un devoir pour la presse de répondre a l'invitation
de la Société allemande. Nous n’avons pu que donner un ré
sumé très succinct des remarquables articles publiés par M.
Lasègue
dans les
Archives de Médecine
(décembre 1802,
avril 1864). Nous avons cherché en les analysant à appeler l'a t
tention de nos collègues, sur une maladie que nous ne connais
sions point encore, et qui a pu passer sous nos yeux sans
fixer notre attention.
Dr Ciiappjlvis .
�92
—
C II É M O S IS S U B - 1 N F L A M M A T 01 H E
TRAITÉ AVEC SL'CCKS PAR l ’b XCISJON.
-
93
sur le tube intestinal. C’est h peine si on signale quelques
scarifications comme pouvant être employées, mais sans en
constater de grands succès. Quant h l ’excision, moyen vanté
L'inflammation de la conjonctive offre en général peu de
gravité, sauf pourtant les cas dans lesquels cette inflammation
sc trouve sous la dépendance d'un état dialhésique ou sous la
domination plus grave encore d’une cause virulente.
Toutefois la conjonctivite, toute simple qu elle paraisse a son
début, peut affecter certaines terminaisons qui compliquent
singulièrement la maladie elle-même : le chémosis confirme
doit être compté parmi ces complications.
On sait que le nom de chémosis est donné à celle altération
par quelques oculistes, critiqué par d’autres, elle est fort peu
mise en usage de nos jours.
Sous le double rapport de la marche rapide de la ma'adie et
du résultat non moins rapidement heureux du traitement em
ployé, nous pensons qu’on ne lira pas sans intérêt l ’observation
suivante :
Observation.
M. l'abbé X .. . , aumônier, attaché à un é ta
blissement religieux, âgé de 45 ans, doué d’une constitution
robuste en apparence, mais un peu lymphatique en réalité, est
qui consiste en un boursouflement de la conjonctive constitué
fréquemment sujet â des névralgies épicraniennes que l’ on peut
par un lacis abondant de vaisseaux sanguins, et par une couche
attribuer à des refroidissements subits auxquels il est souvent
de matière plastique déposée dans les mailles de cette conjonc
obligé de s’exposer par la nature de ses fonctions. Ces mêmes
tive et du tissu cellulaire sous-jacent. Le chémosis, soit dit en
fonctions l’obligent non moins fréquemment h passer d’un en
passant, a été considéré à tort comme formant le troisième
droit très sombre h une vive lumière ; et c’ est a ces deux causes
degré de la conjonctivite.
combinées que nous avons attribué l ’apparition d’une conjonc
On a admis depuis longtemps un chémosis inflam m atoire et
un chémosis séreux ; dans l ’un comme dans l ’autre, l ’anatomie
tivite double qui débuta h l ’œil d roit, vers le milieu du mois de
lévrier.
pathologique montrant les mêmes éléments à cette différence
Quelques pédiluves, des boissons adoucissantes, un purgatif
près de la prédominance de l ’élément plastique ou sous-mu
léger et l ’usage des lotions froides, diminuèrent d’abord cette
queux sur l ’injection vasculaire ou de celle-ci sur la sécrétion
conjoncliviie qui, en 48 heures, cessa complètement à l ’œil
plastique. Or, il est bon de faire observer que le chémosis
gauche, et s'améliora sensiblement a l’œil droit. Mais l'amélio
séreux, ce prétendu troisième degré de l’inflam m ation, peut sc
ration de ce côté ne fut pas de longue durée, et, dans l ’espace
présenter dès le début de la conjonctivite, dans un délai exces
de trois jours, la cornée transparente s’est trouvée entourée
sivement court, et alors même que la marche de la maladie
d’un bourrelet complet, proéminent et assez dur, où l ’élément
semblait devoir en restreindre les symptômes à ceux commu
vasculaire ne paraissait pas prédominer. L ’altération, ne se
nément innocents du début.
lim itant pas autour de la cornée, a, dans l’espace de 24 heures,
Lorsque cette complication de la conjonctivite se présente,
et elle n ’est pas aussi rare qu’on pourrait le suppose»1, il sem
blerait, au dire des auteurs classiques, q uelle cède assez facile
ment au traitement antiphlogistique ordinairement employé et
qui consiste en collyres astringents ou émollients et en révulsifs
envahi la muqueuse palpébrale ; la paupière est devenue dure,
œdématiée , et c’est avec peine qu’on pouvait la soulever et la
dégager du globe oculaire.
Dès l ’apparition du bourrelet péricornéal, deux applications
de sangsues ont été successivement prescrites â la tempe et à
�—
94
—
la région mastoïdienne. Quelques gouttes d'un collyre au nitrate
d’argent ont été instillées quatre ou cinq fois par jo u r entre les
95
—
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
paupières. On a insisté sur les purgatifs et sur un régi-ne dié
tétique convenable, sans aucune amelioration sensible. Le cliémosis augmentait, f’œdème de la poussière aussi ; et il était
facile de prévoir le moment où tout soulèvement de celle-ci
deviendrait impossible.
Nous nous sommes alors décidé à pratiquer quelques scari
fications ; et pendant deux jours de suite nous y avons eu re
cours en suivant une ligne courbe concentrique au cercle cornéen. De ces scarifications s’écoule fort peu de sang, un peu plfls
de sérosité, mais le résultat final est nul. L'altération locale
progresse loin de rétrograder. Il devient urgent d essayer un
moyen plus efficace, et nous songeons h l’ excision du bourrelet.
Pendant qu’un de nos élèves (M. Poucel) s’efforçait de main
tenir les paupières écartées, nous avons, h l’aide de petites pin
Dans notre précédent numéro, nous avons annoncé la con
damnation prononcée contre le nommé B ..., tailleur, par le
tribunal correctionnel, en date du 2 mai.
Nous donnons aujourd’hui le texte de ce jugement rendu à la
réquisition du ministère public et sur la plaidoirie de M. Verne,
l ’un des conseils de l ’Association. Ce jugement important
non-seulement consacre de nouveau le droit d’intervention
des médecins, en raison du préjudice
matériel et moral apporté
h la profession médicale par le charlatanisme, mais ehcore
admet comme blessures par maladresse et imprudence les lésions
internes signalées par les médecins experts chargés de faire
I autopsie du malade soigné par ledit R ..., et que ces médecins
avaient déclarées, dans leurs conclusions, devoir être attribuées
à l’administration intempestive et multipliée du remède Leroy.
ces il dents de rat et de petits ciseaux courbés sur le plai et
En outre, comme on le verra, ce jugement longuement motivé,
coudés à la jointure, emporté une bonne partie du bourrelet
confirme la qualification de
oculaire sans toucher à la production anormale qui tapissait la
remède secret pour tout remède
non inscrit au Codex ou autorisé par une décision ministérielle.
paupière supérieure.
La douleur produite par celle opération a été assez vive,
« L b T ribu n a l ,
mais aucune réaction fébrile n'est survenue, et, de même qu a
« Vu les articles 194 du code d’instruction crim inelle, 320
la suite des scarifications, il s'est écoulé un peu de sang
du code pénal, 53 et 56 de la loi du 19 ventôse an X I,
séreux. Mais, chose remarquable, dès le lendemain, non-seu
36 de la loi du 21 germinal an X I, et la loi du 29 pluviôse
lement ce qui restait du bourrelet vers les deux angles de l ’œil
au X I I 1 , lesdits articles lus à l ’audience par M. le président ;
s’est affaissé, mais encore l ’œdème palpébral a complètement
a Attendu que le docteur Seux et ses confrères médecins au
disparu; et dans quelques jours, des lotions avec l ’eau de
nombre de onze , requièrent d’être admis individuellement
guimauve jointes à l’usage interne de quelques verres d’ eau de
comme partie civile dans l ’instance h cause du préjudice qui
Pullna ont tellement amendé l’état des choses que la guérison
résulterait pour eux, dans l’exercice de leur profession, des faits
a pu être considérée comme définitive.
reprochés au prévenu B ..., que cette intervention étant fondée
Sans doute, il y aurait témérité d’après un seul lait à pres
en droit, il y a lieu de l’admettre ;
crire toujours l’excision dans le chémosis ; mais une observation,
« Attendu qu’il résulte des débats et des pièces produites,
quelque isolée quelle soit, porte avec elle son enseignement,
notamment de celles qui ont été saisies au domicile de B .,.,
et par cela même nous avons cru faire chose utile en publiant
que ce prévenu qui n’a aucune connaissance médicale et dont
celle qui précède.
sincs-PinoNni.
�1)7
la profession csl celle de tailleur, débite habituellement un
ainsi onze bouteilles vendues par B ..., au prix de deux francs
Remède Leroy , qu’il est consulté par des
chacune ; que cependant l'état du malade empirant, il cessa
malades habitant même des villes autres que celle de Marseille
l ’emploi de ce remède; qu’ il décéda à Marseille le 10 mars
où il demeure, qu'il s’excuse à cet égard parce qu’ il serart lui-
1804- ;
purgatif violent appelé
même en correspondance avec le sieur Signoret, docteur en
« Attendu que MM. les docteurs Coste et Broquier, commis
médecine à Paris, mais que le recours à ce docteur n ’empèche
par M. le juge d ’instruction, ayant procédé à l ’autopsie du corps
point qu’il ne soit lui-même directement consulté et que, dès
de Pujol, reconnurent que la mort avait été produite par la
lors, l ’administration qu’il lait de son remède aux malades qui
phthisie dont le malade était atteint, mais observèrent, en même
s’adressent à loi pour qu’ il juge de leur position, constitue tout
temps, sur la muqueuse de l’estomac et les tissus des intestins,
à la fois le débit de préparations médicamenteuses au poids
des lésions graves, remontant à une époque déjà ancienne et
médicinal et l ’exercice dlégal de la médecine;
attestant une inilammation que les médecins ont reconnue
« Que, de plus, le remède Leroy est un remède secret, qu’en
effet celte qualification ne dépend pas de ce que la connaissance
comme devant être attribuée à l ’absorption intempestive du
remède Leroy ;
d’ un remède est plus ou moins répandue ou absolument tenue
<• Attendu que les médecins ont expliqué à l’audience que bien
secrète, mais de ce que une préparation médicamenteuse non
que Pujol eût cessé de prendre ce remède depuis deux mois
spécialement prescrite par une ordonnance magistrale d’ un
avant sa m ort, la plupart des lésions par eux observées sur le
médecin qui commande le remède pour le cas spécial par !ui
tube digestif ne devaient pas moins être attribuées à l'action de
observé, n’est point inscrit au codex ou autorisé par une décision
ce purgatif violent, parce que leur état indiquait qu’ elles remon
taient à une époque antérieure à ces deux mois ; que surtout
ministérielle ;
« Attendu que plusieurs jugements et arrêts ont prononcé
déjà que le purgatif Leroy est un remède secret ; que c’ est ce
l’épaississement et le ramollissement de la muqueuse de l’esto
mac étaient un symptôme non équivoque à cet égard ;
11 no
«A ttendu que B ... a donc par son imprudence causé ces
vembre 1842, et par des sentences du tribunal correctionnel de
lésions internes, fait qui rentre dans les termes de l ’article 520
céans, en date des 6 et 17 rnai 1853 ;
du code pénal ;
qui a été jugé par un arrêt de la cour de cassation, du
« Attendu qu’il est en outre résulté des débats que, dans le
« Attendu que les délits qui lui étaient reprochés sont donc
courant de Tannée 18G3, le nommé Pierre Pujol, demeurant
prouvés aux débats ; qu’il est en récidive pour la vente au poids
au quartier des Crottes, territoire de Marseille, qui était atteint
médicinal de
de phthisie pulmonaire et d’autres maladies, ayant entendu
remède secret; qu’en effet c'est contre lui que fut prononcé le
préparations médicamenteuses constituant un
parler de B ..., dont la réputation est, il parait, étendue, se
jugement précité du tribunal correctionnel de céans à la date
rendit chez ce tailleur et le consulta, que B ..., lui rem it des
du 17 mai 1855, qui le condamna précisément pour la vente du
fioles du purgatif Leroy, qu’ à la suite de l ’absorption de ce
purgatif Leroy ;
remède, Pujol rendit du sang par la bouche ; que B ..., appelé,
fut le visiter chez lui et lui recommanda de continuer l’usage
alternatif du vom itif et du purgatif Leroy; que Pujol en but
« Attendu qu’il est évident que l’administration d’un purgatif,
si énergique laite sans connaissance et conseillé à tout venant,
représentait les plus graves dangers pour la santé publique ;
�—
08
—
a Qu'il esl nécessaire que le prévenu, qui n ’a pas tenu compte
du premier avertissement de la justice, soit plus sévèrement
puni ;
« Attendu que de la concurrence illicite q u'il a faite aux mé
lin e quatrième demande a été ajournée, parce quelle a sou
levé une question de principe ; elle était formée par
pharmacien dont
les qualités personnelles et la parfaite hono
rabilité sont justement appréciées ; mais son double litre a paru
decins, légalement pourvus de diplômes et qui se sont présentés
suffisant à la Commission administrative pour
parties civiles au procès, est résulté un dommage à la fois ma
cer tout d abord l’admission.
tériel et moral ; qu il en doit la réparation ;
un médecin
ne pas en
pronon
Sans doute les statuts de I Association générale ne permet
« Le tribunal reçoit les sieursSeux et consorts en leur inter
tent d'admettre que les médecins, et quelques Sociétés médit aies
mixtes anciennement existantes
vention comme partie civile ;
n’ont môme pu s’agréger à
« Déclare Jean-Baptiste B ..., coupable d'avoir, b Marseille,
e lle q u ’après avoir mis leurs propres statuts en harmonie avec
depuis moins de trois ans, sans être muni d’un diplôme de
ce principe, mais il faut convenir aussi que l’adjonction du
pharmacien, vendu et débité des médicaments ; 2° Vendu un
diplôme de pharmacien, faite par un médecin a son titre de
remède secret, et ce en rédicive ; 5° Exercé illégalement la
docteur ou d’olïicier de santé, ne saurait le frapper
médecine; 4° D'avoir au même lieu et à la même époque , par
maladresse, im prudence, involontairement
occasionné des
lésions internes au sieur Pujol.
« En réparation, le condamne à quinze jours d ’emprisonne
d.'incapacité
absolue pour être admis dans le sein de l ’Association générale.
Toutefois, l'exercice simultané de la médecine et delà phar
macie par le même individu, muni du double diplôme de
médecin et de pharmacien , étant formellement prohibé par le
ment, à vingt-cinq francs d’amende et au paiement en faveur
texte et l’esprit de la loi, quoique cette prohibition, par suite
des sieurs Seux et consorts d’une somme de trois cents francs,
d'une lacune dans la loi, ne soit consacrée par aucune sanction
à litre de dommages-intérêts, sans contrainte par corps, ledit
B ..., étant septuagénaire, etc.
pénale, l’admission dans une Société locale d'un médecinpharmacien exerçant simultanément les deux professions a
paru un lait trop insolite et trop contraire aux principes pour
être prononcée sans que des conditions particulières aient été
Séance de la Commission Administrative du 8 juin 1864.
PRÉSIDENT M. SEUX.
Dans cette réunion, la commission administrative a eu à
s’occuper de plusieurs questions intéressantes.
Sur quatre demandes d’admission, trois ont été accueillies
sans objection et à I unanimité ; ce sont celles de MM. Emile
Martin, de Marseille; Frissant, de Mouriés, et Giraud, demeu
rant à Arène, banlieue de Marseille. Ces admissions portent au
chiffre de H 4 le nombre des membres de la Société locale des
médecins des Bouches-du-Rhône.
directement débattues avec le pétitionnaire.
Le médecin qui habile une localité où il n’y a pas de phar
macien,ayant officine ouvertement fournir des médicaments aux
malades près desquels il est appelé (art. 27 de la loi de germinal
an X I), mais celle faculté lui est interdite là où existe une
officine ouverte gérée par un pharmacien légalement reçu.
Le médecin-pharmacien ne devrait pas user d’une prérogative
plus étendue ; s’il est surtout médecin, il ne doit faire de la
pharmacie que dans les mêmes conditions où le médecin est
autorisé à la faire.
�—
I)YSM ÉNOIt R11ÉE MEM BRAN RUSE.
100 -
Dans son assemblée générale de 1862, I Association générale
a émis le vœu qu'une disposition législative intervienne pour
interdire l'exercice simultané des deux professions de médecin
et de pharmacien,même aux individus munis des deux diplômes,
et sanctionne celte prohibition par une pénalité suffisante.
Elle a en même temps appelé I attention des autorités com
pétentes sur les nombreux abus résultant tant de l'exercice
simallané des deux professions par les mêmes individus , que
de I association de certains médecins et pharmaciens qui ont
des formules de convention intelligibles pour eux seuls, et
d’attirer sur de honteuses spéculations toute la sévérité des lois
prohibitives de la vente des remèdes secrets.
La voie étant ainsi tracée par l ’Association générale, la dé
cision prise par la commission, dans sa dernière séance, est
Toutes les lois que le médecin est appelé à examiner une ma
lade atteinte de dysménorrhée, il lui est facile de se convaincre
qu’il ne se trouve pas en présence d’ une affection isolée, mais
d ’un symptôme lié à un état pathologique de l'utérus, lequel
•
peut être purement
de 1orifice, ou bien, placé sous la dépendance d ’une maladie
générale comme la chlorose et l'hystérie. C?s étals morbides,
qu’on peut grouper sous la dénomination commune de
dysmé-
étant nombreux, la dysménorrhée qui s’y rattache se pré
sente sous des formes variées, dont les unes, très fréquentes,
ont été bien étudiées, tandis que d’autres, sans doute parce
qu’ elles sont plus rares, n’ont attiré l’ attention que d’un petit
nombre d’auteurs.
Parmi ces dernières je signalerai cette
forme qu’ on a appelée
dysménorrhée membraneuse ou pseudo-
membraneuse , nous verrons
parfaitement justifiée.
#
local comme, par exemple, I étroitesse
lequel de ces deux noms doit être
La Commission a eu encore à s'occuper de la proposition,
accepté. En raison de la singularité des symptômes qu’elle pré
déjà indiquée, d'excepter les dispensaires gratuits de l ’interdic
sente et de la stérilité qu’elle entraîne, cette variété est très
tion de la publicité prononcée d'une manière générale.
intéressante à étudier. C’est ce qui m’engage à publier le fait sui
Elle a reçu aussi plusieurs communications relatives à l’exer
cice de la médecine par
quelques
pharmaciens et des sages-
vant, remarquable à plusieurs titres, principalement parla durée
de la maladie dont le véritable caractère a été longtemps méconnu.
Observation.
femmes.
Mme * * * , âgée de trente-cinq ans, a eu trois
Le défaut d’espace ne nous permettant pas d ’indiquer les
enfants. Jusqu'à sa troisième couche elle s’était toujours bien
considérations qui ont motivé les décisions prises, nous en
portée. Il y a quatorze ans. après la naissance du troisième en
renvoyons l ’exposé au prochain numéro.
fant, le retour des règles se fit difficilement, et quelques dou
Qu'il nous suffise, pour le moment, de dire que, dans ses
leurs se manifestèrent dans le bas-ventre et dans les reins; la
délibérations, la Commission administrative n ’est mue que par
station debout un peu prolongée et la marche les rendaient
une pensée : tenir bien haut le drapeau professionnel et veiller
plus fortes et donnaient lieu à la sensation d’un poids sur le pé
avec sollicitude sur les intérêts médicaux.
rinée. La malade n’a pu assigner aucune cause à l ’apparition de
Ce but, elle le poursuivra avec prudence, sans doute, mais
aussi avec fermeté.
ces douleurs, et, comme leur intensité n’était pas très grande,
elle s’en est peu préoccupée et n ’a pas consulté de médecin.
Le Comité de Rédaction.
Marseille. — lœp. Yial, rue Tbiers, 8.
Quelques mois après, étant en voyage, elle souffrit un peu plus
vivement au moment des règles, et, tout à coup, expulsa une
poche membraneuse, après quoi la douleur cessa, le sang conti
nua à couler comme d'habitude, ni plus ni moins longtemps.
Un médecin examina la membrane, et déclara qu’il s’agissait
7
�d ’un avortement, Le spéculum fut appliq ué, et probablement
on trouva quelque ulcération superficielle du co l,ca r un certain
nombre de cautérisations au nitrate d'argent furent laites. Les
mois suivants il ve u t un peu de douleur à l ’époque menstruelle,
mais aucune membrane ne fut expulsée. Un peu plus tard le
même phénomène se produisit ; la poche était plus volumineuse
que la première fois. Elle fut présentée h un médecin qui pensa
qu'il s’agissait d ’une fausse couche. La même opinion lut émise
par une sage-femme de Paris, h qui la malade rendit compte de
ces deux faits. Cette sage-femme supposa que les avortements
étaient dûs à une déviation utérine, et institua un traitement
normal ; la lèvre postérieure était ronge et dépolie, l’orilicc non
dilaté. Point de catarrhe.
Quelques jours après (30 mai ) des douleurs de bas-ventre
commencent, ayant le caractère de battements, très prononcées
du côté gauche, accompagnées d’agitation et d'étal fébrile. Le
8 juin, vers le soir, les règles paraissent. Le lendemain, à midi,
vives douleurs dans les reins, s'irradiant vers le bas-ventre, et,
après une heure de souffrance, expulsion brusque de la poche
membraneuse Celle expulsion effectuée, l’agitation a cessé, les
règles ont continué à couler comme a l ’ordinaire. On me remet
la membrane pour l’examiner.
par des sachets médicamenteux qui furent appliqués pendant
Telle est Uhistoire de celle maladie qui persiste ainsi depuis
six mois, durant lequels I accident ne se renouvela pas. Il y avait
plusieurs années, et paraît augmenter peu a peu de gravité. Je
donc amélioration dans l ’état de la matrice ; mais ce mieux ne
n ’ai pu rapporter a des dates précises lonles les périodes de son
se m aintint pas. B ientôt, sans cause appréciable, les phénomè
évolution parce que les souvenirs de la malade sont un peu confus.
nes successifs de douleur et d’ expulsion d'une membrane se
Mon opinion était déjà formée sur la nature du produit ex
reproduisirent à des intervalles de plus en plus rapprochés, mais
pulsé de b utérus aux époques menstruelles. Je pensais qu'il
irréguliers. Tantôt l’ accident avait lieu plusieurs mois de suite ,
existait un état permanent de congestion utérine avec augmen
tantôt plusieurs mois se passaient sans que les règles fussent
tation du volume de l’ organe, et qu'il se produisait, au moment
troublées autrement que par un peu de douleur. Enfin,dans ces
des règles, une véritable apoplexie qui décollait la muqueuse,
derniers temps, Taccident avait lieu tous les mois, avec des dif
tantôt com plètem ent, sous la forme u’une poche, tantôt par
férences seulement dans le volume de la poebe et dans l’inten
lambeaux. L ’examen direct m’a permis de voir que je ne me
sité des douleurs proportionnée b ce volume. L ’ intervalle entre
trompais pas. Ce que j'avais sous les yeux était la muqueuse
chaque époque menstruelle n’était plus exempte de souffrance,
utérine, lisse du côté de la cavité, hérissée de villosités et ronge
et assez fréquemment survenait un llux hémorroïdal plus ou
du côté par où elle avait etc adhérente. La poche présentait !a
moins abondant. Les rapports sexuels n ’avaient aucune in
forme de la cavité ulétine avec des dimensions au-dessus de
fluence sur la production des phénomènes morbides ; l’éloigne
l’étal normal. En deux ou trois points, on apercevait des solu
ment du mari ne les a pas empêchés d ’avoir lieu.
tions de continuité, la portion correspondante do la muqueuse
Lorsque cette dame vint me consulter, dans le courant du
étant probablement restée adhérente à la paroi utérine. La sépa
mois de mai dernier, les règles ne devaient paraître que quinze
ration paraissait s'être faite au niveau de l'orifice interne du col
jours après. Je constatai cependant par le toucher que le corps
par une ligne circulaire très nette
de l ’utérus était notablement volum ineux, mais sans déplace
membrane au microscope, tuais son apparence était trop bien
ment. De vigoureuses pulsations artérielles s’y faisaient sentir,
caractérisée pour qu'il fût possible de rester en doute sur sa na
surtout du côté gauche où la pression déterm inait un peu de
ture. Un de nos confrères, M. Van-Gavcr, qui l'a vue avec moi.
douleur. Le col examiné an spéculum présentait un volume
a partagé pleinement mon opinion.
Je n'ai pu examiner cotte
�— 104 —
— 105 —
L’expulsion avec le sang menstruel de portions de membrane
a été depuis longtemps signalée. Peut-être même est-elle plus
et glanduleux. Elle présente une face interne toujours lisse,
commune qu’on ne pense; en considérant le développement
pourvue d'un épithélium, et souvent criblée de pertuis glandu
auquel la muqueuse est momentanément sujette h chaque épo
laires, et une lace externe lomenteuse cl déchirée, par laquelle
que, il est logique de supposer qu’ une partie au moins, sinon
la totalité, de l'épithélium doit tomber tous les mois, et proba
blement, en même temps, quelques parcelles de la muqueuse
elle-même. Les décollements partiels de la muqueuse, dans toute
sou épaisseur, constituent le premier degré delà dysménorrhée
membraneuse, et l’expulsion de la muqueuse entière en repré
sente le degré le plus élevé et aussi le plus rare
Dans un mé
moire publié en 1846, dont on 'trouve l’analyse dans les Archives
générales de Médecine (juillet 1847), le docteur Oldham, accou
cheur anglais, a parfaitement établi cette distinction entre les
deux degrés de la maladie.
A une époque encore peu éloignée de nous, lorsque la mu
queuse utérine était contestée ou mal connue, on conçoit que
elle adhérait a l'organe dont elle se sépare. C’est évidemment
une portion exfoliée de la muqueuse. »
Ainsi le doute n’est plus permis aujourd’hu i; il s’agit d’un
dépouillement de la surface interne de l ’utérus; et dans le cas
que je viens de relater, c’est la muqueuse entière qui est déta
chée cl expulsée. Que celle poche membraneuse ail pu être
prise iiour un œuf, c’est la une erreur de diagnostic a peine
explicable, et qui n'a pu résulter que d'un examen inaltenlif.
J’ajouterai que la malade étonnée, avec raison, d’être sujette à
de si fréquents avortements, a pu, en s'isolant de son mari,
acquérir la preuve que la fécondation d’un œuf était tout ii fait
étrangère a la production de cet accident.
Lorsque j ’ai voulu, la nature du mal une fois connue, remon
ter à sa cause, je me suis inlormé en vain. Les souvenirs de la
les auteurs se soient trompés sur la nature du produit membra
malade ne lui rappellent aucune imprudence commise, rien qui
neux expulsé avec les règles. Le docteur Oldham s’est approché
ait pu amener une congestion de l’ utcrus ou empêcher cet or
delà vérité en l’assimilant h la membrane caduque, mais il le
gane de revenir après l'accouchement a son volume normal. Je
considérait à tort comme un produit de sécrétion des glandes
demeure cependant convaincu que cette cause a existé. L’ac
Valleix , qui en avait observé un cas ,1e regardait comme une
couchée se sera levée trop tôt, aura éprouvé une fatigue quel
fausse membrane fibrineuse. Il pensaitque le sangdeces malades
conque. De la, un certain degré de congestion utérine, laquelle
possède une plasticité anormale, d’où la formation rapide d’une
a persisté avec une intensité variable. A chaque époque mens
couche fibrineuse sur les parois de l’ utérus. Cette opinion n’est
truelle une congestion plus active s ajoute à celle qui est per
point admissible. Une fausse membrane aussi épaisse, aussi com
manente, cl l’afilux du sang décolle la muqueuse, tantôt en
plète, ne pourrait être ainsi formée dans le peu de temps qui sé
partie, tantôt en totalité.
pare son expulsion de l’apparition des règles. Eri second lieu,
Le docteur Oldham avait reconnu que celle forme de dysmé
cet état serait permanent,et l’on n’ observerait pas, comme dans
norrhée est liée a un engorgement permanent de l’organe. 11
le cas qui nous occupe, des alternances d’ un mois à l’autre, et
avait de plus constaté, dans la plupart des cas, un certain degré
des périodes de plusieurs mois sans production de ce phénomène
de rétroversion. Je ne l ’ai pas rencontrée dans le cas dont il est
morbide. D ’ailleurs, l’examen de la poche expulsée ne peut
ici question. Le corps de l’ utérus est augmenté de volume et sa
laisser aucun doute. Cazeaux en a donné une description qui sc
face postérieure pèse un peu sur le rectum ; mais le col est a sa
rapporte exactement a ce que j ’ai constaté moi-m êm e :
place normale et il n'existe, en conséquence, point dedysurie,
aucun trouble du côté de la vessie.
« La p o ch e ,d it-il, est formée d’ un tissu celluleux, vasculaire
�—
100 -
En présence d'une affection qui dure depuis un assez grand
nombre d’années et qui inquiète beaucoup la malade, peut-on
espérer la guérison, ou bien la ménopause viendra-t-elle seule
mettre un terme à cet étal ? Il y a lieu, ce me semble, de con
server quelque espoir si l ’on considère que la maladie a déjà
spontanément présenté des intermittences et disparu pendant
plusieurs mois sous l’ inlUienee d'un simple changement de ré
sidence. Mais quel traitement convient-il d employer? C’est ce
que j'a i dû examiner.
Lorsque une maladie de l’utérus parait être sous la dépen
dance d'un état morbide général, il est indispensable de faire
d'abord cesser celui-ci ou, tout au moins, de le m odifier avant
d’agir sur l’organe lui-même. Dans le cas présent je n ’ai trouvé
aucune indication de celle sorte à rem plir. Il faut donc agir spé
cialement sur 1 utérus et lutter non-seulement contre la con
- 107 cessaire de s’ occuper tout d’abord. Pour rem plir ce but, Yalleix,
qui attribuait la maladie a une plasticité trop grande du sang,
conseillait les alcalins. Le docteur Oldham a préconisé les m ercuriaux donnés de manière h provoquer la salivation, traitement
qui ne serait proposable que si le succès devait être certain.
L ’application d'un large vésicatoire au sacrum me semble aussi
peu acceptable. L ’iodure de potassium et les préparations arse
nicales présenteraient peut-être quelque chance de réussite ;
mais nous avons a notre disposition des eaux minérales dont
l’action sur l’utérus est assez efficace; cl c’est a elles qu’il
convient, je crois, de recourir, avant d'essayer tout autre moyen
thérapeutique. Celte manière de procéder présente un double
avantage. Il se peut d'abord que l'usage de l'eau minérale suf
fise pour amener la guérison ; si cet heureux résultat n’ est pas
obtenu, la modification produite par ce traitement rend plus
gestion sanguine de chaque époque menstruelle, mais aussi
facile et plus utile l ’emploi ultérieur d’ une autre médication,
contre l’engorgement permanent de l’organe.
ainsi que M. Durand-Faidel le fait observer avec juste raison,
Pour combattre l ’afflux saDguin exagéré de chaque mois et
plus d’une fois, dans scs ouvrages.
accident qui en résulte, divers moyens thérapeutiques sont à
A quelle eau minérale convient-il d’ avoir recours? Plusieurs
notre disposition. Le seigle ergoté a souvent réussi entre les
espèces d'eaux peuvent agir contre l’engorgement utérin, mais
mains de M. Duparcque et d ’autres praticiens. On pourra t
chacune d'elles rem plit des indications différentes et, par consé
également essayer la digitale. Donnée a haute dose, comme le
quent, ne peut cire utile que dans certains cas. Les sulfurées,
conseillent les anglais, cl particulièrement le docteur Dickinson;
même les moins actives, me paraissent contre-indiquées par
elle a obtenu des succès remarquables dans les hémorrhagies
l’ absence de catarrhe et la prédominance de l’ état congestif et
utérines a l'époque des règles ou en dehors de ces époques. Je
lluxionnaire. Les chlorurées sodiques ne peuvent être conseil
l’ai moi-même employée plusieurs fois avec avantage. A-t-elle
lées que dans les cas évidemment liés au lymphatisme ou a la
une action spéciale sur l’utérus, comme le pense M. le profes
scrofule. Les bicarbonatées sodiques pourraient être utiles, et
seur Trousseau, ou bien agit-elle en exerçant une action séda
j ’avais pensé a envoyer la malade à V ich y; mais j ’ai craint que
tive sur tout le système circulatoire? L ’explication est encore
ce traitement fût mal supporté, et il m ’a paru plus prudent
incertaine, mais l’ action est incontestable. Quant aux topiques,
d’essayer d’abord les eaux dites sédatives ( bicarbonatées calci
astringents ou caustiques, portés dans la cavité même de l’uté
ques) comme Foneaude et Lissât, et c’est a cette dernière que
rus, j ’avoue que je n’y aurais recours qu’en dernière ressource,
j ’ai cru devoir m’arrêter. Je ne sais si les bains d’Ussat feront
et que je ne les emploierais pas sans quelque appréhension.'
disparaître la maladie ; j ’espère du moins qu’il en résultera une
Aucun de ces moyens ne me parait propre à faire disparaître
l ’engorgement chronique de l ’utérus dont je crois qu’il est né
amélioration suffisante pour qu’ un traitement ultérieur puisse
être tenté avec quelque chance de succès.
E. B ourgakel .
�—
108
—
RAPPORT
Fait h la Commission administrative des Hospices par les
Docteurs C gsI c , directeur de l'Ecole de Médecine, et lirorjuier,
chirurgien en chef des hospices, sur un procède d'embaume
ment expérimenté par M*. A udigieu , chimiste.
Messieurs les administrateurs,
A la (in de l ’année 1862, le sieur Audigier, chim iste, demeu
rant. à Marseille, rue Grignan, 63, vous adressa une pétition
tendant à obtenir de vous l ’autorisation d’expérimenter un
procédé d'embaumement dont il était l ’inventeur.
Ce procédé, au dire de l’auteur, présentait sur tous les autres
connus l ’avantage d’être très simple, peu dispendieux et d’a
mener rapidement la momification ; il n ’exigeait aucune opéra
tion ni mutilation
Ces avantages, s’ils étaient réels, pouvaient amener un
progrès dans cette question importante dts embaumements ; à
ce titre, vous voulûtes bien accueillir favorablement celte
demande. Mais en accordant a l ’inventeur l ’autorisation de
produire ses expériences, vous avez voulu qu’elles se fissent
sous votre contrôle et votre surveillance, seul moyen d ’avoir
une garantie sur la vérité et l'authenticité des résultats.
A cet effet, vous nous avez désignés pour suivre et diriger
cette expérimentation. Nous avons l ’honneur de déposer entre
vos mains le rapport, qui en constate les résultats. C e se xp 1riences ont été faites a l’amphithéâtre, sous les yeux des élèves
de l’hôpital et de l ’école qui ont pu, comme nous, les suivre cl
les apprécier.
Le procédé de M. Audigier est des plus sim ples; quelques
minutes suffisent à l ’opération; il consiste à introduire, par
la bouche, une petite quantité, deux verres au plus, de son
liquide et à placer dans le cercueil, tout autour du cadavre, une
poudre végétale imprégnée du même liquide.
Ce liquide, qui constitue l’ invention, est un composé de deux
liquides et de deux sels dissous jusqu’à saturation.
Nous avons dû nous assurer que ce mélange ne contenait
aucune préparation arsenicale ; on comprend, en effet, que si
les liquides en usage dans les embaumements renfermaient de
l’arsenic, les empoisonnements par les composés de ce métal
— 109 —
étant lies fréquents, le crime pourrait être entièrement dissi
mulé par le liquide conservateur. D’ailleurs, une ordonnance
du roi, insérée au
du 31 octobre 1846, déclare for
mellement « que la vente et l’emploi de l ’arsenic et de ses
« composés sont interdits pour chaulagc de grains, l’cmbau« moment des corps et la destruction des insectes. » Or, la
préparation de M. Audigier ne contient aucune trace arsenicale.
Trois cadavres ont été soumis à l’expérimentation : un à
l’Hôtel -D ie u , deux à l'hôpital de la Conception Le premier,
celui de l’ H ôtel-D ieu, lut embaumé le 12 décembre 1862 :
c’était une femme de 55 ans, morte depuis deux jours.
L’ abdornen était déjà bleuâtre et annonçait un commence
ment de putréfaction. L ’opération terminée, la bière fut fermée,
scellée et déposée à la Morgue.Les deux autres embaumements,
à f hôpital de la Conception, furent faits les 9 et 22 mai 1863 ;
le premier embaumé était un homme de 35 ans, décédé à la
suite d’une anasarque générale, et par conséquent tout infiltré ;
le second était une fille de 17 ans; les deux cercueils ont été
fermés et laissés dans l ’amphithéâtre.
A ujourd’h u i, non-seulement la conservation est parfaite,
mais encore la momification est complète. Ces cadavres ont
acquis une dureté comparable à celle du bois et de la pierre ;
la peau, sans être noire, a bruni; les traits de la physionomie
sont conservés, et sur l’un des cadavres, dont on avait eu soin
de recouvrir la face d’un linge, la poudre végétale n ’ayant agi
que médialcmcnt, la peau a conservé sa blancheur cadavérique
Ces embaumements sont donc aussi heureux que possible :
absence de putréfaction, conservation et momification obtenue
en quelques mois, tels sont les résultats que nous avons pu
constater.
Pour apprécier réellement ces résultats, il faut surtout tenir
compte des conditions que ces expériences ont du subir. Ces
conditions ont été loin d’être favorables. Renfermés dans des
cercueils en bois de sapin, mal fermés, mal joints, ces cadavres
ont subi toutes les influences atmosphériques les plus opposées.
Celui de l ’Hôtel—Dieu est resté abandonné dans la morgue,
local humide, en contre-bas du sol et dans lequel coule en
permanence un courant d’eau, et qui, par contre, en été, est
exposé de toutes parts aux rayons du soleil. L ’amphithéâtre de la
Conception, quoique moins humide, présente à peu près les
Moniteur
�- 110 mêmes conditions. Ainsi, ces cadavres ont eu à lu tte r contre
les deux causes les plus favorables h la putréfaction : l’extrême
humidité en hiver, l ’extrême chaleur en été. Comme sujets
choisis pour expérience de ce genre, deux présentaient les
conditions les moins favorables; celui de l’H ô te l-D ie u , décédé
depuis deux jours, offrait déjà un commencement de putréfac
tion ; le second, à l'hôpital de la Conception, était infiltré de
partout, et I on sait avec quelle rapidité sc décomposent ordi
nairement ces cadavres.
Ainsi trois embaumements ont été faits par le procédé Audigier, tous trois ont donné les résultats les plus complets, malgré
le concours des circonstances les moins propres à les favoriser.
Ce procédé est donc bon ; il rem plit le but cherché, c’ est-àdire de préserver les corps de la putréfaction et les conserver
intacts.
Plusieurs autres des procédés connus et employés jusqu'à ce
jo u r obtiennent, il est vrai, un résultat analogue, mais ils sont
loin de présenter les avantages du procédé Audigier comme
simplicité de manœuvres et rapidité d’exécution.
Nous ne rappellerons pas l'ancien procédé des Egyptiens,
aujourd'hui justement abandonné, qui nécessitait les mutila
tions les plus considérables, des manœuvres multipliées et
répétées qui duraient quelquefois au delà de 70 jo u rs ; mais,
depuis, on a essayé une foule d’autres moyens qui tous consis
taient à plonger et à laisser macérer les corps, pendant un laps
de temps variable, soit dans de la saumure, dans du vernis, de
la gomme, de la térébenthine ou tout autre liquide conservateur,
après quoi on les re lira it pour les placer dans le cercueil défi
nitif. Tons ces moyens ont dû être abandonnés en raison de
leur incertitude d’action d’abord, et ensuite à cause des incon
vénients graves qui résultaient pour les familles du séjour
prolongé des cadavres dans le domicile.
Aujourd hui, tous les embaumements se fo n t'p a r une seule
méthode, f injection dans le système artériel d’ un liquide con
servateur. Ce liquide pénètre ainsi, par le système capillaire,
dans toutes les parties du corps.
Lorsque cette méthode parut, elle fut considérée comme un
grand progrès dans l’art des embaumements. Avec elle, [tins
de ces m utilations, de ces soustractions de viscères qui étaient
çn contradiction formelle avec le but de conservation que l ’on
— 111
se propose et qui ne permettaient des embaumements que dans
des conditions presque exceptionnelles. Celte méthode acceptée,
le choix du liquide seul a différé. Berzelius fut le premier, en
1855, qui l’expérimenta ; il injecta du vinaigre de bois. T ronchina, de Naples, fit des embaumements, en 1855, avec une
forte solution arsenicale. En France, Cannai s’ empara bientôt
de cette méthode pour I cxploiter, comme chacun sait, de la
façon la plus tapageuse. L ’injection Gannal est une solution
aqueuse d ’un mélangea parties égales de sulfate d'alumine cl
de chlorure d’aluminium, marquant 54° à l ’aréomètre de Beaumé. L ’injection faite, il complétait l’opération en enveloppant
le cadavre de bandelettes trempées dans un liquide contenant
surtout de la teinture d’aloès.
A la même époque le docteur Sucquet faisait connaître son
liquide qui n’est autre qu’une solution de chlorure de zinc à 50".
Pour apprécier ces deux procédés, nous citerons seulement
le résultat du rapport lu à l’Académie de Médecine par M. Poisseuille, au nom d’une commission (16 mars 1847), sur les expé
riences faites concurremment par MM. Gannal et Sucquet.
Deux cadavres furent embaumés en présence de la com
mission, l ’ un par M. Gannal, l’autre par M Sucquet; les cer
cueils, soigneusement cachetés, puis inhumés en une profon
deur de 70 centimètres dans les jardins de l'école pratique.
L’exhumation en eut lieu au bout d’un an et deux mois, et les
résultats suivants furent constatés :
« Le cadavre embaumé par M. Gannal exhalait une odeur de
putréfaction suffocante; la peau, complètement désorganisée,
présentait de nombreuses solutions de continuité ; le linceul
était en lambeaux et les fragments, noircis par la matière ani
male putréfiée, semblaient faire corps en beaucoup de points
avec elle. Une couche de putrilage, en certains, points do plu
sieurs millim ètres d’épaisseur, tapissait le fond du cercueil. Le
cadavre, dont il était impossible de déterminer le sexe, était
entièrement méconnaissable, sa figure n 'o lïrait qu’une masse
informe, les cheveux et les poils, saisis avec une pince, cédaient
au moindre effort ; les organes contenus dans les cavités splanchéniques se trouvaient dans un étal correspondant.
« Le cadavre embaumé par M .S u cq e tse trouvait, au con
traire, dans un état complet de conservation extérieure et pro
fonde; puis, abandonné à l’air libre, il se dessécha saus la
�— 112 —
moindre putréfaction el acquit une dureté comparable b celle du
bois et de la pierre. »
Il résulte donc de ce rapport que le procédé Gannal est loin
detrc aussi infaillible (pie le proclamait son inventeur. Le
liquide Sucquel est préférable, mais uous lui ferons le reproche
qu’entraîne avec elle celle méthode, c’est d’ exiger une opéra
tion préalable. Gannal fait son injection par l’ artère carotide,
Sucquel par l’artère poplitée. Dans les deux cas, il faut inciser
la peau, ouvrir l’artère, introduire dans son calibre la canule
de la seringue. Si celle-ci est mal assujettie, le liquide peut
rejaillir sur l’opérateur. Si le liquide est pressé avec trop peu
de force, il ne pénètre pas partout; s’ il esl pressé trop vigou
reusement, quelques branches artérielles peuvent se rompre ci
alors le liquide s’épanche au-dehors du système vasculaire dans
quelque cavité viscérale, aux dépens d’autres parties qui ne
sont pas atteintes.
La méthode par injection, tout en marquant un progrès réel,
n’est donc pas exempte d ’inconvénients et d incertitudes (pii
tiennent même au manuel opératoire.
Le procédé qu’a expérimenté devant nous M. Audigier
obtient les mêmes résultats que le procédé Sucquet. Il n’exige
aucune opération préalable, aucune incision ni mutilation,
avantage considérable, b notre avis, car toute idée de mutilation
est toujours pénible, non-seulement pour l'opérateur, mais
surtout pour la famille qui réclame l'embaumement de l’ un de
ses membres.
Nous croyons donc que la méthode de M. A udigier est un
véritable progrès dans l’art des embaumements. Si elle esl
acceptée, par la simplicité el l ’innocuité de ses manœuvres, elle
tendra b vulgariser nue coutume presque abandonnée cl qui
cependant répond b un des sentiments les plus sacrés et les
plus respectables, le désir de conserver el de préserver de la
destruction un parent ou un ami que l’on n ’a pu arracher b la
mort.
Agréez, Messieurs les Administrateurs, l ’assurance de notre
respectueuse considération.
Signé: Y.
Marseille, le 22 février 1804.
BROQUIER, COSTE.
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
D ispensaires G ratuits . — P ublicité . — La commission
administrative n ’a pas cru devoir excepter les dispensaires gra
tuits de l’interdiction de la publicité, prononcée d’une manière
générale, dans une de ses précédentes réunions.
Les dispensaires gratuits ne sauraient certainement être trop
encouragés; ils procèdent d’une pensée philanthropique qui
m rite toute sympathie. Mais ces dispensaires gratuits o n t-ils
besoin de cette réclame qui n’est le plus souvent qu’un des
mille et ingénieux procédés du charlatanisme.
En prenant cette décision, la commission administrative n’a
été inspirée par aucune considération personnelle et n’a vu dans
cette question qu’une question de principe. Quelques dispen
saires existent en effet b Marseille, tenus par des confrères
parfaitement honorables qui n’auront jamais besoin , pour
réaliser les services qu’ ils rendent aux pauvres malades, de
recourir b cette publicité charlatanesque qu’ils sont les premiers
b condamner. La publicité médicale semble réservée ici b quel
ques industriels, nomades ou sédentaires, auxquels tout médecin
jaloux de la dignité professionnelle ne voudra pas être assimilé.
Un membre de la réunion ayant demandé si la même inter
diction devait atteindre aussi les maisons de santé, il a été
répondu que la maison de santé, en dehors du côté médical,
était aussi une affaire industrielle en faveur de laquelle la publi
cité était parfaitement admissible.
Lettre circulaire adressée aux pharmaciens et aux sagesfemmes du département.
La question de l’exercice illégal de la médecine est peut-être
la question la plus importante, la question vitale pour le corps
médical. Tous les elforts de l’Association générale et des socié
tés locales qui y sont agrégées, tendent b débarrasser la société
de ces
plus nombreux peut-être que les méde
cins b diplômes qui, non contents de nuire b la considération el
aux intérêts du corps médical, font tant de victimes et de dupes
parmi le trop crédule public.
Grâce au bienveillant concours de l ’autorité ju d ic ia ire , la
société locale des Bouches-du-Rhône a obtenu déjà contre eux
plusieurs condamnations qui portent leurs fruits.
Indépendamment de cet exercice illégal de la médecine, que
l’on peut appeler l ’exercice illégal de bas étage, il en est un autre
faux médecins,
�- 111
— 113 —
qui se présente au public, sous le couvert de sciences acces
soires à la médecine et qui n’en est pas moins dangereux pour
les malades ; nous voulons parler des empiétements commis
par
pharmaciens et
sages-femmes, dont nous
ne craindrons pas de blesser la susceptibilité, en avançant que
les études auxquelles ils se ,sont livrés ne leur ont pas conféré
l'aptitude voulue et les connaissances nécessaires pour faire
utilement de la médecine.
Quoique bien décidée h faire cesser une situation tout à fait
anormale, la commission administrative a préféré avertir, plutôt
que de provoquer et de poursuivre la répression des faits délic
tueux et c'est dans celte pensée qu'elle a adressé aux pharma
ciens et aux sages-femmes, les circulaires qui suivent.'
Elle n’a fait, du reste, que suivre en cela l ’exemple qui lui a
été donné par un très grand nombre de sociétés locales qui ont
voulu agir aussi par voie de circulaire et avant toute plainte
judiciaire, à l ’égard des pharmaciens et des sages-femmes qui,
contre tout droit et toute convenance, pratiquent plus ou moins
ouvertement la médecine.
Parmi ces sociétés, nous citerons plus particulièrement celles
du Cher, de Toulouse, d’Eure-et-Loire,de la Gironde,de Saumur,
d’Avranches, de la Moselle, du Nord, de Meaux, dé la Meurthe,
de Senlis, etc. Dans certaines localités, les empiétements de
certaines sages-femmes sont surtout devenus si excessifs qu'ils
ont provoqué l'attention d une manière particulière et valu aux
délinquantes de sévères leçons.
quelques
quelques
Lettre-Circulaire adressée a Mesdames les Sages-Femmes.
Marseille, le 12 ju illet 18G4.
Mesdames les Sages-F emmes,
L ’Association Médicale du département des Bouches-du-Rhône a
reçu fréquemment des plaintes au sujet des empiétements commis
par quelques Sages-Femmes sur des attributions que leur diplôme
ne saurait leur conférer; c’est, ainsi qu’elles ne craignent pas de
s’immiscer dans le traitement des maladies utérines auxquelles la
nature de leurs études n'a jamais cependant pu les initier; pour elles,
I application du spéculum et la cautérisation deviennent une occu
pation importante ; elles soignent encore les enfants malades,
pratiquent les saignées en dehors des cas spéciaux où cette opération
leur est permise; il en est qui traitent toutes sortes de maladies et
toutes sortes de malades. Nous vovons sur certaines enseignes
l ’annonce de cabinets de consultations; d’autres ne craignent même
pas de faire de la réclame médicale dans les journaux.
De pareils abus sont dangereux pour la santé publique, et ils
portent une grave atteinte aux intérêts moraux et matériels des
Médecins. L ’Association médicale est bien résolue de ne pas les
tolérer davantage. Elle a donc l ’honneur de vous adresser cette
lettre, afin que celles d’entre vous qui se sont engagées dans une
fausse voie veuillent bien rester désormais dans leur spécialité.
Nous devons toutefois reconnaître qu’un grand nombre compren
nent leurs devoirs et respectent la légalité, et c'est aussi parce que
TAssociation a pour ces dernières la considération qu’elles méritent,
qu’elle s’attachera à provoquer sans hésitation la répression des
empiétements et des abus, toutes les fois que l ’occasion lui en sera
fournie.
Veuillez agréer, Mesdames les Sages-Femmes, l'assurance de
notre considération la plus distinguée.
Au nom de la Commission administrative,
Et suivant sa délibération du 8 ju illet courant.
Le Secrétaire
LAIHENS.
,
Le Président
SE U V .
,
Lettre-Circulaire adressée a tous les Pharmaciens du
département.
Monsieur ,
Marseille, le 12 juillet 1861.
De nombreuses plaintes nous parviennent chaque jour de divers
côtés au sujet des empiétements qui se tout contre la profession
médicale. Parmi les laits signalés, quelques-uns se rapportent à des
Pharmaciens qui, non contents de donner chez eux. plus ou moins
ouvertement, des consultations, font même des visites à domicile et
annoncent publiquement l ’existence, dans leurs officines, de cabinets
de consultation.
Ces empiétements ne pouvaient trouver indifférente la Commis
sion administrative de l ’Association Médicale qui a plus particuliè
rement le soin de défendre les intérêts généraux de notre profession;
aussi a-t-elle décidé qu’avant toute autre mesure une circulaire
serait adressée à tous les membres du corps pharmaceutique du
département. Cette lettre parviendra donc à ceux qui méconnaissent
leurs devoirs comme à ceux pour qui le respect de la légalité est une
règle sacrée. Les uns y verront, nous l’espérons du moins, un
avertissement efficace; les autres comprendront les difficultés qu’il
y avait de ne s’adresser qu’aux délinquants et voudront bien ne pas
être blessés de la généralité de notre intervention dont les bons
résultats espérés se feront d'ailleurs sentir pour eux-mêmes aussi
bien que pour le corps médical.
Loin de nous la pensée de donner à celte communication le
moindre caractère comminatoire; il nous sera cependant, permis de
rappeler à ceux qui l ’oublient trop souvent que si l’exercice illégal
de la médecine est interdit à tous, il l ’est, à plus forte raison, aux
pharmaciens qui, débitant à la fois consultations et remèdes, privent
�- 116 —
LES ÉTAPES DE LA QUESTION DU DIABÈTE
les malades de la garantie que la loi a voulu leur donner en inter
disant l’exercice simultané de la pharmacie et de la médecine
Si nous rappelons aussi les dispositions légales qui interdisent
la vente de remèdes secrets et généralement la vente de médicaments
sans ordonnance du médecin, ce n’est que pour montrer aux plus
incrédules que la loi nous a suffisamment armés contre ceux qui
s’obstineraient dans l’oubli habituel de leurs devoirs et qui espére
raient même trouver l ’impunité dans les difficultés qu’il y a trop
souvent à constater leur délit, ou dans des combinaisons particuliè
res que répudient la morale et la dignité humaines.
Nous aimons à penser, Monsieur, qu’en faisant à tous les Phar
maciens un loyal appel sur le terrain de la légalité, cet appel sera
entendu et qu’animes, de part et d’autre, du désir bien sincère
d’éviter toute dissidence et toute lutte, nous accepterons tous pour
règle de nos rapports le devoir et la justice qui sauvegardent tous
les intérêts et tous les droits.
Et d’ailleurs, en y réfléchissant bien, Pharmaciens et Médecins
n’ont-ils pas des intérêts communs? et la bonne harmonie et l’en
tente des deux professions ne serviraient-elles pas mieux à éteindre
les causes d’amoindrissement qui nous menacent que de stériles
dissensions et un antagonisme dangereux.
La démarche toute de conciliation que nous venons tenter auprès
de vous n’est pas, de notre part, un acte tout à fait isolé; nous ne
faisons que suivre l'exemple que nous ont donné, dans divers
départements, les Sociétés de medecine qui cherchent, comme nous,
à faire respecter les droits du corps médical
Veuillez agréer, Monsieur, l ’assurance de notre considération
distinguée.
Au nom de la Commission administrative,
et suivant sa délibération du 8 juillet courant.
,
PAR LF. DOCTEUR A. FARRE.
Le Secrétaire
Le Pi évident,
LACREftS.
SEUX
Admissions.
— Ont été admis dans la dernière séance : MM.
Cartier, de Gratis ; Liliou , de Charleval ; M e ffre , de SaintJérôme'; Monfray, de la Belle-de-Mai, e lR oberty, professeur à
l ’école de médecine de Marseille.
Assemblée générale.
— L ’assemblée générale aura lieu à
Marseille, dans la seconde quinzaine du mois d ’août prochains
L ’ordre du jour, le jour et le lieu de la réunion seront désigné,
ultérieurement. Les membres de l’association qui auraient des
communications d’intérêt général ou particulier h faire, peuvent
dès maintenant se mettre en mesure de les produire.
Le Comité de Rédaction.
Alarsi-iile. — lmp. ViaI, rue I hiurs, 8.
Tout vie illit vite h notre époque, et, quand on veut suivre son
siècle, il faut marcher à pas de géants.
Obéissant plus que toute autre à l’impulsion commune, la
question du diabète a fait dans ces dernières années de
très rapides progrès, dont la connaissance intéresse h la (ois le
savant et le praticien, car les découvertes de la physiologie ont
une influence immédiate sur la pathologie qui, «h son tour,
dirige la thérapeutique. Il est donc nécessaire de se rendre
compte de ces progrès et d’apprécier leurs conséquences.
Un coup d’ œil d ’ensemble sur les travaux dont le diabète a
été I objet dans ces derniers temps, nous montre d’abord les
chimistes médecins attribuant la présence du sucre dans les
urines a un trouble soit de la digestion soit des sécrétions, et
cherchant à y remédier par un régime spécial. Avec eux la
question fait une première étape.
Puis, survient une découverte importante autant qu'inatten
due : le foie produit du sucre. Ce sucre, comment se d é tru it-il
chez les personnes saines? Pourquoi passe-t-il dans les urines
des diabétiques ? Le médecin d o it-il s’en prendre au foie qui
produit trop ou au poumon qui ne sait détruire? Seconde étape
de la question.
Mais voila qu’on détermine le diabète d’abord en piquant le
bulbe rachidien, puis en irrita n t ou en coupant des parties
diverses du système nerveux. A l ’expérimentation physiologique
la clinique vient apporter le concours et le contrôle de ses
observations. Il y a donc un diabète d’origine nerveuse ; il
faudra, pour le combattre, s’attaquer au système nerveux ;
troisième étape de la question.
Enfin, nous nous arrêtons a une quatrième étape Dans des
expériences moins connues que les autres, mais qui sont non
moins grosses de conséquences, Cl. Bernard nous montre chez
le fœtus le sucre produit sans la participation des nerfs ni du
foie et détruit sans l’ influence du poumon. Il en résulte que la
formation et la destruction du sucre peuvent être des phéno
mènes non plus de sécrétion, mais de n u tritio n proprement dite
et que, pour combattre le diabète, on peut avoir ^ s’adresser
aux fonctions nutritives.
De l’ensemble passons aux détails ; de l’ examen des tendan
ces générales h celui des laits particuliers.
8
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— 119 —
l.a question du diabète restait dans l’ombre depuis des siècles,
lorsque la chimie physiologique vint attirer s u r elle l'attention
du monde savant. Celte maladie était confondue parmi les
plithisies par les anciens, et on lui a fait l'honneur de croire
qu’Hippocrale l’avait englobée dans sa description du
W illis avait, eu 1074, reconnu que l ’urine des dia
bétiques est sucrée. En 1778, Gowley avait isolé le sucre. M.
Chevreuil, en 1815, avait démontré que ce sucre est chimique
ment analogue a celui qui résulte de la transformation de la
fécule. Ces dates montrent combien, pendant des siècles, la
question avait marché lentement.
dorsalis
tabes
Mais voilà qu’à notre époque la chimie prend un nouvel
essor. La chimie organique naît et grandit. Désireuse de se
rendre utile à la médecine comme à la physiologie, elle s’em
pare, avec M. Bouchardat, de la question du diabète. Si
l'urine et le sang des diabétiques contiennent du sucre, dit-elle
d’abord, c’est que, dans l’estomac de ces malades, se développe
un ferment pathologique, une sorte de diaslase stomacale qui
transforme les féculents en glycose.
Un peu plus tard, on découvre que celte action n’ est pas
morbide, mais physiologique, qu’elle appartient au pancréas et
non à l’ estomac. La théorie lient bon, elle objecte que le sucre,
produit par un état morbide de l’estomac, passe tout de suite
dans la circulation générale par les anastomoses qui existent
entre les veines coronaires et celles de l’extrém ité inférieure de
l'œsophage, tandis que le sucre, produit par un acte physiologi
que du pancréas, passe de I intestin dans le système de la veine
porte, où la circulation subit un utile ralentissement. Ainsi
donc au foie l ’on a attribué la destruction du sucre un peu avant
la découverte qui lui attribue sa production.
De celle première doctrine est né un traitem ent qui, grâce à
la pénurie de notre thérapeutique, lui a survécu. Puisque le
sucre du diabète provient d’une métamorphose des aliments
féculents, il faut exclure les féculents du régime des diabétiques.
Tel est, dans son origine et dans son essence, le traitement de
M. Bouchardat.
M. Mialhe a bien compris que, par les progrès de la physio
logie, la question avait changé de phase. Le lait anormal à expli
quer n’était plus en effet comment le sucre se produit dans le
tube digestif, mais comment il n'est pas détruit un peu plus
tard chez les diabétiques, comme il l’est chez les autres
hommes.Il s’agissait donc d’expliquer non plus une production,
mais une absence de destruction. Les carbonates alcalins, dit
M. Mialhe, favorisent l’oxydation de la glycose ; or, le sang
normal est légèrement alcalin, donc c’est lui qui se charge de
détruire le sucre. Il ne le pourra plus s’il perd sa réaction
alcaline, et il la perdra quand sera supprimée la sécrétion acide
de la sueur. Le diabète, naguère attribué à un vice de digestion,
devient donc la conséquence d’un trouble de sécrétion. Déduc
tion thérapeutique : il faut modifier la réaction du sang par un
traitement alcalin ; il faut, par des bains de vapeur, activer la
sécrétion cutanée.
Cette doctrine de M. Mialhe est passible de quelques objec
tions. D ’abord l ’action des carbonates alcalins, sensible à 90°
ou 100g est nulle à 57J, température du corps. Ensuite le sang
des diabétiques reste alcalin. Enhn les féculents mêlés au
carbonate de soude ont subi dans l’économie des altérations
absolument identiques à celles qu’ils subissent quand ils sont
administrés seuls; tel est le résultat des expériences de M.
Poggiale, de Lehmann et de Becker.
Voilà donc la première étape de la question du diabète.
Théories chimiques, traitements chimiques. Les théories sont
reconnues erronées, que re s te -t-il des traitements?
Evidemment, si le diabète ne lient pas à ce que les féculents
se transforment en sucre, on ne le guérira pas en supprimant
les féculents du régime des diabétiques.
Evidemment, si le diabète n’a pas pour cause un défaut d’al
calinité du sang ; si les alcalins mêlés aux féculents n’en m odilient en rien les métamorphoses, les alcalins, en tant qu’agents
chimiques, sont impuissants dans le diabète. Après cette
première étape, la science avait donc besoin de marcher.
La grande découverte de CL Bernard lui a fait faire un pas
immense. CL Bernard a démontré que la principale fonction du
foie, c'est de fabriquer du sucre ; Fauconneau-Dufresne va
soutenir que le diabète est dû à une action exagérée du foie.
Cette doctrine s’appuie d ’abord sur des preuves chimiques.
Chez les diabétiques, comme d’ailleurs chez les autres hommes,
le sang des veines sus-hépatiques est plus riche en sucre que
celui des autres vaisseaux et en particulier que celui de la veine
porte. Le sucre ne vient pas des aliments, il ne s’est pas accu
mulé dans le foie, mais il s’y est produit, car on le retrouve
chez les animaux soumis à une diète prolongée r-l chez les
carnivores soumis pendant plusieurs mois à une nourriture
exclusivement azotée.
La physiologie proprement dite vient aussi la soutenir ; M.
�— 120
—f 121 —
—
Schil) produit chez les batraciens le diabète par l'électropunclure du foie; il enlève le foie cl le diabète disparaît.
La pathologie apporte aussi son témoignage. Le diabète peut
succéder à une contusion du foie; M. Bernard, M. rousseau
et d'autres encore ont observé des cas où cette étiologie était
évidente.
1
Vient enfin un dernier témoignage, celui de l ’anatomie
pathologique. Chez les diabétiques peuvent exister une hype
rémie du loie et une augmentation de sucre dans cet organe ;
chez I un d’eux, qui mourut subitement, M. Am iral a trouvé
dans le foie 57 grammes de sucre, au lieu de 25 grammes, pro
portion ordinaire
Et cependant, malgré toutes ces preuves, la doctrine que
nous examinons est loin d’étre solidement établie.
Il est bien avéré qu’une surexcitation fonctionnelle du foie
peut déterminer une production de sucre assez forte pour qu’il
en passe dans les urines, mais ce qui n’est rien moins que dé
montre, c’est que telle soit la cause habituelle du diabète.
Cette hypertrophie do l ’organe que, d ’ailleurs, Griesingcr n a
observée que 15 fois sur 54 cas, n’est pas, règle générale, en
proportion de la quantité de sucre qui s’amasse dans les urines.
La théorie physiologique de M Fauconneau-Dufresne se trouve
donc en face d’une objection analogue à celle qui a renversé la
théorie chimique de i\L Bouchardat; le fait morbide qui s’opère
n’est pas toujours un excès de production, il peut être un
défaut de destruction.
La doctrine physiologique de M. Reynoso est a celle de M
Fauconneau-Dufresne ce (pie la doctrine de M. Mialhe est à
celle de M. Bouchardat. Normalement le sucre fabriqué par
le foie est consumé dans l ’organisme; si le sucre s’accumule dans
le sang et s’échappe par divers émoncloires, la faute est loin
d’ en être toujours à l’appareil producteur q u ’on ne peut sou
vent surprendre en excès d’activité, mais bien à l ’appareil des
tructeur dont le travail s'est ralenti.
Cet appareil, quel est-il ? C’est le poum on, répond M.
Reynoso. Si le sucre disparaît, c’est par un travail d'oxydation
dont l’ agent est l’oxygène de l'air introduit dans les voies respi
ratoires; le diabète devra donc être la conséquence d’ une lésion
organique ou d’un trouble fonctionnel dans l’appareil respira
toire. Aussi l ’éthérisation, qui trouble la respiration, fait-elle
paraître du sucre dans les urines ; aussi contiennent-elles du
sucre, les urines des animaux hibernants dont la respiration est
considérablement ralentie ; aussi les diabétiques m eurent-ils
tuberculeux.
C’ est spécieux, mais voici quelques objections : Cl. Bernard
a constaté par expérience directe que l’oxygène ne bâte pas
plus qu’un autre gaz la destruction du sucre ; l'hydrogène
arsénié ei l’hydrogène pur l’activent davantage. Pendant l’éthé
risation, la respiration est d'ordinaire fort peu troublée, le
système nerveux l est beaucoup, et on sait aujourd'hui que le
diabète succède souvent à des troubles nerveux. Pendant le
sommeil hibernant, la respiration n’est pas la seule fonction
ralentie, presque toutes le sont également. Enlin et surtout,
pour que celte théorie lût vraie, il faudrait que le diabète fût la
conséquence directe et forcée de toutes les altérations respira
toires; il faudrait (pie la phthisie précédât le diabète au lieu de
lui succéder ; il faudrait que, pendant les dernières périodes de
la phthisie diabétique, le sucre, au lieu de disparaître des
urines, comme il le fait réellement, devint au contraire plus
abondant.
Dans cette seconde étape de la question, nous trouvons fort
peu d’applications thérapeutiques; il faudrait, en effet, d ’après
les uns s’ adresser au foie pour ralentir son activité ; d’après les
autres, s’adresser au poumon pour favoriser et stimuler ses
fonctions; tentatives difficiles et qui ne pouvaient donner que
de faibles résultats.La chimie avait proposé,sinon des remèdes,
du moins des aliments et des médicaments; la physiologie,
dans cette phase, n a fermement préconisé ni des uns ni des
antres ; aussi, pendant que la pathologie acceptait l'influence
de la physiologie, la thérapeutique restait-elle sous I empire de
la chimie.
Evidemment, la question du diabète avait besoin de marcher
encore. Elle le (il et nous allons lasuivre dans une troisième
étape.
Toutes les sécrétions sont soumises à l ’action du système
nerveux ; celle du sucre dans le foie devait l’être comme les
autres. Aussi, dans une expérience â bon droit célèbre et main
tes fois répétée depuis, Cl. Bernard a - t- il démontré (pie la
piqûre du btiibe rachidien détermine le diabète. C’était une voie
nouvelle qui s ouvrait aux physiologistes et aux médecins. Il
fallait des expérimentations, lVJM. Bernard et SrhifT les ont
faites; il fallait des observations cliniques ; suivant l ’exemple
donné en Allemagne par Griesinger, MM. Fritz et Fischer
les ont, en France, recueillies et publiées.
Cl. Bernard constate que c’est au voisinage des racines des
�123 —
pneumogastriques que la piqûre du bulbe rachidien doit être
laite pour déterminer le diabète; la section des pneumogastri
ques au cou ralentit la formation du sucre dans le foie; la
section des mêmes nerfs au-dessous des poumons ne l’altère en
rien.
L éminent physiologiste en conclut que les pneumogastriques
n’ont pas d’action directe sur le glycogénie, qui peut persister
après leur section, mais que l'impression produite par l'air sur
la muqueuse des bronches est le point de départ d une excita
tion que les pneumogastriques transmettent au bulbe rachidien
et qui se propage au (oie par action réllcxc.
Celle action réflexe, lorsqu’elle est exagérée, a pour résultat
une suractivité dans la circulation abdominale et en particulier
une hyperémie du foie, cause prochaine du diabète.
Une influence nerveuse comme cause première et une hype
rémie du foie comme cause prochaine, voilà ce qui, aux yeux
de SchilT, comme à ceux de Cl. Bernard, produit le diabète.
Mais le physiologiste allemand s’applique surtout à la recherche
de deux problèmes : d’un côté, la part d’iniluence qui doit
revenir à chaque portion des centres nerveux dans le travail de
la glycogénie; d’autre part, la nature de l'hypércrnic hépatique
dans les divers cas de diabète.
Ce sont les nerfs vaso-moteurs émanant des couches optiques
et des pédoncules cérébraux qui, d’après Schifî, sont irrités
dans la piqûre du quatrième ventricule. Si on coupe les cordons
antérieurs de la moelle, par lesquels ils passent, l'irrita tio n n’est
plus portée an foie, i! n’y a plus de diabète. Si on ctbérise pro
fondément les grenouilles, la même piqûre reste inetlicace, ces
nerfs ne portant plus l’ irritation à leur extrém ité terminale et
vasculaire.
On peut également rendre les animaux diabétiques en cou
pant les cordons postérieurs de la moelle sans entamer les anté
rieurs. Schifî’ dit que, dans ces cas, il se produit à la portion
supérieure des cordons postérieurs une irritation qui se propage
aux cordons antérieurs.
C’est alors, suivant railleur allemand, un diabète irrita tif qui
sc développe ; les nerfs vaso-moteurs excités font contracter
les libres longitudinales des museles vasculaires du foie, d'où
résulte une dilatation active des vaisseaux et une hyperémie de
I organe. Mais il y a aussi un diabète par congestion passive, pa
ralytique, tenant à un défaut d'influx nerveux. Tel est celui que
Schjffa vu succéder à la section des cordons antérieurs de la
moelle, pratiquée soit au niveau de la quatrième vertèbre cervi
cale soit au-dessus ; les vaisseaux du foie sont alors gorgés de
sang et les urines renferment du sucre jusqu’à la m ort, consé
quence de la lésion nerveuse, qui arrive entre le douzième et le
vingtième jour. Le diabète irrita tif n’était que passager , le
diabète paralytique est durable.
Dépouillées de leur interprétation théorique, les expériences
de Schilî apportent à la question du diabète une donnée incon
testable, c’est (pic celle affection peut être produite par la lésion
de points différents du système nerveux. Ce n'est plus seulement
la piqûre du quatrième ventricule qui peut la déterminer, comme
Cl. Bernard l'a cru d’abord ; c’est aussi la section des cordons
soit postérieurs soit antérieurs de la moelle. Le centre diabétique
a pris une extension considérable.
11 s’élargit encore avec Pavy ; ce n'est plus seulement la lésion
des centrés nerveux encéphaliques ou rachidiens qui engendre
le diabète, c'est aussi celle du grand sympathique, de ses
ganglions et de ses rameaux. L ’ ablation d'un ganglion du cou est
suivie d’un diabète intense, la section des nerfs qui accompa
gnent l ’artère vertébrale amène un résultat analogue.
En résumé, la physiologie nous a prouve (pie l ’altération d’ un
grand nombre de parties diverses du système nerveux peut être
suivie de glycosurie.
De son côté, la pathologie nous prouvera deux choses:
Que des altérations nerveuses peuvent déterminer le diabète.
Que ces altérations peuvent différer entre elles autant par leur
siège que par leur nature.
C'est ce que nous permettent de constater des observations
déjà nombreuses, entre autres celles qui ont été publiées par
par M. Fritz dans la
en 1859, celles que
M. Fischer a publiées dans
en 1865, celles (pie,
suivant de près M. Fischer, M. Lecoq faisait tout récemment
connaître dans la
, celles enfin du docteur
Klée, <pii ont paru dans la
Gazette Hebdomadaire
les Archives
Gazette Hebdomadaire
Gazette médicale de Strasbourg.
Le diabète peut avoir pour cause une émolion morale. M.
Rayer l’a vu survenir après une colère, Oppolzçr après une
frayeur, Lacombe après un chagrin violent, Boucluit à la suite
de travaux intellectuels fatigants.
Il peut succéder à une lésion morbide de I encéphale. Dans
les observations de M. Fritz, on le voit plusieurs fois se déve
lopper à la suite d'hémiplégies, de convulsions, de symptômes
cérébraux divers.
�—
m
—
Il peut dépendre d’une lésion iraumatique des mêmes parties :
M. Bauchet l’a prouve dans sa thèse de concours et M . Fischer
a rassemblé 21 observations qui le démontrent. Dans ces cas, le
siège de la lésion était loin d’êire identique; six fois c’était le
front, cinq fois le vertex ou les bosses pariétales, cinq fois
l’ occiput, dans les cinq autres cas il n'a pas été déterminé.
Alors même qu’aucun traumatisme n ’avait causé le diabète,
qu’aucun symptôme cérébral ne l’avait précédé ni accompagné,
des altérations encéphaliques ont pu être trouvées a l’ autopsie ;
c’est ce qui résulte du fait publié par M. Leudet, en 1859, dans
du fait de M. Luys, inséré' dans le
en 18(30, et de celui de M.
Martineau, qui a paru dans la
en 1862.
Dans ces trois cas, c’est une lésion des parois du quatrième
ventricule (pi on a trouvée, peut-être parce que c’était surtout
celle que l’on, cherchait.
Le point de départ du mal peut être aussi dans la moelle :
dans deux cas cités par M. Fritz, la glycosurie provient de la
myélite et de la méningite rachidiennes. Dans quatre faits rap
pelés par M. Fischer, elle succède à la fracture des vertèbres ;
dans six buts enfin, le même auteur fait observer qu’elle a eu
pour origine des coups portés sur le dos et les lombes.
Enlin la source peut en être dans une altération des filets ner
veux. Gi h h l’a observé à la suite de lésions traumatiques des
nerfs, cl Thomson dans le cours de la névralgie faciale.
Dans ces derniers cas, l’action réflexe devait être nécessaire
ment invoquée ; remarquons cependant qu’il est bien difficile
d’admettre que l’action réflexe joue le rôle principal dans le
diabète par altération nerveuse ; si ce rôle lui appartenait, la
glycosurie, qui provient si fréquemment des centres nerveux,
ne serait pas si rarement produite par une lésion des nerfs péri
phériques.
L'observation clinique, aussi bien que la physiologie, nous a
permis de constater cjue le centre diabétique peut s’étendre à
tout le système nerveux ; elle nous a montré que des parties
fort éloignées du cerveau eide la moelle peuvent très bien, et
même assez souvent, servir de point de départ à la glycosurie ,
et que les altérations nerveuses qui produisent cette maladie
peuvent être de nature tout à fait différente.
Il* y a là une question difficile a élucider, bien digne , par
conséquent, des méditations du médecin qui aime à se rendre
compte des choses.
Nous trouvons dans les travaux récents deux explications de
nature à éclairer le problème.
le Moniteur des Sciences,
Bulletin de la Société Anatomique
Gazette des Hôpitaux
— 125 —
Les recherches anatomiques de Jacubowitch et d’Owjaniskoff
nous ont fourni des données que M. Fischer a mises habilement
h profit.
Trois ordres de cellules existent dans les centres nerveux, ce
sont : les motrices, les sensitives et les sympathiques, qui pré
sident au système vaso-moteur.
Les cellules sympathiques sont répandues dans le cerveau, le
cervelet, la moelle allongée, le système sympathique in lra spinal.
Dans ces diverses parties, elles sont plus ou moins dissémi
nées , mais toutes sont reliées entre elles, toutes sont en com
munication avec le plancher du quatrième ventricule, centre où
aboutissent et d’où émanent les nerfs de la vie organique qui
tiennent sous leur dépendance le système vaso-moteur viscéral
et en particulier celui du foie.
Il en résulte qu’une excitation portée dans un point éloigné
de l’amas central des cellules organiques devra se transmettre a
ce centre et produire les mêmes e(Tels morbides que la lésion
du centre lui-m êm e; mais, dans l'altération des parties nerveu
ses éloignées de ce centre, les cellules sympathiques, plus ou
moins rares et plus ou moins dispersées, ne seront qn excep
tionnellement atteintes.
El voilà pourquoi le diabète, suite ordinaire de la piqûre du
quatrième ventricule , n’est que par exception la conséquence
des autres altérations nerveuses encéphaliques cl inlra-spinales.
Maintenant, pour expliquer comment des lésions si différen
tes et même si opposées, des piqûres et des sections, des i r r i
tations et des destructions, peuvent aboutir au même résultat,
la glycosurie, il faut songer aux vues ingénieuses de Schilï et à
sa distinction des diabètes en irritatifs et paralytiques.
En résumé, dans cette troisième phase de I histoire du dia
bète, nous voyons d ’abord cette maladie produite par une lésion
déterminée d’ un point précis du système nerveux ; puis des lé
sions diverses sur des points differents du système nerveux
aboutissant au même résultat, ce qui doit mettre la science dans
un étal d’ incertitude et de trouble d ’où nous sortons en admet
tant les interprétations que nous fournissent les recherches
anatomiques récentes sur les cellules sympathiques et la dis
tinction des diabètes d origine nerveuse en irritatifs et paralyti
ques ; ce qui confirme et coordonne tous les travaux et tous les
laits sans en détruire aucun Coordonner des faits en apparence
contradictoires et s’harmoniser avec tons , voilà pour une doc
trine le plus précieux gage de vérité.
Ce nouveau travail qui s’opère sur le terrain de la pathologie
�m doit nécessaire nent amener un travail analogue en thérapeuti
que. L’altération du système nerveux étant reconnue cause
première du diabète, pour guérir le diabète, c’ est au système
nerveux qu’il faudra s’adresser. Ainsi l'a compris Goolden qui
recommande les purgatifs et les révulsifs divers, les vésicatoires
à la nuque et les applications de glace sur la tête. tM. Fritz le
cite et l’approuve. De son côté, Kunkler. appelé à combattre un
diabète qui avait triomphé de tous les remèdes, l’a guéri en ap
pliquant à la nuque des ventouses scarifiées et des vésicatoires.
Cependant cette voie nouvelle a été encore fort peu suivie ; elle
aboutit à un champ riche et fécond, mais qui n ’a pas encore
été cultivé.
Par des impressions nerveuses s’expliquent l ’action du café
et celle de la thériaque, médicaments employés l ’un et l’autre,
mais d’une manière empirique et comme moyens accessoires
dans le traitement de M. Bouchardal. Ainsi s’expliquent encore
les bons effets que MM. Rayer et Trousseau ont reconnus à h
valériane, et une guérison par le sulfate de quinine qu’a cons
tatée M. Grisolle. Ainsi l ’on comprend l’ histoire de ce malade
cité par M. Cl. Bernard et chez lequel l’impression vive, pro
duite par un médicament nouveau, arrêtait pour quelque temps
le diabète. Ainsi s'expliquent encore, mais en partie seulement,
les bons elfets de ce modificateur puissant du système nerveux
qu'on nomme l'hydrothérapie ; et le traitement récemment
imaginé par M. Chapman, qui consiste en applications de glace
sur la nuque, perd beaucoup de sa singularité. Enfin l'électri
cité et tons les agents qui impressionnent le système nerveux
se présentent aux explorations de la thérapeutique.
La question du diabète, dans sa troisième étape, paraît donc
devoir recueillir sur sa route un riche butin. Mais cette troi
sième étape doit-elle la conduire au terme de ses principales
conquêtes?
Non, et dans notre pensée il doit lui en rester une quatrième
à parcourir. Après les expériences que Cl. Bernard a faites sur
le fœtus, nul ne peut affirmer que tout le sucre des diabétiques
provienne de l’ intestin ou du foie. Nul d’ailleurs ne peut expli
quer encore de quelle manière le sucre est détruit dans l'orga
nisme.
Ces expériences me paraissent mettre en lumière le rôle
important que peuvent jouer les phénomènes de la nutrition
proprement dite, soit dans la formation, soit sm tout dans la
destruction du sucre.
Dans une première période de la vie fœtale, alors que le loie
pe contient pas encore de sucre, ou en trouve dans les urines;
— 127 —
ce qu'il y a de curieux, c’est que ce sucre disparaît alors que
commence la fonction glycogénique du foie. Les muscles et les
poumons du fœtus contiennent du sucre dans cette première
époque. En un m ol, les fœtus sont normalement diabétiques
avant que leur loie fabrique de la glycose.
En conclurons-nous que, chez l'adulte, le diabète petit être
indépendant de l ’action glycogénique du foie? N o n , mais il
importe de bien s’assurer si toujours on doit accuser unique
ment cet organe et le système nerveux qui le fait agir. Voilà
pour la question de production. Plus importante et plus grave
est la question de destruction.
M. Bernard a constaté que, dans une seco'nde période de la
vie fœtale, alors que le foie sécrète la glycose, celle-ci ne paraît
plus dans les urines. Elle est donc détruite dans l'organisation,
et détruite sans que le sujet respire. L ’inlluence de la respira
tion, l’ inlluence de l’ oxydation s’effacent donc devant celle de
ces actes obscurs qui composent la nutrition proprement dite.
D'un autre côté, nous avons démontré que chez l’ homme le
diabète n’est nullement subordonné aux troubles respiratoires.
Reste donc une grave question de physiologie à étudier, celle
de l’influence de l’acte n u tritif sur la destruction du sucre, et
comme question correspondante en pathologie, celle de l'in
fluence des troubles de nutrition sur la glycosurie.
La doctrine qui paraît devoir s’élever dans cette quatrième
phase de la question ne saurait avoir la prétention de renverser
les deux précédentes, mais seulement celle j:le les compléter.
Elle peut leur dire : Vous ôtes vraies, mais vous êtes incom
plètes ; vous ne vous appliquez qu’à certains cas et non à tous.
E l si on résiste, elle ajoutera : Chez les diabétiques qui meu
rent lentement, on ne trouve plus ni sucre dans le foie, ni
hypertrophie de cet organe; donc les malades ne sont point
morts uniqueoient parce que leur foie fonctionnait trop bien —
Quant à l'influence du système nerveux, s’il est vrai que des
lésions nerveuses ont produit la glycosurie, celle glycosurie a
été le plus souvent passagère, tandis que le véritable diabète,
celui de vos clients, ne finit guère qu’avec leur vie.
La fièvre suspend le diabète : s’ il est vrai que la fièvre peut
avoir quelque influence sur le système nerveux , il est certain
aussi quelle est par elle même un trouble de la vie n u tritiv e ,
ce qui donne à présumer que le diabète est dû à une altération
nutritive.
La grande maigreur des diabétiques contrastant avec le grand
appétit de quelques-uns ; l ’alternance du diabète avec une dia
thèse comme la goutte; enfin les gangrènes, (es cataractes, les
�- 128 tubercules et surtout la cachexie que cette maladie entraîne in
failliblement, font croire qu'il y a en elle autre chose que l’exa
gération fonctionnelle d’un organe utile, qu’il y a un vice de
nutrition.
Voilà autant de raisons dont il faudra tenir compte, pour
entreprendre de nouvelles recherches, dans le sens que je viens
d’indiquer.
Ajoutons que la thérapeutique, c’est-à-dire la médecine cli
nique, la médecine du praticien, a tout intérêt à la solution
complète et précise de celte grave question.
Et, comme si elle pressentait qu’ il y a là une précieuse récolte
à recueillir, elle fournit d elle-même quelques documents utiles.
Nous voyous en effet tous les praticiens recommander le ré
gime animal, c’est-à-dire la nourriture la plus substantielle et
le plus facilement assimilable. Tous s’adressent aux vins géné
reux, aux toniques, aux amers, précisément aux moyens qui
stimulent et soutiennent 1action nutritive. On ne s’ en tient pas
à l ’abstention des féculents, car le sens pratique insinue que ce
n’esl en rien améliorer la maladie diabète que de diminuer le
sucre des urines en supprimant celui qui proviendrait du tube
digestif. On administre le plus souvent les alcalins avec une
parcimonie qui prouve en faveur de leur action vitale contre leur
action chimique, ainsi, d’ailleurs, que le professe M. Trous
seau.
M. Marlin-Damourelle a connu un diabétique guéri par l’ar
senic à doses fractionnées. Or, l’arsenic est, à ma connaissance,
parmi les médicaments, le modificateur le plus puissant et le
stimulant le plus énergique des fonctions nutritives.
L ’hvdrolîierapie, voilà encore un moyen dont l’influence sur
les fonctions nutritives ne le cède en rien à sa puissance comme
perturbateur nerveux. M. Trousseau vante aussi beaucoup l'hy
drothérapie et l’ exercice II a connu un malade chez lequel la
chasse produisait une grande amélioration.
L’ exercice ne peut avoir qu’un effet, c’ est de rendre la nutri
tion plus active.
La voie que nous indiquons peut donc aboutir à des insultais
utiles; digne m otif de nobles espéiances pour ceux qui oseront
s’y engager.
Je m’arrête, mais non p;is avec moi la question du diabète.
A peine ai-je commence à indiquer le tracé de sa quatrième
étape, et cite n'a réellement pas terminé la troisième. Puisse sa
quatrième étape être la dernière et la conduire à ce but précieux
d’une médication cllicace, but que désirent si justem ent les pra
ticiens.
129 —
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
Par arrêté du 8 ju ille t, M. le ministre de 1 instruction publique
a institué une commission chargée de l ’examen des questions
relatives à l ’exercice de la médecine et de la pharmacie, soulevées
par les pétitions dont le Sénat a prononcé le renvoi au ministre
de l ’instruction publique.
Sont nommés membres de celte commission :
MM. Dumas, inspecteur général de l’enseignement supérieur;
Duvergier, conseiller d'Etat ;
Lestiboudois, conseiller d'Etat ;
Giraud, inspecteur général de l’ enseignement supérieur;
Brongniart, inspecteur général de l’enseignement supérieur;
Denonvilliers, inspect. général de l ’enseignement supérieur;
Tardieu, doyen de la Faculté de médecine de Paris ;
Régnault, professeur de pharmacologie à la Faculté de
médecine de Paris.
Bussy, directeur de l'Ecole supérieure de pharmacie de Paris;
Ehrman, doyen de la Faculté de médecine de Strasbourg ;
Planchon, directeur de 1 Ecole supérieure de pharmacie de
*
Montpellier ;
Gintrac, directeur de l'Ecole préparatoire de médecine et
de pharmacie de Bordeaux ;
Cazeneuve, directeur de l’Ecole préparatoire de médecine
et de pharmacie de Lille.
D’un autre côté, il paraît certain que le Conseil d’Etat s’est éga
lement occupé d’un projet de révision de la législation de ventôse
et de germinal,et que ce projet estl’œuvre d’un savant rapporteur.
Tout cela aboutira-t-il enfin? Si la révision a lieu, le corps
médical gagnera-t-il ou perdra-t- il au change ? La loi actuelle
est-elle donc si mauvaise? N’ est-il pas plus exact de dire que
le corps médical ne sait pas s’en bien servir?...
Voilà bien des sujets dignes de sérieuses réflexions.
�—
m
131 —
—
E xercice illégal de la médecine .
— Dans son audience du
2 août courant, le tribunal correctionnel de Marseille a eu à
juger un empirique d'une espèce curieuse : c’est un marbrier,
nommé Alexandre Girard, âgé de 82 ans, et dont la boutique ne
désemplit pas de malades de tonies conditions... La dame
élégante s’y rencontre en compagnie de la femme du peuple...
Les procédés de cet empirique sont l ’imposition des mains, les
signes de croix, l ’application de la salive, mais surtout un ruban
de deux mètres environ dont il entoure ses clients cl dont il
'estomac, et
constate que l'estomac est tombé il le relève.
s’entoure ensuite. Il s’en sert aussi pour mesurer l
lorsqu'il
,
M. le président du tribunal lui ayant demandé si pour ap
prendre son état de marbrier il n’avait pas fait un apprentissage,
il a répondu que oui, mais il a ajouté que pour le traitement des
un don
malades, il n’avait pas eu besoin d ’études. Il avait reçu
de l'humanité.
Ce don du ciel n'a pas toutefois été assez puissant pour guérir
les crédules malades qui se sont adressés â lui ; c’est ainsi que
du ciel dont il se servait pour le plus graud bien
des luxations et bien d’autres maux sont restés rebelles aux
signes de croix, à la salive, au fameux ruban lui-même. Plusieurs
malades se sont plaints énergiquement des suites fâcheuses de
leur aveugle confiance qui les avait empêchés de réclamer des
seins moins
mais qui eussent été plus ellicaces*
surnaturels,
Le tribunal a eu égard à l ’âge avancé de cet empirique et l’a
condamné à 2o francs d’amende et aux dépens.
Les membres de la Société médicale des Bouches-du-Rhône
n’ont pas cru devoir, pour le même motif, intervenir comme
partie civile.
H ygiène. — Beaucoup de médecins s’élèvent journellement
contre l ’usage exagéré du tabac. Mais les fumeurs sont incorri
gibles. On fume plus en 1864 qu’on ne fumait en 1865, et la
progression ira sans doute toujours croissant, ne fût-ce que par
esprit de contradiction.
Un médecin distingué, M. Emile Decaisne, vient de signaler
â l’Académie des sciences plus de vingt et un cas d’intermittence
du pouls, indépendante de toute lésion organique du cœur sur
qualre -vin g t-lm it fumeurs. N euf accusaient en même temps des
digestions pénibles ; les douze autres n’avaient jamais rien res
senti du côté de l’estomac; cinq ou six s'étaient aperçus des
intermittences depuis quelque temps sans y ajouter d’ importance.
Sept virent disparaître complètement les désordres du cœur par
l’abstention absolue ou presque absolue de la pipe, en moins
d’ un mois. Ces différents cas ont été observés chez des hommes
de 27 â 42 ans, tous lîlateurs ou carriers, dans les trois com
munes de Mello, Cirès-les-Mello et S a int-W art (Oise).
Si l’on considère qu’aucun des sujets examinés par M. E.
Decaisne n’ était atteint d’ une lésion organique du cœur, que la
plupart d’entre eux n’ étaient pas dans les conditions de santé
qui favorisent la production des intermittences des battements
du cœur, et qu’ enfin la plupart ont guéri en supprimant l ’usage
du tabac, on pourra en inférer que le tabac exerce une certaine
action sur le cœur.
narcotisme du cœur ;
. M. Decaisne appelle cet état particulier
il est caractérisé par des intermittences dans les battements de
cet organe et dans les pulsations de l’artère radiale. On sera le
plus souvent â même de le faire disparaître en cessant momen
tanément de fumer.
Les faits sur lesquels on vient d’attirer l ’attention de M. le
docteur Decaisne sont bons b vulgariser. Toutefois, les cas signa
lés ne sont pas suffisants pour faire passer à l ’état de vérité
démontrée l ’action spéciale du tabac sur le cœur. Mais, l’éveil
donné sur ce point, il sera maintenant facile de suivre la ques
tion et de contrôler l ’exactitude des vues émises par M. Decaisne.
L ' amour n’est pas au codex . — Un jeune médecin de Vienne,
dit l’ Osf
, était devenu éperdument amoureux
d’une de ses clientes sans oser lu i déclarer sa passion, il lui
écrivit un billet doux qu’il déposa furtivement sur sa table de
toilette dans une de ses visites. Jugez de son étonnement quand
il le reçut le soir même avec cette annotation : « Aucun de ces
articles ne se trouve au Codex. » La femme de chambre, prenant
ce billet pour l’ordonnance, l ’avait porté au pharmacien qui, en
homme d’esprit, et ne voulant pas compromettre le docteur, le lui
avait renvoyé avec cette spirituelle suscription.
Deutsch Post.
—*
�- 152 —
ASSOCIATION MÉDICALE DES BOUCHES-DU-RHONE.
ASSOCIATION MÉDICALE DES BOUCHES-DU-RHONE.
ASSEMBLÉE GÉNÉRALE.
La Société locale des Médecins des Bouches-du-Rhône
Assemblée Générale annuelle tenue à .tfarseille le 30 août
. sous la présidence de M le Docteur S e e x , Président.
1864 ,
tiendra son Assemblée générale annuelle le 50 août prochain, à
trois heures précises du soir, dans le local de la Société Impériale
de Médecine, sis rue des Beaux-Arts, 5, a Marseille. (Tous les
Médecins des Bouches-du-Rhône sont invités a y assister.)
Ordre du jour de ï Assemblée générale de la Société locale des
Médecins des Bouches-du-Rhône, qui aura lien à .1 arseille
le 50 août, rue des Beaux-Arts, 5.
1’ Discours de M. le président ;
2° Admission des nouveaux membres ;
5 Compte rendu par M. le secrétaire des actes et des travaux
de la Société pendant l ’année 18( 5 -1 8 6 4 .—
Exposé de la
situation financière ;
41 Etude sur le développement progressif des Associations
médicales et sur l'application ii ces Associations des principes
économiques modernes dans le but d'améliorer les ressources
du Corps médical, par M. le Dr Chapplain ;
5° Révision des lois actuelles qui régissent l ’exercice de la
médecine, considérée surtout au double point de vue d’une
répression plus ellicace de l'exercice illégal et de la création de
conseils de discipline ;
6° Propositions diverses, Caisse locale des retraites, Sociétés
de secours mutuels, etc. (Chaque membre de l ’Association
pourra faire verbalement ou par écrit telle communication qu’il
jugera convenable.)
Dans la soirée, un banquet par souscription réunira tous les
médecins qui voudront y prendre part.
Le Comité de Rédaction.
Marseille. —lmp. Yial, rue Thiars, 8.
La séance est ouverte à trois heures. Elle a lieu dans le local de la
Société Impériale de Médecine, que M. C happlain , président de
l'honorable Compagnie , a bien voulu mettre à la disposition de la
Société. La réunion est nombreuse ; parmi les personnes présentes ,
nous remarquons M. le docteur Martin , professeur honoraire à
l’École de Médecine et chirurgien consultant des Hôpitaux; M. P.-M.
R o u x , président du Comité Médical des Bouches-du-Rhône:
MM. R ondard, de Salon, et I mbert , d’Arles, délégués des arrondis1'
d'Aix et d’Arles; plusieurs autres médecins xenus de divers points
du département; M. V erne , avocat, l'un des conseils judiciaires de
l’Association , etc., etc.
Lecture est donnée des lettres de MM. G ay , d’A rles, Isnard , de
Géménos, et F auchier , de Saint-Cannat, qui s’excusent de n’avoir
pu se rendre à la réunion.
M. le Président fait connaître à Rassemblée q u e , dans le courant
de l’année-qui xient de s’écouler, le Bureau a admis un certain
nombre de confrères, mais d’après les statuts , l’admission n’étant
définitivement prononcée que par l ’assemblée générale, il y aura lieu
de ratifier la décision du Bureau.
La liste des nouxeaux membres dont il va être donné lecture,
comprend, en outre, quelques confrères dont la commission admi
nistrative n’a lias été appelée à s’occuper, leur adhésion étant parvenue postérieurement à la dernière réunion de la Commission.
L ’assemblée prononce par acclamations l’admission définitive des
quarante-deux nouveaux membres qui suivent :
MM. Amalbert, Aubert Justinien, Auphan , Blanc, Bourgarel,
Gamel, Giraud . médecin en chef à l ’asile de Saint-Pierre , Lauzet,
Liautaud, Emile Martin, M artin, professeur honoraire et chirurgien
consultant des hôpitaux, Maurin. Métaxas, S. Nitard-Ricord,Offand,
011ive,Pellegrin,Philippon,Roberty,professeur à l’école de médecine,
Roux (ils, Sauxet. Van-Gaver, tous de Marseille ; Cartier, de Graus,
9
�— 135 —
Ghaflfard. d'Auriol; de Possel, de laCiotat; Dumas, d’Eyraigues,
Frissant, de Mouriès; Girard,d’Eyguières; Giraud,d’Arenc; Guynet,
de Peyroiles; Liiiou, de Charleval ; Marion , de Fontvioiile ; Marloy,
d’Auriol ; Meffre, de Saint Jérôme ; Monfray, de la Belle-de-Mai;
sultats obtenus, d’abord pour le bien public, puis pour le
corps médical en général et pour chacun de ses membres en
particulier.
Mouret, do Barbentane; Mourret, de Salon; Albert Pélissier, de
Pour un grand nombre de médecins, comme pour moi, les
Saint-Rémy ; Curel, de Scnas; Raneurel, de Lançon; Terras, de
bienfaits de l’association ne sont pas douteux, mais quelques-
Graveson, et Tournon, d’Istres.
uns hésitent encore ; a ceux-là je dirai : Jetez un regard en
M. le Président se félicite d’un si heureux résultat : il rappelle que
les 19 nouveaux membres qui furent reçus, l ’année dernière, avaient
arrière et décidez vous-mêmes si, malgré ses faibles ressources,
tous donné leur adhésion peu de jours avant l ’assemblée générale:
laquelle je m'engage à la maintenir, soutenu par l ’énergie de
ce qui porte en réalité à fil le nombre des admissions obtenues dans
le cours d’une année.
mes convictions pour l ’œuvre à laquelle sous votre sympathique
M. le Président se lève et prononce l ’allocution suivante :
M essieurs et très honorés C ollègues ,
notre société locale n'est pas dans cette belle et noble voie dans
impulsion je me suis entièrement voué. Ici, très chers collègues,
laissez-moi donner à mon honorable prédécesseur, à notre digne
président honoraire, M . le Dr B artoli, le juste trib u t d’éloges
qui lui est dû pour l’énergique direction qu'il a imprimée à notre
œuvré, alors que tout était à faire à Marseille, alors qu’il fallait
Un des plus grands honneurs que j ’ ai eus dans ma vie, une
créer, et vous savez que c’est dans les débuts, au moment de la
des plus douces satisfactions que j ’ai éprouvées, est d'avoir été
création, que se montrent les plus grandes dillicultés. Permettez-
par vos suffrages appelé à occuper ce fauteuil; aussi, comme
moi encore de reporter sur un autre membre du bureau, notre
aujourd’hui pour la première fois j ’ai la mission insigne de
excellent secrétaire, l’honneur d’une partie des résultats auxquels
présider notre assemblée générale annuelle, je tiens avant tout
nous sommes arrivés, car je dois le déclarer ici officiellement,
à vous remercier de la confiance que vous avez bien voulu
M. le Dr Laurens, par la foi qui le soutient, apporte dans l'exer
in ’accorder et à remercier avec vous S. M
l ’ Empereur quia
cice de ses fonctions le zèle le plus v if que vient heureusement
daigné, par son décret du 18 novembre dernier, confirmer votre
seconder une aptitude toute spéciale. La lecture du compte
choix ; je tiens encore à vous dire qu e , durant l année qui vient
rendu des travaux de l ’année va vous en donner la preuve la
de s’écouler, mes eflorts n’ont cessé de se diriger vers le but
plus évidente.
que tous nous devons chercher à atteindre, faire que notre
Oui, messieurs, protection, assistance, influence moralisatrice
Association soit ce corps qui protège, qui soutient, qui moralise
sont inscrits sur notre bannière et ne sont pas des lettres mortes.
comme fo n t compris nos honorables fondateurs.
En effet, combien de fois notre commission administrative n’a-
Protection, assistance , influence moralisatrice ; voila de
t-elle pas soutenu moralement ceux d’entre nous qui avaient
nobles pensées qui ne sont pas de vaines utopies et qui de
besoin d’un appui dans
viendront tous les jours
règlement des honoraires, par exemple, en face d’un client
des réalités ; de la vie spéculative
diverses circonstances difficiles, le
où quelques détracteurs croient ces nobles idées reléguées,
ingrat? des démarches à faire auprès de l'autorité supérieure ?
faisons-les passer dans la vie pratique par nos efforts inces
et ces démarches, grâce à la bienveillance et à la haute justice
sants et nous ne tarderons pas à voir l’importance des ré
de M. le Sénateur chargé de l'administration du département,
�137 —
onl toujours été suivies de résultats avantageux pour nous. Noire
commission n’a-t-elle pas cherché par tous les moyens à relever
voulu soutenir nos intérêts si souvent lésés par la cupidité,
l’ignorance et la crédulité. Je ne saurais séparer de ce témoignage
la situation morale et matérielle du médecin dans les sociétés de
de reconnaissance les respectables avocats, membres de notre
secours mutuels, tout en sauvegardant les intérêts des malades"’
conseil judiciaire, qui onl bien voulu, avec la plus grande géné
Si les résultats sur ce point ne sont pas encore apparents, ne
rosité , mettre si souvent leurs talents à notre disposition.
croyez pas qu'ils soient nuis, la commission administrative s’est
Espérons qu’une sage révision des lois qui régissent l'exercice
occupée avec ardeur de cette question qui, personnellement,
de la médecine, viendra aussi bientôt nous protéger contre
excite toutes mes sympathies : elle ne la perd pas de vue et elle
l’invasion incessante de ce protée appelé charlatan. Je laisse sur
espère pouvoir arriver par son influence a placer pour toujours
ce point la parole à M. le Secrétaire qui vous mettra au courant
le médecin b la hauteur dont il ne doit jamais descendre. Du
de la situation où se trouve cette question importante, indiquée
reste, messieurs,cette question ne cessera d’être à l ’ordre du
sur notre ordre du jour.
jour que lorsque toute satisfaction aura été obtenue à ce sujet.
Dans notre dernière assemblée générale, nous avons, sur le
L ’exercice illégal de la médecine qui se cache sous toutes les
rapport d’un des membres de notre commission administrative,
formes n’a -t-il pas été le sujet constant des préoccupations de
M. le Dr Broquier, voté la création d’un journal, organe des
vos délégués? Les nombreux délits signalés h l ’autorité judiciaire,
intérêts professionnels et scientifiques de la région.
L'Union
les arrêts prononcés à leur instigation par les tribunaux, en font
Médicale de la Provence a paru régulièrement chaque mois et a
foi.
de vous rappeler que
fourni à ses lecteurs, à côté de quelques questions scientifiques ,
votre devoir est de signaler a la commission administrative tous
des documents d’ une importance réelle sur les différents points
les faits qui peuvent venir a votre connaissance. Le charlatanisme
qui intéressent la profession. Ce journal a de plus, en tenant
prend toutes les allures, il s’établit dans les campagnes, dans
chaque associé au courant des actes de la commission adminis
Eh! messieurs,
permettez-moi
les villages comme dans les villes ; tantôt, il se montre sous la
trative, permis a chacun de se mettre en communication avec
veste du paysan en sabots, tantôt sous l ’habit noir de l ’homme
elle relativement aux questions dont elle s'occupe dans ses
des villes, tantôt il s'étale au grand jour et éblouit par son luxe,
séances mensuelles, avantage incontestable qui a nécessairement
tantôt il marche en silence et arrive sournoisement sans se faire
pour résultat la participation de tous aux progrès auxquels nous
annoncer; le charlatanisme, l’exercice illégal de la médecine
aspirons.
ont été la plaie de tous les âges ; les tolérer, les laisser faire
collègues, est notre œuvre â tous, tous nous sommes appelés a
serait de notre part la plus grande marque d’indifférence pour le
la faire prospérer par nos encouragements et surtout par les
bien de l ’humanité d'abord, puis pour notre dignité et notre
travaux, soit scientifiques, soit professionnels que nous confie
considération. Aussi, Messieurs, notre Commission n a-t-elle
rons b ses colonnes. La réception qui a été faite à notre journal
cessé et ne cessera-t-elle pas de veiller sur ce point ; veillons
par les organes les plus accrédil 's, les plus estimés de la presse
tous à l ’exécution de la loi et nous serons toujours soutenus par
médicale prouve au plus haut degré la portée de notre création.
l’autorité judiciaire à laquelle je suis heureux de témoigner en
Persistons, messieurs, dans cette œuvre, et vous surtout, jeunes
votre nom, dans cette réunion solennelle, toute la reconnaissance
praticiens, pleins d’ intelligence et de savoir, ne négligez pas de
que lui doit l’Association pour le zèle avec lequel elle a bien
vous servir de cette voie de publicité qui, non-seulement, sera
L'Union Médicale delà Provence, messieurs et chers
�138 —
profitable à la science ou à la profession, mais qui vous sera
d hommes si éminents par l intelligence et par le cœur, n ’a pas
aussi profitable à vous-inèmes, car le journal est une arène dans
cru, après les longues et sérieuses méditations de chacun de
laquelle les plus habiles se font apprécier, dans laquelle les
ses membres, après les discussions les plus approfondies, pou
aptitudes spéciales se dessinent, se m ontrent au grand jour;
voir s’occuper encore de cette fondation qu’il a renvoyée a un
dans un journal comme dans un cours public on peut prendre
avenir 'plus ou moins éloigné. Cependant même à ce point de
rang parmi les hommes d'élite. Permetlez-moi, messieurs, de
vue, notre société locale, comme toutes celles qui sont agrégées
vous adresser b ce sujet un fraternel reproche : combien d’entre
ii l ’association générale, n’a-t-elle pas f a it , depuis Lan dernier,
vous se sont encore tenus à l’écart, au lieu d’apporter une pierre
un grand pas dans son œuvre d'assistance? Dans sa séance du
à l’ édifice, car, je le répète, le journal doit être l'œuvre de tous,
2 novembre dernier, l’assemblée générale, réunie a Paris sous la
et ceux qui, jusqu’à ce jour, ont inscrit leurs noms dans ses
présidence de l ’ illustre et vénérable savant qui marche b notre
colonnes, désirent avant tout être remplacés par d’autres pour
tête, n'a-t-elle pas adopté b une immense m ajorité le projet de
que chacun contribue d une part au travail, do l ’autre au bonheur
la caisse de pensions viagères d'assistance présenté par le conseil
de voir prospérer un moyen si puissant d ’action. A l’œuvre
général de l’association? Cette institution laisse certainement b
donc, chers collègues, et au moyen de cet organe de publicité,
désirer et ne peut être substituée a la caisse de retraites, inscrite
tous en
dans l’article I er de nos statuts ; mais n'est-elle pas une première
général et pour chacun de nous en particulier, d’ incontestables
application régulière de cette œuvre de prévoyance née seule
nous verrons, si nous le voulons bien, se réaliser pour
bienfaits. Notre journal ainsi compris n’est-il pas un véritable
ment d’hier et que l'avenir montre si belle a nos yeux ? La
progrès ?
création d’ une caisse de pensions viagères d’assistance est
Pourtant a côté du bien que nous avons pn faire dans si peu
d’ailleurs un des vœux formulés dans les statuts de l'association
de temps et avec de si faibles ressources, combien de lacunes
générale, article 46. Par son vote relativement a cet objet ,
restent h remplir ! Cette caisse de retraites, par exemple qui,
l’ assemblée a donc bien mérité des 6,000 médecins réunis en
l ’an dernier à pareille époque,avait excité toutes nos sympathies,
corps pour se soutenir et s’assister mutuellement, puisqu’elle a
constitue encore pour nous un problème difficile à résoudre.
préparé pour eux certaines ressources dans la mesure du pos
L'insuffisance de nos ressources, la difficulté des combinaisons
sible et cela sans engager nullement l’avenir relativement a
financières au moyen desquelles on pourrait faire des tentatives
l'établissement d’ une véritable caisse de retraites. N ’y a-t-il pas
d’établissement, ont arrêté jusqu a ce jour la commission admi
dans la,création que je vous signale, un avantage pour tous?
nistrative qui plus d’une fois s’est occupée dans ses réunions de
cette importante question et qui toujours a pensé que le moment
opportun n était pas encore venu. Vous n’êtes sans doute pas
surpris, messieurs et chers collègues, de cette détermination,
car il n’est aucun de vous qui, comprenant la nécessité d’une
caisse de retraites, n’ait compris aussi les immenses difficultés
de détails attachées a cette institution. Ces difficultés sont si
grandes
que
le
conseil général de l ’association, composé
Quelque minime qu'il soit, il n'en existe pas moins et nous
sommes de cette manière définitivement entrés dans une voie
régulière d'assistance. Du reste, messieurs, j'a i la conviction
intime que c’est particulièrement dans le sein des sociétés locales,
que rétablissement des caisse» de retraites doit s’effectuer ;
veuillez bien vous rappeler ce que j ’avais l'honneur de vous dire
a ce sujet, comme rapporteur, dans notre dernière assemblée.
Au moyen d'une augmentation volontaire dans nos cotisations,
�- 140 —
— 141 —
à la faveur de legs, nous pourrions, je crois, avoir dans un
dans les détails les plus délicats de la profession qu’il a su pren
certain nombre d'années un fonds suffisant pour faire des pen
dre à propos, dans les questions d'honoraires, par exemple,
sions de retraites ; dans une société locale on est moins nom
sont là pour le prouver ; eh bien ! messieurs et chers collègues,
breux, on peut s'entendre plus facilement sur les voies et moyens
ce comité auquel j ’ai I honneur, avec plusieurs d’entre vous,
on se connaît, on se voit presque tous les jours, c’est là surtout
d’appartenir depuis sa création, est parvenu, par une bonne
que le droit à la retraite pourrait être admis plutôt qu’au centre
administration de ses finances et par la générosité de quelques-
de l'association générale ; car, quel est celui d’entre nous qui,
uns de ses membres, à posséder un fonds qui certainement per
jouissant d’une aisance suffisante, oserait profiter de ce droit et
mettrait aujourd’hui de fournir quelques pensions de retraites.
nuire ainsi à un confrère, souvent à un véritable ami, à un ami
Pourquoi n’ espérerions-nous pas, pour notre société, un pareil
d'enfance malheureux ? Cette grave question, messieurs, je vous
résultat? D’un autre côté, ne croyez-vous pas que si, dans le
l'ai dit, n’a cessé d’occuper et occupera de nouveau la commission
Comité Médical, une caisse de retraites avait été établie, très
administrative, la lecture qui va vous être faite sur ce sujet par
peu de membres, grâce à leur position de fortune, useraient de
M. le Dr Cbapplain en est la preuve. Je crois, pour mon compte,
leur droit, circonstance qui rendrait bien plus facile la fondation
que l'avenir de notre association dépend surtout de l’organisation
de la caisse de retraites?
bien entendue de l ’assistance à laquelle tout sociétaire a, pour
Puisque quelques rapprochements, Messieurs et chers collè
ainsi dire, le droit de compter dans ses vieux jours ou dans ses
gues, ont mis sur mes lèvres le nom du Comité médical,
jours de souffrance. Aussi, messieurs et chers collègues, croyez-
permetlez-moi de former avec vous le vœu que deux institutions
bien que le plus ardent de mes vœux est de voir l’avenir de tous
non rivales, mais amies, car leur but est exactement le même,
les membres de notre honorable et belle profession assuré par
puissent un jo u r se réunir en un seul corps pour marcher en
le fonctionnement pur et simple de nos institutions.
semble au but commun, le bien de tous. Qui pourrait douter des
A ceux qui taxeraient mes espérances de chimères, je répon
immenses avantages qui résulteraient de cette union ? Le vieux
drai : Regardez à vos côtés,il y a vingt ans qu’un de nos plus ho
dicton : l'union fait la force est là pour répondre. Pourtant je
norables confrères, aujourd’hui un des doyens de la profession,
comprends certaines objections, j ’entrevois quelques difficultés ;
eut la belle, grande et noble pensée de réunir en association de
ces difficultés sont-elles insurmontables, comme on le d it? Je
prévoyance et de secours, sous le nom de Comité Médical des
ne le crois pas. Pour ne pas abuser de votre indulgence, je
Bouches-du-Rhône, les médecins et les pharmaciens du départe
n’aborderai qu’ un seul côté de la question, celui qui, du reste,
ment; j'a i nommé M. le docteur P.-M. Roux. Grâce à ses démar
domine tous les autres points ; je veux parler de l ’agrégation à
chés incessantes, à son zèle infatigable, à son amour pour le bien
l’Association générale. Par cette agrégation, ou redoute l ’absorp
de tous, ce digne confrère parvint à grouper autour de lui un très
tion de la petite Association locale par la grande Association de
grand nombre d'adhérents et à faire reconnaître par l’Etat celle
France ; on se méfie de cette centralisation qui, dit-on, absorbe
création comme établissement d’utilité publique; et certes, qui
tout'a son profit. 11 me sera très facile de démontrer que l'Asso
contesterait que le comité nous a rendu à tous de véritables
ciation générale n’absorbe nullement les sociétés locales, et que
services dans l ’exercice de notre profession ? L ’appui moral qu’il
celles-ci, malgré leur agrégation, conservent toute leur indépen
nous a donné plusieurs fois, les délibérations pleines de sagesse
dance, je prouverai ensuite qu’il y a un avantage incontestable
�— 445 —
à ne pas rester dans 1isolement et h se grouper en un seul
notre profession ; le confrère qui un jour a besoin d’ un appui
et puis «ant faisceau. Qu'exige de nous l ’Association générale?
moral le trouve immédiatement dans tout le corps médical fran
Deux points imporlants : le premier, que nous adhérions à ses
çais qui, grâce à l’association et à la solidarité qui en résulte, est
statuts; le second, que nous versions dans sa caisse, à mesure
prêt à le soutenir par tous les moyens dont il peut disposer.
qu’un membre est reçu parmi nous, l t droit d’admission de
Peut-il en être ainsi lorsqu’on reste isolé? J’entends répéter sans
celui-ci, c’est-à-dire une somme de 12 francs, plus le dixième
cesse qu’eu France la centralisation nous tue; mais à tout corps
de uos revenus annuels Adhérer aux statuts de l’Association
il faut un centre d’où partent la vie et le mouvement ; il faut une
est s'engager, comme on le fait, dans toute société; existerions-
tête, et si ce corps est puissant, il faut que la tête soit puissante
nous isolément que nos statuts ne pourraient certainement être
à son tour. A côté de quelques inconvénients, je vois, dans cette
plus convenables, et il faudrait toujours prendre rengagement
organisation les nombreux avantages que j ’ai signalés ; ces avan
de s’y conformer ; s’engager ainsi n’est donc pas perdre son
tages sont d’autant plus grands à mes yeux que l ’association
indépendance. Quant aux sommes que nous versons dans la
générale, en dehors des points que j ’ai eu l’honneur de vous faire
Glisse de l’ Association générale, on peut dire qu’ elles sont en
connaître, nous laisse notre entière indépendance. Nous d iri
rapport avec les services que nous attendons de celle-ci : protec
geons nos intérêts locaux comme nous le jugeons convenable,
tion, assistance et secours pécuniaires, tels sont les avantages
nous disposons de nos fonds comme il nous parait utile de le
qui nous sont offerts en compensation des sacrilices que nous
faire ; nous pouvons, entin, établir dans notre circonscription
nous imposons. Mais les avantages les plus incontestables résul
tel moyen de distribuer nos secours qui nous paraîtra le plus
tent, sans contredit, de l’union de toutes les sociétés locales des
conforme à nos besoins locaux ; nous pouvons, en un m ot,
départements au moyen de ce conseil général siégeant à Paris,
établir nos pensions viagères d’assistance comme il nous con
conseil qui est lame de notre vaste association, les avantages les
vient en dehors de l ’association générale, nous pouvons son
plus réels viennent de la réunion possible de tous les médecins
ger à créer chez nous, et pour nous seulement, une véritable
de France en un seul corps obéissant au même code, ayant la
caisse de retraites. Il me semble qu’en présence d’une telle
même pensée, les mêmes désirs, les mêmes aspirations. Ne
situation toutes les craintes doivent disparaître et bien des
comprenez-vous pas de suite quelle force immense doit résulter
difficultés s’affaiblir, c’est pourquoi je fais appel aux bous sen
d une pareille agrégation ? Sans doute une société locale bornée
timents de confraternité dont mes honorables collègues du
à ses propres ressources peut faire du bien, mais ses bienfaits ne
Comité Médical ont donné tant de preuves, c’est pourquoi
s’étendent que sur un petit nombre de personnes, elle ne dispose
je leur dis avec effusion : cherchons à faire tomber tous les
que de faibles moyens d’action ; au contraire, une société qui
obstacles qui jusqu’à ce jour nous ont séparés, réunissons
s’étend sur toute la France a bien plus d’occasions d’exercer sa
nos forces, que le drapeau de l’association générale que nous
bienveillante influence, tant au point de vue matériel qu’au point
portons ici avec fierté devienne aussi le vôtre, afin qu’enfants du
de vue moral ; elle dispose de fonds très importants et peut ainsi
même sol, nous ayons le bonheur défaire ensemble ce bien
aller à la recherche des confrères malheureux ; elle a à sa dispo
auquel nous aspirons tous, mais que la division de nos forces
sition les organes les plus accrédités de la presse médicale qui
ne peut qu’amoindrir.
chaque jour défendent en son nom les intérêts les plus chers de
Je vous ai entretenus bien longtemps, Messieurs et chers
�144 —
collègues ; vous m excuserez, je l’espère, a cause de I importance
voudrais prendre la parole devant eux ; veuillez donc me faire
des différentes questions qui u’ont cessé de fixer mon attention
connaître vos vœux et vos pensées sur les sujets qui peuvent
et que j'ai cru devoir vous signaler pour que vous puissiez, dans
intéresser notre association, je tâcherai d’être votre digne inter
cette réunion solennelle, nous apporter le concours de vos
prète, heureux de consacrer mes forces et mon temps a soutenir
lumières et de votre expérience.
nos intérêts les plus chers, à défendre la plus belle des causes :
Avant de donner la parole a notre digne secrétaire, il me reste,
Messieurs, un devoir pieux à remplir : la mort a fait une victime
parmi nous, elle nous a ravi Melcliior Robert qui, malgré ses
souffrances, comprenant tout le bien que le principe d'associa
tion peut faire au corps médical, avait voulu inscrire son nom
aimé de tous à côté du nôtre. Nous avions reçu, par acclamation,
l ’an dernier, a pareil jour, ce confrère distingué. Rélas ! nous
n'a\ons pas joui longtemps du bonheur de le posséder ! Les émi
nentes qualités de son cœur avaient sans doute marqué sa place
dans un monde meilleur !
La douleur, ici-bas, a une bien plus large part que la joie;
celle-ci, cependant, nous visite à son tour. N ’en est-il pas ainsi
dans ce jour où nous sommes réunis en si grand nombre avec
une seule pensée, où, de plus nous avons le bonheur de souhai
ter la bienvenue et de serrer chaudement la main à quarante-
celle de l'union dans notre grande et noble famille.
Cette lecture, religieusement écoutée , est accueillie par d’unani
mes et chaleureux applaudissements
La parole est donnée à iM. le Secrétaire qui s’exprime ainsi :
L ’année dernière, à pareille époque, notre société semblait
revenir à une vie nouvelle, et d’heureux présages paraissaient
saluer sa renaissance ; ces présages n’ont pas été trompeurs et
aujourd’hui ma lâche qui consiste à vous rendre compte de nos
actes et de nos travaux pendant l'année 4863-1864 serait bien
laborieuse, si notre journal ne vous avait pas déjà tenus au
courant de bien des faits que je n’ai plus dès lors qu’à vous
indiquer.
Nous aurons dans cette réunion à nous occuper de questions
bien intéressantes. Dans
le
discours
de
notre
honorable
Président que vous venez d’écouler avec une si religieuse
deux nouveaux frères qui ont compris que notre famille pouvait
attention, quelques-uues vous ont déjà été exposées, je me
être comparée à celle de ces grands agriculteurs qui acquièrent
garderai bien d’ y revenir pour ne pas affaiblir l’impression
d’autant plus de richesses qu’ils ont plus de bras à leur disposi
profonde qu elles ont faite sur vos esprits.
tion. Salut à vous, confrères aimés ! marchez sous notre ban
Tout à l’heure, M. le Dr Chapplain vous parlera d ’une idée
nière , nous avons la certitude que votre venue sera la source de
dont la réalisation ferait certainement le plus grand honneur
nouveaux bienfaits pour notre corps.
à notre société qui en aurait pris l'in itia tiv e .
Messieurs et cher collègues, Paris va pour la sixième lois
Pour compléter notre ordre du jo u r, après l’ énumération
convier la province à l'assemblée générale de 1 Association des
rapide de nos actes, je vous dirai aussi quelques mots sur la
Médecins de France; j ’ai l’intention de me rendre a cette grande
révision des lois actuelles qui régissent l’ exercice de la médecine,
solennité médicale, à ces agapes, symbole de F union, de la con
et aussi sur cette question déjà vieille , mais toujours actuelle,
fraternité et de l’unité de pensées. C'est en votre nom que
des relations des médecins avec les sociétés de secours mutuels.
j aurai l’honneur de me présenter au milieu de collègues dont la
plupart sont pour nous des maîtres vénérés ou des condisciples
que nous entourons d’estime. C’est aussi en votre nom que je
.Notre personnel
dernière réuniou
s’est
notablement
accru
depuis
notre
�116 -
— 147 —
Notre chiffre est h ce jo u r de 127 ; 42 nouveaux membres
il a examiné consciencieusement les mémoires qui lui ont été
viennent d’être accueillis parmi nous.
soumis et il a appris plus d’ une fois que son intervention avait
Trois radiations ont éiê prononcées a l’encontre de confrères
qui ne satisfaisaient pas à leurs obligations vis-à-vis de la
Société et conformément à l’article 8 de nos statuts.
été efficace.
A propos de celte délicate question des honoraires, nous
avons, dans le numéro d ’avril de notre journal, appelé votre
A cette occasion, permettez-moi de vous faire observer que
attention sur les principes proposés par la Société Médicale du
la radiation n'est pas l ’exclusion, qu'elle est seulement une
Rhône. Puissent
mesure d’ordre qui ne saurait définitivement fermer nos portes
commune!
aux confrères qui en ont été l’objet.
ces excellents principes devenir la règle
Q uoiqu'il en soit , lorsque l'intervention
A côté de ces perles, il en est une autre qui est bien plus
du bureau
de
l'association sera réclamée, soyez assurés que vos réclamations
sensible parce qu’elle est irréparable. Le docteur M. Robert
seront l ’objet d’un examen sérieux et impartial
El lorsqu’il
était à peine des nôtres que la mort nous l ’a ravi. Ap:ès le
sera bien reconnu que votre commission sait tenir la balance
juste tribut d'éloges eide regrets que notre honorable président
égale entre le mauvais vouloir ou ] 'ingratitude et les prétentions
vient de payer à sa mémoire, je devais cependant inscrire
exagérées , ce jo u r-là un grand progrès sera accompli ; les
religieusement son nom dans le document officiel que chaque
tribunaux eux-mèmes accueilleront avec plus de faveur les
année je suis chargé de vous fournir.
demandes qui seront portées devant eux après avoir subi le
contrôle de la commission.
Pendant l’exercice expiré, nous n'avons reçu, fort heureu
sement, aucune demande de secours. Nous n'avons sous tous
les rapports qu’à nous en féliciter et 'a faire des vœux pour
que la mauvaise fortune se tienne pendant
bien longtemps
encore éloignée de chacun de nous.
L’année dernière, vous avez décidé la création d’un jo u rn a l;
ce jo u rn a l, à la fois scientifique et professionnel, devait être
aussi l’organe de notre société. Il a commencé à paraître le 15
janvier 1864 et aujourd hui il a vécu les deux tiers d’ une année.
Chaque année votre Président ou votre Secrétaire reçoivent
Je ne vous dirai pas le doute et les hésitations de ceux-là même
quelques demandes de secours de la part de confrères mal
qui avaient le plus désiré son succès, mais l ’expérience du
heureux, étrangers à notre Association et le plus souvent de
passé, la chute prématurée d’autres feuilles, nées cependant
passage dans notre cité. Quelques-uns même nous ont été
avec toutes les apparences de la viabilité, avaient fait redouter,
adressés par certains d entre vous. Il est de notre devoir de
pour notre publication, les épreuves qu’elle allait traverser Je
vous rappeler que nos statuts ne nous permettent pas de
me hâte d’ajouter, messieurs, que le résultat a dépassé nos
consacrer
espérances et doit dissiper toutes les incertitudes.
le moindre
fonds au soulagement
de
pareilles
infortunes. Nous sommes une société de secours mutuels et
de prévoyance. Nul n’a droit au secours , s'il
ne fait lui-
même partie de la Société.
Votre bureau a eu à arbitrer quelquefois des demandes en
règlement d’ honoraires faites par quelques-uns de nos membres,
Les dépenses seront probablement couvertes par les recettes
et s’ il y a un déficit, il sera peu important.
L ’avenir de notre journal parait donc assuré.
.Si, après l’expérience faite, quelques modifications paraissent
bonnes à introduire dans son mode de lonclionnement ou de
�148 —
— I if) —
publication, la commission administrative saura les étudier ci
les décider; vous pouvez, messieurs, vous en rapporter a son
zèle et à son dévouement b l ’œuvre commune; mais il est une
qaeslion sur laquelle vous vous étiez prononcés l’an dernier et
au sujet de laquelle nous venons solliciter une nouvelle décision,
Parmi les voies et moyens qui vous furent proposés pour faire
lace aux frais du journal, étaient les annonces.
profession.
Nous nous sommes adressas b la fois b l’autorité judiciaire, h
l’autorité administrative, b la juridiction ecclésiastique. Nous
avons pris nous-mêmes directement 1 initiative.
La différence de notre
Vous savez, messieurs, que dans toute entreprise, le chapitre
des voies et moyens est de tous le plus important. Or, les
annonces peuvent donner des résultats pécuniaires relativement
considérables.
Dans un é'an de susceptibilité professionnelle
Nous avons ouvert le feu, sur toute la ligne, contre ce fléau
obstiné de la Société, contre ce parasite insatiable de notre
conduite à l’cgard de
personnes
coupables, après tout, du même délit, a été cependant dictée
par des raisons de convenance que vous apprécierez.
Le charlatan vulgaire, de bas-étage, dont une sordide spécu
lation dicte les ordonnances, nous l’avons dénoncé a M. le
qui
vous
procureur impérial.
honore, vous avez supprimé ces ressources pécuniaires. C’est
G est ainsi que quatre condamnations importantes ont été
sur ce vole émis d’ailleurs a une bien faible m ajorité, que nous
prononcées par le tribunal correctionnel de Marseille pendant
venons franchement vous prier de revenir
l’année judiciaire 1863-1864-, ce sont :
La grande majorité des journaux de médecine ont adopté les
annonces.
Nous éloignerions les annonces inconvenantes auxquelles
a recours un charlatanisme sans pudeur, pour n ’accepter que
celles que j ’appellerai honnêtes et sérieuses.
Elles ne comprendraient qu’une partie de la couverture et
n’empiéteraient pas sur le corps même du journal.
Elles nous permettraient de rendre uniforme le prix d ’abon
nement en supprimant les abonnements à six francs.
Elles nous permettraient encore d'améliorer et d étendre
notre publication.
Enfin , n’oublions pas qu’ en diminuant les chances d’un
déficit qui incomberait a notre caisse de secours, nous ferions
un acte de bonne administration.
Due proposition vous sera donc faite dans ce sens par M.
le Président.
D U n sieur Garibo, tailleur a Endoume, condamné le 27
novembre pour escroquerie et exercice illégal de la médecine,
b 3 mois do prison, 13 fr. d ’amende et aux dépens.
2° Une garde-mala (e, la dame Gratfe, veuve Sarra , con
damnée b 30 fr. d amende.
3° Le sieur Barberi, tailleur dans la vieille ville, qui, en
prescrivant et vendant le remède Leroy, a fait une fortune assez
ronde et que le tribunal a condamné b 15 jours de prison et
25 Ir. d’amende. Dans cette affaire, onze d ’eutre nous sont
intervenus comme parties civiles et ont reçu une allocation de
300 fr. de dommages-intérêts, conformément aux conclusions
de l’ un de nos conseils judiciaires.
Enfin, la pins récente condamnation est celle d’ un m arbrier,
vieillard de 82 ans, que son grand âge a sauvé d ’une peine
plus forte et qui n'a été condamné qu’à 25 fr. d ’amende.
Dans celle affaire, les laits étaient nombreux; un de nos zélés
avocats a bien voulu assister aux débats et n’a pas pensé cepen
Je passe à l’exercice illégal de la médecine; ici, messieurs,
nous nous présentons devant vous les mains pleines.
dant devoir intervenir en notre faveur.
Gel empirique continue, comme avant sa condamnation, son
*
�illégale et dangereuse pratique. L'autorité judiciaire a été de
nouveau avertie.
Toutes ces condamnations ont été obtenues a Marseille; si
elles n'ont pas d é plus nombreuses et si elles ne se rapportent
qu’à des empiriques de notre ville, c’est parce q u ’aucun fait
étranger à notre localit * ne nous a été signalé.
Ce n’est pas seulement à Arles et a Tarascon que les reli
gieuses dépassent les limites que la légalité impose a leur zèle
et b leur charité : A Marseille aussi quelques corporations
religieuses ont la spécialité de certains traitements. Nous en
avons fait le sujet d’une lettre b Monseigneur l’évêque de
Marseille, semblable à celle adressée b Monseigneur l ’archevê
Et cependant, messieurs, dans un des premiers numéros de
que d’ A ix. Aucune réponse ne nous a été faite, mais tout
noire journal, nous avons prié avec instance tous 1es membres
récemment nous avons dû écrire de nouveau une lettre, res
de l’ Association,
tous
les médecins, ceux surtout des petites
localités, de nous signaler les guérisseurs
sans
diplôme dont
ils pouvaient avoir b se plaindre.
pouvions oublier que c’était au nom de l ’hygiène publique que
nous élevions la voix.
On n'a pas répondu h notre appel.
Nous signalions, en eflet, b l’attention de l ’autorité ecclésias
Cet appel, il est de notre devoir de vous l ’adresser encore
aujourd’hui.
tique un pauvre père de famille qui succombait b une gangrène
de l’avant-bras et de la main, consécutive au traitement irra
Quand je dis qu'aucune communication ne nous est venue du
dehors, je dois faire une honorable exception en faveur de la
branche artésienne de notre société.
O ui, Messieurs,
pectueuse sans doute, mais dans laquelle, messieurs, nous ne
nos
tionnel d’un panaris ordonné par des religieuses.
Nous
signalions
aussi
un autre homme dont on devait
amputer le pouce dans des circonstances analogues.
confrères d’ Arles comprennent que
Cette communication a été faite il y a peu de jours seulement
l’Association n’est pas un mot vide de sens, mais qu’elle recèle
nous n’avons reçu encore aticne réponse officielle, mais nous
en elle le germe de tontes les améliorations professionnelles.
savons verbalement que l’autorité religieuse a été émue de ces
Depuis longtemps, les religieuses d’ Arles et de Tarascon
faits et a pris en sérieuse considération nos trop justes récla
se livraient à certaines pratiques médicales C’ était un abus
mations ( l i .
dangereux. Les médecins d’Arles se sont adressés a l’Asso
ciation qui s’est faite l'écho de leurs plaintes auprès de M. le
Sénateur. Le premier magistrat du département a bien voulu
appeler sur les faits qui lui étaient signalés, l ’attention de M.
le Sous-Préfet d'Arles qui a mis b son tour le plus louable
empressement à réformer ces abus. MM. les médecins d’Arles
ont été satisfaits.
En même temps que nous nous adressions a M. le Sénateur,
nous en référions aussi b Monseigneur l’archevêque d’Aix qui
nous a fait la réponse que vous avez pu lire avec notre lettre
dans le numéro d’avril de
V Union Médicale.
résultat de plus a vous indiquer.
C’est un bon
(I) Postérieurement à ta réunion générale du 30 août, M. le président
a reçu de Mer l’évêque de Marseille la lettre suivante qui donne la plus
complète satisfaction aux vœux du corps médical :
Marseille, le l*r septembre 1861.
Monsieur le Président,
Je n’ai pas manqué de communiquer aux religieuses qu’elle concernait
la première lettre que vous avez bien voulu m’adresser. Je viens de charger
de nouveau un de mes vicaires généraux de leur donner connaissance de
votre seconde lettre et de leur enjoindre de se renfermer strictement
dans les limites de leur ministère de charité et de s’abstenir de tout
exercice illégal de la médecine.
�157) —
Vous vous souvenez, messieurs, que M. le Sénateur avait,
irop souvent ces exploitations de la créd u lité publique et l’ in
sur noire demande, décidé qup les affiches m édicales ne seraient
tervention com plaisante d ’un médecin facile et ou b lieu x
plus apposées.
devoirs ne met pas toujours à l ’abri de la catastrophe.
Dans le courant de I année, certaines infractions avant oie
Em us d ’un état de choses aussi g rave,
de ses
nous avons préféré
faites à celte décision, nous avons cru d e v o ir appeler sur elle>
cependant com m encer par agir par voie de circu la ire s dans
l'attention de qui de droit
lesquelles nous avons affirmé notre d ro it et notre in te n tio n de
Ce n était pas encore assez de nous adresser comme nous
l avons fait a toutes les ju rid ictio n s. Il est m ie catégorie de
le revendiquer. Ces circu laires, vous les connaissez
l ne réponse a été faite par une des trois sociétés de p h ar
délioquaiiis vis-à-vis desquels notre règle de conduite devait
macie de M arseille, de tonies la m oins nom breuse , elle ne
être différente, je veux parler des pharm aciens et des sages-
coo pte que 12 membres. Le nombre des pharm aciens à M a r
femmes.
seille est de <S0, et dans le départem ent de 141.
Des plaintes précises nous sont parvenues qui nous signa
La com m ission adm inistrative n’a pas <n a s’ occu per de r e lie
laient des laits que, m alheureusem ent, tout le monde connaît.
réponse , ce que je pourrais donc vous en d ire ne serait que
On nous a cité des sages-femmes qui l'ont de la médecine sur
une lié s grande échelle et au grand jo u r.
des pharmaciens qui , non contents
de
oflicine, les malades qui s’ y rendent, font
On nous a cité
soig n er
dans leur
aussi des visites eu
devoir me contenter d ’en faire ici une sim p le
m ention (1).
En dehors de celte réponse, je crois savoir que la plupart
des pharmaciens, ceux surtout qui com ptent dans la profession,
ville.
Nous en savons qui traitent n on -seu lem en t
spéciales, mais encore tontes
l ’ecbo de mon im pression personnelle, mais il a paru que ce
document prêtait trop "a l’ épigram m e pour que je n’ aie pas cru
su ite s de
les maladies
m aladies, depuis la
modeste carie dentaire et l'in n ocen t mal de dents , jusqu'à
cette redoutable affection contre laquelle le charlatanisme nous
prône chaque jour un spécifique nouveau, cette affection qui
nous a valu le docteur N o ir et qui au jou rd ’ hui nous donne la
momification du tissu dégénéré on {'équivalent chimique du
ont très favorablem ent a ccu e illi notre co m m u n ication et ont
vu dans notre in itia tiv e un moyen de faire cesser certaines
im m oralités qui
rejaillissent
sur
deux
professions
presque
solid a ire s Q u oiq u ’ il en son, ce que je puis vous dire, c’ est que
dans une de. ses dernières réunions, la com m ission a d m in istra
tive a déclaré que ces circu laires ne devaient pas rester à l’ état
de lettres m ortes.
Voilà l’ inventaire aussi abrégé q u 'il m ’a éié possible de vous
cancer.
Malheureusement, messieurs, vous savez à quoi aboutissent
le présenter, de ce (pie nous avons fait pour la répression de
I exercice illégal de notre art
Que l'association médicale soit bien persuadée que j ’apprécie le motif
qui l.a portée à m’adresser sa com m unication, et que je ne négligerai
rien pour que les scrurs se conforment aux prescription s de la loi.
Veuillez faire agréer mes remerciments a MM. les membres de la com
mission administrative, et recevez, M. le Président, l ’expression (le
sentiments dévoues
7 P 4 1kick,
cm
que de Marseille
l) ha commission administrative, dans sa réunion du (> septembre, a
donné son entier assentiment à l'opinion
sommaire émise
par M. le
secrétaire, dans son compte rendu, au sujet <le la réponse des douze
pharmaciens de M arseille à la circu laire qui a été adressée au corps
pharmaceutique du département. Kilo a passé, sur ce document,
du jour.
à l’onJre
�154 —
—
En comballanl le charlatanisme, le souci de l'honorabilité
professionnelle nous dirige surtout ; m ais il n a pas paru suffisantà votre commission de so n préoccuper au dehors.
Ine certaine publicité, non, je me hâte de le d ire , uoe
publicité charlatanesque , paiaissait être une tendance qui
voulait se glisser dans notre sein ; une in itia tiv e couragense
se produisit et une délibération in te rv in t
15.5 —
Nos dépenses ont été :
1°
A chat d un tim b re .........................................
18
—
2°
Dépenses d’ im p re ssio n ..................................
56
—
58
—
5° Frais d ’encaissem ent et m enues
d 'ad m inistra tio n .........................................................
4°
Indem nité à la concierge de la Société. . .
100 —
Total. . .
192 —
qui prohibait pour les
membres de l'Association toute espèce de p u b licité.
dépenses
Eu déduisant nos dépenses de nos recettes, il
Vous le savez, messieurs, la p u b licité m édicale à Marseille
semble être l’apanage exclusif de quelques in d u strie ls auxquels
un médecin jaloux de sa dignité ne peut jam ais vouloir être
assimilé.
reste aujourd’ hui en caisse........................................
2,481
40
Il reste à recou vrer su r les cotisations 120 fr. Nous aurons
d ’ un autre côté b adresser à l’ A ssociation
générale les sommes
qui lui sont destinées d ’ après nos statuts ei dont le chiffre
Chose remarquable! La décision une lo is p rise, elle lut ei<cutée par ceux-là même qu elle pouvait eu apparence froisser
dans leurs intérêts matériels.
reste d éfinitivem ent subordonné aux cotisations qui sont encore
à recouvrer.
L ’exercice courant n’ en laissera pas m oins com me règlem ent
On a compris qu association oblige et un fait heureux s'esi
définitif une som m e de plus de 2 2 00 fr.
révélé: c'est que si nous n’avons pas, com m e la profession
Je dois ajouter que sur la somme de 2,481 fr. 40 c. formant
libérale des avocats, un conseil de d is c ip lin e légal, il existait
notre avoir à ce jo u r, 1 ,0 0 0 Ir. sont placés à la Caisse d ’ E p a r-
cependant, entre les membresd’ unem ém e socié té, une solidarité
gne. Incessam m ent, M. le T ré so rie r doit faire un nouveau
placement des fonds q u ’ il a en caisse.
morale qui avait aussi sa généreuse influence.
Notre situation financière est en progrès ; gravem ent co m
S itcation F i n a n c i è r e :
promise les années précédentes par des procès
m alheureux
soutenus dans l in lé rê l du corps médical , elle s’ est notable
Au 1er janvier 1864. nous avions en caisse. .
608 üo
Les recettes de l'année se sont com posées :
1° Du produit des cotisations et
La révision des lois qui régissent l ’exercice de la m édecine
est prochaine. Le Conseil d’ Etat en a été saisi, le rapport est
des d ro its
d admission des nouveaux membres, s o it...............
1,652 -
3* D’ un compte créditeur du jou rn al (à ce jo u r;.
T o ta l,
. .
prêt, assure-t-on. D ’ un autre côté, la com m ission
tout récem m ent par M.
2* De dommages-intérêts provenant de l ’affaire
Barberi et intégralement veisés a la caisse. . . .
ment am éliorée cette année.
500 -
que, a term iné son tiav ail.
entendu un des
155 3î>
2,673 0
le
nommée
m inistre de l’ in struction p u b li
Ces jo u rs d erniers, nous avons
m inistres de
l'E m p e re u r nous en dou n er
aussi l’ assurance.
C e lte révision des lois était depuis longtem ps l'objet des
�—
lo i) —
vœux üe I immense majorité du Corps M éd ical <|in ne cessa»
de se plaindre des imperfections e l des lacunes de la législatioo
de ventôse el üe germinal.
La loi prononce l ’ in com patibilité entre l’ exercice sim u ltan é
de la m édecine el de la pharmacie et il n’ existe contre ce lte
in com patibilité aucune sanction pénale.
Cependant, messieurs, grâce aux efforts de l'Association
générale, une jurisprudence favorable aux
semblait
devoir
s'universaliser
en
Il
intérêts médicaux
F ra n ce , m a is , il faut
reconnaître que la jurisprudence peut ch anger et la loi actuelle
a
lallu
faire admettre
de
persévérance
I intervention des
pour
arrive r
m édecins comme
à
parties
civiles.
Il a fallu du temps pour faire consacrer le préjudice m atériel
se montrerait alors de nouveau dans toute son impuissance el
et m oral qui nous est causé par les charlatans.
son inefficacité.
M algré la lég is^ lio n sur les remèdes secrets , la réclam e
La révision de la législation m édicale a été m ise à l'ordre du
jour de toutes les sociétés locales. V o u s aurez à émettre uo
et la
vœu sur celle importante matière. T o u te fo is, nous n avons pa»
nouveaux.
voulu appeler votre attention sur la g é n é ra lité
des objets que
cette révision comporte ; ce sujet était trop vaste, d fallait
spéculation
enfantent , chaque jo u r,
des
spécifiques
Faisons des vœux pour que la loi nouvelle n’ offre
pas les
im perfections que nous reprochons à l’ ancienne.
borner.
Le second point essentiel que nous voudrions voir établi par
On a beaucoup parlé de la suppression du deuxième ordre
de médecins, mais il semble qu'un intérêt social en commande
le maintien ; je ne pense pas d 'a ille u rs que ce soit là le nnend
gordien de la situation. Ce n'est pas le d ip lôm e
qui constitue
les différences dans la profession et l'u n ic ité du titre ne les fen
pas cesser.
L avenir de la médecine me parait
beaucoup
la nouxelle loi, serait la création de conseils de d iscip lin e . Cette
création répond aux
vœux les plus ardents de tout
médecin
honorable. Un de nos excellen ts confrères, notre doyen peutêtre, M . F au cb ier de S a in t- C an n ai, nous a écrit à ce sujet une
lettre qui exhale un suave parfum d ’exquise probité ; il se
prononce énergiquem ent en faveur de l'in stitu tio n des conseils
te n ir surtout aux d»*ui
conditions suivantes:
Une répression plus efficace de l ’e x e ic ic c illégal ;
La création de conseils de d iscip lin e .
L ’insuffisance de la répression lie n t dans la loi actuelle aux
lacunes qu’elle présente. La ju ris p ru d e n ce a pu momentané
ment les combler, mais les d -cisions de la jurisprudence ne
valent pas un texte de loi précis.
Comme exemples de ces lacunes, je me contenterai de vou,
indiquer les suivantes :
L ’eicrcice ill *gal de la m édecine est ca ra cté rise comme no
délit et il n’est | uni que comme une sim p le contravention.
de d is c ip lin e . « A vec eux, d it-il, on ne verrait pi us le médecin
traitant s o rtir de chez son malade par la
et
un confrère
déloyal
entrer
par une
porte
ordinaire
porte dérobée.
Il nous rappelle , à ce sujet , un règlem ent
qu’ il
»
voudrait
voir revivre. Ce règlem ent approuvé par lettres patentes du
mois de septem bre 1699 porte, entre autre-* choses, q u ’il est
défendu à tous les m aîtres en ch iru rg ie et h tous autres, de
lever aucun appareil posé par d ’autres m aîtres , si ce n est
en leur présence ou eux dûm ent appelés, à m oins toutefois
d ’un péril évident , a peine d’ in lc id ic lio n
d ’amende.
et de 500 lix res
�— 158 —
Vous le voyez, messieurs, le vieux
temps avait du lion;
vous m'excuserez de vous avoir donné ainsi l'o p in io n d’un de
L aunée dernière, uu rapport vous fut présenté
sur celte
question par notre honorable confrère, le D r M éren tié. Vous en
nos confrères qui n a pu, à son grand regret et au nôtre, se
avez renvoyé l ’étude à uue com m ission spéciale. C e lte com m is
rendre aujourd’hui parmi nous, car, vous penserez avec moi
sion a été nommée et a fonctionne. B ile cru t devoir se m ettre
que la voix des absents ne doit pas être exclue de nos délibé
en relation avec le Grand Conseil des sociétés à M a rse ille . Il y
rations.
eut échange de courtoisie et d ’urbanité ; quelques points de
Mais ici, uue certaine crainte vient se m êler à mes espé
détail furent même résolus a la satisfaction
com m une ; mais
rances. Le pouvoir n 'h é sitera-t-il pas à ren dre le corps médical
quand il s’agit d ’entrer dans le v if de la question, nos confrères
trop inlluent et des laits récents qui se sont
se trouvèrent en présence de l’arche sainte à laquelle il ne fallait
passés dans la
profession libérale des avocats, u ’ em p ê ch e ro n t-ils
pas qu’il
nous soit accordé cette constitution puissante que nous solli
citons.
toucher.
Quoiqu'il en soit, on se prom it de part et d autre de voir et
de chercher les am éliorations désirées, mais les choses eu
Q uoiqu’il en soit, messieurs , form ulons aussi sur ce point
Dotre vœu avec énergie.
restèrent là et je ne sache pas que la question a il fait depuis un
pas en avant.
Il sera donc soumis , à votre sanction , les
résolutions
suivantes :
Et il ne pouvait guère en être autrem ent : tout ce qui lut
proposé alors était un p alliatif im puissant ; c ’est dans des m odi
Bouches-du-R hône
fications radicales, b l'ordre de choses éta b li, que nous pourrons
prie instamment le conseil général de l ’ A ssocia tio n générale,
trouver la base de rapports honorables entre les sociétés et les
d’ user de toute l’influence dont elle dispose :
médecins qui les desservent.
La Société locale des Médecins des
1* Pour faire inscrire dans la nouvelle loi des dispositions
pénales qui rendent efficace la répression du charlatanisme et
de l ’exercice illégal et qui donnent spécialem ent le droit aux
associations médicales d ’in terven ir com m e parties civiles dans
les poursuites auxquelles ce délit donne lieu.
Que vous d ira i-je , m essieurs, sur ce triste sujet, que vous
ne sachiez déjà? Je suis de ceux qui voient dans les tendances
actuelles des sociétés de secours, une véritable coalition an timédicale, une exploitation
im m orale de notre désunion, de
notre honnêteté, peut-être de notre besoin de vivre. E n cessant
d’être exclusives pour les o u vriers et les classes laborieuses,
2* Pour faire accorder aux m édecins, des con seils de disci
en s’étendant aux classes aisées et en incorporant même des
pline ayant une existence légale et dans le genre des conseils
personnes riches qui ne devraient y ren trer que com me m em
de discipline de l ’ordre des avocats.
bres honoraires, ces associations ont cessé d'être des sociétés
de secours m utuels, [tour devenir de véritables sociétés d 'a ssu
J ’obéis au respect que je dois à vos d écisio n s en terminant
par quelques mots sur les sociétés de secours m utuels.
rances mutuelles contre la m aladie et dont les m édecins payent
les primes.
�— KiO —
Et encore si, en échange de n oire dévouem ent ou de noire
acceptation des dures conditions <|ui nous sont faites, nous
rencontrions autre chose que la d écon sid ératio n de la part de
ces despotes populaires devant lesq u els n o ire
Iront humilie a
y a déjà deux ans, dans
une des assem blées générales de
l'Association générale,
X e médecin ne peut, sans se m anquer à lu i-m ê m e , com m e
à l’honneur du corps auquel il appartient, accepter des condi
tions nuisibles, non-seulem ent à ses intérêts m atériels, mais à
pu un moment se courber!
A u ssi, comprend-ou facilement que ceux qui sont libres de
sa propre considération. Et si. ajoute M
Üavenne, des sociétés
celle glèbe socialiste soient si heureux de le proclam er, et que
ouvrières, mal inspirées ou se m éprenant sur la nature et le
ceux qui ont dû chercher dans ce service où leur dignité
but du principe bienfaisant de la m utualité, persistaient dans
a souffert,
prem ières années,
la pensée (le faire aux m édecins une position incom patible avec
il leu r est donné de s'en
leurs intérêts légitim es et le soin de leur propre d ig n ité , il
une occupation
pour leu rs
n'aspirent qu’après le moment où
appaitient incontestablem ent à ceux ci de refuser , non aux
affranchir.
La situation que nous déplorons ne l'ait que s ’aggraver chaque
membres des sociétés, mais aux sociétés elles-m êm es en tant
jom davantage. Le nombre des sociétés va toujours croissant
qn’individualilés collectives, le concours qui leur serait demandé
indépendamment des avantages qu elles p ro cu re u i et qui sont
et dont ils doivent rester libres de discuter les conditions.
de nature à leur valoir de nom breux adhérents, des intérêts
politiques paraissent présider à leu r exten sion .
Je m 'arrête sur cette déclaration de principes qui me parait
la seule base possible des rapports d une société m édicale vis-
Le prosélytisme religieux a cherché aussi dans le principe de
à-vis des sociétés de secours m utuels. Nous ne pouvons, dans
la mutualité un élém ent de propagande ; nous connaissons à
une assemblée générale qui réunit des m édecins de tout le
Marseille une société puissante qui s ’est organisée sous celle
département, proposer une règle de conduite uniform e , les
influence, au prolit peut-être de quelques m édecins privilégies,
circonstances étant variables suivant les localités, mais nous
mais au grand détrim ent de la m ajorité du corps médical.
devons émettre le vœu que, dans chaque localité , les médecins
Nous n ’aurions qu’à noos réjouir de l ’extension du principe
s’entendent pour établir d’ une m anière honorable, les co n d i
de la mutualité, si nos intérêts n ’en étaient gravement lésés.
tions du service médical q u ’ils sont appelés à re m p lir
Mais heureusement aux dangers des A sso cia tio n s, nous avons
des sociétés
v is-à -v is
elle-m êm e. Le jour on
A M arseille où le mal est plus grand que partout ailleurs,
les médecins soroot tous décidés a n’ accepter des Sociétés que
les médecins intéressés à l am élioration de ce service médical
des conditions honorables, ce jour-la les sociétés seront obligées
pourront être ultérieurem ent convoqués
de céder ou de se dissoudre, car elles ne peuvent exister sans
spéciale où s ’agiterait cette grave et difficile question.
un remède ellicace,.c’èsl l ’association
dans une réunion
Lorsque nous aurons à traiter avec des associations pauvres,
service médical.
résistance aux exi
exclusivement ouvrières, nous som m es trop habitués à 11e pas
gences des sociétés de secours m utuels , puisse mériter L
marchander notre dévouem ent pour ne pas co n co u rir, autant
Et ne croyez pas, messieurs, que c e lle
lepruche de coalition. V o ici ce que proclam ait M . Üavenne, il
que nous le pourrons, à une œ uvre philantropique.
�*
— 162 —
165 -
Mais à l'égard des associations t]ni com prennent dans leur
sein des individus aisés, riches m êm e, il n ’y a, ce me semble,
qu’un seul système à suivre, celui qui est proposé par la Uozeth
Medicale de Lyon. Sauf une légère réduction d ’escompte si
M. le docteur C happlain
fait à l’assemblée .la communication
suivante (1) :
Les idées émises par M. C happlain ont excité dans t’assemblée le
plus vif intérêt ; elles émanent des mêmes principes généraux qui
vous voulez, nous devons suivre le même système que nous
onl inspiré la brochure de M. R ondahd . Il est décidé a l’unanimité
adoptous pour les autres clients.
qu’il est opportun d ’appeler sur elles I attention du conseil général
de l ’Association générale.
I
J ’ai fin i, messieurs, mais en te rm in a n t, permette/.-moi de
jeter un regaid vers l ’avenir. L ’année nouvelle va voir modifier
Les conclusions proposées parM. le Secrétaire au sujet de la révi
sion des lois sur la Médecine sont ensuite mises aux voix et adoptées.
la législation qui régit la profession m édicale.
D'un autre côté, de généreux efforts se font pour introduire
L ’assemblée décide, en outre, qu’il v a lieu de m aintenir à l ’étude
le, projet de création d’une véritable caisse locale de retraites et elle
dans les associations le m édecins , des élém ents nouveaux de
prie la Commission administrative de vouloir bien s’occuper active
prospérité.
ment de cette importante question.
Je dois ici rappeler à votre attention le travail de M. Rondard et signaler de nouveau a toute votre reconnaissance les
excellentes intentions de notre très honorable et estimé confrère.
La lecture que va vous faire M
le docteur Chapplain estime
preuve de plus des tendances nouvelles qui cherchent à (aire
entrer dans une voie féconde les sociétés m édicales.
Puisse I horizon nouveau qui sem ble s’o u v rir devant nous
l'association est une œuvie
sérieuse !
Ce propos n’a pas besoin de commentaires, et si nous le rappor
tons, c’est parce qu’il dépeint la situation d ’une manière très exacte.
Le soir, à huit heures, un joyeux banquet a réuni de nombreux
convives dans les salons du Grand Hôtel du Louvre et de la Paix.
Au dessert, plusieurs toasts ont été portés :
nous que des
heureux !
A la suite de cette lecture qui a vivement intéressé l'auditoire.
M. le Président prie l'assemblée de xouloir bien statuer sur les
annonces médicales que M le Secrétaire a propos»'* d ’admettre à l’a
venir dans le journal.
L ’assemblée adopte à l ’unanimité la résolution qui suit :
« La Société locale des Médecins des Bouches-du-BImne autorise
« la Commission administrative à introduire dans le journal les an'< nonces médicales, dans les conditions mentionnées dans lecomple
t rendu de M. le Secrétaire.»
jour indifférent, s’écrier : Décidément
La plus franche cordialité n’a cessé de régner [tendant tout le repas.
rester pur de tout nuage !
P u isse -t-il n ’y avoir plus désorm ais parm i
La séance est levée à six heures
En quittant la salle, nous entendons un de nos confrères, jusqu’à ce
U premier l’a été par M. le président S kux : A l'Union des
Médecins et à MM. Itayzr et Latour !
M. S eux s’est exprimé en ces termes ;
M essieurs,
Le corps médical français forme une grande famille dont le.s
membres sont remarquables par l ’éducation, l'instruction et l’intel
ligence; avec de pareilles qualités, on arrive aux plus beaux résul
tats, mais ce n ’est que par l ’union que ces qualités peuvent être
fécondées; solidaires les unes des autres, ce n’est que par l ’union
*
(I) Nous renvoyons au prochain numéro la publication du travail de
M. le docteur Chapplain.
�— DU —
(|ue nous pourrons obtenir ce progrès professionnel dont instinctive
E tu d e »ur le d é v e l o p p e m e n t p r o g r e s s i f de s a s s o c i a t i o n s m é d i c a l e s
ment nous sentons tous l'indispensable nécessité. Or. l ’association
e t s u r l ’a p p l i c a t i o n à ces A sso c ia tio n s d e s p r i n c i p e s é c o n o m i q u e s
de tous les médecins de France n'a pas d'autre but que celui de
m o d e r n e s , d a n s le b u t d ’a m é l i o r e r les r e s s o u r c e s d u C o r p s M é d i «
nous unir par des liens indissolubles comme les enfants d’un même
c al, p a r M . le D r C H A P P L A I N .
père. Buvons donc à l'union de tous les membres de la grande
famille médicale française, a la prospérité de 1association générale
des médecins1de France; joignons à notre toast les noms de MM. Ie<
docteurs Rayer et A. Latour, l un notre illustre et vénérable prési
dent, l'autre notre éminent secrétaire, qui dirigent notre œunv
avec tant d'habileté et de dé\oùment.
M essieurs
Dans le courant de l ’année qui vient de s’écouler, j ’ ai ém is dans
l’une des S 'ances de la com m ission adm inistrative, au sein de
laquelle vos suffrages m ’ont appelé, quelques idées qui ont
diversement im pressionné mes collègues. A u x uns elles ont
A l'union du corps médical!
A la prospérité de l'association générale des médecins de France!
A la santé de MM. Raver et A. Latour!
paru aventureuses et irréalisables ; elles ont appelé l’attcntiou
et les réflexions des autres. Ces id es une fois lancées, je leur
ai laissé faire leur ch em in , et c’ est avec une vive satisfaction
xM. le docteur P.-M. Roux , président du Comité Médical, a porté
à son tour un toast : A u x Associations m édicales !
Le cri unanime de Vive le Comité Médical a répondu à l impro\isation de son digne et vénérable fondateur.
xM. Mittre a remercié en quelques mots , partis du cœur, M, le
président S e u x de tout ce qu’il fait pour l'Association Médicale et a
porté un toast à sa santé.
Le conseil judiciaire de I Association n ’a pas été oublié et M* V erne,
avocat, a répondu par une heureuse improvisation qui a excité Je'
plus sympathiques bravos.
Nous en passons plus d’un; disons toutefois que M. M énécibi.
en portant un toast aux médecins étrangers à Marseille, a exprimé
très sympathiquement les regrets partagés par tous,qu'ils ne fussent
pas plus nombreux dans cette fête de famille.
La réunion s’est terminée par quelques chansons agréables et île
circonstance et s’est prolongée jusqu'à une heure assez avancée.
On s'est séparé en emportant de cette soirée les plus douce'
que j ’ai reçu de notre honorable président l’ in vitation de dire
quelques mots de mes projets dans celte réunion solennelle.
J'obéis a celte bien veillan te in vitation , m ais n’ attendez pas
de moi un plan com plet de réform e. Je vous exposerai les p rin
cipes sur lesquels doit, a mes yeux, se fonder le d éveloppe
ment progressif de notre a sso cia tio n , mais n’ ou blion s pas,
M essieurs, que les choses sérieuses et pratiques ne peuvent se
développer que par une étude profonde des élém ents qui d o i
vent les constituer. Les in stitu tion s les plus utiles ne peuvent
être présentées b une assemblée générale que lorsque, m ûries
par de longues m éditations, par des calculs incontestables, elles
viennent éclairer les personnes qui sont le m oins préparées h
les discuter.
Quelle que soit l’ im pression que mes idées trou veron t parm i
v o u s , je suis certain d’ y rencontrer des sentim ents sym pathi
ques , car le but vers lequel je cherche à m archer est le perfec
tionnement de la constitution du corps s a v a n t, honorable et
émotions.
Plus d’un convive s est trouvé réconcilié avec lesbanquetsofficiels.
Tous se sont donnés rendez-vous à l'année prochaine.
Le Comité de Rédaction
Marseille. — lmp
Viol, rue Tbiar», H.
honoré auquel nous avons I honneur d'appartenir. Pardonnezmoi , si sortant de la route tracée, je parais, dans quelques
circonstances, ne point faire une part suffisante aux in stitu tio n s
actuellement établies. Le présent, M essieurs, je le subis , mais
10
�—
IGG
je serais heureux d'apporter un élém ent de réforme qui, ren
dant les intérêts plus connexes, am ènerait l ’ union et l’union
La grande association médicale a trop em prunté aux sociétés
ouvrières avec lesquelles elle a une sim ilitu d e de nom. M ais si
obligée dans le sein d'une profession dont les membres sont
notre titre est le même, les besoins à satisfaire s o n t-ils id e n ti
trop souvent désunis.
ques? Les associations ouvrières fournissent à leurs associés : les
Nous avons assisté , M essieurs, b un grand fait, à un progrès
soins du médecin, les m édicam ents, un secours pendant le temps
immense. Il y a quelques années à peine que les premières
de maladie qui sera de deux francs par jo u r, par exem ple; l ’o u
pensées d’ union, d'association générale parurent dans l ’une des
vrier enfin peut recevoir dans ses vieux jo u rs une pension de
cit^s les plus im portantes de notre pays. P a ris répondit à l’im
retraites m inim e. Transportez au
pulsion qu’ il avait reçue de Bordeaux , et bientôt la grande
éléments de l’ association ouvrière et vous verrez com bien elle
corps
m édical ces divers
association médicale se constitua, elle co u vrit de ses adhérents
va se séparer d ’elle. N e com ptons point les secours înédiea-
tous les points fie la France, et nous som m es venus, à notre
m en lau x, les m édicam ents; évidem m ent il ne saurait ici en
tour, nous ranger sous l ’aile m aternelle.
être question. Les secours de tous les jours an confrère malade,
Deux grandes idées ont présidé à la constitution de noire
11 faut encore les rayer de la liste. M ais à la place viendront se
association. La première fut une p nsée d ’ assistance: venir au
ranger toutes les infortunes qu i, enlevant au m édecin les co n d i
secou a des confrères que le m alheur avait frappés. La seconde
tions d’ une vie h o n o ra b le , doivent ê tie com blées par les re s
fut une idée de conservation et d intérêt général. En réunissant
sources sociales. Nous n’ avons donc plus à lim ite r les secours,
dans un même faisceau toutes les forces vive s du corps médical,
comme ils sont lim ité s dans les associations ou vrières dans les
nous pouvions défendre nos in térêts professionnels. Lh où
cas de maladies, mais nous devons sécher lotîtes les larm es que
l ’individu était impuissant, le corps trio m p h a it, et cette union
l’infortune fait verser.
devenait un élément d'intérêt g é n é ra l, car elle nous donnait
Comment soulager ces m isè re s? Là e n c o re , M e s s ie u rs,
le pouvoir de briser le charlatanism e exp lo itan t les populations
se trouve une ligne de séparation entre le m édecin et l ’ouvrier.
crédules dans toutes les parties de la F ra n ce .
Au médecin qui soutient par son travail sa fa m ille ,il ne faut pas,
Le point de départ établi , si nous cherchons à nous rendre
au jour d’ une maladie longue, une somme de 2 fr par jo u r,
compte du chemin parcouru, irons le trouvons déjà bien grand.
comme à l’ ou vrier, il faut que les secours soient au niveau des
Le nombre des adhérents d e là prem ière année était de 155”;
besoins. Appartenant à la classe moyenne de la société, à la
il est, après cinq ans, de 5,746. La caisse centrale contient une
bourgeoisie, il faut que, dans les jo u rs d’ infortune, l’ association
somme de 276,000 fr., soit un revenu de 1 4 ,0 0 0 Ir. environ,
fournisse non pas ce qui est le nécessaire pour l ’ou v rie r, mais
et dans ces chiffres n’est point com pris l ’encaisse des sociétés
ce qui est le nécessaire pour le médecin. A cc o rd e r des secours
locales qui est également fort im portant. R en don s pleine justice
à un médecin, c ’est le m aintenir dans les con dition s honorables
aux efforts de ceux qui, fondateurs de notre œuvre, l’oDt
que notre profession possède daus le monde. En admettant de
amenée au degré de prospérité que nous constatons; mais
semblables p rincipes, que sera notre cutisation in d iv id u e lle de
mesurant les résultats obtenus aux besoins qui doivent trouver
12 fr. par an , que sera notre encaisse en présence des 5 ,7 4 0
leur soulagement dans l ’association , q u ’ il nous soit permis de
associés ?
dire : ce n’est point assez’
Deux sentim ents connexes prévalent dans le corps m édical :
�1(><) la générosité d'abord. La plupart (Je ceux qui ont fondé l'asso
époque et que nous n’ aurons thésaurisé que pour nos petits
ciation médicale se trouvent dans une position de fortune qui
entants.
devait les tenir en dehors d une société de secours mutuels, ils
Celte im puissance , M essie u rs, elle a sa source dans le point
se sont dit: il y o parmi les m édecins des confrères auxquels la
de départ incom plet donné à la grande association m édicale. A
fortune n’a pas souri, il y a des m édecins qui souffrent, don
l’assistance du médecin m alheureux, à la défense des intérêts
nons-leur des secours. Date obolum Delisario , et l’obole est
moraux et professionnels il faut joindre l ’élém ent le plus im p or
sortie de la bourse de tous ceux qui ont un cœur généreux et
tant des sociétés m odernes. U n e association qui veut appeler à
qui sont sensibles à l'infortune. V o tre capital s'est ainsi créé.
elle tous les élém ents de force , doit présenter des avantages
Mais s'il s’est maintenu , s 'il s ’est é le v é , permettez-m oi de vous
réels à chacun des associés. Q uel est parmi nous l’ avantage de
le dire, c’ est qu ’à côté de la générosité de ceux q u i donnent,il
l’homme haut placé dans n oire profession, arrivé à la fortune.
y a dans le cœur de ceux qui souffrent ce sentim ent d’orgueil
Son cœur l ’ attache à n o u s, mais non son intérêt. Il y a parm i
fort honorable qui fait qu’ ils supportent avec courage les pri
noirs des médecins généreux et des m édecins qui sont m alheu
vations, l ’in fo rtu n e, avant de réclam er une part de ce capital
reux, il n’y a pas une association réelle.
Jusqu’à ce jo u r on n’ a considéré les m édecins que com me
qu’ ils om contribué à former.
Ce sentiment d ’o rg u e il, de respect de so i-m ê m e , de la pro
un corps besogneux, ayant des plaies q u ’il faut g u é rir, mais on
fession, est un sentim ent fort respectable, m ais je bénirai le jour
ne I a point envisagé sous cette face qui fait la force des sociétés
où notre a sso ciitio n , grande et p ro sp ère,n ’attendra point qu’on
modernes. Nous sommes société de secours m utuels, nous ne
lui tende la main, mais ira au-devant du confrère qui souffre;
sommes pas société de capitalistes.
pourra considérer
Le corps médical est p au vre, tel a été le point de départ,
comme lui appartenant ce capital et en ré clam e r une part, sans
point de départ qui est vrai ; mais je dis à mon t o u r , le corps
que sa dignité d’homme, de m édecin, puisse souffrir de cel
médical est riche, et c ’est dans l ’association des capitaux que
emprunt fait à la caisse sociale.
se trouvent les con dition s d’ influence et de fortune
où chacun des membres de l ’association
Les besoins de l’infortune, de la m aladie, des infirmités ne
peuvent être satisfaits en présence des sacrifices que nous nous
F a u d r a - t - il, pour a rriv e r à ce ré s u lta t, m odifier les co n d i
tions de la société tout e n tiè re ? N o n , parm i les m odifications
imposons annuellement, en présence de notre situation finan
dans lesquelles j ’entrevois tant d ’avantages pour n o u s , q u e l
cière.
ques-unes sont entrées dans nos mœurs depuis longtem ps,
L ’ année qui vient de s’ écouler a été m arquée par la fondation
d’ une caisse de retraites; mais de com bien de mesures restric
tives a-t-elle été entourée! Quand verrons-nous ses ressources
s’élever au niveau de nos besoins? Je crain s bien que notre
génération médicale n’assiste point à cette fête de famille où le
vétéran du corps médical trouvera pour ses vieux jours une
assistance suffisante. Si ces e s p 'rances se réalisent un jour,
c est que nous aurons fermé l ’o re ille aux besoins de notre
d’autres tendent à prendre chaque jo u r un plus grand dévelop
pement. L ’association que je voudrais voir se constituer daus
le corps médical existe déjà en
dehors de ce corps : c ’est
dans la constitution d ’ un faisceau spécial que se trouvera la
nouveauté.
Yuus avez voulu secou rir les infortunes qui résultent de la
maladie, de la vieillesse, mais il eu est d’autres auxquelles vous
n’avez pas songé. Un de nos collègues riche peut voir sa fortune
�170
ébranlée, il possédait un immeuble t|ne le feu a détruit ; la moit
ve-t-il pas dans des conditions sem blables ? C e lle assurance que
peut l ’atteindre au moment où il est le plus utile h sa famille,
nous demandons à des com pagnies, ne pouvons-nous pas nous
où l épargne ne lui a point permis d ’ amasser encore des res
la donner à nous-mêmes ?
sources suffisantes pour sa femme, pour ses enfants. Laisserez-
Examinons, M essieurs, autant q u ’il nous est possible de le
vous ces malheurs sans assistance? O n t-ils m oins de droit à
faire, quelle est la valeur des prim es qui sont payées annuelle
votre attention? Ou bien, ne leur laisserez-vous que la ressource
ment par les m édecins aux com pagnies?
En portant à 50 IV. en moyenne le chiffre de l’ impôt annuel
de vous tendre la main?
Les sociétés modernes se sont inquiétées de ces malheurs
que nous versons pour l ’assurance, nous trouverons que les
qui peuvent atteindre l'homme dans sa fortune, dans son exis
5,746 assurés paient 175,000 Ir , et si nous form ions un seul
tence. Des assurances ont été établies qui apportent la sécurité
faisceau, le chiffre (b* la co n trib u tio n an n u elle, pour les 18,000
aux propriétaires d’immeubles, qui se substituent an père de
médecins de France serait (Je 5 4 0 ,0 0 0 IV. C e lle garantie que
famille et qui, ne pouvant lui conserver l ’existence, donnent à
nous réclamons pour nos propriétés p articulières est-elle bien
ses enfants des ressources qui leur permettent de subvenir à
légitimée par les faits. Q uels sont les sin istre s qui depuis d ix
leurs besoins. Ces avantages, le capitaliste, le chef de famille
ans, par exem ple, ont frappé le corus m édical? Une enquête
les achètent par un sacrifice m inim e, et les com pagnies qui se
générale pourrait seule nous le dire , mais si je m ’en réfère à
sont formées remplissent les engagements q u ’elles ont consentis
mes souvenirs de M arse ille , je dirai que j'ai vu des fabriques,
et donnent à leurs actionnaires de grands
des magasins, des usines, brûler, mais pour une m aison, pour
bénéfices. Ces
assurances, pour les particuliers qu’ un m alheur peut frapper,
un mobilier de médecin , je n’ en ai nul souvenir.
sont d’une indispensable nécessité, mais elles n ’ont que de
ne dirons-nous pas que la prim e,quelque lég èie qu’elle so it,q u e
faibles avantages pour les grands capitalistes. Il faut que les
nous versons, ne nous profite pas, qu elle profite à l’ in d u strie l
chances de perte soient en rapport avec les prim es versées
dont l’ usine est sans cesse menacée par l'agent qui pour t Ile est
annuellement. Il n’y a plus avantage h re cou rir à l’assurance
lorsque le chiffre des primes versées est supérieur aux chan
ces de sinistre. L'Etat,
par exemple , est à lui-mème son
assureur, car avec les immenses propriétés qui lui appartien
nent et qui couvrent la France, il donnerait aux compagnies
des primes dont le chiffre serait supérieur à la valeur des im
meubles qui annuellement sont dévorés par le feu.
Les grandes compagnies de bateaux a vapeur, les Messageries
Impériales, par exemple, suivent les mêmes errem ents, elles
conservent les sommes destinées à l ’assurance et qui réunies,
au moment du sinistre, lui couvrent, et au-dela, la valeur du
navire perdu.
Le corps médical, considéré comme cire co lle ctif, ne se trou
Et dès lors,
la vie. Rendons donc à César ce qui lui appartient et que le
corps médical profile de l’ argent q u 'il dépense. S i les m édecins
ont versé dans b s caisses des com pagnies plus de 5 .0 0 0 ,0 0 0
en dix ans, sachons les résultats q u 'ils en o u i obtenus, et ca l
culons tout le bien que nous aurions pu faire a nos collègues, si
celle somme immense étau
demeurée la propriété de n oire
association.
Perm etlez-inoi m aintenant, M e s s ie u rs , (le vous présenter h
un autre point de vue des m alheurs h s o u la g e r, un élém ent
d’assistance qui doit entrer encore dans le but de notre asso
ciation.
La médecine n ’ est point une de ces professions que l'on em
brasse par a g ré m e n t, comme but d ’occupation. L ’exercice de
�notre an est entouré de trop de peines, de soucis, d’ une trop
En versant annuellement une prim e calculée suivant I âge, on
grande responsabilité pour qu’ il puisse tenter l ’ homme riche.
paie aux héritiers le capital pour 'equel l ’assurance a été co n
Pour la plupart ,nous appartenons h d'honnêtes fam illes bourgeoi
tractée; on le paie au moment de la m ort, quel que soit le m o
ses qui nous ont poussés dans une carrière qui peu m ou s procurer
ment où elle a lieu.
la fortune que nos pères ne nous ont point laissée.
Le jeune
Quelles seraient,pour le corps m édical associé, les co n d ition s
médecin n’est point ordinairement riche , m ais, Dieu aidant,il
financières de celte com binaison? Ici, nous ne p ou v o n sa d m e llre
voit peu h peu sa position s’améliorer. La considération que sa
que tous les sociétaires se fassent assurer : les uns sont garçons,
profession enlraine , l’intim itc dont l’entourent ses clients, lui
les autres sont trop âgés, les prim es seraient dès-lors trop éle
fournissent les moyens d’ un établissement avantageux. Il devient
vées, eu égard au capital souscrit. P renons le quart seulem ent
alors capitaliste, il est encore dans l ’aurea merliocritas, mais que
des sociétaires subissant les chances de l’assurance sur la vie :
Dieu lui prêle vie et, par son travail, il subviendra aux besoinsdes
cette assurance se contractera au m om ent où le jeune m édecin
enfants qui lui naîtront, d les élèvera, et peut-être, si la mort
établi doit songer a l’ avenir de sa fa m ille ; il aura de trente a
vient l’atteindre dans une vieillesse avancée, leur laissera-l il
trente-cinq ans soit trente-deux ans, par exem ple. En adm ettant
une fortune importante. Mais la vie, qui peut y com pter? Quel
qu’ il s’assure pour 10,000 f r . , il versera annuellem ent com m e
est ci lui d’entre nous qui peut se prom ettre une vie assez
prime 262 fr. Si nous portons au quart le nom bre des assurés et
longue pour établir sa fam ille? Et si le père vient a manquer, si
que nous lim ition s, au début,le m axim um de l'assurance au ch if
le capital amassé est inférieur aux b e s o in s , fermerez-vous,
fre indiqué plus haut, nous trouverons que sur le nom bre actuel
Messieurs, votre cœur? Ne soulagerez-vous point l'infortune de
des associés, la totalité des prim es s’ élèvera à 3 7 0 ,0 0 0 fr., et sur
ces jeunes êtres? Hier, quand vivait le père, ces enfants étaient
le corps médical tout en tier, l’encaisse serait annuellem ent de
vos enfants, ils ne vous sont plus rien quand le malheur les a
1,200,000, en lim itant toujours au quart ceux des m em bres do
frappés !
l’association qui trouveraient avantage b s’ assurer.
Ici encore, Messieurs, les sociétés m odernes ont fait preuve
L ’association sur la vie ne présente pas les chances id e n ti
de prévoyance. Quelles que soient les attaques que ces caisses
ques b l'assurance pour les sin istre s par le feu. La chance de
de prévoyance aient eu à subir; quelles que soient l’ élévation,
ces dernières est com plètem ent aléatoire, celle relative b la vie
l'importance des hommes qui les ont dénoncées com me immo
ne l’est pas. Le sujet assuré pour 10,000 fr. d o it , un peu plus
rales, pour nous qui voyons autour de nous des enfants que
tôt un peu plus tard, toucher cette somme. Toute la question
nous pouvons laisser saus forluue, bénissons l ’institution qui
de bénéfice ou de perle pour l ’association réside dans le plus ou
nous permet, avec des privations m in im e s, d ’assurer leur ave
moins longtemps pendant lequel l ’assuré paiera sa prim e.
n ir, si notre existence se trouve brisée avant que nous les ayons
amenés à l’ âge où ils sont hommes.
L ’assurance sur la vie, telle est l ’ in stitu tion que j appelle
heureuse; répandue dans les pays qui sont nos voisins, elle
commence à prendre chez nous droit de cité. Vous savez,
Messieurs,quel est le fonctionnement de celte utile institution.
Tels sont, M essieurs, les deux prem iers élém ents su r lesquels
doit s ’appuyer le corps m édical pour augm enter sa fortune,
comme corps. Ne croyez pas, M essieurs, que je n'aie point
lait la part des objections que peut présenter mon projet.
Et d abord il est un point de départ sur lequel nous seron s
tous d’accord.
L ’ honorabilité du corps c o m p o rte -t-c lle ces
�-
I7 i -
associations ? Nous sommes lous fort ch ato u illeu x au point de
ment par annuités avec «les prim es. Vous dem anderez encore
vue de la dignité de notre profession. U n projet ne peut être
un acte de générosité à quelques-uns des m em bres du corps
viable qtie s’il respecte ce sentiment qui , pour être éxagéré
médical, compensé par de larges avantages, car si les chances
peut-être , ne doit pas moins être le point de départ de toute
de perte peuvent exister, les bénéfices sont bien plus probables.
institution louchant à l iolérêt matériel du corps médical.
Celle association nouvelle de nos capitaux nous parait digne
Pour calculer ces bénéfices, exam inez les diverses com pa
gnies qui se sont formées, voyez à quel degré s’ est élevée la
d’être discutée. Ce que nous ferons avec nos collègues pour
valeur des actions p rim itive s. O r, le bénéfice de l'A sso cia tio n
associés, ne le faisors-nous pas avec d ’autres hommes parfaite
médicale, quel s e r a - t- il? A p rès avoir rem boursé le capital
ment honorables. En assurant notre fo rtu n e , notre existence,
primitif, vous n ’aurez plus d intérêt à fou rn ir à vos capitalistes.
ne maintenons-nous pas intacts lous nos sentim ents les plus
Tous les revenus devront vous se rvir à form er le capital de
honorables; eu quoi dérogerions-nous quand nous accepterions
garantie des assurés. A u cu n e redevance pour les souscripteurs.
la charge de subvenir aux malheurs qui frapperaient nos collè
Les raisonnements qui précèdent peuvent être faits tant pour
gues par une association collective. Quand après avoir prodigué
les assurances sur la vie que pour celles sur les im m eubles. V o tre
à la société toutes les qualités que notre corps met à sa dispo
capital de garantie devra s’ élever, m ais vous pourrez con sidérer
sition dans toutes les périodes de son existence, nous reporte
comme vous appartenant la partie de l ’in térê t qui, dans les com
rions vers nous , vers nos collègues , les élém ents de conserva
pagnies ordinaires, est la part des actionnaires de la com pagnie.
tion que les combinaisons financières nous donnent, nous ne
C ’est là, M essieurs, que nous trouverons des capitaux suffi
ferions que remplir un devoir envers nous-m êm es, après avoir
sants pour com pléter notre œuvre d ’assistance. L ’expérience
largement rempli nos devoirs envers la société.
Mais, me dira-t-on, votre œuvre est-elle viable ? Ne vous
parle en notre faveur. La valeur des actions de toutes les
compagnies
d'assurances contre l ’ incendie
est
aujourd hui
trouverez-vous pas menacés dans votre fortune que vous voulez
bien supérieure au p rix de l ’ém ission. Les calculs des co m p a
augmenter ? Quand une compagnie s’ élève, la première police
gnies établies pour les assurances sur la vie entière établissent
qu’elle souscrit lui donne une prime de 50 fr. et lui impose, en
que l ’assuré ne paie la prim e que pendant quinze ans en viron ,
même temps, un risque de 50 ou 60 m ille francs. Supposez
et la participation q u 'il reçoit couvre t l an delà l’intérêt de
qu’un malheur vous advienne dans les prem iers temps de votre
l’argent qu’il a versé. Ces données sont positives et doiven t
existence, que deviendrez-vous? Oh ! si les prem ières années
démontrer que l ’association com plète des capitaux possédés par
vous sont favorables, le succès est assuré, mais ne serez-vous
les médecins , entraînerait
point ruinés par des sinistres arrivant au début ?
considérables qui ne nécessiteraient aucun sacrifice. Ce ne serait
Cette objection est vraie; mais, nous l’ avons «lit, le Corps
Médical est riche. Prévoyons un insuccès an début ! Que faut-il
qu’un
pour notre
Corps des revenus
d éplacem ent, on paierait à la Société
M édicale
les
primes que l’on paie aux autres com pagnies.
faire? Créer un capital qui puisse répondre des évènements de
Mes propositions, mes idées ont paru peu t-être étranges à
vos premières années. Que ce capital, souscrit par des médecins
la plupart d ’entre vous,et cependant je ne voudrais point encore
seulement, rapporte un intérêt im portant, eu égard aux chances
m’arrêter là. Il faudrait que tous les besoins fussent satisfaits
qu’ils consentent a subir. Admettez par contrat le rembourse
dans le sein même de notre Corps,
�Je n'oi point la pensée de parcourir ici toutes les combinai
mandent qu à lutter par un travail sérieux et opiniâtre. E n o c
sons que l'association réelle pourrait poursuivre. Un mot encore
cupant quelques-unes des heures de leur jo u rn é e, vous leur
sur une des questions les plus sérieuses de notre époque.
permettrez d’attendre le mom ent où leurs connaissances, leurs
Reportez vos regards vers l’enfance; on parle d’ enseignement
talents connus au dehors, leu r amèneront l ’aisance et la fortune.
professionnel.Quel corps, plus dignem ent que le nôtre,pourrait
Je ne sais, M essieurs, si je fais un rêve, et cependant je crois
aborder ce perfectionnement dont on étudie aujourd’hui la
que tout ce que je viens de vous exposer est réalisable. Ce serait
réalisation.
à mes yeux la régénération du corps m édical par l’ association.
Un collège de Médecins et de C h iru rg ie n s,
p’a c 1 sous la
Aux malheureux nous donnerions des seco u rs; à la veuve,
haute direction de I Association médicale de France, prenant
à l’orphelin nous aurions, par l’ épargne du chef de la fam ille,
les jeunes gens dès le début de leurs études, alors que par
assuré des ressources dans le jour
leurs parents ou par goût ils sont destinés à notre profession;
lard nous donnerions
de l ’a d v e rsité ;
une retraite , à l’ enfant
au v ie il
l'in stru c tio n
i enseignement professionnel marchant avec F enseignement
prolessionnell , au savant in d ig e n t les m oyens de su b ve n ir
littéraire; l ’anatomie,la physiologie, les sciences fondamentales
à ses besoins par son
de notre profession enstignées progressivem ent et pendant de
capitaliste, nous assurerions la conservation de sa fortune.
travail, enfin, au roi d 'en tre rions, au
longues années; n’csl-ce point là une in stitu tion qui promettrait
A uriez-vous alors besoin de conseils de d is c ip lin e ? N o n ,
dans l ’avenir des sujets du premier m érite? A cô 'é de la satis
Messieurs, l ’intérêt qui est une des grandes lois de l'h u m an ité
faction des besoins de l’enfance, de son in stru c tio n , considérez
maintiendrait dans les voies de 1 honnêteté ceux q u i, portant le
tout le bien que vous pourriez faire encore.
titre de m édecin,ne trouveraient pas dans leur cœ ur le v éritab le
Quelle réunion d’hommes illustres vous trouveriez à la tête
culte des choses honnêtes. B an n i du corps m édical, le collègue
de votre enseignement ! Exam inez toutes les liantes positions
indigne trouverait dans cet exil le véritable châtim ent d ’ une
scientifiques, tontes les académies qui font la gloire de la
conduite coupable.
France et comptez le nombre des M édecins qui en font partie.
Ces idées, M essieurs, elles ont été jetées devant vos yeux
Voyez autour de nos savants professeurs de faculté, arrivés au
sans beaucoup d ’ord re; si elles sont viables, elles ont besoin
faite de la renommée et de la fortune, c e lle pléiade de jeunes
d’être étudiées. Que Paris, recevant I im pulsion de la p ro vin ce,
savants (pii souvent sont marqués au front du sceau du génie.
fasse ues enquêtes pour rechercher la possibilité de l 'application
L ’nistoire de tous nos grands hommes nous apprend combien,
pour la plupart, oui été pénibles les débuts de la carrière. A
ceux-là aussi vous devez assistance, mais ce n ’est plus celte
de ces principes. N ous aurous rem pli notre devoir en exposant
tout ce que nous croyons u tile à notre profession.
[Mémoire lu à l'Assemblée Générale de l’Association Médicale des
Bouches-du-llhôr>e, le 30 août 1864.)
assistance qui fait aujourd'hui la base de I A ssociatio n. Ouvrez
ce collège où vous élèverez vos jeunes enfants à la profession
médicale, et leur rétribution équitable et non basée sur une
pen éede lucre deviendra l ’apanage de ces jeu n es hommes qui
ont déjà endossé la robe doctorale. Ils ont appelé sur eux, par
des études remarquables, i’attenlion de nos m ailres et ne de
EXERCICE ILLÉGAL DE LA MÉDECINE PAR DES RELIGIEUSES
S u i t e s g r a v e s de t r a i t e m e n t s i r r a t i o n n e l s .
Dans le com pte-rendji de M . le secrétaire général, nos lecteurs
ont dû remarquer la relation de deux cas de panaris traités par
les religieuses, et dont la term iuaison regrettable a m otivé, de
la part de In com m ission, une nouvelle lettre à M onseigneur
�l’évêque, rappelant les conséquences graves de l'exercice illégal
de la médecine par des personnes inexpérim entées.
Nous nous faisons un devoir d’en publier les observations :
P a n a r i t du pouce. — G a n g r è n e de l a m a i n e t d e l ’a v o n t - b r a i . —■
I n f e c t io n p u t r i d e . — M o r t ,
M. B..., demeurant à Maiseille, rue d’Aubagne, n0..., âgé de 68
ans. d'une forte constitution, n’ayant jamais été malade, se pique le
pouce de la main droite avec une arête de poisson. Deux ou trois
jours après, le pouce devient douloureux, gonflé, il sent des batte
ments violents, la douleur l ’empêche de dormir. S u r la foi de ses
voisins et voisines, il \a au dispensaire des sœurs; on lu i applique
un emplâtre ; cet emplâtre est renouvelé tous les deux jours. Ce| endant le mal augmente, la douleur devient intolérable, le [ ouce et la
main se gonflent, l’épiderme se soulève, et toujours on remet l’emplàtre, en ayant toutefois la précaution d’exciser a\ec des ciseaux
les parcelles d’épiderme soulevées.
Pendant vingt-deux jours, le même système est suivi, avec une
persévérance aussi incroyable de la part du malade que de la chari
table sœur qui aurait dû, cependant, se douter que le mal dépassait
ses ressources ordinaires. Enfin, le 14 ju ille t au son, le malade et
sa famille se décident à demander l ’intervention d ’un médecin.
A mon arrivée, je trou\e SI. B... dans un état d ’agitation extrême
provoquée par la douleur et la fièvre. Malgré cet état, la veille encore
il était allé se faire panser.
Je défis le pansement, et je trouvai la main dans un état affreux;
le gonflement s’étendait jusqu a l ’avant-bras, dépassant la bride du
poignet: l’épiderme était soulevé partout, à partir du pouce jusqu’au
troisième métacarpien. Le pus ne formait pas collection, il était
inbltré dans tous les tissus gonflés, et on le voyait sourdre à travers
les mailles du tissu cellulaire du derme mortifié.
Je pratiquai immédiatement cinq larges débridements, trois sur la
main et deux le long du pouce. Pour faire sortir le pus, il fallait
presseriez tissus à la façon d’une éponge; ce pus était épais, saniciix
et donnait une odeur forte de sphacèle.
Le malade étant fatigué, je renvoyai au lendemain de débrider
l'avant-bras. Je fis appliquer de \astes cataplasmes de fécule de
pomme de terre et j’ordonnai une potion calmante.
Le lendemain, je trouvai M. B... presque aussi souffrant que la
veille. Les débridements n’avaient amené aucun soulagement, ce
qui s’expliquait, du reste, par ce fait que les incisions n'avaient porté
que sur des tissus déjà gangrenés et qui n ’avaient pas encore eu le
temps de dégorger. Je pratiquai de nouveau deux larges incisions,
une à la face palmaire et 1autre à la face dorsale de l'avant-bras.
Dans le courant du traitement, je dus en pratiquer deux autres, ce
qui a fait neuf en tout. Peu à peu les douleurs diminuèrent, les lam
beaux de tissu cellulaire se détachèrent, quoique lentement et avec
peine. Pour diminuer l ’odeur de gangrené et faciliter l ’élimination
des portions sphacélées, j’employai successivement la glycérine, la
solution de tartrale de 1er et potasse, le styrax, l eau chlorurée, etc.
Les manuluves ne pouvaient être employés, ils déterminaient des
hémorrhagies et plus d ’une fois j ’ai été obligé de mettre de petits
tampons de perchlorure de fer pour arrêter de petites hémorrhagies
artérielles qui se produisaient au moment du pansement.
Enfin, au bout de quinze jours, toutes les parties gangrenées
étaient éliminées, le phlegmon était arrêté au niveau des incisions
de l ’avant-bras, la partie malade de la main et le pouce étaient re
couverts de bourgeons de la meilleure nature, les articulations et le
squelette étaient sains, l ’état local était aussi bon que possible, mais
l’etat général était loin d’être aussi rassurant. La fièvre n’avait pas
cessé, les fonctions digestives étaient complètement milles, 1affai
blissement allait en augmentant sous l'influence de la lièvre, d e là
douleur et de la suppuration, et malgré le régime tonique le plus
énergique, bouillons, viande crue, vin, quinquina, rhum, etc., au
bout de quinze jours, au moment où tout danger avait disparu du
côté des phénomènes locaux, je visapparaître une parotidite double,
du délire, des frissons; la langue devient noire et sèche, l ’abdomen
se ballonne, une diarrhée intense se déclare, les selles sont noires et
fétides, et, le 11 août, le malade succombe avec Ions les signes de
l’infection putride.
H ô p i t a l de la C o n c e p t i o n . S e r v i c e d e M . C h a p p l a i n . — P a n a r i s d u
Pouoe, observation recueillie par M. Descosse, élève du service.
Le 23 juillet, se présenta, à l hôpital de la Conception, le nommé
Alessendrini (Edouard-Dominique), âgé de 24 ans, marin.
Quoique d’une constitution peu robuste, le malade semble jouir
d'une santé générale assez bonne, et rien, chez lui. comme diathèse,
ne paraît entretenir l ’affection pour laquelle il réclame des soins.
11 lui atteint, dans les derniers jours du mois de mai, d ’un panaris
qu’il a gardé, sans consulter personne, jusque vers le 15 juin,
epoque à laquelle ou lui conseilla d ’aller se montrer aux sœurs de la
Miséricorde. Une de ces dames lui lit, avec un bistouri, une incision
transversale à la matrice de l ’ongle, après laquelle elle appliqua un
pansement avec du diachylum et une certaine pommade. Voyant
enfin que, malgré ses soins intelligents et trop dévoués, le mal ne
faisait qu’empirer, elle ne vit plus d ’autre remède que l ’amputation,
ce qu’elle indiqua au malade qui, croyant comprendre qu’elle se
chargerait aussi de l ’opération, lui répondit qu’il savait où aller, s’il
en était réduit à cette extrémité.
C’est alors qu’il se présente à l ’hôpital où nous le trouvons dans
l’état suivant :
Le pouce de la main gauche est excessivement tuméfié autour de
la deuxième phalange où viennent s’ouvrir plusieurs trajets listuleux
desquels s’écoule, par la pression, une matière sanieuse et sangui
nolente. Le doigt est dans sa position normale, les mouvements de
flexion sont très pénibles,-pour ne pas dire impossibles, et ceux qui
sont communiqués provoquent des douleurs extrêmement intenses.
Il entre dans le service des blessés, à la salle Saint-A ugustin, où
le chef de service prescrit des applications émollientes qui font dispa-
�— iso —
ISI
raitre les svmplîmes d'inflammation dont nous venons de parler.
M. Chapplàin peut alors imprimer des mouvements et examiner plus
facilement les lésions. Il reconnaît, aux in c ré m e n ts de latéralité
qu il peut faire subir à la dernière phalange et à la crépitation qu’oc
casionne le frottement de celle-ci sur la première, que les ligaments
sont détruits et que la phalange est nécrosée.
Le malade est gardé assez longtemps dans l’hôpital, afin de voir
si la nature ne se chargerait pas elle-même de l ’énucléation de la
phalange, mais l'état demeurant le même, l'amputation est pratiquée
dans l'articulation de la première et de la seconde phalange du
pouce. La plus grande partie de la région palmaire est conservée,
alla de matelasser par un large lambeau la partie supérieure du
pouce, de lui conserver plus de longueur et le plus d’éléments de
sensibilité.
Les suites de cette opération n ont rien présenté de particulier, Le
malade est sorti parfaitement guéri, vingt jours environ après l'am
putation.
Telles sont ces deux observations de panaris, terminés l'un
par la mort, l'autre par l'amputation du doigt. Puissent de pareils
exemples être répandus et connus dans le public. Ils serviraient
à faire comprendre aux ignorants, d ’une part, et de l'autre aux
trop charitables ou ollicieux guérisseurs q u ’en médecine une
pelite cause produit souvent de grands effets, et que ce n’est pas
toujours trop que du savoir et de l ’expérience des hommes de
l ’art pour eu conjurer les dangers.
D r B roquier .
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■1- —J
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1JV-SJ
=-11------ TJ------------ ■■
NO UVELLES ET V A R IÉ T É S .
Ag»ociation G é n é r a l e des M é d e o i n s d e F r a n c e . — L ’Assemblée
générale annuelle de l’Association aura lieu les 30 et 31 octobre courant,
dans l'amphithéâtre de l'administration de l ’Assistance Publique, avenue
Victoria, n’ 3, le 30 à deux heures, le 31 à m idi précis.
Société locale des B o u c h e s - d u - R h ô n e . — Dans Sa réunion du 6
octobre, la commission administrative a admis, à l ’unanimité, MM. les
docteurs Boussot, de Mouriés, et Sanguin tils, de Saint-Chamas.
Vaucluse. — Nous apprenons la mort de M. le docteur Bourbousson,
chevalier de la Légion-d Honneur, président de l'A ssociation des Médecins
de Vaucluse, ancien représentant à l ’Assemblée Constituante et à l ’Assem
blée Législative, vice-président du Conseil Cénéral, décédé à Sablet (Vau
cluse), à l'âge de 33 ans. M. le doéteur M illet père, d'Orange, a été
désigné au choix de l’Empereur pour le rem placer comme président de
la Société Médicale de Vaucluse.
— Les examens pour le titre d'officier de santé ont eu lieu, à Marseille,
le 3 octobre et jouis suivants. Le ju ry était présidé par M. Denouvilliers,
professeur à la Faculté de Médecine de P aris et inspecteur général de
î enseignement supérieur pour l’ordre de la médecine. Vingt candidats se
sont présentés, sur lesquels douze ont obtenu le certificat d'aptitude du
troisième examen; trois ont été ajournés au premier examen, quatre au
second, et un au troisième ; parmi les admissibles, tro is ont mérité la
note : Bien satisfait.
Le Comité de Rc..action
Marseille. — lmp. Viol, rue Thiars, 8.
A S S O C IA T I O N G É N É R A L E
DES
M É D E C IN S
DE
FRANCE.
C in q u ièm e A ssem blée G é n é ra le .
N o m in atio n de M . 9 E U X au C onseil G é n é r a l.
Nous avons a apprendre aux m em bres de la Société d .s
Bouches-du-Rhône une excellente nouvelle. Dans le renouvel
lement du conseil supérieur de l'A sso ciation G énérale, une place
a éle donnée h M. le docteur Seux. Cet honneur rejaillit sur
notre Société, dont l’ im portance a été justem ent appréciée.
Notre honorable président a bien voulu nous rendre cum pte des
séances intéressantes auxquelles il a assisté, par la lettre suivante
qu’il a adressée h M . le secrétaire :
Paris, le I' r novembre I8G4.
Mon cher Secrétaire,
Convaincu du plaisir que je vais vous faire en vous donnant h
relation succincte de ce qui s’est passé à Paris dans l ’amphithéâtre
de l ’avenue Victoria, dimanche et lundi derniers, je m ’empresse de
prendre la plume en vous priant de vouloir bien excuser mon style ;
la rapidité avec laquelle je vous écris, pour satisfaire votre juste im
patience, vous explii[uera quelques vices de forme inévitables en
pareil cas.
Il ne me semble pas indifférent de vous parler d ’abord des salons
du Grand-Hôtel,gracieusement mis à la disposition des présidents et
délégués des sociétés locales, depuis le 29 jusqu'au 31 octobre.
Le samedi soir 29, veille de la première séance de 1 assemblée
générale, nous nous sommes trouvés réunis en assez grand nombre
dans ces beaux salons; le Nord, le M idi et l'Ouest de la France x
avaient leurs principaux représentants, il était tout naturel que les
plus éloignés eussent précédé ceux qui n ’avaient à faire q u ’ un trajet
de quelques heures pour entrer en séance. M. Amédée Latour, notre
éminent secrétaire général; MM. Gallard et Gros, vice-secrétaires;
M. Brun, trésorier de la Société centrale, se trouvaient aussi au
rendez-vous du Grand-Hôtel; puis est arrivé notre vénérable et i l
lustre président, M. le D r Rayer, qui désirait, par sa présence, ré
pondre à l ’empressement qu'avaient mis les médecins des départe
ments les plus éloignés à se rendre à son invitation; quoique fatigué
par une bronchite, il était venu nous serrer la main: impossible de
vous faire une idée de son affabilité pour tous. Cet homme, célèbre à
tant de titres, joint à sa foi vive dans l ’association et au zèle actif
qu’il déploie dans l ’exercice de ses fonctions de président, la grâce
et l’amenité la plus parfaite.
Dans cette reunion intime, on s’est vu de près, on a fait connais
sance, chacun a causé des vœux émis par sa Société; on n ’a rien
décidé, car tout s’est passé en aimables causeries, m aison s’est
compris, puis on s’est quitté en se serrant la main et en se disant au
revoir pour le jour suivant.
�— 182 Le dimanche 30 octobre, à une heure et demie (l'Assemblée devait
se réunir à deux heures), j'entrai dans la salle d ’attente destinée aux
invités. M. le président Rayer s’y (trouvait déjà; accueillant avec
l ’amabilité la plus gracieuse^ les médecins qui arrivaient.
A deux heures et quart, la séance a été ouverte. Les gradins de
l'amphithéâtre de l'administration de l'assistance publique étaient
entièrement occupés par un public d ’élite; l ’aspect de cette réunion
d’hommes venus de tous les points de la France, malgré leur âge,
malgré leurs incessantes occupations professionnelles, dans un même
but. une même rensée. avait quelque chose de grand, de noble,
d’imposant. Sur l'estrade, de chaque côté du président, on distin
guait plusieurs des célébrités médicales de Paris et de la province :
MM. Cruveilhier, Bouillaud, Tardieu. Jobert de Lamballe. Ricord,
Larrey, Michon, Malgaigne, Michel Lévy, Cazeneuve, de Lille;
Mabit, de Bordeaux ; Sanderet, de Besançon ; MM. Amédée Latour,
secrétaire général; Gallard et Gros, vice-secrétaires ; Legouest, secré
taire de la Société centrale; M. Davenne, M .M ourier, vice-recteur de
l ’Académie de Paris. On comptait 00 présidents de Sociétés locales.
M. le président a ouvert la séance par quelques paroles pleines de
bienveillance pour les médecins qui lu i avaient fait savoir que des
devoirs impérieux les avaient empêchés de se rendre à la reunion;
il a ensuite prononcé un discours aussi remarquable par la forme
que par le fond, dans lequel il a fait ressortir avec la , lus grande
evidence les bienfaits de l’association. Que pouvait faire le medeun
isolé contre le charlatanisme et l ’exercice illégal de la médecine?
Rien; il n’osait même pas faire la moindre démarche; vous savez ce
que fait l'association. Les médecins étaient éloignés; d ’un bout de
l ’empire à l'autre, ils se réunissent et, qui plus est. ils se révèlent les
uns aux autres par le côté le plus beau, celui qui donne accès à tous
les bons sentiments. Nous pensons et surtout nous sentons différem
ment depuis que nous sentons en commun, dit M. le président, dont
le discours imagé ne pourrait que perdre considérablement à une
analyse. Quelques phrases heureuses arrivent aussi pour rassurer les
associés relativement à la révision des lois sur l ’exercice de la méde
cine; il ne lui appartient pas, dit-il, de faire connaître le bien que
le i rojet présenté à S. Exc. M. le ministre de l ’instruction publique
produira, mais il est réel. Ces bonnes paroles doivent nous donner
confiance et espérance. M. Rayer n’oublie pas les morts; il rappelle
ensuite que l ’assistance et la protection avaient, comme les années
précédentes, été d’une incontestable utilité pour un certain nombre
d’associés; il fait savoir que plusieurs dons sont venus encourager
l'association dans son œuvre d’assistance, entre autres celui de 1,000
francs envoyé par l ’Empereur, auquel est due la plus grande grati
tude pour son incessante protection.
Notre vénéré président termine en faisant connaître la décision
prise par le conseil général de mettre sous le patronage de l ’associa
tion le projet d’érection d’une statue à Laënnec, dans la ville de
Quimper, lieu de sa naissance.
Le discours de M. le président, souvent interrompu par dciiom-
185 broux applaudissements, est couronné par de chaleureuses accla
mations.
M. Legouest fait ensuite, au nom de la Société centrale, connaître
la situation tinancièrede celle-ci; grande prospérité, quarante-cinq
adhérents de plus que l ’année dernière.
La parole est alors donnée à M. Amédée Latour pour son compte
rendu dont la lecture dure une heure et demie; malgré l ’aridité
indispensable de quelques détails, M. le secrétaire général, par la
profondeur de ses vues et l ’animation de son style, a tenu pendant
tout ce temps, on peut le dire, l ’assemblée suspendue à ses lèvres.
Il me serait bien difficile de vous relater tout ce que ce beau compte
rendu contient, je vais tâcher de vous en donner un très rapide
aperçu.
Personnel. — M A. Latour s’occupe d ’abord des perles très re
grettables et malheureusement bien nombreuses que l'association a
essuyées cette année; quatre-vingts membres sont morts, et. parmi
eux, les plus notables sont : MM. Yillermé, membre de l ’Institut et
du Conseil général de l'Association; Laudouzi. de Reim s; Durand,
d'Eure-et-Loir; Bon de la Gillardaie, du Morbihan; Bourbousson,
de Vaucluse, tous les quatre présidents de Sociétés locales; chacun
de ces clignés et regrettés collègues trouve sous la plume sympathi
que de noire habile secrétaire général les éloges dus à leurs talents
et au rang élevé qu'ils occupaient.
Le nom des autres membres décédés sera religieusement inscrit
dans l ’Annuaire.
Les présidents des Sociétés locales ne sont nommés que pour cinq
ans; plusieurs dont les fonctions expiraient cette année ont été
réélus, M. Cazeneuve, du Nord, entre autres. Ces estimables collè
gues, auxquels les sociétés voulaient continuer leurs pouvoirs, ont
tenu avec juste raison à ne les devoir qu’à un nouveau scrutin.
Quatre Sociétés nouvelles ont été fondées depuis l ’an dernier : nous
en avons aujourd’hui dans soixante-quinze départements et dans
deux colonies; dans les quatorze départements qui ne sont pas agré
gés, on compte aussi quelques associations médicales. Dans trentehuit Sociétés locales, il y a eu augmentation du personnel; cette
augmentation est en tout de 47i membres. Dans le cours d ’une
année, la Sjciété des Bouches-du-Rhône, par exemple, s’est accrue
de 61 membres. Notre chilïre total s’élève aujourd’hui à 6,014
sociétaires.
Il nous est bien doux, ajoute M. A. Latour, de signaler les dis
tinctions (jue l ’Empereur a bien voulu accorder aux membres de
notre association. M. Rayer a obtenu la plus haute distinction qui ail
jamais été accordée à un médecin; M. Tardieu a été élevé au décanal de la Faculté de Médecine et il a dignement inauguré son arrivée
dans cette haute position par une idée, émanation de notre associa
tion : je veux parler de la Société de secours m utuels pour les étu
diants en médecine. M. Gros, notre distingué vice-secrétaire, a reçu
aussi une distinction dont scs travaux le rendaient digne.
Situation financière. — La caisse de F Association possède plus de
�-
184 —
377,000 fr.; 8,237 lr. de dons ont été faits à la caisse des pensions
viagères d’assistance par MM. Rayer, Tardieu, H. Roger, Gallard,
Durand Fardel, À. Latour; des dons ont aussi été faits aux Sociétés
locales par MM. Simonin, Barrier, Cazeneuve. Cependant M. Latour
ne croit pas que les Sociétés locales puissent penser sérieusement à
rétablissement de caisses de retraites ; elles en ont le droit, sans
doute, mais ce serait une mauvaise direction à suivre, surtout depuis
l’établissement de la caisse des pensions viagères d’assistance. M. le
secrétaire général ne développe pas assez celte idée pour que, parti
san, comme vous le savez, des caisses locales de retraites, je puisse
être convaincu et renoncer à cette création dont j ’ai toujours caressé
avec bonheur la pensée. En tout cas. M. A. Latour ne peut admettre
la possibilité du droit à la pension de re traite, il n’admet que
l ’aptitude.
Assistance. — Dans le courant de l'année qui vient de s’écouter.
18.903 fr. ont été distribués; sur cette somme, 1,500 fr. aux So
ciétés locales; chaque année le chiffre consacré à soulager nos mal
heureux s'est éleve ; plusieurs fois ces secours ont été accordés sans
qu’ils eussent été sollicités L ’Association a trois pupilles, fils de
médecins ; elle a l'ail exonérer un officier de santé de ses frais d’exa
men pour le doctorat et de plus elle a, par son influence, fait obtenir
une position honorable à plusieurs veuves de médecins.
Protection. — La protection s’est manifestée sous toutes les for
mes ; dans les rapports des médecins avec les Sociétés de secours
mutuels: ainsi, à Milhau et à Rhodez, l ’Association a obtenu que les
soins médicaux ne seraient accordés que moyennant le prix d’un
franc pour chaque visite ; dans les contestations entre clients et
médecins, en adoptant le principe d’avoir toujours recours à l ’Asso
ciation avant d user des tribunaux; dans diverses demandes à adres
ser aux ministres, celle par exemple qui a trait aux médecins étran
gers qui viennent s’établir dans les stations méridionales de la
France, Nice, etc.; dans la poursuite de l ’exercice illégal de la
médecine et, à ce sujet, dans les démarches auprès des autorités
ecclésiastiques à propos des corporations religieuses ou des jprétres
qui pratiquent tous les jours la médecine sur la plus grande eclielle.
M. le secrétaire général lit à l ’appui de ses assertions la lettre de
M41 Cruicc, évêque de Marseille, excellente lettre qui, vous le savez,
mon cher secrétaire, me fut adressée le \ ' septembre dernier et que
tous les membres de notre Société locale connaissent Celte lettre a
produit une très bonne impression sur l ’auditoire. M.Amédée Latour
signale encore divers modes de protection qui prouvent la grande
utilité de notre Association pour les médecins et pour la société
française.
Moralisation — Dans quelques Sociétés, on s’est trouvé dans la
dure nécessité de prononcer l’exclusion de membres dont la conduite
laissait à désirer. La Société de Lille s’est prononcée d ’une manière
énergique, trop énergique même, contre les annonces dans les
journaux politiques et dans les journaux de médecine ; cependant la
Société des Bouches-du-Rhône a cru devoir les admettre dans le
185
journal qu elle publie sous lé nom d 'Union Médicale de lu Provence.
A ce sujet >1. le secrétaire général a prononcé des paroles excessive
ment flatteuses pour notre publication; il a même cité textuellement
le passage de mon allocution du 30 août dernier, passage dans lequel
je lais ressortir les nombreux avantages que les jeunes médecins qui
ont des aptitudes spéciales pourront trouver à insérer leurs travaux
dans notre journal. M. A. Latour fait ensuite voir combien il serait
avantageux pour les départements de mettre en pratique les idées
que M. Laguesse, vice-secrétaire de la Côte-d’Or, a émises avec tant
de talent sur le concours. Noire éminent secrétaire général n’oublie
pas de signaler à l ’assemblée les propositions Rondard. Chapplain ;
ces noms amis ont, comme vous devez le penser, tinté d une ma
nière fort agréable à mes oreilles et j ’ai été particulièrement heureux
lorsque, ainsi que je l ’espérais, il nous a fait savoir que le conseil
général serait prochainement appelé à examiner la lecture faite dans
notre dernière assemblée générale par notre excellent collègue
Chapplain.
M. A. Latour a résumé ensuite en quelques phrases tout ce qui
est contenu dans son travail, c’est-à-dire tout ce que l ’Association
a fait durant l ’année qui vient de s’écouler, il a terminé par des
paroles pleines de cœur et de dignité à propos des élections q u in
quennales du lendemain, et dans lesquelles, avec ses confrères, il se
présentera de nouveau au scrutin avec confiance, mais non sans
une vive émotion. Ces paroles ont excité les applaudissements les
plus chaleureux qui, du reste, étaient bien mérités par l ’ensemble
de ce remarquable compte rendu, modèle du genre. Un assez grand
nombre de personnes se sont même écriées : E lu par acclamation !
M. Sanderet, président de la Société du Doubs, a lu ensuite un
discours sur le projet d ’érection d ’une statue à Laënnec, dans sa
ville natale. M. le L)r Lediberder est l ’auteur de cette proposition. Ce
discours, par l ’élégance du style et la solidité du fond, a excité le
plus vif intérêt. J’ai eu le plus grand plaisir à l ’entendre; cependant
je fais à M. Sanderet le reproche d’avoir beaucoup trop am oindri la
grande ligure de Broussais dans le parallèle qu’il a cru devoir faire
entre ce grand homme et Laënnec, bien grand, lui aussi, mais d une
autre manière.
Les présidents des Sociétés locales ont alors présenté quelques
considérations sur l ’ordre du jour et la réunion du lendemain, puis
M. le président Rayer a levé la séance.
A sept heures du soir, un tout autre spectacle, beaucoup moins
grave, sans doute, mais tout aussi imposant, avait lieu dans les
somptueux salons du Grand-Hôtel, boulevard des Capucines. Deux
cent soixante médecins, avant à leur tète M. le président Rayer,
s’asseyaient dans cette magnifique rotonde, salle à manger dont on
ne peut se faire une idée que lorsqu’on l ’a vue dans ses jours de fête
avec son éclairage à giorno. Les lumières resplendissantes faisaient
ressortir ces nombreux visages intelligents, habituellement sévères,
mais sur lesquels, dans ce moment, on ne pouvait lire qu’une même
pensée, le bonheur et la satisfaction. La politesse la plus prévenante
�-
186 -
cl les soins les plus empressés oui accueilli les 70 à NO imités aux
quels cette belle et riche hospitalité était offerte avec tant d’effusion.
La cordialité la plus franche n’a cessé de régner pendant le repas
qui s’est terminé par un toast à l'Em pereur par M. le président
Rayer, un à M. Rayer par M. Mabit, de Bordeaux; plusieurs autres
santés ont été successivement portées aux délégués des départe
ments, aux absents, à M. Amédee Latour, aux membres du conseil
judiciaire de l ’Association, aux membres de l ’administration supé
rieure des Sociétés de prévoyance et de secours mutuels par Mil
Michel Lévy, Larrey, Ricord, A. Latour, Tardieu. M. de Melün a
répondu à M. Tardieu par un toast à la prospérité de l ’Association
générale, et M.Chevillon, président de la Société de Vitry-le-Français,
à M Michel Lévy par une santé portée à la médecine et à la chirurgie
militaires. Un toast me paraissait manquer pour rendre complets tous
nos vœux, tous nos souhaits; vous me comprenez peut-être, mon
cher secrétaire, car vous savez ce que je désire dans l ’intérêt du corps
médical ; j ’allais me lever le verre à la main lorsqu'une pensée m'a
arrêté; je vous en ferai part à mon arrivée à Marseille et je suis sûr
que vous m'approuverez.
La soirée s’est prolongée jusqu a onze heures, dans un des salons
de réception de l’hôtel, où n’ont pas manqué, je vous prie de croire,
les chansons, les pièces de vers et cet esprit français qui. vous le
savez, pétille comme le champagne, surtout quand cet aimable vin
est venu exercer son agréable influence sur deux cent soixante cer
veaux de médecins.
Le lendemain 31 octobre, à une heure moins le quart, M. le pré
sident Rayer a ouvert la séance. Ce jour-là, le public n’est pas
admis; ne peuvent assister à la réunion que les membres du conseil
général, le président de la Société centrale et les présidents ou délé
gués de Sociétés locales.
M. Rayer était entouré sur l’estrade par MM. Michel Lévy, prési
dent de la Société centrale, Cruvcilbier, Mabit, de Bordeaux ; Caze
neuve, de Lille, vice-présidents du conseil général ; Amédée Latour,
secrétaire général : Bosviel, membre du conseil judiciaire, Gros el
Gai lard, vice-secrétaires
M. Gros a donné lecture du procès-verbal de la séance de l'année
dernière, ce procès-verbal a été adopté sans discussion.
M. le secrétaire général a communiqué plusieurs lettres de mem
bres qui s’excusent de ne pouvoir se rendre à la séance, M. Ricord,
entre autres qui a joint à sa lettre un billet de 500 francs offert à la
caisse des pensions viagères d’assistance. M. le baron Larrey a fait
un don pour les pupilles de l ’association.
Presque tous les membres du conseil général étaient présents, je
me fais un plaisir de vous signaler parmi eux plusieurs de nos
grandes célébrités médicales : MM.Denonvilliers, Bouillaud, Tardieu,
Jobert de Lamballe. M. Cliaillaux, agent comptable de l'Association
générale, retenu chez lui. par une maladie, a été remplacé par M.
Davenne, pour l ’exposé de la situation financière de la caisse géné
rale et de la caisse des pensions viagères; ce rapport est on ne peut
187 —
plus favorable, le capital de la caisse des pensions esl de plus de
50,000 francs; des remercimenls sont votés à M. Chaillaux.
M. le Président a ensuite fixé l’attention de rassemblée sur le pro
jet d’érection d’une statue à Laënnec; le conseil général a pensé que
ce projet devait être-placé sous le patronage de l ’Association et que
le meilleur moyen d ’obtenir des souscriptions était de nommer une
commission générale composée de MM. les présidents des sociétés
locales, ceux-ci nommeraient dans chaque département une com
mission composée non-seulement de membres de l'Association mais
aussi de médecins honorables pris en dehors et qu’il leur plairait de
désigner; cette sous-commission se chargerait de recueillir les sous
criptions qui doivent être entièrement personnelles, c’est-à-dire que
la caisse des sociétés ne doit nullement intervenir, l'offrande la plus
minime sera acceptée avec la même gratitude que la plus élevée.
Chaque président, une fois le travail de cette sous-commission ter
miné-. en fera connaître le résultat à une commission centrale chargée,
comme son nom l ’indique, de centraliser l'es souscriptions et de
prendre les mesures nécessaires pour hâter l ’exécution du monument.
M. le président a donné alors les noms proposés par le conseil géné
ral pour la commission centrale ; en tête de cette liste se trouve M.
Lediberder, auteur du projet, puis, au m ilieu des notabilités médi
cales de Paris se trouvent les noms de MM. Bérard, doyen de la
faculté de médecine de Montpellier et Elirm an, doyen de la faculté
de médecine de Strasbourg. Dans les départements qui n’ont point
de sociétés locales, la commission centrale sera autorisée à provoquer
directement la création de commissions départementales. Les auto
rités civiles el religieuses de la Bretagne et en particulier celles du
Finistère, seront invitées à prendre une part active à cette patriotique
manifestation. Ce projet de statue a Laënnec, une des plus grandes
gloires de la médecine française et du pays tout entier, est donc placé
entre les mains du corps médical sous le patronage de l ’Association,
l’assemblée adopte chaleureusement toutes ces propositions.
M le président a dit ensuite que le mandat quinquennal du con
seil général et de son bureau étant expiré, il v avait lieu d’élire
quatre vice-présidents, un secrétaire général, deux vice-secrétaires,
et vingt-cinq conseillers; tous peuvent être réélus. Tous l ’ont été eu
effet à l ’exception de MM. Lejeune, président de l ’Aisne et Pénard,
président de Seine-et-Oise qui ont été remplacés par M. Barrier,
président du Rhône et par votre très humble serviteur qui a dû,
sans doute, une si haute marque de distinction à ses honorables et
bien aimés collègues des Bouches-du-Rhône et à l ’importance de la
société qu’ils ont créée, bien plus qu’à lui-même. Je me réjouis de
pouvoir siéger à côté des plus grandes illustrations médicales de
notre époque, surtout à cause de ma chère société qui sera heureuse
devoir que nos honorables associés lu i rendent justice en la plaçant
à un des premiers rangs de l ’Association. M. Bartli a remplacé M.
Villermé, décédé.
Après le dépouillement du scrutin, M. le secrétaire général a
obtenu la parole pour lire son rapport sur cette question: Y a - t- il
�— 188 —
opportunilé à œ que l'association intervienne auprès des pouvoirs
publics pour obtenir une loi nouvelle sur l ’exercice de la médecine ?
Tout le monde se dira peut-être à la simple lecture de cet énoncé,
comment est-il possible démettre un doute sur cette opportunité,
il y a, au contraire, urgence à obtenir celle révision. Eh bien, mon
cher secrétaire, Al Amédée Latour, dans un magnifique langage,
plein de dignité et d’une sage réserve, m a convaincu et a convaincu
toute 1assistance qu’il valait mieux éviter cette démarche auprès des
pouvoirs publics, le moment n’étant pas opportun. Il a été décidé
par l’assemblée que ce rapport, excessivement remarquable par le
fond et par la forme, serait envové dans la huitaine, non-seulement
à chaque société locale, mais à chaque associé, malgré la dépense
considérable qui en résultera pour la caisse de l ’Association, le sujet
et l ’importance de ce travail expliquent cette détermination ; je ne
veux donc pas diminuer le plaisir que vous aurez à lire l ’œuvre de
M. Am. Latour en vous en donnant ici une pâle analyse. Cependant
je dois vous dire, pour vous rassurer tout de suite, sur celte palpi
tante question de la révision des lois qui nous régissent que la com
mission nommée par S. Ex. Al. le ministre de l ’instruction publique
a terminé son travail qui est aujourd’hui entre les mains du rappor
teur du Conseil d Etat et que des changements très importants ont
été introduits par la commission dans les règlements surannés qui
constituent notre code médical. Espérons donc, d ’autant plus, qii’aprésla lecture du rapport de M. Latour et sur sa demande qui était
l ’expression des vœux du conseil général, il a été décidé par l’as
semblée que la question de la révision des lois sur l ’exercice de la
médecine serait mise immédiatement à l ordre du jour des sociétés
locales, qu’un rapport serait fait par elles sur ce sujet important et
envoyé au conseil général avant le \ ” mare prochain. Le conseil
général désire connaître les vœux de tous et il tient surtout à être
ainsi suffisamment autorisé pour faire, au sujet de cette révision, des
démarches sérieuses et utiles; sur sa demande, l ’assemblée lui a
dès-lors donné liberté entière d’user des documents qui lui seront
envoyés par les Sociétés locales, au moment qui lui paraîtra le plus
favorable et par les moyens qui lu i sembleront les meilleurs.
J’avais avant la lecture de M. A. Latour, demandé la parole avec
plusieurs présidents de Sociétés locales au sujet des vœux exprimés
par elles, relativement a la révision des lois qui régissent l'exercice
de la médecine. Ce qui précède vous fera comprendre qu’il n’y avait
pas lieu d’insister, la réponse étant pour ainsi dire venue au devant
de la demande, d’autant plus que nous savions que dans le projet
présenté à S. Eve. M. le ministre de l ’instruction publique des peines
excessivement sévères étaient proposées contre tout individu con
vaincu d’exercice illégal de la médecine ou de vente de remède
secret, quelle que fut la classe de la société à laquelle il appartint.
On a ensuite passé à l’examen des diverses observations que les
délégués des sociétés locales pourraient avoir à présenter. M. Nivet,
du Puy-de-Dôme, a observé qu’il serait urgent d’organiser dans les
montagnes de l’Auvergne un service de santé qui fut suffisant pour
que les pauvres montagnards ne manquassent pas, surtout pendant
les rigueurs de l ’hiver, de médecins et de médicaments, disette qui
pousse les malheureux vers les rebouteurs et les charlatans de bas étage.
M Laguesse, secrétaire-adjoint de la Côte-d’Or, désirerait que le
conseil général lit étudier la question de l’établissement du concours
pour tous les emplois médicaux, ainsi qu’il l ’a indiqué dans le mé
moire envové à toutes les sociétés locales dans le but d ’avoir leur
opinion sur ce point.
AJ. Cazeneuve, du Nord, a lu un rapport dans lequel, au nom de
sa société, il demande énergiquement que l ’Association veuille bien
réclamer du gouvernement que l ’article 36 de la loi de germinal
an XI contre les annonces et la vente des remèdes secrets, soit exé
cutée et qu’avis en soit donné aux journalistes M. A. Latour a
protesté avec force contre cette dernière proposition, les journalistes
ne pouvant être en cause dans cette réclamation.
M. Barrier, de Lyon, désirerait que l ’Association intervint auprès
de S. Exc. Al. le ministre de l ’intérieur pour que toute affiche médi
cale fût interdite. J'ai fait observer que la meilleure marche à suiv re
pour atteindre ce but, était de faire ce que notre société pratique
depuis plusieurs années, c’est-à-dire de signaler ces affiches à M. le
préfet du département, de surveiller avec activité les récidives et de
ne pas craindre de les signaler de nouveau ; pour notre compte, aije ajouté, nous devons beaucoup de reconnaissance à M. le sénateur
de Âlaupas pour les ordres précis et formels qu'il a bien voulu donner
à ce sujet.
M. Bardinet, de Limoges, a raconté que dans son département un
médecin avait été condamné à une amende de 60 IV. pour avoir fait
un certificat sur papier libre. Il voudrait que l ’association intervint à
ce sujet auprès du gouvernement. M. Bosviel, membre du conseil
judiciaire, fait observer avec juste raison que mieux vaut se taire,
car ces condamnations constituent une très grande exception, quoi
que la loi soit précise à ce sujet, et, après réclamations, elles devien
draient à coup sûr la règle; du reste, c’est au client qui demande le
certificat à fournir la feuille de papier timbré. M. Cbevillon, président
de Vitry-le-Français, qui déjà, dans nos conférences, nous avail
entretenus à ce sujet, a affirmé que plusieurs faits semblables
étaient à sa connaissance et qu’il était décidé à ne jamais faire de
certificat sur papier libre.
L ’assemblée a décidé que les diverses propositions qui venaient
d’être faites seraient mises sous les >eu\ du conseil général qui
aviserait et jugerait quelles sont celles qu’il conviendrait de porter
à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale.
La séance est levée à une heure avancée
Voilà, cher secrétaire, le résumé de cette assemblée qui, de I opinion de tous, compte parmi les bonnes; j ’espère qu’il vous sera
aussi agréable de me lire, malgré les imperfections de ma relation.
i|u’il a été satisfaisant pour moi de juger, par mes propres yeux, de
la grandeur et des avantages de notre belle Association.
Je vous serre fraternellement la main.
Seu x.
�191
Quelques m ots sur la m é d i c a t io n t o p i q u e d a n s le t r a i t e m e n t de
la l a r y n g ite c h r o n iq u e é t u d i é e à 1 a i d e d u l a r y n g o s c o p e , par
le D o c t e u r E . N IC O L A S .
Je me propose d’éluditM- ie traitement topique dans la laryn
gite chronique simple, c esl-à dite dans la laryngite qui est
produite par les causes communes aux plilegm asies en général.
La laryngite chronique sim ple peut être guérie par uu
traitement local, tandis que les laryngites syphilitiques, tuber
culeuses, dartreuses, peuvent être avantageusement modiliées
par un traitement topique, mais il est nécessaire d’employer
un traitement général, indispensable pour obtenir la guérison.
Si j ’ai cité ces diverses espèces de laryngites, c'est alin de
bien limiter mon sujet, ne désirant pas. pour le moment, entrer
dans une discussion nosologique qui appartiendrait il une élude
complète de la laryngite chronique.
Après avoir cité quelques observations servant de types à
différentes formesde laryngites chroniques sim p le s, j ’ esquisserai
le manuel opératoire de l ’application des agents médicamenteux
et leur mode d’action.
I.
Observation l. — Mademoiselle L * v ‘ , artiste lyrique,
22 ans, bonne santé habituelle, pas d’ antécédents diathésiques,
est atteinte depuis quatre mois d'une toux légère le matin, sui
vie de l’expectoration de quelques crachats m uqueux, opalins.
Dans la journée elle hemme de temps à autre et principalement
le soir. Elle a été forcée de quitter le chant parce que trois ou
quatre notes du médium de son échelle diatonique sont voilées,
sourdes, les autres notes de son registre étant claires, éclatantes.
Le 19 octobre 1863, je l’examinai pour la prem ière lois. Le
pharynx, le voile du palais, les piliers, les amygdales i.e pré
sentaient aucune lésion .Examen laryngoscopique : la muqueuse
qui recouvre les cartilages aryténoïdes est ro u g e , gonllée,
œdème sous-muqueuse descendant entre ces cartilages d’une
petite quantité et rendant impossible le rapprochem ent de leurs
sommets. En faisant prononcer la voyelle a, la glotte se resserre
dans toute son étendue, aussi bien dans sa partie ligamenteuse
que dans sa fraction cartilagineuse ; mais dans cette dernière
partie, c’est la muqueuse œdématiée qui la ferme et non pas les
cartilages, leur accotement intim e ne se faisant pas.
Prescription. — Hepos de l’ o rg an e, gargarism e a v e c grammes d’alun sur 500 grammes de véh icu le et deux lois par
seinaiue j ’insufflai sur le point malade un m élange par parties
égales de calomel cl de poudre de gomme.
Au bout d’ un m ois de traitem ent, la rougeur et le gonllem ent
des parties malades étaient dissipés et la voix de celte ch an
teuse avait repris son tim bre, sa netteté dans toute son étendue.
Celte observation est intéressante au point de vue physio
logique. La voix de celte personne s’ étend de fa* a fa 1 et
c’ étaient les notes m i 3, /a3, sol*, la \ qui avaient perdu leurs
qualités, notes qu i, dans son échelle diatonique, servent de
transition de la voix de poitrine a la voix de fausset.
M Ballaille (I) a dém ontré par des expériences laryn g osco piques fort bien faites que : 1° Dans le registre de p oitrin e les
aryténoïdes s affrontent par le tiers in férie u r de leurs faces
internes; — 2° Dans le registre de fausset la c c o le m e n l de ces
cartilages est presque nul dans le tiers in férie u r de leurs laces
internes tandis qu’ il est marqué a leur sommet.
L ’observation précédente confirm e donc les données p h ysio
logiques émises par M . Bat taille. En effet le gonllem ent sousmuqueux , vers le som m et des aryténoïdes , em pêche leur
rapprochement in tim e et occasionne par suite l’obscurité des
premières notes du registre de fausset, les suivantes deviennent
nettes parce que la tension des cordes vocales augm entant, la
sérosité qui se trouve dans les m ailles du tissu ce llu la ire est
chassée, les tissus se condensent et si les aryténoïdes n ’ arrivent
pas an contact com plet vers leurs som m ets, ils sont cependant
assez rapprochés pour offrir un point d’appui suffisant pour permettrea la tension des cordes vocales de s’effectuer et alors elles
peuvent vibrer avec une in ten sité suffisante.
Observation //. — M lle G***, âgée de 12 ans. Bonne santé
antérieure. A la suite d’ un refroidissem ent, elle fut prise de
toux et d ’enrouem ent. La toux céda au bout de quelques jo u rs,
mais l ’enrouement persista et il durait depuis sept sem aines
lorsque je fus consulté. C e lle petite malade n ’ est pas am aigrie,
son appétit est bon, le som m eil est conservé; elle n’ a pas de
suffocation, pas de gêne dans la d ég lu titio n , la pression latérale
sur le larynx et la pression perpendiculaire sur, le cartilage e r icoïcJe ne sont pas douloureuses.
Examen laiyngoscopique. — A u niveau des ventricu les à
droite et a gauche, rougeu r foncée et gonllem ent in tla m m aio ire,
l’épiglotte est rouge foncé, sans gonflem ent; d’ ailleu rs, tous
les mouvements intrinsèq u es du larynx se font avec régu larité
et précision.
Traitement. — A u moyen de l’ in s u illa le u r de M orand, je
déposai tous les deux jours sur les points malades un m élange
(1) Nouvelles recherches sur la phonation par Ch. U a tta illc, 4861.
�193 —
il alun el (le sucre en poudre par parties égales. A u bout de
quinze jours, l’enrouement avait entièrem ent disparu et celle
demoiselle pouvait reprendre ses études de chant.
J'ai observé plusieurs jeunes gens dont les observations sont
identiques, quant aux symptômes et à la cause occasionnelle,
à celle que je viens de ciler ; je crois que c'est bien là le type
de cette alfection que Graves a décrit sous le nom denrouement
des jeunes gens (l) el qu‘il attribue à l'affaiblissement des
cordes vocales et peut-être des m uscles laryngiens. Je n'ose
contester l ’opinion de Graves, mais dans certains cas celte
affection dépend des lésions que j ’ai indiquées dans l'observation
précédente. En continuant mes recherches , si l ’opinion de
Graves est vraie, le laryngoscope me donnera le moyen d’en
démontrer I exactitude.
Observation III. — M. d’ A '
âgé de 46 ans. Bonne santé
antérieure, pas d’antécédents darlreux. D epuis un an il est sujet
à des maux de gorge, il tousse le matin el expectore des cra
chats épais, grisâtres, sa voix est souvent voilée; quand il chante,
à peine a-t-d donné quelques notes q u ’ il est obligé de cesser,
car il est pris d’une quinte de toux,
Examen laryngoscopique — La m uqueuse de la gorge est
rouge, un assez grand nombre de fo llicu le s muqueux sont
augmentés de volume. Le larynx est congestionné', la trachée
est rouge foncé, les follicules m uqueux qui surmontent les
cartilages aryténoïdes sont enflammés et font saillie, tous les
mouvements du larynx se font bien.
Quelques séances d’aspirations d’ eau pulvérisée et le repos
de ! organe ont amené une guérison com plète.
Observation IV. — M. F. L***, fileu r de crin s, âgé de 19
ans. s’enrhume assez facilement, mais ces bronchites ne l’em
pêchent pas de continuer sot) travail, il est souvent enroué. Ses
parents vivent et ont nue bonne santé ainsi que ses frères el
sœurs. Le 27 octobre 1863, il se présenta à mot) cabinet.Depuis
un moi* il tousse el il est enroué, des râles sib ila n ts existent dans
toute la hauteur des deux poumons, la d ég lu titio n est doulou
reuse, le pharynx est rouge, les amygdales sont augmentées de
volume, toutes ces parties sont tellement sensibles que je n’es
saye pas l’examen laryngoscopique, il n ’aurait pas été supporté,
la langue est recouverte d’un enduit saburral, il a de la fièvre.
Je prescrivis un vomil if et un gargarism e avec de l’alun. Je1
(1) Leçons cliniques de Graves, tome
ii.
T radu ction du L)r Jaccoud.
ne le revis que le 23 novem bre, la toux est toujours fréquente,
mais les râles sibilants et muqueux ont presque entièrem ent
disparu, le pharynx el les amygdales sont revenus h l’ état
normal el leur sensibilité au toucher ne présente rien d’ in so lite ,
mais l’aphonie est presque com plète, il faut s’ approcher beau
coup du malade et encore on ne saisit pas toujours le sens de
ses paroles La pression sur le cartilage cricoïd e est dou lou
reuse, la déglutition provoque la toux, pas de fièvre.
Examen laryngoscopique. — L ’ épiglotte est rouge, gonflée,
la muqueuse qui recouvre les cartilages aryténoïdes, les rep lis
aryléno-épigloltiques est rouge, œdématiée, les cordes vocales
présentent une teinte rosée, leurs m ouvem ents sont très lim ités,
lents, et il est im possible de les am ener au contact.
Au moyen d'une petite éponge fixée h une baleine recourbée,
je touche l’ entrée du larynx avec une solution de nitrate d ’ar
gent cristallisé (0,50 centigram m es sur 10 gram m es d’ eau).
Gargarisme avec de l ’alun.
25 novembre. — M êm e état, cautérisation légère.
27 novembre. — Même état. Cautérisation avec une solu tion
de 1 gramme nitrate d’argent sur 10 gram m es d ’ eau.
3 décembre. — La toux a dim inué, la dég lu tition est m oins
douloureuse, l’appétit est bon, le som m eil parfaitem ent revenu,
enfin la phonation se fait m ieux.
Examen laryngoscopique. — L ’ épiglotte est à son état n o r
mal, les cordes vocales sont blanches, nacrées. La m uqueuse
des replis et celle qui recouvre les cartilages est encore c o lo
rée el œdématiée, les cordes vocales ne peuvent pas encore
être amenées au contact.
Cautérisation.
7 décembre. — La toux persiste quoique les signes stéth os
copiques aient entièrem ent d is p a ru , le malade est encore
enroué.
Examen laryngoscopique. — L ’ inflam m ation n ’occupe plus
que les orifices des ventricules et la muqueuse qui revêt le
6ommet des aryténoïdes.
Cautérisation.
12 décembre. Toux seulem ent le m a tin , expectoration de
crachats g ris â tre s , gélatiniform es , la voix est parfaitem ent
revenue.
Examen laryngoscopique. — Il existe encore une légère
rougeur au niveau de 1 orifice des ventricules. Cautérisation.
Ce malade n ’a plus été enroué el sa disposition à s'en rh u m er
parait l ’avoir abandonné.
La suite au prochain numéro.
�m
—
Catarrhe du aao lacrym al d r o i t . — D e u x i n j e c t i o n s d e t e i n t u r e d'iode
dans le sac. — G u é riso n . — R é t r é c i s s e m e n t d u c o n d u i t laorymil
in f é r ie u r . — P lus tard , m u c o c è l e . — P o n c t i o n de l a tumeur, —
G uérison rapide de la fistule d u sac q u i s u c c é d é à c e t t e opération,
p a r le doc te ur A L B E R T P E L L I S S I E R , d e S a i n t - R é m y .
Le 26, la pression sur le sac ne fait rien refluer par les points
lacrymaux; une injection d’ eau tiède étant poussée par le point
lacrymal inférieur, quelques gouttes de liq uid e sem blent passer
par la narine correspondante, ce qui prouve bien que le conduit
lacrymal inférieur n’est que rétréci et nullem ent oblitéré.
Le 28, même état.
La dame C ..., âgée de 38 ans, d'une constitution fortement
pléthorique, est affectée depuis douze ans d ’ un larmoiement de
l’œil avec sécrétion d’une matière m uqueuse.
Le 10 mai 1864, nous constatons IV tat suivant :
Lorsqu'on presse la région du sac lacrym al d ro it, un mucus
abondant retlue par les points lacrym aux, une injection d’eau
tiède, poussée par le point lacrymal in fé rie u r, ne passe nulle
ment par la narine correspondante. La même épreuve faite du
côté gauche donne un résultat sem blable, bien que de ce côté
le sac ne soit nullement malade.
Je pratique une injection iodée dans le sac lacrym al droit. Le
lendemain il existe un peu de gonllem ent de cette légion. Eu
comprimant cette d e rn iè re, des m ucosités sortent par les
points lacrymaux.
Le 15, seconde injection iodée dans le sac suivie, comme la
première fois, d’ une réduction m odérée.
Le 20, le sac renferme moins de m u cu s; en injectant de
l’eau tiède par le point lacrymal in férie u r, quelques gouttes
tombent dans la narine correspondante.
Le 2 ju ille t, pas de récidive ; quelques gouttes d ’une in je c
tion d'eau, poussée par le point lacrym al in fé rie u r, sem blent
passer toujours par la narine correspondante.
Le 50, la guérison persiste.
Le 10 septembre, c ’est-à-dire un m ois et dem i plus tard,
M meC... vient d ’A rles me c o n su lie r de nouveau. Depuis huit
jours, il s’est formé une petite tum eur au grand angle de
l’orbite droit ; elle a le volum e d ’un gros pois; elle est dure,
résistante ; la pression ne fait rien re llu e r ni par les p oin ts
lacrymaux ni par la narine. Le point lacrym al in férie u r et le
point lacrymal correspondant adm ettent une canule d ’A n e l,
mais le stylet de ce nom ne peut être enfoncé à plus de deux
millimètres de profondeur ; quelque effort que l ’on lasse, on
n’ arrive pas, avec l ’in strum ent, jusque dans le sac. La tum eur
du grand angle a d o n c tous les caractères d ’un m ucocèle.
Je ponctionne le sac avec un b istou ri à lame étroite ; par la
plaie, il sort du pus d’assez bonne nature; une injection d ’eau
sort en partie par la narine.
Du 20 au 30, la pression exercée sn r le sac fait toujours
sortir des mucosités par les points lacrym aux.
Le 12, il y a un peu de gon llem en t œdémateux avec rougeur
du sac et des paupières; cataplasme ém ollient ; décroissance de
la tuméfaction.
Le 3 juin, l'amélioration était m anifeste; la pression sur le
sac ne faisait rien relluer par les points lacrym aux. Une injec
tion d’eau tiède, poussée par le point lacrym al inférieur, ne
faisait pas refluer les mucosités, le liq uid e passait même en
plus grande quantité par la narine. Tout alla de m ieux en mieux
jusqu'au 20.
Le 18, il existe une petite ouverture au grand aügle de l ’œ il ;
une injection passe dans la narine si elle est pratiquée par celte
ouverture, tandis q u ’une in jection laite par le point lacrym al
inférieur ne rellue nullem ent par l’ ou vertu re (pie le bistouri a
pratiquée. Les jours suivants, la tum éfaction et la fistule p er
sistent.
Ce jour-là, il y avait une légère tum éfaction de la région du
sac, la pression ne faisait rien passer par les points lacrymaux.
Le 22, la pression sur le sac faisait s o rtir quelques mucosités
par le point lacrymal inférieur, le liquide refluait par l'orifice,
une portion du conduit lacrymal correspondant paraissait nota
blement rétrécie.
Le 20, la tuméfaction dim inue.
Le 23, une injection d’ eau poussée par le point lacrym al in
férieur reflue en petite partie par la n arine, pas une goutte de
liquide ne passe par la fistule qui est devenue très petite.
Le 26, la fistule est cicatrisée ; à sa place reste un petit
noyau d’ induration qui disparait les jours suivants.
�-
19G —
—
197 —
Quelques m o ts s u r la m é d i c a t i o n t o p i q u e
ld l a r y n g i t e c h r o n i q u e
NOUVELLES E T V A R IÉ T É S .
étu d ié e
à l'a id e
dans
le
traitem en t
du lary n g o sco p e,
de
par
le D o c t e u r E . N I C O L A S (2“8 article)»
La rentrée de l’Ecole de Médecine et de la Faculté des Sciences
de Marseille est fixée au 19 novembre. Le discours d’usage sera
prononcé par un professeur de la Faculté des Sciences.
Ovaiiolomie. — Une opération d’ovariotomie a été pratiquera
Marseille par M. le docteur Berrut. L ’état de la malade est aujour
d'hui assez, satisfaisant pour espérer un succès.
Caisse des pensions viagères a'assis tance. — Parmi les dona
teurs de cette caisse, dont les débuts ont été si prospères, nous
remarquons M. le docteur Seux, président de la Société des Bouchesdu-Rhône, qui a fait un don de 200 francs.
Nécrologie. — Le corps médical de Marseille a fait une perte
regrettable dans la personne de M. le docteur P .-M . Roux, chevalier
de la Légion-d'Honueur, président perpétuel et fondateur du Comité
Médical des Bouches-du-Rhône, etc., etc. M. Roux a pris une part
plus ou moins active à divers congrès et a été un fervent apôtre du
principe de l'association entre médecins.
— L'Association Générale a consacré cette année une somme de
18,903 francs pour secourir ses infortunes confraternelles, pour venir
en aide à ceux de ses sociétaires atteints par le malheur, aux veuves
des associés et à leurs enfants.
Cettesomme se décompose ainsi:
Par la caisse générale aux sociétés locales...................
1,500
Parla société centrale...................................................
3,700
Par les sociétés locales...................................................
13,703
Plusieurs de ces secours s’élèvent à des sommes importantes.
L ’Association a adopté trois pupilles; trois (ils d’associés, décédés
sans ressources, seront élevés aux frais de l ’OEuvre.
Les dons et les legs faits à l ’Association dans tous les éléments de
l ’Œuvre, pendant l’exercice dernier, représentent une somme de
16,746 fr. 30 cent.
Ces chiffres portent en eux-mêmes leur signification.
Le Comité de Rédaction
MkueUle. — liAfrimerie VUL, roc Tblars, 8.
La malade, qui fait l’ objet de l'observation suivante n ’a pas
été traitée exclusivem ent par des remèdes locaux, cependant je
crois pouvoir en parler ici h cause de son im portance.
Observation V. — tylle C ###, âgée de 27 ans, employée
dans un magasin, vint me consulter le 4 mars 1864. La m ère
se porte bien, le père âgé de 75 ans, est en convalescence
d’une pleurésie double avec épanchem ent, les frères et sœurs
jouissent d ’une bonne santé. E lle tousse de temps en tem ps;
depuis plusieurs années, elle est sujette à un enrouem ent q u i
dure quelques jours, qui disparaît pour re ve n ir encore quelque
temps après, il persiste actuellem ent depuis p lusieurs sem aines.
La malade ne parle q u ’à voix basse et avec fatigue. L ’a u scu l
tation et la percussion ne révèlent aucun sym ptôm e du côté de
la poitrine, si ce n ’est une légère dim in u tion du bru it respira
toire au sommet du poumon gauche ; dyspnée lé g è re , les fo n c
tions digestives sont intactes ; la m enstruation est régulière.
Examen laryngoscopique. — L ’ épiglotte est rouge, la corde
vocale gauche est rosée et la partie qui répond au cartilage
aryténoïde de ce côté est le siège d ’un gonllem ent inflam m atoire.
En faisant tendre les cordes vocales, celle du côté droit s’ avance
vers la ligne médiane dans toute son étendue, tandis que ce lle
du côté gauche ne vient pas au devant d'elle d ’ une qu an tité
égale, les tissus qui environnent le cartilage aryténoïde étant
engorgés.
Fumigations ém o llie nte s, à prendre tous les m a lin s , une
cuillerée à bouche d ’ une solution d ïo d u re de potassium (4 gr.
sur 250 gr. d’eau), une p ilu le d e 0 ,0 2 centig. d ’extrait thébaique
tous les soirs, repos de l ’organe.
8 mars. — Même état, même traitem ent et de plus insuffla
tion sur les parties malades d'un mélange de poudre de gom m e
et de calomel par parties égales.
11 mars. — Même état, même traitem ent.
15 mars. — Même état, même traitem ent.
18
mars. — A m élioratio n légère, m oins de toux, l'e n ro u e
ment est moins marqué, la parole est plus distincte, som m eil
bon, appétit normal.
12
�198 —
— 199
Examen laryngoscopique. — Les tissus qui environnent les
cartilages aryténoïdes sont moins engorgés, la corde vocale
gauche est toujours rosée, mais elle se rapproche mieux delà
droite; l’épiglotte est toujours rouge.
29 avril. — La toux a dim inué, la d ég lu titio n est m oins pé
nible, le sommeil et l ’appétit sont bons. En rouem ent, pas de
fièvre, sueurs le matin. Jusqu'à présent je n ’ai pas noté d ’am ai
grissement sensible.
Je supprime l ’ usage de l’extrait thébaïque et des fumigations
émollientes, je prescris deux cuillerées h bouche de la solution
d iodure de potassium et je continue les insufflations de calomel.
Examen laryngoscopique. — L ’ état inflam m atoire du laryn x
en général a dim inué, l’ ulcération est dans le même état, l’ é p i
glotte n ’est pas ulcérée.
22 mars.— Même état, mémo prescription.
25 mars.—
id.
id.
29 mars.—
id.
id.
1er avril.— La toux a presque cessé, l ’enrouem ent est toujours
assez prononcé, l’état général est bon.
Examen laryngoscopique. — Le gonflem ent inflammatoire
qui entourait le cartilage aryténoïde gauche ainsi que l ’épiglotte
a disparu, mais la corde vocale gauche es! toujours rosée, ses
vibrations sont lentes, difficiles. Mêm e prescription.
5 avril. — Le mieux continue. Mêm e traitem ent.
8 avril. — Même état, même traitem ent.
19
avril. — La toux a augmenté, l ’enrouem ent est très pro
noncé, la déglutition des liquides est douloureuse et excite la
toux : toutefois le sommeil est conservé, ainsi que l’appétit;
pas de lièvre.
Examen laryngoscopique. — L 'é p ig lo tte est rouge foncé, la
corde vocale gauche présente, vers sa partie postérieure une
teinte grisâtre; dans ce point, elle a entièrem ent perdu son
éclat, elle est terne, elle paraît lom enteuse. La muqueuse qui
recouvre les cartilages aryténoïdes est fortem ent injectee et
légèrement œdématiée. Même traitem ent
22 avril. — Les symptômes notés le 19 persistent.
Examen laryngoscopique. — Je d istin g u e nettement l'ulcé
ration qui siège sur la corde vocale gauche et la muqueuse qui
recouvre le cartilage aryténoïde du même cô té ; son fond est
gri-âtre, ses bords sont irréguliers et entourés par un gonfle
ment sous-muqueux. Sur les bords de l’ épiglotte il y a plusieurs
points grisâtres.
Cautérisation de l’ ulcération avec une solu tion au nitrate
d’argent de 1 gr. sur 10 gr. d'eau. Je con tin u e !’ iodure de po
tassium et je prescris l'h uile de foie de m orue et la décoction de
lichen.
26 avril. — Même état, meme traitem ent.
Cautérisation de l'ulcération ; l ’ huile de foie de m orue n ’étant
pas tolérée, j ’ en cesse l’ usage. Deux cu illerées par jour de la
solution d’ iodure de potassium . Le soir, une p ilu le de 0 ,0 2
d’ extrait thébaïque et 0 ,0 5 sous-acétate de plom b.
Jusqu’au m ilieu du m ois de ju in , l ’ état de la malade fu t
stationnaire et la même m édication fut continuée dans son
ensemble.
2I juin. — La position de la malade s ’est considérablem ent
aggravée. La toux est fréquente, le som rpeil est entrecoupé,
l’appétit nul, la déglutition très douloureuse, l ’expectoration est
impossible, dyspnée; la respiration est obscure aux som m ets
des poumons, le pouls est fréquent, am aigrissem ent notable.
Examen laryngoscopique. — L ’ épiglotte est rouge, mais je
ne constate pas d ’ulcération ; la corde vocale inférieu re droite
qui ju sq u ’à présent n ’avait pas été atte in te , présente deux
petites ulcérations qui donnent à son bord lib re un aspect
dentelé ; la corde vocale inférieu re gauche présente tou jou rs
son ulcération, et la région aryténoïdienne est œ dém atiée, très
rouge; la glotte ne peut être fermée.
Deux séances par jo u r de dix m inutes chacune d’ inhalation
d’eau pulvérisée contenant 0 ,5 0 eentigr. de tannin sur 100 gr.
d’eau; quatre cuillerées à cale par jo u r de sirop de m orphine ;
soupes
24 juin. — Même état, même traitem ent.
28 juin. — A m élioratio n dans l ’étal général, et l’ état con
gestif du larynx a dim inué.
Cette amélioration persista et le même traitem ent fut con
tinué.
6 juillet. — La toux est fréquente, sèche, dyspnée, anxiété;
la face est congestionnée, les lèvres sont bleuâtres, l ’œil est
fixe, pouls très rapide, petit, insom nie com plète, aphonie; la
déglutition est presque im p ossib le ; la respiration est o b scu re ,
des râles muqueux sont entendus dans toute l ’ étendue de la
poitrine.
�— 200 —
201
Examen laryngosçopique. — Très d ifficile , cependant je
constatai les lésions suivantes : l ’ épiglotte est œdématiée et
les replis aryiéiio-épiglottiques le sont tellem ent que je ne puis
distinguer les cordes vocales.
Application de deux petits vésicatoires sur les côtés du larynx
et inhalation, toutes les trois heures, pendant dix minutes.de
J’eau de guimauve chauffée et pulvérisée.
Jusqu’au 11 juillet, la position de la malade ne changea pas
d’une manière sensible et elle ne put avaler que quelques
gouttes de boisson.
1 1 juillet. — La toux est moins vive, la malade a dormi
quelques heures pendant la n u it; la d é g lu titio n , quoique très
pénible et provoquant des quintes de toux, est cependant possi
ble puisque pendant la nuit la malade a avalé un peu de bouillon
et du lait; l’expectoration est d ifficile, mais elle se fait.
Examen laryngosçopique. — L 'é p ig lo tte n'est plus œdéma
tiée, la corde vocale droite ulcérée est en voie de réparation,
la région arylénoïdienne qui était très gonllée a diminué de
volume, il y a même une dépression au niveau du cartilage
aryténoïde gauche, tout le côté gauche du larynx est recouvert
de pus. Je pensai qu’ un fragment du cartilage aryténoïde gauche
nécrosé avait été éliminé. Même prescription : bouillons, soupe,
lait.
12 juillet. — La fièvre a cédé, la malade a dorm i plusieurs
heures, presque plus de dyspnée, la toux est m oins frequente,
la déglutition des liquides est moins pénible et l ’accès de toux
qu’elle provoque est d'une durée m oindre. M êm e prescription.
15 juillet. — Même état
14 juillet. — L ’amélioration se m aintient.
15 juillet. — Pas de fièvre, la toux n ’est guère excitée que
par la déglutition, presque pas de suffocation, sommeil bon,
calme, appétit, légère matité et obscurité de la respiration aux
sommets des poumons.
Examen laryngosçopique. — Le larynx est parfaitement dé
barrassé du pus et des mucosités et l ’ examen est complet,
l ’épiglotte n ’est plus œdématiée, elle est un peu plus rouge
que dans Létal normal ; les ulcérations de la corde vocale droite
sont cicatrisées, les replis aryténo-épiglotliques ne sont plus
œdématiés; au niveau du cartilage aryténoïde gauche, il y a
une dépression bieu manifeste, la partie postérieure de la corde
vocale gauche est presque entièrem ent détruite.
«
—
Le 16 et le 17, je ne rem arquai rien de p articu lie r a noter,
l’étal de la malade me sembla identique à celui des jo u rs
précédents.
18 juillet. — La malade est très abattue, fièvre, dyspnée,
mais la déglutition se fait assez bien et la pression du larynx ne
développe pas de d o u le u r; matité sur le tiers supérieur du
poumon gauche et bruit de frottem ent très fin occupant la
même étendue.
Prescription : large vésicatoire sur le point malade, potion
gommeuse rie 150 g r . ,0 ,2 0 centigr. kerm ès et 0 ,2 0 ce n lig r.
extrait de digitale; bouillons.
19 juillet. — La fièvre est toujours forte, anxiété, suffoca
tion, auscultation incom plète à cause de la douleur provoquée
par le vésicatoire. Même prescription.
20 ju illet. — Pouls très rapide, dépressible, dyspnée, langue
très sèche, fuligineuse, le bruit d e frottem ent persiste, souffle
profond. Même prescription. Sinapism es aux extrém ités, eau
vineuse.
Le 21 au m atin, au m om ent de ma visite , la malade était
expirante.
Celte malade avait-elle des tubercules p u lm o naires? E lle a
succombé h une pleurésie du sommet du poum on gauche, alors
que l’ état du larynx com m ençait a s'am éliorer. La respiration a
été longtemps obscure aux som m ets des poum ons, mais il ne
pouvait en être autrement avec les phénom ènes inflam m atoires
graves qui se passaient dans le larynx et qui en d im in u aie nt
considérablement les diamètres. La pleurésie qui a déterm iné la
mort de cette personne présente bien les caractères de la pleu
résie tuberculeuse, m ais je cro is que si des tubercules avaient
existé dans les poumons, il y aurait eu certainem ent des u lcé
rations tuberculeuses dans le larynx et elles auraient siégé à la
face postérieure de l’ épiglotte O r, l’examen le plus m inu tieu x
et souvent répété ne m ’a jam ais m ontré d'u lcération s h c e lle
partie de l ’épiglotte, a aucun m om ent de la m aladie, et si les
phénomènes qui se sont passés dans le cartilage aryténoïde
gauche avaient été de nature tuberculeuse, la diathèse se serait
montrée dans d ’autres parties du larynx Cependant, je crois
que quelques dépôts de m atière plastique ont pu se form er aux
sommets des poumons, ce qui, s ’ajoutant à l’ état de faiblesse
dans lequel celte fille était tombé, a donné à la pleurésie de
la fin des caractères particuliers. Il est fâcheux que I autopsie
n ait pu être faite, elle aurait dissipé tous les doutes.
�_ 202 __
IL
Avant d'entreprendre l’étude de l ’application des médica
ments, je crois nécessaire de résumer et de discuter quelques
points de laryngoscopie dont la solution rendra le manuel
opératoire plus facile. Maintenant ce n est plus qu'avec l’aide
du laryngoscope que l’on pratiquera les insufflations ou les
cautérisations du larynx et je dirai avec Czermak (1) qui
écrit après avoir cité plusieurs cas de cautérisations faites sous le
a laryngoscope : o II De peut donc plus exister le moindre doute
« sur la possibilité d’opérer par ce procédé. Il ne sera même
« plus permis à l'avenir d’exécuter celte opération autrement
« qu’à l’aide du laryngoscope parce que cette méthode seule,
« permet de diriger la main et d’arriver sûrement dans le
« larynx en des points déterminés, tandis que le plus souvent
« jusqu’alors ou a déprimé Lépiglotte et on en a cautérisé la
« surface antérieure et l'œsophage, en se liant au hasard pour
« introduire le médicament dans le larynx. »
Je n’aborderai ici que les questions qui se lient intimemenlà
mon sujet: l’éclairage du laryngoscope, la position du malade
et du médecin.
10 Eclairage du laryngoscope.
A. Lumière solaire.
L ’ éclairage par la lumière du soleil serait le meilleur, à cause
de sa blancheur et de sa pureté, mais ce procédé est d’une
application dillicile. La rotation de la terre changeant à chaque
instant la direction des rayons lumineux, le médecin est obligé
de modifier à tout moment la position du malade. Ensuite la
présence de nuages, l’exposition des appartements sont tout
autant de difficultés.
On doit par conséquent rejeter ce mode d ’éclairage comme
méthode générale.
B. Lumière artificielle.
1° Réflecteurs.
L ’éclairage du laryngoscope par les m iroirs réllectetirs con
caves, que l’on emploie l’ophthulmoscope de Ruete fixé a un
pied mobile suivant la méthode de Turck, ou bien d’après celle
de Czermack qui le lient au moyen d’un manche entre les dents
molaires ; que le réflecteur soit fixé au bandeau frontal de
(1) Du laryngoscope, par le docteur Cjermak. 1860.
Kramer ou bien qu'il soit adapté par une genouillère sur une
chasse de lunette (Semeleder), ce mode d’ éclairage , dis-je ,
présente des inconvénients pratiques considérables.
Si le réllecteur est percé à son centre d’un trou et que la
vision doive s’effectuer par ce point, l’observateur ne peut se
servir que d’ un œil, ce qui est très pénible poureertaines person
nes qui ne savent bien voir qu’avec les deux yeux, par conséquent
beaucoup de détails leur échappent. Quand le réllecteur est fixé
comme Ka employé M .Turck, c’est là son principal défaut, mais
si le réllecteur est mobile comme dans la méthode de M. Czer
mack, à cet inconvénient, vision par un seul œil, se joignent
tous ceux des réflecteurs mobiles, qui permettent la vision au
moyen des deux yeux et qui sont fixés sur la tète même de
l’observateur. D'abord ce n’est qu’après des tâtonnements assez
longs que I on arrive à éclairer le fond de la bouche ; l’éclairage
obtenu, l'observateur est obligé de rester immobile et, quelle
que soit son attention, si l’examen se prolonge, les mouvements
desatètese transmettent au réflecteur. Dans l’application des
remèdes ou bien dans l ’exécution d’une operation, il est de
toute nécessité que le médecin puisse modifier sa position soit
pour voir sous une direction de lumière différente, soit pour
éviter la fatigue qui enlèverait la précision nécessaire à ses
mouvements. Ensuite plusieurs personnes ne peuvent voir
ensemble l ’image laryngienne, ce qui est très fâcheux soit pour
un concours efficace des aides dans une opération, soit pour
l’instruction des assistants.
2° Lentilles.
C’est à M. le Dr Moura que revient l'honneur d’avoir eu le
premier l’idée d'éclairer le laryngoscope au moyen d’une len
tille (1).
Une lentille, soit bi-eonvexe. soit piano-convexe, est placée
au-devant de la flamme d’ une lampe, en arrière se trouve un
réllecteur. Telle est l’ idée sommaire des instruments qui ont
été construits d’après les propriétés optiques des lentilles, sur
les indications de M. Moura d’abord, et ensuite dt M. Krishaber.
L’éclairage du laryngoscope, par les lentilles, présente les
avantages suivants :
1° De permettre la vision binoculaire ;
(1 ) Cours complet de Laryngoscopie , I8 6 I, et Traité pratique de Larynyoscopie et de Rhinoscopie, 1864.
�-
204
—
—
2° D’avoir une source de lumière lîxe, immobile;
5*De laisser à l'observateur la liberté de tousses mouvements;
4” De rendre l ’examen laryngoscopique possible à plusieurs
observateurs en même temps.
Après avoir employé l’éclairage par les réflecteurs, je ne me
sers presque plus aujourd’hui que de l’éclairage lenticulaire,
5° Position du médecin et du malade.
Le malade est assis commodément devant une petite table
sur laquelle est placée une lampe garnie du système lenticu
laire soit de M. Moura soit de M. K rishaber; le médecin est
placé en face du malade et en arrière de la lampe, il regarde sur
un des côtés de celle-ci en rapprochant ses rayons visuels autant
que possible de la direction des rayons fournis par la source de
lumière. Le laryngoscope est placé an devant de la luette du
malade d'après les principes et avec les précautions voulues.
Si le malade fait quelque mouvement brusque, il ne peut pas
renverser la lampe, attendu qu'elle est protégée par les bras de
l ’observateur qui l’entourent. La main droite qui lient le laryn
goscope la protège d’un côté, de l'autre elle l ’ est par la main
gauche qui maintient la langue hors de la bouche, si on exa
mine le malade au point de vue du diagnostic, ou bien qui
introduit les instruments dans la gorge si l ’on pratique une
opération. Dans ce dernier cas la langue est maintenue audeliors de la bouche soit par le malade, soit par un aide.
III.
Médicaments pulvérulents.
—
Insufflations.
Les médicaments, sous forme pulvérulente furent d’abord
employés dans les maladies du larynx par Arélée ; M. Bretonneau
a ensuite préconisé leur emploi et enfin MM.Trousseau et Belloc
ont démontré l’efficacité de ce mode de traitement. J’ai employé
les insufflations d’alun, de calomel et de sucre. C’est surtout
dans les laryngites érythémateuses, alors que la rougeur et le
gonflement occupaient presque toutes les parties du larynx que
j ’ai noté les bons effets des insufflations faites deux ou trois fois
par semaine, avec un mélange par parties égales de calomelet
de poudre de gomme ou d’alun et de poudre de gomme. La
poudre, en s’introduisant dans le larynx, provoque quelques
secousses de toux que le malade doit tâcher de réprimer. Si
205
—
l’insulllation a été faite un peu trop vivement et que de l’air
comprimé par l’insufflateur ait pénétré avec la poudre, le malade
est pris de suffocation, mais elle ne dure que quelques instants.
Plusieurs instruments ont été imaginés pour déposer des
poudres dans le larynx ; celui qui m ’a paru le plus commode
pour opérer sous le laryngoscope,c’est l’insufflalcur de Morand.
Il se compose d ’une canule de 12 centimètres vissée à une
montHre unie à une petite poire en caoutchouc dans laquelle on
place la poudre à insuffler et que l ’on chasse par une pression
légère. De chaque côté de la mouture, se trouvent deux dem ianneaux en métal qui servent â tenir l’instrument.
En opérant sous le laryngoscope, on distingue parfaitement
les points qui ont été couverts par la poudre insufflée et l’on
peut ainsi déposer le médicament sur les parties malades avec
autant de précision que sur une plaie qui siégerait à la peau.
Médicaments liquides.
—
Cautérisations.
On se sert généralement des solutions de nitrate d’ argent, de
sulfate de cuivre, de nitrate acide de mercure. M. de Mussy a
obtenu de bons résultats avec la teinture d’iode.
Je me suis surtout servi de solutions de sulfate de cuivre et
de nitrate d ’argent : J emploie pour commencer une solution
faible, 1 gramme de sel sur 10 grammes d’eau ; puis 2 grammes
sur 10 grammes, enfin une solution saturée.
Lorsque la solution caustique touche toutes les parties du
larynx, que l'instrum ent qui la porte la dépose â l ’entrée de la
glotte, le malade est pris de quintes de toux, de spasmes violents,
les mouvements respiratoires sont suspendus, la face est tu r
gescente, des efforts de vomissements se manifestent. Ces
phénomènes durent très peu de temps, une minute ou deux
tout au plus. Mais si la cautérisation est faite sur un point lim ité,
l’opération n’éveille aucune douleur, et c’est à peine si le
malade s’ en doute. Les malades, après la cautérisation, doivent
garder le silence et éviter l’impression de l ’air. Cette précaution
est très importante.
Pour porter la solution caustique sur le larynx je me suis
servi de l’instrument de M. Trousseau. Une baleine recour
bée â angle de 80 degrés terminée par une petite éponge
solidement fixée. Mais pour la cautérisation sur un point très
�—
506
—
limité comme une ulcération, je préfère employer un pinceau
en blaireau, comme ceux qui servent pour l'aquarelle, fixé à
une tige en fer recourbée à son extrémité suivant une ouverture
d’angle convenable.
Les états pathologiques du larynx qui sont avantageusement
modifiés par les liquides caustiques, sont les ulcérations, quelle
que soit leur nature, l'œdème sous-muqueux que les inflamma
tions incomplètement guéries laissent à leur suite. Enfin l’état
sub-inllammatoire, limité à un point du larynx, comme les ven
tricules, l’espace inter-arylénoïdien.
Liquides pulvérisés.
— La question de la pulvérisation des
liquides est à l’étude, les avis sont partagés , toutefois les
résultats déjà obtenus permettent de bien augurer de cette
méthode de traitement. Pour moi, chaque fois que j ’ai employé
les liquides poudroyés. j ’ai été préoccupé par trois choses:
La température du liquide pulvérisé au moment de sa péné
tration dans le larynx et les bronches ; — 5° Le temps que doit
durer l'inhalation ; — La dose des substances médicamenteuses
mises en suspension dans l’eau.
i•
Il résulte des expérieucesde MM. Gavarret, Giraud-Teulonet
Poggiale que l ’eau pulvérisée prend s e n s ib le m e n t la température
du milieu ambiant (1). Si l'on place dans l 'appareil de M. Mathieu
de l’eau à 40, à 50 et à 60 degrés, on constate que l’eau est
toujours, à 2 degrés centigrades près, à la même température
que celle du milieu ambiant. Si l’on pulvérise de l’eau froides
degrés par exemple, on observe aussi le même résultat. Il
est important, par conséquent, de surveiller la température de
l’appartement, dans lequel se fait la pulvérisation et il est évident
que la pulvérisation, faite dans une atmosphère froide, aurait
des effets fâcheux.
A
Quanta la durée de l’inhalation des liquides pulvérisés, je
pense quelle doit être courte et fréquemment répétée, surtout
lorsqu’ils contiennent des agents médicamenteux, dont la dose
doit être faible.
L’action topique irritante doit être alors à redouter.
FIN.
(t) Mémoire sur la Pénétration des Liquides Pulvérisés dans les voies
respiratoires, par M. le D' Demarquay, 1862.
BIBLIO G R APH IE.
T R A IT É É L É M E N T A IR E D ’H IS T O L O G IE ,
Par le docteur F O R T , ancien in tern e des hôpitaux, m édecin
consultant aux Eaux de C auterets. — I vol. in-8». P rix : 5 fr. 50,
Aujourd’hui que l'histologie a pris droit de cité, non-seulemeut dans la science, mais encore dans l'enseignement officiel,
nous croyons utile de signaler à nos lecteurs le Traité que vieni
défaire paraître M. Fort. Tout le monde connaît les vo lu m i
neux Traités de LIenle et de K o llike r, mais personne n’avait le
courage d’en aborder la lecture.
Celui de M. Fort, dégagé de toute discussion d’Ecole, expose
d’une manière claire et précise l’ état actuel de la science. Il
réunit en un volume ordinaire (500 pages) les idées et les
leçons, encore éparses, de M. Robin, notre savant micrographe,
le père et le propagateur de l’histologie en France. L ’auteur a
le soin de nous le dire dans sa préface, son livre est destiné à
résumer, le plus brièvement possible, les opinions de son maî
tre, puisées dans ses monographies, dans ses leçons particulières
et (>ans le cours qu’ il a fait en 1863 à la Faculté de Médecine
de Paris.
La première partie de l ’ouvrage est consacrée a l ’étude des
éléments solides et liquides, figurés et non figurés qui compo
sent les tissus, à leur développement et leurs transformations.
Cette partie est des jilus intéressantes. Elle initie tout d’ abord
à la connaissance exacte et complète du vocabulaire de l ’histo
logie; la cellule, la fibre, la matière amorphe, etc.,sont décrites
avec la plus grande précision. A propos des transformations de
ces
éléments anatomiques, l ’auteur aborde la question du cancer
et de la cellule cancéreuse. Pour lui, le cancer n’ est qu’un e
hypcrgénèse (1) d’un élément normal. Le cancer n’a pas de
•
(|V) Ihjpergénôse, excès dans lu production des éléments anatomiques.
�—
208
cellules spéciales, n’est pas constitué par un tissu
—
hétéromorphe,
et ces prétendus cellules et noyaux cancéreux ne sont que des
cellules et noyaux des éléments anatomiques accessoires au
tissu au sein duquel on les observe et dont I hypergénèse est
due à une perturbation de la nutrition, inconnue nuis réelle.
« Les mots cancer et cellule cancéreuse doivent être b jamais
« bannis du langage médical et ne doivent servir qu’au point
« de vue de l’histoire. » Qu’en diront les partisans de la spéci
ficité? Et cependant M. Robinet ceux-ci allument de par le
microscope.
Nous ne voolons pas taire ici le procès au microscope ; nous
savons tous les services qu'il a rendus et qu’il peut encore ren
dre, mais n’esl-ce pas aller un peu loin que de le prendre tou
jours comme un infaillible critérium S’il nous en souvient bien,
dans un débat célèbre à l’Académie sur les tumeurs, le micros
cope n'eut pas tous les honneurs de l ’in fa illib ilité . Que M. Fort
nous permette cette petite critique, mais il nous semble qu’il a
un peu vile enterré la spécificité cancéreuse que tant de preuves
cliniques paraissent établir. Sans doute le microscope est un
auxiliaire des plus utiles, mais il ne saurait suppléer absolument
à l’expérience des temps, et nous croyons bon de se garder de
toute exagération d’enthousiasme. A insi, autrefois on voyait la
cellule cancéreuse partout ; aujourd’hui, il paraît qu’elle n’existe
même pas. Ne pourrions-nous pas en dire autant de l ’ophlalmoscope ; il y a quelques années b peine, le glaucome était une
affection des plus rares; depuis l’ophtalmoscope, on trouve le
glaucome partout, et l'excavation de la pupille ! Aussi que d’iris
coupés et déchirés ! Certes la découverte de M. de Grœfe res
tera comme une des belles conquêtes de la chirurgie oculaire,
mais comme on en abuse! Autrefois, autant de slrabiques,
autant de muscles de l’œil coupés, puis le calme est survenu et
les strabiques dorment en paix. A ujourd’hui, c’est le tour de
l’iris, on le coupe pour le glaucome, on le coupe pour l ’amblyopie, on le coupe même pour la cataracte, et cela dans le but
209
—
singulier on tout au moins nouveau de
prévenir l'inflammation
de cette membrane, dont la moindre atteinte était considérée
comme une maladresse ou une complication des plus graves.
Mais revenons b notre sujet et attendons que le microscope ou
toute autre preuve nous ait enfin éclairés sur Ihétérom orphie
ou l’hypergénèse de la cellule cancéreuse.
Après cette première section, l’auteur étudie les liquides de
l’organisme, au point de vue anatomique seulement, le sang, le
chyle et lymphe, et ensuite il passe b l'étude des tissus. Cette
partie est traitée avec le plus grand soin et la plus grande mé
thode. Les tissus osseux, fibreux, musculaires, etc., forment
autant de chapitres intéressants et nous pouvons dire que grâce
b la clarté d ’exposition de l’auteur, rien n’ est facile comme de
se former une idée nette de leur structure. Les épithéliums b
noyaux et b calculs, les parenchymes et enfin le système tégumentaire cutané et muqueux forment le complément de l ’ou
vrage.
Nous ne saurions trop louer l’auteur de l ’idée heureuse qu’il
a eue de faire précéder l ’étude histologique de chaque organe
d’une élude d'anatomie descriptive qui en rappelle les princi
pales dispositions, et le plus souvent nous y trouvons également
l’explication des altérations pathologiques principales. Ainsi,
pour le foie, M. Fort redresse celte erreur grossière qui faisait
consister la cirrhose en une hypertrophie de la substance jaune
aux dépens de la substance rouge atrophiée, alors que ces deux
substances n’existent même pas.
L’ouvrage de M. Fort est donc aussi complet que posssible.
La lecture en est facile, attrayante même; ce traité, désormais
indispensable aux étudiants en médecine pour la préparation de
leurs examens, sera également utile aux médecins en leur évi
tant des recherches toujours longues et pénibles, et nous som
mes persuadé qu’il contribuera beaucoup a vulgariser l ’étude
de l’histologie.
l)r B roq uier .
�NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
Révision des lois gui régissent ('exercice de la médecine. Dans sa séance du 8 décembre, la commission administrative de
l'Association médicale des Bouches-du-Rhône, répondant à l’appel
adressé à toutes les Sociétés locales par le Conseil Général de l’Asso
ciation Générale, a chargé M. le president et M. le secrétaire de lui
faire un rapport sur les points à signaler plus particulièrement à
l’attention des législateurs, relativement à la révision des lois qui
régissent l’exercice de la médecine.
Le rapport approuve par la commission administrative sera ensuite
soumis a la discussion et au vote d'une assemblée générale qui sera
spécialement convoquée à cet effet, \er$ la lin du mois de janvier.
Admissions. — Dans la même séance ont été admis à l unanimité
les membres nouveaux dont les noms suivent :
MM. Clot-Bey. commandeur de la Légion-d'Honneur, associé de
l'Académie Impériale de médecine, etc., etc. ;B oze; Chevalier;
Bonnifay; de Ruelle, docteurs en médecine à Marseille; Beisson.à
Arènei Gastal, à Cassis: D Audibert-Caille, à Aubagne.
— La rentrée de la Faculté des Sciences et de 1 Ecole de Médecine
a eu lieu le jeudi 24 novembre dernier, sous la présidence de M. le
recteur de l’Académie. Le discours d’usage a été prononcé par M.
Lespès, professeur de géologie.
Après la réponse de M. le recteur et le compte-rendu des travaux
de la Faculté des Sciences par son doyen, M. Morren. M. Coste, di
recteur de l'Ecole de Médecine, a pris la parole.
11 a fait ressortir dans son rapport l'importance de notre Ecole qui.
par son enseignement et le nombre de ses élèves, se place au premier
rang parmi les établissements de même ordre. Ainsi, dans le courant
de l'année scolaire 1863-64, il a été pris 312 inscriptions qui se
subdivisent ainsi : 128 pour le doctorat. 72 pour le grade d’officier
de santé et 112 pour la pharmacie. M. le directeur a annoncé une
heureux nouvelle, la création d'une clinique d'accouchement, enlin
obtenue, grâce à ses efforts et au concours intelligent de l’adminis
tration (les hospices. Cette nouvelle clinique complétera l’enseigne
ment de 1 Ecole et permettra aux élèves de s'exercer de bonne heure
à la pratique des accouchements ^ dont l’abord est entouré de tant de
difficultés, meme dans les facultés.
Après la lecture de ce compte-rendu, qui a été vivement applaudi,
M. le directeur a procédé à lappel des lauréals, dans 1 ordre suivant:
1" Année — i" Prix : M. Poucel. — 2* Prix : M. Nicolas.
2° Année. — Le jury d’e xamen n’a point déliv ré de prix pour les
élèves de cette année.
3e Année. — MM. Dubreuil et Monncreau (ex œquo).
Pharmacie. — Point de premier prix. — 2‘ Prix : M Boubée.
Le nombre d inscriptions prises à la rentrée de novembre s’élève
à 103, dont 39 pour le doctorat, 17 pour le grade d’officier de santé
et 49 pour la pharmacie.
Le Comité île Rédaction
TABLE DES MATIÈRES.
Introduction . —
A nos confrères, par le Comité de Rédaction.
Page»,
1
/bsoct'arion médicale des Bouches-du-Rhône. — Assemblée Géné
rale du 24 août 1863............................................................................
4
— Assemblée Générale du 30 août 1864...............................................
135
Les Médecins et les Sociétés
de Secours Mutuels, à propos
du
rapport de S. E. le ministre de l’intérieur, par le Dr Chapplain.
21
La lésion rénale est-elle cause ou effet dans l ’album inurie, par le
docteur A. F a b re ...................................................................................... 28.37
Statuts de la caisse des pensions viagères d’assistance......................
32
Extrait du registre des délibérations de la Commission adminis
trative........................................................................................................
49
Jurisprudence médicale. — Exercice illégal de la médecine. —
Action civile desmédecins. — Préjudice m o ra l...............................
53
— Tout pharmacien qui délivre des médicaments composés, sans
ordonnance du médecin, est passible d ’une
amende de 500 fr.
56
Pleurésie. — Bruit de frottem ent remarquable par son intensité. —
Observations recueillies par J.
Marcorelles, interne, dans
le
service de M. le professeur Seux (hôpital de la Conception). . .
58
De la maladie des Trichines (Trichiniasis). par le Dr Chapplain. . 69.85
Exercice illégal de la médecine par les religieuses. — Lettre
adressée à Monseigneur l ’archevêque d’Aix et sa réponse. . . .
— Suites graves de traitements irra tionn els........................................
63
177
De l ’Association universelle des Médecins et de son importance
nationale, par le docteur A .R ondard, de Salon, membre de l ’As
sociation médicale
des Bouches-du-Hhône. — Com pte-rendu
présenté à la Commission
administrative
dans sa séance men
suelle du 9 mai 1864, par le docteur L. Laurens, secrétaire de
l’Association.............................................................................................
74
Conseils de discipline...................................................................................
80
�Sfo,
1
-
p«g«
Honoraires médicaux..............................................................................
g»
Ghémosis sub-inflammatoire traité avec succès par l ’excision, par
le docteur Sirus-Pirondi....................................................................
9$
Exercice illégal de la médecine. — Intervention civile des méde
cins en raison du préjudice matériel et m oral. — Les lésions
internes produites par l'adm inistration intempestive du remède
Leroy, constituent des blessures par maladresse et imprudence.
— Est considéré comme remède secret, to u t remède non ins
crit au Codex ou autorisé par une décision m in isté rie lle .............
95
— Lettre-circulaire adressée aux pharmaciens et aux sages-femmes
du département.....................................................................................
Dysménorrhée membraneuse,
parledocteur E. B ourgarel...............
113
loi
Rapport fait à la commission administrative des hospices par les
docteurs Coste et Broquier, sur un procédé
d’embaumement
expérimenté par M. Audigier, chimiste..............................................
108
Les étapes de la question du diabète, par le docteur A. Fabre. .
117
Etude sur le développement progressif des associations médicales
et sur l ’application à ces associations des principes économiques
modernes dans le but d’améliorer les ressources du corps
médical, par M. le docteurChapplain................................................
165
Association générale des Médecins de France, cinquième assemblée
générale tenue à Paris les 30 et 31 octobre 1864. — Compte
rendu par M. le docteur Seux.............................................................
181
Quelques mots sur la médication topique dans le traitement de la
laryngite chronique étudiée à l ’aide du laryngoscope, par le
docteur E. Nicolas...................................... ' ..................................... 190.197
Observation de catarrhe du sac lacrymal guéri par les injections
iodées, par le docteur Albert Pélissier, de Saint-Rémy.............
Notice nécrologique sur le docteur Melchior R obert, par S. P. . .
194
16
Traité élémentaire (l’Histologie, par le docteur F o rt, ancien interne
des hôpitaux, médecin consultant aux Eaux de Cauterets; I vol.
in - 8 °; p rix: 5 fr. 50 (Bibliographie). . . . , ................................
Nouvelles et Variétés........................
207
13.32.60.80.98.129.180.196-210
5Ur«olllc. — iLoprlmetie V IA L , rue Thlara, 8
Marseille, le 15 janvier 1865
I°
commence auj<
3SHVK
L'Union médicale de la Provence
sa.
secoude année.
V .
^
Les syropathiesqu’elle a su inspirer ont assur60*d$ e x is te n c e ,v ^ /
Ces sympathi -s ne lui sont pas venues seulemènrdèîlafjpaH
des membres de l’association médicale des Bouches-du-Rhône ;
mais de nombreux abonnés dans notre département et les dé
partements voisins lui ont accordé aussi leur bienveillant con
cours.
C’est un devoir pour le comité de rédaction d’adresser à tous
scs bien vifs remerciments.
Mais la bienveillance reçue crée aussi des obligations; le
comité de rédaction les a comprises et il ne vent pas s’y sous
traire.
Il espère accroître cette année l ’importance de l'œuvre a
laquelle il s’est voué.
Et cependant, il lui est permis de réduire son prix d’abonnement qui ne sera plus que de 4 francs par an, au lieu de six.
L
restera un journal a la fois
scientifique et professionnel.
Elle enregistrera les faits intéressants de la pratique médicale
qui lui seront communiqués.
Elle continuera à s’occuper aussi avec zèle, des intérêts ma
tériels et moraux de la profession, intérêts généraux, intérêts
locaux.
L’année qui vient de s’ouvrir sera probablement marquée par
la révision de la législation médicale.
Nous apporterons aussi notre pierre h l ’édifice qui se pré
pare.
Nous recevrons avec empressement les communications qui
nous seront adressées sur celte importante matière dont nous
aurons plus d’une fois h entretenir no« lecteurs.
Fidèle h la pensée qui l ’a créée et au nom qu’elle porte,
notre publication continuera il exciter le zèle en laveur du
bienfaisantprincipede l’association entre les médecins. Pendant
l’année dernière, le nombre des associés a presque doublé dans
les Bouches-du-Rhône ; notre modeste feuille peut revendi
quer à bon droit une part de ce résultat.
En dépit de quelques esprits inquiets et prévenus, l ’Associa
tion générale des médecins de Fiance est aujourd’hui d é finiti
vement fondée : elle sera dans l’avenir le meilleur complément
ouïe meilleur correctif de la législation nouvelle ; elle restera
toujours le palladium de la profession médicale.
’Union médicale de la Provence
Le Comité de Rédaction.
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https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/2/185/TP-40029_Union-medicale-Provence_1865.pdf
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�212 —
1
gj
Chémosis sub-inflammatoire traité avec succès par l’excision, par
le docteur Sirus-Pirondi..............................................................
^
Exercice illégal de la médecine. — intervention civile des méde
cins en raison du préjudice matériel et m oral. — Les lésions
internes produites par l ’administration intempestive du remède
Leroy, constituent des blessures par maladresse et imprudence.
— Est considéré comme remède secret, tout remède non ins
crit au Codex ou autorisé par une décision m in isté rie lle ............
95
— Lettre-circulaire adressée aux pharmaciens et aux sages-femmes
du département.............................................................................
Dysménorrhée membraneuse,
parledocteur E . B o urga re l.............
113
loi
Rapport fait à la commission administrative des hospices par les
docteurs Coste et Broquier, sur un procédé
d’embaumement
expérimenté par M. Audigier, chimiste..........................................
108
Les étapes de la question du diabète, par le docteur A. Fabre. .
117
Etude sur le développement progressif des associations médicales
et sur l ’application à ces associations des principes économiques
modernes dans le but d'améliorer les ressources du corps
médical, par M. le docteurChapplain............................................
165
Association générale des Médecins de France, cinquièm e assemblée
générale tenue à Paris les 30 et 31 octobre 1864. — Compte
rendu par M. le docteur Seux.......................................................
181
Quelques mots sur la médication topique dans le traitement de la
laryngite chronique étudiée à l ’aide du laryngoscope, par le
docteur E. Nicolas...................................' ..................................190.197
Observation de catarrhe du sac lacrymal guéri par les injections
iodées, par le docteur Albert Pélissier, de Saint-Rém y............
Notice nécrologique sur le docteur Melchior R obert, par S. P. . .
194
16
Traité élémentaire d’Histologie, par le docteur F o rt, ancien interne
des hôpitaux, médecin consultant aux Eaux de Cauterets-, I vol.
in-8°; prix: S f r . 50 (Bibliographie). . . . ..........................................
Nouvelles et Variétés......................
207
1 3 .3 2 .6 0 .8 0 .9 8 .1 2 9 . 1 8 0 . 196. 21 0
MkrieiUe. — luprlm ecie V | \ L , rue TM »ra, 8
I3SH YW
M arseille, le 15 janvier 1865.
L'Union médicale de la Provence commenc
seconde année.
Les sympathies qu’elle a su inspirer ont assu rM Ô # e xiste n ce ^
Ces sympathi s ne lui sont pas venues seulement &èrlajjf)an^
des membres de l’association médicale des Bouches-du-Rhône
mais de nombreux abonnés dans notre département et les dé
partements voisins lui ont accordé aussi leur bienveillant con
cours.
C’est un devoir pour le comité de rédaction d’adresser à tous
scs bien vifs remerciments.
Mais la bienveillance reçue crée aussi des obligations; le
comité de rédaction les a comprises et il ne veut pas s’y sous
traire.
Il espère accroître cette année l ’importance de l ’œuvre a
laquelle il s’est voué.
El cependant, il lui est permis de réduire son prix d’abonne
ment qui ne sera plus que de 4 francs par an, au lieu de six.
L 'Union médicale de la Provence restera un journal a la fois
scientifique et professionnel.
Elle enregistrera les faits intéressants de la pratique médicale
qui lui seront communiqués.
Elle continuera a s’occuper aussi avec zèle, des intérêts ma
tériels et moraux de la profession, intérêts généraux, intérêts
locaux.
L’année qui vient de s’ ouvrir sera probablement marquée par
la révision de la législation médicale.
Nous apporterons aussi notre pierre à l ’édifice qui se pré
pare.
Nous recevrons avec empressement les communications qui
nous seront adressées sur celte importante matière dont nous
aurons plus d’une fois à entretenir no* lecteurs.
Fidèle à la pensée qui l’a créée et au nom qu’elle porte,
notre publication continuera à exciter le zèle en faveur du
bienfaisant principe de l’association entre les médecins. Pendant
l’année dernière, le nombre des associés a presque doublé dans
les Bouches-du-Rhône; notre modeste feuille peut revendi
quer a bon droit une part de ce résultat.
En dépit de quelques esprits inquiets et prévenus, l ’Associa
tion générale des médecins de Fiance est aujourd’hui définiti
vement fondée : elle sera dans l’avenir le meilleur complément
ou le meilleur correctif de la législation nouvelle ; elle restera
toujours le palladium de la profession médicale.
Le Comité de Rédaction.
\
>1111
Honoraires médicaux.......................................................................
�Lettre adressée à M. le P résident de l'A s s o c i a t io n Médicale des
Bouches-du-Rhône, sur la fusion de o e lle - c i avec le Comité Mé.
dioal,
T rès -H onoré P r é s i d e n t ,
Lorsque le 30 août dernier, dans notre assemblée générale
annuelle, vous formiez le vœu que deux institutions non rivales,
mais amies, car leur but est exactement le même, pussent un
jour se réunir en un seul corps pour marcher ensemble au but
commun, le bien de tous; vos paroles rencontrèrent un assen
timent unanime. Près de vous, était assis le regrettable fonda
teur et président perpétuel du Comité Médical, M. le docteur
P.-M. Roux; il parut vous entendre sans déplaisir, et le soir,
dans un cordial banquet où il nous lit l'honneur de venir s’assoir, encore à vos côtés, il répondit par de louchantes paroles
à la sympathie dont il était entouré.
Depuis le douloureux événement qui a enlevé au Comité Mé
dical son vénérable fondateur, celui qui, malgré sou âge avancé,
le dirigeait encore avec la tendre sollicitude d'un père et une
ardeur louie juvénile; un mol, celui de fusion, est sur toutes
les lèvres dans le corps médical de M arseille; j ’ajoute qu il est
dans le cœur et les aspirations d’un grand nombre; serait-il
vrai aussi que chez quelques-uns il a pu causer un certain émoi?
Tout naturellement, l’association médicale s ’est trouvée en
cause ; on la sait très sympathique a la fusion, cette sympathie
a été taxée d’ambition, que sais-je, même de convoitise ! car le
Comité Médical a déjà un fonds de réserve important que de
généreux confrères ont largement doté, tandis que 1Association
Medicale, naissante â peine, en est encore à attendre des libé
ralités qui certainement ne lui feront pas défaut par la suite.
En présence d’une pareille situation, vous avez jugé, trèshonoré Président, que notre devoir nous commandait d’inter
venir, tant au point de vue des principes sacrés de I union gé
nérale des médecins que nous défendons, qu’ au point de vue
de la dignité de notre Société. Il est bon aussi que l opinion, si
prompte â s’égarer, ne fasse pas fausse route et que des inten
tions pures et toutes confraternelles ne soient pas dénaturées.
Et d’abord, il est un point sur lequel je ne pense pas ren
contrer un seul contradicteur; c est que l’ union que nous souhai
tons est désirable et qu’elle serait utile a tous; j éprouverais un
véritable embarras â trouver en faveur de cette thèse des ar
guments nouveaux et que chacun ne connût pas mieux que moi.
Mais, me dira-t-on, cette fusion si désirable, si utile, nous en
convenons, est malheureusement impossible, et en voici les
raisons :
1° Le Comité Médical a une caisse déjà importante, et il est
du devoir de l’administration de la réserver pour ceux qui l ’ont
Constituée par leurs versements annuels. En s’ agrégeant â l ’as
sociation générale, il aurait â verser h la caisse centrale le
dixième de son avoir, et franchement cette libéralité ne lui est
pas permise.
Je ne ferai pas h cette objection une réponse sentim en
tale en disant que tous les médecins étant frères, les fonds
d’une caisse médicale de secours ne seraient pas détournés de
leur généreuse destination, si le cercle des infortunes confra
ternelles qu’ils devraient soulager se trouvait agrandi.
Je ne dirai pas non plus qae les médecins ne s’associent pas
seulement pour faire une caisse de secours, mais plutôt pour
rendre inutile une caisse de secours, en travaillant eu commun a
l’artlélioraiion des intérêts moraux et matériels de la profession.
Encore moins, je me garderai d ’ajouter que si le Comité Mé
dical était pauvre et dépourvu de fonds de réserve, l’ Association
générale ne l’accueillerait pas avec moins d’empressement.
Mais je me contenterai d’ opposer h cette objection un seul
argument qui est sans réplique : il est parfaitement constant et
établi que les Associations,plus anciennes que l’ Association gé
nérale et qui s’ agrègent à elle, n’ ont pas a verser la moindre
partie de leur capital, mais sont dispensées encore de verser le
dixième de leurs revenus, et ne doivent h la caisse centrale que
le dixième des cotisations de leurs membres. En s’agrégeant à
l’Association générale, le Comité Médical ne compromettrait
donc pas les interets de sa caisse ;
2° Je confonds sous un chef unique les deux objections su i
vantes :
Le Comité Médical, dit-on, est une association mixte et dans
son but et dans sa composition ; dans son but, il est à la fois
société savante et société de secours ; dans sa composition, il
comprend en même temps des médecins et des pharmaciens.
Or, l ’association locale n’est pas une société savante, et ses
statuts ne permettent pas d’admettre les pharmaciens. La fusion
est donc impossible.
La première partie de cette objection générale me parait peu
sérieuse, la seconde au contraire est très-grave.
J’admets bien volontiers que le Comité Médical est une so
ciété savante en même temps qu’une société d ’assistance et de
secours; je ne veux pas me souvenir du dicton populaire : qui
trop embrasse mal étreint, et je reconnais sans peine que les
travaux de la section scientifique sont des travaux sérieux ; mais
en quoi ce titre de société mixte, faisant de la science accès-
�soiremenl ou d'une manière principale, pourrait-il empêcher la
fusion avec la Société locale !
Un grand nombre de médecins de celte Société locale fonl
aussi partie du Comité Médical ; pour eux, |l objection est sans
portée ; voudrait-on dire que les autres fe ra ie n t déplacés dans
le Comité Médical, en tant que société savante ? Je ne le pense
pas ; je me garde d’insister sur ce point, je ne veux pas surtout
faire le moindre travail de comparaison, le terrain est trop glis
sant et trop délicat.
Ainsi que je viens de le dire, la deuxièm e partie de I objection
est autrement sérieuse ; car pour la résoudre il ne faut rien moins
que de décider la division, la bifurcation, du Comité Médical en
ses deux élémentscoDStitutil's : les M édecinset les Pharmaciens.
Si je démontrais cependant que la réunion, en un même
corps, des professions médicale et pharmaceutique n’a pas pro
duit et ne peut produire aucun des résultats espérés, j ’aurais
fourni un argument irréfutable en faveur de la séparation des
deux professions.
On a du souvent que les intérêts des médecins et des phar
maciens sont communs ; le fait est très-exact en ce sens que les
uusel les autres ont à se plaindre des empiètements d’indus
triels sans dip ôme qui trafiquent sur la santé publique et sur la
vente des médicaments. Mais malheureusement ce ne sont pas
toujours les mêmes industriels qui nuisent à la lois aux deux
professions.
Qu’ importe alors au pharmacien que tel empirique donne
des consultjiions, si ses ordonnances arrivent chez lui et lui
permettent la vente de ses médicaments, et qu’importe à son
tour au médecin que tel droguiste, tel herboriste, vendent des
médicaments au poids médicinal, si ce droguiste ou cet herbo
riste s’abstiennent de donner des consultations.
11 est malheureusement plus vrai de dire qu’ il existe un véri
table antagonisme, entiemedecinset pharmac iens, sur le terrain
prolessionnel.— Cette thèse a déjà été soutenue, je ne veux
que l’indiquer. Je me demanderai seulement en passant si les
empiètements réciproques dont lesdeux professions se plaignent,
n’auraient pas été favorisés parce que j ’appellerai la promiscuité
des deux éléments dans la même société.
Je crois donc que l’association des médecins et des pharma
ciens sur le domaine professionnel est un fait malheureux, et
que celte association n’est admissible que dans les sociétés
scientifiques où le chimiste et le pharmacien savant peuvent et
doiventse rencontrer avec le médecin anatomiste, physiologiste,
en un mot, avec le médecin homme de science.
On comprend facilement qu’au début d ’une œuvre qui devait
se limiter h une portion de territoire aussi restreinte que l ’est
un département, ses fondateurs se soient préoccupés surtout des
moyens de réunir un grand nombre d ’adhérents. Pour arriver
à leur but, ils ont fait appel h la fois h tous les éléments qui pou
vaient avoir entre eux quelques points de contact ; c ’est ainsi
que sont nées ces sociétés complexes où l’ homogénéité a été
sacrifiée et qui. semblables à ces empires artificiellement formés
de nationalités différentes, portent en elles un germe délétère
qui les empêche de parvenir h la prospérité.
Aujourd’ hui que le principe d’association ne se meut plus
dans les étroites barrières d’ un département et que, sous une
impulsion généreuse, il a pu s’étendre, pour les médecins, a
toute l’étendue de I Empire Français, les sociétés mixtes se
décomposent partout en leurs éléments divers, et ces éléments
se reconstituent d’après leurs affinités naturelles.
Des associations distinctes, uniquement composées de méde
cins ou de pharmaciens, les remplacent ; à côté des nombreuses
sociétés de prévoyance de médecins, se sont déjà formées un
certain nombre de sociétés de prévoyance de pharmaciens ;
nous en connaissons l’existence dans le Nord, le Doubs, l’Isère,
etc.
Pourquoi ce qui est bon ailleurs, serait-il trouvé mauvais
dans les Bouches-du-Rhône.
Et franchement, il serait bien étrange le spectacle d’une as
sociation dans laquelle deux éléments différents se trouvent en
présence et dont l’un voudrait s’isoler tandis que l'autre préten
drait, au contraire, rester indissolublement lié à l’élément sépa
ratiste.
Il y a, dans cette singulière situation, matière ù de sérieuses
réflexions que ne manqueront pas de faire tous ceux dont l'esprit
droit et judicieux ne saurait se laisser égarer par un parti pris
d'avance.
Mais on m’objecte, en terminant: tout ce que vous demandez
û’esi antre chose que la dissolution du Comité Medical ; or, il
existe dans les statuts un article 19 ainsi conçu :
« Dans le cas où l’association se dissoudrait, les immeubles,
meubles et capitaux lui appartenant, seraientattribués à l ’un ou
h plusieurs des établissements charitables ou scientifiques régu
lièrement autorisés du département des Bouches-du-Rhône, et,
à défaut de désignation par l ’association , au bureau de bien
faisance de la ville de Marseille. »
Cet article est très-précis, mais il ne saurait être appliqué à
la situation que nous supposons ; il ne s’agit pas, en effet, de
�—
6
—
dissolution, mais de modification aux statuts. Cette modification
est importante, si l’on veut, elle est radicale même, mais elle
n’est pas au-dessus des pouvoirs d’une assemblée générale.
Je réponds à l'article 19 par l’article 20 qui détermine les
conditions dans lesquelles les statuts peuvent être modifiés.
Et maintenant que nous avons démontré que la fusion que
chacun recounait désirable n’est pas impossible, il resterait à
dire quelle est la solution pratique à adopter.
Je m’abstiendrai d’ aborder ce sujet ; une fois les principes
posés, il appartiendra aux commissions administratives de s’en
tendre pour régler entr’elles tous les points de détail ; ce qu'il
nous importe de proclamer, c’ est que la Société locale, danssoo
désir de conciliation, est toute disposée b faire les concessions
et les sacrifices qui ne seront pas de nature b être opposés au
principe fondamental de son existence : b l ’agrégation b l’Asso
ciation générale des médecins de France.
Voilà, très-honoré Président, ce que je pense sur la question
qui offre en ce moment, dans le monde médical phocéen, un in
térêt particulier d’actualité. J ’ai lieu de croire que j ’aurai aussi
traduit votre pensée, quoique d’une manière imparfaite. Il m’a
été donné de la connaître dans les épanchements auxquels
vous avez habitué votre secrétaire en tout ce qui touche l’ave
nir de l’association générale dans le conseil supérieur de la
quelle vous avez été appelé b siéger, en tout ce qui regarde aussi
notre Société locale b laquelle vous désirez les plus brillantes
destinées,
Je termine ma trop longue lettre par un mot de justification
et par l ’expression d un vœu. La justification; c’est qu’ une plume
plus habile et plus exercée que la mienne n’ ait pas traité le su
jet difficile que j ’ai abordé aujourd’hui, mais je ne pouvais dé
cliner une des obligations de mes fonctions de secrétaire delà
Société locale.
Le vœu, c’ est que l’ année que nous commençons soit signa
lée par 1 important évènement dont ces quelques lignes ont eu
pour but de poser les prémisses et de montrer la route. Vous
êtes, très-cher et honoré Président, par votre caractère élevée!
conciliant, par votre position indépendante, en mesure de ser
vir efficacement celle grande cause. Je vous sais très-disposé à
marcher dans cette voie, permettez-moi de vous apporter mon
modeste encouragement.
Veuillez agréer, très-honoré Président, l’ assurance de mes
sentiments les plus dévoués.
Dr LA U R E N S ,
Secrétaire de la Société locale.
—
7
—
DE LA LEUCORRHÉE.
S'il estime affection qui occupe un grande place dans la pa
thologie de la femme, c’est bien la leucorrhée. Sans vouloir pré
tendre avec certains médecins que presque toutes les femmes
en sont affectées, du moins on ne saurait nier que sa fréquence
n’ait augmenté avec les progrès de la civilisation et les exi
gences delà mode; cette proposition est tellement incontestable,
qu’ un écrivain bien connu, M. Michelet, n’a pas hésité a qualifier
notre époque de siècle des maladies de lu matrice.
Quand une maladie se présente avec une telle fréquence, il
est du devoir du médecin de l’étudier sous toutes ses faces, et
c’est pour cela que nous avons cru le moment bien choisi pour
offrir b nos lecteurs une analyse de l ’excellent mémoire que
vient de publier sur ce sujet M. le professeur Courly de M ont
pellier. Après s’être élevé avec raison contre la définition ba
nale de la leucorrhée, qui signifie, pour le vulgaire, tout écou
lement d’un liquide autre que le sang, par les parties génitales
de la femme, le professeur dit que ce terme doit être conservé
pour deux raisons :
1° Parce qu’il signale a l’attention du médecin un fait im
portant pour le diagnostic, car il révèle toujours un état mor
bide, car il n’y a pas de leucorrhée normale ou physiologique;
chez quelques femmes, il est vrai, les llueurs blanches ne sont
accompagnées d’aucun antre symptôme, mais le médecin doit
se rappeler qu’ un pareil écoulement,surtout s’ il devient visqueux
et gluant, et s’il est accompagné de pâleur et d’amaigrissement,
témoigne d’un véritable étal morbide et que cet état est sou
vent symptomatique d’une maladie utérine;
2° Quelle que soit I affection b laquelle elle se rattachera leu
corrhée devient souvent un symptôme dominateur dans l'h is
toire des affections utérines ; elle s’élève souvent au degré de
maladie proprement dite, et doit être étudiée comme louleautre
maladie.
Enfin, en gynécologie, l’étude des flux, presque toussymptomatiques, sert de transition naturelle entre les altérations
fonctiouelles qui peuvent être bornées aux désordres de la
menstruation et les actes morbides proprement dits qui se ratta
chent b une lésion locale, b une affection diathésique ou b une
altération organique.
�—
Arrivant à ia définition scientifique de la maladie, l’auleor
s’exprime ainsi : La leucorrhée, dit-il, est un flux pathologique
produit par l'augmentation et l’altération des sécrétions nor
males de l’appareil génital. Cette définition nous parait parfaimenl en rapport avec I idée que l ’on doit se faire de la nature
de celte affection. La leucorrhée peut être utérine, vaginale ou
vulvaire.
Eu egard à sa nature, on la distingue en symptomatique
et idiopathique.
Enfin, il faut distinguer la vraie leucorrhée de la fausse leu
corrhée, celte dernière provient de l'excrétion de produits mor
bides : tels sont les résultats de la suppuration, de la gangrène
ou du cancer.
C’est ainsi que dernièrement nous a vous eu l'occasion d’ob
server nous-même, dans le service des dispensaires, une jeune
fille de quinze ans, qui présentait une leucorrhée puriforme,
due à une escarre gangreneuse située dans l ’épaisseur de la
grande lèvre gauche, escarre qui, en se détachant, avait amené
une suppuration assez abondante. On pourrait encore ranger
dans la fausse leucorrhée la suppuration qu’ entraîne la cauté
risation au fer rooge du col utérin ; on sait, en effet, qu’au mo
ment où l’escarre s’ élimine, les parties sexuelles sont souillées
par un liquide purulent qui est quelquefois tellement abon
dant que nous avons vu certaines femmes en être incom
modées.
De même que les notions d’anatomie et de physiologie nor
male et pathologique sont la hase de nos éludes sur toutes les
maladies qu’il nous est donné de connaître d ’une manière po
sitive, de même l’ histoire de la leucorrhée ne peut se faire sans
la connaissance préalable des sécrétions normales de l ’utérus et
du vagin, des organes qui sont les instruments de ces sécrétions
et des altérations qu’elles peuvent subir.
Il faut donc connaître d’abord les produits leucorrhéigues.
Les principaux appareils sécréteurs sont sur la vulve et dans
l ’utérus.
M. le professeur Courty, [d’accord en cela avec Kôlliker, dit
que la muqueuse vaginale ne paraît pas avoir de glandes : dans
l ’état normal elle est sèche ( u b ;en humectée par les sécrétions
vulvaire et utérine. Mais, si elle n ’a pas de sécrétion, elle est
probablement le siège d’ une perforation qui se fait entre les
cellules de son revêtement épithélial.
Après avoir constaté les dissentiments qui régnent entre
plusieurs anatomistes distingués, au sujet des organes sécré-
0
—
teurs de la muqueuse vaginale et au sujet même de l’ existence
de ces organes, opinions diverses dont I histoire n ’apprendrait
rien de bien nouveau aux lecteurs, le professeur arrive aux ex
périences qu’il a entreprises dans le but d’élucider celle inté
ressante question, et ici nous lui laissons la parole :
« A mon tour, dit-il, j ’ai souvent cherché daos le vagin des
organes sécréteurs, glandes ou follicules, et je n’en ai pas
trouvé. J’ ai tâché pourtant de me mettre dans les conditions
les plus favorables à leur découverte. Chez des femmes atteintes
de leucorrhée, surtout de leucorrhée purulente avec vaginite,
après avoir déployé le vagin avec le spéculum, essuyé sa mu
queuse et cherché les points sur lesquels la sécrétion paraissait
la plus abondante ou semblait sourdre d’un orifice apparent,
ceux où le volume et la rougeur des granulations pouvaient
faire supposer que quelques-unes de ces éminences étaient for
mées par des follicules, j ’ai excisé dans ces mêmes points une
petite portion de la muqueuse vaginale, que j ’ai portée aussitôt,
soit dans l’eau, soit dans un liquide coloré, pouvant pénétrer
les canaux excréteurs qui se trouvaient dans l'épaisseur de ce
fragment, que j ’ai examiné ensuite h la loupe et au microscope ;
je n’y ai jamais trouvé de traces de follicules ni de glandes.
Le vagin m’ a doue paru être dépourvu d’ organes sécréteurs
proprement dits. Après avoir dépassé l’aDneau vulvaire ou
l’insertion circulaire de l’hymen, qui est la lim ite des riches ap
pareils glandulaires de la vulve, il faut peut-être arriver ju s
qu’à la surface vaginale du col utérin, pour retrouver dans se s
follicules de nouveaux organes s'créleurs. Le liquide qu i
exsude de la surface de la muqueuse vaginale, entraînant avec
lui de larges débris épithéliaux, est toujours acide. »
Ces expériences nous paraissent d icisives et, pour notre part,
nous n’hésitons pas à adhérer fermement aux conclusions de
l’auteur.
Les grandes lèvres et les petites lèvres présentent un grand
nombre de glandes sébacées et de follicules muqueux. La
vulve offre, en outre, les glandes vulvo-vaginalesel les follicules
urétraux.
La membrane qui tapisse l ’utérus est très-riche en follicules
on en glandes mucipares ; quelques glandes du col ont leur o ri
fice sur le bord ou à la surface vaginale des deux lèvres du mu
seau de tanche.
Le col est bien plus accessible que le corps aux agents ex
térieurs ; dès lors il n’y a rien d’étonnant que ses glandes soient
plus souvent le point de départ de la sécrétion leucorrhéique.
�Le raucus de la vulve est visqueux et filant, celui des glandes
vulvo-vaginales ressemble h celui des glandes de Cowper. Le
mucus des follicules veslibulaires et peri-urétraux, en se mê
lant â la sécrétion sébacée, forme souvent une sorte de magma
qui a une odeur de fromage fermenté. Nous avons vu ce magma
produire des excoriations sur les grandes lèvres chez des
femmes qui oubliaient un peu trop les soins qu’exige une toi
lette quotidienne.
Le liquide vaginal est un liquide clair et séreux, mais on
l’aperçoit rarement isolé, le plus souvent il n ’est que l’exci
pient ou le véhicule des innombrables et larges corpuscules la
melliformes qui se détachent sans cesse par exfoliation et qui
donnent à l’ensemble du produit un aspect opaque et caséeux.
Sa réaction est acide, son odeur est aigre et spéciale ; sa quan
tité augmente vers la fin de la grossesse.
Sous le nom de mucus utérin, on comprend deux mucus bien
différents : celui du col et celui du corps. A l’état normal, ils
sont limpides et la sécrétion en est peu abondante. L ’un et
l’autre se présentent h lorifice utérin, sous la forme d'une goutte
ou d’un filet transparent comme du cristal de roche, mais res
tant adhérent h I organe.
Quelquefois, leurs caractères différentiels se manifestent à
la vue par l’absence de sécrétion de l’un ou de 1’amre, tantôt
le col est obstrué par sa propre sécrétion, tantôt le col ne pa
rait pas sécréter du mucus, mais après le cathétérisme de l’u
térus, on voit sortir un liquide qui vient bien réellement du
corps.
Maintes fois nous avons fait cette expérience, non pas avec
la sonde utérine, comme le dit le professeur de Montpellier,
mais avec le dilatateur utérin fabriqué par M. Mathieu, et
après avoir bien essuyé le col utérin, nous avons pu, grâce à
l'instrument dont nous parlons, écarter ses deux lèvres et voir
sourdre le rnucus de I intérieur du corps utérin.
Les deux sortes de mucus sont transparents, limpides et
alcalins.
Celui du col est gluant, tenace et demi solide ; celui du corps
est visqueux et filant, il contient de nombreux globules épithe
liaux nucléaires ovoïdes; le nombre considérable de ces éléments
solides en altère quelquefois la transparence et lui donne ud
aspect grisâtre, qui a été constaté aussi par quelques obser
vateurs.
La sécrétion utérine, vulvaire ou vaginale, à l ’étal normal,
est souvent très abondante, seulement elle a lieu â la manière
de la plupart des sécrétions, c’est-â-dire quand elle est solli
citée ; il en est de même de celle de la salive qui ne se fait qu’au
moment du repas, du suc gastrique qui a besoin d’être provo
quée, soit par les aliments, soit par certains liquides dans l ’es
tomac, du liquide prostatique qui ne s’opère qu’ au moment de
l'érection.
Il n’est donc pas étonnant que, sans état morbide déterminé,
il se produise sous l’influence de plusieurs causes, capables
d’entraîner quelques troubles fonctionnels, une hypersécrétion
du liquide normalement sécrété d’une manière intermittente ;
c’est un llux muqueux proprement ditqu i peut être décrit comme
maladie essentielle.
Différences de siège de la leucorrhée. — D ’après l ’ auteur, la
leucorrhée vulvaire serait fréquente chez les enfants, surtout
chez les petites filles scrofuleuses ou darlreuses ; elle coexiste
avec des croûtes à la tête, de l ’impetigo, de l'eczéma, etc., se
compliquant parfois d’engorgement et de suppuration des gan
glions inguinaux. Les causes sont : un excès de sécrétion, une
éruption dartreuse, un travail superficiel d’ ulcération causé et
entretenu par le vice scrofuleux ; la leucorrhées’étend rarement
au vagin, cependant l’ auteur cite le fait d’une jeune fille, âgée
de douze ans, dont il a eu l’occasion de faire l ’autopsie et chez
laquelle on trouva l’utérus et la moitié externe des trompes
farcis et distendus par des débris épithéliaux ; ce fait est assu
rément très-remarquable.
L ’irritation, due h la dentition chez les jeunes enfants, les
mauvaises habitudes chez les petites filles, la grossesse chez les
femmes, la malpropreté ou l’âcreté des sécrétions chez les
femmes â poils noirs ou rouges, l’acné vulvaire sont aussi des
causes fréquentes de celte maladie. — La malade se sent
mouillée, elle éprouve de la chaleur, du prurit, et on voit surveuirle gonflement des grandes et des petites lèvres; l ’érythème
des parties voisines rend souvent la marche douloureuse; mais
par contre, on n’observe aucun symptôme du côté du bassin, il
n’y a pas non plus de coliques utérines. On observe sur le linge
des taches allongées, grisâtres et souvent jaunâtres, car pour
peu que la leucorrhée vulvaire soit intense, elle est purulente.—
Comme on le voit, M. le professeur Courty est disposé â ad
mettre, comme fréquente,la leucorrhée vulvaire chez les petites
filles scrofuleuses ; il est clair que quand la diathèse scrofuleuse
existe avec tous ses attributs, nous nous rangeons complète
ment à son opinion, mais quand par exemple, chez une jeune
enfant qui présentera soit un peu d’irapetigo du cuir chevelu,
soit une légère adénite cervicale, nous verrous se développer,
tout à coup, une de ces leucorrhées vulvaires, réputées sponta
�12 —
nées, avec gonflement des grandes et des petites lèvres et
écoulement puriforme, nous aurions lieu de penser h des vio
lences criminelles; c’est du reste l ’opinion de M le professeur
Tardieu de Paris. Nous avons eu nous-mêrne, il y a peu de
temps, l’occasion d’examiner un fait de ce genre : une jeune
fille de sept ans, d’un tempérament lymphatico-sanguin, jouis
sant d’une bonne santé habituelle, cjuoiqu’ayant un léger en
gorgement de deux ganglions cervicaux, fut prise tout à coup
d’une de ces leucorrhées vulvaires purulentes, avec gonflement
des grandes et des petites lèvres, difficulté dans la marche, etc.
Dans le rapport médico-légal que nous fûmes chargé de rédiger
avec le docteur Maurel, nous n’hésitâmes pas h nous pronoocer
pour un attentat à la pudeur, et nos conclusions eurent gaio de
cause devant la cour d’assises des Bouches-du-Rhône.
Leucorrhée vaginale. — Elle est rare dans l’enfance, trèsfréquente chez les femmes, habituellement il n ’y a ni gonfle
ment, ni chaleur à la vulve, le liquide qui s’écoule est laiteux
et justifie bien la dénomination de perte blanche : il peut être
très fluide ou un peu consistant, mais il n ’est jamais ni visqueux
ni gluant. S’il y a vaginite ou blennorrhagie, il peut devenir
jaune-verdâtre par son mélange avec le pus, en même temps
la femme éprouve des douleurs dans le bassin, des douleurs va
ginales, retentissant même sur l'utérus et les organes voisins.
Les taches laites au linge sont rondes et incolores dans le cas
de leucorrhée simple ; allongées, jaunes ou verdâtres, parfois
même sanguino lentes dans les cas de leucorrhée purulente.
Leucorrhée utérine. — Elle est très rare chez les enfants,
et fréquente chez les chlorotiques et chez les femmes soit avant
soit après la grossesse ; les excès vénériens peuvent la provoquer,
d’ordinaire elle est entretenue par un catarrhe, une inflamma
tion ou par une affection dartreuse, syphilitique, un ulcère,
etc. — On observe fréquemment un sentiment de pesanteur
dans le bassin, aes douleurs lombaires et hypogastriques des co
liques et des véritables tranchées utérines. — Le flot de liquide
qui constitue cette perte est intermittent au lieu d être con
tinu. — L ’écoulement est visqueux, ou albumineux comme du
blanc d œuf, et peut être quelquefois jaune et même verdâtre,
quand il est formé par un mélange de mucus et de pus ; les ta
ches qu’il laisse sur le linge sont roudes, et très nettement
circonscrites.
Pour bien être fixé sur la nature et sur le siège de la leu
corrhée, il faut se servir du spéculum. Après avoir constaté
l’ existence des leucorrhées vulvaires et vaginales, on coostate
celle de la leucorrhée utérine quand le spéculum a embrassé le
col. L’ introduction du doigt, comme le dit Vidal de Cassis, d o it
toujours précéder l ’introduction du spéculum. Il est quelque
fois difficile de saisir le col utérin, car il existe souvent avec la
leucorrhée un engorgement du col ou bien une déviation u té
rine: nous nous contentons alors de faire varier la position de
la femme et le museau de tanche vient se placer pour ainsi d ire
de lui même dans les branches de l’ instrument, nous avons eu
plusieurs fois recours h cette manœuvre avec succès. Une
foisle col saisi,on voit le liquide sourdre de l’ orifice utérin,quel
quefois sa transparence est parfaite, d’ autrefois il parait opaque
et blanchâtre; quelques cellules épithéliales, détachées au mo
ment de son passage â travers le col, suffisent pour troubler sa
transparence.
Souvent au lieu d’être opaque, le mucus utérin est jaunâtre,
quelquefois même verdâtre; il y a alors sécrétion de pus et mé
lange de ce liquide avec le mucus. Il arrive quelquefois qu’en
pressant sur le col avec le spéculum, on ne fait sortir qu’ une
goutte de liquide purulent, qui peut être légèrement teinte de
sang. M.Courty dit qu’il faut alors se méfier, car il peut y avoir
un chancre dans la cavité du col, j ’en ai vu, écrit-il, plusieurs
exemples très authentiques et très curieux. Le microscope peut
aussi aider à comploter le diagnostic entre les diverses espèces
d’écoulements.
Fausse leucorrhée. — On ne doit pas confondre, avec les l i
quides lencori héiques provenant de l’ hypersécrétion ou de l’al
tération des sécrétions normales, les liquides étrangers h ces
sécrétions, dont l'écoulement est symptomatique de quelque
altération du contenu de l’utérus ou d’une lésion organique
grave.
Parmi la fausse leucorrhée, doivent se ranger l ’écoulement
qui suit la décomposition de caillots de sang retenus dans ces
cavités; l’écoulement dû a la décomposition du produit de la
conception; le cancer; les abcès de l'utérus; les abcès déve
loppés près du vagin, tels que : les abcès pelviens; la tu bercu
lisation utérine ; l ’écoulement déterminé par la présence de
môles hydatiques, de polypes, de granulation etc.
Différence de nature de la leucorrhée. — On divise la leu
corrhée en idiopathique et symptomatique. M. le professeur
Courty admet que la leucorrhée est souvent symptomatique
d’altération très diverse de la muqueuse génitale et même du
tissu proprede l’utérus, mais il croit, avec M M . Racle et Lorain,
qu’il y a des cas où la leucorrhée est tonte la maladie, c ’est-ùdire où elle ne se rattache ù aucune lésion anatomique perma
nente. Nous ne nions point le fait, nous croyons eu effet, avec
�14
—
l'auteur, que les femmes h tempérament lymphatique, à cons
titution molle, faible et délicate, sont plus sujettes que les autres
à la leucorrhée, mais nous pensons, avec M. Bennett, que
quand une femme consulte un médecin pour de la leucorrhée,
l’on trouve à l’examen qu’ elle a une affection inflammatoire de
la région utérine. S il n’y avait pas d’affection locale, elle n’au
rait pas attaché d’ importance h l’écoulement, puisqu'elle n'au
rait éprouvé aucun inconvénient de son existence.
Les constitutions faibles, les tempéraments lymphatiques sont
sujets h la leucorrhée, l ’âge de la première période des fonc
tions sexuelles, les climats froids et humides y prédisposent
aussi. D'après une statistique reposant sur des faits observés \
Paris par Marc d’ Espine, et à Marseille par M. Girard, le tiers
des femmes seulement seraient exemptes de flueurs blanches
à Paris, tandis que les trois quarts en seraient exemptes à Mar
seille. Le séjour des villes, le régime débilitant sont encore des
causes prédisposantes. L ’usage du café au lait, d’après certains
médecins, serait encore une des causes qui favoriseraient con
sidérablement les pertes blanches. A ce propos, M. Courty fait
une observation qui nous paraît pleine de justesse, c’est que les
femmes qui font usage du café au lait h Paris, se nourrissent
fort mal et remplacent par cet aliment, habituellement frelaté, uo
bon repas où elles auraient mangé de la viande et d’autres ali
ments plus toniques. Comme l ’auteur, nous avons vu quantité
de femmes prenant du bon café au lait, usant du régime toni
que, et qui n'ont jamais eu de leucorrhée.
A ces causes débilitantes, on peut joindre encore l’allaite
ment prolongé, les maladies du cœur, la phthisie ; il faut aussi
ajouter, à cette prédisposition générale, une prédisposition lo
cale consistant dans l’atonie particulière de l’appareil génital.
Chez les femmes qui présentent ces prédispositions, deui
causes d’ordre différent peuvent déterminer la leucorrhée.
Tantôt une simple irritation locale et dans celte cause ou
peut ranger les excitations des organes génitaux, chez les pe
tites filles, l’abus du coït chez les jeunes mariées, la grossesse,
l ’accouchement, etc. Tantôt une imperfection fonctionnelle de
l ’utérus, ou le retentissement que cet organe peut éprouver
du trouble fonctionnel d’ un autre organe, président à rétablis
sement de la leucorrhée. Dans cet ordre de choses, le profes
seur de Montpellier range l ’aménorrhée; dans ce cas la leu
corrhée peut, avec l’aménorrhée, être symptomatique d’un état
général qui domine également l’ une et l'autre : ou bien,elleapparaît ou s’exagère à l’époque correspondante à celle des rè
gles par le fait même de la fluxion et de la congestion qui ca
ractérisent cette période, Je travail menstruel commence, il se
termine par un llux muqueux, au lieu de se terminer par un
flux sanguin.
L ’absence de I allaitement, la suppression d’une fonction
physiologique, de la sueur, de la diarrhée, d’un exutoire, etc.,
peuvent rentrer dans les causes qui amènent la leucorrhée par
suite du retentissement que l’utérus éprouve du trouble fonc
tionnel d’un autre organe. On a encore appelé cette espèce de
leucorrhée métastatique ou supplémentaire, mais, comme le lait
observer avec raison M. Courty, il est fort difficile de savoir si
elle est véritablement supplémentaire ou bien si elle est comme
ces flux eux-mêmes, symptomatique d’ un état général commun
dont ils relèvent tous les deux.
Leucorrhée symptomatique. — La transition entre la leu
corrhée idiopathique et la leucorrhée symptomatique est pres
que insensible, car l ’auteur a soin de nous avertir qu’il ne sau
rait ranger, dans les leucorrhées symptomatiques, les écoule
ments qui ne sont pas a proprement parler leucorrhéiques : tels
que les produits du cancer, des tubercules, etc. En se rappelant
la définition que fauteur a donnée de la leucorrhée, on ne peut
qu’approuver le raisonnement du professeur.
Dans les leucorrhées symptomatiques, il faut distinguer celles
qui sont symptomatiques d’affections générales, catarrhes, rhu
matismes, e tc., et celles qui sont symptomatiques d’affections
locales.
La première est le type de la leucorrhée symptomatique et
sa représentation la plus accentuée est la leucorrhée catar
rhale.
Dr MÉRENTIB.
La suite au prochain numéro.
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
Hôpitaux de Marseille. — A la suite d ’e xcH le n ts concou rs, ont été
nommés
Internes : MM. T rastou r, Revertegat, Caussidou. Ju stin e sy.
Externes : MM. Moltedo, T ron , E y riè s , Coste, B o u l in , A illa u d , Charras,
Ingignac, Hyades.
Académie impériale de Médecine. P rix décernés en 1 8 6 4 . — Nous
remarquons sur la liste générale des p rix décernés par l ’Académ ie, en
4864 :
1° P rix fondé par Mmo Bernard de C iv rie u x . Le sujet proposé était :
Faire Vhistoirc de l'ataxie locomotrice progressiv e. — Une mention
honorable accordée à M. le D* Carre, médecin a Avignon (Vaucluse);
�2* Une médaille de bronze, accordée à M. le docteur Rebory, de
D'gne, pour son rapport sur le service m édical g ra tu it dans le dépar
tement des Basses-Alpes;
34 Une mention honorable décernée à M. le docteur Braye, de Tarascon, pour son rapport sur les épidémies observées dans l ’arrondisse
ment d’Arles (Bouches-du-Rbôue).
Projet d'érection d'une statue à Laennec , à Quimper, sa ville notait.
— Ce projet, dû à l’ initiative de M. le docteur Lediberder et delà
Société du Morbihan, a été placé sous le patronage de l ’Association
générale des Médecins de France. 11 s’adresse cependant au Corps mé
dical tout entier.
Un décret impérial, en date du 27 novem bre d e rn ie r, a approuvé ce
projet. Deux commissions ont été instituées dans le but de provoquer
une souscription pour accom plir ce pieux de v o ir envers l’immortel
auteur de la découverte de l ’auscultation.
La commission générale est composée des présidents des Sociétés
locales agrégées ou non à l ’ Association générale.
La commission centrale des voies et moyens ^st présidée par M.
Rayer et a pour secrétaire M. Roger (H enri), membre de l ’Académie
Impériale de Médecine ; Monseigoeur l'Evêque du diocèse, M le préfet
du Finistère, M. le maire de Quimper en font partie. Cette commission,
en se mettant en rapport avec les com m ission s lo ca le s, est chargée de
centraliser les souscriptions et de prendre toutes les mesures qui de
vront hâter l ’exécution du monument.
Enflo, dans chaque département, des com m issions locales doivent
être instituées. Celle des Bouches-du-Rhône a été ainsi composée :
MM. Seux, président; Laurens, secrétaire ; B a rlo li, Broquier, Blan
chard, Cbapplain, Coste, d ’Astros, Despine, D u s illie t. De Ruelle. Fabre,
Girard, Goy, Jubiot, Maurin, Ménécier, M artin (Alexandre), Pirondi,
Rey, Teissier, Verne, V illa rd , de M arseille; d 'A u d ib e rt, Caille, d’Aubagne ; Marloy, d’Auriol ; de Possel, de la Ciotat ; Gouyel, Silhen,
d’A ix; Rondard.de Salon; Braye, de Tarascon ; Imbert, LJrpart, d’Arles.
Uoe souscription est ouverte en même temps dans l ’ Union Médicalt
de la Provence.
Première Liste : MM. Seux, 50 fr.; Laurens, 10 fr.; Blanchard, 5 fr;
E. Lisle , 5 fr.; Broquier, 5 fr.; R ivière de la Soucbère,5 fr ; Chapplain,
5 fr.: Bouisson, 2 fr.; Solari, 2 fr.; Chaum éry, 2 f r .— Total : 91 fr.
(Adresser les souscriptions à M. le secrétaire de la Société, rue
Dauphine, 17.)
Association Médicale des Bouches-du-Rhône .
Une Assemblée géné
rale sera convoquée le jeudi 9 février prochain, à tro s heures précises
du soir, dans le local de la Société Im périale de Médecine, rue des
Beaux-Arts, 3, à Marseille
Le but principal de cette réunion est de d é lib é re r su r l’ importante
question de la révision des lo is qui régissent l ’exercice de la médecine.
N o t a . — Les médecins du département des Bouches-du-Rbône qui
ne font pas encore partie de I Association M édicale et qui voudront
faire prononcer lru r admission dans celte Assem blée générale,sont priés
d’envoyer leur adhésion à M. le secrétaire, avant celte époque.
Le Comité de rédaction.
Marseille. — lm p. Vial, rue Thiara, H,
Assemblée G én érale de l ’A ssociation
M é d ic a le des B o u o h e s - d u -
Rhône, tenue à M a r s e il l e le 9 févrie r 1 8 6 5 .
Rapport sur la révision de la législation m édicale ,
P au le
Docteub L aurbns, secrétaire.
M e s s ie u r s e t chers C o l l è g u e s ,
Depuis que j ’ai l'honneur de rem plir les difficiles fonctions
de secrétaire de la Société locale des Médecins des Bouches-duRhône, j’ai eu plusieurs fois b vous entretenir de questions
pleines d intérêt.
Celle que je viens vous exposer aujourd’ hui se place au-dessus
de toutes par son importance; aussi, plus que jamais, aurez-vous
a constater mon insuffisance à la traiter convenablement.
Toutefois , j ’espère que votre bienveillance accoutumée
voudra bien m’amnistier encore en 11e tenant compte que de ma
bonne volonté.
Me s s i e u r s ,
Nous sommes invités par le Conseil général de l ’Association
générale b étudier les questions sur lesquelles nous désirons
que porte la révision des lois surannées qui régissent l’exer
cice de la médecine et b lui adresser les résultats de nos études
etl expression de nos vœux. C ’ est pour répondre b cette invita
tion que nous sommes réunis aujourd’ hui.
Avant d’entrer dans le cœur de mon sujet, je ne puis m ’ erapêcher de faire une remarque que votre esprit judicieux n ’aura
pas manqué défaire aussi : le mouvement professionnel auquel
il nous est donné de prendre part et qui n’a pas été sans in
fluence pour amener la révision prochaine de la législation
médicale qui nous a été officiellement annoncée , ce mouvement
dis-je, reporte involontairement la pensée vers une époque
déjà éloignée et qui, signalée par la réunion du fameux congrès
médical de Paris, restera mémorable dans les fastes de notre
profession.
En 1845, le corps médical se leva en masse et fit entendre
unanimement les mêmes doléances, les mêmes plaintes amères,
exprima les mêmes aspirations et les mêmes vœux.
Cette importante manifestation eut pour résultat, la présen
tation aux pouvoirs législatifs, en 1849, d’un projet de loi qui,
après avoir été volé par la Chambre des Pairs, fut emporté,
2
�18 —
comme tant d’autres choses, par la Révolution de Février et ne
put recevoir, pour le malheur de la profession médicale, la
dernière sanction législative.
Aujourd’hui, la situation des esprits dans le monde médical
est toute différente. Lorsqu'il nous est permis d’entrevoir le but
si longtemps désiré, nous sommes cependant réservés et pleins
d'inquiétudes ; nous craignons que notre profession ne trouve
pas dans la nouvelle loi des garanties suflîsantes, et, chose
remarquable! les mêmes hommes si ardents en 1845, sont
encore ceux qui prêchent la prudence vingt ans après, et qui
ont peur que le vent de la liberté qui souffle partout n’emporte
les privilèges qui font notre force.
Le rapport si bien fait deM. Amédée Latour, qui a été adressé
h chacun de vous et que vous avez tous lu, est empreint de ce
caractère d’appréhensions et de réserve.
Cette réserve, ces appréhensions, je les comprends, mais je
ne les partage pas; j ’envisage au contraire avec toute confiance
la révision promise de notre code professionnel, car je ne pais
me Caire k l ’idée que des législateurs puissent oublier qu’à côté
de nos intérêts professionnels, se trouvent aussi des intérêts
de l ’ordre le plus élevé, les intérêts sacrés de la santé publique,
qu’ils ne pourraient, sans se rendre coupables envers la Société,
abandonner à l'ignorance, à l’inexpérience et au charlatanisme.
Le conseil général, dans sa sollicitude éclairée, nous donne
un sage conseil auquel la Commission administrative dont je
suis l’organe, s’est ralliée unanimement ; celui de limiter notre
intervention aux questions de l ’exercice de la médecine, sans
l ’étendre à celles de l ’enseignement ; ces dernières sont plutôt
en effet du domaine des corps académiques et des sociétés
scientifiques, que de nos sociétés locales.
Mais nous aurons encore k nous demander, nous dit le
conseil général, s’il n’y aurait pas tout avantage à nous en tenir
dans la manifestation de nos vœux, aux points afférents à la loi
de ventôse qui seule est en discussion, et si ce ne serait pas
nous exposer à des inconvénients graves et à un échec certain,
de demander, dans un intérêt professionnel, des modifications
au droit commun, à la législation générale, à tel ou tel article
du code civil, etc.
La commission administrative a partagé pleinement cette
manière de voir. Il y a certainement, en dehors de la loi de
l ’an X I, de nombreux desiderata à exprim er, bien des lacunes
à combler, des actes même de réparation et de justice à deman
der; mais il vous paraîtra sans doute, comme h nous-mêmes,
qu’il est opportun de laisser, pour le moment, dans l ’ombre
tous ces sujets, quelque importants qu’ils soient.
Si je vous en donne une esquisse rapide, c’est pour vous
montrer combien seraient sérieuses et presque insurmontables
les difficultés que nous rencontrerions sur notre route.
Si vous trouviez, par exemple, insuffisante la fixation à un
an, de la prescription pour les actions k intenter en paiement de
nos honoraires, songez qu’il faudrait demander la révision d ’uo
article du code civil (a^rt. 2272) ; c’est aussi un article du même
code (art. 2101) qu’ il faudrait modifier pour obtenir que le p r i
vilège des médecins, en ce qui concerne les frais quelconques
de dernière maladie, puisse s’étendre h tous les cas de succession
ouverte ou de liquidation forcée.
Voudriez-vous vous occuper des rapports qui doivent exister
entre l’administration et les médecins requis en cas d’accidents
ou d’épidémie ; mais alors vous vous heurtez contre les articles 9
et 10 du code d’instruction crim inelle qui règlent ces rapports.
Si la législation relative au secret médical ne vous convient
pas, il vous faut obtenir la modification de I article 3781 du
code pénal.
Ceux d’ entre nous qui ne sont p is satisfaits de l’obligation
qui nous est imposée dans certains cas de faire certaines décla
rations de naissances, ne savent peut-être pas que pour s’ en
affranchir, c’est encore un article du code civil (art. 56) qu’ il
faudrait faire réviser.
Il est des médecins pour qui le sentiment de l’ indépendance
est poussé k un degré si élevé, qu’ils ont la prétention de s’af
franchir de toute espèce de responsabilité pour les faits q u i
touchent k la profession. Pour arriver a leur but, il faudrait
effacer ou modifier en leur faveur les articles 319 et 320 du
code pénal et les articles 1382 et 1383 du code civ il.
Si vous voulez vous récrier contre l’injuste et hum iliant im
pôt des patentes, il vous faut demander l ’abrogation de la loi
spéciale qui nous l ’inflige.
On voudrait peut-être aussi faire établir et consacrer, pap la
loi nouvelle, qu’il y a lieu de considérer comme expert, tout
médecin requis par la justice pour un acte de sa profession, ou
appelé devant les tribunaux ; mais bien qu’ il n’y ait k ce fait
aucune sanction législative, une décision m inistérielle rendue
en 1861, sur les instances de l’ Association générale et sur le
rapport de M. Tardieu, a donné sur ce point une satisfaction
�—
20
complète au corps médical. Un vœu sur cet objet serait au
moins inutile.
Les partisans de la réglementation quand même voudraient
encore que la nouvelle loi réglât les rapports des médecins avec
les sociétés de secours mutuels, avec les diverses administra
tions; ils iraient même jusqu’à demander un tarif légal d hono
raires. Bien qu’il soit exact, en ce qui concerne les sociétés de
secours mutuels, que les conditions qu’elles font aux médecins
ne leur permettent pas toujours de recevoir des soins complets
et que par suite cette question, se posant an rang d’une question
d’hygiène publique, mérite toute la sollicitude de l’administra
tion, il parait cependant bien difficile de faire de ce chef no
vœu à exprimer.
Je passe sous silence un grand nombre d ’autres questions de
l’ ordre des précédentes que je pourrais vous développer aussi,
mais je crois en avoir dit assez pour vous convaincre qu’ajouter
tous ces problèmes à ceux que nous allons examiner, ce serait
rendre bien difficile l'œuvre déjà si compliquée que uous pour
suivons.
Au premier rang des questions importantes que nous avoosà
examiner et qui se rattachent à la loi de l'an X I , se place celle
des deux ordres de médecins.
Cette question est très délicate, elle a eu le privilège de
passionner les esprits et, en vous en parlant, je ne voudrais
froisser aucune susceptibilité et dire cependant toute ma pensée.
En me plaçant sur le terrain des principes et de l’honorabilité
professionnelle, je ne puis m’empêcher d’ être partisan d'un
ordre unique de praticiens. Il m’a semblé, d’après ce que j'ai
pu lire dans nos journaux de médecine et dans les comptesrendus de plusieurs sociétés locales, que la majorité du corps
médical était du même avis.
Il suffit d’ailleurs de lire avec attention l ’exposé des motifs
de la loi de ventôse qui a créé les officiers de santé, pour recon
naître que leur institution ne répond plus aux exigences de
notre époque.
Cet exposé des motifs m’a paru être leur condamnation la
plus éloquente.
En y réfléchissant bien, la dignité médicale se trouve entachée
et compromise par ce cachet d’infériorité, que la loi imprime au
front d’ une catégorie de praticiens, dont un très grand nombre
sont pourtant parfaitement honorables et ont une instruction
incontestée.
D’une autre part, messieurs, des hommes éminents pensent
qu’un intérêt social s’oppose à ce que le niveau de l ’égalité pro
fessionnelle fasse disparaître les différences des diplômes.
Le projet de loi de 1847 ne voulait plus qu’un seul ordre de
médecins. Lors de la discussion à la Chambre des Pairs, la lutte
fut très vive sur ce point et occupa la noble assemblée pendant
plusieurs séances. M M . Cousin et Flourens furent les p rin ci
paux adversaires de cette disposition du projet de loi ; ce
pendant l ’amendement Flourens fut rejeté et le principe d’un
ordre unique triompha.
Au contraire, nous nous rappelons tous que, l ’année dernière,
alors que le rapporteur d’ une pétition au Sénat, demandant
l’abolition du titre d’ officier de santé, fût favorable à cette de
mande, le premier corps de l ’ Etat se rangea à l’opinion opposée
dont un illustre chimiste, M . Dumas, se fit l ’éloquent champion.
Il est un point qui semble de part et d ’autre accepté, c’est
que, dans les grandes villes, il ne devrait y être conservé qu’un
seul ordre de praticiens. Cette circonstance, que le litre d’offi
cier de santé, plus facile à obtenir, a trop souvent couvert, dans
les grands centres, du manteau de la légalité, un charlatanisme
audacieux, a été un argument auquel les partisans absolus des
deux ordres n’ont pas opposé une réponse victorieuse.
Mais en revanche, il a toujours été allégué par les défenseurs
de l'ordre de choses établi, que les campagnes se trouveraient
sans un nombre suffisant de praticiens pour les desservir.
Cette doctrine est à son tour contestée et on la repousse
principalement par cette considération, que la concurrence
redoutable que les officiers de santé font aux docteurs en
médecine, surtout dans les campagnes, a pour conséquence
d’éloigner de notre carrière, un nombre notable de jeunes gens
et diminue ainsi le chiffre des praticiens. Et d’ un autre côté,
cette même concurrence fait relluer les docteurs en médecine
dans les grandes villes où l’on constate, en apparence du moins,
une certaine exubérance.
La statistique seule, établissant la situation relative des deux
catégories de médecins dans {es villes et dans les campagnes,
pourrait fournir des données précieuses pour élucider celte
difficile question.
Voici ce qu’ elle nous apprend pour notre département:
Sur une population de 497,118 habitants, nous avons un
total de 367 praticiens dont 261 docteurs en médecine et 106
officiers de santé.
�22
—
Ce chiffre de 367 praticiens se décompose ainsi :
A Marseille, 173 docteurs et 50 officiers de santé ; la popu
lation de notre ville est de 260,910 habitants.
A Aix (population 27*059 habitants), 20 docteurs et 3 officiers
de santé.
À Arles (population 25,543 habitants), 10 docteurs et pas
d'officiers de santé.
A Târascon (population 13,439 habitants), 4 docteurs et pas
d’officiers de santé.
Dans les villes dont la population est inférieure h celle des
villes ci-dessus et supérieure h 2.000 habitants : 30 docteurs et
35 officiers de santé.
Dans les localités dont la population est en dessous de 2,000
habitants : 18 docteurs et 23 officiers de santé.
Ce qui vous frappera dans ce tableau, c’ est :
1° f.c nombre relativement considérable des officiers de santé
h Marseille, grand centre de population!
2° Leur nombre peu élevé à A ix ;
3° Leur absence complète a Arles et à Tarascon ;
4° La proportion à peu près égale des deux ordres de prati
ciens dans les localités moyennes et les petites localités.
Les recherches qu'il m’a été donné de faire établissent encore
que dans les villes moyennes où exercent deux, trois ou un
plus grand nombre de praticiens, les officiers de santé y sont
en nombre égal ou à peu près égal aux docteurs en médecine.
De plus, telle localité peu importante (1,684 habitants)
compte cependant deux docteurs en médecine ; telle autre,
moindre encore (1,580 habitants), en compte aussi deux.
Par contre, telle ville de 2,130 habitants n ’a pas de docteur
et possède deux officiers de santé, et telle autre plus importante
encore (2,788 habitants) ne compte aussi que deux officiers fie
santé.
Rien ne justifie donc dans notre département l ’opinion que
les officiers de santé habitent surtout les localités dont ne vou
draient pas les docteurs en médecine. Il est plus exact de dire
qu’officiers de santé et docteurs n ont dû consulter que leurs
convenances personnelles dans le choix de leur résidence.
Il m’a paru encore que, dans notre département, aucune localité
occupée par un praticien n était assez déshéritée pour ne pas
être suffisante à un médecin de l'un ou de l ’autre ordre.
—
23
—
Il vous est donc proposé, Messieurs, d’émettre un vœu pour
qu'à l’avenir il n'y ait plus en France que des docteurs en mé
decine, en respectant, bien entendu, les droits acquis et en
donnant même aux officiers de santé actuels les plus grandes
facilités pour arriver au doctorat.
Subsidiairement, votre commission a été d’avis de vous pro
poser d’ émettre aussi le vœu que dans le cas où le maintien des
deux ordres serait décidé comme une nécessité sociale:
1° Il soit spécifié d’ une manière bien nette, par la loi nou
velle, que les praticiens du deuxième degré ne puissent pas se
fixer dans les villes importantes et dont la population serait à
déterminer...
2' Que les différences dans les droits et prérogatives attachés
aux deux diplômes soient parfaitement définies.
Il est de toute justice que les obligations et les conditions
d’aptitude exigées étant différentes, les prérogatives et les
droits doivent être differents.
Vous voudrez bien déclarer, toutefois, que les droits acquis
doivent, en tous cas, être sauvegardés.
Il serait surtout à désirer que la nouvelle loi fixât le titre que
les médecins du deuxième degré, devraient obligatoirement
prendre vis-à-vis du public et qui servît à les différencier des
docteurs en médecine.
Ce serait un puissant moyen de décider ceux pour qui l ’ob
tention du titre d’officier de santé ne devait être d ’abord qu’une
étape sur le chemin du doctorat, à couronner le plus tôt possi
ble l’édifice de leur éducation médicale.
Passons à un autre côté de la question :
Le grand vice de la loi de Ventôse, celui qui a été la cause
principale de nos griefs, est son silence relativement à la sanc
tion pénale de l’exercice illégal de la médecine. Cet exercice
illégal est spécifié comme un délit; seulement aucune peine n ’y
est édictée et la jurisprudence, obligée de suppléer au silence
de la loi, a décidé que ce délit, quoique justiciable des tribu
naux correctionnels, ne serait puni que par les peines de simple
police, c’est-à-dire comme une contravention.
Et alors, qu’est-il arrivé ?
La peine dérisoire appliquée a été impuissante pour arrêter
les coupables. Les parquets eux-mêmes qui doivent poursuivre
ce délit ont vu leur zèle pour l’accomplissement d’ un devoir
�s’émousser devant l’absence des conséquences pratiques de
leurs poursuites.
E l cependant, comme le charlatanisme levait de plus en plus
hardiment la tête, comme la santé publique en était chaque
jour de plus en plus menacée, il a fallu entasser Pèlion sur Ossa
pour atteindre ce fléau dévastateur , il a fallu recourir au prin
cipe du cumul des peines, appliquer une peine pour chaque
maladie illégalement traitée, pour chaque consultation illégale
ment donnée; mais ici encore, comme l'on avait affaire à une
simple contravention et que la contravention prescrit par ud
an, on était dans un grand embarras quand il s’ agissait de
relever contre les délinquants un nombre de contraventions
suffisant pour arriver à une amende importante.
Et alors, les médecins ont dû intervenir comme parties civiles
pour que les dommages-intérêts alloués, s’ ajoutant au montant
de l’amende, vinssent accroître la gravité de la peine.
Vous vous souvenez tous de ce qu'il a fallu de courage aux
associations médicales et de zèle de la part de leurs dévoués
conseils judiciaires pour arriver aux résultats obtenus.
Sans doute il est advenu souvent, grâce â cette jurisprudence,
que l ’Association Générale peut s ’enorgueillir d’avoir fait établir
que des condamnations sérieuses ont atteint les délinquants;
je ne veux vous en citer que I exemple d’ un jugement tout ré
cent rendu, à la date du 20 janvier 1865, par le tribunal de
Niort. Ce jugement s’est traduit par 5, 460 fr. d ’amende pour
exercice illégal de la médecine (546 contraventions â 10 fr.
chacune), par la prison et une nouvelle amende pour délit
d’escroquerie.
Mais de pareils résultats sont tout à fait exceptionnels et le
plus souvent les condamnations sont illusoires.
Vous émettrez donc un vœu pour qu’ une pénalité importante
soit édictée par la nouvelle loi contre l’ exercice illégal delà
médecine.
La loi de 1847 avait proposé contre tout délit d’exercice
illégal un emprisonnement de six mois à deux ans, et, en réci
dive, de deux à cinq ans.
Cette peine fut trouvée trop sévère par quelques membres
notables du corps médical qui craignaient que les tribunaux
hésitassent à appliquer une peine aussi forte. Il était plus ra
tionnel de penser que la menace d’ une pareille pénalité aurait
rendu les charlatans et les empiriques à des occupations plus
Après avoir parlé d’une manière générale du délit d ’exercice
illégal,je vais l’examiner chez différentes classes de délinquants.
De bons esprits ont pensé qu’une aggravation de peine de
vrait être prononcée contre les pharmaciens et les sages-femmes,
et cela parce qu’on est en droit d’imposer une plus grande
responsabilité à ceux qui violent la loi, en raison des facilités
qu’ils tiennent de leur position elle-même.
La commission administrative n’ a pas cru devoir vous pro
poser de faire cette distinction ; elle a pensé que du moment où
une peine sévère serait édictée contre le délit d’exercice illégal,
c’était un moyen suffisant de maintenir tout le monde dans la
légalité.
Vous voudrez bien cependant stipuler que la complicité de
l’exercice illégal par des médecins doit être frappée par la
nouvelle loi.
Puisque je viens de parler des pharmaciens, j appelle votre
attention sur l’ incompatibilité inscrite dans la législation entre
l’exercice simultané de la médecine et de la pharmacie et contre
laquelle manque pourtant une sanction pénale.
Nous pourrons émettre le vœu que la loi nouvelle comble
cette lacune.
Le projet de loi de 1847 (art. 6) prononçait cette incompa
tibilité.Toute contravention à cette disposition et toute associa
tion publique ou secrète d’un médecin avec des pharmaciens
étaient passibles de l ’emprisonnement de six mois â deux ans.
Il est un point que je ne veux pas omettre, c ’est celui qui
concerne les médecins étrangers Nous en avons eu h M arseille
et nous sommes exposés â en avoir encore. Nous émettrons le
vœu que les médecins étrangers ne soient pas admis, en France,
à l’exercice de la médecine par une simple mesure ad m in istra
tive, mais que la loi leur impose des épreuves qui deviennent
de suffisantes garanties d ’aptitude et de moralité.
J’aborde un sujet délicat, l’exercice de la médecine par les
congrégations religieuses et les ecclésiastiques, cet exercice
imprudent et téméraire qui, sous le manteau de la charité, fait
de si nombreuses victimes.
L ’envahissement de cette espèce d’exercice illégal est tou
jours croissant et trop rarement réprimé. C ’ est ici notre plus
grand danger, et il y a lieu de redouter que par leur habileté
�26
—
ordinaire d'action et par le jeu bien conduit des hautes influen
ces qui les protègent, les corporations religieuses puissent
échapper aux dispositions prohibitives de la nouvelle loi.
Cependant, Messieurs, exprimons aussi sur ce point notre
vœu dans toute la franchise de nos convictions et avec toute
confiance.
Les congrégations religieuses pourraient-elles échapper à ce
dilemme : ou l’exercice de la médecine est pour elles une
source de bénéfices, comme cela n'est que trop vrai pour un
certain nombre, et alors n ’y a-t-il pas là un trafic entaché de
l’immoralité la plus flagrante, ou bien la charité seule est leur
mobile; mais cette charité n ’est-elle pas au moins bien impru
dente.
Voilà, Messieurs, quelques-uns des motifs qui nous détermi
nent à demander que l’interdiction de la médecine, prononcée
contre tous ceux qui ne remplissent pas les conditions voulues
d’aptitude, soit absolue et sans exception et atteigne aussi
l’exercice illégal gratuit de la médecine.
Sur la question des remèdes secrets, nous ne pouvons man
quer d’avoir une opinion unanime. Le trafic de ces sortes de
remèdes est un des plus graves abus dont la profession médicale
ait à se plaindre. La législation actuelle sur cette matière serait
satisfaisante, puisque l’article 36 de la loi du 21 germinal
an X I prohibe d’une manière absolue l’ annonce de tout remède
secret, annonce faite par voie d’affiches ou autrement, et que
le décret du 29 pluviôse an X III la punit d'un emprisonnement
de trois à six jours. Mais, par une étrange anomalie, la vente
du remède secret par un pharmacien, lorsqu’il n’y a pas en
même temps le délit d’annonce, peut échapper à l ’application
de la peine. Il y a donc sur ce point une lacune grave dans la
loi et sur laquelle nous appellerons l'attention du conseil
général.
Quant aux annonces médicales en général, deux opinions
sont en présence : l’ une veut leur suppression complète et
absolue ; l’autre demande seulement leur réglementation et,
par exemple, que l’annonce d’un remède on d’une substance
thérapeutique quelconque soit dégagée de toute indication
médicale et ne soit pas livrée, comme aujourd’hui, à la plus
déplorable licence.
La deuxième opinion, celle de la réglementation de l’an
nonce, a paru à votre commission préférable et même seule
admissible.
—
27
—
Le projet de loi de 1847 portait création dans chaque canton
d’un ou de plusieurs médecins, chargés de visiter les indigents,
de porter secours aux malades atteints par les épidémies, de
remplir toutes les fonctions de médecine légale, administratives
ou judiciaires qui leur seraient régulièrement déférées, de
transmettre à l'autorité supérieure les faits et documents pro
pres à servir les intérêts de la science et ceux de l'hygiène
publique.
La nomination de ces médecins cantonaux appartenait aux
préfets : elle était faite pour cinq ans ; leur traitement devait
être déterminé par une loi spéciale.
La création des médecins cantonaux, telle qu elle était faite
par ce projet de loi, ne tendait à rien moins qu’à transformer
les médecins en fonctionnaires de l ’Etat ; elle portait certaine
ment atteinte à l ’indépendance du corps médical, et je De pense
pas que cette création soit plus désirable aujourd’hui.
On fit même, dans la discussion, le reproche que les méde
cins cantonaux, étant à la nomination du préfet et soumis à la
réélection tous les cinq ans, seraient entre les mains du gou
vernement des agents électoraux auxquels leur position parti
culière donnait une grande influence.
Malgré ces objections sérieuses, on ne peut méconnaître
qu’il serait important que, pour ôter tout prétexte au charlata
nisme, la médecine des indigents fut organisée d’une manière
régulière partout, et même dans les campagnes. Les bases de
celle organisation seraient à chercher. D ’avance on peut
cependant affirmer que des médecins communaux, limitant leur
action à la commune, rendraient de plus grands services que
les médecins cantonaux dont la juridiction médicale s’étendrait
à tout le canton.Par celte substitution, les malades obtiendraient
des soins plus complets et l ’indépendance du médecin ne serait
pas aussi facilement mise en péril.
Il est un dernier point sur lequel j ’ai un mot à dire : je
veux parler de la moralisation de notre profession Je n ’ai ici
qu”a m’en référer à votre décision du 30 août dernier, par
laquelle vous demandez l’ institution de conseils de discipline.
Je me borne à vous rappeler le vœu que vous avez émis
alors, car je ne veux pas abuser plus longtemps de votre
attention.
Et en finissant, qu’il me soit permis de vous dire, Messieurs
et chers collègues, que les vœux que vous allez émettre pour
être adressés au conseil général auront une rare bonne fortune.
�—
28
—
—
Ils y arriveront sons l’égide de notre honorable président qui,
vous l’avez tous appris avec bonheur, a été appelé, en octobre
dernier, k siéger dans le conseil supérieur de l’Association
Générale.
Ils y seront défendus avec cette éloquence persuasive et ce
zèle éclairé que personne plus que moi n’ a pu si bien apprécier.
Vous m’auriez trouvé bien oublieux si je n'avais saisi l’occa
sion de celte première Assemblée Générale pour adresser nos
félicitations les plus cordiales et les plus sympathiques a M. le
président Seux, membre du Conseil Général de l’ Association
Générale.
Nota. — Dans le prochain numéro , nous ferons connaître
la discussion gui a suivi ce rapport et les résolutions qui ont
été prises par /’ Assemblée.
29
—
vulsions. Jamais auparavant il n'avait eu d’attaques semblables.
Le soir, les symptômes de la pneumonie reparaissent. Alors,
le 18, deux saignées ; le 19, deux autres saignées, de 4 palettes
chacune. Dans cinq jours, du 14 au 19, on enlève a ce m al
heureux quatre kilogrammes de sang. Depuis ces saignées,
dit M. F ort , il n’a jamais recouvré la santé.Nous n’en sommes
pas surpris, et nous trouvons plus étonnant qu’ il ait conservé
la vie. Il a fallu qu’il fut d’une robuste constitution.
Immédiatement après, il est pris de paralysie du rectum et
de la vessie. On l ’envoie dans le service de M. V e l p e a u ,
où
il
passe trois mois. Dans l’intervalle, il a plusieurs attaques sem
blables k la première.
De chez M. V b l p b a u , il va au service de M. B r i q u e t . Lk, la
O BSE R V A T IO N S.
paralysie gagne les quatre membres. La langue, elle-même, est
paralysée. Il a une hémiplégie faciale. E nlin, depuis le l* r jan
L'Union Médicale de P an s , dans son numéro du 20 décem
vier 1862, il se trouve dans le service de M. B bau . Les attaques
bre dernier, publie une observation recueillie par le Dr F ort ,
hystériques se renouvellent. Son état se complique de tous les
dans l ’hôpital de la Charité, salle Saint-Louis, et intitulée :
accidents de la gastralgie la plus prononcée. La paralysie com
Cas d'hystérie chez l'homme consécutif à des émissions sanquines abondantes.
plète du mouvement et de la sensibilité persiste dans les mem
Cette observation nous a paru assez intéressante pour être
un peu dégagés. En terminant le compte-rendu de cette obser
prise en considération. Nous l’appellerions volontiers l 'histoire
vation si intéressante, nous sommes tenté de répéter cette
lamentable d’ une pneumonie traitée h grand renfort de lancette.
phrase si connue : Et nunc erudimini !
bres inférieurs et le petit bassin. Les membres supérieurs sont
Le nommé Bourgeat Alphonse, 57 ans, plombier, entre à
l’hôpital de la Charité , salle Saint-Louis, n° 14, le 14 février
1861 (il était déjà malade depuis dix-neuf jours). Sans doute,
il avait encore conservé toutes ses forces, k en juger du moins
par la résistance qu’il a montrée, nous ne dirons pas k la maladie,
mais au traitement; le 14 on lui fait tro is saignées ; le 15, deux,
et le 16, une, de 4 palettes chacune, en tout 2 kilogrammes
IN T É R Ê TS
P R O FE SSIO N N E LS.
T R IB U N A L C O R R E C T IO N N E L D’ A V IG N O N .
Présidence de M. Michaélis .
Audiences des 14, 21 et 28 décembre.
EXERCICE ILLÉGAL DE LA MÉDECINE. — VENTE
SECRETS. — ESCROQUERIE.
DE
REMÈDES
400 grammes.
Le 17, son état est mieux, les symptômes de la pneumonie
Le tribunal d’Avignon a consacré plusieurs audiences au
ont disparu, mais sous l’influence d ’une émotion il a un accès
jugement de trois affaires, k peu près de la même nature, rela
nerveux, avec boule hystérique, perte de connaissance et con-
tives a des faits d’exercice illégal de la médecine et d’escroque-
�-
30
—
rie, commis dans cet arrondissement de 1863 h 1864. Les
tribunal une lettre adressée à Andruéjol par un homéopathe
prévenus, au nombre de cinq, sont les nommés : 1. Alexis
distingué des environs. Cette lettre est ainsi conçue :
« Mon cher Andruéjol,
Vève, âgé de cinquante-trois ans, cultivateur h Robions; 2.
Andruéjol. herboriste, et 3. Sabine, tailleuse, sa femme, domi
« Je suis passé chez vous ce matin, et je n ’ai trouvé que votre
ciliés h Avignon ; A. François Robert, propriétaire à Bollèoe;
« femme. Arrangez-vous de façon à venir à M arseille passer
5. Henri Gilles, officier de santé, demeurant également h Bol-
« une quinzaine de jours ; il y a de l'argent a gagner ; appor-
lène. Des faits de la plus hante gravité ont été relevés parla
« tez de la poudre en quantité, et, surtout, ayez soin d ’être
prévention, et l’on a vu défiler aux débats les nombreuses
« bien habillé, parce que les gens qui ne sont pas bien mis
victimes de ces empiriques, dont quelques-unes portent encore
« n’inspirent pas de confiance. Je vous prendrai en passant à
les traees des mutilations qu’on leur a fait subir.
« Avignon. Mes amitiés à Mme Andruéjol, et tout à vous de
« cœur.
« Signé : Augier , docteur homéopathe à Carpentras. »
Le prévenu Vève était connu, dans le canton de Cavaillon,
comme possédant un onguent infaillible pour guérir les panaris;
si quelquefois le mal résistait au remède, il avait recours au
L ’inculpé Robert, de Bollène, est un empirique des plus
bistouri ou même aux simples pincettes pour faire disparaître le
dangereux; d’abord condamné à dix ans de réclusion pour faux
doigt malade, et les opérations chirurgicales auxquelles il $e
par la cour d’assises de Vaucluse, il a subi de nombreuses con
livrait, s’il faut en croire les témoins, auraient amené la mort
damnations pour exercice illégal de la médecine. G illes, déjà
de l'un de ses trop crédules clients. Vève reconnaît les faits
plusieurs fois également frappé par la justice, n ’a tenu aucun
relevés à son encontre, et prétend avoir apporté son secret de
compte des condamnations qu’il a encourues Tous deux se
Cayenne ; il ajoute qu’il faisait de la médecine par charité, sans
rendaient à Avignon à de fréquents intervalles, s’ installaient
toutefois refuser les petits cadeaux qu’ on lui offrait en nature
dans un appartement de l ’hôtel des T ro is-M u le ls, où ils rece
ou en argent.
vaient de nombreuses visites de malades que G illes, l ’agent
responsable de son dangereux complice, visitait, et auxquels il
Andruéjol est déjà connu au palais ; il a eu à comparaître
donnait des consultations dont Robert retirait le prix.
devant le tribunal une première fois pour des faits de même
Après l’ audition de nombreux témoins qui ont confirmé les
nature ; il est incorrigible, et, cette fois, il ajoute l ’escroquerie
faits indiqués parla prévention, M. Roussel, substitut, a, dans
larité à Avignon; il applique des emplâtres et administre une
un remarquable réquisitoire, habilement relevé les charges qui
poudre fébrifuge que des personnes intelligentes, il faut le dire
s’élevaient contre chacun des prévenus ; sa parole élégante et
à regret, ont employés quelquefois en les payant fort cher.
facile a captivé l ’auditoire pendant plus de
D ’autres ont bien payé les remèdes, mais elles les attendent
Ce magistrat a démontré, dans un langage é le v é , que les
encore. Andruéjol est porteur de nombreux certificats, tous
actes d’exercice illégal de la médecine compromettent gra
conçus dans les mêmes termes, et légalisés par les maires des
vement la santé publique ; que ces dangereux em piriques,
communes où il a exercé son industrie. Son défenseur, M*
loin d’apporter aux malades une guérison qu’ ils promettent
Terrasse tifs, avocat, voulant démontrer que les remèdes dé
toujours, laissent aggraver quelquefois le mal et rendent sou
bités par son client pouvaient bien avoir quelque vertu, lit au
vent la guérison impossible. Il a en outre établi, à l’aide de la
I
deux heures.
�-
32
jurisprudence et de la doctrine, que le corps médical, juste
ment alarmé des abus qui se produisent sous ses yeux, pouvait
intervenir et demander une réparation que les tribunaux oe
sauraient lui refuser. Enfin, M. le substitut a requis uüe appli
QUELQUES MOTS SU R L A V A C C I N E E T L A V A C C I N A T I O N
A propos de la discussion actuellement pendante
A L ’A C A D É M I E
DE
M É D E C IN E
DE
P A R IS.
cation sévère de la loi contre ces hommes qui se font un jeu
On aurait fort b faire si l ’on prenait b tâche de combattre
de la santé publique et qui sont d’autant plus dangereux qu'ils
pied b pied tous les préjugés populaires qui, a des époques
trouvent un accès plus facile auprès des ignorants.
variables, se font jour dans le public. Ce ne serait pourtant pas
M* Eugène Fortunet, du barreau de Garpentras, dans une
travailler b un sujet dépourvu d’intérêt que de prendre en sous-
spirituelle plaidoirie, a soutenu les droits du corps médical et
œuvre chacun de ces préjugés, l ’étudier b fond dans son évolu
demandé des dommages-intérêts contre chacun des prévenus.
tion, et montrer b quelles conséquences, parfois fort graves,
M 'Sylvestre, avocat, a présenté avec beaucoup de chaleur
celte évolution peut atteindre lorsqu’ elle n ’est nullement gênée
la défense des prévenus Vève, Robert et Gilles, et M° Terrasse
dansson développement. A insi, par exemple,quel rôle ne fait-on
fils a prêté le secours de son talent aux époux Andruéjol.
pasjouerbla sécrétion lactée, et b quels voyages extraordinaires
Le tribunal, après une longue délibération, a rendu un juge
ne soumet-on pas le lait, soit que la femme ne nourrisse pas,
ment qui condamne: 1* Vève b 15 fr. d’amende et 25 fr. de
soit b l’ époque du sevrage ? Et les helminthes, y a-t-il une
dommages-intérêts ; % Andruéjol à un mois d’emprisonnement,
seule maladie de l ’enfance qui, aux yeux du vulgaire, ne compte
50 fr. d’amende et 100 fr. de dommages-intérêts; 3* la femme
pas ces parasites parmi ses causes
Andruéjol à 50 fr. d’amende ; 4° Robert à 45 fr. d'amende et
actives? Toutefois, il faut reconnaître, avec quelque humilité,
100 fr. de dommages-intérêts ; 5° G illes, à 45 fr. d’amende et
que tous ces préjugés ne sont que l ’exagération d’un fait qui a
100 fr. de dommages-intérêts.
pu sans doute être incomplètement observé, mais qui, mieux
pathogéniques les plus
étudié, peut donner, sinon complètement raison au préjugé
MONUMENT
A
LAENNEC.
lui-même, du moins m otif suffisant pour parer dans quelques
circonstances b de sérieuses éventualités.
Souscription publiée par l ’Union M é d i c a le de la Provence.
2œe LISTE.
MM. Aubin, 5 fr.; Clot-Bey, 5 fr.; Dugas, 5 fr.; Verne, 2 fr.;
Larcbe, 2 fr,; Lambert, 1 fr.; Lauzet, 2 fr.; Rolland, 2 fr.;
Roux (de Brignolles), 5 fr.; Ch. Gués, 5 fr.; F . Ghcvillon, 5 fr.;
Laugier, 5 fr.; De Possel (de La Ciotat), 5 fr.; Guibert (de
La Ciotat), 5 fr. — Total.........................................
52 fr.
Montant de la première liste..................................
91
Les réflexions qui précèdent feront facilement comprendre,
nous l’espérons, dans quel esprit et avec quelle mesure nous
voulons toucher aujourd’hui b une question qui, après avoir
longtemps ému le public, a fini par préoccuper les médecins
eux-mêmes, envahir les journaux et enfin les académies.
Nous ne rappellerons pas ici les immenses services rendus b
l’humanité par l ’immortelle découverte de Jenner. On ne peut
les nier lorsqu’on connaît l’histoire des épidémies varioleuses si
fréquentes autrefois et si meurtrières, plus rares et plus bénignes
aujourd’hui. Nous dirons plus, leur retour assez fréquent dans
ces derniers temps, coïncidant avec le relâchement que l’on u
3
�mis,
pas dans les vaccinations, mais dans le choix et le re
et d'où peuvent être réffélés des principes, non-si’iilement im
nouvellement du vaccin, cette circonstance elle-même, toute
portants pour la science elle-même, mais pour cette partie de la
regrettable qu elle est, vient à l’appui du bienfait de cette dé
science vers laquelle doivent tendre les efforts de tous les méde
couverte.
cins: I hygiène publique.
uod
Cependant, dès l’époque où cette méthode a et»' généralisée,
U conliance du public en la vaccination ne sera nullement
on a commencé à redouter que le virus vaccinal, transmis de
ebraolée si, à côte des dangers de la petite vérole que l’on con
bras à bras, transplantât d uo enfant à l’autre non-seulemeot
jure, vous lui faites entrevoir qu'en réalité il est un certain
ce que l'on demandait, mais beaucoup plus qu ou n’aurait
Jauger auquel elle expose qui n'est pas précisément de la nature
voulu , et c ’est ainsi que i on a cru pouvoir accuser la vaccina
de ceux que l'on craignait jadis sans en offrir moins de gravité ;
tion de symptômes lymphatiques, scrofuleux ou darlreux qui,
mais ce sera b la condition qui) côté du danger constatable et
au bout d’un temps plus ou moins long, se présentaient sur
constaté vous signalerez le moyen propre à le conjurer.
l’enfant vacciné. C’était déjà beaucoup; mais plus tard une
Cela dit, reprenons succinctem ent l'histoire des faits.
accusation bien autrement grave a pesé sur la vaccine: de tous
Sans remonter aux
premières observations si précises de
les virus le plus redouté, si ce n’est le plus dangereux, le virus
Cerioli qui datent déjà d'une quarantaine d'années, il est juste
syphilitique a été accusé de suivre la lancette vaccinale pour
de reconnaître qu'avant ce qu’on a appelé l'épidémie de Kivalla,
transporter ses tristes effets d uo entant contaminé à un antre
quelques faits étranges avaient préoccupé le public médical, et
qui oc l'était pas; et si pareille rumeur n’a pu (oui d'abord
il faut citer surtout les deux faits de M. Leroq, publiés dans b
trouver crédit qu'auprès de ceux qui u ont pas mission de s oc
Gazette dtê Hôpitaux, en 18oîî. Ce n’est cependant qu’à partir
cuper de science, il a fallu bientôt que la science elle-même
de la publication d e là première lettre de M. Pacchioti (18*51),
examinât une question aussi brûlante, et de tous côtes on s’csi
que l’émoi ion est devenue g nérale, et qu’elle s’est en quelque
mis à l'œuvre non uniquement dan» le but de savoir, comme dit
sorte régularisée et constituée au moins en doute scientifique
Montaigne, si le fait est, mais aussi pour trouver les moyens
autour de I iulére»saol un moire de M. Viennois (1 8 5 2 ). Cet
d’obvier au danger qui menaçait une des mesures prophylacti
auteur résumait admirablement l étal de la question comme
ques les plus importantes des temps modernes.
il a élucidé avec non moins de talent, pour le dire en passant,
Eb bien, ti en déplaise aux esprits timides qui, avec les meil
le» équivoques qu a pu faire naître la discussion actuellement
leures intentions du monde, rnis eu présence d un fait fâcheux
ouverte au sein de l’Académie de Médecine de Paris. Depuis
ou regrettable,se figurent oe pouvoir mieux faire que de passer
1852, d autres faits isoles ont été publics çà et là, soit en France
le fait sous silence et d’imposer un mutisme complet à lousceui
soit à l’étranger, et lorsque, à la Un de 18(54, M. Depaul, rap
qui auraient été à même de le connaître, nous pen>on$ que ce
porteur de la commission de vaccine, a cru devoir appeler sur
silence n est logique et acceptable que lorsque le fait lui-même
cette grave question I attention de l’Académie, voire même celle
n est susceptible d'aucune conséquence fâcheuse, et qu'il con
de l'Administration, nous tenons qu d a lait acte de courage
centre ses résultats sur ce qui » est individuellement passé saos
iuhul que de couscience medicale. Et qu'on n dise pas que la
crainte de retour ni d extension. Dans le ras contraire la lumière
rareté des bits incriminés pouvait lui conseiller de garder un
doit être portée daos les moindres recoins ou la science pénètre
piudenl silence. Nous ne comprenons pas d'abord ce qu’il y
�aurait de louable dans un sentiment de prudence qui peut ex
Esl-ce à dire qu on ait fait table rase de leurs travaux, et que
poser le prochain, si ce n est un des vôtres, à un accident re
leurs noms soient tombée dans l’oubli ? Assurément non ; et en
doutable. Cet accident ne dût-il se présenter que dans la pro
mettant M. Ricord en si bonne compagnie, nous aimons à
portion d'un sur deui mille, sur quatre si l'on veut, ce serait
croire que ses plus chauds admirateurs ne se formaliseront pas
déjà trop. Mais nous pensons malheureusement que celte rareté
trop des remarques qui précèdent, ni de celles qui vont suivre.
est bien plutôt due aui observateurs eux-m êm es qu aux faits qui
Répéions-le donc : les idées syphilographi.jues qui ont régné
n’ont pu être aussi exceptionnels. Et quel que soit notre ardent
jusqu'à ces dernières années n'ont pas permis que l'on s'iden
désir d éviter la moindre allusion à des questions doctrinales qui
tifiât plus tôt avec l'idée de la transmission des symptômes secon
enveniment mal à propos les discussions les plus simples, nous
daires de la syphilis. L’épreuve clinique n était rien, et M.
ne pouvons pourtant ne point consigner ici une réllexion géné
Rollet n’avait pas encore levé* le doute laissé* dans les esprits par
rale qui, nous en sommes sûr, doit être dans l'esprit si elle n'a
les expériences antérieures de W aller, Vidal et autres. Puisqu'on
déjà été dans l'expression de plusieurs de nos confrères. Le
niait la contagion des symptômes secondaires, on ne pouvait
véritable motif qui a du empêcher qu’on ne s'aperçut plus tôt et
réellement croire à l’inoculation de la syphilis par la vaccine, et
plus souvent de la complication syphilo vaccinale, c est la diffi
encore moins était-il facile de découvrir la plaque ou l'ulcéra
culté qu'a eue la génération médicale actuelle à reconnaître la
tion caractéristique au-dessous ou autour de la pustule vacci
transmissibilité des symptômes secondaires de la vérole, et celte
nale. Les faits de syphilis vaccinale sont rares aujourd'hui, nous
difficulté, pourquoi ne pas le dire, a été une des conséquences
l'admettons ; qu'ils aient été aussi rares par le pa>sé, nous en
les plus malheureuses de la doctrine de l'hôpital du Midi.
douions. Encore une fois, les doctrines ont changé depuis quel
E st-ce à dire qu'en parlant ainsi nous oserions refuser à M.
ques années, fort heureusement ; et, en toute chose de cette
Hicord l utile influence qu il a exercée sur IVlude des maladies
nature, on y regarde de plus près.
syphilitiques et sur le progrès que cette étude a permis d attein
Quoi qu’il en soit, la question grave agitée en ce moment à
dre ? N«»n, mille fois n on ; nous professons pour M. Ricord,
l'Académie de Médecine et qui a soulevé, pour et contre, l'opi
pour son remarquable talent et son agréable caractère, autant
nion de toute la presse médicale peut, selon nous, se résumer
d'estime que de sympathie. Comme tant d'antres, nous avons
par les interrogations suivantes :
mamies fois applaudi à des improvisations pleines de verve et
Est-il, oui ou non, parfaitement avéré aujourd’ hui que dans
où l'initiative d'un esprit hardi et cultivé sVlaoçail au delà des
quelques cas un enfant syphilitique peut, |tar la vaccination,
faits bruts pour entrer dans un domaine de généralisation fort
donner la syphilis à un enfant indemne?
peu cultivé, il faut le dire, à l’époque où florissait l’école du
Midi. Mais, tout eu rendant cette légitime justice à qui Je droit,
nous ne pouvons nous empêcher d ajouter que la doctrine de
Quel est le véhicule de cette contam ination? E st-ce le liquide
vaccinal pur, ou esl-ce le sang de l'enfant contam iné?
En cas de réponse affirmative à la première des deux précé
M. Ricord, comme toutes celles qui l'ont précédée, a pu faire
dentes questions, quelles sont
quelque bien à côté de beaucoup de mal. Sans remonter très
prévenir des accidents aussi regrettables?
loin dans l'histoire de la médecine, oo peut adresser les mêmes
éloges et le même reproche à Brown, à Basori et à Broussais
les mesures à prendre pour
En supposant que l'état actuel de la science permette aux
médecins de se prononcer sur la seconde question, les mesures
prophylactiques proposées sont-elles suffisantes?
�!• L*»rsqu un fa»l est avancr, quelque rhmpiaut qu'il puisse
être ou paraître,
pu
egard à nos idées, il u y a que deux ma
reçu la vérole de la vaccine prise sur un enfant syphilitique.
Mêmes hypothèses, non moins nombreuses, sont nécessaires
nous
pour nier les faits Lecoq ; tandis que la manifestation des pre
proposant de le contrôler à la première occasion, ou le nier
miers accidents sur les bras, au point même «le l'insertion vac
carrément, «ous prétexte qu’il a été mal observé.
cinale, explique la chose tout naturellement sans accuser per
nières «le benviager : l'accepter sous r é t i n e , ei
pii
Il répugnera toujours à notre esprit «le refuser à d honorables
sonne de mensonge ou de supercherie. Mais là ou les faits
confrères f instruction necessaire pour se rendre compte de ce
deviennent d'une évidence qui ne permet réellem ent plus à
qu'ils voient, t u d autres termes, nous ne pouvous consentir *
l'opposition de présenter un argument raisonnable, c ’est I épi
gratifier qui que ce soit d’un brevet d'ignorance, et c'est se
démie de Rivalta, à propos de laquelle M. Devergie a trouvé,
livrer a une pareille inconvenance que de dire à un confrère,
ce nous semble, l'argumentation la plus positive et la plus
chez qui nous ne pouvons noua arroger le droit d'admettre
probante que I on ait développée devant l’Académie. Sur 49
moins d’instruction que chez nous même : vous n'avez pas vu
enfants vaccinés à Rivalta, il y en a eu 4L) atteints de syphilis,
ce que vous croyez avoir vu ; vous n'éles pas capable de distin
ou G sur 7. Est-il possible d adm ettre, dit M. Devergie, qu’une
guer les apparences de la réalité ; ce que vous tenez pour vrai
proportion pareille représente le nombre des enfants atteints de
est faux. Répondre par une pareille lin de non-recevoir à ceux
syphilis congénitale ou ceux infectés pendant I allaitem ent?
qui vous tout part de ce qu'on pourrait croire une exception,
Il faudrait que la vérole lût endémique dans la population
ce n'est pas rétorquer des arguments par des arguments, c'est,
agricole de Rivalta, et on a tout lieu de penser qu elle n'y est
Il notre a»is. s écarter de la règle des bienséances. Nous préfé
pourtant pas plus commune qu'à Paris. O r, voici quels sont les
rons de beaucoup accepter le fait avec réserve, sauf à le contrô
renseignements puisés à la direction générale des nourrices :
ler par de nouveaux faits, ou h prolonger le doute, si l'exception
M. le docteur Millard, l’un des derniers médecins charges de ce
restau par trop exceptionnelle. Nous répéterons à ce sujet, avec
service, a déclaré à M. Devergie qu’il ne se souvenait pas d’avoir
M. Ver lieu il : scientifiquement parlant, il n’y a pas d excep
eu à constater un seul cas de vérole ni chez les nourrices
tions. Le* faits soi-disant exceptionnels se rattachent à un
admises par l’administration, ni chez les enfants confiés à leurs
nouvel ordre d’idées encore inconnu, mais h l’occasion duquel
soins ; et pendant les trois années que M. Devergie a éié lui-
la lumière se fera par le progrès. Or, si un lait dit exceptionnel
mème à la tête de ce service, il n'a observé qu'un ou deux cas
est vrai, ou peut observer que tôt ou tard ou en observera
de celte nature. On peut dire, il est vrai, que la syphilis congé
d'autres semblables. Pour eri revenir à la question en litige,
nitale n'était pas apparente pendant les premiers jours de la
n'y eût il de connu, jusqu’à ce jour, que la malade reçoe à
vie, et qu elle pouvait faire explosion plus lard quaud l'entant
l'Hôtel-Dieu dans le service de M. Trousseau, que les laits
Hait loin de Paris. Mais il est facile de répondre à celle objec
signalés par VI. Lecoq et que l’épidémie de Kivalia, il y en a
tion que, lorsqu'un enfant de la direction des nourrices tombe
évidemment deux fois trop pour que le doute existe encore.
malade, la nourrice est tenue d'en prévenir l'administration, et
Pour ce qui concerne le fait de l'Hôtel-Dieu, M. Trousseau a
un médecin est désigné pour traiter le nourrisson, ü r , il est
eJoquemruent prouvé à quelles nombreuses hypothèses il fau
constant que la syphilis ne compte guère, en moyenne, que
drait avoir recours, si l'on persistait à nier que celle Icuime ait
pour 10 sur les ti,Ü00 enfauls que les hôpitaux placent en
�-
40 —
nourrice. Si au lieu de 10 on en concède 15, cela ne fait encore
que la proportion de 1 enfant syphilitique sur 70. Quand ou
souge k l’écart qu'il y a entre ce chiffre et celui de 6 sur 7 qu'il
faudrait admettre pour la syphilis congénitale des vaccinés de
Rivalta, il est impossible de ne pas repousser une pareille sup
position comme monstrueuse, et de ne pas admettre, ce qui est
infiniment plus vraisemblable, que la syphilis a été communi
quée par la vaccination provenant d ’un sujet primitivement
infecté. Un pareil raisonnement nous paraît sans réplique, et,
dussions-nous faire sourire les cartésiens pur sang, nous ad
mettrons désormais comme parfaitement démontré que la vérole
peut se transmettre par la vaccine;
2* Malgré toutes les bonnes raisons développées par M. Vien
nois, et malgré l’appui donné k ses idées par les esprits élevés
qui ont soutenu la même manière de voir devant l ’Académie,
nous répéterons, avec M. Devergie, que les faits ne sont pas
encore suffisamment péremptoires pour résoudre le point en
litige, à savoir si la vérole est transmise par le sang ou par la
sérosité vaccinale. Je dirai plus, la terrible expérience laite
dans le service du professeur Pelizzari par le docteur Bargioni
ne nous permet pas de douter de l ’inoculation syphilitique par le
sang d'un contaminé, et, par cela même, dès k présent, je suis
beaucoup plus disposé k accepter qu’k combattre Ja manière de
voir de M. Viennois; mais voici où la difficulté commence.
Malgré toutes les précautions employées pour décharger une
pustule vaccinale de sa lymphe inoculable, est-on bien sur
d’éviter que la pustule saigne d’une façon non visible k l’œil du
vaccinateur? et je dis ceci parce que, il y a quelque temps, j’ai
examiné, k l ’aide d’une forte loupe, des pustules vaccinales
ouvertes avec grand ménagement, et que d’imperceptibles gout
telettes sanguines ont été ainsi constatées 1k où, k l’œil nu, il me
semblait voir un liquide complètement dépourvu de sang. Or,
dans le doute, et jusqu’à ce que la question soit complètement
vidée par de nouvelles observations, il vaut mieux laisser toute
-
41
réponse définitive en suspens. Et j ’ajoute que, pour le moment,
la prophylaxie pourra peut-être se passer de la décision que les
progrès ultérieurs de la science pourront nous permettre.
3° La possibilité d’ une transmission dangereuse étant admise,
quelles précautions faut-il prendre pour prévenir des accidents
aussi regrettables?
On en a indiqué plusieurs ; mais nous sommes obligé d’ a
vouer que, k une seule exception près, nous ne trouvons pas
chez toutes les autres de garantie suffisante. On peut bien
admettre, en effet, qne dans quelques cas le choix du vaccinifère
sera facile et de nature k rassurer complètement la responsa
bilité du médecin et les appréhensions de la famille. Ce serait
toutefois prendre l’ exception pour la règle que de se figurer
que toutes les conditions voulues existeront dans la plupart des
cas assez évidemment pour que parents et médecin soient par
faitement rassurés sur les conséquences d’un acte que l’ on juge
trop facilement comme très inoffensif.
L ’âge du vaccinifère, a-t-on dit, doit être d’une grande
valeur, car il est excessivement rare que chez le nouveau-né
syphilitique les manifestations cutanées n’apparaissent pas avant
le deuxième mois. On a même donné comme maximum d’at
tente, pour les symptômes caractéristiques, six mois. Celui qui
écrit ces lignes, soit dit en passant, pourrait citer un fait des
plus authentiques dans lequel la première poussée s’est fait
attendre dix-huit mois, et, jusqu’à pareille époque, pas le
moindre symptôme n ’avait apparu nulle part. On répondra,
nous le savons, que le fait a été ma! observé, qu'on n’a pas
tenu compte d’ autres sources de contamination récente, etc.
Mais nous connaissons la valeur des objections de cette nature,
et nous affirmons une réalité et non une illusion. Quoi qu’il
en soit, le choix d’un enfant ayant dépassé l ’âge de deux mois
ne peut d’aucune façon servir de garantie, p a rla raison toute
simple qu’ en supposant a un médecin le plus expérimenté l ’im
possibilité de se tromper et de prendre du vaccin entre deux
�poussées, la statistique de M.Diday est là pour prouver que,sur
et qui, pourrait-on ajouter, font encore pas mal de victimes Jt
158 nouveaux-nés syphilitiques, il s’en est trouvé 27 chez
l’heure qu’il est ; que Dieu nous garde d’ une pareille pensée, fl
lesquels la maladie a paru après deux mois, un peu plus du
n’est, nous aimons à le croire, parmi les médecins d’aujourd’hui
personne qui puisse sérieusement conseiller de renoncer béné
cinquième !
Quaol à la précaution qui parait si facile à quelques vacciua-
volement au bénéfice de l ’heureuse découverte de Jenner. Nous
teurs et qui consiste à éviter le mélange du liquide vaccinal avec
voudrions, au contraire, qu’on se rapprochât plus que jamais
le sang du vaccinifère, en supposant que celte précaution lût fa
de la saine tradition laissée par Jenner lui-même, et noas allons
cile à suivre, il resterait encore à prouver que le vaccin pur vous
tâcher de le prouver par les considérations suivantes.
met complètement à l ’abri de toute contamination. Or, malgré
4° En énumérant les diverses précautions indiquées comme
les assurances réitérées de quelques savants confrères ptis eu
propres à conjurer les accidents redoutés, nous avons fait nos
dedans et en dehors de l’Académie, la chose ne nous parait
réserves sur l ’une d’elles que nous n’ avons pas encore nommée,
encore rien moins que démontrée ; et la théorie de Galbiali, si
et qui offre à elle seule toutes les garanties désirables. S ’il est
clairement développée par M. Palasciano de Naples (!),ne nous
en effet prouvé, comme nous avons tâché de le faire aussi briè
semble dépourvue ni de sens ni de probabilité, dût-elle aussi
vement que possible, que ni l’ âge du vaccinifère ni l ’absence
servir de texte à un jeu de mots aussi peu heureux que celui
supposée du moindre mélange de sang avec le liquide vaccinal,
auquel ont donné naissance les faits Cerioli (2).
Di la conservation temporaire du vaccin dans des tubes, ne
Quant à l ’idée émise de conserver d’abord le vaccin dans des
peuvent mettre complètement à l’ abri d une contamination
tubes au lieu de s’en servir immédiatement de bras à bras, il est
quelque rare qu’ on la suppose, il ne reste évidemment d ’autre
probable qu'on a mal interprété la pensée de M. Diday. Notre
ressource en nos mains en faveur de la vaccination générale
habile collègue ne peut en effet avoir prétendu que le vaccin
que le vaccin animal dont l ’immortel Jenner a proclamé tous les
ainsi conservé se purifierait par l’attente ; mais il est permis de
avantages, et dont les inconvénients sont encore à trouver.
supposer qu’en le conservant pendant quelques semaines on
M. Palasciano, dans le mémoire précité, fait observer avec
aurait plus de temps devant soi pour mieux observer ce que de
raison qu’ en remplaçant à peu près généralement le cowpox
vient le vaccinifère, et comment se comportent ses pustules
primitif par le vaccin humain, on s’est considérablement éloigné
vaccinogènes.
de la saine tradition ; y revenir à cette tradition ce n’est donc
Cela dit, et après ces diverses explications et suppositions,
laissant à un chacun la liberté de les accepter ou de les repous
pas révolutionner la science acquise, c’ est, au contraire, rentrer
dans une voie logique qu’on n’aurait jamais dû abandonner.
ser, il nous parait que le parti le plus sage à suivre jusqu à plus
Celte pratique n’est, du reste, ni difficile, ni coûteuse; l ’ex
ample informé est de s’abstenir dans le doute. Mais, dira-t-on,
périence se fait sur une grande échelle à Naples depuis plus de
s'abstenir c’est ouvrir les portes à deux battants aux épidémies
cinquante ans ; et ceux-là même,parmi nos confrères, qui étaient
varioleuses qui ont jadis si horriblement décimé les populations,
le moins favorables à cette mesure, ont fini par l’accepter avec
reconnaissance, vaincus par les heureux effets qu’ils pouvaient
(t)
Voir
la Gazette Médicale de
Lyon,
chaque jour examiner et contrôler.
4864, page 6 8 t.
(2) Voyez séance de l ’ Académie de Médecine, 2t fé vrie r
1864.
Les récents adversaires de cette méthode, se cramponnant
�—
45
—
quelque peu à la rouliue, oui tâché de la repousser d'avanceeo
cin, lois même qu’ on se limiterait à la moitié des scarifications
objectant: 1° Les difficultés de la pratique ; 2* Les Irais énormes
pratiquées à Naples sur chaque animal. E t, comme cette opéra
qu’entraînerait la création de ce qu 'ils ont appelé une usine à
tion et ses conséquences n’altèrent que très momentanément la
Cowpox ; 3° la maladie charbonneuse, la morve peut-être, et
lactation et les fonctions normales de la vache, il nous semble
bien d’ autres spectres encore qui, du quadrupède vaccinilère,
permis de conclure que dans les pays où il y a un très grand
pourraient être inoculés à l’homme.
nombre de vacheries, à plus forte raison là où il y a un grand
Cette dernière objection, la plus effrayante en apparence, ne
nombre d’élèves grâce à de riches pâturages, il doit être aussi
peut effrayer en réalité que les personnes par trop peu versées
facile que peu coûteux d'aboutir à la perpétuation de ce virus
en pathologie comparée. Les maladies sus-nommées ne peuvent
par des transmissions successives d’animal à animal.
être classées de nos jours parmi ces ennemis dangereux qui
Quant aux difficultés de la pratique, l’ heureux essai fait par
peuvent, à l’exemple du virus syphilitique, circuler longtemps
M. Lanoix, l ’expérimentation en grand qui se poursuit à Lyon
dans les vaisseaux de l ’économie avant de signaler leur présence
avec plein succès et les détails très circonstanciés sur le rnodus
par des indices non équivoques. Sans doute on a eu raison de
dire que (fort heureusement pour les besoins de l’humanité) ces
faciendi fournis par M. Lanoix lui-même et répétés par la
Gazette de Lyon (année 1864, page 585), répondent d’avance
maladies ne sévissent pas toujours et, en même temps, sur les
aux difficultés mises en avant par certains esprits qui en tro u
diverses races qu elles attaquent d’une façon épidémique. Mais,
vent partout. L ’objection principale, la seule sérieuse, et que
isolé ou à l ’état collectif, le charbon, sur lequel on a p’us parti
nous avons à dessein gardée la dernière, que l ’on puisse
culièrement insisté, constitue une de ces maladies qui ne laissent
mettre en présence de cette pratique, c’est que le vaccin animal
guère place à l’erreur de diagnostic, et ce serait véritablement
communiquera à l’enfant neuf fois sur dix une vaccination
s’arrêter devant une chimère que de repousser le cowpox par
beaucoup plus active que celle ordinairement fournie de bras à
cela seul que la vache est susceptible de devenir charbonneuse.
bras. Mais pour nous ce prétendu inconvénient est un avantage
Il est inutile d’insister davantage sur ce point.
immense par la raison toute simple que, si l ’on a pu constater
La seconde objection, relative aux frais énormes qu'occa
que la vaccine ordinaire ne préserve que pour un temps assez
sionnerait la mise en pratique du vaccin animal sur une large
limité, c’est que le virus n’est pas suffisamment actif; et comme
échelle, ne résiste pas devant le fait suivant : chaque vaccina
on ne connaît pas d’avance la limite de celte durée, et qu’on ne
tion, faite à Naples de la vache j* l’ enfant, coûte 5 francs, ni
plus ni moins. Et nous estimons qu’ il n ’est pas de simple ouvrier
qui ne consentît volontiers à payer le double, s ’il le fallait, une
fois les avantages de cette pratique connus et appréciés. On
comprend, du reste, que chaque vache pouvant fournir jusqu’à
cent pustules, dit-on, car M. Négri, le successeur actuel de
Galbiati, pratique jusqu'à cent scarifications, chacune pouvant
devenir le siège d’une pustule vaccinale, on comprend, disonsnous, avec quelle facilité on peut multiplier les sources du vac
peut, dans l’ éla^ actuel des choses, recommencer tous les deux
ou trois ans, il nous paraît infiniment plus rationnel, et surtout
plus rassurant d’avoir recours d’emblée à la vaccination animale
dont le virus, doué d’ une action plus puissante, peut préserver
mieux, plus longuement et sans crainte des dangers, quelques
rares qu’ils soient, inhérents au vaccin humain.
En résumé nous serions heureux que l ’Adm inistration qui a
tout intérêt, au point de vue de l'hygiène publique, à maintenir
I exigence du certificat de vaccination quand il s’agit d’admettre
�— -46 —
Al —
les enfants dans un établissement quelconque, jugeât convena
plus tard et semble alterner avec l’augmentation ou la dim inu
tion d’un autre flux ; nous avons vu nous-méme une femme
dont le catarrhe utérin alternait avec un catarrhe bronchique.
Le traitement témoigne aussi de la spécialité du catarrhe
utérin ; quelquefois, il est vrai, on est obligé de lutter contre
l’inflammation qui vient compliquer ce flux, mais on ne guérit
pas pour cela le catarrhe ; le changement d’air, l’ action d’un air
vif, sec, les révulsifs, les toniques, les balsamiques, enfin les
topiques propres h modifier la vitalité de la surface sécrétante
produisent habituellement les résultats les plus avantageux.
Le catarrhe utérin aigu peutèlre compliqué d’ un certain degré
d'inflammation ; la douleur est surtout hypogastrique et revêt
par iostants lecaractère de tranchées ou de contractions utérines.
Le catarrhe utérin chronique succède au premier ou débute
sous cette forme ; il succède aussi quelquefois à la m élrile.
Les signes subjectifs sont les suivants : en première ligne,
l’hypersécretion et l’écoulement qui lui succède Cet écoule
ment coïncide, lorsqu’il est abondant, avec une irritation qui
delà muqueuse utérine gagne la muqueuse vaginale et la face
interne des cuisses; puis viennent la dysménorrhée, quelquefois
la métrorrhagie ; il existe des douleurs qui parlent du sacrum
pour aboutir aux aines et au pubis et qui se compliquent, après
un certain temps, d’un sentiment de gêne, de pesanteur, de
plénitude pelvienne ; bientôt a ces douleurs s’ ajoutent de la
gastralgie ou sensation de fatigue et de tiraillements s’étendant
de l’épigastre a la région dorsale entre les deux épaules ; des
renvois, des aigreurs, des vomissements se développent; les
urines viennent aussi troubles, chargées; puis arrivent l’amai
grissement, la langueur et la tristesse.
Les signes objectifs sont les suivants : de la tension et de la
résistance à l’ hypogastre, de la sensibilité au col de l’utérus,
souvent flaccidité des parois utérines, quelquefois augmentation
de volume du col et du corps. La sonde utérine creuse pénètre
avec quelque diflicullé, mais, une fois arrivée, elle est mobile
en tout sens; elle laisse quelquefois couler du mucus très fluide
par son canal.
Des ulcérations fréquentes s’ observent sur le museau de
tanche, particulièrement sur la lèvre inférieure.
M. Courty pense avec M. Scanjoni que la leucorrhée persis
tante, comme la congestion utérine qui l’accompagne souvent,
peut amener â la longue la métrite chronique, les granulations,
la formation des corps fibreux, etc., mais de la h produire d i
rectement ces altérations ou seulement quelques-unes, comme
le veut M. Tyler Smith, il y a loin.
ble d’établir dans chaque chef-lieu de département, ou du moins
dans ceux qui offrent des conditions favorables,
un centre
d'essai qui, sans avoir l'importance de celui qui est en activité
aujourd'hui h Lyon, grâce h son école vétérinaire, ni de ceux
qui peut-être s’établissent actuellement à Alfort et à Toulouse,
favorisés
cependant
par des conditions sem blables, pourra acquérir
assez d’importance pour
compléter l’expérience
d’abord et surtout pour en faire bénéficier les populations.
D r S iru s - P irokdi .
DE LA LEUCORRHÉE
(Suite et fin.)
Le catarrhe de l’utérus, que le professeur de Montpellier a
soin de distinguer de l’inflammation de la muqueuse utérine,
s’observe quelquefois à l’état aigu, souvent à l’ état chronique.
Ce qui caractérise le catarrhe utérin, c ’est la particularité de sa
manifestation, les causes qui le produisent, son mode de déve
loppement, l’analogie des complications, la spécialité du trai
tement.
La particularité de sa manifestation, c’est l’écoulement luimême on le flux ; il fatigue les malades par sa quantité et sa
persistance, ne s’accompagnant de tuméfaction, de douleur et
de symptômes réellement inflammatoires que dans l’état d’acuité
survenu par une iuvasion brusque ou à la suite d ’une longue
durée.
Les causes extérieures qui le produisent sont les mêmes
que celles qui déterminent habituellement les affectious catar
rhales localisées sur les autres muqueuses.
Souvent l'établissement du flux utérin dépend de dispositions
personnelles, d’une constitution faible, d ’une impressionnabilité
constatée à l ’action du froid humide et des variations brusques
de la température.
L ’analogie des complications rend les caractères du flux
catarrhal encore plus évidents chez un certain nombre de
malades. Par exemple, il en est qui sont atteintes, avant ou
depuis leur maladie utérine, de douleurs rhumatismales, de
névralgies, de douleurs articulaires; d’ autres dont le flux utérin
peut diminuer, se supprimer momentanément pour reparaître
�-
48
-
La leucorrhée catarrhale est plus fréquente à l’ utérus qu'au
vagin; il eneslde même, du reste, de la leucorrhée rhumatismale.
La leucorrhée scrofuleuse est plus fréquente chez les enfants
que chez les adultes.
Il y a souvent des leucorrhées blennorrhagiques : elles siègent
h la vulve et au vagin plutôt qu'à l ’utérus ; elles sont remarqua
bles par l’abondance de la sécrétion, sa couleur jaune-verdâtre
et son caractère contagieux ; il y a à remarqu r seulement que
lorsque la blennorrhagie devient chronique, il est difficile de la
distmguerde la leucorrhée simple ou catarrhale.
Les leucorrhées herpétiques ou dartfeuses sont assez fré
quentes ; elles ont de.la tendance à envahir plusieurs parties;
dans ces cas, la muqueuse du vagin présente un caractère vrai
ment impéligineux, quelquefois sur un point, quelquefois sur
uu autre.
La leucorrhée symptomatique des lésions locales est beaucoup
moius importante que la précédente, car il suffit de guérir ces
lésions pour que la leucorrhée elle-raêrne ne tarde pas à dispa
raître, mais elfe ue se déclare pas moins, à un certain moment,
comme état morbide distinct pouvant coexister avec la maladie
qui l ’a provoquée.
La leucorrhée peut être aussi symptomatique de lésions exté
rieures à la muqueuse, telles que la métrite, la périmélrile, etc.
Traitem ent.
La leucorrhée aiguë, surtout la leucorrhée catarrhale aigue,
peut guérir spontanément. Il ne faut pas cependant sc faire
illusion, cai elle a souvent de la tendance à passer à l’état
chronique; or, la leucorrhée chronique produit peu à peu des
troubles digestifs, l’appauvrissement du sang, l'amaigrissement,
le dépérissement des malades. Ces résultats se manifestent par
un état de langueur et par cette altération des traits et du teint
dont l'ensemble est désigné sous le nom de faciès utérin.
La leucorrhée parait quelquefois céder au traitement, mais
elle revient souvent avec une ténacité plus grande. Comme le
professeur de Montpellier, nous avons vu des cas de ce genre
vraiment désespérants; la maladie puise alors dans sa chronicité
même de nouvelles conditions favorables à sa persistance et à
sa durée.
Quand la guérison est obtenue, il faut encore s'attacher à
prévenir le retour de la maladie. Le séjour à la campagne, les
toniques, les amers, les ferrugineux, les bains de mer ou de
rivière, I hydrothérapie, les injections astringentes sont les
moyens qui paraissent le mieux réussir.
— 49
Il est des leucorrhées qu’il faut traiter avec plus de rapidité
et de ténacité encore que la leucorrhée catarrhale : c’est la
leucorrhée vulvaire des enfants, autrement, en portant les
mains instinctivement aux parties génitales, l'enfant contracte
souvent la funeste habitude de la masturbation.
Par contre, il est des leucorrhées qu’ il ne faut pas traiter ou
ne traiter «pie par des soins de propreté : ce sont les leucor
rhées qui existent chez les femmes phthisiques ; elles jouent le
rôle d’une fistule à l'anus ou d’un exutoire artificiel.
Lagneau, Lefranc et plusieurs autres médecins ont insisté
énergiquement sur ce point de pathologie.
Le traitement de la leucorrhée doit presque toujours être à
la lois général et local.
Le traitement général est très important. A insi, chez les
chlorotiques, en combattant la névrose par les sédatifs et par
les toniques, on peut se dispenser de recourir aux injections.
Dans la leucorrhée catarrhale aiguë, le traitement général
suffit le plus souvent; quelquefois, cependant, il faut chercher
à obtenir une crise comme dans le traitement du catarrhe bron
chique. Dans ce but, ou emploie les d ia p h o n iq u e s, on cherche
à porter les mouvements au dehors, à exciter la transpiration.
Si la leucorrhée menace de passer à l’état ch ro n iq u e , on
transforme cette révulsion, par les sueurs, en véritable révul
sion irritative ou séreuse par l’emploi de frictions sèches ou
des épispastiques. Si la révulsion cutanée est insuffisante, on y
joint la révulsion intestinale par les purgatifs.
Il faut soutenir la guérison par les préparations ferrugineuses,
les lotions générales, les bains de siège, etc. Il faut enfin, pour
hâter la guérison, soutenir l’action des moyens généraux par
des topiques astringents; enfin le badigeonnage avec la solution
faible de nitrate d’argent ou de teinture d’iode versée au fond
du spéculum.
La leucorrhée chronique succède quelquefois à la leucorrhée
aiguë, mais elle est souvent chronique d’emblée ; souvent une
diathèse dont l’existence latente était passée jusque là inaper
çue, trouvant dans cet état morbide une occasion de se lo ca
liser, ne tarde pas à se substituer à la cause occasionnelle, dont
l’action est bientôt épuisée, à donner, en quelque sorte, à la
leucorrhée sa propre nature.
Ce qui se passe chez la femme, à propos de la leucorrhée, ne
peut mieux se comparer qu à ce qui se passe chez l’homme à
propos des écoulements chroniques de l ’urètre etde la prostate.
En effet, rien n’est plus difficile et plus long à guérir qu’un
écoulement urétral chez uu calarrheux, un rhumatisant, un
goutteux, un scrofuleux.
�—
Les affections qui exercent le plus d’ influence sur la durée
de la leucorrhée peuvent se ranger, quant h leur fréquence, h
peu près dans l’ordre suivant : chlorose, chloro-anémie, ca
tarrhe et rhumatisme, diathèse dartreuse, scrofuleuse, syphili
tique. Chacune d'elles devient la source d ’une indication spé
ciale, quelquefois spécifique. Nous n’avons rien à dire de
particulier sur leur mode d’emploi ; nous nous contenterons de
passer en revue les moyens qui répondent à la fois aux indica
tions spéciales qui relèvent du siège (muqueuse uléro-vaginale)
et du caractère particulier (flu x , hypersécrétion) de l'étal
morbide.
A la tête de ces moyens, il faut placer les toniques, le quin
quina, le fer, le séjour à la campagne et surtout le changement
de climat.
Les balsamiques, la tisane de bourgeons de sapin, les pilules
de térébenthine, l’eau de goudron agissent sur la leucorrhée
comme sur les antres flux.
Le seigle ergoté a été employé avec succès.
Les eaux minérales n’ont pas toujours une grande efficacité.
Les bains ferrugineux naturels ou artificiels sont utiles dans la
leucorrhée chronique chlorotique.
L hydrothérapie est d une utilité beaucoup plus générale dans
le traitement de la leucorrhée, dans le catarrhe utérin franche
ment chronique; c’est le meilleur révulsif et le meilleur tonique
en même temps; au besoin même, on peut faire précéder les
douches de bains de vapeur.
Lorsque les bains de vapeur, les frictions sèches générales,
l'hydrothérapie sont contre-indiqués, on peut avoir recours à la
révulsion produite sur le tube digestif par les purgatifs, ou sur
la peau par les épispastiques, mais il ne faut pas abuser de ces
moyens, car ils produisent à la longue de l'affaiblissement.
Schœnbein et Aran ont recommandé des lavements contenant
de l ’aloès suspendu dans une sorte de mucilage de savon et
d’eau. M. Courtv leur reproche d’étre désagréables pour les
malades et de causer assez souvent de I irritation au rectum et
à Tanus. Nous ajouterons que chez les femmes qui sont tour
mentées par les hemorrhoïdes, ces irritations deviennent sou
vent lorl douloureuses.
Dans les cas de leucorrhée utérine, le vésicatoire appliqué
sur le col de l’ utérus agit bien; il faut quelquefois en appliquer
plusieurs et, par ce moyen, on obtient assez souvent la gué
rison de leucorrhées rebelles.
Nous voici arrivés pour ainsi dire, par degrés, au traitement
local de la leucorrhée chronique. Généralement ce moyen doit
51
—
être renvoyé à l’époque où la constitution est assez lieureusemeni modifiée pour faire espérer qu’ une action locale décisive
pourra suspendre l’écoulement. Ces topiques sont les injections,
les poudres, les applications diverses pour les leucorrhées vul
vaire et vaginale: les injections et surtout la cautérisation
intra utérine pour la leucorrhée utérine.
Les injections doivent être habituellement toniques, astrin
gentes, caustiques même. D ’autres fois on se sert de liquides
préparés ad hoc, tels qu'une décoction de tannin, de noix de
galle, de roses de Provins, d’alun ou de sulfate de zinc. Il est
clair que ces injections peuvent être variées à l’infini.
Au lieu d ’injections, on a proposé de porter les astringents
ou de légers caustiques, sous la forme de pommades ou de
poudres. I a présence de corps gras dans le vagin n’ est pas
favorable à la guérison de la leucorrhée ; quant aux poudres,
c’est autre chose.
Tantôt on a employé des sachets contenant des poudres
inertes et astringentes, tantôt on a jeté ces poudres dans le
fond du spéculum, ou bieu on les a portées, a l ’aide de cet
instrument, au fond du vagin, dans le cul-de-sac postérieur, en
les enfermant dans un tampon de coton ou de ouate ; il faut
toutefois, sous ce rapport, tâter l ’irritabilité de chaque malade
et ôter le corps étranger dès qu’on s’aperçoit qu’il ne produit
pas de bien.
Du reste, il est bien facile de modifier directement la mu
queuse par le badigeonnage et de combiner celte action avec
celle des lotions. Oue ce soit avec une solution de nitrate d’a r
gent au 50°, de teinture d’iode au 20*, etc., le procédé est le
même : lotionnez le vagin, introduisez un spéculum de buis,
essuyez avec du coton, puis versez la solution au fond du spé
culum ou porlez-l’y avec un pinceau. Celte petite opération
peut se faire tous les jours ou trois fois par semaine.
La même médication est applicable â la cavité utérine.
Pour cela, il faut d’abord que le mucus soit expulsé de la
cavité utérine. Le moyen le plus commode est d’introduire dans
ce conduit des pinces fines chargées de charpie ou un simple
pinceau de blaireau. Ces préparatifs une fois terminés, on porte
un pinceau chargé de caustique dans la cavité de l’organe.
Lorsque la leucorrhée siège surtout dans la portion cervicale
et qu’elle a amené l ’ hypertrophie des glandes du col, il faut
aller plus loin ; on a recours alors â une petite opération qui
consiste à faire sur toute la surface granuleuse, et dans divers
sens, de nombreuses scarifications. On attend que la petite
hémorrhagie soit arrêtée; au besoin, on douche le col pour
�—
l ’arrêter plus vite, et après on porte, a l’aide d’un pinceau, dans
toutes les anfractuosités de celle cavité, une des solutions caus
tiques dont nous venons de parler.
Si ces solutions caustiques sont insuffisantes, on y substitue
alors le caustique solide et même le fer rouge. A ce propos,
nous dirons que nous nous sommes parfaitement bien trouvé,
dans des cas de ce genre, de l’application du caustique Filhos.
La difficulté de badigeonner la cavité utérine a donné l’idée
d’y pratiquer des injections caustiques. Aujourd’hui, l’opération
est facilitée par l’ usage connu des sondes utérines. Il faut loujoms s'assurer que la sonde joue librement dans Forifice cervicoutérin et qu’ il n’y a pas de trace de m élrite ou de péritonite
pelvienne. Nous dirons, en passant, que nous nous sommes
parfaitement bien trouvé, dans les cas de cancer de la matrice,
des injections intra-utérines calmantes.
Le professeur de Montpellier préfère de beaucoup la cautéri
sation avec le crayon de nitrate d’argent fondu, laissé b de
meure, cautérisation qui lui a donné, d it-il, des succès cons
tants. Outre les granulations et les fongosités, la leucorrhée est
la maladie pour le traitement de laquelle il l ’a employé le plus
souvent, mais il faut pour cela que les orifices utérins soient
larges et qu’ il n’y ait aucune inflammation, ni utérine, ni périutérine, ni même aucune forte congestion de l'organe.
Voici le
de l’auteur :
Après avoir préalablement cathétérisé l’utérus pour s’assurer
de la direction de ses cavités, il introduit avec ménagement le
crayon de nitrate d’argent fondu à l aide des pinces portecrayon ou d’un long porte-nitrate ordinaire pour le laisser à
demeure dans la c.ivité utérine, d’où il retire doucement l'ins
trument qui a servi à l’y faire pénétrer. Un tampon imbibé
d’eau salée est porté dans le cul-de-sac vaginal, tout contre le
col, et la malade reçoit les soins que l’on donne habituellement
dans toute cautérisation.
Depuis que j'emploie ce moyen, dit M. Courty, je ne connais
pas une seule leucorrhée qui lui ait résisté, les suites ne pré
sentent jamais rien de fâcheux, la menstruation se rétablit nor
malement, la conception a lieu chez ces malades comme chez
les autres femmes, la grossesse suit son cours normal. Je pré
sente donc ce moyen, dit l’auteur en terminant, avec confiance,
et j ’espère que mes confrères ne larderont pas à s’apercevoir
de quel prix il est pour de malheureuses femmes, condamnées
si souvent à une vie misérable par d’interminables leucorrhées.
modus faciendi
Dr MÉRENTIE.
53
—
Association Médicale des B ouches-du-R hône. — Assemblée G éné
rale du 9 février 1 8 6 5 . — Admission de nouveaux M embres. —
Révision de la législation m é d ic a le d is c u s s io n et délibération
adoptée.
Etaient présents : MM. Seux, président, qui occupe le fau
teuil ; Auphan,Behm, Broquier, Gandolle, Chapplain,Chauméry,
Chevallier, Chevillon jeune,Clàppier (de V itrolles), Gués Charles,
Giraud Auguste (de Saint-Pierre), Jcanselme (de Cuges), Isnard
Charles, Laurens, Liliou (de Charleval), Lislc (de Saint-Pierre),
Maurin, MelTre (de Saint-Jérôme), Méli, M ittre, Nitard-Ricord,
Pally, Payan, Philippon, Rey, Rixalz, Sauvet, Seux fils, Solari,
Tonrnou (d Ut res).
M. le président remercie d’abord les médecins étrangers a
Marseille (pii ont bien voulu, malgré les rigueurs de la saison,
se rendre a celte réunion.
MM. Fauchier (de Saint-Cannat) et de Possel (de la Ciotat) se
sont excusés, par lettres, de ne pouvoir assister a cette assem
blée. M. de Possel a adressé quelques observations sur la ques
tion qui est a l’ordre du jour. L ’ Assemblée lui en donne acte et
l’en remercie.
Depuis la dernière Assemblée générale du 30 août dernier,
un certain nombre de demandes d’admission ont été adressées
au bureau qui les a favorablement accueillies; mais les admis
sions n’étant définitives, aux termes des statuts, qu’après la
sanction de l’Assemblée générale, M le président donne lecture
des noms des nouveaux membres qui sont définitivement décla
rés admis Ces nouveaux membres sont : MM. Beisson, a Arène;
Boussot, de M ouriès; d’Audibert-Caille, d’Aubagne ; Gastal, de
Cassis ; Sanguin fils, de Saint-Chamas ; Bonnilay, Boze, Che
vallier, Clot-Bey, De Ruelle, Dugas, Gués Charles, Laugier,
Seux fils, de Marseille.
M. le docteur Chapplain veut bien, M. le secrétaire étant
indisposé, faire la lecture de son rapport.
A la suite de ce rapport qui a été publié en entier dans le
numéro précédent, la discussion a été ouverte et a porté spécia
lement sur deux points principaux : les deux ordres de médecins
et les conseils de discipline.
M.
est partisan des deux ordres de médecins ; il voit
parmi les officiers de santé des médecins instruits, des camarades
aimés, d anciens condisciples; les officiers de santé rendent les
plus grands services aux campagnes qui se trouveront sans
médecins, si on supprime le second ordre de praticiens. D’ail
leurs, l’autorité supérieure ne parait pas disposée !a les sacrifier,
Sauvet
�—
statu çuo,
et en laissant subsister le
elle aura pour but de sau
vegarder des intérêts précieux, ceux des populations des cam
pagnes dont elle est la tutrice légale.
M.
soutient l'opinion de la commission : quand il s'agit
d’un aussi grave sujet, la question de camaraderie ne doit pas
avoir 1 importance que lui accorde M. Sauvet. La commission
administrative respecte et estime plus que personne les olïiciers
de santé, et la preuve c’est qu’en demandant qu il n’y ait plus à
l'avenir qu'un ordre de médecins, elle demande aussi que nonseulement les droits acquis soient respectés, mais encore que
les plus grandes facilités soient accordées aux officiers de santé
actuels pour arriver au doctorat.
M. Mittre penseque 1 intérêt bien entendu delà profession mé
dicale, intérêt moral, intérêt matériel, m ilite en faveur d’ un
ordre de praticiens, et c’est en se plaçant sur ce terrain des inté
rêts professionnels qu’il votera les conclusions de la commission.
M.
commence par établir que les besoins des popu
lations exigent un médecin pour 2,000 âmes. Telle est, dit-il,
en ce moment la proportion générale des médecins en France,
puisqu'on y compte 18,000 praticiens pour 50,000,000 d'habi
tants. Or, depuis quelques années, le nombre des étudiants tend
à décroître en France; il craint donc pour (avenir une disette
de praticiens, qui sera plus grande encore si l'on supprime les
officiers de santé.
Il pense que ce qui distingue surtout le docteur en médecine
de l'officier de santé, c’est le baccalauréat, ce critérium des
études classiques. Il y a cependant une autre d ilî renoe, c’<st
que les épreuves exigées des olïiciers de santé ne comprennent
pas d’examen sur la médecine opératoire; M. Maurin voudrait
donc que la loi nouvelle leur interdise toute opération chirurgi
cale majeure. Toutefois, cette interdiction lui paraissant lort
difficile à faire respecter, il demande : I* que les officiers de
santé subissent les mêmes examens que les docteurs en méde
cine, afin que les deux ordres de praticiens soient tous égaux au
point de vue de la pratique de l’art et que le titre de docteur ne
soit plus qu’un titre universitaire ; 2° pour que ce litre universi
taire soit recherché, il veut que les officiers de santé ne puissent
s’établir dans les villes qui possèdent soit une Faculté, soit une
Ecole de Médecine.
M
répond d’abord à M. Maurin que le nombre
des médecins, dans le département des Bouehes-du-Rhône, est
dans une proportion excessivement favorable, par rapport au
chiffre de la population, puisqu’on y compte un praticien par
1,400 âmes ; mais, en se prononçant pour un seul ordre de
Mittre
seul
Maurin
Chapplain
58 —
médecins, il se place surtout au point de vue philosophique ; la
science est une, d it-il, il ne doit y avoir qu’ une seule classe de
médecins. En maintenant les deux ordres, il est impossible de
ne pas maintenir aussi certaines différences dans les droits et les
prérogatives. Agir autrement, c’est tendre à abaisser pour les
médecins le taux de I instruction et c’est arriver même h la
suppression des docteurs en médecine.
Plusieurs autres membres ayant pris successivement la parole,
la discussion a été clcse et la majorité de l ’Assemblée s’est pro
noncée en faveur des conclusions de la Commission.
La seconde question qui a principalement occupé l’Assemblée
est celle des conseils de discipline.
Deux opinions différentes ont été émises: l une ne veut pas
des conseils de discipline qui sont considérés comme inutiles,
les associations médicales en tenant lieu. Plusieurs fois déjà,
celles-ci ont eu à s’occuper de questions disciplinaires et elles
s'en occuperont encore, toutes les fois que l ’occasion leur en
sera offerte. Cette opinion est soutenue par M M. Seux, Chapplain,
Nitard-Ricord.
MM. Broquier et M ittre pensent au contraire que les Asso
ciations médicales ne sauraient suppléer aux conseils de disci
pline ; elles n ont pas de juridiction légale et tous les médecins
n’en font pas partie; ils voteront donc pour Finstitution de
conseils de discipline ayant un caractère légal et auxquels seront
soumis tous les membres du corps médical.
La majorité de l’Assemblée a adopté cette seconde opinion.
La délibération prise dans cette réunion a donc été formulée
dans les termes suivants :
L’assemblée générale de la Société locale des médecins des
Bouches-du-Rhône,
Tout en reconnaissant q u 'il existe en dehors des vœux qu’elle
va émettre, de nombreux
dans la législation médicale
qui ne sauraient manquer d'éveiller en temps opportun, la solli
citude du Conseil général de l'Association générale, est d avis
qu’il y a lieu de lim iter son intervention aux faits suivants.
Elle forme donc le vœu :
F Que la loi nouvelle, officiellement annoncée, ne conserve
qu’un seul ordre de médecins, et que dans le cas où les deux
ordres seraient maintenus, elle définisse d’ une manière précise
les différences dans les droits et prérogatives attachés aux deux
diplômes.
Il est bien entendu que les droits acquis doivent être mainte
nus; les plus grandes lacililés pourraient même être données
aux olïiciers de santé actuels, pour arriver au doctorat.
desiderata
�H O P IT A L DE LA C O N C E PT IO N .
2° Qu’une pénalité sévère soit édictée contre toute espèce
d'exercice illégal de la médecine et même contre l ’exercice
illégal
; qu’elle atteigne aussi les médecins qui s’en ren
draient complices;
5e Que l’incompatibilité entre l'exercice simultané de la mé
decine et de la pharmacie soit prononcée avec une sanction
pénale convenable;
Que les médecins étrangers soient soumis, pour exercer
en France, à des épreuves qui deviennent des garanties suffi
santes d'aptitude;
5° Que la vente et l'annonce des remèdes secrets soient for
mellement prohibées et punies d une pénalité importante;
6° Que les annonces médicales soient soumises à une régle
mentation qui en réprime le scandale et les abus;
7° Que dans chaque commune, les secours médicaux soient
assurés aux indigents par des médecins
dont l’ins
titution est préférable a celle des médecins cantonaux;
8“ Que des conseils de discipline ayant une juridiction légale
soient accordés aux médecins.
L aubbns.
les côtés de la poitrine, mais cette douleur avait existe*, d ’après
M ONUM ENT A LAENNEG.
le dire du malade ; crachats muqueux très abondants, aucune
Souscription publiée par l'Union Médicale de la Provence.
3 " LISTE.
trace de sang. Le malade dit n’en avoir jamais aperçu lui-même.
Service de M. Seux.
gratuit
A0
communaux,
Le Secrétaire,
MM. les docteurs Imbert, d’Arles, 3 fr. ; Urpart, id , 3 fr.; Ode,
id., o fr . ; Cartier, id . 5 fr.; Compan, id., 5 fr.; Gay, id., 5 fr.;
Latitte, id., 5 fr.; Du\al. id.. 5 fr.; Despine, de Marseille, o fr.;
Amalbert, id., 2 fr.; Bourgarel. id., 5 fr.; Gasquet. id.. 5 fr.;
d'Astros, id., <0 fr.; Fabre, id , 13 fr ; Honnoralx. 10 fr.; Behm,
5 fr.; Maurel, 5 fr.; Blanchard oncle, 10 lr.; Goy, l() fr.; Bernard
(Marins), 10 fr.; Barthez, I fr.; Maurin, 10 fr.; Méli, 2 fr ; Cartoux.
2 fr.; Melquiond, I fr.; Simonin, I fr ; Martin, 3 fr ; Millou, 2 fr.;
Teissier, 5 fr.: Perrin, o fr.; E. Nicolas, 5 fr.; Kixière, o fr.; Colmar.
3 fr.; P. ., 2 fr.; Barrallier, 5 fr ; Gués, 10 fr.; Mittre, o fr.; André,
5 fr.; Giraud Saint-Rome, o fr ; Aubert (J ). 2 fr ; Blanc (H.), 3 fr ;
Jean, 5 fr.; Seux fils, 5 fr.; Aubert, de Saint-Zacharie, 3 fr ; De
La\it, 10 fr.; Fraissines, 3 fr.: Tass\, de Saint-Zacharie, 3 fr.;
Marloy, d’Auriol, 3 fr ; Richaud, 5 fr.; Bousquet 5 fr.; GiraudPoutet, 5 fr.: Villeneuve, 10 fr.; Froment. 2 fr.; Boze, 3 fr.; Métaxas, 3 fr.: Philippon, 3 fr.; Sauze, 3 fr.; Gibert, 3 lr.
Total............................. 306 fr,
Montant des listes précédentes.................................
143
Total............................. fr.
Le Comité de rédaction.
MtrtelUe. —Imprtnerit YIAL, me Tblara, H.
Observation de morve aiguë, recueillie par M. T iu s t o u r ,
interne du service.
Le nommé Roussel (Blaize), charretier, âgé de 32 ans, d’ une
constitution robuste, est entré à l’ hôpital de la Conception le
9 janvier 1863. Cet homme dit n’avoir jamais été malade de sa
vie ; il tousse depuis huit jours, l ’appétit est nul et il n ’a pris
depuis cette époque que du vin chaud et des tisanes.
Le lendemain de son entrée, on constate les symptômes
suivants : toux assez forte, fièvre modérée, pas de douleur dans
Percussion. — Sonorité normale a droite, matité relative à
Auscultation : râles sous-crépitants des deux côtés,
gauche.
bruit de souffle à gauche dans la fosse sous-épineuse; réson
nance de la voix de ce côté. Tous ces symptômes font diagnos
tiquer par M. le professeur Seux une broncho-pneumonie à sa
période de déclin.
Traitement : Vésicatoire au côté gauche ; potion avec l ’oxyde
blanc d’antimoine.
Huit jours après, les symptômes locaux ont disparu, cependant
la lièvre devient plus forte, le malade a des rêvasseries conti
nuelles et une espèce de subdelirium. Il est toujours plongé
dans un état comateux ; pas de céphalalgie, pas de douleurs
abdominales, légère diarrhée. Roussetse plaint d’ une vive dou
leur a la partie interne et inférieure de la cuisse droite, région
où M. Seux rencontre une tumeur douloureuse au toucher,
située profondément et sans changement de couleur â la peau.
Le 18 janvier, cette tumeur est fluctuante, toujours très doulou-
�— 38
59
reuse ; l'état général esi le même. En présence de symptômes
une légère hypertrophie ; la rate.au contraire, est atrophiée.
généraux aussi graves, de cet abcès qui se forme dans l'épaisseur
Aucune tracede pus, ni de travail phlegmasiquedansces organes.
de la cuisse, M Sbcx croii b une maladie infectieuse et, vu la
Les fosses nasales sont ouvertes. La gauche n’offïe rien
profession de Rouget, est porté b admettre I existence de la
d appréciable, la membrane muqueuse de la fosse nasale droite,
morve aigué Celui-ci, nteriogé sur l ’état de 6anté de ses che
au contraire, présente une rougeur très vive et elle est parse
vaux, dit qu’ ils n’étaient pas malades, mais que dans l’écurie il
mée d'une quantité considérable de granulations ronges à leur
y avait un cheval malade depuis longtemps. — Cataplasmes sur
base et d’ un blanc jaunâtre au sommet, de la grosseur de gros
la tumeur, bouillons, potages et préparations de quinquina.
grains de semoule.
Le 22 janvier, nouvelle tumeur semblable b la partie externe
La peau du front est incisée crucialement ; de l ouverture
et supérieure de la jambe gauche ; malgré l ’absence de l’écoule
s’écoule une assez grande quantité de pus noirâtre et fétide.
ment nasal, la fosse nasale droite est à peine rouge, M. Sbcx
Les bords de l’incision sont recouverts de plaques gangréneuses
n'hésite pas à caractériser la maladie : ça ne peut être, dit-il,
et de pustules.
qu’ une morve aiguë.
Les 25, 2-4 et 23 janvier, la fièvre se maintient toujours assez
vive avec redoublement le soir. Les collections purulentes des
A la partie interne de la cuisse, nous trouvons un abcès, de la
grosseurd’un œnf'de poule, enkysté dans l’épaisseur des muscles
adducteurs.
membresinlerieursaugmenlent en volume. — Même traitement.
Celui de la partie externe de la jambe se trouve en partie
Le 28, le malade se plaint d’une douleur très vive au niveau
sous-aponévrotique et en partie dans l’ intérieur des péroniers
de la tubérosité antérieure du tibia gauche. On constate en effet
latéraux. Enfin celui de l'avant-bras gauche, beaucoup moins
de l’empâtement dans toute l’étendue de la jambe. L ’état géné
volumineux que les deux autres, est tout h fait sous-culané.
ral est toujours le même.
Le -i février, le malade est plongé dans une prostration
Hèfleorions.
— Les divers symptômes que nous a présentés
notre malade indiquaient clairement une affection générale dif
extrême ; il a une diarrhée assez abondante et nous apercevons
ficile à diagnostiquer au début, en raison du peu de signification
sur la région frontale une rougeur vive, érysipélateuse. Deux
des symptômes locaux. La profession de charretier et la présence
jours après, suppuration, et le lendemain, écoulement d'un pus
d’un cheval malade dans l ’écurie d’une part, le développement
fétide ; les bords de l’ouverture sont noirâtres et entourés de pus
d’un abcès profond de l’autre, formèrent les éléments du dia
tules.— Bouillons, quinquina, cataplasmes, lotions chlorurées.
gnostic de M. le professeur Seux.
I.e 7 février, un nouvel abcès se montre a la partie externe
Uu point important manquait cependant dans la symptomato
de l ’avant-bras gauche et l'articulation du coude de ce côté est
logie : c’était l'écoulement nasal ; malgré l ’absence de ce symp
tuméfiée et très douloureuse.
tôme habituel, M. Seux considéra la maladie comme un cas de
La diarrhée n’a pas diminué et le délire n a fait qu’augmen
morve aiguë et les phénomènes ultérieurs lui ont donné raison.
ter. Enfin, le malade meurt le 9 février dans la matinée, sans
L'autopsie, en m ontrant dans la fosse nasale droite l ’éruption ca
avoir présenté le moindre écoulement nasal.
Autopsie:
ractéristique de la morve, a confirmé ce diagnostic et a fait pen-
Les poumons sont sains dans leur partie supé
seràM. Seux que, vu le décubitus dorsal permanent du malade,
rieure ; ils sont fortement engoués â leur base. Le foie présente
la matière de l’écoulement nasal passait peut-être par la gorge.
�DU ROLE QUE PEUT JOUER LE GRAN D SYM PATHIQUE
O u i certaine* maladie*.
notre sens, le but principal de la physiologie pathologique, tel
est le grand service qu elle doit rendre à la pratique.
Or, parmi les affections les plus communes et dont l agent
organique nous échappait jusqu’ ici, se présente en première
Il y a quelque» années, la pathologie ne s'occupait guère du
ligne la grande classe des congestions et des inflammations ; de
grand sympathique. Cependant ce vaste système, dont les
tous les phénomènes morbides, celui qui est presque inhérent à
rameaux se répandent dans l’organisme entier, ne pouvait rester
chaque maladie aiguë, c’est l’étal fébrile. Sur les congestions,
constamment à l’abri des influences morbides et ses alterations
sur les inflammations, les découvertes physiologiques relatives
devaient amener des troubles dans les fonctions auxquelles il
au grand sympathique apportent de précieuses données ; sur
participe. Si parfois on songeait h lui, c elait pour édifier à la
l’état fébrile, elles présentent des explications nouvelles. Le
hâte des hypothèses sans fondement ; ignorant son rôle physio
grand sympathique tenant sous sa dépendance les circulations
logique, on ne pouvait connaître son action pathologique.
locales qui exercent à leur tour une immense influence sur les
Aujourd'hui, les choses ont bien changé; une expérience
sécrétions des glandes et sur la nutrition des tissus, il en résulte
célèbre de Cl. Bernard a éclairé de la plus vive lumière une des
qu’uoe foule d’affections d’ordres variés doivent avoir pour
fonctions les plus importantes du grand sympathique et appelé
cause indirecte un état anormal du grand sympathique. Vaste
sur ce ssslème l'attention du monde médical. Aussi plusieurs
est l’influence physiologique de ce système, vaste devait être
travaux ont-ils surgi qui mettent à la charge du grand sympa
aussi sou action morbigène, et ces notions nouvelles ne pou
thique bien des troubles morbides jusque-là inexpliqués. Eu
vaient manquer de remuer profondément la physiologie patho
condensant ces travaux, en groupant dans un essai de synthèse
logique. Nous allons donc assister à un grand mouvement en
les idées qu’ils contiennent et celles qu’ils suggèrent, nous
physiologie pathologique, mouvement dont les conséquences
voulons mettre en relief une des tendances les plus récentes de
porteront surtout sur les affections de l ’appareil circulatoire et
la médecine contemporaine et attirer les recherches de nos
sur les altérations locales de nutrition.
laborieux confrères sur un sujet eucore peu exploré.
Le sujet, d’ailleurs, en vaut la peine; il parait étroit, il est
Découverte d’un moteur spécial pour les circulations locales,
pour les circulations capillaires ; indépendance relative de ces
jmmense. La tendance est peu accentuée, mais bientôt elle va
circulations; importance du rôle qu’elles jouent dans la vie des
devenir irrésistible ; elle n’est ni plus ni moins que le germe
organes et des troubles qui proviennent de leurs altérations ,
d’une petite révolution.
tel est l’évènement physiologique et medical qu’a produit l’ex-
Notre époque, qui se déclare l ’humble esclave du fait positif,
n’est pas moins que les autres curieuse d'explications ; elle
périeoce de Cl. Bernard sur la section des filets du grand
sympathique.
veut saisir le mécanisme des troubles morbides, elle veut se
Depuis Harvey, l’on avait toujours pensé que la circulation
livrer à l’étude de ce qu elle a nommé la physiologie patho
se résumait presque tout entière dans l’impulsion cardiaque,
logique.
les vaisseaux grands et petits ne paraissaient avoir à exercer
Remonter, dans tout ensemble morbide, au trouble initial, à
qu’une action accessoire et dépendante, régulière et uniforme.
la lésion-mère, afin de la combattre directement, tel doit être, à
Ces idées sont encore vraies pour ce qui concerne les gros
�—
62
—
vaisseaux ; elles sont erronées pour ce qui est
relatif aux
épuisant I irritabilité nerveuse et musculaire et en produisant
une atonie consécutive.
capillaires.
Les efl'ets de la section du grand sympathique il la région
Un changement si radical de doctrine ne pouvait s’opérer
cervicale avaient été observés par Pourtour du Petit, Dupuy,
sans inspirer quelques scrupules aux médecins et même aux
Brachet, Billi (de Milan), Buete (de Vienne), Budge et Waller,
physiologistes. Schifif, par exemple, a cherché h prouver la
mais tous ces auteurs avaient concentré leur attention sur les
dilatation active des vaisseaux et l ’aspiration du sang par les
phénomènes qui se passent alors du côté de la pupille et de
organes; mais, comme il ne trouvait pas de libres propres à cet
l’œil. Cl. Bernard, au contraire, fut frappé par une forte con
usage, il a du accumuler des hypothèses Quoi qu'il en soit de
gestion et par une augmentation considérable de chaleur dans
ces débats sur la nature active ou passive «les phénomènes
les parties où l’ innervation sympathique avait été interceptée.
congestifs, ce qui est bien avéré, ce qui est incontestable au -
Il en fil l’objet d’ une première note, lue à l ’Académie des scien
joard hui, c’est que les congestions n’ont souvent pas d ’autre
ces le 29 mars 1852. L ’éveil était donné; aussitôt Budge en
cause qu’un trouble dans l’innervation sympathique.
Allemagne, Waller en Angleterre, Brown-Séquard en Amérique
Aux preuves péremptoires de la physiologie la pathologie a
su ajouter une démonstration directe. Depuis longtemps déjà,
répétèrent l'experience et en cherchèrent l’explication.
Un moment étonnés, les physiologistes ne tardèrent pas à
M. Lordat avait signalé l’influence nerveuse dans les conges
tenir le secret de ces résultats inattendus. Ils les attribuèrent
tions et les hémorrhagies. En 1863, dans un Mémoire publié
à une dilatation paralytique des vaisseaux où se distribuaient
par les Archives et couronné par l ’Institut, le D r Cahen a dé
les ramifications du nerl sectionné, et la preuve c’est qu’une
montré que les névralgies s’accompagnent parfois d’hyperémies
excitation modérée du bout périphérique de ce nerf fait dispa
locales qui sont dues h l ’intervention du grand sympathique. Il
raître des parties auxquelles il s’irradie la congestion et la
a cité des exemples anciens et nouveaux qui établissent que la
chaleur. Des expériences analogues ont été faites sur d’autres
névralgie trifaciale peut amener des congestions de la conjonc
tive et même de la face; il a prouvé que l ’altération de la cin
points du grand sympathique.
Il en résulte que ce système tient sous sa dépendance les
quième paire est par elle-même incapable de déterminer ces
contractions des petits vaisseaux, qu’il gouverne la circulation
lésions, e! que le grand sympathique, troublé par action r> llexe,
capillaire, et que la suppression ou la diminution de son in
en est le seul coupable.
•
Dans la même catégorie rentrent ces congestions de la ma
fluence peut entraîner des congestions.
Voila donc renversées de fond en comble les idées anciennes
trice que l’on rencontre quelquefois dans le cours de la né\ ralgie
sur les phénomènes congestifs. Il n’est plus question de surac
lombo-abdominale et qui, signalées par Valleix et M. Neucourt,
tivité locale, de vitalité augmentée, ni de ce vieil adage :
mieux étudiées par M. Marrotle, ont été souvent confondues
stimulus, ibi fluxus ;
ubi
la congestion a pour cause directe le
relâchement des vaisseaux de la partie malade, et pour cause
avec des métrites.
Ainsi s’expliquent encore ces rougeurs du visage qu’une
indirecte la paralysie plus ou moins complète des filets du grand
faible émotion morale suffit pour déterminer, et ces congeslious
sympathique correspondants. Tout ce que l’on concède, c’est
• de la chlorose où l ’hyperémie locale coexiste avec une plus ou
qu’une action stimulante peu; aboutir au même résultat eu
moins forte anémie. Ces colorations rouges, livides et violacées
�-
il: ;
63
-
que l ’on peut observer sur le visage, les pieds et les mains des
buminurie peut provenir d’une congestion rénale consécutive à
hystériques, en dehors des accès, ces gontleinents éphémères
une lésion du grand sympathique.
qui parcoureut quelquefois leurs membres, tiennent sans doute
La physiologie moderne attribue au grand sympathique non-
a la même intervention, h laquelle il faut attribuer aussi ces
seulement des congestions, mais encore des anémies. Nous
érythèmes, ces rougeurs diffuses que l’ on rencontre dans le
voyons, en effet, Brown-Séquard faire dériver une grande classe
cours d’affections diverses du système nerveux et parmi les
de paraplégies d’un trouble dans les nerfs vaso-moteurs de la
quelles on peut ranger des plaques rougeâtres plus ou moius
moelle. Sous l’influence d’une action réflexe, ces nerfs contrac
semblables à l’éruption pellagreuse.
teraient d’une manière permanente les vaisseaux qui n o u rris
Une congestion produite par la même cause se développe
parfois, chez les hystériques et les femmes mal réglées, dans le
sent le centre nerveux rachidien, d’où afllux insuflisant de sang
dans cet organe et langueur dans ses fonctions.
tissu cellulaire qui entoure les articulations, notamment autour
C’est par un phénomène analogue qu’on a voulu expliquer le
du genou, et peut en imposer pour un rhumatisme ou une
début de l’accès d’épilepsie. D’après Foville, dans cette maladie,
arthrite.
une excitation périphérique est transmise h la moelle allongée;
Jusqu’ici nous nous trouvons en présence d ’accidents légers
celle-ci, par son pouvoir réflexe, réagit sur les filets du grand
et limités. Vient ensuite la grande question des conges-
sympathique qui accompagnent les tuniques contractiles des
tioos dans les fièvres, à laquelle les notions actuelles sur le
vaisseaux de la tête et du crâne; les vaisseaux contractés chas
grand sympathique doivent, sans doute, ouvrir des horizons
sent le sang, d’où la pâleur de la face et la perte subite de con
nouveaux, mais qu’il serait téméraire d’aborder dès aujour
naissance. Brown-Séquard, Radclifle, Kussmaul et Tenner ont,
d'hui.
avec des variantes, admis cette opinion.
La congestion par action directe ou réflexe des nerfs vaso
L’anémie partielle ou générale des centres nerveux est au
moteurs a été accusée de produire des maux bien graves. La
jourd’hui à l’étude. Donders, Burrows, Ehrmann, Ackermann,
plupart des physiologistes attribuent maintenant le diabète à
Liégeois, Kussmaul ont abordé ce problème nouveau, et si les
une altération du grand sympathique, ou, ce qui revient au
troubles mécaniques des circulations locales occupent dans cette
même, des cellules dont il émane. Depuis que Jacubowitch et
question une place importante, il est évident que les troubles
dynamiques produits par un désordre dans l’innervation sympa
centres nerveux, il n’est pas un médecin qui, connaissant d’une
thique n’y sont pas non plus étrangers. Mais n’insistons pas sur
part les origines et de l’autre les fonctions du grand sympathi
ces sujets encore obscurs, passons sur ces théories ingénieuses
que, ne fasse dépendre d’ une lésion de ce système sinon tous
que nous avons indiquées parce qu’elles révèlent une tendance
les diabètes, du moins tous ceux qui proviennent d'un désordre
de la médecine contemporaine. Ce qui est positif, et ce que
nerveux.
nous tenons à mettre en lumière, c’est que le système sympa
La piqûre du plancher du quatrième ventricule, de ce centre
thique, pénétrant avec les vaisseaux dans tous les organes et
où se rassemblent et se rallient un grand nombre de cellules
présidant h toutes les circulations locales, peut, par ses diverses
sympathiques peut, ainsi que l ’a prouvé CL Bernard, produire
altérations, produire les désordres fonctionnels les plus graves
l albuminurie. La conclusion logique en est qu'une espèce d’al
et les plus variés.
�—
— 66 —
67 —
Sous l'influence des nerls vasomoteurs, le sang peut nou-
cessaire, qu’il existe peu de menstruations exagérées, indépen
seulemenl s’accumuler daos ses vaisseaux, mais encore s'extra
dantes d’une lésion organique grave, qui ne soient provoquées
vaser et se répandre au dehors. À. Cooper avait déjà noté
ou entretenues par leur présence; en prédisposant aux perles
qu’une ecchymose spontanée accompagne parfois les névralgies
les femmes enceintes, elles seraient aussi une cause d’avorte
de la mamelle. Pincus et Samuel ont, par la section du plexus
ment. A M. Cahen revient l ’honneur d ’avoir montré que ces
solaire, déterminé de fortes suffusions sanguines dans la mu
accidents des névralgies lombo-abdominales résultent d'une ac
queuse gastro-intestinale. Dans son très intéressant Mémoire,
tion réflexe sur les nerfs vaso-moteurs.
publié l'année dernière par les Archives, sur les troubles ner
Ce dernier auteur rapporte, d’après M. Jo11y , une observation
veux dans les maladies chroniques, M. Leudet dit avoir observé
intitulée :« Névralgie orbito-fronlale, apoplexie oculaire, menace
des ecchymoses passagères dont l’apparition coïncidait chaque
d’apoplexie cérébrale, commencement d’hémiplégie du côté
fois avec la manifestation des perversions nerveuses. Il fait
droit, guérison par le sulfate de quinine. «Dans ce cas, le même
remarquer qu'une certaine forme de la phthisie s’accompagne
trouble nerveux qui a déterminé l ’apoplexie oculaire travaillait
assez souvent d’hémorrhagies, soit pulmonaires, soit nasales,
évidemment à produire l’apoplexie cérébrale, et, ce qui le prouve
soit enfin cutanées, se manifestent dans ce dernier cas sous
encore mieux, c’ est que le sulfate de quinine a fait disparaître
l’aspect de purpura apyrétique, en même temps que des troubles
l’ensemble morbide.
D’autres actions réflexes peuvent aboutira la congestion et
nerveux périphériques. Vu l’absence de lésions du sang et des
vaisseaux, c’est aux troubles nerveux vaso-moteurs qu’il ratta
l’hémorrhagie cérébrales. J’ai observé que certains dyspeptiques
che les accidents hémorrhagiques, d’autant plus que, pendant
sont sujets, surtout pendant les premiers moments de la diges
le cours des accidents nerveux périphériques, il a observé tantôt
tion, à des congestions cérébrales ordinairement passagères et
le retrait du sang des vaisseaux capillaires, tantôt sa stagnation
quelquefois intenses; aussi l’hémiplégie par cause dyspeptique,
dans ces canaux.
dont M. Pihan-Dufeillay entretenait dernièrement les lecteurs
M. Perroud communiquait l’année dernière à la Société des
Sciences médicales de Lyon un cas d hémorrhagie intermittente
de la conjonctive manifestement liée à une altération du grand
sympathique.
du
Bulletin de Thérapeutique,
pouvait-elle fort bien avoir pour
agent direct une forte congestion ou une légère apoplexie.
Autre hémorrhagie qui n’a pas, heureusement, la même
gravité, l ’épistaxis vermineuse, vérité clinique consacrée par
Des impressions morales et, par conséquent, des influences
l'observation, mais qui échappait à la raison jusqu’au moment où
nerveuses ont, chacun le sait, déterminé des hémorrhagies
nous avons connu les actions réflexes et les fondions du grand
diverses, mais nulle part celte action nerveuse n a été. mieux
sympathique.
observée que pour la matrice. En 1860, M. Marrolte a publié
Bien des troubles de sécrétion proviennent de la même
daos les Archives un remarquable travail sur la névralgie lombo-
cause. Dans les névralgies faciales, ou observe assez souvent le
abdominale. De tous les épiphénomènes de celle maladie, le
larmoiement qui, comme la congestion oculaire, ne peut être
plus curieux et le plus important, d’après ce savant médecin,
déterminé que par le grand sympathique. A cette même in
c’est la mélrorrhagie. Aux yeux de M. M arrolte, l'influence des
fluence, ainsi que l’a démontré M. Cahen, sont liés ces écoule
névralgies sur les métrorrhagies est si puissante, même si né
ments de mucus nasal qui accompagnent certaines céphalalgies.
�69
Mais c’esi surtout lu leucorrhée qui peut être sous la dépen
et Martineau, la maladie bronzée serait produite par une alté
dance du système nerveux, comme l'ont reconnu MM. Marrotte
ration du grand sjmpathique et en particulier du ganglion semi-
et Cahen.
lunaire et des rameaux qui en émanent pour se distribuer dans
L’action nerveuse sur les troubles de la sécrétion urinaire
les capsules surrénales.
est incontestable; elle ne l'est pas moins sur la production de
Sans aller, comme Juler l’a fait l ’année dernière devant la
I ictère; mais, ce qui devient plus obscur, c est le rôle du
Société Harveïenne, soutenir que toutes les maladies de la
sympathique dans celte maladie. Toujours est il que le grand
peau sont déterminées par le système nerveux, on ne peut nier
sympathique tient en partie sous sa dépendance physiologique
l'influence de ce système sur les affections cutanées; elle est
et morbifique les grandes et petites glandes.
évidente surtout pour certains urticaires et, après beaucoup de
Il peut contribuer aussi aux maladies des séreuses, ainsi que
praticiens, j'ai vu des émotions morales promptement suivies
le prouvent les épanchements observés par Cl. Bernard et par
d eczémas. Or, celle action du système nerveux ne peut prove
Schiflf dans la plèvre et le péricarde, par suite de la desiruction
nir que de la partie qui est préposée aux fonctions de circulation
des ganglions cervicaux.Sur la muqueuse intestinal *, la section
capillaire et de sécrétion, c’est-à-dire du grand sympathique.
de ses filets peut être suivie de diarrhée, ainsi que le démon
La preuve matérielle en a déjà été donnée pour le zona, car
trent les expériences de Budge. Son action se fait sentir aussi
Kecklinghausen faisant, en 1865, d’après les indications de
sur les sécrétions cutanées. Comme l ’a constaté SchilF, l’extir
Baerensprung, I autopsie d’un malade qui était mort dans le
pation des ganglions cervicaux détermine des sueurs abondantes
cours de cette affection, a trouvé une altération des racines
de la face et du cou Une altération morbide du système sym
spinales ganglionnaires.
pathique de la même région a produit le même phénomène
Ce vaste et puissant appareil, dont l ’influence se fait sentir
chez deux malades observés par M. Perroud. On peut donc
dans les congestions, les hémorrhagies et les altérations diverses
présumer que c’est à des troubles nerveux résultant d’ une action
de sécrétion, ne devait pas être non plus étranger aux phéno
réllexe qu'il faut attribuer les sueurs locales des phthisiques; elles
mènes inflammatoires.; l’expérimentation
rentreraient alors dans ces troubles nerveux périphériques dont
prouvé.’
M. Leudet a commencé l ’etude. On peut se demander aussi s’il
n’y a pas, dans la suelte, une altération de même nature mais
plus générale. Auraient-elles une même origine ces singulières
sueurs de sang qu’on a rencontrées dans le cours des névroses
et sur lesquelles M. Parrot a publié un intéressant mémoire
Gazelle hebdornwlaire, en
physiologique
l’a
Cl. Bernard enlève à des lapins les ganglions cervicaux infé
rieurs. Quelques jours après, il trouve à l’autopsie des pleurésies
et surtout des péricardites intenses, avec formation d’une
quantité considérable de fausses membranes; dans un cas, il a
1859? Est-ce encore celte
constaté môme l ’hépatisation d’une partie des poumons. En
intluence qu’il faut accuser de ces curieuses sécrétions pigmen
général, d’après l ’illustre physiologiste, la section du grand
taires qui ont été- particulièrement observées «liez les femmes
sympathique ne détermine, chez les animaux robustes, qu'une
nerveuses et que M. Le Boy de Méricourl a le premier décrites
injection violente, mais chez les animaux faibles ou malades,
sous le nom de chromhidrose.
elle produit de la suppuration. Bien que ces résultats ne s’ac
dans la
D’après les opinions de Hubershon,
B arlow ,
Mattéi de Sienne
cordent pas parfaitement avec ceux qu’a obtenus Snellen, ils
�n’en prouvent pas moins que le grand sympathique peut jouer
I N T É R Ê T S P R O F E S S IO N N E L S .
un certain rôle dans les inflammations.
C’est à peu près ce que mettent en lumière certains chapitres
du beau livre de M. Marey sur la physiologie médicale de la
circulation. L'inflammation, dit l'auteur, est un étal congestif
avec quelque chose de plus; ses caractères essentiels, cliniques,
ont été déduits de phénomènes qui appartiennent aux troubles
de la circulation locale ; chaleur, rougeur, gonflement et dou
leur, tous ces signes se rencontrent dans la congestion et,
ajouterons-nous, dans les résultats de la section du grand
sympathique. Il suffit de prolonger la durée d ’application d'un
agent ou d'en augmenter l’ intensité pour changer la congestion
qu’il détermine en une inflammation véritable. Le traumatisme,
l’action de la chaleur, celle des agents chimiques sont dans ce
cas. Les moyens thérapeutiques qui combattent eflicacement
l’inflammation, la saignée, surtout, et l’application du froid, si
utile dans les phlegmasies superficielles, ne s’adressent, après
tout, qu'aux phénomènes circulatoires, et M. Marey répète avec
J. Hnnter a qu’un agent qui posséderait la propriété de faire
« contracter les vaisseaux serait probablement le spécifique de
a l'inflammation. * Entre la congestion simple et l’inflamma
tion complète, il y a transition insensible par une série de
phases qui s'enchaînent, telles que les stases, les exsudations
variées, les alterations cellulaires, de sorte que, d’après M.
Marey, I on peut considérer l'inflammation comme le dernier
terme de la congestion. Sans accepter ces opinions dans toute
leur teneur, on doit reconnaître que les phénomènes congestifs
sont pour beaucoup dans les affections inflammatoires, et
comme les phénomènes congestifs dépendent souvent d’un
trouble dans l’innervation sympathique, est-ce illogique d’en
conclure que le grand sympathique peut être coupable de beau
coup d’inflammations?
La suite au prochain numéro.
A.
F abre.
Il n’est que trop vrai que les certificats délivrés par les méde
cins sont soumis au timbre.
Deux médecins de la Haute-Vienne ont été condamnés h une
amende de 60 francs, l un pour avoir, en sa qualité de médecin
du bureau de bienfaisance, donné un certificat à un
, h
l’effet de déclarer que ce malade était dans l’ impossibilité de se
transporter a l ’H ô te l-d e -ville ; l ’autre, médecin de l’asile des
aliénés, pour avoir délivré sur papier libre un certificat consta
tant l elat de démence d'un malade de l ’asile.
Une consultation de M® Guerrier, avocat, membre du conseil
judiciaire de notre Association Générale, conclut qu’en de
pareilles circonstances l ’administration a pour elle le droit
rigoureux.
« Voila donc les médecins bien prévenus, s’écrie M. Anié« dée Latour, après avoir reproduit dans l
du
U mars la consultation de M* Guerrier. Ils ne doivent déli—
« vrer de certilicats que sur papier timbré. Or, le plus ordi« nairement. ce sont des indigents qui viennent réclamer les
« certificats des médecins, et ceux-ci vont se trouver dans
« cette alternative ou de refuser le certificat a celui qui ne peut
« pas payer le tim bre, ou de payer eux-mèmes le timbre, ou
« de s’exposer à une forte amende en délivrant le certificat sur
« papier libre.
« Il était utile que le corps médical connût la situation ; il
« faut examiner maintenant s’il n ’v a pas quelques tentatives à
« faire auprès de l ’administration des finances pour que les
• médecins puissent concilier le respect qu’ ils doivent a la loi
« avec leurs devoirs d'humanité et de charité. »
Que nos confrères ne s’alarment pas trop, cependant ; il y a
bien des lois anciennes qui ont cessé d ’être justes et qu’on
n’applique pas ou qu’on n’ exécute jamais dans toute leur r i
gueur. Nous serions fort étonné que, dans nos régions, I admi
nistration se départit, sur la question qui nous occupe, de la
sage et complète tolérance qu’elle a montrée jusqu’ici.
Du reste, nous tiendrons nos lecteurs au courant de tout ce
qui sera fait à Paris et de tout ce qui sc passera en France, au
sujet du timbre, bien entendu.
indigent
«
'Union médicale
�— 72 —
VUnion medicale
Mille remerciroeols a
pour les encourage
ments et les éloges qu'elle veut bien, une fois de plus, donner à
notre feuille dans son numéro du 7 mars dernier. Médecins de
la Provence, soyons heureux et liers de l’accueil qui est fait à
notre journal par nos bien-aimés confrères de Paris; mais
honneur oblige,travaillons tous avec ardeur a l ’œuvre commune.
permanente qu elle accuse dans l’algidilé pure, caractérisée par
Souscription publiée par l'dnion M édicale de la Provence.
M
cours du sang et, par suite, son aspect veineux prématuré.
MM. Girard, 10 fr.; Beullac, 5 fr .; Chevillon jeune, 5 fr.;
Trabuc, 5 fr .; Blache, 5 fr.; Reymonnel, 10 lr .; Dor, IU fr.;
Martin Emile, 3 fr.; Rougier-Garagnon, 2 fr.; àocanus, 2 fr.;
Gamel, 2 fr.; Aubert Louis, 2 fr ; Aubert, 2 fr.; Didiot, 5 fr.;
Lachaux, 2 fr.; Pellegrin, 2 fr.; Chabrier, 2fr.; Gillet, 5 fr.;
Vernet, 3 fr.; Tacussel, 2 fr.; Martin de Roquebrune, 5 fr.;
Pirondi, 10 fr.; Rivalz, 3 fr.; Monfray, 3 fr.; Laurent, 3 fr.;
Reynè$,3 fr.; Spitzer,3 fr.; Gouzian,3 fr.; Nitard-Ricord, 5 fr.;
Bouquet, 5 fr.; Crouzet, 3 fr., un Membre du Comité Médical,
5 fr.; Sicard, ô lr . ; Combalat, 10 fr.; Garsin, 5 fr.; Ménécier,
5 fr.; Jourdan, 2 fr.; Magail, 10 fr.; Meffre, de Sainl-Just,
2 fr.; Denans Romain, 3 fr.; De Boissv Dubois, 5 f r . ; Villard
père, 5 fr.; Isnard, 3 fr.; Villard fils, 10 fr.; Denans Félix, 1 l'r.;
rlavard, 5 fr.; De Parseval,5 fr.; Abram, 1 fr.; M érentié,2 fr.;
Van Gaver, 3 fr.; Auphan, 2 fr.; Dauvergne, 5 fr.
Total................................... 199fr.
Montant des listes précédentes...................................... 449
Total...................................
648fr.
MM. les médecins de Marseille et des Bouches-du-Rhône
qui n'ont pas encore souscrit sont priés d’envoyer leur offran
de à M. Seux, président de l Association, rue de Rome, 97,
ou à M. Laurens, secrétaire, rue Dauphine, 17, ou bien encore
à M. Blanchard, trésorier, rue Paradis, 7.
Le Comité de rédaction
Mtrieilie. —Imprimerie VIAL, roe Tbltrt, 8.
le refroidissement, la diminution des paities périphéiiqucs,
Paugmenlalion de la tension artérielle, le ralentissement du
4"“ LISTE.
l
moderne attribue beaucoup d’importance à la dilatation paraly
tique des petits vaisseaux, c'est au contraire leur contraction
MONUMENT A L A EN N EC .
_
Si, dans les congestions et les inllammations, la physiologie
L'algidité, tel est le symptôme qui laisse la plus vive impres
sion à ceux qui ont observé des cholériques. Dans ce cas, elle
u est pas simple ; la composition du sang est de plus altérée par
de fortes déperditions séreuses. Mais ces déperditions elles-
'
'à
mêmes peuvent s’expliquer par une altération du grand sympa
thique, la section des filets de ce nerf qui se rendent à l'intestin
ayant déterminé des diarrhées séreuses. La période dite de
réaction, qui termine le choléra, s’explique comme conséquence
physiologique de l ’algidité. L ’altération du grand sympathique
peut doncjon erle rôle principal dans ce drame lugubre qu’on
nomme le choléra.
Il est une maladie qui commence par une algidilé locale :
c’est la gangrène symétrique des extrémités, étudiée pour la
première fois, il y a deux ans, par M.
Maurice Raynaud.
Elle débute par des spasmes passagers des vaisseaux capillaires,
dont un type est le phénomène connu sous le nom de
mort ; M.
doigt
Raynaud l’appelle syncope locale. A un second degré,
c’est l’asphyxie locale où, le spasme des capillaires artériels se
prolongeant davantage que celui des capillaires veineux, le
sang noir rcllue vers les dernières arborisations du système
veineux et entretient assez mal la nutrition des tissus. Enliu, à
'
�— 74 —
un troisième et dernier degré, la circulation étant tout h lait
ceux qui sont le moins soutenus par des tissus environnants ;
interrompue dans les capillaires d'une région, la vie nutritive
aussi le fébricitant a -t-il la face et les extrémités turgescentes,
s’y altère et la gangrène s’y développe.
fausse bonne mine qui masque son amaigrissement et qui dure
La physiologie pathologique du grand sympathique ne reste
autant que la fièvre elle-même.
pas circonscrite dans des troubles locaux, quelque nombreux
Ainsi donc, dans l ’appareil fébrile, le relâchement des capil
d'ailleurs et quelque variés qu’ ils soient. Elle prétend expliquer
laires, qui ne peut provenir que de l ’atonie des rameaux sym
aussi ce trouble morbide général qui, sous le nom de lièvre, a
pathiques, est le phénomène essentiel et prim itif. Il n’est cepen
de tout temps préoccupé les médecins. M. Marey et l’auteur
dant pas bien certain que quelques états fébriles ne soient pas
d une excellente thèse, M. de Barrel de Poutevès, se sont ap
sous la dépendance d’une augmentation de force dans le cœur.
pliqués à démontrer que tous les phénomènes observés dans la
Nous avons passé en revue bien des états morbides différents
fièvre tiennent à un relâchement vasculaire.
où nous avons reconnu l ’ intervention, soit certaine, soit pro
Qu’observe-t-on. en effet, dans la fièvre? une chaleur plus
bable, soit simplement possible du grand sympathique. Ces
grande ou, ce qui est plus exact, une distribution plus égale
états, il est un ordre de maladies qui les résume tous, où tous
dans la température du corps, un pouls plus ample et plus
peuvent se rencontrer tour h tour. N ’est-il pas naturel de rat
fréquent.
tacher cet ordre de maladies h une altération du grand sympa
Or, il est aujourd’hui démontré d une part que la contraction
des petits vaisseaux retarde et ralentit la circulation, d’autre
thique, comme l’ont déjà fait, d’ailleurs, MM. Rayer, La Caméra,
Cahen?
part que le cœur bat d’autant plus fréquemment qu’ il éprouve
Dans les fièvres intermittentes, nous observons successive
moins de peine à se vider. Du moment donc où les capillaires
ment trois stades : le premier est l ’algidilé ou, si l’on veut, le
relâchés opposeront moins d’obstacle au cours du sang, les
frisson qui en est le premier degré ; c’est une contracture gé
battements du cœur prendront plus de fréquence; dès I instant
nérale des vaisseaux capillaires, ainsi que l ’a expliqué la physio
aussi où les vaisseaux dans l ’atonie céderont plus brusquement
logie Le second, celui de chaleur, reproduit les phénomènes
à la pression excentrique du sang, le pouls revétifa plus d’am
que nous avons observés dans les fièvres continues et qui
pleur.
tiennent à un relâchement général des mêmes vaisseaux ; con
Comme après la section des filets du grand sympathique, on
formément à la loi si rationnelle et si vraie que Henle a pro
observe dans la fièvre une augmentation de chaleur et de rou
mulguée, par le fait d’une contraction trop énergique et trop
geur des téguments; seulement celle chaleur qui, Ih. était
prolongée, la contractilité vasculaire s'est provisoirement épui
locale, ici devient générale; celle rougeur qui, Ih, était circons
sée; uu trouble dans l ’innervation capillaire peut seul produire
crite et vive, est ici diffuse et légère. C’est un effet général
ces deux stades ; quant au troisième, si l'on réfléchit à l’influence
modéré au lieu d’un efiet local violent ; le mal a gagné en
déjà signalée du grand sympathique sur les sécrétions cutanées
étendue, il a perdu en intensité. Il n’y a pas jusqu’au gonflement
et à ces sueurs locales qui ont suivi la section de plusieurs de
qu’on observe aussi dans les deux cas; seulement, dans la
ses filets, on est tout porté à pl acer sous l’ influence d ’un trouble
fièvre, il reste limité à la superficie du corps; le sang distend de
général et de nature paralytique du même
préférence les vaisseaux qui lui offrent le moins de résistance,
générales qui terminent l ’accès de fièvre.
nerf les sueurs
�Los congestions de la rate et du l’oie rouirent dans la catégorie
dos congestions medicales cl il est rationnel do les attribuer à
l’atonie d’une portion du grand sympathique , sans oublier
néanmoins que, pendant un frisson prolongé, le sang, repoussé
de la périphérie, doit a\oir p>us de tendance à refluer vers les
organes profonds.
Qu’on jette maintenant un coup-d’œil sur les lièvres perni
cieuses, on verra se manifester tour a tour chacun des ordres
d'affections que nous avons étudiés jusqu’ici.
un même médicament, celui-ia précisément qui triomphe des
fièvres intermittentes régulières, le sulfate de quinine.
Nous avons parcouru la catégorie des affections qu’une in lluence commune du grand sympathique nous parait devoir
rapprocher dans le cadre nosologique. Il en est d’ autres aussi,
qui i:e leur ressemblent pas, que l'on a voulu rattacher à la
même origine et que nous devons mentionner pour ne rien
omettre d’ important.
M. Trousseau a mis sur le compte du sympathique la produc
Des congestions, on en observe dans les formes paralytiques
tion du goitre exophlhalmique. Celte dilatation des vaisseaux
et comateoses, ainsi que l’ont constaté MM. Sonricr et Jacquot;
de l’orbite et du corps thyroïde s’explique en effet assez bien
dans la délirante, qui lait l’ olijet de trois observations de
par une semi-paralysie des filets nerveux qui président à leurs
Lauter. Des hémorrhagies , dans cette forme pétéchiale qui
mouvements ; les palpitations peuvent aussi dépendre de l ’al
s’est montrée à Copenhagueen ICoSî; dans l’hémoploique, dont
tération d’un système qui agit sur le cœur, mais il sera impos
MM. Millet et Bouyer ont rapporté des exemples ; dans la iné-
sible de le démontrer tant que nous ne connaîtrons pas mieux
trorrhagique, dont M. Lecomte, d’ Eu, a décrit un exemple pro
l inlluence précise du grand sympathique et du pneumogaslique
bant; dans la cardialgique avec hémalémèse, signalée par
sur la fonction cardiaque. Même remarque pour l ’angine de
M. Lévêque. Des lésions de sécrétion, dans la diarrhéique, dans
poitrine gui. d’après la théorie française, développée surtout
la sudorale dont Torti faillit être victime. Des exanthèmes, dans
par M. Lartigue, serait un forfait de ce grand coupable.
ces observations dont la science a été dotée par Comparetli,
Il a été pris en flagrant délit dans d’autres circonstances.
Alibert, Gouraud, Gollin et Bourges. Des inllammations, dans
Ainsi l’observation des phénomènes pupillaires dans l’ataxie
la pneumonique, dans la pleurésiipie, dans cette observation
locomotrice ayant fixé son attention, M. Duchenne a observé a
d’ un étal inflammatoire de la jambe avec grande exacerbation
l’autopsie des lésions de la portion cervicale de ce système ;
tous les deux jours que Brodie fit disparaître avec de la quinine.
poussant ensuite ses investigations jusqu'il la moelle, cet émi
De l'algidité, dans celle forme si commune et si grave qui lui
nent médecin a trouvé non-seulement une atrophie de l’élément
doit son nom. De la gangrène même, dans quelques cas excep
nerveux avec hypertrophie du tissu conjonctif, mais encore et
tionnels dont l un a eu pour témoin Marjoliu.
surtout un développement considérable des vaisseaux capillaires,
Yoilh le bilan des fièvres pernicieuses, à l ’exception de quel
ques-unes qui se manifestent par des désordres nerveux dont
nous ignorons la cause prochaine et le mécanisme. Un trouble
dans l'innervation du grand sympathique, trouble qui se con
centre particulièrement sur un point déterminé,suffit pour nous
donner la clef de tous ces phénomènes qui tons s'effacent devant
qu'il a cru pouvoir attribuer a un état morbide des nerfs vaso
moteurs.
"L'influence de ce système est beaucoup plus probable dans
l’atrophie musculaire. M. Jaccoud a communiqué, en décembre
I8GÎ, à la Société Médicale des hôpitaux, deux observations de
cette maladie où il avait trouvé, indépendamment de l’atrophie
des racines antérieures des nerfs spinaux, la dégénérescence
�graisseuse des ganglions cervicaux du grand sympathique, sur
tout de ceux de la région cervicale, lésion signalée pour la
première fois quelques mois auparavant par Schneivoogl.
Si les opinions que nous venons de mentionner se confir
ment, elles prouveront une fois de plus jusqu'où peut s’étendre
f influence du grand sympathique dans les troubles circulatoires
et quels accidents graves peuvent provenir des entraves appor
produites de toutes pièces par une lésion du grand sympathique,
les premières, au contraire, le grand sympathique est insuffi
sant à les déterminer ; il faut de plus, ou en dehors de lui, des
causes spéciales ou des dispositions intimes qui mériteraient
des recherches approfondies. Au double point de vue du pro
nostic et du traitement, la distinction est capitale. Ce n’est
donc pas tout d’avoir reconnu l’existence d’une inllammation et
tées à son action sur la nutrition des tissus.
Jetons maintenant un regard d’ensemble sur le terrain que
nous venons de parcourir et indiquons quelques-unes des con
séquences générales du mouvement que nous
mations fluxionnaires. O r, tandis que les dernières peuvent être
venons de
constater.
son siège, il faut surtout en indiquer la nature.
Ces études conduisent non-seulement à séparer mais encore
à rapprocher. La vieille classe des fluxions, aujourd’hui délais
sée, reparaît avec l ’appui d ’une science nouvelle. Nous appel
Ce qui nous frappe tout d abord, c’est le lien d’étroite parente
lerions volontiers fluxions toutes les affections aigues analogues
qui unit des affections que jusqu’ici l’on avait considérées
à celles qu’on peut produire par la section du grand sympathi
comme constituant des ordres fort différents : congestions, hé
que et dont le caractère essentiel est l’ afflux de sang ou de
morrhagies. inflammations, lièvres, névroses, lésions de sécré
liquide vers un point déterminé. Des congestions aiguès, cer
tion, lésions de nutrition ne seront plus, a l'avenir, que des
taines diarrhées, certaines hémorrhagies, les pleurésies avec
groupes morbides arbitraires, puisqu’une même iniluence. celle
production de sérosité et d’exsudations plastiques, les amygda
qu il importe à la pratique de connaître, peut les déterminer
lites simples, les intlammations rhumatismales rentreraient dans
tour à tour. Voilà donc, en pathologie, des classifications à
celte catégorie, dont un des types est la pneumonie commune
refaire.
ou lluxion de poitrine.
À l avenir, il faudra tenir moins compte de la forme exté
Toutes ces affections sont unies par des liens étiologiques et,
rieure du mal <pic de sa cause physiologique et de cet agent
parlant, par des indications thérapeutiques. Ainsi elles ont toutes
dont il est plus difficile de constater les effets que l’essence et
très souvent pour cause l ’impression du froid. Par les troubles
qu’on peut appeler le géuie morbide.
qu’elle apporte à la circulation capillaire, par les actions réllexes
Je m explique et je prends un exemple, soit celui des in
quelle peut déterminer, l ’impression du froid devait jouer un
flammations. L’expérience prouve qu'il peut se développer dans
grand rôle dans la production de ces maladies. 11 n’y a pas
un même organe des inflammations dont les unes suppurent
d'influence qui soit plus générale sur les nerfs vaso-moteurs et
fatalement et les autres tendent naturellement à la résolution
qui se fasse sentir plus fréquemment ; elle devait donc avoir la
et ne suppurent que par accident. Celle distinction, l'auteur
première place dans l'étiologie des affections de ce système ;
d’une thèse vraiment médicale, M. Douillard, a eu déjà le mérite
c’est ce qui a lieu en effet ; les notions que nous possédons au
de la faire pour les pneumonies. Qu’on examine avec soin, et
jourd’hui changent en vérité scientifique ce fait d’observation;
on la trouvera vraie comme fait général. Il importe énormément
elles mettent eu parfait accord l’expérience et la raison.
de reconnaître des inflammations suppuratives et des inflam
Indépendamment de ces lluxions par simple impression net-
�vcuse, il y aurait à reclierciici aussi s'il n \
a
pis des mouve
La thérapeutique des maladies que nous avons appelées
ments fluxionuaires dus à l’action d’éléments materiels circulant
lluxionnaires doit y gagner énormément. Nous savons, en effet,
dans I économie. Celle action aboutirait à 1 atonie de. tel ou tel
quelles dépendent en grande partie du système nerveux vaso
roseau vaso-moteur, d’où congestion, excrétion, et par suite
moteur, et comme beaucoup de médicaments agissent sur le
élimination delà substance par celte voie. L ’élu ’e des crises
système nerveux, nous avons l ’espoir motivé de leur trouver
serait à faire plus tard h ce point de vue, mais, pour le moment,
bientôt des remèdes qui leur conviennent.
elle serait trop ebargée d’hypothèses ; passons.
Enfin, grâce à ces notions nouvelles, la thérapeutique voit
s’étendre son horizon toujours trop étroit.
Nous n’irons pas cependant «aussi vile que M. de Barrel de
Pontevès qui, n’examinant les médicaments qu’au point de vue
de leur action sur le grand sympathique, les divise en deux
Nous uous expliquons par elles comment l'aconit et la digi
classes, suivant qu’ils tonifient ou qu’ils dépriment ce système.
tale arrêtent certaines méirorrhagies, ainsi que la clinique l’a
Vient enfin une très curieuse et très importante question
prouvé. Nous nous expliquons surtout comment l'arsenic, au
thérapeutique, celle de l ’aetion élective des médicaments, qui
quel \J. Galien a reconnu une grande puissance sur tout le
se résume en grande partie dans I influence plus spéciale que
système vaso-moteur, agit sur tant de maladies en apparence
l<’ ou tel agent peut exercer sur tel ou tel rameau des nerfs
fo it différentes, mais qui toutes dépendent d’une altération de
vaso-moteurs, il y a la h exploiter tonte une mine de petites
ce système.
découvertes.
Les révulsifs, a cause de leur action réflexe, l'hydrothérapie,
à cause de son influence sur le système vaso-moteur, y gagnent
aussi comme pratiques rationnelles.
Ainsi donc, en thérapeutique comme en pathologie, l ’élude
du grand sympathique doit être intéressante et féconde.
Arrivé au terme de ce travail, nous voudrions nous défendre
Nous y trouvons un argument fort puissant en faveur de
d une accusation d’enthousiasme exclusif. Nous avançant dans
I aoeslliésie chirurgicale qui, en diminuant les accidents in
une voie encore peu explorée, nous avous dû émettre, sous
flammatoires, rend la mortalité jdus rare après les grandes
forme de doute, bien des opinions qui manquent de preuves ;
opérations, résultats que les statistiques ont prouvés, mais
niais ce n’est pas nous qui prétendrons que I avenir de la mé
que les praticiens, préoccupés des ac idents immédiats de
decine est tout entier dans l ’élude des nerfs vaso-m oteurs.il
J’auestbésie, paraissent avoir trop oubliés en ce moment.
existe aujourd hui trois voies distinctes dans lesquelles s avance
Nous v vovons encore une raison de plus pour l ’emploi des
la science médicale ; entre la tendance philosophique, qui con
préparations opiacées après l’opération de la hernie étranglée,
sidère I homme dans ses facultés vitales et dans son admirable
dans les perforations intestinales, dans les blessures acciden
unité, et la tendance anatomique qui suit d’ un œil attentif dans
telles ou chirurgicales, la douleur, par action réflexe, appelant
toutes leurs évolutions les cellules du corps humain, il y a la
l ’inflammation. C’est aussi une indication devenue rationnelle
tendance physiologique qui trouve des progrès a réaliser dans
poui certaines plilegmasies médicales, et uous comprenons pour
l'étude du système nerveux et en particulier du grand sympa
quoi M. I rousseau a obtenu de bons ellels des injections nar
thique. C est dans celle dernière \oie que nous venons de mar
cotiques sous-cutanées comme moyen abortif des inflammations
cher; mais les trois tendances sont nécessaires, et la science ne
périnépbréliques.
peut être complète qu’au prix de leur réunion.
A. F a b r e .
�que l'écrit qu’on réclamé de lui peut être produit en justice ou
IN T É R Ê T S PR O FE SSIO N N E L S.
servir b une justification, pour s’exempter a comparaître h un
conseil de famille, par exemple, le médecin est tenu de se servir
exclusivement, et dans tous les cas, de papier timbré.
sed lex !
Dura lex ,
Voici le texte de la consultation de M° Gueuribr, dont nous
avons parlé dans le dernier numéro, mais que le défaut d’espace
nous avait empêches de publier tn extenso :
que ces certificats seront réclamés par des indigents ; le médecin
« Lorsque, sur la demande d’un malade, le médecin délivre
peut exiger que son client lui fournisse le papier nécessaire et
Dans la pratique, il arrivera souvent, et le plus souvent même,
un certificat, d o it-il, dans tons les cas. faire usage du papier
refuser de délivrer aucune attestation tant qu’on ne lui procure
timbré?
pas le papier timbré ou une exemption valable de l ’administra
Si un certificat délivré sur papier libre est plus tard produit
en justice ou soumis, pour toute autre cause, h l ’administration
de l’enregistrement, le médecin signataire est-il passible d’une
amende?
tion (ce qui sc présentera dans les causes d’assistance ju d i
ciaire) ; mais, dans aucun cas, il ne peut se soustraire a la
ligueur de celle loi fiscale. En vain alléguerait-il qu’ il a ignoré
l'usage qa’on voulait faire de cet écrit ; la loi ne distingue pas,
il suffit que cet écrit
La loi du 15 brumaire an V /I (3 novembre
1708), répond
allirmativement a ces deux questions.
puisse servir.
On objecte que la contravention est commise par la personne
qui se sert du certificat donné sur papier libre, et non pas par
En effet, nous lisons dans l’art. 12 de cette loi : « Sont assu
le médecin qui l’a signé. C’est Ih une grave erreur. La contra
jettis aux droits de timbre, établis en raison de la dimension,
vention se commet au moment où le médecin écrit son certificat,
tous les papiers a employer pour les actes et écritures, soit
et le malade qui en fait usage ne fait que révéler il l'administra
publics, soit privés, savoir....... et généralement tous actes et
tion cette contravention qui serait ignorée sans la production
écritures, extraits, copies et expéditions, soit publics soit privés,
qui en est faite.
devant
on pouvant faire titre
ou être produits pour obligation,
décharge, justilication, demande ou défense... »
Enfiu, I usage qu’on invoque ne prouve rien contre le droit.
D’une part, un grand nombre de contraventions restent toujours
A cette règle générale, la loi admet quelques exceptions,
énumérées dans l’article 16, et de ce nombre ne sont pas les
certificats délivrés par le médecin.
inconnues ou ne sont découvertes que lorsque la prescription
est acquise il leur auteur; d’autre part, il peut arriver que, en
raison des circonstances, l ’administration n ’exerce pas de pour
Or, il est évident qu’en présence des termes de la loi que
suites et ne réclame pas l ’amende ; mais c’est de sa part
nous venons de rappeler, ces certificats rentrent dans la caté
une tolérance ou un oubli et non une règle qu’on puisse
gorie des
invoquer.
écritures privées po u v a it servir de justification.
Ajoutons même qu’en fait le malade qui requiert du médecin
A notre avis, il serait donc dangereux de solliciter du minis
un certificat, veut certainement eu faire usage. Quel sera-t-il?
tère une circulaire a ce sujet, comme l ’ont proposé quelques
Le médecin l ’ignore souvent, sans doute; mais, par cela seul
membres de Sociétés locales; une contestation serait aussi inu-
�8i
—
85
—
tilc, (H la jurispiudence est fixée d’une manière absolue dans le
sens favorable à l'administration.
ventôse, projet qui est devenu la loi qui régit encore rensei
Il n'y a donc pas autre chose à faire qu’à solliciter du minis
Le rapport de Fourcroy établit très bien que la liberté de
tère ollicieusement le dégrèvement «les amendes encourues, et,
l’exercice de la médecine a existé en France pendant près de
pour les éviter à l'avenir, recommander à tous les médecins
onze années, et que cette triste et trop longue expérience a
de ne jamais délivrer de certificats autrement que sur papier
obligé le législateur, dans l’intérêt public, de faire un retour
timbré de 0 fr. 50 c.
salutaire à des lois protectrices.
GuEBBIER,
Avocat a la Cour de Paris, membre du Conseil judiciaire
Ainsi donc, en Angleterre comme en France, l’expérience a
prononcé.
de f Association générale des Médecins.
La liberté d'exercice de la médecine.
gnement et l'exercice de la médecine dans notre pays.
Quant à nous, quelque partisan que nous soyons des libertés
— Comprend-on que
des hommes éclairés veuillent pousser l ’abus de cette belle
en général, nous n’en sommes pas à admettre celle de voler cl
de tuer.
chose qu’on nomme la liberté au point de soutenir que tout le
monde, le paysan le plus ignorant comme le charlatan le plus
éhonté, a le droit de pratiquer la médecine? Ces utopistes in
voquent l’ exemple de l’Angleterre. Or, voici ce que l ’
Médicale, dans sou numéro
Union
du 18 avril, nous apprend sur ce
qui s’est passé tout récemment en Angleterre :
Le
Medical Council
a demandé une amende de 20 livres
,500 Irancs) contre tous ceux qui prendraient illégalement un
titre et se livreraient il l’exercice de la médecine.
U Union Médicale ajoute :
« Voilà donc le Royaume-Uni, après une longue expérience
de la liberté à cet égard, obligé d'intervenir et de prendre des
mesures de plus en plus répressives contre l ’exercice illégal.
Grave enseignement contre ceux qui le prêchent encore de nos
jours; car, s’il est vrai qu'il ne s’agit encore que des réclama
tions des médecins, il n’ est guère à douter que, en présence des
malheurs publics dont cette liberté est chaque jo u r la cause, le
Parlement ne sanctionne les justes restrictions qu’on lui de
mande. »
Dans un article du 24 avril 1805, le même journal reproduit
un loug passage du rapport de Fourcroy sur le projet de loi de
— C'est ce que l’o nt trop souvent ceux qui pratiquent l'exer
cice illégal. Il en est cependant de très honorables et de fort
bien intentionnés qui ne volent pas; ils montrent même beau
coup de dévoùment ; ils administrent gratuitement des remèdes
qui laissent m ourir, s'ils ne tuent pas.
Voilà pourquoi nous désirerions les, voir faire un meilleur
emploi de leur cliarité.
Ceux qui réclament la liberté d exercice de la médecine ne
peuvent parler au nom de la santé publique; ils font même
bien bon marché de la santé de leurs compatriotes. A quel
homme de bon sens persuadera-l-on jamais que les charmes
d'un sorcier, les recettes d ’une somnambule ou les onguents
d’une commère doivent guérir plus souvent et plus sûrement
que les sages conseils d'un médecin qui, dans les hôpitaux,
s’est longtemps formé à la pratique, et, sur les bancs de l’école,
a recueilli les trésors de science dont deux mille ans d’études
ont enrichi la médecine traditionnelle !
Utopistes, ne profanez donc pas le mot de liberté ci ne vous
jouez plus de la santé des hommes.
D’ailleurs, nous n ’avons pas à craindre que, pour le mo-
�—
—
SG —
87 —
ment, cos principes subversifs soient appliqués en France.
soient poursuivis à outrance et châtiés en proportion de leurs
Y a -t-il au monde, après un docteirî, un homme présentant
fautes?
plus de garanties pour l'exercice de la médecine qu’un cinqsixièmes de docteur, ayant subi les cinq examens du doctorat,
préparant sa thèse, interne nommé au concours d’un grand
etablissement d'assistance publique? Telles sont les conditions
Nous n ’attendons pas moins du zèle éclairé de la magistrature
de notre pays.
Le Secret Mcdicnl. —
C’est avec une véritable joie que nous
où se trouvait le sieur L ... quand il (il plusieurs visites pour le
prenons acte d’un jugement dont le corps médical se trouvera
docteur X ..., médecin h Voulx (Seine-et-Marne). Se croyant
heureux et llatté.
lésé par ces faits, le sieur Hoste, officier de santé de la même
Les Cours de Grenoble et de Montpellier ont jugé que le
localité, a assigné en exercice illégal de la médecine le sieur
consentement meme de la personne intéressée ne peut obliger le
L... et le docteur X ...
médecin à faire connaître les maladies qu’il a traitées, si elles
Le tribunal correctionnel de Fontainebleau, par jugement en
lui paraissent, à raison de leur nature, devoir rester secrètes.
date du 27 jauvier dernier, avait condamné le sieur L ... à 50
Aux termes de ces décisions, l’obligation du secret prescrit
francs d’amende envers les hospices et déclaré X ... civilement
par l’article 578 du Code pénal est établie dans mi intérêt
responsable.
général ; elle est nécessaire pour assurera la profession médi
Appel a été interjeté auprès de la Cour de Paris qui a con
firmé le jugement.
Nous voilà encore avertis. La loi, dans cette circonstance, a
été appliquée aussi rigoureusement que possible ; mais en
toutes choses il faut être logique. Si un interne d ’un grand
hospice, avant subi ses cinq examens de doctorat, possédant
par conséquent 1 instruction suffisante pour exercer, et n’ayant
plus qu’à passer sa thèse, ce qui est une simple formalité,
commet, en faisant quelques visites sous la surveillance d'un
docteur, un véritable délit, et se voit condamné à une amende,
comment qualifier la faute des médicastres en habit ou en
jupons qui, sans la moindre instruction ni la plus petite ga
rantie scientifique ou morale, spéculent sur la crédulité et
jouent avec la vie de leurs semblables? Quel zèle Its magis
trats doivent-ils mettre à les rechercher et quelle rigueur à les
punir!
cale, dont l’exercice importe à la société tout entière, la con
fiance publique.
Voilà, pour le secret médical, une nouvelle et importante
sanction; voilà, pour I honneur médical, une belle et glorieuse
victoire.
Dépositaires vénérés des secrets les plus graves, les médecins
ont toujours compris quels impérieux devoirs naissent pour eux
de cette complète et nécessaire confiance. Parmi les qualités
dont notre corps a donné maintes preuves, on a reconmi le
dévouement courageux et modeste, mais on n’a pas assez rendu
justice à la discrétion. Kt cependant il n’arrive jamais qu'un
médecin fasse connaître ces secrets qu’il considère comme un
dépôt sacré. Sans doute, la loi lui permet et lui ordonne le
silence ; mais, quel que soit son respect pour la loi, il place
encore au-dessus d’elle ce qu’ il doit à sa conscience. Le résultat
moral le plus important des jugements que nous venons de
mentionner, c’est qu’ils tendent à consacrer ce grand principe
Si le châtiment atteint des coupables qui sont bien près
que le corps médical professe et qu’ il voudrait voir universel
de I inoocence, n’est-il pas juste que les vrais coupables
lement adopté : le médecin relève avant tout de sa conscience.
�NÉCROLOGIE.
A PROPOS DE L’ENSEIGNEMENT MEDICAL
Le dernier numéro de noire journal venait de paraître quand
nous avons appris la mort du vénérable docteur Sue, médecin
Réclamations amicales et confraternelles à la G azette Médicale
de Lyon.
consultant des hôpitaux,professeur et ancien directeur de b Ecole
de Médecine, oilicier de la Légion-d’Honneur. Par son affluence
aux funérailles, par les discours qui ont été prononcés sur la
tombe, le corps médical de notre ville a su rendre un hommage
mérité a cet homme de bien, b ce savant distingué, b ce praticien
éminent auquel nous venons aussi, bien tardivement malgré
nous, payer notre tribut de justes et profonds regrets.
Un des journaux de médecine les plus autorisés de province,
la
Gazette Médicale de Lyon , et un des
écrivains les plus ins
truits et les plus spirituels, M. Diday, sou rédacteur, nous ont
apporté, dans trois numéros successifs, du 16 avril, du 1er et
du 16 mai, un travail ayant pour but de démontrer la néces
sité, en médecine, d’un corps examinant distinct du corps
enseignant.
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
Noire excellent confrère M. Giraud, médecin en chef b l'asile
des aliénés de Saint-Pierre, va nous quitter pour se rendre à
l ’asile de Marc-ville où il est nommé pour remplacer comme
médecin en chef le regrettable M. Renaudin, un des aliénistes
les plus remarquables de notre temps.
—
V Union Médicale de la Provence
est heureuse d'avoir à
enregistrer la promotion du Dr Girard, professeur b l'Ecole de
Médecine, au grade d'officier de la Légion-d’ Honneur, distinc
tion flatteuse b laquelle ne peuvent aspirer en province que les
médecins d’un mérite qui louche b l’illustration.
M ONUM ENT A L A EN N EC .
Souscription publiée par l ’Union M édicale de la Provence.
5“* LISTE.
MM. les docteurs D u s illie t, 5 f r .; Friedreich , 5 fr.; Rev
13 fr.
(Adrien), 3 fr. — Total........................................... . .
Montant des listes précédentes.......................... . . 648
Total...................... . . 6ül fr
Le Comité de rédaction
lUrseille.— Imprimerie VIAL, rue Tbiar», 8.
Parlant de ce point incontestable que deux choses sont né
cessaires pour faire de bons médecins : l° d e leur donner une
instruction suffisante; 2° de s’assurer qu’ils l’ont reçue, M. Diday
arrive b cette conclusion que la même Faculté ne peut tout b la
fois enseigner, examiner et conférer les grades; car, ajoute
notre auteur, les
jeunes recrues sont toisées par ceux-là
même
qui leur ont fourni la nourriture, de sorte que lorsqu'il s’agit de
savoir si elles ont la taille voulue, non-seulement ce sont des
intéressés qui tiennent la mesure, mais, parmi eux, chacun
en a une différente. Une organisation où une même mesure
serait tenue par des mains désintéressées, indépendantes, don
nerait par cela même plus de garanties d’une appréciation
équitable. Telle est, en peu de mots, la réforme proposée.
N’ayant, nous, mission de défendre la
mesure
de Paris, pas
plus que celle de Strasbourg ou de Montpellier ; ne pouvant
même pas nous arroger le droit d’examiner en quoi ces mesures
diffèrent (si tant est que différence y soit), nous voulons bien
accepter, provisoirement et sous bénéfice d’inventaire, la ré
forme proposée; nous avouerons même, sans crainte de nous
compromettre, que, de prime abord, elle offre un avantage h
l’évidence duquel on ne saurait se refuser, en accordant, bien
6
�entendu, que ceux qui lieudraient la mesure-type ne se ser
Marseille, où l’on constate Jan9 chaque exercice, cl par des
vissent pas d’un de ces instru m e n t tant soit peu élastiques qui
chiffres, la prépondérance relative de ces établissements. Nous
prêtent b la détente. Cet avantage peut être défini en deux
pourrions encore faire observer que, parmi les chefs de service
mots : c’est qu’un concours serait naturellement établi entre
qui ont eu la liante main dans ces hôpitaux, il en est qui ont
les trois diverses Facultés, et qu’en appréciant le degré d’éléva
laissé, par leurs exemples, par leur puissante initiative et par
tion des études, on jugerait par cela même de la valeur de ceux
leur enseignement oral, des traces ineffaçables.
qui enseignent. Jusqu'ici la thèse de notre confrère de Lyon
est donc soutenable et la discussion peut être admise sans que
personne se sente blessé.
Mais voici où les affaires se gâtent : pour qu’un parallèle
annuel put être institué, il faudrait sans doute que la comparai
son poitàt sur des unités semblables. Il faut donc supprimer les
écoles secondaires, augmenter le nombre des Facultés el,comme
la loi du 11 floréal an X n’ a pas été abrogée, il faudrait porter b
six le nombre des Facultés de Médecine établies dans l’Empire
français, et les constituer là où de grands centres de population
et l ’importance exceptionnelle des hôpitaux fournissent l’ali
ment nécessaire à une bonne instruction anatomo-clinique.
Ctla dit, notre honorable confrère ne voit que trois villes natu
rellement désignées an choix de qui de droit : Lyon, Bordeaux et
Nantes. Il parait regretter que Toulouse, par sa situation, soit
forcément subordonnée à Bordeaux ; mais, ajo u te -t-il, à part
Montpellier, Strasbourg et Toulouse, il ne voit, encore une
fois, que Lyon, Bordeaux et Nantes qui fournissent les condi
tions nécessaires;et, parmi les titres qu’on leur accorde, il croit
devoir constater que ce sont les seules villes en province où
ail été fondé et où prospère un journal de médecine.
Nous n’avons pas précisément, nous, Marseillais,b remercier
M. Diday du regret qu’il nous refuse; il paraît que ni le chiffre
de notre population, ni le nombre et I importance de nos hôpi
taux ne sont suffisamment avérés pour que notre collègue de
Lyon ait pu s’en préoccuper.
Il nous sera sans doute permis de renvoyer M. Diday au
compte-rendu annuel de l ’administration des hospices civils de
Il en est qui, avant de se fixer dans notre ville, avaient, b
Paris, battu dans maint concours ceux qui devaient être de
brillants professeurs de la Faculté, tandis que d’aucuns de leurs
condisciples marseillais restaient b Paris, parvenaient an pro
fessorat ou entraient dans le corps médico-chirurgical des
hôpitaux, et que d’autres, enfin, sc faisaient un nom dans la
médecine militaire.
Il nous semble aussi que notre cher confrère fait bien bon
marché du personnel de notre Ecole. Sauf erreur ou omission
de notre part, on compte dans ce personnel un correspondant
de I Institut, deux correspondants de l'Académie de Médecine,
deux correspondants de la Société de Chirurgie et un cor
respondant de la Société Médicale des Hôpitaux. Ces titres,
on le sait, sont très rares, et on ne les accorde jamais b
la légère.
Mais nous voulons nous borner b la défense de ceux qui nous
Ont précédés dans le journalisme médical de notre ville.
Sans doute,!’
Union Médicale de la Provence est beaucoup trop
jeune pour prétendre a ce qu’ on ail une grande foi dans sa \ iabililé ; un enfant de deux ans n’est qu’un enfant, et ce n’est qu'b
I âge de dix-sepl, en sortant du collège, qu'il peut prétendre rai
sonner comme un homme. Mais enfin, tout enfant a le droit de
protection vis-à-vis de ses aînés, et
Y Union espérait
de la
Ua-
zette Médicale lyonnaise un plus bienveillant appui. Elle pouvait
s’y attendre d’autant mieux que d'autres confrères de Paris,
sénateurs par l’âge et par l’importance acquise dans la publicité
médicale, n’avaient pas craint de nous adresser quelques éloges
que nous avons pris pour un généreux encouragement. Quoi
�— !)2 —
qu'il en soit, notre position nous oblige h rappeler à notre aine
de Lyon que, depuis quatorze ans, le Comité Médical
Marseille publie un
Bulletin
de
mensuel ; depuis neuf ans, la
Bulletin
Loin de nous la pensée d’entamer par ces lignes une polé
mique ; notre but n’ a été que de relever un oubli qui, pour être
involontaire , n’en était pas plus flatteur, et nous espérons
trimestriel
qu’en tendant loyalement la main à notre aînée, elle nous la
dout plus d’une fois les travaux ont eu les honneurs de la repro
serrera de bon cœur, en nous souhaitant une longue vie
duction, même à l’étranger ; enfin, si, depuis vingt ans, des
comme nous lui souhaitons à elle une verte vieillesse, exempte
journaux de médecine a apparitions plus fréquentes se sont
d infirmités.
Société Impériale de Médecine publie un
Revue Médicale, Clinique de Mar
seille, Archives Médicales, Clinique des Hôpitaux , Presse
Médicale, sans fournir une longue carrière, leur succession
succédé sous les noms de
même prouve une certaine fertilité de notre sol, et peut-être
est-ce & ces infructueux essais et â l’expérience qu’ils nous ont
Le Comité de rédaction
Quelques mots sur les différents procédés d ’am putation de la Verge,
par le Docteur BHOQ UIER, chirurgien en chef des hôpitaux.
léguée que nous devrons, nous, les derniers arrivés, de pouvoir,
Dieu aidant, parvenir au moins a l’ âge mûr.
Qu’il nous soit permis de terminer par une seule réllexion
Ayant eu l’occasion de pratiquer quatre fois déjà l ’amputation
qui nous est fournie par un mot très juste dit par M. Lorain,
de la verge, j ’ai dû m’éclairer sur les différents procédés qui
dans sa remarquable conférence sur Jenner et la vaccine : Les
ont été mis en usage, et je dirai tout d’abord que le plus simple
plus distingués ne sont pas toujours ceux qui écrivent le plus,
m’a paru de beaucoup préférable.
et I on recueille plus de profil de la lecture de quelques pages
L’amputation de la verge est le plus souvent réclamée par
utilement condensées que du fatigant parcours de volumineux
l’envahissement du cancer. Si elle l ’est quelquefois par une
in-octavos. Parfois nous avons eu nous-mêmes la velléité de
affection grangréneuse ou une lésion traumatique, comme dans
reprocher â ceux de nos confrères qui se livrent à renseigne
le cas cité par Lenoir, où un homme eut la moitié de la verge
ment de ne pas assez écrire pour vulgariser plus d’ une idée
sectionnée par un coup de dent de cheval, dans ces cas particu
pratique dont ils ont l’initiative et dont d'autres se parent ;
liers, le chirurgien n’aura souvent qu’a compléter la section ou
mais, à cela il nous ont souvent répondu qu'ils se consolaient
employer ce que l’on appelle un procédé de nécessité.
de nos reproches en voyant des sociétés savantes couronner
nos jeunes médecins, et nos élèves réussir dans les concours
pour les hôpitaux de Paris.
Je ne veux parler ici que des cas d’amputation pour déve
loppement du cancer.
On sait que le cancer de la verge affecte presque toujours
Nous allions oublier, à propos de concours, que, pas plus
la forme épithéliale. Il se développe le plus souvent chez les
tard que l ’an dernier, un des élèves de cette même école se
individus ayant un phimosis congénital, et comme il prend ra
présenta précisément à l ’internat de Lyon, où des juges, aussi
pidement la forme végétante, il peut quelquefois eu imposer et
instruits qu’ impartiaux, le crurent digne d’être nommé le se
faire croire à de simples végétations ; mais lorsqu’il a envahi le
cond : peu s’eu est donc fallu qu'il n’emportât la fameuse trousse
fourreau de la verge et les corps caverneux, l ’erreur n’est [dus
de Bonnet.
possible.
�— 95 —
Il est arrivé que île simples végétations, développées sous le
prépuce, ayant détruit la calotte préputiale et recouvert le gland
au poiut de le masquer entièrement, ont été prises pour un
cancer. Cette erreur, signalée parM . Follin dans son
Pathologie externe, doit
Traité de
toujours être présente il l ’esprit du
chirurgien qui se rendrait coupable d'une mutilation alors
qu’une simple énucléation aurait suffi.
douloureux et très lent, est aujourd hui complètement aban
donné,
bien qu’il
ait été préconisé par M’Grœfe (1828).
En 1791, Dover publia un mémoire sur l ’amputation de la
verge. Déjà, avant lui, Ledran l ’avait pratiquée à l’aide de
l'instrument tranchant. Boyer en précisa la méthode.
Dans celle méthode, deux choses sont à craindre, dit M. V el
peau : u L de laisser plus de peau qu’il n’en faut pour la cica
Lecaucer delà verge marche assez lentement; il met quel
trice ; 2*d’en enlever trop pour qu’il soi( possible de l’ empêcher
quefois plusieurs années à gagucr peu a peu une partie ou la
de s’éloigner. Dans le premier cas, elle se roule sur elle-même,
presque totalité de l'organe, et cette lenteur est peut-être la
les hords de la division s'arrondissent et la cicatrisation devient
cause qui fait que les malades ne se soumettent que fort tard à
très dillicile. Dans le second, elle se relire plus ou moins vers
l’opération, espérant toujours enrayer le mal à l aide de moyens
le pubis et laisse le moignon à découvert. » Cependant, Boyer,
plus doux.
suivant l'exemple de Ledran, conseille de retirer la peau un
Les ganglions inguinaux ne se prennent également que fort
peu en arrière, afin que la rétraction subite des corps caver
tard; cet engorgement des ganglions ne doit pas être une
neux ne s’oppose pas à la ligature des vaisseaux, et, pour
contre-indication à l ’opération. Dans un cas où la région in
arrêter l'hémorrhagie, les artères dorsales et caverneuses sont
guinale était recouverte par une tumeur formée par la dégéné
liées.
rescence des ganglions, M. Maisonneuve n ’hésita pas à les
enlever, et le malade guérit (janvier 1854).
Comme tous les épithélioma, le cancer de la verge récidive
Lorsque l'amputation est pratiquée à une certaine hauteur,
celle hémorrhagie est peu inquiétante, parce qu’à l’aide d ’une
compression circulaire il est facile de s’en rendre maître et de
souvent, soit sur place, soit dans les ganglions voisins. Aussi
prendre le temps de lier les vaisseaux l'un après l’autre ; mais
doit on opérer le plus tôt possible et s éloigner du mal autant
si l’amputation est faite au ras du pubis, il n’en est pas de
que le permet l ’envahissement.
même, et celle difficulté, jointe à la rétraction des corps caver
Lorsque l’amputation est décidée, le chirurgien se trouve
neux qui s'enfoncent et fuient au fond de la plaie, est quelque
en présence de l’ un de ces deux cas, ou le mal n’envahit qu’une
partie de la verge, ou déjà il a atteint la racine et a gagné les
fois insurmontable et oblige le chirurgien à recourir aux h mos/
laliques les plus énergiques, même le cautère actuel. Celte
corps caverneux jusqu’à leur implantation.
difficulté est si réelle que Shrœger a proposé de diviser la verge
Différents procédés ont été employés dans chacune de ces
deux circonstances.
couche par couche et de lier les vaisseaux à mesure qu’ils
se présentent ; et Langenbeck a conseillé de passer un fil à
Dans le premier cas (lorsque l'amputation peut se faire sur
travers les corps caverneux, eu arrière de la surface de section,
le corps de la verge), un des [dus anciens procédés est la liga
afin de les amener à volonté et les faire saillir pour présenter
ture, faite par Kuyscb, Heister... Une sonde était placée dans
les vaisseaux.
l'urètre pour ménager la miction et I on plaçait au delà du mal
Aujourd’ hui, j ose presque dire que cette question de l'hé
une ligature que l'on serrait chaque jour. Ce procédé, très
morrhagie n’existe plus, grâce à l ’admirable invention de M,
�—
!>«
—
Chassaiguac. L ’écraseur a remplace le bistouri dans une foule de
service de ne l ’enlever que deux bernes après. Une fois, en
cas, et il est peu d'opérations qui se prêtent mieux h cet instru
l'enlevant, une petite artériole donna un jet de sang ; il fut facile
ment que l ’amputation de la verge, à ce point que l’on pourrait
de la lier.
affirmer que la plupart et peut-être toutes celles qui ont etc
Lorsque l’écrasement est fait au ras du pubis, on ne saurait
placer une ligature temporaire. Les corps caverneux se retirent
faites depuis ont été pratiquées a l'aide de l ’éeraseur.
L'action de cet instrument, dit M. Cliassaignac, quoique
et la plaie présente la forme d’une espèce de cratère. Si alors
plus lente que celle du bistouri, est beaucoup plus rapide que
il se produit un léger suintement de sang, un tampon de per-
celle de la ligature et, de plus, elle est immédiate. La ligature
clilorure de fer ou un boulon de feu l’arrêteront rapidement.
ne sépare les parties qu’en déterminant la gangrène; l’écraseur
Dans un cas semblable, j'a i étanché la plaie à l ’aide d’un seul
les diviser ensuite avec une
bouton de feu. Un pansement simple (charpie cératée) est ap
extrême régularité. Lorsqu’il rencontre une artère, il coupe
pliqué les premiers jours, et, plus tard, un pansement h l ’alcool
d’abord les deux tuniques internes qui se plissent de telle ma
dont j ’ai obtenu les meilleurs résultats. Chaque fois que le
nière quelles forment un bouchon au vaisseau; celte oblitéra
malade veut uriner, il enlève son pansement et il le replace
tion est consolidée par l’agglutination des tuniques externes
ensuite.
condense et tasse les tissus pour
avant qu’elles ne soient divisées, et leur oblitération est telle
Dans aucun des cas que j'ai eus, je ne me suis occupé du
ment complète qu’après la division, le canal ne saurait être
canal de l’urètre. Il faut dire qu après l ’écrasement la recherche
rétabli, même par une forte insufflation. A insi, l’écraseur, au
de l’urètre serait fort difficile d’abord et même nuisible, car les
lieu d’ouvrir les vaisseaux, comme le bistouri, commence par
tentatives n’auraient d’autre résultat que de provoquer une
les clore hermétiquement et solidement, avant de les séparer en
hémorrhagie en dérangeant le tassement des tissus.
Heureusement que cette recherche est tout il fait inutile. Le
deux tronçons.
Pour les veines et les tissus crectiles, le mécanisme ne saurait
malade urine parfaitement, sans la moindre difficulté, que
être identique. C’est surtout en comprimant, en condensant les
l’amputation ait été faite sur la longueur du pénis ou à sa
tissus (les corps caverneux) que l'instrument arrêtera I hémor-
racine.
Aussi je crois un peu superllu ce luxe de petits procédés
rhagie; aussi faut-il agir avec une extrême lenteur.
Dans les quatre amputations que j ’ai pratiquées, j ’ai employé
inventés pour maintenir béant le canal après l ’amputation.
l ccraseur; je n’ai jamais eu d'artère à lier. J’ai fait durer
Préoccupés snrtout de l ’idée d ’avoir quand même une sonde
l ’opération en moyenne de trente à trente-cinq minutes. Lors
dans l’urètre, les uns ont imaginé d’ introduire au préalable la
que le tronçon est détaché, la peau m atinée et ranimée en
sonde et de faire en même temps la section et du pénis et de la
avant recouvre presque entièrement le moignon.
sonde (Barthélemy). Par l’écraseur, ce procédé ne pourrait
Un léger
suintement sanguin se produit quelquefois; il est facile de s'en
être bon qu’a la condition de faire avec le bistouri la section
rendre maître à l’aide d'un petit moyeu fort simple : je place à
circulaire du canal et l’écrasement ensuite du corps de la
la base de la verge un fil ciré double et je serre modérément à
verge.
l'aide d’nn nœud à ganse. Celle ligature circulaire suffit a arrêter
Dans le cas où l ’élasticité de la sonde ne serait pas suffisante
le suintement sanguinolent et je recommande à l'interne de
pour la faire ressortir après la section, et dans la crainte, peut-
�être chimérique, de ne plus (rouver ni le canal ni la sonde,
Malgré cela, si le rétrécissement était un danger réel, il serait
noire regrellable confrère Melchior Hoberl avait imaginé de
du devoir du chirurgien de le prévenir; mais l'expérience
traverser le canal et la sonde à l’aide de deux fils doubles qui
prouve au contraire que les rétrécissements sont fort rares
servaient ensuite b la, maintenir et à üxer au dehors les parois
après les amputations et, lorsqu'ils se produisent, ils cèdent
du canal.
facilement h la simple dilatai ion. Ainsi, M. Velpeau, après douze
Si la présence de la sonde était utile, ces moyens pourraient
ou quinze amputations de la verge, pour des lésions organiques,
avoir de la valeur, mais bien loin de là. D ’abord, quand l’am
pratiquées par les procédés les plus ordinaires, n'a vu que deux
putation est faite au ras du pubis, il serait très difficile de
fois survenir des rétrécissements. Dans l’un de ces cas, il s’a
maintenir une sonde dans la vessie dont la contractilité tendrait
gissait d'un rétrécissement purement cicatriciel assez étroit ; il
toujours à la chasser, et, de plus, la présence de ce corps
céda facilement b la dilatation. Dans le deuxième, l ’obstacle b
étranger ne fait qu'augmenter les chances d’inflammation, que
la sortie de l’urine était dû à une sorte de bourrelet cutané,
la sonde soit en gomme élastique ou en caoutchouc. M. Verncuil
vicieusement attiré par la cicatrice ; il put très aisément, par
n ’hésite pas à attribuer à cette cause la perte de l un de ses
une petite opération, rendre libre l ’orifice de l’ urètre.
opères qui succomba à une infection purulente dont le point de
départ fut une ulcération du canal pénétrant jusqu’au corps
spongieux, ulcération déterminée, à n’en pas douter, dit-il,
par la sonde.
M. Chassaigoac, qui a également pratiqué un bon nombre de
ces opérations, n'a jamais constaté de rétrécissement.
Mes quatre opérés ont toujours uriné avec beaucoup de
facilité et je n ’ai jamais eu b m’occuper de rétrécissement. Le
Ainsi, à la suite de l'amputation de la verge, la sonde esl
premier que j opérai, vieillard de 92 ans, sortit parfaitement
inutile et même nuisible. Il est donc superflu de s'occuper de la
guéri de l’hôpital et succomba, un an aj rès, a l ’hôpital d’A I-
recherche du canal.
laucli, b la récidive dans les ganglions de l’aine. Mon honorable
Une autre préoccupation des chirurgiens a été le rétrécisse
ment possible de 1orifice du canal. Pour éviter la coarctation
du nouveau méat, M. Bobyc unit la muqueuse de l'urètre à la
peau au mo\en de trois points de suture; d autres, MM. Ricord,
Richet, Follin, etc., après avoir fait l’amputation, incisent la
confrère, M. Trotebas, chargé du service de cet hôpital, ne
constata point de coarctation du canal.
Le second opéré succomba, après 40 jours, b une ascite
aiguë; la plaie était cicatrisée et le canal largement ouvert.
Enfin, les deux autres, opérés il y a six mois, vivent encore.
partie inférieure de l'urètre de façon b avoir un V ouvert en
Ils sont sortis de l’hôpital parfaitement guéris; ils habitent
avant; les deux lèvres de ce V sont unies b la peau, et l’ouver
Marseille. J ai eu occasion de les rencontrer plusieurs fois et
ture du canal a la forme elliptique.
j ’ai pu constater leur état; ils urinent largement. L ’un des deux
Ce moyen, assez ingénieux et fort simple, peut être employé
a été opéré au ras du pubis; le nouveau méat existe au fond
lorsque l ’on pratique I opération b l aide du couteau ; mais, après
d’un infundibulum où la muqueuse tranche par sa couleur avec
l'écrasement, il serait plus difficile, quelquefois même impratica
le tissu do cicatrice ; le je t d’ urine esl assez fort et n ’a jamais
ble. Il nécessite d’abord la recherche du canal. Celte recherche
été empêché.
pénible, souvent meme infructueuse, présenterait, comme nous
Ainsi, la crainte du rétrécissement du nouveau méat est
l’avons déjà dit, de sérieux inconvénients après l'écrasement.
presque une crainte imaginaire, cl c’est prolonger et compliquer
�inutilement l ’opération que de vouloir rechercher et fixer an
tum par la partie inférieure, sépare les testicules et obtient,
dehors la muqueuse du canal.
après l ’opération, une fente permanente au fond de laquelle se
Il résulte donc de cette étude, ainsi que je le disais au début,
que le procédé le plus simple est le meilleur.
trouve le canal. Par ce procédé, on agrandit l’étendue du trau
matisme, mais, dit M. Roux, le fait le plus saillant des plaies
Par I écraseur, l'opération est facile, dégagée de tonte com
du scrotum n’est-il pas l ’innocuité et la prompte cicatrisai ion ;
plication, elle ne donne aucune crainte d’ hémorrhagie (a la
de plus, on est à l ’abri de toute infiltration d urine ou de stase
condition d'agir lentement) et, de plus, le malade se trouve
de pus, la plaie présentant une fente déclive et non une
placé dans les conditions les plus favorables, conditions qui
cavité.
sont inhérentes à l’écrasement, c’est-à-dire l ’absence presque
complète du traumatisme et des infiltrations consécutives.
Mais, malheureusement, tous les cas ne peuvent se prêtera
Ces procédés m éritent d’être connus; ils sont ingénieux et,
dans des cas analogues, le chirurgien peut y puiser une idée
utile.
celte méthode, et lorsque le mal a envahi jusqu’à la racine des
corps caverneux et du pubis, le chirurgien se trouve en pré
sence de difficultés qu'il doit surmonter le plus souvent par
O B S T E T R IQ U E . — R elation d ’un accouchement triple.
son habileté personnelle et son initiative. A litre de rensei
gnement, je citerai seulement deux procédés mis en usage
dans deux cas semblables par MM. Demarquay et Jules Houx,
de Toulon.
Un fait Je fécondité rare vient de se passer au boulevard
Yauban : une jeune femme, âgée de3 f ans, vient de mettre au
M. Demarquay, après avoir introduit une bougie dans l’urè
monde trois enfants vivants et à terme. Voici quelques détails
tre. circonscrit la base de la verge par deux incisions semi-
sur ce fait extraordinaire : celte darne a été réglée à l’âge de
elliptiques allant du pubis aux bourses; puis, dégageant les
16 ans; mariée à 19, elle a eu son premier enfant à l’âge de 21
deux corps caverneux au niveau de leurs insertions, il les
ans, son second à 22, son troisième à 24, son quatrième à 25
amène en avant et ne fait la section du canal qu’après l’avoir
et son cinquième à 27. Sauf l’avant-dernier, tous ces enfants
isolé autant que le lui permet le mal. De celle façon, l’urètre
étaient du sexe féminin. Quant à ce qui regarde ce dernier
fait dans la plaie une saillie d ’un ou deux centimètres.
accouchement phénoménal, elle nous a dit avoir eu ses règles
Pour éviter qu’il ne se rétracte ou que llo lta n l dans la plaie
pour la dernière fois le 12 ju ille t 186-4; sa grossesse ne pré
il ne prenne une cicatrisation vicieuse, l’opérateur le fend ver
senta rien d’ insolite. Le 12 avril dernier, à neuf heures du
ticalement et fixe de chaque côté les deux parties latérales. Il
malin, les douleurs de l ’enfantement commencèrent; le premier
résulte de cette opération une sorte de vulve au fond de laquelle
enfant se présenta par les fesses et naquit à onze heures et
est ouvert l ’urètre.
demie du malin. L ’accoucheuse qui assistait celte femme avait
M. Jules Roux a imaginé un procédé plus compliqué, mais
fait demander le médecin de la famille, M. le docteur Crouset,
qui, dans un cas d’extrême nécessité, peut être utile. Au lieu
qui aida au dégagement de la tète par l’ introduction de deux
d’attaquer la partie supérieure du scrotum et d’y créer une
doigts dans la bouche du fœtus et en faisant basculer la tête
cavité au fond de laquelle sc trouve l ’urètre, il attaque le scro
avec la main droite. Le deuxième enfant naquit à sept heures
�—
102
—
un quart du so ir; il se présenta en position occipilo-iliai]tie
NÉCROLOGIE.
gauche antérieure; ce fut l'accouchcnse qui coupa le cordon.
Nous assistâmes, avec M. le docteur Crouset et l'accoucheuse,
à la délivrance du troisième enfant. C’était le plus petit et le
Un de nos membres sociétaires, le docteur Rollande, vient
moins vigoareux. 11 vint au monde a huit heures et demie du
de mourir. Il a légué à l’Association Générale des Médecins de
soir.
France une somme de 2,000 francs. Un ami de cet homme
Nous avons noté ici une particularité intéressante : ce der
nier enfant se présentait par la léte ; nous constatâmes parfai
savant, bienfaisant et modeste, nous fait parvenir la notice né
crologique suivante, que nous nous empressons de publier :
tement les sutures et les fontauelles, puis, environ un quart
Le docteur Rollande du Plan, médecin à Châlcaurenard,
d heure 3près, les pieds se présentaient à la vulve; il ii’v eut
vient de mourir à la suite d ’une attaque d’apoplexie qui l'a
qu'à dégager les bras et la tête pour que l'accouchement se fit
enlevé en moins de trois jours. La foule qui se pressait à ses
sans accident.
funérailles, la tristesse peinte sur tous les visages, les larmes
En cherchant l’ explication de ce changement presque subit
que beaucoup versaient, ont témoigné des regrets unanimes
de position, nous ne pûmes l‘ au ri huer qu’au vide qui s’était fait
qu’emportait dans la tombe l'homme excellent que nous venions
dans l ’utérus par suite de l’expulsion des deux premiers fœtus.
de perdre.
Si nous joignons à cela la petitesse de l ’enfant qui, comme
nous l ’avons déjà dit, était peu vigoureux, nous aurons l’expli
cation, je crois. la pins plausible de ce changement subit de
position; les deux premiers enfants étaient du sexe féminin elle
troisième du sexe masculin. Chaque enfant avait une poche des
eaux parfaitement distincte; deux placentas adhéraient entre
eux, et le troisième, plus petit, était libre. Nous trouvâmes
trois cordons; celui du dernier enfant
était excessivement
grêle.
Tous ces enfants, comme nous l’avons déjà dit, vinrent à
terme. Les suites de couches furent des plus heureuses ; il n’v
eut pas d hémorrhagie et fort peu de coliques ou tranchées
utérines, malgré l’énorme distension de la matrice.
La mère allaita ses trois entants ; mais les deux premiers ne
vécurent pas longtemps : le premier mourut neuf jours après,
de convulsions, et le deuxième un mois après, d’une bronchite
capillaire. Au moment où nous écrivons, le troisième vit encore
malades, s’était fait dans la classe indigente une clientèle nom
breuse, à laquelle il prodiguait d’une main les secours de l’art
et de l'autre des secours matériels de toute nature, ’a ce point
même de se dépouiller du linge qu’il portait sur lui pour que
le malade pût aussitôt en faire usage. Qui peut savoir tout le
bien qu il a ainsi fait, sans ostentation, sans orgueil? car lu imême n'en parlait jamais, et si peu à peu le public a été in itié
à Ions ces bienfaits, c’est toujours par suite d’indiscrétions
reconnaissantes. Grâce à l ’activité infatigable dont il était doué,
il trouvait encore le temps, après s'être occupé de médecine et
de chirurgie, de se délasser dans l’étude des sciences cl même
de publier diverses brochures sur l 'électricité, sur le mouve
ment planétaire, etc. La littérature était aussi pour lui une
douce occupation qu'il avait toujours aimée.
Son testament a été le digne couronnement de sa vie. Il a
et la mère continue à bien se porter.
Marseille, le 19 mai i8 6 o .
Le docteur Rollande, plein de zèle pour la science médicale
qu’il exerçait avec distinction, plein de dévouement pour ses
D f M krf.ixtik.
légué sa maison, qui est belle et vaste, pour en faire un hospice
�qui, nous en formons du moins le vœu, prendra le nom d hos
pice Hollande pour perpétuer dans son pays le souvenir de cet
homme de bien. Il a légué une somme de 2,000 francs à la
Coup d'œil sommaire sur quelques récents progrès de la
Chirurgie (IL
Caisse de Secours des Médecins de Paris.
Si quelque chose peut consoler en ce monde la veuve que
M essieurs ,
laisse après lui le docteur Rollande, c’est sans contredit le
souvenir des bienfaits qu’il a répandus et des services qu’il a
Chaque année, depuis 1837, en prenant le service de la
rendus pendant sa vie et qu’il continue après sa m ort; c’est
clinique, je me faisais un devoir de consacrer nos premières
l’ unanimité des regrets et des larmes qu’a provoqués cette mot1
réunions h l ’étude
prématurée.
double but de vous habituer h voir les choses d’un peu plus
de quelque question
générale dans
le
haut que ne le comporte l’examen d’un fait isolé, et pour vous
persuader toujours davantage que la bonne chirurgie ne consiste
MONUMENT A LAENNEC.
pas uniquement dans l ’art de bien faire une opération.
Souscription p u b li ée p ar l'U nion M é d i c a l e de la Provence.
6~ LISTE.
lement reçus dans nos salles pour vous exercer au maniement
MM. Payan (d’Arenc), 5 fr.; d’Audibert-Caille (d’Aubagne),
5 fr. — Total................................................................
10 fr.
Montant des listes précédentes....................................... 686
. Total.............................
J ai parfois aussi utilisé quelques jours de répit accordé par
une diminution passagère dans le nombre de malades jo u rn e l
696 fr.
de l'ophlhalmoscope et du laryngoscope, après vous avoir
oxf liqué la théorie et le mécanisme de ces instruments.
Je regrette, Messieurs, que l époque de plus en plus tardive
à laquelle je suis appelé dans cette enceinte, ne me permette
C'est par erreur que le montant de la quatrième liste a été
pas de trop différer l ’examen clinique des malades qui nous
indiqué de 199 fr.; il était en réalité de 224 fr. La somme de
sont aujourd’hui confiés. Toutefois, pour ne pas renoncer a
696 fr. a été envoyée par M. le président Seux à M. Brun,
une habitude que je crois utile pour vous, nous jetterons un
trésorier de l ’Association Générale.
rapide coup d ’œil sur quelques progrès de la chirurgie, depuis
MM. les médecins de Marseille et des Bouches-du-Rhône
notre dernière réunion. Ce sera une. revue rétrospective d’une
qui n'ont pas encore souscrit sont priés de faire parvenir leur
dizaine de mois qui servira d'introduction h nos entretiens
offrande à M. Seux, président de l'Association, rue de Rome,
ultérieurs.
97, ou à M. Laurens, secrétaire, rue Dauphine, 17, ou bien
enlin à M. Blanchard, trésorier, rue Paradis, 7.
Le Comité de fiédaction.
Utrerllle.—Imprtaerle VIAL, rue Tblar«, 8.
Mais ici se pose tout d’abord une question incidente sur
laquelle il est bon de s’expliquer avant d’aller plus loin.
( 4 ) Résumé de la première leçon du professeur-adjoint de clinique
chirurgicale, le 27 juin 4865.
7
�m—
Rien n’est plus élastique que le mot progrès; chacun l'entend
aujourd’ hui beaucoup mieux fixé sur les deux opérations aux
chemin qu'il parcourt. Cependant, si l'on voit deux personnes
(l'iridectomie, soit excision d'une
portion de l ’iris, et iïiridotomie ou opération d ’Hancock, quand
marcher en sens inverse, et l une d’elles se diriger vers le nord,
il s'agit tout simplement de la section du muscle tenseur de la
tandis que I autre court au m idi, elles auront beau nous affirmer
choroïde ou de ce que l ’on considère comme tel. Si l’on n’est
que toutes deux visent au progrès ; il est permis de croire,
pas parfaitement d’accord sur tous les symptômes qui caracté
sans manquer de charité, que si l une peut atteindre le but
risent le glaucôme aigu, on sait du moins quelle est, hélas ! la
voulu, l'autre lui tournera forcément le dos.
suite ordinaire de l ’existence de la plupart de ce9 symptômes ;
à sa manière, et personne ne doute de le rencontrer au bout du
quelles on a donné le nom
Pour nous, le progrès ne se borne pas b faire du nouveau ni
et si, par la méthode de Graaff on a pu sauver la vision dans
b faire différemment que ses prédécesseurs ; l’ emploi des mêmes
un nombre de cas encore notable, évidemment il y a Ib un
méthodes, l’ usage des mêmes procédés peuvent prétendre au
progrès ; comme il y est aussi lorsque, dans des inflammations
progrès, si ces procédés et ces méthodes sont appliqués avec
oculaires moins graves peut-être, quoique avec menace de
plus de discernement, plus de sûreté et d’habileté, en un mot,
décollements et autres lésions sérieuses, on a pu arrêter la
avec plus de perfection; ce qui revient b dire qu’ on peut admet
douleur d abord et les progrès du mal ensuite par la simple et
tre deux sortes de progrès : celui qui marque une ère nouvelle
presque inoflènsive incision d Hancock.
pour la science et celui qui cherche b bien et mieux appliquer
ce que I on sait déjà. Le premier est rare ; le second l ’est moins,
Que la jeune malade présentée par M. Pravaz b la Société de
et on 1 atteindrait plus fréquemment encore si l ’on pouvait se
Chirurgie ait offert réellement un exemple de curabilité de la
résigner b accorder an perfectionnement du connu la moitié du
luxation congénitale du fémur avec retour complet et normal de
temps que l’on perd b la recherche du nouveau.
A la rigueur, on peut trouver un troisième genre de progrès,
1b où l’on ose renoncer b une erreur due b un engouement pré
la tête de cet os dans la cavité cotyloïde, il est permis d’en
douter, au point de vue anatomique, d après le rapport e lle s
remarques circonstanciées de MM. Bouvier et Broca.
maturé. Ce genre de progrès exige plus de courage et de bonne
Mais, du moment que les fonctions locomotrices du membre
foi scientifique qu’on ne le supposerait de prime abord, et,
inférieur sont très satisfaisantes cl qu’il y a redressement du
vu son utilité pratique , il n ’est assurément pas des moins
bassin par disparition de l’ensellure lombaire, a tel point que
méritoires.
quelques praticiens, aussi capables que consciencieux, ont cru
pouvoir admettre une réduction complète, on peut affirmer que
Cela dit, y a -t-il eu, dans ces derniers temps, quelques pro
la curabilité de ces difformités congénitales a fait un pas im
grès b signaler dans la pratique chirurgicale? Oui, sans doute;
mense et que l’ on a obtenu un résultat jusqu’alors considéré
et s’ils ne peuvent prétendre b être classés dans la première
comme impossible.
catégorie, ils ont droit à une honorable mention dans la
seconde.
A propos de difformités, d est utile de signaler ici celle qui
consiste dans le rapprochement et l’immobilisation des deux
Ainsi, pour ce qui concerne les maladies des yeux, on semble
arcades dentaires par suite de brides fibreuses ou de contrac-
�a
vasculaires des os. Le diagnostic différentiel, mieux établi à
cette difformité si redoutable pour la n u trition, deux chirurgiens
l’avenir, permettra désormais do préciser les indications par
des plus distingués, Esmarch et Rizzoli, ont proposé ou perfec
rapport au meilleur mode de traitement à employer. Toujours
tionné la méthode qui consiste dans la section ou la résection
est-il que si les injections coagulantes, essayées d ’abord par
de la bianche horizontale du maxillaire inférieur. Or, comme,
nous à l’ Hôtel-Dieu de Marseille, n’ont pas réussi parce qu’ il
ttires musculaires ducs à des causes variables. Pour obvier
au point de vue de la douleur et des conséquences de l'opéra
ue s’agissait pas d'une véritable tumeur anévrismale, l'essai
tion, il n’est pas indifférent de sectionner on de resequer un os,
u’est peut-être pas à dédaigner pour cela. Mais, en tout cas, en
il est permis de croire aujourd’hui, avec M. Verneuil, que la
présence d’une tumeur vasculaire des os, la ligature de l’artère
simple section suflit, pourvu que l’on interpose un petit corps
principale du membre a réussi dans trois cas où en l’a appli
étranger ou un lambeau de périoste entre les fragments, et qu’on
quée, et il est permis d espérer qu’elle réussira encore, si,
réprime par des cautérisations superGcitlles les
bourgeons
charnus au fur et à mesure qu’ils se développent.
d’après les études sus-mentionnées, le diagnostic peut être
établi avec exactitude et précision.
Puisque nous avons parlé de resection, on doit à MM. Vei-
Plusieurs productions polypeuses,. assez facilement enlevées
neuil et Le Fort d’être encouragés maintenant, dans les cas les
du larynx, doivent vous faire comprendre quelle est l ’utilité du
plus graves d'affections articulaires chroniques ou de lésioos
laryngoscope et combien il importe de s’exercer à son manie
traumatiques du genou, à remplacer l'amputation de la cuisse
ment, puisque des affections inconnues et jugées incurables ont
par la résection des extrémités osseuses atteintes. Si l’ expérien
pu être vues, saisies, et par cela même devenir curables, par
ce, trop limitée jusqu'à présent, ne permet pas d'affirmer de
suite d’une manœuvre qui n’offre pas de difficultés insurm on
quel côté est le plus de gravité après l’opération, en revanche
tables.
on ne peut méconnaître que le résultat final u’est pas compa
rable dans les deux cas.
Dans une récente discussion de la Société Impériale de
Médecine de Marseille, nous avions refusé d’admettre, quelques-
Depuis les magnifiques recherches de M. Rroca sur le traite
uns de mes collègues et moi, la fracture spontanée du fémur
ment des anévrismes par la compression digitale, cette méthode,
sans altération pathologique préalable ayant détruit ou diminué
on peut le dire, a fait !e tour du monde avec succès, et M.
la résistaoce de l'os. La suite de la maladie, dont on nous rap
Yanzetli, de Padoue, a cité la cure de deux anévrismes artérioso-
portait l'histoire, a donné complètement raison à celte manière
veineux du pli du coude, obtenue en moins de six heures par
de voir, et des faits analogues rapportés à la Société de C hirur
un procédé des plus ingénieux qu'on peut appeler
gie ont démontre, une fois de plus, combien est erronée l ’expres
double, celle de Iartère et celle
compression
de la veine, exécutée séparé
ment par les mains d'un seul aide.
sion généralement reçue de
fracture spontanée. Deux fois, dans
ces derniers temps, nous avons eu a traiter la fracture transver
sale de la rotule par effort musculaire. Dans un de ces cas,
l’effort a été insignifiant ; f écartement était cependant considé
rable et la consolidation a été difficile, incomplète, et par f in -
�— 110
111
wrmédiaire d'une substance fibreuse d’ une soiidilé douteuse,
a reçu, à notre avis, un nouveau perfectionnement par M.
il y avait ici une maladie de l’os par suite d ’un ancien abcès
Duboué, de Pau, dont le procédé par dédoublement, déplace
profond, sous-périosté. Dans l’autre cas, il y a eu b la fois
ment et renversement de lambeaux nous semble offrir les ga
effort musculaire et contusion. L ’écartement, assez prononcé,
ranties désirables, dans les cas les plus difficiles.
a été promptement comblé par une production ossiforme ;
aucune affection antérieure n’ avait altéré la nature intime de Iü
rotule.
Quant h l’extirpation des kystes ovariques par une des opéra
tions les plus formidables que puisse tenter la chirurgie, on peut
dire maintenant qu’en France, b l’exemple de ce (pii a été fait
En vous parlant d un abcès sous-périosté, nous ne pouvons
et adopté d’abord en Amérique et ensuite en Angleterre, on ne
omettre de dire quelques mots sur la grande question con
considère plus comme un acte de témérité l'intervention de
cernant la reproduction des os et, par conséquent, la néces
l'instrument tranchant dans une maladie qui n’ofirc malheureu
sité d’épargner le périoste toutes les fois qu’il s’ agit de resequer
sement pas d’autre chance de salut aux personnes qui en sont
une portion quelconque du squelette. Si l ’habile chirurgien de
atteintes. Que si, jusqu’b ce jour, confessous-le humblement,
Lyon, M. Ollier, avait peut-être un peu trop promis, les adver
b Paris même, l ‘ovariotomie ne compte pas tous les succès qn ou
saires du périoste ont probablement, de leur côté, un peu trop
pouvait espérer, nous devons, par cela même, constater avec
nié, et les derniers faits acquis b la science sont, en définitive,
satisfaction celui obtenu h Marseille, il y a qoelques mois, par
assez favorables à la conservation d'une membrane qui, pour
notre ancien collègue, M. Berrut, qui a laissé parmi nous de si
n être pas la seule à sécréter l’os, ne concourt pas moins acti
honorables souvenirs comme chef des travaux anatomiques do
vement pour cela à sa régénération et b la conservation, limitée
celte Ecole.
si l'on veut, du moule prim itif.
Le cas, ainsi que l’atteste la communication faite par M.
Berrut b l’Académie Impériale de Médecine (séance du 9
A la suite d’une observation des plus intéressantes de M.
mai 18G5). n’était assurément pas des moins graves, et la
Laugier sur la suture du nerî médian, j espérais avoir a vous
réussite n’a rendu qu’une plus éclatante justice b l'habileté de
annoncer un progrès des plus utiles en signalant la possibilité
notre confrère.
de rétablir presque instantanément la continuité anatomique et
partant les fonctions physiologiques d’un nerf en rapprochant les
Enfin, Messieurs, qu’il nous soit permis de dire, en term i
bouts divisés et en les maintenant unis par une suture métalli
nant, que ce n’est pas avec indifférence que nous avons pu voir
que on autre. Malheureusement, des faits contradictoires signa
l’administration de l'assistance publique de Paris charger une
lés b la Société de Chirurgie ne permettent pas d'asseoir sur cet
commission médico-chirurgicale d’étudier diverses questions se
important sujet une opinion positive, et il convient de la tenir
rattachant aux conditions hygiéniques de LLIôtel-Dieu projeté.
en réserve josqu’b plus ample informé.
Assurément on aurait pu mieux faire encore en consalianl celte
commission avant le choix d’un emplacement ; mais, de ce qu'il
La guérison des fistules vésico-vaginales, déjà assurée par
n’y a eu qu’ un progrès partiel en laissant de côté une des
1rs travaux de M Jobertde Larnballe, Marion Sims et Bozeman,
questions principales qui pouvaient être soumises b ladite com
�mission, il n’y a pas ni oint progrès à conslaler dans ce qui a été
fait; et ce piogrès, nous le saluons avec d’autant plus de plaisir
qu’ il peut en faire espérer un plus considérable. Sans doute on
doit savoir gré aux hommes de toutes les professions qui veulent
bien consacrer à l ’assistance publique, et plus particulièrement
H O P I T A L DE LA C O N C E P T IO N .
Salle S a i n t - F r a n ç o i * . — S er vi ce de M . le p r o f e t a e u r 8 E D X .
Maladie bronzée.
à l'administration des hôpitaux civils, le temps qu'ils pourraient
—
Observation recueillie par M. Ueynaud,
interne du service.
donner ü lin agréable repos ; mais il ne serait pas inutile de
faire observer a qui de droit que, dans toutes les administrations
de cette nature, l’élément médico*chirurgical n’a pas une re
présentation suffisante, ne fùl-ce qu’ à titre consultatif. Que les
médecins et les chirurgiens ne soient pas toujours très ferrés
sur des questions de contentieux, cela sc convoit, et l’on ne
comprend pas moins qu’ils puissent quelque peu négliger d'au
tres questions d'ordre ou d’économie intérieure auxquelles ils
n’accordent peut-être pas toute l’importance qu elles mérite
raient ; mais quand il s'agira de l'emplacement à choisir et par
conséquent de l’aération d’un établissement nosocomial; quand
il faudra lim iter l’ampleur des salles et le nombre de lits qu’elles
doivent contenir ; lorsqu il s’agira de fixer la nature et la qualité
des aliments suivant le climat, la saison, voire même la consti
tution médicale ; quand, en un mot, il faudra faire appel aux
enseignements de l’ hygiène publique et privée appliqués nonseulement au traitement des maladies, mais à tout ce qui peut
prévenir leur extension, qu'où nous permette de l’affirmer, les
médecins et les chirurgiens sont seuls compétents, car eux seuls
ont mission d’avoir constamment pour but, dans les éludes
auxquelles ils se livrent pendant leur vie entière, la guérison
de ceux qui souffrent et la conservation de la santé chez ceux
qui se portent bien.
Ce sera avec bonheur que nous constaterons désormais,
ailleurs que dans le sein de l ’assistance publique de Paris, le
progrès que nous venons de signaler.
Smcs Piromdi.
Charlel Jean, TG ans, canonnier, né à Ecully (Rhône), est
entré le 25 ju ille t 1864, salle Sainl-Fronçois, lit u° 2-i.
Complcxion sèche et nerveuse, taille très peu au-dessus de la
moyenne. A première vue, nous sommes frappés de la couleur
brune de son visage, couleur que fait ressortir encore une touffe
de poils blancs qu’il porte sur la lèvre gauche, au milieu de ses
moustaches noires et bien fournies. Un examen plus attentif
•nous fait reconnaître que cette couleur brune n’ est pas uniforme;
sur le Iront et 'a droite se voit une tache plus foncée, occupant
toute la bosse frontale ; on dirait une tache produite par une
solution concentrée de nitrate d ’argent Des taches semblables
se montrent sur les pommettes, sur la muqueuse des lèvres, de
la lèvre inferieure surtout. Poursuivant notre examen, nous en
trouvons aux deux mains, sur leur face dorsale, aux mamelons,
au pourtour de l ’om bilic, mais c’est surtout au scrotum et sur la
lace dorsale du pénis qu’elles sont plus évidentes. Tous ces
points présentent une coloration noire semblable b celle de la
peau d'un nègre ; le reste du corps offre une coloration qui se
rapproche davantage du rouge-brun.
Le malade nous dit que, depuis quatorze mois seulement, sa
peau est devenue plus brune qu’elle n’était. Il n’a jamais pris de
nitrate d’argent ; d ’ailleurs, il ne souffre pas, la faiblesse seule,
qui l’empêchait de continuer son travail, l’a forcé d cnlrer à
l’hôpital : constipation, point d ’appétit, anéantissement général,
pouls soulevant très faiblement le doigt, 70 pulsations à la m i
nute, bruits du cœur très faibles, bruit de souille peu intense
dans les carotides, tel est I ensemble de symptômes qui fait que
M. Seux n’ hésite pas à poser le diagnostic : maladie bronzée
arrivée à une période avancée.
Antécédents.
— Charlei raconte qu’il n'a jamais eu d’autre
maladie que la jaunisse : il avait alors 16 ans. Depuis, il n a
plus souffert de la région hépatique. Son père et sa mère sont
morts 'a un âge très avancé. Soldat à 21 ans, Charlet a passé sept
années en Afrique. Les fièvres, si communes dans cette contrée,
�115
—
ne I oui jamais atteint II était sobre, buvait très peu (Je liqueurs
fortes et point d’absinthe. (I eut une simple gonorrhée pendant
son séjour en Afrique, sms chancre ni aucun accident syphiliti
que. De retour en France, il trouva h Marseille une très bonne
place dans une fabrique de cartons ; il y est resté jusqu au mois
de mars de l’année dernière, époque h laquelle se manifestèrent
les premiers symptômes de la maladie qui l’a emporté. Ce fut
d'abord un sentiment de faiblesse générale; il était courbaturé,
comme anéanti; une diarrhée opiniâtre ne tarda pas à sc déclarer;
sans appétit, il vomissait tout ce qu'il essayait de prendre; mais,
ce qui l'cffiaya surtout, ce furent les taches noires qu'il aperçut
sur son corps et la couleur brune que sa peau prenait peu à
peu. Cependant, ne souffrant que très peu des reins et trouvant
dans son patron un homme compatissant, il put rester en ville,
allant quelquefois h l atelier, mais le plus souvent obligé de
rester dans sa chambre. La diarrhée persista jusqu au 20 juin
1865; les forces ne revenaient pas, cl par intervalle il était
tourmenté par des névralgies hémicrâniennes très douloureuses.
Pourtant, le 10 ju illet, il reprit son travail, mais le 22 du même
mois il se vit obligé de le suspendre encore. A la diarrhée avait
succédé la constipation ; il ne venait à la selle que tous les deux
on trois jours. L’étal d anémie se prononçait davantage et, de
plus, il survint, d it-il, un serrement des deux mâchoires qui
l’empêchait d introduire aucun aliment dans la bouche. Il se
décida alors à se présenter à l ’Hôtel-Dieu où il fut admis dans
le service de la cliuique. Du traitement hydrothérapique amé
liora sa situation et il put, bien que la couleur foncée de sa
peau lût devenue plus intense, reprendre son travail.
Depuis ce moment jusqu h son entrée â l ’hôpital de la Con
ception, il n’a jamais été parfaitement bien : constipation habi
tuelle, vomissements assez fréquents, névralgies faciales; les
urines ont changé plusieurs fois de couleur, tantôt chargées,
tantôt claires ; elles oct été analysées à l ’Hôtel-Dieu : on n'a
trouvé ni sucre ni albumine, d’après les renseignements que
nous avons pu avoir. L ’examen que nous en avons fait nousméme ne nous en montre aucune trace.
L ’amaigrissement a fait tous les jours des progrès, et Charlet
s’est senti à tel point affaibli qu’il s’est décidé à entrer de nou
veau 'a l’hôpital.
Ces commémoratifs nous montrent que le malade n’a souflerl
que très peu dans les lombes, au début de sa maladie. Les
symptômes principaux ont été la diarrhée habituelle suivie de
constipation, le sentiment de faiblesse et le signe pathognomo
nique, la couleur bronzée de la peau. En présence de cette
—
anémie profonde, M. Seux prescrit ; douches froides, 50 gram
mes vin de quinquina, 0*r 40 de 1er réduit.
Sous l’influence de ce traitement, joint â une alimentation
composée de viandes rôties, les forces reviennent et, le 10
août, le malade demande son exeat, bien qu’ il se plaigne d’avoir
toujours froid aux pieds.
Le mieux dont il jouissait devait être de bien courte durée.
Le 23 août, â 7 heures du malin, Charlet est transporté, celle
fois par scs amis, â la Conception, il respire à peine, son pouls
est presque insensible, les extrémités sont froides, on le dirait
paralysé de tous ses membres, vomissements fréquents de ma
tières verdâtres. On nous dit qu’ il a eu une forte diarrhée pen
dant la nuit : thé au rhum, 2 lavement avec vingt gouttes de
laudanum. La diarrhée l ’a [iris le lendemain de sa sortie et ne
l’a [dus quitté. Il rend les lavements; pas de selles dans la jo u r
née; dans la soirée, il ne peut faire aucun mouvement ; on peut
ii peine introduire entre ses dents la cuiller pour le faire boire ;
il meurt h 10 heures du soir.
Charlet a-t-il succombé â une attaque de choléra? Le moindre
écart de régime, vu sa faiblesse, aurait pu le plonger dans cet
état ; ou bien sa fin n’a -l-o lle été que le résultat de la consomp
tion lente amenée par I affection organique encore peu connue
dont la peau bronzée n’est qu’un symptôme? M. le professeur
Seux croit à une attaque de choléra produite avec la plus grande
facilité par quelque écart de régime, chez un homme déjà très
gravement malade et que sa maladie disposait aux troubles
digestifs.
56
— Les poumons présen
tent â leur sommet six â huit tubercules crus ; ils sont tout â
fait normaux dans les autres points.
Rien de particulier h l’estomac, a la rate, au pancréas, au foie,
intestins hypérémiés; les ganglions mésentériques sont hyper
trophiés; quelques-uns offrent des tubercules crus; les reins
sont congestionnes sans aucune altération; la substance corti
cale présente une couleur rouge lie de vin.
Ou sait qu’Addison a rattaché la couleur bronzée de la peau à
une lésion des capsules surrénales, lésion qui pourrait n être
pas la même, tantôt cancéreuse, tantôt tuberculeuse, selon la
diathèse à laquelle le sujet aurait été en proie.
M. Trousseau, dans une observation publiée dans la
, en mars 18GT, a trouvé, de son côté, des lésions
multiples du foie, de la rate, des poumons, etc., et une altéra
tion granuleuse d ’une des capsules surrénales.
Nous avons cherche avec soin la trace d une lésion dans
\
Autopsie,
des Hôpitaux
heures après la mort.
Gazette
�— 110 —
nous n avons pu constater qu'uni
atrophie de ccs organes sans altération appréciable dans leur
texture.
les capsules surrénales,
,
Le fait qui précède nous a paru de nature à intéresser le
public médical. Il ne nous a présenté, il est vrai, que les symp
tômes cités d’ordinaire comme constituant la maladie d'Addison,
mais il nous a permis de noter une particularité nécropsique
qui mérite d’être signalée. Cette affection est d’ailleurs peu
connue ; il règne encore une si grande incertitude sur ses cau
ses. sa marche et sur les lésions qui l ’accompagnent que nous
avons cru de notre devoir de ne pas laisser passer un fait de
cette nature sans appeler sur lui l’attention des hommes com
pétents.
Pour parvenir a bien connaître une maladie nouvelle, le seul
moyen est d’étudier sérieusement tous les faits qui se présen
tent. Un praticien, plus favorisé que les autres, découvre le
premier certains symptômes qui ne lui paraissent se rattacher à
aucune maladie connue; il observe soigneusement, publie le
fait et note les particularités importantes. Voilà déjà un premier
pas de fait. D ’autres médecins se mettent à l’œuvre; les obser
vations se multiplient, les discussions s’ engagent ; quelques
conclusions sont posées ; elles manquent encore, il est vrai, de
netteté et de précision, mais les esprits sont sérieusement à
l ’étude, la lumière se fait jo u r de plus en plus et, peu à peu,
chacun apportant une pierre à I édifice, la construction, fruit du
travail de tous, s’élève et s'achève.
Nous n’avons [as la prétention de nous ranger parmi ccs
habiles édificateurs. Publier sur un sujet encore peu connu
une observation qui puisse confirmer les recherches de nos
devanciers, appeler plus particulièrement l ’attention sur quel
ques faits de détail, tel est le but modeste que nous voulons
atteindre.
Notre malade a-t-il eu réellement une maladie d'Addison?
Nous croyons que 1 indécision sur ce point n est pas possible. Il
y a là, en effet, un ensemble de symptômes qui ne peut se rap
porter qu'à celte affection. On a bien signalé, dans certains cas,
des troubles de coloration survenus sur l’enveloppe cutanée : le
masque des femmes enceintes, les syphilides pigmentaires signa
lées par M. Hardy nous en offrent des exemples ; mais jamais,
jusqu'au moment où Addison publia son travail, on n'avait noté
que des troubles de coloration de la peau, coïncidant avec une
anémie considérable et de graves désordres du côté du tube di
gestif, pouvaient occasionner la mort du malade. Anémie, trou
bles digestifs, taches brunes cutanées, tels sont les trois signes
importants signalés par les observateurs. Notre sujet nous les a
présentés, et par conséquent nous sommes en droit de dire que
c’est bien aux diverses phases d’une maladie bronzée d’Addison
que nous avons pu assister.
Dans le cas présent, nous avons noté, comme dans ceux ob
servés jusqu’à ce jo u r, que les taches brunes ne se sont point
montrées en premier lieu. Le sujet a présenté d’abord des signes
de faiblesse générale et d’anémie, puis sont survenus les vomis
sements et la diarrhée, puis enfin les colorations brunes de la
peau. Quant à ces dernières, elles ne paraissent pas, en thèse
générale, devoir être limitées à quelques points spéciaux ; chez
noire malade, nous avons pu les voir plus accentuées sur les
points signalés par Addison et par M. Trousseau, c’ est-à-dire sur
le visage, la muqueuse labiale, les mains, le scrotum, l'om bilic,
mais elles ont apparu également sur d’ autres points, aux ma
melons, par exemple, et se sont étendues presque généralement,
avec des nuances plus ou moins foncées, à toute la surface du
corps.
Noire malade nous a présenté un signe que nous avons vu
signalé également dans la description de la maladie bronzée,
quoique les auteurs n’aient pas paru y attacher une grande im
portance : nous voulons parler de la névralgie opiniâtre qui a
accompagné les troubles digestifs et les taches brunes. Nous
avons de plus à noter chez lui ce resserrement paiticulier des
mâchoires (sorte de trismus) pour lequel le malade entra à
l’Hôlel-Dieu. Ces symptômes (ou d’autres de même nature) ne
doivent pas nous étonner; il est probable qu’ils accompagnent
d'ordinaire I affection qui nous occupe. La maladie d 'A d
dison ayant, en effet, une marche un peu analogue à celle
d’une intoxication lente, on ne doit pas être surpris de voir
le système nerveux présenter des troubles plus ou moins con
sidérables.
L’étiologie de la maladie bronzée est encore fort obscure.
Frappés de l’ état d’anémie qui accompagne celle singulière af
fection, les observateurs avaient attribué à la cachexie cancé
reuse, tuberculeuse, alcoolique, etc , une certaine part dans la
production de celte maladie. Kien de semblable n’a pu être noté
dans le cas que nous avons eu sous les yeux : pas d’ excès alcoo
liques, pas de syphilis, pas d’empoisonnement miasmatique,
aucune lésion importante dans les organes examinés après
la mort, rien de particulier dans les antécédents, pas de cause,
en un mot, à laquelle nous puissions attribuer l’apparition de
la maladie.
�— 118 —
La terminaison a été brusque, rapide, semblable à celle du
choléra. Il est possible qu’une pareille issue soit une des termi
naisons normales de la maladie bronzée, car, chez le sujet dont
M. Trousseau parle dans sa clinique, la mort a été occasionnée
par des accidents cholériformes analogues h ceux qu’ a présentés
notre malade.
Quoi qu’il en soit, nous ne pouvons accepter, pour nous
rendre compte de ce dernier fait, l'explication donnée pur le
savant professeur de l’Hôtel-Dieu. Se basant sur les expériences
de Brown Séquard, M. Trousseau parait vouloir attribuer il In
lésion profonde des capsules surrénales le llux diarrhéique
éprouvé par le malade. Cette explication ne nous parait pas
concluante, parla raison que chez notre sujet les signes né
cropsiques fournis par l'examen des capsules ont été presque
complètement négatifs.
C’est lii, sans contredit, le point le plus intéressant de l’ob
servation qui précède.
Dans presque tons les cas de la maladie d’Addison observés
jusqu’à ce jour, on a noté une altération profonde des capsules
surrénales. Quelques faits, encore très peu nombreux, font
seuls exception b cette règle, et celui de notre malade doit être
rangé dans celle catégorie. Chez lui, en effet, les capsules oc
nous ont présenté aucune trace de lésion : pas de dégénéres
cence cancéreuse, tuberculeuse ou fibreuse, pas de collection
purulente, pas de ramollissement de la substance corticale. Au
lieu de la dilatation qui accompagne le plus souvent, dans la
maladie d Addison, les lésions précédentes, nous avons constaté
une diminution de volume sans altération apparente dans la
substance des capsules.
Celte atrophie suflil-eIle a elle seule pour expliquer les trou
bles morbides et l’ apparition de la maladie bronzée? Cela nous
paraît difficile à admettre ; toutefois, nous ne pouvons décider
une question aussi délicate et nous nous bornerons à dire que
la science n’est pas encore complètement édifiée sur la relation
qui existe entre la teinte bronzée de la peau et I altération des
capsules surrénales.
Les auteurs qui se sont occupés de la maladie d’Addison
avaient d’abord établi que tous les cas de maladie bronzée
s'accompagnaient d’une altération des capsules surrénales, mais
que cette altération pouvait quelquefois exister sans teinte
bronzée de la peau. Y aurait-il réellement lieu d ajouter un
corollaire à celte conclusion et de dire : exceptionnellement, la
maladie d’Addison peut ne pas être accompagnée de lésion des
capsules surrénales ?
Société locale des B o u r b e s - d u - R b ô n e . — S éance s de la C o m m i u i o a
a d m in is tra tiv e .
Depuis la dernière Assemblée générale de la Société locale
des Bouches-du-Rhône qui a eu lieu le 0 février dernier, la
Commission administrative s’esi réunie plusieurs fois, sous la
présidence de M. Seux.
Elle a eu b statuer sur plusieurs demandes d’admission qui
lui ont été adressées par MM. Michel, Tcissier père, Szacfaier,
des Martigues ; Reymouet, chirurgien consultant des hôpitaux
de Marseille, et Auzoux, médecin sanitaire des Messageries
Impériales du port de Marseille. L ’admission de ces confrères a
été prononcée en conformité de I article 4 des statuts généraux.
M. le docteur Auzoux faisait déjà partie, depuis plusieurs aunées, de l Association générale où il comptait parmi les mem
bres de la Société centrale, d ’abord, puis <le la Société locale
de l’arrondissemeut de Senlis.
La Commission a eu plusieurs fois b s’occuper de l’exercice
illégal de la médecine et des divers empiétements dont la pro
fession médicale est l ’objet.
Quelques empiriques ont été signalés b M. le procureur
impérial. M. Seux, en sa qualité de président de la Société, a
fait également une visite b ce magistrat pour appeler d’une
manière directe son attention sur les faits répréhensibles qui
avaient été signalés par écrit. Ces démarches ont eu de
bons résultats; des enquêtes ont clé faites, cl s’ il ne nous est
pas possible d'en faire encore connaître la solution, il est bon
cependant de constater que la vigilance de l ’autorité judiciaire
ne peut qu’inspirer une salutaire terreur aux délinquants. Ceuxci sont encure malheureusement trop nombreux. Ils le seraient
bien moins et ne tarderaient pas b disparaître de la scène si
chaque médecin se faisait une règle de signaler b la Commission
administrative les renseignements qui sont b sa connaissance.
Le bureau de la Société a eu son attention éveillée sur la
réapparition de quelques affiches apposées sur les murs de
notre ville par un industriel en médecine que chacun connaît
et avec qui la justice a eu plus d’un compte b régler. Il s’est
adressé b M. le sénateur qui a bien voulu nous remercier de la
communication qui lui était faite et a affirmé de nouveau les
principes de prohibition de toute affiche médicale. La réponse
de M. le sénateur est b la date du 16 ju in 1865.
�Enfin, l'autorité ecclésiastique a reçu de nouvelles réclama
tions au sujet des infractions commises par les religieuses h la
législation médicale ; c’étaient encore des malades atteints de
panaris et
par le traitement des dames de Saint-Vin
cent-de-Paul ou des Petiles-Maries ; c’était un pau\re homme
qoi. pendant plus d’un mois, s’était contenté d’un onguent
appliqué par une religieuse sur une fracture d’une phalange
d’un doigt, compliquée de plaie ; c elait aussi un ouvrier affecté
d'une ophthalmie grave, demeurant b Saint-Louis, et qui avait
été
par une sœur de cette localité et avait reçu,
, divers remèdes qui lui avaient été délivrés b la phar
macie des religieuses, sans ordonnance de médecin et sur la
prescription d’ une trop charitable sœur de St-Vincent-de-Paul.
il a été fait, b la plainte portée au nom de l ’Association mé
dicale, la réponse suivante :
Marseille, le 29 mai 1860
,
estropiés
saigné
monnaie
contre
Monsieur le Docteur Seux président de la Société Impériale
de Médecine.
Monsieur le Docteur,
En réponse à la lettre que vous nous avez fait l ’honneur de nous
écrire pour nous informer que des sœurs de charité ont, contraire
ment aux règlements, donné des remèdes dont les effets auraient
été regrettables, je m’empresse de vous faire savoir que nous avons
pris des mesures pour que ces actes ne se renouvellent plus à
l'avenir.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l assurance de mes senti
ments de haute estime et de considération distinguée.
P ontier,
La plainte avait été formulée avec fermeté et M. le président
avait formellement déclaré que si de pareils faits devaient en
core se renouveler, ils seraient, b l ’aveDir, dénoncés b M. le
procureur impérial et les religieuses, trop longtemps récalci
trantes, seraient signalées b la justice. M. le graod vicaire pro
met que les mesures sont prises pour que des actes répréhen
sibles ne se reproduisent plus. Le corps médical prend note de
eelte déclaration, et l’accueille avec toute confiance.
Daos sa dernière réunion, la Commission administrative a
décidé qu’ il y avait lieu de soumettre b la prochaine Assemblée
générale un projet de règlement d’ordre intérieur et additionnel
aux statuts. Elle a chargé M. le secrétaire d ’élaborer et de
rédiger ce document destiné b combler certaines lacunes des
statuts organiques.
, L alrbns.
vie. gén.
Le Secrétaire
Le Comité de rédaction
Marieille. —Imprimerie VlU, rue Thiart, S.
Quelque* co n si dé ra ti o ns tu r le trniteenent des a bcès p a r le d r a i n a g e .
Avant les travaux de
M.
Chassaignac, on n’avait pas
entrevu
l’utilité du drainage en chirurgie ; cette méthode était seule
ment employée en agriculture pour prévenir les inondations et
assainir les terrains, et parmi les pays qui en ont le plus pro
fité, on peut citer b juste titre la Hollande qui lui doit aujour
d'hui sa salubrité, l'abondance de ses récoltes et sa sécurité.
Le drainage, en effet, oméliorc les conditions hygiéniques
d’une contrée, car, dans un pays drainé, les brouillards sont
moins intenses et les maladies par in!ection bien plus rares.
En outre, le sol, débarrassé des excès d humidité de l’hiver,
s'échauffe bien plus vite aux rayons du soleil du printemps, en
sorte que la moisson y est avancée et la récolte plus grande.
Enfin, les nombreux canaux qui sillonnent les terrains drai
nés sont 11ne précaution excellente contre les effets désastreux
des inondations, en facilitant la sortie des liquides.
Pour cela faire, on dispose sous le sol, selon la pente des
terrains, plusieurs rangées de petits tuyaux en poterie, non
vernissés, placés bout a bout ; ces tuyaux aboutissent b uu
canal d un plus grand diamètre ouvert au point le plus bas du
sol, reçoivent par les petits interstices qui restent entre chacun
d’eux les eaux en excès et les dégorgent hors du terrain.
On voit donc que, relativement b ses cons-quences, le drai
nage mérite l'attention sérieuse des médecins et de toutes les
personnes qui font de 1 hygiène une élude spéciale.
Au premier abord, on ne conçoit guère comment le drainage
peut s’appliquer b la chirurgie, mais l’imagination féconde de
M. Chassaignac n a pas lardé a découvrir cette application. En
effet, qu’on fasse abstraction des deux premiers résultats du
drainage pour n’ envisager que le troisième et l'on comprendra
de suite toute I utilité que la chirurgie peut en retirer.
Depuis longtemps ou avait cherché a favoriser par divers
moyens l'écoulement du pus ou des divers fluides épanchés
8
�dans l'économie. Les mèches, les lentes, les scions, les conlieduvertures et les déhridements tendaient vers ce but ; mais les
débridemcbts et les contre-ouvertures ne sont pas toujours
sans inconvénients, et les mèches en charpie ou en coton s'im
prègnent elles-mêmes de liquides et en retiennent toujours uoc
certaine quantité en contact avec les parois du foyer.
Voici donc en quoi consiste le drainage chirurgical : son
principe est d’établir un écoulement des liquides au dehors ou,
en d autres termes, d'opérer une sorte de dessèchement des
loyers purulent*. A cet effet, on se sert de tubes en caoutchouc
vulcanisé, d ’un diamètre vaiiable, mais dont
la dimension
moyenne est celle d’une plume de corbeau, percés, de distance
en distance, de pptits trous semblables aux yeux d’une sonde ;
ces tubes sont p'acés en travers des abcès, des foyers ou dépôts
Depuis quelque temps, W. Lhassa'gnuc a modifi é sa première
manière d'introduire les tubes : au lieu de se servir d"nn stylet
auquel est adapté le tuyau eu caoutchouc, il traverse la collec
tion dans le sens de son plus grand diamètre avec un long
trocart, puis il relire la pointe, la canule restant en place; de
cette manière, il ne s'écoule pas nue goutte de pus et la poche
conserve un degré de tension suffisante ; on fait glisser dans la
camde le tube en caoutchouc, on le coupe il une hauteur suffi
sante, et on lie par dessus les deux bouts avec un petit (il de soie.
Ayant eu plusieurs fois l ’occasion de pratiquer le drainage
pour des abcès volumineux, nous allons choisir parmi nos
observations celles qui nous paraissent devoir plus particulière
ment intéresser nos lecteurs.
Observalion /.
— M. IL .., âgé de 20 ans, d’un tempérament
purulents, de manière que les liquides pénétrant par les trous
lymphatico-sanguin, est sujet, depuis l'âge de dix ans, à des
pratiqués le long de leurs parois en parcourent aisément toute la
adénites cervicales revenant tous les deux ou trois ans h I é-
longueur et viennent sourdre continuellement au dehors par les
puque du printemps et disparaissant sous I influence de pom
deux orifices ou par celui de ces orifices qui est p'acé dans la
mades fondantes et d’un traitement ioduré. Vers la fin du mois
position la plus déclive. On peut introduire ces tubes comme
de février 1804, M. B ... fut pris des mêmes symptômes, quel
des sétons ordinaires ; ainsi, si I on veut drainer un foyer puru
ques ganglions du côté gauche du cou se tum éfièrent; je
lent, on pratique a l’ une des extrémités de ce foyer une petite
soumis le malade au traitement qui avait si bien réussi les
incision à la peau dans laquelle on in tro d u it un s l\le l muni
années précédentes, c’est-'a-dire à l ’usage de l iodure de potas
d’un {il, lequel entraine 2) son tour le tube en caoutchouc. Le
sium à l’ intérieur et aux frictions iodurées sur les glandes.
sty cl arrivé à l autre extrémité du foyer, on pratique sur ce
Sous l’inlluence de ces moyens, j ’obtins la résolution de deux
point une seconde inci>iou qui donne issue au stylet, et en le
glandes, mais les antres ganglions se tuméfièrent davantage cl
rrtira n t on se trouve avoir lait traverser toute l’étendue du
un vaste abcès se forma au-dessous du maxillaire inférieur. Ce
fover par le tube qui v est maintenu à demeure.
jeune nomme, redoutant par-dessus toutes choses les cicatrices
L*ans les abcès profonds du sein et dans les maladies articu
que laissent presque inévitablement les incisions faites avec le
laires avec suppuration, on se sert quelquefois d ’un petit tube
bi>touri, j ’eus recoins à l’opération du drainage. J’enfonçai de
en caoutchouc, d’un ou plusieurs centimètres de longueur,
liant en bas le long trocart de M. Chassaignac, et après avoir
percé de irons, et qui est enfoncé directement et perpendicu
retiré la pointe, j ’introduisis facilement un long tube en caout
lairement dans labtcs. La partie extérieure et saillante de ce
chouc dans la canule. Je laissai une ceitaine quantité de ce tube
tube est fendue en deux et les parois en sont renversées à
hors la plaie, absolument comme on laisse une certaine quantité
dro le et h gauche sur la surface de la peau, où elles sont
de mèche, lorsqu'on applique un séton, et je liai les deux extré
maintenues par une bandelette de diachylum.
mités avec un lil desoie; la douleur ne fut pas très vive: un
�—
m—
gâteau de charpie, une compresse cl une bande constituèrent
ioui le pansement. Le lendemain, la charpie était inondée de
des fistules qui succèdent à un abcès de la marge do l ’anus. Je
pus ; je défis le tube et jp fis cheminer dans la plaie, îi la manière
ne suis pas éloigné de penser que dans celte circonstance les
du scion,une petite portion du tuyau qui était restée en dehors.
tubes à drainage ont éloigné cette infirm ité en fournissant au
A mesure que la suppuration était moins abondante, je faisais
dehors un écoulement constant de pus ; le liquide pouvant tou
moins de tractions sur le tube ; enfin, au bout de vingt jours, la
jours sourdre par les trous il mesure qu’ il se formait, le décolle
suppuration me paraissant à peu près tarie, je le retir/ii et lis
ment de l'intestin a eu dès-lors moins de facilité il se produire
appliquer sur les deux ouvertures un morceau de diachvhim,
que si ou avait traité l'abcès par la méthode ordinaire.
enveloppé d'une compresse et d ’une bande Après quatre jours,
Observation 111. —
Le sieur E ..., charretier de son état, fit
la plaie supérieure était complètement fermée. Il n’en fut pas
une chute assez violente sur le genou gauche, vers la fin du
de même de la plaie inférieure; elle ne se cicatrisa qu’au bout
mois de novembre 1864.
d’un mois, et encore fa llu t-il employer la teinture d’ iode h plu
A la suite de cette chute, il éprouva de la diflicullé dans la
marche; bientôt survint un léger gonllemenl auquel le malade ne
sieurs reprises.
Sur mes onze opérés par le drainage, j ’ai observé trois fois
prêta pas beaucoup d’ attention ; ce ne fut que lorsque la tumeur
celte espèce de fistule qui s’établissait vers l'un des orifices
l’empêcha totalement de se livrer h ses occupations qu’il se
par où avait passé le trocart, j'a i cru pouvoir l'attribuer a ce
décida à faire appeler son médecin ordinaire, M. le docteur
que la compression, dans ces cas. ne pouvait se faire que d’une
Crouset, qui diagnostiqua une hydrarthrose et institua le traite
manière incomplète, parce que la région s’y prêtait difficile
ment rationnel de celle lésion. Soit que ce traitement eût été
ment, comme par exemple dans l'observation que je viens de
institué un peu lard, soit que le malade ne se conformât pas
citer. Bien que ce petit inconvénient soit désagréable pour le
peut-être exactement aux conseils de noire jeune et habile
malade, le chirurgien ne doit pis s’en effrayer, ce n est qu’une
confrère, toujours est-ii que la tumeur ne fil que s’accroître. Ce
affaire de temps, et quelques cautérisations faites soit avec la
fut alors que M. le docteur Crouset me pria de voir ce malade
teinture d'iode pure ou étendue d'eau, soit avec le nitrate d’ar
avec lui. A mon premier examen (20 décembre), je trouvai là,
gent, ont toujours suffi, clic/. m?s trois opérés, pour amener
en effet, presque tons les caractères de l’hydrarthrose ; seule
une cicatrisation complète.
ment, du côté externe de la rotule existait une certaine rougeur
Observation 11. —
A la suite d'une marche forcée, M. A...,
diffuse, et quand on pressait en cet endroit, le malade éprouvait
âgé de 19 ans, éprouva des douleurs vives a l’anus, bientôt
de la douleur. Voyant l’ insuccès de tous les moyens employés
suivies d ’élancements. Lorsque je l'examinai, le 22 avril 1864,
jusqu’à ce jour, nous proposâmes au malade la ponction suivie
je trouvai, au côté gauche Je l'anus, une induration très dou
de l’injection iodée au quart. Celle opération fut faite séance
loureuse de la grosseur environ d’un œuf de pigeon ; je con
tenante; ie liquide qui s’écoula était visqueux et avait presque la
seillai une application de sangsues; mais, malgré cette émission
couleur du chocolat. L ’injection provoqua une douleur assez vive.
sanguine, un abcès ne tarda pas à se form er; je le traitai par le
Le lendemain, 21 décembre, la lièvre était modérée, peu de
drainage et, dix-sept jours après, M. A ... pouvait reprendre ses
chaleur à la peau, seulement le malade éprouvait de temps k
occupations.
autre quelques douleurs assez vives à la partie externe du
Tous les praticiens savent combien est grande la fréquence
genou. On fit appliquer des cataplasmes émollients et on permit
deux bouillons.
�-
Le 22, pouls h 100 pulsations, soif vive, douleurs aigues,
rougeur et chaleur au niveau de l'articulation fémoro-tibiale
gauche, gonflement de toute la fjee externe de la jambe, à
127
—
lemrnt fermées ; on continue la compression et on permet au
malade de se lever pendant deux heures.
Le 23 janvier, le malade fait une petite promenade d’une
partir du genou jusqu’aux malléoles. — Diète, limonade, fo
heure qui ne le fatigue pas ; la jambe est revenue b peu près a
mentations émollientes,
son état normal, l’appétit est bon, le pouls a 73. Le docteur
loco-dofenti.
Le 23, la fluctuation commence b se faire sentir au niveau
Crousel recommande au malade de continuer la compression
du genou, toute la face externe de la jambe est d’un rouge
avec une bande roulée. Ces recommandations sont ponctuelle
violacé, pouls à 110 pulsations, dépressible, langue scclie, sol
ment exécutées, et, le 28 janvier, le sieur E ... est en état de
vive. — Limonade vineuse, potion au kina, fomentations émol
reprendre son travail.
lientes et catapasmes.
Ainsi, voilà un homme qui, b la suite d’ une chute, a été
Le 27, on constate la fluctuation dans toute la partie externe
atteint d’une hydrartbrose, puis d'un érésypèle pblegmonenx
de la jambe, à partir du genou jusqu'à la malléole externe, la
suivi d’un décollement considérable et (pie le drainage a r< tabli
peau est décollée dans une grande étendue, teinte violacée,
environ dans l'espace d’un mois et demi. Il e.>l probable que si
pouls b 100, langue sèche, soi! vive, délire Ingace En présence
on avait pratiqué des contre-ouvertures, le malade aurait souffert
de la gravité de ces symptômes et surtout
davantage et peut-être n’ eut-on pas obtenu un résultat aussi
de
ce vaste décolle
ment, nous n h ;sitons pas, le docteur Crouscl et moi, à appli
quer deux tubes b drainage, l’ un au niveau du genou, l ’autre à
la partie inférieure. — Prescription
ut supra.
avantageux et aussi immédiat.
Observation IV.
— j\JmeX .. . , artiste dramatique, jouissant
habituellement d'une bonne constitution, est prise depuis plu
Le 28, le pus a coulé abondamment à travers les ouvertures
sieurs années d ’un gonflement de la glande vulvo-vaginale qui
des deux tubes, la jambe est moins enflée, le malade a passe
revient a plusieurs mois de distance. Cette inflammation est
bonne nuit ; pouls à 100, langue plus humide. — On prescrit
due, chez elle, comme du reste chez une autre dame que j ’ai
trois bouillons, limonade vineuse et potion b l ’extrait de kina.
eu l'occasion d ’examiner dernièrement, à une cause purement
Le 30, le gonflement de la jambe a considérablement dimi
mécanique, c’est-b-dire a l'étroitesse du vagin, étroitesse qui
nué, le malade y éprouve peu de douleur; pouls a 90. langue
fait que l’acte de la copulation ne peut s'accomplir chez elle
plus humide. — Limonade vineuse, 2 potages; on commence à
sans souffrance; des frictions anodines, des pommades b la
exercer une légère compression au-dessus du genou et dans
belladone suffisaient habituellement
l’intervalle des deux tubes.
dans l’ordre.
pour faire
fout rentrer
Le 3 janvier 1803, la suppuration est bien moins abondante,
Au mois de décembre 186-4, ayant été appelé de nouveau
le pouls est b 80, la peau commence b sc recoller au niveau de
pour la même lésion, je conseillai b celte dame les moyens o r
la partie moyenne de la jambe. —
dinaires qui la soulageaient habituellement; mais, celte lois, le
Ut supra
pour les prescrip
tions. On alimente un peu le malade.
résultat ne répondit pas a mon attente, un abcès se forma qui
Le 13 janvier, le docteur Crousel voyant la suppuration a
acquit, au bout de quelques jours, la grosseur d’une noisette.
peu près taiie, enlève les deux tubes et exerce sur la jambe une
Une fois la collection purulente bien limitée, j ’enfonçai, de haut
compression méthodique au moyen d un bandage roulé.
en bas, un trocart b bydiocèle et j introduisis un tube b drai
Le 18 janvier, les quatre ouvertuies du trocart sont complè-
nage d’uu petit calibre. Pendant quelques jours, le pus coula
�— 128 d une manière continue. Au bout du huitième jo u r, voyant qu’il
ne s’écoulait presque plus de matière par le tube, je l’enlevai.
La plaie supérieure ne tarda pas à se cicatriser, mais la plaie
Quelques roots sur les Affusions et lotions fi o i d e s i leurs effets
phy siolog ique s! le u r em p lo i p a r t i c u l i e r d a n s les pyrexies.
inférieure continua de sécréter encore pendant huit à dix jours
une certaine quantité de sérosité. Quatre cautérisations au
Il n’est pas de médecin qui, dans le cours de sa pratique,
nitrate d argent suffirent pour amener une cicatrisation complète.
n’ait eu à lutter, à certains jours, contre quelqu’un de ces
Ici, encore, je n’hésite pas à attribuer la rapidité de la cica
préjugés si fortement enracinés dans l ’esprit du vulgaire. Parler
trisation à la méthode du drainage. On sait, en effet, que dans
et raisonner médecine est un droit que tout le monde (même
l’abcès de la glande vulvo-vaginale le muco-pus ou le pus
les personnes les plus étrangères aux questions médicales) croit
s’accumulent souvent à différentes reprises, et que si l’on n’a
pouvoir s’attribuer. De là tant d’idées fausses, tant d’opinions
pas soin de tenir l'incision largement ouverte par l'introduction
antiphysiologiques qui trop souvent enlèvent au médecin sa
de mèches, la récidive est à craindre. Comme on l ’a vu, ces
liberté d’action et compromettent le succès de la thérapeutique.
inconvénients ont été écartés dans cette circonstance, et le
drainage a procuré ici un résultat très satisfaisant.
J aurais pu citer encore d'autres observations, mais comme
La médication par l’eau froide est, à notre époque, parfaite
ment acceptée du public. L’hydrothérapie progresse de jo u r en
jour, et nous voyons celte méthode enregistrer des succès ée
elles d apprendraient rien de nouveau au lecteur, je crois en
plus en plus légitimes, à mesure qu elle est mieux connue et
avoir dit suffisamment pour appeler l'a tI en lion de mes confrères
mieux appliquée. Mais il est un point sur lequel les médecins
sur I utilité du drainage en chirurgie. Jusqu'à présent, du reste,
et le public ne sont pas encore parvenus b se mettre d’accord :
je n’ai employé Je drainage que dans le traitement des abcès :
c’est lorsqu’il s’agit d’ appliquer l’eau froide au traitement des
M. Cliassaignacen a étendu l ’application aux tumeurs blanches,
maladies fébriles.
phlegmons diffus, fistules urinaires, épanchements sanguins,
Cependant les faits de tous les jours prouvent combien l’on
hydrocèles, etc., etc. Ceux qui voudront étudier celle intéres
a toi t de redouîer l’ emploi des allusions on lotions Iroides dans
sante quesliou sous toutes ses faces feront bien de consulter
De la Suppuration et
le cours de certaines pyrexies. Sans nul doute ce moyen est
l ’excellent ouvrage de M. Chassaignac :
énergique, perturbateur ; partant il entraîne après lui quelque
du Drainage chirurgical,
ils y trouveront une foule d'applica
danger et le praticien ne doit s’en servir qu’avec une certaine
tions de celte ingénieuse méthode. Quanta moi, en publiant
réserve; mais nous croyons qu’on a beaucoup trop exagéré le
cet article, je n’ai eu en vue que de montrer, par des exemples
nombre et la nature des accidents survenus a la suite de leur
pris dans ma pratique, que, dans certains cas, le traitement des
emploi.
abcès par le drainage donnait des résultats supérieurs à ceux
Currie, qui le premier traita par les allusions froides les
que l'on obtient parla méthode ordinaire. Je m ’estimerais très
scarlatines graves, obtint de nombreux succès. Après lui, des
heureux si j'avais pu faire pa>ser celte conviction dans l'esprit
médecins anglais et allemands, les ayant essayées dans des cas
de mes confrères ci, par là même, les déterminer à essayer
semblables, vantèrent beaucoup cette médication. J’n France,
d’ une méthode qui, au pis aller, ne peut avoir que des résultats
inoflensifs, en admettant qu’elle ri en procure de très avan
tageux.
t ) r Mé ntNTiK.
Valleix en conseilla l’emploi. M. Trousseau, dans sa
médicale,
Clinique
insiste longuement sur les affusions froides et cite
deux cas de scarlatine grave dans lesquels ce moyen fit merveille.
�A Paris, M. Beau fait un- grand usage des lotions froides dans
qui caractérise
la fiè>re t.plu/ïde Cependant, en dépit de ces divers témoigna
typhoïdes. Si la coloration rouge de la peau n’existait pas, on
ges, une sorte de défaveur reste attachée parmi nous il cette
jurerait, b première vue, qu’on a affaire à une dothiénenlérie
médication. La plupart des médecins français, redoutant les
avec état aiaxo-adynamique.
suites dangereuses de ce traitement, n’ osent pas employer l’eau
froide dans les pycxics, et leurs hésitations sont d'autant plus
grandes que le public, en veitu de ce préjugé universel qui fait
ensevelir sous des amas de couvertures les malades en proie à
d une
manière
si
nette certaines
fièvres
M. S eux diagnostique une lièvre scarlatine grave et prescrit
tro i' lotions froides dans la journée.
7 juin. — Hier à la suite des lotions il y a eu un peu de calme :
le déliré est moins fort, la fièvre toujours intense.
une lièvre ardente, accueille avec une répugnance extrême
Meme traitement : diète absolue.
toutes les propositions de ce genre.
8 juin. — L ’amélioration augmente ; il n’y a presque plus
Celte crainte qui paralyse l'action du médecin, cette horreur
instinctive qui saisit les alentours du malade doivent-elles nous '•
empêcher d employer un moyen qui, dans certain cas, agit d une
manière tout à fait souveraine? Devons-nous courber la télé
devant un de ces préjugés vulgaires qui se basent presque tou
jours sur de fausses idées théoriques ou sur l ’interprétation de
faits pour laquelle la compétence du public est tout à fait nulle?
Von, sans doute. U est au contraire de notre devoir de prouver
de délire; la fièvre a diminué, le regard est meilleur ; la des
quamation commence à se faire.
On con'inue encore les lotions froides qui sont pratiquées,
comme les jours précédents, trois fois dans la journée.
9 ju in . — Le délire a complètement cessé; Lintelligence
réparait d’une manière notable.
On donne un peu de bouillon au malade et on suspend les
lotions froides.
par tous les moyens possibles que celle opinion n’a aucune
10 juin. — Le regard est bon, la physionomie naturelle,
raison d’étre et qu’elle sert uniquement à priver la thérapeutique
l’intelligence parfaite; la desquamation est générale et se fait
d’un agent puissant et ellicace.
par larges plaques; le pouls est encore à 112 pulsations.
L ’observation suivante fera voir si nous nous exagérons les
bons effets des lotions froides.
Deux bouillons et deux fécules.
12 ju in . — 124 pulsations: langue sèche et râpeuse; la
physionomie est d ’ailleurs très bonne et l'intelligence n'est nul
Jean Reconda, jo u rn a 'irr, âgé de JG ans, entre le G juin 1805
lement troublée. La persistance de la fièvre est occasionnée par
a i’hôp tal de la Conception, dans le service de M. le docteur
l'intensité de langine ; les amygdales sont très développées et
SEpx.fsaUe Saiul-Cnarles, n* 18).
recouvertes d'une légère couche pultacée ; le malade souffre
Ce jeune homme, d'apparence assez délicate, est malade
depuis huit jours. Il présente à son entrée une fièvre intense
accompagnée de délire ; les amygdales et le voile du palais sont
beaucoup en avalant.
Mauve cl violette ; alun en poudre sur les amygdales; deux
soupes et deux bouillons.
le siège d une rougeur et d une tuméfaction assez vives ; la
15 juin. — Le malade a bien dormi, celle nuit ; il est calme,
peau sèche et brùlaute a dans toute son étendue une coloratron
la desquamation continue ; les amygdales sont encore très dé
d’ un rouge éclatant; les lèvres sont fuligineuses, le faciès
veloppées; il y a en outre un peu de stomatite ; le pouls est 3
typhique ; le malade, incapable de répondre aux questions qui
110 pulsations.
lui sont adressées, présente cet ensemble de signes extérieurs
Deux applications d'alun par jour ; mauve et lait.
�cl lymphatique, appartenant b une des meilleures familles de
14 ju in .— Le malade est mieux ; il souffre moins en avalant ;
le pouls est tombé b 108 pulsations.
Alun
ut supra. Ou donne quelques aliments loyers.
16 juin. — L'amygdalite dim inue; I appétit est bon ; le pouls
n est plus qu’ à 100 pulsations.
Marseille. Ici encore l’éruption fut lente, difficile, accompagnée
de fièvre et de délire. Chez lui comme chez la jeune dame
anglaise, les lotions froides amenèrent une g u ris o n complète.
Les fièvres éruptives, et en paiticulier les scarlatines graves,
ne sont pas les seules affections qui puissent bénéficier de l ’em
Les amygdales sont encore assez volumineuses, mais la fièvre
ploi des lotions froides. Depuis plusieurs années, mon père
est tombée; le malade se sent tout à fait bien et ne souffre plus
emploie souvent ce moyen dans d’autres maladies, cl spéciale
en avalant; l’appétit est bon. Dans quelques jours ce jeune
ment dans ces fièvres typhoïdes b forme ataxique avec délire
homme pourra sortir de l'hôpital.
violent, chaleur et sécheresse delà peau, lièvre intense. Il a
toujours obtenu de celte médication les meilleurs effets. Nous
Le fait dont nous venons d'exposer les détails n ’est pas le
avons pu observer dans son service un très grand nombre de
seul de ce genre qu’il nous soit permis de citer. Dans une note
cas heureusement modifiés par ce traitement. Sons l’ inlluence
communiquée à la Société de Médecine de Marseille, dans la
des lotions fioidcs, il se produit une sédation presque immé
séance du 7 juin 1802, mon père mentionna trois cas de scar
diate : la chaleur de la peau diminue, le délire se C3lme, la
latine grave guéris par l’emploi des lotions froides. Un de ces
fièvre devient moins forte, l ’individu paraît aux yeux de tous
faits fut observé a I hôpital ; les deux autres en ville. Nous allons
notablement soulagé. Celte amélioration, il faut bien le dire,
brièvement les rappeler en quelques mots.
n’est que momentanée : peu de temps après l'affu^on ou la
Le premier de ces trois malades fut une jeune dame anglaise
lotion, l’état du malade est redevenu a peu près ce qu’il était
au troisième jour des couches, une scar
auparavant; on recommence alors plusieurs fois dans la jonrn ’e,
latine grave avec fièvre forte, chaleur extrême de la peau, délire
on continue pendant un certain nombre de jours, et souvent
violent; bref, tout un cortège de redoutables symptômes. L ’é
cette persévérance est couronnée de succès.
chez laquelle survint,
ruption était très confluente et toute l’enveloppe cutanée avait
revêtu une coloration rouge éclatante. Des lotions froides furent
faites deux fois par jour pendant quatre jours. La guérison fut
radicale.
Le second malade, garçon limonadier, âgé de 25 ans, homme
Les lotions froides constituent d’ailleurs une médication par
faitement rationnelle.
Quand on est en présence d’une éruption qui se fait mal,
quels moyens emploie-t-on? Des révulsifs violents, des sina
fort et vigoureux, entra dans le service de mon père, a l’hôpital
pismes, des frictions, des bains de moutarde, bref tous les
de la Conception, atteint d’une scarlatine grave. L ’éruption,
agents capables d’exciter l’enveloppe cutanée et de rappeler a
dans ce cas, se faisait très mal ; à peine apercevait-on sur quel
sa surface le mouvement morbide qui tend b l’abandonner. Les
ques points du corps des rongeurs diffuses ; la fièvre était intense
affusions froides n’agissent pas autrement. Elles révulsent forte
et le délire très violent. Mon père lit faire, pendant plusieurs
ment vers la peau, et tel scarlatineux dont la surface du corps ne
jours, des affusions froides. L ’éruption se développa en repre
présentait, avant la lotion, que des rougeurs disséminées et peu
nant son cours naturel et, trois semaines environ apiès son
intenses, nous apparaît tout b coup rouge des pieds b la télé de
entrée à I hôpital, le malade sortait parfaitement guéri.
cette teinte chaude et éclatante qui est le propre de la scarlatine.
Le troisième malade était un jeune garçon de cinq ans, délicat
�—
Cerlains malades sont en proie h une fièvre inlcnse : la peau
est sèche; la diminution de l'excrétion sudoripare ne perinci
piusà une évaporation salutaire de rafraîchir le corps en même
temps qu elle met obstacle a la sortie naturelle d'une partie des
produits de désassimilation. L'enveloppe cutanée est brûlante,
la température du corps est très élevée, le sujet est réellement
consumé par la fièvre.
L ’indication dans ce cas n'est-elle pas formelle et ne doit-on
pas, avant tout, s’efforcer de
rafraîchir le malade?
La première
idée qui se présentera à l ’esprit ne sera-t-elle pas de mettre
celte peau brûlante en contact avec un corps frais? Personne,
que nous sachions, n'hésite à placer des compresses d’eau froide
sur le front des malades qui se plaignent de pesanteur et de
chaleur céphaliques. Pourquoi donc ne pas vouloir
modérer par
un moyen analogue l’ardeur brûlante de la peau? Les lotions
froides en activant la sécrétion de la sueur et rétablissant les
fonctions de l’enveloppe cutanée, ne rem pliront-elles pas d’ail
leurs une antre indication fort importante?
Mais ce n’est pas tout. Le sang violemment appelé par la
lotion froide à la périphérie du corps abandonne d’autant les
organes centraux. La circulation est vigoureusement excitée;
les poumons, le cœur, le cerveau se vident en partie, et, quel
que momentané que soit cet effet, on doit être très heureux de
pouvoir l ’obtenir dans une maladie, comme la lièvre lypboï le,
par exemple, dont un des caractères principaux est la tendance
extrême à la congestion des viscères.
De plus, le froid étant un puissant sédatif de l'innervation,
agit
eo déprimant les forces vitales
et calmant la surexcitation
nerveuse. On comprend par là comment, après l’affusion froide
on peut voir le cœur battre moins vite, la lièvre décroître, Je
délire diminuer.
C’est ici le lieu d’examiner si les aff isions froides peuvent
êtres imulanles et toniqu s. Celle propr.clé semble peu com
patible avec l’effet s «datif dont nous venons de parler. Cepcn-
155
dant, quand on examine les maladies dans lesquelles ce moyen
a été employé, on est forcé de conclure que les médecins lui ont
reconnu des propriétés thérapeutiques qui paraissent au premiei
abord devoir s’exclure mutuellement. Nous voyons, par exemp'e.des praticiens expérimentés vanter I effet sédatif des affu
sions froides dans les lièvres typhoïdes à forme franchement
aigue, avec fièvre intense et forte surex» iu tio n nerveuse. D un
autre côté, Caspcr, à B erlin, et M. IJortelonp, à Paris, ont
amené une réaction tonique el silu ia if e dans des cas de choléra
grave parvenus à la période algide.
Que faut-il croire? Devons-nous mettre en doute le (a'ent ou
la probité scientifique de praticiens également recommandables?
Ou, si nous admettons que les faits cités des deux parts ont été
bien et dûment observés, comment expliquerons-nous une
contradiction qui parait aussi évidente?
La physiologie nous tirera peut-ctre d’embarras. Examinons
Le froid produit sur les tissus de l'économie des effjts diffé
rents. Appliqué sur une région pourvue abondamment de vais
seaux sanguins, il détermine d’abord un resserrement des tissus;
mais, dès que l’on cesse l’emp'oi du froid, les tissus
réagissent
contre l'effort qui leur avait été imposé en premier lieu; les
vaisseaux se dilatent, le sang atlïue en plus grande aboud.mce,
la lempératurc de la région s'élève; en un mot, il y a
réaction.
Nul doute que le fioid ne produise, dans ce cas !à, un effet
stimulant et tonique ; il active la cin nlation et, p:ur suite, excite
les fondions nuliitives. Mais à côté de ce fait s'eu place un autre
qui n’est pas moins certain, car il résulte de nombreuses obser
vations : le froid est un sédatif nerveux qui diminue l ’activité
vitale el paralyse l'innervation.
Il est donc vrai de dire que les allusions et lotions froides
stimulant
circulation, et sédatif
produisent dans l’économie un effet à la fois
p ir
l'influence qu’ elles exercent sur la
par
leur action sur le système nerveux.
Mais, s’empressera l on d objecter, c'est justement sur ce
point que porte la contradiction. Si le froid touille et stimule
�u
—
136
137
—
-
I individu on faisant circuler le sang avec pins de force, il ne
pourra pas être un sédatif de l ’innervation, car le premier résul
tat d’ une pareille dépression nerveuse serait de ralentir la circu
lation et par suite d’empêcher l'effet tonique.
ASSOCIATION MEDICALE DES DOUCHES-DU-RHONE.
Assemblée g é n é ra le t e n u e à M a rs e il le le 7 s e p t e m b r e 1 8 6 5
sous la p ré s id en ce de M . le d o o te u r S E U X , p r é s i d e n t .
En second lieu, si vous supposez que le froid agisse d’abord
sur le système nerveux, il devra
a fortiori
annihiler tonte sti
mulation circulatoire.
La séance est ouverte à trois heures et demie. Elle a lieu,
comme l’an dernier, dans le local de la Société Impériale de
Ces deux rfïelsse combattent et se détruisent mutuellement.
Médecine, que M. Jubiot, président de la savante compagnie,
Ou bien ils existeront simultanément, et alors le résultat sera
a bien voulu mettre à la disposition de la Société. La réunion
nul; ou un seul persistera, et dans ce cas pourquoi sera ce l’un
est nombreuse ; on remarque parmi les personnes présentes :
plutôt que l’autre ?
M. le docteur Gouzian, président du Comité Médical des Bou
Pourquoi, en un mot, dans certaines fièvres typhoïdes l’nfl'u-
ches-du-Rhône ; M. le docteur J ubiot, président de la Société
*ion froide a-t-elle agi comme sédatif nerveux plutôt que comme
Impériale de Médecine; M. Verne, avocat, l'un des conseils
stimulant circulatoire? Pourquoi dans le choléra le résultat a-t-
judiciaires de l ’Association, etc., etc.
il été inverse ?
M. le président fait savoir a l’assemblée que M. le docteur
L'objection est sérieuse ; essayons d'y répondre
La suite au prochain numéro.
Dr S eux fils .
Laurens, secrétaire de la Société, absent de Marseille par raison
de santé, est dans l'impossibilité de se rendre à la réunion de ce
jour, à cause d’ une maladie subite dont Mme Laurens a été at
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
Les nominations suivantes ont eu lieu à l ’Ecole de Médecine de
Marseille :
M. i.liapplain. professeur suppléant pour les chaires d'anatomie et
phxsiolopi est nommé professeur suppléant pour 1 s chaires de
chirurgie et d'accouchement; M. Broquier, ciief des travaux anato
miques est nommé professeur sup léant pour les rliai es d'anatomie
et physiologie: M. Rousset (Ernest), licencié ès-sciences p ivsiques,
est nommé professeur suppléant p ur les chaires de mat ère médicale
et thérapeuthique, de pharma 1e et toxicologie; M Combalal est
nommé chef des travaux anatomiques.
— L’Assemblée générale annuelle de l ’Association des Médecins
des Bouches-du-Rhône aura leu prochainement. Des lettres per
sonnelles, adressées aux Associés, leur feront connaître le jour,
l ’heure et le lieu de la réunion.
— L'abondance des matières ne nous permet pas d’insérer dans
ce numéro le compte-rendu de l ouvrage du Dr Conche sur la mala
die kystique du testicule; un article lui sera prochainement consacré.
Le Comité de liédaclwn.
teinte. M. le docteur Broquier, qui est le membre le plus jeune
de la commission administrative, veut bien remplir les fonctions
de secrétaire. Sur la proposition de M. le président, l’assemblée
vote des regrets unanimes au sujet de l’absence de M. Laurens,
surtout à cause du m otif qui le retient loin de Marseille.
M.
S eux
prononce ensuite l 'allocution suivante :
M essieurs et très honorés C ollègues ,
Depuis notre assemblée générale du mois d’août deroier, j ’ai
eu l ’honneur, comme vous le savez, d’être élu membre du
conseil général de notre association ; mon premier devoir et le
plus cher à mon cœur est de faire rejaillir sur vous cet honneur;
c’est, sans contredit, à la considération dont jo u it notre Société
ainsi qu’a l’importance de notre département, que les sociétés
locales de France cl l’administration supérieure de noire asso
ciation ont rendu justice en me nommant votre représentant
8
m'
�— IÔK
-
au sein de noire grand conseil de Paris ; veuillez donc recevoir
mais elle en ferait bien plus si elle se réunissait à la grande fa
l’expression de lonie ma graiilude cl croire <]ue je ne négligerai
mille ; car, conservant son indépendance pour la disposition de
rien pour vous y représenter dignement.
ses forces dans la localité, elle étendrait d'une part ses bienfaits
Vous n’ignorez pas, très honorés collègues, combien est
sur un rayon beaucoup plus étendu et elle recevrait d’autre
grande en moi la foi dans notre œuvre ; aussi ne serez-vous pas
part, en compensation de quelques légers sacrifices, un appui
étonnés du bonheur que j ’éprouve en voyant tous les jours s'ac
considérable qui augmenterait ses forces locales. Fusion, fusion,
croître le nombre des médecins qui partagent ma confiance. Je
telle est la pensée qui ne m’abandonnera jamais; telle est l’opi
profile de cette circonstance pour les remercier du témoignage
nion, je le proclame avec satisfaction, de la majorité de nos
de sympathie le p*us complet qu’ils puissent nous donner : je
confrères des deux sociétés.
veux par 1er de leur acte d’adhésion. Oui, très honorés collègues,
notre association qui couvre aujourd’ hui
J’ai le bonheur de vous annoncer que depuis notre dernière
la France de ses
assemblée générale annuelle, vingt-trois nouveaux confrères
sociétés locales, est appelée b de hautes destinées, parce qu elle
nous ont adressé leur acte d’adhésion ; qu’ils soient les bien
es* 1 expression du besoin intelligent de notre époque, l’union :
venus! et que leur exemple soit suivi par les confrères trop
parce qu elle n’a qu’un but, le bien matériel et le bien moral de
nombreux encore que l’indiflcrcnce ou le doute retiennent dans
tous. Or, ses bienfaits seront d’autant plus grands, que tout le
l’isolement. Je profite de cette occasion pour faire appel a ces
corps médical français ne formera qu’une seule et même famille
instincts généreux qui sont l ’apanage du médecin dès son entrée
qui, par son union, aura à sa disposition toutes les forces né
dans la carrière comme étudiant jusqu’il sa retraite la plus re
cessaires au but que nous devons atteindre, aide et protection a
culée !
tous, influence moralisatrice sur tous. Il est donc évident que
J’ai aussi bien du bonheur a vous dire que nous n ’avons eu
la confiance dans notre œuvre doit être d’autant plus grande
aucun secours matériel à distribuer; quant aux secours d’un
qu’on voit chaque année s’accroitre le nombre de ses membres
autre ordre, quant a notre appui moral, ils n’ont jamais fait
et ses rangs grossis par larrivée des hommes les plus distingués
défaut à aucun de nos associes, cette année comme les années
de la profession. Que ions comprennent bien que le succès de
précédentes. C’est ainsi que votre commission administrative
notre œuvre dans toutes ses application ■>pratiques sera toujours
s’est occupée successivement du règlement des honoraires avec
en définitive une question de nombre.
les clients, de üiflicullés survenues entre collègues; elle n’a
Notre société locale n’a cesse de marcher dans cette voie pro
pas négligé la répression du charlatanisme et celle de l’exer
gressive; en effet, le nombre de ses membres s’est constamment
cice illégal de la médecine, en s’adressant aux autorités de
accru malgré l existence à nos côtés d’une société médicale de
l’ordre civil, de l’ordre judiciaire et de l’ ordre ecclésiastique.
prévoyance et de secours mutuels qui, ayant foi dans son droit
Je vous ferai observer qu’au point de vue de la répression de
d’aînesse et dans ses propres forces, croit devoir rester dans
l’exercice illégal, nous sommes entrés dans la voie qui me
l ’isolement et vivre de sa propre vie ; ses intentions sont bonnes,
parait la meilleure et a laquelle tendent beaucoup d ’autres
sont pures, il n’y a pas à en douter. Celte société, dont le bureau
Sociétés locales : c’est que le ministère public poursuit d’ ollîce
est si bien disposé pour favoriser tout ce qui est noble, bon et
les contraventions qui lui sont signalées. Mais il faut que chacun
juste, fait et fera du bien, il n’ y a pas à en douter non plus;
de nous signale avec énergie à la commission administrative les
�140 —
141
(bits qui parviennent h noire connaissance. Que Messieurs les
en conséquence, il la reconstituer, comme l’ indique noire ordre
magistrats veuillent bien recevoir l'expression de notre recon
du jour, Il m’est très agréable de vous faire observer que les
naissance pour l'assistance qu ils nous donnent dans l'accom
membres qui la composaient sont rééligibles. Je crois cire votre
plissement du but que nous poursuivons en commun.
lidèlc interprète en adressant à chacun d’eux mes remercîmenls
Vous avez vu, dans la nombreuse Assemblée générale du
pour les services qu’ils ont rendus a l’œuvre et pour le concours
mois de février dernier, avec quel zèle votre commission admi
loyal et éclairé qu’ils ont bien voulu m’accorder dans l'accom
nistrative a répondu h l’appel de notre conseil général relative
plissement des devoirs, souvent difficiles, de la présidence. M.
ment à la révision des lois qui régissent l ’exercice de la méde
le secrétaire et M. le trésorier ont des droits tout particuliers ii
cine, c’ est vous dire combien est vif l ’intérêt qu’elle porte à la
notre gratitude ; qu’ils veuillent bien agréer une large part dans
solution de cette question si diflicile et si pleine d’ écueils.
ces remerciments.
L ’empressement que beaucoup d entre vous ont mis à se rendre
L’an dernier, nous déplorions la perte d’un de nos regrettés
à cette réunion, malgré la distance, donne In mesure de l’im
collègues ; cette année, nous n’ avons pas de larmes à verser, et
portance que nous attachons tous h ces questions qui préoccu
j ’espère qu’ il en sera ainsi pendant longtemps. Il est cependant
pent le monde médical depuis tant d’années. Une commission
de mon devoir de donner ici un témoignage de sympathie et de
nommée par le conseil général s'occupe de l ’enquête qui devait
regrets au docteur Hollande, de Châteaurenard, car, bien que
nécessairement suivre les rapports qui lui avaient été envoyés par
ce médecin ne fût pas un de nos sociétaires, ce respectable
toutes les Sociétés locales. Ne doutons pas que cette délicate
confrère était un des abonnés de notre journal l
’Union Médicale
affaire de I intervention de l ’Association auprès des pouvoirs
de la Provence, et l ’on
publics, conduite avec sagesse et prudence par les hommes
nom de cet homme de bien nous appartient, car il a laissé par
peut dire, de plus, qu’uujourd’liui le
éminents qui marchent à noire tête, ne soit suivie des meilleurs
testament, à l’Association Générale des Médecins de France,
résultats.
une somme de 2,000 fr.
Ainsi que vous le dira M. le secrétaire, notre Société possède
« La foule qui se pressait à ses funérailles, la tristesse peinte
aujourd’hui la somme «le 2.784 fr. 95 cent. Sur celle somme,
sur tous les visages, les larmes que beaucoup versaient ont
d’après le chaprre VI art. 26, § 4, de nos statuts généraux et
témoigné, comme l'expose la Notice nécrologique publiée dans
organiques, l ’Assemblée générale doit fixer un prélèvement sur
le numéro du mois de ju in de notre journal, des regrets unani
les revenus annuels pour constituer le fonds de réserve de la
mes qu’emportait dans la tombe l’homme excellent que la com
Société. Vous êtes appelés, Messieurs et chers Collègues, à fixer
mune de Châteaurenard et, par conséquent, notre départe
ce prélèvement. La commission administrative vous propose
ment venaient de perdre. »
le chiffre de 2,006 fr., somme à laquelle, sous aucun prétexte,
il ne sera permis de toucher pendant l ’exercice prochain.
J’ai aussi h vous entretenir de la perte que le corps médical
vient de faire en la personne du docteur Clerc Vigneron, em
Votre commission administrative qui, pendant cinq ans, s’est
porté mardi dernier par le choléra, cl pour lequel j ai cru
occupée avec zèle et intelligence du mandat que vous lui aviez
devoir faire intervenir FAssociation. Avant-hier matin, notre
confie:, va déposer ses pouvoirs entre vos mains, car, d’après
excellent collègue, M. le docteur de la Soudière, me prévenait
nos statuts, elle n est nommée que pour cinq ans ; vous aurez,
que dans son service de ! hôpital de la Conception venait de
�— 1 4 3 '-
— U2 —
succomber un médecin. En eiîel, ce confrère, établi aux bains
Que les médecins composant les sous-commissions formées
de mer de la Méditerranée, ayant vu m ourir sa femme du
dans notre département, que tous nos confrères des Bouchcs-
choléra et atteint lui-même de la maladie, s'est vu, étant sans
du-Rhône qui ont compris que la mémoire de Laënnec méri
ressources, dans la dure nécessité de se faire transporter à l'hô
tait bien l’hommage que le corps médical va lui rendre, veuil
pital. Il allait être enseveli parmi les indigents. Sur l ’avis de
lent recevoir mes remercîments pour le concours bienveillant
M. de la Soudière, et avec son honorable concours, j ’ai cru
qu’ils oui eu l ’extrême obligeance de m’accorder dans l ’accom
faire un acte qui serait approuvé par tous en mettant à la
plissement de la tâche dont le conseil général de l’oeuvre m’avait
charge de l ’Association une partie des dépenses nécessaires
fait l’honneur de me charger.
aux funérailles. Il est à regretter que nous n’ ayons pas connu
plus tôt une pareille infortune; bien que M. le docteur Clerc
Vigneron ne fil
pas partie de l’Association, nous aurions
donné aide et protection
à cet infortuné
confrère. Votre
Celte lecture est accueillie par de chaleureux applaudisse
ments.
M. le président fait connaître les noms des médecins qui,
bureau, représenté par votre président, votre trésorier et M.
depuis l’Assemblée générale du mois de février dernier, ont
de la Soucbère. membre de la commission
donné leur acte d adhésion aux statuts de la Société ; ce sont :
administrative,
s est lait un devoir d’accompagner à sa dernière demeure ce
MM. Giraud, de Fos ; Michel, Teissier et Szatîaier, des M arti
confrère malheureux, cet acte étant le seul témoignage public
gues; Rimbaud, d’Aix ; Heymonet, Anzoux, Crouset et Dau-
de bonne confraternité qui ait pu lui être donné par notre cor-
vergne, de Marseille. L ’Assemblée prononce, par acclamation,
poiation. M. le docteur Gouzian, président du Comité Médical
l ’admission définitive de ces neuf nouveaux membres.
des Bouches-du-Rhône, nos honorables collègues MM. les doc
Le fonds de réserve présenté par la commission administra
teurs Villard, Aubin et Bourgarel et tous les élèves de l'hôpital
tive cl les frais des funérailles du docteur Clerc Vigneron,
de la Conception avaient bien voulu se joindre a nous dans
proposés par M. le président, sont approuvés par la réunion.
l'accomplissement de ce devoir confraternel.
Quelques mots encore, Messieurs et très honorés Collègues,
avant de céder la parole à notre excellent secrétaire. Vous
savez que l'Association Générale, voulant rendre à Laënnec un
La parole est à M. Broquier qui donne lecture du compte
rendu de M. Laurens.
M essieurs et chers C ollègues ,
hommage qui lui était dû depuis longtemps, a pris sous son
Je viens, pour la dernière fois, m acquitter des fonctions que
patronage le projet d’érection d’ une statue à ce grand médecin;
vous avez bien voulu me confier il y a cinq ans, en vous
vous n'ignorez pas qu’une commission a été chargée, à Paris,
présentant le bilan de nos actes cl de nos travaux pendant
de centraliser les souscriptions faites dans les départements;
l’exercice expiré.
or, je me fais un véritable plaisir de vous annoncer que la com
mission centrale a aujourd’hui la certitude que le monument
Ce bilan sera court ; je tiens à vous l ’exposer dépouillé de
tout artifice de langage et dans sa plus entière simplicité.
Laënnec pourra être élevé, grâce â la générosité des mem
Dans notre dernière assemblée générale annuelle du mois
bres des Sociétés locales, paimi lesquelles la nôtre a été
d’août 1864, notre chiffre était de 127; il s’est accru de 25
remarquée par la somme importante (736 fr.) envoyée à Paris.
nouveaux membres. En tenant compte d’une démission q u is ’esl
�—
145
—
produite dans des circonstances dont j ’aurai à vous dire un mot,
devoir refuser ses bons offices et l’arbitrage fut proposé au
notre personnel s’élève aujourd’hui à 140 membres.
confrère contre qui il était demandé. Il fut accepté avec em
Grâce h
Y Union Médicale de la Provence
qui parcourt sa
deuxième année avec le succès que lui valent vos sympathies et
le zèle du comité de rédaction, j ’ai aujourd’hui peu de chose h
vous apprendre.
Vous savez déjà ce qui a été fait contre l’exercice illégal de
pressement et cependaol il ne put aboutir. L ’antagonisme des
intérêts qui étaient en cause ne put s'effacer.
D'une part, on s’inclinait avec une entière confiance devant
la décision à intervenir ; mais de l ’autre la résistance fut formelle
et elle prit un tel caractère que la commission crut devoir de
notre art, vous connaissez les démarches incessantes qui ont
mander sa démission au confrère qui tenait si peu compte de
été faites par votre Bureau auprès de toutes les autorités com
son opinion.
pétentes pour obtenir la cessation ou la punition des abus qui
lui étaient signalés.
Ce serait méconnaître le prix de vos moments que de ne pas
Je vous parle de cette affaire en termes généraux et si je n’ai
pas cru pouvoir me dispenser d'en parler, c’est pour qu’elle
porte avec elle un précieux enseignement. Nous sollicitons
me contenter de vous rappeler la nouvelle réponse de M. le
l’institution pour les médecins de conseils de discipline ; s’ils
Sénateur, relative aux annonces et atliches médicales ; la nou
devaient nous être refusés par la nouvelle loi, les associations
velle lettre parfaitement explicite, émanant de l’autorité ecclé
médicales pourraient au besoin en tenir lieu vis-à-vis de leurs
siastique à l’encontre des religieuses coupables du délit d’excr-
membres, dans certains cas déterminés.
cice illégal.
La commission administrative soumet à votre sanction un
Vous n’avez pas oublié non plus que M. le Procureur Impé
projet de règlement d'ordre intérieur et additionnel à nos sta
rial a fait le plus louable et le m eilleur accueil à toutes les
tuts quelle a élaboré. Elle avait remarqué que bien des lacunes
communications que nous avons eues à lui faire.
existent dans les articles organiques de notre pacte fondamental ;
Il me suffit aujourd’hui de vous déclarer que si nous n’avons
d’autres ont besoin d’être expliqués; de plus,ccrtainesdécisions
pas eu l ’occasion d’intervenir directement et comme parties
prises devaient aussi vous être connues et il a paru bon pour
civiles dans aucune poursuite judiciaire, nous sommes cepen
cela de les réunir en un seul tout.
dant restés sur la brèche et avons défendu avec vigilance les
intérêts professionnels.
Vous parlerai-je, Messieurs, de l'intervention du Bureau,
dans tout ce qui se rapporte à l ’assistance morale. Tout cela
rentre dans le domaine des faits ordinaires, q u ’il devient inutile
de rappeler surtout après ce qu’en a dit M. le président.
Mais il est cependant un fait que je ne puis omettre et qui
Vous jugerez par la lecture attentive des divers articles de ce
règlement, quel est l’esprit qui a dirigé la commission et je ne
doute pas que vous n’appréciez ses intentions à leur juste va
leur.
Parmi les nouvelles réceptions faites aujourd’hui, il en est
une sur laquelle j ’ai à appeler un instant votre attention, c’est
celle d’un de nos plus honorables confrère* de la ville d’Aix où
trouve ici sa place naturelle. Un membre de notre Société avait
il occupe une position médicale élevée. Indépendamment du
eu des difficultés avec un autre membre ; après avoir vainement
mérite personnel de notre nouveau collègue, M. le docteur
essayé plus d’un moyeu pour parvenir à une entente, il sollicita
Rimbaud, son adhésion fait cesser l’isolement où avaient cru
l ’arbitrage de la commission administrative; celle-ci ne crut pas
devoir rester jusqu’à ce jour nos confrères de l ’antiqueet savante
�S ituation F inancière :
cité, notre voisine, et elle nous donne I espoir que cet exemple
Au 1rr janvier 1865, nous avions en caisse. .
rencontrera de nombreux imitateurs.
J’ai eu la bonne fortune de passer récemment plusieurs jours
Les recettes de l ’année se sont composées:
en compagnie du docteur Rimbaud, dans une station thermale
10 Du produit des cotisations et des droits
voisine où le soin de notre santé nous avait réunis; c’est là
d’admission des nouveaux membres, soit. . . .
que je l'ai gagné à notre cause, mais je dois ajouter que ma
2° Abonnements au journal.............................
tâche a été lacile.
3° Intérêts de la somme placée......................
A l’occasion de cette adhésion, je crois devoir vous faire
quelques propositions : Je voudrais que, par une application
bien innocente dans l’espèce, de ce grand principe de la décen
Nos dépenses ont été :
tralisation qu'on nous prône tant aujourd’hui, il fût fait, dans
Frais d’administration.......................................
notre société, une part plus eflicacc et plus directe aux arron
Frais de publication........................................
dissements d’Aix et d.Arles Ils sont certainement représentés
Redevance annuelle à FAssociation Générale
F. 1,610 10
1,752
240
43 —
F. 3 645 10
—
F.
F.
154 85
371
334 30
—
F. 860 15
dans la commission par des délégués ; mais ne vous sembleraitil pas à propos, que chaque ann ;e, au moins un mois avant la
réunion générale, tous les médecins de ces arrondissements
pussent être couvoqués au chef-lieu, en une réunion spéciale
Fn déduisant nos dépenses de nos recettes, il reste en caisse
2,784 IV. 95 c.
où s’agiteraient les intérêts spéciaux qoi les concernent.
Leur éloignement de Marseille ne leur permet pas toujours
La commission administrative est arrivée au terme de son
d assister à nos séances ; ils se rendraient p'us facilement aux
mandai et son renouvellement ligure a l'ordre du jour de celle
assemblées qui se tiendraient au chef-lieu de leur arrondissement.
séance.
Comme conséquence de celle décision, je pense qu il devrait
Vous aurez à vous demander s’il n'y aurait pas profit pour
cire nommé un vice- président par arrondissement ; ce vice-
’OEuvre à lui assurer le concours et les lumières de nouveaux
président serait surtout chargé de présider ces réunions.
membres, ou bien si l’expérience de ceux qui ont dirigé la na
Notre société aurait ainsi trois vice-présidents ; mais outre
que plusieurs sociétés locales nous donnent cet exemple, quel
inconvénient pourrait on y voir? Ici le vieil adage :
non nocet, ne serait
abundantia
pas en défaut.
Par celle combinaison, l’ unité de notre œuvre ne sera pas
compromise et une légitime satisfaction sera donnée h tous.
J’ai tellement confiance dans les bons résultats qui attendent
la mise eu pratique de cette proposition que je n’hésite pas à
eu prendre i initiative et à prier M. le président de la soumettre
à votre sanction.
celle jusqu il ce jour n’est pas un titre a la continuation de votre
confiance.
Notre honoïable président n’a pas cru devoir suivre les erre
ments des sociétés dans lesquelles sont présentées les
tures officielles
candida
sur listes imprimées. Il est persuadé, et sa
conviction est aussi la mienne, que quel que soit le résultat du
scrutin qui va s’ouvrir, il sera conforme aux intérêts de notre
chère institution.
Ce n’est pas sans émotion qu’en résiliant les fondions que
j occupe depuis I origine de l ’association, je me demande si inon
*
�-
1i8 —
—
149
—
dévouement et nies faibles moyens n’ont pas été trop au-dessous
sont la condition obligée de leur existence; s’endormir, même
de mes devoirs.
dans la prospérité, c’est fatalement marcher vers la décadence.
Pendant les cinq premières années de son existence, notre
société s’est progressivement élevée du chiffre de 57 membres
L’Assemblée qui voulait donner b M. le docteur Laurens un
qu’ elle comptait à sa naissance, à celui de 1 48 qu elle compte
profond témoignage de ses sympathies, accueille cette lecture
aujourd'hui.
par des applaudissements vifs et prolongés.
Elle s’est trouvée activement mêlée au mouvement profes
sionnel dont le corps médical a offert l ’intéressant spectacle.
M. le président met alors a la discussion la proposition de
M. le secrétaire relativement b la nomination d’un vice-prési
Elle a fait consacrer par les tribunaux et la Cour Impériale du
dent par arrondissement ; celle proposition est appréciée à sa
ressort, les divers principes de jurisprudence que I association
juste valeur par l’assemblée entière qui l'adopte dans toutes ses
générale a eu le mérite de faire sanctionner pour la défense des
applications.
Etablissement du concours pour l ’obléntion de toutes les
droits des médecins.
Contre l ’exercice illégal, elle a obtenu 52 condamnations
dont plusieurs très importantes.
Elle a su mériter la confiance des autorités administrative,
judiciaire et ecclésiastique aupiès desquelles elle a trouvé appui
et protection.
fonctions médicales (question proposée h chaque société locale
par celle de D ijon), telle est la troisième partie de l ’ordre du
jour. M. le Dr Chapplain, qui a bien voulu se charger de ce
travail, en donne lecture (1).
Ce mémoire, parfaitement écrit et frappé au coin de la plus
Dans toutes les questions qui ont été agitées, elle a lait en
tendre efficacement sa voix.
Notre président siège au conseil général de l’association géné
rale.
saine raison, est accueilli par des applaudissements bien mérités.
M. le président fait observer que les conclusions de M. le rap
porteur doivent être mises aux voix et adoptées, rejettes ou
modifiées par l’assemblée, pour que la société locale de D ijon
Enfin, notre société a eu une initiative que je considère comme
reçoive, non pas l ’opinion d’un seul, mais celle de la société des
féconde et que je me fais un devoir de rappeler en terminant.
Bouches-du-Rhône sur celle question du concours qui offre
Les propositions Rondard et Chapplain devraient avoir pour
tant d’intérêt et qui est si diversement interprétée. Après une
résultat de provoquer, en faveur du corps médical, l ’application
courte discussion, l’assemblée adopte les conclusions formulées
des principes économiques modernes qui ont régénéré notre
de la manière sunante par M. le docteur Chapplain :
époque et qui créeraient aussi pour les médecins une situation
1° Les grades universitaires accordés parles facultés présen
prospère. Puisse le conseil général tenir compte du vœu que
tent des garanties suffisantes de savoir pour l’exercice normal
vous avez émis sur cette importante matière d ’où dépend, à
de la profession médicale, soit dans les administrations, soit
mon sens, l ’avenir de l ’association générale.
dans la clientèle civile ;
Malgré ces heureux résultats dont il est permis de s’enor
2° Le concours doit être le mode par lequel les prétendants
gueillir et dont pour ma part je suis fier, tout n’est pas encore
pour le mieux ; il reste beaucoup à faire. La vie des sociétés est
comme celle des individus;
vila in motu. La lutte et les combats
(1) Nous renvoyons au prochain numéro la publication du travail de
M. le docteur Chapplain
�i:;o aux places de professeurs, agrégés dans les facultés de profes
lard est nommé avec cinq voix de m ajorité; M. Blanchard est
seurs suppléants dans les écoles préparatoires, de médecins ei
nommé trésorier à l’unanimité des sulïragos.
chirurgiens-adjoints des hôpitaux, témoigneront de leur apti
tude;
5° Les titulaires pour les fondions plus élevées dans les
facultés, les écoles préparatoires, les hôpitaux seront choisis
parmi les professeurs agrégés ou suppléants, les médecins el
chirurgiens adjoints, ayant subi I épreuve du concours,
On passe à l’ élection des douze membres conseillers. Sont
élus, dans l’ordre suivant : MM Chapplain, Broquier, Gasquet,
Verne, Candolle, Fabre, M artin, professeur honoraire; M illre,
Mérentié, Alexandre Martin, Combalat, Pirondi.
La séance est terminée par la nomination du Comilé de
rédaction du journal I
Union Médicale clc la Provence.
Sont
M. Broquier donne ensuite lecture d'un projet de règlement
élus : MM. Pirondi, Fabre, Chapplain en qualité de membres
d’ordre intérieur, avec articles additionnels il nos statuts, dont
de la commission administrative ; Bourgarel, Ménécier el Isnard
M. le secrétaire a parlé dans son compte rendu. Ce règlement
choisis en dehors de cette commission.
est lu, discuté el adopté article par a rticle : quelques modifica
M. le président fait observer, en levant la séance, que le
tions y sont introduites, la plus importante est celle qui se
banquet annuel, qui a lieu ordinairement à l’ issue de la réunion,
rapporte à la création el a la nomination d ’un secrétaire adjoint,
est renvoyé à des temps meilleurs, à cause de l’épidémie de
la commission administrative se réservait le droit de le nommer,
choléra qui réclame la présence du corps médical ailleurs que
l ’assemblée a décidé qu’elle le nommerait elle-même comme
dans lu joyeuse salle d’un festin.
les autres membres du bureau (1).
On passe alors à la dernière partie de l ’ordre du jour qui
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
indique le renouvellement quinquennal de la commission admi
nistrative.
On vole d’ abord pour les trois vice-présidents :
Nous avons la vive satisfaction d'enregistrer dans nos colonnes
la promotion de M. le Dr Roberly au grade d’ olïicier de la
Légion d Honneur.
M.de laSouchère est nommé vice-président pour l ’arrondis
sement de Marseille ;
M. Rimbaud, pour l'arrondissement d’Aix ;
M. Imbert, pour l'arrondissement d'Arles. Ces membres du
bureau sont nommés à une très grande m ajorité.
Le scrutin s ouvre ensuite pour le secrétaire, le secrétaireadjoint et le trésorier.
M. Laurens est nommé secrétaire à l ’unanimité moins une
voix ; pour la place de secrétaire-adjoint il y a ballottage entre
MM. Villard et Ménécier: à un second tour de scrutin M. Vil (t) Ce règlement, tel qu’il a été adopté par rassemblée, sera imprimé
et distribué à chaque membre de la Société.
— Dès l'apparition de l'épidémie de choléra qui, depuis bien
tôt deux mois, alllige notre cité, el qui a lait jusqu'à cette heure
un m illier de victimes, la Société Impériale de Médecine a
nommé une commis>ion chargée d étudier l’origine et la marche
de la maladie ainsi que les mesures qu’elle pourrait réclamer.
Elle s’est réunie en séance extraordinaire le 9 septembre dernier,
pour entendre la lectine d un rapport sur ces graves questions.
Cette fois comme toujours, le corps médical fait dignement son
devoir ; indépendamment de la mort du Dr Clerc Vigneron, il a
eu à déplorer la perte de M. Mathieu, jeune interne de I hôpital
de la Conception, qui, le 6 septembre, a succombé au champ
d’honneur.
Dans certaines villes d Italie, où le fléau sévit avec plus de
fureur que chez nous, le corps médical compte un plus grand
�—
152
—
—
153
—
nombre de généreux martyrs. C'est ainsi, noos apprend l 'Union
Médicale, que le jeune docteur Jacoli, qui s’était porté au secours
des victimes d’Ancône, a payé de sa vie cette sainte abnégation.
Les docteurs Fabri, directeur de la salubrité maritime, Persichetti,
Slclaniui, Bruscolini, Marchetti, P iccinini, Polloni et Corbisier
ont aussi succombe dans celte ville, victimes de leur dévouement.
A ce martyrologe le corps médical de l'Espagne a ajouté les
noms de MM. Peiro, Ausina et Baldo. Nos journaux de méde
cine doivent inscrire avec respect , dans leurs colonnes, ces
noms glorieux, et les gens du monde, qui n’ont pas toujours
pour notre profession tout le respect qu’elle mérite, doivent se
rappeler que les médecins exposent leur vie pour le soulagement
de leurs semblables.
La marche de Fépidémie sur tout le littoral de la Méditerranée
suggère a Y Union Medirale la rétlexion suivante :
« Si de cet itinéraire de l’épidémie au nord-ouest de la Médi
terranée, l’on rapproche celui qu elle a suivi en sortant de son
foyer prim itif, envahissant successivement tous les ports de la
rive orientale: Damas, Smyrne, Constantinople, Scntari.et tous
les lieux situés sur les deux rives du Bosphore, remontant dans
la Mer Noire jusques sur les rives du Danube, h Galalz et
Braïlow, sans épargner les iles intermédiaires placées sur son
passage, comme Chypre, Malte, où elle sévit avec fureur, et
jusqu au milieu de l'Archipel grec, on ne peut guère se refuser
de voir là un effet de la navigation et comme un témoignage
éclatant de la contagion de cette maladie. »
Voilà en effet ce que nous apprend de plus positif la marche
générale de l’épidémie actuelle.
1 5 S e p t e m h p e - Des bureaux de secours ont été établis par M.
le maire pour assister les cholériques dans les quartiers pauvres. Ce
magistrat s’est adressé à M. le Dr Seux, président de l'Association, pour
le prier de lui indiquer des médecins qui voulussent bion faire ce service.
Une liste d’inscription est ouverte dans ce but au domicile de M. Seux;
dés le premier jour, un certain nombre de nos confrères ont répondu à
l appel de M. le maire et de notre président.
MONUM ENT A LAENNEC.
S o u s c r i p t i o n p u b l i é e p a r l'U n io D M é d i c a l e d e la P r o v e n c e .
7Ϩ LISTE.
M. Rondard, de Salon...............................................
40 fr.
Montant des listes précédentes......................................696
Total.............................
Le Comité de liédadion
Harirille. — Imprimerie V u t , nie Thîer», 8.
736 frT
Etablissement d u c o n c o u r s p o u r l ' o b t e n t i o n
des
fo n c tio n » m é d i
cale* (q u e stio n s p r o p o s é e s à c h a q u e S o c i é t é lo c a l e p a r c elle de
Dij oo. — M é m o i r e p r é s e n t é
p a r M . le d o c t e u r C H A P P L A I N
à l ’Assem blée G é n é r a l e d e l ’A s s o c i a t i o n M é d i c a l e des B o u c h e s du R hône, t e n u e à M a r s e i l l e le 7 s e p t e m b r e 1 8 6 5 .
Messieurs,
La Société médicale des arrondissements de Dijon, Beaune
et Sémur, agrégée à l'Association générale, a mis à l'étude
la question de l'opportunité du concours pour les places dont
disposent les différentes administrations en faveur des médecins.
La question du concours est l ’apanage presque exclusil du
corps médical. Quelques professions l’inscrivent bien sur la
porte de leur temple ; mais, quand le seuil en est franchi, l ’a
depte ne rencontre plus cet obstacle devant lui. Celte institu
tion sans cesse réclamée pour les membres du corps medical
semble nous indiquer que l'étude est le but incessant de notre
profession et que celui là seul est digne de porter le titre de
Médecin qui consacre ses veilles aux labeurs de Tintelligence.
Le concours est une institution qui a passionné noire géné
ration, qui a assisté à ces brillantes luttes dont les champions
étaient les hommes les plus illustres parmi nos maîtres. Nous
avons été mis en demeure de traiter de nouveau cette question
considérée aujourd’hui avec plus de c.dm \ acceptons l'in v ita
tion de nos confrères et exprimons librement notre pensée.
On peut considérer le concours à un double point de vue.
Les arguments qui m ilitent en faveur de l’institution du concours sont puissants, alors qu'on le considère au point de vue
philosophique. C’est le médecin dans toute sa puissance, intel
lectuelle, scientifique, gagnant à la pointe de l’épée les positions
officielles qui sont l’ apanage du corps médical ; le concours
arrête l’homme médiocre; s il ne donne point toujours la palme
au plus digne, c’est parmi les plus dignes, les plus méritants
que le choix des juges assurera le triomphe ; la perspective du
triomphe n’excitera-t-elle pas l’émulation parmi ies médecins,
ne deviendra-t-elle pas I origine d ’un travail plus s rie n \, plus
opiniâtre dont proliieront la science et la société ; le concours
enfin n’esl-il pas l ’élément le plus certain de la moralité et de
l’indépendance du corps médical ?
Résumant ses arguments, I honorable rapporteur de Dijon
y
�i r; i —
s exprime en ces termes : Le concours est utile au point de vue
de la fonction- remplie ; utile au point de vue du mérite récom
pensé et des médiocrités écartées ; utile au point de vue des
capacités qu'il fera naître ; utile} moral et honnête puisqu'il
fait justice de l ’erreur et de l intrigue en imposant silence à lo
malveillance.
Toutes les considérations que nous venons d ’exposer nous
paraissent justes et M. Lagucsse les confirme en exposant com
ment les sollicitations remplacent aujourd’ hui le savoir et nous
fait pénétrer dans ces détails intimes dans lesquels la médiocrité,
la bassesse seules peuvent descendre.
«
«
«
«
«
«
«
«
«
« Quel spectacle,dit-il, que celui de toutes les médiocrités, de
toutes les nullités, tout de noir habillées, se pendant aux cloelles de quiconque peut dire un mot en leur laveur, les unes
s'affichant avec impudeur, tant elles sont sûres du succès, les
autres s’abritant obséquieusement sous les dehors d’ une religion quelles profanent ; quel spectacle que celui d’hommes
qui ont du talent et de l ’honnêteté au cœur, contraints par
leurs indignes compétiteurs de se livrer aux mêmes pratiques,
s'ils veulent avoir quelques chances d’arriver, ou de se retirer
de la lutte las et dégoûtés. »
Issu du concours moi-même, j ’ai ressenti le plaisir, la satis
faction de vaincre, alors que la victoire u’élail point rabaissée
par des sollicitations et cependant, Messieurs, quand on y ré
fléchit, quand, descendant des hautes régions des pensées pures,
on arrive a considérer la marche réelle, pratique des choses,
que d obstacles on rencontre et combien se restreint la sphère
du concours.
Quelles seront les places appartenant aux administrations el
qui seront données par le concours ? M. Laguesse ne le dit pas,
mais M. Diday rapporteur de la société de Lyon en donne une
longue énumération.
« Professeurs et professeurs agrégés des Facultés de métle« cine, des Kcoles de pharmacie ; professeurs titulaires, adjoints
<i et suppléants des Ecoles préparatoires ; chefs des travaux
a anatomiques ; bibliothécaires ; prosecteurs, aides d’anatomie,
a de chimie, de botanique ; chefs de clinique ; chirurgiens,
« médecins, pharmaciens, internes et externes des hôpitaux
a civils et militaires, ainsi que des asiles d ’aliénes, des dispen« saires, bureaux de bienfaisance, salles d asile ; médecins des
« prisons, des lycées, des octrois, des chemins de fer, des ligues
« télégraphiques, etc.; médecins aux rapports, médecins des
« épidémies, médecins vaccinateurs, inspecteurs des prosti-
— 155 « tuées, médecins dos eaux minérales, membres du Conseil
« d’hygiène el d«* salubrité, médecins des diverses «associations
« de secours mutuels. »
M. Diday veut le concours pour les places de médecins des
sociétés de secours mutuels ! c’est sans doule pour nous mon
trer que les plus nobles idées, les sentiments les plus purs ont
aussi leurs exagérations.
Jusqu’à ce jour l’idée du concours a été alliée à l’ importance
des positions qu’il confère; c’est le professorat, c’est la carrière
des hôpitaux dans lesquels on livre un vaste champ d’études à
I homme instruit el laboiieux; c’est la consécration de la valeur
de l'homme relativement à la fonction qu’il occupe. Mais crai
gnons de descendre trop bas el de démonétiser une institution
utile.
Je crains que les admirateurs trop grands du concours ne
fassent une abstraction tiop complète des litres universitaires
acquis après un long travail. Nous pouvons ici ne point parler
des officiers de santé, car dans les positions oflicielles il est peu
question de la seconde classe de médecins. Ainsi donc tous les
postulants sont docteurs. Il faut bien qu’aux yeux des adminis
trations qui relèvent de l'E ta l, ces titres conférés par I Etal
aient une valeur. Je comprendrais que dans un pays où la mé
decine est libre, on put demander à des hommes qu’aucun litre
ne signalerait à la conliance de leurs concitoyens des preuves de
leurs connaissances. Mais alors que vous aurez revêtu la robe
doctorale à Paris el à Strasbourg, que vous aurez prêté à Mont
pellier le serment d’ Hippocrate, un nouvel acte probatoire vous
sera imposé pour donuer vos soins à une société de secours
mutuels !
Votre proposition, M. Diday est attentatoire à la valeur du
titre de docteur, elle est la négation des grades qui nous sont
conférés par nos maîtres.
Mais celle exagération dans la pratique des concours offrirait
bien d’autres dangers.
Supposons un jeune docteur venant s’ établir dans notre ville,
ne lui enlevez-vous point I élément indispensable de ses débuts?
On n’arrive point du premier coup à la clientèle riche; c’est dans
la classe ouvrière, c ’est chez le pauvre qu’il sera d’abord appelé ;
mais l oinrier, où est-il ? il est devenu cet être collectif qu’on
nomme société de secours mutuels. Les pauvres, où les trouverat-il? ils sont dans les hôpitaux,ou bien ils sont soignés à domicile
parles Bureaux de Bienfaisance, par la Miséricorde? Vllendez,
direz-vous au jeune docteur, qu’un concours signalant une
vacance, vous permette d ’user de votre litre de médecin.
�-
156
—
Si nous poursuivons encore cetle élude, ne trouverons-nous
pas beaucoup de qualités nécessaires au médecin qui ne ressor
tissent pas du concours. Croyez-vous que les connaissances les
plus étendues doivent constituer le meilleur médecin ? Qui ne
sait qu'un de nos maîtres les plus savants, les plus illustres, un
des opérateurs les plus remarquables de notre époque, avait
une pratique proverbialement malheureuse. L ’ exercice de la
médecine ne compte point seulement la connaissance du dia
gnostic, de l ’anatomie pathologique, de la thérapeutique, il
comporte des chapitres nombreux qui n’ont point leur para
graphe spécial dans nos livres et qui comptent pour beaucoup
dans le salut do malade. Les soins assidus, intelligents, le tact
médical, l ’amour du malade, la moralité dans la pratique, etc.
Quel est celui d'entre nous qui n’a été frappé des remarques
pleines de justesse qui lui ont été fournies par un médecin très
secondaire et que ce médecin avait puisées non pas dans les
livres, mais dans l’étude de la nature. Et cependant, h ceux-là
vous fermerez l'accès aux positions même les plus modestes,
car ils seront impropres au concours.
Ne faut-il pas plus de moralité, d’attention au médecin visi
teur des filles que de science réelle? Etes-vous bien certain
qu'un ju ry scientifique fasse le m eilleur choix? Certes, je pré
férerais au savant l’homme imbu de la dignité, de la haute
importance des fondions qui lui sont dévolues.
Oh ! je sais bien que la science est le plus souvent alliée â la
dignité du caractère, aux nobles qualités du cœur; mais, à celui
qui possède suttout ces dernières, ne fermez pas tout accès et
latssez-lui exercer son ministère sans que la barrière du con
cours vienne se présenter devant lui.
Le concours serait certainement favorable aux médecins des
sociétés de secours mutuels, mais comment pouvez-vous ad
mettre que ces sociétés abdiqueront leur indépendance en votre
faveur? Vous leur refuserez le pouvoir de choisir elles-mêmes
leurs médecins ! Alors qu’un jeune docteur sera connu dans
une société, vous ferez violence à ses sympathies et vous lui
imposerez le concours? Quelle sera la position du médecin issu
de cette institution? Sera-t-il inamovible? Vous refuserez à
celte collection d’individus le pouvoir que chaque associé pos
sède individuellement de changer son médecin et de réclamer
les soins d’un autre? Poser de semblables questions, n’est-ce
pas les résoudre dans le sens des errements actuels ?
Nous aurions encore bien d’autres objections h faire à M.
Diday, relativement à la généralisation du concours ;'nous ne
lui parlerons point de celte institution des écoles préparatoires
—
157
—
en jurys permanents pour toute leur circonscription. A -t-il bien
réfléchi au nombre considérable d’administrations, de sociétés
de secours qui sont du ressort de l ’école de Lyon ? Pense-t-il
qu’ il restât un temps bien long aux professeurs de cette école
pour s’occuper de leurs affaires particulières, de leur clientèle ?
Et si je réponds à cette question par l'affirmative, c’est qu'il me
reste une dernière objection à faire valoir. Ce concours que
vous réclamez cesserait bientôt, parce qu’il ne se trouverait pas
de candidats pour aller disputer des places que l’on n’accepte
que parce qu’a côté de l ’homme intelligent il y a l’homme ma
tériel qui a des besoins à satisfaire, et parce qu’il est indispen
sable à beaucoup de nos confrères de trouver dans un travail
ingrat, opiniâtre, mal rémunéré, les moyens d’équilibrer les
deux colonnes de leur budget.
Mais ce n’est point au rapporteur de Lyon que nous avons
à répondre. Sachons lui gré même de ses écarts qui témoignent
de la noblesse de ses sentiments, qui honorent notre profession;
mais revenons à la question et exposons nos principes.
Le concours doit être établi dans toutes les positions médi
cales où on réclame, de la part des médecins appelés à les oc
cuper, des qualités particulières, des aptitudes dont la pos
session n’est point démontrée par les grades conférés par les
Facultés.
Je ne parlerai point ici de celte jeunesse qui se presse dans
nos écoles ; il ne saurait y avoir de doute relativement au mode
d’après lequel doivent être données les places d’externes, d’in
ternes des hôpitaux,de chefsdeclinique, de prosecteurs, d’aides
d’anatomie, etc. Ne trouvons-nous pas ici, dans le cas dont
je vous parlais tout h l’heure, d’individus briguant une position
déterminée et qui doivent démontrer qu’ils sont aptes h en
exercer les fonctions. Ici, pas de titres antérieurs, pas de diplô
mes ; c’est au concours h nous montrer quels sont les jeunes
hommes qui pourront être utiles dans les hôpitaux, les amphi
théâtres, etc.
Mais, alors que la Faculté nous aura créés docteurs, quels
seront ceux auxquels la société réclamera de nouveaux titres?
A nos yeux, ce seront ceux qui voudront s’ élever à la dignité de
maîtres, auxquels on conférera le droit de parler, ou de servir
de modèles aux élèves, k la nouvelle génération qui vient s’ins
truire dans les hôpitaux, dans les écoles.
Le concours doit être réclamé pour les professeurs des Fa
cultés et des écoles préparatoires, pour les médecins et chirur
giens des hôpitaux. Je les place sur le même rang, car si les
professeurs ont pour mission plus spéciale d’enseigner, cetle
�—
158
—
même mission est dévolue au corps médical et chirurgical des
hôpitaux : d'un côté, c'est par la parole que l ’enseignement se
fait ; de l’autre, c’est par l’exemple.
Tontes les objections que l’on peut faire au concours s’effa
cent quand on se renferme dans le cercle restreint que nous
venons d’indiquer.
Le professorat, la plus haute expression des devoirs imposés
au corps médical, comme il est aussi la plus noble des fonctions
h laquelle un médecin puisse aspirer, réclame de l’ homme qui a
l ’ honneur d'y prétendre des qualités, des connaissances qui
maintiennent la fonction à la hauteur où l ’opinion publique
l ’élève.
Le concours doit fournir la preuve des connaissances des
candidats. La science dont on doit donner la preuve n’est [dus
celle qui est suffisante pour constituer un médecin instruit, un
praticien honorable. Il faut apprendre aux élèves tout ce que la
science a acquis ; autant que possible ne rien laisser dans l’om
bre, car votre parole est une semence dont vous ne connaissez
pas la puissance. Combien d’idées nouvelles ont leur point de
départ dans l’ exposition de tel point de la science dont le maître
n'appréciait pas la valeur !
Ce n’est point assez de la science, il faut encore un jugement
sur qui connaisse le fort et le faible de ce que l’on enseigne, il
faut une critique habile qui expose avec beaucoup de lucidité ce
qui doit être admis dans la science et ce qui doit en être rejeté.
Quelle institution plus que le concours fera apprécier la faci
lité d'élocution si indispensable à celui qui expose les doctrines
scientifiques devant la jeunesse de nos écoles.
Une dernière considération doit faire réclamer le concours
pour le professorat. C’est le respect, la considération si néces
saire des élèves. Les jeunes gens qui nous entourent , qui vien
nent assister a nos leçons, qui reçoivent de nous les principes
de notre science et de notre art, sont aussi les premiers juges de
leurs maîtres. Le professeur entouré de son auditoire n’ est point
toujours sûr de sa sympathie; la faveur populaire n ’est point
acquise à tous les hommes qui s'adressent à la jeunesse. Une
foule de causes peuvent la leur donner ou la leur ravir, mais
ce qu’il faut que possède le professeur, c’ est le respect de ses
élèves, et ce respect, il l ’obtiendra alors même que par son
caractère,sa sévérité ou d’autres circonstances il aurait perdu la
popularité, quand, issu du concours, il aura donné les preuves
indispensables de sa valeur scientifique.
Il ne faut pas une élocution brillante au corps médical des
hôpitaux ; il n ’est point appelé à l ’enseignement par la parole,
159
—
mais il ne lui faut pas moins de vastes connaissances, un
jugement sain , une habileté très grande , soit par le tact
médical, soit par la pratique des opérations et tout ce qui cons
titue la vie journalière des hôpitaux. A lui. encore, le respect
des élèves, leur confiance. Malheur au médecin qui ne ren
contre autour de lui que le doute ou la critique! A ceux-lh,
encore, demandez les preuves de leurs connaissances, imposez
le concours.
Nous demandons le concours pour les professeurs des facul
tés et des écoles préparatoires, pour le corps médical des hôpi
taux ; mais ce concours, h quelle époque de la carrière prol'essôrale doit-on le placer ?
Nous adoptons pleinement les vues de l’honorable rapporteur
de Dijon. Comme lui, nous voudrions que le concours ne fût
institué que pour les fonctions secondaires, pour les places
de professeurs agrégés dans les facultés, de professeurs sup
pléants dans les écoles préparatoires, de médecins et de chirur
giens-adjoints dans les hôpitaux. Les places hiérarchiquement
supérieures devenues vacantes seraient alors attribuées par
l’élection à ceux qui auraient montré, par des épreuves suffi
santes, qu'ils sont dignes de les remplir.
Si je ne craignais de m ’étendre beaucoup trop loin, il y aurait
à se demander si ces luttes si remarquables auxquelles nous
avons assisté, alors que les places de professeurs étaient don
nées au concours dans nos facultés, ont été réellement utiles
pour la science, l'enseignement, pour les concurrents euxmêmes.
Quand, arrivé au summum des connaissances humaines,
l’homme le plus savant doit songer a son avenir dans une
lutte dont les péripéties sont incertaines, pensez-vous qu’il
songe beaucoup à la science? Croyez-vous que les Blandin,
les A. Berard , etc., ces victimes heureuses du concours,
n’auraient pas donné plus a la science si le.travail incessant de
la lutte leur avait laissé la libre disposition de leurs facultés et
de leur temps, Je parle la des vainqueurs ; mais combien sont
demeurés dans l’arène et qui, parce que le présent leur a trop
demandé, n’ont rien laissé qui fasse passer leur nom a la posté
rité. Je me souviens de l’ un de ces tournois scientifiques dans
lequel douze champions, armés de la science la plus solide, lut
tèrent avec la plus grande vigueur, avec le plus v if éclat, aux
applaudissements des spectateurs émerveillés. Ils étaient la
douze athlètes auxquels la faculté aurait pu largement ouvrir ses
portes. 11 ne devait, y en avoir qu’un d’élu : co fut Blandin qui
avait usé son existence dans ces luttes et qui ne devait pas jo u ir
�—
160
longtemps de son triomphe. Tous ces concurrents qui avaient
été vaincus et qui tous méritaient le triomphe, combien ont été
moissonnés dans la force de l’âge, usés avant l'heure par un
travail surhumain ! Ce travail, en dehors du brillant de la lutte,
du petit nombre de spectateurs qui ont applaudi et se souvien
nent, ce travail, dis-je, a-t-il été bon, utile ?
A côté de ces luttes stériles pour la science, combien sera plus
profitable le travail résultant des goûts, des éludes de l’homme
qui sait que ses travaux, ses productions lu i seront utiles pour
l'avenir. Que le travail soit toujours l’élément du succès, mais
que ce travail soit utile et ne soit pas renfermé dans une voie
fatale dont le parcours use l ’homme et ne profite pas à la
science.
Mais sans nous élever aussi loin, permettez-moi de jeter un
coup-d’œil rapide sur les exigences de notre position. Nous
sommes a Marseille sur un théâtre moins vaste que ne l'est la
capitale de la France. Les positions médicales auxquelles nous
pouvons prétendre sont plus modestes. Il ne peut y avoir parmi
nous de médecins qui se livrent exclusivement au culte de la
science. Dans notre grande cité, notre existence, notre temps
sont employés presque tout entiers à la clientèle civile. Si dans
les débuts de notre pratique, nous pouvons sérieusement réunir
les matériaux d’un concours, cela ne devient plus possible,quand
nos journées entières et souvent une partie de nos nuits sont
consacrées au service de l ’humanité. 11 faut donc que la lutte se
présente au moment où il est possible de colliger les travaux
pour y prendre part.
Loin de nous la pensée de fixer un terme aux études du mé
decin. Son existence est une vie incessante de labeurs et il serait
coupable s’il n’apportait pas dans l’exercice de sa profession la
connaissance de tout ce qui peut être utile au malade et a l’huma
nité, mais arrivé, si je puis m ’exprimer ainsi, à l ’âge mûr de la
vie médicale, le médecin ne d o it-il pas plutôt cherchera faire
profiter ses concitoyens de ses recherches, de ses observations,
et doit-il renfermer son activité dans ses études souvent stériles
du concours.
Telles sont les idées qui nous ont été suggérées en réfléchissant
froidement, sans entrainement comme sans prévention, à cette
question sur laquelle on demande votre opinion.
J ai l ’honneur de proposer à votre approbation les conclusions
suivantes :
1° Les grades universitaires accordés par les facultés présen
tent des garanties suffisantes de savoir pour l’exercice normal de
—
161
la profession médicale, soit dans les administrations, soit dans la
clientèle civile ;
2° Le concours doit être le mode par lequel les prétendants
aux places de professeurs agrégés dans les facultés, de profes
seurs suppléants dans les écoles préparatoires, de médecins
et chirurgiens adjoints des hôpitaux, témoigneront de leur
aptitude;
3° Les titulaires pour les fondions plus élevées dans les
facultés, les écoles secondaires, les hôpitaux seront choisis
parmi les professeurs agrégés ou suppléants, les médecins et
chirurgiens adjoints ayant subi l ’épreuve du concours.
Q ue lques m o t s s u r les a f fu s io n s e t l o t i o n s f r o i d e s ; l e u r s
effets
p h y s i o l o g i q u e s ; l e u r e m p l o i p a r t i c u l i e r d a n s les p y r e x ie s .
[Suite et fin.)
On a observé depuis longtemps que certaines maladies ren
daient l’économie plus apte a recevoir certains médicaments.
Tel agent qui administré à l’étal sain amène des troubles fonc
tionnels considérables peut, dans certains états morbides, être
donné à dose très élevée sans qu’il en résulte aucune consé
quence fâcheuse. On dit, dans ce cas là, qu’ il y a tolérance.
Rasori, par exemple, donnait, dans la pneumonie, jusqu’à
4 grammes d’émétique dans les vingt-quatre heures. Sans
atteindre celte dose, nous avons pu voir naguère M. Giletle
administrer dans les chorées graves jusqv’à 16'20 de tartre
slibié, et ce médicament était parfaitement toléré par l’économie
et pouvait être absorbé sans agir aucunement sur le tube
digestif.
Qui ne sait que dans le tétanos on a donné 6, 10, 20, 50
grammes, et même (dose énorm e!) 50 grammes d’extrait
d’opium sans produire de narcotisme marqué?
Allons plus loin et examinons en détail l’action d’un médica
ment, de l ’émétique, par exemple.
Le sel donné à l'intérieur agit de deux manières : sur le tube
digestif, il produit une irritation locale qui amène dans certains
cas une dérivation salutaire; sur l’innervation, il exerce un effet
sédatif et hyposthénisant. De nombreuses expériences ont
prouvé que 0Kr 10, 0Kr 20, 0*r 50 de tartre stibié amènent le plus
souvent des vomissements et de la diarrhée; à mesure qu’on
�—
162
—
élève les doses et qu’on atteint 0 r 60, 1"% Dr 20 d’émétique,
les troubles digestifs augmentent d’intensité.
Qu’observons-nous, cependant, lorsque nous traitons la
chorée par la méthode de Gilette ? Nous constatons d’abord que
certaines fondions nerveuses sont épouvantablement exagé
rées : nous donnons 0^50, 0’r60, 08'90, l g,20 d’émétique, et
très souvent aucun trouble digestif ne se présente ; pas de
vomissements, pas de diarrhée. La première action de l’émé
tique, son action directe sur le tube intestinal, paraît complè
tement annihilée au profil de son action secondaire sur le sys
tème nerveux.
Et, en effet, quel résultat aurait produit dans ce cas le tartre
stihié s’il avait agi comme vom itif ou comme purgatif? L’irrita
tion du tube intestinal aurait empêché (ou du moins diminué
considérablement) l’absorption du remède et par conséquent la
seconde action de l’émétique ; son action sédative et controslimulante, la seule urgente et indispensable dans le cas actuel,
n’ aurait pu être obtenue.
Voila donc un médicament que nous avons administré à la
même dose et qui a produit, selon les cas, des effets tout à fait
différents mais parfaitement en rapport avec l’indication théra
peutique du moment.
Ce fait et d’autres de même nature ont permis d’établir
(résultat important pour nous et qui explique la longue digres
sion dans laquelle nous venons de nous engager) que certaines
affections rendent l ’économie susceptible de choisir , en quelque
sorte, parmi les différents effets d ’un médicament celui qui
convient le mieux à la maladie présente. Nous croyons qu’on
-peut soutenir celte opinion sans avoir besoin de spiritualiser
la nature médicatrice ni de recourir h 1 intervention plus ou
moins mystérieuse du principe vital. Apercevoir dans les faits
dont nons venons de parler des tendances secrètes de la nature,
des mouvements occultes et inexpliqués est, à notre sens,
compliquer inutilement des questions que I on peut envisager
sous un point de vue beaucoup plus simple.
N ’est-il pas certain que les maladies peuvent modifier d’une
manière plus ou moins profonde la texture de nos organes?
N ’est-il pas certain que les agents thérapeutiques (au moins
la plupart d’ entre eux) se comportent de même et exercent
sur les molécules organiques une action parfaitement ap
préciable ?
N ’est-il pas logique de dire que tel organe modifié d’une
certaine façon par la maladie sera singulièrement apte à tolérer
un médicament qui devra produire sur cet organe une modifi
cation tout opposée? Et si ce médicament peut amener dans
l’économie deux effets tout à fait différents, n’est-on pas auto
risé à penser qu’il agira dans un sens ou dans l’autre, selon la
nature de la modification introduite par la maladie dans nos
organes?
Cette hypothèse nous paraît suffisante pour expliquer les
faits qui précèdent. Elle ne peut, il est vrai, être démontrée
comme un théorème de géométrie, mais il nous semble, du
moins, quelle ne contient rien de contraire ni h la raison ni a
ce qui nous est révélé par l’observation des faits.
D'après celte manière de voir, si les affusions froides ont agi
comme stimulant dans le choléra, comme sédatif dans certaines
fièvres typhoïdes, ce résultat, en apparence si contradictoire,
doit être attribué a la différence des modifications organiques
produites par ces deux maladies, changements qui prédisposent
nos organes à subir telle action thérapeutique ou à repousser
telle autre.
Ajoutons que les affusions froides ne constituent pas, a
proprement parler, une médication tonique : elles sont surtout
stimulantes et elles doivent cette propriété h l ’action qu’elles
exercent sur la circulation. Ce moyen a réussi dans le choléra
parce que, dans celte maladie, la peau est sèche, la tempéra
ture du corps abaissée, la circulation sanguine prodigieusement
ralentie; le froid, en produisant une réaction salutaire, rétablit
les fonctions de l ’enveloppe cutanée, excite la circulation et ra
mène la chaleur. Mais, si l’on faisait usage d’ un pareil moyen
pour stimuler le système nerveux, si on l’employait, par exem
ple, dans ces fièvres typhoïdes h forme adynamique, accompa
gnées d’une prostration considérable des forces, nous croyons
qu’on marcherait à l ’opposé du but qu'il s’agirait d’atteindre et
qu’on s’exposerait h de fâcheux accidents.
En résumé, les affusions froides nous paraissent pouvoir agir
de plusieurs manières différentes :
Effet stimulant sur la circulation.
L En rappelant une éruption à la peau ;
2° En augmentant la chaleur du corps par l’activité imprimée
h la circulation ;
3° En excitant la sueur et rétablissant les fonctions de l ’en
veloppe cutanée ;
4° En dégorgeant les organes intérieurs et diminuant les
congestions viscérales.
Effet sédatif sur le système nerveux.
5° En déprimant le système nerveux trop fortement surexcité.
�—
164
—
6° En soulageant le malade par l’abaissement de la chaleur
du corps.
Quand devra-t-on employer les lotions froides? — Disons
d’abord, connue nous l’avons fait observer en commençant, que
ce traitement étant, par sa nature, puissant et énergique, doit
être employé avec prudence. Ce premier point établi, il ne nous
semble pas difficile de déterminer les circonstances qui néces
sitent l'emploi de cette médication. Les indications qu’elle peut
remplir se déduisent d’ailleurs naturellement de ses effets
physiologiques.
Les pyrexies qui peuvent être modifiées avantageusement
par les affusions froides sont les fièvres éruptives et la fièvre
typhoïde.
Fièvres éruptives. — C’est surtout h la scarlatine qu’a été
appliqué le moyen dont nous parlons. L ’emploi de cette mé
thode nous paraît indiqué dans les deux circonstances suivantes:
Quand la scarlatine s o rt: 1° mal, lentement, par places;
quand elle s’accompagne de symptômes généraux graves (fièvre,
délire, adynamie). Dans ce cas, il y a urgence à rappeler l’érup
tion vers la peau.
2° Quand, par le fait de la violence de l’éruption (cette der
nière se faisant d’ailleurs complètement et le corps étant d’un
rouge cramoisi), la peau est sèche et brûlante, le délire fort, la
fièvre intense. Il s’agit alors de calmer le malade et de diminuer
autant que possible la chaleur du corps et l'excitation nerveuse.
Nous avons vu que les lotions froides remplissaient parfaite
ment ces deux indications.
Ce traitement qui est si avantageux dans certaines scarlati
nes, convient beaucoup moins à la variole et à la rougeole.
Dans la variole, en effet, la maladie n ’est point, comme dans
la scarlatine, limitée aux éléments les plus superficiels de la
peau ; les symptômes sont en général plus redoutables, l'écono
mie est plus gravement atteinte, Lintoxication est plus pro
fonde. N ’oublions pas, d’ ailleurs, que cette médication déprime
le système nerveux et, dès-lors, ne peut être employée qu’avec
une extrême réserve dans une affection comme la variole carac
térisée par un état sceptique qui a pour effet de plonger l’indi
vidu dans une adynamie plus ou moins grande.
Pour ce qui est de la rougeole, nous n’hésiterons pas h dire
que les lotions froides seront presque toujours contre-indiquées
car cette maladie s’accompagne, dans la plupart des cas, d’une
bronchite intense, voire même (ce qui est très commun chez
les enfants) de noyaux pneumoniques, complications qui pour
raient être singulièrement aggravées par l’ emploi du froid.
165
—
Fièvre typhoïde. — Si l ’on employait indistinctement les
affusions froides dans tous les cas de fièvre typhoïde, on pour
rait faire beaucoup de mal. Ici, encore, comme dans la scarla
tine, il faut savoir distinguer, et le praticien doit s’ efforcer,
avant tout, de bien saisir l'indication, précepte qui peut résu
mer en lui seul toutes les lois de la thérapeutique.
Si un malade atteint de fièvre typhoïde grave a la peau sèche
et mordicante, de vives douleurs de tête, de l’agitation et du
délire ; si la fièvre est forte et en même temps le pouls relevé ;
si le sujet est jeune et vigoureux ; si, surtout, la bronchite n’est
pas intense, nous croyons que les lotions froides sont indiquées.
Sous l ’influence de ce moyen, le malade sera soulagé et l’on
verra les symptômes que nous venons de signaler diminuer
notablement.
C’est donc essentiellement contre l’état aigu qu’agissent les
affusions froides.
Pourra-t-on en faire usage lorsque l’adynamie sera très pro
noncée et la prostration des forces extrême? Nous ne le pensons
pas. Nous avons vu plus haut que les affusions froides pouvaient
produire de très bons effets stimulants, mais dans le cas où il
fallait exciter la circulation et non lorsqu'il y avait urgence a
agir sur le système nerveux. A notre sens, un état adynamique
très prononcé sera une des conditions qui conlre-indiqueront,
de la manière la plus absolue, l’emploi des lotions froides.
Ici se présente une question que nous ne devons pas passer
sous silence. L ’adynamie du malade, avons-nous dit, doit em
pêcher le praticien de se servir des affusions ; comment se
fait-il donc qu’on emploie ce moyen dans les scarlatines graves,
puisque ces maladies s’accompagnent le plus souvent d’un
état adynamique manifeste?
Pour répondre à celte objection, il sulïit de savoir différencier
l’adynamie proprement dite de ce que les anciens désignaient
sous le nom d'oppressio virium ou fausse adynamie.
L’essence de certaines affections est de diminuer la force de
vitalité, de rendre l’économie moins résistante aux influences
externes ou internes, en un mot, de déprimer les fonctions
nerveuses. Si nous ne nous trompons, cet état constitue une
véritable adynamie ; c’est ce qu’on observe dans la fièvre ty
phoïde. Un des premiers symptômes de celte maladie est I af
faiblissement du s u je t, et l’adynamie pourra devenir telle
■quelle conlre-indiquera formellement l ’emploi de tous les
moyens capables de déprimer les forces vitales, et en particulier
des lotions ou affusions froides.
�— 160 Dans d'autres cas, les choses se passent tout autrement. Dès
le principe, toute l’économie est fol lement surexcitée, mais les
organes, accablés par la violence du stimulus, éprouvent une
sorte d'engourdissement qui entrave leur jeu physiologique. La
vitalité n’est plus diminuée, comme dans le cas précédent, elle
éprouve au contraire un surcroît d’activité qui empêche
l’ exercice des fonctions et plonge l ’économie dans une sorte de
faiblesse apparente. Ce n’est point la, il est facile de le voir,
une véritable, adynamie : cet état résulte directement d’un
excès de stimulus, et il amène non plus une dépression mais
seulement une oppression des forces vitales. Telle est la fausse
adynamie que I on observe dans les congestions cérébrales,
dans certaines pneumonies intenses, dans les paralysies qui
dépendent d’un étal inflammatoire, etc. La lièvre scarlatine
grave affecte souvent cette forme. On comprend dès-lors
comment les allusions froides ont pu être employées avec succès
dans celte dernière maladie. Traiter un pareil étal par les toni
ques serait eu réalité (si l’on veut bien nous passer celte ex
pression) verser de l'huile sur du feu. Les allusions ou lotions
froides, au contraire, seront parfaitement indiquées dans des
cas semblables, car elles tempéreront l ’ardeur du malade, dé
primeront le système nerveux et feront cesser cet état pré
tendu adynamique qui n’est que le résultat d’une stimulation
exagérée.
Dans tout ce qui précède, nous avons employé indifférem
ment les mots de lotion et affusion. Ces deux termes ne sont
cependant pas synonymes et indiquent deux procédés différents.
Voici comment se pratiquent les lotions froides : le malade
étant couché sur le dos et complètement nu, on passe sur la
surface antérieure du corps une éponge imbibée d’eau h 20°,
puis on met le sujet sur le ventre et on recommence la même
opération sur le plan postérieur. Cela fait, le malade est enve
loppé dans une couverture. La lotion dure une minute et on
peut la renouveler trois, quatre, six fois dans la journée.
Pour pratiquer une affusion, on place le malade dans une
baignoire vide et on laisse tomber sur lui, d une certaine
hauteur , le contenu de deux ou trois brocs remplis d’eau
à 20°. Cette opération ne dure pas plus longtemps que la
première, et ou peut également la répéter plusieurs fois par
jour.
La lotion et l’affusion produisent-elles des effets absolument
smblables, et peut-on employer indifféremment l’un ou l’autre
de ces procèdes? L’affusion est plus énergique que la lotion ;
elle est plus perturbatrice, elle révulse plus vigoureusement
vers la peau et entraîne a sa suite une dépression nerveuse plus
forte et plus prolongée. Ceci ne nous surprendra pas si nous
réfléchissons que l’affusion résume en elle les avantages de la
lotion et de la douche et qu’elle agit à la fois en refroidissant la
peau et en la fouct'onl vigoureusement. Mais, en somme, on
peut dire que les résultats obtenus au moyen de l’ affusion ou de
la lotion sont de même nature ; il n’y a entre ces deux méthodes
qu’une différence de plus ou de moins.
Conséquemment, toutes les fois qu’il s’agira de produire une
forte révulsion vers la peau, pour exciter, par exemple, une
éruption qui se fera mal, on donnera la préférence aux affu
sions. Quand, au contraire, on voudra seulement rafraîchir le
malade ou produire une sédation momentanée, on emploiera
les lotions. Cette dernière méthode conviendra généralement
mieux aux enfants, aux femmes, aux individus faibles et déli
cats pour lesquels l’affusion constituerait un traitement trop
énergique.
C'est ainsi que sur les quatre cas cités précédemment les
lotions ont été employées trois fois : chez un jeune homme
d’une faible constitution, chez une femme en couches et chez
un jeune enfant de quatre à cinq ans. Un seul malade, homme
robuste et vigoureux, a été soumis aux affusions froides qui ont
produit chez lui les meilleurs effets.
Nous pouvons résumer en quelques mots ce travail et poser
les conclusions suivantes :
1° Les affusions et lotions froides constituent une médication
puissante et énergique que le praticien ne devra pas craindre
d’employer dans certains cas déterminés ;
2° Cette médication n'est nullement empirique , elle est, au
contraire, très rationnelle et rem plit des indications positives ;
o° Les pyrexies dans lesquelles on se trouvera bien de son
emploi sont spécialement la scarlatine et la fièvre typhoïde ;
4° Les principales indications que l ’on peut remplir dans ces
deux maladies, à l ’aide des affusions ou lotions froides, consis
tent h rappeler une éruption a la peau ou a calmer la violence
d’un état aigu ;
5° Deux circonstances conlre-indiquent formellement l ’em
ploi de ce moyen : ce sont l’existence d’ une grave complication
thoracique ou la trop grande adynamie du malade.
6° L’affusion est plus énergique que la lotion. On emploiera
la première de ces deux méthodes lorsqu’on voudra rappeler
une éruption à la peau et qu’on aura affaire h des sujets forts et
vigoureux ; dans tons les autres cas, on devra donner la préfé
rence aux lotions.
V. S eux fils .
�—
168
169
—
—
É P ID É M IE D E C H O LÉR A D E 1 8 6 5 .
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
Les M é d e c i n s
Dimanche dernier, 8 octobre, le Corps Médical de Marseille
•accompagnait à sa dernière demeure un de ses membres, le
docteur Honnoraty.
Honnoraly est mort sur la brèche ; c’est un nouveau martyr
du dévouement médical. Depuis quelques jours déjà il éprou
vait la diarrhée prodromiqne, mais ses malades l ’attendaient et
il s’est donné à eux jusqu’à la fin. Le -4 octobre, les symptômes
du choléra confirmé le forçaient à s’aliter ; le 6 au soir, malgré
les soins qui lui furent prodigués par ses confrères, il rendait
le dernier soupir.
Depuis la mort du docteur Clair-Vigneron et celle de
M. Mathieu, notre Corps Médical n’avait plus fait de pertes, et
nous espérions avoir payé tout notre tribut à celle épidémie qui
est bien près de quitter Marseille. Mais, chez nos médecins, à
l ’infiuence épidémique vient s’ajouter celle de fatigues prolon
gées; aussi plusieurs d’entre eux on t-ils été, dans ces derniers
temps surtout, plus ou moins dangereusement malades. Nous
en avons vu qui, atteints par le mal, se sont jetés dans une
voilure pour aller soigner leurs cholériques. Honnoraty a été
du nombre de ces généreux imprudents ; soldat blessé, il a
combattu jusqu’à ce qu’un coup mortel l ’ait renversé sur le
champ d’honneur.
— A Toulon, le docteur Nicker, aide-major, et le docteur
Tourretle, accouru de Paris pour soigner Jes cholériques, ont
payé de leur vie leur noble dévouement.
— L’épidémie décroît rapidement dans toute la Proveuce. A
Marseille, des dixjbureaux de secours qui avaient été établis et
qui, grâce au zèle du Corps Médical, et en particulier des Mem
bres de l’Association, ont rendu d’ importants services, six ont
été fermés, parce qu’ils n ’avaient presque plus de malades.
Dieu veuille que le fléau épargne Paris, où, depuis le 22 sep
tembre, l’on compte chaque jo u r quelques victimes !
— Le Congrès Médical de Bordeaux s’est ouvert le 2 octobre.
On comprend que, dans les circonstances actuelles, les Méde
cins de notre ville n’aient pu assister à celle grande et impor
tante réu n io n, pour laquelle ils professent la plus ardente
sympathie.
Le Comité de Rédaction.
Marseille. — Imprimerie Arnaud et Ce, rue S aint-F erréol, 57.
devant
le C o n s e il
M u n ic ip a l
de M a r s e i l l e .
Tout le monde a pu lire dans les journaux de notre ville le
compte-rendu sommaire de l’ une des dernières séances du
Conseil Municipal, séance dans laquelle il a été décidé que l’on
ne donnerait pas de médailles relatives à la dernière épidémie de
choléra. Nous n’aurions pas eu la pensée de discuter la conve
nance et l ’opportunité de cette délibération, nous n’ y aurions vu
peut-être que la volonté d’épargner à la commune une dépense,
quelque minime qu’elle fût. Mais, en présence des motifs qui ont
paru provoquer cette détermination, nous ne croyons point pou
voir garder le silence. Les raisons qui ont été données par
quelques-uns des membres du Conseil, nous ont paru tellement
erronées et basées sur une appréciation des faits tellement in
juste, que nous nous sommes demanJés, si la religion du Con
seil Municipal n ’avait point été surprise et son vote irréfléchi.
Deux propositions principales ont été énoncées:
1* L ’épidémie de choléra de 1865 a été peu importante :
2' La seconde question a été adressée sous forme dubitative
et résolue par la négative, par le vote du Conseil :
Y a -t-il eu des actes de dévouement?
L ’épidémie que nous venons de traverser, et qui n’est point
encore arrivée à son terme, compte, du 23 ju ille t au 15 novem
bre, 1737 décès de choléra et 291 décès inscrits sous les noms
ùecholèrine et diarrhée ; or, dans une période d’épidémie, une
cholérine et une diarrhée qui entraînent la mort doivent être
classées au nombre des affections cholériques, ce qui porte déjà
le chiffre total des décès à plus de deux mille.
En supposant l ’épidémie circonscrite effectivement dans ces
limites (et nous prouverons plus tard qu’ il y a erreur) est-elle
donc bien inférieure, par le nombre des victimes constaté oflîciellement, aux épidémies antérieures?
il
�En 1834, du 11 décembre du 21 avril 1835, Tétât civil a en
registré 865 décès cholériques.
En 1835, du 6 ju ille t au 31 décembre, 2,576 décès cholé
riques.
établissements particuliers, dans lesquels un service médical
spécial fonctionne d une manière permanente, peut-être trou
verons-nous que le choléra de 1865 a pesé plus que ses aînés
sur le corps médical.
En 1849, du 7 avril au 16 novembre, 2211 décès cholériques.
A un autre point de vue, les épidémies précédentes s’étaient
En 1854, du 50 juin au 1er octobre, 2,818 décès cholériques.
concentrées dans un espace beaucoup plus restreint. Jamais la
En 1855, du 25 juillet au 25 octobre, 1,410 décès cholériques.
banlieue n’avait été frappée comme elle Ta été en 1865. Or, les
Nous n'avons pas le chiffre des décès de 1857 qui, si nos
secours à donner sont d’autant plus difficiles que les malades
souvenirs sont exacts, fut inférieur a ceux (pie nous venons de
sont plus disséminés. Ils exigent d’autant plus de peine, pour le
constater.
Mais si l’ épidémie de 1865 a été, au point de vue des décès,
moins importante que celles de 1855, de 1849, de 1854, n’est-
médecin qui les donne, que ceux qui les réclament sont plus
éloignés de son domicile.
Par les considérations que nous venons d’émettre, nous avons
elle pas, au contraire, plus importante relativemeni à sa durée.
voulu démontrer que l’épidémie de 1865 doit être classée, au
Les services que Ton réclame du médecin sont d’autant plus pé
point de vue de son importance, au même rang que celles qui
nibles qu’ils se prolongent pendant une période plus longue. Que,
ont ravagé Marseille, depuis 1834. Mais, quand même elle
passant la nuit au bureau de secours, il ait h donner des soins à
compterait un nombre de victimes bien inférieur, nous sommes
deux cholériques ou à dix, c’est là un surcroît de travail peu ap
loin d’admettre les conséquences qu’on en voudrait tirer. S’il
préciable. Il n’en sera plus de même si, au lieu de passer dix
est une épidémie qui, grâces à Dieu, ait été peu importante,
nuits, il est appelé à en passer vingt.
n’est-ce point celle qui vient de frapper Paris, et dès lors il eût
L ’épidémie de 1834 a duré 152 jo u rs; celle de 1835,117
été conforme aux principes du Conseil Municipal de Marseille,
jours ; celle de 1849,101 jo u rs; celle de 1854, 94 jours; celle
qu’alors que Leurs Majestés l’ Empereur et l’Impératrice se sont
de 1855, 101 jours; celle de 1865, 113 jours. Sous le rapport
rendus à l ’Hôtel-Dieu et à l ’hôpital Beaujon, bien loin de recon
de la durée, elle est supérieure à celles de 1849 et de 1854, qui
naître les services rendus par le corps des internes, en la personne
ont été plus meurtrières.
de deux d’entre eux, ils leur eussent d it: S’il y avait eu dans
L’ épidémie actuelle a présenté quelques circonstances parti
le choléra actuel un nombre de décès semblable à celui de
culières qui élèvent le chiffre de la mortalité relative, et la pla
1832 et des épidémies précédentes, nous vous récompenserions;
cent au même niveau que celles qui l ’ont précédée.
mais l ’épidémie actuelle est si bénigne que vous ne méritez rien.
Elle a pesé d’une manière plus spéciale sur la population civile
Nous ne doutons pas que cette allocution conforme aux prin
et libre. Le nombre des soldats atteints dans la garnison a été
cipes de nos édiles, n’eût pu leur paraître fort équitable ; qu’on
très minime. Les grands établissements n ’ont point donné à l’é
nous permette d’applaudir à la généreuse détermination prise
pidémie l ’aliment qu’ils avaient fourni dans les épidémies précé
par le chef de l ’ Etat et son auguste compagne. Nous y retrou
dentes. L ’ octroi, la douane, les prisons, le pénitencier, etc.
vons les idées généreuses dont la France s’honore.
ont présenté un petit nombre d’atteintes cholériques. Si nous
Mais l ’assertion relative au peu d’importance de l’épidémie
faisons abstraction des sujets décédés qui, dans les épidémies
deviendra bien secondaire si la question, posée par un autre
antérieures, appartenaient à ces administrations publiques, à des
conseiller municipal, peut être résolue par la négative. Y a -t-il
�—
175
—
—
175
—
eu des actes de dévouement? Nous dirons avec le Conseil Muni
administratifs tant qu’on le voudra, ce n ’est point notre affaire.
cipal : il n'y a lieu de récompenser que les services rendus ; lù où
Pour nous, qui n’avons qu’a constater les services rendus pen
aucun service n'a été rendu, il ne peut être question de décerner
dant l’épidémie cholérique, nous les admirons pour leur noble
des récompenses.
conduite, et nous désirons que notre voix soit entendue de tous
Si nous examinons la portée de ces mots : Actes de dévoue
ceux qui ont un cœur qui sent les actes de noblesse et ne mar
ment; nous trouvons que ces actes peuvent être définis de la
chandent pas l’expression de leurs sentiments au taux d’un
manière suivante : Faire plus que votre profession n’exige de
mesquin calcul d’opinion politique.
vous. C’est sortir, dans la vue du bien public, des règles ordi
Mais arrivons à ce qui nous intéresse d’une manière plus
naires de la vie. Ces actes de dévouement seront variables sui
directe à la conduite du corps médical en face de l’épidémie
vant les circonstances particulières qui les réclament. La guerre
cholérique.
demandera des dévouements qui ne sont point ceux que com
Nous ne pouvons préciser les dates, contentons-nous des faits.
porte une épidémie. Quels seront donc les actes, caractérisés
Quand l'épidémie parut prendre un développement plus consi
dévouement, en présence du choléra? Nous allons les parcourir
dérable, M. le Maire s’en émut et réunit une commission pour
et nous verrons alors quels sont ceux qui, à Marseille, ont fait
décider des mesures a prendre. Elle fut composée de MM. Boyer,
défaut en 1865.
Dor, Gasquet, conseillers municipaux,de M. le docteur Roberty
Qu'il nous soit permis de rendre hommage tout d’abord à ceux
médecin des épidémies, de MM. les docteurs Girard et Pirondi.
dont le dévouement est plus remarquable encore par la haute
Il fut décidé qu’il y avait lieu de constituer des bureaux de secours
position qu ils occupent. A Jove principium. Nous avons admiré
dans les points de la ville où l ’agglomération rendait les secours
notre Empereur, allant visiter les malheureux cholériques dans
plus nécessaires. M. le Maire s’adressa à M. Seux, président de
les salles de l ’Hôtel-Dieu. Nous avons été plus vivement touchés
la société locale des Bouches-du-Rhône, et à M. Jubiot, prési
encore, quand nous avons vu, au chevet du lit des malades de
dent de la Société impériale de médecine, les priant de lui dési
Lariboissière et deBeaujon, notre auguste Impératrice qui, pour
gner ceux des médecins qui donneraient leurs soins aux cholé
remplir un noble devoir, a su refouler dans son cœur ces craintes
riques. Ces honorables médecins répondirent immédiatement,
qu'inspire à tous,cet ennemi cruel, invisible, insaisissable, ces
et les bureaux de secours furent constitués avec le personnel
craintes plus pardonnables encore à son sexe.
médical qui lésa desservis. Ils ont ensuite fonctionné jusqu’au
Mais h Marseille, ces exemples illustres n ’ont-ils pas eu des
jour où, l’épidémie diminuant, ils sont devenus inutiles.
imitateurs? Ce que l’Empereur a fait a l’Hôtel-Dieu, et l’Impé
Quand nous rétablissons ainsi les faits, c’est pour démontrer
ratrice à Beaujon, nos autorités ne Font-elles pas fait? N'avons-
qu’il y a eu un service demandé par le Maire au corps médical,
nous pas vu dans les salles de nos hôpitaux M. le Sénateur
au nom de la cité, et qu’ il y a eu un service rendu. Mais on nous
D e Maupas, M. le Général de Division, M. le Maire de Mar
a dit, les médecins font leur métier! Oui, ils exercent leur
seille, M. le Secrétaire Général de la Préfecture, nos autorités
piofession en soignant les cholériques de leur clientèle ; mais
diocésaines, etc.? Nous ne craignons pas qu’on nous accuse de
leur métier, puisque métier il y a, n’est point d’aller passer leurs
brûler de l ’encens en faveur de ces hommes, que leur position
nuits dans les bureaux de secours. 11 y a alors, ce dont le corps
obligeait, en disant qu’ils ont noblement rempli leurs devoirs,
médical a toujours donné des preuves irrécusables, du dévoue
qu’ils ont fait
ment. Est bien aveugle celui qui ne le voit pas.
du dévouement.
Qu’on discute leurs actes
�— 175 —
Les médecins qui desservirent les bureaux de secours, lurent
silence ces jeunes élèves qui viennent dans notre école apprendre
les plus jeunes d'entre nous. Nous dirions que, pour la plupart, ils
les principes de l’art médical, et qui, internes et externes des
taisaient leurs premières armes en présence du choléra, si ce
hôpitaux, ont passé leurs journées et leurs nuits auprès des cho
terrible fléau ne venait nous visiter a des époques aussi rappro
lériques. Ils ont ainsi noblement commencé leur carrière, et qu'à
chées... Ils ont été douloureusement impressionnés parle vote
défaut des éloges des représentants de la cité, ils reçoivent ceux
du conseil municipal. Comme leurs devanciers,ils n’avaient point
de leurs maîtres.
hésité à sacrifier leur repos pour répondre a l’appel du chef de
L ’un d’entre eux est mort sur la brèche. Au moment où le
la cité; mais, moins favorisés ils n’ont pas obtenu, ce que les
choléra parut, il a lla it, appelé par son père, demander un congé
représentants de Marseille avaient toujours accordé : un témoi
à l’administration des hôpitaux. Mais, en présence de l ’épidémie
gnage de reconnaissance.
qui se développait, partir, c’était fuir, et il mourut victime de son
Mais que faisaient pendant ce temps-là leurs aînés? Sans
doute que, profitant de l’époque de l ’année favorable aux voya
devoir. Que l'on nous dise donc ce que c’est que le dévouement
devant cette tombe si prématurément ouverte !
ges, ils étaient allés prendre leurs vacances annuelles, ou bien
Pour ceux qui demandent ce que c’est que le dévouement en
que, sans s’éloigner, ils vont, dans les riantes villas de notre
temps d’épidémie, qu’ils veuillent bien franchir le seuil des
banlieue se reposer de leurs fatigues ou se distraire des tristes
portes de Lhôpital et ils verront la malheureuse victime du cho
impressions qu’ils ont eu à supporter pendant tout une longue
léra entourée de toutes ces personnes pour lesquelles se dévouer
journée? Non, le devoir ne comporte pas ces distractions agréa
est le fait de tous les jours, de tous les instants. Pensez-vous que
bles, c’est une voie de sacrifices. Les villas qu'ils ont été
ces saintes filles qui soignent ces malades, les frottent, respirent
appelés à visiter sont les salles des hôpitaux et les pauvres mai
leur haleine, leurs émanations souvent mortelles, soient insen
sons habitées par la clientèle de la Miséricorde. Nous ne vou
sibles à la crainte? Non, mais leur dévouement n’ en brille que
lons parler ici que des soins officiels.qui ont été prodigués parle
d'un plus v if éclat, et l ’Impératrice avait bien raison et a fait
corps médical. Quel est celui d’entre nous qui n’aurait pas à
d’elles le plus bel éloge, quand, appelée par un malade du nom
fournir sa chronique secrète! Qu’ il nous suffise de dire qu’avant
de sœur, elle a d it : C’est le plus beau nom qu’on puisse me
que la charité officielle eût songé à ouvrir des bureaux de se
donner ici ! Que cette parole reste dans le souvenir de tous, car
cours, aucun malade, riche ou pauvre, n’a manqué des secours
c’est l'apologie la plus remarquable du dévouement.
médicaux, et cela, nous le disons avec orgueil, grâce à notre dé
vouement.
Nous trouvons encore auprès des cholériques ces vénérables
prêtres, q u i, aumôniers des hôpitaux, ont traversé toutes les
Ce n’est point seulement comme médecin prodiguant les se
épidémies qui ont ravagé Marseille depuis 1849. Qu’ils nous
cours que le corps médical s’ est montré dévoué; mais, appelé
pardonnent, dans leur hum ilité, de signaler le dévouement dont
dans les conseils de nos autorités, il a fourni d’utiles indi
ils n’ont eu jusqu’à ce jo u r d’autre récompense que le respect et
cations pour limiter les ravages du fléau par une sage application
la profonde estime de tous ceux qui les ont vus à l’œuvre.
des lois de l ’hygiène.Les avis du Conseil d’hygiène, du conseil
Voilà bien des actes de dévouement que nous signalons, et
de santé, du médecin des épidémies, e tc., ont été certainement
nous en oublions certainement bien d’autres. Aussi, quand après
utiles et ont amoindri la responsabilité de l ’autorité administrative.
avoir parcouru pendant plusieurs mois ce champ de bataille,
Comment, en parlant de dévouement, passerions-nous sous
nous rencontrons tant de sacrifices, tant d'abnégation , nous
�-
176
—
comptons tant de services rendus, nous sommes étonnés de la
Le choléra a lait son apparition dans nos murs au milieu des
question adressée au Conseil Municipal, et nous dirons à l’hono
circonstances les plus défavorables à son développement. L ’his
rable membre : ces actes de dévouement, si vous ne les avez point
torique des épidémies précédentes, les grandes améliorations
vus, c’est que vous n’y étiez pas.
apportées dans la salubrité de notre ville, grâce à l ’abondante
Nous avions donc raison de dire que le vote du Conseil Muni
distribution des eaux du canal ; la métamorphose complète d’ une
cipal était le résultat d’une surprise, qu’il n’avait pas été réfléchi.
majeure partie des vieux quartiers ; l’admirable disposition des
Ne pas décerner de médailles est parfaitement en son pouvoir;
nouvelles rues; l ’éloignement des établissements réputés in
ce ne sont pas des médailles que nous demandons ; mais consa
salubres ; enfin, la dissémination, dans les faubourgs, d ’une
crer, par un vote, cette assertion, qu'il n ’y a pas eu d’actes de
population ouvrière qui se recrute de 36,000 Italiens, autrefois
dévouement, est uu déni de justice contre lequel nous protes
logés sur un même point, semblaient devoir opposer un obstacle
tons. Vous pouvez individuellement, Messieurs, être reconnais
infranchissable h toute implantation épidémique. L ’excellente
sants ou non ; mais, quand vous parlez au nom de la ville de
constitution médicale, dont nous jouissions, ajoutait encore à
Marseille, dont vous avez l’honneur d’être les représentants, il
nos espérances de sécurité. Le chiffre total des décès se trouvait,
ne vous est pas permis d’être injustes.
en effet, en mai et juin de cette année, bien inférieur â celui de
Le Comité de publication.
1864. Les maladies régnantes n’accusaient aucunement, h cette
même époque, une tendance vers les affections gastro-intesti
nales ; nous notions, avec satisfaction la disposition inverse, soit
Au moment où on met sous presse le numéro du journal, on
en ville, soit dans les hôpitaux. M. J dbiot , médecin principal h
nous fait part d’un projet de délibération par lequel le Conseil
l’hôpital m ilitaire, nous communique, â l’appui, le relevésuivant :
Municipal allouerait h la veuve du Docteur H onorati , mort
de l ’épidémie, une pension de 1,200 francs. Nous sommes heu
1865.
1884.
reux de cet acte de libéralité et de justice. L ’émotion produite
par le vote contre lequel nous protestons, n ’a pas été étrangère,
D IAR R HÉE •
croyons-nous, à celte dernière décision.
R e l a t i o n su r l ’é p i d é m i e d e C h o l é r a , d e 1 8 6 5 , à M a r se ille ,
o y s s é n t é r ie
P a r le d o c t e u r C h . M É N É C I E R .
En présence de la récente communication faite à l’Institut
et à l'Académie de Médecine de Paris, par notre confrère le
docteur M aorin, nous nous voyons obligé, dans l’intérêt des
faits, de retracer un rapide aperçu de la marche et des carac
tères du fléau qui, pour la septième fois, vient de visiter notre
belle cité.
( Mai ... 4 un décès.
• ) Juin. • - M
( Juillet. 17
32
C H O L É R IN E .
( Mai—
) Ju in .. .
( Juillet.
2 un décès.
6
1
9
( Mai—
2 un décès.
. ] Juin. . . 2
( Juillet. 7
M
D IA R R H É E .
Mai—
• ] Juin. . .
f Juillet.
3 un décès.
4
8
15
( Mai—
Juin. . .
( Juillet.
O Y S S E N T E R IE j
4 un décès.
4
8 un décès.
16
C H O L É R IN E ..
( Mai. . .. N i a n t .
Juin. . . 5
f Ju illet. 5
10
Cependant, du 11 ju in au 31 ju ille t arrivent, îles pays contaminés du Levant : 21) vapeurs comprenant un effectif de 4,020
�—
—
178
personnes, dont 2,293 passagers et 1,727 hommes d’équipage.
Huit de ces navires se présentant avec patente nette sont aus
179
[ “ Mlle Célesline E .... 9 ans, traverse Nicolas, 2 ; dont le
père est en rapports incessants d’affaires avec Alexandrie;
sitôt admis en libre pratique. Le premier de tous, la Stella, dé
2’ Mme de Cussat, rue Impériale, 18, après avoir reçu un colis
barque, sous la poterne du fort Saint-Jean, 67 pèlerins, hadjis,
d’Alexandrie ; sa demoiselle la suit de très près dans la tombe ;
arrivant delà Mecque; deux, dès leurs morts, pendant la traver
5° M. D ésert , rue Fontaine Rouvière, 54, qui avait travaillé
sée, avaient été jetés h la mer; un troisième succombait, aussitôt
à bord des Messageries en qualité de peintre. La dame Ambert,
à terre, h une dyssenterie chronique. Nous n’ accuserons pas
habitant la même maison, perd aussitôt deux de ses enfants,
exclusivement, comme on l'a fait, ces malheureux pèlerins, de
les 25 et 28 juillet.
nous avoir importé le choléra d’ Egypte à Marseille. Aussi bien
A leur suite nous inscrivons, pendant les premiers jours :
serait-il assez difficile de trouver autour d’ eux le moindre
Quatre marins ; •
Un habitant de la Caserne Gazzino (Douanes) ;
Un homme d’équipe au chemin de fer ;
Un chiffonnier;
Trois personnes attenantes a des blanchisseuses ;
Six autres ayant travaillé à bord des vapeurs, porté des
fait de contagion.
Il nous suffit de constater que, en ju in , plusieurs vapeurs,
ayant patente nette, quoique desservant les pays reconnus in
fectés , ont été admis en libre
pratique dans
nos ports.
Si, depuis, on a pris quelques mesures quarantenaires, on
sait qu’elles ont porté seulement sur le navire et son équipage,
tandis que les passagers émanés des foyers d’infection, se mêlent
chaque jo u r à notre population. (Nous renvoyons ceux de nos
colis ou fréquenté les quais;-
Quinze , enfin , en rapport avec des marins ou autres,
appelés aux nouveaux ports par leurs affaires.
lecteurs qui voudront s’édifier sur la valeur des mesures qua
Ces faits sont-ils assez concluants et persistera-t-on â nous
rantenaires actuellement en vigueur a l ’excellente brochure de
répéter que le choléra s’est introduit chez nous sur les ailes du
MM. les docteurs P irondi et F abre ) (1).
Avec un système aussi déplorable le choléra devait fatalement
bientôt apparaître au milieu de nous.
vent ou a la faveur des amateurs de pastèques, tomates et fari
neux! Notre population aurait-elle plus consommé de fruits et
de pâtes en 1865 que pendant les années précédentes? Dans tous
En effet, le 18 juin, l’ État civil enregistrait le premier décès
les cas, nous aimerions bien qu’on nous dise comment il se fait
de choléra asiatique sur la nommée B lanc Erançoise, âgée de
que le choléra sévit en ce moment a Paris. Dans le département
40 ans, rue Périer, 21, logeant chez elle le docteur A ..., pen
de la Seine, récollerail-oil les melons en automne? Nous le de
sionné du vice-roi d’ Egypte.
mandons au docteur Maurin , bibliothécaire de la Société d’ Hor-
Le mois de juin n’inscrit que quelques victimes. En juillet,
ticulture de Marseille. Faudra-t-il encore s’arrêter â la dénomi
elles sont plus nombreuses et le 23 éclate définitivement l’épi
nation de pseudo-épidénne dont ce confrère a baptisé une ma
démie.
ladie naissante qui, en grandissant, devait décimer dans notre
Trois cholériques succombent rapidement ce jour-lâ :
ville plus de deux mille âmes. Nous comprenons toutefois qu’il
n’ait pu prendre au sérieux une affection qui, entre ses mains,
cédait à 1 administration de quatre gouttes de laudanum!
(4) En vente, chez tous nos libraires, au profit des victimes du
cboléra.
Cependant les praticiens qui ont assisté â la période de 1834
�-
180
—
—
181
—
à 1855 s’accordent tous sur ce point: que le choléra de 1865 ne
celle épidémie, emportent d’autant plus vite le malade qu’il
le cède en rien aux épidémies antérieures. Pendant le mois de
existe peu de symptômes prodromiques.
juin et commencement ju ille t, le choléra , il est vrai, n’a fait
Dans les cas les plus heureux, c’est-à-dire où la guérison
que très peu de victimes, mais ceux qu'il a frappés ont été
est définitive, la durée du traitement réclame toujours un temps
enlevés avec une rapidité effrayante. Ainsi, dans les hôpitaux,
moyen de huit à quinze jours.
on enregistrait, dès le début, plus de quinze cholériques suc
En ville, le génie épidémique ne s’ est manifesté que très tar
combant dès leur entrée dans les salles ou décédés dans les
divement; mais, une fois établi, la mortalité s’en est bien res
voitures qui les avaient transportés.
sentie. Contrairement à ce que l’on avait remarqué dans les
La rapidité avec laquelle le sujet se cholérise n’a échappé
épidémies précédentes, le nombre des décès ordinaires aurait
de même à aucun de nous. Aussi, cette marche imprime-t-elle
beaucoup augmenté pendant ces derniers temps. Toute appré
à celte épidémie un caractère terrible auquel, nous pouvons le
ciation sur ce point nous est impossible, la plupart de nos
dire, on n’était pas habitué.
honorables confrères, ayant omis de désigner le diagnostic sur
D’autre part, les vomissements blancs et la diarrhée ri/.i-
les certificats de décès. En peu de temps, nous en exprimons ici
forme cèdent assez facilement aux médications habituellement
le regret, il deviendra impossible de dresser, à Marseille, la
employées.
moindre statistique médicale.
L ’algidité arrivebrusquement ; pendant cette période, le pouls,
La maladie n ’a fait son apparition, dans les hôpitaux, qu’après
quoique faible, est presque toujours sensible; une sueur froide,
y avoir été importée de l’extérieur. Dans les grandes adminis
visqueuse, très abondante, recouvre le corps, les urines se
trations le choléra n’a sévi qu’ en dernier lieu, il faut cependant
suppriment, la voix se casse, les yeux s’entourent d’un cercle
en excepter la Caserne Gazzino (Douanes), la Poste et le
bistré. Dans les cas rapidement mortels, le plus souvent, les
Chemin de fer qui, dès le commencement d’août, ont eu un
crampes n’atteignent que les extrémités des membres, mais
décès.
elles s’accompagnent d’une oppression des plus douloureuses
vers la région précordiale.
Voici maintenant quelques détails statistiques sur les divers
services de cholériques dans nos hôpitaux.
Assez fréquemment, au milieu de la période algide, les cram
M. S eux , médecin en chef à 1Hôtel-Dieu, nous communi
pes s’amendent, le pouls s’ élève, la peau devient souple et tiède,
que les renseignements suivants de son service spécial de cho
parfois même les vomissements bilieux reparaissent, cependant
lériques (salle des hommes).
la voix demeure cassée, la sécrétion des urines ne se rétablit
Du 24 ju ille t au 1er novembre , il a été traité 14 cholérines,
point et le malade s’éteint doucement après une longue agonie.—
22 choléras légers, 186 choléras algides.Total 222 malades, dont
La réaction, lorsqu’elle s’établit, mérite une attention soutenue,
19 atteints dans les salles des fiévreux. Sur ce dernier nombre,
car, trop souvent, surviennent des congestions, accidents céré
exceptionnellement il y a eu 10 femmes.
braux, symptômes typhoïdes ou éruption de purpura qui, bien
des fois, ont compromis la convalescence du cholérique.
Enfin les atteintes de choléra sec, assez nombreuses pendant
Algide 186,— morts 85,— guéris 98, — 2 restent en traite
ment, — 39 à l ’état algide sont morts en arrivant et n’ont pu
être traités.
•i
�182
—
—
—
185
—
Hôtel-Dieu. — Service de la clinique.
V ieillards . — Hospice de la Charité.
Dr B brtulus, professeur. (Renseignements pris auprès de
D r Roux fils.
l’ interne).
Atteints 12. — Décédés 8. — Guéris 4.
Du 24 juillet au I er novembre :
Dans la dernière épidémie de 1854, ce même Hôpital avait
72 cholériques,
28 hommes, dont 16 pris dans les salles.
eu 120 cholériques dont 103 décès. Grâce h la séquestration et
44 femmes, dont 3 prises dans les salles.
au système de délation réciproque organisé par son intelligent
G uéris .
médecin , le personnel évalué à environ 700 âmes, a joui d'une
M orts .
Hommes.
..
7
21
Femmes.
. . 13
31
immunité presque complète.
En même temps que le choléra y sévissait, une véritable
épidémie de petite vérole est venue s’abattre sur sa popula
Total : 20 guérisons et 52 morts.
On u’a pas défalqué ici les morts en arrivant. Il en est de
même dans la statistique, donnée plus lo in , des cholériques de
la Conception ; ces deux services réunis ont eu 47 malades,
morts avant traitement.
tion adulte. Il y a eu, quoique les sujets fussent tous vaccinés,
beaucoup
de variole
confluente,
mais
très-heureusement
aucune mort â déplorer. Des convalescents cholériques sont
devenus varioleux.
Saint-Marcel, village de la banlieue de Marseille, a été égale
11 y a eu de plus, à l ’Hôtel-Dieu , 4 cholériques placés dans
ment visité par le choléra et la petite vérole.
les salles de chirurgie, 2 sont morts, 2 ont guéri.
V ieillards . — Infirmerie Saint-Jean-de-Dieu.
Hôpital de la Conception.
Dr F lavard.
Dr L a S oücbèrb , médecin en chef. (Hommes cl femmes
réunis.)
Atteints 3. — Décédés 2. — Guéri 1.
Du 24 juillet au 1er novembre :
La séquestration a suffi par enrayer l’épidémie.
E ntres .
G uéris .
14
9
179
79
Cholérines. .
Choléra . . .
Morts.
2
100
Les 2 morts cholérines ont rapport à des tuberculeux dont
l ’entérite s’ est cholérisée.
Hôtel-Dieu et Conception présentent donc un contingent
Hospice des Aliénés.
D’après une statistique publiée par M. L islb , médecin en
chef (division des hommes).
Sur une population de moins de 1000 âmes, on a constaté
150 cholérines el 76 cas de choléra, ainsi répartis :
de 389 cholériques, dont 190 morts el 199 guérisons.
Atteints.
Décédés.
Guéris.
Hôpital Militaire.
Hommes. . .
48
17
31
M. P au S aint-Martin , médecin en chef.
Femmes. . .
28
18
10
76
35
41
Entrés 114. — Décédés 62. — Guéris 52
�— 481 -
—
485
—
Le total des hôpitaux donne ainsi, jusqu’au 4*r novembre,
594cholériques traités,dont 297 morts et 297 sortis,soit50 0/0
Le C H O L É R A , L es M É D E C I N S e t le P U B L I C ( I ) .
de guérison.
Notons en passant que cette proportion si rassurante porte
presque exclusivement sur des cas de choléra algide.
Alençon (Orne).
Monsieur le rédacteur,
En ville, où les soins peuvent être donnés plus fréquemment
au début, les 2/3 des malades auraient été guéris, si l'on s’en
rapporte aux renseignements fournis par nos praticiens les plus
Depuis près de deux mois, l’on n’enlend partout qu’éloges
et acclamations enthousiastes pour « ces courageux médecins,
pour ces braves jeunes gens q u i, sans se préoccuper du danger,
répandus.
Ainsi donc, la vie du malade dépend presque constamment de
la promptitude des secours qui lui sont apportés.
En terminant cette revue , il nous resterait a ajouter quel
ques mots sur les diverses médications employées contre le
choléra , pendant le cours de cette épidémie. On nous per
mettra de ne faire qu’effleurer ce dernier chapitre. Toutes les
formules que nous pourrions reproduire n ’ayant malheureuse
ment répondu que trop rarement aux espérances conçues par
leurs auteurs.
Cependant, si le spécifique du choléra est encore a trouver,
nous constatons comme un très-grand pas fait dans le traite
ment de celte terrible maladie, l’adoption des indications géné
sans tourner la tête en arrière, courent hardiment braver le
fléau dans les lieux mêmes où il se montre le plus terrible.
»
On déclare les membres du corps médical dignes de la recon
naissance publique et de la postérité, etc., etc. Et ce concert
n’est pas, malheureusement, près de finir : il commence a peine
et doit aller crescendo...... tant que l ’affreuse épidémie ne ces
sera pas ses ravages.
Et cependant, Monsieur, qu’arrivera-t-il quand le danger
sera passé? Tout homme ayant quelque expérience pourrait, dès
aujonrd hui, faire l ’histoire de ce que nous verrons alors : on
décorera quelques maires et quelques adjoints, on votera, com
me l’a fait jadis la ville de Paris, une médaille de bronze ayant
une valeur intrinsèque de quelques centimes , on la distribuera
rales suivantes :
1° Tout-a-fait au d é b u t, les évacuants ;
2° Dans la période algide et cyanique, caléfaction du malade
par tous les moyens en notre pouvoir, jointe à une diète sé
à chacun des médecins qui auront fait ce qu’on appelle leur
devoir, — et... la dette de la reconnaissance nationale sera
considérée comme acquittée.
Quant aux veuves et orphelins que les médecins auront lais
vère de liquide ;
3° Pendant la réaction, les toniques ou les antiphlogistiques,
suivant les cas.
Nous avons vu l’ application de ces indications assez souvent
couronnée de succès pour appeler sur elles l’attention de tous
nos confrères.
Dr C. Mknécikr.
sés, quant aux vieux parents, qui se seront quelquefois con
damnés ù la gêne pour procurer à leurs fils une profession ho
norable, et qui n ’auront plus, pour consolation, qu’une tombe
à contempler dans leurs derniers jours... c’est leur affaire;
qu’ils s’en tirent comme ils pourront! Aucun des survivants
n’est cause, après tout, du malheur qui les a frappés, et tout
(1)Nous sommes heureux de reproduire cette lettre, adressée par
son auteur au journal l'Opinion nationale.
�186
sera dit. Trop heureux les morts, s’il ne se trouve pas quelques
Ils s’exterminent trop souvent ( j’en pourrais citer des exem
personnes prudentes pour blâmer rétrospectivement la témérité
ples), pour permettre aux sociétés ouvrières de secours mutuels
dont ils auront fait preuve ! Cela s’ est vu.
de recevoir des soins médicaux au prix moyen de 56 centimes
Si vous croyez que je juge la chose en pessimiste, veuillez,
par journée de maladie pour toute la France, y compris Paris et
monsieur, vous reporter au passé; prenez note de ma lettre, et,
autres grandes villes et de faire ainsi sur le légitime honoraire
après la cessation de l'épidémie, vous me direz si je n’ai pas
de leur médecin une économie qui « seule, » leur permet de
prédit l’avenir.
subsister : c’est leur devoir.
Les médecins ont, dès longtemps, pris leur parti de ces mi
sères, mais quelles sont les causes de ces llagrantes et déplora
bles contradictions?
Ils s'exposent aux coups des épidémies et des maladies conta
gieuses : c’est leur devoir, toujours leur devoir!
Quant à ceux qui ne sont pas médecins, qui sont, par exem
Ce serait ici l ’occasion de dire beaucoup de mal de la nature
ple, notaires ou négociants, ou propriétaires, ou industriels, ou
humaine, mais tel n’est pas le but que je me propose; je veux
fonctionnaires publics, ou ingénieurs, etc., etc., ils n’ont au
seulement signaler l’un des prétextes sur lesquels s’appuie l’in
cun de ces devoirs-là à re m p lir; ils en sont indemnes; plus
gratitude traditionnelle du public envers le corps médical. Ce
heureux en cela que les paysans, qui payent en argent l ’équiva
prétexte est celui-ci :
lent des corvées qu’ils ne fournissent pas en nature, c’est bien
« L ’épidémie étant pour le médecin ce que la bataille est
assez pour eux d’être exposés au danger de la maladie sans
pour le soldat, les médecins, en s’exposant aux coups des épi
être encore, parle fait de celle-ci, chargés de travaux répu
démies, ne font, après tout, que leur devoir. »
gnants ou de dépenses extraordinaires,
Voilà le sophisme.
Le devoir des médecins ! le devoir des médecins! cela répond
à tout, et c’est extrêmement commode pour se dispenser de
Vous, monsieur, qui êtes l’un des apôtres les plus zélés et
les plus distingués de la mutualité, de la réciprocité, croyezvous, en conscience, que cela soit juste?
toute reconnaissance. Peu importe, après cela, que ce ne soit
Que le commun des gens, qui n’ ont jamais réfléchi à rien,
là qu’une vieille rengaine, n ’ayant aucun fondement, ni en logi
dise de ces banalités et fasse de ces fautes de jugement et de
que, ni en bon sens, ni en équité.
langage, il n’y a pas là de quoi s’étonner; mais que des journa
Les médecins, bien qu’ ils ne soient exemptés d’ aucune des
listes qui, par profession, doivent connaître la valeur des mots,
charges publiques, font gratuitement — à peu près— et en
émettent couramment de telles erreurs, concluant à d’ énormes
tout temps, le service des hôpitaux, des hospices et des bureaux
injustices, c’est là ce qu’on a vraiment peine à comprendre.
de bienfaisance : c’est leur devoir.
Ils consacrent chaque jour de longues heures à visiter gratui
tement les pauvres dans les bouges des grandes villes et dans
les cloaques des campagnes : c'est leur devoir.
Ils dépensent chaque jour leur temps, qui est souvent leur
Et il y en a qui ne reculent pas devant les conséquences logi
ques de leur erreur initiale.
Ainsi, dans votre numéro du 25 septembre, vous citez, sans
vous l’approprier, je me hâte de le reconnaître, un article de la
Sentinelle toulonnaise où, après les compliments obligés à ce
seul bien, à donner des consultations gratuites aux misérables :
brave et estimable corps médical, on ne laisse pas que d’annon
c’est leur devoir.
cer, pour stimuler le zèle des tièdes, s’il s’en trouvait par hasard,
�—
188
-
—
qu’on « signalera ceux que leur devoir (toujours le devoir, vous
—
peut nous porter sera fatal et que nous sommes d’autant plus
« voyez!) appelait au chevet des malades et qui auront déserté
près de lui
« leur poste. » C’est une belle et bonne menace que l’on fait
Comparez.
l'a; eh bien! je crois que c’est ici l ’occasion de s’entendre défi
189
que nous sommes plus près de nos malades.
Ainsi donc, Monsieur, quoi qu'en dise une routine que les
nitivement sur ce prétendu poste et sur celte prétendue déser
médecins, soit par modestie, soit par dédain, ont eu le tort de
tion.
laisser s'établir d’âge en âge,
Que M. le rédacteur de la Sentinelle toulonnaise me fasse
Quand nous consacrons gratuitement notre temps, nos soins
donc le plaisir de me dire où il a vu que les médecins aient le
nos veilles, nos fatigues au soulagement des pauvres malades,
devoir d’être au chevet des malades, soit en temps d'épidémie,
Quand nous exposons notre vie dans des épidémies meur
soit hors du temps d’épidémie ? Qui les y force? Qui les paye
trières, à nos risques et périls, aux risques et périls de nos fem
pour cela? Quelle peine est édictée contre eux en cas de refus?
Les médecins, aux yeux de la Sentinelle , formeraient-ils une
mes et de nos enfants, que notre mort doit laisser le plus sou.
vent sans fortune et quelquefois, hélas! sans ressources,
classe de citoyens à qui la Constitution impose l’obligation de
Nous faisons une chose « que nous ne devons à personne ; »
contribuer aux charges publiques en plus forte proportion que
nous n’accomplissons pas un devoir ; nous faisons « plus que no
les autres? Et si rien n’oblige les médecins à faire plus que ne
tre devoir. » Il faut qu’on le sache.
fait le rédacteur de /a Sentinelle , de quoi le rédacteur de la
Sentinelle se plaindra-t-il ? que dem ande-t-il à qui ne lui doit
rien?
On croit nous faire, comme je le disais plus haut, beaucoup
d'honneur en comparant notre situation, en cas d’épidémie, à
celle du soldat sur le champ de bataille. Certes ce n’est pas moi
qui voudrais amoindrir le mérite de nos soldats de tout rang et
de tout grade; ce mérite est assez éclatant par lui-m êm e; mais
enfin, quelle différence entre nous!
Le soldai qui marche à l’ ennemi est forcé par la loi de le faire;
il accomplit alors son devoir (un rude devoir), mais rien que son
Il faut qu’on sache que, s’il y a là un devoir, c’est nous-mê
mes qui l ’avons choisi, c’est nous, uniquement nous, qui nous
le sommes imposé ; c’est la part que nous avons prise ; mais
sans donner, pour cela, à qui que ce soit, le droit de placer sur
nos épaules un fardeau que ne portent pas les autres citoyens :
voilà la vérité. Cuique suum.
Et, quand des gens font cela, j ’ose dire, comme nous l ’avons
fait et comme nous le faisons encore à propos de toutes les épi
démies, de toutes les misères, avec un dévouement qui ne s’est
jamais démenti, sans poser de conditions, sans exiger les
compensations que la société nous devrait en stricte justice,
devoir. S’il ne le fait pas, il manque à ce qu’il doit et il encourt
sans espoir d’ un avantage quelconque, d’une récompense hono
une peine.
rifique quelconque, sur lesquels l’expérience nous a appris à ne
Sans compter que le soldat voit son ennemi face à face, qu’il
pas compter, ce n’est pas le cas, il me semble, de procéder
peut le déjouer, l ’éviter, le prévenir, faire usage de ses armes et
contre eux par voie de menaces inconvenantes toujours, et à
lutter.
tous les égards inutiles.
Nous, au contraire, nou6 allons à la bataille libenter, parce
Que la Sentinelle toulonnaise calme donc ses alarmes. Quoi
que nous voulons y aller. Et, de la présence de l ’ennemi, nous
que nous connaissions nos droits, quoique sachant par expé
ne voyons rien, nous ne savons rien, sinon que le coup qu’il
rience où iront les récompenses après la bataille, nous nous
ir
�—
190
—
—
191
conduirons dans l’épidémie actuelle comme nous nous sommes
Quant au rôle public que nous avons eu à remplir, Messieurs
conduits dans les autres : c'est tout ce qu il faut.
les Membres du Conseil Municipal savent aussi bien que moi
Veuillez agréer, etc.
en quoi il a consisté. S'ils n’ont pas su apprécier les exigences
Dr H. B elloc (d’Auxerre).
des services hospitaliers, la prompte organisation des bureaux
de secours, la régularité des gardes de nuit, je n’ai rien à en
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
dire; la vérité se fera jour d’elle-même.
Je n insiste pas davantage, Monsieur le Maire, ma lettre n’a
Le Président de la Société locale des Bouches du-Rhône a
adressé à M. le Maire la lettre suivante :
qu’un but, c’est de faire savoir, au nom du corps que j'a i l’hon
neur de présider, que la délibération et Je vole du Conseil Muniéipal nous ont tous profondément offensés dans notre dignité
Monsieur le Maire,
La décision prise par le Conseil M unicipal, dans sa séance
d’homme, de médecin et de citoyen français.
Je vous prie, Monsieur le Maire, de vouloir bien communi
du 6 novembre, a porté l’ atteinte la plus sérieuse à la dignité
quer celte lettre au Conseil et d'agréer, pour vous même,
du corps médical de Marseille. Président d’ une association qui
l’expression des sentiments tout particuliers de haute considé
compte dans ses rangs un grand nombre de médecins de noire
ration et de respect avec lesquels j ’ai l’honneur d’être votre
cité, je considère comme un devoir de prendre la plume pour
très dévoué serviteur.
-
S eux.
protester contre une injustice aussi profonde qu’inconcevable.
Après l’épidémie qui vient de désoler notre ville, le Conseil
a pensé qu’il n’y avait pas lieu de nous décerner, au nom de nos
A s s o c ia t io n G é n é r a l e d e p r é v o y a n c e e t de se c o u rs m u t u e l s
des M é d e c i n s de F r a n c e .
concitoyens, une marque de reconnaissance et d’estime. Ouest
même allé plus loin ; lorsque vous, Monsieur le Maire (et veuil
lez bien agréer mes remercîments), avez parlé du dévouement
des médecins et demandé pour eux une récompense publique,
des voix se sont élevées au sein du Conseil, disant qu’avant de
voter une récompense pour le dévouement il convenait qu’on
s'informât d’ abord s'il y avait eu dévouement !
Douter en pareille matière c'est accuser de lâcheté ou de
coupable négligence un corps dont on respecte généralemeul
trop peu les labeurs et la dignité. Se disculper d’ un pareil blâme
c’est admettre qu i! soit possible: je ne le puis ni ne le veux.
Il ne m ’appartient pas d ’exposer ici, au grand jour, les actes
privés de chacun de mes confrères, pendant l épidémie qui
vient d’avoir lieu, et de suivre ces derniers, pas à pas, dans
l’accomplissement de leur mission périlleuse et souvent ignorée.
Paris, le 20 octobre 1865.
Monsieur et très -honoré C onfrère ,
Les conditions sanitaires dans lesquelles se trouvent actuel
lement placés quelques départements et la ville de Paris, ont
imposé au Conseil général le devoir de ne distraire, en ce mo
ment, aucun des Membres de l’Association générale des Méde
cins de France de scs occupations professionnelles et des
services qu’il peut être appelé à rendre â la population.
En conséquence, dans sa séance du 18 octobre dernier, il a
décidé h l’unanimité que l’Assemblée générale de l’Association,
qui devait avoir lieu le !29 octobre prochain, serait ajournée au
dimanche après Pâques de 1866.
Je m'empresse de vous prévenir du résultat de cette déli
bération.
Le Conseil général avisera avec le plus grand soin à ce que
cet ajournement, commandé par toutes sortes de convenances,
ne nuise h aucun intérêt de l’Association. Le rapport sur l’en-
�192
—
quête relative a la révision des lois qui régissent l’exercice de
la Médecine, rapport préparé par une Commission dont M. le
docteur Barrier, membre du Conseil général, Président de
l’ Association des Médecins du Rhône, est le Rapporteur, a été
lu au Conseil géaéral, qui en a renvoyé la discussion à la pre
mière réunion de novembre prochain. Aussitôt qu’il aura été
adopté par le Conseil général, ce rapport sera livré à l’impres
sion et vous sera adressé a(in qu’ il puisse être examiné à loisir
par les Sociétés locales et que la discussion puisse obtenir toute
la latitude possible à la prochaine Assemblée générale de l’As
sociation.
L ’empressement des Sociétés locales a exprimer leurs vœux
a été très-général, mais non universel. D'un petit nombre d'en
tre elles, le Conseil général n’a encore rien reçu (16 ou 17
sur 95). Si la Société que vous présidez était au nombre de
celles qui sont en retard, le Conseil général vous serait recon
naissant de ne pas différer plus longtemps l ’envoi des observa
tions et des vœux de vos honorés confrères.
Vous apprendrez avec satisfaction, Monsieur et très-honoré
Confrère, que l’Association générale de prévoyance et de
secours mutuels des Médecins de France est dans une situa
tion de plus en plus florissante, et que le triple but de son ins
titution est de jour en jour et partout mieux compris, mieux
apprécié et mieux atteint.
Veuillez agréer, Monsieur et très-honoré Confrère, la nou
velle assurance de mes sentiments dévoués.
É P ID É M IE D E C H O LÉR A D E 1 8 6 5 .
Les
M édecins
devant
le C o n se il
M u n ic ip a l
de
M arse ille.
Nous mettons sous les yeux de nos lecteurs, le rapport sui
vant fait par M. Thourel au conseil municipal.
« Messieurs,
» Au nom de la commission spéciale saisie par vous de la pro
position de notre honorable collègue M. Boyer, relative à une
pension viagère a accorder à la veuve de feu le docteur Honnoraty, je viens vous communiquer les motifs et le résultat de ses
résolutions.
» L’invasion possible et prévue du fléau indien, qui tant de
fois a désolé nos rivages, constitue un danger immense. La pré
venir est incontestablement un intérêt, un besoin, disons mieux,
un devoir de premier ordre. Nous le savons tous, grâce à de
trop douloureuses expériences, le choléra rie se produit pas
spontanément dans nos comrées, il s'élance de l’Orient, décime
les populations à chacune de ses étapes et manifeste son appro
che par des signes terribles, que des affirmations théoriques trop
imprudemment écoutées, et des spéculations économiques peu
vent défier, mais ne sauraient, hélas ! méconnaître ni conjurer.
» C’est sur nos frontières de terre et de mer qu'il faut, par
d’énergiques mesures et de sages institutions, dont la tradition
n’est pas perdue, comme ce Conseil en a déjà exprimé le vœu,
que le péril peut être détourné. Les principes du libre échange
n’ont rien à faire en semblable occurrence, ce n’ est pas au cho
léra qu’on prétendrait follement appliquer la loi de notre temps :
laissez faire, laissez passer; ceci, du reste, ne peut être aujour
d’hui qu’un juste regret et une légitime espérance.
12
�—
— 195 -
104 —
» Dès que le danger prévu se réalise, dès que le lléau a mis
» Les populations ont eu à leur tour, sur l’initiative de l ’édi-
pied sur le sol national, son invasion constitue évidemment un
lité, quand le flot dévastateur s’est retiré, un grand devoir de
malheur public. Ceci n’est pas une guerre dont le dénoûmenl
réparation et de charité à accomplir. Ainsi se sont produites
se débat entre les forts, c’est l ’attaque soudaine, meurtrière,
et ont été immédiatement remplies de nombreuses listes de
d'un ennemi insidieux qui cache ses armes, s’acharne surtout
souscription pour venir en aide aux veuves et aux orphelins
contre l’enfance, la faiblesse et la misère et porte d’ailleurs la
des victimes du choléra. Toutefois, est-ce à la caisse où sont
perturbation dans tous les rapports sociaux, commerciaux et in
déposés ces derniers qu’il eût été convenable de laisser se pré
dustriels.
senter la veuve d’un médecin mort dans l ’exercice de sa noble
«Chacun songe instinctivement à se défendre; mais il est
deux classes de citoyens, auxquels de grands et de nouveaux
mission ?
» Votre commission ne l’a pas ainsi pensé. Feu le docteur
devoirs sont imposés, celle des fonctionnaires publics, celle des
Honnoraty, médecin de la Grande-Miséricorde et de nombreu-
médecins.
ses Sociétés de secours mutuels, s’est dévoué au soin de tous
» Les fonctionnaires. — Je n’ai pas à vous dire ce qu’ ils ont
les cholériques sans distin ctio n , avec une activité infatigable,
à faire, car vous savez ce qu’ils ont fait pendant cette dernière
pendant les longs jo u r' de l ’invasion. Elle était enfin à son dé
épidémie.
clin, lorsque sa santé fut ébranlée et qu il ressentit lui-même
» Les médecins. — Pour ceux-ci la tâche est plus ardue. Ils
les premières atteintes du mal. Ses amis le pressaient de s’aliter
sont, pour ainsi parler, la milice de la santé publique, et sur ce
et de recevoir lui-m êm e les soins qu’il prodiguait aux autres, et
véritable champ de bataille, ils sont appelés à une suprême lutte
pour l’y décider, on invoquait le soi t réservé à sa veuve s’il ve
avec le lléau, lutte d'autant plus glorieuse que les travaux en
nait à succomber. Rien ne put vaincre sa résolution de conti
sont plus rudes et les dangers plus grands.
« Leur état cesse d’être une profession libre, il s’élève et s’en
noblit, leur clientèle n’a plus de lim ite , ils se doivent à tous et
nuer ses périlleux travaux. La Providence veillera sur elle! s’écria-t-il. Ces mots étaient à peine sortis de sa bouche, que la
force du mal le terrassait ; il ne se releva plus.
â chacun, et pardessus tout aux plus pauvres et aux plus souf
» Nous avons cru que la Cité devait considérer comme une
frants; ils doivent encore, maîtres d eux-mêmes, en présence
dette sacrée le devoir de ne pa6 laisser au besoin une femme
d’indicibles souffrances et de la dépouille mortelle des victimes,
sans fortune, devenue veuve dans de telles conditions. Nous
chercher h découvrir la nature du mal et le secret du remède.
pensons qu’en lui assurant une existence modeste, nous hono
» Disons-le donc, c’est là un véritable service public, une
rons la mémoire de son mari, nous glorifions son dévoùmenl,
grande et noble mission humanitaire : elle offre surtout cela de
nous honorons en même temps et nous encourageons le corps
grand, que notre temps voit les vrais médecins, dans ces circons
médical tout entier.
tances solennelles, désintéressés à tous égards, se placer et res
» Votre commission vous propose donc la résolution suivante :
ter au-dessus de toute préoccupation d’ éloges ou de récompenses
» Le Conseil ;
à obtenir.
» Voulant reconnaître et glorifier le beau dévoûment ue feu
» A Marseille, et cett* fois encore ils se sont montrés dignes
de leurs devanciers.
le docteur Honnoraty, qui, sans prendre souci de sa propre saut •
de jour eu jour plus sérieusement compromise, a continué, peu-
�—
196
—
dant (onle la durée de l ’épidémie, à prodiguer aux cholériques
ses soins inlelligents et désintéressés, jusqu’au moment où il a
été lui-même atteint et foudroyé par le fléau;
» Estimant aussi que la résolution solennelle et spontanée
de celle assemblée, d’assurer à sa veuve restée sans fortune
une existence indépendante, non h titre de secours, mais com
me un témoignage de la reconnaissance publique, rendu parla
Cité en sa personne, h la mémoire de feu le docteur Honnoraty,
mort dans l ’accomplissement de ses devoirs professionnels, esl
pour le Corps médical tout entier, un honneur et un encourage
ment. »
Le Conseil, après avoir entendu ce rapport, en a adopté les
conclusions b la presque unanimité et a accordé b la veuve
Honnoraty une pension viagère de 1,200 fr
Il a, en outre, prié M. le Maire de transmettre à la veuve
Honnoraty une expédition en forme de la délibération du Con
seil lorsqu’elle aura été approuvée.
et à chacune de ces époques les actes de la Cité ont constaté le
dévouement des médecins. Nos lettres de noblesse sont aussi
anciennes que les premiers monuments médicaux du monde, et
le mot dévouement est un des premiers inscrits sur le blason que
nous ont transmis nos prédécesseurs.
Après avoir réclamé contre l’oubli dans lequel on a laissé les
services de nos ancêtres, voyons si nous sommes digne» d eux.
Les qualités réclamées du vrai médecin sont, d’après le rap
porteur, d’être, dans les temps d’épidémie, désintéressés à tous
égards, et de se placer au-dessus de toute préoccupation d éloges
ou de récompenses à obtenir.
2° La délibération fâcheuse du Conseil municipal, l ’impres
sion pénible qu’en a éprouvée le Corps médical elles protes
tations qui en ont été la conséquence, semblent avoir amené
cette phrase sous la plume de M. Thourel. Avons-nous été mus,
dans les soins que nous avons prodigués aux cholériques, par
l’espérance des éloges et des récompenses? Il nous suffira, pour
effacer toute ambiguité, de rappeler les faits:
Comme nous l’avons dit dans notre précédent numéro, NT le
Nous aurions voulu ne donner que des éloges au rapportée
M. Thourel, et remercier au nom du Corps.médical, le Conseil
municipal, de l ’acte de libéralité et de justice auquel il vient de
s’associer à la presque unanimité. Q u'il nous soit permis cepen
dant de faire nos réserves relativement a certaines partiesdurap
port qui nous semblent présenter une ambiguité fâcheuse. Peu
habitués aux artifices du langage, nous voulons que les positions
soient nettes et qu’il ne puisse rester aucun doute dans l’esprit
de tous nos concitoyens qui ont suivi les délibérations du Con
seil municipal et qui ont lu les protestations du Corps médical
qui en ont été la conséquence.
1° Ce n'est point seulement de notre temps que les vrais
médecins se sont dévoués dans les époques solennelles auxquelles
fait allusion l’honorable conseiller. Plus qu’ aucune autre ville,
Marseille compte, dans ses annales, bien des jours de deuil,
Maire, pour régulariser la distribution des secours, fil appel à
l’assistance du Corps médical. Quand l ’épidémie fut arrivée a
son terme, le chef de la Cité, qui savait qu’il avait contracté, en
vers les médecins qui avaient répondu â cet appel, une dette de
reconnaissance, proposa au Conseil municipal de leur décerner
des médailles. C’était la récompense qui avait été accordée après
les autres épidémies. Cette proposition fut rejetée : il n’y avait
eu qu’une épidémie insignifiante, disait un honorable conseil
ler; il n’y avait pas tu d acte de dévouement, ajoutait un autre,
line délibération ainsi motivée était blessante, pour tous, peutêtre, mais plus particulièrement pour ceux auxquels on avait
demandé des sacrifices au nom de la Cité.
Il ne fut venu à la pensée d’aucun de ces médecins, de récla
mer des représentants de la Cité, un acte de reconnaissance ;
mais alors que, par le rejet d’une proposition qu’ ils n’avaient
�—
198
—
—
point sollicitée, a laquelle ils étaient complètement étrangers,
on niait jusqu’à la réalité du service rendu ; nous ne craignons
point de le dire, ne'} as ressentir l'offense, eut été méconnaître
l ’importance des décisions du Conseil municipal.
199
—
valeur des employés à la quotité du traitement qu’ils émargent,
que le corps médical est le plus bas placé dans l’échelle. Mais
comment reconnait-on l’importance des fonctions qu'il est appelé
à remplir? C’est par la considération, l’autorité dont il est en
Nous avons donc été profondément affligés du vole du Conseil;
touré. Si les médecins sont les derniers par le chiffre du budget,
mais nous n’avons jamais sollicité ni éloges, ni récompenses.
ils n’en sont pas moins les premiers dans le personnel des éta
Avons-nous été désintéressés à tous égards?
blissements de bienfaisance.
5° Continuons notre historique. Par une modification aux
Il faut donc accepter les hommes dont vous avez besoin, avec
errements du passé, M. le Maire, en demandant l’assistance des
leurs qualités et leurs défauts. À cette époque où l ’argent est le
médecins pour les bureaux de secours, avait ajouté qu’une in
principal mobile des actions humaines, il est bien heureux de
demnité leur serait allouée. Cette partie de la lettre fit hési
rencontrer une classe d'hommes pour lesquels le culte de l’hon
ter plusieurs de nos jeunes docteurs. Se dévouer, — nous
neur et de la charité marche en première ligne, pour lesquels un
demandons pardon du m o l, c’est le seul vrai, — se dévouer
éloge, une récompense ont plus de valeur que l ’or, et qui eussent
aux services des malades pauvres, telle était leur seule inten
reçu de M. le Maire et du Conseil municipal une médaille dont
tion. Aussi, quand huit de nos jeunes collègues se trouvèrent
la valeur vénale pouvait bien être de deux francs, comme une
en présence du chef de la Cité, pour recevoir leurs instructions;
compensation suffisante pour leurs nuits passées à prodiguer des
» Ne parlons pas d’honoraires, dit l ’un d’eux, c’est gratui
secours aux malheureux cholériques. Ils se seraient considérés,
tement que nous donnons nos services. » M. le Maire leur ré
peut-être, comme vos obligés!
pondit à peu-près en ces termes : « La ville n ’a point la préten
Un journal a comparé la délibération du corps Municipal de
tion de vous payer pour les services que vous lui rendrez, mais
Marseille à un trait digne des citoyens de Sparte. Sparte est bien
alors que vous aurez passé vos nuits et que vous prendrez dans
loin de nous ; il nous semble bien difficile de faire remonter la
la journée le repos qui vous est indispensable, vos intérêts peu
société vers sa naissance. A la rudesse du Grec, nous préférons
vent soutïrir et nous vous indemniserons à peine pour les visites
l’urbanité française. C’est donc un anachronisme, et nous préfé
que cette circonstance pourra vous faire perdre. »
rons à cette élévation du caractère le simple Merci que l ’on accorde
Après ces explications, nous pouvons dire, avec l ’honorable
dans notre pays à tous les services rendus. D’ailleurs, êtes-vous
M. Thourel : Cette lois encore, ils se sont montrés dignes de
bien certains d’être aussi Spartiates que le veut le journal de Paris?
leurs devanciers.
et cette publication de vos séances dans les journaux de la ville,
Mais nous sommes loin de trouver dans ce mépris des éloges
est-ce bien seulement pour instruire les citoyens de leurs affai
et des récompenses le caractère du vrai médecin. De toutes les
res? Nous craignons bien que vous ne soyez pas plus insensibles
professions libérales, celle de médecin est celle à laquelle on de
aux éloges de vos concitoyens que les médecins l’eussent été
mande le plus de désintéressement,et cependant les secours qu'on
aux vôtres.
réclame de lui sont les plus précieux, les pius pénibles, quelque
Nous aurions bien encore à discuter les obligations imposées
fois les plus rebutants. Si nous considérons les budgets des ad
au corps médical. Est-ce bien à un corps officiel à constater
ministrations de charité, nous trouvons, si nous jugeons delà
des devoirs qui ne sont point inscrits dans la loi? M. l'avocat-
�—
200
—
—
201
—
rapporteur nous parait avoir oublié à notre détriment les grands
La Société Impériale de Médecine veut bien nous donner
principes de notre droit public, qui établissent l ’égalité des droits
communication de la lettre suivante, que nous publions avec
et des devoirs. Pour vous, membres du Conseil municipal, les
empressement :
médecins ont à remplir les devoirs qui incombent aux autres ci
Cercle médical de Gand.
toyens, et ils n'en ont pas d’autres.
Dans notre pays, là où les besoins se présentent, ils ne sont
Gand, le 7 décembre 1865.
officiellement à la charge d'aucune espèce de citoyens ; ils sont à
la charge de tous ; c’ est ainsi que les hôpitaux, les hospices, etc.,
sont dotés par les villes; que les dépôts de mendicité, l’assis
A Monsieur le Président de la Société Impériale de Médecine
de Marseille.
tance des enfants, sont à la charge des départements. Et quand
de grandes calamités se présentent, ce sont encore les êtres col
Monsieur le Président,
lectifs qui ont nom ville, département, etc., qui deviennent l’in
Nous avons lu dans le Moniteur Belge, du 5 décembre 1865,
termédiaire entre les besoins à satisfaire et les citoyens qui peu
la protestation courageuse que vous avez adressée au Conseil
vent donner assistance. Aux médecins, la cité réclame le secours
municipal de votre ville, à propos de son relus d’accorder de
de leur a rt; aux citoyens favorisés de la fortune, elle demande
modestes médailles aux personnes qui se sont distinguées pen
des souscriptions, et quand elle a ainsi soulagé les malheureux,
dant l ’épidémie de choléra de 1865.
elle devient le représentant de l’obligé, et son devoir lui impose
Et cependant ils l’ ont prouvé, nos dignes confrères de Mar
de remercier le bienfaiteur. Ce n ’est point l'a un jeu de notre
seille, quelque meunière que soit une épidémie et quelque
imagination, et nous pourrions trouver des arrêts des tribunaux
grande que soit l ’ingratitude des hommes, le médecin sera tou
qui fo n t affirmé pour des temps d’épidémie.
jours à la hauteur de sa noble mission,et jamais on ne fera en vain
Quant au devoir moral que l'opinion publique nous impose et
appel à son dévouement. C’est pourquoi nous venons vous prier,
que, d’accord avec elle, nous acceptons, ce devoir ne ressortit
Monsieur le Président, d’être auprès de nos confrères marseil
point du Conseil municipal. Comme vous, Messieurs, nous de
lais, l’interprète de nos sentiments de vive admiration pour leur
mandons la décentralisation. Vous avez brisé les traditions qui
conduite héroïque pendant l’épidémie de choléra qui a sévi dans
toujours nous avaient unis à vous pendant les diverses épidémies
votre ville, et de leur dire que, si votre Conseil municipal leur
qui se sont trop rapidement succédé dans notre ville. Mainte
a refusé des récompenses honorifiques si bien méritées, leurs
nant le corps médical aura à voir s’il est de son intérêt de répon
confrères de Gand, ville populeuse comme Marseille, et où, à
dre à l ’appel des représentants officiels de la cité, et s'il ne lui
différentes époques, le choléra a exercé ses ravages, sont heu
sera pas plus honorable de se placer seul en face de ses conci
reux de leur offrir leurs plus chaleureuses félicitations et l’assu
toyens. Il ne faillira pas certainement à ce devoir, et si la délibé
rance de leur profonde sympathie.
ration par laquelle vous accordez à la veuve Honnoraty une ré
compense civique est un honneur pour le corps médical tout en
tier, elle ne saurait être pour lui un encouragement.
Le Comité de Rédaction.
Le Secrétaire
Le Président,
C h . C a ppbe .
D umont.
�—
202
—
Par délibération du G décembre, la Commission administra
tive des Hôpitaux a décidé que des médailles commémoratives
de leur dévouement pendant l'épidémie de 1865, seraient décer
nées aux médecins et aux élèves des hôpitaux qui avaient été
chargés du soin des cholériques.
—
203
—
lettre. Ces propositions au nombre de cinq, doivent être pré
sentées à la prochaine assemblée générale à Paris.
P remière P roposition : « Toutes les Sociétés locales sont
» invitées b demander par l'organe de leur délégué, b l’assemblée
» générale, l ’application rigoureuse de la loi relativement b l’an» nonce et au débit des remèdes secrets. »
La commission n'a pu qu’approuver une telle proposition.
Conipte-rendn des séances de la Commission
administrative.
D euxième P roposition : « Les Sociétés locales sont invitées
» b se concertersur les bases pratiques,d’un arrangement b faire
» adopter par tous les membres de l’associatioD au sujet des
» conditions du service médical des Sociétés de secours mu-
Séance du 12 octobre 1865 — Présidence de M. S eux.
» tuels. »
M. le Dr. Rondard, de Salon, présente comme nouveaux
La commission, comprenant toute l ’importance de celte pro
membres adhérents : MM. Olive, officier de santé 'a Eyguières,
position, exprime le vœu que tous les médecins qui ne sont pas
Jaissy, docteur b Orgon; Boyer, docteur b Saint-Mitre. Ces trois
avec nous, se fassent recevoir de notre association. Ce serait,
honorables médecins sont admis sauf l ’approbation de l’assem
en effet, le vrai moyen d’empêcher les dissidences de se pro
blée générale.
duire dans le corps médical, relativement aux sociétés. Au sur
M. le Président informe la commission qu’un procès a été in
plus, le Conseil général de Paris pourrait exercer une influence
tenté h un empirique, le nommé Davin, lequel avait été signalé
considérable sur les autorités locales pour les engager b faire
à la commission par le docteur Rey. Lecture est donnée d’une
rémunérer dignement les médecins chargés du service des socié
lettre
tés de secours mutuels, et par Ib rehausser la dignité médicale.
circulaire
émanant de la Société locale du Nord.
Les questions agitées dans ce travail étant très-importantes,
M. le Président nomme une commission composée de MM. de
la Souchère, Mittre et Mérentié.
T roisième P roposition : « Les Sociétés locales s’entendront
» pour demander b être représentées b l’assemblée générale,
» proportionnellement au nombre de leurs membres, b raison
» de 1 délégué pour 100 membres et au-dessous , et de 1 délé-
Séance du 17 octobre 1865. — Présidence de M. S eux.
Cette séance est toute entière remplie par la lecture et la dis
» gué pour chaque centaine de membres ou fraction de centaine
» audelb de cent membres. »
cussion de la lettre-circulaire de la Société du Nord. (Rapport
Q uatrième P ropositions 1.es Sociétés locales sont invitées
présenté p ir M Mérentié, au nom de là commission nommée
» b demander que, relativement!) la nomination de leurprési-
dans la dernière séance.) La Société locale du Nord, exprime le
» dent,M M . les Préfets dirigent nécessairement leur choix sur
désir que la Société locale des Bouches-du-Rhône fasse connaî
» l’ un des membres de ces sociétés locales. »
tre son opinion au sujet des propositions contenues dans cette
Ces deux propositions ont été adoptées b l ’unanimité.
�—
204
—
Cinquième P roposition : « Les Sociétés locales sont invitées^
» annuelle, sur le rapport de la Commission administrative, et
» réclamer la révision immédiate des statuts de la caisse des
» après enquête rigoureuse sur la position et les droits des can-
» pensions viagères d’assistance.
» didats, désignera par un vote définitif celui ou ceux qu’elle
» La fondation conserverait
son titre de caisse de pensions
» viagères d'assistance. Les statuts actuels seraient à peu-près
» veut doter des pensions mises h sa disposition ;
» A rticle 13. doutes les difficultés qui pourraient s’élever
» les mêmes jusqu’à l'article 9 qui serait ainsi rédigé : le taux
» au sujet de l’administration de la caisse de pensions ou du ser-
» des pensions serait autant que possible de 600 fr., et ne pour-
» vice des pensions, seront jugés par l'assemblée générale sans
» rait s’élever au-dela de 1,200 fr ;
» appel.
» A rticle 10. — Le Conseil général rendra compte chaque
» année de la situation financière de la caisse de pensions via» gères; et, lorsque les lessources permettront une première
» A rticles 14, 15 et 16. — Ce seraient les articles 15,14 et
» 15 des statuts actuels. «
Sur tous ces articles contenus dans la cinquième proposition,
» répartition, il mettra a la disposition de l'assemblée générale
la commission n’a pu que s’associer aux vœux de la Société lo
» les fonds a distribuer ;
cale du Nord. Elle a pensé, en effet, que c’était à cause de la
» A rticle 11. — L ’ assemblée générale peut se rapprocher
crainte d ’une centralisation excessive que certaines Sociétés
» autant que possible de l ’ équité, en laissant aux Sociétés loca-
locales, vivant d’une manière brillante, n’avaient pas voulu se
» les une part légitime d’intervention ; elle fera deux parts de
-réunir h l’association des médecins de France. La Commission
» ces fonds, l'une, qui se composera des huit dizièmes, sera ré-
a ajouté que, dans l’intérêt des associations locales, il serait à
» partie entre les diverses sociétés au prorata du nombre de
désirer qu’ on voulût bien leur accorder une plus large part d’ac
«leurs membres; l ’autre, qui sera constituée par les deux
tion dans la gérance de leurs affaires et de leurs intérêts. Ce
r>dixièmes restants, sera mise h la disposition du Conseil géné-
serait lh, en effet, une tendance qui amènerait infailliblement
» ral qui les portera la où les infirm ités ou les maladies auraient
» laissé un nombre exceptionnel de sociétaires a secourir. Dans
» ce dernier cas, la Conseil général rendra compte de ces fonds
» dans l'assemblée générale.
» A rticle 12. — Une fois mise en possession de la part qui
» lui revient dans la répartition des huit dizièmes, chaque So» ciélé locale devra l'affecter a des pensions viagères d’assislan» ces, en prenant au besoin dans la caisse particulière de quoi
de nombreux adhérents et assurerait d’ une manière plus positive
l ’avenir des Sociétés locales, et par conséquent, celui de l’asso
ciation générale,
M. le Vice-Secrétaire a adressé une réponse à M. le Prési
dent de la Société locale du Nord, sur les différentes questions
qui viennent d’être énoncées et dans le sens indiqué par la
Commission.
Séance du 9 novembre 1865. Présidence de M. S eux .
» les compléter. En cas d’ insuffisance de l’allocation et des res» sources propres pour constituer une pensioD, lesfonds seraient
M. Chapplain appelle l ’attention de la commission sur un
» laissés en réserve et a intérêts pour se cumuler avec les allo-
sujet qui intéresse h divers titres la profession et 1 honorabilité
» calions des années suivantes jusqu’à ce qu’ils puissent consti-
médicales. Le médecin qui meurt en temps d épidémie ne de
» tuer une pension entière. Chaque Société, dans sa réunion
vra it-il pas être considéré comme fonctionnaire public? et dès-
�—
206
—
207
—
lors, sa veuve el ses enfants ne devraient-ils pas être assimilés
nelle, pour exercice illégal de la médecine, a été condamné à
aux veuves et aux enfants des fonctionnaires qui ont rempli des
deux mois de prison, seize francs d ’amende et le* frais avec con
fonctions publiques ? En d’autres termes, d it M. Chapplain, si
trainte par corps L ’extrait du jugement sera inséré dans le pro
je considère que les mères, les veuves ou les enfants de ceux
chain numéro de Y Union médicale de la Provence. La Commis
qui sont morts au champ d'honneur ou dans l’ exercice de leurs
sion adresse des rernercîments au docteur Rey, pour l’empres
fonctions, ont bien souvent obtenu des récompenses honorifi
sement qu’il a mis à signaler le sieur Davin.
ques. des allocations ou des pensions, je suis péniblement sur
Le vice-secrétaire, A. V illard .
pris du silence qui accueille les actes de dévouement émanant
du corps médical. N ’y aurait-il pas lieu en conséquence de de
mander une modification législative, ou tout au moins une sub
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
vention budgétaire pour payer des pensions aux veuves ou aux
enfants des médecins? Cette question, étudiée d’abord avec le
M. le Dr Jubiot, médecin principal à l’hôpital m ilitaire, prési
plus grand.soin, ne pourrait-on pas la soumettre ensuite à l’au
dent de la Société Impériale de Médecine, a été promu au grade
torité supérieure, et même, la porter devant le Sénat?
d'officier de la Légion-d’Honneur.
. M. Mittre complète cette proposition par la suivante: Ne se
ra it-il pas convenable de demander b l ’autorité supérieure que
les services rendus par les médecins en temps d’épidémie uu de
calamité publique, fussent autant de titres qui leur permettraient
d'occuper, a un moment donné, les places vacantes dans les ad
ministrations, places qui sont presque toujours accordées à ceux
qui sont le plus protégés?
d’une triste vérité qui, après avoir été vivement contestée, ne
peut plus être, maintenant, niée par personne ; l’autre est l’an
nonce des résultats .expérimentaux les plus extraordinaires, les
plus inattendus et qui ne manqueront pas de soulever d’ardentes
controverses. Tandis que M. Millard lisait à la Société Médicale
Vu l ’importance de ces deux propositions, M. le Président
nomme, pour les examiner , une commission
Deux faits des plus importants ont été dernièrement commu
niqués aux Sociétés savantes ; l’un est la confirmation éclatante
composée de
MM. Chapplain, Mittre et Pirondi.
Séance du 5 décembre 1865. — Présidence de M. S eux.
des hôpitaux une observation de syphilis produite par le vaccin
de l’Académie de Médecine, M. Villemin présentait à l ’Acadé
mie une note où il avançaitque la matière tuberculeuse de l ’hom
me, inoculée à des lapins, développe en eux la tuberculose.
Le malade observé par M. Millard est le neveu d’un médecin ;
M. le Président annoneeque MM. les docteurs Hilarion Gués
le samedi, 19 août 1865, il se présenta à l’Académie pour se
et Rocanus, lui ont envoyé leur acte d’adhésion pour faire par
faire revacciner ; on lui inocule le vaccin d’un enfant de six mois,
tie de l’association. Ces honorables confrères sont admis 'a l’una
pâle et de chétive apparence; il n’a pas fait attention si les pus
nimité jusqu’à délibération de la prochaine assemblée générale.
tules de l’enfant étaient ou non saignantes. Quatre pustules se
t
M. le Secrétaire donne lecture d’une lettre de M. Verne,
développent chez lu i, deux à chaque bras ; elles paraissent suivre
avocat, annonçant que le sieur Davin, signalé au Conseil par le
une marche régulière; les croûtes tombent le 12 septembre.
docteur Rey, et traduit devant le tribunal de police correctiou-
Deux piqûres semblaient être restées sans résultat, lorsqu'à leur
�208
-
niveau, vers le 20 septembre, M. X . aperçoit deux boulons qui
se convertissent bientôt en croûtes sèches et brunâtres.
Vers le 22 octobre, M. X commence à éprouver des douleurs
de tête très-violentes, qui reviennent toutes les nuits et le pri
vent de sommeil ; il ressent aussi quelques douleurs vagues dans
la poitrine et observe sur la face antérieure du tronc des rou
geurs insignifiantes qui ne lui causent aucune démangeaison. Il
Ce n’est sans doute pas assez pour nous en applaudir avec
avait la syphilis, la syphilis vaccinale, car le malade, qui n’accu
orgueil, mais cela doit pourtant nous permettre de constater le
sait aucun antécédent vénérien, dont les organes génitaux étaient
fait avec quelque satisfaction.
exempts de lésions syphilitiques et de leurs traces, portait aux
L 'Union n’étant l ’écho d’aucune coterie, mais un terrain scien
bras, cachées sous deux croûtes brunâtres, deux ulcérations de
tifique où tous les membres de la famille médicale sont conviés à
nature chancreuse. C’est ce qu’a constaté M. M illard, dont le
se donner la main, nous sommes persuadés qu’elle acquerra,
diagnostic a été continué de tous points.... par M. Uicord!
chaque année, plus d’importance et par conséquent plus de vita
Décidément le vent tourne aux doctrines contagionistes. La
théorie de M. Villem in sur la nature virulente de la tuberculose
lité, en voyant grossir le nombre de ses collaborateurs et en
mieux systématisant le concours d’un chacun.
ne pouvait venir dans un moment plus propice, et cependant elle
C’est dire que de nombreuses et notables améliorations sont
ne doit pas compter sur un triomphe prochain, si tant est qu elle
projetées pour le Journal. Mais nous préférons exciter quelque
triomphe jamais. L ’ ingénieux agrégé du Val-de-Gràce a mis, à
peu la curiosité de nos lecteurs que de vanter par anticipation
plusieurs reprises, deux lapins de la même portée dans les mê
les résultats auxquels nous espérons parvenir a l’aide du zèle et
mes conditions de régime et d'habitat ; à l ’ un il inoculait de
delà bonne volonté que, à défaut dequalités plus brillantes, nous
la matière tuberculeuse, et chez celui-là il trouvait au bout de
avons déjà mis et continuerons â mettre au service d’une œuvre
quelque temps divers organes, les poumons en particulier, gar
essentiellement utile.
nis de tubercules, tandis que l ’autre, immolé le même jour, n’a
Disons mieux : l ’œuvre est nécessaire, car, seule, elle peut
vait dans ses organes absolument rien qui ressemblât aux tuber
périodiquement dissiper cette atmosphère de silence qui pèse
cules. S’ agissait-il bien de tubercules? M. Villemin a étudié à
depuis trop longtemps sur les hommes et les choses de notre
fond les caractères microscopiques des matières tuberculeuses.
ville, où, cependant, le vrai mérite n’est pas plus rare que
Ses expériences méritent d’être
partout ailleurs. La modestie est certes une belle vertu que
refaites
et contrôlées par
d’autres observateurs.; on va donc imm oler en masse ces inno
l'on doit d’autant plus estimer qu’elle est plus rare ; mais
cents lapins. S’il est dans le vrai, il aura bien mérité de la scien
toutes les exagérations, même dans le bien , dégénèrent en dé
ce, mais pourra-t-il se prévaloir de sa découverte comme d’un
fauts; et s’il est toujours temps pour les anciens de se corriger
titre pour devenir membre.... de la Société protectrice des ani
de ceux qu’ils ont, il est utile aux jeunes d’en avoir le moins
maux ?
possible.
Le Comité de Rédaction.
Marseille. — Imprimerie A r n a u d , Ca YER e t C6, rue Saint-Ferréol, 57.
Nous faisons donc un appel aux uns et aux autres. Apportez,
chacun de vous, votre contingent. Vous y trouverez la double
�
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/2/185/TP-40029_Union-medicale-Provence_1866.pdf
ded38c10bb0e8ae0cf6547e1d5be9c01
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niveau, vers le 20 septem bre, M. X . aperçoit deux boutons qui
se convertissent bientôt en croûtes sèches et brunâtres.
Vers le 22 octobre, M. X com m ence â éprouver des douleurs
de tète très-violentes, qui rev ien n en t toutes les nuits et le pri
vent de sommeil ; il ressent aussi quelques douleurs vagues dans
la poitrine et observe sur la face an térieu re du tronc des rou
geurs insigniüantes qui ne lui causent aucune démangeaison. 11
avait la syphilis, la syphilis vaccinale, car le m alade, qui n'accu
sait aucun antécédent vénérien, dont les organes génitaux étaient
exem pts de lésions syphilitiques et de leurs traces, portait aux
bras, cachées sous deux croûtes b ru n âtres, deux ulcérations de
nature chaucreuse. C’est ce q u ’a constaté M. M illard, dont le
diagnostic a été confirm é de tous p o in ts.... par M. Ricord!
Décidément le vent tourne aux doctrines contagionistes. La
théorie de M. Villemin sur la n atu re virulente de la tuberculose
ne pouvait venir dans un m om ent plus propice, etcependanl elle
ne doit pas com pter sur un triom phe prochain, si tant est quelle
triom phe jam ais. L ’ingénieux agrégé du V al-de-G râce a mis, à
plusieurs reprises, deux lapins de la m êm e portée dans les mê
mes conditions de régim e et d’habitat ; à l’un il inoculait de
la m atière tuberculeuse, et chez celui-lâ il trouvait au bout de
quelque tem ps divers organes, les poum ons en particulier, gar
nis de tubercules, tandis que l’a u tre , im m olé le même jour, n’a
vait dans ses organes absolum ent rien qui ressem blât aux tuber
cules. S’agissait-il bien de tubercules? M. Villemin a étudié h
fond les caractères m icroscopiques des m atières tuberculeuses.
Ses expériences m éritent d ’ê tre refaites et contrôlées par
d ’autres observateurs; on va donc im m oler en masse ces inno
cents lapins. S il est dans le vrai, il aura bien m érité de la scien
ce, mais pourra-t-il se prévaloir de sa découverte comme d’un
titre pour devenir m em b re.... de la Société protectrice des ani
maux ?
Le Comité de Rédaction.
Marseille. — Imprimerie ARMa UD, Cayer et C°, rue Saint-Perréel, 57.
1
Ce n ’est sans doute pas assez pour nous en applaudir avec
orgueil, mais cela doit pourtant nous perm ettre de constater le
fait avec quelque satisfaction.
L Union n ’étant l’écho d ’aucune coterie, mais un terrain scien
tifique où tous les m em bres de la famille médicale sont conviés à
se donner la m ain, nous som m es persuadés qu’elle acquerra,
chaque année, plus d ’im portance et par conséquent plus de vita
lité, en voyant grossir le nom bre de ses collaborateurs et en
mieux systém atisant le concours d’un chacun.
C’est dire que de nom breuses et notables am éliorations sont
projetées pour le Journal. Mais nous préférons exciter quelque
peu la curiosité de nos lecteurs que de vanter par anticipation
les résultats auxquels nous espérons parvenir à l’aide du zèle et
de la bonne volonté que, à défaut dequalités plus brillantes, nous
avons déjà mis et continuerons à m ettre au service d’une œ uvre
essentiellem ent utile.
Disons m ieux : l’œ uvre est n écessaire,car, seule, elle peut
périodiquem ent dissiper cette atm osphère de silence qui pèse
depuis trop longtem ps sur les hommes et les choses de notre
ville, où, cependant, le vrai m érite n ’est pas plus rare (pie
partout ailleurs. La m odestie est certes une belle vertu (pie
l’on doit d ’autant plus estim er qu’elle est plus rare ; mais
toutes les exagérations, m êm e dans le bien , dégénèrent en dé
fauts; et s’il est toujours tem ps pour les anciens de se corriger
de ceux qu'ils ont, il est utile aux jeunes d’en avoir le moins
possible.
Nous faisons donc un appel aux uns et aux autres. Apportez,
chacun de vous, votre contingent. Vous y trouverez la double
- 1
�—
2
—
satisfaction que produisent l'accom plissem ent d ’un devoir et un
concours efficace apporté h l’œ uvre com m une.
Quant au Comité de rédaction, il ne faillira pas à la tâche qui
lui est imposée par le suffrage de ses confrères, et à eux de dé
cider si dans toute question grave, pouvant intéresser la pro
fession, nous avons hésité un instant a défendre avec énergie
de légitimes intérêts peu courtoisem ent attaqués. O r, le passé
doit répondre de l'avenir, et l’on peut com pter su r une coura
geuse indépendance toujours com patible avec les convenances et
la m odération, im posées a une polém ique honnête et loyale.
Serait-ce trop présum er que de com pter su r l’appui moral
de tous nos confrères ?
•
Le Comité de rédaction.
DE LA MALADIE KYSTIQUE DU TESTICULE,
à propos de l’ouvTage duDrE. Conclie (De la Maladie kystique
du testicule, Lyon, 4865), par le Dr SEUX fils.
Malgré les préoccupations de tout genre occasionnées par l’ap
parition en Europe du terrible 11* au indien, l'année 1865 a fourni
un contingent raisonnable de travaux scientifiques. Les recher
ches médicales figurent pour une large pari au m ilieu de ces pro
ductions de l’esprit, et nous avons eu la satisfaction de voir quel
ques-unes des plus intéressantes d’entre elles ém aner delà pro
vince.
Au nom bre de ces dernières m érite de figurer le mémoire du
docteur E. Lonche (de Lyon) sur la Maladie kystique du testi
cule. Ce travail, indépendam m ent de sa valeur intrinsèque, ale
m érite, inappréciable h notre ép o q u e, de renferm er des idées
nouvelles et de contenir de précieux docum ents sur une maladie
encore peu connue.
C'est A. Cooper qui, au com m encem ent de ce siècle, appela
le prem ier sur elle l’attention des chirurgiens. Avant lui, la
maladie kystique était com plètem ent ignorée; les auteurs fai
saient ren trer dans la catégorie des cancers les divers cas de
kystes testiculaires qu ’ils avaient eu h exam iner.
Cette erreu r persista assez longtem ps dans la science. Plu
sieurs années après la prem ière ablation de tumeur kystique
pratiquée par Cooper, M. Cruveilhier p u b lia, dans son grand
traité d ’anatom ie pathologique, une observation de cancer alvéo
laire du testicule avec matière perlée. M. Conclie considère ce
fait comme un exem ple de maladie kystique du testicule.
Nous devons avouer q u ’après avoir lu attentivem ent l’obser
vation dont il s’agit et exam iné la magnifique planche jointe au
texte, nous n ’avons pas conservé le m oindre doute. Évidem
ment, dans le fait m entionné par M. Cruveilhier, il s’agissait
d’une tum eur kystique,
Cependant le traité d’anatom ie pathologique fut publié de 1829
à 1835; si ce grand ouvrage ne fait pas m ention de la maladie
kystique du testicule, si surtout lo savant professeur de Paris a
donné le nom de cancer alvéolaire à une tum eur dont la dispo
sition kystique était évidente, il faut adm ettre que la maladie
dont M. Couche vient de donner une description si complète
préoccupait fort peu les esprits il v a trente ans.
Et en effet, à part quelques chirurgiens anglais dont l'atten
tion avait été mise en éveil par le travail de A. Cooper, personne,
dans les prem ières années de ce siècle, ne songeait a étudier les
kystes testiculaires.
Ce n ’est q u ’a partir de 183-4 que nos auteurs français com
mencent à signaler cette maladie.
Dès lors cette étude prend plus d’extension. Les journaux de
médecine reçoivent divers articles; plusieurs pièces sont présen
tées aux sociétés anatom iques, et enfin, les observations de
venant plus nom breuses, des travaux plus im portants appa
raissent.
En 1854 et 1856, MM. T ré la te t Robin, en France, C urling,
!v
..
■■
�— 1 —
—
en A ngleterre, s’efforcent d'ajouter a l’histoire des tumeurs kys
tiques du testicule et insistent particulièrem ent sur la nature de
la maladie et la description des sym ptôm es.
En 1861, un Français, M. B outin, prend le prem ier, pour
sujet de thèse inaugurale, la maladie kystique, et cite de nou
veaux faits.
Enfin, cette année, M. le docteur Couche publie, sur le même
sujet, une monographie com plète et enrichit la science de sept
observations nouvelles.
Comme on le voit, dirons-nous avec n otre confrère de Lyon,
l'étude de la maladie kystique est essentiellement d'origine an
glaise. N ous ajouterons cependant que notre pays a dignement
réparé le temps perdu. Sur trente observations de maladie kysti
que, dix-huit ont été publiées en France.
Depuis onze ans, les kystes du testicule ont été le sujet de cinq
travaux sérieux. Sur ce nom bre, un seul, celui de Curling, pro
vient de l'A ngleterre ; les quatre au tres ont été composés par
nos compatriotes.
A notre confrère de Lyon revient en particulier l’honneur d e
voir publié le prem ier, avec toute l’au to rité que donne l’expé
rience et eu so basant sur de nom breuses observations, l'histoire
complète de la maladie kystique.
Le travail du docteur Conche est divisé en deux parties prin
cipales. Dans la prem ière, que l on.pourrait appeler partie ana
lytique, Fauteur recueille les faits, les exam ine et étudie leurs
moindres détails; il observe la n ature et l’analyse avec soin.
Dans la seconde, à laquelle nous donnerions volontiers le nom de
partie synthétique, il ram asse en un seul corps tous les matériaux
épars, les réunit les uns aux au tres et en form e ce tout complet,
celte maladie kystique-type qui lui avait d ’abord apparu vague
m ent, perdue dans le nom bre et l’universalité des faits isolés.
Cette division seule constitue à nos yeux un des principaux
mérites de l’œuvre du docteur Conche, car elle indique un esprit
sérieusem ent philosophique.
{
5
—
L ’auteur a évidem m ent une préférence m arquée pour la m é
thode analytique et objective. Si, h notre époque, en m édecine,
en philosophie, etc., les esprits sont égarés par tant de faux sys
tèmes, c’est q u ’on n'observe pas avec assez de soin les faits du
monde physique et ceux du monde moral. À ce com pte, nous
devons rem ercier M . Conche d’avoir établi en principe, par la
division générale de son ouvrage, l’im portance de la méthode
d’observation.
La partie analytique est subdivisée en deux chapitres. Dans
le prem ier, Fauteur résum e les principaux travaux composés
avant lui sur la maladie kystique : nous en avons parlé au com
mencement de notre article.
Le second chapitre contient la description des faits que le doc
teur Conche a pu étudier personnellem ent. L’auteur présente
sept nouvelles observations de maladie kystique, avec autopsie
de la tum eur. Elles sont scrupuleusem ent rédigées. La partie
nécropsique est traitée avec soin ; peut-être, seulem ent, pourraiton dem ander un peu plus de précision dans les détails m icrogra
phiques.
Avec les m atériaux précédents, l’auteur construit la seconde
partie de son ouvrage, la partie synthétique.
Celle-ci renferm e la description détaillée de la maladie kysti
que, histoire très consciencieusem ent écrite, fort intéressante et
pleine d’aperçus nouveaux et ingénieux.
Nous ne saurions trop recom m ander en particulier les deux
chapitres consacrés à l’anatom ie pathologique. Il est facile de
voir que notre confrère lyonnais s’est occupé tout spécialem ent
de cette partie de son travail. Et, sans contredit, c ’était celle qui
présentait le plus d’in térêt puisqu’elle pouvait perm ettre d'ac
quérir des données certaines sur la nature et le siège de la
maladie, points sur lesquels la divergence des opinions était
grande.
�— 6 —
Dès le principe, M. Gonche pose carrém en t la question. Quelle
est la nature de la maladie kystique du testicule ?
L ’auteur n'hésite point *a considérer cette tum eur comme
constituée par deux élém ents essentiels et indispensables: l'élé
ment fibreux, le kyste.
Le premier forme la base, la traîne de la tu m e u r; il provient
de l’hypertrophie du tissu fibreux contenu dans l’organe testicu
laire.
Les kystes se forment au centre du tissu fibreux et on peut
leur reconnaître quatre m odes de développem ent.
Qu'il y ait ou nou, dans ces tu m eu rs, de la m atière cartilagi
neuse, cancéreuse ou tuberculeuse, c’est ce dont l’auteur s in
quiète peu. Si la tram e est form ée par du tissu fibreux, si la dis
position kystique existe , ces productions m orbides, quelque
com pliquées, quelque hétérom orphes q u ’elles soient, n’en doi
vent pas moins être langées dans une seule et m êm e classe de
tum eurs pour lesquelles notre confrère propose le nom de fibiokystiques.
Celte manière de voir nous parait des plus élevées. Sans con
tredit, M. Conche est un excellent observateur ; mais il vise plus
haut. Si l'observation analytique doit précéder toute autre élude,
elle ne constitue pas pour lui toute la science. E tudier sérieuse
ment les faits; les généraliser de plus en p lu s; déduire de
la connaissance des faits celle des lois qui les régissent ; arriver
aux données les plus sim ples, tel est le m ouvem ent que doivent
suivre les sciences pour se rapprocher le plus possible du but
commun qu’elles poursuivent, la certitude dans l'unité et
l'unité dans la certitude. N otre confrère de Lyon connaît ce but
mieux que personne et c’est celui vers lequel il m arche.
Aussi, poussant plus loin encore cette idée de généralisation,
lui voyons-nous adopter l’opinion de ceux qui considèrent les
tum eurs fibro-kystiques du te s tic u le , de l’ovaire, des reins,
comme appartenant a une seule et m êm e famille.
Ce n'est pas tout : 1 origine des tu m eu rs fibreuses proprement
-
dites est tout a fait sem blable a celle des tum eurs kystiques et
ces deux classes de maladie doivent ren trer dans le m ême cadre
pathologique, celui du tissu fibreux. Le point de départ est le
même pour ces lésions si diverses. Toutes proviennent d’une
hyperplasie du tissu connectif et se rattachent h une lésion pri
mitive, l’hypertrophie fibreuse.
Telle est la pensée générale qui dom ine tout le travail de *
M. Conche. Les recherches de notre confrère doivent nous ins
pirer une confiance d’autant plus grande que l’auteur n ’a adopté
des idées dont la grandeur était bien laite pour le séduire, q u ’après les avoir soum ises au creuset de l’expérience, au contrôle
de la m éthode analytique.
Après la nature de la maladie kystique, un des points qui ont
attiré, d’une m anière spéciale, l’attention du docteur Conche,
est le siège de la tum eur, c’est-à-d ire la partie de l’organe testi
culaire prim itivem ent envahie par le mal.
A. Cooper croyait que la maladie siégeait dans les tubes sém inifères.
M. Robin la fait naître de l’épididyme.
D’autres auteurs croient que la tum eur kystique se développe
dans la tunique albugiuée.
Curling, enfin, la place dans le rete testis, c’est-à-dire dans
les tubes droits du corps d’IIigmore.
M. le docteur Conche n’adopte aucune de ces opinions. E t,en
réalité, si nous adm ettons (ce qui paraît prouvé d’une manière
certaine) que la tram e de la tum eur kystique est essentiellem ent
fibreuse, nous aurons quelque peine à placer le siège de la ma
ladie dans l épididym e ou les tubes sém inifères, parties complè
tement.dépourvuesde tissus fibreux. D’ailleurs,dans lesdiverses
tum eurs que notre confrère a exam inées, l’épididyme était sain
ou atrophié; quelquefois il avait com plètem ent disparu; dans
aucun cas il n était dégénéré.
�D'autre part, l’auteur n'a jamais rencontré les tubes séminifères au milieu du parenchym e de la tu m e u r; leu r place, par
faitement distincte, a toujours été dans le voisinage de la pro
duction fibro-kyslique, et ils form aient la une m asse simplement
atrophiée comme l'épididym e.
Pour toutes ces raisons, M. C o n ch erejette l’opinion d’A. Cooper et celle de M. Robin.
L ’auteur se m ontre aussi difficile h l’égard du rôle que peut
jouer l’albugiuée dans la production de la m aladie, l’enveloppe
fibreuse du testicule étant constam m ent, au début de la tumeur,
séparée de la production m orbide par le parenchym e de l’organe
sperm atique.
L’opinion dont M. Conche se rapproche le plus est celle de
C urling; seulem ent, tandis que le chirurgien anglais place le
siège unique de la tum eur dans les canaux du corps d’Highmore,
notre confrère de Lyon, sans nier que le rete testis puisse
être envahi par le m al, soutient que la m aladie part du tissu fi
breux, c’est-à-dire du corps d ’H igbm ore lu i-m êm e.
Comme il est facile de le voir, l'opinion du docteur Conche est
beaucoup moins absolue que celle de C u rlin g ; pour ce, nous la
croyons plus sérieuse et plus vraie.
N oublions pas, en effet, que f élém ent fibreux constitue la trame
de la tum eur kystique ; si cette dern ière siège uniquem ent dans
les canaux droits, on se dem ande a quel propos cet élément vient
faire irruption au milieu des tubes et des kystes intra-lubulaires.
Au contraire, on conçoit très bien que le corps d ’Ilighm ore, dé
veloppé et transformé par suite de l’hypertrophie übreuse , en
vahisse le rete lestis, pénètre à travers les vaisseaux et enveloppe
com plètem ent ces derniers en les transform ant en kystes.
Toutefois, malgré le désir que nous aurions d ’adopter entiè
rement 1 opinion si séduisante et si rationnelle du docteur Conche,
nous devons faire nos réserves. L 'au teu r (il nous le dit luimême), n ’a eu q u ’une seule fois l’occasion d ’observer la tumeur à
son début; les six autres m alades, d ont il a publié l’observation,
étaient déjà arrivés à une période trop avancée pour que l’exa
men de la tu m eu r ait perm is de reconnaître le point de départ
du mal. Dès lors, ne som m es-nous pas tenus de n ’adm ettre q u ’à
titre d ’hypothèse, non encore form ellem ent dém ontrée, la théo
rie de notre confrère de Lyon ?
L’observation de maladie kystique publiée dans le Montpellier
médical du mois de m ars 1861, observation que M. Conche cite
dans le prem ier chapitre de son m ém oire, contient une phrase
qui augm ente nos doutes et les rend plus légitim es. VL Cade,
railleur de cet article, term ine de la façon suivante l’exposé ana
tom o-pathologique de la tum eur :
« Chose étonnante et incom préhensible ! au milieu de ce d é« sordre affreux qui a envahi tous les élém ents constitutifs de
« l’organe sécréteur du sperm e, nous constatons l’intégrité par« faite du rete testis et des vaisseaux afférents sinueux aux« quels il donne naissance. »
Rem arquons que la tum eur dont il s’agit pesait “ 00 gram m es
et avait le volum e de la tète d un h élus à term e ! S ’il faut ad
m ettre que la maladie kystique débute toujours par le corps
d’H igm ore,'peut-on logiquem ent supposer qu’une tum eur puisse
acquérir un volum e aussi considérable en respectant intégrale
ment le rete testis ? Cet organe est contenu dans l’épaisseur
même du corps d ’Higm ore ; com m ent le mal a -t-il pu ne pas
l’envahir?
Nous nous dem andons si la tunique albuginéc ne peut pas,
dans certains cas, être le point de départ de la maladie kystique.
S’il en était ainsi, on com prendrait facilement qu'une tum eur
pareille à la précédente eût pu se développer sans porter atteinte
au rete testis situé assez loin du siège prim itif du mal.
Cette idée a été soutenue par quelques auteurs ; nous nous
contenions de la rappeler en
sans pr
oit
des m eilleures. 11 est fort possible que le lait cité par M. Cade
soit une de ces exceptions qui ne peuvent infirmer ia règle. Pour
notre part, nous désirons bien sincèrem ent que VI le docteur
�Couche poursuive ses recherches et que les laits lui donnent de
plus en plus raison.
Nous sommes plus intéressés p eu t-être q u ’on ne pourrait le
croire au succès des idées de notre confrère. P our qui a lu le
mémoire du docteur Couche il en coûte de renoncer a certaines
explications ingénieuses qui subjuguent, dès l'ab o rd , l’esprit.
Nous ne croyons pas que personne ait plus clairem ent exposé la
marche de la maladie kystique, ni expliqué d 'u n e m anière plus
logique le développement progressif de la tum eur.
Un trouble se fait dans la nutrition du corps d ’H igm ore. Le
tissu libreux se développe et se transform e en un noyau dans
l’intérieur duquel de petits kystes com m encent à apparaître. A
m esure que cette tum eur se développe, com prim ée en haut et en
arrière par le bord supérieur de la tunique albuginée renforcée
en ce point du corps d’H igm ore, elle se développe du côté qui
lui présente le moins de résistance, c’e st-à -d ire en bas et en
avant vers la substance testiculaire. Il se passe alors un fait très
rem arquable : lîxés à leur partie supérieure, au niveau du rete
testis, mais libres par leur extrém ité inférieure, les tubes sém inifères s’écartent pour livrer passage à la tu m eu r, se relèvent
latéralem ent et rem ontent sur les côtés de la production m or
bide. Ce mouvement s’accentue de plus en plus à m esure que la
tum eur se développe, et il arrive un m om ent où to u t le paren
chyme du testicule est refoulé à la partie p o stéro -su p érieu re de
la masse fibro-kystique. Alors la tum eur a parcouru to u te la lon
gueur du testicule, et elle se trouve en contact direct avec la face
interne de la tuniqne albuginée.
Si le produit morbide continue à se développer, les tubes séminifères, comprimés de plus en plus, s’atrophient et à La longue
disparaissent complètem ent. Enfin, l’épididyme lu i-m êm e dim i
nue peu 'a peu de volume et disparaît à son tour.
Tel est le m écanism e ingénieux par lequel le docteur Conche
explique fenvahissem ent com plet de l’org an e'rep ro d u cteu r. Si
l’idée mère, celle de l’hypertrophie fibreuse, n ’appartient pas à
notre confrère lyonnais, il a du m oins le m érite d’avoir fait une
excellente application de cette théorie générale.
Les recherches su r la natu re, le siège, la m arche de la maladie
kystique, prennent à elles seules une grande partie de l’ouvrage
du docteur Conche. Les chapitres qui suivent, consacrés à I etude des sym ptôm es, des causes, du diagnostic, sont rédigés
avec tout lesoin possible ; seu lem en t, ces diverses questions étant
peu susceptibles de d o n n er lieu à des développem ents nouveaux,
nous ne devons pas nous étonner si elles n ’ont pas pour nous
tout fatlrait des découvertes anatom o-pathologiques.
Il est cependant dans cette dernière partie des points qui m é
riteraient d’attirer longuem ent n otre attention. T elle est, par
exemple, la discussion soulevée par notre confrère lyonnais, à
propos de la différence qui existe en tre la tumeur kystique car
tilagineuse et l’enchondrôm e du testicule.
Certains chirurgiens trouveront p eu t-être cette distinction oi
seuse et pour le m oins inutile. Que la m aladie débute par la for
mation d ’un tissu enchpndrom ateux ou d 'u n produit fibro kysti
que ; que le cartilage se développe dans les kystes, ou que les
kystes prennent naissance dans le cartilage, le résu ltat final ne
sera-t-il pas le m êm e ? La tu m eu r enchondrom ateuse ne présenlera-t-elle pas toujours dans son développem ent les m êm es
phases? Dès-lors, à quoi bon vouloir différencier deux états
morbides identiques ?
Nous ne pouvons adopter cette m anière de voir. Il est possi
ble que, dans les deux cas, la m arche et le pronostic de la ma
ladie ne varient pas d ’une m an ière considérable ; là n 'est pas la
question capitale. Ce qu’il im porte de ne pas perd re de vue c ’est
l’idée générale (pii dom ine tout le travail du docteur Conche,
idée en vertu de laquelle fa u te u r fait re n tre r dans le cadre pa
thologique du tissu fibreux la maladie kystique du testicule.
Dans tous les cas soum is à son observation, fa u te u r a vu
�— 12
l'élém ent fibreux constituer la base des kystes testiculaires.
Donc :
Toute tumeur h trame fibreuse dans laquelle se développent
des kystes est dite tumeur kystique.
Si le cancer , le cartilage ou le tubercule apparaissent au mi
lieu d'une tumeur semblable, celle-ci est dite alors tumeur
kystique «ompliquêe.
/lu contiaire, toute tumeur à trame tuberculeuse, cancéreuse
ou cartilagineuse dans laquelle se développent des kystes , est
dite simplement tumeur cartilagineuse , cancéreuse ou tubercu
leuse ; jam ais on ne doit lui donner la dénomination de kys
tique.
11 nous semble, si nous ne faisons erreu r, que les trois propo
sitions précédentes résum ent la pensée de notre confrère lyon
nais. Nous adoptons, pour notre part, cette opinion et nous fé
licitons NL le docteur Conche d'avoir établi avec tant de soin le
diagnostic différentiel entre l’enchondrôm e du testicule et la tu
meur kystique. Cette distinction n’a p eu t-être pas une im por
tance très grande au point de vue pratique, m ais elle élargit le
champ de la pathologie générale et simplifie les données qui ser
vent de base a la classification des produits m orbides.
D'après ce qui précède, il est naturel q u eM . Conche ne puisse
résoudre, par un oui ou par un non, la question du pronostic.
La maladie kystique du testicule est-elle bénigne ? A. Cooper
répond par l'affirmative, M. Velpeau par la négative. N otre con
frère de Lyon adopte une opinion interm édiaire et se prononce
pour la bénignité ou la m alignité de la tu m eu r, selon que cette
dernière est simple ou qu elle est com pliquée d’un élém ent de
mauvaise nature.
Cette partie du travail du docteur Conche m anque un peu de
netteté. La pensée de l'auteur n ’est pas développée d’une ma
nière claire et précise. Tout en concluant a la bénignité des tu
meurs simples, notre confrère parait croire qu elles peuvent, à
un moment donné, se transform er et devenir m alignes. S ’il en
est ain si,l’infection de l’économ ie traduite par la dégénérescence
des ganglions, la reproduction de la tu m eu r et la m ort n ’est plus
sous la dépendance d 'u n vice général, d ’une disposition idio
syncrasique, m ais elle est consécutive à un état local.
Cette m anière d'envisager la question ne nous sem ble pas des
plus concluantes. Dans notre pensée, une tum eur kystique sim
ple peut devenir m aligne, non pas parce q u ’il y £f transform ation
des produits pathologiques, mais parce que la disposition m aligne
que I individu porte en lui se révèle à un m om ent donné en dé
terminant une infection générale qui se localise en prem ier lieu
sur la tum eur. Si le sujet n’est pas prédisposé à cette générali
sation, la tu m eu r kystique restera éternellem ent bénigne.
Telles sont les idées que soutenait B onnet, de Lyon, à propos
du cancer. M. le docteur Conche ne les partage pas, et paraît
adopter l’opinion de M. V elpeau, en vertu de laquelle l’infection
cancéreuse est toujours consécutive a un état local
La conséquence directe de la théorie propagée par le savant
professeur de P aris, est l’obligation de prévenir la généralisation
maligne en faisant disparaître toute affection locale.
M. Conche arrive à ce lle conclusion obligée, et term ine son
travail en conseillant, dans tous les cas, l’ablation du testicule.
« Aussi cro y o n s-n o u s que l'on doit recourir a l'ablation du
« testicule, non dans l’espoir de voir la guérison définitive su i« vre l’opération aussi souvent que le disait A. Cooper, mais
« pour délivrer le m alade d ’une tu m eu r qui, bénigne, est néan« moins gênante, et, parfois douloureuse, peut enfin devenir
« plus tard cancéreuse ; (pii, m aligne au contraire, est une cause
« puissante de généralisation, que l’on doit supprim er le plus
« prom ptem ent possible. »
Sur ce pefint, com m e sur la question du pronostic, nous ne par
tageons pas com plètem ent l’opinion de notre confrère lyonnais.
Le seul cas de m aladie kystique que nous ayons pu observer
�-
— 14 —
est celui d’un ouvrier tourneur âgé de 55 ans. Cel hom m e, de
puis l'dge de six ans, portait dans le testicule gauche une tu
m eur qui, après avoir m arché très lentem ent pendant un grand
nom bre d’années, s’était notablem ent accrue dans l'espace de
quelques mois. Le malade, craignant de voir la grosseur attein
dre un volume considérable, et gêné d’ailleurs de plus en plus
par elle, demanda l’opération. Celle-ci fut pratiquée. On trouva
le testicule transform é en une m asse dure et com pacte, an centre
de laquelle existaient plusieurs kystes contenant de la sérosité
ci tri ne.
Voila un cas dans lequel l’opération était rationnellem ent in
diquée. Mais supposons que le malade eût consulté un chirur
gien dix ans plus tôt, alors que la m aladie paraissait stationnaire;
aurait-on pu proposer l’opération ? N ous ne le croyons pas.
A cette époque, en effet, il y avait lieu d’espérer que la tumeur
ne deviendrait pas plus volum ineuse ; elle était indolore, peu
gênante; elle n ’exposait, par elle-m êm e, l’individu a aucun
danger; bref, il était tout h fait inutile de soum ettre le malade
aux hasards d’une opération.
Dans le cas que nous signalons, l’ablation du testicule est de
venue, il est m i , nécessaire. Mais puisqu’on a vu une maladie
kystique rester à peu près stationnaire pendant plus de vingt
ans, n ’est-on pas autorisé à croire que certains m alades pourront
conserver plus longtem ps encore une tu m eu r pareille sans en
être considérablement incom m odés ?
En conséquence, il nous paraît plus sage de n’adopter, qu’en
faisant de certaines réserves, la règle do conduite tracée par le
docteur Conche.
d'hom m es savent trouver en eux assez d’énergie et de force pour
résister à l’engourdissem ent de la province. N ous n ’en devons
estimer que davantage ces esprits distingués qui donnent l’exem
ple aux au tres, ces hom m es de travail qui, éloignés du foyer in
tellectuel de la capitale, conservent intacts dans leur âme le goût
de la science et l’am our de l’étude.
Dr S ëüx fils.
DES ENDUITS IMPERMÉABLES EN MÉDECINE.
I.
Depuis dix-lm it ans environ, M. de R obert de Latour s’efforce
de vulgariser deux idées étroitem ent solidaires à ses yeux, une
théorie et une m édication de l'inflam m ation. Pour lui, l’infiammalion est u n e exagération locale de la calorification, com m e la
fièvre est l’exagération générale de celte fonction. Dans toute
phlegmasie, l’augm entation de la chaleur locale est le fait essen
tiel et prim itif, elle déterm ine la dilatation du sang, produit la
distension des tubes circulatoires et explique ainsi tous les phé
nomènes. De plus, la com m unication de la peau avec l’air est in
dispensable à la calorification. Intercepter cette com m unication
c'est donc m odérer et éteindre la chaleur et par conséquent m o
dérer et éteindre l’inflam m ation elle-m êm e. De lh le rôle des
enduits im perm éables. Telle est en deux m ots la doctrine.
Toutefois ces idées o n t été lentes h se répandre, m algré le ta
lent et la persévérance de leur courageux prom oteur. Sa théorie,
a part de rares exceptions, n ’a ren co n tré que l’indifférence, et
sa m édication elle-m êm e, longtem ps délaissée, n ’a fixé l’attention
que depuis ces d ern ières années seulem ent. D’où vient cela?
L’idée de M. de R obert de la T our est sim ple et originale, facile
à vérifier dans son principe et ses applications; elle a une im
portance doctrinale et pratique incontestable ; elle touche in ti
mement â la physiologie, a la pathologie et h la thérapeuthique ;
�—
16
elle attaque les bases de notre science, le fond m êm e de nos
convictions ; elle a, en un m ot, tout ce q u 'il faut pour intéresser
et passionner au besoin. Le silence fait au to u r d'elle a donc lieu
d’éto n n er, surtout en ce tem ps de recherches infatigables et
d’ardentes investigations où il suflit de lancer une idée, souvent
de la plus mince valeur, pour voir chacun à l’cnvi s’en emparer
l’expérim enter, la contrôler et s'efforcer de la ju g er sous toutes
ses faces. L ue condam nation partie de h a u t— j ’y reviendrai plus
loin — condamnation prém aturée ou mal com prise, n ’a pas été
é tra n g e r^ c e tte espèce d’ostracism e. H eureuse ou m alheureuse,
volontaire ou involontaire, l'influence d ’un grand nom est incal
culable, et l’on a vu plus d ’une erreur s’abriter sous son égide.
Certes, je n’accusé pas ici le talent, celle éclatante et éternelle
glorification de l’esprit hum ain, je déplore plutôt l’aveuglem ent
des hommes à accepter sans exam en la parole du m aître et leur
trop facile abdication personnelle devant l’au to rité du nom.
Q uoiqu'il en soit, au lieu du dédain, l’idée de M. de R obert de
Latour m érite d ’être sérieusem ent é tu d ié e ; il est tem ps de la
soum ettre largem ent au creuset de l’expérience et de savoir
tout le parti que la science et l’art en peuvent tirer. Pour moi,
me bornant a envisager le côté th érapeutique de la question, je
vais exposer sincèrem ent les résultats positifs et négatifs de ma
pratique individuelle, et continuer ainsi l’œ uvre déjà ébauchée
par quelques m édecins, partisans ou adversaires de la m éthode,
par MM. Boo.nafont, R icord,V elpeau, Sw ain, P aten ô tre.S tro lh ,
de Strasbourg ; Benoist, de N euville; Gostes et V enot, de B or
deaux ; M-d rot, de Sainl-D izier ; T rêv es, D reyfus, Homolle,
Aubrun, Moreau, Perrin. Que cet exem ple soit suivi, et il peut
1 être aisém ent, car l’usage des enduits im perm éables est, je
crois, plus l'p an d u aujourd'hui que ne sem blent le témoigner
les rares communie lions de la presse ; ce sera le moyen d'ap
porter une solution définitive au problèm e et d ’être fixé sur la
valeur exacte de la m édication isolante.
J emploie les enduits imperméables depuis trois ans, je lésai
0
—
17
—
expérimentés dans un très grand nom bre de phlegm asies ou
ilaftections diverses, dans le rhum atism e articulaire aigu, les
inflammations glandulaires, l’orchite, l’adénite cerv icale, le
phlegmon m am m aire, le bubon inguinal, l’en to rse, les violences
articulaires, la p érito n ite, l’érysipèle, l'angioleucite, la plilegmatia alba dolens; les tu m eu rs variqueuses enflam m ées, les
phlegmons et les contusions graves des m em bres, l’hygrom a,
les brûlures des prem ier et deuxièm e degrés, les panaris, les
gerçures du m am elon, etc. A la v érité, je n ’ai pas enregistré
tous les faits particuliers, m ais j ’ai exactem ent recueilli environ
soixante observations. C’est principalem ent sur ce chiffre, dont
la valeur num érique ne saurait être niée, que je vais baser une
appréciation som m aire de la m éthode. Je passerai successive
ment en revue les effets de l’enduit isolant dans chacune des
affections précédem m ent énum érées.
II. — RHUMATISME ARTICULAIRE AIGU
I
Mes notes signalent une quinzaine d’individus d ’âge et de
sexe différents, attein ts de rhum atism e articulaire aigu et traités
par le collodion élastique. R arem ent fixe et lim ité â une seule
jointure, le rhum atism e était le plus souvent g én éralisé, am bu
lant et suivi de fièvre. L ’enduit im perm éable m’a rendu alors
des services réels; com m e m édication locale, il est, selon m oi,
bien supérieur â tous les topiques connus ; il a une rapidité, une
sûreté d’action in co n testab les; g én éralem en t, deux heures après
son application, les douleurs m êm e les plus violentes s’apai
sent, et le gonflem ent ne tarde pas â se dissiper â son tour,
comme le prouvent, a la surface cutanée, les rides nom breuses
de la couche im perm éable. J'ai vu plus d 'u n e lois de m alheureux
rhumatisants, apres avoir épuisé en vain tous les calm ants, b é
nir, dans le collodion, le m oyen qui seul arrêtait prom ptem ent
leurs souffrances et leur rendait la tranquillité et le som m eil
perdus depuis longtem ps. Je me rappelle, entre autres exem
ples, une jeune fille de dix-neuf an s, attein te de rhum atism e
�19
articulaire aigu généralisé. Du l " a u 10 m ars 1864, la plupart
de ses jointures avaient été en v ah ies; l’aco n it, le colchique, le
sulfate de quinine, l’opium avaient été donnés sans succès du
rable. Les douleurs continuaient d ’être excessives. Le iO, les
deux genoux, les deux articulations tihio-laisiennes et le poi
gnet droit, sim ultaném ent pris, étaient rouges, tum éfiés et très
douloureux. Le soir, je recouvris, à la fois, ces cinq jointures de
collodion riciné; les douleurs furent totalem ent enrayées en
deux ou trois heures, et la nuit apporta un calm e très satis
faisant. Cela n’em pêcha pas le rhum atism e, essentiellement
m obile, de se porter successivem ent sur de nouvelles articu
lations, mais toujours le mal céda rapidem ent à l’action du
topique.
Les mouvem ents du m alade, le frottem ent dos couvertures,
les sueurs si abondantes chez la plupart des rhum atisants, dé
chirent et détachent de bonne heure l’enduit isolant ; souvent
même au bout de trente-six ou quarante-huit heures, celui-ci,
em porté par vastes lam beaux, laisse l’articulation entièrement
découverte, On évitera cet inconvénient en protégeant le collo
dion avec une cravate de m ousseline, un tissu quelconque, et
dès qu’il comm encera à se fendiller et h tom ber, on le rempla
cera par une couche nouvelle. Cette précaution est de rigueur;
sans cela, la phlegm asie et les douleurs articulaires incomplète
m ent éteintes, ne tardent pas à se réveiller avec toute leur in
tensité. Il suffit, d’ailleurs, de revenir h la m édication pour les
voir »e dissiper aussitôt.
Quel est le rôle du collodion, dans le rh u m atism e? Il est évi
dem m ent nul contre l'affection générale, la diathèse ; mais il est
remarquable dans l’attaque rhum atism ale com posée d’une série
plus ou moins nom breuse d’arth rites partielles. En effet, l'en
duit imperméable dim inue singulièrem ent la violence et la du
rée de chaque atteinte articulaire, il apaise les souffrances, et
par la modère les réactions générales, assure le calme et le som
meil, m aintient le b ien -être, prévient les troubles profonds de
—
la nutrition, réduit une m aladie ém inem m ent douloureuse, la
simplifie et en abrège la convalescence.
III. —
INFLAMMATIONS GLANDULAIRES.
Ici les effets du collodion ont été plus variables. On va
en juger par les résu ltats suivants que m ’ont fournis l’o r
chite, l’adénite cervicale, le phlegm on m am m aire et le bubon
inguinal.
— En 185 4 , le traitem en t de l’orchite donna lieu,
au sein de l’A cadém ie de m édecine, à une discussion m ém orable
dans l'histoire des enduits im perm éables. Cette année fut pour
eux une date m alheureuse. V aillam m ent défendus par M. Bonnafont, mais condam nés par l'im posante autorité de MM. Ricord
et Velpeau, ils reçu ren t alors un coup funeste, et rencontrèrent,
j’en suis sûr, une des principales causes du long discrédit qui les
a frappés. En vain M. de R obert de L ato u r, pour sauver la m é
thode, s’en prit-il aux im perfections du procédé adopté; en vain
accusa-t-il le collodion, ses inconvénients, son insolubilité, son
défaut d’élasticité, la com pression douloureuse q u ’il exerce sur
les parties cylindriques peu volum ineuses, tels que le scrotum ,
les doigts, m êm e l'avant-bras, le bras et le sein ; en vain insistat-il sur la nécessité de lui su b stitu er, dans ces cas, un enduit
facile a enlever, par exem ple une solution de gom m e appliquée
sur la région m alade et saupoudrée d’am idon ; les explications et
les efforts de ce distingué confrère, appuyés sur de solides preu
ves cliniques, ram en èren t difficilem ent, lentem ent l’opinion ; la
médication isolante fut com prom ise, et longtem ps ses avantages
restèrent m éconnus.
J’ai traité cinq orchites par les enduits im perm éables : quatre
par le collodion riciné et une parla solution de gom m e. Avec ce
dernier en d u it, le résultat a été satisfaisant ; au contraire, il a
été défavorable avec le collodion, car je com pte un succès sur
trois revers. M algré leur insuffisance num érique, ces faits ne sont
pourtant pas sans in térêt. Ils confirm ent les argum ents et les
Orchite.
�20
—
réserves de M. de Robert de L atour et sem blent dém ontrer
dans l’orchite, les avantages de la solution gom m ée amidonée
sur le collodiou. Voici d’ailleurs, en peu de m ots, mes cinq ob
servations :
Observation I. — Garçon de 16 ans, lym phatique. Orclûte
spontanée. Invasion le 8 janvier 1864. Le 14 état suivant : testi
cule et épididymc gauches de la grosseur d’un œ uf de poule ; cor
don volumineux ; peau du scrotum rouge, tum éfiée, adhérente ;
douleurs, élancem ents s’irradiant au flanc gauche et aux reins ;
im possibilité de dorm ir la nuit. Collodion. —«■Le 15, nuit très
bonne; pas de souffrance; som m eil prolongé sans interruption.
Le m atin, la diminution de l'orchite est frappante, elle est d’ail
leurs attestée par les rides nom breuses du collodion ; douleurs
calmées partout. La pression sur la tum eur développe a peine de
la sensibilité. — 18 janvier, l’inflam m ation est étein te; il ne
reste plus qu’une certaine induration indolente du testicule et de
l’épididvme. — Le 22, le collodiou tom be par larges plaques.
La peau du scrotum a repris sa m obilité.
Observation I I . — Garçon de 14 a n s; bonne constitution. Or
chite traum atique traitée dans la prem ière sem aine par des bains,
1rs topiques belladones, les cataplasm es. Le huitièm e jour l’acuité.de la phlegmasic n ’est pas am éliorée. Collodion. — Le len
dem ain, la souflrance et le volume de la tu m eu r ont augm enté;
la compression par l'enduit im perm éable est intolérable. Je suis
obligé de fendre la couche de collodion, d’en solliciter la chûte
et d’employer d’autres moyens.
Observation III. — Jeune hom m e scrofuleux ; il a eu île
nom breuses ad nites cervicales suppurées et des abcès par con
gestion aux parois thoraciques; il en porte des stigm ates indé
lébiles. Les phlegm asies, chez cet individu, ont une grande
tendance aux suppurations. O rchite traum atique. Inflammation
aiguë. A dhérence de la peau. Le collodion n ’em pêche pas la
formation d ’un abcès que je ponctionne le surlendem ain. Du pus
21
—
se forme en outre à la surface du tég u m en t; il s'éten d en nappe
et reste em prisonné sous la couche im perm éable. Je me hâte
de détacher celle-ci pour d o n n er issue au liquide. On agira de
même en sem blable circo n stan ce. Je signale, en passant, cet in
convénient du collodion; je l’ai ren co n tré dans quelques autres
phlegmasies term inées par suppuration.
Observation IV. — O rchite blen n o rrh ag iq u e récente et in
tense sur un individu <Je3 0 ans. Em ploi du collodion; com pres
sion douloureuse ; nécessité de ren o n cer im m édiatem ent à l’en
duit.
Observation V. — O rchite blennorrhagique h sa période ai
gue ; application de la solution de gom m e saupoudrée d ’am i
don; sédation et disparition rapides de la phlegm asie.
Réflexions. — Ce d ern ier fait, unique et par conséquent in
suffisant pour ju g er la m édication, m ’a perm is au m oins de cons
tater les avantages du procédé, la facilité de ram ollir l’enduit et
de l'enlever tous les so irs, par exem ple, au moyen d ’un cata
plasme ou d’un bain ; la faculté de le rem placer fréquem m ent
et la possibilité de suivre les variations de volum e des parties
malades sans être exposé à les g ên er et a les offenser. T oute
fois, je dois le dire, l’usage de la gom m e exige le repos au lit,
ou l’immobilité, car cette espèce d’enduit adhère mal a la peau,
s’en détache aisém ent et tom be sous forme de croûte sèche par
l’effet seul de la m arche ou des m ouvem ents.
Adénite cervicale . — C ette affection, com m une chez les in
dividus et surtout les enfants lym pathiques ou scrofuleux, se
piésente fréquem m ent h la pratique m édicale. J ’ai expérim enté
contre elle quinze à d ix -h u it fois le collodion élastique avec des
résultats différents : tantôt l’enduit a fait rétro g rad er l’inflamm a
tion, tantôt il a été incapable de prévenir la suppuration. Plus
d'une fois l'insuccès a été dû à une application tardive du
remède, car l’adénite cervicale, n atu rellem en t lente dans sa
�—
m arche, ne pousse le malade a réclam er les soins du médecin
qu'au m om ent où les sym ptôm es ont pris une certaine acuité,
c’est-à-d ire lorsque la suppuration est im m inente ou déjà
établie.
Quoi qu’il en soit, je suis d ’avis de recourir a la médication
isolante dans toutes les périodes de l’adénite ; elle a beaucoup
de chance de réussir si la phlegm asie n ’est pas arrivée a son
dernier term e et si le pus n’est pas form é ; dans le cas contraire,
elle est encore utile, car elle dim inue l’in ten sité de la douleur,
limite le gonflem ent, réduit le volum e de l’abcès et par consé
quent exerce une influence favorable sur l’étendue et la régu
larité de la cicatrice, avantage précieux dans une région aussi
apparente que le cou.
— Contre ce genre de phiegm asie, le
collodion a eu égalem ent entre mes mains des effets variés, il a
même abouti un peu plus souvent à la suppuration qu"a la réso
lution. Ces résultats n ’infirm ent nullem ent la valeur de la mé
dication isolante. Ainsi, je suis parvenu h g u érir rapidem ent et
à rendre a l’allaitem ent d’énorm es seins, rouges, douloureux,
infailliblem ent voués à la suppuration, après être restés douze
jours sans perm ettre a l’enfant de téter. D ’autres fois, le collo
dion a eu l’avantage de calm er les douleurs intolérables d’un
abeès m enaçant ou déjà form é, com m e le prouve l’exem ple sui
vant :
Une jeune femme prim ipare, accouchée le \1 m ars 1864, est
obligée, dix-huit jours après, de suspendre son allaitem ent. Un
phlegmon m ammaire se développe de chaque côté. Ce 3 avril,
le sein gauche, engorgé depuis dix jo u rs, est dur et volum ineux,
mais l’inflammation m arche len tem en t, la sensibilité reste limi
tée à sa face supérieure. Le sein droit, très gros, est excessive
m ent rouge, douloureux et enflam m é ; le phlegm on a ici une
marche rapide : élancem ents très violents, suppuration im m i
nente, nuits mauvaises. Collodion sur les deux seins. Les souf
P hlegmon
mammaire .
23
—
frances, naguère insupportables au côté dro it, se calm ent une
heure après. Le lendem ain le sein gauche a dim inué de volume;
il est plus souple et m oins sensible ; le sein droit n ’est le siège
d'aucune douleur tant q u ’on ne le presse pas; l’inflam m ation y
reste stationnaire; les nuits deviennent calmes. — Le 6 avril,
ouverture de l’abcès d ro it, issue de soixante à quatre-vingt
grammes de pus. — Le 12, après deux jo u rs de souffrance très
modérée, ouverture à gauche d ’un abcès sem blable au précé
dent.
A propos de phlegm ons m am m aires, je dirai un mol des ger
çures du m am elon, accident si com m un, si opiniâtre, si léger
en apparence, et po u rtan t si influent sur la form ation des abcès
au sein cl les destinées de l’allaitem ent. J ’ai souvent em ployé
contre elles le collodion riciné, avec l’espoir de rencontrer enfin
un remède ellicace. A près quelques avantages très éphém ères,
je n’ai jamais obtenu de succès solide et durable. Ce moyen si
rationnel échoue, com m e tout autre topique, devant la succion
répétée de l’enfant.
Bubon inguinal. — Je n’ai â noter que deux bubons in g u i
naux traités par le collodion, et deux résultats nuis. Dans les
deux cas, l’adénite datait de huit h dix jo u rs; elle était aiguë,
déjà avancée, et nécessita l’ouverture d’un abcès. Dans le pre
mier, le bubon était v én érien , provenait d ’un chancre ; dans le
second, il avait succédé h une m arche forcée, chez un individu
dont la fesse était couverte de furoncles.
IV. — E ntorses . — V iolences
articulaires .
Appliqué d’em blée ou après les irrigations d ’eau froide, l’en
duit imperméable constitue une m éthode rationnelle de traite
ment dans l’entorse, les contusions, les déchirures articulaires
sans luxation, ou avec luxation préalablem ent réduite. Je l’ai
employé six fois environ contre ces sortes de lé sio n s, soit
au membre su p érieu r, soit au m em bre inférieur. Je n ’ai eu
�—
21
-
qu'à m’en louer. Je le crois utile dans les circonstances
suivantes :
1° Lorsque, par son siège à la racine du m em bre, l’articula
tion ne se prêle guère aux irrigations froides;
2° Lorsque ces dernières ont été suspendues, et que pourtant
la phlegmasie articulaire n ’est pas com plètem ent étein te;
5° Lorsque, par un m otif quelconque, les irrigations ne sont
pas applicables, lorsqu’il y a inconvénient ou danger à faire
usage de l'eau froide, chez un individu m alade, un rhum atisant
ou un catarrheux, par exem ple.
V. —
P éritonite .
Je n ’ai jamais employé le collodion contre la péritonite puer
pérale, la plus grave assurém ent des phlegm asies accessibles â
la médication isolante ; j’y ai recouru deux fois dans la péritonite
ordinaire.
Dans le prem ier cas, la péritonite développée spontaném ent
chez un homme de 58 ans, existait depuis q uatre jo u rs avec ses
caractères locaux et généraux ordinaires. Sans être inquiétante,
elle suivait une m arche progressive. Une couche de collodion
fut étendue sur tout le ventre. Deux ou trois heures après, la
douleur se calmait. Dès ce m om ent, am élioration ; pression
abdominale de plus en plus insensible; rétablissem ent rapide.
Dans le second cas, il s ’agissait d une p éritonite due h un
étranglem ent herniaire. Voici en deux mots les détails de l’ob
servation relatifs aux effets de l’enduit im perm éable. Ils me
sem blent digues d attention.
Femme de 60 ans ; depuis longtem ps elle porte deux hernies
crurales, une de chaque côté ; un bandage les contient habituel
lem ent. La gauche s’étrangle le 5 juin 1864, vers le milieu du
jour. Aussitôt éclatent les signes de l’occlusion intestinale. Ils
vont augm entant progressivem ent.
Je vois la malade pour la prem ière fois le lendem ain soir à G
-
25 -
heures, trente heures après le début des accidents. La tum eur
herniaire, du volume d ’un œ uf de poule, est ronge, dure, rénilente, très douloureuse, irréductible. N ausées continuelles, vo
missements fréquents, l’estom ac ne supporte rien. P éritonite lo
calisée; la douleur excessive, su rto u t au centre et au to u r de la
hernie, s’irradie à tout l’abdom en qui est m éléorisé, très sensi
ble à la moindre pression ; g ém issem ents, an x iété; pouls petit
et très fréquent.
J’essaie en vain le taxis. D ’intolérables souffrances m ’em p ê
chent de le co n tin u er. J ’étends alors une couche de collodion
élastique sur la tum eur et su r tout l’abdom en. Il est 6 heures
du soir. Dès 8 heures les douleurs sont apaisées ; les vom isse
ments s’arrêtent pendant plusieurs heures, et quelques cuille
rées d’eau froide sont avalées et gard ées.
Le lendemain m atin co n traste avec la veille. Calm e, bien-être.
La tumeur e t le ventre sont souples et a peu près insensibles à
la pression. Ce ch an g em en t rem arquable me fait espérer la ré
duction. J ’insiste donc su r le taxis prolongé. Mes tentatives
échouent; cependant elles n ’ont pas causé de souffrance, pas
d’aggravation. En som m e, si la h ern ie reste irréductible, les
symptômes aigus, les sym ptôm es inflam m atoires de l’étran g le
ment ont franchem ent et définitivem ent cessé ; ils ne rep araî
tront plus m algré l’in ten sité toujours croissante des accidents
d’occlusion, m algré les vom issem ents stercoraux, la constipa
tion absolue, l’absence de gaz in testin au x , le ballonnem ent du
ventre, l’affaissem ent g énéral.
*
Le 7 juin, à 2 heures du soir, la m alade accepte enfin la ké
lotomie ; j ’opère im m édiatem ent. L ’intestin est rén iten t, dur,
épaissi, rouge-brunâtre ; il olïre deux ecchym oses plus foncés
mais saus gangrène ; adhérences nom breuses avec le sac. La ré
duction et le pansem ent term in és, j ’applique une nouvelle co u
che de collodion autour de la plaie et sur tout l’abdom en ju sq u ’aux
lombes. Les phénom ènes consécutifs m archent avec la plus
�—
26
—
grande sim plicité ; pas de traces de péritonite. La plaie est en
tièrem ent cicatrisée quinze jours après.
Réflexions. — L ’inflammation joue un grand rôle dans l'é
tranglem ent herniaire ; elle devient redoutable soit en augmen
tant le volume des parties et conséquem m ent en redoublant la
eonstriction intestinale, soit en donnant lieu 'a la péritonite. Je
crois le collodion appelé a rendre de véritables services dans la
hernie étranglée. Sa propriété d ec o n te n ire t d’apaiser l’inflamma
tion en fait un auxiliaire précieux et nullem ent h dédaigner. Il est
susceptible de dim inuer les causes d’irréductibilité et les chances
d ’opération, de prévenir, de m odérer ou d'en rav er la péritonite,
de simplifier, en un m ot, les accidents et de leur im prim er un ca
ractère de bénignité rem arquable. Mon opinion vient d’ailleurs
confirmer celle de M. le docteur B enoist de N euville [Union
médicale , Paris 1864, num éros des o et 7 janvier). Toutefois,
l'emploi du collodion dans la hernie étranglée ne cache-t-il pas
un écueil? Supprim er l’inflamm ation n ’e s t-ce pas supprim er en
partie le signal du danger? Le bien-être m om entaném ent donné
au malade ne va-t-il jeter dans une sécurité perfide, prolonger
le relus d'une opération nécessaire, faire p erdre un tem ps irré
parable? Cette surface tranquille ne co u v rira-t-elle pas un tra
vail d'invisible désorganisation? En un m ot, la bénignité appa
rente des symptômes ne va-t-elle pas m asquer le progrès des
lésions profondes, le spbacèle lent de l'in testin ? C’est au chi
rurgien de veiller. Que sa sagacité et sa ferm eté ne fassent pas
défaut ; qu’il reste à la hauteur de son rôle et qu’il ne se pré
pare pas l’amer regret d'avoir com prom is la vie du m alade et la
dignité de l arl, pour la vaine satisfaction d’un soulagem ent fu
gitifVI.
— P hlegmasies
d iv e r s e s .
J'ai encore expérim enté le collodion contre des tum eurs vari
queuses, frappées d’inflamm ation récente ou ancienne, contre la
phlegmatia alba dolens, l’angioleucite, l’érysipèle de la lace et des
membres, les panaris, les brû lu res des prem ier et deuxièm e de
grés. Dans ces diverses affections j ’ai peu de réserves a opposer
à futilité des enduits im perm éables; les résultats ont été plus
satisfaisants que p récéd em m en t; ils se sont traduits plus cons
tamment par la disparition rapide de la douleur, la résolution
progressive de la rougeur et du gonflem ent. Afin d ’éviter les ré
pétitions, je me borné h constater ce fait général, sans exam iner
chaque cas particulier. J ’excepte pourtant de ces rem arques
l’hygroma. Le seul (pie j ’ai eu à traiter par la m édication isolante
adonné un insuccès com plet.
Il s’agissait d’un hygrom a prérotulien, développé spontané
ment chez une jeu n e fille de 18 ans. La tum eur eut une m arche
aiguë et rapide ; ayant com m encé h paraître le so ir, elle égalait
déjà, le lendemain m alin, le volum e du poing, était rouge, te n
due, très douloureuse. U ne couche de collodion appliquée alors
resta sans effet ; les élancem ents devinrent plus violents, la
réaclion pins forte et, dans la jo u rn ée, une ponction devenue
nécessaire laissa écouler une grande quantité de pus et de sy
novie.
M. Benoist de N euville, partisan convaincu de la m édication,
cite également un exem ple, un revers, pareil au m ien. Le col
lodion semble donc peu favorable à l’hygrom a.
VIL — Résumé.
L’enduit im perm éable jo u it d ’une efficacité incontestable;
sans être infaillible, il e st, à mon avis, le m eilleur topique de
l’inflammation ; loutes les fois q u ’il est applicable, je le préfère
aux antiphlogistiques locaux ordinaires dont l’actio n , générale
ment moins constante, m ois rapide et m oins sû re, reste si sou
vent problématique.
Je fais cependant une exception capitale en faveur du froid et
des irrigations continues. En elfet, la réfrig ératio n et la m édica
tion isolante rep résen ten t les deux plus puissants m oyens de
combattre les phlegm asies. El si la théorie de M. de R obert de
�—
Latour est vraie, ils auraient entre eux beaucoup d ’analogie; ils
arriveraient l’un et l’autre au m êm e bu t, par le m êm e procédé;
ils éteindraient l’inflamm ation en soustrayant la chaleur aux tis
sus. D’ailleurs, les irrigations continues et les enduits imper
m éables, tous deux lim ités dans leurs usages et accessibles à
certaines régions seulem ent, ou a certaines m aladies, peuvent se
compléter réciproquem ent et ren d re de grands services à la
thérapeutique, soit par leur application isolée, soit par leur ap
plication alternante et successive.
L'enduit im perm éable joue un rôle im portant dans toutes les
phasesde l’inflammation, tantôt en l’enrayant prom ptem ent, tan
tôt en m odérant sa violence. Dans les pblegm asies a tendances
suppuratives, s’il n ’em pêche pas toujours la form ation du pus,
il a fréquem m ent une action favorable sur les phénom ènes in
flammatoires, il les am oindrit, leur im prim e une m arche rétro
grade, circonscrit la tum éfaction, atténue la rougeur, calme la
douleur, dim inue enfin le foyer de la suppuration. J'ai plusieurs
fois vérifié ce fait avec attention ; j ’en ai parlé plus liant notam
m ent à propos des abcès m am m aires étendus et profonds et des
adénites cervicales suppurées.
Le collodion est sim plem ent un to p iq u e; il agit uniquement
sur le symptôme inflammation, produit ou su p p o rt des maladies
aigues o u ’chroniques. Il n’exclut donc pas les m édications gé
nérales nécessitées par elles. Ainsi, dans le rhum atism e, l’éry
sipèle, les pblegmasies puerpérales, scrofuleuses, e tc ., on em
ploiera avec lui, suivant les indications, la saignée, les purgatifs,
la quinine, l’aconit, la digitale, la vératrine, le colchique, le ni
trate de potasse, les m ercuriaux, l’iode, etc.
La disparition prom pte, par le collodion, d ’une phlegmasie
quelconque, arthrite rhum atism ale, érysipèle, angioleucite, phleg
mon glandulaire, etc., n ’a jam ais produit, sous mes yeux, de
métastase sur un organe im portant. Elle a plutôt exercé une sa
lutaire influence sur l’état général, sur la fièvre et les phénomè
nes de réaction ou de sym pathie.
29
—
L’enduit im perm éable a une action locale exclusivem ent li
mitée aux surfaces où il est appliqué. A près avoir éteint sur
place une inflam m ation, il n ’em pêche pas celle-ci de gagner de
proche en proche ou d ’éclater à distance, si elle est m obile ou
ambulante de sa n atu re, com m e l’érysipèle et le rhum atism e.
Dans ce cas, il faut poursuivre le mal partout où il fait explo
sion, et toutes les fois on obtiendra les m êm es effets de l’enduit
isolant.
Marseille, 2 jan v ier 1866.
Dr Charles I snard.
M ie tte s S c ie n tifiq u e s
Notre journal a l’espérance de pouvoir, un peu plus tard —
lorsqu’il lui sera donné d 'au g m en ter son volum e et de paraître
plus souvent, — reproduire les faits saillants des séances aca
démiques et résum er les travaux les plus rem arquables de la
médecine actuelle. M ais, pour le m om ent, nous ne pouvons que
de loin en loin, et dans un espace trop restrein t, consigner
quelques-unes des données nouvelles qui nous ont le plus vive
ment frappés.
Décidément, la doctrine des m aladies parasitaires prend une
extension de plus en plus grande. N ous savons la frayeur, dans
certains pays salutaire, que la maladie des trichines com m ence
à inspirer. Dans la théorie de la pellagre, l’étiologie qui parait
définitivement triom pher est celle qui place cette endém ie sous
l inlluence de l’usage habituel du m aïs altéré, et altéré par un
parasite, leverderam e. Il est bien entendu que l'on distingue
alors la pellagre vraie des pseudo-pellagres, de celle qu’on a
nommée sporadique et de celle des aliénés, comme l’a fait
M. Théophile Roussel dans le bel ouvrage que l’Institut a cou
ronné et que le public va ju g er à son tour.
�—
30
—
L’homme a ses parasites; son corps est un terrain sur lequel
des espèces diverses naissent, vivent et sc développent. Nous
venons de rappeler que les parasites des anim aux, les trichines,
par exemple, peuvent venir l’habiter, sc n o u rrir et se repro
duire à ses dépens, et que les parasites des végétaux peuvent, à
l'instar delà verderam e, l’em poisonner ou le rendre malade. Où
s’arrêtera-1-on dans ces découvertes d'affections produites et
communiquées par des agents parasitaires? L e m icroscope le dira
peut-être un jour.
Voici m aintenant les anim aux eux-m êm es victim es des para
sites qui naissent sur les végétaux. Tel est du m oins le résultat
des recherches de M. Em. D uchem in, com m uniquées tout ré
cem m ent h l'Académie des Sciences. U ne m aladie terrible, un
choléra, une peste, n im porte, avait frappé les abeilles; toutes
m ouraient et les ruches devenaient désertes. Q uelle était la cause
de ce fléau ? M. Duchemin l’a trouvée. L’ennem i m ortel de l’a
beille est un acarus ; notre savant l’a surp ris, l ’a saisi sur le corps
de ses victimes, il l a ensuite poursuivi ju sq u e dans son repaire
qui est une simple plante, l'héliantlm s an n u u s. Ce n’est donc
pas seulem ent pour nous que les roses ont des épines.
Comme la m alheureuse espèce hum aine, les anim aux qui nous
entourent ont aussi leurs nom breuses m isères, leurs maladies
sporadiqûes et épidém iques. La tribune académ ique a, dans ces
derniers jours, répété le nom du choléra des volailles et surtout
celui du typhus contagieux des bêtes à corne. Voilà des uoms
un peu légèrement donnés ; ils sem blent résoudre un problème
qui est à peine posé et qui ne m an q u e, d’ailleu rs, ni d’im
portance, ni d ’intérêt, ni d’actualité : quels sont les rapports de
ces pestes des animaux avec les épidém ies (pii sévissent sur les
hommes ?
M. Guyon s’est hâté de présenter, à F In stitu t, une note ten
dant à dém ontrer l’identité du choléra avec les épizooties conco
m itantes. M. Guyon va un peu vite. Q uand M. G uérin a raconté
à I Académie de M édecine qu’il avait vu p érir, l’autom ne der
nier, trois cents dindons atteints de diarrhée séreuse, puis blan
châtre et dont les crêtes devenaient violacées, M. Bouley, prenant
tout de suite Ja parole, a dit que cette m aladie, d’une subtilité
contagieuse si grande q u ’elle tu e, en dix ou douze heures, un
volatile auquel on l’a inoculée avec la pointe d’une aiguille, ne
se communique cependant pas à l’hom m e. Bien au co n traire;
quand elle sévit à Alfort et dans scs environs, c’est un régal
pour les dom estiques de l’école, qui offrent une tom be honora
ble aux victimes du fléau. C ertainem ent cette m aladie n ’a de
notre choléra que le nom .
Elle typhus des anim aux, aurait-il quelques rapports avec le
nôtre? Le problèm e est à résoudre. Si M. Louis Croit recon
naître une certaine analogie entre les deux m aladies, M. Bouley
n’en admet pas et n ’adopte ce nom de typhus, em ployé pour la
première fois par Vicq d ’Azyr, que pour ne pas porter om brage
à M. Piorry.
Ce qu’il y a de fort h eu reu x , c’est que cette m aladie, si con
tagieuse pour les anim aux, ne se com m unique pas à l’h om m e;
en Angleterre, les garçons équarrisseurs et les bouchers ont
pu faire des centaines d ’autopsies d ’anim aux typhiques, sans
que le m oindre accident ait été signalé parm i eux. De son
côté, M. Bouley a m anié pendant plusieurs h eu res, et sans incon
vénients pour sa san té, des débris d’anim aux typhiques, bien
qu’il portât au pouce une large écorchure. D epuis, la sécurité de
l’honorable académ icien a été fortem ent ébranlée à cet égard;
pourquoi? parce q u ’il a vu le typhus frapper deux anim aux d’une
espèce voisine de celle du cochon, deux pécaris, dont l’organi
sation, ajo u te-t-il, se rapproche tant de celle de l’homme.
M. Bouley, vous êtes trop m odeste.
Ces pécaris, attein ts du typhus, avaient su r la m uqueuse in
testinale une éruption dont l’aspect ressem blait beaucoup à celui
de la peau de l'hom m e ou du m outon attein t de variole conlluenle. L)e là l’idée de rech erch er, par voie expérim entale, les
rapports du typhus avec la variole et le covvpox. On avait déjà
�oublié que plusieurs des anim aux du jardin d ’acclimalalion, qui
oui succom bé au typhus contagieux, avaient été vaccinés peu de
temps auparavant par M. A uzias-Turenne.
F r a c t u r e s d i v e r s e s o b s e r v é e s à l ’H ô t e l - D i e u .
S ervice
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
En récom pense de leur dévouem ent pendant la dernière épi
démie cholérique, ont été nom m és chevaliers de la Légiond ’H onneur : MM. Seux et Rivière de la S o u d ière, médecins des
hôpitaux, et D auvergne, chef interne a l’H ôtel Dieu.
Comme m édecins, nous som m es heureux de ces récompenses
accordées à nos trois m éritants confrères. Comme membres de
l’Association, nous partageons de tout cœ ur la joie de notre
Président et de notre V ice-président, et nous constatons avec
bonheur la satisfaction générale avec laquelle a été accueillie
leur nomination.
Pour services rendus pendant la m êm e épidém ie, sont exemp
tés des droits qui leur restent à acq u itter pour l’achèvement de
leurs éludes, les élèves de l’école de M arseille, dont les noms
suivent:
MM. Jaillieu, d'H urlaborde, M arcorelles, Coste, Bontan,
Eyriès, Nicolas, Garcin.
— Nous offrons, cette fois, à nos lecteurs, pour leurs étrennes, un supplém ent de seize pages, et nous avons l’espérance
de leur faire souvent, dans le cours de l’année, de petits ca
deaux de celle nature.
Le Comité de Rédaction.
Marseille. — Imprimerie A r n a u d , Cayf.R et
rue Saint-Ferréol, 57.
de
M.
Chapplain
Le service chirurgical de l’Hôtel-Dieu a présenté, dans le
dernier sem estre de 1865, un grand nom bre de cas de fractures,
remarquables non-seulem ent p arleu r diversité, mais encore par
des particularités qui nous paraissent avoir un assez grand inté
rêt. Nous avons cru être utiles à nos lecteurs en faisant passer
sous leurs yeux quelques-uns de ces faits.
Fracture du crâne avec enfoncement.— Application du trépan.
— Mort. (Observation recueillie par M. T rastour, interne
du service.)
Vanio Alexis, journalier, âgé de 16 ans, entré le 5 juillet
dans la salle Ducros, service de M. Chapplain. — Il raconte à
M. Guichard, externe de garde, que, travaillant le matin à six
heures à bord d 'u n navire ancré sur le quai Napoléon, une pou
lie s’est décrochée d'une vergue dont la hauteur était a peu près
d’un second étage, et lui est tombée sur la tête. C’est par le
crochet qu’il a été attein t, car on constate une plaie contuse du
cuir chevelu et une perforation des os dont le diam ètre est de
deux centim ètres environ dans tous les sens et correspond au
diamètre du crochet. Le siège de cette plaie se trouve sur le
pariétal droit à son tiers antérieur et supérieur. Ce jeune
homme n’est entré à l'hôpital qu’à quatre heures du soir, et y
est venu lui-m êm e sans aucun soutien; il jouissait par consé
quent de l’intégrité des fonctions de ses m em bres inférieurs.
Il n’y avait point de déviation de la face et les altérations de la
myotilité n ’étaient point appréciables dans les m em bres supé
rieurs, dans le cas où elles auraient existé.
Le lendem ain, 6 juillet, M. Chapplain, chirurgien en chef,
constata l’état suivant :
2
�—
Hémiplégie de tout le côté gauche, les traits de la lace sont
déviés, la sensibilité et le m ouvem ent ont disparu dans tout le
côté gauche. Petite plaie circulaire et contuse a la région pa
riétale droite. Les liquides existant dans l’aire de la plaie
sont mus par un battem ent qui indique déjà qu’il y a communi
cation avec la cavité crânienne, circonstance qui est démontrée
d'une manière plus positive encore par la présence de quelques
fragments de substance cérébrale. Le doigt introduit à travers
la plaie du cuir chevelu, constate une fracture du pariétal, et
au-dessous du niveau de l ’os, des fragm ents enfoncés dans
la substance m ême du cerveau.
A l'aide d’une pince, une prem ière esquille appartenant à la
table externe de l’os, ayant un centim ètre de long sur deux mil
lim ètres de larg e, est re tiré e ; une seconde esquille appar
tenant a la table in tern e, ayant trois centim ètres de long sur trois
millim ètres de largeur est retirée encore avec plus de difficultés.
Un troisièm e fragm ent est allé se placer au-dessous de la
partie antérieure du pariétal, et m algré plusieurs tentatives fai
tes avec toute la prudence que com portait l'organe sur lequel
on agissait, il faut renoncer a l’espérance de retirer cette troi
sième esquille que l’on sent cependant mobile et enfoncée dans
la pulpe cérébrale.
M. Chapplain, assisté de M. P irondi, professeur de clinique
chirurgicale, applique im m édiatem ent u n e couronne de trépan,
et enlève seulem ent alors la troisièm e esquille qui est un frag
m ent du pariétal ayant trois centim ètres de long et deux de
large, taillé en biseau aux dépens de la table externe.
Im m édiatem ent après, quelques m ouvem ents se manifestèrent
dans les m uscles du côté gauche de la face ; le m em bre inférieur
fut égalem ent quelque peu soulevé, m ais le bras demeura dans
la résolution la plus com plète.
Pendant tout ce tem ps, le jeu n e m alade continue à parler,
raconte a qui veut l’entendre com m ent l’événem ent est survenu,
et se m ontre soucieux de to u t ce q u ’on lui fait..
35
—
On fit appliquer im m édiatem ent, sur la tête, de la glace,
d’une manière perm anente, à l’aide d’un bonnet en caoutchouc.
Dans l’après-m idi, des convulsions se m anifestent dans tout
le côté gauche; la prononciation est plus em barrassée, les m ots
ne sont plus distincts comme ils l’avaient été ju sq u ’à ce moment.
La réaction est m odérée.
7 juillet. — Les convulsions sont perm anentes, plus vio
lentes et la réaction plus m arquée. (Calomel à doses fractionnées,
un gram m e en dix paquets; application perm anente de sangsues
aux apophyses m astoïdes ; saignée de 500 grammes).
8 juillet. — Les phénom ènes sym ptom atiques d ’une inflam
mation du cerveau et des m éninges se sont aggravés encore.
— Convulsions, délire, cris, parole incohérente, em barrassée.
(Même traitem ent.)
9 juillet. — Aggravation de tous les sym ptôm es. — Mort.
Autopsie.— La plaie des os du crâne représente assez bien un
huit de chiffre, chaque circonférence offre à peu près le diam ètre
d’une pièce d'un franc, l’une est le résultat de la violence exté
rieure, l’autre de l’application du trépan. La calotte crânienne
enlevée, on trouve une plaie de la dure-m ère et des autres m é
ninges. La dure-m ère enlevée, nous voyons une injection très
marquée de l’arachnoïde correspondant à la partie supérieure
des deux lobes frontaux. Le cerveau lui-m êm e a été blessé
très profondém ent; les parois de la plaie de 1 organe sont rédui
tes en bouillie et infiltrées de pus. Le corps, vulnéraut a pénétré
jusque dans le ventricule latéral par sa partie antérieure où l’on
voit la plaie se tet m iner.
Plaie de tête. — Fraeture du crâne. — Commotion.
(Observation recueillie par M. T rastour.)
Bartoletti, Jean, m anœ uvre, âgé de 18 ans, est tombé aujour
d’hui 19 octobre de la hauteur d ’un troisième étage et dans la
chute, sa tête, au dire des gens qui l'accom pagnent, est venue
frapper contre une colonne en fonte.
�— 36 —
— 37 —
Transporté im m édiatem ent h l’hôpital, il présente une plaie
contuse de trois centim ètres au niveau de la partie moyenne et
inférieure du pariétal gauche occupant toute l’épaisseur du cuir
chevelu. On ne sent au niveau de la plaie aucune fracture
des os du crâne; sur le bord antérieur seulem ent, on perçoit
une induration ou plutôt une infiltration des tégum ents, et en
avant une dépression qui sem blerait indiquer une fracture. Pas
d’écoulem ent sanguin, soit par le nez, soit par les narines.
Le sujet est en com m otion, la face est pâle, l’intelligence
nulle, les m em bres sont dans la résolution, insensibles aux
agents excitants,le pouls est lent et très dépressible. Le malade
gémit mais ne com prend point les questions qu’on lui adresse
et ne parle pas. (Pansem ent sim ple. Sinapism es aux extrémités.)
20 o c to b re .— A sa visite, M. Chapplain trouve les mêmes
symptômes qui ne se sont pas sensiblem ent m odifiés; il constate
cependant une ecchymose des paupières supérieures seulement,
les paupières inférieures conservant leur apparence normale, et
diagnostique une fracture probable du crâne dans la région susorbitaire de la base du crâne.
Les phénom ènes de com m otion ayant p ersisté, le pouls étant
toujours misérable, il prescrit une potion excitante, en recom
mandant de saspendre les excitants dans le cas où les phéno
m ènes de réaction et de m éningo-encéphalite se présente
raient dans la journée. (A cétate d ’am m oniaque. Eau de menthe
et de mélisse.)
21 octobre. — La journée d ’hier a présenté les mêmes phé
nom ènes ; mais dans la m atinée se sont présentés les symp
tômes qui appartiennent à l’état inflam m atoire du cerveau et
des m éninges: les convulsions, les cris du m alade, la dilata
tion des pupilles ; l ’intelligence est dem eurée complètement
obtuse ; le pouls, malgré ces phénom ènes inflamm atoires, s’est
fort peu relevé. (1 gram m e calom el en dix prises.)
22 octobre. — L’état du m alade est dem euré le même ; il
m eurt h trois heures du soir.
Autopsie. — Les tégum ents du crâne étant enlevés, on
trouve un épanchem ent sanguin considérable dans les régions
pariétale, tem porale et orbitaire du côté gauche. Cet épan
chement sanguin correspond à une fracture com m ençant h la
partie externe du frontal form ant le rebord orbitaire externe qui
se dirige horizontalem ent en arrière dans la fosse tem porale et
s’arrête à l’extrém ité postérieure de la portion écailleuse du
temporal. Les muscles qui recouvrent celte région sont pro
fondément contus. Les bords de la fracture sont nets, sans
esquilles. La calotte crânienne enlevée, on trouve une coloration
rouge uniform e de l’arachnoïde ; au-dessous de celle-ci, dans
toute la partie postérieure du lobe frontal et la partie antérieure
du lobe pariétal, au niveau et au-dessus de la scissure de Sylvius,
la substance cérébrale est considérablem ent ram ollie et même
diffluente. Le reste du cerveau est hyperémié.
Fracture comminutive de la voûte du crâne par arme à feu.
(Observation recueillie par M. T ron , externe du service.)
Damein, François, âgé d e4 0 ans, courtier en vins, est apporté
à l’H ôtel-D ieu le 15 décem bre 1865, à une heure de l’aprèsmidi. Après une altercation qui s’est élevée entre lui et son
frère, il a essayé de se donner la m ort en se tirant un coup de
pistolet k la région pariétale droite. — Voici les lésions q u ’il
présente â son entrée h l’hôpital :
Etat local. — A l’union du frontal et du pariétal droit, existe
une plaie contuse qui offre une surface noirâtre, livide, des
bords désséchés et une ecchymose ainsi qu’un décollem ent des
parties voisines. Cette plaie, produite évidem m ent par une arme
à feu, laisse voir une fracture com m inutive du crâne, avec perte
de substance de la table interne et externe de l’os, dans une
étendue de six centim ètres de long et d’un centim ètre de large.
Les bords sont taillés en biseau aux dépens de leur face externe.
Cette fracture s’étend de 5 ou 4 centim ètres au dessus du pavil
lon de l’oreille, h la ligne m édiane, et est dirigée obliquement
�—
38
—
de dehors en dedans et de bas en hau t, suivant une ligne qui
partirait du sommet des grandes ailes «du sphénoïde à la suture
sagittale. U ne certaine quantité de la substance du lobe droit
antérieur du cerveau est sortie et on peut apercevoir les batte
m ents de la pulpe cérébrale. De cette perte de substance, où
l’on pénètre facilem ent avec l'index, on retire cinq ou six
esquilles noirâtres et la bourre en papier du pistolet. — Appli
cation de com presses d'eau froide.
Etat général. — Le malade n ’a pas perdu connaissance et ré
pond aux questions qu ’on lui fait. L 'intelligence et la sensibilité
sont un peu obtuses, les pupilles contractées, légère déviation
de la bouche à gauche. L orsqu’on veut découvrir le malade, il
ram ène M ui les couvertures. Le 16, c’est-à-d ire le lendemain,
le pouls se relève, il existe une contracture des membres supé
rieu rs; le soir, la prostration augm ente. Il parle encore un peu,
cependant; mais, pendant la nuit, fièvre, soubresauts de ten
dons ; la pulpe cérébrale se soulève et fait hernie h travers les
bords de la plaie. Le 17, apparaissent des sym ptôm es de cérébrite ; il y a du délire, des convulsions ; la respiration est très
em barrassée ; d e là raideur et de la contracture des membres;
pas de paralysie ; le pouls est fort, dur, accéléré, la déglutition
difficile ; il est im possible de faire avaler au malade quelques
gouttes de tisane. Il m eurt le 18 à trois heures du matin.
Autopsie. — Les tégum ents du crâne présentent une infiltra
tion de sang dans presque toute son étendue. La fracture existe
sur le pariétal droit; elle est en étoile et rectangulaire. Elle s’é
tend, à droite, jusque vers la fosse tem porale; â gauche, jusqu’à
la partie inférieure de la grande aile du sphéroïde. La calotte
sciée, afin de bien m ontrer cette fracture, laisse voir la durem ère injectée et épaissie, surtout au voisinage de la solution de
continuité. Elle est criblée d’esquilles noirâtres. Autour de la
fracture et entre la dure-m ère et le crâne, existe un caillot assez
volumineux, on en trouve un autre en tre la dure-m ère et I arachnoïde; on aperçoit aussi en tre ces deux membranes un
épanchem ent séro-sanguinolent. L ’arachnoïde et la pie-m ère
sont ram ollies. Celle-ci est injectée, surtout à la base des deux
lobes antérieurs. La substance cérébrale est très ramollie et
laisse voir un piqueté très abondant. Un cinquièm e environ du
lobe droit antérieur est détruit supérieurem ent. On ne trouve
pas d’épanchem ent dans les ventricules. La balle ne se rencon
tre pas dans le cerveau; elle est sortie par un trou qui s’est con
fondu avec le trou d ’entrée et n ’a fait que sillonner la substance
cérébrale, dans une étendue assez grande cependant, pour dé
term iner des accidents inflammatoires qui ont em porté notre
malade.
Ces trois faits présentent, réunies, plusieurs des complications
propres aux fractures du crâne. Relativem ent à la cause vulnérante et aux accidents qui en sont la conséquence, on trouve
dans la prem ière et la troisièm e observation une action localisée,
et, dans le second cas, au contraire, la cause vulnérante agit
sur la totalité de la tête. Dans les deux prem iers cas, action lo
cale et conservation des fonctions cérébrales ; dans l’autre, au
contraire, l’ébranlem ent général a détruit les fonctions du cer
veau et la com m otion est survenue, qui ne s’est dissipée que
d’une m anière fort incom plète avant la m ort.
Quand on exam ine des sujets atteints de lésions des parties
antérieures du cerveau, on est forcém ent obligé de s’occuper de
la localisation de l’organe législateur de la parole. Chez le sujet
qui était en com m otion, la faculté de l’émission de la parole a
disparu comme toutes les autres fonctions de l’organe encépha
lique. Dans les deux autres cas, la lésion était trop localisée pour
que ces faits puissent servir à étayer ou a com battre la doctrine
de M. Bouillaud, car la partie dem eurée saine dans les lobes
frontaux, pouvait expliquer la persistance de la parole chez nos
deux malades. Les lésions étaient à droite et par conséquent la
persistance de la fonction pourrait parler en faveur de l’opinion
de M. Broca.
�—
Il est fort rem arquable que les sym ptôm es physiologiques
d’une lésion cérébrale ne soient survenus chez le premier ma
lade que vingt-quatre heures environ après l’accident. Le bec
de la poulie s’enfonce dans la pulpe cérébrale jusqu’à la ren
contre de la *paroi supérieure du ventricule latéral ; diverses es
quilles pénètrent dans la substance cérébrale et compriment
l’organe, et cependant le jeune hom m e vient à pied de son chan
tier, plusieurs heures après l’accident ; il raconte avec une ex
trêm e lucidité l’accident dont il vient d’être victime. Ce n’est
que le lendemain à la visite, c’est-à-d ire vingt-quatre heures
après l’accident, que les phénom ènes sym ptom atiques d’une af
fection cérébrale paraissent ; c’est alors seulem ent que survient
la paralysie. Ces phénom ènes ne sont pas évidem m ent la con
séquence de la rupture des libres cérébrales, mais bien de la
congestion, de l'inflam m ation de l’organe encéphalique et de la
compression qui en a été la conséquence. L ’intelligence persiste
encore, le sujet raconte les événem ents ; son attention est atti
rée par les prescriptions qui lui sont faites et ses facultés intel
lectuelles ne soilt perverties, altérées,détruites que lorsque l’in(lammation cérébrale est devenue générale.
Bien qu’il n ’y ait pas de com m otion bien prononcée sur le
troisième malade, on sent déjà qu’il y a eu une cause plus géné
ralisée, l’intelligence est obtuse, la parole plus lente ; bien que
localisée, l’action du pistolet s ’est étendue à une partie de l’en
céphale. La cause est plus générale. L’inflamm ation est aussi
plus rapide et la m ort plus prom pte.
L’indication du trépan a paru d 'autant plus positive chez le
jeune Vanio, que l’on ne pouvait prim itivem ent connaître la pro
fondeur à laquelle avait pénétré le corps vulnérant; on pouvait
croire que les phénom ènes de paralysie n ’étaient dus qu’à la
présence des esquilles au-dessous d elà voûte crânienne.
Il existait de plus une circonstance qui se rencontre bien ra
rem ent dans les fractures par les instrum ents contondants qui
ne sont pas m us par la poudre à canon, c’était la simplicité de
41
—
la fracture, quant a u i os : le plus souvent du point fracturé,
comme d’un centre, partent des rayons qui vont s’étendre à une
étendue plus ou m oins considérable de la voûte ou de la base du
crâne, comme le dém ontrent les deux autres faits. Dans le pre
mier cas, au contraire, la fracture ressem blait à la perte de subs
tance produite par une couronne de trépan : pas la moindre fê
lure ne se présentait nulle part.
La m ort est survenue après quatre jours chez les deux p re
miers malades. Le sujet blessé par un pistolet n'a survécu que
deux jours. L ’inflammation du cerveau et des méninges a été,
dans les trois cas, la cause de la m ort.
[La suite au prochain numéro.)
P r o g r è s r é c e n ts e t te n d a n c e s n o u v e lle s d e la
P a th o lo g ie C a rd ia q u e .
Voilà environ un dem i-siècle que l'attention du monde médi
cal est fixée sur les maladies du cœ ur.
Dans une période préparée par Corvisart,‘ouverte par Laënnec,
nous voyons trois causes principales appeler sur ce sujet des
investigations nom breuses auxquelles est imprimée une direction
spéciale. Ces causes sont : en prem ier lieu, la découverte de la
percussion etd e l’auscultation qui, tom bant en plein organicisme,
viennent donner une précision jusque-là inconnue au diagnostic
des lésions; en second lieu, les recherches de la physiologie sur
les battem ents et les bruits du cœ ur, d’où d’ingénieux efforts et
des discussions fréquentes pour éclairer, l’une par l’autre, la
physiologie et la pathologie, et pour les accorder entre elles ;
enfin, la précieuse découverte de l’endocardite et l’examen m i
nutieux des désordres qui peuvent en résulter.
Depuis L aënnec, ju sq u ’à l’époque actuelle, les m édecins, par
suite de ce m ouvem ent, ont eu à s’occuper surtout des lésions
des m em branes et des orifices cardiaques, de leurs signes physi
ques et de leur diagnostic.
�_
42
—
A ujourd’hui, ces recherches continuent, m ais un autre mou
vement s'opère. Le rôle du m uscle cardiaque, un peu trop né
gligé jusqu ici, est mis davantage en relief ; on se préoccupe au
moins autant des altérations dynam iques que des signes physi- •
ques; on pousse encore plus loin l’exam en des rapports qui unis
sent les affections cardiaques avec celles des autres organes et
des vaisseaux ; enfin, la recherche des indications thérapeutiques
vient s’ajouter sérieusem ent a celle du diagnostic différentiel des
lésions.
Deux voies dUtinctes sont donc actuellem ent suivies. Nous
indiquerons d’abord quelques-uns des principaux progrès qui
ont été récem m ent accomplis dans la prem ière ; nous signalerons
ensuite quelques-uns de ceux vers lesquels on marche dans la
secpnde.
1.
L’endocardite, dont la découverte est une gloire pour l’Ecole
française, devient en ce m om ent l’objet de nouvelles recherches.
L’Ecole allemande reconnaît a cette m aladie des caractères qui
diffèrent un peu de ceux que lui avait prim itivem ent assignés
Bouillaud.
Pour ce qui concerne les lésions, contrairem ent a l’opinion
d’autrefois, qui en plaçait le point de départ dans les couches
profondes de la m em brane, les seules qui soient douées de vas
cularité, les Allem ands, guidés par la doctrine cellulaire de Vir
chow, les localisent, au d éb u t, dans les couches superficielles.
En étiologie, tout en reconnaissant la préém inence de la cause
rhum atism ale, ils placent, pour la plupart, au second rang l’in
fluence de la maladie de B rig h t; 1 un d’entre eux, W underlich,
réserve cette place a la rougeole.
La symptomatologie leur parait form er un cortège beaucoup
moins redoutable qu’on ne l avait cru d’abord. L ’endocardite,
j ’ai pu m aintes fois le constater com m e eu x , ne produit souvent
dans l’économ ie aucun trouble im m édiat ; je me rappelle, entre
autres faits, un malade de l’hôpital Cochin, chez lequel, dans la
convalescence d’un rhum atism e, se développait une endocardite
fortement accentuée, et qui, se sentant très bien, répétait avec
satisfaction : Je ne suis pas malade de cœ ur. Q uant aux signes
physiques, Niem eyer insiste surtout sur le bruit de souffle au
premier tem ps et h la pointe, sur l’extension de la matité pré
cordiale dans le sens de la largeur, enfin sur le renforcem ent du
second bruit dans l’artère pulm onaire.
11 est une form e de l’endocardite qui avait échappé aux pa
tientes études de Bouillaud. C’est Senhouse Kirkes qui, en 1852,
a été le prem ier à reconnaître l’endocardite ulcéreuse, affection
rare qui a déjà provoqué les travaux de Virchow, de Rokitanski
de Bambcrger, de F riedrich, de Charcot et Vulpian, de Lancereaux, de V ast, de Schivardi et d’Hérard.
Cette maladie peut attaquer les deux sexes; elle frappe de
préférence les gens débilités ou livrés à des professions latigantes. C’est surtout dans le cours du rhum atism e articulaire qu ’on
la rencontre. L ’état puerpéral, les cachexies, paraissent y pré
disposer aussi.
Le plus souvent annoncée par des frissons aussi intenses que
ceux de la fièvre interm ittente, la maladie peut se m ontrer en
suite sous deux aspects différents. Tantôt elle présente des symp
tômes typhoïdes, la céphalalgie, rabattem ent, la stupeur, le dé
lire, la sécheresse de la langue, le ballonnem ent du ventre et la
diarrhée, une fièvre vive avec dicrotism edu pouls, assez souvent
aussi de la toux et une oppression intense, qui ont pu faire croire
à une phthisie aiguë; tantôt prédominent des symptômes pyrohémiques. C’est alors que les frissons se m ontrent et se répè
tent avec le plus d ’intensité, au point de sim uler com plètem ent la
fièvre interm ittente ; on voit apparaître ensuite une prostration
avec pâleur et coloration subictérique de la face, parfois aussi
l’ictère proprem ent dit, et le plus souvent la diarrhée.
Les signes com m uns à ces deux formes sont la dyspnée, la
diarrhée, des vom issem ents verdâtres qui sont à peu près cons
tants dans le prem ier septénaire, et les signes physiques de l’en
�docardite ; le bruit de souffle se m ontre à l’un ou à l'autre temps,
il a m anqué dans des cas exceptionnels.
L ’autopsie perm et de voir, au voisinage des valvules et dans
les cavités gauches, une ulcération, au fond et au bord de la
quelle se trouvent des végétations ou tout au moins des granu
lations. A son pourtour, le tissu de l’endocarde est ramolli, en
voie de désagrégation ; quelquefois m êm e ses lam beaux ne tien
nent plus que par un m ince pédicule, flottant dans la cavité du
cœur. On rencontre de plus des infarctus dans la rate, les reins,
le foie. On a noté aussi des foyers de ram ollissem ent cérébral,
des plaques gangréneuses ou sim plem ent ecchymotiques, occu
pant les séreuses, les m uqueuses ou la peau.
La physiologie pathologique a rattaché ces lésions des divers
organes à l’affection du cœ ur, en dém ontrant que les résidus de
la désagrégation de l’endocarde et les produits m orbides des ca
vités cardiaques sont l'origine de dépôts qui vont obstruer di
vers systèmes capillaires. Elle attribue aussi les symptômes gé
néraux à l'em poisonnem ent du sang par ces produits.
il y a encore une endocardite ulcéreuse chronique; bien que
cette forme n’ait pas fixé l’attention dans ces derniers temps,
elle existe et nous en trouvons la preuve dans une observation
de Testa. Le sujet se plaignait d ’une souffrance du côté du cœur,
avec élancem ents qu’il com parait à la douleur qu’aurait déter
minée un glaive qui l’eût transpercé de part en part. Ces accès
survenaient surtout au m om ent du repas. Au bout d’un an, la
m ort survint subitem ent. A l'autopsie, on trouva des ulcérations
profondes à la surface du ventricule droit ; une ulcération avait
détruit les valvules aortiques, elle s’étendait à l’aorte et l’avait
déchirée au voisinage de son origine.
L ’endocardite ulcéreuse chronique, voilà donc un problème à
proposer aux travailleurs m odernes.
Dans le cas observé par T esta, ce fut l’ulcération de l’aorte
qui déterm ina la m ort subite. N ouveau problèm e, des plus diffi
ciles et des plus im portants, que celui de l’aortite, et cependant
presque inexploré. T essier, en 1839, avait tracé une description
succincte de l’aortite sim ple, aiguë et chronique ; en 1862, Leudet a signalé l’aortite avec abcès, qu’il considère comme cause
d'infection purulente; l’ouvrage de Niemeyer contient, sur l’aor
tite, quelques détails anatom iques, bien peu de renseignem ents
cliniques. Pour ma part, j ’ai observé plusieurs cas où des symp
tômes simulant^ une affection cardiaque avaient pour cause
un rétrécissem ent inflammatoire de l’aorte ascendante, reconnu
a l’autopsie ; j ’en ai rencontré deux où existaient les symptômes
de l’endocardite, sans signes physiques du côté du cœur ; il y
avait surtout une douleur vive dans la région cardiaque, se pro
pageant jusque dans le bras gauche, et des accès intenses de suf
focation, le plus souvent provoqués par le mouvement. La mort
fut subite, et l’autopsie ne put être faite. On était en droit de
penser à ces ru p tu res du cœ ur par ram ollissem ent inflamm a
toire, sur lesquelles a paru, en 1863, un travail de M artin. Mais
on peut égalem ent se dem ander s’il ne se form erait pas, dans les
cas analogues, une aortite ulcéreuse.
La péricardite ulcéreuse existe certainem ent. Stokes, entre
au tres, en a publié une observation instructive, mais insuflisante pour en établir le diagnostic. C’est encore une étude à
poursuivre.
Une form e particulière de péricardite a été décrite dans ces
derniers tem ps. Déjà signalée par Cruveilhier, la péricardite hé
morrhagique était généralem ent ignorée, surtout dans son mé
canisme. Mais les travaux de Ileschl et de Virchow, en Allema
gne, de B runet, de Charcot et Vulpian, de Lamceraux, à Paris,
de Christian, à Strasbourg, ayant dém ontré que l'hém orrhagie
méningée a pour cause ordinaire la dégénérescence et la rupture
des vaisseaux qui se sont développés dans une néo-m em brane,
on devait se dem ander si une lésion analogue ne se produirait
pas dans le péricarde. Elle existe en effet, ainsi que le prouvent
les 23 observations contenues dans la thèse de Debest de
Lacrousille , et si quelquefois elle ne donne lieu à aucun
�47
malaise bien défini, elle déterm ine aussi assez souvent la mon
subite.
La péricardite, j ’entends parler de celle qui est simple, est une
des (maladies dont on trouve le plus souvent la trace dans les
nécropsies. Cependant il est rare q u ’on la diagnostique pendant
la vie. On doit donc accueillir avec em pressem ent et soumettre
<Min sérieux examen clinique tous les signes par lesquels des
médecins habiles sont parvenus à reconnaître cette affection.
Racle insiste sur la m atité qui dépasse en bas le point où l’on
sent battre la pointe du cœ ur. G ueneau de Mussy professe que
la douleur est plus fréquente q u ’on ne le croit ; quand elle ne se
déclare pas spontaném ent, on peut la provoquer par la pression
épigastrique, ainsi que Mayne l’avait déjà indiqué; quand on
exerce une pression entre les deux chefs du sterno-mastoïdien,
on éveille une sensibilité plus ou m oins vive sur le trajet du nerf
phrénique, ce qui s’explique depuis que Hirschfeld a suivi les
filets de ce nerf sur le péricarde. C onstam m ent, en arrière, d’a
près Gueneau de Mussy, dans le point correspondant au péri
carde, la percussion produit un son tym panique comparable à la
sonorité skodique sous-claviculaire.
Les bruits de frottem ents de la péricardite pouvant simujer
toutes les affections valvulaires, c’est aux signes graphiques que
Marey attribue le plus d ’im portance dans le diagnostic de cette
/
maladie. Le pouls y est d ’une brusquerie particulière qu’on ne
rencontre guère que dans l’insuffisance aortique, mais il n’a pas
ici l’am plitude énorm e du pouls de Corrigan.
D’après Marey, les signes graphiques sont égalem ent d’une
utilité très grande dans le diagnostic des affections valvulaires.
Il a rem arqué, par exem ple, que, dans le rétrécissem ent aorti
que, la période d’ascension du tracé est plus longue que de cou
tum e, la lenteur avec laquelle l’ondée sanguine pénètre dans les
vaisseaux entraîne une lenteur correspondante dans l’expansion
de l’artère. Dans l’insuffisance aortique, au contraire, la période
d’ascension est brusque, elle est représentée par une ligne ver
—
ticale, ce qui tient à l'abaissem ent de la tension artérielle. Si les
deux lésions coexistent, après un redressem ent brusque, signe
de 1’insulïisance, vient une courbe indiquant la lenteur de la replétion com plète des vaisseaux.
Ajoutons que, d ’après les recherches récentes de Durosiez,
l’insuffisance aortique peut être révélée par un double souille
interm ittent crural.
Le tracé ne fournit pas d’indications bien précises pour distin
guer l’insuffisance m itrale du rétrécissem ent aortique ; mais
Marey a comblé cette lacune laissée par la sphygmographie, en
constatant, d ’après le dépouillem ent d’observations nom breuses,
que le pouls, d’une irrégularité complète et sans intervalles
périodiques dans la prem ière de ces affections, est, au contraire,
parfaitement régulier dans la seconde.
Les indices sphygm ographiques du système artériel m anquent
dans les altérations du cœ ur droit, ce qui est im portant pour le
diagnostic différentiel des lésions correspondantes des deux
cœurs. Mais, dans l’insuffisance iricuspide, le tracé du pouls vei
neux indique deux battem ents successifs: le prem ier, plus fai
ble, par l’im pulsion de l’oreillette ; le second, plus fort, par la
contraction du ventricule. Ces signes ont permis à Marey de
porter un diagnostic que l’autopsie a vérifié. Dans un autre cas
d'insuffisance tricuspide, c’est la conservation de la régularité du
pouls qui a perm is à Trousseau de distinguer cette maladie de
l’insuffisance m itrale, et l’autopsie lui a donné raison.
A ces signes, et au pouls veineux des jugulaires, qui n ’est pas
caractéristique, les recherches m odernes ont ajouté, pour quel
ques cas d.insuffisance tricuspide, le pouls veineux de la veine
cave inférieure, entrevu il y a 50 ans par Kreysig, mais nette
ment reconnu, en I8G4, par Seidel, Geigel et Bamberger. Ce
pouls est évident surtout lorsque l’insuffisance est accompagnée
d’une hypertrophie du ventricule droit. On voit alors le foie vo
lumineux s’abaisser dans l’abdomen ; son bord inférieur est sou
levé par des pulsations auxquelles le sphvgm ographe reconnaît
des caractères analogues à ceux du pouls veineux carotidien.
�—
48
—
II.
Dans les recherches que nous venons de faire, nos investiga
tions sont restées concentrées sur les affections des membranes
du cœ ur et sur le diagnostic exact de leur siège anatom ique; la
science pourrait m êm e se vanter d ’être parvenue à une précision
prodigieuse de diagnostic, si ces affections n ’étaient souvent mul
tiples, si elles ne présentaient souvent des com plications qui dé
routent les plus habiles. A utrefois, au contraire, les médecins
ne s’arrêtaient guère aux altérations des orifices ; ils ne voyaient,
le plus souvent, dans les maladies du cœ ur, que des altérations
de ses parois, que des anévrysm es actifs ou passifs. Désormais,
espérons-le, nous entrerons dans une période où seront conci
liées les opinions trop exclusives; l’action réciproque des deux
ordres dê lésions et l’autonom ie de chacune d ’elles seront suf
fisamment reconnues.
Pidoux et ses élèves travaillent en ce m om ent a réhabiliter
l’hypertrophie du cœ ur comme m aladie prim itive ; telle est, du
moins, le but que Campana s’est proposé dans son excellente
thèse.
D 'après Pidoux et Carqpana, l’hypertrophie du cœ ur, loin de
dépendre des lésions de ses valvules et de l’exercice forcé de ses
fibres, est, avant tout, le résultat de son évolution vitale; elle
provient d ’une aberration prim itive de sa nutrition
Cette opinion se base su rto u t sur des observations authenti
ques, une de Beau, entre autres, où la dilatation hypertrophique
s’est produite sans lésions des orifices ;
S ur le témoignage d ’observateurs tels q u ’A uburtin, qui n’ont
jam ais rencontré un seul cas où des palpitations répétées aient
déterm iné l'hypertrophie ;
S ur le volume énorm e que le cœ ur acquiert dans certains cas
d’hypertrophie, et qui, non-seulem ent n ’est plus en proportion
avec le surcroît d’énergie qui lui est nécessaire, mais encore de
vient une gêne pour ses fonctions et n ’est d’ailleurs pas compa
rable avec l’hypertrophie physiologique des m uscles ;
Sur l’exam en microscopique qui, en m ême tem ps que l’hyper
trophie, constate une aberration de structure ;
Elle pourrait s’appuyer encore sur l'influence des causes mo
rales, qui étaient si puissantes aux yeux de Sénac, et dont I évi
dence a porté M orgagni à partager cette opinion d’Albertini, que
l’action des causes morales explique pourquoi l’anévrysme du
cœur, si fréquent chez les hom m es, épargne a peu près complè
tement les anim aux. C’est sans doute l'observation pathologique
qui a suggéré l’idée déplacer dans le cœ ur le siège des passions.
Elle pourrait invoquer aussi l'influence des maladies généra
les ; ainsi Sénac rapporte que, dans la peste de Marseille, le
cœur présentait une dilatation « extraordinaire, étonnante, prodigiéuse. »
Enfin, com m e dernier argum ent, et des m eilleurs, vient l’in
fluence de l’hérédité, reconnue surtout par les anciens auteurs,
qui suivaient m ieux que nous les maladies des familles. Ainsi,
Lancisi, qui consacre tout entière sa 47* proposition à prouver
l’hérédité des maladies du cœ ur, cite une famille où le bisaïeul,
le grand-père, le père et le fils ont été atteints d'anévrysm e car
diaque. A lbertini rapporte l’histoire d ’une femme dont cinq
frères avaient succom bé à une maladie du cœ ur, et qui en était
atteinte elle-m êm e. M orgagni, Sénac et surtout Corvisart, in
sistent sur le rôle de l’hérédité ; ce qui prouve une prédisposition
spéciale, chez certains sujets, à l’aberration de la nutrition et du
fonctionnement cardiaques.
Ainsi donc, renouant la chaîne rom pue par l’étude un peu trop
exclusive des affections valvulaires, la m édecine m oderne peut
reconnaître l’existence des hypertrophies cardiaques, non pas
comme le rem ède utile ou l’effet nécessaire des obstacles valvu
laires, mais com m e une affection à part ; elle continuera ainsi,
avec de nouveaux élém ents, les études des anciens auteurs sur
cette maladie; seulem ent elle adm ettra que les altérations valvulai
res, et surtout les insuffisances, agissent souvent comme causes,
tantôt déterm inantes et tantôt occasionnelles de cette maladie.
�—
50
—
Probablem ent elle m aintiendra dans le m êm e groupe mor
bide, et peut-être réu n ira-t-e lle , sous le nom commun d’ancvrysm es, l’hypertrophie et la dilatation sim ple, qui sont unies
par des transitions insensibles et qui se développent sous les
mêmes influences; mais elle les distinguera com m e deux formes
d’un même état m orbide et com m e sources d’indications plutôt
différentes qu'opposées.
Elle reprendra aussi leur étude sém éiologique, qui a déjà été
faite bien plutôt au point de vue de théories physiologiques et
pathologiques q u ’au point de vue de l’observation clinique, et
séparera avec soin, parmi les sym ptôm es qui les accompagnent,
ceux qui sont sous la dépendance des lésions des orifices.
Voici un ensem ble m orbide q u ’on eût pris, il y a quelques an
nées, que l’on prendrait encore pour une simple insuffisance
tricuspide, et où le principal rôle m e paraît appartenir à la dilata
tion, c’est-à-d ire à l’anévrysme passif, du cœ ur droit.
Il est une aflection qui présente, du côté du cœ ur, une insuf
fisance tricuspide avec ses signes physiques plus ou moins carac
térisés, et une dilatation portant u n iq u em en t ou surtout sur les
cavités droites, avec affaiblissem ent de leurs parois. Elle s’ac
compagne en outre de lésions hépatiques d’apparence congestive
et de lésions pulm onaires variées, m ais dont la plus fréquente
est l’em physèm e. Les vieux g o u tteu x , les vieux asthmatiques,
les individus faibles ou débilités en sont les principales victimes.
Cette maladie est dans ce m om ent en voie de s’individualiser,
de se dégager comme entité pathologique.
Déjà, Stokes l’avait reconnue et en avait groupé les éléments
essentiels ; il avait mis du m oins en relief la faiblesse de l’im
pulsion cardiaque coexistant avec des lésions hépatiques et pulmo
naires. W alshe avait observé de plus des signes d’affections val
vulaires, et les avait attribués à un agrandissem ent des orifices
provenant tl’unedilatation cavitaire. G endrin et Friedrich avaient
égalem ent constaté une insuffisance relative de la tricuspide.
Marey, en 1863, avait donné, dans son beau livre, une descrip
tion succincte, mais assez complète, de cette maladie ; pour lui,
c’est une dilatation passive du cœ ur droit, dépendante d'un em
physème pulm onaire. C’est la même affection que W ilks, en
1865, a considérée comme une insuffisance tricuspide ayant pour
cause la pneum onie chronique ou la cirrhose du poumon, et qui,
celte m ême année, a fait l’objet des travaux beaucoup plus com
plets de Parrot et de Gouraud. Parrol s’en est occupé surtout au
point de vue delà production d ’un bruit de souffle dont la cause
est une insuffisance relative de la valvule tricuspide produite par
l’asystolie, c’est-à-dire la dilatation passive du cœur. Gouraud
l’a décrite au point de vue de l’action pathogénique des maladies
pulmonaires sur le cœ ur droit.
Un obstacle à la circulation pulm onaire, comme point de dé
part fréquent, mais non nécessaire ; la dilatation passive du ven
tricule droit, comme conséquence prem ière et fait capital ; l’in
suffisance relative de la tricuspide, comme effet de cette dilata
tion ; le reflux et la stase du sang veineux, et en particulier du
système veineux hépatique, comme résultat de ces altérations
plus fonctionnelles que matérielles du cœ ur ; telle me parait être
la filiation ordinaire de ces divers troubles morbides.
L’obstacle à la circulation pulm onaire peut provenir, soit d’une
insuffisance m itrale, soit d’une lésion pulm onaire. Cette lésion
peut être une pneum onie chronique ou une sclérose du poumon,
ainsi que le prouvent les faits réunis par W ilks, et celui qu’a
publié Charcot. La pleurésie peut entraîner à sa suite la dilata
tion du cœ ur droit, ainsi que l’avait déjà observé Sénac. La pneu
monie aiguë est accusée par Gouraud de la produire quelquefois
d’une façon tem poraire ; ce serait là, d’après cet auteur, la véri
table cause du souffle cardiaque que l’on rencontre parfois dans
le cours de la pneum onie et que, ju sq u ’ici, I on attribuait à une
complication d ’endocardite. Ce qui est rem arquable, c’est de voir
la phthisie ne produire presque jamais, et l'emphysème déterm iner
assez souvent cette im puissance du cœ ur droit. Cependant, de
ces deux affections, la phthisie est certainem ent celle qui res-
�treinl le plus la circulation p ulm o naire, puisq ue, suivant les
belles recherches de N. Guillot, elle va j u s q u ’il l'annihiler pres
que com plètem ent. Mais elle procède à cette obstruction d une
m anière lente et graduelle, tandis q u e l'a sth m e , cause ordinaire
de l'emphysème, m arche par attaq ues plus ou moins subites.
Cependant 1 em physèm e ne p eut, par lu i-m ê m e , produire cette
inertie et cette altération du c œ u r droit ; il n'y aboutit que chez
les sujets débilités et su rto u t chez les g o u tte u x , si prédisposés
aux désordres o rganiques et dynam iques du systèm e cardio-vas
culaire.
Les vaisseaux pulm onaires étant o b stru é s, le sang a de la
peine a sortir du ventricule d ro it, qui se laisse alors dilater ; mais
une autre influence vient aider à cette dilatation, c’est que l’ar
tère pulm onaire se dilate e lle-m ê m e au point de déterminer
assez souvent I insuffisance physiologique de ses valvules. Une
insuffisance de m êm e nature se produit b la tricuspide, avec
beaucoup plus de fréquence et d ’a u tan t plus de facilité que,
m êm e à l étal norm al, celte valvule ne ferm e pas parfaitement
bien, ce qui en fait, co m m e l’ont so uten u A dam s et WilkinsonKing, un régulateur de la tension veineuse générale.
Le sang veineux ne se trou vant plus e m p riso n n é , n’étant plus
forcé de s accum uler en tre 1obstacle pulm onaire et le ventricule
droit, reflue dans le systèm e veineux général et en particulier
dans le système hépatique, soit qu il y ait sim plem ent influence
des dispositions anatom iques, soit que le poum on et le foie aient
une action physiologique co m p lé m e n ta ire ; on connaît, en effet,
le développement du (oie pendant la vie lœ tale, alors que le pou
m on ne fonctionne pas.
En résu m é, le phénom ène.essentiel est l’état d impuissance et
de dilatation du ventricule d ro it, qui ad m et, co m m e cause fré
quente, un obstacle à la circulation pulm onaire, com m e consé
quence d irecte, une insuffisance tricuspide, et comine consé
quence indirecte une su rcharge du système veineux avec congestion considérable du foie.
Telle est la physiologie pathologique de la maladie. Quant a
son aspect clinique, c ’est celui des maladies du c œ u r: faciès
cardiaque, pouls veineux, œ dèm e des extrém ités, hydropisies
parfois énorm es, gonflement du foie, dyspnée avec râles thoraci
ques qui m asqu en t souvent les bruits du cœ u r ; ceux-ci sont
faibles, fréquents, tantôt avec un bruit de souille au prem ier
temps, correspondant à l’insuffisance tricuspide, plus rarem en t
avec un double bruit de souffle exprim ant une double insuffi
sance, tantôt sans aucun bruit anorm al, alors surtout que la m a
ladie est très grave, q u ’elle est avancée, que l’insuffisance est
considérable et que le cœ u r a perdu son énergie.
Quant aux indications thérapeutiques, elles prouvent surtout
les avantages de cette tendance que Stokes et Beau ont tâché
d’im prim er à l ’étu de des affections cardiaques, et qui com m ence
à faire de sensibles progrès. C eux, en effet, qui ne voient dans
cette maladie q u ’une insuffisance tricuspide, se trouvent, en sa
présence, co m p lètem en t d ésarm é s; ceux, au contraire, qui ont
reconnu L'influence primitive et prédom inante des troubles dy
namiques du m uscle cardiaque, trouvent dans la médication
tonique un auxiliaire puissam m ent utile.
(La suite au prochain numéro.)
D' À. F abre.
C h ro n iq u e M en su e lle .
Dans ce siècle où tout m arche à la vapeur et à l’électricité,
publier un co m p te -ren d u le surlendem ain d’une première repré
sentation n ’est déjà plus à p ropos; à plus forte raison, redire un
mois après tout ce qui s ’est lu dans les aulres journaux. Cette
réflexion nous est venue juste au m om ent où nous prenions la plu
me pour co m m ettre l’acte que nous blâmons. Cependant si, celte
fois, nous nous b ornons à glaner quelque peu dans le champ
de la presse parisienne, q ui, il faut le dire, plus tôt et mieux
renseignée que les jo u rn a u x de province, nous mâche la beso
gne des co m p te s-ren d u s académ iques, nous donnerons, à l’ave-
�uir, nu caractère plus local h ces articles, l a clientèle de nos
confrères et la richesse de faits de nos hôpitaux en alimenteront
la publicité.
C om m ençons par l'Institut :
Et d'abord ne vous donnez plus la p eine de chercher la théorie
du choléra, elle est trouvée. Rien n ’est plus sim ple, dit M. Grimaud de Caux. En vérité, je ne sais ce que l’on attend pour lui
décerner le prix Dréant. C ertes, nous ne saurions trop louer les
eftorts consciencieux auxquels s’est livré ce savant, sur tout ce
qui regarde ce fléau ; mais ex am in o n s ses conclusions. C’est
M. G rim aud qui parle :
« i* Le choléra de 18Go est venu du dehors. J ’ai découvert
et signalé le point du sol où, en d é b a rq u a n t, il a touché France.
Le devoir pour l'avenir est de lui ferm er les voies que nous lui
connaissons (rien de plus juste).
« S- Le principe du choléra est d ’origine organique. Pour la
préservation on peut com pter su r l'efficacité constatée des subs
tances capables d ’em pêcher des pro du its o rganiques étrangers
de s ’im planter dans le corps h u m ain .
- 3* La théorie véritable du choléra est trouvée. Elle se dé
montre par les effets prim itifs qui signalent sa présence dans un
corps vivant, et parla m éth od e de traitem e n t qui conjure ces effets
avec un infaillible succès.
« Il résulte de la que, p ou r la solution com plète du problè
me, il reste deux inconnues seu lem ent :
« 1* Le principe par lequel la m aladie est spéciûée est-il de
nature végétale ou anim ale ?
« 2" Quelle est la substance la plus propre a neutraliser im
m édiatem ent l'action de ce p rin cip e ? »
Le prem ier point n 'est pas b d iscuter, e t nous som m es entiè
rem ent de l’avis de M. G rim aud. Q u ant au d eu x ièm e, le principe
du choléra est d origine o rg an iq u e, je le veux bien. Mais quelles
sont les substances capables d 'em p ê ch e r les produits organiques
de s im planter dans le corps hum ain Serait-ce l’opium qui con
jurerait ces effets avec un succès infaillible, et que l’auteur ap
pelle à contrôler sa théorie? Mais alors la deuxièm e inconnue
est trouvée a l’insu m êm e de M. G rim aud, et il resterait à co n
naître la nature végétale ou animale du principe cholérique, ce
qui ne serait, il faut l’avouer, que d ’une utilité secondaire.
Seulem ent, voyons dans quels cas ce rem ède (l'opium) n'a ja
mais, et en aucun lieu, suivant l'auteur, m anqué son effet. C’est,
dit-il, dans les cas sim ples, c ’esl-b-dire : !°d a n s les cas non fou
droyants, et 2 ' dans les cas où l’élém ent cholérique n 'est pas
venu s ’ajouter à d ’autres causes de m ort im prégnant le sujet.
J’avoue que celte deux ièm e exception n ’est pas très claire, mais
il me sem ble, en o utre, que tous les cas sortant de ces deux ca
tégories ne sont pas si simples que veut bien le dire M. Grimaud.
Si, du reste, la m éth od e opiacée roussit dans les cas simples,
quelle est celle qui ne réussit pas, à co m m encer par celle de
M. A ronssohn?
11 n ’y a pas bien lon gtem ps que le docteur A rm and donnait le
sulfate de quinine au m êm e titre que M. Grimaud donne l’opium.
Des observations du p rem ier, faites en Cochinchine, il résulterait
que sa m étliode qui nique donnerait seulem ent une mortalité de
dix pour cent. Quel beau résultat! S ’il pouvait le contrôler, M.
Grimaud ne dirait pas que l’opium est le seul rem ède efficace.
Le choléra, ajoute l’honorable académicien, consiste dans une
sidération du système nerveux de la vie organique. Soit. Mais
alors il me sem ble que la m éthode du docteur Chapm an est bien
plus rationnelle (i).
Tandis que M. G rim aud découvre la théorie du choléra, M.
Guyon co m m u niq ue à l' Académie deux notes : l une tendant a
démontrer la non transm ission du choléra, de l’hom m e aux ani
maux, la d euxièm e ten d an t à établir l’identité du choléra avec
les épizooties concom ittantes. Mais en voila assez sur cette m a(t) Glace le long du rachis et chaud aux extrémités pendant la période
algide. — Chaud sur tout le corps pendant la réaction.
�57
ladie, qui a eu le triste privilège de réveiller l’ardeur du steeplechase'du prix Bréant.
M. Peyrani et M. Philippeaux, de L yon, sont d’accord sur la
n on-régénération de la rate co m p lè te m en t extirpée, mais le pre
m ier soutient contre M. Philippeaux q u e, m ê m e incomplètement
enlevée, la rate ne se rep rod uit jam ais. C’est là le sens de la
com m unication de M. P eyrani.
Tel sera le ré su m é de ce qui co ncerne l'Académ ie des scien
ces, en y ajoutant encore une n ote de M. Plateau, sur la force
m usculaire des insectes. Si jeu n esse sav ait....... Les enfants qui
font traîner aux capricornes et aux h an n eto n s de petites char
rettes en papier ne se seraient jam ais im aginé q u ’un jour M. Pla
teau m ettrait à profit cet a m u se m e n t enfantin pour découvrir la
force m usculaire des insectes. M. Plateau doit être un observa
teur profond. Il a du ajouter de petites pierres dans les voitures,
exciter les petites bêles de trait h la co u rse, et enfin peser sépa
rém ent l’animal et le fardeau. En faisant de m êm e pour les che
vaux et d’autres vertébrés, il en est arrivé a cette conclusion :
que les insectes o n t, relativem ent h leu r poids, une force énor
m e, co m parée à celle des anim aux su périeu rs.
L Académie de m édecine n est g u è re pins riche que l'Acadé
mie des sciences. La discussion su r le typhus des hèles à cornes
occupe plusieurs séances. L es u n s, co m m e M. Bouillaud, trou
vent le mot typhus im p ro p re ; d ’au tres, co m m e M. Louis, veu
lent faire de cette épizootie une fièvre typhoïde. Enfin, l'on n'est
pas près de s'en tend re ... pas plus q u e su r la vaccination.
Celle-ci est un des dadas favoris d e l’Académ ie. Elle revient
avec une interm ittence annuelle passionner les esprits, à l’occa
sion du rapport de M. D epaul, sans q ue l’on sache bien à quoi
s en tenir su r le résultat de la discussion. C elte année, la vacci
nation animale a été mise sérieu sem en t en question. Pauvres
nourrices vacciniferes ! je vois déjà la façon dont vous allez en
graisser en tre deux barrières du jardin d ’acclimatation.
M. Maisonneuve a lu un m é m o ire sur l’application des injec-
-
lions coagulantes à la cure du varicocèle. Ce procédé, qui est à
peu près le m êm e que le traitem ent des varices par les injections
de perchlorure de fer, ou mieux, com m e le pratique M. Delore,
de Lyon, avec le liquide iodo-tannique, aurait réussi entre les
mains de cet habile chirurgien. On ne peut ju g er de la valeur
d’un procédé q u ’après l’avoir ex périm enté; cependant, par ana
logie de ce qui se passe dans les varices, il y a lieu de se d em an
der si les guérisons q u ’obtient M. M aisonneuve sont définitives
ou tem poraires.
M. Péan a présenté à l’Académie un nouveau cas d ’ovariotomie
suivie de succès. Ce doit être un encouragem ent de plus à vul
gariser cette précieuse et m oderne conquête chirurgicale.
Le m êm e chirurgien a présenté aussi une malade q u ’il a opé
rée avec succès d ’une tu m eu r fibreuse de l’utérus, pesant deux
kilog. Il faut,[pour term in er le bilan des quatre séances du mois
de janvier, citer le travail de M. Raciborski, sur le traitement
des affections de la m atrice par des pansem ents quotidiens, à
l’aide de nouveaux pessaires préparés avec le tvphas.
C’est le 8 janvier q u ’a eu lieu la séance annuelle de la Société
Médico-psychologique. M. Félix Voisin, son président, a ouvert
la séance par u ne courte allocution. Quand on s ’exprim e avec
cette énergie d ’expression et cette supériorité de style, on ne
doit pas craindre de fatiguer l’attention de ses auditeurs. Exempt
de lieux co m m u n s, le discours de M. Voisin ne ressemble pas à
tous les au tres, pas m ê m e par sa longueur, dernier point de res
semblance q ue nous lui aurions volontiers pardonné, car nous
avons regretté q u ’il fût si court.
L’espace nous m a n q u e pour parler de la Société de Biologie, et
nous n’av o n sq u e ju s te la place d ed ire un m o td u nouveau procédé
de M. Ollier, co m m e opération prélim inaire dans l’extirpation
des polypes n aso-pharyngiens. Nos lecteurs doivent déjà savoir
en quoi il consiste ; rabattre le nez en avant et en bas par une
incision en V ren versé, com m e si l’on voulait faire entrer cet
organe dans la bouche du malade, le laissant adhérer toutefois
�par (rois piliers, la cloison au m ilieu, les ailes sur les côtés.
Q uand M. Ollier aborde une q u estio n , c ’est toujours avec cet
esprit pratique qui caractérise les bon s ch irurgiens Deux obser
vations récentes rapportées par M . B o n n efo u sd a n s le Montpellier
Médical, viennent en core, après celles q u ’a rapportées M. Vien
nois, justifier le choix original du p ro céd é. Cependant si nous
n hésitons pas en tre cette o pératio n et la résection de M. Flau
bert, de R o u en , il n ’en serait pas de m ê m e en comparant la mé
thode de M. Ollier avec celle de M. N élato n. Mais il me semble
qu il conviendrait de distin g u er les cas. P o u r un polype implanté
su r l’apophyre basilaire ou su r cette p etite surface qui est en
arrière de l’o uv erture de la tro m p e d 'E u sta c h e , je préférerais le
procédé du chirurgien de Paris ; p our un polype implanté sur la
voûte des fosses nasales, le cas est assez rare, je donnerai la
préférence au procédé de M. O llier. Enfin, je crois que, dans
quelques cas de polypes par trop volum ineux, on pourrait peutêtre co m b in er les deux p rocédés. N o u s les avons essayés sur le
cadavre, et nous avons pu ap précier la simplicité du manuel
opératoire de l’ostéotom ie verticale et bi-latérale du nez. Cepen
dant, quand nous avons voulu en fon cer le doigt dans la narine,
droite ou gauche, nous n ’avons pu le faire sans briser les cornets
ou la cloison, et la voie o uv erte ne n o u s a pas paru aussi large
que celle que M. Nélaton se fraie par 1ostéotom ie palatine et la
division du voile. Enfin, pour te rm in e r, si nous n'admettons pas
le procédé du chirurgien de L yon, co m m e application générale,
nous som m es tout disposé à reco n n aître la valeur et I impor
tance de celte nouvelle m é th o d e, Mirtout e n tre les mains si ha
biles de celui qui l'a p récon isée.
A. Q.
E x e rc ic e illé g a l.— J u g e m e n t d u T r i b u n a l civ il de Marseille.
Attendu qu'il résulte des d ébats q u e , dans le mois d’août der
nier, la Ülle 11. B . . . , ép rou van t de violents m aux de tête, s’en plai
gnit à la dam e V ..... , sa v oisine; q ue celle-ci lui parla d’un re
mède que lui avait vendu une fem m e B ..... , qui guérissait toute
espèce de maux ; q u ’à la prière de la Dlle B .... la dame V .... lui
céda cette substance contenue dans un (lacon ; que cette per
sonne en prit u ne cuillerée à bouche le lendemain m atin; que
les effets de ce p rétendu rem ède furent des plus fâcheux ; qu ’elle
éprouva de violentes douleurs d'entrailles accom pagnées de dé
jections ; que sa vie fut m êm e dans un sérieux danger ;
Attendu que les recherches auxquelles il fut procédé firent
découvrir que cette substance n ’était autre que de la coloquinte
distillée dans de I alcool et q u ’elle provenait de chez l’inculpé
L. L. D__ qui en débitait des llacons accom pagnés d ’un pros
pectus pompeux ; q u ’une perquisition faite dans son domicile
y lit découvrir quatre llacons pareils et une masse de pros
pectus ;
Attendu que le prévenu est donc convaincu d ’avoir occasionné
par son im prudence les lésions internes éprouvées par la Dlle
B ... et qui, d ’après les tém oignages du docteur Rey, caractéri
saient une g a stro -en térite ; q u ’il a débité un rem ède secret et
s'est aussi im m iscé sans droit dans l’exercice de la pharmacie ;
que déjà D ... a été puni d ’une am ende en 1862 pour vente de
remède secret ; q u ’il y a lieu de lui appliquer une peine en rap
port avec les résultats dangereux produits par la substance q u ’il
a répandue;
A ttendu, quant au délit de colportage d'im prim és sans auto
risation, q u ’il ne résulte point suffisamment des d é b ats; que ces
imprimés se sont trouvés chez lui, mais qu il n ’a point été cons
taté qu'ils eu ssen t été émis dans le p u b lic ,
Le T ribunal
Déclare D ..... L. L. coupable d’avoir, en 1865, à Marseille,
I* exercé illégalement la pharm acie; 2*débité au poids médicinal
un remède secret; 3* par im prudence, occasionné des blessures
à la Dlle H. B ...
En réparation le co nd am n e à deux mois d ’em prisonnem ent, à
16 francs d 'a m e n d e et aux frais avec contrainte par corps.
�—
60
—
—
Le renvoie du surplus des lins de la plainte, liquide les frais à
fr. 27 50 cent.
Fait et prononcé en au dience p ublique au Palais de Justice, a
Marseille, le 2 1 novem bre 1865.
(Signé) A u tra n , p ré sid en t, A rnaud et B ouis, juges.
Ma sse , greffier.
C o m p te -re n d u d es s é a n c e s de la C o m m issio n Administrative.
seancb du 11 janvier
1866.
Présidence de M. S eux .
M. Martin, professeur, adresse des félicitations bien sincères
a M. le d octeur Seux et à M. de La S o u c h è re , au sujet de leur
nom ination au grade de chevalier de la L égion-d'H onneur. Tous
les roécecins, dit M. M artin, applaudissent de grand cœur à
cette haute distinction, d 'a u ta n t plus qu elle a été accordée à
M. le Président et au V ic e -P ré s id e n t de la Société locale des
B ouches-du-R hône.
M. Seux rem ercie M Martin des paroles affectueuses qu il
vient de p ro no ncer, tan t en son nom personnel q u ’au nom de
l’association des m édecins des B o u c h e s-d u -R h ô n e .
M. le Président rend com pte des visites du jou r de l ao et
fait connaître la m anière dont M. le S é n a te u r a reçu la commission qui est allée à la Préfecture le l*r jan v ier. « Messieurs, a
dit M. de Maupas, ce ne sont pas seu lem e n t des paroles élogieuses qu'il faut ad resse rai! corps médical de Varseille pour la
m anière d ont il s ’est co nd uit p end ant la d ernière épidémie : ce
sont des rem ercim ents bien siucères et ju ste m en t mérités.
Veuillez transm ettre à tous vos collègues l'expression de mes
sen tim en ts de haute estim e et de profonde sympathie. »
La commission rem ercie M. Seux de s être rendu l’interprète
des paroles et des sen tim en ts de M. le S én ateu r.
61
—
M. Seux ayant reçu de M. Rayer une lettre d ’invitation pour
se rendre à la réunion du conseil général à Paris, raconte ce qui
a eu lieu dans cette réunion , h laquelle il a assisté le 20 dé
cembre d ernier.
Le but de cette séance était de voter sur l’envoi immédiat du
rapport de M. B arrier (révision des lois qui régissent actuelle
ment la m édecine), à MM. les Présidents des Sociétés locales,
et de décider si le conseil général devait intervenir ou non, col
lectivement, dans la discussion qui aura lieu à ce sujet à l’as
semblée générale du 1er avril prochain. Dans cette séance,
M. Seux a exprim é son opinion en faveur de la révision des lois,
justifiant ainsi l’opinion de la Société locale des B ouches-duRhône.
La décision prise par le conseil général dans cette réunion a
été la suivante : « Le conseil g énéral, en conséquence de la
délibération prise par la d ern ière assemblée générale, décide
qu'il y a o pportunité à agir su r les pouvoirs publics pour d e
mander la révision d es lois qui régissent actuellem ent la m éde
cine, en vue du projet de loi qui parait être à l’étude au Conseil
d’Etat. » La com m ission rem ercie M. Seux de sa com m unica
tion. La séance est levéç.
Le Secrétaire, D r V illard
k
■
�de La S ou ch ère un loast rem arq u ab le el vivement applaudi:
« Ces distinctions, leur a - t- il d it, pour lesquelles vous êtes plus
spécialem ent désignés par vos longs services publics, sont un
h o n n e u r qui rejaillit su r le corps m édical tout entier. En ré
com pensant en vous le courage civil, si hautem ent éprouvé
pendant la longue épidém ie qui vient de ravager Marseille,
l'E m pereur accom plit sa m ission de civilisation et de progrès. »
L ’adm iration si ju s te m e n t m é ritée par la bravoure militaire
ne doit pas être exclusive . « Il ap p artien t à notre époque, aux
g én éra tio n s qui arrivent, d ’élever au m êm e niveau tout ce qui,
dans la m arche de l’h u m a n ité, est m a rq u é du sceau du génie,
toutes les actions, tous les d é v o u e m e n ts qui font I honneur de
l’hom m e et du pays. »
L o rateur a en suite signalé tout ce q u ’il y a de noble et de
glorieux dans la mission du m é decin en lace d 'u ne grande épi
démie. « N on, le courage que uou s avons à m o ntrer n’a rien de
cet clan qui cache le d ang er. L’ennem i que nous avons à com
battre est invisible, ses coups sont im p rév u s, ils sont mortels.
C 'est froidem ent, sans e n th o u sia sm e , d an s les salles d'un hôpi
tal, au sein de la famille, parm i les ind igen ts, que nous allons
exposer notre existence. Si le soldat, au sein de la victoire, peut
entrevoir de loin les larm es d ’une m è re , ces larmes, cette afflic
tion, ce désespoir, nous les voyons sans cesse. Partout, autour
de nous est la tristesse, le d é c o u ra g e m e n t, la m o rt, et nous de
vons, en présence de tant de m a lh e u rs, d e m e u re r impassibles,
car il faut soutenir toutes les défaillances el relever le moral des
populations épouvantées. »
M. Chapplairi, en te rm in a n t, a ren du hom m age aux autorités
adm inistratives qui o nt vu à l’œ u v re les m édecins de Marseille;
à l’E m p ereu r, à l’Im p ératrice q ui, a p rè s avoir visité le champ de
bataille du m édecin, o n t su ré c o m p e n s e r le dévouem ent médical.
En son nom et au nom de M. de La S ou ch ère, M. Seuxa ré
pondu que les réco m p enses reçues h onoraient non seulement
les m édecin s qui v enaient d ’en être l ’objet, mais encore le corps
médical tout en tie r, d ont les m em bres sont unis par une étroite
solidarité et ne form ent q u ’une seule famille;
Qu il était p articulièrem ent touché de la m arque éclatante de
sympathie q u ’il recevait de ses confrères, m em bres de l’associa
tion médicale des B o uclies-du-K bône ; il leur a porté un toast
chaleureux ainsi q u ’à trois médecins qui n'ont jamais cessé de se
dévouer à l'association, M. R ayer, président général, M. A m édée Latour, secrétaire général à Paris et M. le docteur Laurens, secrétaire de notre Société locale.
Les paroles de M. S eu x, em preintes d ’une éloquence partie
du cœur, ont été couvertes d ’applaudissem ents enthousiastes.
Ensuite, le d o cteu r Villard, vice-secrétaire, se rendant L in
terprète de la pensée de ses collègues, a porté un toast élégam
ment écrit el vivem ent applaudi aux étudiants en m édecine de
Marseille, dont la belle conduite a été si rem arquée pendant
l’épidémie, et qui ont été récom pensés dans la personne de
M. Dauvergne, c h e f intern e des hôpitaux, nom m é chevalier de
la Légion-d' H o nn eur. M . Villard a profité de celle occasion pour
rendre h om m age à l Adm inistralion des hospices dont les efforts
ont contribué à faire honorer dignem ent le dévouem ent médical.
Dans une réponse pleine de m odestie, M. D auvergne a re
mercié ses confrères et tém oigné de sa reconnaissance envers
le haut fonctionnaire qui adm inistre le d épartem ent ainsi q u ’envers l’A dm inistration des hospices.
M. le d octeur M ittre, dans une improvisation qui a permis
d'apprécier sa diction pure et (acile, a porté un toast à l’associa
tion générale, sau vegard e des intérêts professionnels, appelée à
protéger tous les m édecins, surtout au début de leur carrière.
• Cette fête serait com plète, a -t-il dit, si, après nos félicita
tions bien cordiales aux m édecins que nous fêtons aujourd hui,
il nous était donné de féliciter aussi des m édecins placés dans
une position plus m odeste et moins oflicielle, les médecins des
sociétés de secours m u tuels et surtout ceux des bureaux de se
cours. Ils o nt d o n n é leur te m p s, prodigué leurs veilles pour
�soulager les pauvres, el ils n ’o n t eu p our récom pense d'une si
belle conduite que le so uvenir de leur abnégation.
t En portant ce toast à l’association g én érale, j'espère, a-t-il
ajouté, qu un jo u r elle réu nira tous les m é d ec in s de l’Empire,
tout en conservant I au ton om ie et I individualité des sociétés lo
cales. Grâce h l’association, le corps médical pourra un jour
taire en ten d re ses réclam ations si ju s te s et si peu écoulées. »
De vils applau dissem en ts o n t pro uv é â M. Miltre qu ’il venait
d ’e ip r im e r les sen tim en ts de l'assem blée.
M le docteur Rey a p orté un toast à M. le docteur Coste, di
recteur de l Ecole de M édecine et a d m in istrate u r des hôpitaux,
puis un autre toast à MM. les avocats V erne et Chataud, qui
com posent le conseil judiciaire de l ’association locale des Bou
ch es-d u-R h ôn e.
M. le docteur Pirondi, m e m b re de la com m ission administra
tive, a don né lecture d une lettre écrite par M. Amt dée Latour.
Dans celte lettre, M. le secrétaire g énéral félicite l’association
des réco m p enses que les m édecins qui so n t â sa tète ont obte
nues. Il y tém oigne u n e pleine confiance en l ’avenir d'une
œ uvre qui doit resserrer les liens de b o n n e confraternité et as
su rer au corps médical tous les av an ta g es, toutes les améliora
tions q u ’il est en droit d ’a lte n J r e d ans l’o rd re des intérêts pro
fessionnels.
C ette attention délicate, cette d ém arch e vraim ent confrater
nelle de M. A m édée L atour a reçu de l'assem blée l’accueil en
thousiaste qu elle méritait.
Telle a été cette soirée qui re ste ra dans les annales delà
profession médicale co m m e uo g ra n d exem ple et un précieux
souvenir.
Nous nous faisons un plaisir d ’offrir, cette fois en
core, â nos lecteurs, un s u p p lé m e n t de 16 pages.
— N ota .
Le Comilé de rédaction.
■ ir teille. — Imprimerie AHIUVD, Ca TER et C*, rue Selot-Ferréol, 97.
M arseille e t la c r é a ti o n des n o u v e lle s F a c u lté s de
M édecine.
1
k
La séance du Conseil municipal du 18 février dernier aura vi
vement intéressé tout esprit jaloux de la grandeur de Marseille
et des progrès de nos institutions médicales. Elle nous a révélé
d’im portantes m e su re s : d’un côté, le Conseil m u n icip al.su r la
proposition de l’honorable M. T ho urel, décidait de demander
avec instance au G o uv ernem en t l’érection de notre école secon
daire en Faculté de m édecine, sous l’offre de contribuer aux frais
de cet établissem ent ; de l’autre, M. le Maire déclarait que d ’ac
tives d ém arches avaient été faites, dans le m êm e b ut, par lui et
par M. le S é n a te u r chargé de l’adm inistration des B ouches-duRhône.
Destinées à créer parmi nous un grand foyer de science et
d’en se ig n e m e n t, ces d ém arches touchent à un intérêt général
trop élevé pour ne pas être accueillies avec faveur. Elles le se
ront, il faut r esp érer. Mais quels que soient leurs résultats, nous
devons toujours un vif tém oignage de gratitude et de satisfaction
à la noble p ensée qui les a inspirées.
A près ce public hom m age, exam inons ici une question pleine
d’actualité et voyons co m m en t, en d em an dant une Faculté de
médecine, M arseille justifie ses propres aspirations et l’active
sollicitude de ses autorités.
Elle les justifie : par le chiffre de sa population ; par son im
portance industrielle et com m erciale; p a r le s puissants élém ents
de science et d ’en seig n em en t accum ulés dans son sein ; par sa
position g éog raph iqu e ; par ses relations intérieures et exté
rieures; en un m ot, par toutes ses forces vives el par ses hautes
destinées.
Les grand es villes seules conviennent parfaitement à la m ulti
plicité théoriqu e et pratique des études médicales. Sans doute
I
�— G7 —
notre art p eu t s ’ex ercer, av ecd istin ction et profit pour la science,
partou t, m ê m e dans l'isolem ent des petites localités; mais ren
seignem ent de la m édecin e ne tro u v e des é lém ents véritablement
com plets q u e dans les g ra n d es cités populaires. E n effet, là seu
lem e n t, avec les fécondes ém u latio n s, se ren con trent à la fois
toutes les m e su re s ap p ro p riées, les g ra n d s établissem ents scien
tifiques et les g rand es institu tio n s de bienfaisance ; là seulement
abondent, dans leur infinie v ariété, to u tes les misères sociales
capables d ’alim en ter les plus vastes cliniq ues, de suffire aux
n om b reu ses investigations de la science, de faire en un mot des
médecins achevés, habiles p raticiens et savants distingués dans
chaque b ranch e de l’art.
Marseille réu n it à un très haut d e g ré tou tes ces conditions.
Son E co le seco n d aire de m édecin e et de p h a rm a c ie , son corps
e n s e ig n a n t,noble lignée, fidèle aux g ra n d es traditions scienliliques, habituée aux d év o u em en ts e t aux difficultés de la profes
sion , ses am ph ith éâtres de dissection a b o n d a m m e n t pourvus de
cad av res; sa bibliothèque m édicale déjà considérable et souvent
au gm entée par les dons de g én ére u x co nfrères , sa Faculté des
sciences, ses trois g ra n d s hôp itau x, son hospice d’aliénés, ses
prisons, ses casernes, ses u sin es, ses m a n u factu re s, ses ate
liers, ses grands chantiers de co n stru ctio n , son imm ense popu
lation o uvrière, ses m a rin s, ses n o m b re u x étran g ers, ses rela
tions avec toutes les parties du m o n d e , ses maladies exotiques,
ses fréquentes épidém ies, sa position de sentinelle avancée de la
santé publique, position qu elle o ccupait hier encore avec hon
n eur au milieu du choléra , to u t enfin lui crée, en France, une
situation adm irable, exceptionnelle m ê m e pour servir les intérêts
de la science et de l’en se ig n e m e n t.
Jo ign ez-y le re c ru te m e n t facile de nos écoles, du moment
q u ’elles d istrib u ero n t une plus large instruction médicale et
qu elles au ron t le droit d ’accord er tous les privilèges et tous les
litres conférés par nos institutions. Dès-lors n otre ville, au lieu
de servir d e halte passagère à dos étu d ia n ts , fixera au milieu
d’elle ses nom breux enfants, attirera les jeu n es gens de tout le
sud-est de la F ra n c e , de l’Algérie, du littoral m éditerranéen ;
ceux du Levant en particulier y alllueront d ’autant plus n aturel
lement q u ’ils y trouveront, déjà résidant, beaucoup de leurs n a
tionaux étrangers.
Voilà, en un rapide coup d’œil, les sources intarissables où
Marseille peut aller puiser ses élém ents d’étude et de prospérité
scientifique.
M aintenant figurez-vous tous ces élém ents, aujourd’hui épars
et languissants, soudain pénétrés d ’une vie nouvelle, anim és
d’une v igoureuse im pulsion, unis dans le culte magique de la
science, tran sform és, grandis et concentrés dans un foyer com
m un, au cœ u r d ’une Faculté de m édecine, et de là se réfléchis
sant au d eho rs, se répandant partout avec profusion pour susci
ter tous les g én ére u x élans, éveiller toutes les aptitudes, affirmer
toutes les capacités et, dans un but sublim e, assurer les plus
utiles, les plus intim es bienfaits réclam és par l’hum anité : telle
vous apparaîtra, dans cette rég énération , Marseille m oderne et
savante. Elle d o n n era le magnifique spectacle d ’une grande cité
travaillant, au sein de la paix, à l’accom plissem ent de sa haute
mission civilisatrice. A près avoir élevé sa puissance intellectuelle
au niveau de ses prospérités comm erciales et industrielles, au
niveau du progrès social m oderne, au nivéau des destinées où
elle est appelée ; après avoir harm onisé le com plet développe
ment de toutes ses forces et de toutes ses facultés, elle aura réa
lisé une de ses plus ard entes aspirations et sera fière de concou
rir, plus activem ent que par le passé, à la gloire et à la splendeur
de la France.
Le Comité de rédaction.
�—
68
—
UNIVERSITÉ DE FRANCE. - ACADÉMIE D’AIX.
École Préparatoire de Médecine et de Pharmacie de Marseille.
M arseille, le 10 mars 1866.
Le Directeur de l'Ecole à Messieurs les Membres du Comité de
rédaction de /'U nio n M édicale de Marseille.
M essieurs et très honorés confrères ,
Le feuilleton de l'Union Médicale de P a ris,du 30 janvier der
nier, à propos du m o u v e m e n t scolaire d ans les établissements
d’en seig nem ent médical pour 1 8 6 3 , disait de l'Ecole de Mar
seille un m ot qui devait faire croire q ue cette Ecole était en dé
cadence, par rapport aux au tres institu tio ns du m êm e ordre.
J'ai dû réclam er contre u n e pareille inexactitude, par une
lettre en date du 9 février, et d ont je d em an dais l’insertion dans
le jou rnal.
Ma d ém arch e, si légitim e q u ’elle fut, n ’a pas réussi ; la recti
fication que je dem andais a é té refusée.
Il était pourtant, je crois, de to u te justice et de toute conve
nance qu ’on publiât tex tu ellem ent ma lettre. Mais, comme je
prouvais, par des chiffres officiels, q u e le journaliste n ’est nul
lem ent au courant de ce qui se passe dans les écoles médicales
d e là province, et qu'il s ’est co m p lè te m e n t trom pé à l’égard de
celle de Marseille, ma lettre n ’a pas été in sé ré e . On a trouvé
plus com m ode d’an n o n c e r tou t sim p lem e n t, quinze jours plus
tard, q u ’on ferait droit à ma réclam ation , d ans la prochaine
ch ronique des départem en ts.
O r, ce droit ne m ’a point été fait ; la satisfaction qui m’était
si ju ste m e n t due ne m ’a pas été d o n n ée.
E n effet, dans le feuilleton du 27 février, l'auteur de l’erreur
contre laquelle j ’ai p ro testé p rétend n ’avoir jam ais nié, con
testé, ni m is en d ou te les p ro grès de l’E cole de Marseille. Con-
— 69 —
séq uem m ent, il n ’a pas, dit-il, de rectification à produire, mais
à donner seu lem ent une explication ; explication que je ne sa u
rais accepter, car elle n’explique absolum ent rien.
Pourquoi donc, si le feuilletoniste de YUnion Médicale n’a
jamais nié la prospérité de notre Ecole, écrit-il cette phrase que
je lui reproche : « A Lille, h T oulouse comme à Bordeaux —
impossible d ’en dire autant de Marseille — l’augm entation des
élèves est en rapport avec celui des cours, etc. » ? L ’ouverture
de cette parenthèse n ’est-elle pas un peu dédaigneuse, et ce
langage ne veut-il pas dire, très évidem m ent, que Marseille,
par les résultats que d onne son Ecole de m édecine, est au-des
sous des villes qui v iennent d'être citées, m êm e de Lille ?
Il n’y a pas lieu à la moindre équivoque ; cela est parfaite
ment clair.
Or, savez-vous q u ’elle est l’explication q u ’on d o n n e? M. G ar
nier prétend q u ’il n ’a pas eu connaissance de m on rapport de
l’année scolaire 1 863, atten d u que ce co m p te-rend u n ’a pas
encore été publié dans les organes médicaux de Marseille.
Je ferai d ’abord observer â m on contradicteur que les doyens
et directeurs ad ressent officiellement, chaque année, après la
session de n ovem bre des conseils académ iques, leurs rapports à
S. Exc. M. le M inistre ; ils peuvent bien om ettre quelquefois
de les envoyer aux rédacteurs des journaux de médecine.
Je reg rette fort cette omission de ma part. Mais q u ’importe,
après tout, que je l’aie commise ? Si, m êm e par ma faute,
M. G arnier ignorait le m o uv em ent de l’Ecole de médecine de
Marseille, en 1 8 6 3 , pouvait-il la signaler com m e n’étant point
en progrès, co m p arativem ent aux autres E co le s? Ne devait-il
pas s ’ab sten ir de toute appréciation, favorable,ou défavorable ?
Son silence eût certain em e n t beaucoup m ieux valu que l’én o n
ciation d ’un fait que j ’ai d ém o ntré totalem ent contraire à la vé
rité.
Je vous prie, M essieurs et très honorés Corilrè/es, d’avoir la
bonté d ’accueillir dans votre journal, avec ces brèves re m a r-
�— 70 —
-
ques, ma lettre au réd acteu r en c h e f de VUnion médicale de
Paris.
Veuillez bien recevoir m es re m e rc im e n ts et l'assurance de
m es sen tim en ts les plus d istin g u és.
E. C oste .
UNIVERSITÉ DE FRANCE. - ACADÉMIE D’AIX.
École Préparatoire de Médecine et de Pharmacie de Marseille.
M arseille, le 9 février 1866.
Le Directeur de lEcole a Monsieur le docteur Amédèe Latour,
rédacteur en chef de /'U n io n M édicale.
71 —
pour cela, q u ’a puiser à la source olïiciellc; il avait uniquement
à consulter les docum ents statistiques donnés par le gou vern e
ment.
Ce sont ces d o cu m en ts m êm e qui feront la base de m a récla
mation.
Je vous prie donc, pour l’édification du signataire de l’article
auquel je rép o n d s, de m e perm ettreçle vous indiquer les chiffres
suivants, que j ’e m p ru n te au com pte définitif des recettes des
établissements d ’enseignem ent su périeu r, publié par l’autorité
universitaire, et qui exprim ent le nom bre d ’inscriptions prises à
l'Ecole de m édecine de Marseille pend ant une période de dix
années, h partir de 1 856. L ’Ecole de Marseille figure seule pour
les quatre d ernières an nées, et, pour les six prem ières années,
elle est m ise en regard des Ecoles de Bordeaux et de L Ile.
\ïi
M onsieur et très uonoré C onfrère ,
J ’ai l’h o n n e u r de d em an d e r à votre loyauté la rectification
d une grosse e rre u r que je viens de lire d ans le num éro du 30
janvier d ern ier de l'U nio n Médicale.
Le feuilleton, sous la sig n atu re P. G a rn ie r, en parlant du
m ouvem ent scolaire d ans les Ecoles p ré p ara to ires de médecine,
en 1863, co ntien t ce passage :
« A Lille, à T oulouse co m m e à B ordeaux — impossible d’en
dire autant de Marseille — l’au g m entatio n des élèves est en rap
port avec celui des cours. Lille accuse 2 9 6 inscriptions et plus
de 100 élèves coïncidant, etc. »
Il résulte évidem m ent de cette citation que l’Ecole de Mar
seille est en dehors du m o uv em ent ascensionnel que présentent
les au tres Ecoles dans le n om b re de leurs élèves, et q u ’elle est
m êm e au dessous de celle de Lille.
Je ne sais où l’auteur de cette c h ro n iq u e est allé prendre ses
informations. Je puis vous dire qu'il a é té fort mal renseigné.
Son ap préciatio n, cd ce qui to u ch e l’E cole que j ’ai l’honneur de
diriger, est, de tous points, co ntraire a la vérité. Il lui était
pourtant bien facile d ’éviter de faire ainsi fausse route. Il n ’avait,
1836. — Marseille, 286 inscriptions. — Bordeaux, 267. — Lille, 280.
1857. — Marseille, 448
id.
— Bordeaux, 283. — Lille, 348.
—
—
—
—
—
1863. —
1864. —
1865. —
1858.
1859.
1860.
1861.
1862.
Marseille,
Marseille,
Marseille,
Marseille,
Marseille,
Marseille,
Marseille,
Marseille,
340
393
397
348
479
297
333
387
id.
id.
id.
id.
id.
id.
id.
id.
— Bordeaux,
— Bordeaux,
— Bordeaux,
— Bordeaux,
265.
301.
372.
332.
—
—
Lille,
Lille,
Lille,
Lille,
236.
190.
182
178
Le prem ier trim estre de IS 66 nous d onne, au I er février, 92
inscriptions.
Ce tableau affirme très nettem ent, par des preuves irrécu
sables, l’état de prospérité de l’Ecole médicale de Marseille, et
lui donne un ran g bien su périeu r à celui des écoles de Bor
deaux, Lille, C aen, N an tes, Lyon m êm e ; car, dans ces dix der
nières an nées, par le chiffre de ses recettes, c ’est-à-dire par le
nombre des inscriptions qu elle reçoit et par celui des candidats
qui viennent y postuler les grades, l’Ecole de Marseille se m a in
tient au d euxièm e rang parmi toutes les Ecoles p réparatoires;
K* *
»
•
*'■r
�—
72
—
elle est im m édiatem ent ap rès celle de T ou lou se, qui a toujours
eu la suprém atie.
Veuillez ex cuser, très h o n o ré co n frère, la longueur de ces
détails. V o tre collaborateur r e g re tte ra , je p en se , quand il les
c o n n aîtra, d ’avoir, aussi lég è re m e n t, ém is une assertion qui,
souverainem ent e rro n ée , p lacerait, aux yeux de vos lecteurs,
l’Ecole de m édecine de Marseille dans une situation d’infériorité
qui est bien loin, vous le voyez, d ’ê tre la sien n e , et que je ne
pouvais accepter pour elle.
Je com pte, M onsieur et très h o n o ré co n frère, su r votre bonté
pour la prochaine insertio n, dans votre jo u rn a l, de cette lettre
rectificative, d ont vous co m p ren d rez, j ’en suis sû r, toute l'im
portance.
Veuillez, je vous prie, ag réer l’assu ran ce de m es sentiments
les plus distingués.
E . C ostb.
F r a c t u r e s d i v e r s e s o b s e r v é e s à l ’H ô t e l - D i e u .
S ervice de
M. CnAPPLAix.
Fracture multiple de la clavicule. ( Observation recueillie par
M. T rastocb , interne du service.)
Ferrada F rançois, 7 4 ans, tailleur d ’habils, en tre à F HôtelDieu le 2 novem bre.
Il raconte que dans la soirée du 2 n o v em b re, après de copieu
ses libations, en voulant descendre l’escalier de sa maison, il
roula du prem ier étage à la porte d ’e n tré e et fut transporté im
m édiatem ent à l ’hôpital.
Cet hom m e présente un ab aissem en t de 1’épaul.e gauche et un
raccourcissem ent notable de l’espace co m p ris en tre le sternum
et le moignon de l’épaule. O n voit, sans l’aide du loucher, une
déformation de la région occupée p ar la clavicule. A la partie
centrale existe une saillie très aiguë que l’on sent constituée
par un fragm ent osseux soulevant la peau, alors que la portion
de la clavicule te n a n t à l’omoplate et celle qui, en dedans, lient
au stern um o nt conservé la position horizontale. Cette saillie os
seuse est pro du ite par l’extrém ité externe d ’un troisième frag
m ent placé e n tre les deux autres et com plètem ent séparé d’eux.
La position de ce fragm ent est presque verticale, un peu oblique
de haut en bas et de dehors en dedans, sa face supérieure est
devenue in tern e, la face inférieure est externe. Sa longueur est
de trois cen tim ètres environ La mobilité du fragm ent moyen
est com plète, m ais le déplacem ent se reproduit im m édiatem ent
et à peu p rè s dans la m êm e étendue. Le sujet ne porte pas de
traces de co m u sion s violentes au niveau de la fracture.
Les tentatives de réduction faites im m édiatem ent am ènent
l’abaissem ent du fragm ent moyen, mais il .n’est point possible
de le placer d ans une position absolum ent horizontale et encore
plus difficile de J’y m aintenir. Le bandage de Mayor est appliqué,
maintenu et renouvelé de m anière à rendre la difformité la
moins g rand e possible.
La fracture s ’est consolidée assez rapidem ent, malgré l’âge
avancé du malade; mais la guérison n ’a été obtenue qu avec une
déformation très notable, que l’on a cherché, inutilem ent, à
combattre.
Si les fractures de la clavicule sont inscrites parmi les plus
fréquentes que l’on observe dans les services hospitaliers, il est
quelques variétés de ces fractures qui sont exceptionnelles et
très rares. M algaigne cite dans son traité des fractures une o b
servation qui lui est p ro p re, qui a beaucoup de rapports avec
celle que nous veno ns de publier. Dans les deux cas, le dépla
cement n ’a pu être réduit ; seulem ent, d ’après l’observation de
notre regretté m aître, il était impossible de détruire le déplace
ment, M. G u ersan t qui vit le jeu ne malade ne put le réduire
davantage. Dans le fait qui nous est propre, on pouvait abaisser
l’extrémité supérieure du fragment et non le placer bout à
�bout avec les deux autres frag m en ts, m a is o n pouvait cependant
le déplacer, lui im p rim er des m o u v e m e n ts , tandis qu il parait
résu lter de la narration de M algaigne q u e tout m ouvem ent était
impossible.
Par quel m écanism e s ’est p ro du ite cette double fracture ? Il
eût été in téressan t de le savoir d ’u n e m anière positive. Mais
l'état dans lequel se trouvait n o tre h o m m e au m om ent de l’acci
dent ne lui a pas perm is d’analyser ses m o u v em e n ts. Malgaigne
ne dit pas co m m e n t s ’est produite la fracture multiple dont nous
venons de parler. L’analogie et le ra iso n n e m e n t peuvent seuls
nous diriger. D ’une part, il n ’y a pas de traces de contusions lo
calem ent, ce qui aurait dû e x iste r dans le cas de fracture directe.
A un au tre point de v ue, la position du frag m en t moyen n indi
que-t-il pas une action ind irecte. D ans le cas d ’une lésion directe,
le fragm ent moyen aurait dû se placer e n tre les deux fragments
et dans une position inférieure; d ans le cas actuel on dirait qu après une p rem ière fracture il y a eu co ntinu ation de l’action et
brisure du fragm ent moyen qui a été co m p rim é et courbé par
l’un ou l’au tre des fragm ents in tern e ou e x te rn e , de là la posi
tion verticale, car l’action a agi en d é te rm in a n t sur le fragment
un m o uv em ent en arc de cercle.
Fracture de lacromion. (Observation recueillie par
M. T rastoub , interne du service.)
Le nom m é Pukoski M athieu, âgé de 60 ans, ancien commer
çant, en tre à l’H ôtel-D ieu le 8 o ctob re 18G5. 11 est tombé hier,
à n euf heures du soir, su r le bord d ’un trottoir et a perdu con
naissance ; quand il a repris ses se n s, il s'est trouvé dans une
pharm acie où on lui pansait u n e petite plaie qu il portait à la tête.
T ranspo rté à l’hôpital, il se plaignit d ’une forte douleur à
l’épaule gauche. Les m o u v em e n ts du b ra s étaien t très doulou
reux; ils s’exécutaient avec u ne assez g ra n d e facilité et faisaient
percevoir, quand ils étaient portés un peu loin , une crépitation
sourde au niveau de l’articulation s c a p u lo -h u m é ra le .
Le lendem ain, à la visite, cet hom m e est exam iné par M.
Chapplain, l’épaule est gonflée, sans coloration anormale témoi
gnant de l’existence d ’une confusion ; les m ouvem ents volon
taires sont difficiles, ceux qui sont com m uniqués sont doulou
reux. Le m o in d re m ouvem ent com m uniqué au bras fait perce
voir de la crépitation, mais il est assez difficile de reconnaître le
lieu m ê m e où siège la crépitation. Chacune des parties consti
tuant le sq uelette de l’épaule est exam inée, et enfin, par une
main placée sur l’extrém ité de Lacromion et l’autre sur l’épine
de l’om oplate, toutes les autres parties étant d em eurées au re
pos, on trouve que le siège de la fracture est Lacromion, au ni
veau de l ’articulation claviculaire. Les déplacem ents ne sont pas
appréciables.
Le bras du malade est placé dans l’immobilité et maintenu
par un bandage de Mayor. A ucun accident u ’est venu entraver
la marche de la consolidation. La petite plaie de la tête est éga
lement g uérie, et le sujet peut sortir parfaitem ent guéri le 8 no
vembre, q uaran te jo u rs environ après son accident.
Quel a été le m ode de fiaclure ? Par quel m écanism e cette
lésion s est-elle produite ? Il y a lieu de croire que celte frac
ture a été produite par une cause agissant su r le moignon de
l’épaule ; m ais le peu de renseignem ents fournis par le malade,
l’absence de lésion physique appréciable tém oignant d ’une chute
sur le m oignon de l’épaule, ne nous laissent que des doutes à
ce sujet.
La circonstance la plus rem arquable est l’absence de dépla
cem ent, tout au moins d ’un déplacement notable, le gonflement
étant peu im p ortan t et n ’ayant pu nous cacher soit un défaut im
portant du niveau, soit un écartem ent entre les deux fragments.
Fracture de l'os iliaque (Observation recueillie par M. T ra Stour )
Michelon, M a riu s,à g é de tren te-sept ans, marin, a fait, dans
Ja journée du \ sep tem b re, une chute de dix m ètres de hauteur.
Il entre le lendem ain à l’Hôtel-Dicu, portant une énorm e ecchy
�—
76
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mose et un développem ent considérable de la hanche et de l’aine
droite. C ette région est d o u lo u re u se , soit par le toucher, soit
par le m o ind re m o u v em e n t du m alade.
P endant les prem iers jou rs, on applique des compresses et
des cataplasm es résolutifs, et lorsque la résorption commence à
avoir lieu, M. Chapplain reconnaît une fracture de la crête ilia
q ue dans sa partie an térieure. Le fra g m e n t détaché a une lon
g ueu r de huit cen tim ètres d ’avant en arriè re et de quatre centi
m ètres de h au t en bas ; il occupe l’épine iliaque antérieure et su
périeure. Le fragm ent a glissé de h aut en bas et de dehors en
dedan s, de m anière que le reb o rd iliaque s ’est abaissé et est
porté en dehors ; la face in te rn e du frag m en t est devenue su
p érieu re, par co n sé q u en t le plan s u p é rie u r du fragm ent est de
v enu h peu près parallèle au plan de la fosse iliaque. Le frag
m ent jo u it d’une certain e mobilité.
La fracture est d em eu rée telle q u e l’action physique ou la
contraction m usculaire l'avaient placée, sans q u ’elle ait pu être
m aintenue dans une au tre position.
Q uelques phén om ènes d ’inllam m ation de la hanche se sont
•manifestés, la résolution a été o b te n u e . Le repos a suffi pour
am ener la consolidation. Le m alade est sorti le 18 octobre, sans
q u ’il se ressente en au cun e façon de sa fracture, sans que la dé
viation du fragm ent ait en traîn é aucun in c on vén ient.
{La.suite au prochain numéro.) ,
P r o g r è s r é c e n t s e t t e n d a n c e s n o u v e l l e s d e la
P a th o lo g ie C a rd ia q u e .
Suite et fin.
Les altérations des orifices et les d ésord res des parois ont,
dans les maladies du cœ u r, des rap p o rts intim es et une in
fluence réciproque ; si les obstacles valvulaires déterminent ou
occasionnent souvent la dilatation et l’hypertrophie, nous v e
nons de voir q u ’à son tour l’agrandissem ent des cavités peut
produire l’insuflisance relative des valvules.
A ujourd'hui, on se conforme assez bien à ce grand précepte
de Stokes que, d ans les maladies du cœ ur il faut tenir compte
avant tout de l’état dynam ique du muscle c a rd ia q u e ; on r e
cueille, com m e lui, des cas de lésions des orifices qui passent
longtemps inaperçues, parce que l’énergie m usculaire du cœur
neutralise leurs effets ; mais on oublie un peu trop que, dans
son adm irable étu de de l’asystolie, Beau a soutenu précisément
les m êm es idées.
Le savant clinicien de Dublin a aussi étudié avec beaucoup
de soin u ne affection du muscle cardiaque qui, bien q u ’exam i
née au point de vue anatom ique par Laënnec et Cruveilhier,
avait été un peu négligée, au point de vue clinique, par l’école
française ; je veux parler de la dégénérescence graisseuse.
Cette affection se manifeste surtout dans le cours du rhu m a
tisme, de la goutte et des maladies chroniques en général ; Gallavardin l’a ren co n trée aussi à la suite de l ’intoxication par le
phosphore. Elle est caractérisée par la faiblesse de l’impulsion
cardiaque, la len te u r, la faiblesse et l’irrégularité du p ouls, la
gêne de la circulation pulm onaire , qui tantôt ne se trahit que
par l’irrégularité dans les m ouvem ents de la respiration et tantôt
se manifeste par des accès d ’orthopnée , le gonflement du foie,
l’œdème, des sym ptôm es apoplectiformes de courte durée, mais
qui se rép èten t souvent. Virchow et G. Sée l’accusent de p ro
duire la g an g rèn e des e x tr é m ité s , par le ralentissem ent de la
circulation. Ce qui est mieux dém ontré, c ’est q u ’elle peut e n
traîner la m o rt subite par la rup ture du c œ u r , dont elle est la
cause la plus co m m u n e ; elle peut la d éterm in e r aussi par syn
cope , chez les convalescents qui rep ren n en t brusquem ent la
position verticale.
Niem eyer vante beaucoup, pour la com battre, les eaux de
Carlsbad et de M arienbad ; Stokes insiste surtout su r l’exercice
�m usculaire, la n o u rritu re a n i m a l e , le vin et les toniques. Les
accidents apoplectiform es qu elle d é te rm in e réclament les sti
m u lants diffusibles ; on a pu les faire d isparaitre en plaçant la
tète d ans une position déclive, ce q u i p orte Stokes à les ranger
sous la d épendance d 'u n e a n ém ie céréb rale résultant elle-même
d’un défaut d ’im pulsion du cœ u r.
Indépendam m ent de cetie d ég én éressen ce graisseuse à mar
che ch ron iqu e, il en est une h m a rch e a ig u ë , qui se développe
dans le cours du typhus et que S to k es a ég alem ent étudiée. La
débilitation du cœ u r s ’v m anifeste souvent par la suppression
d u p rem ier bruit ; le traitem ent par les stim ulants, par les alcoo
liques su rto u t, y rend de très g ra n d s services. Au moment ou
les travaux de Z en ker v ie n n en t de fixer l'attention sur les lé
sions m u scu laires dans la fièvre typhoïde, il importerait de sou
m ettre à de n ouvelles rech erch es l’anatom ie pathologique du
muscle cardiaque dans celte maladie.
Enfin, ce m uscle peut ralentir d ’u n e m anière progressive ses
b attem ents. Dans ces derniers m ois, L afon t-G ou zy et Jauzion
ont publié chacun un cas où, le m alade ne se plaignant pas d au
tres sym ptôm es que d ’une g ra n d e faiblesse, son poulsétait tombé
progressivem ent à 4 0 , 1 8 , 8 , 2 p ulsations, ju s q u ’au moment où
il s’arrêta p o u r toujours.
E n résu m é, la pathologie du m uscle cardiaque a été, dans ces
derniers t e m p s , l’objet de q uelq ues travaux qui appellent de
nouvelles études, mais d ’où résu lte déjà u n e conséquence théra
peutique im portante, la nécessité de la m édication tonique dans
certains cas. C’est une voie en co re peu explorée qui s’ouvre
aux recherches de n otre je u n e g én éra tio n m édicale, avide de
progrès et désireuse su rto u t d ’u ne science d irectem en t utile ù
la pratique.
U n e au tre q uestio n, ré c e m m e n t approfondie par les patholo
gistes, est celle des rap p o rts des affections cardiaques avec les
désordres des autres organes.
E n tre le cœ ur et les divers viscères, il y a un échange d’in-
lluences m orbides où le cœ u r, en général, donne plus qu’il ne
reçoit. On savait que le rein doit quelquefois au cœ ur les lésions
de la maladie de B right ; mais, ce qu ’on ignorait encore, c’est
qu’une altération du rein peut, en gênant la circulation artérielle,
être cause d ’hypertrophie cardiaque ; c’est cependant ce que
Traube a voulu tout d ernièrem en t d ém o ntrer ; Virchow et Roth
ont apporté quelques faits à l’appui de cette opinion ; mais à ce
sujet, B am berger a ém is des doutes motivés sur ce que l’h yp er
trophie cardiaque se m o ntre dès le début de l’alfeclion rénale et
qu’elle intéresse non pas seulem ent le ventricule gauche, mais
le cœ ur tout entier.
Exception faite pour les palpitations et une suractivité passa
gère, ou au co ntraire un ralentissem ent notable que les affec
tions com ateuses im p rim en t quelquefois à la circulation, le cer
veau n ’a pas, ju s q u ’ici, d ’action d ém ontrée dans le développe
ment des maladies du cœ ur. Par contre, lorsque ces maladies
existent, elles ex ercen t une influence souvent pernicieuse sur les
organes en céphaliques. Sans doute celte influence était depuis
longtemps co n n u e, Albertini l’avait le prem ier signalée, R a mazzini et Malpighi avaient succom bé à une apoplexie survenue
dans le cours d ’une affection cardiaque ; Corvisart avait insisté
sur cet accident de l’anévrysm é et Bouillaud sur cette consé
quence possible de l'hypertrophie ; mais jam ais les faits de cet
ordre n ’avaient été mieux élucidés q u ’à notre époque.
On a distingué, en effet, parmi ces apoplexies, celles qui sont
dues à une an ém ie artérielle, com m e Stokes l’avait reconnu
pour celles qui su rv ien n en t dans le cours de la dégénérescence
graisseuse du c œ u r ; celles qui appartiennent à une oblitération
artérielle, sur lesquelles ont paru les excellents travaux de
Fritz et de L ancereaux , où l’embolie joue le principal rôle et où
l’affection cardiaque n ’est ni une cause nécessaire ni une coïn
cidence c o nstante ; enfin, parmi les apoplexies par hém orrhagie,
on a distingué de celles qui sont dues aux troubles de la circu
lation encéphalique, celles, beaucoup plus nom breuses, qui pro-
�w ennent d ’u n e altération vasculaire développée sous la même
influence g énérale qui a produit la maladie du cœ ur ; c’est celte
dernière opinion que so u te n a ie n t en co re récem m ent Vallin à
Paris et Chatard à B ordeaux. L ’ap hém ie peut accompagner l'cm iplegie ; elle peut aussi se m o n tr e r seule, et si la maladie du
cœ ur la produit parfois in d ir e c te m e n t, la cause directe la plus
ordinaire en est, d ’après l’opinion d e K irkes et de Huglhings
Jackson, l’oblitération de l’a rtè re cérébrale moyenne.
N ous avons vu quel rôle c e rtain es affections pulmonaires,
l’em physèm e en particulier, p eu v en t jo u e r d a n s la pathogénie de
quelques affections cardiaques. M ais, b ien plus souvent, c’est le
cœ u r qui ex erce une action p ern icieu se su r le poum on. Bien de
plus fréquent que de voir u n e affection pulm onaire survenir
dans le cours des maladies du cœ u r ; c ’est le plus souvent l'in
farctus qui se produit ; il a été l'ob jet, il y a cinq ou six ans,
de q uelques recherches et de q uelq ues discussions. Bochdalek
l'attribuait su rto u t à l’inflam m ation et D illrich à l’altération
graisseuse des parois vasculaires. Enfin H eschl, étudiant à fond
cette lésion, y a reco nn u deux altérations successives; la pre
m ière est une ind uratio n, u ne carnification du parenchyme, due
a la présence d ’une m atière am o rp h e de nouvelle formation con
ten ant des g ranu latio ns d ’h ém ato ïd in e ; la seconde, entée sur
la p rem ière, est une p n eu m o n ie spéciale te n d a n t non pas à la
su p p u ratio n , mais à l’h é m o rrh ag ie et à la g an g rèn e . C’est la
doctrine qui réunit au jo u rd ’hui le plus de partisans.
E n 1 8 6 5 , G erhardt étu diait u n e a u tre action, beaucoup plus
ra re , mais non moins p ernicieu se, du c œ u r sur le poumon; il
s ’agissait des throm boses du c œ u r droit qui, d ’après cet auteur,
p roduiraient aussi des noyaux d ’infarctus, au lieu de détermi
ner sim p lem ent l’œ d èm e p ulm o naire ou des noyaux de pneumo
nie. Ces infarctus, en tout cas, n e p o u rra ie n t être identiques à
ceux dont nous venons de parler ; il y a d on c là une étude ana
tom ique à poursuivre. L o rsq u ’ils o nt le volum e d’un œuf de pi
geon, G erh ard t prétend les reco n n aître aux sigues suivants : ac
cès de dyspnée au d éb u t, puis dyspnée m oins violente mais plus
continue ; au bout de quelques jours, m atité, râles bullaires puis
sonores, et respiration bronchique.
C’est là un point spécial de cette grande histoire des embolies
qui, com m encée par l’école française, a été si avancée par l’école
de Berlin. N ous ne ferons que la m entionner ici, parce q u e lle
appartient plus à la pathologie vasculaire q u ’à la pathologie car
diaque. E n effet, co m m e l’enseigne Virchow, les embolies qui
partent du cœ u r, produits de formation ou résultats de la destruc
tion de la séreuse, so nt en général petites , elles déterm inent,
dans les divers org an es, des obstructions qui ne sont le plus
souvent que capillaires. C ependant une embolie de l’oreillette
droite, arrêtée aux orifices ca rd ia q u e s, a pu déterm iner la mort
subite ; m a is , plus s o u v e n t, le caillot m igrateur est venu de
plus loin, il a été lancé par un tronc veineux.
Les artères n ’ont pas le pouvoir d’arrêter ainsi, par des em
bolies, la circulation dans le cœ u r ; peuvent-elles y porter d ’au
tres entraves ? D ’après la théorie que xMauriac a soutenue en
1860, la congestion du cœ ur provenant d ’un reflux sanguin dans
les coronaires serait la cause d e s m orts subites dans l’insufïisance aortique. Cette opinion ne s ’accorde pas avec les ex pé
riences publiées en 186 5 par Panum , de Kiel, qui a vu les bat
tements du cœ u r persister plusieurs heures après 1oblitération
des coronaires.
Souvent le cœ u r et les artères sont altérés à la fois parce
qu’ils subissent à la fois l'influence d ’une action morbide g én é
rale, suivant l’opinion soutenue par Cazalis, Sénac le jeune,
Trousseau, M auriac, P idoux, Vallin, et qui devient assez r é
pandue. Mais, ce qui est plus problém atique, c’est l’action des
diverses diathèses su r les maladies du cœ ur. P o u r l’arthritîs, le
fait c«t incontestable ; q uan t à 1herpétism e, les cas tels que ce
lui dont parle B ezançon, où l ’on a vu l’apparition d ’un pityriasis
capitis enrayer à plusieurs reprises la m arche progressive d ’une
affection cardiaque, m e paraissent se rapporter non pas à des
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-
éruptions d artreuses mais à des arlh ritid e s. Pas plus q u e l’aclion
de l'h erpétism e, celle de la syphilis n ’est bien dém ontrée.
T an dis q u e le nosologism e s’av en tu re un peu dans cette
question de l’inllnence des diathèses su r les affections cardia
ques, le physiologism e, m ieu x inspiré pour celte lois, cherchek
réso ud re un problèm e clinique des p lu s im p ortan ts et où l’action
du cœ u r tient la principale place, celui de la tension vasculaire.
C’est lb une étude ré ce n te, qui a toute la valeur d ’une véri
table découverte et qui doit re n d re d es services immenses à la
' thérapeutique com m e b la pathologie. M arey, à l ’aide des ins
tru m en ts de précision, est parvenu a m e su re r la tension vascu
laire. Beaucoup d ’indications th é rap eu tiq u es que les anciens
avaient basées sur l’étal du pouls so n t e rro n é e s, parce qu’elles
sont déduites d ’ap préciations fautives. La vitesse et l’ampleur
du pouls ne d é n o ten t nullem ent une forte tension, qui se révèle
au contraire par un pouls lent et c o n c e n tré . C’est une séméio
logie nouvelle, établie sur u ne base solide, et sur laquelle on
peut établir de nouvelles indications th é rapeu tiqu es.
C’est ce que F erran d a co m m e n c é à taire, il y a quelques
mois b peine.
Q uand la tension est forte, il re c o m m a n d e de diminuer la ré
sistance au c o u rsd u sang par le relâch em ent capillaire (frictions,
m assage, lotions chaudes, déjà p récon isées par Morgagni) ; il
dim inue la q uan tité de liquide par les hyd rago gu es, purgatifs ou
diurétiques ; il conseille la saig n é e, qui doit être modérée pour
ne pas produire l’a n ém ie, m ais q u ’il faut employer en se rappe
lant que le sang qui stag ne n ’est pas utilisé et ne devient qu’une
cause d ’encom brem ent.
Quand la tension est faible, il préconise le traitem ent tonique
et la digitale, que Beau avait déjà n o m m é e , avec grande raison,
le q uin q u in a du cœ ur, c o n trairem en t b l’opinion erronée qui en
fait un d ébilitant parce q u ’elle est un sédatif cl q u ’elle calme en
fortifiant.
Ces rem èd es n ’ont rien de bien nouveau en eux-mêmes, mais
—
83
—
d'empiriques ils deviennent rationnels et ont l’avantage que leu r
emploi est log iqu em en t déduit de données certaines. L’étude de
la tension vasculaire doit jeter aussi un nouveau jo u r sur la m é
dication an iim onio-arsenicale, récem m ent préconisée par Papilla u d ,d a n s le but principal de soutenir la tonicité du muscle
cardiaque.
Nous term in on s ici celte courte et incomplète revue. Puisset-elle, en signalant des su jets d ’étu des,stim u ler le zèle de q u el
que ch erch eur intrépide auquel nous souhaiterions d ’être h eu
reux !
Dr A. F abre.
De la m édication arsénio-antim oniale et de son emploi
contre le s m aladies du cœur et quelques autres affections,
par le docteur Lucien PAPILLAUD.
Une opinion trop accréditée dans l ’esprit des médecins m o
dernes, consiste b considérer com m e incurables les maladies
dites organiques du cœ u r. Il y a des réserves b faire contre
ce jugem ent absolu, et quelques distinctions b établir entre les
affections q u ’il co m p rend .
Il n ’est que trop vrai, certaines lésions, soit des valvules, soit
des orifices du c œ u r, sont irrém édiables toutes les fois q u ’elles
ont déterm iné un ch a n g e m e n t définitif de texture ou de form e;
mais rien ne prouve que l’altération, qui a été l’origine de celte
lésion, n’ait eu sa période de curabilité au début.
M alheureusem ent, la m édecine n ’est appelée b intervenir que
longtemps après le d é b u t et, le plus souvent, lorsque les lésions
sont devenues définitives et indélébiles. Mais que de sujets avec
de pareilles lésions vivent non seulem ent d ’une existence très
supportable, mais qui a, m êm e b leurs yeux, les apparences de
la santé. Il nous arrive très souvent b nous tous, médecins pra- '
ticiens, de re n c o n tre r, chez des malades qui réclam ent nos soins
pour d ’autres causes, des signes très prononcés de rétrécisse-
�— 85 —
m ent des orifices, d ’insuffisance des valvules, et de dilaiation
des cavités cardiaques, lésions q u i, b part un certain degré de
g ên e et d ’incom m odité, p e rm e tte n t h peu près tous les actes de
la vie individuelle et sociale, et ne so nt pas m êm e soupçonnées
par ceux qui les p o rte n t. T a n t que la vitalité du cœur est in
tacte, cet organe trouve la force n écessaire pour surmonter un
obstacle ou p ou r suppléer à un défaut qui se trouve exister
dans le jeu des parties qui le c o m p o se n t ; la circulation se fait
q uo iq u ’avec de légères im p erfectio n s, la vie du sujet n’est pas
m enacée et l’affection est réd uite au rôle d'infirmité. Mais dès
q u ’il y a abaissem ent des forces vitales du c œ u r, le danger com
m ence avec l'affaiblissement des fibres m usculaires de cet orga
ne, avec la dim inution de |sa contractibilité et avec la dilatation
passive qui en est la c o n sé q u en c e. D ans le plus grand nombre
des cas, ce ne sera donc pas c o n tre des ossifications valvulaires
ou artérielles, co ntre des tran sform atio ns du tissu des orifices,
qu'il aura un traitem ent b diriger. Ces lésions, une fois établies
définitivem ent, devront être acceptées co m m e des infirmités ir
révocables, mais le rôle de la th é ra p e u tiq u e consistera, selon les
diverses indications, b e n tre te n ir, a s o u te n ir, a stimuler et à ré
gulariser la vitalité du c œ u r. L e p ro fesseur Stockes dit avec rai
son q u ’il n ’est pas une seule lésion valvulaire simple qui n’ait
été ren con trée sans que son ex istence e û t été indiquée antérieu
rem ent par des troubles circu latoires, tandis que les désordres
fonctionnels de la plus g ra n d e a p p a re n c e peuv ent exister sans
que les valvules ou les orifices soient le siège d ’aucune lésion.
Ce fait si simple et si vrai doit d o n n er b eaucoup a réfléchir.
U ne au tre opinion, non m oins accréditée parmi nous, admet
que presque toutes les affections o rganiques du cœur pro
cèdent de l’inflammation ; on adm et b ie n , p our la grande majo
rité de ces maladies, l’o rigine rh u m a tism a le , mais le rôle du rhu
m atism e lui-m êm e n ’est co m p ris q u e com m e une cause qui
agit par l'interm édiaire des phleg m asics. C ep en d an t, si l’on veut
bien se rappeler que l’alb u m in u rie s ’accom pag ne à peu près in-
variablement d ’u ne hypertrophie du cœ ur gauche, que la sper
m atorrhée occasionne les troubles les plus violents dans les m ou
vements du c œ u r, q u e l’abus du tabac b fum er est une des causes
de la d égénérescence graisseuse de cet organe, que l’appauvris
sem ent du sang a p ou r sym ptôm es des troubles de la circula
tion centrale, et la dilatation des cavités cardiaques; q u ’un grand
nombre de sujets, atteints d ’affections du cœ ur, reconnaissent
pour cause de leur maladie des ém otions m o rales; q u ’il existe
le plus so uv ent une relation entre certaines névroses et particu
lièrement la chorée et les lésions valvulaires du cœ ur ; que les
fistules biliaires d é term in e n t, au bout d ’un certain tem ps, des
ossifications des grosses artères et des cavités cardiaques ; et
qu’enfin l’h ypertrophie du cœ u r est une des maladies finales des
aliénés, on conviendra q u ’il existe pour les lésions du centre cir
culatoire un n om b re considérable d ’origines non phlegmasiques.
La suite au prochain numéro.
■*,
C h ro n iq u e M e n su e lle .
En raison de la triste prérogative q u ’a eue Marseille d'ouvrir
les portes de la F ran c e au choléra de 1865; eu égard au vœu,
d’ailleurs si ju ste , exprim é dans Y Union médicale du 28 novem
bre d ernier, en raison m êm e des m atières qui doivent se traiter
cette an née a S trasb o u rg , nous aurions cru q u ’il dous fût permis
d’agiter, en séance solennelle, ces questions posées par la fata
lité elle-m êm e. N o tre corps médical eût été sensible b l’h on neu r
d’organiser le co ng rès de 1866. Mais pareille faveur ne lui était
pas réservée. Il parait q u ’elle ne doit pas d escen dre le cours du
Rhône ! S e ra it-c e pour insinuer que l’esprit des congrès ne
coule pasde source ? T oujours est-il que, sur les bords du Rhin,
a retenti le sursum corda ! Q ue le corps médical de S trasbourg
nese formalise pas de ces paroles; personne mieux que nous ne
reconnaît sa h aute capacité, et personne mieux que M. Eissen
•U '
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!
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86
—
n ’eût pu d éfendre la cause qui n ou s est si sympathique et sur
laquelle MM. Piroudi et F a b re , d a n s un travail consciencieux,
•s’étaient déjà expliqués c a té g o riq u e m e n t. N o us voulons parler
de l’im portation et de la co n tag io n . M. Eisscn ne bégaie ni ne
m âche ses idées ; il proclam e h a u te m e n t la transmissibilité du
choléra, en rappelle les preuves év id en tes pour l’épidémie der
nière, et attaq ue de front l’école non conlagioniste. Il termine
son article par le p ro g ra m m e des q u estio n s du congrès et fait
appel à toutes les sociétés m édicales de F ran c e. Nous osons espé
rer que celle de Marseille ne sera pas en retard et q u ’elle complé
tera, en peu de tem p s, ainsi q u ’elle se l’était proposé, le rapport
si exact et si précis de M. B o uisso n, su r le début de l’épidémie.
Puisque nous p arlons de ch o léra, d is o n s-le ic i en famille : le
mois de février a co m p té un décès ch olériq ue a IHôtcl-D icu et
quelques graves cholérines o n t ap paru de ci d elà. Mais ne regar
dons pas la situation au m icro sco p e , et p our rassurer nos con
frères, disons tout de su ite q u e la co nstitutio n médicale a été
g énéra le m en t bonne. En effet, les tu b ercu leu x qui, dans celte
saison, s ’im posent aux h ô p itau x , o c cu p en t la m ajeure partie des
breux, ni si éprouvés que l’an d e rn ie r, san s d o u te à cause de la
douce tem p ératu re de l’h iver. C ’est à peine si l’humidité de ces
d erniers jou rs a réveillé q u elq u es c a th a rre s. Les fièvres conti
nues avaient, le mois passé, le cara c tè re catharral et les fièvres
interm itten tes n ’ont [pas été ra re s, si nou s consultons les regis
tres des hôpitaux. Q u ant à la m o rtalité , à l’H ôtel-D ieu, le chiffre
passé, celui de février un tiers plus faible q u ’en 1865 sur une
la Conception sont tou t aussi satisfaisants. La situation sanitaire
de février est donc très ra ss u ra n te .
La polém ique de la g én éra tio n sp o n ta n é e n ’est pas terminée;
si nous jeton s les yeux su r les c o m p te s - r e n d u s de l’Académie
nier en veut à M. P a s te u r; la commission, espérons-le, videra
la querelle des deux savants cham pions, à la satisfaction de l’un
et de l’a u tre.
Une note de M. Lefort sur la présence de l ’urée dans le lait
des h erbivores; — une com m unication de M. Payen sur la dé
composition de l’iodure de potassium à l’air libre par de faibles
doses acides (0*005), décom position qui n ’a pas lieu à l’abri du
contact de l’air ; — . une note de M. de S eré sur un couteau galvano-caustique, dont le besoin ne se faisait nullem ent se n tir ;
— une note de M. T rip ier sur le traitem ent de la coqueluche
par l’alcool, tel est le bagage m ensuel de l’Institut. Cette d er
nière note su rto u t qui vient, com m e le digestif au dessert, clore
les séances de février, ne nous semblait cependant pas im pé
rieusement réclam ée par l ’im portance des travaux de l’illustre
académie. P uisq ue l’usage de l’alcool en thérapeutique touche à
l’abus, de là à l’ivresse chloroform ique, la transition est facile.
Le chloroforme est le m eilleur agent anesthésique; tel est le
titre d’une note de M. Sédillot. Suivant lui, suivant M. Velpeau,
îl n’a pas de rival, il va bien au -d essu s de l’éther ; et pour s u r
prendre plus vite le malade, et pour am ener une anasthésie plus
complète, et pour éviter un réveil lent et loquace, etc. Sans
doute, nous so m m es de cet avis; mais ce qui est vrai à Paris peut
ne pas l’être en province. Dans les hôpitaux de la capitale, nous
avons vu m aintes fois endorm ir des m alades par le chloroforme.
Quelques g ou ttes su r une com presse et le sujet tombait. La ré
solution arrivait p ro m p tem en t, l’excitation était de très courte
durée. Ce résu ltat, observé tant de fois, com paré à celui que
nous obtenions dans nos hôpitaux et plus encore en ville, ne
laissa pas que de nous su rpren dre. La période d ’excitation
avec le chloroform e que nous em ployons ici se prolonge très
longtemps, la q u an tité de liquide que l’on est forcé de consom
mer dépasse celle q ue m arqu e la prudence et quelquefois m êm e
on a été co n train t de ren on cer à endorm ir un malade. Nul
doute que ces difficultés ne tie n n e n tà l’im pureté du produit que
•.
i
J
�nous livrent les pharm acien s. N o u s ne voulons pas les accuser
d ’être de mauvaise foi d ans la v ente de celte substauce mélan
gée trop souvent h de l’alcool ou de l’é th e r, mais nous voudrions
attirer leur attention su r l ’im p o rta n c e de la pureté du chlorotorm e. Dans cet é tat, son ad m in istratio n ne présente aucun
d ang er en tre les m ains d ’un p raticien.
Rien de bien in tére ssan t d an s les séances de l’Académie de
m édecine ! L e p a n se m e n t des plaies par occlusion met de nou
veau M. V elpeau en co ntrad iction avec M. G u érin. Disons tout
de suite que cette m é th o d e, vieille de d eux siècles, n’a pas tenu
tout ce q u ’en atten dait son nouvel in n o v ateu r au jour de l’exhum ation. L ’év èn e m en t capital de ra s s e m b lé e de la rue des SaintsP ères a été la n om ination de M . B éh ier. Ce professeur, pour
être le m oins an cien , n ’est pas le m o ins aim é, et sa sollicitude
pour les élèves m érite bien la pop ularité dont il jouit.
Si les illustres académ iciens se r e p o s e n t quelquefois sur leurs
lauriers, v aillam m ent co nq uis, il est vrai, les m em bres de la
Société de ch iru rg ie , p halan ge de travailleurs infatigables,
ch erch eurs é ru d its, de p ratic ie n s habiles, lancent chaque se
m aine dans l’a rèn e de n ou veau x su jets de discussion. Le mois
passé il s'agissait des polypes n aso-p haryn gien s. Nous n’avons
pas la place de parler de c ette q u e stio n , que nous réservons
pour un prochain n u m é ro .
A. Q.
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
Un concours public p o u r u n e place de chirurgien adjoint des
hôpitaux s’ouvrira a l’H ôtel-D ieu d e M arseille le 10 juillet pro
chain.
— N ous avons le plaisir d ’offrir à nos lecteurs un supplément
de huit pages.
Le Comité de Rédaction.
Marseille— Typ. ARNAUD, Ca y e R et ComP., rue St-Eerréol, 57.
Quelques considérations pouvant servir à l ’étude des
m aladies de la protubérance annulaire.
Parmi les divers organes qui constituent le système nerveux
central, il n ’en est point qui paraisse,au premier abord, plus im
portant que la protubérance annulaire. Placée au centre m ême
de la masse encéphalique et nom m ée pour cette raison, par
Chaussier, mésocéphale, la protubérance sert d ’intermédiaire
entre les trois grandes sections de l’axe cérébro-spinal. Elle
tient, en arrière, à la moelle par le bulbe rachidien ; en avant,
elle s’épanouit dans les lobes cérébraux ; sur les côtés, elle est
unie au cervelet de la m anière la plus intime.
Varole avait com paré la protubérance à un pont sous lequel
passait le courant nerveux renferm é dans la moelle et le bulbe
rachidien. Le nom de pont de Varole est resté il la protubérance
aunulaire et les travaux des anatomistes anciens et modernes
ont dém o ntré que cette expression si pittoresque était en même
temps profondém ent juste.
En effet, quelque intimes que paraissent être extérieurem ent
les points de contact du mésocéphale avec le cerveau , le cerve
let et la m oelle épinière, ces diverses parties sont unies entre
elles d ’une m anière encore plus profonde. Le pont de Varole
est un véritable pont soutenu par les pédoncules cérébelleux
moyens, piliers solides qui s’enfoncent dans l'épaisseur des lo
bes du cervelet ; sous cette arche nerveuse le bulbe rachidien
passe en réalité, pénétrant dans la protubérance et la traversant
pour aller se p erdre, par l’interm édiaire des pédoncules céré
braux , ju sq u e dans la profondeur des hém isphères de l’e n c é
phale.
La protubérance annulaire doit donc a v o i r , au point de vue
physiologique, u n e im portance capitale et consécutivem ent les
�— 90 —
lésions qui alteign en t ce co n tre n erv eu x ne peuvent que pro
duire dans toute l’éco no m ie de profonds désordres*
L e mésocéphale ayant u n e co n te x tu re anatomique des plus
compliquées, nou s croyons indispensable de rappeler d’abord ,
en quelques m o ts , la disposition g énérale des éléments divers
qui le co n stitu e n t; nous verrons en suite si les conséquences
que nous au ron s pu tirer de cet ex am en sont en rapport avec les
expériences de la physiologie m o d e rn e ; nous terminerons en
passant en rev ue quelques faits pathologiques et en examinant
si l’observation clinique fournit des d on nées conformes aux ré
sultats o b ten u s dans l’a m p h ith éâtre et le laboratoire.
La protubérance annulaire est co nstituée par six couches de
fibres disposées par rangées alternativem ent transversales et
longitudinales. La p rem ière co uch e, celle qui est en rapport
avec la gouttière basilaire, est c o m p o s e de fibres transversales
qui se rendent dans les pédoncules cérébelleux moyens.
Dans la seconde couche on ne voit que des fibres longitudina
les ; elles sont la continuation des pyramides du bulbe, passent
entre la p rem ière et la troisièm e couche de la protubérance,
sortent du mésocéphale p our form er la partie la plus superfi
cielle des pédoncules céré b rau x , trav ersen t les couches optiques
et les corps striés, puis vont se p erd re dans les hémisphères en
céphaliques.
Les fibres de la troisièm e couche, co m m e celles de la pre
mière, sont transversales et se réu nissent aux pédoncules céré
belleux moyens.
La quatrièm e couche est co nstituée par des fibres longitudi
nales qui sont la continuation du faisceau innominc du bulbe.
Ce faisceau traverse profondém ent la p rotubérance et se trifurque : la prem ière division se porte en dehors dans le pédoncule
cérébelleux moyen ; la d eu x ièm e form e le faisceau triangulaire
de l’isthme qui se réunit avec celui du côté opposé en passamt
sous les tubercules quad riju m eaux ; la troisièm e, de beaucoup
—
91
—
la plus im portante pour le sujet qui nous occupe , sort en avant
de la protubérance pour former la partie m oyenne des pédoncu
les cérébraux.
En arrière de la quatrièm e couche on voit une nouvelle ran
gée de fibres transversales, et, enfin, plus profondément, une
dernière couche de fibres longitudinales appartenant aux corps
restiformes et se rendant dans la partie la plus postérieure des
pédoncules cérébraux.
R appelons, pour m é m o ire , q u e , d’après MM. Longet et
üirschfcld, les pyram ides et les faisceaux innom m és du bulbe
sont la continuation des cordons an téro-latéraux de la moelle ,
et les corps restiform es celle des cordons postérieurs.
La protubérance est donc un lieu de passage que traversent
les divers élém ents (m oteurs et sensitifs) de la moelle épinière
en se rendant d ans les masses cérébrale et cérébelleuse.
N’oublions pas de m entionner un fait im portant, c’est que le
pont de Varole n ’est pas formé exclusivement de substance
blanche ; la substance grise y est représentée par un amas irré
gulier disposé au cen tre du mésocéphale.
D’après ce qui précède il est facile de voir que la protubé
rance est un organe des plus nécessaires ; cette importance du
mésocéphale au gm ente encore si l’on considère que le moteur
oculaire commun, le trijumeau, le moteur oculaire externe et
(d’après M. Cruveilhier) le facial, tous cordons nerveux de pre
mier ordre, proviennent de la protubérance ou des parties aux
quelles cette dernière donne directem ent naissance.
Prenant pour point de départ les données anatomiques que
nous venons d 'ex po ser, nous pouvons assez facilement nous re
présenter les désordres qui surviendraient dans tout le système
organique s i , chez un individu , la protubérance annulaire était
complètement détruite.
Par le fait de l ’interruption du courant nerveux le cerveau ne
recevrait pas d ’im pression sensitive et, par suite, ne pourrait
envoyer à la périphérie aucune impulsion m otrice. En consé
�—
92
—
—
quence, un sujet ainsi m utilé serait co m p lètem en t insensible à
toutes les influences du d eh o rs ; la volonté persisterait chez lui,
mais elle ne pourrait agir q u e sous l’influence d ’une excitation
purem ent subjective, d ’une cause te n a n t a l’individu lui-méme,
toutes les im pressions du m o n d e ex té rie u r étant annihilées pour
lui. Et alors m êm e q ue la volonté en trerait en jeu , elle ne pour
rait déterm iner aucune action ; l’influence motrice s’arrêterait
b ru sq uem ent au niveau de la p ro tub éran ce, les mouvements vo
lontaires seraient co m p lètem en t abolis. La station debout per
sisterait cep en d an t, celle position étant propre a la nature de
l’h om m e et pouvant être co nservée instinctivem ent sans que la
volonté interv ienn e, mais la m a rch e serait impossible. Possédant
son intelligence, susceptible de vouloir mais incapable d’exer
cer sa volonté en d ehors du d o m a in e de la pensée pure,
insensible h toute excitation m écan iq ue, le sujet, plongé dans
un engourdissem ent rêv eur, resterait com plètem ent immobile
si quelques m o uv em ents d é te rm in é s par l'action réflexe n'avaienf lieu par intervalles.
Les ch angem ents subis par la physionom ie ajouteraient en
core a l’horreu r de celte situation. Le n erf facial étant paralysé
a droite com m e à gauche on ne c o n s ta te r a it, il est vrai, aucune
désharmonie dans l’aspect g én éra l de la face, mais le visage
présenterait une désesp éran te régularité ; pas le moindre pli,
absence complète de co ntractio ns m usculaires, pas de mouve
m ents des yeux, aucune expression dans le r e g a r d ; rien ne
refléterait la pensée su r ce m asqu e inerte que ne viendrait
jam ais anim er le plus léger so urire. La bouche demeurerait
béante, la mastication serait co m p lètem en t abolie et la paralysie
du m uscle péristaphylin e x te rn e ap po rterait dans la déglutition
une gêne notable. D é p l u s , l’im m obilité forcée des lèvres, en
em pêchant la nette articulation des s o n s , rendrait la parole dif
ficile.
Si la lésion de la p ro tu b é ra n c e consistait en une tumeur dé
veloppée dans l’intérieur de la m asse n erveuse, il pourrait se
93
faire que la production m orbide se développât en haut et en a r
rière et com prim ât les tubercules quadrijumeaux ; dans ce cas
surviendraient des troubles de la vue pouvant aller jusqu'à l’a
maurose et la cécité complète. Mais, même en supposant intacts
les tubercules q uadrijum eaux, l'appareil de la vision aurait subi
une pertubaiion profonde. Les paupières resteraient entr ouver
tes et immobiles ; les globes oculaires, soustraits à l’influence
de leurs m o teurs et soum is à la seule action du muscle grand
oblique, sera ie n t, dans une immobilité com plète, dirigés cons
tamment vers la partie supérieure et interne de l’o rb ite , les
pupilles, par suite de la paralysie du nerf m oteur oculaire com
mun et des filets nerveux provenant du ganglion ophtalm ique,
auraient perdu le pouvoir de se contracter ou de s’agrandir ; le
regard resterait perpétuellem ent fixe et sans vie ; enfin l’opacité
de la cornée, résultat des troubles profonds survenus dans la
nutrition de l’œil, ne tarderait pas à se m ontrer, em pêchant la
lumière d’im pressionuer la rétine dem eurée saine etexcitable et
privant le m alheureux malade du dernier lien qui le rattachait au
monde ex térieur. N ous pouvons sans dépasser de beaucoup la
vérité,dire le dernier lien, c a rie toucher n ’existerait plds, l’odo
rat ainsi que le goût seraient considérablement dim inués et l'ouïe
ne pourrait s’ex ercer q u'en d éterm inant de douloureuses se n
sations.
Telle paraîtrait devoir être la situation d’un individu dont la
protubérance annulaire serait com plètem ent détruite. Le ta
bleau est des plus tristes; mais il est facile de voir que toutes
les maladies de la protubérance ne déterm ineront point des
désordres aussi profonds. Les symptômes varieront à l’infini
selon la nature et l’étendue de la lésion, et les variétés porte
ront aussi bien sur la forme des troubles physiologiques que sur
leur intensité.
Dans le cas , par exemple , où la maladie , sans envahir .toute
la protubérance, aurait attaqué spécialement les faisceaux inno
mmés et les corps restiform es, on pourrait constater un certain
�—
(rouble dans la coordination des m o u v e m e n t s , car ces cordons
nerveux envoient dans le cervelet de nom b reu ses ramifications.
Si les nerfs qui naissent de la p ro tu b é ra n c e , au lieu d’être com
p lè te m en t détruits dès leu r orig ine, sont comprim és ou lésés
peu p ro f o n d é m e n t, leurs fonctions ne seront point abolies
com m e dans le cas que n o u s avons su p p o s é ; elles seront sim
plem ent troublées et plus ou m o in s perverties. De même, si la
lésion siège p articulièrem ent su r un des lobes de la protubé
rance, les sy m p tô m es , au lieu de se m o n tre r également sur les
divers côtés du corps, p ré d o m in e ro n t b droite ou b gauche.
Voila les résultats au xq uels on arrive par le raisonnement en
se basant su r la co nstitutio n an ato m iq u e du mésocéphale. Exa
m inons m aintenant si les ex p érien ces des physiologistes confir
m e n t ces conclusions th é o riq u es.
La physiologie est obligée de se d éclarer impuissante toutes
les fois q u ’il s ’agit de co nstater su r Je vivant des désordres que
l'hom m e seul est susceptible d ’ép ro u v er, alors que l’expérimen
tation doit atteindre des o rg an es q u ’on ne peut toucher sans
co m p rom ettre sérieusem ent la vie de l ’individu. En pareil cas,
force est au physiologiste de s’ab sten ir ou d ’expérimenter sur
les anim aux. Mais chez l’animal certaines parties du corps dif
fèrent n otab lem en t des organes qui leur correspondent chez
l’h o m m e; co n sé q u em m en t les ex périences ainsi faites ne sont
pas toujours concluantes et elles n e d o n n en t souvent b l’esprit
qu ’une certitude relative.
N ous nous trouvons, dans le cas actuel, en face d’une diffi
culté de cette nature. La p ro tu b é ra n c e annulaire des animaux,
su rto u t celle des anim aux su p érieu rs, ressem ble beaucoup, il
est vrai, b celle de l’h o m m e ; m ais la distribution des nerfs, qui
proviennent du m ésocéphale, n ’étan t point la m ême dans l’es
pèce hum aine et chez l’anim al, et ce d ern ier étant privé de plus
du jeu de la physionom ie, il en résulte q u e tous les désordres
q u ’entrainerait chez l’h o m m e la d estructio n complète de la pro
95
—
tubérance ne p o u rro n t être constatés chez les animaux. Cepen
dant, m algré ce vice originel, l’expérimentation physiologique
prouve, d ’une m anière suffisante, l’exactitude d ’une partie des
détails que nous avonsdonnés.
Il résulte des expériences de Flourens, Magendie, Bouillaud,
etc., que les lobes cérébraux, orgaûes b l’aide desquels se ma
nifestent les facultés intellectuelles, sont en outre le siège de la
faculté de percevoir les impressions sensitives. Un animal privé
de ces deux lobes tom be dans un assoupissement profond et pa
rait soustrait b la vie extérieure.
Si, respectant le cerveau, on se contente de sectionner com
plètement les pédoncules cérébraux b leur sortie de la protubé
rance annulaire, les mêm es phénom ènes s’observent. Ce fait
prouve su rabo nd am m en t que les impressions sensitives ne
naissent point dans les lobes cérébraux, mais q u ’elles viennent
de la périphérie, trav ersen t le bulbe rachidien, la protubérance,
et parviennent, par l’interm édiaire des pédoncules cérébraux,
jusque dans les lobes encéphaliques chargés, en quelque sorte,
d’élaborer les im pressions sensitives et de les percevoir.
Cependant l’anim al, privé com plètem ent de ses lobes céré
braux, donne encore des preuves évidentes de sensibilité. G erdv, ayant excité un animal ainsi mutilé, vit celui-ci sortir de son
assoupissement, crier et chercher b fuir. Poussant plus loin l’ex
périence, Gerdy lésa profondém ent la protubérance annulaire ;
aussitôt to u t disparut : l’animal retomba dans la somnolence et
demeura désorm ais insensible aux excitations les plus vio
lentes.
M. L onget renouvela l’expérience de Gerdy en la rendant plus
concluante encore. Ayant soum is des chiens et des lapins b l'é
thérisation, il fit n aître chez ces animaux des troubles physiolo
giques ap p arten an t b deux périodes distinctes. Dansla première,
qui correspondait a l’éthérisation des lobes cérébraux, l'animal
s ’assoupissait et n ’exécutait plus aucun m o u v em ent; mais, si on
le pinçait, il s’éveillait, criait et donnait de nombreux signes
�—
96
—
d agitation. La seconde période, p ro d u ite par une influence plus
prolongée de l’agent an esth ésiq u e, était caractérisée par l’éthérisatiou de la p ro tu b éran ce annulaire. Dans cette période, l’ani
mal restait com plètem ent im m obile, et on pouvait l’exciter, le
blesser, le dilacérer sans q u ’il p arû t ép rou ver la moindre sensa
tion.
Se livrant à une d eu x ièm e expérience sur d ’autres chiens et
d 'au tres lapins, M. L onget enleva à un de ces animaux les lobes
encéphaliques et il observa e x a c te m e n t les m êm es phénomènes
que chez les chiens ayant subi la sim ple éthérisation des lobes
cérébraux. Achevant b expérim entatio n en attaquant le mésocéphale, il vit alors survenir Yinsensibilité complète, signe qui ca
ractérisait, dans l’expérience p récéd en te, l’éthérisation de la
p ro tub éran ce annulaire.
E n conséquence la protubérance n ’est point seulem ent un organe
co nd ucteur des im pressions sensitives, elle est aussi un véritable
centre de perceptivité. D o it-o n s ’éto n n er dès-lors de voir la
masse centrale du m ésocéphale co nstituée en partie par de la
substance grise ?
Il y a plus. N ous avons vu que l’anim al, privé de ses lobes cé
rébraux, mais avant co nservé sa p ro tu b éran ce, faisait des mounements pour fuir, lorsqu’on l ’excitait vivem ent. Après la des
truction du mésocéphale, h l’insensibilité absolue s’ajoutait l’im
mobilité la plus com plète. Dans la p ro tu b éran ce siège donc,
outre la faculté de percevoir les sen satio ns, le pouvoir d ’exécu
ter les m ouvem nts qui d é p en d e n t de la volonté.
Le mésocéphale parait partager avec le cerveau proprement dit
la prérogative de percevoir les im p ressio ns sensitives et de com
m and er les m ouvem ents volontaires. S eu le m en t, dans cette com
m u nauté de pouvoirs, le plus beau rôle est dévolu à la protubé
rance. Q ue I on supprim e en eflet les lobes cérébraux, 1 animal
pourra encore sentir et se m ouvoir. Enlevez la protubérance en
laissant intacte la masse encéphalique, to u t disparaît ; et cela doit
être, car en détruisant le m ésocéph ale on fait plus que d ’anéantir
—
97
—
un des deux cen tres de perceptivité et (Y-incitation on intercepte
aussi le co uran t qui devait conduire l'impression sensitive dans
l’autre ce n tre et en ram enerle mouvement.
F lo u re n s fait intervenir, dans chaque m ouvem ent exécuté sous
l’influence de la volonté, trois forces distinctes : la volonté d 'a
bord, qui, d'après lui, réside d ansles lobes céré b rau x ; Yincita
tion motrice, q u ia son siège dans la moelleépinière; enfin la coor
dination des mouvements, à laquelle préside le cervelet. Cette
analyse du mouvement voulu nous parait très fidèle ; seulem ent
l’expérience a prouvé que l’incitation motrice siégeait, non dans
la m oelle, mais dans la protubérance annulaire et les lobes cé
rébraux. Q uant a la volonté, elle n’existe que chez l’homme et elle
semble se m anifester par le cerveau. Chez l’animal, l’instinct
rem place la volonté ; il com m ande tous les m o uvem ents autres
que c eu x ’d éterm inés par l’action réflexe et il paraît siéger éga
lem ent d ans les lobes encéphaliques.
Des ex périen ces précédentes et des déductions q u ’en ont ti
rées les physiologistes nous pouvons conclure qu ’un individu,
privé de sa p rotubérance annulaire, aura perdu la faculté de per
cevoir les im pressions sensitives et de com m ander les m o uv e
ments volontaires; la sensation douleur n ’existera plus mais la
volonté, d ans son essence, ne sera point abolie.
/
Les physiologistes n ’ont m alheureusem ent donné aucun détail
sur les désordres survenus dans les fonctions de certains nerfs
crâniens à la suite des lésions de la protubérance. 11 est probable
cependant, pour ce qui regarde en particulier les neifs de la
cinquièm e, de la sixièm e et de la septième paire, que des troubles
physiologiques m anifestes doivent résulter de la destruction du
mésocéphale. Q u an t au n erf m oteur oculaire co m m u n, en exci
tant, après la section de la protubérance, les pédoncules céré
braux et le n erf lu i-m ê m e, il serait facile de voir si ces divers
organes ont conservé leurs fonctions spéciales. Nous ignorons
si cette expérience a été faite; mais il nous parait difficile que le
mésocéphale puisse être détruit sans que les pédoncules céré-
�b ra n s, qui en p ro viennent, ne soient pas e u x - m e m e s profondé
m e n t modifiés.
En pareille m a ti è r e , l'ex p érim en tation physiologique est
m u e tte , et nous som m es forcés de p rocéder par induction. Nous
appuyant sur l’anatom ie, nou s avons su pp osé que la destruction
de la protubérance e n traîn ait, chez l’h o m m e, de profonds dé
sordres dans les fo n d io n s des nerfs m o te u rs oculaires, du triju
m eau et du facial. Il nous reste h voir si les faits pathologiques
confirment notre hypothèse et de plus s ’ils so nt en rapport avec
les expériences faites p articulièrem ent su r la protubérance.
[La suite au prochain numéro).
Dr S eux fils.
De la m édication arsén io-an tim on iale et de son emploi
contre le s m aladies du cœur et qu elq u es autres affections,
par le docteur Lucien PAPILLAUD.
D ’après ces co urtes co nsid ération s su r les m aladies du cœur,
il convient d ’ex am in er b rièvem ent aussi le traitem ent qui leur
est opposé. Ce traitem ent co nsiste p re sq u e u niq u em e n t, on le
sa it, dans les préparations de digitale q u ’on prodigue faute de
m ieux, et d on to n fait, selon n o u s, un é tra n g e abus. La digitale,
n ’ayant aucun e action coutre les lésions qui siègent aux orifices,
aux valvules e t aux parois du c œ u r, ne p eut donc rien contre les
maladies o rganiques p ro p re m e n t d ite s ; elle ne peut influencer
que la fonction du c œ u r; or, co m m e n t l’influence-t-elle ? Les
expériences de M. Claude B ern ard o n t d ém o n tre q u e cette subs
tance était un paralysant du c œ u r ; c ’est donc en exerçant une
action dépressive sur sa vitalité, su r son én erg ie générale, sur
la contractilité de scs libres m u scu laires et su r sa résistance dy
nam ique et physique aux causes qui te n d e n t à son affaiblisse
m ent et b la perversion de ses fonctions. O r , toutes les fois que
le cœ ur a besoin de déployer un su rcro ît de force dans une des
parties ou dans la totalité de l'o rg a n e p o u r vaincre l’obstacle
qu’a p p o rleu n rétrécissem en t ou pour suppléer au défaut q u ’en
traîne une insuffisance ou une influence m édicam enteuse qui
paralyse îi un certain degré l’activité du muscle cardiaque et qui
déprime sa vitalité, agit incontestablem ent dans le sens de la
maladie. Q uand on emploie la digitale dans ces cas, on s’attache
à com battre un sym ptôm e, abstraction faited esa cause, on pèse
de toute la puissance d ’une médication paralysante, stupéfiante,
dépressive et toxique, sur un appareil et une fonction en état
nécessaire de suractivité, et qui cèdent m om entaném ent b l’ac
tion an ti-v itale exercée contre eux, mais qui reprennent leur
degré de suractivité dès q u ’est suspendue celte action thérapeu
tique qui, étan t antipathique et hostile a l’organism e, ne peut
être établie d ’une m anière perm anente.
C'est donc une médication b suspendre et h reprendre indéfi
nim ent, c’est un combat incessant à livrer qui ne peut avoir
d ’autre term e que celui de la vie du malade, et dont la consé
quence devra être ou une intoxication poussée jusqu’aux d e r
nières lim ites de sa compatibilité avec l’existence, ou une vic
toire gagn ée par la maladie sur le rem ède dont la vertu aura été
ém oussée par l’habitude, et qui sera devenu impuissant à m o
difier la vitalité du cœ u r sans cesser d’être nuisible au reste de
l'organism e. Car la digitale n’agit pas seulem ent sur le cœur,
elle atteint toute l’innervation, elle trouble les fonctions intellec
tuelles et sensorielles, elle trouble la digestion, elle trouble l’ac
tion m u scu laire, elle agit, en un m ot, b la m anière des stupé
fiants, et c ’est en frappant sur tout l’organism e q u ’on parvient,
b l'aide de ce m édicam ent, b modifier, et encore b ne modifier
que tem p o ra ire m en t un seul symptôme, la fréquence des batte
ments du cœ ur.
R endons cependant b la digitale la justice qui lui est d ue; c ’est
un rem ède qui ne va pas toujours contre le but q u ’on se propose,
et qui peut serv ir indirectem ent b soutenir la vitalité du muscle
cardiaque, car en d im inu ant le nom bre des évolutions du cœur,
il donne b cet o rg an e, dans une certaine m esure, un repos re-
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latifqui m énag é ses forces, réd u it la d ép en se de son activité, et
co nserve ju sq u 'à un certain d eg ré l’intég rité de son innervation.
Le c œ u r est un muscle in te r n e . Le m é d ic a m e n t qui doit être le
mieux approprié à la g uériso n ou à la palliation des maladies de
cet organe telles que nous les c o m p re n o n s, doit être celui qui
exerce une action élective et rég u latrice su r le système muscu
laire, qui stim ule les t o n d io n s de ce sy stèm e, qui augmente
son énergie et sa résistance, qui p révien t sa fatigue et qui favo
rise sa n u tritio n . Ce m é d icam en t, c ’est l ’arsenic.
Il est d ’observation que l’arsenic a u g m e n te Lactivité muscu
laire, acc ro ît la résistance à la fatigue, et d o n n e aux sujets qui
en font usage une notable aptitude à su p p o rte r sans lassitude, ou
avec une lassitude r e la tiv e m e n tm o in d re , les travaux et les exer
cices corporels et p artic u lièrem en t les lon gu es courses et les
ascensions pénibles. Chez ces su jets, la v ig u eu r musculaire est
portée à un haut d egré, et se so utien t d ’u n e m a n ière remarqua
ble ; ils ép rou ven t un se n tim e n t d ’alacrité générale qui leur
donne la conscience de leur ap titu de pour l’exercice et le tra
vail ; pour eu x , le poids de la fatigue sem ble plus léger, et la
nutrition, plus active et plus ré g u liè re , se traduit par ce degré
d ’em bonpoint m odéré qui est un d e s s ig n e s de la santé. Ces pro
priétés physiologiques et th é ra p e u tiq u e s de l’arsenic, sont celles
qui so nt le m ieux ap propriées aux indications que comportent
les m aladies du cœ u r, indications qui co nsistent à soutenir, ré
gulariser et stim uler la vitalité du m u scle cardiaque, dont les
forces doivent faire équilibre à un obstacle ou suppléer à un dé
faut dans la circulation centrale. La p ro priété q ue possède l’ar
senic de prévenir l'essoufflem ent, ne peut résu lter que de son
action névrosthénique et rég ulatrice su r le cœ u r.
Mais cette propriété n év ro sth én iq u e ou p our mieux dire
m yothénique n ’est pas le seul titre q u ’ait l ’arsenic pour devenir
un m édicam ent spécial des m aladies du cœ u r. On sait que, se
lon les doctrines françaises, les n eu f d ix ièm es des maladies du
cœ ur procèdent du rhu m atism e. Le professeur Bouillaud et les
médecins de son école considèrent le cœ ur com m e une articula
tion interne et établissent que cet organe peut subir toutes les
altérations et transform ations pathologiques que déterm ine la
cause rhum atism ale dans les articulations internes. O r, quel est
le m édicam ent qui guérit le mieux les affections rhumatismales
invétérées, ch roniques et rebelles; après que tous les autres r e
mèdes ont échoué ? C ’est l’arsenic. Nous avons encore présents
à la m ém oire les récents travaux du regrettable professeur Beau
et du docteur G uéneau de Mussy, qui ont employé l’arsenic en
bain en m êm e tem ps que la médication arsenicale à l’intérieur
contre une des manifestations les plus opiniâtres de l’arthritis
appelée le rhu m atism e noueux.
Du reste, l’usage de l’arsenic contre le rhum atism e lem onte
à Dioscoride, et il n ’a pas cessé d ’être employé, et avec succès,
contre cette affection depuis ces tem ps reculés ju s q u ’aux temps
modernes, tan tô t d irectem en t et sous son véritable nom, tantôt
indirectem ent et sous le couvert des sulfures antimoniaux aux
quels il est naturellem ent allié.
R em arquons en passant que les altérations articulaires de
nature rhum atism ale, d ’apparence très grave et de caractère très
opiniâtre, d em eu rent cependant des années dans une période
de curabilité, et accessibles à nos médications. Pourquoi n ’en
serait-il pas ainsi des lésions rhumatism ales du cœ ur ? P o u r
quoi leur accorder sans hésiter le triste privilège de l’incurabi
lité ? Nous croyons que, pour qu ’elles deviennent curables, nous
ne devons pas nou s borner à pallier leurs effets à l’aide de la di
gitale, il faut les attaq u er dans leur cause, il faut enfin traiter le
rhumatisme cardiaque par lesagents quiguérissenl le rhumatism e
des articulations, et au premier rang de ces agents nous plaçons
l’arsenic. N o u sfe ro n s ainsi de la thérapeuthique étiologique.
Nous devons avouer cependant que ce ne sont pas ces consi
dérations théoriques qui nous ont conduit à l’emploi de l’arse
nic dans le traitem ent des maladies du cœ ur. Nous y avons été
conduit cliniquem ent, c ’est-à-d ire par les voies empiriques. En
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1853, ayant à traiter une malade qui présentait les signes d'une
doses moitié moindres que celles des autres sels arsenicaux, a
hypertrophie active du cœur, sans rétrécissement ni insuffisance,
une action beaucoup plus prompte et plus sûre, saris pour cela
nous eûmes lid ce d’essayer dans ce cas quelques sels minéraui
être plus toxique. Nous l’avons fait préparer en granules que
qui passent pour exercer une action atrophique sur le cœur, tels
nous avons nommés granules antimoniaux ; nous avons adopté
que les sels de mercure, de plomh et d'arsenic. Nous débutâmes
ce nom parce que nous avons cru qu'il fallait tenir compte des
par les sels mercuriels auxquels il fallut renoncer après quelques
préventions des malades contre l’arsenic et les composés arse
semaines, en raison de la très grande susceptibilité gastrique du
nicaux qui sont encore un épouvantail pour le vulgaire, malgré
sujet, et nous les remplaçâmes parunesolutiond’arséniatedesoude.
leur réhabilitation thérapeutique. Dans ces granules, l’arséniate
Sons l’influence de ce dernier médicament , les battements
d’antimoine est dosé à un demi-milligramme ; nous prescrivons
de cœur diminuèrent d intensité et d ’étendue, l étal de demi-
habituellement quatre de ces granules par jour, soit deux m illi
congestion qui existait vers la tête cessa graduellement, la circu
grammes de sel arsenical. A celle dose.ee médicament peut être
lation se régularisa, les palpitations disparurent, les forces re
continué pendant des années entières et même indéfiniment.
vinrent, et après un an de traitement par la médication arseni
Comme ses composants, lorsqu’ils sont pris à petite dose long
cale,'cette malade avait acquis une guérison complète qui ne s’est
temps continuées, l ’arséniate d’antimoine agit sur l’organisme
pas démentie depuis.
en général par une influence reconstituante des plus remar
Après avoir obtenu ce succès sur lequel nous n’avions pas
quables, son action élective et régulatrice sur le cœur ne vient
compté, nous nous attachâmes à essayer l’arsenic sur tous les
qu’après et se confond avec les modifications générales et répa
malades qui nous parurent atteints de lésions organiques ou de
ratrices qui l’ont précédée.
lésions fonctionnelles du cœur, et sur une série de vingt cas,
Tous les médecins ont pu observer comme nous que, dans les
nous ne rencontrâmes que quatre sujets réfractaires à l’action
divers cas pathologiques où le tartre stibié et les autres antimo
de ce médicament. Des seize qui subirent l inlluence arsenicale,
niaux actifs étaient administrés d’une manière continue, la cir
quelques-uns guérirent et d’autres obtinrent des améliorations
culation subissait presque toujours une remarquable sédation
qui, pour eux, étaient des guérisons malgré la persistance des
qui n’était pas passagère et de courte durée comme celle qui est
signes de leurs lésions organiques. Nous eûmes la pensée d ai
l’effet de la digitale, mais qui persistait longtemps encore après
der l’arsenic par l ’emploi soit simultané, soit alternatif du tartre
la cessation du médicament. Le pouls ne s abaissait pas, comme
slibié, et nou> constatâmes que cet adjuvant augmentait la puis
sous l’influence de ce dernier médicament, au-dessous de cin
sance de la médication arsenicale. Cette similitude d’action entre
quante et même de quarante pulsations, mais il descendait au
ces deux médicaments, leur influence réciproque qui s’entr ai
chifTre de soixante en moyenne et il se maintenait à ce degré
dait et qui accroissait leur vertu, nous donnèrent l’idée de faire
quand tous les autres effets apparents de l ’antimoine avaient de
mieux que de les associer, c’est-à-dire de les combiner. Cette
puis longtemps cessé de se faire sentir.
idée fut réalisée avec succès par les soins intelligents de M
L ’action élective de l’ arsenic sur le cœur est encore plus pro
Mausnier, notre collaborateur, qui, après divers essais, obtint
noncée que celle de l ’antimoine. A la suite des intoxications ar
un sel nouveau, l ’arséniate d’ antimoine, que depuis nous avons
senicales graves, un des symptômes les plus remarquables est le
presque exclusivement employé. L ’arséniate d’antimoine, à des
ralentissement et la faiblesse circulatoires qui persistent long
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temps après la cessation des autres phénomènes toxiques, et
qui, dans certains cas, persistent définitivement.
L ’action élective de l ’arsenic n’est pas bornée au cœur et b la
circulation ; elle s’étend aussi aux poumons et aux fonctions qui
L'arséniate d'antimoine est un sel blanc, pulvérulent, insipide
leur sont dévolues, la respiration et l'hématose, et elle exerce
et insoluble dans l'eau. Cette insolubilité peut paraître, au pre
sur elles une influence régulatrice et sédative. Tout le monde
mier abord, désavantageuse pour un sel arsenical, car la plupart
sait (jue les préparations arsenicales sont employées avec succès,
des médecins qui préconisent l ’arsenic comme médicament in
depuis Dioscoride jusqu’à nos jours, contre le catarrhe, l’asthme,
sistent sur la préférence a donner aux préparations solubles et
la phthisie, la pleurésie chronique, la coqueluche, l’angine de
diluées dans une grande proportion de liquide. Mais l’insolubi
poitrine, etc. Nous ferons remarquer que les préparations anti
lité dans l’eau n'est pas l iusolubililédans les liquides gastriques,
moniales et surtout le tartre stibié, la plus active de toutes,
surtout au contact des aliments et pendant le travail de la diges
servent aussi pour remplir les mêmes indications. L ’arséniate
tion. Telle est, sans sortir de notre sujet, la condition de l’acide
d’antimoine, qui réunit les propriétés thérapeutiques de ses
arsénieux, substance très-imparfaitement soluble et qui, cepen
composants, ne pouvait manquer d’être un remède efficace
dant, agit toutaussi promptement et peut-être plus etficacement
contré ces divers états pathologiques ; nous l’avons employé avec
que les arséniates de soude ou de potasse ; telle est aussi la con
un succès presque constant contre le catarrhe aigu et chronique
dition de l'antimoine métallique et de ses sulfures et oxi-sulfures
avec des résultats très remarquables, mais moins certains contre
qui sont presque tous, malgré leur insolubilité, vomitifs comme
l'asthme, et enfin souvent avec avantage contre la phthisie; dans
le tartre stibié lui-même.
cette dernière maladie, c’ est l’état catarrhal accompagnant les
Nous prescrivons les granules antimoniaux ou d’arséniate
tubercules qui est favorablement modifié ou même guéri tout à
d antimoine a la dose de quatre par jour en deux fois et après le
fait, en même temps que la nutrition est améliorée, l ’appétit et
repas, avec la recommandation de boire quelques gorgées d’eau
les forces restaurés. C ’est là, croyons-nous, tout ce que. dans
après les avoir pris. Cette dose nous a le plus souvent suffi, mais
l’état actuel de la médecine, on peut espérer de mieux des traite
nous avons pu, sans le moindre inconvénient, l ’élever, selon les
ments contre la phthisie;car. par aucune médication on n’obtient
indications, à six, a huit et à dix par jour, soit trois, quatre et
directement et immédiatement la résolution ou la transforma
cinq milligrammes. Ces doses semblent tenir un moyen terme
tion des tubercules; car cette résolution ou celte transformation
entre'Celles qu'emploient nos savants et distingués confrères,
ne peuvent être atteintes qu’indirectement avec l’aide du temps
les docteurs Isnard, de Marseille, et W a liu , de Nice. Le premier
et par la voie des métamorphoses pathologiques et physiolo
donne de un à trois centigrammes d acide arsénieux par jour; le
giques.
second préfère l arséniate de soude, qui ne contient que de 2oà
Signalons encore comme des indications pour la médication
35 p. 0,0 d arsenic, et la dose qu il adopte est le plus souvent
arsénico-antimoniale les dyspepsies, même celles qui dépendent
celle d’ un seul milligramme par jour, et quelquefois même d une
de lésions organiques; la tendance aux congestions cérébrales,
fraction
de milligramme (un cinquièm e, un septième, un
contre laquelle M. le docteur Lamarre-Picot a avec raison
dixième), Il est vrai que, comme l a dit un des auteurs que je
préconisé l’ arsenic ; la chlorose et l'anémie, contre lesquelles le
viens de citer, le docteur Isnard, l arsenic est un médicament
fer seul ne réussit pas toujours et a besoin d'un adjuvant; les
qui produit des effets souvent hors de proportion avec ses doses.
névralgies et névroses, pour lesquelles les anti-spasmodiques
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ne sont que des expédients impuissants; les ataxies et adynamies
typhoïdes, et enfin les cachexies de toute origine et de tous les
degrés dans lesquelles il n’ y a d’autres ressources efficaces que la
médication par les eaux minérales ou la médication arsenicale.
Après avoir fait cette très incomplète énumération des cas
dans lesquels l ’arsenic et l’antimoine rendent des services quand
l’inlluence des autres médications est devenue nulle et impuis
sante, nous disons de ces médicaments ce que Sydenham disait
de I opium : Maintenant que nous sommes habitués b nous en
servir, nous ne pourrions plus faire de la médecine sans eux.
C’est ce mois-ci que l’Académie des sciences a distribué ses
largesses, il y en a eu un peu pour tout le monde, même pour
M. Grimaud. Nous sommes loin de désapprouver les libéralités
de l’Institut et nous applaudissons volontiers b sa prodigalité
exceptionnelle ; cependant il y a des comparaisons qui choquent !
Mieux récompenser l'auteur d’aperçus, tout à fait hypothéti
ques, sur une épidémie dont on connaît h peine le premier mot,
qu’un bienfaiteur réel de l’humanité, nous semble chose éton
nante et nous rappelle ce proverbe un peu trop provençal peutêtre, mais non moins juste : « Étroit ail son , large b la farine. »
Ainsi donc, le vulgarisateur de la compression digitale, oh
C h r o n iq u e M e n s u e lle .
pourrait même dire le créateur de cette méthode, M. Vanzetti,
de Padoue, ne vient qu’en seconde ligne. Il est vrai que sa mé
Le mois de mars ne l a en rien cédé jb son prédécesseur au
point de vue de la santé publique. On se rappelle que nous
avons donné , pour février , un bulletin sanitaire des plus satis
faisants. Nous n’avons ce mois-ci, b part quelques varioles
légères et quelques croups, à signaler aucune maladie prédomi
nante. Il n’ y a pas eu, b proprement parler, de constitution
médicale , quelques fièvres muqueuses , peu graves en général,
ayant rempli les registres de l ’hôpital on sollicité le zèle de nos
praticiens. A celte époque où les phénomènes astronomiques
occupent une si grande place dans la science, comme dans le
monde, peut-être pourrions-nous expliquer la bénégnilé de
l ’hiver par l'influence des lunes? Pourquoi pas! La médecine
hippocratique attribuait bien à celte planète un pouvoir que
Mathieu de la Drôme ne désavouerait pas, et M. Le Verryer,
lui-même , en se promenant dans les astres , ne trouverait pas
mieux. Toujours est-il que février a été un mois exceptionnel
dans l ’histoire des mois et que les astronomes ont eu beau cher
cher, calculer, ils n’ ont pu le doter de la moindre petite nou
velle lune, phénomène unique et si rare que ni nous, ni nos
petits enfants , ne le reverrons.
thode a parcouru le monde, sans qu’ il ait eu besoin d’en payer
les frais de voyage. — Les recherches de M. Luys, sur le sys
tème nerveux , ont été jugées dignes d’ un prix. Rien n’est plus
juste que la récompense accordée b ce chercheur émérite. S'il
est un ouvrage propre à déchirer un coin du voile qui semble
vouloir nous dérober la clé des affections nerveuses, c’ est à coup
sur l ’œuvre du lauréat. M. Luys a non seulement enrichi la
science de faits importants, montré autant que possible la cor
rélation entre le sympôme et la lésion, tiré de ses travaux des
points de vue originaux, mais il a encore ouvert des horizons
inexplorés en donnant de l’ensemble du système nerveux un
aperçu aussi neuf que philosophique. La division des fibres ner
veuses en convergentes supérieures, présidant b toutes les nobles
facultés de l’homme, b ses instincts, ses passions; en conver
gentes inférieures, tenant sous leur dépendance les phénomènes
matériels, sensibles; et enfin en commissurantes, reliant les
deux moitiés symétriques du grand axe cérébrospinal dont elles
règlent l’harmonie , est bien une vue qui est propre b l ’auteur.
Et comme il traite de main de maître la partie philosophique de
son ouvrage , comme il se montre observateur rigoureux et sé
vère dans l’interprétation des faits, comme il est logique dans
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leur explication!. . Enfin tout séduit dans cette œuvre magis
M. Ricord, se plaçant sur le terrain de la conciliation, admet les
trale qui comptera parmi les plus solides, tout, à part peut-être
incisions sous-culanées de M. A. Guérin, dans la première
la forme un peu indigeste de la partie anatomique.
phase de la maladie, jusqu’h la suppuration exclusivement ; mais
On sait que dans un membre dont le tronc artériel a été obli
s’agit-il de la deuxième période, il se range de l avis de M. Vel
téré la circulation se rétablit par les communications nombreu
peau. Enfin, d’autres chirurgiens ont établi des distinctions
ses des collatérales ; mais ces anastomoses artérielles ne sont
entre tel ou tel cas. Ainsi M. Michon admet la guérison spon
pas les seules que l’on observe. Les vaisseaux h sang rouge
tanée des petits anthrax et veut au contraire débrider largement
peuvent en effet s’aboucher avec les veines par des ramusculcs
les gros, l'étranglement pouvant bien, plutôt que le bistouri,
visibles à l’œil nu, ou du moins h la loupe , et il en résulte alors
provoquer l’accident que l ’on redoute. — M. Larrey divise les
une modification dans la circulation veineuse. Tel a été le sujet
incisions en superficielles qui peuvent donner lieu h l’érysipèle,
du travail remarquable de M .Sucquet « D’ une circulation dériva
et en profondes qui le préviennent. Même dilléreuce a été établie
tive dans les membres et dans la tète chez I homme » qui a ob
par M. J. Guérin entre les cautérisations superficielles et pro
tenu une mention avec
fondes. A ce propos nous dirons queM . A. Richard a publié
\ ,500 fr.
Le rapport de M. Cl. Bernard, entre autres travaux, men
dans la
Gazelle des Hôpitaux une lettre adressée à M.
Nélaton.
tionne une étude sur l'extrait de la lève de Calabar, dont les
Ce chirurgien, l’auteur de la lettre, traite tous les anthrax par la
auteurs ont isolé le principe , h seine, antimydriatique que l’on
cautérisation profonde et rayonnée. Il voudrait convaincre le
pourra désormais opposer a l'atropine.
professeur de clinique qui, dès longtemps, a abandonné les appli
Avec le mois de mars a commencé, h l’Académie de méde
cations de feuilles de noyer pour I usage du bistouri. J avouerai,
cine, une discussion, close aujourd’hui, sur le traitement de
avec M. Velpeau, que les accidents à la suite des débridements
l ’anthrax. C'était à l’occasion du mémoire de M. A . Guérin « Du
sont assez rares ; cependant, dans les anthrax vraiment trop vo
traitement de 1 anthrax par les incisions sous-cutanées. » M.
lumineux, cas où il faut couper les tissus à une grande profon
Gosselin en était le rapporteur. Elevé dans la crainte, assez
deur, la cautérisation de M. Richard me parait préférable aux
juste d ailleurs, de l érysipèle et de Einfection purulente, acci
incisions. Les idées lyonnaises sont b ce sujet très justes et cer
dents auxquels peuvent donner lieu les grandes incisions cru
tainement l ’érysipèle après la cautérisation n’arrive qu’excep-
ciales ou rayonnées, M. Gosselin s’était fait le défenseur de la
tionnellement. La tendance du siècle est évidemment de res
méthode sous-cutanée. M. Velpeau, au contraire, s’appuyant sur
treindre l ’emploi de l'instrument tranchant, et quand il peut
les faits qu une pratique de trente ans avaient déroulés sous ses
donner lieu à des accidents aussi terribles que l ’infection puru
yeux , ou plutôt sous sa main, défendait les incisions a ciel ou
lente ou l'inflammation érysipélateuse, on a toujours raison de
vert. Sur 184 anthrax, observés a l’ hôpital, l ’illustre professeur
recourir à d'autres agents pour arriver, avec le moins de danger
n’a eu a enregistrer que 14 décès. Sur cette longue statistique,
possible, au but que l ’on se propose. Dans tous les cas, l’ impor
il n a relevé que 5 cas d'érysipèle, dont un développé sur un
tant est de débrider, puisque M. Velpeau a montré que la gué
anthrax non incisé. Un seul malade a succombé a cet accident,
rison n’ était pas due à l ’évacuation des matières purulentes ou
un autre à l'infection purulente; de sorte que M. Velpeau
putrides. Cependant M. Briquet a rappelé qu’ il suivait la prati
n est pas du tout disposé à.recourir à une nouvelle méthode.
que de Dupuylren, et l'on sait que ce chirurgien recommandait,
�— 110 —
— 111
après l’incision, de presser tous les jours la partie. Beaucoup de
ainsi le danger de la vaporisation d’un pareil liquide dans un
médecins l imitent encore et comptent des succès.
appartement, le malaise qui en résulte pour le chirurgien, la
— S’ il est une maladie bien connue, bien décrite, c’est l’oph-
douleur qu’ éprouve le malade après l’emploi de cet agent, cte.
thalmie purulente. La distinction des ophthalmies granuleuses
Cependant nous regretterions qu’ une telle méthode fût déjà
et pseudo-membraneuses est consignée dans tous les livres,
délaissée, car en en modiliant le
excepté peut-être dans les classiques, tels que V id a l, de Cas
la chirurgie un service des plus précieux.
modus faciendi, on rendrait à
sis, commenté pourtaut par un soi-disant spécialiste, M. Fano.
Enfin, pour terminer les séances du mois, l’hygiène des ma
Cependant la Société de chirurgie s’est saisie de celle question
ternités est venue prendre rang dans les discussions de la So
et malgré l ’opinion de M. Depaul, n’aurhit-elle donné lieu qu'à
ciété de chirurgie. On se rappelle les utiles préceptes formulés
la communication de M. Lelort, la discussion n’eût pas été sté
par cette assemblée, lors de la discussion sur l'hygiène des hô
rile. Ce chirurgien a exposé les moyens employés par lui à l'hô
pitaux en général et l’on comprendra toute l'importance de
pital des enfants pour en exclure cette maladie qui y sévissait
cette question plus humanitaire peut-être que scientifique, si
épidémiqueraent quand il prit le service. M. Giraldès a esquissé
l’on se reporte aux statistiques. M est prouvé par celles-ci qu’ il
a grands traits les caractères et le traitement de ces deux sortes
meurt huit fois plus de femmes en couches à l’hôpital qu’en
d’ophthalmies chez les enfants et, comme toujours, jetant cà et
ville. Améliorer un pareil état de choses est un devoir que ré
là quelques vues originales, il s’est ainsi résumé :
clame impérieusement l ’humanité, résoudre ce problème serait
1° La première condition est de s’ assurer de l'état de la
cornée ;
2* Renverser la paupière et agir sur elle au moyen du nitrate
pour l’ Académie de chirurgie un titre de plus à la reconnais
sance de tous, titre qui ne déparerait pas ceux que loi ont acquis
déjà ses gloires scientifiques.
A. Q.
d argent;
3° Employer les irrigations nombreuses ;
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
-4° S'abstenir d’application de sangsues ou de scarifications.
Enfin M. Marjolin a insisté sur la nature de l’ ophtbalmie
diphthéritique dont la gravité la rapprocherait, selon lui, delà
diphtnérite des voies digestives ou respiratoires.
E ncore ün
mot de la trichinose. — Que de bruit ne
s’est-il pas fait, dans ces derniers temps, autour des trichines;
— L ’anesthésie locale, malgré les tentatives de M. Roux, de
que d’émoi ces animalcules n’ont-ils pas produit, dans le
Toulon, pour en étendre le champ à la grande chirurgie, était
monde scientifique d’abord, puis dans les populations. Grâce
demeurée restreinte à quelques petites opérations dont la plus
aux rapports de MM. Delpech et Reynal, toutes les craintes
commune est celle de l ’ongle incarné. La pulvérisation de l’é
doivent se calmer, et la science, en prouvant qu’elle sait pré
ther, produisant l ’insensibilité, a semblé ces jours-ci devoir lui
venir une maladie mortelle, pose un fleuron de plus à sa cou
donner un nouvel essor. Accueillie comme un véritable bienfait,
ronne. Tout le monde doit maintenant savoir qu’aucun cas au
elle a séduit un moment les membres de la Société de chirurgie,
thentique de celle maladie n’a été observé en France; qu’en
mais son règne n a pas été de longue durée et les essais ont
Allemagne même elle est rare, puisque, d’ après une statistique
bientôt dévoilé les inconvénients. Ils sont de plus d’ un genre :
officielle publiée à Brunswick, sur 30,000 porcs soumis, pen-
�«tant vingt et un mois, à l’inspection micrographique, H seule
ment étaient trichines, et qu’on est à l'abri (Je tout danger pour
vu qu'on ne mange de cette viande qu après l’ avoir soumise b
une cuisson complète. Que ne nous est-il aussi facile de uous
S ervice
de M.
Ciiapplain.
préserver du choléra !
Conférence
sanitaire de C onstantinople. — Honneur aux
délégués français qui, pour mettre l’Europe a l’abri d une nou
velle invasion du fléau indien, ont présenté et réussi h faire adop
Fracture de l'épine de l'omoplate, des septième et huitième
côtes gauches. — Pneumonie. ( Observation recueillie par
M. Trastour, interne du service.)
ter les propositions suivantes :
La mesure la plus prompte, la plus facile à exécuter et la plus
sûre consisterait, en cas de choléra parmi les pèlerins, à inter
Scotla Gaétan, 45 ans, journalier, entre à l’ Hôtel-Dieu, salle
Ducros, 24, dans le service de M. Chapplain.
rompre momentanément, c’ est-à-dire pendant la durée de l’é
Cet homme est tombé dans Ja cale d'un navire, sur le côté
pidémie, toute communication maritime entre les ports ara
gauche. On constate à son entrée une fracture de la septième et
biques et le littoral égyptien, en laissant ouverte aux hadjis,
huitième côte gauche : un bandage est appliqué autour du corps
pour leur retour en Egypte, la route suivie par les caravanes. En
et assez fortement serré.
d’ autres termes, les pèlerins seraient assujettis à faire une qua
Le malade se plaignait en même temps de la région scapu
rantaine soit sur place, pour ceux qui préféreraient attendre
laire, mais la contusion violente qu’ il avait éprouvée rendait un
dans le Hedjaz la lin de l ’épidémie, soit dans le désert pour
compte suffisant de celte douleur; cependant, comme cette
ceux, en plus grand nombre, qui suivraient la caravane.
douleur était plus localisée dans un point que dans un autre, elle
Inoculation
de la tuberculose. — Où donc nous arrête
rons-nous en fait de transmissibilité des principes morbides?
Voilà les expériences de MM. Hérard et Cornil qui viennent
continuer celle de M . Villem in et prouver que la matière tuber
culeuse de l ’homme, inoculée à des lapins, leur communique la
tuberculose. Quel dommage que les meilleures choses ne puis
sent pas se transmettre aussi lacilement !
appela l’attention de M. Chapplain qui, deux jours après l ’en
trée du malade, put reconnaître qu’il existait une fracture par
tielle de l ’ épine de l omoplate, dans la partie moyenne de cette
apophyse. La fracture était peu étendue, le fragment détaché
avait une longueur de cinq centimètres environ ; on pouvait le
saisir sur ces deux faces à l ’aide des deux doigts opposés l’un à
l ’autre, et I on obtenait une mobilité très notable et de la cré
pitation. Il n’y avait, du reste, aucun déplacement ; les mouve
— Au moment où nous écrivons ces lignes, a lieu à Paris
ments du bras étaient possibles, mais il était diüicile de rapporter
l’ Assemblée générale de l ’Association. Nous regrettons de ne
la douleur existante à l’ une ou l ’autre des altérations physiques
pouvoir publier que dans notre prochain numéro le compte
dont était atteint notre malade.
rendu de cette importante réunion.
Le bandage de corps entourant la poitrine et la bretelle ser
Le Comité de Rédaction.
vant à le fixer, furent les seuls appareils qui maintinrent les frac
tures des côtes et de l’ épine de l’omoplate.
— T y p . A R >AUD, C a t e r
c*.0> .n p .,
ru -
St-t'e.-réot, 57.
5
�— lli
I n point pneumonique sc montra dans le poumon gauche,
formité h la suite d’ une fracture sans déplacement; 5L parce
quelques sangsues et le kermès enrayèrent cet accident et le
qu’il est aujourd’ hui avéré que lorsque les fragments d’une frac
malade sortit de nos salles après un mois environ, ne présen
ture sont demeurés en contact, le périoste qui les avoisine n’est
tant plus aucune trace de son double accident.
le siège d’aucun épaississement, d’aucune induration capable
II y a quelques années que les fractures de l ’épine de l'omo
plate attirèrent plus particulièrement l’ attention du corps médi
de révéler, à travers les parties molles, l’existence de la solution
de continuité.
cal. Les circonstances qui avaient ainsi excité un certain émoi
Le lait que nous venons de rapporter vient, à une assez lon
dans les sociét s savantes méritent d’être rappelées, car elles
gue distance, se placer à côté de ceux de MM. Velpeau, Thierry,
montrent combien doivent avoir de circonspection les méde
Demeaux et témoigner de la justesse des observations laites
cins appelés comme experts, pour éclairer la justice.
par la Société de chirurgie.
Voici le fait tel qu’ il est rapporté par M. Velpeau, dans une
de ses leçons de l’ hôpital de la Charité : (1)
» Un jeune homme lait une chute, il éprouve une douleur
Fracture et luxation de la sixième vertèbre cervicale. (Obser
vation recueillie par M. Tnoiv, interne du service.)
* vive dans l'épaule. Un médecin distingué de province, que
Le 20 décembre 1805 , le nommé Bosso, Joseph jo u r n a lie r ,
« j'aime et que j ’estime, est appelé, constate une fracture de
âgé de 32 ans, fait une chute du premier étage d’une maison en
« I omoplate, la soigne et la guérit. Quatre ou cinq semaines
construction, dans les chantiers delà rue Impériale. 11 tombesur
« après, ce médecin tombe malade. Pendant qu'il est retenu chez
le dos et n’a pu se se relever. Il a éprouvé une violente douleur
* lui et qu’il ne peut sortir, le jeune homme demande, devant
dans la région cervicale. Il est immédiatement transporté à
« les tribunaux, une indemnité pour l’accident qui lui est arrivé.
l’Hôtel-Dieu et est couché au n° 6 de la salle St-Louis.
u Le
médecin qui l ’a soigné lui donne un certificat ; comme il
Le sujet est couché sur le d o s, dans l’ immobilité la plus ab
a ne peut se rendre au tribunal, on appelle un autre médecin,
solue; son intelligence n’est pas altérée, il rend compte des
« qui, après avoir examiné le malade, affirme qu’ il n’y a pas eu
sensations qu’il éprouve. Il lui est impossible d’imprimer le
i de fracture, et donne un certificat en ce sens. »
moindre mouvement à ses membres; la paralysie du mouvement
La Société de chirurgie, saisie du fait par M. Demeaux, de
Puy-l’ Kvéque, eut a résoudre diverses questions relatives il celte
variété de fractures.
est complète et occupe les bras tout autant que les membres
pelviens. La sensibilité a également disparu
dans toute la
partie inférieure du corps et le blessé n’est sensible à la piqûre
Après avoir admis qu’ une chute sur l’ épaule pouvait entraî
d’une épingle qu’ a la partie supérieure de la poitrine, du
ner la (raclure de l ’épine de l'omoplate, il fut constaté que ces
moignon de l'épaule ; la sensibilité descend un peu plus bas à
sortes de (raclures peuvent permettre des mouvements très va
droite qu’h gauche.
riés du bras et que l’absence de difformité cl d’engorgement au
bout de trente-huit jours, n’autorise pas a nier la fracture de
l'épine de l ’omoplate : 1° parce q u ’il ne saurait y avoir de dil-
La respiration est purement diaphragmatique, elle est difficile.
La circulation est plutôt ralentie, mais ne témoigne pas, au mo
ment de l’entrée, qu’elle participe aux altérations si importan
tes que présente le malade.
I) Gazette des Hôpitaux, 1«52, page 323.
La nuque est le siège d’un gonflement assez considérable,
�— 117 —
elle est douloureuseel ne présente aucune difformité apréciable.
altérations physiologiques présentées par Bosso, unies aux
circonstances qui ont déterminé la lésion, semblent marquer
une fracture de la colonne vertébrale dans la région cervicale.
ment la vessie et le rectum. En effet, il fallut, dès le soir, prati
quer le cathétérisme, et, le lendemain, on obtint quelques selles
à l aide d’ un purgatif.
Le malade fut maintenu ainsi pendant quatre jours, sans qu’il
La colonne vert braie examinée en arrière ne laisse perce
offrit aucun phénomène qui témoigna d’ une inflammation de la
voir aucun signe appréciable; le gonflement ne permet pas île
moelle, et mourut ensuite subitement pendant la nuit du 23 au
sentir parfaitement les apophyses épineuses. M. Cliapplaiu in
24 décembre.
troduit le doigt dans la bouche pour examiner la paroi posté
Autopsie, 26 heures après la mort.
— Les muscles de la ré
rieure du pharynx et voir si le plan vertébral n’ est pas irrégulier.
gion cervicale , tant en avant qu’ en arrière, sont infiltrés de
Le loucher ne donne aucun signe, mais il n’est pratiqué que
sang. Tous ces muscles enlevés, on voit que la lésion physique
pendant quelques instants, afin d ’éviter le vomissement et les
occupe la cinquième vertèbre cervicale. Les ligaments qui unis
mouvements qu’il aurait produits, mouvements qui eussent pu
sent les apophyses articulaires gauches sont rompus, ceux qui
devenir dangereux et aggraver i’ etat du malade.
unissent aussi le corps des vertèbres ont été également rompus.
Avait-il un peu de déviation de la tête sur le côté gauche? Ce
La cinquième vertèbre est luxée sur la sixième, mais non pas
signe, s'il e x ista it, était bien peu appréciable; le chirurgien se
également dans tous les points. Les apophyses articulaires droi
trouvant du côté gauche pour examiner le malade, la position
tes ont conservé leurs rapports, tandis que les apophyses articu
de la face,de ce côté, ne pouvait être considérée que comme le
laires gauches se sont séparées l ’une de 1 autre et se trouvent à
résultat de l'attention et de sa volonté.
uue distance d’ un centimètre environ. L ’apophyse articulaire
En l ’absence de signes positifs, les pbénomèmes physiologi
gauche de la cinquième vertèbre se trouve en arrière , et l’ apo
ques avaient déjà nue importance telle, que le diagnostic fut en
physe articulaire de la sixième vertèbre est demeurée en avant.
core : Luxation probable de la colonne vertébrale, simple ou
Le disque intervertébral et la cinquième vertèbre sont fractu
compliquée de fracture dans la région cervicale.
rés, déchirés. Le disque renfermait, dans sa partie antérieure,
Le malade fut placé horizontalement sur le dos, sur un plan
une partie de la face inférieure du corps de la vertèbre, el ce
dur, el la tête h peine relevée sur un coussin qui, partant du
corps, dans d ’aulre« points, avait entraîné avec lui une partie du
milieu du dos, établissait un plan très légèrement incliné.On dut
disque. L ’apophyse épineuse de la sixième vertèbre est fractu
également, par des coussins latéraux , maintenir la tête dans
rée il sa hase et entraînée en bas par les muscles.
l’immobilité, ou du moins éviter des mouvements trop brusques.
En l ’absence de signes physiques témoignant d un déplace
ment osseux, on pouvait soupçonner encore , soit un épanche
ment intervertébral, soit une commotion de la moelle.
Des ventouses scarifiées furent appliquées à la région dorsale.
La moelle épinière est compromise mais ne se trouve nulle
ment déchirée.
Fracture de l'humérus par effort musculaire. ( Observation
recueillie par M . T ro tebas , interne de service).
Outre les phénomènes constatés à l ’entrée du malade, nous
Graziano, Jacques, journalier, âgé de 50 ans, d ’un tempé
devions nous attendre a ce que les phénomènes de paralysie oc
rament nervoso-sanguin, d’une bonne constitution, entre à l’ hô
cupant tous les muscles de la vie volontaire, atteindraient égale
pital delà Conception et raconte qu’en se rendant au travail, il a
�été assailli, sur une place publique , par des enfants qui lui lan
senti aucune douleur dans la région affectée. Cette fracture de
çaient des pierres, et qu’ayant voulu eu jeter h son tour, il a exé
l’ humérus par effort musculaire peut donc être classée parmi
cuté avec son bras le mouvement du début, mais que subite
celles qui se sont produites chez un individu sain, et qui sont la
ment il a ressenti une violente douleur, que son bras est retombé
conséquence d'un effort violent.
inerte, et que la pierre est venue tomber à ses pieds. Il est en
La théorie proposée par Double ne saurait nous expliquer le
tré le jour même, 25 avril, à l'hôpital de la Conception , il est
mécanisme de la fracture, puisqu’elle siège au dessus de l’inser
placé dans le service de M . Chapplain , au n° 25 de la salle St-
tion deltoïdienne ; elle se rapproche de plusieurs autres laits cités
Augustin.
24 avril. — Le gonflement du bras est considérable, les mou
vements exécutés par le malade sont très douloureux ; le loucher
le plus léger produit également des douleurs. Le malade est as
sis sur son lit et l’on perçoit assez facilement de la crépitation.
La fracture parait presque transversale et siégeau dessus de lïnsertion deltoïdienne.
Le gonflement énorme qui existe ne permet pas l ’application
d’ un bandage, le membre, placé dans une gouttière, est recou
vert de compresses résolutives.
5 mai. — Le gonflem ent, quoique beaucoup moindre, existe
cependant encore. La coloration du bras est celle d’un ipembre
qui a été le siège d’une contusion très violente.
dans la science, tel que celui raconté par Larrey à l ’Académie de
Médecine, et rappelé dans l’ouvrage de Malgaignc : Une dame,
descendant de voiture et sentant le marche-pied se rompre sous
elle, se retint fortement à une des poignées de la voilure, de là
une fracture juste au dessus du deltoïde.
On dirait, dans les deux cas, une violente contraction de mus
cles ayant porté en haut la partie inférieure de l’humerus, alors
que la partie supérieure est maintenue par la contraction du grand
pectoral et du grand dorsal et autres muscles congénères.
La fracture que nous venons de rapporter n’a d’intérêt que
par la cause qui l ’a produite, parce qu elle rentre actuelle
ment dans les nombreux cas de fractures humérales, soit pour le
pronostic, soit pour le traitement.
8 mai. — Actuellement que le gonflement a complètement
disparu, on peut s’assurer que la fracture siège au dessus de l’in
sertion deltoïdienne. E lle est assez élevée pour qu’un appareil
L e c h o lé r a d a n s le s h ô p it a u x c i v i l s de M a r s e ille .
ordinaire des fractures du bras ne puisse être appliqué. Le seul
bandage utile est une écharpe soutenant le coude sans le soule
ver, et un bandage de corps tenant le bras immédiatement ap
pliqué contre la poitrine.
Les fractures de l’humérus produites par un effort musculaire
ne sont point rares, mais on a pensé que dans la grande majo
rité des faits cités, elles avaient été préparées par une altéra
tion de l’ os. Rien chez le sujet dont nous venons de raconter
l’histoire ne peut donner lieu à cette interprétation. — Cet
homme est dans la force de I âge , ne parait atteint d’aucune dia
thèse affectant la solidité du tissu osseux ; jamais il n avait res
On a, dans ccs derniers temps, beaucoup écrit sur le choléra;
il ne faut ni s’en étonner ni s’em plaindre. Quand une épidémie,
à chaque invasion nouvelle, moissonne les hommes par milliers
dans nos cités et par millions dans le monde, le devoir impérieux
du médecin n’est-il pas de chercher dans une étude approfondie
de ses causes, de ses symptômes et de scs lésions, des mesures
hygiéniques pour la prévenir, des remèdes pour la combattre ?
De ce devoir s’est acquitté avec autant de conscience que de
Le Choléra dans les hôpi
taux civils de Marseille pendant l'épidémie de 1865. Pour ré-
talent l’auteur de l’ ouvrage intitulé :
�120
—
soudre les graves problèmes, pour dissiper les obscurités pro
(pie, cette fois, exception a été faite à la loi de M. J. Guérin :
fondes que présente cette grande histoire du choléra, la science*
« La constitution diarrhéique est pour une ville menacée d’épi
n’aura jamais assez de documents authentiques et d’observations
démie ce (jue la diarrhée prémonitoire est pour un individu me
exactes ; nous devons savoir gré à M . le professeur Seux de
nacé de choléra. » Ils y verront encore (pie le premier cholé
nous faire connaître les documents et les observations que scs
rique reçu à F Hôtel-Dieu a été admis le 27 juin et que le second
patientes études lui ont permis de recueillir, et nous osons lui
est entré le 16 juillet, circonstance bien extraordinaire si le
assurer qu'il a atteint le but annoncé par l’ épigraphe de son li
choléra, comme on l’a dit à l’ Académie, existait à Marseille
vre :
avant le 11 juin. Ils y verront enfin que, sur les 30 premiers
Utile si je puis.
C ’est h Marseille qu’a débuté l’épidémie cholérique qui, en
cholériques traités à l ’hôpital par M. Seux, il y avait 19 marins,
186'), a ravagé diverses villes de France. La question de l’ori
tandis (pie, sur les 30 cholériques suivants, il n’y avait plus que
gine du choléra de Marseille est donc d’ une importance capitale
trois marins, ce qui décèle assez clairement le foyer primitif de
dans l’histoire générale du choléra ; elle renferme à elle seule ce
l’épidémie.
problème de l ’importation dont la solution par la négative nous
Ces malades admis à l’Hôtel-Dieu n’ont pas été reçus indiffé
livre fatalement et sans défense aux coups du terrible fléau, tan
remment dans toutes les salles. Sur la demande de M. Seux, un
dis que la solution par l'affirmative nous donne l'espérance de le
local à part leur a été réservé. C ’est le principe de l’ isolement,
parquer, de l’emprisonner, de lui fermer nos villes et nos foyers.
qui a été également adopté dans les hôpitaux de Paris, et dont
Sans doute, il est clair comme le jour que le choléra de Mar
fu tilité n’est plus discutable dès le moment où l’on admet que
i'K
prévue, elle avait été prédite, elle s’est accom plie; c’est |à un
La salle St-Joseph, confiée à M. Seux, et la petite salle pour
fait évident, une vérité incontestable, qui tombe sous l’action de
les cholériques femmes, dont était chargé M. Bertulus, se sont
f
le choléra est transmissible par les hommes.
ce qu’on appelle, à tort peut-être, le sens com m un; c’est de
trouvées un moment insuffisantes ; il a fallu en ajouter une troi
?.
seille a été importé d’ Alexandrie. Cette importation avait été
m
plus une vérité scientifique basée sur des preuves solides et mul
sième. Fn effet, l ’épidémie de 1865 a été assez meurtrière ; elle
tipliées. Cependant on a pu écrire dans des livres et racouter
a fait, d’après les relevés de M. Seux, 2,037 victimes. A l’Hôtel -
devant les Académies que le choléra est né dans notre ville
Dieu, pendant les 166 jours qu’elle a duré, ont été traités 333
même, que ce monstre est un enfant de Marseille et qu’il exer
cholériques, dont 267 hommes et 66 femmes ; à l’hôpital de la
çait ses ravages avant l ’arrivée ctes premiers navires accusés de
Conception, il y en a eu 23-1, dont 158 hommes et 76 femmes ;
l ’avoir apporté d’ Alexandrie, c’ est-à-dire avant le 1 I juin.
ce qui fait, pour l ’ensemble des hôpitaux, 567 cholériques, dont
Ceux qui voudraient être édifiés sur celte question et que
n ’auraient pas encore convaincus les travaux déjà publiés pour
l’ élucider, n ont qu’à consulter l’ ouvrage de M Seux. Ils y ver
ront que, dans les mois de mai et de juin , Marseille était dans
d’excellentes conditions sanitaires, que, dans le service de M.
Seux, à l’ Hôtel-Dieu, sur 170 malades traités pendant cette pé
riode, pas un n’élaii atteint d ’afl’e clion diarrhéique aiguë, et
223 ont guéri et 314 ont succombé.
Ces chiffres prouvent qu’à sa septième invasion le choléra n’a
vait rien perdu de sa fureur première, et que, des victimes (pi'il
frappe, la plupart succombent sous ses coups. Voilà cependant
ce que le docteur Maurin a imaginé d’appeler une pseudo-épi
démie, un mélange de choléra, d’ intermittence, de suelte et de
lièvre typhique. Non, la maladie qui a affligé Marseille en 1865
�n’était ni aussi bénigne, ni aussi complexe qu’a pu le croire
M. Maurin; c’ était tout simplement le choléra, avec ses carac
tères très nettement tranchés, tels (pie M. Seu\ les avait obser
vés dès 1834 et qu'il les a constatés depuis dans toutes les au
tres épidémies.
La diarrhée prémonitoire, que M. Seux a toujours rencontrée
chez les 07 malades traités par lui jusqu’au 28 août, a manqué
au contraire chez les 08 sujets qu’il a eus h soigner depuis cette
époque jusqu’au 23 septembre ; elle a reparu ensuite. C’est
donc au plus fort de 1 épidémie qu’elle a manqué. La loi posée
par M. J Guérin n’csl donc pas constamment vraie.
La maladie, une fois déclarée, peut se montrer avec une in
tensité variable ; M. Seux, m ultipliant les divisions, lui recon
la diarrhée simple ; 23la cholérine ;
3* le choléra léger ; 4° le choléra algide peu accentué ; o’ le
choléra algide curable ;
pendant il sait que celle forme a été observée par quelques-uns
de ses confrères. Pour ma part, je l’ai notée trois fois : j ’ai vu
un vieux concierge de la rue Montgrand mourir dans moins de
trois heures en pleine algidité, après avoir essayé en vain de
Cependant quelques nuances particulières se sont produites.
naît six degrés distincts :
de diarrhée ; M. Seux n’a point rencontré de choléra sec ; ce
le choléra algide incurable.
Sur 122 malades atteints du choléra algide curable, 20 ont été
pris dans l'hôpital ,*sur ces 20, seulement S o n t guéri, et, de
ces 5, il y en a deux pour lesquels le choléra a été un remède;
une femme a été par lui délivrée d’ une ascite et un homme d'un
rhumatisme chronique. M. Seux a vu aussi une pneumonie et
une albuminurie avec anasarque enlevées par une attaque de
choléra.
L ’état typhique qui succède souvent a l ’algidité a été décrit
avec soin par l'auteur, à qui, pour ma part, je sais beaucoup de
gré d’avoir insisté sur la dillérence qui existe entre cet état et
la véritable fièvre typhoïde ; bien des fois M . Seux l'a observé
chez des malades qui n’avaient usé ni de la médication stimu
lante ni des opiacés. Sur 158 choléras algides, 40 ont présenté
l ’état typhique ; de ces derniers, 28 sont morts, 21 ont guéri.
vomir et après avoir rendu par les selles une quantité de matières
b peine suffisante pour salir un mouchoir ; b la rue Léopold, j ’ai
vu un garçon de neuf ans qui n’a pas rendu une selle, bien qu’a
vant mon arrivée on lui eût administré de l ’huile de ricin, et qui
a été enlevé en trois heures par un magnifique choléra bleu ;
enfin une femme que j ’ai soignée b la rue Turcon, après une algidilé modérée mais prolongée, après une réaction faible et
compliquée, a fini par guérir mais n’a rendu que des selles ex
trêmement rares pendant la durée assez longue de sa ma
ladie.
M. Seux étudie avec un soin minutieux, dans un chapitre
particulier, les symptômes les plus importants. Il insiste sur la
valeur, au début significative, des diarrhées aqueuses, abon
dantes et surtout indolores ; les matières blanches se sont offer
tes exceptionnellement b son observation ; elles étaient d'un
blanc grisâtre et sans odeur dans le tiers des cas, jaunâtres ou
brunâtres et très fétides dans les deux autres tiers. Les vomis
sements étaient presque toujours d’un vert porracé, caractère
propre b l ’épidémie de 1865. La rareté de la céphalalgie et des
crampes lui a paru aussi constituer un caractère remarquable
de la même épidémie. La suppression des urines a été constante
dans l’algidité, et sa gravité pronostique n’a pas failli ; seule
ment, dans quelques cas, les urines ont reparu une ou deux
fois, pour ne plus se montrer jusqu’à la mort du malade.
Le pouls, dans l ’algidité, était en moyenne b 00 pulsations,
petites et difficiles à compter ; chez plusieurs des sujets il a
Mais, ce qu’il y a de plus terrible à constater, c ’est «jue, sur ces
manqué 24 heures et chez l’ un d’eux 48 heures avant la mort ;
138 choléras algides, 4 ont récidivé
dans la réaction, son amplitude était notable, mais sa fréquence
L ’ algidité avait été ordinairement accompagnée ou précédée
dépassait rarement le chiffre de 100. La température de la peau
�— 125 —
a clé aussi examinée avec soin ; ainsi, chez un individu atteint
ment curatif est moins important <pie la prophylaxie, et celle-ci
de choléra algide incurable, le thermomètre a donné 15° a la
doit reposer sur l’origine de la maladie, sur son mode de propa
plante des pieds, 52 au pli de l'aine, 34 au creux de l’aisselle,
gation.
4S au bout de la langue et 4-4 à l ’extrémité du nez ; ce malade
ne mourut que 59 heures après l’expérience.
Pour M. Seux, il n’ y a pas de doute : la cause première des
épidémies de choléra en Europe doit être cherchée dans les na
Eu résumé, le choléra qui a sévi h Marseille en 1865 est bien,
vires et au milieu des voyageurs qui arrivent des lieux contami
aux yeux de M . Seux, le choléra asiatique avec toute sa laideur
nés. Seulement, pour que la maladie se propage dans une loca
primitive ; seulement il a revêtu deux caractères spéciaux :
lité, il faut que certaines dispositions inconnues préexistent ;
d ’une part un état bilieux des plus manifestes, d’autre part une
car, dit-il excellemment : « Qu’on se figure d’ une part un amas
tendance adynamique un peu plus accentuée que dans les épi
« de matières très combustibles, d’ autre part du bois chargé
démies antérieures.
« d’ humidité ; l ’étincelle qui pénétrera dans le premier fera
Il a été très grave, et le pronostic a dû être réservé même,
« naître des flammes qui dévoreront tout ; celle qui sera en
dans les cas légers ; ainsi, M. Seux a vu 5 fois sur 52 des ma
« rapport avec le second produira à peine un peu de fumée, et
lades atteints d’ une simple diarrhée se cholériser complètement ;
« le feu s’éteindra bientôt. » On ne peut savoir d’ avance si telle
la cholérine, 1 fois sur 1 8 ,et le choléra léger, 1 fois sur 52, ont
localité est disposée ou non a alimenter l’ incendie.
dégénéré en choléra mortel. La cyanose persistante et le coma
étaient, de tous les symptômes, ceux qui annonçaient le plus
infailliblement une mort prochaine.
redouter l'étincelle dans tous les cas.
Il faut donc
Mais quelle est, au fond, la nature de cet agent que trans
mettent ainsi les voyageurs ? M. Seux l’ ignore comme nous
Après la mort, des lésions diverses ont été trouvées. Le gon
tous ; il croit que le choléra est un empoisonnement miasma
flement des follicules intestinaux n’a été rencontré que 5 foissur
tique. a Ce mot miasme, ajoute-t-il, a le grand inconvénient
1A autopsies, et, coïncidence singulière, 4 fois sur 14 autopsies,
« d’être fort vague et de ne rien préciser ; mais il a, par la
les plaques de Peyer étaient proéminentes. La psorentérie a
« même raison, l ’ immense avantage de laisser le champ libre à
manqué chez des sujets morts après dix jours de maladie, et
u toutes les hypothèses et, par conséquent, de ne point engager
s’est rencontrée chez des individus qui ont succombé dans les
a l ’avenir. »
cinq premiers jours. La rate était, 8 foissur 14, à l 'état normal,
Le miasme est, selon toute vraisemblance, absorbé surtout
1 fois infiltrée de pus, 1 fois indurée, 2 fois simplement hyper
par les voies respiratoires, et concentre son action sur le grand
trophiée, 2 fois atrophiée. Il y avait ordinairement les traces
sympathique. M. Seux s’ explique ainsi la violente perturbation
d’ une fluxion gastro-intestinale et parfois des congestions se
du tube digestif, mais il s’arrête tout de suite dans la voie des
condaires portant surtout sur le cerveau et le poumon. Je re
interprétations. Je ne puis partager, sur ce point, la réserve un
grette que les résultats négatifs concernant les recherches faites
peu trop prudente de l’auteur ; la plupart des phénomènes cho
sur le grand sympathique ne soient pas plus détaillés.
lériques trouvent leur explication, sinon unique du moins prin
Ayant ainsi étudié à fond les symptômes, la marche et les lé
cipale, dans le trouble des uerfs vaso-moteurs, ainsi que ten
sions du choléra-morbus, l ’auteur se prépare a aborder la ques
dent à le prouver les recherches les plus récentes de la physio
tion complexe du traitement de celte maladie ; mais le traile-
logie pathologique. Je regrette que M. Seux n’ait pas poursuivi
*
�126 —
à fond cette étude pleine d’intérêt, mais, sans doute, il n’a pas
des moyens spécifiques ? Non, la science n’ en possède pas.
voulu s’écarter des faits certains et des données positives, dans
faut agir suivant les indications cliniques, nous dit l’auteur, et
un livre dont l ’esprit et le but sont éminemment pratiques.
avec grande raison.-Il insiste sur l’importance des stimulants
Quoi qu’il en soit, le miasme se transmet d’un malade à un
externes, moyens employés concurremment avec toutes les mé
autre, et M. Seux raconte 1 histoire assez significative de deux
dications et qui sont probablement la cause de leurs succès
petits foyers qui se sont développés a M arseille, l’un dans la
communs. Pour arrêter la diarrhée, l’ipéca, surtout quand la
salle Moulaud à l’Hôtel-Dieu, l'autre abord du navire russe le
Delphin.
Il croit également que les linges imprégnés par les dé
jections et les sueurs des cholériques peuvent propager la ma
ladie, et rapporte à ce sujet l ’observation, cette fois exacte, de
la blanchisseuse de Sain t-Jcan -d u -D e serl, dont un savant qui
n'est pas médecin, M. Grimaud de Gaux, avait déjà raconté la
fin tragique dans ses anecdotes sur le choléra de Marseille,
nitrate de bismuth était ensuite administré, les lavements laudanisés étant réservés pour les diarrhées accompagnées de coli
ques ; les purgatifs salins lui ont paru un moyen inutile et dan
gereux ; h leur suite la diarrhée prenait, pendant quelques
jours, une intensité elïrayanie. Contre les vomissements, rien
de puissant comme 1 ipéca.
en 1865.
A insi le choléra est, pour M. Seux, une maladie transmis
sible, à un degré moindre cependant que la rougeole, la scarla
tine et la variole. « Toucher le cholérique ne donne pas le mal,
« mais respirer l'air qu'il respire peut le donner. » Les mesures
prophylactiques découlent tout naturellement de ces doctrines,
et l'auteur pense qu’ il faut,
langue était large, humide, saburrale, avec amertume de la
bouche, lui a généralement sufli ; en cas d’ insuccès, le sous-
a jusqu'à
ce que la commission in-
« ternationale ait terminé son œuvre en Orient, se garder chez
« soi. »
Isolement, aération et purification des navires ; pour les voya
geurs, huit jours d’observation dans un lazaret convenable et
très aéré, pendant lesquels les hardes seraient ex posées à l'air et
dé infectées ; quant à ce qui concerne Marseille, choix de nos
iles pour é tablissement d'un lazaret, isolement complet des
malades au Lazaret ; désinfection des déjections ; emploi du
phénate de soude comme désinfectant ; propreté générale; veulilalion extrême des maisons et des établissements publics ; tel
les sont les précautions que conseille M. Seux, après d'autres,
nous sommes fiers de le constater, et avec tous les hommes de
bon sens.
Mais, quand le mal s’est déclaré, quel traitement employer 9
A la période algide, les stimulants internes ont été joints aux
stimulants externes, mais M. Seux a observé ce que d’antres
praticiens ont constaté aussi : tantôt l’estomac était dans une ir
ritabilité telle qu’il rejetait immédiatement tout, tantôt il restait
muet et, 1absorption ne se faisant plus, il se remplissait outre
mesure pour se vider ensuite brusquement ; voilà un dessignes
qui m’ont paru à la fois des plus graves et des plus désolants
pour le médecin. Raison de plus pour insister sur les stimulants
externes parmi lesquels il en est un dont M. Seux s’ est servi
avec succès pour amener la réaction ; je veux parler de l’emmaillotemcnt dans un drap mouillé.
Après la cessation de l’état algide, quand la diarrhée persis
tait, parmi les médicaments employés par I habile médecin de
'Hôtel-Dieu, il en est peu qui lui aient aussi bien réussi que le
calomel. Quand les vomissements continuaient, les vésicatoires
volants
pansés avec la morphine, lui ont rendu de réels ser
vices.
Pour l'état typhique, si la fièvre était vive et l’agitation exces
sive, le bain tiède lui était utile. Pour la tendance au coma
comme pour les congestions thoraciques, les saignées générales
�— 129 —
ei les saignées révulsives oui ét<- prescrites avec un insuccès no
table ; les vésicatoires et les frictions slibiées n'ont pas donné de
C h r o n iq u e M e n s u e lle .
meilleurs résultats. Les bouillons de bœuf comme aliment, l'eau
vineuse comme boisson, le camphre et le quinquina comme
médicaments, les sinapismes aux membres inférieurs comme
Parlerons-nous encore du choléra ? Il le faut bien. Mais que
applications externes, voila les moyens qui ont été le plus em
le lecteur se rassure, nous ne venons pas, en fâcheux augure,
ployés à iH ôtel-D ieu contre l ’état typhique. Pendant la conva
lui annoncer l’apparition du fléau. L ’ennemi n’esl plus à nos
lescence un régime sévère a été scrupuleusement et très sage
portes et tout nous présage une heureuse saison.
Il nous faut cependant jeter un coup d’œil sur le passé, puis
ment prescrit.
Quelques médicaments prétendus spécifiques on été expéri
que le zèle des travailleurs qui prennent à tâche de découvrir
mentés. Le sulfate de cuivre, préconisé par M. Burcq et utilisé
les causes du trousse-galant indien, si peu galant, ne s’est point
par M. Lisle, adonné, sur 9 cas, i
guérisons dont une, au
ralenti et tient encore en éveil l’attention du monde médical.
moins, peut lui être fortement contestée. La fève de Calabar,
Nous disons cela h propos d’une note de M. Cazalas, lue à l’ A
proposée parM . Km. Martin, a donné une guérison et un décès.
cadémie de médecine le 5 avril dernier. L'auteur fait partie du
Le valérianate de zinc, essayé sur la recommandation du doc
petit nombre des anti-contagionisles et nie par conséquent l’im
teur Ourgaud, de Pamiers, n’a pu sauver les deux malades aux
portation du choléra. Fermer les yeux 'a la lumière est le droit
quels il a été administré. Quant à M. Aronssohn, qui employait
d’un chacun ; libre â l ’auteur d’avoir des idées rétrogrades, nous
les bains de vapeur en même temps que les alcalins, il a guéri
ne nous permettrions pas de l ’en blâmer, si les conclusions qu’il
1-4 malades sur 50. M. Seux fait remarquer qu’en même temps
formule n’ entrainaienl des conséquences pratiques de la plus
que toutes ces médications étaient tentées, on appliquait les sti
grande gravité. Heureusement nous n’en sommes pas encore à
mulants externes, auxquels, suivant toutes présomptions, doit
l’application de ce superbe et trop large système. L ’auteur ne
être en grande partie attribué l’ honneur de la guérison.
prêche rien moins que la suppression des quarantaines, il croit
J ’ai dû, dans ce résumé forcément rapide, passer bien des re
avoir démontré leur inutilité, que dis-je, leurs dangers. En vé
marques ingénieuses, des préceptes sages et des appiécialions
rité de pareilles assenions font un singulier contraste avec les
intéressantes, mais mon but aura été rempli si j ’ai pu faire com
opinions émises par les délégué-s français et adoptées par le con
prendre que le livre de M. Seux est l’œuvre d’un esprit judi
grès international. Nous n’entreprendrons pas de discuter en
cieux et d’ un observateur habile, q u i, c tant en position de voir
détail le travail de M. Cazalas, MM. Pirondi et Fabre s’en sont
beaucoup, a eu le soin de bien voir. Il sera aussi utile que peut
chargés et l ’ont fait avec succès. Ils ont démoli l’échafaudage
l ’être une étude intelligente, approfondie, dégagée de toute
créé pour les besoins de la cause anti-contagioniste en l’atta
préoccupation systématique et pratiquée sur une vaste échelle.
quant par la hase; le premier coup de marteau a sulli, elle était
La bibliographie du choléra renferme déjà beaucoup de travaux;
vermoulue.
elle en compte extrêmement peu d’aussi solides et d’aussi cons
Il faut avouer que M. Cazalas a eu un rare bonheur pour trou
ver des matériaux favorables à ses opinions. Nous voudrions
ciencieux.
A. F.
bien savoir pourtant où il a puisé ceux qui regardent notre
�ville. E st-il venu à Marseille étudier la question ? Je ne le crois
qu’on ne peut lui contester c’est un talent supérieur d'exposition
pas, ou alors on a dû lui fabriquer des renseignements de com
et une façon énergique d’exprimer ses convictions. Il est vrai
mande. Je crois plutôt qu’il a arrangé son petit système sur des
que pour l’énergie, M. Depaul ne craint personne.
documents imprimés. Mais dans ce cas, pourquoi ne pas souiller
Professeur depuis quelques mois, M. Richet vient d’être nom
mot du rapport de M. Bouisson sur le début de l’ épidémie, rap
mé membre de l ’Académie de médecine. Voilà bien du chemin
port qui avait jusqu h un certain point un caractère olliciel, puis
fait en peu de temps ; mais ce n’est que justice. L ’auteur de
qu'il émanait d’ une commission de la Société Impériale de mé
celle si bonne anatomie chirurgicale, — elle en est à sa troisième
decine ? Pourquoi ne pas parler non
plus du mémoire de
ou quatrième édition, — avait des titres sérieux qui le recom
M M. Fabre et Pirondi, au moins pour en combattre la subs
mandaient au choix de ses nouveaux collègues, et il le savait, la
tance ? Pourquoi enfin avancer que ce n’est qu’à Paris, Brest,
modestie n’étant pas le défaut qui eût pu Tempêcher de devenir
Marseille, Toulon, que la maladie a revêtu la forme épidémique.
académicien.
Solliers-Ponl n’est pas même cité et A rle s est mis sur le même
La Société de chirurgie continue sa discussion sur l’ hygiène
rang que Lyon pour l’ immunité, 0 décès seulement. C’est que
des maternités. Il résulte clairement des discours de MM. Tar-
M. Cazalas a bâti son mémoire sur les relevés du conseil de
nier et Trélat que la plus grande cause de mortalité dans ces
santé militaire, relevés qui peuvent être très exacts, j’en con
hospices est la fièvre puerpérale. M. Delore, de Lyon, est arrivé
viens, mais fort insufiisants, quand il s’agit d’ une maladie qui
aux mêmes conclusions. Pour ce dernier chirurgien la cause
atteint indistinctement les
principale de la maladie serait l ’encombrement. La propagation
pèkins et les guerriers.
Enfin M. Ca-
zalas s appuie, pour déclarer que le choléra n’ est contagieux ni
serait favorisée par l’agglomération, l ’agent de transmission se
directement, ni indirectement, sur l ’autorité des Anglais. Qu’il
rait le miasme puerpéral. Les autres causes ne seraient que se
rr.e permette de lui citer un de ces aimables voisins, mais un
condaires, les saisons par exemple, dont.M. Trélat tient tant de
bon, qui pourrait bien ne pas être de son avis et qui, dans sa cli
compte. Il est facile de prévoir les conclusions de M. Delore
nique médicale, a consacré un article au mode de propagation du
pour la prophylaxie de cette épidémie.
fiéau indien. Si l’auteur du mémoire avait lu l ’ouvrage de Granes, il eut, peut-être, été convaincu que tous les médecins bri
tanniques n’étaient pas de son école. Les gentlemen, du moins,
chez lesquels l’amour du moi est très développé, ne prêteraient
pas aux théories généreuses de M. Cazalas, une oreille aussi
complaisante que celle de l ’Académie.
La discussion sur la vaccination a été suspendue, nous sus
pendrons aussi nos appréciations, jusqu à ce que la commission
lasse connaître le résultat de ses expériences. M. Bousquet qui
la boude et M. Depaul qui l'a dirige, sont deux champions ter
Une note sur 1 anesthésie locale par le sulfure de carboue,
une observation de dilatation du conduit de Warton, une autre
de décollement de l’épiphyse inférieure du fémur complètent le
bilan de la Société de chirurgie.
M. Dolbeau désigné pour suppléer M. Jobert (de Lamballe),
a ouvert son cours de clinique chirurgicale par une excellente
amblyopie au début de la paralysie générale. Après
avoir montré à l ’ophlhalmoscope une atrophie papillaire , le pro
leçon sur I
fesseur, par une suite de raisonnements, de probabilités qui ont
la valeur de la certitude, arrive au diagnostic d’une paralysie gé
ribles, doués tous deux de grandes qualités et tous deux fort te
nérale, dont la première manifestation s’est produite sur la vue,
naces. On peut ne pas être de l’avis de M. Bousquet, mais ce
puis, par les troubles des autres sens, etc. Deux malades, placés
�— 133 -
— 132 cote à côte, lui ont fourni l’occasion de montrer l'affection à son
début et h sa période confirmée.
Un cours de clinique n’est pas un cours de pathologie, et sans
laire ici de personnalité, il me semble que tous les professeurs
ne sont pas toujours pénétrés de celle vérité. Véritable clinicien,
M. Dolbeau a su éviter l’écueil et s’ est montré â la hauteur de sa
toutes les opérations chirurgicales; c’est presque toujours elle
qui est le mobile ou le but de la médecine opératoire. « L ’anaplaslie est l ’art de remédier aux difformités. » D ’où l’ obligation
de bien connaître celles-ci, quand on veut se charger de les cor
riger. Or, imaginez une difformité quelconque, simple ou com
posée, elle rentrera dans les cinq groupes suivants, proposés par
l’auteur :
lâche.
« La clinique, d it-il, a pour mission d ’utiliser les enseigne« ments de la pathologie, d’ une part pour reconnaître les mala« dies, et d’autre part pour distinguer ce que chaque affection
« présente de particulier, eu égard à tel ou tel individu. Il y a
« autant de maladies que de malades, et l’art du clinicien con« siste a instituer une thérapeutique en rapport avec l’état géné-
1° Difformités par synthèse. (Réunions anormales.J
2° Difformités par diérèse. (Séparations anormales.)
3° Difformités par exérèse. (Pertes de substances.)
Difformités par prothèse ou exubérance. (Excès de subs
tance.)
5° Difformités par hétérotaxie. (Changement de rapports.)
Ce qu’ il y a de vraiment utile dans ce tableau, c’est que ces
» ral et local de chacun des malades. »
Ce précepte est strictem ent suivi dans cette première leçon.
divisions
en
comportent d’autres exactement
semblables;
Sans avoir vu le malade, on le connait ; on découvre son affec
seulement le mot anaplastie prendra la place de difformité et
tion, et conduit par l'analyse d’ un praticien h sens droit, on pose
l’on comprendra bien vite qu’une difformité étant donnée, il
un diagnostic certain. Le sujet était difficile, la façon si simple
faudra pour la corriger recourir au groupe correspondant qui
dont il est présenté fait qu’on ne s'en aperçoit [ras. Ce début pro
sera celui de nom contraire. Ainsi l’on aura :
1° Anaplastie par synthèse. (Réunion des parties séparées.)
met un brillant semestre.
Dans le
Dictionnaire des Sciences médicales,
tome IV,
2“ Anaplastie par diérèse. (Séparation des parties réunies.)
1r* partie, M. Verneuil vient de publier un article sur l’anaplas-
3° Anaplastie par exérèse. (Ablation des parties superflues.)
tie. Après avoir expliqué le terme qu il emploie et, dans une ju
4° Anaplastie par prothèse. (Apport de parties nouvelles.)
dicieuse critique des autres expressions, formulé les raisons qui
5° Anaplastie par anataxie. (Replacement en son lieu normal.)
ont décidé de son choix, l auteur entre en matière. Nous regret
tons avec lui que les exi enees de la publication l ’ aieut enfermé
dans des limites si restreintes. M. Verneuil aurait écrit un vo
Tel est le point de vue original, élevé, auquel se place M. Ver
neuil. On voit tout de suite le parti que l ’on peut en tirer.
Les règles fondamentales posées par l’auteur ne sont pas
lume sur cette question, sans l ’épuiser, et on le voit sans peine,
moins claires ni précises. Le chapitre des indications et contre-
au train dont il y va. La chirurgie réparatrice est prise par lui
indications, révèle un praticien consommé, et l ’article tout en
dans le sens le plus large. Il ne s’ agit pas seulement de restaurer
tier, un esprit réfléchi, un chirurgien érudit. Les exemples
une portion d’ organe avec un emprunt lait aux parties voisines,
abondent sous sa plume et son style concis n’ est jamais obscur.
il ne s’agit pas seulement de tordre un lambeau de peau ou de le
On a beaucoup appris quand on a lu ces quelques pages et l’on
faire glisser, de refaire un nez ou d’oblitérer une fistule ; non :
se dit en fermant le livre qu’il est encore de beaux jours pour la
le cadre de l'anaplastie est plus vaste ; il comprend presque
chirurgie française.
A. O-
�— 135 —
Réunion de l'Association géaérale des médecins de France.
Le dimanche , 8 a v r il, h deux heures, dans le grand amphi
théâtre de l'Adm inistration de l ’assistance publique, à Paris, a
eu lieu la septième assemblée générale de ( Association, sous la
présidence de M. Rayer.
La réunion était nombreuse; le président de la Société locale
des Bouches-du-Rhône, M. Seux, qui devait nous y représenter,
en a été malheureusement empêche par des raisons majeures;
mais , toujours désireux de concourir au progrès de l'Œuvre, il
avait adressé à M. le président Rayer , en même temps qu une
lettre d’ excuse, un nouveau don de 200 francs pour la Caisse
des pensions viagères.
M Rayer, prenant le premier la parole, a exposé la situation
morale de l’ Association, dans un langage a la lois noble et sim
ple que l Assemblée a accueilli par des applaudissements pro
longés.
Le docteur Legouesta présenté ensuite, avec une élégante
concision , le compte-rendu des travaux de la Société centrale;
puis M. Henri Roger a exposé la situation de la souscription
Laënnec, cette idée de justice et de patriotique reconnaissance
que notre Société locale a si bien comprise et à laquelle elle a
généreusement répondu. La Commission a aujourd hui en caisse
une somme ronde de 20,000 francs, et la statue de Laënnec,
confiée à I habile ciseau de M. Lequesne, est déjà commencée.
Décidément, comme l’a dit M. H. Roger dans son brillant rap
port, grâce à l’Association, « la France médicale a de l ’or pour
soulager ses infortunes, et du bronze pour éterniser ses gloires.»
La séance s’est terminée par la lecture du rapport annuel de
de M. Amédée Latour. Il nous est pénible de ne pouvoir ici re
produire en entierce magnifique et saisissant exposé, qui prouve
par des chiffres et par des laits, tout ce qu’il y a de sève féconde
et de puissante utilité dans l ’ Association générale.
Il résulte de ce rapport que les Sociétés locales agrégées il
l’Œ uvre sont au nombre de 90 disséminées dans 77 départe
ments et 2 colonies. L ’Association réunit aujourd’hui 6,209
membres; elle a reçu cette année 525 membres nouveaux. Le
tota1 de son avoir est de 427,277 francs, ce qui fait environ
40,000 francs de plus que l ’année dernière. La caisse des pen
sions viagères d assistance est déjà de 7 1,460 francs. Les dons
cl legs qu elle a recueillis pendant le dernier exercice dépassent
12,000 francs et sont ainsi répartis :
Pour l ’ Association générale............................ F r. 5,320
Pour la Caisse des pensions viagères............... » 6,561
Pour les Sociétés locales.................................. » 2,221
Les ressources de l'Œ u v re sc composent donc de trois élé
ments distincts, ou, si l’on veut, se rendent à trois ordres de
caisses. De ces trois caisses, la plus pauvre est la caisse géné
rale, car elle a pour devoirs de donner des subsides aux Sociétés
locales dont le fonds de secours est épuisé , de doter la caisse de
pensions viagères, de lui verser tous les ans une somme de
6,000 francs, et toute somme excédant celle de 50,000 francs,
qui constitue le maximum de son fonds de réserve. M. le secré
taire général désirerait que les Société locales s'imposassent
aussi, pour leur fonds de réserve, un maximum dont l’excédant
serait versé à la caisse des pensions viagères. Celte dernière est
la plus intéressante de toutes, et M. Amédée Latour fait pour
elle un éloquent appel à ses confrères ; il voudrait que tons les
médecins à qui viendrait d’arriver un événement heureux, mar
quassent ce jour de bonheur, non pas, comme faisaient les an
ciens, par une petite pierre blanche, mais par une libéralité à l’é
gard de cette œuvre excellente.
Le Conseil général n’a eu, cette année, à secourir qu’une
seule Société locale, à qui il a voté 600 francs. Parmi les Socié
tés locales, 58 ont eu des secours à distribuer, elles ont donné
17,107 francs. Mais les secours matériels ne constituent qu’une
minime partie du but qu'il faut atteindre, et M. Amédée Latour
a rapporté des faits aussi nombreux que touchants qui mettent
en lumièreles ressources nombreuses, les avantages importants
de la solidarité confrat(M-nelle.
L ’Association s’occupe encore des intérêts généraux de la pro
fession , et même des lois qui la régissent. M. le rapporteur ne
fait qu’indiquer cette question capitale qui, à cause de son im
portance même, devait être traitée dans un travail spécial ; mais
d s’étend davantage sur les efforts faits de toutes parts pour ré
primer l’exercice illé g a l, ce vampire attaché à la médecine
actuelle.
Des considérations empreintes d’une philosophie douce et
charmante terminent ce travail éloquent qui a été accueilli par
des applaudissements frénétiques.
La journée du 8 avril s’ est terminée par le banquet annuel
offert à MM. les présidents et délégués des Sociétés locales, et
�I3(> —
auquel, d iso ns-lecn passant, le président et le président hono
raire du Comité médical des Bouclies-du-Rhône, en ce moment
Ih 'a Paris, ont été gracieusement invités.
Dans la séance du lundi, 0 avril, M. Barrier, membre rlu
Conseil général, a fait un rapport sur les résultats de l’enquête
ouverte dans les Sociétés locales, relative a la révision des lois
de l'exercice de la médecine.
(Suite.)
(
1)
L ’étude des faits relatifs aux affections de la protubérance an
Une longue discussion a eu lieu sur ce sujet ; elle a eu pour
résultat l’adoption, b l'unanimité, de la proposition suivante :
nulaire fournit des résultats très dissemblables. Il en est ainsi
« L ’Assemblée générale, désirant que les efforts de l’Asso
ciation soient immédiatement dirigés vers la répression de
l’exercice illégal de la médecine, et craignant qu'en divisant ses
efforts elle ne les affaiblisse, d eide que les autres questions ins
crites au rapport de M. Barrier , sont ajournées et renvoyées au
Conseil général, pour qu’il agisse dans les circonstances qui lui
paraîtront favorables c l dans le sens de la majorité exprimée
dans l ’enquête et dans l’ Assemblée générale. »
ment de malades. Pour retirer quelque fruit des recherches c li
Divers autres rapports très intéressants, mais d'une moindre
importance, ont été ensuité présentés par MM. lïouzelot. Guer
rier et Barrier. Enfin, I’ Vssemblée s’est séparée après une labo
rieuse séance qui n’a pas duré moins de six heures*
Cette pénurie de documents cliniques tient à deux causes :
Tous les rapports et les discussions auxquelles ils ont donné
lieu seront publiés dans l'A nn uaire.
toutes les fois que l’examen porte sur un petit nombre seule
niques, il faut observer sur une grande échelle; or, les auteurs
ont noté très peu de cas de maladies de mésocéphale, et c’est b
grand’ peine que l’ on trouve , disséminés dans lesjournaux.de
médecine ou dans les traités dogmatiques, quelques faits se
rapportant b ces affections.
d’abord , au peu de fréquence des affections du mésocéphale ,
pu is, b l iusuffisance même de la description symptomatique de
ces maladies ; n’ ayant présents a l’esprit que des renseignements
très vagues, nous retrouvons difficilem ent, sur le vivant, le
type morbide imcomplèlemenl décrit dans les livres et il en ré
sulte que des cas fort intéressants passent quelquefois devant
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
nous sans attirer notre attention. Dans un chapitre consacré
aux maladies du mésocéphale , M. Cruveillier décrit en ces
termes une pièce pathologique : « La figure 3 représente une
Aux noms des médecins récompensés pour leur dévouement
pendant l’ épidémie cholérique de 1NG5, nous sommes heureux
d’ajouter, ceux de M M . Am albert, Auphan, Payan et Picard, qui
ont obtenu des médailles d’argent.
— D intéressantes conférences sur l’ hygiène, par M. le docteur
M itlre, ont lieu a la salle du Conservatoire , tous les lundis, à 9
heures du soir.
Le Comité de Rédaction.
M i r e i ll e —
Tjf|>.
a k .s a I'D,
C a t f .H
et C.linp., roc St -Kurréol, 57.
protubérance annulaire qui m a été remise par M L ... La dé
formation qu’ ont subie la protubérance et le bulbe est vraiment
est malheureux que nous soyons privés de
toute espèce de renseignements sur les symptômes obsencs au
lit du malade. » Vraisemblablement, si la symptomatologie des
extraordinaire. //
maladies de la protubérance avait été mieux connue, M. L... au
rait songé b une affection de cet organe et il aurait pris en détail
l’observation du malade.
(i) Voir le numéro d'avril.
G
�Mais comment établir le diagnostic de ces maladies, puisque
lubérance annulaire. Nous nous contenterons de citer les noms
nous ne connaissons pas leurs symptômes, et comment laire
de b'riedreîcli, Lebert, Schiff, Ducliek qui recueillit quinze ob
l’étude des symptômes si nous ne pouvons établir un bon diag
servations de maladies du mésocépbale, Ladame (de Neufcliâtel)
nostic* ? La dilliculté est sérieuse; il nous semble cependant quelle
qui fit paraître , l’année dernière, un mémoire sur les tumeurs
n'est pas insurmontable. Trop souvent, dans nos hôpitaux, après
de la protubérance , travail consciencieux basé sur
avoir posé le diagnostic « apoplexie cérébrale » ou « ramollisse
niques. Ces habiles observateurs , en comparant les faits re
20
faits c li
ment encéphalique » le médecin — tout en continuant de s'oc
cueillis par leurs devanciers et par eux-mêmes , parvinrent à
cuper du malade— néglige l'élude d ’ une affection trop commune
introduire quelque clarté dans la description symptomatique et
pour être intéressante, oublie de noter les particularités diverses
le diagnostic différentiel de ces maladies. Cependant le sujet est
de la maladie, et quelquelois même ne songe point à pratiquer
loin d’être complètement élucidé ; on pourra en juger par les
l'examen nécropsique. O r , au-dessous de la maladie visible, il en
détails «jui vont suivre.
existe parfois une autre qui se manifeste par des signes difficiles
Une «piestion capitale se présente tout d’abord. Nous avons
ii découvrir; telle affection supposée simple est en réalité compli
vu que , d ’après la constitution anatomique du mésocépbale, cet
quée d'une lésion qui passe complètement inaperçue, tant elle
organe paraissait pouvoir être supprimé sans amener la mort de
donne lieu b des symptômes peu nets, peu accentués. Ce casse
l’individu. La physiologie expérimentale, en nous apprenant que
préseote quelquelois pour les maladies de la protéburance annu
des animaux avaient continué de vivre après l’ablation complète
laire, et nous rapporterons, plus loin, l’observation d’un malade
de la prolubérence, est venue conlirmer les données de l ’ana
chez lequel l’ autopsie révéla l ’existence d’une grave lésion du pont
tomie. Voyons maintenant ce que d it, a ce sujet, la grande voix
de varole, alors qu’ on croyait trouver un simple ramollissement
de la clinique. Le pont de varole est-il, oui ou non, un organe
«les centres nerveux. Sans doute il est des cas dans lesquels,mal
indispensable à l ’entretien de la vie?
gré la plus grande attention , on ne peut établir un diagnostic
I c i, il est nécessaire d ouvrir une parenthèse. Les troubles
précis; mais, «pie nous importe 1 insuffisance d’ un diagnostic,
tonclionnels , survenant a la suite de profondes lésions organi
lorsque nous avons à notre disposition «les détails complets sur la
ques , varient avec la qualité — le numéro d’ordre pour ainsi
maladie et sur l ’examen nécropsique !
dire— des parties intéressées. O r, parmi les divers organes, il
des
communique, par eux , a tout l ’organisme ; ces organes , dans
installé, par exemple, comme dans les l niversités d'Allemagne,
aucun cas , ne peuvent être supprimés, même momentanément;
ou ( histoire de chaque malade est minutieusement recueillie,
qu’une lésion , par exemple, détruise le cœur ou les poumons ,
où pas un sujet ne succombe sans «pie
ne
ou le bulbe rachidien , la mort survient a l ’instant même. Il
soient examinés avec le plus grand soin , aucun fait intéressant
est d’autres organes dont la destruction entraîne également la
ne serait perdu pour la science.
m o rt, non plus rapidement comme les précédents, mais au
\jà conclusion de ce qui précède est rigoureuse : si le service
observations et des autopsies «Hait mieux organisé , s’il était
tous les organes
en est qu’on pourrait appeler
fondamentaux, parce que la vie se
bout d’ un temps plus ou moins long ; ces organes ne sonl pas ,
C’e s t, en effet, de 1 Allemagne et de la Suisse que nous sont
venus l«îs travaux les plus complets sur les affections de la pro-
par eux-mêmes, absolument nécessaires à la vie, cependant la
suppression de leurs
fonctions a un tel retentissement sur
�H1 —
l’organisme que la n u lrilio n s’épuise et que l'individu linit par
Mais si le mésocéphale n’est pas un organe de première né
succomber. Ces organes, sans être, comme le cœur ou les
cessité, comment expliquer ces cas de mort foudroyante sur
poum ons, des viscères
n’en sont pas moins
venue à la suite d’ hémorrhagie de la protubérance? Le docteur
Certaines parties du corps , au contraire , peuvent manquer
des sciences : Un homme robuste et bien portant tombe brus
sans que la vie cesse; seulement leur suppression amène un
quement privé de connaissance; une heure après, il était mort.
indispensables.
fondamentaux,
Mesnet communiqua, en 1861 , le (ait suivant à l’Académie
trouble fonctionnel persistant, parce que cçs parties ne peuvent
On trouve, à l'autopsie, dans la protubérance annulaire un foyer
pas être remplacées dans l ’organisme ; telles sont, par exemple,
hémorrhagique contenant uu caillot demi-solide
du volume d'un
le nerf optique ou l’appareil de l'ouïe. Quoique moins importants
pois rond.
que les autres , ce sont là cependant des organes
d’une couche de substance cérébrale piquetée de sang, ramol
principaux.
Il est d'autres parties enfin dont l’ utilité est moindre en ce sens
que la nature p e u t, par ses propres lorces, suppléer à leur dis
L ’excavation faite par l’hémoirhagie est enveloppée
représentant le volume de la moitié de la
dernière phalange du doigt auriculaire.
lie, le tout ensemble
parition; telle est 1 artère principale du bras ou de la jambe;
On l’a déjà dit depuis longtemps : l’étendue d’une lésion n’est
au bout d'un certain temps, le membre, quoique privé d'un im
pas à redouter autant que la rapidité avec laquelle se produit le
portant vaisseau , continue à vivre comme par le passé. Ces der
trouble organique; l’ économie est
niers organes sont d’un ordre relativement
et imprévus; elle peut s’accoutumer à des désordres considérables,
secondaire.
Cela posé , à laquelle de ces quatre catégories appartient la
protubérance? Cet organe est-il
principal ou secondaire ?
fondamental, indispensable,
surprise parles coups brusques
mais à la condition que ces derniers se fassent peu à peu. Une
lésion très vaste siégeant sur un des premiers organes , si elle
se produit avec le n te u r, n ’occasionne pas toujours la mort de
Dès l’abord , l'observation clinique parait donner raison à la
l’individu ; au contraire , qu’un trouble, beaucoup moins con
première supposition, car on trouve enregistrés, dans la science,
sidérable, survienne tout d'un coup dans cet organe, le sujet
uu certain nombre d'exemples de mort survenue en cinq heures,
succombe parfois instantanément. Ce fait explique comment
en deux heures, en quelques minutes même , à la suite d’une
une apoplexie légère du mésocéphale a pu produire la mort en
apoplexie de la protubérance. D'un autre côté , des observa
quelques minutes , alors que des individus dont la protubérance
tions récentes prouvent que certains sujets ont pu vivre pendant
était presque complètement envahie par des dépôts cancéreux
plusieurs années, tout en ayant , dans leur protubérance, une
ou tuberculeux ont vécu plusieurs années, sans meme présenter
lésion grave et profonde. Le docteur Ladame c ite , dans son Me
de symptômes proportionnés à la gravité de la lésion.
moire, le cas d’ un nommé Leu
dont le mésocéphale, sauf
Cependant, ne nous bâtons pas de conclure de ces derniers
une couche d une ligne d épaisseur, était occupé par un vaste
faits que l’ homme peut vivre longtemps sans protubérance
noyau cancéreux ; la maladie dura trois ans. Ce fait, contrai
annulaire. Sans doute le mésocéphale ne peut être assimilé au
rement aux exemples dont nous venons de p a rle r, parait prou
cœur ou aux poum ons, car si une maladie semblable à celle
ver que la protubérance n’ est pas indispensable à l'entretien de
de Leu avait eu son siège sur l ’un de ces organes, il est
la vie , puisque Leu a pu vivre pendant un certain temps avec
hors de doute (pie la mort lût survenue rapidement. Mais les
une lésion aussi profonde du pont de varole.
lésions du pont de varole donnent lieu cependant à une termi-
�liaison funesle. Leu a manifestement succombé aux progrès de la
de la tumeur suffisait pour transmettre au cerveau l ’impression
maladie de la protubérance; un malade que nous avons pu exa
sensitive, à la périphérie l’excitation motrice.
miner nous-même — celui dont on verra plus loin l’observation
Quoi qu il en soit, ce fait porte en lui-même son enseignement
complète — est mort h peu près comme Leu. En conséquence,
pratique, car il prouve que l’intégrité des fonctions delà pro
les lésions occupant la presque to ta lit1du mésoeéphale, si elles
tubérance annulaire peut coïncider avec une lésion profonde de
n'entraincnt point instantanément la mort, la produisent au
cet organe. L ’observation suivante diffère notablement de celle
bout d ’un temps plus ou moins long. La protubérance nous pa
de Leu. Elle est assez curieuse pour mériter d etre rapportée
raît donc devoir être rangée dans la deuxième catégorie de notre
(oui au long.
division , c'est-'a-dire parmi les organes
indispensables.
Ce qu’il y a de plus extraordinaire dans l ’observation du doc
Observation (1).
— Jean-Baptiste Gistello, journalier, âgé de
teur Ladame , c'est que , malgré la lésion énorme du pont
27 ans, entre Je 29 novembre 1804 à LHôpital de la Conception;
de varo le , la sensibilité était conservée sur tous les points
il est placé dans une des salles de M. Seux, suppléé dans ce
du corps; le sujet pouvait, d é p lu s , exécuter facilement les
moment par M. Van-Gaver.
mouvements volontaires ; le mésoeéphale, quoiqu’envahi par
Cet homme, doué d'une bonne constitution, alfirme n’avoir
un cancer considérable , continuait donc à fonctionner. Singu
jamais été malade ; c’est la première fois qu’il entre à l ’hôpital.
lière bizarrerie lorsqu’on songe que dans des cas où la lésion
Depuis environ trois semaines, Gistello a été pris d’une cépha
de la protubérance était beaucoup moins profonde , on a vu les
lalgie violente ; il a continué de travailler pendant une quinzaine
fooctions de cet organe considérablement perverties !
de jours, mais depuis une semaine les douleurs sont devenues
Le fait de Leu nous offre- t-il un exemple des immenses res
sources de la nature? Le pont de varole p e u t-il, à un moment
donné, être
remplacé
par un autre organe ? Le docteur Go»le-
tellement intenses qu’il s’est vu forcé de suspendre complète
ment son travail.
Examen du malade.
—
Fièvre assez forte ; bouche amère,
lier avait soutenu , en 1855, dans une séance de la Société de
langue sale, anorexie, pas de vomissements, quelques douleurs
médecine de Strasbourg, la possibilité d ’un pareil fait ; pour lui,
de ventre, un peu de diarrhée ; céphalalgie très intense ; laiblesse
des fibres nerveuses situées hors de la protubérance pouvaient
générale.
suppléer à l’action interrompue de celles du mésoeéphale et trans
mettre les impressions aux hémisphères cérébraux.
Los yeux présentent un phénomène assez singulier: les deux
globes oculaires sont agités de mouvements alternatifs d éléva
Cette hypothèse s’est-elle réalisée chez Leu? Assurément
tion et d’abaissement ; ces mouvements sont très réguliers, ils
nous n’avons pas la preuve mathématique du contraire , mais
ont lieu sans interruption aucune, en même temps pour les deux
nous avouons que cette idée théorique nous parait peu compa
veux et d'une manière parfaitement égale. La vue est un peu
tible avec la constitution anatomique -lu mésoeéphale. L ’expli
affaiblie. Gistello ne se préoccupé nullement de celte mobilité
cation du docteur Ladame nous semble plus logique : le mé
decin de Neufchâtel croit que les fonctions de la protubérance
(1) Nous devons à l’obligeance do M. Traslour, un des internes
s’ étaient concentrées chez Leu sur la petite portion du mésocé-
les plus distingués de nos hôpitaux, quelques précieux détails rela
phale restée saine; la mince couche nerveuse située au dessus
tifs à ce malade.
�— 1U —
— U5 —
Examen du malade le 23 janvier
1865.— Le faciès est bon,
des globes oculaires qui n ’occasionne pour lui aucune gène; il
le sujet u’est pas amaigri, l'appétit est lies développé; depuis
nous dit que ces mouvements ont commencé a se manifester
deux jours, quelques vomissements sont survenus ; pas de gène
quelques mois avant le début de sa maladie ; dès le principe ils
dans la déglutition; pas de douleurs d’estomac; un peu de
ont été ce qu'ils sont aujourd’ hui. Oisons de suite que ces mou
constipation. Le pouls est à 45 pulsations. Les fondions des
vements n’ont pas cessé de se produire pendant tout le temps du
poumons et du cœur s’accomplissent avec la plus grande régu
séjour de Gistello à l ’Hôpital.
larité. La céphalalgie frontale est toujours forte ; elle parait
M. Van-Gaver diagnostique une fièvre muqueuse légère. Sous
s’exaspérer b certains moments. La sensibilité est fortement
l'influence d’ un traitement approprié, les symptômes d’embarras
amoindrie sur tout le côté droit du corps ; ce côté est en outre
gaslro-intestiual se dissipent rapidement. Au bout de huit jours,
frappé d’une paralysie musculaire qui se fait particulièrement
Gistello n’a plus de diarrhée; l’appétit est revenu, mais la
remarquer sur le membre supérieur ; il y a un peu d’abaissement
céphalalgie persiste avec une grande violence ; les douleurs siè
de la commissure labiale du côté droit. La marche est impossi
gent sur le front, principalement a gauche, et elles sont plus
ble; le malade traîne la jambe droite et ne peut pas faire seul
fortes le matin que le soir.
plus de trois pas; dès qu’on lui fait fermer les yeux, il tombe.
Le 10 décembre 1864, M . Seux reprend son service. Gistello
L ’intelligence est parfaite et le malade s’exprime très facile
souffre toujours beaucoup de la tête; de plus, pendant les quel
ment; pas de troubles de l’ouïe. La vue est encore un peu
ques jours passés à l’hôpital, l’affaiblissement de la vue a aug
faible; les pupilles sont dilatées; il n’y a plus de diplopie; les
menté. On n aperçoit au fond de l’œil aucune opacité, mais les
globes oculaires sont toujours animés des mêmes mouvements
pupilles se contractent très incomplètement et la vision des
et la conjonctive est irritée par le fait de cette mobilité inces
objets n’est pas nette ; il y a un peu de diplopie le soir. M. Seux
sante ; il n’y a pas de strabisme.
diagnostique une amaurose incomplète et fait passer le malade
dans un service de chirurgie.
L ’examen pratiqué sur l’œil au moyen de l’ophthalmoscope
fait constater un état variqueux des vaisseaux de la papille. Au
En présence de ces symptômes, M, Seux rejette la pensée
de l’ataxie locomotrice, et diagnostique un ramollissement céré
bral a gauche ; il prescrit un purgatif pour le jour même, et dès
le lendemain fait placer un séton à la nuque.
bout de quelques jours la vue s’améliore, la diplopie disparail et
Les vomissements persistent jusque vers le 5 février; à partir
la vision devient plus nette. Malheureusement les douleurs de
de ce moment ils cessent de se produire. Vers cette époque, les
tête sont toujours fortes et l’affaiblissement général est deveDu
douleurs frontales ayant piis un caractère franchement inter
tel que Gistello peut à peine se soutenir sur ses jambes. L ’incer
mittent, on prescrit un peu de sulfate de quinine, ce qui amène
titude de la démarche et les troubles qui accompagnent la déam
un soulagement momentané. Le pouls est toujours très lent; le
bulation font songer à une ataxie locomotrice commençante;
malade ne peut venir b la selle qu’avec des purgatifs. L ’appétit a
des pilules de nitrate d’argent sont prescrites sans grand ré
augmenté ; Gistello nous dit souvent b cette époque
sultat. Dans les derniers jours de jan \ier, l ’état général du ma
gerait toujours (sic).
qu’il man
lade ne s'étant pas amélioré et les troubles de la mobilité prenant
Dans le courant du mois de mars, la maladie fait de grands
plus de consistance, on renvoie Gistello dans le service de M.
progrès; la paralysie du sentiment et du mouvement, qui jus
Seux.
�— 1il —
qu'à ce moment était localisée sur le côté droit du corps se pro
Les poumons sont un peu engoués,
mais ils ne présentent
page a loui le côté gauche; la céphalalgie est toujours très vive;
aucune trace de tubercules -,
l'intelligence est conservée, ainsi que la parole.
intacts; le foie, les reins et la rate sont un peu atrophiés, mais
Vers le 15 avril, Gistello commence à parler plus difficilement ;
les ganglions mésentériques sont
complètement sains.
au bout de quelques jours, il ne répond plus aux questions qu'on
lui adresse, cependant il est facile de voir que I intelligence est
Celte observation est intéressante à plus d’ un titre. Elle cons
conservée. Le malade tombe dans un état de prostration com
titue d’abord une exception à la loi formulée par M. Louis sur
plète ; il ne retient plus les urines n i les matières fécales.
la relation qui existe entre les tubercules pulmonaires et ceux
des autres organes. Chez Gistello, une partie importante de la
La mort survient le 8 mai 1865.
Autopsie.
— Méninges injectés ; chapelet de granulations
masse encéphalique était tubercuiiséeet cependant les poumons
grises sous l’arachnoïde, h gauche le long de la scissure de
ni aucun autre organe ne présentaient la moindre trace de
S y lvins. Cerveau ramolli en masse et présentant un
état piqueté
granulation ; on voit assez souvent chez les enfants certains vis
assez prononcé ; le lobe gauche est un peu plus mou que le
cères atteints de tubercules, les poumons étant d'ailleurs com
droit. Ventricules latéraux distendus par une sérosité abondante.
plètement sains; chez l ’adulte, celte disposition est rare, il est
Le corps strié et la couche optique du côté gauche sont le siège
bon de la noter lorsqu'elle se présente.
d’un vaste loyer de ramollissement; de plus, plusieurs petits
L ’affection à laquelle a succombé notre malade a paru s'être
points de l’hémisphère du même côté présentent une dillluence
développée avec une rapidité extrême. Pendant le mois d’octobre
assez grande.
18(Ji, Gistello se trouvait dans un parlait étal de santé; dans les
La protubérance annulaire a extérieurement son aspect nor
premiers jours de novembre, il commençait à souffrir de la tête;
mal ; cependant, en enlevant la couche la plus superficielle de
au mois de mai de l’année suivante, il était mort! Le début delà
cet organe, nous mettons a découvert une masse dure, bosselée,
tuberculisation du mésocéphale peut-il logiquement être reporté
de la grosseur d ’une noix ; cette masse, entourée d’ une enve
au déla du mois de novembre ? Oui, si l’ on suppose que cette
loppe assez résistante et vascularisée, n’est autre chose que le
maladie n’a pas présenté, dans les premiers temps, de symptô
mésocéphale dégénéré; tout autour de ce vaste noyau existe
mes appréciables, ce qui peut être, à la rigueur, car nous avons
une mince couche de substance blanche un peu ramollie, seule
des données bien peu exactes sur le d but et la marche de ces
partie du mésocéphale qui n ’ait point participé à la dégénéres
affections, même lorsqu’elles sont simples. Or, la maladie de
cence. Au-dessous de ce premier noyau nous en trouvons un
Gistello a été d’autant plus obscure qu’elle était singulièrement
second beaucoup plus petit, situé dans le i* ventricule, enkysté
compliquée: ramollissement cérébral, ramollissement de la
comme le premier et du volume d’un gros pois. Ces deux
moelle et t u cervelet, tuberculisation de la protubérance annu
noyaux présentent à la section une ceriaine résistance ; ils sont
laire, noyau tuberculeux dans le 4* ventricule, telles sont les
d’ un jaune serin, un peu ramollis au centre, et offrent tous les
nombreuses lésions que nous a révélées l'examen nécropsique.
caractères ries produits tuberculeux.
Selon toutes probabilités, dans le cas actuel, le tubercule aura
La moelle épinière est dilfluente dans toute son étendue; le
cervelet est également ram olli.
ouvert la scène ; agissant ensuite comme corps étranger au
centre de la masse encéphalique il ama déterminé les nom-
�— 148 breuses altérations cérébrales ci-dessus mentionnées. L ’ influence
oculaire externe, cordon nerveux qui prenant naissance dans le
exercée sur l'organisation matérielle des centres nerveux par
sillon transversal, situé entre le bulbe et la protubcrcncc, se
les tubercules cérébraux est d ’ailleurs un fait connu depuis
trouve en rapport direct avec le mésocéphale.
longtemps. M. le docteur Romberg le signalait, en 1835, en
Le strabisme convergent a été indiqué comme un symptôme
faisant remarquer combien était fréquente la coïncidence des
des affections cérébelleuses. L ’origine du moteur oculaire ex
tubercules du cerveau avec d’autres affections cérébrales; de
terne n ’est pas éloignée, assurément, du cervelet, mais elle est
cette m ultiplicité des lésions, ajoutait-il, résulte un mélange de
plus rapprochée encore du pool de varole ; conséquemment, un
symptômes fort dilficile à classer. C ’est ce que nous avons
produit morbide développé dans la protubérance devra, plus
observé chez G islello ; il était tout à fait impossible de séparer,
facilement qu’une tumeur cérébelleuse, comprimer ou léser ce
chez ce malade, les symptômes occasionnés par la lésion du mé-
nerf. Si donc le strabisme convergent peut faire songer â une
à fortiori diriger l’attention du
socéphale de ceux qui se rapportaient au ramollissement du cer
maladie du cervelet, il doit
veau, ou à celui de la moelle. Pour établir une pareille distinc
decin vers une lésion de la protubérance. Les faits sont d’ac
tion, il aurait fallu connaître quelques signes pathognomoniques
cord sur ce point avec la théorie.
propres aux affections du mésocéphale, ce qui nous manque.
On trouve relatée tout au long dans les
mé
Archives de Médecine
Le docteur Ladame qui a observé un grand nombre de ces
(août 1861) l'observation d’un jeune garçon de six ans, chez
maladies attribue une certaine importance au strabisme diver
lequel on avait constaté un strabisme convergent de l’œil gau
gent ; cependant le médecin de Neufchàlel a trouvé ce signe une
che; en examinant le cerveau, on s’aperçut qu’une tumeur
seule fois sur 26 cas; c est une raison pour émettre quelque doute
fibro-plastique siégeant sur la face inférieure du pont de varole
sur la valeur d’ un pareil symptôme. Produit par une paralysie du
et du bulbe aplatissait en le comprimant le nerf du la 6e paire.
nerl moteur oculaire commun, le strabisme externe a été signalé
Les
Mémoires de la Société de Médecine de Strasbourg
particulièrement dans les cas où il y avait une lésion siégeant sur
rapportent le fait d’un artilleur dont le lobe gauche du mésocé
les pédoncules cérébraux, parties de l’encéphale qui donnent
phale était occupé par un noyau tuberculeux: le sujet avait
naissance à ce nerf; on comprendrait a la rigueur qu’une maladie
présenté un strabisme interne de l’œil droit.
du mésocéphale, par le retentissement qu elle pourrait avoir sur
M. Gruveilhier, dans son grand
Traité d'Anatomie Patholo
ces pédoncules, amenât une cessation dans le fonctionnement du
gique , parle
moteur oculaire commun, et par suite un strabisme divergent;
dans le lobe gauche du cervelet, et chez lequel on n avait
mais ce symptôme, en tout cas, serait produit indirectement et
observé aucun trouble du côté des yeux.
il ne faudrait point en chercher la cause dans la protubérance
elle-même.
d’ un soldat qui portait deux masses tuberculeuses
M. Guéuiot fit paraître l’année dernière, dans la
Gazette
hebdomadaire de Médecine et deChir-urgie (août 1865), l’obser
Le strabisme convergent au contraire relève plus immédiate
vation d’une femme dont l'autopsie (it découvrir dans le cervelet
ment du pont de varole; sur 26 cas de maladie du mésocéphale,
plusieurs noyaux tuberculeux. Cette femme avait présenté un
le docteur Ladame a trouvé six fois ce symptôme. Le strabisme
trouble assez singulier de la vision, mais il n'y avait pas eu de
interne, en effet, est occasionné par une paralysie du muscle
strabisme.
droit externe, et ce muscle est sous la dépendance du moteur
Ainsi donc le strabisme convergent n accompagne pas tou-
�150 —
jours les affections cérébelleuses, et il sc remarque assez sou
vent dans celles de mésocéphale.
Comment cette fracture a-t-elle pu se produire? aucune cause
externe directe n’a agi ici ; aucune cause interne générale n’est
Sans tirer de ce qui précède une conclusion trop absolue,nous
admissible , après l’eiamen attentif du malade ; ca r, sans être
pouvons cependant en déduire les deux propositions suivantes:
d’une constitution athlétique, ce jeune homme est vigoureux ; il
Le strabisme divergent parait se lier b une lésion des pédon
n’offre ni antécédents vénériens, ni traces d’affection scrofuleuse,
cules cérébraux ;
cancéreuse, e tc...; ses parents, d’un âge avancé, vivent et
Le strabisme interne semble indiquer une maladie du cervelet
ou de la protubérance annulaire.
[Iji sut/e au prochain numéro.)
jouissent d’ une bonne santé. Le bras droit n’a été, antérieurement
b cet accident, le siège d’aucune douleur et d’aucune gêne ; on
Dr S b u i fils.
ne peut donc accuser une osteïte ou toute autre affection locale.
Reste donc seule l’action musculaire comme cause appréciable
C lin iq u e
C h ir u r g ic a le .
M . C.OSTE, PROFESSEUR
de cette fracture. — Une contraction énergique et subite b la
loisdn triceps brachial, du deltoïde et du sous-épineux , tendant
h porter l ’avant-bras et le bras en haut et en arrière, s’est pro
duite pendant la flexion de l’avant-bras sur le bras ; les muscles
Fracture de l'humérus produite par l'action inusculaire. (Ob
servation recueillie par Henri Nirolas , interne du service).
brachial antérieur et biceps ont été surpris pendant leur contrac
Les observations de fractures d os longs dues uniquement à
cité par une contraction musculaire volontaire très énergique ,
l ’action musculaire, sans altération antérieure appréciable du
ayant pour but de le porter en liant et en arrière , et agissant
tion et ont opposé une résistance b ce mouvement d ’élévation en
arrière de l’avant-bras. L ’humérus a é té , en ce moment, solli
squelette , sont assez rares pour que j'aie cru devoir recueillir
brusquement avant la cessation d’ une contraction involontaire
une observation de fracture de l’ humérus, produite par l'action
qui le retenait en avant, il s’est brisé au niveau des insertions
musculaire seule.
du brachial antérieur.
Tisserand J.-B . , âgé de 19 a n s . jo u rn a lie r, se présente, à
I Hôtel-Dieu, le
Je crois cette explication admissible dans ce cas : si ce mode
février 1N66, et raconte que la veille, lan
de production peut être contesté:, ce qui ne peut certes pas
çant avec force une pierre assez volumineuse sur un de ses ca
l’être , c’est la fracture se produisant par la seule action muscu
marades , au moment où il portait l ’avant-bras en haut et en
laire, et l’argument le plus fort contre la supposition d’une cause
arrière , d a , tout a coup , ressenti une douleur très vive qui l a
interne générale ou d’une affection locale est une consolidation
contraint b laisser retomber le bras et b lâcher la pierre que sa
parfaite, uncal irréprochable obtenus en trente-cinq jours, à l’aide
main tenait. Depuis ce m om ent, impossibilité de relever son
d’un simpleappareil contentif appliqué le lendemain de l’accident,
m em bre, gonllement , douleur ; il marche en soutenant le bras
renouvelé six jours après et définitivement enlevé le 3 avril.
droit avec la main gauche ; la crépitation se produit très dis
Trois jours après l’enlèvement de l’appareil , j ’ai surpris le ma
tinctement , des mouvements de flexion ont lieu au niveau du
lade aidant aux infirmiers et soulevant un paquet de linge ; il
tiers inférieur avec les deux tiers supérieurs de l’ humérus, et
est parfaitement en état de reprendre son travail.
une fracture siège incontestablement en ce point.
H enri NICOLAS.
�—
152
—
B IB L IO G R A P H IE .
Dictionnaire annuel des progrès des sciences et institutions mé
dicales, par M. P. Garnier, rédacteur de l'Union Médicale.
— Deuxième année, 1865, (Paris, chez Germer Baillière).
Ce titre seul indique l'im portance du livre. Chaque année la
médecine s’enrichit de découvertes nouvelles; pour exercer
convenablem ent l'art de guérir il im porte de se tenir au courant
de la science, de se familiariser avec les procédés modernes, de
connaître et d'approfondir les idées de formation récente, en uu
mot, d'avancer toujours de plus en plus dans cette voie du pro
grès qui est la voie naturelle de chaque hom m e, comme elle est
celle de la société tout entière. Oui, nousaulres médecins, pour
nous-m êm es et pour l’art que uous exerçons, nous devons être
des hommes de progrès; et comme le résultat le plus immédiat
de notre profession est le soulagem ent du mal physique, c’est
avant tout vis-à-vis du malade que doit se manifester cette ten
dance progressive de notre esprit.
Mais’quel moyen emploiera le médecin pour se tenir au cou
rant de la science? D evra-t-il épuiser la liste interminable des
ouvrages qui reçoivent chaque année le jour? C’est là un travail
tout à fait incompatible avec les exigences de la clientèle et que
pourrait seul accomplir un homme de cabinet, non un prati
cien. Lire assidûment toutes les feuilles médicales est, pour la
même raison, un tour de force impossible à exécuter. Suivre les
séances des sociétés de médecine peut convenir au praticien
des grandes villes, mais com m ent fera le médecin éloigné des
principaux centres?
Ces difficultés disparaîtraient en grande partie si nous avions
sous la main, groupés d’un façon m éthodique, réunis dans un
volume peu considérable, presque dans un agenda de poche,
des renseignem ents précis sur les découvertes médicales de
155
chaque année. Des livres semblables existaient déjà pour l’in
dustrie, les sciences, les lettres. M, P. Garnier, rédacteur de
l’Union Médicale, entreprit, il y a deux ans, de créer pour la
médecine une publication de cette nature. L’année dernière
parut un premier volume; celui de cette année nous est arrivé
précédé d’une savante introduction de M. A. Latour; et, comme
le fait spirituellem ent remarquer ce dernier, le Dictionnaire
des progrès donne lui-même l’exemple du progrès, puisque le
volume de 1865 a 250 pages de plus que celui de l’année
précédente. Ce fait prouve que M. Garnier a entrepris sérieuse
ment une œuvre des plus sérieuses; dans un travail de cette
nature, l’idée première est beaucoup, la persévérance est plus
encore; nous ne douions point que l’auteur ne poursuive cou
rageusement son œuvre et que ses efforts ne soient couronnés
du plus légitime succès.
Parmi les chapitres les plus remarquables de ce livre, nous
devons signaler ceux consacrés à YAphasie, à XEudocardite
ulcéreuse, aux Epidémies, à la Syphilis, à la Vaccination, au
Choléra.
En notre qualité de contagioniste convaincu, nous aurions de
nombreuses réserves à faire sur les idées émises dans ce der
nier chapitre. Il est regrettable que les premières lignes de cet
article contiennent une erreur, à notre sens, capitale. M.
Garnier fait naître spontanément à la Mecque le choléra de
1865 et il donne comme causes productrices de la maladie la
malpropreté dégoûtante des pèlerins mahométans et l’influence
délétère du climat. Il est, au contraire, de notoriété à Marseille
— ainsi que l’indique M, le docteur Seux dans son récent tra
vail sur le choléra — que le fléau asiatique est né, l’année der
nière comme toujours, dans l’Inde et qu’il a été importé, en
1865, de l’Inde à la Mecque par les pèlerins indiens venus au
près du tombeau du prophète.
Nous regrettons également que pour éclairer cette question
de l’importation du choléra M. Garnier n’ait pas consulté plus
�—
m
—
longuement le savant ouvrage de nos confrères marseillais,
MM. les docteurs Sirus Pirondi et A. Fabre ; il aurait vu que
ce plaidoyer en faveur de la contagion n’est pas basé seule
ment sur les farts de la dernière épidémie de Marseille, mais
encore sur toutes les épidémies cholériques antérieures a 1865.
Cette part faite à la critique, nous sommes les premiers 'a re
connaître les mérites réels de l’œ uvre et nous applaudissons de
tout cœur à la courageuse initiative prise par le rédacteur de
YUnion Médicale.
Traitement du choléra. — Emploi de l'ipéca dans la première
période, par le docteur Agricol Girard, d'Eyguières. —
(M arseille,M arius Lebon, libraire-éditeur,sur la Cannebière )
Nous sommes heureux de pouvoir m entionner particulière
ment ce travail, fruit des recherches consciencieuses d’un de
nos confrères de VAssociation médicale. Fixé depuis plusieurs
années à Eyguières, M. le docteur A. G irard, a eu le courage de
résistera rinlluence énervante d’une petite ville de province et
le m érite de trouver, au milieu de nom breuses occupations,
le temps d’écrire. Notre confrère a suivi en cela l’exemple de
quelques-uns de ses devanciers : nous pourrions, sans aller
bien loin, citer les noms de Bouteille qui, retiré à Manosque,
loin detoulcenlre intellectuel, écrivit, en 1810, un important
ouvrage sur la Chorée, du docteur Dauvergne, établi actuelle
ment dans la même ville et connu du monde médical par d’im
portantes publications.
Le travail du docteur A. Girard n'est point un livre, c’est une
simple brochure ; mais ce m ém oire de quelques pages contient
d’excellentes idées pratiques. Partant de ce principe que tout
homme qui a vu et observé a en lui-m êm e une somme de con
naissances dont pourraient profiter ses semblables, notre con
frère n ’a pas hésité à prendre la plum e, mû par le généreux
désir fie dim inuer le plus possible les maux occasionnés par le
fléau asiatique.
155
L’idée théorique du docteur A. Girard n’est pas nouvelle;
l’auteur nous le dit lui-même. On a comparé souvent le choléra
à une fièvre interm ittente ; l’analogie est grande, en effet, entre
ces deux maladies et notre confrère a indiqué nettement les nom
breux points de contact qu elles présentent. L’auteur ne va pas
jusqu’à dire que le choléra est une Gèvre interm ittente, mais il
le considère comme un empoisonnement produit par un miasme
spécial. Dans l’étal actuel de nos connaissances, cette idée théo
rique nous parait être la plus soutenable.
Quanta la médication par l’ipéca, il a fallu au docteur A. Gi
rard un certain courage pour l’adopter franchement et beaucoup
de persévérance pour la faire accepter d’un public trop souvent
opposé par système à l’interventiou médicale et pharmaceuti
que. Cette méthode est d’ailleurs des plus rationnelles; em
ployée depuis plusieurs années dans le traitement du choléra,
elle compte de nombreux succès. Cependant quelques médecins
hésitent à en faire usage. Est-ce crainte de leur part, est-ce
difficulté du côté des malades? Nous l’ignorons. Toujours est-il
que nous avons pu observer nous-même plusieurs cas de cho
léra dans lesquels l’ipéca, quoique parfaitement indiqué, n’avait
pas été administré. Ce fait prouve au moins que ce traitement,
si utile parfois, ne jouit pas dans le public d’une faveur bien
grande ; nous devons, en conséquence, savoir très bon gré au
docteur A. Girard fie ses efïorts pour populariser une méthode
aussi féconde en bons résultats.
Ce n’est pas que nous considérions l’ipéca comme un antidote
de la maladie asiatique, comme un moyen assez héroïque, étant
donné au début, pour conjurer toujours le fléau indien. Nous
ne croyons pas non plus que ce remède convienne, absolument
parlant, dans tous les cas de choléra à la première période. Que
l’on n hésite point à employer l'ipéca, quand il y a lieu, rien de
mieux ; mais encore faut-il eu faire usage d’une manière ration
nelle, et surtout pour remplir certaines indications, pour com
battre certains accidents. A propos de ces derniers, nous eus
—
—
�—
456
—
sions préféré <]uc M. Girard n’eût pas m entionné,d’une manière
aussi absolue,'la diarrhée eau-de-riz ; ce symptôme fait quelque
fois défaut dans le choléra ; l’année dernière, en particulier, nous
avons pu observer chez les deux tiers environ des cholériques,
au lieu de celte diari liée type, des selles jaunes ou brunâtres.
Pourquoi notre confrère d’Eyguières redoute-t-il autant, dans
le choléra, l'emploi des stim ulants â l’intérieur? Sans doute il
ne faut point abuser de ce m oyen, mais nous croyons que l’au
teur s’exagère un peu trop l’influence de l’éther ou de l’acétate
d’ammoniaque sur la production de l’état typhique. Cet état est
un des modes de terminaison du choléra et conséquemment il
résulte de la maladie elle-m êm e, non des médicaments em
ployés pour la com battre.
Comme on le voit, sur bien des points nous différons de sen
timent avec le docteur A. Girard ; mais du choc des opinions
jaillit la lumière ; entre notre confrère de l'Association médi
cale et nous, cette étincelle ne peut être qu’un éclair de rayon
nement sympathique et de chaleureuse amitié. D’ailleurs, ne
l’oublions pas, l’homme qui, de lui-m êm e, prend fa plume,
poussé par le seul désir d’être utile à ses semblables, a droit â la
reconnaissance de tous et, comme le dit Sydenham, il mérite le
nom de bon citoyen.
Etude médico légale sur la simulation de la folie, par le
docteur A. Laurent, médecin en chef de l'Asile des Aliénés de
Marseille. (4866, Paris, Victor Masson et fils.)
Tableau d'Ophthalmoscopie, par le docteur E. Martin, mé
decin-oculiste des bureaux de bienfaisance de Marseille. —
(1866, Paris, J. B. Baillière et fils).
Le manque d'espace nous oblige de renvoyer â notre pro
chain numéro l’analyse de ces deux ouvrages.
Dr Z ede .
157
—
C hronique M ensuelle.
A quelques jours d’intervalle, des nouvelles fort importantes,
mais contradictoires , nous sont arrivées-sur l'état sanitaire d’A
lexandrie, Le Moniteur , et d’après lui quelques feuilles médi
cales , annonçaient, en elîet, qu’a ucun cas de choléra ne s’était
produit parmi les pèlerins de la Mecque. Ces mêmes jour
naux espéraient que le pèlerinage s’accomplirait, cette anannée , dans de meilleures conditions que l’année passée. Une
semaine ne s’est pas écoulée que déjà on répète partout le nom
de l’effrayante maladie. Le choléra est à Alexandrie, il y fait
des ravages et Marseille s’émeut justement de ce lointain écho.
Parmi les épidémies qui sévissent sur l’espèce humaine , il n'en
est pas qui impressionne plus vivement le vulgaire que le cho
léra ! C’est qu’en effet aucune n’a une marche aussi rapide,
aucune ne s’étend aussi largement sur la surface du globe. Pas
un pays ne peut échapper à la sinistre visite de ce rôdeur impi
toyable , quand il a une fois mis le pied sur le littoral. N ’en dé
plaise aux anli-contagionisles , à M. Cazalas , l’ennemi juré des
quarantaines , à M. Maurin , l’hygiéniste théoricien , qui aime à
combiner les éléments pathologiques avec la couardise de la po
pulation pauvre , jamais le choléra , qu’il dérive du grec ou de
l’hébreu , ne se développera spontanément dans les vieux quar
tiers de notre ville. Jamais l’insalubrité ne sera cause première
ni exclusive de I infection cholérique. A ussi, inquiet de l’orage
qui nous menace de loin , répéterons-nous avec la Gazette du
Midi : Caveant consules.
Si nous avons des craintes pour l’avenir , le présent du moius
est très rassurant. Jamais les registres de l’hôpital n’avaient
compté si peu de décès. Le mois de mai ne s’est signalé par
aucune constitution médicale particulière. La température , il
faut le dire, a été relativement basse et les beaux jours se sont
succédé sans cette chaleur accablante des autres années. Les
bains de mer et les établissements d’eaux ne sont pas encore
fréquentés ; mais patience, le thermomètre montera et ce délas
sement aquatique nous sera bientôt permis.
Les gazettes médicales nous ont annoncé, en deux lignes, la
�158
mort <le M. M ichon; seul, M. Diday consacre quelques colonnes
à son illustre ami. Il esquisse sa vie et son caractère, avec ce
style vif et mordant que nous lui connaissons, mais qui, au be
soin , sait être pathétique. Concurrent m alheureux, si la chaire
officielle du professorat lui lut refusée, Michon n’en laisse pas
une gloire moins pure ni une m ém oire moins durable. A l’école
de ce grand chirurgien se sont formés de bons praticiens qui
garderont précieusement les préceptes du m aître.
A V Institut, rien d’im portant en médecine. La Commission
des prix sur l’application de l’électricité à la thérapeutique a été
nom m ée; elle se compose de MM. V elpeau, Boyer, Longet,
Serres, Cl. Bernard, Becquerel, Barbier, Cloquet, Coste. Quant
a la Commission du grand prix de chirurgie sur la conservation
des membres par le périoste , les mêmes nom s, sauf M. Bec
querel, qu’il faut remplacer par M. Milne Edwards, ont réuni
la m ajorité des suffrages.
A l’Académie de médecine , M. Depaul est arrivé triom
p h an t, il a tro u v é... la pierre philosophale? — Non. — Le
remède du legs Bréant? — Pas davantage. — Mais le cow-pox
spontané. C'est une génisse d’Orléans qui en donnait depuis
deux mois , en veux-tu, en voilà ! — Aussitôt que M. Depaul
apprend la chose, il se rend à Orléans pour voir l'animal pro
dige , prend ses mesures pour ferm er la bouche à M. Bousquet,
puis retourne avec sa bête. A cette heure, une vache mûrit
ses boutons dans l étable académ ique. M. Lanoix , lui aussi,
aurait rêvé le triom phe! il arrivait, arm es fourbies, dans l’en
ceinte réservée ; mais une protestation de M. Larrey l’a forcé,
au premier m o t, à plier bagage, et il a dû déposer un mé
m oire sur le bureau.
M. Briquet a term iné son rapport sur les épidémies choléri
ques de 1852, 1849 , 1854. L ’auteur s’est arrêté à la question
du traitem ent que M. Barth développera dans un rapport sur
l’épidémie de 1865. M. Briquet ne nous a rien appris de nou
veau , mais il a résum é l’état actuel de la science sur la question
en rendant justice à chacun.
M. Delpech était chargé d'un rapport non moins intéressant.
Il s'agissait de la trichinose. Ce qui nous a surtout fait plaisir,
c’est que la France paraît être préservée de ce fléau. Suivant
M. Delpech , on n ’y rencontre ni trichinose aiguë, ni trichinose
—
—
159
enkystée et guérie, ni commémoratifs d'épidémies anciennes
comme en Allemagne. Nous voilà rassurés et nous pouvons
manger tranquillem ent noire saucisson c ru , ancienne et pré
cieuse ressource des jours de garde. Je me rappelle avoir entendu
un académicien dire à la savante compagnie que le moyen d’évitçr la trichine serait d’interdire la vente de la charcuterie ;
l’honorable membre aurait pu ajouter une proposition non moins
ridicule pour garantir l'ivresse , c’eût été d'empêcher la vente
du vin, et encore auraii-on pu se griser avec du cidre ! . . .
M. Dubois (d’Amiens) a commencé des recherches sur le
genre de mort des grands hommes. C'est par J.-J. Rousseau
qu'il a débuté. Ces études médico-littéraires délassent un peu
de la médecine sérieuse et l’on suit volontiers l’auteur de celte
élude analytique nouvelle et pleine d’intérêt.
Les appareils nombreux qu'on présente chaque jour à l'Aca
démie , pour l’anesthésie locale , prouvent assez l’importance
que chacun attache à cette question. Ces jours-ci, M. Ricord ,
au nom d’un dentiste de Paris , en a présenté un nouveau dont
l’agent anesthésique serait le protoxyde d’azote. L’ustensile peut
être nouveau, quoique le dessin qui nous la fait connaître ne
montre rien de bien original, mais à coup sûr le moyen n’est
pas neuf. Davy, le fameux chim iste, employa le premier le gaz
hilariant pour se guérir de névralgies dentaires très opiniâtres.
Plus lard , W ells, dentiste américain , proposait ce moyen à
Morton, lequel l’écrivit à Jakson. On sait le reste : comment
l’éther remplaça le gaz , comment le chloroforme conquit, peu
de temps ap rès, sa place au premier rang des anesthésiques.
M. Giraldès nous a donné les détails historiques sur celle ques
tion dans un très bon article du nouveau dictionnaire pratique.
Puisque nous en sommes aux appareils, citons celui (jue M. Lefort a présenté à la Société de chirurgie pour la coxalgie. Il nous
parait bon au point de vue de la simplicité et des nombreuses
indications qu’il remplit. Toutefois, son prix , sans doute élevé ,
en restreindra la vulgarisation.
Parmi les nouveaux perfectionnements que subit chaque jour
l’arsenal oculistique, il n’en est pasde meilleurs que ceux qui ont
pour but de restreindre le nombre des instruments à employer
pendant une opération. A ce litre, les deux pinces qu'a pré
sentées M. Gosselin à l’Académie de m édecine, au nom de
—
�160
M. D ubois, peuvent être placées au prem ier rang. Elles sont
destinées a l’iridectom ie et h la pupille artificielle. L'une réunit
la pince courbe et le couteau lanceolaire, l'autre la pince à
griffe pour fixer l'œil, et les ciseaux. Rien n’est plus simple que
ces deux instrum ents, pas de ressorts, pas de ficelles ; ils ferom
leur chemin.
•
La Société de chirurgie nous promet un résum é de la discus
sion sur F hygiène des m aternités.— Les conclusions de celle
importante question seront formulées dans un rapport qui éclai
rera, sans doute, les adm inistrations hospitalières sur les me
sures hygiéniques propres à am éliorer le sort et les chances des
pauvres femmes en couches.
M. Broca a présenté a la Société une pièce anatomique d’un
sujet mort quelques jours après la ligature de la carotide pri
mitive. Une ulcération de la carotide interne dans le canal caro
tidien fournissait le sang des hém orrhagies qui avaient déter
miné ce chirurgien à celte grave opération. M. Broca ajoute
qu’il aurait voulu avoir lié la carotide interne. M. Chassaigoac
rappelle un fait semblable de sa pratique consigné dans le traité
du drainage chirurgical.
La Gazette des Hôpitaux a publié une bonne leçon , et elles
le sont toujours , de M. Grisolle , sur l’atrophie des testicules
consécutive aux oreillons. Nous avouons que le professeur de
l’Hôiel-Dieu e s t, peut-être, le prem ier qui ait signalé ce genre
d’atrophie testiculaire ; mais, à coup sû r, elle n était pas passée
inaperçue pour tout le monde. M. Trousseau , dans sa clinique,
consacre une leçon à l’orchite des oreillons , et même à l’ovarite chez les jeunes filles , consécutive à cette affection. Je veut
bien que M. Trousseau n’ait pas prononcé le mot atrophie,
mais cette atrophie n’est-elle pas elle-m êm e consécutive à l’in
flammation du parenchyme de l’organe? Je m ’étonne que.N. Gri
solle , sur un sujet aussi neuf, et cherchant des citations, n’ait
pas , tout de suite, m entionné, l’opinion encore assez nouvelle
de son collègue et prédécesseur.
A. Q.
Le Comité de rédaction.
—
Marseille. — Tjp Arnaud, Cayer et Comp., rue Soinl-Ferrcol, 57.
161
—
Du mouvement progressif de la Chirurgie pendant 1année
scolaire 1865-1866 fl).
M essieurs
Conformément a l’usage que j ’ai cru devoir adopter, dans
votre intérêt, nous commencerons aujourd'hui nos conférences
cliniques par un examen sommaire du mouvement scientifique
de la présente année scolaire, au point de vue de la pratique
chirurgicale.
Et d’abord, conslalons-le de suite, l’année que nous parcou
rons, pas plus que la précédente, n'a eu l'occasion d’enregistrer
jusqu’à ce jour aucune de ces belles découvertes qui fixent une
époque et la rendent en quelque sorte exceptionnelle
Cependant, des travaux sérieux et d’une importance relative
ont enrichi la science d’une manière aussi utile que variée, et il
serait bon de se rappeler parfois, lorsque les Gérémies modernes
pleurent ou font semblant de pleurer sur la pénurie actuelle de
ce que l’on qualifiait trop facilement jadis de grands hommes,
il faudrait, dis-je, se rappeler que s’il existe malheureusement
dans l’ordre des choses matérielles des insectes destructeurs
nommés termines, à l’apparente faiblesse desquels ne peuvent
résister les m onum ents les plus solidement charpentés, nous
trouvons, en revanche, dans l’ordre moral et intellectuel, une
puissance d’action incalculable dans le zèle des travailleurs les
plus infinies; et les plus larges assises de la science ne peuvent
être bâties par les grands architectes qu’avec et par le concours
des ouvriers les plus modestes.
Il ne me semble même pas inutile d'ajouter que souvent les
trop hautes conceptions des architectes s'écroulent sous le poids
(I) Résumé de la première leçon du Professeur-Adjoint de clinique
chirurgicale, le 21 juin 1800.
�—
m
—
des nouvelles théories q ui, à leur tour, vieillissent et tombent,
tandis que les faits bien et soigneusem ent observés, restent de
bout et rendent, a un m om ent donné, d'incontestables services k
notre art.
Que celte comparaison, M essieurs, vous serve d'e ncourage
m ent, et que le mot d'ouvriers de la science ne vous paraisse pas
trop lmmble ; a mon avis, il n’en est pas de plus noble à quelque
point de vue qu’on l’envisage.
I.
Nous com m encerons cette revue par la constatation des pro
grès récem m ent réalisés par l’anesthésie. El ne vous figurez pas
qu’en disant progrès je veuille faire allusion a deux nouvelles
substances propres a produire l’anesthésie : Ic chloro-carbone
proposé par l’illustre Simpson d'Edim bourg, et le protoxyde
d’azote, vanté par M. Préterre. Sans refuser a ces deux nouveaux
agents toutes les propriétés qu'on leur accorde, il me semble que
les recherches m odernes visent plus particulièrem ent à produire
l'anesthésie locale, sans avoir besoin de provoquer ce sommeil
préalable qui, hélas ! n'a été que trop souvent déjà le précurseur
du sommeil éternel.
A ssurém ent parmi les trop rares privilèges attachés aux hôpi
taux de M arseille, il est perm is a nos collègues et a notis-même
de révendiquer celui d’une complète im m unité d’accidents par
l’emploi des anesthésiques, quoique la seconde ou la troisième
amputation pratiquée en France avec plein succès et sous le
bénéfice d’une anesthésie com plète, date de plus de vingt ans et
d’une époque où notre très distingué prédécesseur M. le docteur
Heymonet était encore chirurgien en chef de notre Hôtel-Dieu,
et mettait au service des idées nouvelles beaucoup de talent,
non moins de zèle et une grande expérience.
Toutefois, et malgré celte longue période pendant laquelle
un grand nom bre d’opérés ont pu bénéficier de l’éther et du chlo
roforme sans le m oindre accident, j’ai toujours souhaité, et avec
quelque impatience, je l’avoue, l’heureux jour où l’application
d’une anesthésie locale perfectionnée permettrait au chirurgien
de se livrer à de longues opérations, tout en épargnant aux opérés
les souffrances produites par l’instrument et les dangers insépa
rables du sommeil anesthésique.
Je crois que cet heureux jour est enfin arrivé, et nous devons
le saluer avec autant d’empressement que de satisfaction.
Déjà la réfrigération locale à l’aide du procédé d’Arnott nous
donnait de magnifiques résultats. Plusieurs parmi vous ont
pu constater que chaque année ce mode d’anesthésie est trèsfréquemment employé dans nos salles soit pour l’arrachement
de l’ongle incarné soit pour l’ablation de petites tumeurs bien
limitées, et sans que le moindre inconvénient ait pu modifier
notre manière de voir sur la complète bénignité de ce moyen.
Maison ne peut pas y avoir recours pour les grandes opérations,
là précisément où l’anesthésie est le plus nécessaire, et c’est à
remplir cette lacune que visent les appareils de Richardson et de
Saies-Girons. Celui du rédacteur en chef de la Revue Médicale
nous semble rem plir le mieux toutes les conditions désirables,
au point de vue même de sa simplicité, et nous ne pouvions
moins attendre de cet esprit ingénieux auquel la médecine doit
de si intéressantes études sur l’introduction des médicaments
par les voies respiratoires.
L’anesthésie locale n ’a sans doute pas dit encore son dernier
mot; mais la route d’une importante réforme est maintenant tra
cée, et le temps accomplira l’œuvre si bien commencée.
IL
Tout en ne voulant pas exagérer l'influence délétère de l'air,
ou pour mieux dire, des élémens atmosphériques sur les plaies
exposées, toujours est-il que personne ne peut contester l’utilité
de la réunion immédiate et la facilité avec laquelle l'inflammation
suppurative s’em pare d’une plaie alors (pie rien ne s’oppose à ce
que, par son contact immédiat, l’air décompose les liquides sécré-
�lés à sa surface; d’où, et comme conséquence du fait, retard
dans la cicatrisation et bien d ’autres complications plus graves
encore.
Q uoiqu’il en soit, si la chirurgie dite sous-cutanée n est peutêtre pas appréciée autant qu’il le faudrait, et si la nouvelle mé
thode proposée parM . Jules Guérin pour le traitement des p/aiw
exposées que l'auteur appelle traitem ent par occlusion pneuma
tique, n ’a pas encore été examinée et discutée avec toute l’at
tention qu’elle com porte, toujours est-il que tous les chirurgiens
cherchent a éviter les grandes brèches laissées à découvert et
tâchent par tous les moyens possibles de faire de la chirurgie
sous-cutanée, si ce n’est théoriquem ent du moins pratiquement
C’est ainsi que M. Alph. Guérin a proposé pour le traitement rie
l'anthrax de renoncer â hacher la peau et de pratiquer, au con
traire, de profondes incisions sous-cutanées, partant du centre
de la tum eur et se dirigeant, par rayons excentriques, vers sa
circonférence. Cette circonférence étant précisément la partie
qu’il importe le plus souvent d’inciser, il restera peut-être a dé
cider si, dans tous les anthrax, il faut absolum ent faire partir les
incisions du centre, et si parfois il ne sera pas permis de limiter
l’opération â des débridem ents sous-cutanés, pratiqués précisé
ment au dessus et en dehors des lim ites du mal. Mais ici encore
c'est a l’expérience qu'il faudra, comme toujours, en appeler, tout
en donnant acte â M. Alph. Guérin du progrès réalisé.
111.
La physiologie et la pathologie du système osseux ont fait, dans
le courant de l'année, de notables progrès, alors même qu’à
l’exemple de M. Sedillot on persisterait a ne pas admettre tous
les heureux résultats de la chirurgie sous-périostée, tels qu’ils
paraissent pourtant acquis â la science d’après les spécimens
fournis par MM. Ollier et ses adhérents.
L histoire de la coxalgie a été surtout ! objet d’une étude
spéciale de la part de M. V erneuil, étude complétée au sein de
165
la Société de chirurgie par les observations de MM. Marjolin,
Le fort, Giraldès cl Bouvier. Aux signes de diagnostic que l’on
possédait déjà, on en a ajouté de nouveaux que l’on ne saurai1
trop signaler à l'attention de tous les chirurgiens : tels que l'aboJilion limitée ou complète de l’abduction de la cuisse, la diffé
rence de rhythm e dans la marche, et l’inégalité de niveau entre
les deux genoux, les cuisses étant fléchies sur le bassin et les
pieds placés sur la même ligne.
Quant au traitem ent, qu’il me soit permis de dire qu’il fut un
temps, j ’en conviens, où la coxalgie, de même que la maladie
connue sous le nom de tumeur blanche du genou, étaient par
trop considérées comme symptômes locaux d’une même diathèse
générale, et l’on en confiait trop exclusivement la guérison à une
médication générale. Mais les travaux deBonnet,si remarquables
el si utiles à tous égards, ont porté peut-être l’exagération dans
un sensopposé, et lessoins locaux ont, à leur tour, absorbé d'une
manière trop exclusive et par cela même fâcheuse, toute 1 ini
tiative des praticiens.
On revient aujourd’hui à des idées beaucoup plus modérées
et plus justes : les recherches anatomo-pathologiques ont certes
éclairé grandem ent la chirurgie qui sait actuellement par quelles
manœuvres et à l’aide de quels appareils on peut maintenir ou
redonner autant que possible à un membre l'a ctivité fonction
nelle qui lui appartient. Mais, de son côté, la médecine propre
ment dite n’a pas perdu ses droits et l'influence diathésique,
mieux définie, a fait comprendre l’inanité de tout traitement local
si, par une hygiène mieux entendue et par une médication gé
nérale appropriée à la circonstance, on ne cherche pas à corriger
l’état général qui préside, en quelque sorte, à ces diverses ma
nifestations locales.
Dans la sage combinaison de ces deux moyens d'action est le
véritable progrès. Et, soit dit en passant, si l’emploi du murialc
de baryte est par trop passé de mode, les raisons données dans
notre thèse inaugurale pour motiver l’essai d’un traitement gé—
—
�—
166
-
ncral sont aussi vraies aujourd’hui qu’elles l’étaient il y a trente
ans.
IV.
L’histoire des corps mobiles articulaires a également reçu une
notable impulsion par les récentes recherches de M. Panas.
Faudra-t-il réellem ent adm ettre que ces corps se développent
spontanément dans les franges vasculaires synoviales, si ce n’est
dans le tissu cellulaire sous-synovial, comme le prétendait déjà
Laënnec ? ou bien existe-t-il des cas où, a la suite d’une chute,
une portion de cartilage articulaire peut se détacher, rester flot
tant dans l’articulation et devenir l’origine d’un corps mobile?
L’opinion de M. Panassur ces corps, qui ne seraient en défini
tive que des concrétions développées dans la synoviale, est ap
puyée par trop de preuves anatom o-pathologiques pour ne pas
l’adm ettre dans le plus grand nom bre de cas.
Et tout dernièrem ent encore, notre excellent collègue, M.
Queirel, m ontrait a la Société Im périale de Médecine de Mar
seille une articulation du coude farcie, en quelque sorte,de
ces productions à divers degrés de leur développement, et dont
une, parfaitem ent libre, présentait la forme un peu réduite et
les qualités d'un de ces corps enlevés par nous , quelque temps
auparavant, du genou d’un m alade couché au n° 21 de la salle
Cauvière.M ais, dans quelques cas aussi, l’origine cartilagineuse
de ces corps est incontestable, et, sans citer le fait si connu de
M onro, je n’en veux d’autre exemple que celui si péremptoire
présenté, en 1845, à la Société A natom ique, par M. Richet.
Aussi, et h cause même de cette double origine, je ne vou
drais pas plus de l’ancienne dénom ination de corps étrangers
articulaires que de la nouvelle, beaucoup plus simple iVarthrophites, et il me semble qu’en continuant à désigner ces pro
duits morbides sous le nom de corps mobiles articulaires, ou
admet im plicitem ent les deux étiologies , et on donne ainsi rai
son aux faits.
167
Je ne quitterai pas ce chapitre concernant le système osseux
sans vous parler aussi des importantes communications faites ’a
la Société de Chirurgie, par MM. Richet et Chassaignac, a pro
pos de phénomènes graves d’intoxication survenus à la suite des
fractures, en apparence les plus simples, du maxillaire inférieur.
À la vérité, quelques chirurgiens ont contesté la simplicité de
fractures suivies d’accidents aussi redoutables. — Mais , à notre
avis, il ne nous parait pas parfaitement juste de nier la simpli
cité primitive, initiale, d’une fracture, par cela seul qu’elle a
pu, par la suite , être compliquée d’accidents graves.
Un fait recueilli à notre Hôtel-Dieu, il y a trois ans, et qui
sera plus tard publié in extenso, ajoutera un exemple de plus, a
ceux fournis par M. Richet, et l’on doit savoir gré à ce savant
professeur des bonnes raisons données pour motiver beaucoup
de réserve dans le pronostic, ainsi que des efforts tentes pour
conjurer le danger qu’il signale.
Ici encore, Messieurs, ne craignons pas de rendre hommage
aux services rendus par le drainage chirurgical. — Ce n'est que
justice envers son auteur M. Chassaignac.
V.
Le traitem ent des coarctations uréthrales est évidemment
entré dans une phase progressive. El, d’abord, si l’on parvient
à manier facilement et peut-être a simplifier quelque peu l'ins
trument si ingénieux imaginé par M. Désormeaux, et appelé
endoscope, il est incontestable que I on possédera un moyen
précieux pour établir avec certitude un bon diagnostic différen
tiel des diverses causes de rétention d’urine. Mais, dès h pré
sent, il est permis d’affirmer que pour tout chirurgien prudent
l’uréthrotomie interne est praticable sans exposer les malades à
un danger sérieux , et que les indications et les contre-indica
tions ont été suffisamment discutées pour que tout praticien sa
che aujourd’hui quels sont les cas où la dilatation doit encore
être préférée , et quels sont ceux , au contraire , où, en s’obsti—
—
�—
168
—
nani inutilem ent à dilater, on expose les malades aux accidents
consécutifs à une miction diftïcile, tels que la pvélo-néphrite.
la cystite, etc., etc.
Est-ce a dire qu’il faudrait, com m e conséquence des réllexions
qui précèdent, innocenter l'uréthrotom ie interne de tous les in
convénients qu’on lui reproche? A ssurém ent, non; mais,
comme cela arrive d ’ordinaire en pareil cas, les partisans trop
exclusifs de chacune de ces deux m éthodes se renvoient récipro
quem ent le reproche d’insuccès, dus parfois a des causes bien
étrangères au procédé opératoire m is en usage ; et, eu fait, rien
n’est venu prouver, jusqu’à ce jour, que l'uréthrotom ie interne
superficielle, autrem ent dit, a incisions m odérées et bien limi
tées , ait produit aucun des désordres soudainement déterminés
par la dilatation forcée.
Sans doute rien de semblable n’est il craindre lorsqu'on s’en
tient à la dilatation graduée , voire même à la dilatation subite
pourvu (pie l’on s’abstienne de tout cathétérism e forcé. — Mais
il est facile de reconnaître que cette dilatation est d ’un emploi
peu commode et d’un résultat nul ou trop temporaire, lorsqu'il
s’agit d’un rétrécissem ent d u r, fibreux, à peu près infranchissa
ble ; et, ici encore, l’endoscope pourra épargner un jour bien
des tâtonnem ents pour le moins inutiles.
Du reste, il est égalem ent des cas où l'uréthrotom ie interne
est elle-m êm e d’une application im possible,— et c'est alors que
l'uréthrotom ie externe, telle qil’elle a été pratiquée par notre
distingué confrère, M. B o u rg u et, d’Aix, c’est-à-dire par sec
tion latérale et par excision des tissus pathologiques, peut don
ner d’excellents résultats .
VI.
Les travaux ayant parfois le titre le plus modeste ne sont pas
toujours les m oins im portants à connaître, et je signale tout
particulièrem ent à votre attention un m ém oire présenté par M.
Labbé à la Société ce C hirurgie, ayant pour titre : De lapro-
-
169
-
pagation de /’inflammation au péritoine à la suite des adéni
tes inguinales.
Déjà, en 1856, une excellente thèse, de M. inies Jngot, avait
paru sur la Péritonite par propagation; mais ce travail, quelque
intéressant qu’il soit, n’offre pas, à notre point de vue, la même
importance que celui de M. Labbé. Si l’on songe, en effet, à la
fréquence de l’inflammation développée dans les ganglions ingui
naux, sa propagation au péritoine, fut ellc aussi rare qu'on peut le
supposer d’après les quelques faits bien constatés que l'on possède,
il n’en resterait pas moins avéré qu’un accident inflammatoire des
plus simples, en apparence, peut donner lieu à une complication
promptement mortelle qu’il n’est pas facile de prévenir, c’est vrai,
mais que l'on pourra du moins prévoir et, en la prévoyant, sau
vegarder les intérêts de la science qui est censée ne rien.ignorer.
I,'inflammation, née d’abord dans les ganglions inguinaux suporliciels, s’étend aux ganglions de la couche profonde et sem
ble se com m uniquer, du membre inférieur, à la fosse iliaque par
1intermédiaire du ganglion de Cloquet.
Une fois les ganglions péri-iliaques atteints, la gangue cellu
leuse qui les entoure s’enflamme bientôt et l’inflammation ne
tarde pas à passer sur le péritoine.
Le diagnostic de cette grave complication n'est pas facile, diSions-nons; toutefois, s'il survient un gonflement considérable à
la suite d’une adénite inguinale, avec empâtement et douleur ma
nifeste dans la fosse iliaque, on pourra penser que la phlogose a
gagné les ganglions de cette région , avant même que les nau
sées, les vom issem ents, la petitesse du pouls, l’altération de la
face et le météorisme ne trahissent l’existence delà péritonite.
M. Léon Labbé a donc rendu un service réel en signalant le
fait, quelque rare qu’il soit.
VIL
Alors que l’électricité étonne pour ainsi dire le monde par ses
utiles et incessantes applications ; alors, surtout, que la pliysio-
�—
170
—
iogie el la médecine ont su lant en profiler sous tes mains habi
tes de M. Duchaîne (de Boulogne) et de bien d'autres, il ne
pouvait pas se faire (pie la chirurgie seule ne cherchât pas à uti
liser, elle aussi, un moyen puissant capable de produire instan
taném ent une section aussi nette que com plète, la où I impossi
bilité de passer la main pour conduire un instrum ent tranchant
n’exclut pas la possibilité du passage d’une tige ou d'un fil, ap
tes à conduire le fluide d estru cteu r, et dont le degré de calori
cité peut varier a volonté.
Cette méthode â laquelle on a sim ultaném ent donné le nom
de galvano-caustique, d’électro-chimique ou (Yèlectvohjse, a été
pour la prem ière fois appliquée h la chirurgie, en France du
m oins, parM . Nélalon. Il s’agissait d'un énorm e polype nasopharingien, el la guérison a pu être obtenue sans qu’on ait fait
subir au malade aucune de ces énorm es m utilations rendues
obligatoires par la gravité, disons m ieux, l’incurabilité de la
maladie qu'il s’agit d’extirper en plein pour éviter une trop fa
cile repullulation.
Je ne discuterai pas ici. assurém ent, si avant M. Nélalon, un
chrirurgien de Crém one, M. Ciniselli, avait déjà indiqué les di
verses applications de la galvano-caustique \\ la médecine opéra
toire : je discuterai moins encore si la m éthode agit en décom
posant ou en détruisant les pédicules des tum eurs , e t, par ce'a
même, si le nom d’éleclrolysc ou d'électrochim ie est plus ap
proprié à la chose que celui de galvano-caustique; mais ce qui
me paraît parfaitement incontestable, c'est que M. Nélalon a
été le prem ier à tenter la destruction des polypes naso-pharyngiens par l’électrochimie.
On doit à un de ses plus distingués disciples, M. Dolbeau, la
relation des prem iers essais de l’illustre professeur de clinique
de la Faculté de Paris, et il est hou de constater que , sur cinq
opérés, un seul a succombé a une fièvre typhoïde dont il lût at
teint au m om ent même où Ion croyait pouvoir compter,
par rapport à l’opération elle-même, sur un succès de plus.
171
-
M. Dolbeau termine son exposé en disant, avec raison, que ces
faits sont de nature à encourager les chirurgiens, car si les opé
rations préliminaires doivent disparaître de la pratique, c’est à
l'électrochimie qu’il faudra demander la guérison des polypes
naso-pharyngiens
Ces opérations préliminaires, Messieurs, vous les connaissez;
el vous comprenez aussi que quelle que soit la très grande habi
leté des chirurgiens et malgré les magnifiques résultats obtenus
par MM. Richet, Ollier et bien d’autres, l’ablation totale ou par
tielle du maxillaire supérieur, la luxation, la perforation delà
voûte palatine, celle de l'unguis, l’incision du voile du palais, etc,
ne sont pas des manœuvres tellement bénignes qu’on ne puisse et
(ju’on ne doive surtout chercher à les éviter avec empressement.
Ce que i’on sait peut-être un peu moins, c’est que la première
el la plus élémentaire de toutes ces opérations préliminaires a été
pratiquée à I Hôtel-Dieu de Marseille le 30 janvier 1835. Il s’a
gissait d'un malade atteint d’un polype fibreux remplissant les
fosses nasales, tout un sinus maxillaire, les sinus frontaux et une
bonne partie de barrière-bouche ; il se composait de plusieurs
pièces et il était absolument impossible de s’assurer, par le tou
cher, et du nombre de ses ramifications lobulaires et de la place
de ses pédicules d’implantation.
Quelques essais antérieurs d’extirpation par la méthode an
cienne ayant complètement échoué dans notre service, comme
dans d’autres hôpitaux où le malade avait d’abord séjourné, je
pratiquai d’abord une incision parlant de l’extrémité interne de
l’arcade sourcillière droite et divisant longitudinalement et sur la
ligne médiane le cartilage latéral et celui des ailes du nez. Une
seconde incision divisa les tissus de dedans en dehors et de liant
en bas depuis l’épine nasale jusqu’il dix millimètres au dessus
de la commissure droite des lèvres ; et après avoir disséqué et
renversé le lambeau triangulaire résultant des deux incisions
sus-m entionnés, j ’enlevai l’os propre du nez à droite, qui se
trouvait à demi luxé par la tum eur; je passai ensuite une scie à
�172
chamelle autour de la base de 1 apophyse m ontante du sus-maxil
laire que j’enlevai en enlier, ainsi que l'unguis, la cloison à
moilié détruite, et le cornet in férieu r, après quoi on put enlelever assez facilement les diverses parties dont se composait
cette énorm e tum eur. Je n’ai pas l’intention de m'étendre ici
davantage sur un fait dont le récit com plet attend depuis long
temps un rapport Académique et dont la pièce principale a été
envoyée au Musée D upuytren ; je devais pourtant le rappeler à
propos des récents progrès dont s’esl enrichie la chirurgie pour
fextirpation des polypes naso-pharyngiens, afin de compléter
les renseignem ents nécessaires a ceux qui voudront écrire avec
impartialité les phases successivem ent parcourues par une mé
thode opérative, avantd’atteindre à un certain perfectionnement.
Mais il est tem ps de nous arrêter. N ous en aurions pour beau
coup trop de tem ps encore s’il fallait rappeler, aussi sommaire
ment que je viens de le faire, tous les travaux dus au zèle inlatigable de nos contemporains. Vous pourrez toutefois compren
dre par ce qui précède quelle ample moisson vous pourrez cueil
lir en vous livrant a de bonnes lectures aidées et, en quelque
sorte, contrôlées par l'observation clinique journellement mise
à votre portée.
El cela dit. M essieurs, je me fais un devoir de terminer par
quelques mots de félicitation que les élèves de notre Ecole, à
l'exemple de leurs condisciples de Paris et de Montpellier, ont
bien m érités de la part de leurs chefs de service. Une voix plus
autorisée que la mienne vous a dit en séance publique et solen
nelle combien votre utile et charitable dévouement a été
apprécié pendant la dernière épidémie. Laissez-moi ajouter ici
que si, malgré tout le bon vouloir des adm inistrations locales et
malgré toute la bienveillance et toute Uimpartialité qui caractéri
sent les actes du gouvernem ent de l'E m pereur, vous n’avez
pu tous être récom pensés au même degré, vous avez du moins
tous conquis déplus en plus l’estime et la sympathie de ceux
qui vous ont vus à l’œuvre.
S irus-P irondi.
—
—
173
—
De la prophylaxie de la douleur, au point de vue chirurgical.
Etude sommaire sur l’anesthésie.
« Divinum est opussedare dolorem,.
i H ippocrate. »
Mémoire lu à l'Association scientifique de France, dans la
séance dn 2c0 juin; session, à Marseille, de 1866 ; par
M. C o ste , professeur de clinique chirurgicale et directeur
de VEcole de Médecine.
Éteindre mom entaném ent toute sensibilité et, conséquem
ment, supprim er la douleur dans une opération sanglante, c’est
un service immense rendu au malheureux patient qui, devant
l’impuissance des ressources ordinaires de la thérapeutique,
doit subir l’atteinte de l’instrument tranchant.
L’anesthésie générale, par les inhalations d’éther ou de chlo
roforme, marquera donc, dans les annales de l’art opératoire,
une époque a jamais mémorable, une date ineffaçable.
Pourtant, h côté du bienfait, s’est trouvé parfois le danger ;
dans quelques cas, heureusement très-exceptionnels, de l’em
ploi des vapeurs anesthésiques, la mort, une mort foudroyante,
est venue prendre la place de la douleur.
Ces cas de mort par l’anesthésie, le chloroforme les a produits
plus souvent que l'éther ; aussi, le chloroforme, qui avait détrôné
l’éther, est il, aujourd’hui, beaucoup moins en faveur, et les
chirurgiens inclinent à revenir h la découverte américaine.
Si nous examinons parallèlement, et d’un rapide coup-d’œil,
les effets des deux anesthésiques, nous voyons, d ’après les résul
tats de notre service d’hôpital et de notre pratique urbaine,
qu’une sérieuse distinction peut être faite entre le chloroforme
et l’éther.
Cette distinction, basée sur l’observation attentive et rigou
reuse des faits, établit que le chloroforme possède une puissance
�anesthésique d'autant plus rapide, qu’il est le produit de plu
sieurs distillations successives, et, comme tel, entièrement pur
de tout mélange em pvreum atique.
Dans ces conditions de pureté, le chloroforme, sauf les pre
mières inhalations, toujours très désagréables aux malades, esi
facilement inspiré, et, hors les cas assez rares d’individus tota
lement réfractaires à son action, il amène l'insensibilité, après
avoir fait passer le sujet par une période d'excitation, de désor
dre m usculaire, qui cesse plus ou moins vite.
D 'autres fois, mais cela est rare, 1 excitation continue el la
sensibilité persiste. Le chloroforme ne fait alors ni bien ni mal;
le patient ressent toutes les douleurs de l'opération.
D'autres fois, enfin, et, c’est, heureusem ent, la grande ex
ception, le chloroforme tue dès les premières inspirations.
Ce m alheur, qui vient de se produire de nouveau deux fois,à
Paris, a quelques jours de distance, a pu arriver entre des mains
parfaitement habiles et exercées.
La chirurgie lyonnaise, si dignem ent représentée, a été fort
m altraitée par le chloroforme. C ’est à ce point, qu’elle y a, je
crois, b peu près renoncé; on ne se sert plus, a Lyon, depuis
plusieurs années, que de l’éther.
Nous avons été constam m ent heureux a Marseille. Le chlo
roforme, dont nous faisons presque exclusivement usage, ne
nous a jamais donné un seul cas de mort.
Voyons, m aintenant, com m ent se comporte l’éther.
Son action diffère notablem ent de celle de son rival. D’abord,
l'anesthésie par l’éther arrive, en général, plus lentement;il
faut ainsi, pour que le moyen ne soit pas impuissant, persévérer
dans les inhalations, qui, quelquefois, ne produisent absolu
ment rien. L’éther, m êm e bien pur, bien rectifié, est donc plus
souvent infidèle que le chloroform e; mais, lorsqu’il agit, il a
sur lui cet avantage, reconnu de tous les praticiens, que l’exci
tation qui suit son adm inistration est ordinairement de peu de
durée et d’intensité, parfois même com plètem ent mille, si bien
que le malade arrive tranquillement et sans secousse à la réso
lution musculaire et à l’insensibilité.
La réaction qui se fait, déjà depuis un certain temps, en fa
veur de l’éther est, par conséquent, assez bien justifiée.
Le jugem ent comparatif sur les deux moyens peut conduire
b cette conclusion : le chloroforme est plus constant et plus ra
pide dans les effets que le chirurgien en attend, mais il est plus
dangereux. L’éther est moins sur, comme moyen d éteindre le
sentiment ; mais, en retour, il est, assurément, plus inoffensif.
Du reste, quel que soit celui des deux anesthésiques que le chi
rurgien préfère, il devra le refuser aux malades qui n’ont à subir
que de petites opérations. Pour celles de grande chirurgie, il
importe au plus haut point, avant de recourir à 1 anesthésie, de
bien peser les contre-indications qui pourraient venir, soit du
tempérament de l’individu, soit d’une affection concomittante
de celle qui nécessite l'opération.
Ces principes, que tout opérateur prudent doit soigneuse
ment observer, sont ma règle invariable de conduite, la base
de ma pratique personnelle.
Il serait b peine besoin de rappeler ces précautions, tant elles
sont élém entaires, si je n’étais bien convaincu que de leur omis
sion peut dépendre un malheur causé par l’anesthésie.
L’expérience nous apprend que l'inhalation du chloroforme
offre, chez les enfants en bas-âge, une immunité relative. Les
accidents qu’il peut produire sont, en effet, excessivement rares
b cette période de la vie. Les jeunes enfants tombent très rapi
dement daus le sommeil anesthésique et ils en sortent b peu
près toujours heureusement. Cela étant bien connu, la médecine
opératoire peut, sans appréhension, au premier âge, jouir de
l’entier bénéfice de l’anesthésie chloroformique.
Je ne dirai rien ici de 1 amylène. Après sa courte apparition
dans la pratique chirurgicale et le peu de faveur que lui ont ac
cordée les opérateurs, je ne puis citer que pour mémoire ce
prétendu anesthésique.
�Je ne m 'arrêterai qu’un instant aussi au proloxyde d'azote,
dont les propriétés anesthésiques toutes particulières avaient été
reconnues, il y a un peu plus d’un dem i-siècle, par le chimiste
Davy.
Après un long oubli, les chirurgiens américains ont repris, de
puis quelques années, au point de vue de la suppression de la
douleur, l'étude de protoxyde d’azote.
Leurs essais ont eu peu de retentissem ent en France.
Cependant, tout nouvellem ent, M. Demarquay et, après lui,
M. Préterre, l’habile et savant chirurgien dentiste, ont remis eo
scène, comme agent anesthésique, le protoxyde d’azote, nommé
aussi gaz hilarant, parce qu’il produit, chez celui qui le respire,
un besoin de rire irrésistible, une extase délirante.
Ce gaz est obtenu, on le sait, en décomposant l’azotate d’am
moniaque parla chaleur.
Respiré parfaitement pur, le proloxyde d’azote produit très
rapidement 1 anesthésie ; une a deux m inutes d’aspiration du
gaz suffisent. Il parait être inoffensif; m ais, son action étant
très éphém ère, 1 insensibilité qu'il amène cessant après 40 à 50
secondes a peine, cet anesthésique ne pourrait, pour les grandes
opérations de chirurgie, lutter avec le chloroforme ou l’éther.
Pour les opérations superficielles et de courte durée, les seules
auxquelles il serait applicable, on doit certainem ent lui préférer
l'anestlrsie régionale par l’un des procédés connus.
Avant d’arriver à la deuxièm e et dernière partie de ce travail,
1 anesthésie locale par refroidissem ent, je ne puis me défendre
de relever une observation que j’ai bien des fois entendue dans
l'exercice de mon art.
On m'a souvent tenu ce langage : la pratique des opérations
chirurgicales, grâce au chloroforme ou a l’éther, est devenue fa
cile aujourd'hui. Le patient, dompté par l’agent anesthésique,
privé par lui de sentim ent et de volonté, n’oppose aucune résis
tance ; il est en quelque sorte une masse inerte, sur laquelle
le chirurgien peut tailler tout à son aise, sans être troublé
par les cris, ni gêné par les mouvements inséparables de la
souffrance.
Une fois pour toutes, ces paroles sont une erreur.
Les gens du monde, il est vrai, ne sont pas forcés de raison
ner juste quand ils veulent parler médecine ou chirurgie.
C’est le contraire de ce qu'on dit là qui est la vérité. Sans
doute, le chirurgien qui opère avec l’aide du chloroforme est
heureux, pour son malade, de l’absence de toute douleur ; mais,
s'il éprouve cette satisfaction d'une philantropie bien naturelle,
l’idée que des suites funestes peuvent naître de l’anesthésie le
préoccupe et l'inquiète.
Je n ’hésite donc pas à le dire, parce que ces perplexités ont
maintes fois opprimé mon âm e; l’opérateur est moins tranquille
avec le chloroforme que sans le chloroforme. Dans le premier
cas, la crainte d’accidents possibles l’obsède malgré lui ; dans le
second, tout en regrettant que le malade souffre, il est délivré
du souci des chances fatales de l'anesthésie. L'homme de l’art
reste, alors, seulement aux prises avec les difficultés de l'opéra
tion qu’il a commencée et qu’il cherche, confiant en lui-même,
à mener à bonne fin ; il est, incontestablement, plus calme.
Et qu’on ne l'accuse pas alors de dureté de cœur. Si, dans ces
conjonctures, le chirurgien paraît être indifférent aux plaintes
et à l’agitation douloureuse du patient, c’est qu’un soin unique
l’absorbe, un seul devoir l’occupe : l’irréprochable exécution
de son œuvre réparatrice. Aussi, guidée par sa conscience, sa
main est ferme et sure ; le but va être atteint; le chirurgien et
le malade sortiront victorieux de l’épreuve.
En face des hasards et des dangers de l’anesthésie par le chlo
roforme ou par l’éther, ils ont bien mérité de l’humanité ces
savants dont le génie inventif cherche à découvrir des moyens
qui, pour bien des opérations, en substituant une anesthésie locale à l’anesthésie générale, conservent le bienfait et suppri
ment le péril,
�— 178 —
L'anesthésie par refroidisem ent, applicable il une foule de
cas, principalem ent à toutes les opérations de petite chirurgie,
souvent si douloureuses, peut s’obtenir, dans l’état actuel de nos
connaissances, par divers procédés.
La science possède, depuis une quinzaine d’années environ,
le mélange frigorifique de M. A rnott, de Brighton, (deux par
ties de glace et une partie de sel m arin, placées dans un sachet
de gaze ou de mousseline).
Cet anesthésique local, que j’emploie beaucoup, depuis qu’il
est entré dans le domaine de l’art, m ’a rendu, h 1 hôpital et en
ville, de très grands services. Il est forcément limité aux opé
rations d’une rapide exécution et dans lesquelles le chirurgien
ne doit intéresser que des parties superficielles ; mais, même
ainsi réduit, le rôle de la glace est encore bien précieux, car il
est susceptible de très nom breuses applications dans les cas les
plus usuels de la pratique.
Le mélange de M. A rnott fait passer les tissus avec lesquels il
est mis en contact par trois phases distinctes, mais qui se suc
cèdent à de très courts intervalles : douleur un peu compara
ble a celle de la brûlure, puis engourdissem ent et, finalement,
insensibilité.
La glace amène ces deux derniers effets sur la partie quelle
touche en y suspendant la vie, puisqu’elle arrête le cours du
sang et supprim e faction nerveuse. Or, la circulation et l’inner
vation étant les sources de tout m ouvem ent vital, ces effets
doivent inévitablem ent se produire, et plus ou moins rapide
m ent, suivant que la peau est saine ou lluxionnée par un état
inflammatoire.
Le froid excessif déterm ine ainsi, dans le lieu de son appli
cation, une congélation de quelques instants, une mort momen
tanée. D ès-lors la partie se ride, durcit beaucoup, devient d’un
blanc de craie et aussi froide que la glace elle-m êm e.
On peut être sûr, h ce m om ent, que l’opération sera suppor
tée sans douleur.
179
V a-t-il quelque inconvénient, à côté de cet avantage ? Aucun,
vraiment. La gangrène de la peau, que quelques esprits prévenus
ou inattentifs pourraient craindre, n’est nullement a redouter.
La moindre réflexion montre l’impossibilité d’un tel résultat. La
glace peut bien, en quelques minutes, engourdir le tégument
qu’elle couvre au point de le rendre insensible; mais elle ne peut,
dans un si court espace de temps, y tarir les sources de la vie.
Ici, d’ailleurs, l'expérience vient confirmer la théorie ; je n'ai
pas été témoin d’un seul fait de gangrène dans les innombrables
cas où j’ai fait usage du mélange frigorifique.
Une réaction trop vive, après la cessation du froid, pourraitelle survenir ? Nullement encore , le plus souvent du moins. Le
sang retourne, sans déterminer de congestion sérieuse, dans les
capillaires d’où il avait été chassé, et l’organisation reprend son
empire.
Tout récem m ent, et presque en même temps, un chirurgien
anglais et un chirurgien américain, M. Richardson, de Londres,
et M. Bigelow, de Boston, ont proposé de nouveaux moyens
d’anesthésie locale par le froid intense.
PourM . Richardson, le résultat est dû h la vaporisation de
l’éther, réduit à une température de six degrés Fahrenheit audessous de zéro.
M. Bigelow parle d’un nouvel agent, la bhigolène, par lequel
le mercure du thermomètre est aisément réduit à 15 et même
20 degrés au-dessous de glace.
La bhigolène est un des produits hydrocarbonés de la distilla
tion du pétrole, cette huile de pierre qui est si inflammable.
La bhigolène, pour le dire en passant, est d’une odeur re
poussante.
Son extrêm e volatilité, bien supérieure à celle de l’éther,
amène un refroidissement tellement subit et si intense, que la
peau peut-être glacée en huit à dix secondes.
La presse médicale, française et étrangère, s’est fort occupée
de ces deux découvertes. Je me permettrai, en prononçant ce
-
-
�180
mot, et pour être lidèle h l'histoire, de faire observer que la
proposition de l’anesthésie locale par la vaporisation de l’éther
est une idée déjà passablement vieille, qui n'avait pas fait son
chem in, et que le chirurgien de Londres vient tout simplement
de rajeunir.
Le procédé de M. Richardson a été soumis à l’expérimenta
tion clinique dans les hôpitaux de Paris et de Londres. Les ré
sultats paraissent être favorables. Toutefois, la quantité d'éther
vaporisé devant être considérable pour que le froid et l’insensi
bilité viennent à la suite, si le lieu où se trouve le malade est
étroit et les assistants à l’opération un peu nom breux, ceux-ci
et l'opérateur lui-m êm e pourront être sérieusem ent incommo
dés par les vapeurs d’éther.
C'est un grave inconvénient dont il faut tenir compte. En
outre, l’inllammabilité de l'éther pourrait bien, dans un espace
réduit, et avec le concours de certaines circonstances, créer un
véritable danger.
Quant au refroidissem ent par l'intervention du nouvel agent
trouvé par M. Bigelow , la découverte est de trop fraîche date et
les essais qui en ont été faits sont encore en trop petit nombre,
pour qu’on puisse, aujourd'hui, ém ettre, sur le procédé du chi
rurgien de Boston, une opinion bien arrêtée.
Mais, enlin, qu’il me soit perm is de poser une dernière ques
tion.
Pour que l’anesthésie qui succède au refroidissement abou
tisse à l'insensibilité complète de la partie sur laquelle doit être
faite une opérarion , est-il bien nécessaire que l’abaissement de
la tem pérature atteigne ces lim ites extrêm es données par la va
porisation de l’éther ou de la bhigolène ?
N ’y aurait-il pas, même, quelque péril à redouter pour le
maintien de la vie dans des tissus q u i, sans nécessité , auraient
été soumis a une réfrigération aussi énorm e ?
En l'état, et jusqu a la production de faits plus nombreux,
d ’expériences plus décisives, ces innovations ne sont point,
—
—
181
dans ma pensée, un perfectionnement de l’anesthésique local de
i\L A rnotl, sur lequel l’observation a depuis longtemps pro
noncé. Le mélange frigorifique du chirurgien de Brighlon est
d'une si facile application, il est si constamment efficace, il a si
peu d’inconvénients, que rien, semble-t-il, ue saurait lui être
supérieur.
Pourquoi donc les chirurgiens ne s’en tiendraient-ils pas,
quant à p résen t, a ce moyen si simple et si sûr d’éteindre toute
sensibilité sur la partie qui doit subir une opération rapide et su
perficielle ?
C’est, aujourd hui, le jugement le plus impartial elle plus
vrai qui me parait devoir être porté sur ces questions, à moins
qu’une plus longue expérimentation lie vienne affirmer la supé
riorité des nouvelles découvertes.
Le progrès réel sera toujours le bienvenu.
B IB L IO G R A PH IE .
Elude médico-légale sur la simulation de la folie, 'par le doc
teur A. Laurent, médecin en chef de l'asile des aliénés de
Marseille (1866, Paris, Victor Masson et fils).
Cet ouvrage s’adresse aux médecins experts, aux magistrats
et aux jurisconsultes. La simulation de la folie est en effet une
question légale autant que médicale et on comprend qu’elle in
téresse a la fois l’homme de droit et le médecin. Ce dernier
trouvera dans le livre du l)r Laurent de précieux renseigne
ments cliniques; le magistral, de son côté, verra, en lisant ces
pages, combien est grande parfois la difficulté du diagnostic de
la folie et il comprendra que l'homme spécial seul peut discuter
les questions de médecine mentale ; enfin, le jurisconsulte, en
parcourant cette œuvre, se familiarisera avec la manière d’être
des sim ulateurs et des aliénés véritables et, par suite, il pourra
en toute connaissance de cause modifier d une manière heu
reuse certains côtés de la législation actuelle.
L’ouvrage de notre confrère, quoique écrit sous l'influence
d’une Seule pensée, — faire savoir par quels moyens il est
possible de reconnaître si une folie est réelle ou simulée —
peut donc être décomposé analytiquement en trois parties dis-
�182
tinctes : une partie exclusivem ent scientifique, une autre qu'on
pourrait appeler proefssionnelle, la dernière, enfin, d’un intérêt
plus général, se liant aux prescriptions légales qui regardent par
ticulièrement les aliénés.
Nous ne pouvons qu’applaudir h la m anière noble et réservée
dont le Dr Laurent s’est occupé, dans la partie professionnelle
de son œuvre, des rapports qui doivent exister entre le magis
trat et le médecin légiste. Celte question n'occupe point à elle
seule un chapitre spécial, elle est partout et elle n est nulle part;
amenée de loin en loin par la force des choses, l’auteur la résout
ça et h, sans entrer dans les détails, par quelques-unes de ces
phrases nettes et précises qui valent mieux souvent qu’une lon
gue dissertation.
La question de jurisprudence est égalem ent disséminée dans
tout l’ouvrage, et quoiqu’elle ne soit point traitée d’une manière
particulière, elle ressort fie l’ensem ble même des faits et le lec
teur la voit naturellem ent intervenir.
En som m e, le livre de notre savant confrère est, parla forme,
surtout scientifique. Les chapitres consacrés a l'examen direct
et indirect de l'individu soupçonné de simulation peuvent être
considérés comme le véritable guide pratique du médecin ex
pert; il semble, en réalité, qu’en suivant les conseils du Dr Lau
rent on pourra aisém ent se reconnaître à travers le dédale des
maladies m entales. Cette partie du livre est pleine de précision;
si nous osions même, nous dirions qu’il y en a trop. L’auteur
dit, en effet, dans son chapitre II : « qnel’intei vention del’homme
spécial est tout a fait indispensable dans toutes les affaires judi
ciaires où il es1, question d’aliénation m entale.» Sans doute, mon
cher confrère, vous avez mille fois raison. Mais pour convaiucre
le public il aurait fallu ne point être vous-m êm e si clair et si
lucide ; votre ouvrage est m alheureusem ent fait de telle façon
que le vulgaire — charmé de tout com prendre— va s’attribuer
le droit de décider en dernier ressort les questions spéciales les
plus ardues. Ne serait-ce pas ici le cas de dire que le mal est en
gendré par l’excès du bien ?
Mais laissons la le paradoxe, — nous aurions mauvaise grâce
h le soutenir — et disons sim plem ent que M. le Dr À. Laurent
a trouvé le secret de dire beaucoup en peu de mots. Sa descrip
tion des principales formes de la folie ne tient pas 80 pages, et
il y a lâ pourtant la substance de plusieurs gros volumes. Per
sonne ne songera — et l’auteur m oins que personne — â pré
senter l'étude médico-légale sur la simulation de la folie comme
un traité de médecine m entale; cependant, le praticien qui ne
veut point s’occuper spécialem ent des aliénés, trouvera dans
—
cette œuvre d’excellents détails qui pourront lui être très utiles
pour le diagnostic des différentes formes de la fofie.
Les idiots et les imbéciles, catégories d’êtres qui ne doivent
point être rangés parmi les fous, simulent quelquefois l’aliéna
tion mentale. Chose singulière ! ces individus, qui sont presque
complètement dépourvus d’intelligence, peuvent concevoir Je
projet de se faire passer pour fou et soutiennent leur personnage
avec persévérance, parfois même en déployant beaucoup de ruse.
La m enstruation, la grossesse et l’âge critique sont, dans
quelques circonstances, le point de départ de véritables mala
dies mentales ; d'où de nouvelles occasions de simuler, contre
lesquelles le médecin expert devra se tenir en garde.
N’oublions pas de mentionner le chapitre qui termine l’ou
vrage. M. le Dr Laurent y signale les dangers que courent les
simulateurs en se livrant à leur jeu dangereux ! « La contrainte
« morale et physique et plusieurs conditions très pénibles exi« gées par la simulation peuvent amener, par suite de la prolon« gation forcée de celte feinte, une aliénation mentale réelle. »
Nous regrettons de ne pouvoir parler plus longuement de ce
remarquable ouvrage. Cependant nous croyons en avoir assez
dit pour faire voir l’utilité du livre et l’intérêt qu’il présente.
Que le lecteur juge lui-même.
Dr Zéde .
C hronique M ensuelle.
Nous voyons souvent , dans les journaux grands et petits, le
chroniqueur aux abois. Cependant le inonde est grand et il s’y
passe bien des choses. Notre embarras à nous est tout different;
nous aurions beaucoup à dire, et il faut que nous écrivions peu.
Que se passe-t-il donc dans le monde médical?
Un fait qui, tout d’abord, mérite d’être signalé ici, c’est la
session de l’Association scientifique de France, tenue a Mar
seille le 18, le 19 et le 20 du mois de juin. Nous regrettons de
ne pouvoir analyser ces intéressantes séances, où des sujets si
variés ont été passés en revue. Marseillais, nous sommes fiers
de voir notre ville choisie comme centre scientifique ; médecins,
nous sommes heureux de constater que deux de nos confrères.
MM. Coste et Pirondi, aient pris une part honorable aux tra
vaux de celle laborieuse et brillante session.
Bien plus importante encore et bien plus grandiose sera cette
assemblée qui doit s’appeler le congrès médical international.
Au mois de juin, pendant que grondait le canon et que les peu
ples m ettaient h s’entre-détruire un acharnement inouï, le co-
�184
mile chargé de préparer ce congrès lançait sa première circu
laire; il m ontrait ainsi que si la politique porte souvent les
hommes à s’égorger, la science , au contraire , les unit dans les
liens d'une grande et noble fraternité.
Aussi belle que la science est la profession m édicale, surtout
quand elle lutte contre de redoutables fléaux. Durement éprou
vés par une épidémie m eurtrière, nos confrères d’Amiens ont
fait dignement leur devoir. Deux d’entre eux, les docteurs Léger
et Thuilier, sont tombés sur la brèche; encore deux nomsà
ajoutera la liste glorieuse du martyrologe médical.
Amiens n’est pas la seule ville de France où le choléra ait, le
mois d ern ier, exetcé ses ravages. Il n'a pas encore disparu de
N antes; il a sévi à Hesdin, dans le Pas-de Calais; à Pennack.
dans le Finistère ; à Courcelles-Chaussy, dans la Moselle; et,
tout près de nous, à la Ciotat, dans les Bouches-du-Rhône. Son
intensité a été faible, dans ce dernier pays, où il n'a guère frappé
que ceux qui étaient prédisposés par la misère ou l’imprudence;
irrégulier dans sa m arche, il paraît y être en décroissance défini
tive ; espérons qu il aura cessé quand ces lignes seront im
primées.
En Europe, le fléau visite en ce m om ent la Belgique, où il a
fait, à Bruxelles, une faible apparition ; la Hollande, où, beau
coup plus violent, il s’est abattu sur Rotterdam , la Haye, Delft
et Amsterdam ; l'A llem agne, enfin, où il ravage Stettin.
En Arabie, il a éclaté parmi 1er pèlerins venant de la Mecque,
et notamment dans la grande caravane qui se rend de la Mecque
a Médine. Djeddah n’a été , jusqu’ici, que très légèrement
éprouvé; Jamho a cruellem ent souffert, et l’embarquement pour
l'Egypte a été suspendu
Nous regrettons que l’espace ne nous permette pas de repro
duire les m esures prescrites par M. le m inistre de I Agriculture
et du Commerce pour nous préserver du choléra.
11 est aussi un docum ent que nous aurions bien vonlu repro
duire et sur lequel nous com ptons revenir : c’est un arrêt de la
Cour de Cassation qui a été publié par notre sœur aînée, YUnion
médicale , de Paris , dont la lecture a toujours pour nous le
double attrait de l'instruction et du plaisir.
Ce qu’il y a de capital dans cet arrêt de la Cour, c’est que l’as
sociation immorale du médecin et du pharmacien tombe sons
l’application de la loi et sous les coups de la justice.
Le Comité de Rédaction.
—
-
Marseille. Typ. elLiib Arnaud, Caycret C., rue Snint-PerréOliK.
185
-
Concours pour une place de Chirurgien-adjoint
des Hôpitaux.
Les portes de l’amphithéâtre de F Hôtel-Dieu sesontouvertes,
il y a quelques jours, pour une de ces solennités auxquelles no
tre public médical est trop rarement convié. Un concours allait
s’ouvrir pour donner un nouveau membre-adjoint au corps chi
rurgical des hôpitaux. On avait annoncé qu’un grand nombre
de champions devaient prendre part à la lutte ; mais , au mo
ment du combat , les rangs se sont éclaircis. Nous n'avons vu
dans l’arène que MM. Picard et Q ueirel, et nous avons assisté
à un brillant duel dans lequel la valeur des candidats a com
pensé le nombre.
Nous voulons bien croire que la réputation des deux concur
rents, déjà sérieusem ent établie, ait pu être une des causes de
la désertion de plusieurs des concurrents annoncés; mais cette
raisonne saurait suffire. Alors que tant de jeunes docteurs vien
nent planter leur tente à Marseille , on comprend à peine qu’il
ne s’en trouve pas un plus grand nombre , s'occupant de chirur
gie , qui affronte les chances du concours. La perspective d’une
longue pratique dans les hôpitaux nous semble un motif suffisant
pour tenter la carrière, même au prix d'un revers. Ce concours
a lieu à l’époque de la vie où les études de la Faculté sont à
peine term inées, où les besoins de la clientèle n’absorbent point
encore le temps d’une manière absolue , et où l'on peut consa
crer à l’étude une partie de la journée. Alors que l’administra
tion des hôpitaux n’avait pas établi le concours, il y avait cer
tainement un plus grand nombre de compétileurs.
Après avoir parlé de ceux qui n’ont pas voulu concourir,
pourquoi faut-il s’occuper aussi de ceux qui n'ont pas pu pren
dre part à la lutte? Une décision administrative exigeait que les
candidats fussent docteurs depuis un an au moins. — Quelle
pouvait être la valeur de cette mesure? On comprend que, eu
8
�égard à l'im portance des fonctions auxquelles sont appelés les
chirurgiens nommés , on exige d’eux une limite d'âge ; mais la
date du diplôme ne saurait satisfaire a cette pensée. Ce sont or
dinairem ent les élèves les plus instruits , les plus méritants qui
retardent le moment où ils prennent leur grade de docteur. Ne
sait-on pas que les positions d ’internes de nos grands hôpitaux,
soit a Paris , soit en province , sont incompatibles avec le titre
de docteur ? Dès lors , l’élève laborieux, qui aura été assez heu
reux pour obtenir, par le concours, une place d interne, sera
moins favorisé que celui qui, moins travailleur, n’aura pas
concouru, ou qui, m oins heureux, n'aura pas réussi et n’aura
eu qu’a suivre la m arche norm ale des études universitaires.
L'année d’exercice du doctorat est-elle une mesure ayant
pour but de s'assurer de la m oralité du candidat ? Cette raison
nous parait assez légitime. L ’adm inistration des hôpitaux ne
peut s’attacher que des hommes parfaitem ent honorables ; mais
alors cette m esure ne peut-être générale, elle doit donner lieu
â des exceptions. Lorsque , com m e cela s’est présenté dans la
circonstance actuelle, il se trouvera un interne de nos hôpitaux,
nouvellement reçu docteur, qui aura pleinem ent satisfait h tous
ses devoirs, auquel l’adm inistration serait heureuse de confier
un service , parce que le passé lui répond de l’avenir, et c’est à
ce candidat qu’on opposera une barrière infranchissable, par
cette raison seule qu’il n’est pas docteur depuis un an !
Nous appelons l'attention de l’administration des hôpitaux
sur cette décision qui nous paraitm cltre un obstacle innlileala
liberté du concours. Nous croyons qu'elle a reconnu, dans les
circonstances actuelles, l'inconvénient de cette partie du pro
gramme; et si comme nous le pensons, c’est une mesure propre à
constater la m oralité des concurrents , elle établira une honora
ble exception pour ceux des candidats de notre école et de nos
hôpitaux de M arseille qui auront donné des preuves de leur dé
vouaient a ses intérêts et à celui des malades.
Le jury du concours était formé par des médecins et chirur
giens des hôpitaux en activité de service ; il était présidé par
M. Reymonel, chirurgien consultant. On aime h retrouver dans
ces solennités ces vétérans du corps médical des hôpitaux,
venant ouvrir le seuil du sanctuaire au vainqueur. C’est une
noble pensée de la Commission administrative pour laquelle
dous lui témoignons toute notre reconnaissance. Le respect que
l’on témoigne à nos aines nous touche profondément.
Arrivons actuellement au concours, dont nous avons h cœur
de rendre compte. La haute valeur des deux émules étant audessus de toute contestation , nous pouvons nous acquitter de
notre tâche en toute sincérité et signaler avec franchise quels
sont , dans leurs brillantes épreuves , les points qui ont prêté
à la critique.
Dans la première épreuve , anatomie et physiologie, la ques
tion posée par le jury a paru surprendre les candidats : l’un d'eux
a même affecté, par deux fois, de déclarer qu’il cherchait à rat
tacher sa question à la chirurgie. La question , telle quelle est
énoncée dans le programme , est complexe. L anatomie, dans
un concours de chirurgie , semblerait devoir être chirurgicale ;
mais existe-t-il une physiologie chirurgicale? Dans ces condi
tions , le jury avait à choisir de poser une question anatomique
purement chirurgicale, n’établissant aucun rapport avec la ques
tion physiologique, ou bien d’établir un lien entre les deux ques
tions. 11 a obéi a cette dernière pensée en posant la question
suivante : Du duodénum et des corps gras en physiologie. L’a
natomie du duodénum a été parfaitement faite par les deux con
currents; ils ont paru devoir se compléter l’un par l’autre. Plus
de méthode , d’exactitude dans les rapports anatomiques chez
M. Queirel ; plus de précision dans l'étude de la structure de
l'intestin chez M. Picard. Ce dernier, par l’analyse complète
qu’il avait faite de la structure de la papille, semblait préluder
d’une manière méthodique à l’étude de ses fondions. Il avait, de
plus, parfaitement divisé l’étude des corpsgras au point de vue
physiologique. Mécanisme d’après lequel les corps gras pénè-
�188
ti ent dans l'organism e, quel est leur ( tat pendant qu’ils y sé
journent , comment sortent-ils de 1 économie , régression de
la graisse?Pourquoi , après ce lumineux exposé , le candidat,
sous le prétexte de rattacher la question à la chirurgie , s’est-il
lancé dans une digression sur les néoplasm es, étude qui est du
domaine de la pathologie et non pas des fonctions s’exécutant
dans l’état de santé ?
M. Queirel considère l’absorption des corps gras comme étant
toujours un phénom ène de saponification exercé par le liquide
pancréatique. On était en droit d’attendre de lui une discussion
des théories opposées, d’après lesquelles la pénétratiou des
corps gras dans l’économie se ferait par émulsion. Cette discus
sion paraissait d ’autant plus nécessaire que les travaux les plus
récents sem blent affirmer celte dernière opinion.
L’épreuve de pathologie chirurgicale a donné à traiter par
écrit aux deux candidats : La grangrène sèche. En connaissant
la valeur scientifique des deux concurrents , on pouvait s’atten
dre à une question parfaitem ent traitée. L ’attente n’a pas été
trompée , et cependant la critique un peu sévère peut trouver
que , dans l’exposé de la question , les deux compositions ont
présenté quelques lacunes. Chez M. Picard , comme chez M.
Queirel , nous n avons pas trouvé une distinction suffisante en
tre la grangrène humide et la grangrène sèche. L étiologie a été
traitée par les deux concurrents d’une manière très complète.
Dans cette partie de sa composition , M. Picard a donné des
preuves d’une érudition profonde , mais il a glissé trop rapide
m ent sur l’artérite. — La symptomatologie a été, à son tour,
parfaitem ent exposée. Nous nous attendions, alors qu'il a été
question du traitem ent , à une discussion d’une question qui se
présente à la pensée et aux réflexions de tous les chirurgiens,
alors qu’il s’agit de se décider a pratiquer uue amputation dans
le cas de la grangrène sèche. Il faut am puter, disent les deux
candidats , alors que la grangrène est limitée ; mais cette ques
tion ainsi tranchée devait être motivée. Il est beaucoup de chi
—
rurgiens qui pensent que les seuls efforts de la nature sont pré
férables à l’action chirurgicale. Il est des statistiques qui don
nent raison à ces derniers. Pourquoi , dès-lors , cette réserve
dans une question qui paraissait un des points les plus impor
tants à élucider ?
Nous l avons dit en commençant , malgré ces imperfections,
cette épreuvée témoigna de connaissances profondes chez les
deux candidats ; elle était à la hauteur de ce que I on était en droit
d’attendre de leur science profonde et de leur jugement éclairé.
Le jury avait fait choix , pour les épreuves cliniques, de trois
malades portant les affections suivantes : 1* une cancroïde de la
lèvre; 2° une coxalgie ; 5• une tumeur abdominale chez une
femme. Deux de ces malades devaient faire l’objet d’une leçon
clinique immédiatement après leur examen. Sur le troisième, à
leur choix, les concurrents devaient écrire une consultation.
Le choix de iM. Queirel s’est porté sur la coxalgie; M. Picard a
écrit sa consultation sur la tumeur abdominale.
Les deux prem iers malades présentaient peu de dilliculté, re
lativement au diagnostic, au traitement. Le diagnostic différen
tiel .judicieusem ent déterminé par les deux concurrents, con
duisait aux données thérapeutiques qui ont coursdans la science
et dans la pratique actuelle. La tumeur abdominale devait , au
contraire , exercer leur sagacité. Elle existait chez une femme
jeune , ayant eu un en fan t, il y a trois ans : le début de la tu
meur remontait à cette époque; elle était fixée dans la fosse ilia
que gauche, rem ontant jusqu’au niveau de l’ombilic ; elle était
dure , peu mobile. M. Queirel, dans sa leçon orale , diagnosti
que une tumeur fibreuse , des ligaments larges, et proposa l’o
variotomie. — M. Picard , traitant la question par écrit , re
connut un kyste de la région relro-ulérine, e t, comme son
compétiteur , proposa l’enlèvement de la tumeur. Les deux
candidats nous ont paru trop sacrilicr à la tendance du moment
et nous doutons que , chargés du soin de cette femme, ils eus
sent mis à exécution l’opération si facilement proposée. Nous
�190
croyons M. Queirel bien hardi de porter l'instrument tranchant
sur une tum eur (ibreuse aussi peu mobile et dont les attaches
sont pour lui l’objet d'un grand doute ; mais la proposition de
M. Picard nous semble presque tém éraire. L’enlèvement des
kystes retro-utérins n’est point encore classé parmi les hardies
ses du moment qui font aussi facilement ouvrir l'abdomen de
quelques femmes. Il faut , dans ce cas-là , avoir la probabilité
de term iner son opération, sinon toujours heureusement pour la
malade, du moins pour l’honneur de la chirurgie et du chirurgien.
Les opérations à pratiquer ont été l’amputation de Chopart,
la ligature de l'axillaire sous la clavicule. Les deux amputations
ont été faites par M. Queirel tuto, cito et jucunde. M. Picard,
dans la ligature , a eu la main m alheureuse. Il a étonné ceux qui
avaient l’habitude de le voir opérer à l’a mphithéâtre. Il est des
moments où le meilleur des opérateurs faiblit, et il est malheu
reux que ce soit dans une circonstance qui décide des résultats
d’un concours. L ’amputation de Chopart a montré à ceux qui
ne le connaissaient pas ce qu'il savait faire.
M. Queirel a été nommé chirurgien-adjoint des hôpitaux, et
si le public a reçu avec plaisir cette nomination , il a regretté
que les lois du concours entraînassent une défaite à côté d une
victoire ; mais le vaincu a m ontré que sa place était assurée
d’avance dans les rangs des chirurgiens de nos hôpitaux, lia
une revanche à prendre, et celte fois nous comptons quelesuccès couronnera ses efforts.
Le Comité de rédaction.
—
—
Q uelques considérations pouvant servir à l’étude des
m aladies de la protubérance annulaire.
Suite et fin ( 1).
Un symptôme assez im portant, au premier abord, est la
faiblesse de la vue. Ce signe est un de ceux que l’on a le plus
souvent rencontrés dans les maladies de protubérance. Sur
(1) Voir les numéros d'avril et de juin.
26 cas, M, Ladame a noté 10 fois de l’amblyopie ou de l'am au
rose et 2 fois de la diplopie. Nous avons pu nous-mèmeobserver,
chez notre m alade,de la diplopie coïncidant avec un affaiblis
sement extrêm e de la vue. Ce qu’il y a eu de surprenant chez
Gislello, c’est que ces troubles sont devenus moindres à mesure
que la maladie cérébrale a fait des progrès. Trois mois avant sa
mort, Gislello distinguait les objets beaucoup plus nettement
qn'au moment de son entrée à l’hôpital, la diplopie avait com
plètement disparu, et cependant la céphalalgie avait augmenté,
ainsi que la paralysie du sentiment et du mouvement.
Ce fait nous empêche d’attacher à l'affaiblissement de la vue
une grande valeur. Songe-t-on d'ailleurs aux nombreuses
maladies dans lesquelles ce symptôme a été observé ? Une lésion
du mésocéphale détermine souvent — les faits le prouvent —
des troubles de la vision, et l’on peut a la rigueur se rendre
compte de ces désordres par une compression, une altération
quelconque des tubercules quadrijumeaux, voisins très rappro
chés delà protubérance. Mais une lésion des nerfs optiques, une
tumeur siégeant dans le voisinage de ces importants cordons
nerveux peuvent également troubler ou anéantir la vision.
N’a-t-on pas donné l’affaiblissement de la vue comme un symp
tôme des tum eurs de la région pituitaire ?
En adm ettant que dans les affections du mésocéphale, la vue
fût presque toujours troublée, il resterait à expliquer comment
chez certains malades ce désordre se traduit par une simple
diplopie, chez d’autres par une amblyopie pouvant aller
jusqu’à la perte complète de la vision. Dans l’impossibilité
de trouver la cause intime de ces phénomènes, qui se lie au
mystérieux mécanisme du système nerveux, bornons-nous à
mentionner le fait général, à savoir que dans les maladies de
la protubérance on a constaté souvent des désordres manifestes
de la vision.
Nous n’insisterons pas longuement sur la dilatation et le ré
trécissement de la pupille. Cessymptômes ont été notés dans un
�193
lois des bourdonnem ents d’oreille et 7 fois une faiblesse plus ou
moins grande de l’ouïe. Les troubles de l’odorat s'expliquent
par les changem ents survenus dans la muqueuse nasale, mem
brane qui reçoit des filets nerveux émanés du trijumeau; celle-ci
rougit, devient plus épaisse et plus molle, présente en un mot
tous les signes du coryza. La protubérance étant malade, on
conçoit sans peine que le trijumeau, qui naît directement de cet
organe, ne fonctionne point d’une manière régulière, que le co
ryza se produise et que l’odorat soit plus ou moins affaibli. Tous
ces phénomènes s’enchaînent. Les altérations du goût s’expli
quent plus facilement encore ; le nerf lingual en effet donne à
la langue la sensibilité gustative ; or, ce nerf est une ramifica
tion du maxillaire inférieur, branche importante du trijumeau.
Quant aux troubles de l’ouïe, ils sont plus difficiles a conce
voir. Cependant, si nous songeons que le muscle interne du mar
teau est animé par un nerf provenant du ganglion otique, que
d’ailleurs le nerf acoustique s’anastomose, avant de pénétrer
dans le conduit auditif interne, avec la grosse racine du nerf de
la 5* paire, nous aurons moins lieu d'être surpris des désordres
survenus dans l’audition. Une petite part dans la production de
ces troubles de I ouïe revient peut-être au facial, puisque le mus
cle de l’étrier est mis en mouvement par une branche émanée de
ce cordon nerveux.
Mais le nerf de la 7* paire donne lieu à des phénomènes bien
autrem ent importants. La paralysie faciale a été, en effet, rencon
trée souvent dans les maladies de la protubérance annulaire.
MM. Rilliet et Barthez l’ont observée chez un enfant dont le
mésocéphale et le cervelet contenaient des tubercules. M. le D'
Ladame, sur 26 cas de maladie de la protubérance, a noté 12 fois
des altérations du nerf de la 7e paire ; H fois ces désordres con
sistaient en une paralysie faciale et 1 fois seulement en une sorte
d’irritation du nerf h la suite de laquelle étaient survenus des
spasmes dans les muscles de la face. La paralysie l’emporte donc
de beaucoup sur Eexcitation du nerf. Telle n’est pas I opinion de
—
trop grand nombre de m aladies pour que nous puissions espé
rer qu ils nous soient d'un grand secours dans le diagnostic
des maladies du mésocéphale. La dilatation de la pupille étant
produite par les contractions des libres longitudinales de l'iris
animées par le grand sym pathique, et ce nerf — ce système de
ner/s, pour mieux dire — étant lié intim ém ent à la vie de l ame
et aux manifestations purem ent subjectives de notre être, il en
résulte que la pupille peut être énorm ém ent dilatée, en dehors
de toute influence morbide. De plus le système du grand sympa
thique, par ses connexions intim es avec le système cérébro
médullaire, peut subir plus ou m oins le retentissem ent des lé
sions siégeant sur ces centres, et am ener la dilatation de la pu
pille dans un très grand nom bre de maladies, autres que les lésionsdu mésocéphale. Toutau plusl étatde la pupille, meriterait-il
d’attirer notre attention s’il avait toujours été le même dans
tous les casde maladie du mésocéphale; si, par exemple, on avait
constaté toujours la dilation ou le rétrécissem ent de l’ouverture
pupillaire. Un phénom ène aussi persistant aurait pris alors une
grande im portance, car il aurait pu être l’indice d’un trouble
constant — par excitation ou par faiblesse — survenu dans les
fonctions du nerf m oteur oculaire commun. Mais il n’en est
rien. M. l.adamea noté seulem ent^fois l’inégalité des pupilles,4
fois la dilatation, 1 fois le rétrécissem ent des orifices pupillaires.
Résultat insignifiant comme on peut le voir.
En somme sur les quatre symptômes fournis par l’appareil
de la vision, strabism e, affaiblissement et troubles de la vue,
m ouvem ents du globe oculaire, état de la pupille, les deux pre
miers seulem ent nous paraissent avoir quelque valeur. Ces deux
sym ptôm es, surtout s ils se présentent simultanément, devront,
croyons-nous, faire songer à une maladie de la protubérance.
Nous avons supposé qu’une grave lésion du mésocéphale de
vait apporter des troubles m anifestes dans les fonctions de l’o
dorat, du goût et de l’ouïe. En effet, le docteur Ladame a trouvé
4 lois l'odorat troublé, G fois de notables altérations du goût, 2
—
�—
194
—
M. Gendrin. Ce médecin, dans ses recherches sur les tubercules
du cerveau et de la moelle épinière, insiste longuement sur les
accès épileptiques qui, d'après lui, accom pagnent presque tou
jours la tuberculisation cérébrale. Lorsqu’une tum eur de nature
tuberculeuse siège dans le mésocéphale, M. Gendrin croit que
les muscles du visage sont pris de préférence et que la maladie
débute par des accès convulsifs dans les m uscles de la bouche
et des joues. Cette opinion ne concorde point avec les faits ob
servés par M. Ladame, puisque, ce m édecin a vu une fois seule
ment des m ouvements convulsifs de la face. En général on a
beaucoup exagéré en France et même en Allemagne la valeur
des troubles convulsifs dans les affections de la protubérance.
Cependant Friedreich a rencontré très rarem ent les convulsions
dans ces maladies, et nous voyons le médecin de Neufchâtel ne
les observer que 5 ou A fois sur 26 cas. Il ne faudra donc pas
com pter, pour établir le diagnostic d ’une lésion du mésocéphale,
sur le phénom ène général convulsions, encore moins, malgré
l’opinion de M. Gendrin, sur les convulsions de la face. Au con
traire, la paralysie faciale sera un signe fort im portant. Dans les 11
cas observés par M. Ladame et dans celui que citent MM. Rilliet
et Barthez, cette paralysie siégeait du même côté que la tumeur.
L'hémiplégie a été observée plus souvent encore que la para
lysie faciale : on l a notée dans la moitié des cas. Presque tou
jours elle se trouvait du côté opposé à la lésion, comme Valieix
l’avait indiqué. Si un abcès siège dans la protubérance, dit cet
auteur, et s il est borné a un seul côté, il y a hémiplégie du côté
opposé. M. Ladame a trouvé que, dans la très grande majorité
des cas où la paralysie faciale coïncidait avec l’hémiplégie, le
phénomène signalé par M. Gubler se présentait, c’est-h-direque
l’hémiplégie était alterne ( la face étant paralysée d’un côté et le
corps du côté opposé ). Chez notre malade la paralysie faciale
était peu accentuée ; elle existait cependant. La commissure la
biale légèrem ent abaissée^ droite indiquait chez Gislello un peu
de paralysie dans les muscles faciaux du côté gauche ; toute la
moitié droite du corps, au contraire, était frappée d’une paralysie
du sentim ent et du mouvement.
Nous devons dire que le a s de notre malade ne nous semble
pas très concluant, — au moins relativement à l’hémiplégie al
terne, — à cause de la multiplicité des lésions observées chez lui.
Qui pourrait assurer que F hémiplégie alterne présentée par Gistello fût occasionnée par la maladie du mésocéphale, alors
qu’un énorme foyer de ramollissement existait sur le corps strié
et la couche optique du côté gauche ? La paralysie résultant de
cette dernière lésion ne devait-elle pas exister naturellement à
gauche sur le visage, à droite sur le corps ? Notons de plus que
les symptômes de paralysie faciale ne paraissent s’être manifes
tés chez Gistello que dans le courant du mois de janvier; or,
d’après ce que nous avons dit précédemment de ce malade, il y
aurait quelque raison de croire que la lésion de la protubérance
s’est produite longtemps avant le ramollissement du cerveau; la
paralysie faciale survenant au mois de janvier paraît donc avoir
coïncidé avec l’époque probable où le ramollissement cérébral
commença à se manifester. Le fait de Gistello, si difficile à ana
lyser, ne peut en conséquence être donné comme une preuve
sérieuse en faveur de l’hémiplégie alterne. Toutefois, ce fait
isolé ne diminue en rien l’importance des résultats obtenus par
MM. Gubler et Ladame.
Un fait très important ressort d’ailleurs des recherches du sa
vant médecin suisse. Si la paralysie faciale a manqué lo fois sur
26 dans les maladies de la protubérance, chez tous les malades,
— un seul excepté, — il y a eu des troubles de la motilité plus
ou moins considérables. Ces derniers ont été très variés : c’était
tantôt de la faiblesse musculaire h divers degrés,de l’hemiplégie,
de la paralysie générale, tantôt des convulsions, des spasmes,
des contractures, des mouvements irréguliers. Cependant, les dé
sordres par faiblesse ou par suspension des fonctions motrices
l’ont emporté de beaucoup sur ceux provenant d’une excitation
de ces mêmes fonctions. Ceci s’accorde avec ce que la physiologie
�196
nous apprend du mésocéphale. Cet organe, avons-nous dit pré
cédemment en nous appuyant sur les expériences modernes,
semble être un centre de perceptivité pour les impressions et
d'incitation pour les m ouvem ents volontaires; de plus, il parait
conduire a la périphérie le courant m oteur émané des lobes cé
rébraux. Conclusion : si lé mésocéphale est gravement lésé les
mouvements volontaires doivent-être troublés, diminués ou abo
lis. Les faits confirm ent cette m anière de voir ; il est désormais
acquis a la science que les troubles de la motilité sont un des
symptômes les plus sûrsdesaflectionsde la protubérance; parmi
ces désordres, les plus fréquents sont les paralysies diverses.
N ’oublions pas de dire que ces paralysies sont accompagnées le
plus souvent de la perte du sentim ent dans les parties correspon
dantes aux muscles affectés.
Dans un certain nom bre de cas, on a noté de la paralysie géné
rale. Celle-ci, d’après M. Ladame, apparaît rarement dans le
cours de la maladie.
« La paralysie généralisée, dit ce m édecin, se déclare en gé« néral aux approches de la m ort. On voit la paralysie, qui jus« qu’alors n'avait frappé qu’une m oitié du corps, s’étendre à la
« jambe du côté opposé, puis atteindre l'extrém ité supérieure. »
Chez Gistello nous avons observé la m êm e m arche; un mois en
viron avant sa mort, cet hom m e, qui n ’avait eu jusqu'à ce mo
ment que le côté droit paralysé, a été pris successivement dan's
toute l’étendue du côté gauche. La paralysie généralisée , si I on
se basait seulement sur les faits observés par le l)r Ladame, pa
raîtrait donc être une term inaison des maladies de la protubé
rance plutôt qu’un véritable symptôme. Cependant, les auteurs
m entionnent des laits qui ne confirm ent pas cette assertion.
Valleix a rencontré la paralysie générale, longtemps avant la
mort, chez des malades atteints d’un ramollissement étendu de
la protubérance annulaire; cet auteur signale également ce signe
comme accompagnant les collections purulentes qui occupent le
centre ou la totalité de cet organe. M. Serre, de son côté, a vu
197
le même symptôme dans descasd'hémorrhagie du mésocéphale.
Tous ces faits prouvent au moins que la paralysie générale se
rencontre assez souvent dans les affections de la protubérance;
ce symptôme, surtout s’il coïncide avec d'autres signes, aura
donc une certaine importance.
Leu, Gistello et d’autres malades ont présenté une très grande
incertitude dans la marche, une sorte de manque de coordination
dans les mouvements rappelant les symptômes de ce genre ob
servés dans les maladies du cervelet. Ce signe est moins surpre
nant qu’il n en a l'air ; le bulbe rachidien envoie, en effet, de
nombreux prolongements dans le cervelet et une partie des fibres
ijui se rendent à ce dernier organe traversent la protubérance; il
peut donc se faire qu’une lésion occupant la plus grande partie
du mésocéphale détruise ces fibres et par conséquent retentisse
sur le cervelet.
Les vomissements, la constipation, l’état du pouls ne nous
paraissent pas pouvoir guider l’observateur dans ses recherches.
Les vomissements indiqués comme un symptôme des tumeurs
cérébrales manquent le plus souvent dans les maladies de la pro
tubérance, ou du moins ils se présentent d'une manière trop
irrégulière pour qu’on puisse établir un lien quelconque entre
un pareil symptôme et le siège de la maladie. Le pouls est ordi
nairement lent, la constipation est assez fréquente, mais tous ces
signes se présentent dans un très grand nombre de maladies, et
par suite ne se rattachent point d'une manière particulière aux
affections du mésocéphale.
La céphalalgie manque rarement dans les maladies de la pro
tubérance. En général, elle est vive, opiniâtre; elle survient quel
quefois par accès et souvent se trouve localisée à la région occi
pitale. Nous avons vu cependant Gistello accuser de vives dou
leurs céphaliques siégeant exclusivement sur le front. La cépha
lalgie d’ailleurs, en raison de son apparition fréquente dans les
maladies cérébrales, ne nous semble pas devoir servir, plus que
les vomissements ou Je ralentissement du pouls, au diagnostic
—
-
�198
d’une lésion de la protubérance. Tout au plus lés douleurs cé
phaliques auraient-elles une certaine signification si elles exis
taient d'une m anière perm anente à la région occipitale.
Ces divers signes, néanmoins, ont leur valeur en ce sens qu’ils
concourent tous à désigner la masse encéphalique comme le siège
du mal.
Un phénomène plus im portant et se rattachant d’une manière
plus directe au mésocéphale, est la gène dans la déglutition. Elle
manquait chez Gistello ; mais le Dr Ladame a eu fréquemment
l'occasion de noter ce symptôme dans les maladies du mésocé
phale, et M. Cruveilhier, de son côté, l’a observé dans un cas
d’apoplexie considérable de la protubérance. Ce signe, quoique
ne se présentant pas toujours dans les affections du mésocéphale,
nous parait avoir une grande valeur; sa présence, au milieu
d un cortège de symptômes se rattachant à une maladie encé
phalique, pourra donc m ettre sur la voie d’une lésion de la
protubérance.
Comment expliquer cette gêne de la déglutition? Le nerf
maxillaire inférieur anime un des m uscles qui concourent au
mouvement de déglutition, le muscle périslaphylin externe;
sans doute ce muscle pourra être paralysé par la lésion de la
protubérance et le trouble survenu consécutivement dans les
fonctions du maxillaire inférieur; mais l’inaction des péristaphylins externes suffit-elle pour expliquer la gêne si considéra
ble de déglutition qu’on a observée dans certains cas ? Nous
ne pouvons le croire et il nous semble que la question est plus
complexe.
Les muscles nom breux, indépendam m ent des péristaphylins
externes, qui agissent dans la déglutition reçoivent leur mou
vement des nerfs glosso-pharyngien, pneumo-gaslrique, spinal
et grand hypoglosse. Ces cordons nerveux ne naissent point de
la protubérance ; mais il im porte de rem arquer qu'ils se distri
buent à un certain nom bre de muscles, dont le jeu peut être
soumis à l’empire de la volonté ; de ce nombre sont les muscles
—
—
199
qui produisent le mouvement de déglutition ; si le mésocéphale
est détruit, l'incitation volontaire émanée des lobes cérébraux
s'arrêtera fatalement au niveau de la protubérance, et ne pourra
pas plus se transm ettre aux nerfs glosso-pharyngien, pneumo
gastrique, spinal et grand hypoglosse pour commander la dégluti
tion, qu’aux cordons nerveux du bras ou de la jambe pour pro
duire les mouvements de ces parties. Leu, quoique porteur
d’une grave lésion du mésocéphale, n'avait pas perdu la jouis
sance des mouvements volontaires ; mais c’est là une exception,
il ne faut pas l’oublier, et elle ne saurait renverser notre hypo
thèse.
La même théorie pourrait être admise au sujet de l’abolition
de la parole. Ce signe a été constaté, dans les maladies de la pro
tubérance, plus souvent encore que la gêne de la déglutition, et
c’est un de ceux qui ont le plus fixé l’attention des observateurs.
Sans nul doute, si l’intelligence était toujours atteinte dans les
affections de mésocéphale, on comprendrait sans peine que la pa
role, manifestation extérieure de la pensée, fût abolie; mais il
n’en est rien. Les faits prouvent au contraire, que dans les lé
sions, même les plus graves, de la protubérance, l’intelligence
est le plus souvent conservée. Gistello en est un exemple : jus
qu’au dernier moment ce maladeacompris, — a eu l’air au moins
de comprendre, — ce qu’on lui disait ; pourtant près d'un mois
avant sa mort, il ne pouvait presque plus parler. Chez Leu égale
ment « la 'perception intellectuelle était nette, » et cependant la
parole était inarticulée. Ce malade, comme Gistello, avait une
protubérance à peu près complètement détruite. Deux obser
vations insérées dansles Archives générales de médecine (oe
série ; tomes 8 et 18) contiennent les détails suivants :
1" malade : tubercule dans le mésocéphale ; intelligence par
faite, parole inintelligible.
2’ malade : tumeur fibro-plastique dans la face inférieure du
pont de Varole et du bulbe ; intelligence parfaite, abolition de
la parole.
—
—
�—
200
—
M. Cruveilhier cite dans son Traité d'Anatomie pathologique
l’observation de deux sujets, l’un atteint d'une hémorrhagie con
sidérable delà protubérance, chez lequel il y avait impossibilité
absolue d’articuler tessons et conservation pleine et entière de
l’intelligence, l’autre porteur de noyaux tuberculeux dans la
protubérance, — le cervelet étant aussi euvahi partiellement —
et dont l’intelligence était restée parfaite quoique l’articulation
des sons fût difficile.
Il parait donc prouvé par les faits que le mésocéphale peut
être profondément lésé sans que l’intelligence soit atteinte.
Cependant, on ne peut nier que, dans un certain nombre de cas,
certains troubles intellectuels n’aient apparu. Ces faits sont fort
difficiles a expliquer, et nous sommes forcés, pour nous en ren
dre jusqu'à un certain point com pte, d’adm ettre, faute de mieux,
I hypothèse d’un retentissem ent produit sur les lobes encépha
liques, par la lésion de la protubérance. Mais alors pourquoi ce
retentissem ent n’a-t-il pas lieu dans tous les cas ? Mystère.
Q uoiqu’il en soit, le fait clini<]ue qui résulte de tout ceci
c’est que, si les lésions de la protubérance sont quelquefois
accompagnées de troubles intellectuels, dans un grand nombre
de cas on constatera i intégrité de l'intelligence et en même
temps Tvyipossibilité d'articuler les sons. Ce signe est rare
dans les affections cérébrales ordinaires ; il a donc une impor
tance réelle pour le sujet qui nous occupe.
Mais dans le cas où l’intelligence est parfaitement conservée,
comment se rendre compte de la perte de la parole ? On pourrait
invoquer ici un retentissem ent physiologique sur le point de
l’encéphale qui préside a la parole. Mais cette explicationestdes
plus nuageuses, ou pour mieux dire elle n’explique absolument
rien. Dans quelle partie du cerveau faut-il placer le siège de la
parole? On l’ignore. Comment et par quelle voie une lésion de
la protubérance pourrait-elle réagir sur cette circonvolution
m ystérieuse ? On ne le sait pas davantage. Reste donc à invo
quer l’inactivité des parties qui interviennent physiquement pour
—
201
produire l’articulation des sons. Ces parties, c'est-à-dire les lè
vres et la langue, sont animées par les nerfs facial et grand hypo
glosse. Nous avons vu que la paralysie faciale se présentait sou
vent dans les maladies de la protubérance; riend’étonnant en
conséquence a ce que ces affections amènent une gêne considé
rable dans le mécanisme des lèvres. Quant au nerf grand hypo
glosse, si ]’hypothèse que nous avons émise au sujet de la gêne
de la déglutition est vraie, lincitalion motrice émanée du cer
veau parvenant incomplètement à ce nerf, on conçoit facilement
que la langue soit plus ou moins paralysée. Ce dernier organe,
de même que les lèvres, ne pouvant fonctionner librement, la
parole sera abolie ou au moins inintelligible. Notons en passant
que les mouvements de la langue sont parfaitement volontaires
quand ils ont pour fin unique la parole. On ne parle que lors
qu’on veut m anifester extérieurement sa pensée, et dans ce fait
la volonté intervient.
En résumé il est facile de voir que la pathologie des maladies
du mésocéphale est loin d’être complète. Parmi les signes qui
nous paraissent se rapporter plus particulièrement à une lésion
de cet organe nous rappellerons le strabisme convergent, sur
tout s’il coïncide avec des troubles de la vision, la paralisie fa
ciale, l hémiplégie alterne et peut être la paralysie généralisée,
la céphalalgie occipitale, la gêne dans la déglutition, enfin l’inté
grité intellectuelle coïncidant avec la perte ou la gêne de la parole.
Dans la prem ière partie de ce travail, prenant pour point de
départ la constitution anatomique du mésocéphale, nous avons
décrit idéalement et b grands traits l’ensemble des désordres pro
duits dans l’économie par la destruction complète de la protubé
rance annulaire. Nous avons vu que les expériences des physio
logistes confirmaient une partie de notre hypothèse; la clinique
donne aujourd’hui raison de la manière la plus complète aux con
clusions basées sur les données anatomiques. Sans doute nous
�—
202
—
203
—
n’avons trouvé nulle part, dans tous ses détails, la forme type
femme Rambaud, boulevard National. A l’hôpital de la Concep
que nous avions décrite, — tout ce qui est idéal n'est point
tion, une domestique, entrée le 19 septembre, fut prise de cho
appelé à avoir ici-bas une réalisation complète, — mais du moins
léra dans les salles, et succomba le 22 janvier. Les diarrhées
il nous a été donné de retrouver dans les faits cliniques les prin
étaient encore nombreuses â celte époque, et d’une certaine gra
cipaux traits de notre esquisse, les caractères importants de no
vité, puisque l’hôpital Saint-Esprit perdit deux de ses malades.
tre description pathologique. La conservation de I intelligence
— D’ailleurs les entrées dans les hôpitaux ne diminuaient point,
J abolition de la sensibilité et des mouvements volontaires, les
et, â la fin janvier, le chiffre de la mortalité générale avait aug
troubles des sens, la paralysie des nerfs facial trijumeau, mo
menté en ville de 50 environ sur celui du mois précédent.
teurs oculaires, voilà autant de signes capitaux que les études
La constitution médicale de janvier n’était donc pas d’un très
à tour ré
bon augure pour les mois suivants ; cependant, le mal ne fut pas
vélés. C ’est qu’en effet l'anatomie et la pathologie sont unies
en s’aggravant, car l’Hôtel-Dieu ne perdit, en mars, que deux
l une à l’autre par un lien des plus intim es; pour le médecin,
cholériques, marins débarqués.— Nous devons a la vérité de
autant que pour le chirurgien, les connaissances anatomiques sont
déclarer, â l’asile public des Aliénés, deux décès dus au choléra,
indispensables et elles facilitent singulièrement l'intelligence de
le 13 de ce même mois.
d'amphithéâtre et l’observation clinique nous ont tour
ce livre mystérieux qu’on appelle la Clinique.
Dr S eux fils.
Quant aux cas de choléra, très rares, signalés en ville, ils se
montrèrent toujours isolés etne donnèrent lieu, par conséquent,
à la création de foyers
épidémiques ; néanmoins ce ne fut
qu’en avril et mai où Je choléra asiatique cessa de figurer parmi
Sur la nouvelle épidémie de choléra de 1866, à Marseille
les maladies régnantes.
Le bulletin de la santé publique s’améliorait considérable
Les épidémies de choléra, qui se sont succédé à Marseille,
ment : dans ces deux mois, nous eûmes plusieurs journées où
depuis plus de 30 années, ne nous ont que trop convaincu des
' 'état-civil n’inscrivit que 8 et 9 décès, pour toute la ville et la
difficultés qu’il y avait toujours eu à s’en débarrasser prompte
banlieue. On pouvait donc se considérer désormais comme dé
ment.
livré complètement de toute influence épidémique.
Officiellement, l’épidémie cholérique de 1863, clôture le 17
novembre; cependant le mal indien ne disparaissait réellement
qu’en avril 1866.
Cette heureuse situation devait-elle se continuer longtemps ?
Les faits vont nous répondre.
Déjà, dans le n° de juin 1866 de Y Union Médicale de Provence,
En effet, pendant le 1er trimestre decette année, nos hôpitaux
le savant collègue qui rédigeait la Chronique mensuelle ma
civils reçurent de l’extérieur des malades cholériques, ou vi
nifestait ses craintes pour l’avenir, quoique le présent fût très
rent se déclarer dans les salles quelques attaques de choléra.
rassurant et que les registres de l’hôpital n’aient jamais compté
Ainsi le 5 janvier,un nommé Ahmet, jeune marin de 22 ans, à
si peu de décès. Le choléra, ajoutait-il, est â Alexandrie, il y
bord du navire ottoman le Séverin-Pokir, vintsuccomber à l’Hô-
fait des ravages, et Marseille s’émeut justement de ce lointain
tel-Dieu. Le 11, c’est encore un marin qui meurt d’anémie, suite
écho.
de choléra, rue Pclite-Roquebarbe. Le
18, on enregistrait la
Le 2 mai, le navire le Said, arrivait d’ Egypte â Marseille, et
�—
—
204
fut envoyé illico a la Ciotat, pour subir quelques réparations ; il
y faisait, le 5 , son entrée, et venait jeter l'ancre au milieu du
port, ù quelques mètres du quai.
Avant d'entrer plus avant dans notre récit, il est très im
portant que tout le monde sache que, à La Ciotat comme a
Marseille, le choléra avait complètement disparu, et que, depuis
les premières chaleurs, les médecins de la localité n'avaient
point noté de constitution médicale spéciale. Cependant, le 11
mai, a La Ciotat, un vieux patron pécheur, domicdié sur le quai,
en vue du Said, succombait à une attaque de choléra parfaite
ment caractérisée. De cette maison, la maladie se répandit à
celles voisines et ce premier décès fut ainsi bientôt suivi de 6 ou
7 autres. Le Said eut, le 23 seulement, un malade cholérique
qui guérit promptement. — Quelque temps après, les Message
ries envoyèrent a La Ciotat les navires en bois I 'Osiris et le
Caire, qui avaient servi aux transports des Caravanes; ces deux
navires ont dû être démolis et les épaves déposées sur les
quais. (1)
En présence de la réapparition du choléra, les habitants de La
Ciotat, encore sous l'impression des malheurs de l ’année der
nière, commencèrent d’émigrer. Il est constant que l’émigra
tion prit bien vile des proportions considérables, et fil arriver à
Marseille de nombreux habitants de celte localité ; les uns ne
tirent que passer dans nos murs, les autres s’y installèrent, re
tenus sans doute par l'attrait des processions de la Fête-Dieu.
Dès ce moment, le choléra apparut de nouveau â Marseille.
Mais a défaut des émigrants que nous transportait la voie fer
rée, nos relations maritimes avec La Ciotat, quoique faibles,
n’auraienl-elles pu servir a importer quand même le fléau indien
dans nos murs. A-t-on fait faire quarantaine aux nombreux
bâtiments (plus de 50) partis avec chargement de La Ciotat, du
(1) Tous ces renscigucmenls, nous les devons à l’obligeance de M. le docteur
Bertulus, qui a dressé une enquête 1res détaillée sur ces derniers événements de
La Ciotat.
205
—
17 mai au 19 ju ille t, à destination de Marseille ? et parmi ces
arrivages, nous en trouvons deux, à la date des 12 et 14 ju in ,
avec chargement de bois â brûler et billots, qui pourraient
bien provenir de la démolition des navires dont nous parlions
tantôt.
Le'vapeur français le Thabor, parti sur l’est, le 28 mai, de La
Ciotat, n ’est-il pas arrivé â Marseille le 29 ? Il est vrai qu’ une
seconde fois ce même navire, après avoir quitté La Ciotat le 28,
juin, rentra à Marseille le 2 juillet seulement. Le Said a-t-il
été envoyé en quarantaine d’observation, avant de faire son en
trée, le 5 ju in , dans notre port '?
Si nous hésitions â adopter l’ idée d'une nouvelle importation,
il nous faudrait admettre la présence de germes cholériques dé
laissés par l'épidémie de 1865, et venant éclore subitement,
sans trop savoir comment, à La Ciotat et â Marseille. Notre rai
son ne peut accepter une semblable hypothèse. La Ciotat n a
jamais été classée au nombre des villes malsaines, que les épidé
mies atteindraient de préférence. La peste de 1720 n’y pénétra
point. En 1834-35-49-54, elle n’eut que des cas isolés de cho
léra, chez des passagers, — tandis que, en 1865, elle a perdu
38 habitants. D ’ailleurs, pourquoi ces mêmes germes ne se se
raient-ils pas développés dans Toulon, La Seyne, Solliès-Pont,
etc., qui, l’année dernière, ontété bien plus maltraités que nous?
— Par contre, en 1865, le choléra a visité en première ligne
les ports où abordent les Messageries du Levant, épargnant
tout d’abord Celte, Port-Vendre et autres villes voisines du
littoral qui n ’ont que des relations indirectes avec ces navires.
Une fois le choléra â La Ciotat, rien ne s’est opposé à ce
qu’il pénétrât â Marseille, au moins par la voie ferrée.
Les attaques cholériques, d ’abord peu nombreuses et isolées
pendant la première quinzaine de ju in , se manifestèrent plus
fréquemment à la fin du même mois. En juillet, elles augmentè
rent, mais en conservant, au dire des médecins qui ont soigné
les premiers malades, un caractère de bénignité qui ne leur était
�—
206
—
-
207
-
pas encore connu. Cependant, à côté de celte bénignité, toute
Plus heureux que nos confrères d’Amiens, aucun des mem
relative bien euteudu, on remarquait, non sans émotion, l’e x
bres de notre lamille médicale n’a succombé. Cependant, plu
tension rapide que paraissait vouloir prendre la maladie sur
sieurs médecins et élèves ont ressenti l ’influence cholérique ;
certains point de la ville. Subitement après la journée du 16, où
mais ces atteintes: n’ont jamais été de nature à inspirer des
le choléra ne faisait que 4 victimes, l ’état-civil inscrivit officiel
craintes sérieuses. Les pharmaciens seuls ont payé un doulou
lement, le lendemain 17 ju ille t, vingt-deux décès cholériques.
reux tribut à l’épidémie. Dès les premiers jours de la réappari
Depuis, ce chiffre de décès s'est maintenu a peu près le même,
tion du choléra à Marseille, quelques médecins ont devancé
avec quelques oscillations, et comme le choléra est en voie
l’appel de l’Administration, et ouvert des Bureaux de secours,
décroissante dans les localités voisines premièrement infec
dans les quartiers où la maladie sévissait le plus. — L Autorité,
tées, nous avons l’espoir qu’ il cessera bientôt ses ravages à
de son côté, redoublant de soins, veille à l’entretien de la salu
Marseille.
brité des rues et a leur désinfection. Espérons que tant d’abné
Voici la liste des décès cholériques depuis le 5 juillet 1866:
gation et de dévouement triompheront du fléau qui désole notre
ville.
Dr C. M é k é c ie r .
J U IL L E T .
DÉCÈS
DÉCÈS
CHOLÉRIQUES.
JOURS.
JOURS.
GÉNÉRAUX.
5
6
7
8
9
10
1t
12
13
14
15
16
17
18
30
21
27
24
30
31
34
27
29
31
23
30
56
56
CHOLÉRIQUES.
Chronique m ensuelle. — Nouvelles et variétés.
G ÉN ÉRA U X .
1
1
2
2
1
1
1
2
4
2
3
4
22
27
R e p o rt..
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
29
30
31
58
44
50
37
47
31
40
37
51
45
42
64
38
73
73
28
19
18
14
19
11
20
16
21
20
16
23
18
314
Abondance de biens ne nuit pas, dit le proverbe. C’est une
erreur, du moins pour ce qui concerne Y Union Médicale de la
Provence, que l’abondance des matériaux empêche, cette fois,
de se présenter avec une véritable chronique mensuelle, il est
vrai que les deux évènements du mois pour le public médical de
Marseille, le concours et le choléra, ont reçu, dans ce numéro ,
une place digne de leur importance. Laissons donc, pour celte
fois, notre chroniqueur se reposer sur ses lauriers ; mais nous
prenons envers nos lecteurs l’engagement de ne plus lui donner
vacance de longtemps.
La bibliographie chôme également; que voulez-vous , chers
Le prompt développement qu’a fait en ville le choléra, n'a
confrères, nous avons tant de choses à vous dire ! E l cependant
pas été moins sensible dans nos hôpitaux. — Après avoir reçu
nous avons un article qui est tout prêt ; il s agit du Tableau
quelques cholériques a I H ôtel-D ieu, les malades de la clinique
Ophthalmoscopique, du docteur Em ile Martin ; cet article vous
(salledes femmes) furent atteints rapidement. A la suite de cette
était promis, nous vous le faisons soupirer ; ayez patience en
importation dans les salles, deux infirm iers du personnel des
core un mois.
hôpitaux sont morts du choléra les 17 et 18 juillet.
Un s est beaucoup battu le mois dernier, je veux dire qu’on
�—
208
209
—
—
a vigoureusement lutté; mais c’était a I Académie de médecine,
et il n’y a pas eu de morts, pas même, espérons-le, de blessés ;
ou n’a enterré ni la méthode sous-cutanée, ni son vulgarisateur.
DES INJECTIONS FORCÉES DANS L’OCCLOSION INTESTINALE
P ar lf. D' Ch . ISNARO (de Marseille ).
L'Académie a lait une précieuse acquisition dans la personne
de M. Broca ; elle a eu le malheur de perdre M. Gibert, enlevé
par le choléra, qui a fait dans le corps médical encore deux au
tres victimes : M . Franck
Chaussier, à Paris, et M. James, à
Amiens.
L'Académie n’est pas le seul corps savant qui propose des
sujets de prix ; plusieurs sociétés de province la suivent dans
Sommaire. — I. Observations.— Réflexions : difficultés, importance et proba
bilités du diagnostic.
Il — Coup d’œil sur le traiiement mécanique. — Des injections forcées. —
Bibliographie; faits cliniques.— Manœuvre ; effets ; bénignité habituelle;
accidents ; avantages et revers. — Des injections forcées relativement à la
nature de l’occlusion intestinale. — Des injections forcées relativement au
siège : 1» Occlusion du gros intestin. 2» Occlusion de l’intestin grêle. Rôle
de la valvule iléo-cœcale : comment elle résiste et cède; expériences cada
vériques ; faits pathologiques — Résumé.
celte voie , et notamment le Comité Médical des Bouches-duRhône, qui nous adresse le programme suivant :
« Le Comité Médical des Bouches-du-Rhône, reconnu par dé
cret impérial comme établissement d’utilité publique , décer
nera, dans sa Séance Générale d’A vril 1807 :
Ce travail contiendra :
1° Deux exemples nouveaux d’occlusion intestinale guérie
parles injections forcées ;
2° Une étude sur ce mode de traitement.
« 1° Une médaille d’or de la valeur de 200 fr. a l’auteur du
meilleur mémoire sur la question suivante :
« — Quels sont les devoirs professionnels des médecins vis-àvis de l’autorité, de leurs confrères et du public? Doivent-ils
accéder à toute demande de l’autorité, à celles de leurs confrè
res, et aux exigences des clients ? Quelle est la limite dans la
quelle ils doivent se tenir ?
I.
Obsrrvation I . — L e je u n e P ..., âgé de quatre ans et demi,
d’une forte constitution, est atteint d’occlusion intestinale au
milieu d’ une santé parfaite. La dernière selle a lieu le 22 octobie 1857 ; aucun trouble digestif n’existait les jours précé
dents. La constipation persiste avec opiniâtreté jusqu’au 6
novembre. Au début, il y a des co iques vives inlerm Uenles.
« 2 Une médaille d’or de la valeur de 200 fr. à l’auteur du
meilleur mémoire sur le sujet suivant :
« — Par quelles réformes dans le service de la police sani
taire peut-on arriver a 1 extinction des maladies vénériennes ?
Les vomissements suivent de piès la suppression ('es sel es; ils
sont d’abord alim entaires, puis b ilieux,
enfin steicoraux;
l’estomac rejette a ptm près tout ce qui lui est confié. Le ventre,
méléorisé de bonne heure, acquiert, dans les derniers jo u rs, un
« Les mémoires, écrits en Français, devront être parvenus au
volume considérable. Il n y a jamais eu, à proprement parler, de
siège du Comité Médical à Marseille, rue de l’ A rb re, 25, avant
fièvre, jamais cette sensibilité exquise et superficielle provoquée,
le 1er mars 1867, terme de rigueur.
dans la péritonite, h la moindre pression. Le ballonnemeut du
« Les auteurs qui se feraient connaître sont exclus du con
cours. v
ventre rend inutile toute exploration destinée a préciser le siège
et la nature de l’occlusion. Dans leur marche lente, les symp
Le Comité de rédaction.
tômes locaux et généraux se sont sans cesse aggravés jusqu'au
seizième jou r.
Marseille. Typ. et LiUi Arnaud, C ayerel C., rue Saint-Ferreol
9
�—
210
—
Le 6 novem bre, la dépression des forces est extrême , le pouls
petit, filiform e, insensible, la respiration très gênée, la peau
—
211
—
en général natu relles, deviennent de temps en temps un peu
liquides; elles ne renferment jamais de fragment d’intestin.
froide et visqueuse, la face pâle et profondément altérée; les
Le 23 novem bre, une diarrhée abondante survient ; rien ne
yeux sont enfoncés dans leur orb ite; la vie semble près de s’é
peut l’arrêter ; il y a tous les jours un grand nombre de selles ;
teindre; l'intelligence seule est conservée.
la maigreur et l’ affaiblissement font de rapides progrès; l’enfant
Du 22 octobre au 5 novem bre, j ’em ploie, h l’ intérieur et à
expire le 3 décembre.
l’ extérieu r, la plupart des médications usitées. J ’insiste parti
culièrement sur la belladone et sur les purgatifs donnés par la
O b ser v a tio n I I . — R . . . , 72 ans, vieillard d’une constitution
bouche et en lavement, sur le sé n é , le calomel, etc. Chaque
maigre et sèche. Depuis vingt ans, il porte une hernie inguinale
substance ingérce est bientôt rendue, laissant persister, avec
gauche volumineuse. Celle-ci, toujours abandonnée à elle-même,
les vomissements et la constipation, tous les signes de l'occlusion
n’a cessé de rentier et de sortir avec facilité.
intestinale.
Dans la soirée du 6 novembre, j ’ai l’idée de recourir aux injec
tions forcées, sans y attacher, je l’avoue, beaucoup d’espérance.
Je fais pousser, par le rectum, un courant continu d’eau froide
Dans le mois de juin 1861, elle s’engoue, offre de grandes
difficultés de réduction, et alors seulement elle détermine le
malade à appliquer un bandange.
En août, survient tout-â-eoup une occlusion intestinale.
aussi abondaot que possible. Dans son affaissement, l’enfant
Comment s’est-elle opérée? Sans me liv re ra des conjectures,
s’abandonne presque sans résistance à celle manœuvre, dont le
je dirai seulement que la constipation n’a joué ici aucun rôle, et
résultat immédiat est d augmenter encore l’angoisse respiratoire.
que la hernie , tout en ayant préparé peut être le nouvel accident,
Les selles ne tardent pas a avoir lieu. Elle s se répètent plusieurs
n’en a pas été la cause directe. En effet, il n’y a pas d’étran
fois très copieuses, avant m in u it; l’ eau est rendue entraînant
glement dens le canal ing u in al, l’intestin rentre et sort aisément ;
avec elle des gaz et des matières slercorales; celles-ci n’offrenl
l’anneau est très-laige et l ’on ne constate ni tumeur, ni douleur
rieu de remarquable ui par leur quantité, ni par leur dureté, ni
h son voisinage.
par leur fétidité gangréneuse, ni par leur couleur noirâtre, ni
par la présence de corps étranger ou de débris d’intestin.
Quoi qu'il en so it, voici les symptômes offerts par le malade,
du 7 au 16 août :
A ces évacuations succède un soulagement instantané; le
Vorhissements au début alim entaires, puis muqueux et bi-
ventre se déprime; les vomissements s’arrêtent; la prostration
liëux, plus tard stercoraux. Soif vive, ardente. Constipation
cesse; la physionomie se ran im e: tout, en un m o t, signale la
invincible pendant une dizaine de jours. Les bo ssons et les pur
disparition de l ’étranglement.
gatifs, d’abord rejetés par les vomissements, sont entièrement
8 novembre, état général bon, pools rele vé , réveil de l’appétit.
gardés à la fin. Météorisme et ballonnement énorme du ventre.
— Le 1 0 , il n’y a pas de selle depuis le 7 : un lavement et de
Altération des traits ; faciès livide et grippé ; anxiété , angoisses;
faibles doses de calomel rétablissent la liberté du ventre.
pouls petit, m isérable, imperceptible; refroidissement de la
Le 1 2 , l ’enfant est bien , il se lève et a repris sa gailé. Fonc
tions digestives régulières; une selle normale. Cet état satis
faisant dure encore une dizaine de jours. Les déjections alvines,
peau ; sueurs visqueuses ; émaciation cadavérique; intelligence
nette; voix éteinte ; langue glacée; hoquet : état alarmant.
Traitement: purgatifs divers par la bouche et en lavements,
�__
—
séné en particulier ; belladone ; glace Le M i, après avoir défi
nitivement reconnu I impuissance de ces m oyens, je fais diriger
213
Relativement à la cause, on éloignera dans les deux cas l'idée :
soit d’une lésion organique ayant lentement agi sur l'intestin .
dans le gros intestin une injection très-abondante d’eau froide.
telle que cancer, rétrécissem ent, compression par une tumeur
On persiste jusqu’à ce que le liquide soit violemenl repoussé à
voisine; soit d’un corps étranger, tel que amas durci de matière
l’extérieur malgré la volonté du malade. A la suite de cette ten
lécale, noyaux de fru its, os, paquets de lombrics, calculs bi
tative, des matières slercoralesel beaucoup de gaz sont entraînés
liaire ou intestinal. En effet, rien de pareil ne s'est révélé avant,
au dehors avec le lavement. Dès lo rs, la liberté de l’intestin est
pendant ou après les accidents.
rétablie; les selles se régularisent; les symptômes locaux et
Par voie d élim ination, on est forcé d’admettre une inva
généraux de l ’occlusion cessent et le vieillard est rendu promp
gination, ou bien la torsion de l’intestin sur lui-même, ou
tement à la santé,
encore l’étranglement par un anneau . par une bride péritonéale.
L invagination étant, dans le jeune âge surtout, le mode le
R éflexions .— V o ic i, au point de vue du diagnostic et du
plus commun d’étranglement interne, il faut supposer un ac
traitement, quelques réflexions suggérées par les deux observa
cident de celte nature, chez l’enfant sujet de ma première
tions précédentes.
observation.— Chez le vieillard, la piésence d’ une ancienne
Rappelons d’ abord ce fait général : autant il est facile de
reconnaître l’occlusion complète
de l'intestin , autant il est
souvent d illicile , impossible même d’en préciser le siège et la
hernie rend très probable la constriclion d'une anse intestinale
subitement engagée sous une adhérence.
Du reste, au point de vue thérapeutique dont j'ai seul à
nature. Pourtant, cette détermination a une haute importance
m'occuper i c i , au point de vue des injections forcées, de leur
pratique ; elle mérite tonte l ’attention du médecin et doit être le
opportunité et de leurs chances de réussite, il n’est pas indis
but de ses persévérants efforts, parce q u elle lui permet de di
pensable d apporter une exactitude mathématique dans le dia
riger avec plus d intelligence les ressources de la thérapeutique :
gnostic. Il suffit de distinguer— chose généralement facile —
de calculer d’avance les chances olïertes par les moyens méca
si l’occlusion est la conséquence ultime d’ une affection orga
niques et en particulier par les injections forcées; de préparer
nique lentement développée, définitive et irrémédiable, ou bien
enfin le succès ci’une tentative suprême , d’une précieuse opé
si elle est constituée par un accident brusque, un obstacle
ration , la gastrotomie et la création d'un anus artificiel. •
amovible, comme l’ invagination, la torsion, la constipation,
Maintenant, que s’esl-il passé chez mes deux malades? Quel
degré d’exactitude pouvait-on douner au diagnostic?
l’étranglement dû lui-même à une bride ou à un anneau.
Relativement au siège, on peut établir aussi des conjectures
Dans les deux c a s , l ’affection s ’est révélée avec ses signes
très approximatives. Selon m oi, locclusion, à la fois éloignée
généraux les plus po>ilils: vomissementsstercoraux,suppression
de l’estomac et du rectum , existait au voisinage de la valvule
complète des selles et des g az, ballonnement du ventre.
iléo-cœcale, au-dessus ou bien au-dessous, soit à la poition
Mais pouvait-on déterminer la nature et le siège de l'étran
glement?
Sans arriver à une certitude absolue, il était possible, je
crois , de réunir une somme assez grande de probabilités.
intérieure de 1 iléon, so itàla poitionsupérieurc du gros instestin.
Cette opinion a pour preuves dans mes deux observations : les
vomissements stercoraux répétés pendant plusieurs jou rs; le
ballonnement d'emblée généralisé et bientôt excessif du ventre.
�—
214
i absence de tumeur primitive sur le trajel du colon; la possi
bilité d'introduire d'énormes
215
—
lavem ents; j’ajouterai, chez le
vieillard . la digestion des liquides avalés notée pendant les
—
4* Une dernière selle au début même de l’occlusion , ensuite
constipation opiniâtre et suppression des gaz jusqu’à la m '.l,
arrivée le cinquième jour.
derniers temps, e t, chez mon jeune malade, le fait suivant, si
5* Nausées et rares vomituritions, absence complète de vo
l’on admet une invagination: dans la deuxièm eenfancc, contrai
missements malgré l ’ingestion fréquente de liquides, de potions
rement à la prem ière, l’intestin grêle est le siège le plus ordi
purgatives et de bouillons. Ce signe tranché est dû assurément
naire de l'occlusion ( I ) .
A l’appui de ces raisonnem ents, et pour confirmer mon dia
gnostic^ 1 citerai quelques traits bien caractéristiques d une autre
observation égalem nt recueillie par moi dans ces dernières an
nées. La netteté des symptômes permit de fixer avec exactitude le
siège de l’occlusion, cette fois, à une courte distance du rectum.
11 s’agit d’ un homme ayant reçu un coup de couteau dans le
au siège de l’étranglement vers la limite inférieure du tube
digestif; il aurait manqué, l ’occlusion existant en un point
rapproché de l’estomac.
6° Pas de tuméfaction, pas de douleur dans la fosse iliaque
gauche, au-dessous de la cicatrice.
7° Impossiblité de garder, même quelques instants , les lave
ments simples ou purgatifs.
llancgauche, vers le milieu du colon descendant; la plaie avait été
Il sulfira de comparer ces symptômes avec ceux de mes deux
assez large pour permettre d'abord 1 issue d’ une portion d'in
premières observations pour juger, ici et là haut, les différences
testin , et pour laisser plus tard, à la peau , une cicatrice linéaire
du diagnostic.
de cinq centimètres environ. La blessure guérie, cet homme
IL
avait vécu une douzaine d’années sans présenter de troubles
digestifs noiahles, lorsqu'il fut pris tout a coup d ’étranglement
C o i’P-DOEIL SLR LE TRAITEMENT MÉCANIQUE.
— DeS INJECTIONS
interne ayant pour cause évidente la constriction d'une anse
forcées. — Dans
intestinale par une ancienne adhérence. Entre autres signes
devant l’ insuffisance des médications ordinaires, on néglige un
offerts a mon attention, voici les plus remarquables nu point de
peu trop les moyens mécaniques. C e u x -c i, très nombreux , on
vue du diagnostic :
le sait, comprennent le mercure coulant, les balles de plomb ou
le traitement del’occlusion intestinale, et surtout
!° Douleur v iv e ,d’ abord nettement limitée dans le llancgauche
de divers métaux; les douches froides, les malaxations, les
au niveau même de la cicatrice, puis gagnant successivement la
(■normes ventouses et le marteau de Mayor appliqués sur les
moitié supérieure du colon descendant, le colon transverse et le
parois abdominales ; l’électricité ; le cathétérisme de l’intestin;
colon ascendant.
les insufflations d’air et les injr étions forcées.
2° Tum eur de plus en plus volumineuse et distincte ayant très
Dans leur diversité d action, tons ces moyens sont capables
exactement même siège et même développement que la douleur.
de rendre des services. Tous ont donné des succès. Sans vouloir
5* Abdomen d’abord souple, déprimé et indolore à la région
les étudier longuement ic i, j ’en dirai un seul mot, aûn de
ombilicale, dans tout l’espace circonscrit par le gros intestin; à
mieux faire ressortir le mécanisme et l’utilité des lavements
la fin seulement météorisme généralisé.
forcés q u i. se u ls, m’occuperont d une manière spéciale.
(1) Hilliot et Barihez, Traite clinique et praliqtn? des maladies des enfants
Paris 1853, tome 1, p. 811 et 820.
Les boides métalliques et le m ercure, tant employés autrefois,
avaient pour but de remédier à I invagination , cause supposée
�—
217
-
de presque toutes les occlusions. Ils ont souvent aggravé les
Bibliographie. — F aits cliniques. — Les livres classiques ,
symptômes de l'étranglem ent, e t , sans être rejetés absolument,
même les plus récents, passent sous silence ou indiquent à
ils ne méritent pas la confiance exagérée dont ils ont été l’objet.
peine les injections forcées dans le traitement de l’occlusion
Les douches et le marteau dè Mayor appliqués sur la peau du
ventre ont quelquefois réduit un étranglement interne ou ex
intestinale. A insi :
L ’électricité, sans répondre h toutes les espérances, a éga
D’un côté, il n’en est question ni dans le Dictionnaire de
médecine en 50 volumes (1), ni dans 1eliuide du médecin 'pra
ticien de Valleix (2 ), ni dans le Traité de pathologie interne de
M. Grisolle (3 ), ni dans la Clinique de M. Trousseau (4).
lement produit quelques bons résultats en sollicitaut les con
D’un autre côté. M. Monneiet se borne à les mentionner
terne, en provoquant la contraction brusque et violente des
muscles de la paroi abdominale.
tractions intestinales elles-mêmes.
dans son Traité élémentaire de pathologie interne (5) ; le Dr
La sonde soulève et dégage directement l’ anse déplacée de
Fabre (6 ), tout en niant leur utilité d’après Monro et Sam.
l’intestin , elle convient donc spécialement dans l'invagination
Cooper, résumé l’importante observation du Dr Antonio Bouati,
située vers le colon descendant, l’S iliaq u e, ou le rectum.
que M. Boucliut s’est contenté de rappeler plus tard dans son
J.es malaxations avec la main et Jes énormes ventouses ont
Traité des maladies des nouveau-nés (7) ; enfin, MM. Rilliet et
réussi dans quelques cas. Les premières seront exercées avec
Bartliez (8), après avoir recommandé, à l’exemple des docteurs
une extrême prudence,et d’aulaol plus modérément que I occlu
Wood et M ittch ell, les insufflations d’air contre l’invagination ,
sion sera plus ancienne. Les secondes seront d’abord appliquées
conseillent les douches ascendantes, dans le cas où les premières
sur le ventre, puis, lorsqu’elles y adhéreront, on les élèvera et
n’auraient pas réussi
on les abaissera tour a tour en exécutant un véritable mouvement
En définitive, il faut s'adresser aux journaux de médecine
de soufflet. Ces divers moyens pourront dégager les portions
pour juger convenablement la question des injections forcées,
d intestin retenues sous une b rid e, détruire les invaginations,
et encore ne trouve-t-on çà el là qu’ un très petit nombre d’ob
modifier les engouements et remédier ainsi à l’occlusion (Trous
servations. Mes recherches in ouï permis d en recueillir huit
seau , Clinique médicale). On comprendra aisément leur mé
seulement : sur ce chiffre on voit les douches ascendantes com
canisme , en assimilant le premier degré de l'étranglement
binées , deux fois avec le mercure métallique , une fois avec la
interne à l'engouement d une hernie ordinaire, et en comparant
les malaxations et les grandes ventouses aux tentatives de ré
duction extérieure, avec cette différence que , dans T occlusion,
la manœuvre est plus aveugle, moins directe et moins sure.
Les insufflations d’air et les grandes injections d’eau froide
ont entre elles beaucoup d’analogie. Elles l ’emportent sur les
moyens précédents par leur action plus générale, plus régulière,
plus immédiate et plus complète; toutefois, les injections forcées,
en particulier, dont je vais parler m aintenant, ont une puissance
incontestablement plus grande.
(1) Article Volimlus, par Haige-Delorme ; tome 30, page 895, année 1840.
(2) 4“* édition 1800; tom. IV, chapitres Étranglement intente, et hu-aginalion, pages 137 et 143.
(3) 6"* édition 1833, lom. Il, chapitres: Iléus el Invagination de l’intestin.
(i) Clinique médicale de i llôtel~lheu <1e Pari*. 1862. loin. Il, Occlusions in
testinales, page 310.
(3) Année 1864; tom. 1, page 370.
{G) Dictionnaire des Dictionnaires de médecine, l$4t ; o n VIII, page 1047,
article Volvulus.
(7) 2“* édition 1<
vm>2; page 391, chapitre Inc iginatii
,8] Traité des maladies des enfants, I S 3 3 .
cliim ii
n 1
:;i. \ i l l
page 829 , De l’invagination.
�—
218
—
scammonée; cinq fois h peine, elles sont employées isolémeni et
—
219
—
prescrivit 45 grammes environ de mercure coulant et fit avaler
presque toujours après l’cchec bien constaté des moyens ordi
le quart de cette dose; aussitôt les symptômes prirent un aspect
naires.
alarmant: angoisse générale,
respiralion anxieuse, hoquet
Voici d’ailleurs I analyse succincte de ces huit faits.
continu, pouls insensible. Heureusement, cette scène effrayante
Le premier est celui du I)r Antonio Bonali ( I ) . A l ’époque où
eut une courte durée ; e t , après un borborygme impétueux
jl fut publié, les injections forcées, rarement essayées encore,
causé par le mouvement antipéristaltique de tout l’intestin, le
étaient une ressource à peu près nouvelle. Cependant le Dr
malade rendit par la bouche la décoction de son injectée. Celle-ci
Slram b io, en 1805, les avait appliquées, sans succès à la vérité,
fut reconnue , avec la dernière évidence, à l’odeur, à la couleur
contre deux cas de volvulus désespérés, liés à des cancers ayant
et surtout au son qui se déposa, par le repos, au fond du vase.
profondément désorganise 1 estomac et le duodénum. Quoiqu'il
Dès ce moment, les symptômes se calmèrent subitement, sans
en soit, l’observation du L)’ A . B o n ati, remarquable à divers
être exaspérés par l’administration de deux nouvelles doses de
titres . mérite d’être apportée ici avec ses traits les plus saillants:
mercure, prises â intervalle d’ une demi-heure. La nuit fut tran
Dans la matinée du 15 mai 1834, un jeune homme d’une
quille ; le hoquet se dissipa ; (rois selles eurent lieu avant huit
constitution saine et robuste fut pris subitement de volvulus et
heures du malin. La convalescence marcha régulière et rapide.
offrit les symptômes suivants: vomissements très fréquents,
Chomel, partisan des douches ascendantes dans le rectum,
d’abord alim entaires, muqueux et b ilieu x, puis stercoraux ;
les conseillait spécialement conlre l’invagination du gros in
constipation opiniâtre, aussitôt après l’expulsion des matières
testin. Il avait réussi deux fois, chez des malades atteints d’é
contenues au-dessous de l ’étranglem ent; météorisme consi
tranglement interne, avec tumeur dans le flanc droit et tous les
dérable; pouls petit, frequent, im perceptible; face grippée;
symptômes rationnels et probables d’une invagination. Dans les
hoquet. — Le 20 mai an m atin, à partir du sixième jo u r, les
deux cas, les malades recouvrèrent entièrement et promptement
accidents s’ étaient beaucoup aggravés, malgré une thérapeutique
la santé en passant pour ainsi dire de la mort à la vie (1).
très active, malgré 0 saignées, 70 sangsues, les bains, la glace à
l'intérieur et à l’extérieur, les lavements simples, les lavementsde
Le Dr M oullières, de C hap dle-sur-Erdre, a publié un fait
d’étranglement intestinal, probablement d’ invagination iléo-
tabac, l ’opium ,etc. La situation semblait désespérée. A 6 heures
coecale , traité avec succès par les douches ascendantes, suivies
du -oir,on se décida â recourir aux injections forcées. Le malade
immédiatement de l’administration de trois grammes de scam
couché sur le côte droit, à l’aide de l ’hydroballe 'sorte de pompe
monée. Ces douches se composaient d’ une injection de trois
aspirante et foulante à jet continu) on poussa p arle rectum trois
litres d’ eau froide , répétée â plusieurs reprises. Quelques mi
boccali d’ une décoction de son. On s’arrêta quand, la respiration
nutes après, le malade re n d it, avec son lavement, des matières
devenue brève et fréquente, le malade manifesta un sentiment
et des gaz, et le rétablissement eut lieu bientôt (2).
pénible de suffocation. Après quelques instants, un tiersenviron
Dans un cas d’invagination colique gauche, combattue inuti
de la décoction fut évacué. Dans la soirée, la position était de
lement par divers moyens, notamment par les purgatifs, le Dr
venue de plus en pins fâcheuse. Vers 11 heures, le D'Bonati
(t) Aimait untrtr.iali ri médtcina traduction dans la Gazette médicale de
P aru, tom. III, page 7, n* du 3 Janvier 1835.
(1) Abeille médicale, Juin 1840, page 153; Chomel, Leçon de clinique diHôtelDieu.
(3) Abeille medicale, t*r Janvier 1849, page 5.
�Lhoium ce, de Sam t-Dié, eut recours aux lavements forcés. La
d'iléus, au moyen des lavements répétés d’eau froide ; il est
suppression desselles était complète, les vomissements stercoraux
extrait du
dataient de cinq jours. On injecta une aussi grande quantité
Gannat.
seizième compte-rendu annuel de la Société de
d'eau que le malade put supporter, et immédiatement après une
En fin , dans un excellent a rticle , sur l’invagination intestinale,
selle copieuse eut lie n ; la continuité du tube digestif lut rétablie
le IV Bosia rapporte un fait tiré de sa pratique, où il lui fut pos
et la guérison ne se lit pas attendre ( I ) .
sible d’obtenir la réduction d’une énorme hernie ombilicale
On lit , dans le Journal de médecine et de chirurgie pratiques,
étranglée, par les injections d’eau froide de six litres environ (1).
[Lasuite au prochain numéro.)
une observation d'occlusion intestinale empruntée au Journal
de médecine de Bordeaux. Elle est d'autant plus intéressante
qu'il sagit d'un engouement intestinal , chez un enfant de dix
ans, c’est-à-dire à un âge où l'embarras stercoral est très rare,
Le 15 août, le Dr Roux (de Brignoles) fils, médecin de l’hos
comparativement aux faits signalés, chez l'adulte et surtout chez
pice de la Charité de Marseille, a adressé la lettre suivante à
le vieillard.— Le 10 septembre 4 8 5 8 , le petit malade fut pris
M. Armand Desprès, rédacteur de la Gazette des Hôpitaux :
des signes d’occlusion : coliques , vomissements de plus en plus
fréquents, constipation opiniâtre, ballonnement, dépression gé
« Monsieur et très-honoré Confrère,
nérale. Les purgatils en potions et en lavements, les opiacés, la
Lecteur assidu et attentif des excellents articles que le monde
potion R iv iè re , le chloroforme furent administrés en vain. Le
médical est habitué à voir sortir de votre plume, je n’ai pu maî
18, après huit jours de maladie . I enfant était dans nn état dé
triser un pénible étonnement en parcourant votre compte-rendu
plorable : face altérée, voix éteinte, pouls insensible. On com
de la brochure de M. Stanski, dans le numéro du 7 août de la
bina le mercure métallique (80 grammes en une lo is ), avec les
Gazette des Hôpitaux.
lavements abondants , répétés coup sur coup, au moyeu de l ir-
Mon intention n’est point de me poser en champion des doc
rigateur Eguisier. Dès la première fois , l’enfant s’écrie qu’il est
trines contagionistes, des travaux de MM Seux, Fabre, Pirondi,
plein et rend le lavement seul
Daremberg, Grimaud (de Caux), etc.; ils sauront bien, s’ils le
Ou recommence deux, trois,
quatre fois en augmentant toujours la quantité de liquide. Le
daignent, se défendre eux-mêmes, unguibus et rostro.
quatrième lavement présente quelques débris de matière fé
Le nom de M. Stranski indique une origine polonaise et nous
cale. Dans la nuit du 18 au 19, selles copieuses composées de
savons que le gros sel se trouve par mines dans son pays;
boulettes dures, de noyaux de fru its, de mucosités sangui
moins riches en quantité, nous avons la légitime prétention de
nolentes et de mercure métallique. A partir du 120, le petit ma
l’emporter par la qualité et de soutenir des opinions fort avoua
lade revient promptement à son état naturel (2).
bles avec une urbanité de langage inconnue à l’auteur des sar
L'Union médicale , de Paris (5), cite un exemple de guérison
(1) Gazeltedes Hôpitaux, 12 Février 1853, page 76.
(2) Journal de médecine et de chirurgie pratiques, Paris, Novembre 1858 ; tom
XXIX. page 501.
(3) 2 Décembre 1862; tom. XVI (nouvelle série), page 422.
casmes que vous avez enregistrés.
Dans les réflexions qui terminent votre article, vous indiquez
la destruction du foyer du mal comme le meilleur préservatif.
(1) Gaulle du Hôpttaux, 27 Octobre 1863, page 503.
�223
« Civiliser, transplanter on détruire les populations des bords
du Gange, si elles ne veulent point enterrer leurs morts, raser
La Mecque si les Musulmans ne veulent point renoncer h laisser
pourrir le bétail autour de la ville sainte; tel est le véritable
préservatif du choléra. »
« Aucune morale ne condamnera cette violence... e tc ... »
J excuse cette péroraison de l’écrivain qui, dans le silence du
cabinet, cherche le mot de la (in ; mais si, comme nous, vous
aviez vu de près cet admirable pays, le Bengale, Calcutta, la ville
des Palais, comme Victor Jacquemont l’a nommée, ces popula
tions industrieuses que vous voulez détruire, vous n’auriez pu
vous relire sans promener le dos de votre plume sur ces propo
sitions fantastiques.
—
Comparons maintenant ces résultat s avec leurs relevés dans
les épidémies précédentes:
1835 —
108atteints, 21 guéris,
87 morts.
1849 —
56
»
15
»
41
»
1851 —
121
«
16
»
105
»
Pendant celte année 1854, du 10 juillet au 10 octobre, i’hos
pice renfermait à peu près la même population qu’en 1865,
avec celte différence qu’il y avait un peu moins de vieillards et
un peu plus d’enlants.
Le nombre des faits cholériques relevés en 1865 à la Charité
présente une infériorité remarquable auprès de ceux que les
médecins qui nous ont précédé ont notés dans les épidémies
antérieures.
Mais soyons tolérants, laissons La Mecque aux dévotions des
Des améliorations apportées dans l’aération des cours, des
Musulmans, les cadavres du Gange aux filets, aux bûchers de la
salles, constamment blanchies à la chaux et tenues avec une
police anglaise et aux myriades de chacals qui, tous les soirs,
propreté rigoureuse; un matériel de literie avantageusement
peuplent les rives de l ’Hoogly, et permettez-moi un mot sur
transformé, un bon ordinaire, plaçaient la population dans un
l’isolement en matière de choléra.
état convenable pour résister aux influences dépressives de
L ’Hospice de la Charité de Marseille, dont le service médical
l’agent toxique.
m est confié, renferme dans son enceinte une population de
Du 30 juillet au 16 août, nous voyons six cas de choléra se
près de 800 personnes, dont 480 vieillards. Cet établissement
succéder d’assez près; mais a partir de cette époque le fléau sus
s’élève au milieu des quartiers populeux qui forment la vieille
pend ses coups jusqu’au 1er septembre. C ’est qu’à partir du 16
v ille , entre l’ Hôtel-Dieu où les premiers cholériques furent
août, la population de l’hospice est consignée; nos vieillards ne
transportés dans les premiers jours de juin 1865 e lle port delà
vont plus hebdomadairement parcourir
Jolielle qu’il domine. Ce n’est pourtant que le 29 juin que nous
visiter leurs parents, amis, connaissances, empressés à les pour
les vieux quartiers,
constatons la première atteinte de lépidém ie naissante sur une
voir de comestibles; c’est que notre hospice, bien que placé au
fille de la maison.
centre du foyer principal, se trouve isolé et que les habitants
Le mois de juillet se passe presque entièrement sans que de
nouveaux cas soient observés. Le 30 ju ille t, les* 3 août,6, 8, 11,
15, 1 0 , — 1°' septembre, 8, 9 , 10, 15, 2 6 , nous avons des
cholériques.
En somme 13 cas graves dont 9 morts et 4 guéris.
(Depuis la réapparition du fléau, nous avons, pour 1866, 5
cas dont 2 décès.)
n’ont plus aucun rapport avec les maisons qui contiennent des
cholériques.
C’est à cette séquestration rigoureuse que nous devons le peu
de mal éprouvé dans notre hospice.
Ajoutons, en terminant, que les cholériques ont été soignés
dans une salle particulière, où nous n’avons jamais laissé sé
journer un cadavre.
�—
224
—
—
225
—
De ce qui précède, nous croyous pouvoir conclure que la
etc., deviennent de plus en plus populaires; encore quelques
séquestration dans l’enceinte des hospices destinés â la vieillesse
efforts et nous verrons apparaître Yentéroscope e tl e gastroscope,
est le meilleur moyen d’ empêcher l’invasion du choléra au seiu
voire même le pneumoscope et le cardioscope. Loin de nous la
de leur population et la mortalité terrible qui en est la fatale
pensée d’amoindrir la valeur des nouveaux moyens d investi
conséquence.
gation dont la science dispose; seulement, nous sommes bien
Agréez, Monsieur et très-honoré Confrère, l ’assurance de
ma considération distinguée.
forcés de reconnaître que ccs divers inrtrumentoscopes ne sont
pas tous au même degré utiles et parfaits. Moins parfait encore
Dr S . Houx (de B .)
Modecin de l'Hospice de la Charité de Marseille.
est l’usage que l’on en sait faire ; il est malheureusement trop
certain que , parmi ceux qui recourentâ l'aide puissante de la
lumière il en est plus d’un qui ne pourrait dire en toute sincérité
B IB L IO G R A P H IE .
avec Molière :
Je l'ai va , dis-je , v u , de mes propres yeux vu ;
Tableau d Ophlhalmoscopie, par le docteur E. Martin, méde
cin-oculiste des bureaux de bienfaisance de Marseille. (1866,
P a ris, J .- B . Baillière et fils).
Le X IX * siècle a été appelé le siècle des lumières. Pour qui se
contente de tout examiner superficiellem ent, pour qui ne se ha
Et c’est un m a l, car personne ne peut nier que certains de ces
instruments — en particulier l’ophthalmoscope et le laryngos
cope— ne rendent des services réels. Grâce â eux nous avons
pu voir d habiles expérimentateurs exposer sous nos yeux et
nous faire presque loucher du doigt des lésions sur lesquelles
nous avions jusqu ’alors des données très peu précises.
sarde point a scruter d’un œil téméraire les profondeurs du monde
Quelqu’un qui voit bien par lui-même et qui s’efforce d’ap
moral, cette dénomination est en eftet très juste. L ’industrie
prendre aux autres h bien voir, c’est notre confrère le D' E .
prospère de plus en plus, les chemins de fer couvrent le monde
Martin. On pourra en juger en examinant les magnifiques figures
entier, l’électricité s’élance audacieuse pour réunir les deux
jointes â son Tableau d'ophthalmoscopie. A ce propos, nous
continents , les moyens de destruction deviennent si ingénieu
nous demandons pourquoi M. Martin a mis au singulier le mot
sement formidables que la guerre de 30 ans durera bientôt 30
tableau, son ouvrage n’est, h proprement parler, qu’une suite de
m inutes; en un mot, si la lumière abandonne trop souvent les
ces tableaux. En effet, outre la belle planche coloriée, le travail
esprits, elle resplendit par contre puissamment sur les corps et
de notre confrère contient quatre tableaux, dans lesquels sont
perce â jour de plus en plus la mystérieuse obscurité de la ma
groupés d une manière méthodique les symptômes ophthalmos
tière.
copiques des diverses maladies pouvant attaquer le globe de l’œil.
C ’est probablement pour ne point avoir à pâlir devant ces
Le premier de ces tableaux est consacré aux lésions du cristallin
rayonnantes clartés que la médecine a introduit, depuis quelque
et du corps v itré , le second à celles de la choroïde, le troisième
tem ps, dans son arsenal physiologique et pathologique une série
a la rétine , le quatrième à la papille et aux vaisseaux de la ré
d'instruments dans lesquels la lumière joue le principal rôle.
tine. Un texte de plusieurs pages pour chaque chapitre complète
Le microscope , on peut le dire, est le roi du moment : l’oph-
les tableaux symptomatiques et permet au lecteur de se rendre
thalraoscope , le laryngoscope, l ’urélhioscope, le cystoscope,
un compte exact des figures coloriées. De cette façon, l’ élève
�—
^
27 - —
novice encore en ophthalmoscopic peut étudier d’abord sur les
planches seules , puis avec l ’instrument sur le maladeen s’aidant
Chronique M ensuelle.
de celle s-ci, les diverses altérations morbides que présente le
globe oculaire.
N ’oublions pas de mentionner un chapitre consacré à ( examen
subjectif de l'œ il, et dans lequel le médecin trouvera des détails
très précis sur la manière d’apprécier le degré d’acuité de la
vision et le plus ou moins d étendue du champ visuel.
En somme, la nouvelle publication de M. Martin est essentiel
lement pratique. Le but de notre confrère a été de faciliter l’élude
si intéressante et si dilîicile de l’ophlhalmoscopie. Nous croyons
qu il a atteint pleinement son but et que l’élève désireux de
s’exercer au maniement de l ’ophthalmoscope, le praticien éloigné
des grands centres p ourront, à l aide des tableaux du Dr Martin,
se livrer seuls et sans guide aux études ophtalmologiques. La
bonne volonté, le désir d’apprendre ne sulïisent point à qui veut
acquérir un ordre donné de connaissances ; il faut encore avoir à
sa disposition les moyens de s instruire et surtout savoir tirer
parti de ces moyens. Voilà ce qu’a parfaitement compris notre
confrère, et nous croyons qu’ il aura grandement contribué pour
sa part à empêcher l ’ophthalmoscope d’être entre bien des mains
un instrument inutile.
La critique, qui place volontiers son mot partout, aurait trouvé
probablement que la publication du docteur Martin était trop dé
taillée pour un manuel d'ophthalmologie, trop écourtée pour un
traité de pathologie oculaire. Mais notre confrère a fermé la
bouche à la critique en présentant, dès la première page, le
Tableau d'ophthalmoscopîe comme le complément indispensable
d’ un ouvrage précédemment publié sur les maladies des yeux.
Pour consoler la critique de son inaction forcée, nous ne pou
vons que lui répéter le fameux mot d’Henri IV à Crillon et nous
espérons qu elle fera comme le brave général, lequel ne se
pendit nullement et conserva toutes ses forces pour une occasion
meilleure.
Dr Z&d e .
Notre rôle de chroniqueur mensuel, nous l'avons déjà dit, ne
nous permet pas d’offrir des primeurs à nos lecteurs. Tout au
pins pouvons nous glaner dans le domaine de la bibliographie et
donner, un peu tard quelquefois, nos appréeiatious sur les
questions pendantes. Il en est deux aujourd’hui qui n’ont rien
perdu de leur actualité et sur lesquelles nous devons dire quel
ques mots :
L ’une est la discussion sur la méthode sous-cutanée, la se
conde la question du choléra.
C’est b propos d’un travail de M. J. Guérin, lu par lui b
l’Académie de Médecine, dans la séance du 12 juin, que le feu
a pris aux poudres. M. Guérin revendique b plus d’un titre le
patronage de la méthode sous-cutanée. M. Velpeau, son adver
saire de vieille date, j ’allais dire naturel, lui rend justice et
accorde a son collègue la part qui lui est due, mais rien de plus.
Or, celte part n’<st pas celle du lion ! . . . M. Jules Guérin, qui
d a pas oublié les éloges ni les encouragements que l’Institut
lui a prodigués, se défend bec et ongle, et plus M. Velpeau res
serre te champ de ses découvertes, découverte s’il y en a, moins
M. Guérin est disposé à laisser amoindrir ses travaux. S il nous
était permis de glisser ici une petite objection, nous demande
rions b M. Guérin pourquoi, b l’appui de ses propositions, il n'a
pas fourni quelques observations détaillées et concluantes ,
prouvant la supériorité de la méthode qu il croit appelée b régé
nérer toute la chirurgie. C elle-ci, b vrai dire, se passe bien de
révolution, et je ne sais ce qu’ elle gagnerait b être ainsi parquée
dans le cadre sous-cutané. M. Guéno n’y pense pas: vouloir
faire entrer toute la chirurgie dans son .système, ce serait vouloir
mettre toute l’eau de la mer dans un trou. Du reste,une science
dont les progrès sont basés sur 1 observation rigoureuse des
faits et dont chaque découverte doit résister au contrôle de la
clinique n’a pas besoin de révolution. Elle s’avance hardiment
dans l’avenir, appuyée sur le livre d’or d’une fidèle statistique
dont Malgaigne, encore un des adversaires scientifiques de M.
Guérin, a marqué I avènement, et dont lui, M. Guérin, se
montre peu prodigue.
Il est des hommes de talent capables d émettre une idée
neuve, juste et pratique, mais qui, en pères aveugles, veulent
�—
en étendre l’application outre mesure. Ils arrivent ainsi à l'exa
gération, et la chose bonne, acceptée par tout le monde, devient
absurde et impraticable. Les exemples de ce que j ’avance se
raient nombreux : ainsi l’écraseur, cet instrument ingénieur,
conquête précieuse que la postérité appréciera encore plus
que l’époque qui l a vu naître, n est-il pas une absurdité pour
i amputation d'un membre ou l ’opération de la taille.— L ostéo
claste, qui ne passera pus à la postérité, par exemple, n’est-ce
pas l'exagération d’une idée, bonne en p rincipe?— Le cathété
risme, en suivant dans le choix de I instrument une progression
inverse entre la lumière du rétrécissement et le cathéter, u’estil pas une absurdité ? — Les amputations à coup de hache, —
la percussion médiate de l ’utérus sur le sacrum et bien d autres
sont tout autant d excentricités, et pourtant elles appartiennent
à des hommes d’ un mérite reconnu, incontestable et incontesté.
\1. Guérin a rendu quelques services par la vulgarisation de la
méthode sous-cutanée, il voudrait la compromettre.
Pour montrer combien il est difficile de s'arrêter sur la
pente de l’exagération, qu’on me permette de rappeler ici le fait
suivant :
Cn docteur de province ayant employé des topiques alcalins
sur de petits kystes synoviaux et les ayant vus, disait-il, dispa
raître p arce moyen, on arriva à proposer de les traiter par
l’application d’un peu de salive. Tous les matins à jeûn, sous
prétexte qu à ce moment le liquide est plus alcalin, le malade
en faisant sa toilette devait passer deux ou trois fois sa langue
sur son kyste et tout était dit. Vous avouerez que voila un traite
ment par trop homœopathique et je n’aurais sans doute pas osé
en parler si je ne l ’eusse vu, il y a plusieuis mois, dans un
journal que j ’avais cru sérieux jusque-là, YAbeille Médicale.
M Velpeau, dans son dernier discours, avait pris le parti de
démontrer que rien, absolument rien, n’était nouveau dans le
travail de M Guérin. On sait avec quel talent l’éminent chirur
gien de la Charité défend les doctrines classiques et aussi sa
personne quand elle e>t en cause. Il n’a pas été celte fois audessous de sa lâche, ni failli à son habitude, qui est de convaincre
son auditoire. MM. Bouillaud, Boi:ley et Robin ont pris parla
la discussion. L e premier refuse l’expression organisation im
médiate à laquelle M . Guérin attache un sens particulier, et
tout à fait de son crû. M. Bouillaud maintient le mot cicatrisa
tion. Nous avons trouvé dans le discours de M. Bouley de très
bonnes vues sur la cicatrisation, la suppuration en général et
sur la valeur des plaies sous-cutanées en particulier. Enfin, M.
229
—
Robin, f observateur microscopique consciencieux par excel
lence, a donné quelques éclaircissements sur les blastèmes et la
régénération des tissus. Suivant lui, et c’est 1opinion la plus
accréditée, le muscle ne se régénère point, tandis que le tendon
peut se reproduire.
Pans un muscle coupé, il y a interposition d un tissu ma
tériel; dans un tendon sectionné, ce tissu n’existe pas! ou bien
il y a réunion immédiate, c’est-à-dire, sans interposition d'élé
ment étranger, les fibres tendineuses s’accolent molécule à mo
lécule, ou bien il y a formation d'un blastème,lequel donne nais
sance à des éléments embryoplasii p ie s, qui, eux, donnent
naissance à la lilure tendineuse. C ’est une régénération fœtale
du leodon. Pour les nerfs, le même phénomène a lieu, mais
beaucoup pins lentement et l’on ne s’en étonnera pas, si l’on
sait que c’est au quatrième mois, d’après M. Robin, que le tissu
net veux est constitué chez le fœtus.
Toutes ces choses sont bonnes à noter, et M. Guérin en a
peut-être fait trop bon marché. Le microscope, dontM . Bouil
laud a fait le plus bel éloge, a ses vérités que l’on ne peut pas
toujours expliquer, mais qu il faut accepter de bon gré en atten
dant le dernier mot. La discussion se prolongera encore sans
doute, car M. Ricord a demandé la parole.
Il est un autre terrain sur lequel la polémique est engagée,
plus seulement avec M. Velpeau et le rédacteur de la
Gazette Médicale , mais aussi avec MM. Desprès et Lefort.
doq
M. Lefort peut être peu connu de M. Guérin, mais à coup
sûr la jeune génération sait apprécier en lui un de ses plus
digues représentants. Elle a foi dans cette illustration naissante
et s’appuie pour garantir l’avenir sur un passé déjà brillant et
sur des travaux nombreux et consciencieux. Ce que M. Velpeau
a fait à l’Académie, M. Lefort l’a fait avec non moins de succès
dans la Gazette Hebdomadaire (du 24 août, surtout). 11 a
fourni des preuves qui ont dû satisfaire M. Guérin en même
temps qu elles le dépossédaient, de la priorité au moins. C ’est
sans doute ce motif qui a valu à M. Lefort un rapprochement
avec M. Velpeau,et comme les grands gén es se rencontrent,on
regrette de voir le rédacteur de la Gazette Médicale, si éloigné
de nos deux adversaires.
Quant à M. Desprès, il n’est bruit, dans le Paris médical, que
de son affaire. On parle même de grandes courses médico-chi
rurgicales dont le prix de 2 ,000 fr. serait nommé prix du ten
don rotulienl on pourrait courir sans limite d âge. Seuls, MM.
�-
230
—
Guérin el Desprès sont sur les rangs. Le sport médical parie
pour M. Desprès; cependant, afin d égaliser les chances, quel
ques-uns insistent pour que le médical gentleman-rider trop
léger, prenne du poids. M. Desprès objecte que s’il n’a pas
trente ans de Méthode sous-cutanée , il a ses tumeurs des mus
cles et du testicule ( I ) .
La raison est acceptée.
Nota Bene. — Il n’ y aura pas d’agence des poules, cet animal
ne pouvant servir à l'expérim entation.
E t voilà où nous allons ! . . .
Malgré le nombre de décès cholériques qui ont figuré chaque
jour sur les registres d’ aoùt, ce m ois-ci n’a eu qu’une mortalité
totale assez faible. Le chiffre des cas (le choléra qui, le 11 août,
donnait 11 décès, était allé en diminuant jusqu'au 28, à tel
point que les journaux avaient cru pouvoir s’abstenir de le faire
connaître. Le 28 août, petite recrudescence; quelques cas se
sont présentés dans les hôpitaux Nous ne voulons pas empiéter
sur le mois de s-ptembre et faire ici une prédiction après coup.
Voyons plutôt ce qui s’ écrit autour de nous. Parmi les travaux
publiés sur cette question, prenons la brochure d’un de nos
compatriotes et am is, le docteur M a u iin ,sur l’analyse et la syn
thèse de l ’épidémicité cholérique. L auteur, on le sait, se donne
comme anticontagionniste, el d après l’avant-propos de son
écrit, on croirait qu’il va nous prouver la non-contagion «lu
choléra. Il n en est rien; bien au com raire, si je voulais trouver
des preuves de la contagion, c est dans le liv ede M. Mautinquc
je les puiserais, livre, du reste, qui ne manque pas de qualités.
La question de I origine du choléra, l’étude de ces rives loin
taines qui en sont le berceau, I aperçu des causes des épidémies
depuis 1817, contiennent un ensemble de faits et des actes qui
ont quelque valeur. Mais quand, avec Hippocrate, M. M.iurm
vient d ire: « Le principe du choléra est dans l’air • ; quand il
ajoute: « le germe cholérique peut eue importé par les choléri
ques isolés et par les groupes où règne h- cho éra , » je me de
mande ce qu'il faut de plus pour croire à la contagion. On
s’étonne même qu après avoir prouvé toutes ces propositions,
l’auteur avance celle-ci: u Rien ne prouve que le germe cho
lérique, auquel l'air sert de véhicule, puisse être importé par
l'air contenu dans les navires, dans les «tofîes, dans les matières
inertes. »
11) M. Desprès est l'auteur de deux bonnes thèses sur ces deux sujets
Allons plus avant el nous trouverons encore des preuves de
la contagion. Je prends celle-ci au hasard, la brochure de M.
Maurin en est riche : « Un nonrisson amené depuis le 27 ju in ,
à Onnav, meurt du choléra le 3 juillet. — Le 13, l'enfant de la
nourrice succombe. — Le 17, la nourrice meurt. — Deux voi
sines subissent les atteintes du mal, le 18 et le 24. — Le 26, le
mari fournil la dernière victime. » D’autres faits de ce genre
suivent ces quelques lignes; mais là seulement n’avons-nous
pas tous les caractères de la contagion. Si le choléra, dans ce
ca*, n'a pas été contagieux, comment donc aurait agi une affec
tion contagieuse? — C ’est cependant en présence de faits sem
blables et à peu près identiques que M. Desprès nie l’influence
du voisinage, de la cohabiiation, etc., etc.
Je ne suppose pas que les anticontagionnistes veuillent nous
faire une querelle de mots et, par une subtilité qui couvre une
défaite, admettent l ’infection el non la contagion. Dans tous les
traités de pathologie, n’admet-on pas une contagion médiate,
une infection somatique, si l’on v e u t? ... Et si l’on remonte
même à l’étymologie du mot, comme le dit M. Révillout, dont
je partage la manière de voir, contagio veut dire aussi souvent
eontagion qu'influence. Contagw lunæ, influence de la lune; il
faudrait être diflicile pour ne pas accepter un pareil latin, il est
de Cicéron. Du reste, Pline emploie le mot contagio, signifiant
infection.et il n ’y en a pa< d autres en latin. Infectio, on le sait,
veut dire teinture, coloration, ainsi qu’on le trouve dans Théodorus Prisciarius, médecin du IV e s iè c le .— La petite vérole
n’est-clle pas infectieuse? a-t-on besoin du contact ou de l’ino
culation pour en être atteint? Et mieux, la fièvre puerpérale? —
Ainsi donc, jamais les contagionnistes n ont voulu dire que le
choléra était transmissible par inoculai ion ou par contact direct;
jamais ils n ont nié qu’ il y avait des conditions de réceptivité
favorables à la transmission de l’affection; mais ce qu'ils nient et
ne sauraient admettre, c’est que le choléra puisse se développer
spontanément, à M arseille, par exemple, sans importation; —
ce qu ils affirm ent, c ’est que l’ importation seule peut donner
lieu à une épidémie, qui aura plus ou moins de durée, plug ou
moins d’intensité, suivant des causes spéciales qui nous échap
pent encore ; c est que la constitution médicale desannées précé
dentes à celles de I invasion n'a aucune influence sur I épidémie
et ne peut en rien la faire pressentir. Ce qu’ ils alïirment enfin,
c est qu’on pourrait se préserver complètement du fléau par des
mesures sanitaires propres à tarir le mal dans sa source ou au
moins à en empêcher au loin la propagation.
A. Q.
�—
232
—
—
La forte recrudescence qui s’est produite, il y a quelques
jours, dans l'épidémie cholérique, ayant paru h l'autorité muni
cipale nécessiter la formation de bureaux de secours, M. le
233
-
De l’extraction de la cataracte par le procédé linéaire combiné
avec l’iridectomie. (Extraction linéaire modifiée.)
Maire a écrit h M. le président S eu x, pour lui demander le con
cours des membres de l'association.
Un des oculistes les plus distingués de l ’Allemagne, chirur
M. le Président a aussitôt convoqué son conseil, dont les sen
timents ont été reproduits par la lettre suivante :
gien aussi savant qu’opérateur extrêmement habile, M. le
professeur Grœfe, de Berlin , a tout dernièrement adressé a
l'institut de France un important ouvrage ayant pour titre:
M arseille, le 8 septembre 1866.
Ainsi que l’usage le veut, M. de Grœfe accompagne son livre
Monsieur le M aire ,
Après avoir pris connaissance de la lettre que vous nous avez
fait 1 honneur de nous adresser le 6 de ce mois, nous nous
sommes empressés d’en donner communication à la commission
adminisrative de l’ Association.
C elle-ci, tout en reconnaissant la manière juste dont vous
personnellement, Monsieur le Maire, avez su apprécier les ser
vices rendus par les médecins dans la dernière épidémie et vous
en conservant une vive gratitude, n'a pu oublier le vote malheu
reux du Conseil m unicipal. Mais vous avez raison, Monsieur le
Maire, de compter sur le dévoument et l’abnégation des mem
bres de notre Société ; leur concours ne fera jamais défaut,
lou«es les fois qu une épidémie couvrant notre cité de deuil
vous fera réclamer leurs services.
Plusieurs membres de noire association se trouvent déjà
inscrits pour les bureaux de secours que vous avez établis, et
nous sommes heureux de pouvoir vous informer que d’autres
viendiout encore vous offrir leur concours.
Veuillez bien agréer, Monsieur le Maire, l’expression de»
sentiments de haute considération et de respect avec lesquels
uous avons l'honneur d’ètre, vos très dévoues serviteurs,
Le Vice-Secrétaire.
V illa rd
Clinique ophthalmologique.
Le Président ,
S bux.
dune lettre d’envoi, et, dans cette lettre, l’illustre professeur
relève les points importants de sa clinique, et signale plus par
ticulièrement les succès nombreux et définitifs obtenus par
l’application du dernier procédé opératoire qu’il a imaginé pour
l’extraction de la cataracte.
Avant de décrire ce procédé, et pour mieux faire saisir
l’importance de la question, qu’on nous permette de rappeler,
aussi brièvement que possible, que tous les moyens imaginés
pour remédier à la cécité consécutive, a l’opacité du cristallin,
peavent être classés dans deux grandes catégories ou méthodes.
Dans la première, l’obstacle b la pénétration des rayons lu
mineux jusqu a la rétine est déplacé, modifié ou, pour ainsi
dire, détruit sur place à l aide d’aiguilles pleines ou forées, et
qui doivent pénétrer dans la coque oculaire par la plus petite
brèche possible.
Dans la seconde catégorie, il s'agit d’enlever complètement
l'obstacle, de faire sortir par conséquent le cristallin de l’œil,
en pénétrant dans Ja coque oculaire par une brèche qui est tou
jours proportionnée a la largeur Je la cataracte.
Jusqu à présent, et malgré les tentatives infructueuses de
Le Comité de rédaction.
Gensoul en Fra n ce , de Earle et Lebel en Angleterre, de Luadri
en Italie, et plus tard de Jœger en Allemagne, il était à peu près
Mars«üJt. Typ. el Lilb A rriud, Ca^er et C., rue Saint-Verréol, 57.
répété par tous
les traités classiques que l’extraction de la
10
�—
235
cataracte doit se faire par la cornée transparente, c’ est-à-dire
ment de bascule, la faire passer dans la chambre antérieure,
à travers la partie de l’œil qui n’a pas moins besoin que le
ayant soin, dans ce premier temps, de ne pas blesser l’iris ni la
cristallin lui-même d’ une parfaite transparence, et dont la moin
capsule cristalline. Après quoi,on fait cheminer le couteau à plat
dre tache, cicatricielle ou autre, suffit quelquefois pour inter
vers la pupille jusqu’à ce qu’en en relevant la pointe on soit sûr
cepter la lumière et s’opposer ainsi à la vision, sans compter bien
de pouvoir laisser, entre le point d’entrée et le point de sortie,
d autres inconvénients encore, parmi lesquels nous citerons, en
un espace d’environ 8 millimètres.
première ligne, sa tendance marquée à la suppuration.
La pointe du couteau ayant traversé la sclérotique, mais
Un pareil état de choses devait naturellement captiver l'at
cette fois de dedans en dehors, on tourne d’abord la lame légè
tention des praticiens, et M. de Grœfe a été un des premiers à
rement en avant pour achever l’incision scléroticale, et l’on
proposer une réforme qui ne pouvait avoir quelque chance
procède ensuite à ^incision de la conjonctive en retournant la
d’être favorablement accueillie qu’en se présentant sous de pa
lame en arrière, dans Je but de ménager un lambeau muqueux
reils auspices.
postérieur, destiné à couvrir et à protéger la plaie scléroticale.
Cette réforme, M. de Grœfe l ’a donc tentée, et aujourd’hui
2* Temps. — Après l’ incision de la coque oculaire, l’iris se
il propose hardiment d’extraire la cataracte en pénétrant dans
présente et fait légèrement hernie à travers la plaie; on le saisit
l ’œil par une plaie linéaire, non pas par sa façe transparente
avec de petites pinces et on enlève d'un coup de ciseau la por
la cornée), mais par sa paroi opaque (la sclérotique), et il four
tion qui dépasse les bords de la plaie ; après quoi on déchire
nit de nombreux faits à l'appui pour prouver que cette utile
avec un kyslitôine la capsule cristalloïde antérieure dont on
réforme donne, comme nous le disions tout à l’ heure, des ré
écarte les bords latéralement.
sultats de beaucoup supérieurs à ceux obtenus par tous les
5* Temps. — En exerçant avec soin une légère pression sur
le bord supérieur de la plaie à l’aide d une curette, le cristallin
anciens procédés.
Seulement faut-il ajouter comme circonstance complémen
se présente pour ainsi dire de lui-même aux doigts de l'opé
taire et capitale, que la scléroticotomie doit être combinée
rateur, qui n'a plus ensuite qu’à recouvrir la plaie avec le lam
avec \' iridectomie.
beau conjonctival qu’ il s ’est ménagé.
Décrivons d'abord le procédé et nous laisserons ensuite parler
Tels sont, en résumé, les principaux temps de cette nouvelle
méthode opératoire. Mais nous passons ici sous silence une foule
les faits.
1er Temps. — Le malade étant couché et la tête maintenue
de renseignements ayant une importance considérable, quoique
immobilise
relative, et sans lesquels on ne peut se faire une juste idée
d’ abord les paupières à l’aide du blépharosiate à écrou fixe, et
des résultats admirables qui ont été obtenus à Berlin et ailleurs;
dans une position très modérément relevée, on
l’opérateur, placé derrière le malade, après avoir fixé l’œil à
et il est permis de les qualilier de la sorte alors qu’on sait que
l’aide des pinces de W aldau , implante un petit couteau à
la statistique de M. de Grœfe donne quatre-vingt-quatorze succès
cataracte, n’ avant pas plus de 5 m illim ètres de largeur, à la par
j complets sur cent opérations, et que l’illustre professeur de
tie supérieure et externe de la sclérotique et à deux millimètres
Berlin ne qualifie de succès complet que celui qui donne aux
en arrière de la circonférence cornéale. Dès que la pointe du
opérés la faculté de lire le n 1 des tableaux de Jœger.
çouleau a traversé la coque fibreuse, il faut, par un petit mouve
11 est plus que probable que la description qui précède et
�—
236
—
celle bien plus complète que I on peut lire dans la clinique du
Dans tous les cas, il nous semble permis d’affirmer, môme
professeur de Berlin, ne pourraient donner au lecteur qu’une idée
après le petit nombre de faits recueillis en quelques jours
très incomplète de la nouvelle méthode, s ’il n’avait été réservé
autour de nous, que la scléroticotomie combinée à l’iridec
a plusieurs de nos confrères la bonne fortune d’assister a l’essai
tomie donne des résultats plus prompts, plus complets et plus
clinique de cette brillante opération pratiquée par un des élèves
exempts de conséquences fâcheuses qu’aucun des procédés
les plus distingués de M. de Grœfe, par celui auquel le savant
opératoires antérieurement connus. Telle est notre conviction
oculiste de Berlin a conlié, en France, la traduction et la vulga
et nous pensons n’ être pas seul de cet avis.
risation de ses idées, par M. le Dr Edouard Meyer.
Maintenant, qu'il nous soit permis de terminer ces lignes par
Ce jeune et habile chirurgien, qui s’est déjà fait remarquer à
une réflexion rétrospective à laquelle nous n’attacherions pas
Paris par des travaux sérieux et par un excellent cours d’oph-
une grande importance si elle ne nous fournissait une nouvelle
talfnologie professé à l’ecole pratique, a bien voulu, dans lin-
occasion de constater l'oubli, pour ne rien dire de plus, auquel
térét de la science et des malades, changer quelques jours de
est vouée d’avance toute initiative qui se présente avec le double
repos qu'il pensait s’accorder dans notre ville en séances instruc
désavantage d être privée du cachet central et de ne pouvoir im
tives dont chacun de nous a pu faire son prolit, et, sur l ’invitation
médiatement prouver ce qu’il y a d’ utile dans l’innovation
de quelques chefs de service dans nos hôpitaux, diverses opéra
proposée, en l’étayant de faits pratiques dûment constatés.
tions ont été pratiquées avec un résultat des plus remarquables.
En 1838,
un médecin de Marseille,
qui était fort jeune
Pour ne parler ici que du sujet principal qui a motivé cet
alors et qui ne l’est pas aujourd'hui, frappé de tous les in
article, nous constaterons que, sur six cataractes opérées par la
convénients qu’il avait pu voir et constater dans divers hôpitaux
nouvelle méthode, il n’y a eu qu’un insuccès, et encore faut-il
de France et de l'étranger, h la suite de l’extraction de la cata
ajouter qu’ il s'agissait d'un vieillard à constitution délabrée, chez
racte à travers la cornée ( et cela malgré le talent incontestable
lequel peu d'intelligence et beaucoup d’indocilité n ’avaient pas
et incontesté des grands opérateurs qu il avait vus à l’œuvre),
permis les manœuvres nécessaires à l’issue de petits fragments de
étudie la question, rédige un mémoire et imagine (grâce à
corticale restés dans l ’œ il, et où cependant tous les accidents
l’utile concours de M. Charrière ) un nouvel instrument à l’aide
consécutifs se sont bornés à une légère couche de transformation
duquel il tâche de démontrer que l ’extraction du cristallin par
pyoïde derrière la cornée, là où l'extraction par incision à
la sclérotique est aussi facile et moins dangereuse qu à travers
lambeaux eût été probablement suivie d’ une fonte phlegmoneuse.
la cornée.
Même à l’heure actuelle, il est difficile de dire si l’œil, à l'aide
Ce mémoire, remis à une société savante, fut conlié à un
d’une petite opération supplémentaire, ne pourra pas récupérer
rapporteur, gui le perdit, et l’ instrument seul, avec le nom de
une partie de sa vision, car nous ne sommes encore qu'à une
l’auteur, est resté sur les catalogues de la maison Charrière.
trop courte distance de l ’opération.
L’auteur eût probablement fini, à l’exemple du rapporteur,
Mais, en revanche, nous avons observé, dans les cinq autres
par perdre le souvenir de son œuvre; mais le hasard en avait
opérés, la plaie linéaire se cicatriser en vingt-quatre heures et
décidé autrement, et un de ses amis, parlant de Paris pour
1 état de l'œil ainsi que de la vision tellement normal que les
s’établir à Venise, eut 1 idée de publier, dans le Mémorial île la
opérés pouvaient quitter la chambre au bout d’ une semaine.
médecine contemporaine, année 1840, page 574, la traduction
�—
238
—
—
littérale du mémoire en question, plus un dessin aussi exact que
239
—
Le succès des douches ascendantes dépend de l'abondance el
île l'intensité du courant. La quantité d’eau injectée doit tou
possible du nouvel instrument.
Dans ce mémoire, que je viens de relire, j ’ai précisément
jours être considérable; elle l’a été chez mes deux malades (1),
trouvé toutes les bonnes raisons que fait valoir avec tant
et chez tous ceux dont j ’ai rapporté l ’observation (2 ; cette
d’autorité l'illustre M. de Grœfe à l'appui de son procédé, et
condition est indispensable pour remonter suffisamment haut
je n'ai pu me défendre d’ un souvenir rétrospectif, non pas, j ’ose
dans l’intestin, et pour lutter avec assez d’énergie contre l'oc
l’affirmer, pour nous octroyer une petite satisfaction personnelle,
clusion. Sans manquer d’être prudent, on ne se laissera pas trop
mais par amour propre national, ce qui ne nous paraitra jamais
arrêter par la crainte de voir survenir des accidents, tels que la
trop naïf ni déplacé.
dyspnée, la compression des divers organes abdominaux et
Suies P irondi.
surtout l’asphyxie ou la rupture de l’intestin. Ces derniers, en
particulier , n’ont jam ais été observés à la suite des injections
DES INJECTIONS FORCÉES DANS L’OCCLÜSION INTESTINALE \
forcées ou des insufflations d’air. Cependant, il ne faudra pas
P ar l e D' C h . ISN ABD (de M a r se il l e ).
oublier: 1 les circonstances très défavorables où sont ordi
nairement employées les grandes douches rectales, puisque dans
MA>OF.l'VRE ; e f f e t s ; bénignité h a b it u e l l e ; accidents; avan
l’étranglement interne l’on a souvent affaire h des individus
— Tout instrument fournissant un jet continu
ballonnés, suffoqués, affaissés, ayant !’ intestin plus ou moins
et suffisamment vigoureux peut servir aux injections forcées.
désorganisé; 2° les expériences de M. Piorry sur les animaux
Tels sont les divers irrigateurs. Celui du D r Eguisier et le clyso-
vivants, expériences tendant a démontrer que la distension ex
pompe ordinaire, usités partout, réunissent toutes les conditions
trême de l’intestin par les gaz peut causer l’asphyxie et la
tages et revers .
désirables de simplicité et d’efficacité. Le clysopompe a très bien
suffi chez mes deux malades. Seulement, au lieu de me servir de
la boite en zinc adaptée à Linstrum eut, j’ai fait plonger directe
ment le corps de pompe dans une grande cuvette remplie d’eau
froide que l’on renouvelait sans cesse avant son entier épuise
ment : mon but était d’obtenir une manœuvre plus commode,
tout en m’ assurant un jet régulier et non interrompu. Du reste,
à défaut d’ un instrument perfectionné, on doit savoir tirer parti
de celui que le hasard met sous la main. Chornel, essayaul pour
la première fois les injections forcées, employa, faute de mieux,
une énorme seringue trouvée chez son client et pouvant conte
mort, en refoulant outre mesure le diaphragme vers les pou
mons; 3° la possibilité d’ une perforation intestinale à la suite
de celte même distension, perforation seulement observée dans
le cas où les tuniques étaient déjù ramollies, ulcérées ou gan
grenées (3).
Il est difficile de préciser la quantité d’eau nécessaire aux
lavements forcés. E lle doit varier beaucoup suivant la hauteur
de l’étranglement et suivant le calibre du gros intestin luimême si variable dans la série des individus. D un autre côté,
loin d’éclairer
suffisam m ent, les expériences cadavériques
donnent une idée fort incomplète de ce qui passe sur l’homme
nir plusieurs litres d’eau. Il la fit remplir cinq à six (ois coup
sur coup, ordonna autant de copieux lavements a son malade et
il réussit.
(1) Suile. — Voir le numéro de septembre.
(1) Voir plus haut, pages 200 ei 211.
(2) Voir plus haut, page 218 et suivante».
(U) Grisolle : Traite de jtathologic interne, tome i, chapitre, Pneumotose du
tube ditjeslif.
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240
—
—
241
-
vivant, sain ou malade, et en particulier sur l ’homme atteint
le tube intestinal; déterminer une pression excentrique vers
d occlusion intestinale. Dans le premier cas, en effet, le liquide,
ses parois et ses extrémités; le déplisser, elfacer ses courbures
obéissant exclusivement aux lois physiques, n’a d’autre obstacle
le ramener, autant que possible, à la direction rectiligne; exer
à surmonter que la pesanteur et l’élasticité des tuniques intes
cer sur lui divers mouvements et surtout une véritable traction
tinales: sa mesure est la limite même de cette élasticité uni
de haut en bas; solliciter énergiquement ses contractions affai
forme et passive. Dans le second cas, il rencontre, pour dimi
blies ou annulées dans son bout inférieur; faire remonter dans
nuer plus ou moins la capacité de l’ intestin, les propriétés
sa cavité et réduire toute anse invaginée ; ramollir les matières
inhérentes aux tissus v iv a n ts, diverses modifications physio
durcies; favoriser l’expulsion des corps étrangers, etc., tels
logiques ou pathologiques, mais par dessus tout la contractilité
sont, en deux mots, les eflets multiples des injections forcées.
unie à la sensibilité,
Dire comment elles agissent, c’est démontrer en même temps
et même la douleur associée à des
contractions puissantes et désordonnées.
leur rôle dans l’étranglement interne.
L ’examen attentif des effets produits par l'injection, voilà le
Du reste, on peut se faire une idée assez exacte de leur mé
meilleur guide pour en mesurer l’abondance. On se réglera
canisme et de leur utilité en reproduisant, sur le cadavre, tous
donc sur le mouvement de progression du liquide, sur la tolé
les enchevêtrements intestinaux capables de simuler artificielle
rance de l’ intestin, sur l’anxiété et la dyspnée du malade, sur
ment les diverses espèces d’occlusion.
la dépression du pouls et des forces.
Des docteurs, Cunningham et R illie l, font observer avec quelle
La main appliquée sur l’abdomen pourra bien suivre quel
facilité l’insufflation débrouille sur une table, ou sur le cadavre
quefois la marche de l'eau dans le tube intestinal, mais le
un paquet intestinal quelque intriqué qu’il soit. A l'exemple de
ballonnement, d’ordinaire si prononcé, rendra cette appréciation
ces deux médecins, j ’ai imité à l'amphithéâtre, sur le gros
le plus souvent difiicile ou impossible. On observera soigneuse
intestin et sur l’intestin grêle, tous les étranglements possibles:
ment l’ état général, les progrès de la gêne respiratoire et l’on
invaginations, enroulements, torsions, nœuds, etc,; je les ai
s'arrêtera si la suffocation, déjà considérable, devenait imminente.
soumis aux injections forcées, recommencées de mille ma
Toutefois, en dehors de ces signes précieux, et sans cesser
nières, j ’ai donc pu étudier ce moyen thérapeutique et en
d’avoir l’œil sur la manœuvre, le médecin trouvera la principale
constater la valeur. Toutefois, les résultats varient sur le gros
sécurité des grandes injections dans l’ intolérance même de l’in
intestin et sur l’intestin grêle: prompts et décisifs, dans le
testin. En effet, cet organe, tout d’un coup stimulé par une
premier cas, ils sont, au contraire, lents et incertains dans le
distension brusque et
par la température froide de l’eau,
second. Les différences de la douche expliquent les diversités
réagira bientôt, déployant d’ énergiques contractions bien faites
du résultat: là, en effet, elle conserve toute sa vigueur initiale
pour vaincre la résistance du sphincter anal et pour rejeter
tandis qu elle arrive ici considérablement atténuée par la val
violemment au dehors le liquide, avant l’apparition des accidents
vule iléo-cœcale. D ’un autre côté, si on cherche à simuler
causés par une trop forte dilatation.
l’intussusception la plus commune de toutes, celle de l'intestin
Par l’énorme quantité d’eau introduite, les lavements forcés
grêle dans le colon, si on lui donne même une certaine lon
produisent une action complexe sur l ’intestin, et en particulier
gueur, par exemple 80 centimètres, on voit le courant dilater
sur toute la portion située au dessous de l’étranglement. Dilater
le bout inférieur de l’intestin, presser de bas en haut sur
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242
—
—
l’anse invaginée, la dégager et finalement opérer la réduction
aisément, brusquement, en masse, comme cela a lieu dans
243
-
A quel moment de 1 occlusion intestinale convient-il de faire
les injections forcées?
On devra les pratiquer de bonne heure, avant L invasion
une hernie ordinaire.
A la vérité, les expériences cadavériques ne reproduisent pas
probable de certains accidents, avant l’apparition de la péritonite,
rigoureusement les phénomènes de la vie ; la maladie imprime
avant le développement du gonflement inflammatoire et d’une
b l’intestin des différences capitales dont
constriction irrémédiable, avant la formation des adhérences,
il faut s’efforcer
de tenir compte. L ’ inflammation, le gonflement, laconstriclion
l’altération, le ramollissement ou l’ulcération des tuniques intes
les adhérences, le mouvement péristaltique ou antipéristaltique
tinales, avant le travail éliminateur d une anse depuis longtemps
sont autant d’éléments nouveaux mobiles, variables, plus ou
invaginée.
moins difficiles b préciser, susceptibles de compliquer ou de
Les adhérences, en donnant lieu b des étranglements in
simplifier la situation, d'être favorables ou nuisibles au succès
surmontables peuvent rendre inutiles les injections forcées;
des injections forcées. Les altérations morbides survenues pen
la lésion des paiois intestinales peut les rendre nuisibles en
dant la vie ne constituent pas toujours un obstacle aussi invin
favorisant une perforation. Les adhérences, en particulier,
cible qu’on pourrait le croire d’abord. A in si, M. R illie t, b propos
doivent être une cause fréquente d’insuccès ; on sait avec quelle
de l’anatomie pathologique de l ’invagination, signale un fait
rapidité elles se forment et s'organisent : il suffit de rappeler les
digne d’être médité: « En exerçant, dit-il, une douce traction
faits si communs observés sur les individus opérés ou morts de
sur le bout supérieur de l’intestin, ou mieux encore en refoulant
hernie étranglée , ou bien ayant succombé b la péritonite.
de bas en haut la masse invaginée, on fait cheminer un corps
Toutefois, il ne faudra renoncer aux douches ascendantes dans
étranger qui n’est antre chose que l’intestin invaginé. On le
aucune période de l’ occlusion ; ressource précieuse de presque
déplisse très aisément, si aisément même, que l ’on se prend'a
tous les instants, elles ont réussi fréquemment b une époque
regretter de n’avoir pas essayé pendant la vie, au moyen d’un
très avancée; l ’expéiience le prouve sans réplique. A in si, chez
procédé mécanique ou même d’une opération chirurgicale, une
le malade du D r À . B o n ati, l’étranglement était arrivé au sixième
extraction que l’on exécute si facilement après la mort (1). »
jour; il était également ancien dans les deux cas de Chomel ,
Quelle est la meilleure position b donner au malade?
dans celui du D r Lhommé et dans celui qu’a rapporté le Journal
E lle doit varier suivant le siège reconnu ou supposé de
de Médecine et de Chirurgie pratiques ; enfin, sur mes deux
T occlusion et avoir pour but de concentrer tout l’effort du cou
malades, il datait, chez l ’un du dixième jour, et chez l’autre du
rant sur l ’obstacle ou sur la valvule iléo-cœcale, dans le cas où
seizième (1).
l ’étraoglement occuperait l ’intestin grêle. Le malade sera donc
Malgré leur valeur, les injections forcées manqueront trop
étendu sur le dos, le bassin élevé, si l ’occlusion atteint le
souvent encore leur but ; il faut s’y attendre en songeant b la
colon descendant ou le colon transverse; il sera couché sur le
nature et b l ’intensité de certains étranglements internes. Elles
côté droit, le bassin abaissé, si l’occlusion existe vers le colon
ont échoué deux fois dans la pratique du Dr Strambio (2 ), plu-
ascendant ou Lintestin grêle.
(1) Rilliet et Barthez, Traite des maladies des enfants, tome I, page 809.
(t) Voir plus haut pages 209 et 211.
(2) Voir plus haut page 218.
�—
244
—
—
245
-
sieurs fois entre les mains de Chomel (1), une fois à l’ Hôtel-
lum étreignant L intestin à la façon d’ un nœud d’autant plus
D ieu . dans le service du professeur Rostan
serré que la constriction persiste davantage (1 ;
*2), et vraisembla
blement on n'a pas enregistré tous les insuccès. Cependant elles
n'en constituent pas moins un moyen , à la fois
rationnel et
puissant, digne d’être plus souvent employé , et d'être toujours
essayé avant de renoncer à toute thérapeutique , ou d’en venir
soit à l’ entérotomie conseillée par MM. Laugier, Maisonneuve
et N éla lo n , soit à la gastrotomie régularisée, proposée par
M. Parise de L ille .
T La compression du tube digestif par une tumeur extérieure
lorméeaux dépens des viscères ou des parois de l’abdomen.
L ’occlusion de l’intestin aura, au contraire, des chances
réelles de guérison lorsqu’elle reconnaîtra pour causes :
1* L ’invagination (2) ;
2° La torsion , les divers enroulements de l’intestin sur luimême ;
3“ Une hernie des parois abdominales récemment engouée ou
D es injections forcées relativement a la nature de l ’oc
clusion.
— Les injections forcées sont appelées à des résultats
très dilféreuts suivant la nature de l’occlusion intestinale.
Les principales causes susceptibles de les faire radicalement
échouer sont :
étranglée: ici l’injection forcée prêtera, au besoin, son utile
concours à la réduction extérieure ;
4* L ’introduction d’ une anse intestinale sous une bride formée
à la suite de péritonite et reliant diverses parties de l’intestin
entre elles, ou à tout autre viscère, ou bien à une portion d’épi
1° L inflammation des tuniques de l'intestin et, en particulier,
ploon. Dans ce cas , l’ intestin s’engage sous ces sortes de ponts
l’entérite phlegmoneuse, intervenant d’ailleurs très rarement
d’abord plus ou moins larges , et n'en subit aucune gêne immé
pour opérer l’oblitération complète ;
diate; mais bientôt, à la suite d'un engouement accidentel,
2° Les rétrécissements dus à un squirrhe ou à un cancer des
ceux-ci deviennent trop étroits et finissent par déterminer un
parois, ou bien à une simple hypertrophie , à une induration,
véritable étranglement, semblable aux
ou bien encore a des tumeurs épithéliales, des polypes . des
niaires ;
végétations syphilitiques ;
3° Les cicatrices provenant de plaies intestinales, de larges
ulcérations tuberculeuses, typhoïdes, syphilitiques, cancéreuses ;
4* Les transformations fibreuses spontanées , quelquefois
congéniales ;
5* La conslriction longtemps prolongée, exercée soit par un
anneau fibreux , soit par une ouverture h ern ia ire, et ayant pro
duit finalement l’oblitération;
6* L ’étranglement déterminé par le sac d’ une hernie récem
ment réd uite, par l ’appendice iléo-cœ cal, ou par un diverlicu-
(1) Abeille Médicale , loc. cil.
(2) Gazette des H ôpitaux, 5 février 1846, page Ci.
étranglements
her
(I) En signalant le mécanisme des étranglements diverticalaires et leur gravité
constamment au-dessus des ressources ordinaires de la thérapeutique, il est
impossible de ne pas rappeler l'excellent Mémoire du professeur Parise de Lille,
Sur le mécanisme de l'étranglement intestinal par nœud direrticulaire. (Voir le
Bulletin Médical du nord de la France, n°‘ de juin et juillet 1860.)
(î) L’invagination est la plus fréquente de toutes les espèces d’occlusions.
(Benjamin Philipps , London méd. chir. Irons.; 1848.)
Les invaginations du gros intestin sont assez nombreuses ; celles de l’intestin
grêle sont au contraire assez rares ; les plus communes ont lieu de l’intestin grêle
dans le gros intestin (W ill. Thompson, dans Edimbourg med. and surg.
jùurnal 1835, et dans Arcli. gén. de méd., 2* série, tome XI, page 352. —
Raige-Delormo.— flurquoy, Recherches sur les invaginations, 1858. —Valleix.—
Grisolle.)
L’invagination a lieu à tous les âges ; elle est surtout fréquente chez l’enfant, et
en particulier dans la première année. Son siège le plus ordinaire est le gros
intestin dans la première enfance, l’intestin grêle dans la seconde. (Rilliel.)
�—
d°
246
-
—
Les corps étrangers tels que : accumulation de matières
fécales d urcies, o s, noyaux de fru its , concrétions biliaires ou
247
—
que l’accident ne devienne pas à son tour l'origine d’une désorgaoisation profonde et irrémédiable.
intestinales ; calculs rénaux ou vésicaux ayant pénétré dans l'in
Les cas d’impuissance radicale pour les injections lorcées sont
testin ; paquets de vers intestinaux formés par un tœnia et sur
heureusement les plus rares dans la pratique; ceux où elles ont
tout par des lombrics ;
des chances de réussir so n t, au contraire, les plus fréquents.
6' E n fin , lilé u s spasmodique ou n e rve u x, s’il existe réelle
Et s’il est, en g én éral, difficile de porter un diagnostic rigou
reux sur la nature de I occlusion , presque toujours on recon
ment (1).
Au point de vue de l'efficacité des injections forcées, il y a
naîtra l’affection qui a produit un étranglement réfractaire aux
donc, on vient de le voir, deux espèces bien distinctes d’occlu
lavements forcés; car déjà auront apparu des signes locaux ou
sion intestinale. Dans la première , l'oblitération est définitive;
généraux caractéristiques, soit des troubles digestifs chroniques
généralement elle apparaît comme le dernier terme, le dénoue
et intermittents annonçant le rétrécissement lent et progressif
ellc-méme
de l'intestin , soit des accidents à invasion brusque, à marche ra
incurable. Dans la seconde , on a affaire moins à une maladie
pide révélant une constriction opérée subitement par un anneau
véritable qu’à un accident. L ’intestin a é té , en quelque sorte,
très étroit, par un nœud diverticulaire, etc.
ment fatal d une lésion
ancienne , progressive,
surpris au milieu d’ une santé parfaite; au fond, il n’a nulle
D’ailleurs, quelles que soient les causes de l'occlusion et les
ment perdu ses aptitudes physiologiques, et pour le rendre
incertitudes du diagnostic, dans le doute on emploiera toujours
immédiatement à ses fonctions naturelles, fortuitement en
les grandes injections. D ’une innocuité habituelle, elles seront
rayées, il suffît de lever l’obstacle assez t ô t , bien entendu, pour
capables de rendre des services même dans certains rétrécisse
ments organiques. C e u x -ci, en effet, sans être arrivés au der
(l) Longtemps admis, l’iléus spasmodique a élé formellement nié plos tard,
à mesure que le diagnostic moderne , éclaire sur l'anatomie, a pris ure certitude
plus complète. Pour les partisans de cette dernière opinion , l’occlusion est
toujours due à un obstacle mécanique, physique ou organique de l’intestin,
et les cas d’iléus spasmodique spontanément réJuils résulteraient simplement de
la disparition de cet obstacle même. (Raige-Delorme , Dictionnaire : Volvulus.—
Grisolle, Pathologie interne, t. Il, Iléus.)
Cependant, l’opinion ancienne a retrouvé aujourd’hui des adhérents con
vaincus , e t , sans parler du volvulus nerveux uniquement constitué par le
mouvement anlipéristaltique de l’intestin , je citerai les témoignages suivants:
M. Cruveilher admet les contractions musculaires dans ses cinq divisions des
oblitérations intestinales. (Anatomie pathologique générale; Paris, 1852, tome
H , page 2(1.)
Le Dr G iraud, cité par Valleix , croit, en s’appuyant sur deux faits, à
l’existence de l’étranglement spasmodique, et il le désigne sous le nom d’iléus
par rétrécissement. (Journal des connaissances medico-chirurgieales, t5 novem
bre 1852.)
Enfin, M. Monneret n'hésite pas à regarder les contractions ataxiques, irré
gulières des toniques musculeuses de l’intestin comme cause fréquente d’oblitéra
tion. (Traité de pathologie interne, tome I,page 576 ; Paris, 1864.)
nier degré, peuvent tout à coup déterminer une obstruction
complète résultant d’un
embarras stercoral dans l’ampoule
formée derrière l’ anneau constricteur. Cela se rencontre surtout
au gros intestin Les lavements forcés auront alors une utilité
réelle : en levant momentanément l’obstacle, ils feront cesser
les angoisses de l’étranglem ent, éloigneront le danger, et ajour
neront ainsi le terme fatal.
Des
injections forcées relativement ad siège de l ’occlc-
9ion. — L ’occlusion peut avoir son siège, soit dans le gros
intestin, soit dans l’ intestin grêle. D elà des différences capitales
au point de vue du traitement actuel.
l a Occlusion du gros intestin. — Les injections forcées
trouvent leurs plus grandes chances de réussite et*leur véri
table importance dans l’ occlusion du gros intestin.
�—
249
—
Ic i, en eftel , elles manifestent toute leur puissance : le cou
longueur de l’ instrument. Des gaz et des matières s’échappèrent
rant pénètre avec facilité et conserve jusque sur I obstacle toute
immédiatement, et tous les symptômes de l ’étranglement interne
sa vigueur ; il dilate , allonge, déplisse l’intestin, presse dans le
disparurent (1).
sens de ses extrém ités, excite violemment ses contractions et,
[La fin au prochain numéro.)
coproduisant au plus haut degré les effets que j ’ai énumérés
précédemment vI , il développe les conditions éminemment
lavorables au succès de la manœuvre. En outre , le gros intestin
Du traitem ent de la Chlorose et de l’Anémie
est le siège du plus grand nombre des occlusions , puisque l in
P ar le Docteur L ucien P aphlaud.
vagination est la cause la plus fréquente des étranglements
internes, et qu elle atteint de préférence cette partie du tube
digestif : de là une consécration nouvelle pour la valeur des dou
ches ascendantes.
de l'appauvrissement du sang, paraissaient avoir leur remède
unique dans les préparations du fer, et jamais spécifique n’a
Toutefois, celles-ci deviendraient inutiles si l'occlusion existait
très b as, si I on avait particulièrement affaire à une invagination
du colon descendu jusque dans le rectum ou même faisant saillie
au dehors. L ’impulsion du jet se trouvant alors complètement
neutralisée, il conviendrait de substituer aux injections forcées
un moyen plus direct et plus sû r, le cathétérisme et le refoulement
de l'intestin , aidés au besoin de la réduction préalable avec la
main.
vait été considéré comme mieux en possession de son titre que
ne l’était ce médicament. Cependant, depuis quelques années,
les faits d'abord, la théorie ensuite, sont venus jeter quelques
doutes sur la toute puissance du fer pour la restauration du
sang. On s ’est aperçu que son usage exclusif ne réussissait pas
constamment à réparer les lésions du liquide nourricier, quelle
que lût la persévérance qu’on eût mise à son emploi, et quelle
que fût la variété des préparations dont on se fût servi, et de
Telle fut la conduite suivie par le I ) r Bosia à l’égard d’un petit
enfant de quatre mois atteint d invagination intestinale, située
dans Je colon descendant. Le toucher rectal faisait sentir dis
tinctement , à cinq centimètres au-dessus de l ’anus, une tumeur
m olle, arrondie, remontant sous la pression du doigt, et redes
cendant aussitô t, surtout pendant les efforts et les cris du petit
malade. Les grands lavements d’eau froide administrés à plu
sieurs reprises restèrent sans résultat. Le cathetérisme intestinal
fut alors pratiqué. On employa une grosse sonde en gomme
élastique munie d’un tampon à son extrémité ; après quelques
instants de douce et patiente m anœ uvre, l’anse intestinale inva
ginée fut refoulée et reportée dans
La chlorose, l’anémie et toutes les maladies qui dépendent
l’ abdomen
de toute la
plus on a constaté que d’autres médicaments avaient pu faire
l'œuvre de réparation pour laquelle le fer avait échoué.
D’un côté les recherches pathologiques ont démontré que la
chlorose et l'anémie n'étaient pas directement et uniquement
issues de la diminution des globules rouges du sang, et qu’elles
n’étaient le plus souvent que des maladies de deuxième ou de
troisième génération, dont la cause première remontait à une
lésion de l’innervation ou de la nutrition, hystérie ou dyspepsie.
Celle filiation étant admise, la thérapeutique ne devait plus
avoir uniquement pour but de faire pénétrer du fer dans l’éco
nomie animale pour augmenter dans le sang la quantité de la
matière colorante et des globules rouges, elle devait avoir en
(I) G a u l t t des H ô p ita u x, 27 novembre 1863, page 503
�—
250
—
vue de régulariser l'innervation et la nutrition, de manière à ce
<]ue la réparation des liquides et des solides eût lieu dans une
mesure normale qui donnât aux uns et aux autres les principes
qui les constituent. En deux mots, régulariser l’innervation et
la nutrition, et proportionner l'assimilation et la désassimilation,
tel est le problème thérapeutique que nous devons poursuivre
251
-
2, 5 et 4 grammes par jour. Mais ne nous bornons pas a ne
considérer la modification à opérer chez nos malades que sous
le rapport de l’introduction du fer dans leur sang, et éludions
faction des autres agents qui, sans introduire ce métal dans
I économie animale, guérissent, eux aussi, les constitutions ap
pauvries et détériorées.
dans le traitement des maladies caractérisées par l’abaissement
Un auteur dont le nom nous échappe, et qui avait observé un
des forces et par l’altération des éléments de notre organisation.
des premiers que faction du fer ne consistait pas uniquement
D’un autre côté, les investigations de la chimie et de la pa
dans la restitution au sang de sa proportion normale de ce
thologie ont singulièrement réduit le rôle du fer dans la recons
métal, avait cru pouvoir établir que les propriétés du fer pour
titution du sang. Les quinze kilogrammes de sang que contient
la guérison de la chlorose lui étaient communes avec les autres
le corps humain en moyenne, renferment à peine deux grammes
métaux, et que des effets identiques ou tout au moins analogues
de fer. Serait-ce donc pour réparer une diminution de 50 b 60
aux siens, pourraient être obtenus avec le plomb, le cuivre, le
centigrammes de ce métal dans le liquide sanguin que nous
zinc, l’argent, fo r , etc. Cette généralisation est pour le moins
ferions prendre pendant trois ou quatre mois à nos malades, I ,
exagérée, et sans entrer dans l’examen des qualités thérapeuti
2 , 5 et i grammes de fer par jour ? Nous ferions ainsi passer
ques de toutes les substances métalliques, il nous suffira de
dans l’économie animale de 150 à 500 grammes de fer pour en
citer le plomb, dont f inlluence est constamment toxique pour
faire assimiler la minime portion de 50 à (50 centigrammes. On
peu qu’elle soit prolongée, et quelle que soit la minime propor
voit que le résultat ne serait pas en rapport avec les moyens. Il
tion des doses. Mais dans tout paradoxe, il y a une certaine
faut donc interpréter faction du fer autrement, et admettre une
dose de vérité, et il est même quelques esprits qui soutiennent
inlluence dynamique qui est au-dessus de son intervention
que tout paradoxe est un commencement de vérité. Or, nous
comme substance assimilable. Nous sommes loin de nier l’im
trouvons dans le manganèse, fo r, l’antimoine, et l'arsenic, des
portance que peut avoir la restitution â faire au sang d’un quart
médicaments analogues au fer, des médicaments reconstituants.
ou d’ un tiers de sa proportion de fer, mais nous ne comprenons
Nous ne voulons examiner dans cet article que les proprié
pas que, pour arriver à ce but, il soit utile d’en employer plu
tés reconstituantes de l’arsenic et de l’antimoine. Il est d’obser
sieurs centaines de grammes dont la totalité, moins un demi-
vation que les sujets soumis pendant longtemps (plusieurs mois
gramme peut-être, passera inutilement par les voies d’ingestion,
ou plusieurs annf-es) à un usage régulier de l’un de ces deux
d absorption et d’élimination.
médicaments, â doses minimes, acquièrent de l ’appétit, des forces
Hayons donc de nos prescriptions les doses massives de pré
et de l’embonpoint.
parations ferreuses. Comme beaucoup d’autres substances, ce
Le tartre stibié, qui est de toutes les préparations antimo
médicameut agit plus par la continuité que par la quantité, et
niales que nous connaissions celle qui est portée au plus haut
une dose quotidienne de 10 à 20 centigrammes de fer, arrivera
degré de dynamisme, a été employé avec succès comme recons
tout aussi bien b en faire pénétrer 50 â 60 centigrammes dans le
tituant contre la phthisie. Donné d ’abord comme vomitif, ou ne
sang au bout de quelques mois d’usage que des quantités de I ,
tarde pas à reconnaître que, malgré la tolérance, ou mieux en
�—
—
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253
-
—
raison même de cette tolérance, au lieu de continuer le rôle de
médicament perturbateur qu’il avait au début, il devenait mé
dicament réparateur, et que, dans ce sens, son influence se
prolongeait indéfiniment.
Ce même remède a été appliqué comme altérant spécial au
traitement du glaucome hypertrophique et des ophlhalmies scro
fuleuses et même purulentes, contre lesquelles il doit avoir une
action spéciale, puisqu'elle a été constatée par de savants oph
talm ologistes anglais et français, mais son influence générale
reconstituante ne doit-elle pas avoir une grande part dans cette
action spéciale et localisée sur l’ organe de la vue?
Quant a l ’arsenic, qui, jusqu’à ces dix dernières années,
n’ avait été considéré que sous le point de vue étroit de ses pro
priétés altérantes contre l’herpétisme, et de ses effets anti-pé
riodiques contre les fièvres et les névralgies, son action recons
tituante est parfaitement démontrée par les faits et généralement
admise aujourd'hui. On voit en lui le principe actif d’ un très-
fluence réparatrice de l ’arsenic, et recouvrer graduellement une
santé qui avait paru à jamais perdue.
L action de ces deux médicaments, antimoine et arsenic,
parait identique : c’est une action insensible, douce, lente, et à
laquelle notre distingué confrère le docteur Isnard a donné avec
raison l’épithète de suave. En effet, elle est accompagnée d’une
sensation de bien être intérieur qui autorise celte expression.
Leurs doses sont les mêmes : de 2 à 4 milligrammes, en mo
yenne, et l’analogie qui existe entre l’antimoine et l’arsenic, ne
se borne pas, comme on sait, aux effets thérapeutiques, elle
s’étend à leurs effets toxiques et elle va même jusqu’à la simi
litude de leurs tâches dans l’appareil de Marsh.
Celte analogie thérapeutique nous a fourni l’idée de com
biner ces deux substances en un produit unique; on sel nouveau,
l'arséniate d’antimoine, dont les propriétés ont répondu a notre
attente et qui nous a donné, à doses minimes, un médicament
énergique, d’une administration facile, s’adaptant à tous les cas
grand nombre d’eaux thermales dont l’ efficacité serait inexpli
dans lesquels les antimoniaux et les arsenicaux sont employés,
cable en raison de l'insignifiance de leur minéralisation en
et qui nous parait jo u ir d’ une action spéciale pour régulariser les
dehors de leur élément arsenical.
fonctions du
Les recherches d’un grand nombre d'observateurs tels que les
cœur,
c’est pourquoi nous lavons préconisé
contre les affections de cet organe.
docteurs Sistach, Isnard, W ahu, etc., ont prouvé que lorsque
Mais nous avons voulu aussi utiliser son action reconstituante,
l’ organisme était descendu au dernier degré d une cachexie
et nous en servir contre les maladies caractérisées par l’appau
quelconque, soit paludéenne, soit tuberculeuse, ou autre, alors
vrissement du sang. Déjà, quelques-uns des savants confrères
que tous les toniques ordinaires, y compris le quinquina et le
que nous avons cités avaient traité et guéri avec l’arsenic seul,
fer, étaient non-seulement impuissants, mais de plus impossi
des chloroses et des anémies rebelles à 1‘ influence du fer. Déjà
bles à tolérer, en raison du délabrement des organes digestifs, il
aussi, il avait été reconnu par eux que l association ou l’alter
y avait encore, au milieu de ces conditions précaires, une res
native des préparations arsenicales avec les préparations ferrugi
source dernière, ullima ratio , qui pouvait retirer les malades
neuses rendaient le traitement plus facile et la guérison plus
de l'abîme dans lequel ils descendaient, et que cette ressource
rapide; plus facile en ce qu’il n était pas besoin de dépasser les
extrême consistait dans l ’emploi de l ’arsenic. On a vu des ma
doses minimes ; plus rapide en ce que la médication arsenicale
lades épuisés par d’intarissables suppurations, ou minés par
activait singulièrement les effets de la médication ferreuse. Nous
des cavernes tuberculeuses, ou bien encore lentement empoi
avons voulu réunir ces avantages et les augmenter encore des
sonnés par le miasme paludéen, se relever peu à peu sous l’in-
vertus du troisième agent dont nous avons parlé dans le cours
�—
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—
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255
-
de ce travail, l ’antimoine. Pour cela, nous avons fait faire une
pas là. Nous rencontrons souvent chez les sujets chloro-ané-
préparation à proportions lixes et invariables dans laquelle l ar-
miques des lésions de l'appareil respiratoire, des toux sèches,
séniate d'antimoine est uni au fer, et qui porte le nom de
des catarrhes bronchiques, et même les premiers signes stéthos
granules antimonio-ferreux. Chaque granule représente un 1/2
copiques qui annoncent la tendance à la tuberculisation, ou un
milligramme de sel antimonial; et quelques centigrammes de
commencement même de tuberculisation. Alors, aux remèdes
fer, Ioht dose est de quatre seulement par jour. Avec ce médi
précédents que nous considérons tous comme excellents contre
cament d'un si petit volume et d'une facilité d'administration
celte redoutable maladie, nous adjoignons l'huile de foie de
tout exceptionnelle, nous avons vu, à tous les âges et dans
morue, et quelquefois même dans les cas où la tuberculisation,
toutes les conditious de la vie,
déjà commencée, est menaçante, nous faisons faire, soit simul
la reconstitution des sujets
appauvris et débilités s’opérer avec une sûreté et une rapidité
tanément, soit consécutivement, un traitement par les eaux
merveilleuses, même dans des cas où les doses massives des
hydro-sulfureuses de Bonnes ou de la Baillière.
ferrugineux n'avaient pu inlluencer la maladie et n ’avaient eu
pour résultat que la fatigue des organes digestifs.
Nous croyons que plus il y a de forces qui convergent vers
un même but, mieux ce but doit être atteint. Aussi, si le fer
Tel est l’ensemble des médications que nous avons coutume
d’opposer à la chlorose et à l ’anémie, médications à I aide des
quelles nous avons presque constamment réussi à obtenir des
succès.
doit être placé au premier rang des agents réparateurs du sang,
et si l'arsenic et l'antimoine sont les meilleurs des reconstituants
et des névrosthéniques, ce n’est pas une raison pour ne voir
Chronique Mensuelle.
qu’eux dans le traitement de la chlorose et de l’anémie. Il im
porte d ’y faire entrer les toniques végétaux et en première ligne
le quinquina, et les autres toniques amers. Nous avons donc
coutume de prescrire, outre la médication arsénio-antimonioferreuse, le vin de quinquina et de gentiane. Nous donnons la
préférence aux quinquinas rouge ou jaune, et nous choisissons
l un ou l'autre selon qne les sujets ont ou non â subir ou à
craindre les influences paludéennes. S’ il n’est besoin que d’un
tonique,
nous optons pour le quinquina rouge; s’il est besoin
d’ un tonique doublé d’un anti-périodiqne, nous adoptons le
quinquina ja u n e ; et enfin, si nos malades ont, comme cela
n'arrive que trop souvent, quelques traits de la diathèse scro
fuleuse, nous faisons ajouter au vin de quinquina une petite
quantité d’iode, dont la dose varie, selon les circonstances, de 1
à 4 milligrammes par jour.
Notre thérapeutique de la chlorose et de l’anémie ne se borne
Le 16 septembre, au moment même où notre dernier numéro
sortait des mains de l ’imprimeur, nous avons appris une bien
triste nouvelle. M. Métier venait de succomber à la campagne
du docteur Dugas, prés Marseille, des suites d’une affection céré
brale aiguë. C’est en visitant le lazaret de nos îles que l’infatigable
inspecteur général des services sanitaires aurait contracté une in
solation, point de départ du mal qui l’a frappé. Notre président, le
docteur Seux, n’a pas manqué de visiter pendant sa maladie son
collègue au conseil général de l ’association des médecins de France,
et s’est fait un devoir d’accompagner ses dépouilles mortelles à
l’église du Canet, ou son service funebre a été célébré. Uuanl à
notre journal, il regrette vivement que les circonstances l’aient
empêché de payer plus tôt son tribut d’éloges et de regrets à cet
homme éminent chez qui se trouvaient réunis à un si haut degre
lamour du devoir, l’élévation de I esprit, la dignité des manières
et l’élendue du savoir.
�—
256
257
-
—
Pourquoi faut-il que cette fois notre chronique soit presque un
article de nécrologie? Un autre deuil vient de frapper la médecine
française dans la personne d’nne des illustrations dont la Provence
est le plus justement Ûère. Le 4 octobre, M. le professeur Rostan
a succombé lui aussi à une affection cérébrale. M. Rostan fut une
des lumières de l’école de Paris, un des propagateurs les plus au
torisés et les plus dévoués de sa doctrine, à laquelle il a consacré
les derniers efforts de sa noble intelligence. Clinicien consommé
autant que professeur habile, il a, mieux que personne, enseigné
la médecine piatique et rempli la haute et difficile mission de for
mer des médecins. Nous nous réservons de revenir, dans un article
spécial, sur la vie et les travaux de M. Rostan.
Pour le moment, l ’Académie se recueille : après en avoir fini avec
la discussion sur la méthode sous-cutanée, elle hésite à se lancer
DES INJECTIONS FORCÉES DANS L’OCCLÜSION INTESTINALE (1)
P ar l e Dr C h . ISNARD (de Marseille ).
2' Occlusion de l'intestin grêle. — La question des lave
ments forcés dans l’occlusion de l’intestin grêle ne peut se
résoudre qu’après la solution préalable de celle-ci : la valvule
iléo-cæcale est-elle ou n est-elle pas un obstacle infranchissable
pour les liquides poussés du colon vers l'iléon ?
Malgré sa facile vérification, au moins sur le cddavre, malgré
sa grande simplicité apparente, celte dernière question , loin
d’être jugée d éfinitive m ent, est aujourd’hui encore très contro
dans un nouveau tournoi scientifique; la question si imporiante de
versée ; e t , si la majorité des anatomistes et des médecins re
l ’industrie des nourrices, question ni plus ni moins que capitale
pour l’avenir des générations appelées à nous succéder, a provo
qué jusqu’ici des conversations, mais non de vrais discours.
garde la valvule de Bauhin comme une barrière absolue au
A la société impériale de chirurgie, dis discussions intéressantes
ont eu lieu sur les tumeurs du testicule, sur le cancer du pharyin
et de l ’œsophage, sur les polypes fibreux du rectum ; nous regret
tons que le défaut d’espaee ne nous permette pas de résumer ces
discussions et nous empêche également de donner une idée som
maire de quelques travaux de valeur qui ont paru dans la presse
médicale.
La commission chargée d’organiser le congrès médical interna
tional vient d’annoncer l ’ouverture du congrès pour le 16 août
1867, et de faire connaître son programme.
Nous espérons que la médecine provençale sera largement re
présentée dans cette assemblée; nous comptons aussi qu’elle pren
dra une part active aux travaux du congrès scientifique qui doit
s ouvrir à Aix en décembre prochain.
reflux des matières solides, liquides ou gazeuses, on trouve, pour
défendre l’opinion contraire, des preuves nombreuses et des
témoignages d ’une incontestable valeur.
Examinons rapidement la série des travaux et des faits oppo
sés, et voyons quelle conséquence légitime on en peut tirer sur
le rôle de la valvule-iléo-cœcale.
En 1573, C. Varole découvre cette valvule, l’appelle opercule
de l’iléon, et définit nettement ses usages, en établissant qu elle
s'oppose au retour des excréments du colon dans l'iléon. Six ans
après, Bauhin copie Varole, e t, s’attribuant la découverte de
son prédécesseur, il a l’honneur de lui attacher son nom. Fabrice
d’Aquapendcnte démontre, le premier (1618), que la valvule de
Bauhin s’oppose au passage de l’air dans l’iléon, quand on
insuffle le gros intestin par l’anus. Vers la même époque , Riolan
l’envisage comme la barrière des clystères. Morgagni en trace
l’histoire exacte (1719) ; un peu plus lard ,Winslo\v en fait con-
Le Comité de Rédaction.
Marseille.— Typ. Arnaud, Cayer et Comp., rue Saint-Ferrcol, 57.
V
(1) Suite et fin .— Voir les numéros de septembre et d’octobre.
M
�—
258
—
naître la structure ; enfin , Albinus donne de la valvule 1751
la description la plus complète que l ’on ail publiée jusqu’à ce
s’opposer à leur rétrogradation vers l'intestin grêle. Dans l ’état
physiologique, cette ascension rencontre trois principaux obs
jour (1).
Un grand nombre d'anatomistes et de physiologistes sont
venus ensuite confirmer
faciliter l ’écoulement des matières dans le gros intestin, el pour
les recherches précédentes sans y
1° La configuration infundibuliformc de la valvule largement
je me contenterai
ouverte du côté de l ’iléon , fermée du côté du cæcum, par un
ô , MM. Béclard -i ,
bourrelet saillant, m obile, oblong d’avant en arrière, fendu
ajouter aucun trait saillant. Dans celle voie
de citer Bichat 2), Meckel et Panizza
tacles :
dans le môme sens et constitué lui-même par une lèvre supé
Longet 5 , Sappey 6) et M il ne-Edwards 7 .
Parmi ces derniers , plusieurs ont simplement mentionné le
rôle physiologique de la valvule iléo-cœcale destinée à empêcher
le retour des matières lécalcs dans l’ intestin g rê le ; d’autres, tels
que Panizza et M. Sappey , plus exclusifs, ont formellement nié,
à la suite d’ expériences directes sur le cadavre
la rétrogradation
de toute espèce de matière solide , liquide ou gazeuse.
« Pour constater, dit M. Sappey, que la valvule s oppose au
rellux des liquides , il suffit de verser de l ’eau dans le cæcum
par le colon ; bien que l'iléon soit libre , il ne passe pas une seule
goutte de liquide dans sa cavité , e t , si pour forcer ce passage ,
on soumet le cæcum à la pression d’une colonne d’eau de 3 à i
m ètres, on reconnaît que le liq u id e , loin de s'échapper par
l’orifice iléo-cœcal , distend les parois de l ’intestin et finit par
rieure et une lèvre inférieure appliquées l une contre l’autre ;
2* L ’insertion à angle droit de l ’iléon sur le côté du cæcum,
la disposition flottante du bourrelet valvulaire dans la cavité de
ce dernier : double circonstance très favorable a l ’occlusion de
la valvule , pendant le flux ou le reflux des matières poussées du
cæcum vers le colon , ou du colon vers le cæcum ;
3* La distension du cæcum, dont l’effet est de tirer sur les
freins de la valvule et d’en rapprocher les lèvres, à la façon d une
boutonnière, avec d’autant plus de rigidité que la dilatation
est elle-même plus considérable.
Voyons maintenant si les matières, au moins les liquides et
les gaz, peuvent vaincre la difficulté et remonter dans l ’intestin
grêle.
les rompre. — Si au lieu de le rem plir d’eau , on I insuffle, on
A toutes les époques, des hommes dont on ne saurait con
reconnaît également que l’air ne s’échappe pas par l iléon. Or,
tester ni la bonne fo i, ni la compétence, ni l’autorité, sont
si les gaz et les liquides trouvent dans cette valvule une barrière
venus répondre affirmativement à cette question , en invoquant
infranchissable, il devient évident que les matières demi-liquides
tour à tour les expériences sur les animaux vivants, les expé
ou solides seront plus sûrement arrêtées encore, »
riences sur le cadavre et la pathologie.
La valvule iléo-cœcale est merveilleusement organisée pour
Richerand, Sabatier, Borsieri (1), Adelon, Jourdan et Mou-
(1) Sappey, Traité d'anatomie descriptive, tome III , page 204,
(2) Anatomie descriptive.
(3) Gazette med. de Paris. 1835, tome III, page 8.
(i) Physiologie, 1859, page 71 , 3* édition.
(5) Traité de physiologie. 2* édition 1861 ; tome 1 , page 145.
(6) Loc. cit.
(7) Leçons sur la physiologie et l’anatomie comparée , 1861 el 1862 ; tome VI,
page 395 et tome VII, page 139.
et des solides , des lavements et des matières fécales; ils s’ap-
falcon (2) admettent le re je t, par les vomissements, des liquides
puyent sur les expériences et les faits pathologiques rapportés
(t) Gazette méd., loc. cit., page 8.
(2) Dictionnaire des sciences medicales, en 60 vo! , tome XXIII , articles :
lleo-cwcat, page 840 et Iléus, page 5*46, torne XXV , article : Intestin , p. 545.
�—
260
—
—
par Barthez (1) , Schwartz, Brunner, Van-Swieten , Morgagni
et les auteurs qui ont écrit sur l’iléus.
-
Arrivé de haut en bas sur la valvule , il l ’aura entr’ouverle. En
même tem ps, l'eau , toujours poussée violemment par les con
Widemar,Dehaén, Haies et Palletta ont fourni des preuves ana
logues, et même, pour démontrer l'innocuité des lavements for
cés, Palletta écrit : « La résistance de la valvule peut être vaincue
dans la plus grande partie des cas , comme l'ont démontré les
injections faites sur le vivant et sur le cadavre par Dehaën , par
Widemar et par moi ; et , dans aucune de ces expériences, on
n’a vu les intestins remplis et distendus de manière à offrir
quelque danger de rupture 2). »
Dans sou Manuel médico-chirurgical (3), Aulhenac partage
les mêmes opinions et croit aussi au vomissement des liquides
injectés par le rectum.
J’ai résumé plus haut .4 la remarquable observation du I)' A.
Bonati, si souvent reproduite dans la presse médicale. J’y renvoie
le lecteur. Eu la rappelant ici, je veux surtout la signaler comme
un exemple de lavement rendu par les vomissements, après
avoir mis fin à une occlusion intestinale. L'auteur admet une
invagination de l’intestin urèle, avec introduction
261
du bout
supérieur dans l'in férieur, et il explique de la manière suivante
la guérison par les effets combinés des injections forcées et du
mercure : les douches, employées en premier lieu , trouvèrent
une barrière d’abord infranchissable dans la valvule de Bauhin
dont la résistance , très variable suivant les individus, ne put ici
être vaincue ni par la force du courant, ni par la vigueur du
mouvement antipérislaltique. Le mercure fut alors administré.
Par sa lluidilé et sa pesanteur, il aura traversé la lumière très
rétrécie, mais incomplètemeut oblitérée, de l ’intestin invaginé.
tractions antipéristaltiques et trouvant une issue désormais
lib re , sera facifemont remontée du colon dans l ’intestin grêle ;
puis, venant se heurter contre l’anse invaginée, elle l’aura en
traînée et réduite, et se sera enfin reportée vers l’extrémité
supérieure du tube digestif pour être rejetée par les vomisse
ments.
« La double valvule iléo-cœcale, dit M. Cruveilhier, ne
saurait permettre, dans les cas ordinaires, le passage des ma
tières du gros intestin, dans l’intestin grêle. Cependant, il
résulte d’une foule d’expériences que j ’ai faites à cet égard , que
l’eau injectée du gros intestin vers la valvule, que l'air insufflé
dans la même direction triomphent le plus souvent, mais avec
plus ou moins de facilité, suivant les sujets, de la résistance
opposée par la valvule. Le rellux du gros intestin dans l’intestin
grêle ne serait possible que pour les gaz et pour les liquides; il
ne saurait l ’être pour les matières qui ont un certain degré de
consistance. Le retour desmatières fécales est donc impossible.
Toutefois , si l’on considère qu’il faut toujours une forte disten
sion du gros intestin pour obtenir le rellux des gaz et des liquides
du gros intestin dans l’intestin grêle, à travers la valvule iléocœcale , on est autorisé à se demander si le passage des gaz et
des liquides du gros intestin dans l’intestin grêle est possible
dans l'état normal. Certes, ce rellux u’est pas impossible; mais,
il est bien plus rare qu’on ne le dit communément, et il ne faut
pas prendre a la lettre cette locution usuelle, vomissements de
matière fécale , qu'on trouvait encore, il y a peu de temps, dans
toutes les observations de hernie étranglée et d’étranglement
(1) Barthez, Xoucelles observations sur les coliques iliaques, elc.. dans les
Mémoires de la Société médicale d'émulation, an vin, tome III, page 401, et dans
le Mémoire sur les fluxions, Montpellier, 1816.
(2) Gazelle méd., loc. cit.
(3) 2* édition, Paris, 1820, tome I, article : Iléus, pagç 541.
(4) Page 208.
interne. Je n’ai rencontré qu’une fois des matières fécales, pro
prement dites , dans les matières d’un vomissement. Voici, du
reste , le mécanisme de la résistance que la valvule iléo-cœcale
apporte au rellux des matières fécales, et de la manière dont elle
peut céder. Par l'effet de la distensiou ordinaire, les deux valves
�—
262
—
263
—
—
sont refoulées, la supérieure de haut en bas, l ’inférieure de bas
eu haut ; leurs faces correspondantes deviennent convexes et se
pressent d autant plus fortement que la dislensiou est plus con
sidérable. Chez quelques sujets , la distension , portée jusqu’à la
déchirure des faisceaux longitudinaux, ne triomphe pas de
l’obstacle. Chez le plus grand nombre, le bord libre de la valve
inférieure glisse de droite à gauche sous la valve supérieure qui
reste immobile ; et les gaz et les liquides passent alors du gros
intestin dans l’intestin grêle , avec une facilité proportionnée au
renversement de la valve inférieure (1). »
M. Béraud . après avoir rappelé les expériences confirmatives
de Haller et de M. Cruveilhier, s’ exprime en ces termes : « S’il
est avéré que le reflux des matières un peu consistantes , comme
les fèces , est impossible , il est avéré aussi que les liquides et
les gaz peuvent passer du gros intestin , dans l'intestin grêle.
Cette conclusion se trouve en harmonie avec la pathologie. On
trouve , en e ffe t, des cas et un entre autres , dans les Archives
de Médecine , où un malade a rendu par la bouche le liquide
qu’il veuait de prendre par un lavement (2). »
Le Dr R illiet a essayé , sur le cadavre d’ un jeune enfant,
d’injecter de l’eau au moyeu d ’une seringue à courant continu ,
et il est arrivé très facilement à rem plir tout le gros intestin et
même à franchir la valvule (3).
Pour le D r Bosia , on ne saurait mettre en doute le passage,
au-dessus de la valvule , de l’air insufflé et des lavements forcés.
Entre autres faits invoqués à l’appui de son opinion , il cite une
observation de hernie ombilicale très volumineuse réduite par
les grands lavements d’eau froide. C’est la même dont j ’ai déjà
parlé (4). Dans ce cas, une portion plus ou moins notable de
l inlestin grêle faisait évidemment partie de la tumeur, car le
gros intestin presque tout entier aurait à peine suffi à produire
le volume énorme qu'avait la hernie. Il faut donc supposer, ajoute
l’auteur, que la valvule ait laissé passer une quantité suffisante
de liquide pour dilater l’intestin et lever l ’obstacle.
Dans une très intéressante observation (1 , le Dr Trabuc , de
Marseille , a publié un double exemple de lavements rendus par
la bouche et de vol vides nerveux dû aux contractions antipéustaltiques de l ’intestin. En voici les principaux traits: — Unedame
atteinte de calcul biliaire , après avoir souffert modérément de
son affection pendant cinq ans, vit, un jour, en sortant de table,
les accidents prendre subitement une violence extrême et offrir
les caractères suivants : douleur atroce à l’hypocondre d r o it,
avec gonflement énorme et rapide de la région. Vomissements
d’abord alimentaires, puis muqueux , mais toujours sans traces
de hile. Ensuite efforts de vomissement continuels, très labo
rieux et, malgré leur violence, n’aboutissant à aucune espèce
d évacuation. Constipation opiniâtre. Ictère. Tous les traitements
échouent : aucun médicament, aucune goutte de liquide n’arrivent jusqu’à l’estomac; des morceaux de glace mis dans la
bouche sont rejetés immédiatement. La position s’aggrave sans
cesse. Une consultation a lieu , trente heures après le début des
accidents ; les médecins se bornent à prescrire des lavements
de bouillon pour soutenir les forces. Un premier lavement,
donné à l’ instant , est rendu cinq minutes après par la bouche.
Le D' Trabuc, étonn de ce phénomène insolite, ne veut d’abord
y croire, malgré sa parfaite évidence. Pour se convaincre, il
répète l’expérience , ordonne uu second lavement composé de
mauve et d’ huile. Le résultat est le même ; le doute est désor
mais impossible : le liquide , rejeté un peu plus tard que précé
demment , laisse apercevoir très distinctem ent, à sa surface ,
(t) Cruveilhier, Traite d'anatomie descriptive, IV* édition
l ” partie , page 154 et suivantes.
(2) Manuel de physiologie, Paris, 1833, page 187
(3) Traité des maladies des enfants . tome I , page 829.
(4) Voir plus haut, page 221.
1862, tome II
l’huile qui surnage ; de p lu s , celte fois, comme la première, la
(1) Voir: Actes <lu Comde Medical des Bouches-du-Rhône, année 1863. p. olo.
�—
264
—
—
265
—
m alade , en vom issant , accuse en termes très énergiquesune
odeur et une saveur excrémentielles détestables. Cette sensa
tion avait même été d ’abord un m o tif pour lui faire obsti
nément refuser le deuxième lavem ent (1)... Enfin, aprèsquatre
f nsiestins n’offraient aucune trace d'altéralion pathologique ou
jours de souffrances inouïes , après l ’apparition des signes les
courant d’eau . introduit par le rectum , une impulsion graduée,
p lusala rn iants.au moment où tout espoir semblait perdu, la
d’abord faible et peu h peu très vigoureuse ; dans le principe, je
scène se termine heureusement par l'expulsion, dans les selles ,
l’ai réduit aux simples dimensions du jet fourni par un irriga-
d une énorme quantité de bile et d ’un calcul biliaire ayant la
teur ordinaire : le but de cette manœuvre était d’étudier atten
grosseur d’ un œuf de pigeon.
tivement toutes les modifications survenues dans l’ intestin, et
cadavérique.
Mes expériences, commencées sur l’homme , puis contrôlées
sur la femme, ont été variées de mille manières. J’ ai imprimé au
J’ai voulu apporter ma part de recherches personnelles dans
de ménager le plus longtemps possible sa structure et celle de la
cette question, si controversée , du degré de résistance de la
valvule. J’ai donné au gros intestin une position lanlôt horizon
valvule iléo-cœcale.
tale, tantôt verticale. Je l ’ai suspendu par le rectum; j ’ai versé
En pathologie , il m a été donné de recueillir deux faits; je
de l’eau dans sa cavité; je fai rempli à des hauteurs différentes
les ai exposés au commencement de ce travail (2). S’ils ne
pour juger la pression de chaque colonne liquide sur la valvule
laissent pas , dans l’esprit, une certitude com plète, ils réunis
et pour répéter ainsi l’expérience de M. Sappey : or, dans tous
sent , au m oins, une très grande somme de probabilités.
ces cas, sauf quelques différences, les résultats définitifs ont
En anatomie , j ’ai entrepris sur le cadavre une série d’expé
élé les mêmes sm l’ un et sur l ’autre cadavre.
riences. Conduites avec toute l’attention et toute l ’impartialité
Sur l ’homme, la résistance de la valvule a été facilement et
possibles, elles me semblent avoir quelque intérêt dans le débat
rapidement vaincue. 11 a suffi d’ un courant modéré, d’une
actuel. Je vais les résumer très succinctement, en indiquant
dilatation médiocre du gros intestin, d’une faible pression sur la
d’abord les conditions où elles ont été faites.
valvule, d’une colonne verticale d’eau ayant h peine quinze à
Je les ai répétées sur deux cadavres différents , sur un homme
vingt centimètres de hauteur.
de 35 ans et une femme de 23 ans, ayant succombé, l'un et
Le passage du liquide dans l’intestin grêle était accéléré quand
fautre, à des maladies aiguès, après un court séjour k l’hôpital.
on augmentait la dilatation du gros intestin, ou la hauteur de la
Les deux sujets , fortement musclés, avec toutes les apparences
colonne. Mais le reflux n’était pas proportionné à la pression ; il
de la vigueur, étaient dans un état de fraîcheur parfaite; leurs
était relativement beaucoup plus faible et n 'acquérait jamais une
grande intensité. Cependant, malgré la lenteur de sa marche,
(1) En résumant l’observation du Dr Trabuc, je l’ai complétée par quelques
détails inédits. Pour les distinguer, je les ai écrits en italiques. Je les dois à
l’obligeance et aux affirmations très positives de noire vénérable confrère : au
moment de l’impression , il les avait jugés superflus, dans un exemple de
colique hépatique où les symptômes du volvulus devaient naturellement rester
au second plan. Mais. au point de vue où je me suis placé, dans mon travail,
au point de vue de l’occlusion intestinale , leur suppression devenait une lacune
que j’ai été bien aise de pouvoir combler.
(2) Voir page 209 et suivantes.
il avait encore assez de force pour dilater l’intestin grêle et dé
plisser ses circonvolutions ou ses intrications diverses surtout si
elles étaient peu compliquées.
En pressant et en rapprochant avec précaution les deux extré
mités de la fente iléo-ccecaie, comme les deux angles d’une
boutonnière , on favorise l ’ascension de l’eau dans l’ intestin
grêle. Ce fait, que j'a i vérifié plusieurs fois, m’a paru certain et
*
�—
digne d ’êlre noté, car il expliquerait le mécanisme du reflux des
injections forcées dans l'occlusion intestinale, en démontrant
que les contractions antipérislaltiques ont pour effet, non-seule
ment de pousser le liquide vers la valvule, mais encore de rap
procher les extrémités de celle-ci et conséquemment d’entrou
v rir ses deux lèvres.
Si l ’on coupe l’iléon très-près de son origine, a 6 ou 8 centi
mètres au-dessus du cæcum , ou peut exactement apprécier
l’ énorme influencequ exerce la valvule sur la vigueur du courant.
Celui-ci se présente alors directement au regard : il est continu,
atteint le volume approximatil du petit doigt, et l’on voit son
intensité modérée, augmenter sensiblement par la pression.
Les tuniques intestinales résistent a une forte dilatation;
elles supportent, sans se rompre, la pression d’une colonne
d’ eau haute d’un mètre et demi, c'est-à-dire égale à la longueur
moyenne du gros intestin; elles se sont déchirées à les niveaux
267
—
n’est pas constant sur tous les individus; nul chez les uns , il
varie chez les autres ; mais sa possibilité et même sa fréquence
reposent sur un ensemble de preuves physiologiques, anatomi
ques et cliniques aujourd'hui incontestables.
Je terminerai les considérations précédentes par un argument
tiré de la pathologie, c’est-à-dire de l ’étude même des symptô
mes de l'occlusion intestinale; il aura bien sa valeur; le voici :
que l'étranglement siège sur le gros intestin ou sur l’intestin
grêle, la maladie imprime à tout le tube digestif d’importantes
modifications, tantôt obscures, il est viai, mais tantôt évidem
ment favorables au succès thérapeutique des injections forcées
et au reflux des liquides dans l’intestin grêle. A insi:
D’un
côté , qu’observe-t-on dans l’occlusion intestinale?
Deux faits saillants: 1“ des vomissements opiniâtres; 2° une
constipation rebelle, souvent dès le début, avant même que le
gros intestin n’ait été vidé. Or, les vomissements attestent
différents par le seul effet d’ un courant très volumineux et très
l'énergie et la persistance du mouvement antipéristaltique dans
violent.
toute la portion du tube digestif située au-dessus de l’étrangle
Sur le second cadavre, les mêmes expé riences ont donné des
résultats semblables; seulement la valvule a opposé une résis
ment; la constipation prouva qu’au-dessous le mouvement pérstaltique est aboli, ou bien interverti et transformé en contrac
tance un peu plus difficile à vaincre; le passage de l’eau dans
tions antipéristaltiques, comme le démontrent l’ observation
l’iléon s’est toujours opéré avec plus de lenteur; il a nécessité
clinique et les expériences sur les animaux vivants. Maintenant
une dilatation plus grande du gios intestin, ou bien la pression
que produiront les injections forcées dans un intestin soumis à
d’ une colonne liquide haute de 50 à 60 centimètres.
de pareilles conditions? De deux choses l’une: ou bien le mou
Tels sont les faits proprement dits qui, par leur réunion, dé
vement anlipéristaltique s’emparera du courant et le poussera,
montrent directement le degré de résistance et le mécanisme
soit contre l’obstacle si l’étranglement atteint le gros intestin,
complet de la valvule iléo-cœcale. J’ai dû les m ultiplier, dans
soit contre la valvule si l’ étranglement est plus haut ; ou bien le
mon travail, pour éclairer une question douteuse et pour asseoir
mouvement péristaltique se réveillera avec énergie pour se dé-
sur des bases solides une vérité généralement contestée ou niée.
barrasser de l’eau injectée en si grande abondance. Dans l’ un et
Importants par le nombre et la valeur, ces faits sont les uns né
l’autre cas, l'intestin deviendra le siège de modifications très
gatifs, les autres positifs, et leur contradiction même a sa signi
propres à réduire l’étranglement ; dans le second cas, en parti
fication; elle est le correctif d'une opinion trop absolue, elle
explique le véritable rôle de la valvule et autorise cette conclu
sion définitive: Le reflux des liquides, dans l'intestin grêle,
culier, les violentes contractions péristaltiques du bout inférieur,
combinées au mouvement antipéristaltique du bout supérieui,
opéreront en sens inverse une double traction, très utile pour
�—
268
—
—
269
—
dégager l'in testin, très efficace surtout si l’on a affaire à une
ment au (tassage , dans l’iléon, des liquides injectés par le
invagination colique (1).
rectum.
D'un autre côté, 1 occlusion intestinale, parles puissantes
Ici finit cette étude: en démontrant comment résiste et cède
contractions antipéristaltiques qu’ elle détermine, e ït très capa
la valvure iléo cœcale, elle permet d'affirmer désormais l’ utilité
ble de favoriser le retour des liquides dans l'iléon. En effet, que
des lavements forcés dans l ’occlusion de l’intestin grêle. Et si
représente la valvule de Bauhin? Une boutonnière rectiligne,
ce mode de traitement a moins de chances de réussir dans ces
ou mieux îormée par deux lèvres curvilignes juxtaposées. Or,
sortes d’étranglements que dans ceux du gros intestin, s'il ren
comment o u vrir une pareille boutonnière? De deux façons: soit
contre alors des difficultés plus sérieuses, il est cependant des
en rapprochant ses deux extrém ités, soit en écartant ses bords.
tine à rendre encoie de véritables services. On l’emploiera donc
He bien î les injections forcées et le mouvement antip ristalti-
sans hésiter, quelles que soient les incertitudes du diagnostic
que, en s'unissant dans l'occlusion intestinale, opèrent a la fois
relativement au siège et à la nature de l ’occlusion: dans une
ce double mécanisme et conduisent au même but. A insi: d'une
situation toujours périlleuse, il constitue une méthode théra
part, si une distension moyenne du cæcum pa rle liquide attire
peutique à la fois simple, rationnelle et le onde en r- sullats
en sens opposé les angles de la valvule et la ferme, une disten
heureux.
sion très forte neutralise, au contraire, ce premier effet en écar
tant, en
ffaçani peu à peu les deux lèvres, et surtout en faisant
glisser l’ inférieure sous la supérieure.
D autre
Résumé.
part, le mouve
ment antipéristaltique, tout en poussant vivement le liquide
1. Les injections forcées figurent, dans le traitement méca
vers l'iléon, assure la régidité de la valvule p a rla contraction
nique de l’occlusion intestinale, comme un moyen peu u^ité,
de "sa double et épaisse tunique musculeuse; il donne à son
mais digne de l'être davantage.
orifice lin aire
e llip tiq u e ;
la forme d'un anneau circulaire, ou mieux
2. Les livres classiques en parlent à peine. Seuls, les journaux
conséquemment, il rapproche les angles de la
de médecine renferment des données positives: ils ont fourni a
boutonnière, m aintient ses bords plus ou moins écartés, et
mes recherches huit observations auxquelles s'ajoutent deux
voilà de quelle façoo il paralyse la résistance de la valvule,
autres recueillies dans ma pratique personnelle.
intervertit les fonctions de l ’intestin et contribue double-
3. La manœuvre des grandes injections est simple et facile :
on préférera les instruments à jet continu ei en particulier les
(1) Celte opinion est confirmée par l'analogie pathologique, par les deux faits
suivants. Ce sont deux exemples d’invagination du colon rapidement guérie par
l’emploi simultané des vomitifs (ipécacoanha, 13 décigrammes) et des lavements
purgatifs (séné, 25 grammes). Dans l'un et l’autre cas, la médication avait eu
pour but de provoquer à la fois, en haut des mouvements antipéristalliques, en
bas des mouvements péristaltiques, c’esi-à-dire des tractions en sens opposé, une
extension et une contre-extension véritables, destinées à réduire l'étranglement
intestinal. De ces deux exemples, le premier est dû au Df Delacroix, le second
au Dr Lebrun, de Héric, Seine-Inférieure; (Voir : Abeille Médicale, 1856, n. du
15 février,page 44 et du ornai, page 128).
irrigateurs ordinaires.
La douche, toujours abondante, sera
répétée, au besoin, p'usieurs fois coup sur coup.
Jusqu’à ce jour, la pratique des lavements forcés a été
exempte de dangers. Toutefois, en réfléchissant aux lésions pro
fondes que subissent, dans l’étranglement interne, les tuniques
intestinales et les diverses fonctions de l’économie; on doit
admettre la possibilité de certains accidents redoutables, tels
que la perforation de l’intestin et l'asphyxie par compression
�extrême des poumons : l'analogie
pathologique justifie ces
craintes, si l’expérience directe ne les confirme pas.
5. La quantité d ’eau nécessaire aux douches ascendantes est
difficile h préciser d’avance ; elle variera suivant la hauteur de
l’occlusion et suivant une foule de particularités anatomiques
ou pathologiques individuelles. Le m eilleur guide sera, pour le
médecin, l ’examen attentif des phénomènes locaux et généraux
développés chez le malade.
sérieuses difficultés, inhérentes soit à la valvule iléo-cœcale, soit
a la longueur du trajet que le liquide doit parcourir.
9. La pratique des injections forcées dans l’occlusion de l’ in
testin grêle implique nécessairemeut pour elles la possibilité de
remonter la valvule.
Conteste et nié par la majorité des physiologistes et des mé
decins, admis de tout temps par quelques uns, ce reflux est dé
montré aujourd’hui par une masse imposante de faits. S’il n’est
6. Les injections forcées produisent sur l’intestin des effets
mécaniques et physiologiques très favorables à la réduction des
tranglcments intestinaux. Les expériences cadavériques donnent
une idée assez exacte de leur valeur et permettent de constater
des résultats différents sur le gros intestin et sur l’ intestin grêle.
7. On peut recourir aux douches rectales h toutes les époques
de la maladie ; elles ont même réussi plusieurs fois dans une
période très avancée. Néanmoins, il est rationnel de lesemplover
de bonne heure, avant le début de complications susceptibles
de les rendre inutiles ou dangereuses.
8. La nature et le siège de l’occlusion exercent une influence
considérable sur le succès des lavements forcés :
Relativement à la nature, il y a deux espèces d’étranglements
internes. Les uns sont incurables, comme les maladies d’où ils
pas constant, s il n’est pas également facile sur tous les indivi
dus, il n’en est pas moins positif: son évidence est prouvée
directement par les expériences sur les animaux vivants, par
les expériences sur le cadavre et par les observations cliniques ;
elle est de plus confirmée indirectement par l’étude approfondie
des phénomènes de l’occlusion intestinale.
10.
Il est nécessaire de porter un diagnostic exact sur
l ’étranglement interne, si l’on veut calculer d’avance l ’opportu
nité et l’efficacité des diverses méthodes curatives et en particu
lier des douches ascendantes. Malheureusement ce diagnostic
est souveul difficile ou impossible. Toutefois, j ’ai démontré que
les injections forcées peuvent réussir dans la majorité des cas
offerts a la pratique, et cela suffit pour assurer leur valeur. Plus
puissantes que les moyens ordinaires, elles méritent une place
émanent en général, et dont ils sont la terminaison fatale. Les
importante dans la thérapeutique des étranglements intestinaux;
autres, véritables accidenK fortuits au milieu d'une santé par
et si elies sont applicables à toutes les périodes de la maladie,
faite, laissent au contraire beaucoup de chances de réussir ; ils
principalement au début, ou ne manquera pas de les essayer
sont heureusement les plus communs.
Relativement au siège, on distinguera aussi deux variétés
avant de renoncera tout traitement, ou d’en venir soit a la
gastrotomie, soit à la création d’un anus artificiel.
d’occlusion: celle du gros intestin, et celle de l’intestin grêle.
Dans le premier cas, les douches ascendantes se révèlent avec
tous leurs avantages, parce que le
ros intestin est précisément
R O ST A N .
le siège du plus grand nombre des étranglements internes, et
parce que le courant pénètre avec facilité et conserve jusque sur
Parmi les hommes éminents que la mort a depuis peu enlevés
I obstacle toute a vigueui Dans le deuxième cas, les injections
a la Faculté de Médecine de Paris, f Union Médicale devait une
sont encore applicables, mais elles rencontrent de nouvelles et
mention particulière au professeur Rostan, dont le nom vient
�—
27 2 —
s ajouter a la longue sérié <l' illustrai ions qui font la gloire de la
Provence.
C’est en s'appuyant sur ces principes que ses études dans les
salles de malades et à l’amphithéâtre des autopsies, l’amenèrent
M. Roslan élait né à Saint-M axim in (Var), le 16 mars 1789,
à découvrir la maladie connue sous le nom de ramollissement
ei avait reçu ses premières leçous d un membre de sa famille,
du cerveau. Ses recherches sur cette affection, publiéesen 1820,
depuis prince de T Eglise. Amené de bonne heure à Paris, il y
portaient l’empreinte d’ une telle exactitude que les nombreux
tii de solides études et fut reçu docteur en 1812 avec une thèse
travaux, publiés jusqu’à ce jour, u’ onl pu que confirmer la per
sur le Charlatanisme. Elève de Pinel, il fit *es premières armes
fection de ses descriptions et la rigueur de ses appréciations,
au vieil hospice de la Salpêtrière, an milieu du typhus que l'in-
sans contredire ni redresser rien de ce qu’il avançait.
vasion étrangère avait amené paimi nous. Son dévouement fit
l'admiration de ses maîtres et de ses émules.
Dès l’année 1823, il devint membre de l ’Académie de Méde
cine, et en 1826 parut son Cours de Médecine Clinique, dans
En 1818, il ouvrit son premier cours public, où l’on vit se
lequel il montrait comment on pouvait, avec les principes de la
presser à l'envi la jeunesse médicale, et il prit une part active
médecine organique, porter le diagnostic à un degré de précision
aux luttes scientifiques soulevées par fauteur illustre de la doc
inconnu jusqu’alors.
trine physiologique.
Cependant, la médecine seule n’occupait point tout son temps
Pour lui, faisant appel à la saine raison,et bannissant, comme
Dans sa pensée, l ’étude des sciences physiques et naturelles
il le dit, la vaine métaphysique des médecins vitalistes, il cher
renfermait des connaissances presque aussi indispensables au
che a établir des bases solides sur lesquelles pût reposer la pa
médecin que l’anatomie et la physiologie. Il s’y livrait avec ar
thologie.
deur et puisait en elles des règles applicables à la conservation
Son esprit sérieux et positif établit que, médicalement, patho
logiquement, il n'existe dans l'homme que des organes et des
fonctions ;
Que les fonctions ne sont que les organes en exercice, qu’elles
ne sont que des effets ;
Que les organes, dans certaines conditions de forme, de vo
lume, de consistance, etc., sont dans l ’état normal et exercent
des fonctions normales: c'est l’état de santé;
Que les organes, dans d’autres conditions de form e, de volume
de consistance, e tc., sont dans l’état anormal et exercent des
fonctions anormales: c’est l’état de maladie;
Que les organes pouvant être malades de beaucoup de maniè
res, la nature des maladies est très variée;
Que les lluides, qui sont ou des effets d’organes ou des élé
ments d organes peuvent être malades, qu’ils peuvent l’être
prim itivem ent ou secondairement.
de la santé de l’homme : il en fit le sujet d’un ouvrage publié en
1822: Cours élémentaire d'hygiène.
La réputation de M. Roslan était assez solidement établie
comme médecin et savant par ces trois ouvrages, et par un
grand nombre de mémoires importants publiés dans le Journal
de Médecine, de Chirurgie et de Pharmacie , ainsi que dans le
Dictionnaire de Médecine. Ces mémoires traitaient des sujets
les plus divers : de la rupture du cœ ur, du magnétisme anim al,
de l’asthme des vieillards, de la distinction des anévrismes , de
la transposition des viscères ; de la fracture spontanée du fé
mur, etc., etc,
Cependant, toutes ses préférences étaient pour le professorat.
C’était toujours avec émotion qu’il se rappelait cette époque de
lutte, où il avait levé et soutenu le drapeau de l’organicisme
contre l’illustre Broussais, champion redouté de la doctrine phy
�—
274
siologique. Le concours ayant été établi après la Révolution de
1850, il put arriver, en 1855,h la chaire de clinique médicale de
l'Hôtel-Dieu.
Nul ne possédait comme lui les qualités du professeur clini
cien. Il excellait dans l ’art d’ in itie r les élèves à l’ examen et à
l’ interrogation des malades. Rien n’égalait la précision, la clarté
de ses indications, quand au m ilieu des difficultés d’un cas com
pliqué, il faisait surgir aux yeux des élèves ce qu’il présentait de
simple et de saisissable.
A cela se joignaient uue élocution facile, dégante dans sa pré
cision, abondante sans être diffuse, un débit animé, l ’enthou
siasme, enfin l ’amour de son sujet. Car il ne pensait pas qu'il
275
—
M. Rostan jouissait, au milieu d’une famille adorée, des hon
neurs et de la fortune que lui avaient procurés tant de rares et
solides qualités, quand il commença a sentir les atteintes du mal
qui devait l’emporter. Après une agonie morale de plusieurs
années, il a succombé le 5 octobre 1866, entouré de ses amis
dont il pressait la main avec effusion, depuis que la parole lui
avait refusé l’expression des sentiments affectueux qu'il avait
pour tous ceux qui venaient le visiter.
C’est ainsi que, depuis quelque temps, disparaissent un à un
les hommes illustres dont s’enorgueillissait la Faculté de Paris,
et dont l’enseignement avait fait l ’éducation médicale de la gé
nération actuelle. Aujourd’hui, sans avoir à déplorer leur perte,
fût indifférent de croire ou de ne pas croire a la profession que
nous voyons plusieurs professeurs célèbres abandonner des
l’on exerce. Dans sou introduction au livre de l’organicisme,
chaires qu’ils ont illustrées a des titres divers. Puissent leurs
publié en 1864, ouvrage dans lequel il a vivement défendu les
successeurs, s'inspirant de leur souvenir, n’avoir d’autre but que
principes de toute sa vie, voici ce qu’il disait :
de les égaler! Puissent aussi les élèves faciliter leur lâche en
« Pour atteindre la supériorité dans un art, il faut l’aimer;
« pour l’aimer, il faut y croire. On peut dire généralement que
ne faisant pas intervenir au milieu de leurs leçons des préoccu
pations étrangères à la science.
L -B .
« les hommes qui ont honoré la médecine par leur génie t out
« étudiée, l’ont pratiquée avec amour. On peut de même affir« mer que beaucoup de médecins ne sont restés obscurs que
Chronique Mensuelle.
« parce qu’il n ’y croyaient pas. Comment voulez-vous, en effet,
a qu’on se donne beaucoup de peine pour approfondir une
« science en laquelle on n’a pas foi? Bien plus, nous ne crai-
L'industrie des nourrices. — Notre monde médical n’a guère
« gnons pas de dire qu'il ne peut y avoir que des médecins mé-
de petite chronique ; les événements qui l ’intéressent ont tous
« diocres qui ne croient pas à la médecine, ils ont leurs raisons
« pour cela, et nous ne devons pas nous étonner qu'ils ne croient
« pas à la leur. Il est des médecins qui s’imaginent qu’il est spiri
une certaiue importance et un cachet scientifique. Ils se pas
sent en grande partie dans les salles un peu désertes des Aca
démies.
te tuel et de bon ton d'afficher de 1 incrédulité pour leur pro
De quoi s’est-on occupé ce mois-ci à l’ Académie de Méde
ie fession: ils croient se donner ainsi un air de supériorité. Con
cine? A peu près d’une seule question, mais elle est vaste, elle
ei tentons-nous de leur rappeler celle sentence de Voltaire : Le
est grave; si elle intéresse la science, elle touche au cœur la fa
« plus sûr moyen de rester inférieur a son art, c'est de se croire
mille et la patrie. Une effrayante mortalité frappe les enfants de
« supérieur a lui. »
Paris et, ajouterons-nous, des grandes villes, confiés â des nour
i
�—
276
—
—
277
—
rices de petites localités. Telle est la révélation qu’ont faite deux
l ’étude statistique des enfants en bas âge; la deuxième, à une
médecins bien placés pour voir les faits, M. Monot et M. Bro-
revue rétrospective de l ’ancienne législation concernant l’ in
chard. Pour répondre à une invitation ministérielle, M. Biol a
dustrie nourricière; la troisième, renfermant l’exposé de l’orga
présenté à l’ Académie, sur ce sujet, un rapport et un complé
nisation actuelle de la direction municipale des nourrices; la
ment de rapport. Comment remédier a ce mal qui prend les
quatrième, enfin, relative aux mesures â prendre pour amé
proportions d'un lléau? Telle est la question soumise à l ’Aca
liorer la situation des nourrissons et pour diminuer la mortalité
démie et sur laquelle MM. Boudet et Husson, ont lu chacun un
des nouveau-nés.
important discours.
Ces deux discours sont bien loin de se ressembler entre eux.
Le bilan mortuaire des enfants placés en nourrice est effra
yant; il s’élève aujourd'hui â TO pour 100. Il a toujours été
L'un est sentimental, et l'autre positif; l’un se présenté avec des
considérable et a, sous l’ancien régime, vivement ému la sollici
émotions qu’ il fait partager, l ’autre avec des documents qu il
tude de l’autorité. Aussi, dès 1350, une ordonnance du roi Jean
fait connaître. M. Boudet ne propose pas une solution, il la de
fixe-t-elle les rémunérations accordées aux nourrices et aux
mande, il la réclame, tandis que M. Husson, en révélant les
placeuses ou recommandaresses, et détermine-t-elle leurs devoirs
eflorts faits dans le passé, tend à écarter toute solution nouvelle
respectifs. En 1613, sous Louis X III, le louage des nourrices
dans l’avenir. M. Boudet stimule l ’Académie en l’émouvant;
devient l’objet d’un privilège restreint à quatre personnes et
M. Husson, en l'instruisant, la modère.
constitué en titre d’office. En 1769, à la suite d’ une sorte de
M. Boudet pose la question et trace un vaste programme. Il
disette de nourrices survenue par suite des abus dont ces fem
n’ hésite pas à déclarer que l’ intérêt des familles, la prospérité
mes elles-mêmes étaient victimes au sujet du payement de leurs
nationale, les destinées du pays et l ’avenir de la race française
salaires, un bureau général des nourrices et recommandaresses
sont liés à l'accroissement de la population en nombre et en
est établi. Ce bureau passa, en l ’an IX , dans les attributions du
force, et partant aux conditions hygiéniques faites à l ’enfance et
Conseil général des hospices, et c’est là l'origine de la direction
à la jeunesse. Aussi, lo ra te u r voudrait-il que l’ Académie, élar
actuelle des nourrices.
gissant les limites de la discussion, s’occupât non-seulement de
L ’ancien bureau avait un réglement précis et sévère. Le bu
1'infiuence pernicieuse de l ’exploitation nourricière, mais encore
reau actuel place les enfants dans six circonscriptions; à la tête
des dangers du transport des enfants nouveau-nés â la mairie
de chacune est placé, avec le titre de sous-inspecteur, un agent
et de l’ utilité de la constatation des naissances a domicile, du
administratif qui pourvoit au recrutement des nourrices avec le
régime des crèches et des asiles, du système des écoles, des
concours des médecins, les envoie à Paris pour prendre les en
pensionnats et des lycées. C'est le but que poursuit, avec un
fants sous la conduite d’une surveillante, surveille les enfants et
zèle digne d’éloges, la Société protectrice de l enlance, et à la
les nourrices, paye les salaires et assure l ’exécution des nom
recherche duquel M. Boudet voudrait que l ’Académie employât
breuses mesures instituées dans l’intérêt de la santé et du bien-
ses lumières et sou autorité.
être des nourrissons.
M. Husson a lu, le 23 octobre, un long et savant discours,
Les médecins, au nombre de cinquante et un, sont chargés de
qui peut se diviser en quatre parties: la première, consacrée à
la levée des nourrices, de la surveillance des enfants et des
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278
—
279
—
soins que l ’état des uns ei des autres peut réclamer en cas de
près à faire reconnaître l'identité des enfants, une surveillance
maladie.
officieuse exercée par les maires et les curés, dont les certificats
Le bureau assure aux nourrices un minimum de salaires; il a
sont réclamés aux nourrices, empêchent sans doute bien des
une réglementation un peu compliquée, mais très sage, et ce
abus; mais, à notre sens, une surveillance plus active encore
pendant sa clientèle va s’amoindrissant chaque jour par la con
devrait être exercée par une association charitable, où les dames
currence des bureaux particuliers, et, ajoute M. Husson, par le
seraient admises, et où chacun prendrait sous sa protection un
système corrupteur des primes en argent qu’ils offrent.
ou plusieurs enfants placés dans le voisinage de son domicile.
M. Husson cherche enlin si ou pourrait porter remède à la
La surveillance active, tel est le nœud de la question.
situation actuelle. On se trouve, d it-il, entre deux extrémités
Constatons, en terminant, que notre bonne ville de Marseille
également redoutables. Laisser faire, c'est-à-dire ne rien faire,
a, pour l ’enfance, plus de sollicitude que d’autres villes qui se
ou réglementer à outrance. Mais, comme il lui parait difficile de
piquent d'être à la tète de la civilisation. Nous avons signalé
concilier le libre exercice de la puissance paternelle avec l’ac
son œuvre de la Charité Maternelle, qui ajoute au mérite d’amé
tion de la puissance publique, il conclut que l ’Académie doit se
liorer l’allaitement mercenaire celui, plus grand encore, de faci
borner à signaler à l ’autorité le mal qu elle connaît et celui
liter I allaitement maternel ; rappelons, en terminant, qu’ici le
qu’elle soupçonne, et qu elle doit abandonner à sa sagesse,
nouveau-nén est pas transporté à la mairie; c’est le père qui,
l etude des moyens propres à y rémédier.
accompagné de deux témoins, s’y rend pour le faire enregistrer,
En lisant la lin de ce beau discours, on a volontairement sur
les lèvres le fameux desinit inpiscem.
Si l'Académie se conformait aux vœux de M. le directeur de
et, en casd absence du père, c’est l’accoucheur ou la sage-femme.
Nous ignorons qu’il soit jamais résulté de cette coutume le
moindre inconvénient.
l’Assistance publique, elle ferait absolument comme des méde
cins qui, appelés en consultation, diraient à la fam ille: Nous
— La Faculté de Paris. — La première Faculté de méde
avons reconnu une maladie grave, c’ est à vous maintenant de
cine de l’Empire est en ce moment l'objet de vives préoccupa
chercher les remèdes.
tions. On se préoccupe à la fois et des maîtres et des élèves.
Or, à notre sens, on peut appliquer à ce mal deux principaux
remèdes :
Les élèves, il faut le dire, ont produit un vrai scandale à la
séance solennelle de rentrée. Il est de tradition parmi eux de
Il faut d’ abord donner aux nourrices la garantie qu elles se
faire tapage ce jour-là; nous en savons tous quelque chose, et
ront payées; c’est le plus sûr moyen de les attirer et de s’assurer
l’on pourrait citer tel médecin qui, aujourd’hui, porte grave
Je concours des meilleures.
ment la robe rouge et l’hermine, et qui, en pareille occasion,
Il faut aussi quelles soient régulièrement surveillées; c’est là
le point le plus délicat et le plus difûcile de la question.
ne manquait pas d’emprunter la voix du coq d’Esculape. Cette
tradition, il faut en convenir, est un mal; peu à peu la Faculté
A Marseille, nous avons l'Œ u v re de la Charité Maternelle,
est devenue le lieu de rendez-vous de tous les tapageurs, étu
quivien tau secours des mères indigentes et s’occupe de placer
diants de quinzième année, étudiants de profession, ou, ce qui
en nourrice les enfants pauvres. Un système de médailles pro-
revient au même, étudiants qui n’étudient pas. Pour une heure,
�—
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—
281
—
les estaminets ont chômé, leurs pipes se sont éteintes et l’am
phithéâtre de la Faculté a reçu la visite annuelle de leurs cha
peaux pointus. Aujourd’hui, l’abus est devenu intolérable; le
tumulte et la licence ont dépassé toutes limites ; il est fâcheux
ASSOCIATION MÉDICALE DES BOUCHES-DU-RHONE
ANNEXÉE A L’ASSOCIATION GÉNÉRALE DES MÉDECINS DE FRANCE.
que les étudiants sérieux ne réagissent pas contre ces habitudes
qui donnent au public une mauvaise opinion de notre jeunesse
médicale, et qui sont un manque complet de convenances en
A ssem blée
gén érale
ten u e
à M a r s e i l l e le 1er d é c e m b r e
1866,
sous la p r é s i d e n c e da M . le Dr S E U X , p r é s i d e n t .
vers des maitres vénérables.
Ces maitres s’en vont. Pour ceux que la mort n’a pas frappés,
La séance est ouverte à 3 heures et demie. Elle a lieu dans le
vient de sonner l ’heure de la retraite. M M . Cruveilhier, Trous
local de la Société impériale de médecine, (pie M. Sauvet, pré
seau, Piorry, Àndral et Jobert de Lamballe vont laisser un héri
sident de la savante compagnie, a bien voulu mettre à la dispo
tage magnifique et qui sera sans doute vivement disputé. Un
sition de l’association.
journal publie, à ce sujet, la liste suivante des candidats, en
plaçant au premier rang celui à qui il attribue le plus de
chances :
Jamais assemblée n'avait été aussi nombreuse. On y remar
quait M. le D 'G ouzian, président du Comité médical des
Bouches-du-Rhône ; M. Imbert, vice-président pour l’arrondis
Anatomie pathologique: M M . Barlh, Laboulbène, Honel et
Sulpian.
sement d’Arles ; M. Sieard, vice-président de la Société Impé
riale de médecine; M* Verne, avocat, l’un des conseils ju d i
Pathologie interne: M M . Axenfeld, Bouchut.
ciaires de l ’Association, etc., etc.
Pathologie externe: MM. Broca, F o llin , Foucher et VerM. le secrétaire donne lecture du procès-verbal de la der
neuil.
Thérapeutique: MM. Gubler, Hardy et Sée.
Pathologie générale: MM. Chauffard et Lasègne.
Souhaitons que les nouveaux élus soient dignes de leurs pré
nière Assemblée générale ; ce procès-verbal est adopté. Divers
membres de la Société se font excuser par lettres de oe pou
voir assister à la séance.
M. le président fait savoir à l’Assemblée qu’un des membres
décesseurs.
Sur ces entrefaites, la m ort de Natalis G uillot vient de faire
un nouveau deuil et de laisser une nouvelle vacance.
de la Société, M. le D1' Bailly, de Marseille, est gravement ma
lade. Les paroles prononcées par M. Seux à l ’adresse de cet
estimable collègue sont l ’expression des sentiments les plus
— Nomination. — Au moment de mettre sous presse, nous
apprenons une bonne nouvelle: M. le Dr Coste, directeur de
notre école et président de l ’Adm inistration des Hospices, vient
d’être promu au grade d'officier de la Légion-d’honneur.
Le Comité de Rédaction.
sym pathiques de tout le corps m édical .4
M. le p résid en t p ro n o n ce en su ite l’allocution suivante :
Messieurs et très honorés collègues,
Dans notre dernière Assemblée générale, nous avons nommé
trois vice-présidents, un pour chaque arrondissement'
MarseilJe. — lmp. Arnaud,* Cayer ci C., rue Salnt-Ferréol. 57.
f2
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—
283
—
a Ne vous semblerait-il pas à propos, nous disait à ce sujet notre
pour juger le plus ou moins d'opportunité de la demande de ré
excellent secrétaire, que chaque année, au moins un mois avant
vision, ont pensé qu’il ne fallait pas attaquer la question d’une
la réunion générale, tous les médecins fie nos arrondissements
manière générale, mais aborder seulement les points sur les
pussent être convoqués au chef-lieu en une reunion spéciale où
quels ils avaient la certitude que justice nous serait rendue. 11
s'agiteraient les intérêts spéciaux qui les concernent? Leur éloi
faut, a dit M. Denonvilliers, pour ne pas éparpiller nos forces en
gnement de Marseille ne leur permet pas toujours d'assister à
pure perte, se contenter de réclamer la modification de la loi en
nos séances ; ils se rendraient plus facilement aux assemblées
ce qui concerne l ’exercice illégal. Leminent professeur, avec
qui se tiendraient au chef-lieu de leur arrondissement. »
cet esprit de lucidité et de précision qui le distingue, formula
Votre vote a prouvé, Messieurs, que vous compreniez toute
l’importance de la proposition qui vous était faite. Aussi me suis
je empressé, quelque temps avant la réunion de ce jour, d’écrire
à M. le Dr Im b e rt, vice-president de l'arrondissement d ’Arles,
alors des propositions importantes adoptées à l'unanimité, pro
positions dans lesquelles, comme l’avait demandé M. Diday (du
Rhône), la loi considérerait toujours l exercice illégal comme
un délit et non comme une contravention.
et a M. le Dr Rimbaud, vice-président de celui d’A ix, pour les
J’abuserais évidemment de votre temps si je vous faisais con
engagera réunir nos sociétaires, au chef-lieu de le u rsarrondis-
naître la discussion remarquable qui eut lieu à la suite du rap
dissements respectifs. Ces réunions locales ont eu lieu.
port de M. Barrier, car je ne pourrais être qu’un bien faible in
A Arles, nos honorables collègues ont surtout insisté sur l’in
suffisance de la loi relative à l ’exercice de la médecine, et prin
cipalement sur la pénalité illusoire qui frappe l’exercice illégal.
C’est là, du reste, depuis plusieurs années, le cri de détresse
poussé par la grande m ajorité de nos Sociétés locales. Il résulte,
en effet, du très remarquable rapport lu à la dernière Assemblée
générale de Paris, par M. Barrier, mon collègue au Conseil gé
néral, que 64 sociétés ont émis en faveur de la révision de la loi
sur l’ exercice de la médecine et de la pharmacie, une opinion
des plus explicites avec des développements importants à l’appui,
terprète de la pensée des médecins les plus considérables de
Paris et de la province qui prirent part à cette discussion. L ’an
nuaire, qui se trouve à votre disposition, vous donnera la-possi
bilité de lire en entier le rapport de l’honorable M. Barrier sur
toutes les souffrances professionnelles. Vous pourrez aussi y
prendre connaissance de la discussion qui en a été le résultat et
des diverses propositions qui ont été faites. Or, voici quelle a
été, en définitive, le vote adopté, à une immense majorité, par
l ’Assemblée générale de Paris :
« L ’Assemblée générale, désirant que les efforts de l ’associa
et notre Société locale des Bouches-du-Rhône a été classée
tion soient immédiatement dirigés vers la répression de l’exercice
parmi celles dont le rapport a été remarqué. On peut dire à ce
illégal de la médecine, et craignant qu’en divisant ses efforts elle
sujet qu’à la grande assemblée de Paris, la bannière de chaque so
ne les affaiblisse, décide que les autres questions inscrites au
ciété portait pour inscription : Répression efficace par une pénalité
rapport de iVJ Barrier sont ajournées et renvoyées au Conseil
plus sévère ; c’est ainsi du reste que l’éminent M. Barrier a ré
général pour qu’il agisse dans les circonstances qui lui paraîtront
sumé la pensée de tous. Eh bien ! Messieurs, des hommes de la
favorables, et dans le sens de la majorité exprimé dans l’enquête
plus grande valeur, des hommes haut placés, et surtout placés
et dans l’assemblée générale. »
�—
284
Telle était la situation après notre dernière assemblée; ré
pression de l'exercice illégal de la médecine par une modifica
tion apportée à la loi sur ce point , tel fut évidemment le vœu
émis par tous.
quête, le Conseil général, par la voix de plusieurs de ses membres,
a expliqué oralement à S. E. les doléances du corps médical
relativement à l’exercice illégal, sous toutes ses formes, et la
nécessité de la répression aussi bien dans un intérêt social que
Le Conseil général, qui tout en dirigeant d’ une main ferme
dans l ’intérêt professionnel. M. le ministre a non-seulement
les affaires de l'Association générale s’ inspire toujours de la
écouté très attentivement cet exposé, mais il a encore provoqué
pensée, des besoins des Sociétés locales, vient de faire une dé
des explications nouvelles et prolongé l ’audience bien au delà
marche qui vous prouvera combien il tient à cœur, dans la me
des limites que le Conseil général aurait pu espérer.
sure du possible, de faire arriver jusqu'au pouvoir les justes
« La réponse de M. le ministre a été pleine de bienveillance
doléances du corps médical. Le mardi, 30 octobre, ayant à sa
et a exprimé un sympathique intérêt pour les souffrances du
tête M. Rayer, président, M. Cruveilhier, vice-président, le Con
seil général a obtenu une audience de S. E. M. le ministre delà
justice, «audience, dit Y Union médicale du jeudi 1er novembre,
dont on peut espérer un résultat favorable aux vœux émis par
l ’Association. » V oici, en effet, les passages les plus importants
corps médical. S. E. a promis d’examiner avec un soin très attentifla requête qui lui était remise et les documents qui l’accom
pagnaient. Elle a promis, en outre, de recevoir de nouveau le
Conseil général aussitôt que son examen serait terminé et qu’une
décision de sa part pourrait lui être communiquée.
de la lettre qui m'a été adressée, a ce sujet, par M. le président
« Le Conseil général a quitté cette audience plein de confiance
Rayer :
et d'espoir, et ce sont ces impressions, Monsieur et très honoré
« Monsieur et très honoré confrère,
confrère, que je suis heureux de vous transmettre.
« Veuillez avoir, etc.
« J’ai l ’honneur de vous annoncer que le Conseil général a
rempli la mission qui lui a été confiée. Il n'a pas cru devoir se
borner à transmettre simplement les vœux de l’ Association au
(Signé)
Le president, Rayer.
Par expédition :
Le secrétaire général,
L atoür A m édke . »
gouvernem ent, mais il a demandé une audience à celui de
MM. les ministres auquel la question ressortit directement,
c’est-à-dire à S. E. M. le garde des sceaux.
« Celte audience lui a été gracieusement accordée et, le 30
octobre dernier, le Conseil général, qui réunissait le plus grand
nombre de ses membres, a eu l’honneur d ’être reçu par S. E.
M. Baroche, ministre de la justice.
« En remettant à M. le ministre les vœux exprimés par TAsso
ciation et les documents et renseignements à l ’appui de sa re
Voilà donc, Messieurs, l'intervention active et officielle de
l’ Association dans la croisade humanitaire que le corps médical
doit soutenir contre ce puissant Protée, contre cet hydre à cent
têtes, appelé exercice illégal de la médecine.
Cette démarche, qui a une portée considérable, sera accueillie
avec satisfaction dans toutes les Sociétés locales qui l’ont, pour
ainsi dire, provoquée; elle trouvera surtout de lecho parmi nos
honorables collègues du troisième arrondissement, puisqu'elle
répond au vœu qu’ils viennent de formuler
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—
—
287
—
A A ix, deux vœux différents ont été émis par nos honorables
justice à être rétribués, non comme de simples témoins, mais
collègues : le premier se rapporte aux moyens <ju’ il serait bon
en qualité d’experts. Un résultat plus complet ne peut être ob
d’employer pour augmenter le nombre des adhésions. Nos col
tenu que par une modification de la loi. »
lègues du second arrondissement pensent qu’il pourrait être très
Or, vous savez quelle a été la décision de la dernière Assem
avantageux de faire une circulaire dans laquelle le but de l'œuvre
blée générale ; nous devons, pour le moment, ne diriger nos
et les moyens qu elle a à sa disposition seraient exposés. Cette
efforts que sur la modification de la loi relative à l ’exercice
circulaire serait adressée à tous les sociétaires qui la feraient
illégal.
parvenir aux médecins avec lesquels ils sont plus particulière
Dans le courant de l’année qui vient de s’écouler, il ne s’est
ment en rapport, une note favorable de leur part accompagne
produit aucun fait bien saillant d’exercice illégal que je doive
rait cet envoi.
vous signaler ; toutefois, j’ai eu avec M. le procureur impérial
Vous serez appelés, bien honorés collègues, a donner votre
avis sur celte proposition qui me parait digne de fixer votre at
tention, d'autant plus que ce ne sera pas une mesure nouvelle,
mais une reproduction faite, je crois, à propos de ce qui avait
été exécuté dans les deux ou trois premières années de notre
institution.
plusieurs entretiens au sujet de différents industriels sur lesquels
votre bureau avait dû lixer son attention. Comme toujours, ce
magistrat a accueilli avec bienveillance les communications que
je lui ai laites et il a agi de manière b rendre b l’avenir plus difliciles les manœuvres des délinquants.
Espérons que si, dans un temps prochain, par une heureuse
modification apportée b la loi, l’exercice illégal est considéré
Le second vœu est ainsi conçu : « Il serait bon de mettre a
l’ordre du jour la question des honoraires médicaux dans nos
rapports avec la justice. Nous sommes régis, à ce point de vue,
par des lois qui, datant de 1811, fixent pour des déplacements
qui entraînent une perte de temps assez considérable, pour des
expertises et des rapports longs et difficiles, une rétribution illu
soire. »
comme un délit, la sérieuse pénalité qui en résultera arrêtera les
audacieux et les incorrigibles que l’application de la loi ancienne
trouble fort peu.
Néanmoins, restons sur la brèche, ne laissons passer aucun
lait sans en prévenir l’autorité, et pour arriverb ces fins, veuillez
bien, très honorés collègues, toutes les fois (pie l’occasion s’en
présentera, ne pas négliger de nous adresser b ce sujet les do
Cette question, Messieurs, a déjà été agitée plusieurs fois;
cuments qui peuvent se trouver entre vos mains. C’est ainsi
vingt-six sociétés ont même renouvelé leurs réclamations à ce
qu’ un des honorables membres de la commission administrative,
sujet. Comme vous pourrez le voir dans notre annuaire et dans
M. Chapplain, vient de nous rendre témoins, dans son service
le rapport déjb cité de M. Barrier, le Conseil général s étant
d’hôpital, de deux nouveaux faifs d’exercice illégal. Il s’agit de
adressé, par l’ organe de M. le professeur Tardieu, à S. E. M. le
deux femmes soignées par les sœurs de Saint-Vincent de Paul.
ministre de la justice, il ne nous fut donné gain de cause qu’en
L ’autorité ecclésiastique, instruite de ces faits, nous a promis de
partie. « M. le garde des sceaux, par une lettre circulaire
ne rien négliger pour qu'ils ne pussent se renouveler. Toutefois
en date du 16 décembre 1861, adressée à MM. les ptocureurs
en cas de récidive, votre bureau est tout b fait décidé à porter
généraux, reconnut le droit des médecins appelés à déposer en
l’affaire devant l’autorité judiciaire.
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—
Il y a, Messieurs, uue question qui se lie à l'exercice illégal
d’ une manière plus directe q n ’on ne pourrait d'abord le croire,
—
nelle. Ce rapport, reflet de votre pensée, sera envoyé au Conseil
général avant la prochaine Assemblée générale de Paris.
c est l'organisation de l ’assistance médicale dans les campagnes
Assurément l ’organisation de l'assistance médicale dans les
et chez les pauvres en général. En effet, dans les localités éloi
campagnes mérite d’être étudiée ; mais celle des grandes villes
gnées des grands cenires, et même dans ces derniers, les pauvres,
est-elle assez parfaite pour qu’il n’y ait pas à s’ en occuper?
soit par misère, soit à cause de l ’éloignement, au lieu de s’adres
Comme j ’ai eu l'honneur de vous l’exprimer, telle n’ est pas ma
ser aux médecins, se mettent entre les mains des charlatans de
pensée ; telle n’est pas non pins la pensée de votre commission
toute espèce, vont frapper à la porte des communautés reli
adm inistrative; aussi ai-je cru avec elle que, comme complé
gieuses, à celle de quelques ecclésiastiques, qui, il faut le dire,
ment de la question précédente, il serait bon qu’un rapport fut
méconnaissent complètement leurs devoirs en répondant à cet
lu aujourd’ hui sur l ’état de l'assistance médicale dans la ville de
appel.
La Société locale du Puy-de-Dôme, à cause de sa situation au
Marseille. M. M ittre, dont le zèle pour l’Association ne fait
jamais défaut, a bien voulu se charger de ce travail.
milieu de communes pauvres, ayant été plus particulièrement
frappée de la pensée qu’un des meilleurs moyens de réprimer
l’exercice illégal était d’assurer des secours aux nécessiteux, avait,
à l ’avant-dernière Assemblée générale, par l’organe de M. Nivet,
son vice-président, fixé 1 attention de celle-ci sur ce sujet im
portant. L ’ examen de la question fut renvo/é au Conseil général ;
ce dernier chargea un de ses membres, M. Houzelot, secrétaire
de la Société locale de l ’arrondissement de Meaux, de faire un
rapport à la dernière assemblée générale, sur /’organisation de
l'assistance médicale des indigents dans les campagnes. Il fut
décidé par l’ Assemblée, sur la demande du rapporteur, écho du
Conseil général, qu’ une enquête préalable sur la matière,ouverte
dans les Sociétés locales, était indispensable. C’est pourquoi vous
êtes appelés, Messieurs, à nous donner, soit aujourd’ hui de vive
voix, soit par des documents écrits, les données nécessaires pour
que la commission administrative puisse faire sur ce sujet un
travail qui expose la situation exacte du département au point
de vue de l’assistance médicale dans ses campagnes. Il est évi
Vous savez, Messieurs et très honorés collègues, que depuis
deux ans environ, la santé de notre excellent secrétaire, M. le
Dr Laurens, avait été fortement ébranlée ; cependant une amé
lioration très notable survenue dans son état après un séjour de
quelques mois dans son pays natal, nous avait donné de grandes
espérances ; aussi, aux élections quinquennales de l ’année der
nière, avions-nous saisi avec empressement l’occasion de lui
donner, en le renommant secrétaire, un témoignage manifeste
de notre estime et de nos sympathies. J’ai le vif regret de vous
annoncer aujourd’ hui que notre très cher collègue, ne se trouvant
pas dans la possibilité de reprendre ses fondions, vient nous
prier de vouloir bien le remplacer. Dans l’intérêt de la Société,
et en reconnaissance de tout le bien qu’il avait fait à l’œuvre,
j ’avais cru devoir, pendant quelques mois, résister à la demande
réitérée de notre honoré collègue ; aujourd’hui, toute résistance
devient impossible, sa santé exigeant son éloignement de Mar
seille.
dent que vous êtes aussi appelés à donner votre opinion sur la
Vous êtes donc appelés à donner un successeur à notre excel
meilleure organisation a proposer, tant au point de vue de l’in
lent secrétaire ; mais avant de procéder au scrutin, je crois être
térêt des pauvres qu au point de vue de la dignité profession -
le fidèle interprète de la Société entière en adressant à M. le Dr
�—
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—
291
—
L. Laurens, avec notre espérance d ’un complet rétablissement
soit appelé de nouveau dans notre département et qu’il puisse
pour lu i, d’une part nos sincères regrets, de l’autre l’expression
s’asseoir encore parmi nous !
de nos plus vifs sentiments de gratitude pour le zèle, l’intelli
Six autres collègues, quatre h Marseille, deux dans les autres
gence et l’ abnégation avec lesquels, pendant cinq ans, il s’est
arrondissements, ont cru devoir s’éloigner de nous en refusant le
dévoué à notre œuvre.
payement de leur cotisation ; il est a regretter d’ une part que
Depuis notre dernière assemblée nous avons eu la douleur de
des sociétaires aient pu être pris de découragement, et d’autre
perdre un de nos plus jeunes collègues, le Dr Bonifay, médecin
part qu’ ils aient adopté celte forme pour le manifester ! Pourquoi
des Messageries impériales. La famille de cet honoré collègue
ce découragement ? Notre œuvre, si admirable par le but qui la
habitant Marseille, son domicile réel étant donc dans notre ville,
dirige, n’est-elle pas en pleine voie de prospérité? Ouvrez notre
nous avions pu l ’admettre parmi nous, bien qu’il fût le plus sou
annuaire, lisez le compte rendu de notre éminent secrétaire gé
vent embarqué. Ce médecin a succombé en mer dans l ’exercice
néral, M. A. Latour, et si votre courage a faibli, il doublera à
de ses fonctions, au retour d’un long voyage dans les mers du
cette lecture, car vous y verrez les nombreux bienfaits répandus
Japon, à une maladie dont les premiers symptômes avaient in
par l’Association dans la famille médicale ; confrères secourus,
quiété ses amis de France. Bonifay n avait jamais pu, à cause de
veuves de médecins soutenues et mises a l ’abri du besoin, pu
ses voyages, (réquenter nos réunions; il était donc peu connu
pilles élevés; vous y verrez l'augmentation toujours croissante
de nous. Je sais toutefois que, par ses qualités, il s’était fait
d’un capital appelé un jour à rendre des services plus nombreux
aimer non-seulement des jeunes médecins, ses anciens condis
encore.
ciples, mais aussi de toutes les personnes qui l'approchaient.
Élève, il avait été, dans un de nos concours pour les hôpitaux,
nommé premier externe; médecin, il avait su comprendre, en
adhérant des premiers à nos statuts, tout le bien qui peut ré
sulter de l’association. Puisqu'il nous a été impossible de rendre
les derniers devoirs à ce collègue estimé, que sa famille du moins
reçoive ici publiquement l’expression des regrets qu’une mort
prématurée a fait naître dans le cœur de tous les membres de
Indépendamment de cette influence morale qu’ exerce sur
nous l ’idée d’association, de protection, influence qui ne cessera
de grandir h mesure que chacun en comprendra bien l’impor
tance, ne voyez-vous pas le bien que, dans quelques années, cette
caisse de pensions viagères d’assistance va faire aux vétérans
malheureux de la profession ? Car cette caisse qui n’a été fondée
que depuis trois ans possède déjà un capital de plus de 71,000
francs.
notre Société !
Nous avons en outre à regretter l’éloignement de plusieurs
collègues. M. le Dr Charrière, médecin en chef de l’asile de StRemy, appelé à rem plir les mêmes fonctions dans l’asile de
Pontorson, département de la Manche, a dû se séparer de nous,
mais c’ est a son grand regret et avec le désir le plus vif de con
tinuer à faire partie de noire Société qu’ i! a pris cette détermi
nation. Faisons des vieux pour que noire honorable confrère
L ’appui moral dans toutes ses applications, n’a jamais manqué
aux collègues qui ont eu a le réclamer tant à Paris que dans les
départements; l’appui matériel prendra un développement de
plus en plus important toutes les fois que le besoin s’en fera
sentir. Que désirer de plus de la part de notre Association, dont
l’idée, il y a quelques années, germait h peine dans le cœur de
quelques hommes généreux, disons-le à leur louange, les heu
�—
—
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293
—
—
Espérons que ce capital, bien minime il est vrai aujourd’hui,
reux delà profession? Eli bien! Messieurs, dans ma conviction
et dans la vôtre aussi, j ’en suis sur, l’Association fera beaucoup
plus encore ; elle est appelée à reconstituer peu h peu le corps
prendra un jour des proportions telles que nous puissions réel
lement poser les bases d’une véritable caisse de retraite, et en
voter l ’établissement durable et définitif !
médical, à cicatriser ses plaies ; mais la maladie est ancienne, et
vous savez comme moi qu’ en pareil cas les meilleurs remèdes
sans l'aide du temps sont sans résultats. Disons avec le spirituel
La Fontaine :
Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage.
Cette lecture est accueillie par de chaleureux applaudisse
ments.
M. le président fait ensuite connaître les noms des médecins
qui, depuis la dernière Assemblée générale, ont donné leur acte
Courage donc, à l ’œuvre plus que jamais, serrons nos rangs,
d’adhésion aux statuts delà Société. Ce sont MM. Rambaud,
ne comptons que sur nous-mêmes et nous arriverons à ce beau
Hilarion Gués, Rocanus, Villard père, Coronat, Queyrel, Beul-
jour où le titre de médecin sera synonyme de celui de membre
lac, Armand Laurent, Fraissines et Lebas, de Marseille; MM.
de l'Association générale des médecins de France !
Du reste. Messieurs, à côté de quelques défections, j'a i la con
Olive, d’ Eyguières, et Bover, de S l-M ittre. Tous ces nouveaux
collègues sont admis à l’ unanimité.
solation de vous indiquer un nombre croissant d’adhésions; en
M. le Dr Builly, etranger jusqu’ à ce jour à l’Association et
effet, depuis notre dernière assemblée generale, douze nouveaux
présent à l’assemblée, demande à faire partie de notre Société
noms estimés de tous sont venus s’ajouter à notre liste ; je vais
locale. Ce confrère distingué est admis par acclamation.
avoir l'honneur de vous appeler à voter sur l’admission de ces
honorables confrères qui, comme nous, ont foi dans l avenir.
Qu’ils soient les bienvenus et que leur exemple trouve chaque
Le premier vœu émis par MM. les médecins du second arron
dissement est ensuite mis aux voix et adopté.
La suite au prochain numéro.
année de nombreux imitateurs?
Il me reste, Messieurs et très honorés collègues, encore quel
ques mots à vous dire et j ’ aurai terminé :
Chronique Mensuelle.
Vous savez que j ’ai toujours caressé avec bonheur l ’idée d’une
caisse de retraite pour notre Société locale; les bases d’une pa
Occupons-nous d’abord aujourd’hui de Marseille et de la Pro
reille institution ne pouvant être établies qu’au moyen de capi
vence. C’est déjà un souvenir lointain, mais c’est un souvenir
taux, notre pauvreté s'oppose aujourd’hui à ce que sérieusement
précieux que celui des beaux discours qui ont été prononcés à la
je puisse vous proposer le moindre projet sur ce point. Toutefois,
séance d’inauguration de notre H ôtel-D ieu, si bien restauré
j espère porter bonheur a l institution et en féconder la pensée
comme hôpital et comme monument. Ce qui nous a le plus v i
en priant la Société de vouloir bien agréer comme un premier
vement touché dans cette cérémonie, c’est la promesse faite
capital, auquel nous donnerions le nom de Fonds de retraite ,
par M. le sénateur de Maupas que nous aurions prochainement,
le don que je lui fais d’une somme de 52o francs, que je vais
aux environs de Marseille, un hospice de convalescents, comme
mettre entre les mains de M le trésorier.
�—
294
293
—
—
Paris a son asile de Vineennes. Nous n ’avons pas été moins sen
Pendant que nos écoles de province reprennent paisiblement
sibles â la nouvelle que M. Coste, président de l ’administration
le cours de leur enseignement, tous les regards et toutes les
des hospices et directeur de notre école de médecine, était promu
oreilles se tournent vers la Faculté de Paris. Décidément, cette
au grade d’officier de la Légion d’Honneur. Récompense d’un
Faculté traverse une grande crise; ses vieilles illustrations s’é
zèle infatigable et qui, depuis longues années, ne s’est jamais
teignent ou s’effacent; il faut choisir des professeurs pour occu
ralenti ; celte nomination ne pouvait être accueillie qu’avec une
per les chaires déclarées vacantes. La formalité du concours
n’existe plus ; les nominations doivent se faire par élection di
satisfaction générale.
recte. Le sentiment personnel de celui qui écrit ces lignes est que
Le lundi 27 novembre a eu lieu la séance de rentrée de la
jusqu ici les choix auraient pu être meilleurs. L’on conçoit, a la ri
Faculté des sciences et de l'École de médecine; M. le recteur de
gueur qu’a M. B a rth , cet anatomo-pathologiste si consommé,
l’Académie présidait.
le scrutin de la Faculté eût préféré un autre anatomo-patholo
—
L’ un des professeurs de la Faculté, M. Favre, qui appartient
giste de profession, mieux nourri de la science nouvelle, mais cet
aussi à notre école, a prononcé un discours présentant le tableau
homme n’existait pas, et M. Yulpian, dont nul d’ailleurs con
des merveilles de la science à l'époque actuelle ; M. l’abbé Aoust,
teste le mérite, n’avait pas fait de l’anatomie pathologique une
également professeur de la Faculté, a lu ensuite un rapport sur
étude assez spéciale, ne s’était pas assez concentré sur cette
les travaux de la précédente année scolaire ; M. le doyen, prenant
branche de l ’art, pour être érigé en rival sérieux de son éminent
aussi la parole, a jeté un coup d’œil rapide et clair sur l’ensemble
compétiteur. Nous n'hésitons pas à déclarer aussi que, dans
de l’enseignement donné par la Faculté depuis douze ans,
l’opinion publique, M. Gubler était classé avant M. Sée ; la
époque de son établissement. Enfin, M. le directeur de l’école a
plume de M Gubler a été jusqu’ici bien plus féconde que celle
fait un rapport lucide et d ’une grande sincérité sur les travaux
de son rival, e t, d’ailleurs, à égalité de titres scientifiques,
de la dernière année scolaire. Il a montré que l’année courante
comme garantie d’aptitude spéciale au professorat et comme
débute sous de très heureux auspices, puisque le chiffre des ins
hommage au principe du concours, le candidat agrégé ne devait-
criptions de novembre s’est élevé plus haut que jamais.
il pas l’emporter sur celui qui ne l ’est pas? Entre M. Chauffard
La séance s’est terminée par la proclamation des lauréats :
Élèves en médecine de l re année : 1er prix ex-œquo, MM.
Béraud et Bastide — 2* prix, M. Berrut. —
Mention honorable,
M. Jamet.
et M. Lasègue, le choix , il faut en convenir, était difficile; l ’un
penseur plus profond, l’autre orateur plus b rilla n t, tous deux
d’ailleurs dans les meilleures conditions pour occuper dignement
une chaire il la Faculté. D’ un côté nous eussions aimé voir
M. Chauffard ramener les esprits vers les hautes études de pa
2' année, pas de prix.
thologie générale, par un enseignement un peu nébuleux sans
3' année, ex-œquo, MM. Nicolas, Eyries et Coste. — Mention
doute, mais qui n’eût pas manqué de grandeur; d’autre part,
honorable, M M . Bernier et Tron.
Prix ex-æquo pour les élèves en pharmacie, MM. Andréolelty,
Regnier, Granet et Gibous.
nous aurions vu avec le plus vif regret que la Faculté ne s’atta
chât pas d’une manière définitive M. Lasègne, ce professeur
dont la parole a tant de charme et d’attrait.
�—
296
—
Un concours aurait dû décider, mais un concours institué sur
des bases plus larges que celui qui a été supprimé comme une
T A B L E DES M ATIÈRES.
formalité inutile, un concours où des juges nombreux auraient
été appelés des trois facultés et même des principales écoles de
rEm pire.
— De Paris a Aix il y a bien loin, mais le chroniqueur a vite
franchi les distances. Décidément le Congrès scientifique d’Aix a
ANNÉE 1866.
du succès, et un grand succès, auquel, d ’ailleurs, nos Marseillais
contribuent largement. Nous donnerons, dans notre prochain
numéro, un compte-rendu sommaire de ce qui se sera passé
dans ces grandes assises scientifiques, en réservant, bien entendu,
la plus large place pour les travaux accomplis par la section de
médecine.
A. F.
Pages.
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
Le concours pour trois places d internes des hôpitaux de
Marseille s’est terminé par la nomination de MM. Garsin, Suzini et Vidal.
— Après un brillant concours, M. Flavard vient d'être nommé
chef interne de nos hôpitaux.
— Le Dr Vlétaxas commencera au mois de janvier 1867, a son
dispensaire, rue Thubaneau, 57, des conférences cliniques sur
les maladies des yeux, les mardis, jeudis et samedis à 10 heures
du matin ; il insistera surtout sur les moyens nouveaux d'explo
ration de l’ œil.
Le Comité de Rédaction.
Vlarseille. — lmp. Arruud, Cayer e t « , roc Saint-Perréol. 57.
A nos Confrères, par le Comité de rédaction................................
1
De la maladie kystique du testicule, à propos de l’ouvrage du Dr
E. Concile, par le IV Seux fils......................................................
2
Des enduits imperméables en médecine, par le Dr Ch. Isnard (de
Marseille).......................................................................................
15
Miettes scientifiques.........................................................................
29
Fractures diverses observées à ITIotel-Dieu, par le IV Chapplain..................................................................................... 33, 72, 113
Progrès récents et tendances nouvelles de la pathologie cardiaque,
par le IV A. Fabre......................................................................41, 76
Exercice illégal. — Jugement du Tribunal civil de Marseille.........
38
Compte-rendu des séances de la Commission administrative, par
le Dr Villard..................................................................................
61
Le Banquet, par le Comité de rédaction.........................................
64
Marseille et la création des nouvelles Facultés de médecine, par le
Comité de rédaction.....................................................................
65
Lettre du Directeur de l’Ecole de Médecine de Marseille, au Comité
de rédaction de l’Union Médicalede Provence........................
68
Lettre du Directeur de 1Ecole de Médecine de Marseille, au ré
dacteur en chef de l’Union Médicale de Paris...........................
70
De la médication arséiüo-antimoniale et de son emploi contre les
maladies du cœur et quelques autres affections, par le D1Lucien
Papillaud....................................... .............................................. 83, 98
�—
298
—
Quelques considérations pouvant servir ù l’étude des maladies de
la protubérance annulaire, par le D'Seux (ils.................. 89, (37,
Le choléra dans les hôpitaux civils de Marseille, du !)■ Seux;
bibliographie, par A. F ...................................................................
Réunion de l’Association générale des médecins de France..........
Clinique chirurgicale de M. Coste.......................... •*........................
Bibliographie : Dictionnaire des progrès des sciences et institutions
médicales du Dr P. Garnier, — et Traitement du choléra, du
Dr A. Girard, d’Eyguières, par le Dr Zède........ .........................
Du mouvement progressif de la chirurgie pendant l’année scolaire
1865-66, par le Dr Sirus-Pirondi................................................
Prophylaxie de la douleur, au point de vue chirurgical, par le
D' Coste............ • .............................................................................
Bibliographie . Etude médico-légale sur la simulation de la folie,
du Dc A. Laurent, par le Dr Zède..................................................
Concours pour une place de chirurgien-adjoint des Hôpitaux, par
le Comité de rédaction....................................................................
Sur le choléra de 1866 à Marseille, par le Dr Ch. Ménécier............
Des injections forcées dans l’occlusion intestinale, par le Dr Ch.
(snard (de Marseille)......................................... ................ 209, 228,
Lettre du D' Roux fils, à la Gazette des Hôpitaux. ....................
Bibliographie: Tableau d’Ophthalmoscopie du D’ E. Martin, par le
D' Zède.............. ................................................................................
Lettre du D' Seux au Maire de Marseille................................ ...........
De l’extraction de la cataracte par le procédé linéaire combiné
233
avec l’iridectomie, par le I)r Sirus Pirondi..................................
Du traitement de la chlorose et de l’anémie, par le Dr Lucien Papillaud...............................................................................................
Rostan, par L. B.................................................................................
Séance annuelle de l’Association médicale des Bouches-du-Rhône,
agrégée à 1 Association générale des médecins de France..........
Chronique mensuelle, par A. Q. . . 53, 85, 106, 129, 157, 183, 207,
Nouvelles et variétés.......................... 88, 111, 136, 207, 255, 275,
m..
1
�
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/2/185/TP-40029_Union-medicale-Provence_1867.pdf
1fdf893d29742a4d50394c448b31e5d7
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/
UNION MÉDICALE
DE LA
PROVENCE
JOURNAL SCIENTIFIQUE ET PROFESSIONNEL
Publié sous la Direction d’un Comité de Rédaction
E t s o u s le s a u s p ic e s d e la S o c ié té L o c a le d es M éd ecin s
D ü DÉPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHÔNE
Agrégée à l’Association Générale des Médecins de France,
Pour tout ce qui concerne le Jourual, demandes d’abonnement, réclamations, échangea, etc.,
s’adresser an Secrétaire de l’Association Médicale des Bouches-du-Rhône,
me Saint-Jacques, 29 (Affranchir).
f ■+
MARSEILLE
TYPOGRAPHIE ET LITHOGRAPHIE ARNAUD, CAYER ET C,e
Rue Saint-Fcrréol, S7
1867
,-
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�LISTE DES MEMBRES
COMPOSANT LA
SOCIÉTÉ LOCALE DES BOUCHES-DU-RHONE.
— - -~ J—
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,
------~~~
ASSOCIATION MEDICALE DES BütJCbES-WJ-ItlIONE
ANNEXÉE A L’ASSOCIATION GÉNÉRALE DÉS MÉDÊÔÏNS DE FRANCE.
A ssem blée
BUREAU ET COMMISSION ADMINISTRATIVE.
:M. Seux & # , prof, à l'Ecole deMédccine.niéd en ch.des bôpit., Marseille.
pour l’arrondissement de Marseille : M. Rivière de la Souchère # ,
médecin en chef des hôpitaux et du chemin de fer.
pour l’arrondissement d’Aûv : M. Rimbaud,
pour l'arrondissement d'Arles: M. Imbert, cliir. en chef de l’hôpital.
Secrétaire : ai. Villard, médecin adjoint des hôpitaux, Marseille.
Vice-Secrétaire : M. Ollive, Marseille.
Trésorier : M. Blanchard (Camille), Marseille.
COMMISSION ADMINISTRATIVE.
MM. cbapplain, chirurgien en chef des hôpitaux et profess. suppl.à l’Ecole, Marseille
Broquier chirurgien en chef des hôpitaux, professeur suppl. à l’Ecole, Marseille.
Gasquet membre du conseil municipal, Marseille.
Verne, Marseille.
Candolle. Marseille.
Fabre (Augustin), Marseille.
Martin profess honoraire à l’Ecole de médecine, cliir. consult. des hôpitaux.
Miltre (Théophile), Marseille.
Mérentié. Marseille.
Martiu (Alexandre), Marseille.
Combalat, chirurgien-adjoint des hôpitaux, chef des travaux anatom., Marseille.
Pirondi (Sirus) chirurg. consult. des hôpitaux, prof. adj. à l’Ecole, Marseille.
PRÉSIDENT HONORAIRE.
M. Bartoli, professeur à l’Ecole de médecine et chirurgien en chef des hôpitaux.
CONSEIL JUDICIAIRE.
MM. Verne, avocat à MarseilleChataud, avocat à Marseille.
MEMBRES SOCIÉTAIRES.
MM. Amalbert, Marseille.
Bouisson, méd.-adj. des bôp., Marseille.
Armieux, Roquevaire.
Bourgarel, cliir. adj. des hop. Marseille.
Aubert, Marseille.
Boyer, Saint-Mitre (les Martigues).
Aubin. Marseille.
Boze, directeur de l’établissement hydro
Audiberl, Rousset.
thérapique, Marseille.
Aujoux, Marseille.
Builly, Marseille.
Auphan, Marseille.
Cartier,médecin adj. de l’hôpital, Arles.
Baraillier, Marseille.
Cartier, Grans.
Barthés, Marseille.
Cartoux, Marseille.
Behm, Marseille.
Castellan, Aix.
Beisson, Arène.
Cbabert, Maillanne.
Bernard (Marius), chirurgien en chef Chaffard, Auriol.
des bôpitaax, Marseille.
Cbauméry, Marseille.
Beullac (Tbéod.), Marseille.
Chevalier, Marseille..
Blanc. Marseille.
Cbevillon aîné, Marseille.
Blanchard (S.-L.), Marseille.
Cbevillon jeune, Marseille.
Boussot, Mouriés.
Clappier, Vitrolles.
c•
g é n éra le ten u e
à M a r s e i l l e le l e
décem bre
1866,
sous la p r é s i d e n c e de M . le D r S E U X , p r é s i d e n t .
Président
S
Suite et fin.
La parole est donnée à M.Villard, vice-secrétaire, pour la^leclure du compte-rendu des actes et des travaux de la Société pen
dant l’année 1865-66 :
Messieurs et chers Collègues,
L’année dernière, à pareille époque, vous m’avez fait l’hon
neur de me désigner pour faire partie de votre Bûreau en qualité
de vice-secrétaire. En me confiant ces nouvelles tondions, vous
m’avez donné un éclatant témoignage de votre estime et de votre
sympathie. Je vous en remercie publiquement aujourd’hui.
Cela dit, Messieurs, je croirais manquer a mon devoir si, en
prenant pour la première fois la parole devant vous, je ne me
rendais pas l’interprète de vos meilleurs sentiments à l'égard de
notre secrétaire que des circonstances indépendantes de sa vo
lonté ont éloigné de nous. M. Laurens, qui a été un des fonda
teurs les plus zélés et les plus dévoués de notre œuvre, a cons
tamment et plus que tout autre payé de sa personne et de son
intelligence. Les honneurs d’un scrutin imposent bien souvent
des charges qu’il est difficile de remplir, et, quel que soit le
mérite de celui qui est désigné par les suffrages de ses collègues,
il doit toujours se tenir a la hauteur du mandat dont il est in
vesti. Je crois donc être dans le vrai en vous disant que d’autres
pourront succéder a notre secrétaire, mais qu’ils ne le remplace
ront pas. C’est la, Messieurs, l’éloge le plus mérité que nous
puissions adresser à notre excellent confrère, M. Laurens.
l
�*2
Je serai court dans mon compte rendu. Quelques détails com
ploieront, K* tableau qui vient de vous être si habilement trace
par notre Président.
Le Conseil d’administration, nommé par vous l'année der
nière, a tenu ses séances régulièrement tous les mois. Constam
ment préoccupé du but de notre œuvre, il n’a rien négligé de
ce qui touche aux intérêts moraux et matériels de notre profes
sion. Quelles que soient les questions dont il a eu à s’occuper,
il les a toujours examinées et discutées avec cet esprit de sagesse,
de dignité et de modération dont vous avez pu vous convaincre en
lisant dans notre journal les résumés de nos séances mensuelles.
C’est ainsi que, demandant la répression des abus qui lui étaient
signalés, il a pu obtenir, grâce aux démarches directes de notre
président et au concours empressé de M. le procureur impérial,
des poursuites efficaces contre ceux qui se livrent impunément
à l’exercice illégal de la médecine. C'est ainsi encore que dans
ses rapports avec l'Association générale, aussi bien que dans ses
relations avec diverses sociétés départementales, il a toujours
été guidé par les principes qui ont fondé notre institution et
qui devront plus tard la perfectionner. C’est ainsi, enfin, que, dans
les temps de calamité publique, il a su défendre la dignité du
corps médical tout entier, et prouver, par son attitude ferme et
respectueuse à la fois, que le dévoùment parmi nous n’a pas be
soin d’être sollicité par l’appât des récompenses, mais qu’il les
attend avec justice lorsque l’heure du danger a passé.
A ce sujet, vous n’ignorez pas, Messieurs, de quelle manière,
après l’épidémie de 1865, notre président a su répondre aux in
sinuations peu bienveillantes qui se sont produites â notre
adresse dans notre Assemblée municipale. Il n’a fallu rien
moins â celte époque qu’une protestation publique contre un
vote rendu public pour ramener les esprits à une appréciation
plus sage et plus équitable. Peu nous importe que, pendant ou
après une épidémie, on veuille marchander nos services ; mais
ce que nous ne saurions permettre, c’est le doute, je dirai plus,
la négation de notre dévoùment, lorsque chacun de nous a payé
un si large tribut au bien de l’humanité.
Dans une autre enceinte, un de nos collègues les plus estimés,
président d’une de nos sociétés locales non moins importantes
que la nôtre, M. Gouzian, disait que la charité était contagieuse
dans le corps médical marseillais. En effet, l’année dernière un
de nos confrères tombe victime du fléau, laissant une famille
sans fortune et sans soutien. Le Comité médical des Bouchesdu-Rhône et notre Association, unis déjà dans une même pensée
comme ils le seront un jour dans un seul et même but, ont voté
ou souscrit avec une admirable spontanéité, pour la veuve de
cet infortuné confrère, les fonds suffisants pour parer aux pre
miers besoins. De pareils témoignages de confraternité, aussi
noblement exprimés sur une tombe à peine fermée, honorent
au même litre et le cœur qui les donne et la main qui les reçoit.
Puisque je parle du passé, Messieurs, permettez-moi de vous
rappeler avec quel empressement et quelle satisfaction vous avez
accueilli, il y aura bientôt un an , la haute distinctiou qui fut
accordée par le gouvernement à trois de nos collègues que nous
aimons à entourer de notre profonde estime et de notre vive
sympathie. Tous trois font partie de notre Association ; et ce
qui prouve combien est grand cet esprit de solidarité qui nous
lie, c’est que nous les avons, à notre tour, sacrés chevaliers de
la Légion-d’Honneur dans un banquet qui marquera dans les an
nales de notre Société.
Le choléra de 1866 nous a fourni l’occasion de garder une
seconde fois, vis-à-vis de l’autorité supérieure, une attitude ferme
et indépendante. Vous connaissez la réponse que votre Président
et votre Vice-Président ont, au nom du Conseil et au vôtre,
adressée à M. le Maire. Notre premier magistrat, dont les senti
ments personnels vous sont connus, faisant appel à notre con
cours et à notre dévoùment pour l organisation des bureaux de
secours, reçut une réponse dans laquelle il était dit : que malgré
la blessure de Tannée dernière, le corps médical comprenant ses
�devoirs comme il les avait toujours compris, se rendait à l'invi
tation qui lui étau laite, laissant toutefois à chacun sa pleine
liberté d’action et le soin de se mettre personnellement à la dis
position de M. le Maire. Formons des vœux, Messieurs et chers
Collègues, pour que l'avenir nous épargne le retour de ces déso
lantes épreuves que nous venons de traverser, épreuves d’autant
plus pénibles que nous en sentons nous-mêmes, mieux que per
sonne, tous les périls et toute la gravité.
Depuis notre dernière Assemblée générale, onze de nos hono
rables collègues de Marseille ou du département ont sollicité
l’honneur de faire partie de notre Société. Vous aurez aujourd’hui
à valider leur élection, bien que déjà votre Conseil les ait admis
à l'unanimité. Ce sont MM. Olive, d’Eyguières; Jaissy, d’Orgon;
Boyer, de St-Miltre; Hilarion Gués : Roeanus; Villard père ; Coronat,que nous avons déjà possédé parmi nous; Queyrel, Beuilac,
Laurent Armand et Lebas.
Situation financière.
Voici ce qui résulte du rapportée M. le Trésorier pour l’année
1865-66, du 50 septembre de la première à la même époque de
la seconde :
Fonds de r é s e r v e .................................... Fr. 2,000 —
BECETTES :
Sommes restaut en c a i s s e .......................... Fr. 784 95
Cotisations et droits d’admission . . . . » 1865 —
Intérêts des sommes placées.......................... » 105 98
Total . . Fr. 4,755 95
DÉPENSESI
Frais d’administration.................................... Fr. 107 70
Trois trimestres à la c o n c ie rg e ..................... » 112 50
Frais de re c o u v re m e n t............................... 0 28 50
Frais d’impression des s t a t u t s .................... » 50 —
Journal. Cinq trimestres dont un de l'an dernier » 664 50
Total . . Fr. 965 20
Notre avoir s’élève donc à .
Fr. 3,790 73
—3—
Il y a de plus à adresser à l’Association générale la somme qui
lui est due d’après nos statuts, somme dont le chiffre reste
subordonné aux cotisations qui sont encore à recouvrer.
Notre Société possédant aujourd’hui la somme de 5,790 fr.
75 cent., la commission administrative vous propose de porter à
5,000 francs le fonds de réserve qui, d’après le chapitre vi, ar
ticle 26, paragraphe 4 de nos statuts généraux et organiques,
doit être fixé par l’Assemblée générale.
La situation de notre journal, Messieurs, mérite de fixer votre
attention d’une manière toute particulière. Comme organe scien
tifique, l’Union médicale de la Provence, à peine née d’hier, a
pris un rang des plus honorables dans la presse médicale. Vous
vous rappelez entre autres les saluts affectueux de YUnion médi
cale de Paris, lorsque notre feuille fit son apparition dans le
monde médical. Celait là un encouragement qui devait être bien
tôt suivi d'éloges mérités. En effet, quelques-uns des travaux
que plusieurs d’entre vous ont publiés dans Y Union de la Pro
vence ont été justement remarqués et signalés par les journaux
de la capitale. Est-il besoin de vous rappelei les savants articles
de M. Fabre sur les lésions rénales dans l’albuminurie, le dia
bète, le rôle que peut jouer le grand sympathique dans certaines
maladies, et enfin une étude très remarquable sur la pathologie
cardiaque? Je ne ferai que vous citer, parmi les mémoires origi
naux les plus importants, ceux de M. Chapplain, sur lamaladie des
trichines; de M. Bourgarel, sur la dysménorrhée membraneuse;
de M. Nicolas, sur la médication topique dans le traitement de
la laryngite chronique; et plus récemment encore, deux articles
pratiques sur la leucorrhée, parM. Mérentié. Il serait injuste de
ne pas mentionner ici 1 intéressant travail de notre collègue,
Al. Seux fils, sur les maladies de la protubérance annulaire, tra
vail qui a été cité il y a peu de jours d’une manière spéciale par
la Gazelle hebdomadaire ; et enfin deux mémoires deM .Isnard,
l’un sur les enduits imperméables en médecine, l'autre sur les
injections forcées dans l’occlusion intestinale. Si à ce bilan scien
�—6—
tifique j’ajoutais le détail des observations prises dans nos hôpi
taux et publiées par MM. Seux, Pirondi, Chapplain et Broquier,
je trouverais aisément de quoi répondre aux détracteurs du jour
nalisme médical à Marseille. Et encore, est-il bon de vous faire
observer que notre journal n’a pas toujours eu deux feuilles à sa
disposition, et qu'en outre les questions professionnelles oc
cupent dans ses colonnes une assez large place. Il est hors de
doute que dans une institution comme la nôtre, tout ce qui se
rattache à la profession médicale doit exciter le plus grand in
térêt. Aussi, je ne crains pas d’être démenti en disant que dans
d'autres Sociétés locales, de pareils sujets ne sont pas traités
avec plus de justesse et de modération que dans la nôtre. Bon
nombre d'articles professionnels ont été insérés dans notre jour
nal avec un mérite qui ne sera contesté par personne.
A tous les points de vue, nous devons donc viser à donner à
notre publication une existence plus large et plus assurée. Que
chacun de nous apporte une pierre à l’édifice, et notre but sera
bientôt atteint. Ce ne sont pas les éléments de prospérité qui
font défaut; a chacun de comprendre la tâche qui lui incombe,
et surtout le devoir de la remplir. Si j’osais même vous indiquer
la voie qu’il y aurait à suivre, je vous dirais : à vous qui aimez la
science et qui la mettez au service d’une observation rigoureuse
et étendue, donnez-nous des articles scientifiques dont l’impor
tance, justement appréciée, prouvera que Marseille n’est pas
au dessous des grands centres intellectuels; à vous qui recher
chez le bien de vos collègues, qui demandez de larges améliora
tions dans nos règlements, signalez les abus à réprimer, indiquez
les lacunes à remplir, recherchez en un mol tout ce qui peut
perfectionner notre profession ; à vous enfin dont les minutes
sont enlevées par une nombreuse clientèle, ou qui craignez, trop
timidement peut-être, de tenir la plume dans un intérêt com
mun, aidez-nous de vos moyens pécuniaires, doublez, triplez
votre abonnement à notre journal, faites des prosélytes parmi
les tièdes, et vous verrez tous que la grandeur d’une associa-
—7—
lion philanthropique comme la nôtre doit finalement exercer une
influence des plus légitimes sur tout ce qui rayonne autour
d’elle.
Vous avez remarqué plus haut dans l’exposé de notre situation
financière, le déficit occasionné par l’impression de notre journal.
Vous auriez le droit de vous montrer difficiles à cet égard, si
nous n’avions pas la conviction qu’à dater de ce jour vous aurez
à cœur de nous venir en aide. L’Union médicale de la Provence
ne compte qu’un nombre encore trop peu considérable d’abonnés.
Laissez-nous donc espérer que désormais, votre concours à tous
nous étant assuré, l’avenir de cel important recueil sera d’autant
plus certain qu’il ne sera plus renfermé dans les limites trop
étroites d’un budget malheureusement trop restreint.
Je m’arrête, Messieurs et chers collègues, avec la certitude
que votre bienveillance saura corriger les imperfections de mon
compte-rendu. La place que j’occupe me donnait un modèle à
suivre; il m’eût été difficile de l’imiter, encore moins de vous le
faire oublier.
Le fonds de réserve de 5,000 francs proposé ci-dessus est mis
aux voix et adopté. Quelques observations sont échangées entre
MM. Nitard-Ricord, Chevalier et Seux sur les dépenses occa
sionnées par le journal. M. le président fait observer que si l’im
pression de celle feuille a été onéreuse pour la Société, tout fait
espérer qu’il n’en sera plus de même à l’avenir.
M. le Dr Mittre a la parole pour la lecture d’un mémoire in
titulé : Organisation de l'assistance médicale desindigenls dans
la ville de Marseille. Ce sujet difficile a été traité par notre Col
lègue de manière h mériter l’approbation générale.
M. Mittre a présenté sa thèse de façon h faire bien apprécier
le traitement des indigents à domicile, dans les hôpitaux et les
établissements privés. Son but a été de prouver que le service à
domicile devrait être établi dans les mêmes conditions (pie pour
�le service des hôpitaux ; et, comme premier échelon à la position
<|ui serait faite aux médecins, M. Mitlre a proposé le concours.
Une mesure aussi libérale aurait non-seulement pour résultat
de diminuer le nombre des médecins qui sont attachés aux di
verses administrations de bienfaisance, mais encore d'assurer
aux malades secourus plus de garanties, et au corps médical plus
de respect et de considération. M. Mittre, dans cet intéressant
travail, a pris pour modèle l'arrêté préfectoral qui a été publié en
date du 29 mars 4859 par M. le préfet du Pas-de-Calais, arrêté
qui accorde aux médecins chargés de l’assistance des indigents
le droit à toute espèce de récompenses, et les autorise à signaler
aux autorités locales, aux conseils d'hygiène et de salubrité,
toutes les questions qui sont relatives à la santé publique.
Après quelques observations présentées par MM. Rampai,
Maurin, Chapplain, Chevalier et Seux, il est décidé b l’unanimité
que le mémoire de M. Mittre sera renvoyé à la commission ad
ministrative qui ctudiera la question dans le courant de l’année
et en fera un rapport à la prochaine assemblée générale.
La question de l’organisation de l'assistance médicale des in
digents dans les campagnes ne soulevant aucune communication,
M. le Président prie les membres de l’Association de vouloir
bien lui adresser à ce sujet les documents nécessaires pour que
la Commission administrative puisse s’occuper de la question
avant l’assemblée générale de l’année prochaine.
On passe à la nomination d’un secrétaire en remplacement du
Dr Laurens.
Volants, 57 : M. Villard obtient 27 voix; M. Rampai, 17;
M. Mittre, 9 ; M. Olive, 1; bulletins blancs, 5. — En consé
quence, M. Villard est élu secrétaire.
Cette élection laissant vacante la place de vice-secrétaire, il
est procède à la nomination de ce dernier, en remplacement de
M. Villard.
Votants, 45 : M. Olive (Camille) obtient 31 voix ; M. Rampai
r; M. Mitlre, 4; M. Collien, 3; MM. Seux lils, Maurin et Maurel,
chacun 1 voix. — En conséquence, M. Olive est nommé vicesecrétaire.
La sixième et dernière partie de lordre du jour portait : Pro
positions diverses. Personne n’ayant demandé la parole, la séance
est levée.
Le soir, à 7 heures et demie, lt banquet annuel a eu lieu dans
les salons de la maison Geller. M. le président a porté un toast
à l’union du corps médical; à M. Rayer, président de l’Associa
tion générale des médecins de France; h M. Arnédée Latour,
secrétaire général; et a M. Gouzian. président du comité médi
cal des Bouches-du-Rhône. D’autres toasts ont été portés à M.
le Dr Coste, président de la Commission administrative des hos
pices, récemment promu au grade d’ollicier dans l’ordre impérial
de la Légion-d’Honneur; 1» MM. les médecins des arrondisse
ments éloignés de Marseille, et enfin a M. Villard, nommé
secrétaire de l’Association médicale des Bouches du-Rhône.
Chronique M ensuelle.
Le Congrès scientifique tenu à Aix (Provence), le 12 décem
bre, a été l’évènement heureux de ce mois. Nous ne pourrions
donner, même sommairement, le compte-rendu des travaux qui
y ont été élaborés. La section des sciences médicales suffira
d’ailleurs très amplement h défrayer cette chronique.
Vingt-deux questions figuraient au programme, on ne pouvait
s’attendre évidemment h les voir toutes traitées avec le dévelop
pement qu’elles comportaient.
M. le président de la section n’a du accorder pour chacune
des lectures que dix minutes ; ce temps nous a paru bien
court et si les interruptions forcées ont pu froisser quelques au
teurs, les Mémoires ont eu bien b souffrir d’être écourtés ou ré
�sûmes en cours de lecture. Selon nous, il eût mieux valu suivre
! exemple donné par les habiles organisateurs du prochain Con
grès international de Paris , en écartant certaines questions
scientifiques, dont les sociétés locales peuvent amener la solu
tion, pour ne s’occuper que de celles qui se lient plus intime
ment aux intérêts des populations et du pays.
Dans la séance d’installation du bureau de la troisième section,
M. Sauvet, président de la Société impériale de Médecine de
Marseille, a rendu un hommage public à la mémoire des savants
confrères dont le corps médical d’Aix s’honore, et qui tous
avaient appartenu, comme membres correspondants, à cette
société savante.
Après quelques paroles de remercîments qu’a très heureuse
ment improvisées M. Payan, d'Aix, au nom de ses collègues, les
travaux scientifiques ont été appelés.
La première question du programme, sur le dessèchement, le
colmatage et le drainage, étudiés au point de vue de l’hygiène
publique comme moyen d'assainissement des marais et des pays
marécageux, a sollicité une excellente communication de M. le
docteur Chabrier, d’Aix. Ce savant confrère ne veut point de
projets systématiques ; toutes les méthodes sont bonnes, a-t-il
dit, pourvu qu elles soient appliquées avec intelligence. A la
suite de cette lecture s’est élevée une discussion des plus intéres
santes où l’on a entendu MM. Payan et Blanc, d’A ix, et l’abbé
Musy, de Marseille. — M. le président Fonssagrives, résumant
le débat, a fait ressortir les avantages qu’il y aurait à employer
nos forçats dans ces grands travaux d’assainissement.
L’enseignement de l’hygiène dans les écoles secondaires a
trouvé d’excellents propagateurs en MM. Blanc et Sicard, de
Marseille, secrétaire-général; — M. le docteur Mittre, déjà bien
connu de nous par ses excellentes conférences publiques d’hy
giène, a insisté principalement sur l’utilité de l’enseignement de
l’hvgiènc chez les garçons et les jeunes filles, au moment de
l'adolescence ; les mères de familles de notre époque ne savent
/
— f1
point élever leurs enfants, il convient de les instruire dès leur
jeunesse. Diverses propositions ontétéémises par MM. Bousquet
Payan, Baumarchais, d’Aix, et Simon Roux, de Marseille,
sur les moyens de propager cet enseignement. L'opinion de
M. Seux, de Marseille, les résumant toutes, a prévalu, et l’on a
émis le vœu de voir introduire l’enseignement de l’hygiène
dans les lycées et les écoles secondaires pour les élèves des clas
ses supérieures; cette nouvelle classe devrait être confiée au mé
decin de l'institution. M. le professeur Fonssagrives a déjà
obtenu de M. le Ministre de l’Instruction publique l’autorisation
d’ouvrir des conférences d’hygiène dans les principales villes de
France; il faut espérer qu’on ne tardera pas à étendre celte fa
veur aux établissements d’instruction secondaire.
La troisième question de l’inspection des viandes de bouche
rie au point de vue de l’hygiène publique, a permis h M. Fons
sagrives, si familier avec toutes les questions d’hygiène publi
que, de s’étendre assez longuement sur les trichines et la
trichinose dont nous sommes menacés par la frontière du Nord.
M. Ménécier, de Marseille, a appelé, de son côté, l'attention sur
la ladrerie du porc et a vivement attaqué les ordonnances de
police qui la concernent, ordonnances des plus insuffisantes,
qui permettent â la maladie désignée sous le nom de Tamia
(ver solitaire) de se répandre de plus en plus dans quelques
villes de France, et notamment à Marseille. Le langayage est
un moyen insuffisant de diagnostic, il faut placer la ladrerie du
porc au rang des vices rédhibitoires. M. Ménécier réclame
contre l’inspection des viandes de toutes espèces faites par un
seul agent ; il demande à ce qu’elle soit confiée â une Com
mission composée au moins de trois membres, docteur en mé
decine, vétérinaire et chimiste.
M. Bernard, d’Apt, abonde dans ce sens et voudrait que le ser
vice rentrât dans les attributions des conseils d’hygiène. M. Guinier réclame l’inspection des écuries de bestiaux, notamment
des vacheries dont on livre souvent les animaux malades à
�1 abattoir. II a vu uue véritable épidémie de lièvres intestinales
résulter de l’ingestion de celte viande.
M. Ménécier, eu prenant la parole sur les mesures que l'on
devrait apposer il la propagation de la rage, a d'abord payé un
juste tribut d’éloges aux autorités administratives de la ville de
Marseille qui, par la sévérité apportée à l’exécution de leurs arrê
tés, ont enrayé depuis longues années les terribles ravages de
l'inoculation rabique des animaux à l’homme. Grâce il la-nou
velle affectation du depot Menpenty, tous les animaux malades y
sont reçus sans aucun frais et abattus immédiatement. Les pro
priétaires peuvent ainsi se débarrasser du chien qu’ils soupçon
nent enragé.
Celte organisation unique en France, en dehors des écoles
vétérinaires, rend chaque année d'immenses services ii la popu
lation et il l'administration qu’elle instruit de tous les cas de
rüge. Le musellement est, d’après M. Ménécier, la manière la
plus efficace de se garantir des atteintes des chiens enragés.
Dans la discussion qui a suivi celle intéressante communica
tion, M. Chabiiers’est déclaré ouvertement contre la muselière,
qui, d'après lui, serait capable, théoriquement, d’augmenter les
cas de rage chez les animaux. M. Chabrier s’appuyait princi
palement sur ce qu'en Orient, où les chiens jouissent de la
plus grande liberté, la rage y était inconnue.
M. Ménécier, rappelant les termes de ladernièreenquêtesurla
rage en Orient,a prouvé a son savant argumentateur qu'il n'était
pas très bien informé sur ce qui se passait à Constantinople. En
effet, dans cette ville, un service de captage est actuellement
organisé â l'encoDtre des chiens errants, chez lesquels on observe
très fréquemment la rage, vu le climat très variable qui l’y favo
rise.Dans les pays très chauds, l’affection rabique ne se rencontre
qu’exceptionnellemenl, tandis qu elle est fréquente dans notre
zone tempérée, mais il faut tenir compte ici de la chaleur seule
ment et ne point s’arrêter à l'influence que peut avoir sur la santé
des chiens la liberté dont on les laisse jouir dans ces contrées.
Le même fait se passe, d’ailleurs, en France, où les statistiques
démontrent qu'avec une température très basse ou très élevée,
la rage se développe avec plus de difficulté, contrairement à ce
qu’en pense le public, qui, en fait de questions médicales,
épouse souvent des préjugés.
M. Bourgnet ajoute que les cas de rage développés à l’inté
rieur des maisons sont très fréquents et qu'il est nécessaire
d’insister, comme l’a dit M. Ménécier, sur la publication d’un
avis officiel indiquant les symptômes de l’affection rabique
Nous citerons, comme mémoire seulement, les communica
tions de MM. Guinier et Nicolas, de Marseille, sur l’utilité incon
testable de la laryngoscopie, qui prend de plus en plus faveur.—
La présentation des instruments destinés à faciliter les diverses
opérations que peuvent réclamer les maladies du larynx (extirpa
tion, cautérisation, électrisation), et la description méthodique
qu’en a fait notre confrère, ont vivement intéressé l’assemblée.
Le lendemain, une séance d’auto-laryngoscopie a eu lieu à
l’hôpital civil d’Aix.
La question du mode de propagation du choléra et de l'in
fluence des conditions météorologiques sur cette propagation a
été traitée ce même jour. L’affluence était grande, quelques mem
bres des sections voisines étant venus assister aux débats qui,
disait-on, promettaient d’être un peu vifs. Nous connaissions
d’avance les orateurs qui, de part et d’autre, s’étaient fait inscrire
pour prendre la parole, et. notre persuasion était que la discus
sion 11e franchirait jamais les limites de la polémique courtoise
des académies.
La défection des anti-contagionistes, au moment même de la
lutte, a été pour tout le monde un évènement aussi étrange
qu inattendu.
Néanmoins, de l’avis de bien des personnes, la discussion n'a
rien perdu de se transformer en une causerie scientifique.
Dans celte séance, M. Seux, de Marseille, a lu une savante ré
futation des faits avancés par M. Didiotsur l’invasion cholérique
�— U —
(le 18(15 il Marseille. Ou ne saurait répondre avec plus de fer
meté et de dignité il une attaque qui n'a pas toujours été très
courtoise. MM. Sicard et Mittre veuaienl de traiter la question
d’hygiène du choléra. Ce dernier, dans une brillante improvi
sation, avait retracé Fhistoriqne des mesures quarantenaires et
démontré uu fait du plus haut intérêt que M. Blanc, d’Aix,
combattait. M. S. Roux a ensuite lu quelques passages d'un
mémoire sur les maladies qui, chez les vieillards, favorisent
la terminaison du choléra par asphyxie. Nous regrettons la
rapidité avec laquelle notre confrère s'est vu forcé de lire ce
travail, l’un des plus sérieux présentés à la section médicale.
La discussion, engagée sur divers points de la question, s'est
prolongée assez longtemps entre les orateurs que nous venons
de citer, et MM. Bourguet, Bernard (d'Apl), Fonssagrives,
Fabre, Laugier et Ollive (de Marseille).
La séance n’a été levée qu'après avoir exprimé le vœu de voir
les quarantaines m aintenues, le choléra étant une maladie
transmissible, et l’hygiène publique améliorée dans chaque ville
Cette question une fois épuisée, les séances de la section ont
été moins fréquentées, un grand vide a coïncidé avec le départ
de M. le président Fonssagrives, que ses devoirs professionnels
appelaient à la Faculté de Montpellier. M. Payan, d’Aix, viceprésideut, qui devait, en cette occasion, occuper le fauteuil de la
présidence a cédé cet honneur a M. Guinier qui a pris aussitôt
en main la direction des débats.
Les lectures faites pendant les derniers jours ont été aussi
intéressantes que celles qui les avaient précédées. Ainsi on a très
apprécié les communications de MM. Sicard et Payan, de l'uti
lité et des avantages des bains de mer.
La question du bubon d’emblée a été vivement discutée entre
MM. Cbavernac et Payan plaidant pour la doctrine de Ricord,
contre M. Bourguet qui apportait une série d’observations, qui
la combattaient. La discussion sur la valeur de la médication par
les eaux minérales de la Provence a été soutenue par MM. Cha-
vernac, Chabrier, Payan, Bourguet, Jobert de Gréoulx, Sicard,
Bernard et Guinier; elle a démontré que les eaux d’Aix avaient
des propriétés réelles et trouvaient leur application, lorsqu’elles
sont chaudes, principalement dans lirido-choroïdite et la
conjonctivite simple. La kératite traumatique exige l’eau
froide.— Les eaux sulfureuses des Camoins (près Marseille),
qui semblent vouées à un éternel oubli, rendent cependant des
services incontestables en boissons ou en bains, dans la scrofule,
la chloro-anémie, les dartres et la syphilis invétérée, ce qu’a
soutenu M. Sicard.
Nous regrettons la précipitation avec laquelle les travaux ont
été conduits pendant les derniers jours de la session ; un grand
nombre de médecins qui ne séjournaient point à Aix y sont re
venus et ont dû regagner leur foyer sans avoir pu faire les lec
tures pour lesquelles ont les avait inscrits, la clôture ayant été
décidée assez inopinément et contre tons les règlements.
Quoique la section n’ait rien envoyé en séance générale,
il a été accordé un tour de faveur a quelques médecins privi
légiés.
La médecine a eu ainsi trois communications : dans !a pre
mière, M. Fonssagrives a traité de l'hygiène de l’enfance et s’est
fait, comme toujours, vivement applaudir; M. Mittre, dans une
autre séance, a fait une lecture sur la destruction et la conser
vation de l'espèce humaine. Ce travail était une étude médicophilosophique plutôt que médicale proprement dite.
Enfin, M. Bertulus dont on avait regretté l’absence dans
la section médicale est venu exposer ses idées pratiques sur la
contagion, l’infection et la transmission du choléra asiatique,
ainsi que les moyens de l’arrêter dans sa course.
Le 25 décembre, jour de dimanche, une séance académique
avait été offerte à Marseille, aux membres du Congrès scienti
fique de passage en cette ville. M. le Maire de Marseille prési
dait cette réunion, où figuraient au bureau les Présidénts de
toutes les sociétés savantes de la cité. Le public d’élite qui assis
�tait à celle fête a pu voir que Marseille conserve, au milieu de
son agitation commerciale, un culte spécial pour les arts, la
littérature et la science.
Quant à la session qui devait se tenir à Nice, on nous a dit
qu'elle avait complètement échoué.
Placée entre les fêtes de la Noël et du jour de l’an, il fallait
peu compter sur le succès.
M.
N O U V ELLES E T V A R IÉ T É S.
L'année 1<S67 a commencé par un deuil au milieu de nous.
Le 5 janvier, le Dr Bailly, jeune encore, succombait à une dou
loureuse maladie. Il laisse d unanimes regrets. Un nombreux
cortège de confrères et d'amis l'accompagnait a sa dernière de
meure. Trois discours ont été prononcés sur sa tombe, au nom
des Sociétés médicales de Marseille dont il faisait partie : le
IV Sicard a parlé pour la Société impériale de médecine: le Dr
Roux lils, pour le Comité médical; le Lr Seux, pour la Société
locale des médecins du département.
— Dans la liste des titres honorifiques accordés par S. Ex. le
Ministre de l’Instruction publique, nous avons remarqué avec
satisfaction les noms des Dr* Bertulus et Seux, nommés, le pre
mier, officier de l’instruction publique; le second, officier d’aca
démie.
— M. Seux, président de la Société locale des Bouches-duRhône, a fait a l’Association un nouveau don de 525 francs,
destiné a une caisse de retraite pour les vieillards.
— Par décision du Conseil d’Administration des Hospices de
Lyon, approuvée par M. le Sénateur, préfet du Rbône, 1 e trai
tement des médecins de l’Hôtel-Dieu a été porte à 2,000 fr.
Le Comité de Rédaction.
Marseille. — lmp. Arnaud, Cayer etc., rue SaiDt-Perréol. 57.
MÉMOIRE SU R L ’ONGLE INCARNÉ
Par le Dr D1DI0T, Médecin principal de l’armée.
L’affection connue sous les uoms d'ongle incarné, d'ongle
rentré dans les chairs, est assez commune chez les militaires (1).
Souvent légère en apparence et ne constituant qu’une simple
incommodité, elle peut néanmoins, à la suite de marches for
cées, de courses répétées ou d’une station prolongée, causer
des douleurs assez vives, et être le point de départ d’une inllammation violente du gros orteil, qui s’étend parfois à tout le
pied et même à la partie inférieure de la jambe.
Elle est surtout remarquable par la fréquence de ses récidives
et par la difficulté de sa guérison. Tous les chirurgiens d’armée
savent la résistance opiniâtre de cette lésion aux différents pro
cédés dirigés contre elle. Il n’est pas non plus de maladie contre
laquelle on ait employé plus de moyens de traitement.
C’est donc, à ce dernier point de vue surtout, un sujet qui
mérite de fixer l’attention des médecins militaires. On est frappé
non-seulement de la différence des méthodes curatives, mais
aussi de leur fréquente inefficacité et l’on ne peut s’expliquer
leur diversité que d’après celle des idées exclusives que les au
teurs de tous ces procédés se sont faites sur le mode de forma
tion de l’ongle incarné. Les uns, dans la pensée que la pré
sence de l’ongle dans les parties molles est la seule cause de la
lésion, s’attaquent à lui, en le détruisant en tout ou en partie,
ou en le redressant; les autres se bornent h réprimer les parties
molles et à combattre leur inflammation, avec l'opinion que ce
(i)
L’ongle incarné pouvant être guéri sans opération, ne motive l’exemption
du service militaire que s’il offre une gravité exceptionnelle, ou se complique
d’un état fongueux des chairs. Il ne peut être que très rarement un cas de
réforme. (Instruction du Conseil de santé, du 2 avril 1862, sur les infirmités
qui rendent impropre au service militaire, »• 424>.
2
�sont les chairs primitivement affectées ei dont le boursoufllement
vient recouvrir le bord de l'ongle.
Certains agissent à la fois sur l’ongle et les chairs latérales :
enlin, il en est qui supposent que le siège du mal est dans le dé
veloppement irrégulier de l’ongle et qui l’arrachent en partie ou
en totalité et détruisent en même temps la matrice pour empê
cher sa reproduction.
î'réoccupé d’ailleurs de faire valoir la supériorité du moyen
qui lui est propre, chaque auteur s’est borné à sa description,
de sorte que tous ces procédés se trouvent disséminés dans les
divers ouvrages de chirurgie. Je m’attacherai h en présenter un
aperçu sommaire avant de formuler les principes de la méthode
rationnelle et efficace a laquelle je rapporte les résultats cons
tants de ma pratique.
L'ongle incarné ne s'observe presque exclusivement qu’au
gros orteil, et plus communément à son côté interne. On le con
çoit facilement par les particularités de cet ongle, qui est plus
dur et plus épais et aussi plus tranchant à ses bords libres.
Quand la lésion est légère, elle se borne a la partie antérieure
de la rainure latérale; mais elle s'étend souvent en arrière vers
la racine de l’ongle, à la portion du bord qui est habituellement
recouvert et comme enchâssé dans les parties molles.
La croissance anormale de l’ongle, sa trop longue convexité,
une section irrégulière ou négligée, la malpropreté habituelle,
une transpiration abondante, comme celle qui se produit dans
les longues marches, les courses fatigantes, qui échauffe les
parties molles, les gonfle et les ramollit, la pression latérale de
l'empeigne d'une chaussure grossière, qui tend à repousser les
chairs contre le bord de l'ongle, telles sont les causes qui con
tribuent le plus fréquemment â la formation de l'ongle incarné,
en dehors des causes accidentelles, comme les contusions, les
piqûres, on les causes générales et constitutionnelles. (Scrofules
syphilis.)
En général, cette affection se produit lentement, et pendant
— 19 longtemps elle reste assez légère et ne cause qu’une douleur
insignifiante. C’est ce qui se remarque particulièrement chez les
personnes qui observent des habitudes de propreté, qui n’ont
point à supporter des stations ou de marches fatigantes, et qui
prennent la précaution de couper de temps en temps le bord de
l’ongle après l’avoir soulevé d’entre les parties molles sous-ja
centes.
Mais on comprend que la négligence de ces soins, une mar
che prolongée, une chaussure mal faite suffisent pour aggraver
le mal, qui, borné d’abord â la partie antérieure du sillon latéral,
gagne peu h peu toute la rainure jusqu’il la matrice et celte der
nière elle-même. C’est ce que nous observons le plus souvent
chez nos militaires, lors des changements de garnison, après de
longues étapes. J’ai vu, pour ma part, plus d’un écloppé de cette
sorte. Dans ces conditions, en effet, la marche est très pénible,
elle n’est possible qu'a la condition de quitter la chaussure ou
d’en retrancher la portion d’empeigne qui recouvre le gros or
teil; souvent même, à cause de la douleur aiguë dont celui-ci
est le siège, elle ne peut se faire que sur le talon. Le repos, des
lotions de propreté amènent ordinairement quelque soulage
ment; mais ces accidents se répètent avec plus ou moins d’in
tensité à la suite de chaque marche prolongée; les tissus qui
bordent latéralement l’ongle deviennent alors rouges, tuméfiés,
et un pussanieux s’écoule du fond de la rainure qui s’ulcère. De
simple incommodité d’abord, la lésion est ainsi transformée en
une véritable infirmité qui, par les douleurs qu’elle cause, les
privations qu’elle impose, nécessite alors l’emploi des moyens
chirurgicaux.
J’ai déj'a dit que ces moyens étaient fort nombreux. Pour
mieux les apprécier, je les diviserai en quatre catégories, selon
qu’ils agissent sur l’ongle, ou sur les chairs seulement, ou à la
fois sur l’ongle et sur les parties molles latérales, ou enfin sur la
matrice elle-même.
A la première catégorie se rapportent les procédés ; Du re
�— 20 —
dressement simple de l'ongle, soit avec une agrafe double enga
gée sons les bords latéraux et rapprochée au moyen d une petite
vis Yésigné, Dudan, Labarraque (1), soit en dégageant le bord
incarné an moyen d’une pince a torsion, et le ramenant par
dessus les parties molles, après avoir préalablement ramolli les
parties ulcérées par des applications émollientes Huet (2). —
Cette méthode ne peut convenir que dans les cas simples et elle
ne met pas à l’abri des récidives.
— Du rétrécissement de l'ongle par l'incision soit du bord in
carné seulement (Fabrice d'Aquapendente (3) ou avec amincisse
ment de la partie moyenne (Dionis ,soit de la portion centrale
en (orme de \ Faye (o , soit de tout l’angle interne et en tenant
toujours l'ongle coupé lort court (Guilmot (6). Mais tous res
moyens ne sont que des palliatifs et ne peuvent d’ailleurs réussir
que daus les cas légers.
—De /’arrachement du bord incarné seulement, après incision
pratiquée au moyen d’un canif ou d'un bistouri Blaquière (7)
A.Cooper (8) ou avec des ciseaux (Dupuytren (9) ou de la totalité
même de l'ongle(Dupuyiren 10), Velpeau \11). Ces derniers pro
cédés sont douloureux et souvent repoussés par les malades. Ils
ne sont pas moins défectueux, à cause des récidives auxquelles
ils exposent, quand l’ongle en repoussant prend une direction
vicieuse.
Dans la deuxième catégorie il faut ranger les moyens curatifs
dirigés contre les chairs latérales seulement, soit en les excitant
Albucasis (12 , A. Paré (15), Brachet de Lyon (14), Guyon (13)
(1) Thèse de Paris, 1837. — (2) Union médicale, année 1860, n. 152, p. 163.
— (3) Œ uvres chirurgicales, chap. 104. — (4) Cours d'operalion de chirurgie,
p. 622. — (5) Thèse de Paris, 1822. — (6) Recueil de mémoires de médecine m i
litaire, l r« ■série, t . J . p . 264. — (7) Journal des sciences medicales, t. XVIII,
p. 208. — (8) Lectures, t. I, p. 200. — (9) Archives générales de médecine,
armée 1826. — (10) Leçons orales, t. IV., p. 391. — (11) Traite de médecine
opératoire, t. I, p. 457. — (12) Livre II, chap 91. — (13) Œ uvres, édition
Malgaigne. — (14) Journal général de médecine, t. LVIII, p. 317.— (15) Société
de chirurgie, séance du 22 octobre 1862.
- 21 soit en les détruisant avec la potasse caustique (Levrat Perroton
(I), Senné (2), ou la pâte caustique de Vienne (Scoutletten
et Donzel 3) soit en les momifiant pour ainsi dire avec le perchlorure de fer solide (Vahu (4). En général ces procédés don
nent de bons et prompts résultats, mais ils sont fréquemment
suivis de récidives.
La troisième catégorie comprend toutes les opérations qui se
pratiquent a la fois sur l’ongle et les parties molles; telles soni:
la section du bord incarné avec cautérisation des chairs fon
gueuses (Paul d'Egine (5), Sommé (6), le redressement du bord
incarné avec compression des fongosités au moyen d’une lame
de fer blanc (Desault (7) ou de plomb (Bover (8) ou avec des
cylindres d’éponge préparée, engagés sous l’ongle et les chairs
malades (Bonnet (9); l’arrachement du bord incarné avec cauté
risation des chairs fongueuses (Dupuytren (10), l’excision de la
partie de l’ongle enclavée et la destruction superficielle des
chairs malades par une application pendant cinq minutes de pâte
de Vienne et ensuite de pâle au chlorure de zinc pendant vingtquatre heures consécutives (Bonnet (1 l).Tous ces procédés, plus
sûrs que les précédents, sont néanmoins moins propres â pré
venir les récidives dans la plupart des cas que ceux de la caté
gorie suivante qui se pratique sur la matrice de l’ongle, de ma
nière à la détruire et par suite a empêcher la reproduction de
l’ongle.
Ainsi, l’excision de la matrice unguéale, ajoutée au procédé
de l’arrachement, toutes les fois qu’elle participe â l'affect ion
(Dupuytren(12); la section avec arrachement du bord incarné de
(1 ) Journal général, 3' série, t. XXXIII — (2) Bulletin de thérapeutique,
année 1832, p. 378. — (3) Thèse de Strasbourg, 1836. — (19) Annuaire de
médecine et de cliimrgie pratiques pour 1861.— (5) Livre XIV, chap. 85. p. 50.
— (n) Archives générales de médecine, année 1823. — (7) Journal de chirurgie,
t. IX. — (8) Traité des maladies chirurgicales, l. II. — (9) Bulletin de Théra
peutique, année 1832, I. VI. — (10) Leçons orales t. IV, p. 392. — (11) Traite
de la cautérisation, par Philipeaux, p. 592. — (12) Id ., p. 394.
�— 22 l’ongle avec cautérisation, au moyen du fer rouge, des parties
molles pour empêcher la reproduction’ de l'ongle (Larrey (1) ;
l’ablation d’un seul coup, au moyen du bistouri, de la matrice,
du bord incarné et des parties molles altérées Baudens (1) ; la
destruction soit avec la potasse caustique de toutes les parties
altérées jusqu’au delà de la racine de l’ongle (Vanderback (5),
ou de toute la partie de l'ongle qui tient à la peau (Krérner (4).
soit avec le caustique de Vienne, après une incision au niveau
de la racine (Scouttetten (5) ; l’excision de la matrice et des
chairs fongueuses avec cautérisation immédiate, au moyen du
caustique de Vienne (Sédillot (6) ; l’atrophie de la matrice par
une compression continue après l'arrachement (Boyer (7).
Tous ces procédés, à la simple énumératiou desquels j ’ai dù
me borner, ont sans doute donné k leurs inventeurs d’excellents
résultats. Il n’en est point, en effet, qui ne puissent dans certains
cas répondre à une véritable indication. Mais une rigoureuse
observation des faits conduit néanmoins k reconnaître les in
convénients réels plus ou moins graves de la plupart de ces
moyens, même les plus rationnels, appliqués comme méthode
générale.
Les procédés de l'arrachement (Velpeau), de l’excision avec
cautérisation des chairs au moyen du fer rouge (Larrey), sont
des moyens douloureux, auxquels j'ai vu des malades se refuser
malgré la possibilité de recourir aux anesthésiques. Ceux de
l'ablation des parties altérées avec le bistouri en y comprenant
la matrice (Dupuytren, Lisfranc, Baudens), ne s’exécutent pas
sans produire aussi des souffrances assez vives et réclament plus
d’habilité de la part de l’opérateur pour ne pas entraîner d'acci
dents fâcheux.
(i)
Archives générales de médecine, année 1829, t. XXL — (2) Clinique des
plaies d’armes à feu, p. 386. — (3) Recueil des mémoires de médecine militaire,
1” série, t. XXIII, p. 226. — (4) Id., t. XXIII, p. 283. — (3) Clinique de
Strasbourg et Thèse de D onzel. —(6) Traité de médecine opératoire, t. II, p. 217.
— (13) Traité des maladies chinirgicales, t. II.
— 23 —
La cautérisation potentielle, au contraire, n’a point tous ces
inconvénients, et quand elle est appliquée avec précaution et
selon certaines régies, elle constitue réellement la méthode la
moins défectueuse.
C’est pourquoi, après une élude approfondie des différentes
méthodes de traitement, et après avoir vu mettre et mis moimême en pratique différents procédés, particulièrement ceux de
nos maîtres de la chirurgie militaire (Larrey, Scouttetten, Bau
dens, Sédillot. etc.), je me suis arrêté a l’application de celte
méthode qui n’a rien d’exclusif, et qui joint kcet avantage d’être
a la fois sûre, non douloureuse et constamment suivie des m eil
leurs résultats.
Voici en quoi elle consiste :
1° Je fais appliquer pendant deux jours au moins des cata
plasmes émollients sur le gros orteil et prendre un bain de pied
prolongé pendant une grande heure le matin même de l’applica
tion, de manière k bien disposer les tissus altérés à l’action du
caustique ; 2° j'entoure ensuite le gros orteil d’une bandelette
de sparadrap agglutinât if fenétré d’une ouverture suffisante pour
laisser k nu les parties molles du bord malade et de la racine de
la matrice onguéale, et j ’y place une légère couche de pâte de
Vienne, que je laisse en con tact avec les tissus environ quinze ou
vingt minutes afin de permettre la formation d’une escarre qui
s’étende k toute l’épaisseur que je veux détruire ; 5° ce résultat
obtenu, l’orteil est de nouveau recouvert de cataplasmes émol
lients et le pied soumis k l’action des bains prolongés pendant
trois ou quatre jours pour hâter la chute de l’escarre ; A” aussi
tôt qu’elle commence k se détacher, on l'isole au moyen des
ciseaux ou du bistouri et on opère en même temps l’excision du
bord incarné de l’ongle qui, étant devenu membraniforme, per
met de pratiquer cette petite opération sans causer la moindre
douleur; 5° enfin, pour empêcher toute reproduction du bord de
l’ongle cl éviter ainsi toute chance de récidive, j’ai la précaution
île cautériser encore légèrement le fond de la rainure jusqu’à la
�racine, soit avec le caustique de Vienne, soit seulement avec le
perchlorure de fer solide, selon le cas.
La plaie qui résulte de ces diverses opérations est alors pan
sée simplement; elle se cicatrise assez promptement en dix ou
quinze jours au plus et se recouvre d'un tissu épidermique qui
augmente de densité et se cornéifie pour ainsi dire h la longue.
Ce procédé, comme on le voit, est fort simple, et son applica
tion faite avec soin met sûrement h l’abri de toute récidive en
détruisant les parties molles dans lesquelles le bord latéral de
l'ongle est comme enchâssé en arrière et en enlevant également
la partie incarnée de ce dernier, aussi bien que la matrice qui le
reproduit. Dans aucun cas il n'a donné lieu â des accidents fâ
cheux et il me parait surtout recommandable aux médecins des
corps de troupes qui ont toute la facilité d’en faire l'application
dans une infirmerie régimentaire.
Quand l’affection est légère, bornée seulement â la partie an
térieure de la rainure latérale de l’ongle, en général il sullit
d’exciser le bord incarné de l’ongle soulevé avec des pinces, et
de faire une seule cautérisation des chairs soit avec la pâte de
Vienne, le perchlorure de fer, ou l’alun calciné, que je mêle
d’habitude à de la charpie râpée, de façon â faire former croûte
avec l’escarre et â favoriser ainsi en dessous la production assez
rapide de la cicatrice. Le plus souvent, les malades commencent
à marcher le lendemain même de cette opération, et je n’ai
jamais constaté la moindre récidive après la reproduction de
l’ongle.
Tels sont les principes qui m’ont constamment dirigé dans
ma pratique, et dont je n’ai eu qu’à m’applaudir. Je joins à
l’appui l’analyse sommaire des neuf cas suivants, dans lesquels
l’affection à des degrés divers a été combattue efficacement par
cette méthode de traitement, et dont les malades qui m’ont été
présentés plusieurs mois après n’ont éprouvé aucune récidive.
P r e m iè r e o b se r v a t io n .
— Mabru, Jean, soldat au 24e de
25 ligne, d’une constitution affaiblie par de fréquentes atteintes de
fièvres en Algérie, est atteint depuis longtemps d’un ongle in
carné au gros orteil du pied gauche. L’angle externe de l’ongle
est comme recourbé en dedans et complètement recouvert de
chairs tuméfiées et fongueuses ; la marche étant très pénible, il
est envoyé à l’hôpital le 21 juin 1864 et couché salle 5, n° 12.
Cataplasmes émollients et péJiluves pendant les premiers
jours; en raison de l’affaiblissement général de la constitution,
le malade est en même temps soumis dès le principe a l’usage
des toniques (vin de quinquina et proto-iodure de fer). Le 27
juin, application des caustiques de Vienne. Le 30, nouvelle cau
térisation du sillon latéral après l’excision du bord incarné et
de l’escarre primitive. Cicatrisation complète de la plaie le 17
juillet.
— Durand, Jules, du 24e de ligne,
entré à I hôpital pour une bronchite chronique, le 5 mai 1866,
est placé ensuite salle 4, n° 8, pour y être traité d’un ongle in
carné, qui récidive fréquemment à la suite de longues marches
ou de promenades fatigantes et dont le malade désireardemment
être débarrassé.
L’affection siège au côté interne du gros orteil droit et parait
bornée à la partie antérieure du bord latéral qui présente une
fissure suppurante au fond de laquelle l’ongle est enfoncé et en
tretient un état d'ulcération sensiblement diminué déjà sous
l’influence d’un repos prolongé à l’hôpital. Néanmoins, le 12
août, on pratique la cautérisation après l’application préliminaire
des émollients et l’excision du bord incarné de l’ongle, et le ma
lade, auquel la médication générale est continuée (huile de foie
de morue, iodure de potassium), sort complètement guéri le 6
septembre.
D e u x iè m e o b s e r v a t io n .
T r o is iè m e o b se r v a t io n . — Verhaeghe, Alexandre, du 24* de
ligne, entre à l’hôpital, salle 4, n° 32, le 26 juillet 1864; il est
�— 26 —
atteint au gros orteil droit, d’un ongle incarné dont les deux
bords pénètrent a la fois dans les chairs. Application des émol
lients pendantdeux jours et cautérisation, le 28, du bord interne,
excision de l’escarre et de la portion iucarnée de l'ongle, le 1er
août, et application nouvelle du caustique dans la rainure laté
rale. Retour aux émollients le A et le 5, puis application du
caustique au bord externe. Pansement simple de la plaie interne
et fomentations émollientes de tout le pied. Le 10, cautérisa
tion des tissus sous-jacents avec le perchlorure de fer solide
mêlé a de la charpie râpée et pansement simple. Le 27, la
cicatrice est complète et le malade sort le A septembre parfaite
ment guéri; il lui est seulement recommandé de se ménager
dans la marche et d'envelopper son orteil pendant quelque temps
avec un linge huilé.
— Drin, Louis, infirmier militaire à
la 7e section, est depuis longtemps porteur d’un ongle incarné
au gros orteil, bord interne. Les résultats obtenus chez les pré
cédents malades le décident a se faire traiter pour celle affection
et il entre le 24 août â l’hôpital, salle 4, n° 35. Cautérisation le
20, inapplication du caustique, le 51, dans la rainuie latérale
pour détruire la matrice du bord incarné; cicatrisation achevée
le 18 septembre; le malade sort le 3 octobre en parfait état de
guérison.
Q u a t r iè m e o b s e r v a t io n .
— Salaüm, Pierre, ouvrier d’admi
nistration â la 5e section, en traitement â l'hôpital depuis le 5
septembre 1864, pour une affection vénérienne, est en même
temps porteur d'un ongle incarné au gros orteil droit, côté in
terne, dont il désire se guérir avant sa sortie. Le traitement spé
cifique étant presque achevé, il est placé, salle 5, n° 14, et le
lo octobre on fait l’application du caustique de Vienne, selon
les règles de la méthode. Cure radicale et sortie le 12 no
vembre.
C in q u iè m e o bserv a tio n '.
— Masabrol, Pierre, du 24° de ligne,
d’une bonne constitution, souffre d’un ongle incarné au gros
orteil du pied droit. Il y a longtemps, dit-il, qu’il ne marche
qu'avec une certaine difficulté ; mais c’est surtout a la suite de
promenades militaires qu’il éprouve des douleurs insupporta
bles. Il présente en effet au côté interne de l’orteil un bord ren
trant dans les chairs qui sont rouges, tuméfiées et suppurantes,
et le repli de la peau qui sert de base d’implantation â la racine
de l'ongle est lui-même enflammé et le siège d’un commence
ment d’ulcération. Le gros orteil et tout le côté interne du pied
sont aussi engorgés le jour de son envoi à l'hôpital, le 21 octobre,
au lendemain d'un exercice fatigant.
Le malade, placé salle 4, n° 33, est soumis aux applications
émollientes et prend des bains de pied pendant quatre jours;
sous l'influence de ces moyens et du repos dans la position
horizontale, le gonllement inllammatoire disparait, et on prati
que l’application du caustique sur les parties altérées le 26, en
l'étendant même au delà sur près de la moitié de la matrice de
l’ongle; on détache l’escarre, on excise la portion d'ongle in
carné et on cautérise de nouveau les tissus sous-jacents. La
cicatrisation s’est promptement faite; elle était achevée le 16
novembre, et le malade, parfaitement guéri, a pu sortir de l’hô
pital le 29.
S ix iè m e o b s e r v a t io n .
Giry, Jean, du 24e de ligne, entre
le 4 novembre 1864, salle 4, na 27, pour une légère incarnation
de l'ongle du gros orteil gauche. L’affection est bornée à la
partie antérieure du bord latéral libre de l'ongle. Néanmoins,
pour le mettre à l'abri de toute récidive, je me décide à
la cautérisation complète de tout le bord malade jusqu'à la
racine.
L’opération pratiquée, le 8 novembre, la cicatrisation était
obtenue le douzième jour et le malade a pu sortir le 29, en par
fait état de guérison.
S e p t iè m e o b s e r v a t io n . —
�28
H
o b s e r v a t io n . — Parage, fusilier au 8° de ligne, se
plaint depuis dix mois environ d’avoir un ongle qui s’enfonce
dans les chairs, et qui l’empêche de faire de longues marches. 11
est envoyé à l'hôpital le 15 décembre et couché salle 4, n. 35.
Il porte en effet au gros orteil droit un ongle incarné très con
vexe dont le bord latéral interne est fortement recourbé et en
foncé dans des chairs mollasses, fongueuses, et baignées par un
pus sanieux et parfois sanguinolent. Applications émollientes et
bains de pied peu .ant trois jours; cautérisation le 19; excision
du bord incarné le 22, et réapplication immédiate du caustique
dans le fond de la rainure qui lui sert de matrice jusqu’à la
racine en arrière. Pansements simples, ensuite développement
des bourgeons celluleux et vasculaires, répression au moyen du
perchlorure de fer solide, mêlé a une légère couche de charpie
râpée, et dès lors formation rapide d’une cicatrice qui est
achevée le 19 janvier et permet au malade de marcher sans la
moindre douleur. Néanmoins, la pulpe du gros orteil reste en
core tuméfiée, en raison de l’état inflammatoire assez vif dont il
a été le siège et des dispositions naturelles des tissus â rester
mous et humides; c'est pourquoi l’on continue l’usage des ré
solutifs et d'une compression méthodique pendant quelques
jours, et après sa sortie de l’hôpital, qui a lieu le 29, le malade
a la recommandation de conserver le gros orteil couvert d'un
morceau de linge. Depuis, la cicatrice s’est affermie et a pris
une consistance presque cornée, sans qu’il se soit reproduit au
cune nouvelle prédisposition a l’affection.
u itièm e
Jurisprudence P rofession nelle.
ACTION DES MÉDECINS POUR LE RECOUVREMENT DES HONORAIRES.
PRESCRIPTION. — RECONNAISSANCES DE DETTES.
Le Code Napoléon, pas plus que les lois spéciales, n’accorde
au médecin une action pour se faire payer de leurs honoraires.
— 29 —
Les lois romaines, au contraire (§§ Lcx de extraordinar. cognitionib.), et la coutume de Paris (art. 125) attribuaient en
termes formels aux médecins une action contre les particuliers
auxquels ils avaient donné leurs soins. Mais hâtons-nous d’ajou
ter que si le Code est moins explicite à cet égard, le principe
n’en est pas moins admis dans nos lois ; il suffit pour s’en con
vaincre de lire les dispositions de l’article 2101, qui déclarent
la créance du médecin privilégiée, et celles de l'article 2272 qui
limitent à une année la prescription de leur action pour leurs
visites, opérations et médicaments.
Il ne saurait donc y avoir de difficultés sérieuses sur ce point;
mais les deux dispositions que nous venons de rappeler, au con
traire, ont souvent donné lieu a des contestations.
Nous reviendrons plus tard sur les difficultés qui peuvent
nailreau sujet des privilèges édictées par l’art. 2101, et nous
allons brièvement examiner aujourd’hui les règles qui se ratta
chent à la prescription.
Nous chercherons moins, on le comprend, à exposer une
théorie savante et dogmatique, qu’a étudier au point de vue
pratique et spécial aux médecins la question de prescription en
matière d'honoraires.
Le point de départ de ces observations se trouve dans l’article
2272 du Code Napoléon, ainsi conçu: « L'action des médecins,
chirurgiens et apothicaires, pour leurs visites, opérations et
médicaments.... se prescrit par un an. »
L’ordonnance de commerce du mois de mars 1673, qui re
produisait presque identiquement l’ordonnance de 1512, accor
dait également une année aux médecins et chirurgiens pour in
tenter leurs actions.
Il faut d’abord se demander quel sera le point de départ de ce
délai.
Quelques auteurs et arrêts, notamment un arrêt de Limoges
du 3 juillet 1839, fixent le point de départ de la prescription au
jour même où le médecin a commencé ses visites :
�— 30 u Attendu, dit l’arrêt, que si l’on rapproche l’article 2272 de
« l’article 2274, qui porte que la prescription a lieu, quoiqu’il
« y ait continuation de services et qu'elle ne cesse de courir que
« dans le cas où il y a compte arrêté, obligation ou citation en
« justice, le rapprochement de ces dispositions conduit à penser
« que le point de départ de la prescription doit être fixé au jour
« même où le médecin a commencé à donner ses soins au ma
lt lade : que, d’ailleurs, cette opinion est concordante avec le
( principe général que la prescription commence à courir du
« jour où l’action est ouverte; car il est incontestable qu’en
« droit, le médecin ne soit fondé a exercer une action pour le
« paiement de chaque visite et du jour de chaque visite.... »
Cette doctrine, quelque bien fondée qu’elle puisse paraître au
premier examen, doit être, selon nous, absolument repoussée,
Elle repose, en effet, sur un principe inadmissible, à savoir, la
divisibilité de la créance du médecin pour les soins donnés dans
le cours d'une même maladie.
« On ne doit pas regarder, dit Pothier (Des oblig. , n° 681),
la créance d’un médecin ou d’un chirurgien, qui a eu soin d’un
malade pendant une maladie, comme composée d’autant de
créances séparées que le médecin a fait de pansements, mais
comme une seule et même créance qui n’a été consommée que
lorsque les soins du médecin ont été achevés, soit par la guéri
son ou la mort du malade qui ont mis tin 'a la maladie, et lorsque
le médecin ou le chirurgien ont été congédiés. »
La plupart des auteurs ont adopté ce raisonnement parfaite
ment juste. Nous citerons, entre autres, MM. Troplong, Duranton et Yazeille.
Une exception pourrait peut-être être soulevée dans le cas
d’une maladie chronique, dont la durée est illimitée et toujours
très-longue. Dans ce cas, il serait plus facile de soutenir que la
prescription court du jour de chaque visite, et il serait prudent
aux médecins de régler chaque année leur créance, et de faire
sinon solder leur compte, au moins le faire approuver.
— 31 —
Mais nous nous croyons autorisés, par la doctrine et la juris
prudence actuelles, a poser, en règle générale, que la prescrip
tion ne commence a courir que du jour de la dernière visite ou
du dernier pansement.
Examinons maintenant si ce délai fatal d’une année ne peut
pas être prolongé; en d’autres termes, si la prescription ne peut
pas être interrompue.
La prescription peut être interrompue:
1° Par une citation en justice, un commandement, une saisie
une citation en conciliation; enun mot, par toute demande en
justice ayant pour but de faire judiciairement constater la
créance du médecin contre son débiteur, pourvu que celte de
mande soit formée avant l’expiration de l’année, le fût-elle
d’ailleurs le dernier jour.
Nous pourrions longuement nous étendre sur ce dernier
moyen et ses nombreuses subdivisions ; mais, au point de vue
pratique, il nous suffit de l'indiquer.
2° Par la reconnaissance que le débiteur fait du droit de celui
contre lequel il prescrivait. (Art. 2248 C. N.)
Cette reconnaissance peut se réaliser de différentes manières,
soit expresses, soit tacites. En premier lieu, nous devons citer
la renonciation à la prescription acquise par le débiteur. Si on
ne peut pas renoncer à la prescription avant qu’elle soit accom
plie, il n’en est pas de même quand le délai est expiré ; le débi
teur, maître de ses droits et actions, a la faculté de renoncer a
opposer ce moyen d'une manière expresse, par une déclaration
écrite ou même verbale (la déclaration verbale sera constatée par
simple témoignage, s’il ne s’agit pas de plus de loO fr.), ou
même d'une façon moins explicite. Ce dernier mode de renon
ciation (renonciation tacite) résultera en général d’un fait qui
suppose Yabandon du droit, acquis. « Pour que les faits empor
tent renonciation, dit Merlin, il faut qu'il en résulte une volonté
manifeste de renoncer, c'est-à-dire que ces faits soient directe
ment et à tous égards contraires au droit et au privilège. »
�— 32 —
Il devient aisé à chacun d'apprécier dans les laits multiples
qui peuvent se présenter, mais qu'il serait impossible d’énu
mérer ou même de prévoir, si ce principe est applicable et
qu'elle conséquence il en peut tirer.
Occupons-nous maintenant de la reconnaissance proprement
dite. Elle diffère de la renonciation en ce que la renonciation
intervient après la prescription acquise, tandis que la reconnais
sance intervient avant que la prescription ne soit accomplie ;
mais les règles que nous avons indiquées sont applicables à
l'une et à l’autre. Ainsi, les lettres missives suffisent pour inter
rompre la prescription quand elles contiennent une reconnais
sance des droits du créancier.
De même : la mention de Bon et approuvé, mise par le débi
teur sur la note qui lui est présentée. La lettre par laquelle une
partie accuse la réception d’un compte a elle envoyé, promettant
de s’en occuper plus tard, etc.
Enfin la reconnaissance s induit de certains faits comme la
reconnaissance, par exemple, si le débiteur paye une partie de
sa dette, et il a été jugé qu’un payement fait à litre d'à-compte
est interruptif delà prescription Cassation, 29 janvier 1838) si
le débiteur donne un gage, etc.
La conséquence de la renonciation ou de la reconnaissance
est énorme, en ce que la nature de la créance se trouve modi
fiée et n’est plus prescriptible par un an. Or, ce moyen de pres
cription, quelque déloyal qu’il soit, est fréquemment employé
pour résister aux légitimes réclamations des médecins. Pour
obvier a cet inconvénient, il suffira donc, le plus souvent, de
faire, dans le délai légal, approuver le compte des visites ou
d’obtenir une lettre qui reconnaisse la dette. (Union Médicale
de Paris.)
L. G uerrier, avocat.
Le Comité de rédaction.
Typographie Arnaud, Cayer et
CIc, rue Saiut-Ferréol, 57,
Marseille.
HOPITAL DE LA CONCEPTION.
SERVICE DE M. VILLARD.
Endocardite ulcéreuse chez un homme atteint de syphilis
constitutionnelle.
Observation recueillit par M. T
Réflexions par M. V
r a st o u r ,
interne du service.
il l a r d .
Le nommé Louis Benoit, âgé de trente-deux ans, marin,
entre le 20 juin 1860 dans le service de M. le Dr Villard, à
l’hôpital de la Conception, salle Saint-Jean-Baptiste, n°9.
Cet homme, doué d'une bonne constitution, veûait du service
des vénériens, où il était entré le 26 mai pour un chancre induré
datant de trois semaines. Le chancre était cicatrisé, mais la peau
était le siège de nombreuses plaques cuivrées; des croûtes exis
taient dans les cheveux ; les ganglions inguinaux et cervicaux
étaient encore fortement engorgés. Il avait été pris subitement,
le 18 juin, dans le service des vénériens, d’une affection aiguë
que l’on crut être une pleuro-pneumonie du côté droit. Lors
qu il entra dans les salles de médecine ^20 juin), il portait, en
effet, un vésicatoire sur ce côté et était soumis au tartre stibié
a haute dose. Il avait une fièvre intense, une dyspnée considé
rable ; son faciès était légèrement cyanosé. Le malade présentait
en outre un peu de stupeur, et, bien que son intelligence parut
complètement intacte, il répondait lentement aux questions qui
lui étaient adressées. Tous ces phénomènes n’étaient pas en
rapport avec la lésion pulmonaire ; on ne trouvait, en etïet, qu’un
peu d’obscurité du son, et on ne percevait que quelques râles
sous-crépilants â la base du côté droit. La toux n’était pas in
tense; les crachats, peu abondants, présentaient parfois une
coloration rouge sans ressemblance avec les crachats rouillés de
la pneumonie. L’examen le plus minutieux des organes respira3
�toires lit découvrir dans le côté gauche un bruit de souffle pro
fond et quelques râles crépitants dans les tortes inspirations.
Le malade présentait donc des symptômes évidents de pneumo
nie. M. Villard prescrivit une saignée de 300 grammes, un vési
catoire sur le côté gauche, et lit continuer la même dose de
tartre stibié.
Le lendemain 21 juin, les phénomènes généraux n avaient
pas changé : la fièvre était aussi forte, la suffocation toujours
considérable ; le sang de la saignée ne présentait pas de couenne
inflammatoire. A l'auscultation, on ne percevait plus que quel
ques râles muqueux 'a grosses bulles à la base des deux côtés,
sans bruit de souffle; presque pas de matité; plus de crachats
rouges. En face de symptômes aussi insolites, qui indiquaient
plutôt une congestion pulmonaire qu’une hépatisation réelle,
M. Yillard examina le cœur. La main appuyée sur la région pré
cordiale était légèrement soulevée par des battemeuts précipités,
mais parfaitement réguliers, sans frémissement cataire. Par
rauscnltation, il était facile de constater un double bruit de
souffle ayant son maximum â la base : le premier était fort et
rude, le second était doux et s’entendait â peine. Il y avait par
conséquent, chez ce malade, rétrécissement et insuffisance de
l’orifice aortique ; pas de matité, pas de voussure thoracique.
Le pouls était plein, sans irrégularité, vibrant et précipité.
L'état général était toujours très-grave. Nous nous arrêtâmes
alors â l’existence probable d’une lésion profonde de la mem
brane interne du cœur, et nous diagnostiquâmes une endocardite
ulcéreuse. Nous devons faire observer que cet homme n'avait
jamais eu de rhumatisme, et que jamais antérieurement il n’avait
été atteint de maladie sérieuse, sauf quelques accès de fièvre
intermittente qu’il avait eus deux années auparavant. Notons
enfin qu’arrivé à cette période de sa maladie, cet homme n’avait
encore présenté aucun symptôme dn côté des voies digestives :
pas de ballonnement, pas de diarrhée, rien enfin qui dût porter
l’attention sur quelque affection fébrile à marche pernicieuse.
35 —
Le traitement fut le même, c’est-à-dire le tartre stibié à dose
rasorienne, et on appliqua un vésicatoire sur la région précor
diale.
Le 22, la fièvre et l'oppression sont toujours aussi fortes. Le
malade, obligé de rester assis, se plaint de violentes palpitations.
Vingt sangsues à l’anus, tartre stibié continué.
Le 25, le malade est pris de vomissements. La potion émétisée est remplacée par une potion avec 20 gouttes de teinture
de digitale.
Le 24, il y a un peu de délire ; le faciès prend une coloration
jaune bronzée. Dans la soirée, le malade est pris d’un frisson
violent qui dure plus de d<jux heures et se termine par la mort.
Autopsie faite vingt-quatre heures après. — La face est
d’un violet foncé. Il y a de l'œdème aux extrémités inférieures
jusqu’à la partie supérieure des cuisses. Le cadavre étant ré
clamé, nous sommes forcés d’ouvrir la cavité thoracique seule
ment, et avec de grandes précautions. Nous trouvons un épan
chement peu considérable dans les cavités pleurales. Pas trace
de tubercules. Les poumons sont fortement engoués à la base.
Le péricarde ne présente rien de particulier, sauf un peu de
sérosité, sans fausses membranes. Le cœur a à peu près son
volume ordinaire ; sa consistance n’offre rien d’anormal; sur
certains points, nous notons une couche assez épaisse de tissu
graisseux. Les cavités de l’organe, examinées avec soin, ne pré
sentent, au premier abord, aucune lésion importante; nous
trouvons seulement quelques caillots blanchâlies, résistants et
peu adhérents, se prolongeant dans les gros vaisseaux. L’endo
carde, légèrement épaissi et ramolli, est le siège d’une coloration
rouge générale. Pas de pus, pas de pseudo-membrane. Les
altérations les plus remarquables existent à l’orifice aortique.
Les valvules ventriculaires paraissent intactes : mais les valvules
sygmoïdes sont profondément altérées : l’une, très-amincie,
mais non perforée, offre sur sa face ventriculaire une ulcération
superficielle ayant environ 3 millimètres de diamètre ; la seconde
�— 36 —
est épaissie, couverte de nombreuses productions fibrineuses
molles et peu adhérentes ; déchiquetée sur ses bords, elle est
largement perforée dans sa partie centrale; la troisième enfin
présente dans son cul-de-sac auriculaire, au niveau de sou bord
adhérent, une ulcération à fond grisâtre de 6 millimètres de dia
mètre environ, ulcération qui parait s’étendre dans I épaisseur
de la cloison inter-ventiiculaire. Les bords de cette valvule sont,
comme ceux de la précédente, irréguliers, parsemés de nom
breuses granulations qui lui donnent l’aspect d’un chou-fleur
syphilitique.
Nous avons noté enfin, sur la membrane interne de l'oreillette
gauche, immédiatement au-dessus de la valvule bicuspide, une
petite ulcération sans caractères particuliers.
Réflexions par le D' Villard. — Cette observation m ’a paru
remarquable à plus d’un titre : par la rareté de la maladie, d'a
bord; puis, par l’ensemble des symptômes que nous avons
observés ; en troisième lieu, par les antécédents syphilitiques du
sujet; enfin, par les lésions cadavériques.
Je dois dire, tout d’abord, que je n’avais jamais observé un
seul fait d’endocardite ulcéreuse. Je ne connaissais, sur cette
importante maladie, que les savantes leçons faites en 1865, par
M. Hérard, â l’hôpital de Lariboisière (1), ainsi que deux remar
quables articles publiés par mon confrère et ami, le Dr Augustin
Fabre, dans l'Union médicale de la Provence (2). Ce fut mon
interne, M. Trastour, étudiant plein de mérite, qui me remit en
mémoire les travaux que je viens de citer. Je venais de diagnos
tiquer une endocardite, lorsque ce jeune homme me demanda
s’il n’y avait pas quelque rapport entre les phénomènes que
nous avions sous les yeux et ceux de l’endocardite ulcéreuse,
dont il avait lu aussi la description. La ressemblance, en eilet,
(1) Gazette des Hôpitaux, 13 et 15 juin 1865.
(2) Progrès récents et tendances nouvelles de la pathologie cardiaque , février
et mars 1866.
— 37 —
n’était pas douteuse : symptômes locaux et symptômes généraux
se rapportaient également à une plaie de l’organe central de la
circulation. Il était impossible, du reste, de rattacher les phéno
mènes que nous observions,soit à une hépatisation pulmonaire,
soit à une fièvre typhoïde, soit enfin à une fièvre pernicieuse.
Pendant quelques jours, il est vrai, les deux poumons avaient
été le siège d’une congestion, d’un véritable engouement; mais
ce n’était lâ qu’un effet résultant de 1 obstacle apporté â la cir
culation pulmonaire. Au surplus, les signes fournis par l’auscul
tation, sensibles la veille, étaient presque négatifs le lendemain.
Admettre l’existence d’une affection typhoïde, ce n’était pas
expliquer avec plus de succès les troubles de la circulation.
Restait enfin la pensée d’une fièvre pernicieuse. Mais comment
s’arrêtera une pareille probabilité, lorsque, nous l’avons dit, la
marche de la maladie a été essentiellement rapide et continue,
sans frissons au début, sans périodes a intermittences. Mon ma
lade avait bien eu, deux ans auparavant, des fièvres paludéennes;
mais il n’était rien resté, chez lui, de celte disposition fébrile
que conservent souvent pendant de longues années ceux qui ont
été atteints de ces fièvres miasmatiques. De plus, si cet homme
avait eu antérieurement des douleurs rhumatismales récentes
ou anciennes, j’aurais pu admettre une corrélation évidente en
tre ces douleurs et les phénomènes cardiaques qu’il a présentés
plus tard; mais, sur ce point, rien encore n’était admissible.
Bref, le malade a succombé peu de jours après le début de sa
maladie, et l’autopsie a pleinement confirmé notre diagnostic.
Cet homme, on s’en souvient, venait du service des vénériens,
où il était en traitement pour des accidents secondaires de la
syphilis. J’éloigne tout d’abord l’idéeque les remèdes spécifiques
(jui lui avaient été ordonnés, le mercure, entre autres, aient pu
avoir quelque influence sur la production de la maladie qui l a
emporté. J’ignore même si la cachexie mercurielle, soit qu elle
provienne d’un traitement hydrargyrique, soit qu’elle résulte de
conditions propres à ceux qui travaillent le mercure, peut doter-
�— 38 —
miner par elle seule des lésions cardiaques analogues à celles
que nous avons observées. Il n’en est pas moins vrai que l’in
fection syphilitique d’une part et de l’autre la manifestation subite
d’une maladie du çœur, ont dû, dans cette circonstance, fixer
mon attention d'une manière toute particulière. Je me suis donc
demandé s’il n’y avait eu, dans ces deux ordres de faits patho
logiques, qu’une simple coïncidence, ou bien s’il n’y avait pas
eu corrélation, sinon évidente, du moins probable, de cause à
effet. Si l’endocardite ulcéreuse avait été décrite comme un des
accidents possibles de la syphilis constitutionnelle, je n’hésite
rais pas à attribuer la même origine aux altérations que M. Trastour, mon interne, a décrites dans son observation ; mais, mal
gré tout le soin que j’ai mis dans mes recherches, je n’ai rien
trouvé qui ait pu me fortifier dans cette idée. Je n’ignore pas
que la syphilis viscérale a fourni h la science des faits nombreux
et des preuves incontestables. M. Lancereaux, dans une série
d’articles insérés dans la Gazette hebdomadaire (1864), a publié
sur ce sujet 17 observations signées des noms de MM. Ricord,
Rayer, Depaul, Gubler, Diétrich de Prague, Schutzenberger,
Yvaren, Wilks, Gibert, Virchow, Frerichs, Ch. Robin, Leudet,
G. I.agneau, Zambacco, etc. Toutes ces observations ont une
importance pratique du plus grand intérêt. Mais, je le répète,
les ulcérations du cœur susceptibles d’ê tre rattachées à la syphilis
n’ont pas encore été, que je sache, ni signalées, ni décrites.
Bien plus, suivant M. Lancereaux, les manifestations de la sy
philis sur l’organe central de la circulation atteignent rarement
les orifices et les valvules : c’est la substance musculaire qui
serait le siège de prédilection de ces altérations. De là, absence
presque constante de souffle, mais troubles dus h 1 impossibilité
plus ou moins grande de la contraction cardiaque, et, par con
séquent, symptômes progressifs de l’asvstolie. Il est facile de
voir que celte opinion est complètement opposée aux probabi
lités que j’émets en faveur de mon observation, puisque les
lésions décrites plus haut ont eu pour siège presque exclusif les
— 39 —
valvules aortiques. Est-ce une raison, cependant, pour rejeter
d’une manière absolue la corrélation que je me borne à signaler?
Je ne le pense pas; et, sans avoir la prétention de résoudre affir
mativement un sujet aussi difficile, je crois qu’il y a lieu, néan
moins, de lui accorder une sérieuse attention.
Les altérations viscérales de la syphilis, en général, sont con
sidérées comme des accidents tertiaires. M. Lancereaux les
groupe sous trois formes, qui sont : la forme inflammatoire in
terstitielle, la forme gommeuse, la forme cicatricielle. Quant
au cœur, ce sont des nodus ou tubercules que l’on y rencontre.
Je ne parlerai pas des végétations verruqueuses ou globuleuses
qui se développent quelquefois à la face interne des oreillettes,
et plus fréquemment sur les valvules sigmoïdes et auriculoventriculaires, végétations qui ont été très-bien étudiées par
Laënnec, et auxquelles Corvisart attribuait une origine véné
rienne. Celte opinion n’est plus admise aujourd'hui.
La forme ulcéreuse n'appartenant donc pas aux manifestations
tertiaires de la syphilis, je me suis demandé si l’endocardite sur
venue chez mon malade ne pourrait pas être considérée comme
un accident secondaire, au même titre que les ulcérations de la
bouche ou du nez, du vagin ou du rectum. 11 est vrai que les
lésions syphilitiques des muqueuses ont des caractères anato
miques et une symptomatologie qui prouvent leur spécificité.
Or, ces lésions, me répondra-t-on, ne sont rien moins que dé
montrées dans le tissu séreux. Mais, comme le dit Vidal de
Cassis, est-il nécessaire de forcer l’analogie pour arriver à ad
mettre la syphilis comme cause occasionnelle de certaines affec
tions dont le germe ou la prédisposition existait déjà? Dès-lors,
si mon observation n’a pas pour elle des preuves certaines, je
puis bien dire qu’elle repose au moins sur des probabilités d’une
assez grande valeur.
D’un autre côté, les lésions valvulaires constatées à l’autopsie
n’ont-elles pas présenté des caractères particuliers, qui, au point
de vue de la syphilis, méritent une attention toute spéciale ?
�— 40 —
Ces lésions se sont produites avec une grande rapidité; leur
nombre et leur étendue justifient pleinement la marche et la
terminaison prompte de la maladie ; enfin, leur forme et leur
aspect ont offert quelque chose qui n'est pas ordinaire. En effet,
les ulcérations qui ont été décrites sont larges déchiquetées,
circonscrites par des végétations pol vpi formes. L une de ces
ulcérations, après avoir perforé le cul-de-sac de la valvule, a
envahi le tissu musculaire de la cloison inter-ventriculaire ; et,
chose très-importante a noter,*c’est que, sur ce point, les bords
allongés de celte pelite plaie sont rouges, tandis que sa partie
centrale présente un aspect grisâtre. Eh bien! je le demande,
ces caractères multiples ressemblent-ils â ceux de l'endocardite
ulcéreuse simple? Depuis que cette autopsie a été faite sous mes
veux, j’ai lu quelques observations relatives a cette dernière
maladie; mais dans aucune je n’ai trouvé des altérations pareilles
à celles que j’ai consignées dans la mienne. J'aurais été bien
aise, je dois le dire ici, de pousser mes recherches cadavériques
beaucoup plus loin. C’est ainsi que le foie, les reins, le cer
veau, etc., auraient été sérieusement examinés. Peut-être
auiais-je rencontré, dans ces organes, soit des altérations plus
ou moins avancées, dues à l'infection syphilitique, soit quelquesunes de ces lésions secondaires dues à l'introduction dans le
torrent circulatoire des produits qui résultent de la destruction
de l'endocarde, substance granulo-graisseuse ramollie, dépôts
fibrineux, pus, etc. ; mais, le cadavre étant réclamé, j'ai dû me
borner â lui enlever le cœur (1) et â examiner ses poumons.
C’est tout ce que j’ai pu étudier sur un sujet aussi intéressant.
Autre chose encore : Les phénomènes généraux qui accom
pagnent l’endocardite ulcéreuse peuvent revêtir, d’après les
quelques auteurs qui ont écrit sur cette maladie, soit la forme
typhoïde, soit la forme pyohémique. Or. ceux que j’ai décrits
(1) La pièce anatomique a élè présentée à la Société impériale de Médecine
de Marseille, le 7 juillet 1866.
,
— 41 —
dans mon observation s’éloignent de beaucoup de la première et
ressemblent fort peu à la seconde. Il est facile d’en juger par la
description qu'en donne M. Hérard : « Dans la forme typhoïde,
dit ce savant médecin, on a noté une fièvre vive avec un pouls
souvent dicrote, un grand abattement, de la stupeur, de la
céphalalgie, du délire, la langue sèche, une soif vive, de la
diarrhée, du ballonnement du ventre, des sudamina, des pété
chies, le gonflement de la rate, le catarrhe bronchique, etc.... »
Reconnaissons de suite que les phénomènes généraux obser
vés chez mon malade n’appartiennent nullement â cette forme
typhoïde. Voyons s’il sera possible de les ranger sous la forme
pyohémique : « Cette forme, dit encore M. Hérard, rappelle
l’infection purulente. Outre la plupart des symptômes ci-dessus
énumérés, on voit se manifester des frissons violents. Ces fris
sons n’ont rien de régulier; ils se montrent tous les jours, quel
quefois deux fois par jour; ils sont suivis de chaleur, mais la
sueur est généralement peu abondante ; la dyspnée est très-vive
et souvent accompagnée de râles dans les poumons ; quelquefois
l’ictère existe ; le pouls acquiert une grande fréquence. Deux
phénomènes se montrent très-fréquemment : les vomissements
et la diarrhée. Ces phénomènes ont été quelquefois si prononcés,
que l’on a pu croire à un empoisonnement ou au choléra. »
Au premier abord, on dirait qu’il existe une certaine parenté
entre cette dernière description et celle qui a été donnée de
mon malade. C’est ainsi que la dyspnée, la phlegmasie pleuro
pulmonaire, la grande fréquence du pouls, le frisson unique que
nous avons noté dans la période terminale de la maladie, rap
prochent mon observation delà forme pyohémique; mais elle
s’en éloigne par l’absence de phénomènes typhoïdes communs
aux deux formes, par l’absence encore de ces frissons qui se
montrent tous les jours et qui sont suivis de chaleur et de sueur ;
par les vomissements et la diarrhée que l'on observe fréquem
ment; enfin, par la marche et la terminaison beaucoup plus ra
pides de la maladie : les premiers symptômes ont éclaté le
�— 42 —
18 juin, et la mort est arrivée le 24, c'est-à-dire six jours après.
L’on m’objectera peut-être que, si la durée de la maladie a été
aussi courte, c’est parce que les lésions cardiaques ont été beau
coup plus graves par leur multiplicité et leur étendue; dès-lors,
les phénomènes généraux n’ont pas eu le temps de se mani
fester avec les caractères que nous venons de faire connaître
d’après \1. Hérard. Eh bien ! c’est précisément parce que les
altérations valvulaires n’ont pas imprimé à l’état général de mon
malade soit la physionomie typhoïde, soit l’ensemble de la forme
pyohémique,que je suis porté à admettre l’influence d’une cause
particulière, d'une infection générale, en un mot, de la syphilis
constitutionnelle.
L'élude microscopique de ces intéressantes lésions aurait pu
et pourrait peut-être encore lever les difficultés que soulève
mon observation. À cet égard, je ne dois pas craindre d’avouer
que, si je n'ai pas poursuivi mes recherches dans cette voie,
c’est que mes connaissances en micrographie étant plutôt théo
riques que pratiques, il m’eût été difficile de résoudre seul un
pareil problème. Du reste, j’ai soumis la pièce anatomique à
plusieurs de mes collègues de Marseille : quelques-uns, armés
du microscope, n'ont pas trouvé dans cette pièce les éléments
histologiques propres à l'infection syphilitique; d’autres, en plus
grand nombre, ont accepté mon opinion, mais avec toutes les
réserves qu elle comporte.
M. Trousseau a dit avec raison, dans ses leçons cliniques,que
le diagnostic des affections organiques du cœur est une étude
plus intéressante qu'utile. Il n’est que trop vrai, en effet, que,
dans la grande majorité des cas, toute la science du médecin
s'arrête devant l’impossibilité de guérir le malade. Mais il est
toujours satisfaisant de pouvoir porter un diagnostic exact,
lorsque les symptômes que l’on observe appartiennent ’a diverses
altérations pathologiques. Nous savons tous combien il est diffi
cile, parfois, de déterminer avec certitude le siège ou la nature
d’une lésion cardiaque. Or, c’est précisément en raison de ces
— 43 —
difficultés qu’il importe de publier les faits que l’on a observés,
surtout lorsque leur rareté même devient un enseignement
pour tous.
Angine couenneuse et croup, bronchite diphthéritique ;
emploi réitéré des vomitifs, perchlorure de fer à l’inté
rieur ; guérison.
Henriette Champion, enfant lymphatique, âgée de trois ans,
ayant habituellement une bonne santé, est prise dans les pre
miers jours de l’année dernière d’un rhume peu intense auquel
les parents prêtent d’abord peu d’attention. Vers le milieu du
mois de janvier, l’indisposition de la petite Henriette prend un
caractère plus sérieux : la toux devient rauque, la respiration
gênée et sifflante, la fièvre se déclare. Ces accidents devenant
de plus en plus intenses, les parents conduisent leur enfant chez
un officier de santé qui diagnostique un croup, juge la trachéo
tomie urgente et me renvoie la malade. Je vois pour la première
fois cette enfant le 27 janvier, à 3 heures de l’après-midi.
La jeune Henriette est à ce moment dans un état des plus
alarmants : faciès pâle et bouffi, lèvres cyanosées, suffocation
extrême avec dépression du creux épigastrique, sifflement laryn
gien très prononcé, respiration bruyante et des plus anxieuses;
la toux est rauque, voilée et amène dans la bouche des crachats
que je ne peux voir, car l’enfant les avale au lieu de les rejeter
à l’extérieur; les ganglions sous-maxillaires sont très engorgés;
la gorge est tapissée presque complètement de fausses membra
nes grisâtres; le pouls esta 130 pulsations.
Cet ensemble de symptômes ne permettait pas le doute : il
y avait évidemment chez la petite Champion angine couenneuse
et croup. La trachéotomie me parut indispensable; mais ne pou
vant opérer sur le champ la malade, je prescrivis la potion vomi
tive suivante : larlre stibié cinq centigrammes, sirop d'ipé-
�44 —
cacuanha trente grammes, eau distillée 200 grammes (à
prendre en trois fois jusqu’il effet vomitif); je recommandai en
outre aux parents de projeter toutes les heures dans le fond de la
gorge une grande quantité d’alun en poudre. J’avais vu relatées
quelques jours auparavant dans l'Union Médicale plusieurs
observations de croup traité avec succès par l’emploi du perchlorure de fer à l'intérieur; a tout hasard je dis à Mme Cham
pion de mettre dans un verre d’eau 10 gouttes de perchlorure
de fer et de faire prendre h l’enfant tous les quarts d’heure quel
ques gorgées de cette eau.
Je revois la mnlade dans la soirée, a 6 heures d’abord, puis a
10 heures. Le vomitif a amené d’abondantes matières glaireuses,
parmi lesquelles je trouve de nombreuses plaques diphthéritiquesd’un blanc grisâtre. Cinq applications d’alun ont été faites,
presque toutes suivies de vomissements, De plus, l’enfant a bu
près de deux verres d'eau contenant chacun 10 gouttes de per
chlorure de fer. Sous l’inlluence de cette médication, un mieux
sensible s'est opéré chez ma petite malade; la physionomie
est assez calme, l’œil est bon, les lèvres sont roses: il y a très
peu d'écoulement nasal; la suffocation a diminué, le sifflement
laryngien est beaucoup moins fort. A l’a uscultation, je perçois
un murmure vésiculaire affaibli et de gros râles sibilants et ron
flants dans les deux côtés de la poitrine; pouls â 126 pulsations;
les amygdales sont plus développées, mais les fausses membra
nes qui les recouvrent ne sont pas plus abondantes. En pré
sence du mieux qui s’est opéré depuis quelques heures, je
rejette, pour le moment, la pensée de la trachéotomie.
Un vomitif pour le lendemain matin et au besoin pour la nuit:
alun en poudre toutes les deux heures dans le fond de la gorge;
15 gouttes de perchlorure de fer dans un verre d’eau (prendre
tous les quarts d heure trois cuillerées â houche de ce mélange,
suivies de quelques gorgées de lait).
28 janvier. Depuis la veille, cinq applications d’alun ont été
faites : la nuit a été calme ; il y a eu du sommeil et pas d’accès
de suffocation ; aussi le vomitif n’a-l-il été administré que ce
matin, A la suite de la potion émélisée, Tentant a rejeté des ma
tières moins abondantes que la veille et composées de mucosités
parmi lesquelles je ne trouve plus trace de fausses mem
branes. La petite malade a pris depuis hier soir un verre entier
d'eau additionnée de 15 gouttes de perchlorure de fer. La res
piration est moins sifflante, mais elle est encore très bruyante;
la voix est toujours voilée, mais moins rauque; pouls faible et
â 126 pulsations ; physionomie intelligente. Henriette suit de
l'œ il tout ce qu’on fait autour d’elle et elle obéit avec une doci
lité parfaite. Pas d’écoulement nasal.
Alun toutes les deux heures; vomitif au besoin ; 20 gouttes
de perchlorure de fer dans un verre d’eau (à prendre ut suprà) ;
un bouillon au milieu du jour.
Le soir, à 6 heures, je trouvai ma malade beaucoup plus
fatiguée que le matin; pouls â 160 pulsations; respiration
anxieuse, rude, sifflante ; abattement, inquiétude; l enfant n’a
pas voulu avaler une seule goutte de bouillon; on a pu cepen
dant lui faire prendre, depuis le matin, près d’un verre d’eau
avec 20 gouttes de perchlorure de fer; quatre applications
d’alun ont été faites; un vomitif a été pris, lequel a amené une
abondante expectoration de mucosités verdâtres mélangées de
fausses membranes ; la gorge n’est pas plus prise; pas d'écoule
ment nasal ; â l’auscultation, murmure vésiculaire affaibli et sif
flant, râles nombreux à grosses bulles. Cette aggravation de symp
tômes et surtout la nature des crachats composés de mucosités
mêlées défaussés membranes,— jusqu’à ce moment les plaques
diphthéritiques, lorsque je les avais rencontrées, avaient été
complètement séparées des mucosités,— me firent penser que le
croup s’était compliqué d’une bronchite pseudo-membraneuse,
complication des plus fâcheuses, puisqu’elle nous enlevait pres
que complètement la chance suprême d une opération.
Un nouveau vomitif; alun toutes les deux heures; 20 gouttes
de perchlorure de fer dans un verre d’eau (donner chaque quart
�46 —
d’heure, en alternant, tantôt deux cuillerées de ce liquide, tan
tôt deux cuillerées de bouillon.)
A 11 heures et demie, la petite malade dormait d’un assez
bon sommeil ; la respiration était moins gênée et moins
bruyante; pouls à 148 pulsations; le vomitif avait amené une
expectoration semblable à celle que j'avais observée a 6 heures ;
l’enfant avait pris un demi-verre d’eau au perchlorure de fer;
cependant le creux épigastrique était fortement déprimé et le
réveil de l’enfant, dont je fus témoin, fut accompagné de beau
coup d’anxiété et d'inquiétude.
Alun, perchlorure de fer et bouillon ut stiprà; vomitif au be
soin.
29 janvier. L’enfant a bien dormi; on n’a pas eu besoin de
recourir au vomitif; la petite malade à pris depuis hier un verre
entier d’eau avec 20 gouttes de perchlorure de fer; la physio
nomie est redevenue intelligente, gracieuse même; l’anxiété a
disparu ; le creux épigastrique est moins déprimé ; pouls a 120
pulsations ; les ganglions cervicaux sont moins engorgés et la
gorge est plus libre; constipation.
Un vomitif; alun toutes les deux heures; 20 gouttes de per
chlorure de fer dans un verre d’eau ; bouillon; un lavement
huileux dans la journée.
A ma visite du soir, les parents me montrent une cuvette pres
que pleine de crachats muqueux et pseudo-membraneux expec
torés à la suite du vomitif du matin et pendant tout le jour;
l’enfant a pris encore un verre d’eau perchlorurée ; il y a eu un
peu de sommeil,et dans la journée la petite malade s’est amusée
assez volontiers ; l’appétit revient; la toux est plus claire ; râles
moins nombreux dans la poitrine; pouls â 124 pulsations ; deux
selles liquides.
Un vomitif ; alun ; 25 gouttes de perchlorure de fer dans un
verre d’eau; bouillon.
30 janvier, 9 heures du matin. Pendant la nuit, la suflocation
a reparu et les parents ont donné immédiatement un nouvean
vomitif ; abondante expectoration muqueuse et diphthéritique ;
les fausses membranes sont larges et épaisses ; au moment où
je vois la malade, îe regard est bon, la respiration n’est plus
sifflante, les amygdales et le pharynx sont en grande partie dé
gagés ; le pouls est encore â 130 pulsations.
Un vomitif ; ut suprà.
50 janvier, 7 heures du soir. Les matières expectorées â la
suite du vomitif du matin contiennent moins de plaques diphthéritiques; elles sont plus franchement catarrhales; pouls à 120
pulsations; la gorge ne contient presque plus de fausses mem
branes; la toux est plus claire et la voix presque naturelle; â
l’auscultation, on perçoit un murmure vésiculaire plus fort et
plus moelleux que les jours précédents, mais encore mélangé
de quelques râles ; l’enfant demande à manger.
Alun : 25 gouttes de perchlorure de fer; bouillon ; vomitif
au besoin.
La suite au prochain numéro.
I)r S eux f il s .
Intérêts Professionnels.
La Gazette Médicale de Lyon (numéro du 16 novembre 1866,
page 525) nous donne connaissance d’un nouveau projet d’orga
nisation du service médical des sociétés de secours mutuels.
Deux faits essentiels paraissent dominer l'économie de ce
projet :
1° La division de la ville en sections, avec des émoluments
fixés â 1500 fr. par chaque médecin, nommé pour 5 ans;
2° La nomination d’une commission mixte composée des pré
sidents des sociétés et des docteurs en médecine, appelés à dé
cider toutes les questions intéressant lesdites sociétés, et même
à désigner les médecins pour chaque période de 5 années.
Cette nouvelle organisation nous parait renfermer des clé
ments de succès incontestable, et depuis longtemps on cherche
�h Marseille à établir une eutente pareille entre le Corps Médical
et le Grand Conseil des sociétés de secours mutuels.
Néanmoins, il est surtout à remarquer que de toutes parts les
réclamations des associations locales signalent, en premier lieu,
la tendance fâcheuse des sociétés de prévoyance à admettre dans
leur sein des familles qui jouissent d’une aisance parfaitement
établie, et qui profitent du bénéfice du décret de 1852, spécia
lement consacré à la classe ouvrière, le tout au préjudice le
plus manifeste du corps médical.
Nous sommes heureux d’informer nos confrères que la com
mission administrative de la Société locale des Bouches-duRhône s’occupe activement de l'étude de celte question impor
tante qui sera comprise dans un travail d’ensemble prochaine
ment communiqué, et qui appellera l'attention de l’autorité
sur les intérêts professionnels si souvent sacrifiés.
Dr M it t r e .
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
La Commission organisatrice du Congrès médical internationnal qui doit s’ouvrir â Paris, le 16 août prochain, a choisi
pour ses Correspondants délégués à Marseille, MM. Coste,
Seux et Fabre. Les médecins qui désirent adhérer au Congrès,
doivent en prévenir l’un de ces honorables confrères. Nous ne
doutons pas que Je corps médical de Marseille ne donne des
preuves nombreases de sympathie à cette grande œuvre scienti
fique.
MM. Carrier et Roherty ont été nommés administrateurs des
hôpitaux civils de Marseille.
M. Fabre est nommé professeur suppléant aux chaires de
clinique et de pathologie interne.
Le Comité de rédaction.
Marseille. — Tjjj. Arnaud, Cayer el Comp., rue Saiat-t'erréol, 57.
Compte-rendu trimestriel des séances administratives.
nu 4 ja n v ier 1867. — P r é sid e n c e d e M. S e u x .
Acte d’adhésion de M. Rougier-Garagnon, docteur en méde
cine, à Marseille.
Plusieurs faits d exercice illégal delà médecine sont signalés
au Conseil par MM. Mittre et Verne. M. le Président et M. le
Secrétaire prennent bonne note de ces faits, et promettent de
les porter à la connaissance de M. le Procureur impérial.
Pour prouver une fois de plus l’influence morale que I asso
ciation exerce sur ceux qui se livrent illégalement à l’exercice de
la médecine, M. le Président annonce que les Sœurs de SaintVincent-de-Paul, signalées plusieurs fois et tout récemment en
core a l’auioiilé ecclésiastique, ont pris l'engagement de ne
plus traiter de malades et de ne plus délivrer de remèdes.
Dans le cas où les Sœurs provoqueraient de nouvelles plaintes,
de la part du corps médical, il n’y aurait qu’a en informer la
Supérieure générale qui est dans l’intention de ne plus tolérer
des abus de celte nature.
Le Conseil fait appel à tous les membres de notre Société
locale pour assurer l’existence du journal l'Union .Verticale de
la Provence. 11 regrette (pie tous les médecins faisant partie de
notre association départementale ne soient pas abonnés à cette
feuille scientifique et professionnelle. Les trais que nécessite la
publication du journal ayant été jusqu’ici au dessus des res
sources que donnent les abonnements, il serait à désirer qu’une
souscription volontaire permit de donner â cette publication
une étendue plus large et une existence plus assurée. Déjà plu
sieurs membres du bureau se sont fait inscrire pour diverses
4
S éa n c e
�— oO —
sommes; si vingt-cinq collègues seulement voulaient participer
a celte souscription pour la minime somme de 20 francs, le but
serait facilement atteint.
M. le Président soumet ensuite au Conseil un mémoire qui
lui a été adressé par le L)r Blondon de Besançon. Ce confrère,
ayant donné* ses soins pendant cinq ans a un riche malade,
atteint de paralysie de la vessie, avait demandé pour ses hono
raires la somme de trente mille francs environ. Le Tribunal, qui
avait été saisi de celte affaire n’av^it alloué au Dr Blondon qu'une
somme bien inférieure a celle qui lui était due. Cet honorable
confrère s’esl alors adressé à diverses sociétés locales, leur sou
mettant une série de questions qui doivent servir ses intérêts
dans l’appel qu’il a interjeté. Le Conseil de notre S o c ié té 1 a
examiné avec le plus grand soin et la plus grande impartialité
toutes ces questions auxquelles il a répondu de manière a don
ner gain de cause à la demande bien légitime du l)r Blondon.
SÉANCE DU 7 FEVRIER
1867. ---- PRÉSIDENCE DE M. S e UX.
Acte d’adhésion de M. Fortuné Viguier, docteur en médecine
à Marseille.
Le travail de M. Mittre sur l'assistance médicale des indi
gents dans les villes et les campagnes, lu dans la dernière
Assemblée générale de notre Société I " décembre 1866) avait
été renvoyé a une commission composée de MM. Chapplain,
Fabre, Verne et Mittre. M. le Président invite les membres de
celte commission a se réunir au plus tôt, afin que le rapport qui
sera soumis au Conseil soit renvoyé à M. Amédée Latour
avant la première Assemblée générale qui doit avoir lieu à
Paris, le 28 avril prochain.
M. M it t r e . — Le sujet que j’ai traité ne répond pas d’une
manière précise a la circulaire du Conseil général ; il serait donc
convenable de reprendre ce travail et de le diviser en deux
parties.
La première serait consacrée à l'assistance médicale dans les
campagnes, question posée aux sociétés départementales par le
Conseil général ; la seconde traiterait de l’assistance médicale
dans les villes et spécialement dans la nôtre où il y a tant d’abus
a signaler, tarit d’améliorations a demander. Cette étude très
large et par cela même très complexe est bien digne assurément
de fixer l’attention de l’Assemblée générale; mais pour nous,
les conséquences d'un pareil travail ne me paraissent pas avoir
la même importance. En effet, l’assistance dans les campagnes
n’olfre rien de particulier à signaler dans notre département.
Toutes les localités sont pourvues de un ou plusieurs médecins.
Nous pourrions donc répondre que nous n’avons pas d’obsertious à présenter à ce sujet.
Il n’en est plus de même de l’assistance médicale dans notre
ville où le corps médical peut revendiquera bon droit de larges
améliorations. Ici, le travail dont il est question serait tout a
fait en dehors du sujet proposé par le Conseil général ; il n au
rait d autre but que de défendre les intérêts et la dignité du
corps médical marseillais devant nos autorités locales et les di
verses administrations auxquelles sont attachés bon nombre de
médecins. Le moment est venu, ajoute M. Mittre, où nous de
vons demander des réformes ou loutau moins des améliorations
convenables. Et d’abord, pour ne parler que d’un sujet qui inté
resse ceux de nos collègues qui occupent des emplois salariés,
notre Société ne pourrait-elle pas signaler à M. le Préfet ou à
M. le Maire le chiffre minime des émoluments qui sont alloués
aux médecins qui remplissent des fonctions publiques? Partout
les positions médicales officielles sont convenablement rétri
buées; Marseille n’est pas, à ce point de vue, à la même hauteur.
Autre question: La Commission administrative n’agirait-elle
pas sagement en faisant observer à qui de droit, «pie le favori
tisme appelle presque toujours à des emplois vacants ou nou
veaux des médecins qui déjà sont assez privilégiés pour occuper
un nombre de places un peu trop considérable? Ce serait, à mon
�52
avis et de l'avis rie beaucoup de nos collègues, le moyen le pins
efficace pour mettre un terme à de déplorables abus. La faveur
est assurément un superbe privilège; mais elle est d'autant plus
digne qu elle est plus modérée.
En appelant l'attention du Conseil sur des faits de cette na
ture, je répète que le moment est venu pour l’Association de
marcher dans une voie plus libérale et plus démocratique. Il
importe de répondre aux dénégations qui nous sont adressées,
à ceux qui prétendent que l’Association ne fait rien ou pas
grandchose, que les intérêts professionnels sont pour elle un
sujet de constante préoccupation.
Je suis certain qu'eu agissant ainsi nous obtiendrons l’assen
timent général. Je termine en formulant le vœu qu'à l'avenir
lorsqu’une place sera vacante dans une administration, le Con
seil soumette aux autorités une liste de présentation.
Tel est l’ensemble du travail que je me propose de faire con
naître prochainement à la Commission administrative.
Après quelques observations présentées par MM. Seux, Pirondi et Villard, le Conseil adopte la proposition de M. M ittre.
—
S éance du 7
m ars
-
1867. — Présidence de M. S eux.
Acte d’adhésion de M. Isaac. Joseph-Henri, docteur en méde
cineà Marseille.
M. le Président donne lecture d’une lettre circulaire de
M. Armand, président du Comité départemental des Bouchesdu-Rhône, invitant la Société locale des médecins du départe
ment à souscrire pour faciliter la visite de l’Exposition à un
certain nombre de contre-maîtres, cultivateurs et ouvriers des
Bouches-du Rhône.
Le Conseil, exprimant ses regrets de ne pouvoir souscrire à
une pensée aussi généreuse que populaire et patriotique, a dé
cidé qu’il y avait lieu de répondre à cette circulaire que les sta
tuts de notre Association s’opposent à toute désignation de
53
fonds étrangère au but indiqué par nos réglem ents; mais que
cependant, il sera donné avis à tous les membres de la Société de
la demande faite par M. Armand, les invitant à faire parvenir
au secrétariat de la Chambre de Commerce, les sommes qu’ils
seraient dans l’intention de souscrire. A cette effet, une note
sera insérée dans le prochain numéro de YUnion Médicale.
M. le président annonce que le Comité de publication du
journal a décidé que le prix de l’abonnement à Y Union médicale
sera élevé de 2 francs ; c’est un droit qui appartient au Comité
de rédaction, sauf toutefois l’approbation du Conseil. Du reste,
dans le principe, l’Assemblée générale avait fixé le prix à 6 fr.;
e( si plus tard ce prix a été diminué, ce n’a été que pour encou
rager cette publication toute récente. Cette proposition est
adoptée.
M. le président demande si le Conseil ne serait pas dans l’in
tention de s’occuper d'un nouveau tarif des honoraires des m é
decins. Le Comité médical des Bouches-du-Rhône a publié, il
est vrai, un tarif il y a quelques années; mais ce travail qui a
rendu déjà d’excellents services, présente des lacunes qu’il se
rait important de combler et des exagérations qu’il serait conve
nable de corriger. Je pense donc, dit M. Seux, que dans le cou
rant de l’année le Conseil pourrait s’occuper de cette question,
de concert avec le Comité médical qui a pris l’initiative. Celte
proposition est jugée excellente ; le Conseil l’adopte à l’unani
mité.
Un des membres du bureau appelle l'attention du Conseil sur
l'opportunité de dem andera l’autorité supérieure la révision des
listes des docteurs, officiers de sauté, pharmaciens, e tc ., etc.
Celte révision est d’autant plus urgente qu’elle n’a pas été faite
depuis plusieurs années. Le nombre toujours croissant des doc
teurs en médecine et des officiers de santé a amené dans les in
dicateurs une certaine confusion de titres qu’il serait convena
ble de faire disparaître, en demandant que tous les m em bres du
Corps médical soient rangés dans des listes respectives et olli-
-
�—
eiellement publiées, ("es lisiez seraient ensuite com m uniquées
par les soins de l’Association à ceux qui impriment et publient
les indicateurs marseillais.
Le Conseil adopte cette proposition a laquelle il sera donné
suite prochainement.
Le secrétaire, D1 Vùllard .
Angine couenneuse et croup, bronchite diphthéritique ;
emploi réitéré des vomitifs, perchlorure de fer à l’inté
rieur ; guérison.
Suite et pu.
ôl janvier. Depuis la veille, l’enfant a pris encore deux vomi
tifs: les matières expectorées sont moins abondantes et contien
nent peu de fausses m em branes ; pouls à 128 pulsations; l’en
gorgement des ganglions sous-m axillaires a considérablement
diminué : la physionomie est bonne, les lèvres sont roses, le nez
est sec.
Alun ; 15 gouttes de perchlorure de fer ; deux soupes et deux
bouillons; eau rougie : vomitif au besoin.
1"février. Bon sommeil ; regard excellent ; à l’auscultation
le m urm ure vésiculaire est très pur, a peine quelques râles à
grosses b>:Iles à la base de la poitrine : pouls a I2 i pulsations ;
l’enfant n’a plus eu besoin de vomitif depuis la veille.
Alun; 10 gouttes de perchlorure de fer, repas léger; eau
rougie.
2 février. Les amygdales sont encore très grosses, mais il n’v
a plus de traces de fausses membranes sur ees glandes non plus
que sur le voile du palais et le pharynx; très bon som m eil; la
malade est très contente; pouls à II 6 pulsations.
5 gouttes de perchlorure de fer.
5 février. M urmure vésiculaire très pur à droite et à gauche;
bon appétit ; pouls à 120 pulsations .b* prescris une alimenta -
55
— -
lion substantielle et je ne revois plus b: malade que le 10 fé
vrier. A cette époque les amygdales sont encore assez grosses
et le pouls est a 120 pulsations ; mais l'état général est excel
lent, il n ’y a plus ni toux, ni expectoration d ’aucune sorte, la
voix est très claire.
A la fin du mois de mars, les parents m’am ènent leur fille;
cette enfant est parfaitement guérie et elle ne conserve comme
souvenir de l’affreuse maladie à laquelle elle a échappé qu’un
peu d’hypertrophie des amygdales.
Malgré le nombre et l’énergie des vomitifs employés chez la
petite Champion, nous ne croyons pas qu’il faille rapportera
eux seuls tout l’honneur de la guérison. Combien, en effet, ne
voit-on pas de croups, de croups même moins sérieux que celui
de notre malade, dans lesquels l’emploi répété des vomitifs ne
peut prévenir une terminaison fatale! Dans le cas que nous ve
nons de rapporter en grands détails, le perchlorure de fer a été
adm inistré h la dose de I gramm e, 2 gramm es, 2 grammes 50
ceiilig. dans les 24 heures; pour nous, ce médicament est venu
puissam m eut en aide aux potions vomitives et aux applications
d’alun.
L’emploi du perchlorure de fer est d'ailleurs très rationnel.
Q ifobservc-l-on, en effet, dans l’angine couenneuse et le croup?
Trois faits principaux d’où résultent trois indications capitales :
1° Obstacle m atériel à la libre entrée de l’air dans les pou
mons, par le fait de la présence des fausses membranes dans
l’arrière-gorge et le larynx ; il faut faire disparaître cet obstacle.
2. Disposition générale en vertu de laquelle les fausses mem
branes se reproduisent avec la plus grande rapidité ; il faut dé
truire cette disposition générale.
5. Affaiblissement extrêm e de toute l'économ ie: il faut rele
ver les forces vitales.
Le perchlorure de fer remplit ces trois indications.
Administré à l’intérieur a l’étal de solution, â la dose de 10 à
50 gouttes dans un verre d’eau,— l enfant buvant chaque quart
�56 d’heure quelques gorgées de ce liquide — il baigne fréquem
ment les parties malades et par le tait seul de son passage dans
le pharynx au moment de la déglutition, il les modifie de la m a
nière la plus heureuse sans fatiguer aucunement le malade.
Mais, dira-t on, vous n’agissez ainsi que sur le pharynx! c’est
vrai ; mais remarquez en première ligne qu'en débarrassant
barrière gorge , vous diminuez singulièrement l'obstacle qui
s'oppose à l’entrée de l’air dans la poitrine. Considérez ensuite
que l'origine du mal n’est pas dans la gorge et que la diphlhérie
est une maladie générale contre laquelle le perchlorure de fer ne
parait pas sans action.
En effet, ce rémède,une fois absorbé, passe dans la masse du
sang et, comme tous les astringents, il épaissit le liquide nour
ricier, le rend plus compacte et conséquemment moins apte a
laisser passer h travers les vaisseaux sanguins ce sérum parti
culier qui plus tard serait devenu de la diphlhérie. Car, rem arquons-le bieu, dans une maladie comme le croup, ce qu’il faut
se proposer — au moins en principe — ce n'est pas de rendre
le sang plus ditlluent afin de dissoudre les fausses membranes.
Dans la masse du sang, ces dernières n’existent pas ; elles se
forment consécutivement, en dehors des vaisseaux, après la
transsudation à travers les canaux sanguins d’une partie du
liquide nourricier. Si donc on parvient à épaissir le sang de
façon a diminuer la quantité de sérum qui passe a travers les
vaisseaux, on doit opposer un obstacle sérieux à la formation
des fausses membranes. Nous ne pouvons sans contredit affir
mer que celte idée qui nous parait bonne en théorie soit infail
lible en pratique; mais, du moins rien ne peut nous faire croire
que le perchlorure de fer n’agisse pas de cette façon; en tout
cas, il ne peut y avoir aucun inconvénient à administrer ce
remède à l’intérieur, attendu qu’on peut l’employer concurrem
ment avec les vomitifs, l’alun et les moyens locaux les plus
énergiques.
Mais le perchlorure de 1er n'est pas seulement un astringent,
— 57 c’est encore un tonique; en raison de cette propriété précieuse,
nous pouvons combattre avec avantage, à l aided ece rem ède,
la faiblesse extrême qui accompagne si souvent le croup.
Astringent modificateur a l’extérieur, astringent coagulant
du sang h l’intérieur, tonique, ce médicament parait donc con
venir plus que tout autre dans la terrible maladie qui effraie a si
bon droit les mères et les praticiens. M aintenant, faut-il con
clure de ce qui précède que le perchlorure de fer soit l’antidote
de la diphlhérie? Non certes; mais reconnaissons au moins que
ce remède est un puissant moyen thérapeutique qui a rendu et
qui peut rendre de véritables services dans le croup et l’angine
couenneuse.
Dr S eux fils.
C hronique M ensuelle (I).
Avec la nouvelle année a commencé une nouvelle constitu
tion médicale. L’hiver peu rigoureux que nous venons de tra
verser, car il est a peu près fini, n ’a pas été très m eurtrier, et
l’on peut dire que Marseille a reconquis, cette année, sa place
parmi les villes a tem pérature douce. Je connais bon nombre
d’étrangers, émigrant vers Nice, qui ont établi ici leur quartier
d’hiver. A Paris, au contraire, si nous en croyons les journaux,
un vent des plus froids a régné pendant les derniers jours de
février, comme si Borée eût voulu balayer les folies de ce vieux
diable interm ittent, qu'on nomme le Carnaval. Aussi se plainton de la grippe, comme nous le faisons nous-même. Bronchites,
corysas, conjonctivites, telles ont été les affections les plus fré
quentes; on peut y ajouter des cas nombreux de fièvre catar(I) Cette Chronique, arrivée trop tard pour paraître en mars, ne perdra
rien de son Intérêt en étant publiée dans ce numéro.
(Note de la licdaction.
�rhale, ayant une grande analogie, et nous croyons que c'est la
même chose, avec ce que Graves a décrit sous le nom d’/n fluenza. Mais à ces maladies, en général bénignes, sont venus
se joindre plusieurs cas de croup, ainsique nous avons pu le
constater dans la clientèle de la plupart de nos confrères ou
dans la nôtre. Ces angines diphthéritiques avaient une marche
lente et une terminaison le plus souvent funeste.
Les affections éruptives encore assez nombreuses, mais limi
tées dans certains points de la ville, n’ont pas revêtu le carac
tère épidémique grave. En somme, le bilan de la santé publique
est des plus rassurants, on pourrait s’en assurer en parcourant
les registres des hôpitaux.
— A l'Hôtel-Dieu la pourriture d'hôpital s’est montrée dans
un des services de chirurgie, et a semblé, sans prendre une
grande extension, vouloir se fixer dans une salle, pour long
temps. Les désinfectants locaux sont venus en aide ou cautère
actuel pour combattre cette complication si lâcheuse des plaies,
mais elle a résisté à tous les moyens de traitem ent. C’est un
fait curieux et digne d’être noté, que le retour périodiquement
annuel de cette maladie. L’Hôtel-Dieu semble pourtant aujourd hui dans de bonnes conditions d'aération, de propreté et d’en
tretien, et nous ne pouvons attribuer la cause de celte affection,
éminemment contagieuse qu'à un contagiura apporté dans les
salles par un blessé. Un jour, espérons-le! l'hygiène fera jus
tice de la nombreuse famille des affections contagieuses ou
épidémiques.
A propos d'hygiène nous ne pouvons nous empêcher de dire
quelques mots d'un petit livre bleu, que nos confrères ont dù
voir dans la vitrine de quelques libraires et dont le titre modeste
cache un esprit sérieux et un style convaincu. Ce sont les en
tretiens familiers sur'l’hygiène par M. Fonssagrives.
a Vulgariser, saas abaisser » telle est la devise du professeur
de Montpellier. Certes, il s'est bien acquitté de sa tâche, mais
qu’on ne s’y trompe point, fauteur, tout en écrivant pour les
59 —
gens du mode, donne des conseils dont l’homme de l’art fera
bien de profiler. 11 traite en philosophe le chapitre du travail, en
homme de cœur les devoir de la maternité physique. Les excès
sont réprim és d’un ton sévére, les passions gonrm andées avec
bonté; mais rien n’égale l’entretien sur l’éducation où l'auteur
semble encore plus m aître de son sujet. Signalons enfin, sur les
alliances consanguines et leurs conséquences, quelques vues
qui ne manquent ni de profondeur, ni de vérité. En somme, ce
petit livre fera son chemin et le style dans lequel il est écrit ne
contribuera pas peu à le propager. Après ces justes éloges, nous
ne saurions cependant passer sous silence un point dans lequel
nous ne pourrions être d’accord avec notre ém inent confrère.
C’est quand il jette, pour ainsi dire, à notre génération un regard
de pitié. Pauvre race chétive et corrom pue, est-il près de
s’écrier! C’est être par trop pessimiste, selon nous. Q u’il ne
nous flatte pas, d’accord ; « qui bien aime, bien châtie; » mais
qu’il s’alarme ainsi sur notre destinée, c’est aller trop loin ! —
En le lisant nous nous sommes rappelé ce passage de Vôlney;
« L’homme m écontent du présent, suppose au passé une per
fection mensongère, qui n’est que le masque de son chagrin. Il
loue les morts en haine des vivants, il bat les enfants avec les
ossements de leurs pères... » Ce n’est pas que M. Fonssagrives
soit atrabilaire ni misanthrope, mais il a cédé à ce courant des
esprits inquiets qui, dans le style com i-hom ériquedu jour pour
rait s’exprim er par «les dieux s’en vont.» — Que les alarmistes
se rassurent, la race ne se détériore pas; nous continuons a
offrir à l'arm ée un contingent des plus respectables et qui s’ac
croît tous les jours ; on recrute sans trop de difficultés les cui
rassiers et l'on trouverait sans peine quelques cent-gardes qui
rem pliraient l’arm ure du roi-chevalier.— Au reste nous avons la
faiblesse de croire que les François lor et les Porthos ont été des
exceptions, LouisXIV, le grand roi, était plus fait la à table qu’à
la lutte, et la génération de 89 valait bien les petits marquis de
la régence. Nous ne valons pas mieux que nos prédécesseurs,
�60
physiquement parlant. Quant aux œuvres de 1 intelligence, que
l'éminent hygiéniste ne s’effraie pas de la tendance actuelle, elle
n'est que transitoire, mais plutôt quï! considère ce qu'a fourni
la première partie du XIX.- siècle! Si la moisson est aussi riche
pour la seconde moitié, notre époque saura rivaliser avec les
siècles les plus illustres,— Alex. Dumas, dans un volume de
ses mémoires, répond a cette objection de la décadence avec
l'esprit et la verve qu’on lui connaît. Il énumère cinquante noms
au moins que les règnes les plus brillants auraient enviés a notre
époque, et si je m’en souviens bien, les provençaux y figurent
pour une bonne part. Encore ne cite-l-il que des littérateurs,
que serait-ce si l'on y ajoutait la liste des savants.
MM. Gosselin et Béhier ont inauguré les cliniques chirurgi
cale et médicale de la Pitié. C'est une bonne mesure que la
création de ces cliniques dans un hôpital éloigné, ç’a été une
bonne pensée que de les confier a deux professeurs égalem ent
aimés des élèves et justem ent célèbres. — M. Gosselin, comme
M. Béhier, a formulé sa doctrine. Elle est simple comme toutes
les bonnesichoses, elle est sûre comme tout ce qui s’appuie sur
l’observation directe et l'expérimentation, elle sera presque in
faillible, quand ebe concordera avec l'expérience des anciens
passée au crible de la statistique et de la critique moderne.
M. Behier a dignement répondu aux attaques d'une partie de
la presse. J avoue bien humblement n’avoir jamais compris de
quel danger ces sentinelles avancées du progrès m enaçaient la
Faculté de Paris; je ne sais de quel malheur nous avertissaient
ces nouvelles oies du Capitole, mais les nominations qui ont fait
arriver à la chaire professionnelle des noms déjà connus et
aimés, nous rassurent pleinement pour l'avenir. S il est juste de
payer un tribut d éloges et de regrets à ceux qui s’en vont ou
que la mort nous a enlevés, il est juste aussi de saluer dans les
nouveaux venus les gloires prochaines de la France médicale et
les solides piliers du nouvel Asclépion. Au reste, M. Béhier l a
bien dit: Pourquoi imposer un joug aux idées nouvelles, pour
—
—
-
61
quoi tracer l'ornière qu'il faudra nécessairement suivre? Nous
savons par 1 histoire ce que peut, sur la marche (lu progrès des
sciences médicales, une doctrine qui s’implante par F intimida
tion du maître ou d’une académie. Non ! la vérité s’impose
d'elle-m êm e, le maître n’a pour mission que de nous faire con
naître les movens propres à la découvrir, et il n’en est pas que
l’on doive négliger. On n’est plus aujourd’hui organicien entêté
ni vitaliste pur, l’exclusivisme n’esl plus de mode: mais aux
disciples d’Hippocrate qui suivent de trop près le précepte
'< lndicatione viorborum incerta, in general-ibus sta, » et qui,
fort soucieux, à bon droit, des forces du malade, le sont trop
peu des signes de la maladie, les organiciens comme M. Béhier
opposent un nouveau principe : c’est le contrôle de l’expéri
m entation, c’est l’opiniâtreté dans la recherche des symptômes,
c’est l’application à en saisir les moindres nuances. Ils m ettent
à contribution tous les moyens connus, toutes les découvertes
nouvelles, tout.es les recherches passées, pour arriver a la con
naissance précise de ce term e complexe qui s’appelle diagnostic
sans laquelle la m édecine hippocratique sera toujours incom
plète. La doctrine de M. Béhier se retrouve dans ses œ uvres;
dans la clinique qu’il a publiée et dont nous attendons le deu
xième volume, au chapitre Erysipèle on voit ce qu’il est; plus
loin, au sujet de la fièvre puerpérale, on peut aussi apprécier ses
idées. Ce livre contient sa profession de foi, tout comme l’article
Adenite du dictionnaire encyclopédique des sciences médicales
renferm e celle de M. Velpeau. — Après de pareils organiciens
on serait lier d’emboîter le pas.
Nous avons parié déjà plusieurs fois dans ces chroniques des
leçons de M. Dolbeau qui a suppléé M. Jobert, de Lamballe, à
l Hôtel-Dieu de Paris : aujourd’hui cos leçons forment un vo
lume et nos confrères pourront vérifier nos assertions. L’espace
nous manque pour en parler longuement, nous citerons cepen
dant celles sur le rétrécissem ent de l’œsophage, les obstructions
intestinales, les tum eurs de l’abdomen, le mal perforant, quel
ques affections oculaires, etc.
�02
l a Société de chirurgie, en vacance depuis quelques temps,
a repris le cours de ses travaux.
Dans une des dernières séances, le Dr Chapplain a été nommé
membre correspondant de la savante compagnie, ("est une
juste recompense des travaux consciencieux de notre confrère
que l'Association médicale a nu bien souvent apprécier.
A. O.
—
—
J u r is p r u d e n c e p ro f e s s io n n e lle .
UN PROCÈS MEDICAL ÈN A>GLETERRE.
Le journal anglais The Lancet publie, dans les num éros du
!" et du 24 novembre dernier, la relation détaillée d’un procès
qui s’est produit à Londres, et qui a été plaidé dans le courant
du mois dernier.
Les circonstances dans lesquelles celte allaire se passe sont
assez curieuses et heureusement assez rares pour que nous ne
laissions pas échapper l’occasion d’en entretenir un moment nos
lecteurs.
Il s’agit d’un procès médical. L inculpé est un dentiste; la
plaignante, une de ses clientes. Mme Absolon, couturière de son
état, accuse M. Statham: 1* de l avoir chloroformée contre sa
volonté : 2e de lui avoir arraché six dents en usant de violence à
son égard. Elle attribue aux suites de cette opération (qui a eu
lieu en 1864) l’état de maladie dans lequel elle se trouve actuel
lement, et qui l’empêche de gagner sa vie. En conséquence,
elle espère que le jury condamnera VJ. Statham à lui payer un
dédommagement.
Mm* Absolon raconte longuement les faits. En 1864, elle se
présente au Great Northern Hospital, afin d’y être traitée pour
débilité nerveuse, maux de tête et maux de dents. Elle rencon
tre l'accusé qui l’examine plusieurs fois et se décide a lui arra
cher des dents. M“* Absolon s’y refuse d’abord, disant ne pas
— 63 —
pouvoir supporter la douleur (h; l’opération. Le dentiste [im
pose alors le chloroforme. Le médecin de l'hôpital, qui a été
consulté a ce sujet, ne voit aucun danger dans l’emploi de cet
anesthésique, et M. Statham procède à I extraction des dents
avec l’aide de M. Bvers, qui a endormi la malade. Celle-ci re
vient à elle un peu avant la lin de l’opération, et dit souffrir
beaucoup. — Suit la description des soins consécutifs. —
Elle déclare, du reste, que, 1 inculpé s’est m ontré très-bon pour
elle et qu’il lui a même donné de l’argent à plusieurs reprises.
On se demande avec étonnem ent comment une personne qui
a été soignée gratuitem ent,qui a reçu des secours pendant deuxans d’un homme qui ne lui devait rien, peut ensuite faire com
paraître son bienfaiteur devant un jury correctionnel !
(.es témoins a charge paraissent a leur tour. L’un discute la
question desavoir si, dans l’état de la plaignante, ii fallait arra
cher les six dents d’une fois, et attribue à l’administration du
chloroforme son état de faiblesse nerveuse excessive. Une autre
déclare qu elle était hystérique, et que l’opération peut avoir
empiré son état. Un troisième proteste contre l’emploi du chlo
roforme.
Le défenseur de l’accusé réfute dans tous ses détails l'accusa
tion de violence dans l'administration du chloroforme et dans
l’extraction des dents.
L'accusé raconte les faits comme ils se sont passés, et re
grette que l’acte de charité qu’il accomplissait envers Mmt Abso
lon, en la soignant gratuitem ent et en pourvoyant uses besoins,
ait été tourné contre lui par l’accusation.
Quant aux témoins de M. Statham , — tous médecins, — ils
dorment raison a l’accusé sur tous les points et approuvent im
plicitement tout son traitem ent.
Ces discours ont occupé le tribunal pendant deux séances. Le
président, après avoir entendu les deux parties, résume les dé
bats, — ce qui, dans ce cas, n ’est pas chose facile, — et le jury,
appelé a se prononcer, se retire pour délibérer.
�CA —
En avançant dans la lecture de ce singulier procès, nous
avions hâte, on le comprend, de connaître la sentence du jury.
En effet, après avoir assisté à cette scène, qui, peut-être, aurait
été comique sur le théâtre, mais qui, transportée dans la réalité,
devient presque inconvenante, rien n’était plus intéressant que
de savoir comment le jury se prononcerait sur des questions
aussi complètement hors de sa portée que celles qui appartien
nent à la médecine.
Nous avons été. nous l’avouons, très agréablement surpris en
lisant qn’après quatre heures et demie de délibération, le jury
n'ayant pas pu réussir à formuler un verdict, les parties avaient
été renvoyées.
Nous voyous dans cette non-intervention du jury une énergi
que protestation contre un état de choses qui n'est plus de notre
temps.
Ce seul fait, a nos yeux, contient une bonne leçon que nous
voudrions voir méditer de l’autre côté du détroit.
Encore un mot. Le Corps médical n'a pas voulu laisser
M. Statham sans un témoignage de sa sympathie. Une liste de
souscription fut ouverte dans le but de payer les frais du procès.
Un meeting d’une trentaine de personnes fut convoqué. Il re
poussa l'offense faite à M. Statham comme faite au Corps tout
entier, déclara le jury incompétent en cette matière, et loua la
charité et le généreux désintéressement de M. Statham.
« Nous serions heureux, dit en terminant le journal anglais,
« de voir les relations de médecin à malades placées sur un
u meilleur pied, quanta la possibilité de I intervention légale...»
Nous ne pouvons que nous associer bien sincèrem ent à l’expres
sion de ce vœu, et souhaiter â nos voisins doulre-M anche de la
voir se réaliser le plus vite possible.
(Union médicale de Paris.)
Dr de Yalcocrt.
Le Comité de rédaction.
Marseille. — Typ. Àrnaoü, Cayer et Cotsp., rue Seint-Ferréol, 57.
Telle est l’épigraphe inscrite au rapport de l’Un ion Médicale
de Paris, sur l’enquête relative aux faits de la dernière épidémie
de choléra dans le2D'<‘ arrondissem ent de Paris. C’est une attaque
bien violente de la part d’un médecin à ses confrères ; nous
ajoutons que c’est une attaque irréfléchie et qui ne peut attein
dre ceux contre lesquels le trait est dirigé. Devions-nous ce
pendant laisser tom ber celte assertion? Nous ne le pensons pas;
car, bien loin de vouloir rabaisser notre adversaire, nous lui di
rons qu’elle ne nous blesse que parce qu'elle sort de la plume
d’un confrère qui a un nom dans la science, dont nous aimons à
suivre les travaux et que nous avons pris jusqu'à ce jour au
sérieux.
Nous ne comprenons pas très bien la valeur du dilemme dans
lequel M, Boinet enserre les partisans de la contagion : Poltrons
ou intrigants, telles sont les denx alternatives qui nous sont
offertes. Avant de lions ranger sous l’une ou l’autre bannière,
faisons notre examen de conscience, tâtons-nous.
Pourquoi le médecin qui croit à la contagien a-t-il peur? Je
pense que la querelle de mot soulevée par le nom de contagion
est actuellem ent vidée. Le médecin contagionniste est celui qui
croit à la transm issibilité du choléra d’un horameà un autre, non
pas par le loucher, mais par toute émanation provenant de
l’homme malade. Ces bases étant ainsi acceptées, poursuivons
nos recherches. Il n’v a dans ces conditions qu’une manière de
prouver que l’on a peur: c’est de tourner les talons à l’homme
atteint de choléra et de se mettre en dehors des atteintes
des émanations m orbifères; mais pour l'honneur dç notre
corps, le nombre des fuyards est bien peu considérable et ne
5
�67
épidémique chez les individus. Le choléra de 18G5 est survenu ;
l'épidémie s'est présentée dans des conditions exceptionnelles.
Alexandrie était infectée, Marseille n’est précédé que par Malte,
ce trait d’union entre l’Egypte et la France, il était d’un intérêt
immense d'assister au développement du fléau à sa première
étape sur la terre de France. L’expérience nous a convaincu et
nous ne balançons pas à combattre les idées que nous avions
partagées jusqu’à ce jour. Nous n’avons pas la prétention de
faire adopter, dès aujourd'hui, les opinions dont l’expérience
nous a dém ontré la réalité, c'est une question que l’avenir et un
avenir prochain jugera. Le moyen de se distinguer alors, sera de
professer les doctrines anti-contagionnistes.
Ces dernières doctrines ont été soutenues dans des brochures
que nous considérons comme malheureuses à plusieurs titres ;
elles retardent le développement de la science. Les faits, au
point de vue étiologique sont si difficiles à apprécier ! Quelle
difficulté n’a-t-on pas en à prouver la contagion des accidents
secondaires de la vérole? Quelles objections n’a-t-on pas fait
aux observations qui paraissaient les plus irrécusables? Et cepen
dant la vérole règne toujours: elle n ’est communicable que par
îe loucher; chaque jour des enfants, infectent leurs nourrices.
Le temps a accompli son œuvre; les faits douteux sont devenus
irrécusables pour les plus sceptiques; personne aujourd’hui ne
doute plus. Nous ne voulons pas devancer la marche régulière
de l’esprit humain. Les argum ents de M. Boinet, nous paraissent
dépasser le but,car ils compromettent celui qui les invoque. Ils
ressemblent assez à ces moyens qu’emploie l'homme qui court
an suicide incertain de conserver toute la force de sa volonté en
présence de la mort. L’épigraphe de M. Boinet est la pierre que
le suicidé se met au cou pour être sur de se noyer. Elle nous
avertit que les anti-coniagionnistes ne céderont que devant des
faits absolum ent incontestables, qu’ils lutteront avec acharne
ment, tant leur am our-propre est engagé dans la lutte.
Ces grandes questions ne trouveront point leur solution dans
—
saurait constituer une catégorie. Il ne reste donc plus que le
médecin qui. croyant qu’il court un danger en se transportant
auprès d un malade, n hésite pas, et sait affronter la m ort, par
dévouement à l'hum anité, par sentiment du devoir.
C’est en vain que je cherche la peur! iMon honorable collè
gue et ami le dr Seux, partisan de la contagion, se rendant a
son service d’hôpital, me parait avoir plus de courage, que
M. Boinet assuré qu’il ne court aucun danger auprès d'un
cholérique. L’un est le soldat affrontant la mort qu’il sait le
m enacera chaque coup de fusil tiré par l’ennemi, l’autre est le
Bédouin fanatisé auquel le Marabout a promis l'invulnérabilité.
C'est donc vainement que j’ai cherché dans le corps médical
les éléments d’une catégorie de poltrons ; arrivons à ceux qui
veulent se faire valoir. M. Boinet tout anti-contagionniste qu'il
est, est-il bien certain de ne pas rentrer dans cette classe ? Se
faire distinguer est un des mobiles les plus puissants de l’humamité, et nous avons vu, en effet, le Corps médical se distinguer
par son zèle, par son dévouement dans toutes les époques
depidémies. Mais comment peut-on compter se faire distinguer
par ses idées contagionnistes dans une ville où sur 500 méde
cins, il y en a 250 au moins qui partagent cette opinion,et nous
faisons une largepartaux anti contagionnistes. M. Boinet veut-il
dire, par excès de bienveillance que ceux qui paraissent soutenir
les idées contagionnistes ne croient pas à la contagion et veulent
tlatter les opinions populaires ?
Nous sommes contemporains de M. Boinet; comme lui, nous
avons été élevés à l’école de Paris, à l'époque où les idées anti
contagionnistes, florissaient à l’Académie de Médecine. Nous
avons subi l’influence de nos maîtres et nous avons vu passer
devant nous les épidémies de 1849, de 1854, de 1855, sans que
les faiis soient venus noos démontrer la réalité absolue de la
contagion. Il est si difficile d'apprécier les questions d’étiologie
et de déterminer, quand une épidémie règne dans une ville, les
circonstances qui ont présidé au développement de l’afiection
—
�-
68
—
des assertions insultantes; elles réclament des éludes sérieuses
et non une condamnation délinitive semblable a celle que nous
combattons. Que tous les efforts tendent h éclairer celte ques
tion si importante delà contagion î 11 est probable que des évène
ments semblables a ceux dont notre ville a été la première victi
me se représenteront; qu’ils soient utilisés pour les besoins de la
science, et dans l’intérêt des populations. Il est bien plus facile
de suivre la marche d'une épidémie contagieuse alors qu'il existe
un seul point d’infection, que lorsqu’ils se sont multipliés.
Qu'au lieu de cacher ce qui se passe à bord des navires, les
accidents soient immédiatement signalés. N ’est-ce pas ainsi qu'a
procédé M. Boulley pour le typhus des bêtes ’a cornes, et n ’a
t-il pas montré aux plus incrédules la transmissibilité de celle
affection? L épidémie de I8 6 5 n ’apas été perdue, et si elle n'a
pas convaincu M. Boinet, qui ne l’a observée que la où l’origine
première est difficile a débrouiller, elle a amené déjà des résul
tats remarquables. Crovez-vous que cette circulaire d'un ém i
nent Ministre, dont Marseille s’honore, ne soit pas le résultat
d'une enquête sérieuse et que ce soit sans des raisons légitimes
qu'il propose un congrès sanitaire pour parquer les pèlerins
de la Mecque sur le bord de la mer Rouge, c est quil sait que ce
sont là les importations du choléra en Europe.
Le camp des contagionnistes s'agrandit tous les jours; les
médecins observateurs, qui n’ont pas rencontré encore des faits
incontestables de transmissibilité, doutent déjà et il en est peu
qui osent se pronoucer avec cette énergie de conviction que
nous aimons à trouver chez M. Boinet, tout en regrettant la
lorme qu’il croit devoir donner à son opinion.
Après avoir effacé cette tache de la peur, île l’intrigue que
nous inflige notre confrère de Paris, ajoutons que nous pensons
que la doctrine de la contagion est celle du progrès. Elle est
bien plus satisfaisante pour tout individu qui cherche quelque
chose de sérieux dans la science. La transmissibilité nécessite
un aliment matériel, une émanation de l’organisme malade, qui
n’est point transmissible aujourd’hui qui le sera demain peut-être.
Mais que veut dire cette enlite, le génie épidémique, qui se
trouve constamment sous la plume des anti-contagionnistes. Ce
quid divinum qui est là pour expliquer ce que l’on ne comprend
pas, et qui, comme les doctrines des propriétés vitales, va ré
pondre à tous les inconnus et arrêter le développement de la
science par une explication toujours facile. Notre agent de la
contagion, nous pouvons espérer l’arrêter, le neutraliser ; il
est enfin quelque chose de matériel que l’on peut combattre.
Que pouvons-nous contre ce génie épidémique qui, par un
caprice difficile à com prendre, quittant Alexandrie, vient tout
juste débarquer à Constantinople, Ancône et Marseille, les seuls
pays en communication par de services des bateaux à vapeur?
Sur l’aile de quel vent a t-il suivi sa route? Avouons que dans
la création de son génie épidémique le positivisme médical est
bien en défaut.
Term inons cet article déjà trop long. Disons que le corps
médical a noblem ent rempli son devoir, quelle que soit d’ail
leurs son opinion relativement au développement du choléra.
Que ceux qui ont peur se mettent derrière nous, dirons-nous
en nous appropriant un mot historique et lorsque se terminera
la bataille , nous trouverons que les colonnes du Moniteur
enregistrant les récompenses seront toujours trop courtes,
car les noms de tous ceux qui se sont faits valoir par leur dé
vouement n'y seront pas inscrits. Que M. Boinet réfléchisse à
lajporlée de l’épigraphe qu’il a cru devoir choisir et qu’il l’efface,
s’il le peut, pour nous d’abord, parce qu’il nous blesse, mais
surtout pour lui. Les doctrines médicales ne sont point telle
ment stables qu’il ne puisse voir se retourner contre lui une
accusation injuste.
Dr Chàpplàin.
�—
70
-
ASSOCIATION GÉNÉRALE
De Prévoyance cl de Secours Mutuels des Médecins de France.
Compte-rendu de l’Assemblée générale tenue à Paris les 28 et 29
Avril 1867.
L Association ne se discute plus. Tous les jours elle s'affirme
par des faits positifs, par ses actes et par ses bienfaits. La der
nière assemblée générale en donne un nouvel et éclatant témoi
gnage.
Nous allons résumer succintement ce que d’autres ont dit et
ce que YAnnuaire ne tardera pas à reproduire dans tous ses dé
veloppements.
La séance du 28 avril a été ouverte a 2 heures par un dis
cours du vénéré président M. Rayer qui, malgré ses longues
souffrances incomplètement guéries, a voulu se retrouver à
ia tête de l’Association, objet de sa constante sollicitude et de
son généreux dévouement.
Quelpues traits saillants se détachent de ses nobles paroles
vivement applaudies par l’assistance : « Quand, semblable à
l'homme qui a bien rempli sa journée, l’Association générale
vient nous d ir e :— J’ai bien rempli mon année, j’ai secouru,
j’ai aidé, j’ai soulagé ; — notre conscience collective se réjouit
d’une sensible joie et chacun a sa part de ce bon tém oignage....
Secourir les infortunés, prendre soin des veuves et des orphelins,
tendre la main aux vieillards, voila des pratiques journalières
qui font le mérite, la force, la vertu des corps tels que le nôtre...
Ne croyez pas que, pour n ôtre pas sur le premier plan, les in
térêts professionnels qui nous préoccupent soient diminués ou
mal servis. Le crédit ou Linfluence finissent toujours par passer
du côté des services rendus.
M. le Dr Legouest, secrétaire de la Société Centrale, a exposé
ensuite avec beaucoup de lucidité la situation de la Société :
<* Heureux les peuples qui n’ont pas d’histoire, a-t-il dit, plus
heureuse encore est la Société Centrale, dont toute l’histoire,
pendant l’année qui vient de s’écouler, se résume en bienfaits.
Dans ses assemblées mensuelles, la commission administrative
n'a eu qu’à distribuer des secours et à enregistrer des adhésions
nouvelles... » Le nombre des sociétaires nouveaux s’est élevé
de 59; c’est une augmentation de 14 sur l’année précédente...
Les m orts ont atteint le chiffre de 49. L ’état des finances de la
Société Centrale est très-satisfaisante, bien que depuis la fonda
tion de la Caissedes pensions viagères, les dons se dirigent de
préférence vers cette utile institution. L’avoir de la Société Cen
trale se compose au 1er janvier 1867 de 59,545 francs 90 cen
times. Line somme de 6,700 francs a été distribuée à 21 person
nes, au nombre desquelles sont plusieurs veuves de médecins
civils et militaires ; c’est 2,600 francs de plus que Tannée der
nière.
L’assistance de la Société a été réclamée par quelques per
sonnes qui n’avaient d’autre droit que leur infortune ; mais elle
a été limitée à celles qui de près ou de loin se relient à la famille
médicale, et nous espérons, ajoute M. Légouest, qu’on voudra
bien p ardonner à une société de secours mutuels et de pré
voyance de s’être laissé entraîner dans les voies de la charité.
M. le Dr Henri Royer, au nom de la commission de la sous
cription Laënnec, annonce que les sommes recueillies dépassent
déjà 20,000 francs, chiffre suffisant pour élever à l’immortel in
venteur de l’auscultation, un m onum ent digne de lui et de la
France. Il propose de faire appel aux médecins étrangers pour
rendre un plus éclatant hommage à cette illustration française
qui est aussi la gloire de l’humanité. L’Anglais Jenner n’a-t-il
pas sa statue dans une cité française, à Boulogne-sur-M er?
Laëenner n’est-il pas aussi digne d’un hommage internationnal?
Comme Jenner n’appartient-il pas à tous les pays. Quoiqu’il en
�—
72
-
soit, les propres ressources de l'Association sont dès a présent
sullisantes pour que le monument consacré à Lénnec puisse du
rer; de bronze et de granit, il déliera les seiècles, presque a
l égal de l’admirable Traité de l'auscultation. Il y a plus : grâce
à une combinaison financière du dévoué trésorier de l'Œ uvre,
du Dr Brun, une certaine somme, produit du placement des
sousciiptions, pourra faire retour à l’Association; ce sera la co
tisation posthume du médecin bretou, et, de la sorte, le nom de
Laënnec ligurera sur la liste des donateurs perpétuels de l’Asso
ciation générale... La statue, due h l’habile ciseau de M. Lequesne et sortie des ateliers de fonderie de M. D ucel,est â l’Ex
position des Champs-Elysées : on peut admirer cette noble
image de Laéennec, l’altitude recueillie, méditative, la physio
nomie calme et un peu sévère, comme la Vérité ; le maître est
assis dans sa chaire, le stéthoscope â la main, l'oreille écoute,
1 intelligence entend; il va rendre des oracles (et ceux-l'a, se
ront clairs el surs , ou plutôt i! va dicter des lois.
« En 1837, a dit M. Henri Royer, l’Académie de médecine
décidait que le buste de Laënnec ornerait la salle de ses séances,
et ce buste promis, on l'y cherche vainement après trentes an
nées. Voyez, Messieurs, la toute puissante de LAssociation :
vous avez voulu tous qu'un trop long oubli de l’illustre mort fut
réparé, el la réparation ne se fera pas attendre. »
D’après la proposition adoptée par lA ssem blée, la cérémonie
pour l’inauguration de la statue ce Laënnec aura lieu vers la fin
de mai 1868, â Quimper, ou doit se tenir en même temps un
concours régional agricole.
M. le secrétaire général, Dr Amédée Latour, a pris à son tour
la parole pour exposer la situation de l’Association dans l’en
semble de l’Œ uvre Nous ne pouvons donner ici qu'un trop
court aperçu de ce long et très remarquable com pte-rendu plu
sieurs fois interrompu et applaudi.
Selon une pieuse coutume, la première peusée a été pour les
morls. Celle année le deuil a été général : 136 sociétaires ont
73
succombé! Dans ce douloureux négroioge figurent les noms de
Beyran, Cahen, Chaillÿ, Furnari, Jobert (de Lamballe , Mêlier,
Michon, Natalis Guillot, Parcliappe, Ratier, et tant d’autres
qui ont tous honoré notre profession par leur science, leur ca
ractère, leur dévouement, leurs vertus.
L’Association compte aujourd hui 6,295 membres et a reçu
220 adhérents nouveaux depuis un an.
Les finances sont dans l’étal le plus florissant. On en peut
juger par les chiffres suivants, au dessus de tout commentaire :
La Caisse générrle possède 52,487 fr. 55 c.; la Caisse des
pensions viagères: 94,056 fr. 65 ; la Société Centrale : 39,545 fr.
90 c.; les Sociétés locales 285.645 fr. 62 c., ce qui élève le
total général de l’Œ uvre a 471,545 fr. 68 c. L’excédent du ca
pital sur le dernier exercice est de 44,258 fr. 62 c.
L'ensem ble des dons et legs faits â l'Association a été cette
année de 15,112 fr. dont 3,350 pour la Caisse générale;
4325 fr. pour la Caisse des pensions viagères et 3,436 fr. 60
pour les Sociétrs locales.
L’Association a distribué, dans l ’ensemble de l’Œ uvre, la
somme de fr. 27,532,35 pour secours â des sociétaires malheu
reux, à des veuves ou à des enfants de sociétaires. C'est plus de
10,000 que dans l’exercice précédent. Des secours accordés par
la Société centrale figurent pour la somme de 67,000 fr., et
ceux des Sociétés locales pour la somme de 17,442,55 fr. En
définitive, depuis le moment où l’Association a pu donner des
secours, plus de 100,000 fr. ont été distribués sans compter
tous les actes d’assistance et de protection accomplis sous toutes
les formes.
Huit sociétés ayant épuisé leurs fonds de secours ont adressé
des demandes de subsides au conseil général qui, d’une manière
définitive ou provisoire, a fait droit à toutes ces requêtes.
La Caisse des pensions viagères a fait de rapides progrès. De
puis un an son avoir a augmenté de fr. 22,589,83. Son exis
tence est donc assurée , cl tout fait prévoir qu’on arrivera à dé
-
-
�passer les calculs sur lesquels avait etc fondée cette institution.
Il nous suffit de constater ici ces résultats décisifs. L’espace
nous manque pour présenter les considérations de M. Am. Latour
sur l'exercice illégal de la médecine, sur les progrès de l'Associ
ation, sur la déontologie médicale, etc. L’A nnuaire seul peut
exposer toutes ces questions qui touchent a la lois aux intérêts
professionnels, a la dignité et a la grandeur morale du corps
médical.
Le soir, a 7 heures, plus de 200 convives se réunissaient dans
la salle de banquet du Grand-Hôtel. Des toats nombreux ont été
portés et chaleureusement applaudis. La plus aimable cordialité
n'a cessé de régner jusqu’à la fin.
La séance du 29 avril, prolongée de 1 heure à 5 heures a été
consacrée a des questions d’organisation intérieure et d’intérét
général.
Le Comité de Rédaction.
BIBLIOGRAPHIE.
Encore quelques mots sur la contagion du Choléra épidémique.
Le temps des polémiques ardentes et des discussions passion
nées sur la contagion du choléra paraît enfin écoulé; mais le ter
rible fiéau peut, d’un moment à l’autre, revenir dans nos murs,
et les médecins, gardiens naturels de la santé publique, doivent
poursuivre avec calme et persévérance de conscieucieuses études
sur cette grave question. C’est cet esprit de sage modération
dans la discussion des laits et d’examen judicieux, autant qu’ap
profondi dans la recherche du problèm e, qui a guidé l’auteur du
livre modestement intitulé : Encore quelques mots sur la conta
gion du Choléra.
M. le professeur Seux est franchement contagioniste. Comme,
à ses yeux, il est d’une importance extrême pour les intérêts les
plus sérieux des peuples que cette question soit enfin résolue, il
remplit son devoir d’homme et de médecin en faisant connaître
les bases nombreuses et solides delà conviction qu’il s'est formée
à ce sujet.
Le mot contagion doit être pris, non pas dans son sens éty
mologique et tout à fait restreint, mais dans son sens le plus
large, comme synonyme de transmissibilité. Seulement, les m a
ladies contagieuses doivent être rangées en deux classes : celles
qui se communiquent par le contact, et celles qui se transm et
tent au moyen de l’air vicié par le malade : c’est dans la seconde
de ces catégories qu il faut placer le choléra; toucher un cholé
rique ne donne pas le mal, mais respirer l’air qu’il respire peut
le donner. Voilà comment M. Seux est contagioniste, et voilà
comment Je sont les médecins qui croient à la transmissibilité
du choléra. Ce serait donc une tactique déloyale que de les pré
senter comme des contagionistes, dans la vieille acception du
mot.
Avant de discuter sur la transmissibilité du choléra, l’auteur
examine avec soin une question préalable, celle de l’existence et
de la nature du choléra européen. De l’étude des descriptions
qu en ont données des médecins illustres, depuis Hippocrate
jusqu’à M. Grisolle, M. Seux conclut que ce choléra obsérvé
autrefois en Europe était une maladie tout à fait différente du
choléra indien.
A. F abre.
(La suite au prochain numéro.)
Revue Mensuelle.
Le mois de mai commence et déjà la fraîcheur des derniers
jours d’avril a fait place à une douce tem pérature qui va nous
débarrasser pour un an au moins, de nos vêtements d’hiver.
Les fleurs naissent partout et la verdure couvre nos prom e-
�76
nades où nous pourrons envoyer nos bambins ou uos petits
malades. N’ont-ils pas besoin d’air et de soleil, ces frêles con
valescents des affections printanières. La constitution catarrhale
a dominé tout le mois dernier et la rougeole, parmi les affec
tions éruptives, a occupé le premier rang. La fréquence de celte
éruption a été considérable; si le plus souvent elle a été béni
gne, quelques phénomènes graves sont venus plusieurs fois
compliquer la dernière période de la maladie. Les oreillons ré
clament également une mention dans le trop succinct com pte
rendu des maladies régnantes que nous donnons h nos lecteurs.
Celte singulière affection s’est m ontrée, comme presque tou
jours, sous forme épidémique. Dans les familles nombreuses, elle
a atteint simultanément tous les enfants, produisant quelquefois
des métastases ovariques, plus souvent que des orchites. Ce
fait s’est surtout remarqué chez des jeunes tilles qui atteignaient
lage de la puberté et que la fluxion, la congestion, qui s’ef
fectue vers les organes de la m enstruation, ne prédisposaient
que trop à l’influence de la maladie. Chose curieuse, ces enfants
n’avaient pas de parotidiles, alors que leurs frères n’avaient
que des oreillons. Nous en aurons fini, si nous mentionnons
encore quelques fièvres muqueuses graves, et dans nos salles
de chirurgie la persistance de la pourriture d’hôpital.
Vous le voyez, cher lecteur, il n’est nullement question de
choléra. C’est que, jusqu’à ce jour, aucun fait authentique n’a
été constaté, excepté un cljoléra-nostras, qui est entré à la
Conception dans le courant de mars. Nous ne pouvons prédire
ce que l’avenir nous réserve à ce sujet, mais nous espérons ce
pendant que le germe se sera épuisé l’an passé. Il est d’obser
vation de voir deux années de suite sévir le fléau, trois c’est
plus rare.
A propos de choléra, M. Briquet a lu ’a l’Académie impériale
de médecine, son rapport sur l’épidémie de 1849. Nous ne répé
terons pas avec tous les journaux, qu’attendre un rapport dixhuit ans,c'est long, et que pourtant il faut attendre encore ! Mais
—
—
- 77 —
nous prendrons acte des conclusions du rapporteur. L'honorable
académicien ne prononce pas le mot contagion ou infection,
mais il semble pourtant ne pas nier, que dis-je? il affirme même
que le choléra indien est contagieux. En effet : « \q caractère
« éliolorgique principal du fléau est la faculté de se propager
« d’un lieu à un autre. » Et les conditions qui favorisent la pro
pagation de l’épidémie sont justem ent celles qui sont suscepti
bles de colporter l'agent spécifique, miasmes, virus ou ferment,
comme : « le voisinage des lieux ou règne le choléra, les
grandes variations atm osphériques; — la proximité des cours
« d ’eau peu rapides; — l’arrivée des vents venus des localités
« infectées, » ou bien celles qui ont le triste privilège de le faire
éclore, l'entretenir ou le développer, comme : « les altitudes
« peu considérables,— l’élévation de la tem pérature, — la
« présence d’une grande quantité de vapeur d’eau dans l’air, —
« de défaut d’aération, — les grandes réunions d’hommes, —
« l’encom brem ent,— la guerre, — la disette, la misère, la
« mauvaise santé, — l’étal de débilité, — les passions débili« (antes, les fatigues, et enfin le régime alimentaire peu conve«< nable. »
Chose rem arquable et déjà remarquée, c'est que ; « quand
« la propagation s’est faite par la voie de terre, elle a générale« ment eu lieu de proche en proche. Par la voie de mer, au
« contraire, elle a eu lieu à des distances plus ou moins gran« des, et les premières localités atteintes ont été généralement
« des ports marchands. » Concluez après cela à l’abolition des
quarantaines! Voulez-vous d’ailleurs un fait isolé, mais bien
évident, en faveur de la contagion. On ne l'accusera pas d’être
apocryphe, il est de M. le Préfet. Le choléra sévissait dans une
ville du Nord. De peur d’effrayer la population, l’autorité et les
journaux étaient convenus de n’en pas parler. Le fléau frappe,
entre autres, une famille ; le père et la mère meurent. Celle-ci
allaitait un enfant qui, par les soins délicats de M. Levert, es1
transporté à la campagne et confié à une nourrice. Celle qui
�—
78
-
prêtait ainsi une mamelle généreuse à une bouche innocente,
ne pensait pas, nouvelle Cléopâtre, ouvrir son sein au poison.
Elle succombe pourtant aux atteintes du choléra et autour d'elle
dans sa famille tombent d’autres victimes.
L'enfant, cause du mal, transporté dans une autre famille y
apporte encore le germe fatal, si bien qu’on eût pu suivre à la
piste la trace de son désastreux passage et que personne ne
voulut l’allaiter. Il dut subir l'allaitement artificiel et il vit en
core aujourd'hui. Sans doute ce fait manque de détails scientifi
ques qu'on pourrait fournir au besoin; mais je défie bien qu’on
puisse lui donner une signification contraire au système que
nous avons déjà eu l’occasion de défendre.
N'avons-nous pas raison, plus que jamais, de croire a la con
tagion quand de jour en jour nous voyons diminuer la phalange
des anti-contagionnistes.
Avant de sortir du sanctuaire académique, nous signalerons,
après tous les chroniqueurs, le remarquable discours de
M. Broca. En prenant pour la première fois la parole, au sein
de ce corps savant, M. Broca a voulu prouver, ce que tout le
monde savait, que l’Académie avait été heureusement inspirée
de le choisir au nombre de ses membres titulaires.
Notre dernière chronique nous a valu quelques reproch.es de
plusieurs de nos confrères relativement a notre optimisme. Déjà
ils nous accusaient du défaut inverse de celui que nous impu
tions a M. Foussagives. Les arguments que nous leur fournis
sions de vive voix, les ayant laissés incrédules, nous sommes
heureux de pouvoir aujourd hui nous appuyer sur l’autorité de
l’honorable académicien que nous venons de citer. Plus savant
que nous, et mieux inspiré, il est venu, pièces justificatives en
mains, abonder dans notre sens. Il a prouvé, à la grande satis
faction de l’Académie et de la nation entière que la population
française n’était pas en décroissance et que, de ce côté au moins,
la patrie n’était pas en danger. Regardons enfin l’avenir avec
assurance et répétons avec Condorcet : « L'âge d’or est devant
« nous, nos pères ne l’ont point vu, nos enfants le verront,'et
« c’est à nous à leur en préparer le chemin. »
P uisque nous parlons de M. Broca, la transition sera facile
pour passer de la rue des Saints-Pères à la rue de l’Abbaye,
siège de la société de chirurgie. C’est encore ce professeur qui,
en apportant un cas de trépanation suivi de guérison, a soulevé
la discussion si intéressante du trépan.
Cette question qui a préoccupé à juste titre pendant si long
temps et h différentes époques le monde savant, n’a pu être en
core résolue. Cependant les dissidences qui se sont élevées
entre les membres de la société, il faut le répéter ici, sont plus
apparentes que réelles et tous les chirurgiens s’accordent a
trouver bonne et utile l’application du trépan, quand les indica
tions sont précises. Précises, voila la difficulté et c’est sur ce
point qu’existe la divergence. Pour nous, nous sommes un peu
de l’avis de. M. Trélat et beaucoup de celui de M. Giraldès, qui
estime que le sens clinique est mis en jeu ici plus que dans tout
autre cas. M. Legouest, avec la clarté d’expressions qui lui est
propre et sa sagacité habituelle, a fait de bonnes distinctions. Il
a apporté un certain nombres d’observations, très-importantes
et propres à éclairer la question. M. Perrin et M. Lefort en ont
aussi cité qui ont une grande valeur et s’il est résulté de la dis
pute académique que de nouveaux faits manquent encore à la
pratique pour résoudre le problème posé, on a conclu du moins
que le trépan ne devait plus désormais n’appartenir qu’à l'his
toire ancienne de la chirurgie.
Nous avons vu dans les hôpitaux de Marseille de nombreux
cas de fracture du crâne ; nous avons vu des chirurgiens regret
ter plusieurs fois, après l’autopsie, de n’avoir pas appliqué le
trépan ; nous l’avons vu employer dans un cas ou le malade a
succombé, mais nous devons dire que l’opération n’avait rien
ajouté à la gravité de la maladie et que si elle n'a pas empêché,
du moins n a-t-elle pas causé la mort.
A. Q.
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> ..........
'
80
—
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'
Chronique Locale
Le Comité Médical des Bouches-du-Rhône a tenu son
Assemblée générale le 30 avril dernier, sous la présidence de
M. Roux, vice-président, M. Gouzian empêché pour cause de
maladie.
Dans cette séance plusieurs récompenses ont été distribuées
aux lauréats du concours de 1867.
Sur la question: « Devoirs du médecin vis-à-vis de l'autorité,
des confrères et des clients, etc. » (Rapporteur M. Mi tire), le
Comité a accordé:
1° Une médaille d’or de 200 fr. à M. le D7 Delfeau, de Collioures (Pyrénées-Orientales);
2° Une médaille de bronze à l’auteur anonyme du mémoire
portant l’épigraphe : Hoc opus hic l'abor est;
5° Une mention honorable à M. le D7 Bourgade, de Lislrac,
(Gironde).
Sur la question : « Par quelles réformes dans le service de la
police sanitaire peut-on arriver à l'extriction des maladies vé
nériennes. » (Rapporteur M. Maurin), le Comité à décerné:
1* Une médaille d’argent, grand module, à M. le Dr Jeannel,
professeur de l’École de Médecine de Bordeaux;
2* Une mention honorable au mémoire portant les initiales
J. F. P. C., avec épigraphe de M. Michel Lévy.
M. Dugas, l’un des fondateurs du Comité, a ensuite fait don
d’une somme de 200 fr. pour le concours d’avril 1868, dont la
question a été ainsi posée: « Indiquer les moyens d'établir un
système uniforme de quarantaines entre toutes les nations. »
M. Gouzian, président sortant, a été nommé président hono
raire, en reconnaissance des services rendus au Comité.
Le Comité de Rédaction.
StrM’iîle —Tyj> Arnaud, Cayer et Corup,, rus Seint-Ferrcol. 57.
INTÉRÊTS PROFESSIONNELS
DE L ’AVENIR DU CHEF-INTERNAT A MARSEILLE
11 y a quelques mois, tout le personnel de nos hôpitaux fat
ému par une nouvelle tout a fait inattendue. On disait partout
que le chef-internat revenait à la vie ! Nouvelle étonnante, in
vraisemblable, vu la gravité de l’affection et la position déses
pérée du malade que l'on savait condamné sans retour par les
sommités médicales. Cependant rien n’était plus vrai ; le chefinternat revenait réellem ent a la vie, et depuis cette époque,
nous avons pu le voir, retrouvant une partie de son ancienne
force, vivre presque de la vie d’autrefois. Que faut-il penser de
cette résurrection? Quelle confiance peut-on accorder à ce réta
blissement? Notre chef-internat est-il aujourd’hui un simple
chlorotique que quelques prises de fer feront revivre, ou bien,
refroidi par la vieillesse, ankylosé par l’âge, est-il destiné à mou
rir obscurém ent au premier jour en dépit du fer, du quin
quina et de tous les cordiaux de la pharmacopée ancienne et
m oderne? C’est ce que nous allons examiner.
Disons-le tout d’abord, le chef-internat a rendu des services
réels. A une époque où la réglementation des études n’existait
pas comme aujourd’hui, où les élèves avaient moins que de nos
jours l’occasion de s’instruire et les moyens de profiter de ces
occasions, le chef-interne était nécessaire. Sur lui, l’adminis
tration des hospices pouvait se reposer entièrem ent, car il pré
sentait des garanties d’instruction et de mérite qu’on aurait dif
ficilement trouvées chez plusieurs. Le chef-interne était â cette
époque, par le fait même des choses, très supérieur aux élèves
qui l’entouraient, et en créant cette place, l’administration avait
résolu un double problème : donner aux élèves un chef qui les
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dirigeât dans leurs études : avoir un homme à elle sur qui elle
pût compter et nui assumât sur lui la responsabilité des diffé
rents services de la maison. De grandes prérogatives étaient
attachées à cette place ; par dessus tout était ouvert devant le
chef-interne un vaste champ d’observation et d’étude dont il
avait garde de ne pas profiter. Aussi le chef-internat a-t-il compté
dans ses rangs un grand nombre de jeunes gens sérieux et ap
pliqués qui sont devenus d’habiles praticiens. Plusieurs d’entre
eux exercent de nos jours dans noire ville, où ils jouissent d'une
considération universelle et méritée. C’est Va un véritable titre
de gloire pour le chef-internat; nous sommes heureux de le
proclamer hautement.
Mais les temps sont bien changés depuis l’époque de la créa
tion du chef-internat. Aujourd’hui, les causes qui rendaient dans
le bon vieux temps cette institution si utile n’existent plus; tout
est transformé, tout sauf les avanlages attachés à cette place.
Ceux-là sont restés les mêmes, de telle sorte qu'on peut dire
sans dépasser la vérité que de nos jours le chef-internat est sur
tout utile au chef-interne. Le jeune homme qui a obtenu cette
place, — conquise d’ailleurs vaillamment à la pointe de l’épée,
— a sa position assurée pendant six ans. Durant ce long espace
de temps, toutes sortes de facilités lui sont données pour com
pléter ses éludes, pour se familiariser avec les nombreuses
difficultés de la pratique médicale, pour se créer même une clien
tèle. En quittant les hôpitaux ie chef-interne est déjà convena
blement posé dans le public ; il est à peu près sur de son avenir.
Ah! sans doute, s; nous ne devions considérer que l’intérêt
d un seul, si le contingent de la scolarité médicale ne devait pas
dépasser chaque année le chiffre un, nous proclamerions le
chef-internat uue institution excellente. Mais voilà la question.
Devons-nous assurer à un seul des avantages tels qu’ils ne puis
sent être obtenus par cet heureux qu au détriment de la majo
rité? Est-il plus logique, plus juste, plus progressif, alors qu’on
peut avoir plusieurs excellents internes chaque année, de ne
—
—
former qu’un bon chef-interne tons les trois ans? Et s’il nous
est démontré par l’examen sérieux de la question que le chefinternat, pour lequel on fait tant de sacrifices, est line institution
inutile, impossible, vicieuse même, peut-on et doit-on la con
server?
Il en est, nous le savons, qui portent aux nues le fameux
tablier rouge. Le chef-interne, disent-ils, dirige les élèves
dans leurs éludes; il les surveille, maintient le bon ordre parmi
eux et assure la régularité des services; il remplace le médecin
ou le chirurgien, lorsqu’accidentelleinpnt celui-ci ne peut se
rendre à l'hôpital ; il fait la visite du soir et surveille les malades
graves; praticien instruit, il peut donner avec intelligence les
premiers soins aux blessés qui se présentent souvent à l’hôpital
dans l’intervalle des visites ; pour ce dernier motif en particulier
le chef-interne est tout à fait indispensable, vu la médiocrité de
la plupart des internes. Enfin, ajoutent-ils, le chef-interne est
l'hom m e de l’administration, et la responsabilité étendue qui lui
incombe favorise singulièrem ent la tâche des adm inistrateurs
dans tout ce qui se rapporte directement aux malades.
Tel est le langage tenu par les partisans du chef-internat.
Quant à nous, nous prétendons prouver dans le cours de cet
article que les internes seuls peuvent très facilement accomplir
les diverses fonctions sus-indiquées, et par conséquent que le
chef-interne est inutile ; nous disons en outre que ce dernier rie
peut pas, par la nature même des conditions de son existence,
accomplir convenablem ent ces mêmes fonctions ; bien plus,
nous soutenons que le chef-interne complique et bouleverse le
service hospitalier au lieu île le rendre plus complet et plus
lacile. Entrons dans la question.
Les ressources de tout genre dont dispose le chef-interne lui
perm ettraient de se rendre très utile aux élèves; nous serions
le premier à demander son maintien si nous le vouons consa
crer quelques moments à I instruction de ces derniers. A la
�visite du soir, par exemple, il serait très tacite pour lui <J insti
tuer une sorte de clinique privée et élémentaire qui serait comme
une introduction à l’enseignement plus relevé des professeurs
de notre école. Que de petits détails qu’on ne trouve nulle part
indiqués dans les livres pourraient être signalés dans ces entre
tiens cliniques! Sur les diverses manifestations du pouls, sur
l’utilité et le mode des divers pansements, sur la manière d 'in
terroger les malades, etc., etc., l’enseignement officiel reste
muet le plus souvent : les élèves peuvent très-difficilement dans
les cours des facultés ou des écoles préparatoires être exercés
l’un 3près l’autre a l étudesi importante de l’auscultation..........
Nous n’en finirions pas si nous voulions énumérer tout ce qu’on
pourrait faire ou dire dans ces leçons. Et ces leçons seraient
excellentes pour les commençants, très utiles même pour les
élèves plus avancés ! M alheureusement ce que nous proposons
là le chef-interne ne le fait pas, il ne l’a peut-être jamais fait ;
nous ajoutons qu’il ne peut pas le faire. Pourquoi ? Parce qu’il
est accablé de travail, plus accablé qu’on ne saurait croire. 11 est
tenu de suivre toutes les visites afin d’être au courant de tout
ce qui se passe dans les salles; rcmarquons-le bien. — et nous
y reviendrons, — c’est là pour lui une nécessit'1 indispensable,
car s’il en était autrem ent, comment pourrait-il remplacer tantôt
tel chef de service, tantôt tel autre? Le soir, le chef-interne passe
l’inspection de tous les services ; à certains jours de la semaine,
il est obligé de tenir des consultations gratuites pour les indi
gents; il est souvent requis pour des expertises, pour des rap
ports de médecine légale : presque toujours il a été nommé, à
l’École de Médecine, soit prosecteur d’anatom ie, soit chef des
travaux anatomiques. Ajoutons que les règlements ne l’empê
chent pas d’être attaché, en dehors de l’hôpital, comme médecin
ou chirurgien à quelque administration. Enfin, le chef-interne
est docteur, il a sa clientèle, une clientèle véritable et nom
breuse. Au milieu de toutes ces occupations, il ne peut trouver
le temps de faire reposer son esprit, de lire, de sc recueillir ;
peut-on alors lui demander de s’occuper des élèves et de faire
une clinique ?
Mais ce que le chef-interne ne peut faire, les internes l’exé
cuteraient facilement chacun dans leur service respectif. C’est
ce qui a lieu dans la capitale. Nous savons, pour l’avoir expéri
menté nous-même très souvent, que la visite du soir, faite à
Paris par l'interne, est une occasion précieuse pour les externes
et les stagiaires du service, voire même pour les simples étu
diants, de s’instruire, d’observer, d’expérimenter sous la direc
tion d’un maitre jeune et plein de zèle. Ce résultat-là, essen
tiellement bon et pratique,nos internes l’obtiendraient facilement
à Marseille, si le chef-internat était supprimé. Relevés à leurs
propres yeux, ils ne tarderaient pas à prendre d’eux-mêmes sur
les autres élèves un ascendant que ceux-ci seraient les premiers
a reconnaître, parce qu’il ne léserait en rien les intérêts de
l’amitié et de la camaraderie.
La bonne intelligence entre le chef-interne et les élèves, voilà
bien une utopie digne de figurer parmi les dogmes de la religion
hum anitaire! De temps immémorial, ces deux éléments se sont
heurtés et ils se heurteront toujours. Mettez en contact le feu et
l’eau, que se passera-t-il? Ou bien le feu desséchera l’eau ou
l'eau éteindra le feu; mais prétendre les faire vivre côte à côte
comme deux vieux amis, erreur profonde, rêve irréalisable!
i.e chef-interne est habituellement si mal avec les élèves que
nous ne craignons pas de trop nous avancer en disant qu’eût-il
le temps de les diriger dans leurs études, il ne le ferait certaine
ment pas ; et c’est tout naturel. Quel intérêt veut-on que le chefinterne porte à des élèves avec lesquels il est en contestation
perm anente? Mais, direz-vous, d’où proviennent ces contesta
tions? De la nature même de l’institution. En effet, le chefinterne n’est pas seulem ent un chef pour les élèves; c’est un
surveillant, un maitre qui gronde et qui punit, en un mot un
mentor véritable ; or, on oublie trop que Mentor avait la barbe
blanche. Le chef-interne est toujours un jeune homme qui vient
�—
88
—
à peine d’élre reçu docteur en médecine ; quelquefois même il
est encore élève au moment de sa nomination ; parfois il devient
brusquement le supérieur de ceux dont il élait la veille l’égal et
l’ami. Dans ces conditions-là, quelle autorité réelle peut-il
exercer sur les élèves? Car, rem arquons-le bien, ces derniers
qui ont un sentiment très vif du juste respecteront toujours chez
le jeune chef-interne l’autorité de 1 instruction et du talent, si
cette instruction est solide et ce ta'enl réel ; mais l'autorité
brute, l’autorité qui surveille et qui punit, ils seront toujours
disposés à se regimber contre elle s'ils la voient revêtir la figure
d’un jeune homme, presque d'un camarade. Mais, dira-t-on, à
Paris l’interne surveille les élèves et fait marcher le service sans
rencontrer de la part de ces derniers le moindre obstacle. C’est
vrai; les internes de Paris sont très considérés, très respectés
de tous, mais aussi jamais ils n’infligent eux-m êm es de puni
tions aux élèves. Lorsque ces derniers ne remplissent pas con
venablement leurs fonctions, l’interne appelle sur ce fait I atten
tion du chef de service qui, lui, alors signale les délinquants au
directeur de l'hôpital;.et Ladministration punit les élèves négli
gents. Si les internes de Paris punissaient, tout leur prestige
s’évanouirait, parce qu aux veux des élèves ils n’ont pas qualité
pour punir.
Dr S eux fils.
La suite au prochain numéro.)*Il
REV U E CLIN IQU E. — M. COSTE.
R é s e c tio u «lu m a x illa ir e I n fé r ie u r
Il y a quelques jours que M. ie professeur Coste a pratiqué la
résection du maxillaire inférieur chez une femme âgée de 55 ans.
La tumeur pour laquelle cette femme était venue réclamer les
secours de la chirurgie avait débuté il y a six ans. Elle occupait
exclusivement le maxillaire inférieur et s'était développée davan
tage sur le côté droit. Au niveau de la symphise du m enton, la
forme de Los était cylindrique, faisait saillie au-dessus du bord
libre de la lèvre en avant et touchait presque l’os hyoïde dans
sa partie postérieure. A gauche l’angle du maxillaire paraissait
sain. L’altération pathologique.remontait beaucoup plus haut,
à droite; cependant on put espérer d’abord que l’on pourrait
conserver le eondyle.
Les ganglions lymphatiques voisins n’étaient nullement alté
rés; mais les tégnmens au-dessous du menton étaient amincis,
une fluctuation assez étendue témoignait de la présence d’un
liquide au-dessous de la peau et obligeait l’opérateur à sacrifier
une partie notable des téguments et à multiplier les incisions.
L’opération a été pratiquée avec une habileté remarquable par
rhonorable professeur. Les tégnmens étant séparés de la tumeur,
le maxillaire fut divisé au niveau du menton, les parties molles
internes séparées, la langue retenue par une ligature, la résec
tion du côté gauche fut pratiquée au niveau de l’angle de la mâ
choire. A d ro ite, la scie à chaîne fut portée à la hase du
conu vie, mais un examen plus attentif démontra que cette partie
de l’os n’était pas saine, elle fut alors saisie par une forte pince,
et pour ainsi dire arrachée de sa cavité sans la moindre perte de
sang. Cette partie du manuel opératoire nous a paru fort remar
quable , et nous nous sommes demandés si ce fait exceptionnel
ne pourrait point devenir une règle générale. — La partie réel
lement dangereuse de l'opération n est elle pas au uiveau du
eondyle? N 'esl-ce point là que l’on peut léser des artères im
portantes? O r, faction nous a paru bien plus facile, alors que
le chirurgien opérait la dissection sur une petite masse osseuse,
et non sur une partie plus considérable qui gêne les mouve
ments.
Quelle est la nature de la tum eur? Nous ne donnons ici qu’qn
aperçu succinctd’une opération im portante; nous savons quelle
sera publiée d’une manière com plété, et nous pourrons alors
�—
88
89
nenle de choléra indien la première de ces deux influences;
mais, quant a la seconde, rien ne prouve qu’il faille la placer
sous la dépendance de la môme cause. Ce n’est pas la première
fois que l’on voit la constitution stationnaire passer successive
ment par deux types, le dur et le mou, le sthénique et l’asthéni
que. Un des observateurs les plus sagaces et les plus profonds dont
puisse s’honorer la médecine française, Raymond, de Marseille,
avait parfaitement constaté et admirablement décrit la succession
de ces deux types, vers la fin du siècle dernier. Mais cette question
est ici tout à fait accessoire ; la grande question dans le livre qui
nous occupe est celle de la transmissibilité du choléra.
Prenant a partie cette assertion de M. Cazalas, qu’il n’existe
dans la science pas un seul fait positif prouvant que le choléra
ait été em porté par les personnes ou par les choses, M. Seux
établit de la manière la plus formelle, la plus catégorique, la
plus incontestable, que non-seulem ent ce lait existe, mais en
core qu’il est escorté de bien d’autres faits qui démontrent la
transm issibilité du choléra. Il le prouve en faisant passer sous
les veux du lecteur une foule de document où se trouvent toutes
les conditions exigées par ce médecin si sévère à l’endroit des
preuves sur lesquelles s’appuvent les opinions d’autrui : clarté,
authenticité, évidence, certitude, exactitude, précision, détails,
et, de plus, multiplicité. Cette argum entation puissante, scru
puleuse dans les détails et irrésistible dans l’ensemble, ne peut
être, sans perdre de ses caractères les plus précieux, ni analysée
ni scindée, et ceux dont la conviction serait encore hésitante ne
sauraient mieux faire que de lire l’ouvrage de notre éminent
confrère.
M. Seux pouvait s’en tenir là; mais il a voulu faire plus en
core ; il s’attache à démontrer que ceux qui attribuent les épi
démies cholériques à des influences purem ent locales n’appuyent
leurs opinions sur aucune donnée sérieuse. Il a bien facilement
raison de cette théorie qui place le choléra sous la dépendance
des conditions atmosphériques, quand celles-ci sont si variées et
-
expliquer la présence d'un abcès au milieu d’une tum eur d ’ap
parence cancéreuse et l’absence d altération des ganglions.
La malade est en bonne voie de guérison.
Dr Chapplain .
BIBLIOGRAPHIE.
Encore quelques mots sur la contagion du Choléra épidémique.
(Suite.)
Ce dernier n'est sorti de son pays natal que depuis le prin
temps de 1817, pour commencer ses migrations désastreuses à
travers le monde. Ces migrations ont eu, d’après l’éminent au
teur, deux conséquences capitales :
1° L’apparition en Europe d’une maladie nouvelle;
2’ Le cachet particulier imprimé depuis lors à quelques affec
tions diarrhéiques et même aux affections de toute nature, par
l’introduction de cette maladie dans nos contrées.
De ces deux propositions, la première est incontestable ; la
seconde pourrait bien être scindée en deux parties : s’il est vrai,
comme l’avance M. Seux, en s’appuyant sur les résultats com
parés de son observation personnelle et de celle de son aïeul,
que, depuis la première invasion du choléra indien dans la ville
de Marseille, les diarrhées et les choléras européens ont eu
beaucoup plus de tendance a se compliquer de cyanose et d’effa
cement prolongédu pouls; s’il estégalem ent reconnu que,depuis
vingt-cinq ou trente ans, cette espèce de constitution médicale
qu’on appelle la constitution stationnaire a changé, et que les ma
ladies ont cessé de revêtir le type sthénique pour présenter tous
les caractères de l’asthénie; je crois que l’on peut, que l’on doit
même, comme le fait M. Seux, attribuer à une trace perm a-
�—
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si différentes dans les nombreuses localités que le lléau envahit
a la fois; quand les situations lliermométriques et hygrom étri
ques qui accompagnent aujourd'hui, dans un point donné, l’ar
rivée du choléra, s'étaient mille et mille lois reproduites depuis
que le monde existe, sans que le choléra se lût jamais montre
avec elles. D'ailleurs, si la chaleur, la sécheresse et le calme des
vents, qui sont particulièrement incriminés par M. Jobert, de
vaient produire de toutes pièces le choléra, il y a bien longtemps
que celte maladie se serait implantée à Marseille, où ces phéno
mènes météorologiques sont ordinaires pendant l’été. Si, comme
M. Didiot l’affirmait vers le mois de juillet 1866, « l’intensité du
choléra décroît rapidement a la suite des orages qui ont ac« compagné d’abondantes pluies, » comment se fait-il qu’a
Marseille, dans les premiers jour do septembre 1866, ce lut
précisément après une pluie d’orage qu’on observa une brusque
recrudescence? Théoriciens, théoriciens, ne vous tournez pas
autant vers les nuages, et consultez davantage les faits médicaux
Vous perdriez peu a être moins météorologistes; vous gagneriez
beaucoup à rester avant tout médecins.
Comme les inlluences météorologiques, les causes d’iusalubrité agissent sur la marche et l’intensité du lléau. Ceux qui in
criminent tant la malpropreté du nouveau Marseille, si souvent
ravagé par le choléra, n’ont pas connu le vieux Marseille, le
Marseille des rues étroites, des immondices et des passarès, où
Je choléra n’avait jamais pénétré. En faisant aux caprices de la
météorologie et aux infractions a l'hygiène la part adjuvante,
maissimplement adjuvante, qui leur revient, M. Seux se montre
un des représentants les plus éclairés de celte école contagioniste qui sait attribuer à chaque cause l'influence qu’elle exerce
réellement.
Après une étude d’ensemble sur l’étiologie du choléra, M. le
professeur Seux, circonscrivant davantage le débat, suit dans sa
marche la dernière invasion, celle qui a commencé en 1865.
Partout, dans son parcours, il retrouve les preuves de l’im por-
—
91
talion; mais ce qu’il constate surtout, et ce qu'il s’applique à
m ettre en relief, c'est ce grand lait que le fléau indien arrive
beaucoup plus promptement en Europe aujourd'hui que les com
munications entre l’Inde et l’Europe sont plus rapides, ce qui,
joint h d’autres preuves, le conduit à poser cette loi bien digne
de nos plus sérieuses m éditations
La rapidité de la marche du choléra indien à travers le monde
a toujours été en rapport avec la rapidité des communications.
Mais il est un épisode de l’invasion de 1865 qui méritait plus
que tout autre de fixer l’attention d’un médecin marseillais :
Comment le choléra s’est-il développé dans notre ville? M. Seux
n ’a pas eu de peine à dém ontrer qu’avant l’arrivée des émigrants
d Alexandrie, l’état sanitaire de Marseille était excellent et qu’il
n’existait pas le moindre indice d’une constitution cholérique.
C’est ce qu’avait constate tout notre corps médical, mais ce qui
ne cadrait nullement avec la théorie de M. Cazalas et de son lieu
tenant, M. Didiot. Aussi, m ettant son esprit ingénieux à la re
cherche des faits, M. Didiot crut-il en trouver quelques-uns où
une affection plus ou moins cholériforme se serait déclarée avant
l’arrivée des fuyards d’Egypte. Ces faits présentaient-ils les ca
ractères exigés par M. Cazalas? étaient-ils positifs, clairs, au
thentiques, évidents, détaillés, certains, complets? Ainsi ne l'ont
point peusé deux médecins de Marseille, comme le prouve une
note insérée par eux dans la Gazette hebdomadaire ; mais
M. Didiot n ’en restait pas moins inébranlable dans ses affirma
tions. Il fallait que les faits si diversement racontés devinssent
l’objet d’une nouvelle enquête, et M. Seux s’y est livré avec la
bonne foi, la franchise, la patience et le discernement que cha
cun lui connaît. Les résultats de ces recherches ont été commu
niquées au congrès scientifique de France, dans une séance an
noncée plusieurs jours à l’avance, où I on s’attendait a une dis
cussion prolongée entre les eontagionistes et leurs adversaires,
discussion fort désirable entre gens bien élevés, car du choc jail
lit la lum ière, mais la Inde n’eut pas lieu, les anticontagionistes
�92
—
avaient évité le choc; ils pourront cependant encore trouver la
lumière en lisant, dans l'ouvrage de M. Seux, l’examen des faits
dont MM. Didiot et Gazalas se contentent pour étayer leurs opi
nions.
Il était temps, du reste, qu’on en finit avec le procédé Gazalas
pour écrire l’histoire des choléras de Marseille. En 1854, dit, en
effet l’éminent médecin militaire, l’épidémie cholérique épargna
Marseille; il est vrai qu’elle ne s’y déclara que le 7 décembre.
En 1855, ajoute-t-il, la maladie éclate h Marseille, elle n’exis
tait alors ni h Paris ni en Egypte; d’où le lecteur serait amené à
conclure quelle nous est tombée du ciel ou qu’elle a surgi de la
Cannebière, si l’on iguorait que le choléra nous est alors venu
de Toulon, où il exerçait de grands ravages. En 1849, continue
notre historien, l’Algérie est frappée avec violence; le choléra
ne se manifeste ni en France ni en Egypte. Quelle est donc l’é
pidémie qui, en 1849, ravageait Paris où elle enlevait entre au
tres personnages, le maréchal Bugeaud ? Quelle est donc cette
épidémie qui, en 1849, faisait a Marseille deux mille et quelques
centaines de victimes?
Du reste, il ne faut pas faire un crime a M. Gazalas, qui est
presque un étranger pour nous, de ces petites inexactitudes sur
des faits déjà si anciens. Des Marseillais, des médecins même, à
ce que disent de mauvaises langues, n’ont-ils pas déclaré que
Marseille n’avait pas eu d’épidémie cholérique en 1865? Nous
n avons pas eu le choléra à Marseille en 1865, et encore moins,
sans doute, en 1866, il est, par conséquent, inutile de raisonner
plus longtemps sur cette espèce de cauchemar que nous avons
tous éprouvé; il est même inutile de suivre M. le professeur
Seux dans l’exposé des judicieuses mesures qu’il propose pour la
prophylaxie quorantenaire, cette conséquence nécessaire de la
transmissibilité du choléra. Voyons, MM. Seux et Didiot, cessez
de discuter sur nos rêves, et occupez à autre chose vos talents si
remarquables, mais si différents.
A. Fabre.
—
95
—
Revue Mensuelle.
Le choléra, — encore ce vilain mot, mais pourquoi toujours
en parler, puisque, Dieu merci, nous ne l’avons pas. Votre der
nier numéro était tout plein de ce sujet mille fois ressassé ! O ui,
cher lecteur, vous avez raison, mille fois raison, mais avec ce
maudit personnage on ne sait jamais où l’on en est. S’il est
parti ou s’il n’est pas encore arrivé ! Est-il venu? oui. Viendral-il? non. N ’allez pas dire que j’use du paradoxe, mais je pro
mets de ne plus parler du fléau à la mode, après vous avoir ex
pliqué cette petite contradiction. Le choléra est arrivé ; — dans
notre port? non. — Heureusement nos sentinelles médicales
l'ont arrêté en chemin, et son apparition a été de courte durée.
Il n’a pas franchi les roches escarpées du Frioul. Un navire ve
nant de Naples nous amenait en effet deux cas, — deux morts,
— de choléra. Grâce aux sages mesures prises dans cette cir
constance, aucun fait de transmission n’a été observé. Ce ren
seignem ent, quoique officieux, est cependant très exact et doit
vous garantir de la peur. — La peur, Monsieur, me disait un
jour un de ces bons bourgeois qui figurerait bien dans la garde
nationale, — c’est nerveux ! Ça se comprend, mais ça ne s’ex
plique pas. Ainsi, ma femme, vous savez comme elle est forte
et puissanle ! eh bien ! quand elle voit une araignée elle se trouve
mal. Cependant, si elle raisonnait elle aurait bien la force de la
tuer! — Mais moi qui vous parle, mon animal c'est le bœuf!
Quand je vois un de ces biscornus, je suis près de m ’évanouir;
il me prend un trem blem ent. — Et le monsieur marié concluait
que chacun avait sa petite bête, et que le choléra était la petite
bêle de beaucoup. Ce que j’en dis n’est certes pas, pour le corps,
médical ; car, partisans de doctrines opposées, si la discussion
dous divise quelquefois, le danger nous trouve toujours réunis,
luttant encore, mais de zèle et de dévouement, près du lit de nos
malades, notre vrai champ de bataille.
�94
Les maladies régnantes du mois passé ont élé en général
bénignes, beaucoup de fièvres éphémères, d'em barras gastri
ques ou encore de ces maladies dont on néglige trop souvent de
poser le diagnostic. Les rougeoles, moins nombreuses qu’en avril,
continuent cependant à se manifester et s’accompagnent sou
vent d’accidents cérébraux. Ceux-ci, provoqués encore par cette
période si délicate dans le bas-âge, la dentition, ont enlevé assez
d’enfants, un peu plus peut-être que les antres années. Les mois
les plus meurtriers, pour ces petits êtres si faibles, sont habi
tuellement juillet et août, et si le mois de mai est venu cette
fois s’inscrire à côté des deux premiers, nous le devons sans
doute à l'augmentation rapide de la tem pérature. Au reste, le
chiffre total de la mortalité n a pas été très eleve.
Une grande discussion vient de s’élever au sein de la Société
de chirurgie, sur le tiaitement de la syphilis. Nous pouvons dire
en quelque sorte que nous l'attendions, car il y a déjà deux mois
que M. Dolbeau avait levé ce lièvre. Guérison radicale avec ou
sans mercure, voilà l’e nseigne, — non, je veux dire le titre de
la discussion. Nous voudrions en voir la lin avant de la résum er
et de donner notre opinion. Ce n’est pas qu’elle ne soit déjà
formée ; mais nous pensons qu’il faut aborder de pareilles ques
tions sans passion et sans parti-pris; aussi dirons-nous comme
M. Ricord : — « L'homme absurde est celui qui ne change ja
mais, » et nous changerions volontiers si quelqu’un de ces doctes
chirurgiens pouvait nous donner des motifs et des faits propres
à nous convertir. Mai6 déjà ce qui nous a souvent frappé, nous
pouvons le dire, ce n'est pas Inutilité ou 1 inutilité du traitem ent
spécifique, nous savons à quoi nous en tenir, mais l’utilité de
telle ou telle préparation mercurielle contre telle ou telle mani
festation de la diathèse. Les chirurgiens de Paris ne nous don
nent pas de très grands enseignements à ce sujet ; M. Velpeau
seul a effleuré cette question qui nous paraît pourtant fort im
portante, si importante que c’est le désaccord dans lequel sont
les partisans du mercure sur ce point, qui a fourni à M. Desprès
—
un argum ent à l’appui de ses idées. Ce ne sera peut-être pas le
plus facile à rétorquer. Les auteurs ne s’étendent pas longue
ment sur celte matière ; nous serions cependant injuste envers
M. Rollet, si nous ne faisions une exception pour son traité si
remarquable et si consciencieux des maladies vénériennes. Le
chirurgien lyonnais discute en effet sérieusem ent les avantages
particuliers à chaque genre de préparation, dans un chapitre qui
est le résultat d’une expérience acquise à bonne école. La dis
cussion du trépan a été clôturée par une communication de
1V1. Larrey. L’opinion de ce chirurgien, basée sur les nombreux
faits observés par lui et par son père devait avoir un très grand
poids et semblait très propre à éclaircir le doute. On s'attendait
peut-être à ce qu'il tranchât ce nœud gordien ; mais point. —
Le discours ou plutôt le mémoire de M. Larrey entre moins dans
le cœur de la discussion qu’il ne donue un exposé substantiel de
l’état de la question. C’est une bonne étude sur le trépan, et
bien que l’auteur dans ses conclusions résume les indications et
les contre-indications de cette opération, il termine enfin par ce
que tout le monde sait : c’est une ressource précieuse en chi
rurgie, — elle n’est pas sans gravité, — il faut la restreindre à
des cas bien définis. Mais tous les médecins en conviennent et
depuis longtem ps. Je ne vois rien là de nouveau.
M. Nélaton a été nommé membre de l’Institut. L’Académie
des Sciences n’eût pu mieux compléter sa section de médecine
et de chirurgie. Possédant déjà M. Velpeau, qui unit à une vaste
érudition une pratique plus vaste encore, elle possède aujour
d’hui la personnification du vrai sens clinique et de la chirurgie
contemporaine. Nous applaudissons volontiers aux succès d’un
maître que les honneurs laissent toujours aussi affable que
modeste.
A. Q.
�—
96
—
NOUVELLES ET VARIÉTÉS.
Nous annonçons, avec regret, la mort de M. le Dr Civiale, le
célèbre promoteur de la lilhotritie, le premier qui la pratiqaa
sur le vivant. M. Civiale était âgé de 75 ans, membre associé
libre de l’Institut, membre titulaire de l'Académie de médecine,
officier de la Légion-d’honneur, etc. Avec lui la chirurgie perd
une de ses gloires, la France une de ses illustrations.
— C’est le 16 août, dans moins de deux mois, que doit s’ou
vrir le Congrès médical de Paris. Chacun de nos confrères fait
sansdoute.au fond de son cœur, les vœux les plus ardents pour le
succès de ce congrès. Mais, pour la réussite d'une grande entreprisè, les vœux platoniques ne suffisent pas. C’est bien de pré
parer une réponse à l’une des questions du program m e; c’est
bien encore d aller assister aux débats ; mais il y a une autre
manière de participer h cette œuvre scientifique et nationale.
Un congrès n’est possible qu’autant qu’il possède des ressources
suffisantes pour la publication de ses actes. Moyennant une
souscription de 20 francs, remise entre les mains d’un des cor
respondants délégués, qui sont, à Marseille, MM. Coste, Seux,
Fabre, Chapplain et Villard, chaque adhérent reçoit une carte
de membre fondateur et recevra plus tard le com pte-rendu des
travaux du Congrès, qui formera sans doute un fort bel ouvrage
Le Corps médical de Marseille doit avoir a cœur de ne pas
rester, sous ce rapport, en arrière des médecins des autres
grandes villes, et de compter dans son sein un grand nom bre de
membres fondateurs du Congrès international.
Le Comité de rédaction.)
Marseille.— Typ, Arnaud, Cayer et Corop., rue Saint-Ferréol, 57.
—
97
—
INTÉRÊTS PROFESSIONNELS
DE L ’AVENIR DU CHEF-INTERNAT A MARSEILLE
(Suite 1)
Voilà toute la question : le chef-interne n’a pas qualité pour
punir. Il en résulte que sa position est très fausse, très délicate.
S ’il ne surveille pas les élèves, il ne remplit pas son mandat :
§ il fait son devoir trop en conscience, il casse les vitres et
amène du désordre. Pour se m aintenir sans encombres à ce poste
difficile, il faut une délicatesse de tact, un sentim ent des nuan
ces, une droiture de jugem ent qui font défaut à la plupart des
hommes. Le chef-interne est malheureusement trop porté à
marcher toujours le tablier rouge à la ceinture et la consigne à
la main. Cette conduite maladroite et peu intelligente lui attire
de nom breuses inim itiés, et fait naître à chaque instant, entre
lui et les élèves, des conflits qui troublent la marche régu
lière du service. Répression du côté du chef-interne, résistance
du côté des élèves, défiance et aigreur de part et d’autre, telle
est la situation. Que l’administration supprime le chef-interne,
quelle punisse elle-m êm e les élèves négligents, — les internes
aussi bien que les externes ou les stagiaires, — et la tranquillité
ne sera jam ais troublée.
Mais ce n’est point seulement avec les élèves que le chefinterne est en désaccord, c’est également avec les chefs de ser
vice. Ici le mal est plus sérieux.
Dans la pensée de l’administration, le chef-interne remplace
les chefs de service, lorsque ces derniers ne sont pas à l'hôpital
(I) Voir le n* du mois de Juin 1867
7
�—
A lui de faire la visite du soir, de surveiller les malades graves
et de remplir les indications urgentes. Mais pour remplacer con
venablement les médecins ou chirurgiens en chef, il faut abso
lument que le chef-interne soit au courant de tous les services;
et pour atriver a ce but, il est indispensable qu'il suive toutes
les visites. Or, ceci est matériellement impossible, les visites se
faisant a peu près à la même heure. Et d’ailleurs, le chef-interne
se trouve en contact avec plusieurs chefs de service ; il ne serait
pas homme s’il les voyait tous du même œil, et s’il n’avait pas
des préférences pour certains d’entre eux. Qu’en résulte-t-il?
C’est qu’au bout de quelque temps il a pris l’habitude de rester
dans les salles de ces derniers et de négliger à peu près com
plètement les autres.
Et puis le chef-interne est docteur ; il a un diplôme qui lui
donne , aussi bien qu’à ses chefs, le droit de voir et de soigner
des malades. Cette situation fait du subordonné le confrère,
l’égal, presque l'adversaire du chef. Aussi le chef-interne ne se
fait-il pas faute de changer les diagnostics établis par le chef de
service, de modifier les prescriptions de ce dernier, de critiquer
les opinions émises par lui. Ces faits-là nous les voyons tous
les jours et ils sont d’autant plus regrettables, que tous les
règlements du monde seront impuissants à empêcher leur repro
duction. Le mal tient à la nature même des conditions dans
lesquelles se trouve le chef-interne. Comment, on augmente de
toutes les manières possibles les pouvoirs de ce dernier, on lui
accorde des prérogatives de toutes sortes, on en fait un docteur
et l’on est étonné qu il oublie parfois le rang secondaire qu’il
occupe à l’hôpital ! C’est du contraire qu’il faudrait être surpris.
En vain nous objeclera-l-on que si le chef-interne est bien
élevé, que s’il a le sentimenf des convenances, il n’agira pas
comme nous le disons. Hé! mon Dieu ! ne faisons pas les hom
mes plus corrects qu’ils ne peuvent l’être. Sans d o u te, nos
chefs-internes sont parfaitement polis et convenables, mais ds
sont jeunes, ils sont ardents, ils ne réfléchissent pas toujours à
99
—
la portée de leurs paroles ou de leurs actes, ils se sentent le droit
d’avoir des opinions médicales, de traiter des malades à leur
guise, et comme tous les jeunes gens ils sont portés à abuser de
ce droit et à croire qu’ils font mieux que les autres. Cet état de
choses est essentiellement vicieux, mais il provient uniquement
de 1 institution du chef-internat; il n’est point le fait du chefinterne.
On ne comprend pas assez en général l’avantage immense
que trouve le chef de service à n’avoir affaire qu’à son interne.
Constamment en contact avec le médecin ou chirurgien en chef,
s'inspirant tous les jours des idées de ce dernier, l’interne pro
longe, pour ainsi dire, dans le service l’action de son chef. Un
pareil état de choses, outre qu’il facilite singulièrem ent la tâche
de l’interne, établit dans le service une régularité, une unité
d action dont les malades sont les premiers à 'profiler. Ce ré
sultat si im portant ne sera jamais obtenu, si entre le médecin et
son interne vient se placer un jeune docteur en médecine ayant
seul le droit d ’agir, — et d’agir à son g ré ,— dans le service, eu
l’absence du chef.
Autrefois, l’administration n’autorisait à concourir pour le
chef-internat que les jeunes gens qui n’étaient pas encore doc
teurs. Au fond, la situation était la m êm e; car, le plus souvent,
deux mois après le chef-interne passait docteur en médecine et
tout était dit ; nmis au moins le principe était sauvé. Cette res
triction n’existe même plus : aujourd’hui les rangs du concours
sont ouverts aussi bien au possesseur du diplôme qu’au simple
étudiant en médecine. Malgré la pensée généreuse qui a guidé
( administration dans l’adoption de celte dernière mesure, nous
n’en regrettons pas moins de voir sanctionnée officiellement
une situation qui compromet d’une manière évidente l’intérêt
des malades et la dignité des chefs de service.
Soit, dira-t-on: nous admettons en principe que, pour les be
soins ordinaires du service, le chef-interne est inutile; nous
comprenons même que l’unité d’action doit être plus facilement
�100
%>,v>* { ' maintenue entre les élèves et leur chef de service, qu’entre ce
.d lui-ci et le chd-inlerne. Mais encore faut-il que les internes
ù! soient capables de remplacer le médecin ou le chirurgien. Avezvous songé d'ailleurs que dans un grand hôpital ouvert nuit et
jour à toutes les souffrances il peut se présenter telle maladie qui
exige les soios immédiats d’un praticien instruit et expéri
m enté? En face d’un de ces cas qui demandent du sang-froid,
de l’initiative, du coup-d’œil, une instruction solide, comment
se comporteront de simples élèves peu habitués à se trouver
seuls en présence de malades sem blables? Nous répondrons à
cette objection en disant que nous voyons tous les jours se pro
duire le fait suivant: un blessé grave est amené à l'Hôtel-Dieu ;
c’est un maçon qui vient de faire une affreuse chute du haut
d’un échafaudage ; c’est un matelot qui a reçu un coup de cou
teau dans le ventre; on appelle le chef -interne ; celui-ci est
absent. Et cependant la nature de ses fondions obligerait ce
dernier à être toujours à l’hôpital; faut-il donc le blâm er, l’ac
cuser de négligence? En apparence oui, au fond non. Qu elle
est donc la raison qui peut expliquer ces absences m ultipliées?
Cette raison, la voici.
Le chef interne est un débutant dans la carrière médicale.
Naturellement ce jeune docteur songe à son avenir ; mis en re
lief par sa position à 1 hôpital,il est très souvent réclamé par des
malades de la ville; dans les vieux quartiers de Marseille, il est
même des familles qui ont l'habitude, en quelque sorte tradi
tionnelle, d'avoir pour médecin le chef-interne de l'hôpital. Ce
lui-ci, qui n a de position assurée que pendant cinq ou six ans,
ne laisse pas échapper celte occasion de former sa clientèle: il se
fait connaître, il voit des malades et, par conséquent, il est très
souvent hors de l'hôpital. Quelquefois même, avons-nous dit, il
a pu être nommé médecin de quelque société ou de quelque
grande compagnie. Voilà de nouveaux profits, mais aussi de
nouvelles obligations, de nouvelles charges, de nouvelles occa
sions de ne pas être à l’hôpital. Nous accordons qu’on pourra
—
■sr. y
—
—
101
sur ce dernier point modifier la situation. Soit, on obligera le
chef-interne de n’avoir aucune place en dehors de celle qu’il
occupe à l’hôtel-Dieu ; mais pourra-t-on l'empêcher d’avoir une
clientèle? Il y a là une question de fait et une question de prin
cipe. En fait, il serait injuste d’exiger d’un jeune homme qu’il ne
s’occupât point de son avenir ; en principe, on ne peut pas em
pêcher un docteur en médecine de voir des malades. Non, on
n’a pas ce droit, parce que le devoir du médecin est de soulager
les souffrances de l’hum anité, parce que dans certains cas le
chef-interne, docteur en médecine, serait coupable s’il ne répon
dait pas à l’appel des malades
11 faut donc, qu’on le veuille ou non, accepter forcément ce
fait, à savoir que les internes se trouveront souvent seuls en pré
sence de ces cas graves, accidentels, dont nous parlions tout à
l’heure. Et d’ailleurs quand ces cas sont d’une gravité excep
tionnelle, le chef-interne lui-m êm e, — en admettant qu’il soit
présent, — ne prend pas sur lui la responsabilité d ’une déci
sion ; il envoie chercher alors le chef de service qui, seul, peut
agir dans ces cas particuliers avec toute l’autorité du savoir et
de l’expérience.
Qu’on ne vienne donc plus alléguer en faveur du chef-interne
la nécessité d ’avoir à toute heure un médecin instruit, prêt à
faire face à toutes les éventualités de la pratique chirurgicale ou
médicale. Dans les cas réellem ent difficiles et spéciaux, l’interne
fera ce qu’aurait fait le chef-interne : il enverra chercher le chef
de service ; dans tous les autres cas, il agira comme il agit déjà
tous les jours, c’est-à-dire qu'il fera pour le mieux, et, qu’on en
soit persuadé, il ne fera pas plus mal que le chef-interne.
Nous ne doutons pas que ceci ne soulève de nombreuses
objections. Les partisans du chef-internat ne manqueront pas
de faire observer que les élèves sont trop faibles pour remplacer
le chef-interne, (pie les concours donnent chaque année de
déplorables résultats, que le nombre des élèves médiocres parait
augm enter d’une façon désespérante , preuve évidente, s’em-
�—
presseront-ils d'ajouter, que le chef-interne est indispensable.
Nous sommes fâchés de le d ire , mais ni les faits , ni la théorie
ne confirment celte opinion. Les faits de tous les jours sont
là ; ils prouvent de la manière la plus évidente que nos internes
sont des jeunes gens instruits et sérieux. Pendant une année
entière Yhôpital de la Conception est resté sans chef-interne;
durant ce long intervalle de temps, des malades de toutes sortes
ont réclamé les soins des internes ; 11’ont-ils pas été traités
régulièrement et avec intelligence? Dans les cas ordinaires
l ’interne de garde agissait comme il l’entendait; dans les cas
très-difficiles il envoyait chercher le chef de service; si, par une
raison quelconque, ce dernier ne pouvait se rendre à l ’hôpital, les
internes se réunissaient, mettaient encommun leurs lumières et
prenaient le parti qu’ils jugeaient être le meilleur. Nous tenons
à constater que le résultat général a été très bon, que les élèves
et les chefs de service étaient on ne peut plus satisfaits et que
dans aucun cas on n’a eu à accuser un interne de maladresse,
de négligence ou d’ ineptie. En fait donc la question nous paraît
tranchée très positivement en faveur des élèves.
C’est sur la question théorique que nous attendons les parti
sans du chef-internat. Comment, vous prétendez que le chef-in
terne est indispensable à cause de la médiocrité des élèves et de
la faiblesse des concours! Mais c’est un langage tout opposé
qu’il faut tenir. Au lieu de dire : les élèves sout faibles, donc le
chef-interne est nécessaire; dites, s’il vous plaît: le chef-interne
existe, donc la responsabilité des élèves est supprimée, donc
l’émulation n ’existe plus, donc les concours sont moins goûtés
et par conséquent plus faibles, doue les élèves sont médio
cres (1). El en effet, nous ne voyons pas ce que la position d ’inierne à Marseille peut avoir de séduisant au point de vue scien
tifique. Que cette place offre quelques avantages à des jeuues
gens sans fortune, nous eu convenons ; mais à cette époque de
105
la vie où le jeune homme se livre aux études professionnelles, ce
qu’il faut considérer avant tout c’est l’instruction; or, les attri
butions de l'interne, sous le chef-interne, se réduisent presque
à celles d’un scribe ou d’un bureaucrate. L ’interne lient les ca
hiers de service, il fait quelques pansements simples et tout est
là. Mais, dira -t-o n , il a les jours de garde, excellente occasion
pour lui de s’instruire, car alors il se trouve en face de l’imprévu
et forcé d’agir par lui-même. Savez-vous en quoi consiste le
plus souvent cet imprévu dont on parle tant? A tâter le pouls
de quelques fiévreux et à panser quelques plaies, c’ est-à-dire à
accomplir une tâche dont un étudiant en médecine qui a six
mois d’études s’acquitterait dans la perfection. Bien heureux est
l’interne assez favorisé pour avoir à appliquer un appareil de
fracture; plus heureux encore celui qui, par le plus grand des
hasards, à la chance étonnante de suivre un accouchement na
tu re /e t de lier un cordon ombilical! Il est formellement en
joint à l ’interne de garde de ne pratiquer aucune opération, de
ne poser aucun appareil compliqué, d’avoir recours au chef-in
terne dans toutes les circonstances un peu difficiles, c’est-à-dire
dans toutes celles où l ’initiative personnelle aurait à jouer un
rôle.
En vain objectera-t-on que, d après notre propre aveu, l’in
terne accomplit parfois des travaux plus sérieux que ceux que
nous venons d’indiquer. S’il les accomplit, c’est en dépit de la loi
cl par infraction aux réglements; or, c’ est la question régle
mentaire, légale et théorique du chef-iuternat que uous discu
tons en ce moment. Si l’interne, par exemple, pratique une
opération urgente, c’ est que le chef-interne est absent, c’est
par conséquent que celui-ci, —
à tort ou à raison —
est en
faute. Si le chef-interne ne peut pas, à certains moments éviter
d’ être en faute (et nous l ’avons démontré), c’est que l’institution
est mauvaise. Supprimez alors le chef-interne. Mais si vous le
maintenez reconnaissez avec nous que les réglements l’obligent
(t) Il est bien entendu que nous sommes dans ce moment en pleine hypothèse.
à ne laisser à Linterne que la partie la moins intelligente du
�travail. Dans cette discussion de principe, nous avons donc le
Comme nous le disions au commencement de cet article, le
droit de dire que le chef-internat efface presque complètement
chef-interne ne se renouvelle que tous les trois ans, et il nous
la personnalité de l'interne et réduit a néant la responsabilité
empêche de mettre chaque année à la disposition de plusieurs
de ce.dernier.
internes les immenses ressources qu il absorbe à son profit. Il
Or, c'est la responsabilité qui fait les forts ; c'est elle qui rend
est donc un obstacle a l’instruction des élèves. Ajoutons qu’en
homme et praticien parce quelle amène inévitablement à sa
diminuant le nombre, l ’importance et le prestige des concours,
suite les réflexions sérieuses, la conscience de la dignité person
il abaisse forcément le niveau des études. Est-ce là une institu
nelle et la nécessité du travail. Pourquoi les internes de Paris
tion digne du X IX ” siècle? A notre époque où les idées larges
ou de Lyon jouissent-ils d’une réputation si universelle, si ju s
et libérales ont revivifié toute chose, où le niveau intellectuel
tement méritée d'ailleurs? Ce n’est pas seulement parce que les
s'élève de plus en plus, où les moyens d’instruction sont mis
concours sont difficiles e lle s places peu nombreuses, relative
largement à la portée de tous, où les questions individuelles cè
ment au nombre des candidats, c’est surtout parce que l’interne
dent le pas chaque jour à l’intérêt général, convient-il de con
de Paris ou de Lyon est un personnage. Il fait la visite du soir,
server un système si profondément arriéré, si peu en harmonie
examine les nouveaux malades et commence le traitement : en
avec les aspirations et les besoins du jour?
l’absence du médecin ou chirurgien en chef, il le remplace et
Nous espérons que l'administration de nos hospices, qui joint
iulte seul contre toutes les difficultés pratiques qui se présentent
à un zèle infatigable I intelligence de toutes les idées grandes et
a chaque instant dans un grand service; en un mot, ses pouvoirs
justes, remettra sérieusement à l ’étude cette question du chef-
sont étendus et sa responsabilité sérieuse. En quittant l ’internat,
internat, qui ne nous parait pas avoir été suffisamment appro
il est déjà praticien, il entre alors sans hésitation dans la carrière
fondie. Elle pourra le faire d'autant plus facilement qu’elle est
et la parcourt le plus souvent avec succès. O nje comprend sans
complètement désintéressée dans le débat et que l’ existence du
peine, une place qui assure de tels avantages aux jeunes gens
chef-interne ne présente plus pour elle, au point de vue admi
doit être fort ambitionnée ; aussi les candidats sont-ils très-nom
nistratif, aucun avantage. Autrefois, en effet, le chef-interne
breux et le concours de l’internat est-il à Paris et à Lyon une
n était pas seulement un médecin, c’était presque un sous-di
véritable lutte d’intelligence à laquelle prennent part des élèves
recteur responsable. Entre lui et les administrateurs de nom
venus des differents points de la France, on pourrait presque
breux rapports d affaires existaient, lesquels n’avaient pas trait
dire du monde entier.
exclusivement à la médecine ou à la chirurgie. De nos jours, il
Rien de semblable dans notre bonne ville ; peu soucieux d’une
n’en est plus de même; le chef-interne ne s’occupe que des élè
position qui ne les met nullement en évidence, les jeunes gens
ves et des malades; sa responsabilité ne va pas au-delà. Dans
sont peu empressés de se présenter à l'internat. A peine de loin
ces conditions, pourquoi l ’administration tiendrait-elle à con
en loin un candidat étranger à la ville et à l’école vient-il dis
server le chef-interne? Que celui-ci réponde, aux yeux des
puter aux élèves de nos hôpitaux le droit d’écrire les prescrip
administrateurs, de tous les services de la maison, ou que cha
tions sous la dictée du chef de service. Devrait-on s’étonner si
que interne ait la responsabilité de son service particulier,
dans ces conditions les concours étaient faibles et les candidats
qu’importe? Le point capital, c’ est que la direction générale
peu remarquables?
soit constamment une; or, l’unité entre la tête et le brassera
�106 —
d autant plus forte— s'il y a plusieurs brasau lieu d un seul, —
—
107 —
L'organisation que nous proposons n'a pas le mérite de la
que chaque membre travaillant moins sera moins fatigué et con
nouveauté; elle n’en est que meilleure, car elle est jugée de
séquemment plus propre à agir. Ajoutons qu’on évitera par là
puis longtemps. A Paris, à Lyon, à Bordeaux, à Bruxelles, à
ces regrettables conflits entre les chefs de service et le chef-in
terne, entre les élèves et ce dernier, conflits pour lesquels l ’au
torité hospitalière a souvent à intervenir, et qui fatiguent tout le
Gand, à Liège, à Louvain, etc., — villes dans lesquelles nous
avons pu constater nous-même le fait que nous avançons, —
il
n’y a pas de chef-interne et partout les résultats sont excellents.
monde, les administrateurs aussi bien que les chefs de service et
D’ailleurs, à Marseille même, on a expérimenté ce système. Ainsi
les élèves.
que nous l ’avons déjà dit, pendant un an il n’y a pas eu, à l’Hôpi
Ainsi donc aucun intérêt scientifique ou administratif 11e m i
lite en faveur du chef-internat et nous pouvons résumer tout ce
qui précède en disant que celte institution est à la fois une
superfétation, une impossibilité , une complication véritable.
tal de la Conception, de chef-interne, et durant ce long espace
de temps,—
qu’ on veuille bien nous passer celte expression,—
tout a marché sur des roulettes. Bien plus: lorsqu’à la suite de
cette expérience décisive, l’administration des hospices consulta
les chefs de service sur la question de savoir s’il convenait de
Nous concluons donc à la suppression du chef-interne ; nous
demandons pour Marseille ce qui existe déjà dans presque toutes
les grandes villes, c’est-à-dire que chaque interne relève uni
quement de son chef de service et de l’administration. Ne crai
gnons pas d’augmenter les pouvoirs de l’interne; laissons-lui
l'organisation du service et la direction immédiate des élèves
externes et stagiaires. Que risquerons-nous en agissant ainsi,
puisque l’ interne sera sous la dépendance directe du médecin ou
chirurgien en chef pour tout ce qui regardera le traitement des
malades, de l'administration pour ce qui ne sera pas exclusive
ment scientifique?
Quanta la question du remplacement des internes, eu cas de
congé ou de maladie, elle n’en est pas une. Il serait très-facile
en effet de réserver chaque année au concours de l’internat, à
la suite des places données aux internes titulaires , deux ou trois
places d internes provisoires, lesquels ne jouiraient des attribu
tions des titulaires (appointements, frais de nourriture, etc.),
supprimer le chef-interne ou de le maintenir, la réponse fut una
nime en faveur de l ’abolition du chef-internat. On comprend
alors l ’étonnement de tous, lorsque quelques mois plus tard on
eut connaissance de la décision prise par l’administration : le
chef-internat était maintenu et un nouveau concours annoncé
pour le mois de novembre prochain. Sans doute il y avait lieu
d’ être surpris ; si l’administration avait sur la question en litige
une opinion arrêtée, à quoi bon faire une longue expérience et
prendre conseil des chefs de service ? Mais si elle demandait
l ’avis de ces derniers, qui devaient être ce nous semble assez
bous juges en pareille matière, pourquoi ne pas tenir compte de
leur opinion ? Sans contredit, l’administration a eu ses raisons
pour maintenir le chef-internat, et nous ne douions point
qu’elles ne soient sérieuses. Toutefois nous prendrons la liberté
de lui dire qu’en adoptant cette mesure, elle n’a peut-être
point songé à toutes les fâcheuses conséquences que pouvait
avoir une pareille détermination.
que lorsqu’ils remplaceraient ces derniers. Ces nouveaux inter
nes ne grèveraient d'aucune charge le budget des dépenses et
l’administration pourrait compter sur eux puisqu’ils auraient été
reçus au concours et auraient fait leurs preuves.
El maintenant revenant—
un peu tard, il est vrai — au titre
de notre travail, demandons-nous ce que l’avenir réserve au
chef-internat. A cette question nous ne pouvons répondre qu’en
�—
affirmant nos convictions et manifestant nos espérances. Le
109 —
publier les résultats de leurs recherches et d’enrichir la science
chef-internat est un débris du passé; c’est une grande ruine,
par leurs travaux. Aujourd’hui, nos confrères ne craignent plus
mais ce*n'est pas autre chose : qu'on l’entoure de respect et de
autant de faire gémir la presse, par là ils se rendent utiles et
vénération,.qu’on laisse la mousse et le lierre le tapisser de leur
montrent ce qu’ils valent.
poétique enveloppe, ce sera alors un monument qui dira a nos
Pour taire progresser la science, il ne suffit pas d’inventer, il
neveux l’histoire du passé, et a ce titre il pourra encore être
faut aussi perfectionner et vulgariser. C’est ce qu ont parfaite
utile. Mais qu’on n'espère pas lui douner une vie nouvelle en
ment compris le Dr Morell Mackensie, de Londres, et son tra
blanchissant ses murailles et rajustant ses pierres disjointes ; ce
ducteur, le Dr Nicolas, de Marseille. La laryngoscopie est une
travestissement ne servirait qu’à taire ressortir plus encore son
découverte précieuse comme moyen d’exploration physiologi
impuissante vétusté.
que et médicale ; elle ouvre aussi une ère nouvelle à la théra
Trop souvent on a accusé Marseille d’ être une ville rétro
peutique des maladies du larynx, qui pourront désormais être
grade, entièrement vouée au culte d’ une tradition routinière,
attaquées directement par une médication topique. MM. Morell
incapable d’immoler ses habitudes sur l ’autel du progrès. Il est
Mackensie et Nicolas ont donc rendu un véritable service en
temps de faire justice de ces fausses accusations. Le plus spiri
contribuant à faire connaître cet art nouveau et si éminemment
tuel de nos compatriotes, l’ illustre et regretté Méry, appelait
u tile.
Marseille la Porte de l’univers ; à nous de prouver que notre
L ’ouvrage commence par une étude historique, où sont suc
ville est digne de ce nom et qu elle peut le revendiquer aussi
cessivement exposées les tentatives faites depuis Levret jusqu’à
bien pour les choses de l’ intelligence que pour les richesses
Czermak pour explorer, à l ’aide d’ un m iroir, la gorge et le larynx.
matérielles. Nous avons pleine confiance dans l’administration
Cette étude se fait remarquer par l'érudition dont elle témoigne
de nos hospices ; nous espérons fermement que dans celte cir
et l’impartialité qui préside aux jugements de l’auteur. Cepen
constance elle cédera au vœu de tous et que nous pourrons
dant Morell Mackensie, initié par Czermak à l’art où il est de
bientôt célébrer dans un joyeux hymne les louanges du dernier
venu aujourd’hui si habile, n’a peut-être pas assez mis en relief
chef-interne.
la part considérable qui revient à Garcia dans la découverte et à
D1 Seox fils.
Ludwig Turckdans la vulgarisation de la laryngoscopie. Véritable
créateur de cette méthode nouvelle, Garcia sut l’utiliser pour
BIBLIOGRAPHIE.
ses travaux de physiologie; Turck l ’introduisit dans le domaine
de la médecine proprement dite, où Czermak démontra mieux
Du Laryngoscope et de son emploi dans les m aladies de la gorge ,
avec un appendice sur la Rhinoscopie ,
par Morell Mackensie ,
Traduit de l’anglais sur la seconde édition, par le Dr Émile Nicolas.
que personne son immense utilité pratique.
La question historique une fois vidée, nos auteurs passent à
la description du laryngoscope, et ils examinent d’une part le
m iroir laryngien lui-même, d’autre part les procédés d’éclairage,
Un changement heureux commence à s’opérer dans les ha
bitudes du corps médical de Marseille. Praticiens habiles et,
pour la plupart, instruits, nos prédécesseurs négligeaient de
desquels dépend si souvent la réussite des investigations laryngoscopiques. Traçant le parallèle de l’éclairage direct et de
l’éclairage réfléchi, le médecin anglais donne, dans la majorité
�— no —
— 111 —
«les cas, la préférence à ce dernier, tandis qu 'a l’exemple de
qui appartiennent à sa race : il est précis, il est méthodique, il
M. Moura Bourouillon, M. Nicolas préfère l'éclairage direct.
Les appareils une fois connus, les auteurs enseignent la ma
va droit au but pratique. Des figures bien faites et assez nom
breuses facilitent d’ailleurs l’intelligence du texte. Quant au
nière de s’en servir en indiquant d'abord les principes et en dé
traducteur, une connaissance approfondie du sujet lui a permis
crivant ensuite la pratique de l’art, les difficultés à vaincre, les
de comprendre et de rendre parfaitement la pensée de l ’auteur,
fautes à éviter.
il a été ce qu’il fallait être, exact, clair et correct. Il a modeste
L ’art d'explorer le larynx une fois appris, il faut connaître cet
ment essayé ses forces dans une traduction ; mais, maintenant
organe tel qu'il se présente dans le m iroir; c’est ce qui fait,
qu’ il a réussi, nous devons lui demander plus encore. Comme il
dans l ’ouvrage de Mackensie, l’objet d’une description très-
l’a dit excellemment dans son introduction, « Quoique la laryn
soignée.
goscopie demande une étude spéciale, elle ne constitue pas une
Sont ensuite groupées dans un même chapitre les parties
spécialité, c’ est une méthode d’examen de plus qui s’offre au
dites accessoires delà laryngoscopie; on y enseigne l’aulo-Iaryn-
médecin. » Grâce à cette méthode nouvelle, les maladies du
goscopie, les moyens de montrer h plusieurs personnes h la fois
larynx et les manifestations diathésiques qui se fixent sur cet
le larynx d’un même sujet, ce qui, en attendant uu nom plus
organe pourront être désormais étudiées avec plus de fruit.
convenable, est désigné sous celui de récipro-laryngoscopie ; la
Qu’au moyen du laryngoscope, M. Nicolas poursuive ses études
manière d’inspecter la région infra-gottique, etc. Les instru
pathologiques sur le larynx, et qu’ensuite il les publie. Nous
ments grossissants et les instruments plus ou moins adjuvants,
lui prédisons des succès dont ses confrères de Marseille seront
tels que la pincette épiglottique, le fixateur et le support pour la
heureux.
À. F.
tète sont aussi décrits dans ce chapitre.
Mais la partie la plus intéressante et la plus neuve de l’ouvrage
dont nous ne donnons ici qu’une trop courte analyse, est celle
T R O U S S E A U
où sont exposés d’une part les procédés de médication topique
que le laryngoscope permet d’appliquer exactement sur les par
ties malades, et d'autre part les opérations diverses qu’on peut
aujourd’hui, grâce à la même découverte, pratiquer sur cette
région. Nous signalerons surtout l’ instrument inventé par Mac
kensie pour galvaniser les cordes vocales et sa lancette poul
ies scarifications, son forceps, ses ganses métalliques, ses an
neaux et son écraseur, destinés à l ’ablation des tumeurs. Des
observations déjà nombreuses et suffisamment détaillées prou
vent combien la laryngoscopie s’est perfectionnée entre les
mains du médecin anglais et quels services importants elle peut
rendre à la thérapeutique.
Morell Mackensie paraît posséder à un haut degré les qualités
Le faîte de notre profession est cruellement éprouvé : en peu
de temps, la mort vient de frapper Jobert, Follin et Civiale; au
jourd’hui elle nous enlève un de nos maîtres les plus vénérés et
les plus aimés. Trousseau a succombé le 25 juin dernier, après
plusieurs mois de vives souffrances, dont il avait suivi les progrès
avec calme et dont il avait calculé la fatale issue avec une rigou
reuse exactitude.
Trousseau était né à Tours en 1801. Docteur en 1825, agrégé
en 1826, il fut chargé, la même année, de visiter plusieurs dé
partements désolés par diverses épidémies, et, en 1828, il fit par
tie, avec M. I .ouis, de la commission envoyée à Gibraltar pour y
étudier la fièvre jaune. Il fut décoré au retour de cette mission.
Médecin des hôpitaux en 1851, il conquit en 1859, après un
concours mémorable, la chaire de thérapeutique et de matière
�I
— 113 —
médicale de la Faculté de Médecine de Paris, et passa, en 1850,
la chaire de clinique médicale de l'H ôtel-D ieu. Il fut successi
vement élu membre de l’Académie impériale de Médecine , et
nommé officier, puis commandeur de la Légion-d’Honneur.
En 1864, Trousseau, se sentant trahi par ses propres forces,
laissa sa chaire de clinique pour reprendre celle de thérapeu
tique où il reçut un accueil enthousiaste. Mais obligé de se reti
rer deux ans plus tard, il quitta définitivement la Faculté avec le
titre de professeur honoraire.
Trousseau avait été Représentant du peuple a la Constituante
de 1848; mais il ne fut pas réélu a la Législative et reprit sans
retour ses travaux scientifiques. Quoique courte, sa vie politique
lui a créé des sympathies qui ne fo n t jamais abandonné.
Avec Trousseau disparaît une grande figure médicale. Il a
exercé sur son époque une inlluence considérable. S’il a été un
des plus illustres chefs de cette école de cliniciens réprésentée
par Chomel, Rostan, MM. Bouillaud et Piorry, il a été aussi le
principal instigateur du mouvement qui a régénéré la thérapeu
tique après Broussais et lui a imprimé, dans ces derniers temps,
un essor si puissant. Merveilleusement doué, il fut a la fois pro
fesseur célèbre, clinicien éminent, brillant orateur, écrivain
très répandu. Malgré les occupations d’ une immense clientèle et
d une consultation européenne, il n’a cessé de consacrer une
partie de son temps h la science. Ses livres, plusieurs fois édités
et traduits en diverses langues, sont entre les mains de tous les
médecins et de tous les élèves. Son Traité de Thérapeutique ,
fait avec la collaboration de M. Pidoux, et sa Clinique de T HôtelDieu sont des monuments impérissables de notre littérature mé
dicale.
Son cœur était à la hauteur de son talent. D une bienveillance
infinie pour la jeunesse qui se pressait autour de son enseigne
ment, excellent pour tous, unissant les qualités de l'artiste à
celles du savant, il sut, au faite de la renommée, rester simple,
noble et généreux ; toute sa vie, il conserva un culte pieux pour
ses deux maîtres, Bretonneau et Récamier. Sa mort est un deuil
pour la famille médicale, une perle immense pour la science
qu’il a servie, malgré ses souffrances, jusqu’à ses derniers mo
ments.
Dr C. lsNARI).
à
RELATION
d ’one
AMPUTATION TOTALE DU MAXILLAIRE INFERIEUR
P a r N . <’O S T E ,
Professeur de clinique chirurgicale à l’École de Médecine de Marseille
et Directeur de l’École.
Lecture faite à /'Associâtion Scientifique de France, dans sa Séance du soir
du 20 ju in 1807 ( Session de Marseille ).
Messieurs,
J’ai besoin de quelque indulgence pour la nature même de
mon sujet, et j ’ai l ’honneur de vous la demander.
Du reste, je ne serai pas long. Votre attention a été charmée
jusqu'à présent par les communications si pleines d'intérêt qui
vous ont été faites, et je ne voudrais pas la fatiguer maintenant.
Je désire vous intéresser un moment, si je le puis, et sans
trop vous émouvoir.
Un fait chirurgical d’une gravité exceptionnelle vient de se
produire à la clinique de l'école de Marseille.
La médecine opératoire a dû intervenir ici dans son appareil
le plus formidable, et le résultat a été heureux.
Au double point de vue de son extrême importance et du
succès de l’entreprise, l ’exposé de ce fait m’a paru digne de
compter parmi les travaux de notre Association. J ai donc l'hon
neur de le lui présenter, avec quelques rédlexions qui en décou
lent naturellement.
Il s'agit de l’ablation totale du maxillaire inférieur, nécessitée
par une dégénération cancéreuse de l ’os et des gencives.
La malade qui porte celte affection a 55 ans et parait en avoir
Marseille. — Typ, Arnaud, Cayer et Conop., rue Saint-Ferréol, 57.
50. Son terrible mal l’a vieillie avant l’àge. Cette malheureuse
s
�- 115 -
— 114 —
vient d’un village situé sur la limite de notre département; elle
est reçue à 1Hôtel-Dieu, dans mon service, le 28 avril dernier,
et je l'opère quelques jours après, le 7 mai.
vive espérance , la teinte terreuse de la peau, au lieu d’accu
ser une généralisation du cancer, peut bien être seulement l’in
dice d’une anémie protonde, anémie qui a plusieurs causes: une
Le diagnostic est facile, car les symptômes sont nettement
alimentation depuis longtemps insuffisante, la douleur et toutes
accusés: tumeur très-saillante, légèrement bosselée, occupant
ces petites hémorrhagies, si souvent renouvelées, par les ulcé
toute l ’étendue de la mâchoire inférieure, son corps et ses bran
rations des gencives.
ches, mais montant un peu plus h droite qu h gauche ; énorme
hypertrophie et dureté extrême des gencives correspondantes,
qui portent ça et là des ulcérations superficielles, presque inces
samment saignantes ; élancements douloureux et h peu près
continuels.
Je m’arrête h celte pensée et j’y puise une résolution su
prême.
Après avoir très sérieusement médité sur la situation de ma
malade, je ne désespère pas de sa guérison par l'intervention
chirurgicale. Je me décide fermement à l ’opérer malgré l’im
Cette tumeur ne peut être, évidemment, qu'un ostéosarcome.
mense danger de la tentative; je me décide a l’opérer, d’abord
Son origine date de la fin de 1862; elle s’est développée len
parce que, si faibles que soient les chances de réussite, elles ne
tement pendant les premières années, puis elle a considérable
ment grandi dans ces derniers temps.
La langue et le plancher buccal sont intacts. 11 en est de
même, et très heureusement, des ganglions lymphatiques voi
sins: ganglions cervicaux et ganglions parotidiens.
Sous la peau de la région sus-hyoïdienne, peau rouge et
amincie, je perçois une fluctuation manifeste. 11 y a là, non
celle fausse fluctuation qu’on rencontre dans la dégénérescence
sont point impossibles; puis, parce que l’affection que porte celte
femme, si elle est abandonnée à elle-même, la conduira sûre
ment, inévitablement et prochainement à la m ort; enfin, par cet
antre motif, que la patiente, dont l’état est devenu vraiment into
lérable, me demande instamment l’opération comme un dernier
moyen de salut.
L ’opération, en ellet, doit être de toute manière, quelle que
soit son issue, pour cette malheureuse une délivrance.
encéphaloïde, mais l’ondulation réelle delà présence du pus; un
abcès s’est formé dans ce point, par suite d’un phlegmon cir
Ma malade était fort anémique, je viens de le dire. Cette cir
conscrit, comme on le voit quelquefois au voisinage des tumeurs
constance m ’a empêché, bien à regret, mais absolument, de lui
malignes.
L ’amaigrissement de la malade révèle une grave atteinte
portée à la nutrition.
Du reste, j ’ignore si c’est une illusion, mais je ne trouve pas
donner du chloroforme, car j ’aurais beaucoup accru le péril
qu elle allait courir.
L ’anémie profonde, en prédisposant à la syncope, est une
contre-indication formelle de l’anesthésie chloroformique.
précisément chez cette femme la couleur jaune paille qui a été
Je serai aussi bref que possible sur les détails descriptifs de
donnée comme le signe le plus expressif de la cachexie cancé
mon opération. Je ne veux pas oublier que, s’il y a ici des mé
reuse.
decins, l'honorable assistance compte, en bien plus grand nom
Il pourrait, malheureusement, en être ainsi. L ’économie a eu
bre, des gens du monde, familiarisés, sans doute, avec les
le temps, sans doute, dans une période de cinq années, d’être
choses de la science, mais dont l ’oreille est peu habituée à de
infectée par le virus cancéreux. Toutefois, et c’est ma plus
pareils récits.
�— 116 —
L ’altération osseuse est de telle nature et I envahissement des
se montrent tout-à-fait saines, ainsi que je l’avais supposé. Je
gencives si complet, que l’espoir d’une régénération ultérieure
fais successivement, d’avant en arrière et de bas en haut, partie
de l’os par la conservation du périoste doit s’évanouir. Le maxil
avec le bistouri, partie avec mes doigts, l’isolement des deux
laire et son enveloppe nourricière ne forment qu'une seule et
portions de la mâchoire, en commençant par le côté gauche, qui
même masse morbide, qu'il faut emporter du même coup.
est le moins malade.
Une très longue incision, dont les extrémités touchent aux
Dans les dissections profondes et sur les régions où l’on est
apophyges zygomatiques, passe à peu près sur le milieu de la
exposé â blesser des artères d’un assez fort calibre, toujours
tumeur, qu’ une rapide dissection et la division de la muqueuse
difficiles à lier, une faute est bientôt commise, un coup de bis
buccale mettent entièrement à découvert. Des deux lambeaux
touri maladroit est bientôt donné. Pour éviter cela, il faut que
qui résultent de l’incision, le supérieur représente la lèvre infé
l’action des doigts se substitue, autant que possible, à faction
rieure et les joues ; l ’inférieur comprend la peau des régions
de l’instrument tranchant; il vaut mieux déchirer que couper.
thvro-hyoïdienne et parotidiennes. Pendant que le bistouri déta
Dans ce travail, plus douloureux peut-être pour le patient, mais
che ce lambeau, très aminci sur la ligne médiane, un Ilot de pus
incontestablement plus sur, le pouce sert beaucoup l’opérateur,
sort d'un vaste abcès formé sur ce point. Cet incident n ’est, à la
parce qu'il agit très énergiquement.
rigueur, ni une difficulté ni un danger, mais, au point de vue de
Ces règles, que je cherche depuis longtemps à vulgariser dans
la restauration des parties, un grave inconvénient. Celte peau,
mon enseignement et dans toutes les occasions qui s'offrent à
si amoindrie dans son épaisseur par la fonte purulente du tissu
moi, devraient être écrites en gros caractères dans les livres de
cellulaire, cette peau presque réduite à son squelette, ne pourra
médecine opératoire.
être conservée, et le sacrilice que je vais être obligé d’en faire
par un grand V fera a mon lambeau inférieur une large échan
crure fort compromettante pour sa réunion à l ’autre lambeau et
même pour sa vitalité.
C’ est une nécessité à laquelle je suis forcé de me résigner.
Je coupe en deux, après cela, le maxillaire sur la ligne mé
diane.
Ce temps de l'opération, temps indispensable, est rapidement
exécuté au moyen de la scie à chaîne, dont le fil conducteur est
aisément porté de bas eu haut, derrière la tumeur et dans les
profondeurs de la bouche, non par l’aiguille courbe ordinaire,
qui eût été beaucoup trop courte, mais par l’aiguille à gaine
dont se servait Gerdy pour son opération de la cure radicale de
la hernie.
Les deux moitiés du maxillaire sont alors écartées et, dans
cette grande plaie béante, les parties charnues voisines de l’os
Avant de couper les muscles géniens, et pour prévenir un
accident de suffocation que pourrait amener le retrait de la
langue, j'ai soin de la retenir par une anse de fil passée à travers
elle, au-dessus de son frein, et confiée à un aide. La portion
condylienne, à gauche, me paraissant saine, je puis me dis
penser de désarticuler, et, d'un trait de la scie à chaîne, je -résé
qué l’os bien en arrière de son angle.
Une remarque importante, je crois, trouve ici, dès à présent,
sa place.
Dans une opération aussi grave que celle de l’amputation totale
du maxillaire inférieur, on pourrait, il me semble, amoindrir
notablement les chances fatales, surtout au point de vue de l ’hé
morrhagie, qui est le principal danger, en ne désarticulant pas les
condyles, si l’ intégrité de l’os dans ces points le permettait et si,
partant, on pouvait le scierde chaque côté à la base de l'apophyse
coronoïde, au-dessous de l’insertion du tendon du temporal.
�— 119 —
— 118 —
Le grand écueil de cette opération est, derrière le condyle, la
présence de la carotide externe et de ses deux branches term i
Le pansement terminé et la malade portée dans son lit, l’exa
men de la mâchoire y montre celte transformation de tissu pa
nales, la maxillaire interne et la temporale. Il faut que cet écueil
thognomonique de l’ostéosarcome: le corps de l’os, notamment,
soit évité. Là surtout est le péril.
est le siège d ’un ramollissement fougueux, d’une sorte de carni
La moitié droite de la mâchoire est ensuite enlevée.
J’espérais d'abord pouvoir faire comme à gauche. Je place
donc ma scie encore sur la base de l’apophyse coronoïde,
et l’os est abattu. Mais je reconnais alors que celte partie que je
fication.
L ’hypertrophie de la gencive offre aussi, au plus haut point,
les caractères anatomiques ordinaires du cancer.
La patiente est ranimée par des cordiaux et du bouillon, don
voulais laisser est manifestement altérée ; la portion celluleuse
nés à de courts intervalles. 11 y avait un danger imminent à con
du montant du condyle est mollasse et fougueuse, presque dif-
jurer, l'excessive faiblesse provenant et de la perle du sang et
fluenle. Il n ’y a pas à hésiter ; je dois l ’enlever aussi. Je saisis
de la douleur.
immédiatement et solidement avec un fort davier droit ce bout
Les suites immédiates sont heureuses. Pas de fièvre, point de
d’os, dont le tissu compacte est sain et résistant; je l’attire for
frissons. D’abord la déglutition , un moment difficile, exige
tement en bas, en combinant mon mouvement de traction avec
l’emploi de la sonde œsophagienne. Mais bientôt la malade peut
des efforts de torsion. Tandis que ma main gauche exécute cette
avaler sans peine par un moyen des plus simples: une longue
double manœuvre, le scalpel que porte ma main droite divise,
canule en gomme élastique, adaptée au bec d'uu biberon ordi
en rasant le condyle, la capsule fibreuse qui l ’unit h la cavité glé-
naire, et qui plonge aisémenf dans le pharynx.
noïde et le tendon du petit ptérygoïdien au-dessus de son atta
Toutefois, la nourriture, forcément liquide, prise par la bou
che à la partie antérieure du col du condyle. La désarticulation a
che étant insuffisante, je prescris, chaque jour, deux verres de
lieu tout aussitôt. C’est l’acte final de l ’opération ; il s’accomplit
bouillon en lavements. Ce supplément d’alimentation est con
très promptement et très heureusement, sans effusion d’ une
tinué encore à cette heure.
goutte de sang.
J’ai ouvert,de chaque côté, la faciale, la transverse de la face,
la masséterine, la dentaire et, seulement à droite, la linguale.
La réunion de la plaie ne se fait que très imparfaitement. J’y
complais fort peu, du reste. Des chairs aussi anémiques que
celles de cette malheureuse femme ne pouvaient me donner
Le précepte, excellent selon moi, qui consiste, dans toute
qn’un blastème médiocrement réparateur. Puis une portion de
opération de chirurgie, à lier les artères au fur et à mesure qu’on
la lèvre postérieure de l’incision, considérablement amincie, a
les coupe, devait trouver ici sa plus rigoureuse application.
été frappée de gangrène, et la chute de l ’escarrhe a nécessaire
Au moment de commencer le pansement, l’opérée a été prise
d’une syncope que de fortes aspersions d'eau froide ont bientôt
ment accru la largeur de la plaie.
Les fils de la suture ont été enlevés après quelques jours, et
J’ai réuni avec mon aiguille, qui abrège beaucoup l'opération,
le pansement a simplement consisté en une bandelette de diachylon dont le plein soutenait, les chairs sus-hyoïdiennes et dont
et par vingt points de suture entrecoupée, cette immense plaie.
les extrémités venaient s'appliquer sur les tempes. Cette bande
De grands gâteaux de charpie, une compresse et une bande cou
lette était renouvelée tous lesjours. On appliquait par-dessus de
vrent la suture.
la charpie et une bande en forme de fronde.
dissipée.
�— 121
— 120 —
Aujourd’ hui, quarante-quatrième jour de l'opération, I état
de mon opérée est, relativement, des plus satisfaisants. Sauf le
menton, qui est un peu rentré, et les joues légèrement boursoufllées, l ’aspect du visage n’est pas trop difforme. La couleur ter
reuse de la peau semble déjà moindre et le moral est excellent.
Le pelolonnement de la langue en arrière ne peut guère se
produire maintenant, et, conséquemment, une asphyxie lente,
insensible, n est point à redouter. J’espère donc que l'air péné
trera assez abondamment dans les [tournons pour constituer une
respiration h peu près normale, et qu'une hématose suffisam
ment réparatrice pourra se faire.
D’autre part, la plaie s’ est beaucoup rétrécie, et peut-être fi
nira-t-elle par se cicatriser entièrement ; mai j’ ai lieu de craindre
que le passage de la salive ne s’oppose à sa complète occlusion.
Dans ce cas la prothèse devra fournir sa part de secours ; le pla
cement d’un obturateur pourra être nécessaire. Quant à l’appli
cation dune mâchoire artificielle, ce serait, dans les conditions
où se trouve l’opérée, une véritable impossibilité.
La cure n’ est pas complète, sans doute: le visage restera dé
formé; la cicatrisation de la plaie est inachevée encore, et il se
pourrait qu’une oblitération artificielle devint indispensable;
l’articulation des mots est imparfaite;
enfin, l ’impossibilité
actuelle de la mastication réduira, pendant un temps plus ou
moins long, l’alimentation à l’ usage d’une nourriture demiliquide et, conséquemment, peu substantielle.
Tout cela existe malheureusement; mais la vie de cette
femme, qu’une cruelle affection condamnait à la mort , est
sauvée. C’est le but suprême de l ’art dans les situations déses
pérées. N’est-ce point assez que de l’ atteindre?
l'importance de la mutilation qui doit la suivre, et les chances
plus ou moins probables d’une récidive.
De cet examen sévère dépendra le parti à prendre: l’action ou
l’abstention.
Dans tonte dégénérescence cancéreuse, même avec les meil
leures conditions de l’organisme, le mal peut se reproduire plus
ou moins longtemps après qu’il a été enlevé. Pourtant on opère
eton doit opérer, parce que, si fiéquentcs que soient les réci
dives, l’opération, secondée par un bon traitement antidiathésique, peut donner une guérison durable. Les exemples n’en
sont pas trop rares.
Chez notre malade, ainsi que je l’ai fait observer, il y avait des
raisons très plausibles pour attribuer à l’anémie sa profonde dé
coloration. La crainte d’une intoxication cancéreuse, sans être
rigoureusement impossible, pouvait donc, logiquement, être
écartée et ne devait point m’arrêter.
En présence d’ un état irrémédiable, d’une alfection inévita
blement mortelle, le chirurgien peut tout oser, à la condition,
toutefois, que l’art ue sera pas compromis par une tentative
téméraire, et sa main ne saurait être enchaînée par ce motif,
qu’une grave mutilation devra succéder a l’opération qui est
l’unique chance de guérison. La chirurgie doit faire vivre; mais
elle ne peut pas être toujours conservatrice, sans amoindrir
celui qu’elle arrache à la mort ; il faut souvent que le malheu
reux reste pinson moins mutilé : c’est le prix de son salut.
J'ai été guidé par ces refléxionsen opérant ma malade.
C’est à ces pensées qu’obéit le chirurgien dans ces terribles
situations où les dernières ressources de notre art peuvent et
doivent être appliquées, telles, par exemple, qu’une lésion
traumatique qui demande l’amputation simultanée des deux
cuisses ou des deux jambes. Il y a la une mutilation bien autre
Pour apprécier à leur juste valeur les éléments d’excessive
gravité d’une opération comme celle que je viens de raconter, il
faut considérer le danger immédiat auquel elle expose le malade,
ment alfreuse que l ’enlèvement du maxillaire.
Il manque à mon opérée presque la moitié du squelette de la
face. Je ne me dissimule pas les inconvénients de tonte nature
8*
�— 123 —
qu'entraîne l’absence de cette partie. Indépendamment de la
pliquée d’ une tumeur, opération dans laquelle l’anesthésie aura
déformation des traits et de l’impossibilité de la mastication, les
pu être contre-indiquée ou le patient réfractaire à l ’agent anes
organes voisins ont subi des changements de rapports qui, en
thésique, jette l’économie, si la douleur est extrême et dure
rétrécissant le pharynx, ce vestibule des voies aériennes et d i
longtemps, dans une telle dépense de fluide nerveux, que la vie
gestives, peuvent altérer la respiration et la nutrition.
peut s'éteindre par épuisement, lors même qu’il n’y a pas eu
Mais la mâchoire de celte femme sera t-elle toujours absente?
Cette pièce ne peut-elle revenir plus tard , sous la forme d’une
trop de sang perdu.
Ma malade pouvait donc périr sous l ’instrument; mais aussi
production cartilagineuse et même osseuse, assez épaisse et
l’opération pouvait la sauver ou lui apporter, du moins, le béné
résistante pour que la malade, avec l’aide de la pression de la
fice d’une trêve plus ou moins longue. J’ai dû ne point hésiter.
langue contre le palais, puisse broyer de la mie de pain, des
Du reste, en médecine opératoire, la crainte d’accidents pou
viandes tendres et des légumes?
Cet espoir n’ est pas du tout une chimère, bien qu il ne reste
pas ici le moindre lambeau du périoste.
vant devenir mortels dans toute opération, grande ou petite,
n’est pas une objection sérieuse devant laquelle on doive re
culer. Autrement la chirurgie ne serait plus possible. L’opéra
Il résulté de faits pathologiques assez nombreux et d’expé
tion la plus simple et la mieux exécutée pouvant entraîner des
riences faites sur les animaux, que le périoste n’est pas indispen
suites funestes; le patient étant exposé, dans certains cas, à
sable à la reproduction de l'os, car un os a pu se reproduire
périr de l’opération qu’on lui fait plutôt que de son mal, si l’on
après l entier enlèvement de son périoste.
écoutait de telles pensées, si l’on cédait à de telles craintes, on
Voici, à cet égard, ce que démontre l’observation : en l ’ab
n’oserait plus rien entreprendée, la chirnrgie serait absolument
sence du périoste, il peut renaître un amas osseux, informe,
désarmée ; car il faudrait se souvenir alors qu’une amputation
irrégulier, et ne représentant que très imparfaitement l’os pri
de doigt peut amener le tétanos et la mort ; que la saignée peut
mitif, dont il peut cependant remplir à peu près la fonction.
tuer d’une phlébite.
Mais quand le périoste a été conservé, surtout s’il est épais et
gonflé, cas où il se détache facilement, l’os peut se reproduire
exactement, avec toutes ses formes normales.
Une dernière remarque pratique, soulevée par le (ait qui
m’occupe, c'est la considération du danger qu’une telle opéra
tion faisait courir immédiatement à ma malade.
Les chances mauvaises étaient, assurément, énormes. Dans
une opération telle que l’enlèvement total du maxillaire infe
rieur, l'hémorrhagie est, incontestablement, le premier danger ;
mais il y a encore un bien grand péril dans la douleur excessive
et forcément prolongée; la vie peut s’échapper aussi par celte
large brèche faite à 1 innervation.
Une opération de haute chirurgie, comme l’extirpation com
Si des préoccupations de cette nature venaient obséder les
chirurgiens, on ne verrait plus de ces grands dévoûments de
l’art, où la hardiesse, inspirée par la conscience d’un devoir à
remplir et soutenue par l ’habileté, a pu, dans un effort suprême,
disputera la mort un malheureux dont les jor»rs étaient comptés.
Dans la pratique des opérations chirurgicales, voici, s’d m’est
permis de les tracer, ou plutôt de les rappeler, les vrais prin
cipes a suivre; et ces principes, formulés en quatre proposi
tions, doivent être notre code, la règle souveraine de notre
conduite :
1° Peser bien soigneusement les indications et les contre-in
dications d’une opération ;
2° La pratiquer résolument si le mal qui la réclame est évi
�— m
—
demment incurable par tout autre moyen et si eHe n’est pas
Les causes de la propagation des maladies vénériennes peuvent
être divisées en causes directes et en causes indirectes. Les pre
formellement contre-indiquée ;
5° Mettre le plus grand soin , cela est élémentaire, dans
mières sont inhérentes, pour ainsi dire, a la nature spéciale
I exécution de la manœuvre opératoire ;
de ces maladies, et à la conformation anatomique des organes
4° Combattre le mieux que l’on pourra les accidents consé
cutifs, s’il en survient.
partie de la constitution physique et morale de notre société ac
Quaud le chirurgien a rempli tous ces devoirs, il peut être
tranquille et ne s’inquiéter de rien, quelle que soit l'issue de la
tentative qu’il aura laite pour sauver un malade voué à la mort
geuiio-urinaires; tandis que les secondes proviennent en grande
tuelle.
Dans (piel pays et quelle époque les différentes maladies vé
nériennes ont-elles pris naissance?
Usera très heureux s’il réussit. En cas d’insuccès, il regrettera
Quelle est leur véritable nature intrinsèque?
bien amèrement d’avoir manqué le but; mais la voix de sa
Toutes ces maladies sont-elles produites par un seul et même
couscience l’ absoudra complètement.
virus; les virus, au contraire, seraient-ils aussi variés que les
Dr
Co ste.
maladies elles-mêmes?
Toutes ces questions, et bien d’autres que nous négligeons k
dessein, n’ont pas encore été résolues, il faut bien l’avouer,
ÉTIOLOGIE ET PRO PH YLAX IE
d’une manière complètement satisfaisante, et malgré les remar
DES MALADIES VÉNÉRIENNES
quables travaux, malgré les recherches, les expériences de toutes
ou
sortes, exécutées depuis de commencement de ce siècle par les
Étude des causes et des conditions anatomo-physiologiques qui permettent
la contagion, favorisent et entretiennent la propagation des maladies
vénériennes dans l'espèce humaine et des moyens prophylactiques à leur
opposer.
syphilographes de tous les pays, nous en sommes encore réduits
aujourd’hui k demander que la lumière se fasse en ces difficiles
questions.
Ce ne sont assurément pas les théories ou les solutions qui
I" p a r t i e . — É T IO L O U 1 E .
ont fait défaut, leur abondance et leur absolutisme ont été tout
au contraire la cause principale de toute cette obscurité. Aussi,
Kechercher et étudier avec soin les causes diverses de la pro
ne pouvant et ne voulant accepter la responsabilité d aucune de
pagation des maladies vénériennes, exposer les conditions spé
ces théories exclusives, et désirant surtout de ne pas nous laisser
ciales et les modes variés de la contagion, faire ressortir d ’une
entraîner dans d’interminables discussions, nous contenterons-
façon toute particulière l’importance jusqu’ici trop négligée de
nous d’exposer brièvement ce qui, dans l ’état actuel de la
certaines conformations physiques des organes génitaux et mon
science, nous paraît se rapprocher le plus de la vérité, sans
trer les facilités plus ou moins grandes qu’elles présentent à
avoir la prétention de la posséder toute entière et de pouvoir
l’introduction des virus dans l’économie, réunir enfin en un seul
donner sur les faits existants une explication toujours nette,
et même faisceau les nombreux moyens prophylactiques conseil
claire et satisfaisante.
lés par les divers auteurs, tel est, en résumé, le but de ce tra
vail.
On admet généralement aujourd’hui qu’il existe trois espèces
distinctes de maladies vénériennes, à savoir :
�—
m
—
—
1* La blenuorrhagie ;
127
—
très-restreint de mcnbranes muqueuses et jamais sur les autres
tissus de l économie. Ces membranes muqueuses sont :
2° Les ulcères vénériens simples, non suivis de l ’infection
générale de l’économie :
3* La syphilis.
D après les recherches des syphilographes modernes, et prin
cipalement d’ après les remarquables travaux de M. le Dr Basse-reau, il parait démontré que les deux premières de ces maladies
ont existé dès la plus hante antiquité ; la troisième, au contraire,
semblerait n ôtre venue en Europe que vers la fin du X V ’ et le
commencement du X V I* siècle.
1* Chez la femme, les menbranes muqueuses utéro-vaginales,
urétrales et vulvaires;
2e Chez l'homme, la menbrane muqueuse balano-prépuciale
et l’uréthro-vésicale. Pour ce qui est de la membrane muqueuse
oculaire, la contagion est déjà beaucoup plus rare, et enfin, dans
ces dernières années, on en est arrivé à douter sérieusement que
la membrane muqueuse rectale put s’enflammer par le seul fait
du contact du pus blennorrhagiqne.
L ’état de turgescence des organes génitaux et l'afflux sanguin
De ces trois affections, deux, la blennorrhagie et les ulcères
considérable qui se fait à la surface de leurs membranes mu
vénériens simples ne sont, dans la grande majorité des cas, que
queuses pendant l’acte du coït paraissent favoriser d’une façon
des affections purement locales; la troisième, au contraire, la
très-marquée la contagion de la blennorrhagie. Enfin la jeunesse
syphilis se généralise rapidement et peut envahir successivement
relative de ces organes, leur plus ou moins de délicatesse et une
tous les tissus de l’économie.
largeur exceptionnelle du méat urinaire ont certainement une
Toutes ces maladies ont pour caractère commun d’étre con
influence manifeste sur le plus ou moins d’aptitude individuelle
tagieuses à une certaine période de leur existence; mais les con
à contracter cette maladie. La blennorrhagie peut être considé
ditions nécessaires à celte contagion et les conséquences qu elles
rée comme une affection propre aux organes génito-urinaires ; il
entraînent varient pour chacune d’elle, ain<i que nous allons le
n’en est pas de môme pour les autres maladies vénériennes qu’il
démontrer.
nous reste à examiner ; car bien que ces organes en soient éga
La blennorrhagie est une maladie le plus souvent locale, n ’é
lement le siège le plus habituel, le terrain, pour ainsi dire, de
tendant par conséquent que rarement le cercle de son activité
prédilection, nous verrons bientôt que ce phénomène vient
au-delà de l’appareil genito-urinaire, car on est loin d’être fixé
principalement de ce que, grâce à leurs fonctions spéciales, ces
sur la nature des ophtalmies et des arthrites dites blennorrha-
organes sont plus souvent que tous les autres mis eu contact
giques. Le pus blennorrhagiqne parait jouir, dans certains cas,
direct avec le pus virulent et que la délicatesse extrême de leurs
de la propriété de reproduire la maladie par le simple contact
tissus et le peu de résistance de l'épiderme ou de l ’épithélium
suffisamment prolongé avec certaines muqueuses, et rien ne
qui les recouvre, ne les protège pas suffisamment contre les
prouve jusqu’ à présent que ce contact ait besoin, pour produire
causes diverses de solution de continuité, d’excoriations qui
ce résultat, d’ être précédé de la dénudation épidermique des
peuvent se produire pendant le coït et, partant, les expose à de
membranes muqueuses à la surlace desquelles il est déposé. Ce
nombreuses et faciles inoculations.
pus, contrairement à ce que nous verrons bientôt exister pour
Cette dernière circonstance, la fragilité de l’épithélium des
le pus virulent de la syphilis ou des chancres non infectants,
organes génitaux, a une grande influence sur leur aptitude à
n’exerce son action pathologique contagieuse que sur un nombre
contracter les maladies virulentes, elle explique la fréquence
�—
128 —
extrême îles ulcérations spécitiques sur la muqueuse balanoprépuciale et la rareté relative de ces ulcérations sur la peau de
la verge ou celle des doigts, bien que ces tissus soient mis en
contact avec le pus virulent à peu près aussi fréquemment que
cette membrane muqueuse.
Le virus contenu dans le pus des ulcérations chancreuses
simples (non suivies d’infection générale), jouit de la propriété
de transmettre la maladie qui lui a donné naissance :
i* Par le simple contact suffisamment prolongé avec les mem
branes muqueuses ;
2° Par l'inoculation physiologique ou artificielle h la surface
de tous les autres tissus de l’économie préalablement dénudés
de leur épiderme. Celle propriété contagieuse, bien différente en
cela de celle du pus blennorrhagique,n’a pour ainsi dire aucunes
limites, puisqu’elle peut s'exercer indistinctement sur tous les
croyons fermement que les conditions les plus favorables à la
contagion, poui ne pas dire tout a fait indispensables, sont cons
tituées par l ’existence d’ une solution de continuitéquelconquede
ces tissus, ou, pour le moins, d’une dénudation épithéliale de
leur surface.
Le pus provenant d’accidents syphilitiques suppurés, mais
principalement celui sécrété par les ulcérations primitives et
quelques accidents secondaires, jouit de propriétés éminemment
contagieuses. Inoculé dans des conditions convenables, physio
logiquement on artificiellement à un individu vierge de tout
accident syphilitique antérieur, ce pus reproduit presque tou
jours le symptôme initial de la syphilis, c’est-à-dire le chancre à
base plus ou moins indurée suivi de l’engorgement caractéristi
que indolent spécial de la pléiade ganglionnaire à laquelle abou
tissent les vaisseaux lymphatiques qui partent du point ulcéré.
tissus de l’économie et que cette inoculation peut être répétée
Inoculé, au contraire, à un sujet atteint antérieurement de la
avec succès un nombre de fois indéterminé chez le même in d i
syphilis constitutionnelle, ce pus reste, dans la grande majorité
vidu ; il suffit pour cela que le pus virudent, soumis à l’expéri
des cas, sans action locale ou générale, et quand, par exception,
mentation, soit emprunté à des ulcérations chancreuses simples,
l'inoculation réussit, l’ulcère qui en résulte présente très rare
non indurées, arrivées à une certaine période de leur développe
ment les caractères pathognomoniques, types assignés par les
ment. L’ existence antérieure, présente même, d’ulcérations de
auteurs à l ’ulcère syphilitique prim itif, c’est-à-dire qu’il peut,
cette nature, ne met donc jamais a l’abri d’une façon absolue
par l’inoculation du pus virulent qu’il sécrète, transmettre la
des récidives, ou, pour mieux dire, de nouvelles atteintes. Cepen
syphilis à un sujet sain et déterminer quelquefois chez le sujet
dant, on doit ajouter qu’ il parait résulter des nombreuses expé
lui-même qui
le porte,
sujet déjà infecté antérieurement,
rimentations et inoculations pratiquées en vue et à l’occasion de
l’apparition de nouveaux accidents constitutionnels. Ce fait est
la syphilisation que, chez certains individus, 1 aptitude a la con
rare, exceptionnel, mais il est tout à fait certain et ne peut plus
tagion des ulcères simples non syphilitiques, semble diminuer,
être nié aujourd’ hui.
disparaître même, après un nombre variable, mais indétermi
Telle est la règle générale qui domine la contagion, la trans-
nable, à l ’avance d’inoculations, et que, dans la majorité des cas,
missihilité des accidents syphilitiques. Cette règle, on ne saurait
le temps nécessaire b la cicatrisation de ces ulcères paraît devoir
trop le répéter, n’est pas une loi absolue, tant s’en faut, elle
être d’autant plus court que les inoculations ont été déjà répé
présente, au contraire, ainsi que nous l ’avons déjà vu, d’assez
tées un plus grand nombre de fois. Enfin, bien qu’ il soit géné
nombreuses exceptions; ajoutons de plus, pour corroborer ce
ralement admis que la contagion puisse s’effectuer par le simple
que nous venons de dire, qu’il n’est pas extrêmement rare de
contact du pus virulent avec les membranes muqueuses, nous
voir le symptôme prim itif de la syphilis, le chancre «lit infectant,
�— 130 —
conserver pendant toute la durée de son existence une base par
faitement molle, ne présentant pas même la plus légère trace de
ce que l'on a nommé l’induration parcheminée; que l'on a vu
des inoculations pratiquées avec du pus d'accidents prim itifs
présentant tous les caractères assignés au chancre syphilitique,
type induré, réussir sur le sujet lui-mcme qui avait fourni le pus
a expérimenter. Cela prouve, comme nous le disions au com
mençant, que la science est encore loin d’être faite et que l’on
a toujours tort lorsque l’on fonde une doctrine dans des sciences
aussi peu fixées, aussi élastiques que le sont les sciences dites
d’observation, d’être absolu et de vouloir prématurément établir
des lois immuables.
Nous venons d étudier les différentes causes de transmis
sion et de propagation des maladies vénériennes inhérentes h la
nature toute spéciale de ces affections. Voyons maintenant
quelle influence peuvent exercer sur celte propagation la con
formation toute particulière des organes génitaux et les fondions
spéciales qu’ils sont appelés a remplir.
Les organes génito-urinaires sont, dans l’immense majorité
des cas, le siège p rim itif des matières vénériennes et l’acte phy
siologique qui contribue le plus h la transmission de ces affec
tions est sans contredit le coït. C’est effectivement pendant l’ac
complissement de cetie fonction que ces organes présentent les
conditions les plus favorables a la contagion, leurs tissus sont alors
dilatésoutre mesure, leurs téguments assez distendus pour éprou
ver, sous l’ inlluence de la moindre cause vulnérante extérieure,
de véritables solutions de continuité, leurs vaisseaux sont gorgés
de sang et les nombreux vaisseaux lymphatiques qui rampent à
leur surface, paraissent mieux disposés qu'a tout autre moment
à une absorption prompte et facile. Les membranes muqueuses
de ces organes participent a toutes ces fâcheuses conditions, elles
présentent de plus le grave inconvénient d’être,dans la majorité
des cas, humectées, ramollies par la présence du mucus qu’elles
sécrètent et le contact plus ou moins prolongé de la matière sé
bacée. Survienne le moindre effort, la moindre cause vulnérante,
par exemple, l'introduction par le pénis d'un poil dans le con
duit vaginal, et immédiatement se produiront une légère solu
tion de continuité, une imperceptible excoriation, une simple
dénudation épithéliale a peine sensible, souvent môme invisible,
mais qui n’en serviront pas moins de porte d’entrée h la ma
ladie.
Si maintenant, quittant ces généralités, l’on veut pénétrer
plus avant dans la question et se rendre compte, par exemple, de
l ’influence plus ou moins grande que la conformation physique
extérieure des organes génitaux, spéciale a chaque individu,
peut avoir sur le plus ou moins d’aptitude de sa part à contracter
ces maladies virulentes, il importe d’examiner avec soin ces di
verses conformations, c’est ce que nous allons faire avec quel
ques détails.
Ce qui, abstraction faite du volume etdela couleur, donne aux
diflérents pénis leur aspect spécial, c’est la présence ou l’absence
du prépuce et, lorsque cet appendice existe, la disposition parti
culière qu’il affecte par rapport au gland.
Les médecins appelés par leur position à passer de fréquentes
visites sanitaires d’hommes, de soldats, par exemple, ceux sur
tout qui prennent la peine d’examiner les choses de très près,
ont pu remarquer qu’en dehors des individus circoncis et de
ceux atteints de phimonis complet, tous les hommes pouvaient
être rangés dans l’une des trois catégories suivantes, eu égard à
la conformation spéciale de leur prépuce :
1° Ceux dont le prépuce, restant constamment en arrière de
la base du gland, laisse cet organe complètement à découvert,
même pendant l'état de flaccidité de la verge ;
2° Ceux dont le prépuce recouvanl habituellement le gland en
tout ou en partie pendant l’état normal du pénis, est cependant
assez large, assez mobile pour s’étaler complètement sur la verge
pendant 1 érection et ne présenter jamais, pendant cet état de
turgescence de l’organe d’anneau constricteur, de rétrécissement
�-
132 -
situé au niveau du point où la muqueuse prépuciale fait suite à la
peau, au limbe du prépuce ;
5* Enfin, ceux dont l ’ouverture antérieure du prépuce plus
—
133 —
ces phénomènes physiologiques est suffisamment diminuée pour
que les personnes qui jouissent d'une pareille conformation puis
sent rester quelquefois plusieurs jours sans éprouver le besoin,
ou moins étroite peut bien encore permettre de découvrir le
la nécessité, de se livrer à ces soins minutieux de propreté tout
gland pendant l’état de flaccidité de la verge, mais éprouve de
a fait indispensables aux autres hommes.
grandes difficultés a dépasser, pendant l’érection, la saillie formée
Le volume du gland dans celte conformation spéciale étant de
par la base de cet organe et se trouve alors soumise, tout le
beaucoup supérieur principalement à sa base à celui du reste de
temps que dure cette érection, à une distension forcée.
la verge il en résulte que, pendant le coït, le membrane muqueuse
Ces trois conformations différentes du prépuce donnent non-
prépuciale se trouve tout naturellement protégée contre les ef
seulement une physionomie spéciale à chaque membre viril,
forts, les frottements les plus énergiques par la saillie que forme cet
mais chacune d’elles, ce qui est plus important, présente des
organe, de telle sorte que la cause la plus puissante d’éraillures
chances diverses a la contagion des ulcérations spécifiques, ainsi
de solutions de continuité et, partant, d infection, ne porte pas
que nous allons le démontrer.
son action directement sur elle, mais bien sur le gland lui-même
Chez les personnes dont le prépuce est conformé comme nous
dont l’épithélium, heureusement très-résistant, se laisse diffici
venons de 1 indiquer dans notre première eatégorie, le gland est
lement entamer. Il «arrive cependant quelquefois qu’une légère
habituellement d’un volume très supérieur à celui du reste de la
fissure se produit à la surface de cet organe et offre ainsi une
verge. Il est à peine rosé, sa surface est sèche, jamais enduite de
porte d’entrée au pus virulent; c’est qu’alors un des longs poils
matière sébacée ; son épithélium est épais, résistant, et la sensi
implantés sur les grandes lèvres aura été introduit fortuitement
bilité est relativement peu développée a sa surface, de telle sorte
dans le vagin par le pénis lui-même pendant les mouvements
que les Irottemenls même un peu rudes y produisent rarement
souvent peu mesurés du coït. Cette cause traumatique, nous ne
des excoriations. Le filet ou frein du prépuce est généralement
saurions trop le répéter, est beaucoup plus fréquente qu’on ne
long, la peau de la verge jouit d’une grande mobilité, ce qui lui
le croit généralement, mais elle passe la plupart du temps ina
permet de fuir avec plus de facilité l’action de certaines causes
perçue à cause de l’excitation générale qui accompagne habi
vulnérantes spéciales. La verge, prise dans son ensemble, a la
tuellement cet acte physiologique.
forme d’un cylinbre légèrement aplati d’avant en arrière d’un
volume a peu près égal dans tonte son étendue.
La muqueuse prépuciale, ratatinée pour ainsi dire derrière
Par suite des mouvements de va et vient, exécutés par le pé
nis pendant le coït, le pus contagieux est d'abord étalé à peu près
uniformément sur toute la surface de la verge, mais il ne tarde
la base du gland, a perdu elle aussi en grande partie sa délica
pas à se rassembler en majeure partie dans la rainure balano-
tesse et sa sensibilité, elle n'a conservé l ’aspect réellement mu
prépuciale, au niveau de la base du gland où il rencontre un ob
queux que tout à fait à sa racine, au niveau du sillon balano-
stacle à sa marche dans la forme perpendiculaire et la forte sail
prépucial. L'épithélium qui la recouvre est épaissi, mais il est
lie de la face postérieure de cet organe. C’est donc là que ce pus
loin cependant de présenter autant de résistance que celui qui
a le plus de temps h séjourner, là aussi qu’il sera de nouveau
recouvre le gland. Enfin, bien que l’exfoliation épithéliale et la
emprisonné lorsque, l ’érection ayant cessée, le prépuce revien
sécrétion muqueuse persistent encore à sa surface, l’activité de
dra de lui-même reprendre sa place accoutumée, c’est-à-dire se
�—
154
—
plisser derrière cette face postérieure. On comprendra donc fa
cilement en réfléchissant un instant b ces diverses circonstances,
pourquoi chez les personnes conformées de la façon que nous ve
nons de décrire, les ulcérations chancreuses, syphilitiques ou
non, se rencontreront de préférence, toutes choses égales d’ail
leurs, dans celte rainure balano-prépuciale et sur les parties la
térales du frein, surtout si l’ on veut bien ne pas oublier que c'est
également à ce niveau que la membrane muqueuse balano-prépuciule présente le plus de délicatesse, et son épithélium Je plus
de fragilité. Par contre, on constatera très rarement des ulcéra
tions spécifiques sur la surface antérieure et externe du gland.
—
135
—
plus ou moins foncé; sa surface est toujours humide, tomenteuse, recouverte, chez les gens malpropres, d’une couche sou
vent fort épaisse de matière sébacée, d’ une odeur d’autant plus
pénétrante qu’elle y est déposée depuis plus longtemps. La mem
brane muqueuse du prépuce présente le même aspect, mais une
coloration plus vive; les cryptes que l’on rencontre normalement
b sa base, au niveau de la rainure balano-prépuciale, sont large
ment ouverts, ce qui donne a cette partie un aspect fortement
chagriné. Cet aspect est dû b la présence d’une série alternative
de petites saillies et d’anlractuosités disposées le plus générale
ment suivant le grand axe de la verge, mais coupées, elles mê
Tout ce que nous venons de dire est en grande partie applica
mes, de distance en distance, par d ’autres petits replis de la mu
ble aux personnes qui ont subi (opération de la circoncision,
queuse, dont la direction est perpendiculaire a la leur. Ces
surtout si cette sage opération a été pratiquée pendant la pre
anfractuosités, ccs saillies faciles h constater pendant l ’état de
mière enfance, elles se trouvent même placées dons des condi
flaccidité de la verge, disparaissent habituellement pendant l é-
tions plus favorables encore pour éviter la contagion. Chez
rection par le fait de la distension de la membrane muqueuse dé
elles, en effet, les surfaces muqueuses ont acquis une telle soli
terminée par la turgescence des tissus sous-jacents, de la pointe
dité, que l inoculation du pus contagieux ne peut guère se faire
des corps caverneux, mais elles se reformcnlaussitôl que l ’organe
qu 'a la faveur d une soluliou de continuité produite pendant
a repris son volume normal et ont une grande tendance a em
l’acte du coït. Ajoutons que chez ces personnes, l’éloignement
prisonner le pus virulent déposé b leur surface pendant l’acte du
du pus virulent, et par cela même de la cause directe de la maladie,
est rendue ou ne peut plus facile par la faculté qu elles possè
coït.
Le prépuce, pris dans son ensemble, est généralement plus
dent au suprême degré de mettre à d couvert les parties suscep
épais que dans les conlormations précédemment étudiées; son
tibles d’être cout iminées et d ’employer a la toilette spéciale de
limbe a plus de %ita lité, les vaisseaux sanguins qui rampent a sa
ces organes certains liquides prophylactiques, dont le contact,
surface sont très apparents et sa membrane muqueuse jouit
tout b fait inoffemif ou a peine sensible pour leurs tissus endur
d’une grande délicatesse et d’ une exquise sensibilité; malheu
cis, est au contraire fort douloureux ou même tout b fait impos
reusement, l ’épithélium qui la recouvre, constamment humecté
sible b supporter pour les autres personnes qui ne jouissent pas
par la sécrétion muqueuse d’un côté et la présence de la matière
de celte bienheureuse conformation.
sébacée de 1 autre, offre très-peu de résistance et se laisse enta
Chez les individus dont le prépuce est conformé de la façon
déciite dans notre seconde catégorie, le gland, au lieu d’avoir la
forme d’un cône tronqué b base large, ainsi que cela se ren
contre le plus souvent dans les deux cas précédents, offre géné
ralement une forme cylindro-conique, sa couleur est d ’un rose
mer avec la plus grande facilité.
(La suite au prochain numéro.)
D' A. Boü lo n g n e ,
Médecin-Major do <»• classe h l’Hôpital militaire de Marseille.
�—
156 —
—
137
—
Chronique Locale
DU CONCOURS
Nous communiquons à nos lecteurs la lettre suivante de M.
le professeur Lassègue, adressée au rédacteur de la Gazette des
Que les Sciences physiques prêtent à la Médecine (1)
P a r le D' Sinus P irondi.
Hôpitaux :
« Monsieur et très-honoré confrère ,
« Des élèves et des amis de Trousseau ont eu la pensée de
I
consacrer à sa mémoire un monument qui restât comme le
Si l’on examine attentivement la marche de l’ esprit médical
témoignage de leur gratitude ou de leur affection.
« Trousseau avait \oulu, par une décision formelle, que ses
pendant la première moitié du siècle actuel, on arrive facilement
funérailles eussent lieu sans faste et sans solennité, et que son
à constater que deux tendances ont par trop longtemps divisé
corps fût déposé dans le caveau de la famille. Elever un monu
les hommes les plus sages et les plus éclairés de notre profes
ment sur sa tombe, c’eût été presque contrevenir â cette volonté
sion.
Les uns, interprétant dans un sens trop restreint le vieux pré
dernière,
« Il leur a paiu plus conforme aux sentiments du maître, de
cepte : Oportet curare, et oubliant l ’autre non moins ancien :
faire exécuter un buste en marbre, qui serait placé dans la salle
Experientia fa lla x , ont cherché avant tout et quand même des
des actes de la Faculté de médecine, et d’ouvrir une souscrip
agents de guérison, faisant empiriquement appel aux moyens
tion pour que tous pussent s’associer à ce pieux hommage.
les plus divers, comme aussi aux plus bizarres, espérant toujours
« J’ai compté que vous voudriez bien nous aider de votre
y trouver quelque frère-puiné de lecorce péruvienne. C’est
amical concours et recevoir les cotisations qui seront centra
ainsi qu’après avoir essayé l’or, l’argent et autres produits quel
lisées entre les mains de M. Asselin, éditeur, place de l'Ecole de
que peu aristocratiques, on n’a pas craint de tenter l ’essai de
Médecine.
substances d’une origine moins distinguée, et le guano, par
« Votre bien affectionné, C.
L a ssbg ü e.
« L ’exécution du buste sera confiée à M. Geoffroy Dechaume.
Les listes de souscription seront closes le 1er décembre pro
chain. »
—
propos des dermatoses.
Dans l’autre camp, au contraire, la guérison de la maladie
semble occuper le second plan ; ce que l’on recherchait de pré
M. le Dr D’ Astros, médecin en chef des Hôpitaux, a été
nommé chevalier de Légion-d’Honneur.
—
exemple, a osé paraître sur quelques formules médicinales, à
Le 16 août, s'est ouvert à Paris le Congrès médical
férence, c’était la nature intime, l’essence de la lésion morbide,
les chances probables de sa terminaison; on semblait attendre
avec une curiosité par trop scientifique (a-l-on dit non sans
malice) que l'examen nécroscopique vint confirmer ou corriger
international.
Le Comité de rédaction.
le diagnostic antérieurement formulé.
Marseille. — T jp , Arnaud, Cayer et Comp., rue Saint-Ferréol, 57.
(t) Extrait d’une communication faite à l’Association Scientifique de France
Session de Marseille, 1867.
9
�— 138 —
En un m o t, si d’un côté on aspirait à la guérison sans avoir
inhérents aux diverses fondions des organes, soit à l ’état de
l’air de se soucier du comment et pourquoi on y parvenait, de
santé, soit à l’état de maladie, depuis le moment où la vie com
l’autre on se contentait, en quelque sorte, de photographier la
mence jusqu’à celui où elle cesse.
maladie avec sa contre-épreuve anatomique.
Les choses ont changé depuis, fort heureusement, et les deux
Il
tendances convergent aujourd hui vers un même but. Toutes les
écoles professent indistinctement la nécessité de m ultiplier les
moyens d’ investigation mis à notre portée pour analyser scrupu
leusement les moindres symptômes morbides, les transformer
en signes et parvenir ainsi à la détermination étiologique, point
capital pour formuler une médication rationnelle.
En définitive, c’est donc a la recherche des causes morbigènes
que doivent tendre tous les efforts du praticien, et sans vouloir
diminuer rimporlauce que l’on accorde avec tant de raison aux
L ’utilité de ces recherches étant admise, comment faut-il y
procéder ?
L ’observation clinique, si perfectionnée cependant chez les
anciens, serait-elle bien fructueuse aujourd’hui pour les malades
comme pour la science, si l'on s’en tenait exclusivement aux
moyens d’investigation dont disposaient nos devanciers?
Serait-il, par exemple, permis à notre époque de classer parmi
causes éloignées telles que l’ hérédité, la consanguinité, les in-
les amaurotiques incurables tous ceux qui accusent des troubles
lluences climatériques, saisonnières, etc., on ne doit pas perdre
graves dans la vision, ou de qualifier d’affection scorbutique les
de vue que les causes prochaines ou déterminantes sont celles
diverses espèces d’épulis?
contre lesquelles il faut surtout intervenir avec promptitude et
ii propos, si ce n'est pas toujours avec succès.
Les meilleures recherches étiologiques, celles que l’on doit
considérer comme les plus capables de nous conduire à une
Mais avant d aller plus loin qu’il nous soit encore permis de
connaissance exacte de la maladie, 11e peuvent se passer du con
faire une courte excursion à côté, mais non en dehors de notre
cours des sciences auxiliaires, et toute la science médicale elle-
sujet principal.
Nous entendons ici par cause morbigène tout ce qui amène
même, considérée d une façon abstraite, sans tenir compte des
applications pratiques qui constituent l'art médical, doit ses plus
et constitue l ’altération organique précédant l’altération fonc
incontestables progrès à l’incessant appel qu elle fait à la phy
tionnelle.
sique et à la chimie, sans négliger peut-être l’astronomie et
Cette altération organique, une fois produite, peut n’être pas
toujours visible et constatable, mais il est difficile d'admettre
qu’elle fasse défaut, sauf les circonstances encore trop fréquentes
où elle peut n’avoirétéque passagère ou fugace. Si on ne la trouve
pas, en dehors de ces derniers cas, c’est que nos moyens d 'in
vestigation sont insuffisants, — et sans prétendre jamais il l’ im
possible, autrement dit a soulever le voile qui couvrira toujours
d’ une ombre impénétrable ce qui louche aux causes premières,
il est permis d’ aspirer a la connaissance de tous les phénomènes
assurément les mathématiques. — Que si nous omettons volon
tairement de mentionner ici la botanique, la zoologie et la géo
logie, c’est que de tout temps on a compris et mieux apprécié
la liaison intime qui rattache celle-là à l’étude de la matière
médicale, l ’autre aux notions fournies par l’anatomie et la patho
logie comparées, et la troisième enfin à la connaissance des
causes telluriques qui peuvent peser sur les endémies.
Serrons maintenant les preuves d’ un peu plus près.
�uo —
— 141 —
longtemps servi de base h l'auscultation et à la percussion, c’est-
111
à-dire anx meilleurs moyens de diagnostiquer avec certitude
l’état normal ou anormal des voies respiratoires et circulatoires;
L'anatomie, celte base indispensable aux études médicales,
elle a conduit les physiologistes à l’ établissement d’une théorie
a sondé a des profondeurs incroyables la composition de l'orga
déjà (ort acceptable de l'audition, et très prochainement, grâces
nisme, et, comme le dit fort bien M. A. Dechambre, ne bornant
aux belles recherches expérimentales d’Helmhollz et autres, qui
pas ses recherches aux composés organiques, elle les poursuit
vont être répétées et commentées par deux savants professeurs,
jusqu’aux éléments, et parvient parfois a résoudre un problème
MM. Morren et Lespès, on peut affirmer que celte théorie recevra
de physiologie pendant quelle constate une disposition nouvelle
le plus intéressant complément que puissent ambitionner tous
dans les tissus. Exemple: la découverte des libres ciliaires,dont
ceux (jui désirent s’instruire.
les fondions se rattachent a Yaccommodation de l ’œ il, a permis
Les lois de l’optique n’ont pas été moins nécessaires pour
d’expliquer ce remarquable pouvoir que chacun possède d’allon
bien comprendre la fonction visuelle; et ce n’est pas assez dire.
ger ou de raccourcir Taxe oculaire, pouvoir que je ne saurais
En effet, toute la pathologie oculaire moderne, toutes les plus
mieux comparer qu’ au va et vient qu’on peut imprimer, a son
belles acquisitions physiologiques, pathologiques et même chi
gré, a une lunette d’approche.
rurgicales, sont dues h la découverte de l'ophthalmoscope, ins
Est-ce donc et uniquement au scalpel le plus délicatement
trument d’optique par excellence, dont l'invention repose sur le
conduit que l ’anatomie est redevable des progrès de ce genre?
jeu de la lumière concentrée et réfléchie par des miroirs à tra
Non, assurément ; c’est la l’œuvre de la micrographie, autre
vers des lentilles convexes ou concaves.
ment dit le résultat des travaux qu’on entreprend a l’aide du
Le même système, les mêmes jeux de lumière appliqués à des
microscope, inventé par la physique et que des physiciens nous
instruments composés, eux aussb de miroirs et de lentilles,
apprennent 'a manier.
mais appropriés à des organes situés plus profondément que
Le microscope ne rend pas moins de services a la physiologie
l'œil, ont permis la construction du laryngoscope, à l’aide duquel
qua l ’anatomie; et tout dernièrement encore, en expliquant à
on a pu mieux comprendre d’abord les fondions du larynx, le
l ’Académie de médécine sou ingénieuse théorie sur la contrac
mécanisme vocal, découvrir des lésions opérables bien au delà
tilité musculaire, M. Rouget aaflirmé une fois de plus et pièces
des limites où l ’œil n’avait jamais pu pénétrer, et par cela même
en main, dûment photographiées, toute l ’importance de cet ins
porter un secours efficace à des maladies antérieurement incon
trument, puisqu’il lui doit sa belle découverte de la structure
nues ou jugées incurables.
spécule des éléments dits contractiles ; découverte qui permet
Et sans énumérer tout ce que la perfection de la mécanique,
aujourd’hui d’identifier la contractilité des muscles avec une
si puissamment aidée par la science, nous promet encore, nous
propiiété purement physique de l ’élément musculaire : l’élasti
pouvons du moins résumer la dette de la médecine envers la
cité.
physique en disant que la connaissance de toutes ses lois nous
Mais le microscope n’est pas le seul produit avantageusement
est indispensable pour apprécier la constitution du milieu sous
transplanté du domaine de la science physique dans le terrain
l’inlluence duquel l’organisme accomplit ses phénomènes vitaux ;
médical. La connaissance des lois de l'acoustique a depuis
phénomènes éminemment variables, et dont les variations sont
�—
— 143 —
142 —
précisément soumises à celles de ce milieu lui-m êm e; sans ex
continuité quelconques, auxquelles les frottements, les tiraille
clure d’ autres influences non moins importantes h connaître et
ments de toute sorte exposent ces organes, la conformation par
relatives à la pesanteur, h la chaleur et a l’électricité.
ticulière de la rainure balano-prépuciale et les cryptes nombreu
L’électricité! cet immense levier de l’intelligence humaine,
ses que l’on y rencontre, offrent,dans le cas présent, beaucoup de
q u i, supprimant les distances pour la transmission de la pensée
chances pour que l'inoculation se fasse naturellement en ces en
et nous servant, a nous médecins, de nouvelle langue pour
droits, et cela par le fait de l ’emprisonnement presque inévitable
interroger des organes paresseux ou muets, arrivera peut-être
du pus contagieux.
un jour à supprimer aussi les paralysies, ce tombeau partiel
d’ uu être qui se senf encore en vie.
[La fin au prochain nwnro.)
Il nous reste à décrire la conformation défectueuse que nous
avons prise comme type de notre troisième catégorie.
Le signe principal, caractéristique de cette conformation est,
avons-nous dit, l’existence d ’un prépuce présentant une ouver
ture antérieure assez large pour permettre de découvrir entière
ÉTIOLOGIE ET PRO PH YLAXIE
ment le gland pendant l’état de flaccidité de la verge, mais trop
DES MALADIES VÉNÉRIENNES
étroite pour permettre à cet appendice d’être reporté facilement
ou
en arrière du gland pendant l’érection ou présentant toujours,
Étude des causes et des conditions anatomo-physiologiques qui permettent
la contagion, favorisent et entretiennent la propagation des maladies
vénériennes dans l’espèce humaine et des moyens prophylactiques à leur
opposer.
d’anneau conlricteur correspondant au point d’ union de la mem
lorsque cette dernière manœuvre est exécutable, une espèce
brane muqueuse prépuciale, avec l’extrémité antérieure de la
peau de ce prépuce.
l rc p a r t i e . — É T IO L O G IE .
( Suite J
Pendant le coït, le prépuce est alternativement porté en avant
Les personnes affligées de cette vicieuse conformation, ont or
dinairement le gland plus large que long, sa face supérieure est
profondément excavée dans sa partie moyenne, tandis que sa
et en arrière de la couronne du gland, or, comme dans la con-
face postérieure, c’est-à-dire celle qui est insérée sur les corps
(ormalion spéciale qui nous occupe en ce moment, cette dernière
caverneux, offre une très grande étendue, ce qui donne une
partie de l’organe est moins saillante qu elle ne l'est générale
grande saillie au bord du gland, que l’on nomme la couronne de
ment dans les précédentes conformations, il en résulte qu’elle
cet organe. Chez ces personnes, le frein du prépuce est habi
ne protège plus autant la membrane muqueuse prépuciale contre
tuellement court et largement implanté sur la face inférieure
les froitements trop rudes qui peuvent se produire, et que ces
uréthrale du gland, très près du méat urinaire. Le prépuce étant
derniers, exerçant alors leur action avec une intensité à peu
plus long et plus mobile du côté de la face dorsale de la verge,
près égale sur toute l’étendue de la surface balano-prépuciale,
il en résulte nécessairement que si l'on repousse cet appendice
peuvent produire ’a peu près pat tout indistinctement des excoria
en arrière, dans une direction parallèle au grand axe de la verge,
tions et permettent ainsi au pus virulent de s’inoculer indiffé
le frein et la partie inférieure du prépuce éprouvent déjà une
remment sur tous les points de cette muqueuse. Cependant,
certaine tension lorsque la partie supérieure dorsale de cet ap
n'oublions pas qu’en l’absence des excoriations ou solutions de
pendice est à peine déjà à moitié déplissée. Si l’on continue le
�-
— 145 -
144 —
même mouvement, la face antéro-inférieure du gland sera forte
Pendant l’accomplissement de l’acte du coït, cette membrane
ment attirée en bas par la traction exercée sur le filet qui s’y
muqueuse saillante boursoufflée se trouve placée dans les plus
trouve étroitement attaché, le sommet, la pointe de cet organe
fâcheuses conditions, c’est sur elle en effet que portent presque
s’abaissera, tandis que la face supéro-postérieure, et principale
exclusivement tous les efforts déterminés par le frottement du
ment sa couronne, se relèveront de telle sorte que le gland, pris
pénis contre les parois vaginales. Aussi est-ce elle qui sera le
dans son ensemble, exécutera un véritable mouvement de bas
siège le plus habituel des excoriations, des solutions de conti
cule de la pointe vers la base, et tendra ainsi inévitablement à
nuité, et, par conséquent, des ulcérations spécifiques. Il est en
prendre une direction presque perpendiculaire h celle des corps
core, dans cette conformation particulière, un autre endroit où
caverneux, et que le méat urinaire regardera en bas et un peu
l’on rencontre également très souvent les ulcérations chancreu-
en arrière au lieu de regarder en haut et en avant, ce qui est
ses : c’est au niveau de l’union de la membrane muqueuse pré
l ’état normal. C'est, du reste, grâce à ce mouvement de bascule
puciale avec le limbe, la partie cutanée du prépuce, lâ où existe
que la couroune du gland, dans celte vicieuse conformation,
cette espèce d’anneau constricteur normal, dont nous venons de
parvient à se dégager du prépuce en exécutant une sorte de sou
parler assez longuement, lequel en effet se trouve distendu outre
bresaut plus ou moins prononcé suivant les individus, mais tou
mesure pendant l’érection, tiraillée et excorié pendant le coït. Il
jours manifeste pour un observateur attentif.
en est de même du filet que son peu d’élasticité et sa brièveté
Si, après avoir refoulé le prépuce en arrière de la couronne du
gland, on l'abandonne à son mouvement de retrait naturel sa
membrane muqueuse ne tarde pas â être arrêtée dans sa marche
exposent â être déchiré â chaque instant et h devenir, par con
séquent, un lieu d’ élection pour l'inoculation du pus virulent.
Nous ne parlerons qu’incidemment de la conformation des
d’arrière en avant, par la saillie du bord postérieur de cet or
personnes atteintes de phimosis complet, cette conformation
gane, elle se plisse, se boursoufïle, et forme alors â ce niveau
anormale et habituellement congénitale devant être, suivant
un véritable bourrelet circulaire dont le relief dépasse bien sou
nous, considérée comme un état pathologique, auquel il importe
vent celui de la couronne du gland. Supposez, pour un instant,
de porter remède tôt ou tard par une opération chirurgicale.
que dans ces conditions le pénis entre en érection, ce bourrelet,
Tout le monde connaît les nombreux inconvénients qu’entraîne
loin de disparaître, de s’affaisser, se trouvera tout au contraire
une pareille incommodité, et, sans parler de la nostalgie spéciale
immobilisé plus que jamais dans cette position défectueuse; car
signalée dernièrement par M. le Dr Fleury, il nous suffira de
non-seulement cette membrane muqueuse pourra moins que
rappeler les difficultés considérables que rencontre dans ce cas
jamais se porter de côté du gland, considérablement augmenté
l’application des soins les plus élémentaires de la propreté, l’état
de volume, par le fait même de cette érection, mais elle ne
subintlammatoire à peu près constant de la muqueuse balano-
pourra même plus s’étaler tant bien que mal sur le dos de la
prépuciale et, par conséquent, la tendance, la disposition ex
verge, comme elle, le faisant pendant l’état de flaccidité, empê
trême aux balano-postiles; enfin, la nécessité souvent absolue
chée qu’elle est d’exécuter ce mouvement rétrogradé par l'étroi
de pratiquer une opération sanglante, le débridement ou la cir
tesse de l’ouverture prépuciale qui forme alors un véritable an
concision dans de très mauvaises conditions pour lé pa
neau constricteur trop étroit pour franchir l’obstacle présenté
tient, lorsque, par exemple, du pus virulent introduit entre le
par les corps caverneux augmentés considérablement de volume.
prépuce et le gland a donné naissance à de nombreuses ulcéra
♦
�-
—
146 —
147 -
tions, lesquelles ont amené on état inflammatoire, et, par suite,
ricnnes du nom de maladies honteuses, exactement comme si
un gonflement excessif de cet organe et la constriction souvent
ces affections ne pouvaient atteindre que des personnes gros
fort dangereuse du gland.
Nous venons d étudier ce que nous avons nommé, au com
sières et déshonnêtes livrées à tous les excès du vice et de la
mencement de ce travail, les causes directes, prochaines des
ce serait peut être le cas de rappeler ici ce qu’un poète moderne
maladies vénériennes, et les conditions anatomo-physiologiques
paraphrasant Horace, disait de la m ort:
qui favorisent la contagion ; nous avons essayé de faire ressortir
débauche. Cette manière de voir nous parait trop rigoureuse et
l importance de quelques-unes d’entre elles, d’en faire compren
Le pauvre en sa cabane où le chaume le couvre
Est soumis à ses lois.
dre les différents modes d’action, ce qui nous a forcé a nous
E t la garde qui veille aux barrières du Louvre
étendre beaucoup trop peut-être sur la partie physiologico-méca-
N’en défend pas les rois.
nique de la question. Nous ne le regrettons pas, cependant,
D’autant plus que cette pruderie un peu exagérée, a eu de tout
car elle nous a paru jusqu’à présent beaucoup trop négligée par
temps et a encore actuellement les conséquences les plus lâ
les auteurs, malgré son incontestable importance. Nous allons
cheuses sur la santé publique, ainsi que nous allons essayer de
actuellement passer en revue un certain nombre d'autres causes
le démontrer.
qui, bien que ne déterminant pas par elles-mêmes aussi direc
La réprobation universelle qui, sous l’influence de cette ma
tement l'apparition de ces maladies, en permettent, en favori
nière de voir, frappe ainsi indistinctement tous les individus
sent, en facilitent, enlin, à un très-haut degré, la propagation
atteints d’affections vénériennes, n’a jamais eu, malheureuse-
dans l'espèce humaine. Parmi ces dernières causes, les unes ont
ment, la puissance, la vertu d’empêcher personne de contracter
leur point de départ dans l’état moral de la société, les autres
ces dangereuses maladies, tandis qu’elle a, en revanche, indirec
dépendent plus spécialement de son organisation matérielle.
tement favorisé beaucoup leur extension latente dans la popula
Jusqu'ici nous avons traité le côté purement scientifique de la
tion civile, ainsi que dans l’armée. C’est donc là encore une
question, aussi nous sommes-nous avancés avec une certaine
véritable cause de propagation des maladies vénériennes. Qui
assurance; actuellement, au contraire, au moment d'aborder la
de nous, en effet, n’a connu de pauvres jeunes gens qui, dans
partie pour ainsi dire morale de ce travail, nous sentons notre
la crainte de voir l’existence de leur maladie honteuse divulguée,
assurance nous abandonner, tant le sujet nous parait épineux,
préféraient souffrir en silence, continuer leur vie habituelle et
aussi éprouvons-nous le besoin de réclamer l’indulgence de nos
laisser aggraver leur mal, que de réclamer pour une pareille
lecteurs et de leur demander comme une véritable faveur, de
affection, les soins intelligents du médecin de leur famille, etc.
vouloir bien ne pas se hâter de juger notre travail avant d’a
Mais celte cause d’extension de propagation des maladies
voir pris la peine de le lire jusqu’au bout. Nous ajouterons, de
vénériennes, a peut-être encore des effets plus désastreux dans
plus, que nous sommes prêts, pour leur être agréable, à retirer
l’armée; car, enfin, un jeune homme malade peut presque tou
et rétracter par avance tout ce qui, soit dans la forme soit dans
jours, quand il le veut sérieusement, réussir à se faire soigner en
le fond, serait de nature à blesser leur susceptibilité ou contre
secret et éviter, par cela même, la honte et les inconvénients
carrer leurs idées fermement arrêtées.
attachés à la divulgation de sa maladie ; il n’en est pas de même
A tort ou à raison la société a stigmatisé les maladies véné-
dans l'état militaire,
l’out soldat ou sous- ollicier atteint de ma-
�—
148
—
ladie vénérienne est obligé, s'il veut se guérir, d’entrer h l'hô
rapidement guéris, leur santé y gagnerait considérablement et la
pital ou à l'infirm erie; il voit par conséquent le nom de sa
santé publique bien davantage encore.
maladie écrit en toutes lettres sur des registres ou des billets
L ’exiension tous les jours croissante de la prostitution clan
d’hôpital destinés h passer sous les yeux d’une foule de monde,
destine est une cause très puissante de propagation des maladies
soit à l'hôpital, soit au régiment. Qu'en résulte-t-il? C’est que
vénériennes. Ce genre de prostitution est loin, en effet, d’offrir
beaucoup de ces soldats, mais principalement de ces sous-offi
les garanties de la prostitution publique patentée, les femmes
ciers, dans la crainte de perdre, par la divulgation de leur faute,
qui l’exercent n’étant soumises à aucune visite sanitaire régu
l’estime de leurs chefs et de voir dans quelques cas, par ce fait
lière. L ’accroissement de ce genre de prostitution est lui-même
seul, leur carrière militaire entravée, préfèrent conserver indéfi
le résultat de plusieurs circonstances et conditions sociales que
niment les maladies dont ils sont atteints, employer tous les
nous nous contenterons de signaler, tout lecteur sensé compren
moyens possibles pour tromper la bonne foi des médecins m ili
dra sans peine les motifs de notre réserve. Nous noierons en
taires, éluder les visites sanitaires réglementaires, que d'avouer
première ligne l'augmentation de la richesse, du bien-être dans
franchement leur fâcheux état au médecin de leur régiment.
certaines classes de la société, coïncidant précisément avec celle
Qu’arrive-t-il alors le plus souvent? C’est que parmi ces soldats
de la misère, suite du renchérissement de la vie matérielle dans
ou sous-ofiieiers qui réussissent h échapper à la surveillance, il
les classes inférieures; en seconde ligne, l’abaissement tout
s’en trouve toujours un certain nombre à conscience fort élasti
spécial du salaire du travail purement manuel de la femme, suite
que qui continuent h se livrer de temps en temps au coït, exacte
inévitable de l’invention de certaines machines qui le rempla
ment comme s’ils étaient en parfaite santé. Les conséquences
cent avantageusement pour le chef d’établissement, telles que
d’une pareille conduite sont faciles a pressentir; l'époque de
les machines a coudre,à broder par exemple; en troisième ligne
leur guérison se trouve indéfiniment retardée, ils transmettent
l ’envahissement réellement déplorable et tous les jours de plus
les maladies vénériennes don» ils sont atteints aux femmes avec
en plus prononcé, par les hommes, d une foule de métiers, de
lesquelles ils ont des rapports, et ces femmes, a leur tour, infec
professions jadis presque exclusivement réservés aux femmes et
tent une foule d’autres hommes. C’est ainsi que dans une petite
ville de garnison, où le nombre des femmes se livrant a la pros
titution est généralement assez restreint, il suffit quelquefois
exercés par elles; enfin, comme conséquence de tout ce qui pré
cède, l’impossibilité matérielle absolue, parfaitement démontrée
actuellement pour la grande majorité des femmes habitant les
d'un seul individu contaminé et sans conscience pour empoi
grandes villes, de vivre en dehors du mariage ou de la famille
sonner tout un régiment.
avec les seules ressources de leur travail manuel.
Tout ceci, nous le répétons, n’aurait généralement pas lieu,
si ces militaires étaient certains de ne pas être mal vus, mal
notés par leurs chefs lorsqu’ils se déclarent atteints de maladies
Ces diverses raisons unies a l’instinct naturel d'imitation au
besoin, aux exigences toujours croissantes du luxe, ont forcé peu
à peu la plupart des ouvrières à chercher dans des relations illé
vénériennes; la plupart, je ne dis pas tous, — je connais trop la
gitimes les ressources indispensables a leur existence, ressources
nature insouciante de certains soldats pour avancer une pa
que le travail à lui seul ne pouvait plus leur fournir. Or, cette
reille affirmation, — la plupart, dis-je, en feraient immédiate
manière de vivre, ce changement perpétuel et presque obligatoire
ment l’aveu au médecin de leur corps, ils seraient bien soignés
d’amants a été et est encore tous les jours, pour un grand nom-
�-
ISO —
bre de ces malheureuses filles, la source d'une foule de maladies
vénériennes, maladies qu’elles transmettent ensuite aux. hommes
quelles fréquentent, n’ayant la plupart du temps, ni le temps,
ni le loisir, ni les moyens de se soigner, encore moins celui de
vivre, en se privant des secours, des bénéfices de la prostitution.
La prostitution publique, patentée, c’est-â-dire celle qui
s’exerce avec autorisation de la police, dans les maisons de to
lérance, est également une source féconde, un moyen de pro
pagation des plus actifs des maladies vénériennes. Les dangers
que présente ce genre de prostitution proviennent uniquement
du peu de garanties matérielles, qu’offrent a la santé publique les
visites sanitaires auxquelles est soumis le personnel de ces éta
blissements. Nous traiterons, dans la seconde partie de ce travail
cette importante question avec tout le soin qu’elle comporte;
nous exposerons en détail les raisons qui rendent la plupart du
temps ces visites illusoires, et nous donnerons les moyens de re
médier efficacement à ce déplorable état de choses.
Telles sont les causes principales qui permettent, favorisent
ou entretiennent la contagion et la propagation des maladies
vénériennes. La première partie de notre travail est terminée ;
les nombreux détails dans lesquels nous sommes entrés et le
grand développement que nous avons donné a cette première
partie nous faciliteront beaucoup l'exposition de la seconde,
c’est-'a-dire de celle qui traite de la prophylaxie, but principal
de cette étude.
(La suite au prochain numéro.)
Dr A. B ou lo n g n e ,
Médecin-Major de l r0 classe à l’Hùpital militaire de Marseille.
NÉCROLOGIE
Depuis quelques mois, les articles de Nécrologie prennent
dans les journaux de médecine une place beaucoup trop consi
dérable. La section des sciences médicales de l’ In stitu t, l’Aca
démie de médecine et surtout la Faculté de médeciue sont
découronnées. Plusieurs de ces hommes dont nous avons admiré
les travaux, dont le génie a illustré notre profession, dont le
nom s’attache aux grandes découvertes de notre époque, ont
disparu de la scène du monde. Leurs noms comme leurs tra
vaux, sont rentrés dans le domaine de l’histoire.
C’est a peine si nous retrouvons encore quelques-uns des
athlètes des grandes luttes médicales du commencement du
siècle. Où sont les antagonistes de ce grand novateur, qui
a pu croire un moment avoir imposé ses idées a tout une géné
ration et qui a survécu a ses triomphes, Chomel, Rostan, dont la
terre couvre aujourd’ hui les dépouilles et dont le nom est
pieusement conservé dans le cœur de tous ceux qui furent leurs
élèves.
La lithothritie, qui a son chapitre inscrit dans la médecine
opératoire a vu s’éteindre ses créateurs. Leroy-d’ Etioles, Heurteloup, e tC iviale, le dernier de ses représentants, le premier
dans sa création.
Ft ces travailleurs opiniâtres qui se sont attachés à cette
lésion regardée comme au-dessus des ressources de l’art, e
qui condamnait â une infirm ité terrible la femme frappée dans
l ’exercice de ses plus chères fonctions, Lallemand, Jobert de
Lamballe, les précurseurs des chirurgiens américains ; le pro
fesseur de Montpellier est mort depuis longtemps, moins mal
heureux que Jobert, il a conservé sa noble intelligence jusqu’au
dernier moment.
Si les vides sont immenses partout, nulle part on ne les
trouve plus grands qu’a la Faculté de médecine. La génération
des concours compte â peine quelques-uns de ses représentants.
Les élus et leurs émules, moins heureux, sont en nombre si
restreint qu’il semble que celte institution qui donne au profes
soral tant d’autorité appartienne à une époque bien plus éloi
gnée de nous qu’elle ne l’est en réalité. Blandin, les deux Bérard,
Royer-Collard, Malgaigne, Gerdy, Lisfranc, Leuoir, Miction,
Robert, Vidal, etc., et dans ces derniers temps les deux illustres
élèves de Bretonneau, ces nobles et laborieux enfants de la Tou
raine.Trousseau, ce professeur si éloquent, si persuasif, si
entraînant, qui savait si bien rendre attrayante l ’une des bran
ches les plus arides de l ’enseignement médical, et qui s’était
�— 153 —
condamné à la retraite, avant l'heure où la mort devait le ravir
à la reconnaissance de nous tous qui étions ses élèves.
C’est avec la plus profonde vénération que toute notre généra
tion prononcera le nom du dernier venu dans celte longue
liste. Velpeau, hier nous le disions encore, est le chirurgien le
plus complet de notre France; aujourd'hui, c'est au passé que
que nous devons parler, et ce sont nos souvenirs seulement qui
nous rappelleront son immense savoir, la sécurité de son juge
ment, son habileté opératoire et surtout le zèle ardent qu’il
professait pour l’enseignement de tous les élèves qui l ’entou
raient.
Comme savant chirurgien, Velpeau a touché h toutes les
parties de la chirurgie. Pour lui, le nom de spécialiste était
une erreur, car il embrassait dans sa vaste érudition, dans son
immense pratique, toutes les branches de l’ enseignement. Quel
est le sujet chirurgical qui n'a été traité a l’amphithéâtre delà
Charité? Quelle est la variété d’opération qui n’a été pratiquée?
Cet homme, né dans la forge du maréchal-ferrant, n’a jamais
oublié que le travail seul l ’avait élevé, et lorsque la fortune l ’a
eu comblé de ses faveurs, il était encore le premier à donner
l'exemple du travail, de l'assiduité, et s’ il était sévère, c’était
surtout pour lui-même.
Une souscription se forme pour élever un buste à Trousseau,
et c’est justice. Mais qu'une voix plus autorisée que la mienne,
fasse appel à tous ceux d’entre nous qui doivent quelque
reconnaissance à Velpeau, et nous verrons bientôt la statue de
notre maître, s’élever dans la cour de l'Hôpital de la Charité,
dont il a été le flambeau pendant de si longues années de
cette carrière si bien remplie.
Pleurons-le aujourd'hui, mais montrons-nous reconnaissant
demain.
J.
C h a p p l a in .
Au moment de mettre sous presse, nous apprenons encore
la mort de M. Rayer. C’est un deuil pour la science, c’est un
deuil aussi pour l’Association générale des médecins de France.
INTÉRÊTS PROFESSIONNELS
L pn llé d c v ln s et le C h o lé ra en Ita lie
« Le premier entre tous, le gouvernement italien vient de
donner un noble exemple, en assurant aux veuves et aux or
phelins des médecins qui succombent en soignant les cholériques
le droit à une pension viagère et alimentaire. L ’Espagne avait
bien créé un précédent à cet égard en 1855, en constituant
ainsi des pensions à quelques-unes des veuves pauvres des mé
decins qui s’étaient le plus distingués dans l’épidémie de 1854,
mais c’était là une récompense transitoire et exceptionnelle ana
logue à celle qui a été accordée par la ville de Marseille, en
1865, à la veuve du docteur Honoraty ; ce n’était pas un droit,
comme vient de le reconnaître et de le consacrer par une loi la
législature italienne. Aux députés Curti et Macchi en revient la
noble initiative. Fondés sur les aspirations exprimées par l’Awo-
ciazione medica ilaliana, ils ont interpellé le ministère sur ses
dispositions à étendre aux médecins le droit à une pension , re
connu par la loi, aux employés de l ’État morts dans l’exercice
de leurs fonctions. Sur sa réponse affirmative, un projet de loi
a bientôt été rédigé, présenté, amendé et adopté d'urgence dans
la séance d u 31 juillet. « La nation, a dit le rapporteur, éprouve
le besoin et le devoir de manifester sa reconnaissance aux mé
decins généreux q u i, devant la fureur et le danger du fléau,
mettant de côté les plus douces affections de la fam ille, accou
rent au soulagement des malades et succombent dans le magna
nime exercice de leur apostolat. » Et malgré l’état précaire des
finances, les Chambres ont voté immédiatement une pension
annuelle de 400 francs pour la veuve et de 1,000 francs avec
enfants dont le droit cesse à leur m ajorité, de même que celui
Marseille.— Typ. Arnaud, Cayer et Corop., rue Saint-Ferréol, 57.
de la veuve, si elle convole en secondes noces. Quand un gou-
10
�— 155 —
vernemcot comprend aussi délicatement ses devoirs et sait les
guier, ([lie, de toutes les sciences, la chimie est celle qui a le
remplir loyalement au détriment de sa caisse, il s honore, gran
plus contribué, dans notre siècle, au perfectionnement de l ’art
dit et augmente sa solvabilité au crédit de l'opinion publique, en
de guérir. Elle offre à la physiologie un instrument direct
vertu du proverbe : « Qui paye ses dettes s’enrichit. »
d’expérimentation et de recherche qui, appliqué à l ’étude de la
« Quoique ne profitant directement qu’à nos confrères ita
plupart de nos fonctions, en dévoile chaque jour le mécanisme
liens, ce précédent ne doit être perdu pour les médecins d'aucun
et refoule de plus en plus l ’inconnu au-delà des limites que l ’es
pavs. Il constitue un acte précieux pour la reconnaissance future
prit humain n’aurait osé dépasser en rêve. Qu’il nous suffise de
de leurs droits les plus sacrés. Qu’ils sachent s’en prévaloir et
rappeler, comme spécimen des immenses travaux de cette nature,
partout l’exemple sera imité. A la France, qui a le privilège de
les œuvres de iMM. Claude Bernard, Brown-Séquard et Longet ;
l ’initiative de la justice et de la générosité parmi les nations, ap
et celles non moins importantes signées par MM. Dumas, Ber-
partenait de le donner; en sc laissant dépasser ici par sa sœur
thelot ou Favre. Ajoutons même que celui, parmi ces éminents
l’Italie, elle ne peut manquer de le suivre bientôt, et dès lors
chimistes, qui appartient à cette Faculté des sciences et à notre
toutes les autres l ’imiteront comme une des meilleures mesures
École de médecine, a, plus que tout autre, contribué, par suite
prophylactiques contre le choléra. »
d’une conception vraiment admirable de simplicité, à réduire à
P. G a r n ie r .
(Union Médicale, 19 septembre 1867, p. 482.)
une seule loi, dite d'équivalence, tous les phénomènes qui,
appartenant à un ordre différent, paraissaient devoir mettre en
Ces lignes n’ont pas besoin de commentaires. En les repro
jeu des forces diverses. Ainsi, pour le physicien, il y avait la
duisant, nous nous associons complètement aux réflexions et
force calorique, la force électrique et la force lumineuse ; pour
aux éloges de notre confrère de Paris, et nous signalons toute
le chimiste, la force d’affinité; pour le physiologiste, la force
l’importance, pour le corps médical, de la mesure noble et juste
vitale. Eh
que vient de prendre le gouvernement italien.
prouvé, et dans celte enceinte même, que toutes ces forces se
Le Comité de Rédaction.
bien ! aujourd’hui des expériences décisives ont
réduisent à une force unique qui n’est autre que le mouvement.
Sans doute le mode de ce mouvement diffère dans la chaleur,
dans l’électricité, dans la lumière, etc. ; mais chaque mode peut
DU CONCOURS
se transformer dans un autre; le mouvement chaleur peut deve
nir mouvement électrique et se métamorphoser lui-même en
Que les Sciences physiques prêtent à la Médecine
Par le D r Sinus P ibosdi.
mouvement lum ineux; et tous sont équivalents entre eux,
c’est-à-dire qu’ils représentent toujours la même somme de
force. (I est presque impossible de saisir par la pensée toutes
( Suite.)
IV
Si des applications de la physique à la médecine, on passe à
celles de la chimie, on peut véritablement répéter avec M. Fi-
les conséquences pratiques qui pourront dériver un jour d’une
pareille théorie.
Mais revenons à ce qui rentre plus particulièrement dans le
domaine médical.
Tous les actes fondamentaux dont la succession perpétuelle
�— 157 —
— 156 —
caractérise l ’état de vie, sont nécessairement chimiques, puis-
liée ; les dimensions de ce globe, qui imposent des limites néces
qu ils consistent en une suite non interrompue de compositions
saires à la multiplication de ces êtres et sa distance réelle au
et de décompositions plus ou moins profondes. Sans doute,
centre de notre monde, ce qui constitue un des éléments indis
alors même que toutes les lois chimiques seraient connues avec
pensables de sa température propre.
un rare degré de perfection, leur application ne saurait su IFire
Il est également indispensable de savoir apprécier l’obliquité
pour déterminera priori et sans une étude directe de l'orga
du plan de l ’orbite terrestre, comparé à l’axe de rotation de la
nisme vivant , l ’issue précise de chaque réaction vitale. Mais
planète, lorsqu’ on veut comprendre le principe immédiat de la
malgré celte insuffisance nécessaire, il serait absurde de regarder
division essentielle de la terre en climats. De cette double
les actes de la vie organique comme soustraits a l’empire des lois
appréciation nait la loi fondamentale relative h la distribution
chimiques. C'est par conséquent il la chimie qu’il appartient de
géographiquedesdiversesespèces vivantes, animalesetvégéiales,
fournir le vrai point de départ de toute théorie rationnelle, con
et l’on ne peut ignorer de nos jours que les plus intéressantes
cernant la nutrition, les sécrétions et tout ce qui concourt à
acquisitions de l'anthropologie sont dues précisément à l ’impul
l ’échange indéfini entre les molécules qui s’en vont et celles qui
sion imprimée à ce genre de recherches, par la géographie
médicale, si bien envisagée déjà par le regrettable M. Boudin,
les remplacent.
et si largement cultivée maintenant par des hommes qui, à
V
L’astronomie elle-même ne demeure pas étrangère aux pro
l ’exemple de MM. Broca et Bergeron, lionorcnt autant la méde
cine que la science sociale.
grès de la médecine, et je m’estime heureux d’avoir a constater
VI
le fait devaul un de ses plus illustres représentants (1).
Il est difficile, en effet, de comprendre nettement la théorie de
Il semblerait enfin que, par suite de sa complication, l’étude
la pesanteur et d’ établir une analyse exacte de ses effets généraux
des corps vivants et plus particulièrement de l'homme, devrait
sur l'organisme, si on en isole ce phénomène de celui de la gra
décliner toute ingérence des procédés mathématiques. Cepen
vitation céleste. Pourrait-on concevoir d'une manière vraiment
dant, la statistique médicale ne peut être abordée que par ceux qui
scientifique la condition d existence propre aux corps vivants, si
savent manier le calcul. Et s’ il est un peu vrai de dire, qu’il ne
on négligeait l’ensemble des conditions astronomiques, qui
faut pas trop abuser des enseignements de la statistique, à
caractérisent la planète à la surface de laquelle nous vivons?
laquelle on peut faire tenir le langage qu’on désire entendre, il
Il n’est pas inutile non plus de connaître la masse terrestre
n’est pas moins équitable d’ajouter que, sanslaslatistique.il
comparée à la masse solaire, d’où résulte l’intensité effective de
serait difficile d’arriver à la connaissance exacte d’une foule de
la pesanteur proprement dite ; la forme terrestre qui règle la
résultats qui importent autant aux applications d'une bonne
direction de celle pesanteur; l’équilibre fondamental et les
hygiène, qu’à l ’emploi ou à l’oubli de maints procédés thérapeu
oscillations régulières des lluides qui recouvrent notre globe et
tiques.
à l’état desquels l’existence des êtres vivants est étroitement
Du reste, celte partie de la chirurgie que l’on nomme autoplastie, emprunte sans cesse à la géométrie ses formes et son
(I) M. Le Verrier, président de l’Association Scientifique.
langage descriptif. En un mot, si une éducation logique, telle
�—
158
159
—
-
que peut la doDner l ’étude des mathématiques, est chose indis
arriver à fondre toutes les sciences en une seule, simplifier de
pensable aux physiciens, aux chimistes et surtout aux astrono
plus en plus la matière dans sa composition anatomique, et
mes, il y aurait anomalie h prétendre que chez le médecin,
réduire réellement toutes les forces en une seule, il ne faudrait
l’ instrument intellectuel ait moins besoin d'être aiguisé, alors
pas redouter un pareil progrès, sous le prétexte de lui voir
qu’on le destine â la solution des problèmes les plus complexes,
exercer une fâcheuse influence sur nos convictions les plus
et, par cela même, les plus difficiles que l’on puisse aborder. Et
chères et les plus indispensables à la civilisation.
tout cela est si pratiquement vrai, du reste, que je ne puis résis
Dieu a donné ’a l’ homme l’intelligence pour s’en servir autre
ter au désir de rappeler une anecdote, bizarre peut-être, mais
ment que pour l'édification d'une certaine philosophie, qui n’a
dont la signification est facilement saisissable.
vraiment de sage que le nom. Mais, plus l’ horizon qui s’ouvrira
On raconte que l ’illustre Chaussier, voulant, à un examen
devant cette intelligence sera vaste, plus il sera permis a l'homme
d'anatomie, s’assurer de l'intelligence et surtout de la méthode
de contempler, d’analyser et d’admirer l’œuvre immense de la
propre a un élève auquel il s’intéressait, demanda au jeune
création, plus aussi il se sentira saisi d’amour et de respect pour
homme et sans autre préambule, de lui faire la description du
le Créateur lui-même.
tabouret traditionnel sur lequel il se trouvait assis. Sans se
déconcerter le jeune homme entreprend la description de son
escabeau et s’ en acquitte avec un ordre parfait et à la grande
ÉTIOLOGIE ET PROPHYLAXIE
satisfaction du professeur. Ce jeune élève, qui était alors un tout
DES MALADIES VÉNÉRIENNES
petit répétiteur de mathématiques, est devenu depuis une des
gloires de l’ École de Paris.
V II
En résumé, il y aurait plus que de la témérité a conclure de ce
ou
Étude des causes et des conditions anatomo-physiologiques qui permettent
la contagion, favorisent et entretiennent la propagation des maladies
vénériennes dans l’espèce humaine et des moyens prophylactiques à leur
opposer.
«"■ p a r t i e . — P R O P I I lE / â X l E ,
qui précède que ceux qui se livrent a l’étude et a l’ exercice de
la médecine doivent posséder l’ensemble de toutes les sciences
On peut suivre, dans l’exposition de ia prophylaxie des mala
que nous venons d’énumérer, oubliant ainsi que chacune d’elles
dies vénériennes, différentes méthodes qui, bien que distinctes
a pris un essor capable d'effrayer l’esprit le plus hardi. Mais il
en apparence, aboutissent toutes, en somme, au même résultat.
n’est pas permis d’ignorer le tribut que, réciproquement, chacune
Pour nous, désirant ne pas trop nous éloigner de l’ordre que
d’entre elles apporte à sa voisine, et personne ne peut se croire
nous avons adopté dans l ’étude de l’étiologie de ces affections,
vraiment en possession de la spécialité qu’il cultive de préfé
nous étudierons celte prophylaxie sous les deux titres suivants:
rence, que lorsqu'il sait emprunter aux sciences collatérales les
1° Prophylaxie personnelle ou privée ; ‘l 0 Prophylaxie générale,
procédés propres au perfectionnement de l’objet de ses prédi
publique ou administrative. La première de ces deux divisions
lections.
correspond â peu près â ce que, dans l’étiologie, nous avons
Que si l’on pouvait un jour, quelque éloigné qu’il soit de nous,
nommé les causes directes; la seconde s’adresse plus spéciale-
�101 ment aux causes indirectes éloignées, dépendantes de la consti
Il est un autre moyen prophylactique applicable également
avant le coït, moyen excellent, puisqu’il joint à l’avantage de
tution matérielle et morale de notre société.
La prophylaxie personnelle ou privée comprend, première
préserver les hommes de la contagion, celui d’en garantir égale
ment, les précautions que toute personne saine qui s'expose à
ment les femmes ; ce moyen tout le monde le connaît, il con
la contagion doit prendre avant, pendant et après le coït; secon
siste à recouvrir la verge d’une certaine enveloppe protectrice,
dement, les moyens prophylactiques ou neutralisants spéciale
faite avec l ’intestin de mouton préparé ou une feuille mince de
ment applicables aux individus contaminés qui, dans certains cas
caoutchouc. On se plait depuis quelque temps à jeter le dis
fort rares, se voient forcés d’ accomplir ou de subir cet acte
crédit sur cet utile engin, en répétant à satiété ce mol si connu
malgré leur état de maladie. Parmi les moyens prophylactiques
d’ une femme célèbre : le condom e:>t une cuirasse contre le
qui doivent être employés avant le coït, par les personnes conta
plaisir, mais une toile d’araignée contre le danger; ou bien en
minées que des raisons majeures, impérieuses, forcent à se livrer
core cet autre mot de M. Ricord : c’est un parapluie qui protège
à cet acte, nous ne saurions trop recommander, l # aux femmes:
quelquefois la tête, mais ne garantit jamais les pieds, etc., etc.
les lotions et injections vaginales plusieurs fois répétées, quel
Tout cela est assurément fort spirituel, mais il faudrait savoir avant
ques instants avant les rapports sexuels. Ces injections se font au
t >ul, si c’est bien vrai, si les reproches qu’on lui adresse sont
moyen de l’eau simple, ou, ce qui est préférable, avec de l ’eau
véritablement fondés. Or, si nous en jugeons par ce qui se
additionnée d une forte proportion, un vingtième environ, de
passe tous les jours sous nos yeux, nous croyons être en droit
sou poids, de l’une des substances suivantes: tannin, alun,
d’affirmer que ce moyen prophylactique, malgré ses inconvé
lartrate de fer et de potasse, vin aromatique, vinaigre de toilette,
nients, est encore un des moins imparfaits que l’on puisse em
eau de Cologne, enfin acétate de plomb liquide, extrait de
S a
ployer et qui rend tous les jours d’incontestables services; son
turne; 2° aux hommes, l’émission de l’urine pratiquée dans les
emploi devrait donc, au lieu d’être décrié comme on a trop de
mêmes conditions, c'est-à-dire quelques instants seulement
tendance à le faire, être au contraire fortement encouragé par
avant le coït et, lorsque cette émission ne peut avoir lieu, quel
les médecins, à condition, bien entendu, que les personnes appe
ques injections urétherale, et lotions et cautérisations extérieures,
lées à s’en servir ne se crussent pas dispensées, par cela même,
en cas de chancres, au moyen du nitrate d’argent. Les injections
de mettre en pratique, après le coït, les autres prescriptions
uréthrales doivent être pratiquées avec les solutions médicamen
prophylactiques que nous allons bientôt leur indiquer.
teuses que nous venons de recommander, en ayant soin toute
Dans le cas où I on ne voudrait ou ne pourrait se servir de
fois, de les faire moitié moins concentrées. Il va sans dire que *
cette enveloppe protectrice, nous ne saurions trop recommander
ces injections vaginales ou uréthrales, ne sont applicables qu’aux
de prendre la précaution d’enduire, avant le coït, la verge en
femmes atteintes de vaginites ou aux hommes affectés de blé-
tière avec un corps gras quelconque, de l’ huile,de la pommade,
norrhagie. Q uoiqu’il en soit, il ne faut jamais perdre de vue
du cold-cream par exemple; c’est un excellent moyen pour éviter
que tous ces moyens n’ont qu’une efficacité douteuse, relative,
les déchirures, les excoriations ainsi que le contact direct du pus
et même tout-à-fait nulle, lorsqu'ils sont mis en usage pendant
virulent avec les tissus muqueux et cutanés si délicats de cet
la période aiguë de la blénorrhagie et la période d’activité ou
organe. Tel est, a peu de choses près, l ’ensemble des moyens
même d’état des ulcères chaucreux syphilitiques.
qu’il est prudent d emplover dans les cas douteux, avant le coït.
�— 163 —
Pendant l’accomplissement de cet acte, il est certaines pré
i
génitaux; il est donc absolument indispensable, si l’on veut
cautions dont on ne saurait trop recommander I observation,
préserver également
la membrane muqueuse uréthrale des
principalement aux jeunesgens. C'est d’abord d’ éviter,comme le
suites d’un contact impur, d’avoir recours à un autre moyen. Ce
dit très bien M. Melcliior Robert, ces orgies nocturnes h la suite
moyen consiste dans l’émission de l'urine après le coït, mais
desquelles les rapports sexuels prennent un caractère d’acharne
pour retirer de cette émission tous les avantages quelle peut
ment, presque toujours nuisible et dans lesquelles, ajouterons-
procurer, il faut qu’elle soit pratiquée le plus tôt possible, après
nous, un amour-propre mal placé,une ridicule gloriole de jeune
le coït et de la manière suivante: La miction étant commencée,
homme remplacent bien souvent le véritable plaisir. On évitera
on interrompt brusquement le jet de l’urine en serrant un ins
également avec soin la prolongation intempestive volontaire ou
tant l’ une contre l ’autre les parois opposées du canal de l’urèthre
la répétition coup sur coup de l ’acte vénérien: cette manière de
au niveau du gland; puis, on cesse presqu’aussilôt cette pres
faire amenant presque toujours une irritation très préjudiciable
sion ; l ’urine qui avait distendu un moment les parois de ce
des organes génitaux. Enfin, l ’éjaculation spermatique devra
canal, s’échappe alors avec violence et entraîne avec elle toutes
toujours s’accomplir entièrement, régulièrement, cette espèce
les impuretés introduites pendant l'acte du coït, On répète la
d'injection a tergo étant un très bon moyen de nettoyage naturel
même manœuvre plusieurs fois de suite et l’on acquiert ainsi
du canal de l ’uréthre.
chaque fois de nouvelles garanties contre la contagion.
Le coït une fois terminé, on devra procéder sans retard au
Si l'on veut faire bénéficier en même temps la muqueuse
lavage complet de tout l'organe. Cette opération s’ exécute ordi
balano prépuciale des propriétés prophylactiques de ce lavage
nairement au moyen d’ une certaine quantité d’eau renfermée
naturel, il suffit d’attirer en avant du gland l’extrémité du pré
dans une cuvette. Celte manière de procéder nous parait défec
puce, de fermer solidement l’ouverture de cet appendice, en en
tueuse, car en laissant baigner ainsi la verge dans une quaulilé
maintenant les deux bords accolés l ’un contre l’autre,’ et en
restreinte de liquide, elle permet encore pendant quelque temps
suite d’ uriner dans ces conditions; l’urine poussée par les con
le contact de la matière virulente avec les tissus qu’il importe
tractions de la vessie, sort comme d'habitude par le canal de
d'en débarrasser, au contraire, le plus complètement et surtout
l ’urêthre, mais trouvant dans l’occlusion du prépuce un obstacle
le plus rapidement possible; aussi lui préférons-nous de beau
à sa libre sortie extérieure, elle se répand immédiatement entre
coup la méthode suivante. La verge étant soutenue dans la main
la muqueuse prépuciale et le gland, déterge ces surfaces et en
gauche au-dessus de la cuvette, on laisse tomber sur toute sa
traîne avec elle toutes les impuretés, aussitôt que cessent la
surface, et pendant un certain temps un mince filet d'eau dont
pression exercée b l ’extrémité du prépuce, on lui permet de
on aide l'action délersive par de légères frictions avec les doigts
s’échapper au dehors avec facilité.
enduits de mousse épaisse de savon ; puis, on augmente peu a
Jusqu’ici nous avons supposé la miction praticable, mais il
peu la force du jet d'eau et l’on termine cette petite opération
est certain cas où cet acte ne peut s’accomplir dans de bonnes
par une véritable inondation générale de
conditions, c’est-à-dire immédiatement après le coït ; dans ces
toutes les parties
sexuelles.
cas, plutôt (pie délaisser le pus suspect séjourner dans le canal
Ce lavage, quelque bien exécuté qu’il soit, ne peut en aucun
de l ’urèthre ou le vagin, nous conseillons aux hommes de prati
cas étendre son action au delà des parties externes des organes
quer, plusieurs injections uréthrales successives avec de l’eau
�—
— 165 —
164 —
pure et simple. Les injections médicamenteuses étant trop ir r i
tantes pour la membrane muqueuse de ce canal, devront être
L’ensemble des moyens prophylactiques que nous venons de
décrire, réussirait sans aucun doute à préserver des atteintes
employées uniquement par les femmes dont le vagin ollre, en
des maladies vénériennes la majeure partie des personnes qui
général, une sensibilité beaucoup moins grande; pour ces der
s’exposent a les contracter, si leur emploi était toujours possible;
nières nous recommandons spécialement les injections alunées
malheureusement, il ne l’ est pas toujours, il faut bien l’avouer ;
pratiquées au moyen d’ une seringue à injection dont le bout re
c’est ainsi, par exemple,que les personnes atteintes de phimosis
courbé devra être introduit jusqu’au niveau du.col de l’utérus.
complet ou même celles qui, sans avoir de phimosis, présentent
Ces injections doivent être nombreuses, puissantes, successives,
cette conformation vicieuse particulière que nous avons décrite
afin de ne pas laisser au pus contagieux la possibilité de séjour
et rangée dans notre troisième catégorie, ne peuvent que très
ner dans les replis normaux de ce conduit vaginal.
difficilement se livrer aux lavages médicamenteux que nous ve
Il peut arriver enfin que les soupçons inspirées par l ’état de
nons de conseiller, non-seulement h cause des obstacles maté
santé de la femme avec laquelle on vient d’avoir des rapports,
riels, que ces conformations leur opposent, mais principalement
deviennent tout à coup, a la suite d'un examen plus minutieux
h cause de l ’extrême sensibilité de leur muqueuse balano-pré-
ou d’ un tardif aveu, unedécèvante réalité; dans les cas de ce
puciale, laquelle rend très douloureux, souvent même tout h
genre, et toutes les fois enfin que l’on aura quelques raisons de
fait insupportable le contact un peu prolongé de toutes ces
concevoir des craintes fondées sérieuses de contagion, le lavage
solutions irritantes. Pour ces personnes, il n’existe réellement
à l’eau de savon que nous avons précédemment recommandé,
qu’un seul moyen prophylactique; mais, hâtons-nous de le dire,
devra être suivi de l’ application durant quelques minutes d ’un
ce moyen est un remède presque souverain ; on ne doit donc,
linge trempé dans un des liquides suivants:
par conséquent, jamais hésiter â le mettre en pratique. Ce moyen
c’est l ’ablation complète du prépuce par la circoncision.
1°— Eau distillée........... ................ 60 grammes.
Perchlorure de fe r.........
5
grammes.
Acide citrique................
4
grammes.
De toutes les opérations proposées pour remédier à ce vice
de conformation, la circoncision est, en effet, la seule qui pré •
sente des avantages réels, incontestables, sans offrir de sérieux
2“
— Alcool ordinaire.......... 30
Savon mou de p o ta sse .. . .
Essence de citron rectifiée..
grammes.
20 grammes.
15 grammes.
3°
— Eau ordinaire.............. 100
Alcoolé de Guaco........... 20
grammes.
grammes.
et les nombreux désagréments qu’elle entraîne h sa suite. Pour
4°
— Eau distillée.................. 100
Tartrate de fer et depotasse.
grammes.
10 grammes.
d’examiner les résultats que produisent habituellement les di
inconvénients, la seule, enfin, qui, tout en donnant une grande
liberté au gland, fait disparaître â peu près entièrement l ’extrême
fragilité de ces parties, cesser la production de la matière sébacée
convaincre de la vérité de ces propositions , il nous sullira
verses autres opérations.
Faute de ces diverses préparations, il vaudra toujours mieux,
L ’incision pure et simple ou même en V pratiquée à la face
plutôt que de rester sans rien faire, tremper la verge dans de
supérieure, dorsale du prépuce donne, lorsqu’elle n’intéresse
l’eau mélangée avec un tiers environ de son volume, de vinaigre
pas toute la hauteur de cet appendice, un résultat presque insi
de toilette ou d’eau de Cologne.
gnifiant, car la lésion primitive ne tarde pas â se reproduire â
%
�-
166 —
— 167 —
peu près aussi prononcée qu’ayant l'opération, par suite du re
assurément à elle seule pour garantir la plupart des individus
trait continu de la cicatrice. Si cette incision a été, au contraire,
des atteintes des maladies vénériennes; mais il ne faut pas per
suffisamment prolongée, jusqu a la rainure balano-prépuciale,
dre de vue que bien souvent l’application de la plupart de ces
par exemple, la lésion primitive ne se reproduit plus, il est vrai,
moyens n’est pas possible ou du moins est assez difficile pour
mais alors le résultat obtenu est des plus disgracieux; les parties
que l’insouciance, la paresse et la malpropreté, si naturelle à
latérales du prépuce n’ayant plus de point d’appui, tombent de
l'espèce humaine, en fasse négliger l ’emploi par une foule de
chaque côté du gland et forment là deux espèces d’ailerons qui
personnes ; il a donc fallu chercher ailleurs la solution de ce
s’engorgent à chaque instant et s’excorient avec la plus grande
difficile problème et trouver les moyens de garantir, pour ainsi
facilité, ils constituent dans tous les cas, une nouvelle difformité
dire, malgré eux, les hommes de la contagion de ces maladies.
des plus désagréables, dont les chirurgiens ont le plus grand
C’est l ’ensemble de ces moyens empruntés tous a l’hygième
générale et aux ressources delà police administrative qui cons
tort, selon nous, de ne pas davantage se soucier.
titue ce qui l’on a nommé la prophylaxie publique de ces affec
L ’incision pratiquée à la partie opposée du prépuce, sur les
tions. C’est celte dernière qu'il nous reste hexminer.
côtés du frein, après avoir sectionné ce dernier, donne un résul
tat qui, pour être absolument opposé, n’en est pas moins dés
Jusqu’au commencement du X IX e siècle, on ne s’est pour
avantageux. Le prépuce, à la suite de cette opération, forme sur
ainsi dire occupé que d’une seule chose : séquestrer et soigner
la face dorsale du gland un bourrelet plissé, mobile, dont la sur
tant bien que mal les personnes infectées qui viennent s'offrir
face muqueuse, celle qui reste en contact avec le gland, conti
volontairement, sans jamais penser h rechercher les autres beau
nue a être le siège d’une active sécrétion de matière sébacée et
coup plus nombreuses qui cachaient, au contraire leur maladie.
conserve l’aspect tomenteux que nous avons vu être l ’une
Ce n’est que dans ce siècle-ci que l'on pense à exercer sur les
des conditions les plus favorables à la contagion.
maisons de tolérance, sur les filles publiques, une surveillance
Reste enfin une dernière opération : l’excision du bourrelet
active, continue, régulière, dans l ’intérêt de la santé publique,
muqueux prépucial exubérant, tout en respectant la partie cuta
et de le soumettre, pour atteindre ce but, a des visites sanitaires,
née du prépuce. Cette opération, quelque séduisante qu’elle
plus ou moins fréquentes, suivant les localités. Celte excellente
paraisse au premier abord, ne devrait jamais, si j ’en crois mon
mesure a déjà donné de fort louables résultats; mais, hâtons-
expérience personnelle, être pratiquée, car elle entraîne la plu
nous de le dire, elle est loin d’avoir produit tout le bien que l’on
part du temps après elle une série d'inconvénients, d’incommo
était en droit d’en attendre; cela tient h plusieurs raisons dont
dités dont on ne peut bien apprécier la gravité qu après en avoir
voici les principales : premièrement, ces visites sont faites h de
été témoin. En présence de pareils inconvients, on en est très
trop longs intervalles; secondement, les médecins qui en sont
souvent réduit h pratiquer la circoncision, opération qu’il eût
chargés n’ont pas toujours le temps de le faire convenablement ;
été beaucoup plus simple et plus sage, on en conviendra, d’exé
troisièmement, ils sont loin de posséder tous les connaissances
cuter dès le début.
spéciales nécessaires pour remplir avec une sûreté scientifique
Nous venons de terminer l ’élude de la prophylaxie person
absolue ces difficiles fonctions; quatrièmement, il est un certain
nelle, privée. L ’observation rigoureuse des divers moyens pré
nombre de ces affections que les femmes peuvent dissimuler
ventifs, des précautions hygiéniques qu’elle comporte, suffirait
avec une grande facilité; cinquièmement, l ’emploi du spéculum
%
�n’est pas obligatoire dans toutes les villes où se passent ces v i
sites; sixièmement, enfin les règlements qui régissent toutes
ces questions sont laissés, la plupart du temps, à l ’appréciation
des administrations locales, composées presque toujours de per
sonnes mariées, fort honorables et fort respectables assurément,
mais imbues quelquefois d’idées très arriérées et, dans tous les
Les séances de la Commission administrative ont toujours été
cas, presque toujours incompétentes.
Dr A. Bou lo n g n e ,
Médecin-M.ijor de I r«classe à l’Hôpital militaire de Marseille.
scrupuleusement tenues au commencement de chaque mois,
elles ont toutes été laborieuses et remplies d'intérêt, comme on
peut s’en rendre compte par l’aperçu suivant :
(La suite au prochain numéro.)
S
é a n c b
du
4
ja n v ie r
18G7.
—
P
r é s id e n c e
d e
M.
S
e u x
.
M. le Président soumet a l'approbation de la commission la
CHRONIQUE.
candidature de M. Kougier-Garagnon. Cet honorable confrère
est admis, sauf l’approbation de la prochaine assemblée géné
C o m ité llé illc a l d es B o u ch es-d u -R h ôn e.
rale. En parlant des admissions, M. Seux annonce que pendant
Le Comité médical des Bouches-du-Rhône, reconnu par décret
son court séjour à A ix, durant la session du Congrès scientifi
im périal comme établissement d ’ u tilité publique , décernera dans
que, il a eu occasion devoir un certain nombre de nos confrères
sa séance générale d’a v ril 1868 :
de cette ville, et qu’il a eu leur promesse d’adhésion à l’Asso
r
Une
Médaille d'or
de 200 francs à l ’a ute ur du m e ille u r mé
m oire sur la question suivante : « Poser les bases d ’ un système
quaranlenaire u nifo rm e pour toutes les nations. »
2° Une
Médaille d'or
à l ’auteur du
m e ille u r mémoire sur le
sujet suivant : « Éludes sur les eaux du canal de M arseille, consi
dérées au point de vue p h y s iq u e , c h im iq u e , m icrographique et
hygiénique. »
3“ Une
Médaille d'or
pour le travail le plus com plet sur la ques
ciation médicale.
Plusieurs cas d'exercice illégal de la médecine sont sig illé s; il
en sera rendu compte à propos de la visite faite par le bureau au
procureur impérial.
On nomme une commission spéciale chargée d'examiner le
travail deM . le Dr M ittre, sur l ’assistance médicale des indigents
dans les villes; celte commission est composée de MM. Mittre,
tion ci-après énoncée: « De la liberté de l’enseignement médical. »
Chapplain, Fabre et Verne; elle doit faire un rapport sur ce tra
Les mémoires, écrits en français, devront être parvenus au siège
vail, rapport qui sera lu dans la prochaine assemblée générale.
du Comité Médical, à Marseille, rue de l ’A rb re , 25, avant le 1" mars
Enlin M. le Président soumet au Conseil un mémoire qui lui
a été adressé par M. le Dr Blondon (de Besançon), relativement
1868, term e de rig u e u r.
Les auteurs q u i se feraient connaître seront exclus du concours.
Le Président,
Dr A. S ic a h d .
à une demande d’honoraires laite par ce confrère, qui, pendant
cinq ans, a donné ses soins a un malade atteint de paralysie de la
vessie. Le tribunal n’ayant alloué au ï> Blondon qu’une somme
Marseille. — Impr. A rnaud , C ayer et C ., rue Saiut-Ferréol, 57.
bien inférieure a celle qui lui était due, ce confrère soumet à la
11
!» ;
■ f lU M
�—
470 -
Société une série de questions qui devront lui servir dans l’appel
qu’il a interjeté ; la Commission répond a chacune de ces ques
tions et charge le Secrétaire de faire connaître sa réponse au
souscriptions pour permettre aux ouvriers d ’aller visiter l’Expo
sition de Paris, adresse une demande à l ’Association médicale,
afin qu’elle contribue à cette œuvre industrielle et populaire.
La Commission décide qu’une lettre sera écrite a M. Armand,
Or Blondon.
dans laquelle elle exprimera tous les regrets de ne pouvoir
S
é a n c e
d o
7 fé v r ie r .
—
P
r é s id e n c e
d e
M.
S
e o x
.
souscrire, parce que les réglements s’y opposent, a une pensée
MM. les Dr‘ Viguier et Castellan (d’Aix) demandent à faire
aussi généreuse, mais qu elle fera parvenir une circulaire à cha
partie de l ’Association générale; leur demande est accueillie,
cun des membres de l ’Association, les invitant à adresser leur
sauf révision de l’Association générale.
souscription individuelle au secrétariat de la Chambre de Com
M. le Secrétaire donne lecture d ’unè circulaire adressée aux
médecins du département, pour déterminer leur adhésion à la
merce.
Une accusation, anonyme, il est vrai, est portée contre un
membre de l’Association, lui reprochant certains actes portant
Société.
M. le Président exprime le vœu que le travail de M. M ittre
atteinte à son honorabilité,aux intérêts des médecins et des ma
sur l'assistance médicale dans les campagnes et dans les villes
lades. Bien qu’anonyme, les faits que renferment cette lettre,
soit bientôt soumis à la commission. M. M itirerépond que le
présentent un tel caractère de vérité que la majorité de la Com
sujet qui a été mis à l'ordre du jour par le Conseil générai de
mission décide que deux membres du Bureau feront une en
Paris est très complexe; il pense qu’il serait opportun de pré
quête à ce sujet et présenteront, s’ il y a lieu, des observations
senter un travail particulier à l’autorité locale; il faudrait si
purement officieuses au confrère désigné par cet écrit.
gnaler, par exemple, le chiffre minime des émoluments alloués
M. Mittre pense qu’un bon moyen pour amoindrir l’exercice
aux médecins qui occupent des emplois publics. Il demande, en
illégal de la médecine, serait de prier l’autorité préfectorale de
outre, que l’Association médicale, veillant aux intérêts de cha
faire réviser les listes des docteurs, officiers de saDté, sages-
cun de ses membres, présente elle-même une liste de présenta
femmes, pharmaciens et herboristes. Les conclusions de M. M it
tion, lorsque dans une administration publique une place sera
tre sont adoptées.
devenue vacante. Après quelques courtes observations, cette
S
dernière proposition de M. M ittre est adoptée.
é a n c e
d u
4
a v r il
. —
P
r é s id e n c e
d e
M.
S
e u x
.
M. Seux croit qu’il y aurait opportunité à faire un tarif au
M. Jaccoud , secrétaire du Comité médical international,
sujet des honoraires médicaux ; le Conseil adopte cette proposi
adresse une lettre à M. le Président de l ’Association locale pour
tion k l’ unanimité.
obtenir des souscriptions en faveur du Congrès médical interna
S
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d ü
7
m a r s
.
—
P
r é s id e n c e
d e
M.
S
e u x
.
tional, qui doit se tenir à Paris. Chaque membre de l ’Association
sera prévenu individuellement, afin qu’ il puisse faire parvenir
son adhésion à MM. Seux, Coste et Fabre, nommés commis
saires par la commission du Congrès.
A l ’occasion de la lettre anonyme reçue, dans la séance deruière,
les membres chargés de b enquête déclarent qu il a pu y avoir
�—
erreur île la part du médecin incriminé, mais que des observa
tions ont sulli pour terminer la cessation d’un état de choses,
qui pouvait être préjudiciable à l ’honorabilité d’un de nos confrères.
M. le Dr T ***, membre de l’Association médicale, adresse
une demande de secours pour son beau-père, ancien médecin,
aussi membre de notre Société, qui, infirme et avancé en âge,
ne peut plus suffire à ses besoins. Il est décidé qu’un premier
secours de 200 francs lui sera envoyé et qu’à la fin de l’année le
Conseil jugera s'il y a lieu de faire un nouvel envoi de 100 fr.
S
ea n ce
du
8
m a i
.
—
P
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S
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du
5
ju il l e t
.
175 —
—
P
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d e
M.
S
b u x
.
Diverses plaintes sont de nouveau adressées contre des per
sonnes exerçant illégalement la médecine. M. le procureur im
périal en sera informé.
Au sujet du rapport sur l ’assistance médicale dans les campa
gnes, M. M ittre fait observer que, dans notre département, les
médecins ne semblent pas avoir à faire de sérieuses récla
mations. M . Seux répond qu’un rapport doit être fait à ce sujet
au Conseil général de l ’OEuvre, qui vient d’adresser daus ce but
une lettre à tous les présidents; en conséquence, une circulaire
va être adressée à tous les médecins des Bouches-du-Rhône,
.
circulaire dans laquelle ils seront priés de répondre à différentes
Dans cette séance, M. le Président parle de l ’Assemblée géné
questions qui leur seront posées sur les besoins de leur localité,
rale de l’Association des médecins de France, qui a été tenue à
sur les ressources que les indigents peuvent trouver dans le ser
Paris, et à laquelle il a eu le bonheur d’assister. Le compte
vice médical, et sur la manière dont la dignité médicale est
rendu de cette assemblée annuelle ayant déjà été fait dans
sauvegardée.
P Union Médicale de Paris et dans YAnnuaire de VAssociation,
S
nous n’ v reviendrons pas ici.
é a n c e
du
9
a o û t
. —
P
r é s id e n c e
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M.
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.
M. Laurent, aujourd’hui médecin en chef de l’Asile public
S
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d u
7
ju in
. —
P
r é s id e n c e
d e
M.
S
e u x
.
M. Louis Camoin (maire de Cuges), est admis, sur sa de
mande, à faire partie de l’Association, sauf ratification de l’as
semblée générale.
M. Candolle appelle l ’attention sur l’exercice illégal de la
médecine, pratiqué par les Sœurs de St-Vincent-de-Paul. M. le
Président fait observer que, déjà, plusieurs faits étant venus à sa
connaissance, il s’ est plaint à l ’autorité ecclésiastique qui lui a
répondu que toutes les fois qu’une sœur aurait ordonné des
remèdes ou livré des médicaments sans l’intervention d’ un mé
decin, le mieux serait de la signaler à la supérieure, qui pren
drait les moyens de faire cesser cet abus.
La fille du médecin auquel un secours de 200 fr. a été en
voyé, adresse de vifs remercimenls à la Société.
d’ Aliénés de Tains (Meuse), ancien membre de la Société locale
des Bouches-du-Rhône, adresse une demande de secours en fa
veur delà veuve et des quatre enfants de M. C***, qui a quitté
depuis peu le département. Rien ne s’oppose à ce que le secours
demandé soit voté; M. C*** a été un des membres fondateurs
de l’Association médicale des Bouches-du-Rhône. En consé
quence, un secours de 400 fr. est voté.
M. le Président annonce l’envoi de la lettre-circulaire dont
i
nous avons parlé dans la dernière séance, à tous les médecins
des deuxième et troisième arrondissements.
S
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d u
5
s e p t e m b r e
. —
P
r é s id e n c e
d e
M.
S
e u x
.
Sur leur demande, MM. Gouzian, Tityé et Monnerot,de Mar
seille, sont admis, sauf ratification de l’Assemblée générale, à
faire partie de l’Association.
�M. Gasquet cite un fait d’exercice illégal de la médecine, de
la part d’un nommé Fraissinet, demeurant dans les vieux quar
tiers et traitant les tumeurs cancéreuses.
Ainsi qu’ il en était convenu, M. le Président a adressé une
lettre à M. le Préfet, pour le prier de vouloir bieD ordonner la
révision des listes des docteurs, médecins, pharmaciens, sagesfemmes et herboristes du département.
De nombreuses lettres ont été reçues en réponse à la circu
laire, adressée aux médecins des Bouches-du-Rhône sur l ’assis
lement. MM. Papillaud et Mousnier ont été les premiers à le
faire connaître et à le répandre dans la pharmacie, sous la forme
de granules, dits antimoniaux.
En cherchant une combinaison régulière à base d’arsenic et
d’antimoine, ils ne sont pas arrivés d’emblée à la découverte de
ce sel nouveau; ils ont tâtonné et, après divers essais, ils sont
parvenus à le préparer de trois manières différentes, qui, toutes,
donnent un produit de composition identique. J’extrais d’une
note même qu’ils ont bien voulu me communiquer, la descrip
tance médicale dans les campagnes: les idées émises dans ces
tion de ces trois procédés. L ’arséniate d’antimoine peut donc
lettres, serviront de base au rapport qui sera prochainement
s’obtenir:
adressé sur ce sujet au Conseil général.
10 Par décomposition d’un équivalent de cholrure d’antimoine
M. le Président informe la commission administrative, qu ac
par l'acide arséniqne pur, en solution dans le tiers de son poids
compagné de M, le Secrétaire, il a rendu visite à M. le Procu
d’eau distillée. On chauffe en agitant presque jusqu’à siccité;
reur impérial, auquel il a remis une note détaillée sur les faits
on lave à grande eau et à plusieurs reprises et par décantation à
d’exercice illégal de la médecine, dont il a déjà été fait mention.
la capsule.
Ces faits concernent soit des industriels qui débitent des remè
2° Par double décomposition entre le chlorure d’antimoine et
des spécifiques, et en retirent un salaire, soit des Sœurs de
l ’arséniate de soude. — On prend un équivalent de proto-chlo
Saint-Vincent-de-Paul, soit des personnes qui s’affublent de
rure d’antimoine tombé en deliquiumà l’air libre, et un peu plus
titres qu’elles ne possèdent pas. M. le Procureur impérial a
d’ un équivalent d'arséniate de soude finement pulvérisé. On
accueilli cette démarche avec la plus grande bienveillance et a
chauffe le chlorure dans une capsule jusqu’à 60 degrés environ.
promis de donner à ces affaires la suite qu’elles méritent.
On y projette tout à la fois l’arséniate de soude, on agite vive
Dr J. O l l iv e , Vice-Sccréîaire.
ment, la décomposition a lieu immédiatement. L ’eau de cristal
lisation de l’arséniate de soude et du chlorure d’antimoine est
DE L’ARSÉNIATE D’ANTIMOINE
DANS L’EMPHYSÈME VÉSICULAIRE DES POUMONS
\ o u v e llo É tu de su r la U«^dl(*a*lon a r s e n ic a le
P ar l e
D' Ch . ISNAHD ( d e M a r s e i l l e ).
I
— Arséniate d’antimoine; matière médicale : caractères physiques et
chimiques; préparation ; formule.— Propriétés physiologiques et thérapeutiques.
— Action dans l’emphysème vésiculaire des poumons — Faits cliniques.
Sommaire .
M
a t iè r e
m é d ic a l e
.
—
L ’arséniate d’antimoine est introduit
dans la chimie et la thérapeutique, depuis quelques années seu
suffisante pour que la double décomposition de ces deux sels,
ainsi que la production des sels nouveaux, puissent avoir lieu ;
et cette proportion d ’eau n’ est pas assez considérable pour qu’il
se forme de l ’oxy-chlorure d’antim oine, produit ordinaire de
faction de l’eau sur le chlorure antimonial. On chauffe en agitant
constamment presque jusqu’à siccité. Cette manipulation a
pour hui de chasser l ’acide hydrochlorique qui se forme. On
lave ensuite à grande eau et à plusieurs reprises, par décanta
tion à la capsule.
3° Par double décomposition, dans l’ordre inverse.
—
On
�—
—
176 —
prend un peu plus d’un équivalent d'arséniale de soude, on le
dissout à chaud dans une proportion d eau telle que la solution
en soit en consistance presque sirupeuse ; on y jette un équi
valent de chlorure d’antimoine concret, on agite vivement ; la
décomposition est rapide et même tumultueuse ; on continue
de chauffer presque jusqu’à siccité ; on lave ensuite à grande
eau à plusieurs reprises et par décantation.
477 —
Ce sel se présente sous la forme d’une poudre blanche, amor
phe, insipide et insoluble dans l'eau et les acides faibles,
L ’acide azotique n’ a sur lui qu’une très faible action à froid,
et le décompose entièrement par l’ébullition.
L ’acide chlorhydrique le dissout avec la plus grande énergie,
même à froid, lorsqu’il est concentré.
Quand on le chauffe avec précaution vers -j- 150° ou 200*. il
M. Dorvault indique ce dernier procédé (1), et il recommande
devient anhydre sans changer de composition ; mais si on élève
expressément, dans l’opération, de faire réagir le chlorure d’an
la température au rouge, l’oxyde d’antimoine en excès com
timoine sur l’arséuiate de soude.
mence à d istiller (i) .
Dans l’ Officine, publiée peu de temps auparavant (2), le même
On le prépare en versant la solution concentrée d’un équiva
chimiste donnait pour base aux granules antimoniaux du doc
lent de proto-chlorure d'antimoine, dans une autre solution éga
teur Papillaud, l iodure d’antimoine, ou plutôt l’oxyiodureou
lement concentrée d’arséniate de soude.
iodhydrate basique d’antimoine, poudre jaune orange; il y a là
L ’arséniate qui, après cette opération, devrait être neutre, ne
évidemment une erreur que l ’auteur, du reste, n’a pas tardé de
devient basique que par des lavages prolongés, en perdant de
reconnaître lui-même (5).
l ’acide arsénique.
J’ai eu à ma disposition un arséniate d’antimoine préparé par
Il est essentiel d'employer un léger excès d ’arséniate de soude
un pharmacien de Marseille. Il avait été obtenu en traitant
et de verser le chlorure d’antimoine dans l ’arséniate alcalin, |en
une solution de tartrate aniim onico-potassique par l'acide arsé-
agitant constamment, pour éviter la formation de l’oxy-chlo-
nique. Dans cette opération, l’arséniate se précipite au fond
rure d'antimoine, qui deviendrait une impureté pour l’arséniate.
du vase, sous forme d’une poudre blanche, insoluble, qu’on
La formule de l ’arséniate d’antimoine est: (Sb1
2 O3)4, As 0 5- f
lave et fait sécher. Ce produit a les caractères physiques de
5 p. J00 d’eau d’interposition.
l'arséniate sorti de la pharmacie Mousnier, et dont j ’ai eu un
J’ai décrit avec détails les caractères et la préparation de
échantillon entre les mains. J’ignore s’il a une composition chi
l’arséniate d’antimoine. Ce sel est nouveau; il est encore peu
mique bien définie, mais je me suis assuré que ses propriétés
connu, ou bien même il est contesté dans son existence chim i
physiologiques et thérapeutiques, sont celles des autres prépa
que ; j ’ai voulu fixer l ’opinion sur sa composition exacte ; mon
rations arsenicales.
travail aura, j ’espère, quelque utilité.
M. Chapsal a étudié avec beaucoup de soin l ’arséniate d’anti
moine (4). Voici les caractères généraux qu’il lui assigne dans
son travail :
P
r o p r ié t é s
p h y s io l o g iq u e s
e t
t h é r a p b ü t iq ü e s
.
—
Depuis
plus de trois ans, j ’étudie avec attention l’arséniate d’antimoine
dans le but de connaître ses effets généraux et de vérifier les ré
sultats obtenus par le Dr Papillaud. Voici d’après mes recher-
(1)
(2)
(3)
(4)
mai 1867, p. 160.
U n io n p h a r m a c e u tiq u e ,
O fficine
de 1867, p. 558.
U n io n p h a r m a c e u tiq u e ,
U n io n p h a r m a c e u tu iu e ,
juin 1867, page 192.
août 1867, p. 241.
*
(t) Traité par un léger excès de potasse caustique en solution, et à chaud, il est
décomposé entièrement en protoxyde d’antimoine et en arséniate de potasse, présenlanl tous les caractères des arséniates. ( N o te d e M M . P a p i l l a u d e t M o u s n i e r . )
�179 —
ches quelles sont ses propriétés physiologiques et thérapeuti
ques :
du sel arsenical ; la conjonctive a été la dernière à se dissiper.
L ’arséniate d ’antimoine est toléré à doses plus élevées que ne
A la dose quotidienne de un a dix milligrammes, et surtout a
*e sont généralement les composés solubles, tels que l’acide
une dose inférieure à cinq milligrammes, ce sel est bien sup
arsénieux, l’arséniate de soude et l’arséniate de potasse. Fré
porté; il peut être administré pendant des mois entiers et a peu
quemment, ces derniers ne sont plus supportés à la dose de
près indéfiniment, sans réveiller ni accident , ni phénomène d ’in
deux et surtout de trois ou quatre centigrammes ; la tolérance
tolérance. A cette dose, il excite l’appétit, facilite les digestions,
pour des quantités plus fortes est rare ; elle n’a été obtenue
détruit la constipation, rend plus actives l'hématose et la circu
que très exceptionnellement. Des essais tentés sur m oi, et
lation capillaire, augmente les forces et le bien-être général.
publiés il y a cinq ans (1), m’ont prouvé que cinq centigrammes
On peut l'employer à doses plus élevées encore, sans déter
d’acide arsénieux, en solution aqueuse très-étendue, consti
miner d’effets toxiques. Pour connaître, au moins approximati
tuent la dose maximum que l’on puisse supporter sans incon
vement, les limites de sa tolérance, je l ai expérimenté sur moi-
vénient pendant l ’état de santé et en dehors de symptômes
même, en pleine santé et hors de toute influence pathologique.
pathologiques intenses.
J’ai fait usage de l ’arséniateprovenant delà pharmacie Mousnier.
Sous le rapport de la tolérance, l’arséniate d’antimoine a
J’ai eu le soin de débuter par des doses moyennes et de les
beaucoup d ’analogie avec une autre préparation également inso
augmenter rapidement, afin d’éviter l ’accoutumance produite
luble, l ’arséniate de fer qui peut être prescrit indéfiniment,
par les quantités minimes, et conséquemment de mieux juger.
sans danger, a la dose de plusieurs centigrammes. Le docteur
Ainsi, j'a i pris, le premier jour, un centigramme d’arséniate
Vjgnard aîné (deNantes), va même jusqu'à ordonner impunément
d’antimoine, en une fois; le second, deux centigrammes en deux
vingt centigrammes tous les jo u rs , pendant longtemps (2).
lois; le troisième, trois centigrammes en trois fois; le quatrième,
Rarement, des doses aussi élevées ont produit, entre ses mains,
six centigrammes ; le cinquième, encore six centigrammes ; le
des nausées, de la diarrhée, de l'enflure au visage, en un mot,
sixième, neuf centigrammes; le septième, dix centigrammes,
ces légers phénomènes d’ intolérance que toujours la cessation
toujours en trois fois et immédiatement après les repas. Jusqu’au
du traitement fait promptement disparaître.
sixième jour, je n’ai a peu près rien éprouvé ; mais à la dose de
Comme médicament, j ’ai employé l ’arséniale d’antimoine
neuf centigrammes, j'ai commencé a ressentir les effets de l ’in
dans une série d’états pathologiques très-différents, dans la
toxication arsenicale qui, devenue plus accentuée h dix centi
chlorose, l'adynamie, l ’anémie, l ’amaigrissement, les cachexies,
grammes, s’est traduite par les phénomènes suivants: tête
certaines névroses, diverses maladies chroniques du cœur, le
lourde et congestionnée, céphalalgie frontale, serrement des
catarrhe bronchiqueancien, la phthisie, l ’emphysème vésiculaire
tempes, douleurs orbitaires, conjonctivite très prononcée,
des poumons, etc. En somme, j ’ ai retrouvé, dans ce composé
œdème de la face ; malaise général, sentiment de fatigue ; dou
leurs vagues sur le trajet des nerfs sciatiques ; perle d’appétit ;
nausées, sans vomissements, quoique l’arséniate fût constam
ment avalé après les repas ; diarrhée légère,sans coliques ; pouls
a 90. Ces accidents ont rapidement disparu, après l’interruption
(1) Voir U n io n m é d ic a le d e P a r i s , juillet 1862, p. 137, De l’acide arsénieux
dans rles Fièvres pernicieuses.
(2) Sur l’emploi de l’arséniate de fer à hautes doses contre les affections dartreuscs et particuliérement contre l'eczéma; in J o u r n a l de M éd e cin e d e l'O u e st ,
tome I, 31 janvier 1867, p. 27
�—
— 180 —
181
manière aussi brillante, M. Fabre s’est montré digne de l’im
nouveau , les propriétés ordinaires de l'arsenic. Je le regarde
comme une bonne préparation arsenicale, à la fois sûre, bien
tolérée, d’une commode administration , ayant de plus l ’avan
tage, sous la dénomination de granules antimoniaux , de laisser
ignorer son origine arsenicale et d’être conséquemment accepté
sans hésitation par certains malades pusillanimes. A ce point de
vue, le Dr Papillaud a réalisé, sous une autre forme, la pensée
utile de Boudin et de Cahen qui avaient appelé, l’ un, Solution
minérale, la solution aqueuse d’acide arsénieux ; l ’autre Granules
de Dioscoride, les granules composés avec le même acide.
Par f association de l’arsenic et de l’antimoine, ce sel e s t-il,
comme l’affirme M. Papillaud, deux fois plus actif que les autres
préparations arsenicales, sans être plus toxique? Il y a là une
nuance thérapeutique très délicate ; j ’avoue ne pas l avoir saisie ;
je la crois d une appréciation difficile en songeant à la puissance
des effets que manifestent fréquemment l’acide arsénieux et
l’arséniate de soude, par exemple, aux doses minimes de un,
portante chaire de clinique à laquelle il est attaché, depuis
quelques mois a peine, en qualité de suppléant, chaire occupée
déjà à plusieurs reprises par d’éminents professeurs.
Nous pouvons le dire tout d’abord, les leçons sur la chlorose,
ne seraient point désavouées par la capitale; elles resteront
parmi les meilleures productions intellectuelles de l'école de
Marseille.
Un excellent esprit de méthode a dirigé notre confrère dans
ses recherches. Il y a dans la maladie des éléments qui la cons
tituent essentiellement et d’autres dont elle n’a que faire. Re
connaître l’affection, prévoir son issue, régler son traitement,
voilà des problèmes de premier ordre pour le pratic:en, mais
qui, à coup sur, sont tout à fait en dehors de la maladie consi
dérée dans son essence. De même, trouver le lien qui va des
causes aux symptômes, en passant par les lésions ; question très
intéressante pour le savant, mais pour le savant seul. Dans la
deux milligrammes et moins encore.
(La suite au prochain numéro.)
maladie il n’y a, à proprement parler, qu'une cause productrice
d’un effet {la lésion), ce dernier devenant cause à son tour, et
produisant certains effets secondaires [symptômes), qui se pré
sentent dans tel ou tel ordre [marche). Le Dr Fabre qui appelle
LA C H L O R O S E
Leçons professées à l’Hôtel-Dieu do Marseille par le DrAugustin FABRE,
professeur suppléant à l’École de Médecine,
et recueillies par M. SUZINI, interne des Hôpitaux de Marseille.
Le jeune professeur à qui nous devons cette intéressante
la doctrine organicienne, la théorie des localisateurs quand
même, n’attribue point, il est vrai, à la lésion, commecause pro
ductrice des symptômes, une importance très grande, mais il
établit que les quatre éléments sus-désignés (causes, lésions,
symptômes , marche), constituent à eux seuls la maladie; au
étude, peut être rangé parmi les hommes dont Corneille disait,
praticien ou au savant de chercher d’abord à les connaître et
qu’ils ne veulent pour leurs coups d’ essai rien moins que des
d’ user ensuite de ces données primordiales pour trouver la so
coups de maître. Coup de maître en effet, —
nous le disons
lution des problèmes qui l’intéressent plus particulièrement. Ces
hautement, — que ces leçons consciencieuses, riches de détails,
problèmes, nous l’avons déjà dit, sont, pour le praticien, le
pleines d’aperçus nouveaux et ingénieux, dans lesquelles l’au
teur a trouvé le secret de rajeunir complètement une maladie
diagnostic , le pronostic et le traitement, pour le savant la phy
siologie pathologique.
connue dès Hippocrate! En débutant dans l’enseignement d’une
Cette importante distinction entre ce qui est le fait de la ma
�—
183
-
ladie et ce qui en constitue, pour ainsi dire, les appendices est
mais il n en est point ainsi ; tous les doutes à ce sujet s’évanouis
établie avec beaucoup de soin par l ’auteur. Le 1> Fabre la con
sent devant la remarquable description, laite par M. Fabre, des
sidère comme devant servir de base à l ’élude de toute affection ;
formes diverses de la chlorose. Celte maladie revêt parfois les
quant à nous, elle nous paraît très utile, car elle empêche l’esprit
caractères d’une véritable cachexie, c’est-à-dire d’un état des
de marcher en aveugle dans les sentiers de la routine et lui per
plus sérieux, et cette forme toujours grave peut présenter du
met de voir indistinctement autour de lui.
côté du cœur, des poumons, de l’utérus, du système nerveux,
Toutefois, lorsqu’on cherche pour les autres et non pour soi-
les plus dangereux symptômes. En admettant même que la
même il est bon de jeter, dès le principe, un coup d'œil d ’en
chlorose revête la forme commune ou la forme légère , elle n’en
semble sur l'espace à parcourir. C’est ce que fait le Dr Fabre.
détermine pas moins de nombreuses incommodités, et il serait
Avant de commencer, en suivant la méthode précédente, l’étude
fort à désirer que les mères comprissent à la lin qu elles pour
de la chlorose, le jeune professeur se demande, dans sa première
raient très souvent, par un système d'éducation mieux entendu,
leçon, si la chlorose et l ’anémie sont deux maladies de même
les épargner à leurs filles.
nature. Se basant sur certains détails, fournis par les causes, les
Quant à ces dernières, elles se plieraient sans peine à toutes
considéré
les exigences d’une bonne hygiène physique et morale, si elles
que, dans la
savaient combien de maux entraîne après elle la chlorose. Nous
chlorose, la diminution porte exclusivement sur les globules
ne croyons pas qu'il soit possible de dessiner un type de cette
symptômes, le traitement, s’appuyant sur ce fait —
comme très important par l'école allemande —
rouges, dans I anémie sur tous les éléments solides du sang,
maladie plus complet, plus accentué, plus réel que celui qu’a
M. Fabre n’ hésite pas à répondre par la négative; pour lui la
tracé notre confrère dans le chapitre des symptômes. Aucun dé
chlorose n’est pas l'anémie; la première est toujours une ma
tail n'a été omis et tous, même les plus infimes, tiennent leur
ladie primitive, essentielle: la seconde, une lésion secondaire se
place dans ce tableau frappant de vérité; certains signes, entre
rattachant à des états morbides très différents.
autres les troubles de l ’innervation et les bruits vasculaires
Après cette étude d ’introduction que complètent des recher
ches historiques fort intéressantes, Fauteur aborde immédiate
ment l’étude des causes qui produisent la chlorose.
Nous désirerions qu’ un grand nombre de mères pussent lire
sont décrits avec un soin tout particulier. Nous reviendrons plus
loin sur ces derniers symptômes.
La partie la plus neuve et la plus longuement détaillée de
l ’ouvrage du Dr Fabre est la cinquième leçon consacrée à la
cet important chapitre de l'étiologie. Elles y verraient dénoncé
physiologie pathologique, c’est-à-dire à la relation qui existe
avec beaucoup de vérité et de sens, comme cause protectrice,
entre les causes, les symptômes et les lésions. L ’histoire de la
des pâles couleurs, le système d’éducation employé à l’égard de
maladie était autrefois très mal connue : on observait les causes,
la plupart des jeunes filles, système faux en tout point, qui
les lésions, les symptômes, les effets thérapeutiques ; on obser
aboutit à faire de véritables poupées au lieu de mères de famille,
vait, on ne faisait rien de plus; on ne comprenait pas encore,
qui arrête dans leur développement les forces physiques, qui
que nous autres médecins, comme le dit très judicieusement
atrophie l’intelligence,— souvent même le cœur — au profit de
notre confrère, « s’il nous faut avant tout, observer avec soin et
l’imagination et de la susceptibilité nerveuse.
« sans subir l ’influence des idées préconçues, nous ne devons
Si encore la chlorose était toujours une maladie bénigne!
« pas pour cela, renoncer à nous expliquer les phénomènes
�184 —
« dont nous avons été témoins. » Pourquoi et comment telle
cause amène-t-elle telle lésoin. pourquoi telle lésoin se traduit-
ASSOCIATION MÉDICALE DES BOUCflES-OÜ-RHONE
elle par tel symptôme? Ces questious n’ étaient seulement pas
posées.
ANNEXÉE A L :ASSOCIATION GÉNÉRALE DES MÉDECINS DE FRANCE.
Il faut le dire à la décharge des anciens, privésdu microscope,
peu versés dans l ’élude de la chimie pathologique, ils ne pou
vaient songer à résoudre de pareils problèmes. Aujourd'hui
A s s e m b lé e
gén érale
ten u e
à
M a rseille,
le
3
D écem bre
1867 ,
sous la p r é s i d e n c e de M . le D r S E U X , p r é s i d e n t .
nous pouvons faire et nous faisons mieux qu’eux ; nous obser
vons d’abord, puis nous nous efforçons de réunir dans un tra
vail d'ensemble, les divers résultats fournis par la méthode Ba
La séance est ouverte il trois heures et demie. Elle a lieu dans
conienne. Suivons notre confrère dans cette voie et examinons
le local de la Société impériale de Médecine, que M. Sicard,
avec lui la physiologie pathologique de la chlorose.
président de la savante compagnie, a bien voulu mettre à la dis
Trois causes principales produisent cette maladie ; le séjour
position de l ’Association.
dans les lieux bas, révolution du flux menstruel, les excitations
On remarque parmi les personnes présentes, M. le Dr Sicard,
qui portent sur le système nerveux. Comment, se demande le
président de la Société impériale de Médecine et du Comité mé
Dr Fabre, chacune de ces sauses peut-elle amener la lésion fon
dical des Bouches-du-Rhône; M. Verne, avocat, l’un des mem
damentale de la chlorose, la diminution des globules rouges?
bres du conseil judiciaire de l’ Association.
Pour la première cause l ’explication est ingénieuse et des
M. le Secrétaire donne lecture du procès-verbal de la der
plus logiques; elle repose toute entière sur la différence d’ état
nière Assemblée générale. Ce procès-verbal est adopté sans
chimique qui existe entre l’oxygène et l’acide carbonique con
observations.
tenus dans le sang. L ’oxygène se trouve dans les globules
rouges et à l'état de combinaison, l’acide Carbonique dans le
sérum, mais simplement à l'état de dissolution.
Divers membres se font excuser de ne pouvoir assister à la
séance.
M. le Président fait part à l ’Assemblée de la maladie du
Il résulte de ce fait que la pression atmosphérique exerce une
Dr Fraissines, membre de la Société. Les paroles que prononce
action très grande sur l’ exhalation de l’ acide carbonique; elle
M. Seux à l ’adresse de ce collègue, sont l ’expression des senti
favorise le départ de ce gaz lorsqu'elle est légère, elle le rend
ments les plus sympathiques de tout le corps médical.
plus difficile,au contraire, lorsqu’elle est forte. En conséquence,
M. le President, prenant ensuite la parole, prononce une
dans les lieux bas, remarquables par l’intensité de poids que
allocution dans laquelle, après avoir payé un large tribut
présente l’atmosphère, l’acide carbonique ne sort point libre
d éloges et de regrets à la mémoire du regrettable M. Rayer,
ment de l’organisme ;
lieux élevés il
décédé le 10 septembre dernier, il signale la délibération prise
s’échappe beaucoup plus facilement des vaisseaux sanguins, fa
tandis que dans les
par le Conseil général de demander à M. le Ministre de l’Inté
vorisé par sa fuite par le peu de pression exercée sur les parois
rieur qu’une liste de candidats a la présidence lui soit présentée
de Ces derniers.
et que cette liste soit le résultat d’un vole delà première Assem
(La suite au prochain numéro j
Marseille. — Typ. Arnaud, Cayer et Comp-, rue Saint-Perréol. 57.
blée générale de l ’Association. Cette détermination, ajoute M. le
12
�j
—
186
-
187 —
—
Président, ne pont manquer de donner an vénérable M. Rayer,
total général de l’œuvre est de 471,535 francs ainsi décomposé :
un successeur digne de lui et de notre belle oeuvre; elle trou
vera de chaleureuses approbations dans toutes les sociétés lo
cales. La demande du Conseil général
a été favorablement
accueillie par Soi: Excellence M. le Ministre, qui a pris la déci
Caisse générale............................. , F.
52,487
Caisse des pensions viagères.. .
94,056
Société centrale............................
39,345
Sociétés locales.............................
285,645
Total. . .
sion suivante : « Il sera sursis au remplacement du président de
l ’Association générale des médecins de France jusqu'il la pro
chaine réunion de l'Assemblée générale;
cette
Assemblée
pourra appeler l’attention du Ministre sur les candidats qui lui
paraîtraient les plus aptes à occuper la présidence. »
M. le Président, parlant ensuite de la mort prématurée du
Dr Bally, de Marseille, rappelle ce que la Société locale des Bou
ches-du-Rhône a fait pour cet esiirhable collègue ; « compacte
et serrée, elle l ’a accompagné au champ du repos où les derniers
adieux ont été l ’expression de nos sincères regrets, »
Trois sociétaires ont cru devoir, sans motifs apparents, re
noncer aux bienfaits de l’ Association; mais en revanche, neuf
nouveaux membres sont venus grossir nos rangs, ce sont;
MM. Rougier, Viguier, Gouzian, Isaac, Monnereau, Tilyé, Deblieu, tous les sept de Marseille; M. Çastellan, d’ A ix ,e tM . Ca
moin, de Cuges.
Pour prouver l’ heureuse influence de l’Association sur cha
cun de ses membres en particulier et sur tous en général, M. le
Président raconte de quelle manière le Conseil d administration
a défendu, après une enquête minutieuse, l ’honorabilité d’un so
ciétaire accusé d’ un acte qui entache l’honneur d’ un homme.
Que l'on ne vienne pas nous demander, après une telle conduite,
ce que fait l’Association ? Rendre la justice n’est-ce pas un beau
rôle? Avec notre Association, plus n’est besoin des conseils de
diséipline si souvent réclamés.
Cette allocution renferme un aperçu de la dernière Assemblée
générale de Paris, tenue le 28 avril dernier. 27,532 f r . , ont été
distribués à des sociétaires malheureux, a des veuves ou à des
enfants de sociétaires, pendant l’exercice de 1866-1867. Le
. F. 471,533
Le nombre des sociétaires s’élève au chiffre de 6300 environ.
M. le Président rappelle ensuite les vœux formulés par l’Association auprès de M. le Ministre de la Justice, au sujet de la
répression de l’exercice illégal de la médecine. Les délégués de
l’Association auraientemporté l'assurance que ces études allaient
être reprises pour donner définitivement à notre profession des
garanties plus solides et plus efficaces. Toutefois, M. le Président
pense que la jurisprudence actuelle donne plus ample satis
faction que ne nous donnerait la révision de la loi. Il cite à
l’appui de son opinion, qui a été, du reste, soutenue déjà par
M. Amédée Latour, le fait d’un sieur S ..., qui a été récemment
condamné par le Tribunal correctionnel de Montargis pour d i
verses contraventions d’exercice illégal de la médecine à 4,800
fr. d ’amende et 486 jours de prison. Après une pareille condam
nation, il y a lieu de se demander si une nouvelle loi pourrait
appliquer une répression aussi sévère. Au surplus, il ne faut
pas se faire illusion ; rien n’est plus difficile que la poursuite
réellement efficace de l ’exercice illégal de la médecine, attendu
que le charlatanisme a des succès, parce que les différents mas
ques dont il se recouvre ont les sympathies du public. Ce der
nier, s’est toujours plu, se plait et se plaira dans le merveilleux
et l ’excentrique.
A cette question de l’exercice illégal se rattache d’une ma
nière
intime
celle de
l ’assistance
médicale des indigents.
M. le Dr Nivet, professeur à l ’Ecole de médecine de ClermontFerrand, appela il y a trois ans, l’attention de l’Assemblée géné
rale de Paris sur ce sujet. L’ Assemblée, comprenant toute l’im -
�-
188 -
— 189 -
portance de cette question, décida que cette dernière serait mise à
lecture du compte-rendu des actes et des travaux de la Société,
l’ordre du jour dans toutes les Sociétés locales. Dans l’Assem
pendant l'année 1866-67.
blée générale du mois d’avril un excellent rapporta été lu à ce
Après avoir prouvé que l’esprit de notre œuvre est une des
sujet par M. le D' Hameau, délégué de la Société de la Gironde.
tendances les plus libérales de notre époque, et qu’il réclame à
Mais les renseignements envoyés par les Sociétés locales ayant
bon droit sa part dans le progrès moral et matériel, M. Villard
été insuffisants, la discussion a dû être renvoyée a la prochaine
lit une courte notice nécrologique sur le Dr Jean-Gabriel Bally,
assemblée. M. le Président, après avoir pris les renseignements
membre de la Société locale des Bouches-du-Rhône, décédé le
nécessaires auprès des honorables sociétaires qui exercent la
5 janvier dernier. « Médecin distingué, praticien spécialiste,
médecine dans les campagnes de nos trois arrondissements, et
homme de cœur, Bally avait pris une place bien méritée dans
après en avoir conféré avec la Commission administrative, s’est
notre corps médical et dans notre cité. M. Villard termine cette
fait un devoir d’adresser un rapport au Conseil général. Il rap
notice en disant: Notre regretté collègue savait se faire apprécier
pelle ensuite que l ’année dernière, a pareille époque, M. le D r
Mutre lut un rapport sur l'assistance médicale dans les grandes
et aimer de tous ceux qui l’approchaient; et j ’ai hâte de le dire,
Messieurs, il ne comptait parmi nous que des amis ou des con
villes. Ce travail, renvoyé à la Commission administrative sera
frères qui avaient pour lui la plus grande estime et la plus vive
soumis dans quelques instants à 1 examen et a l’approbation de
sympathie. »
l’ Assemblée.
Parlant ensuite de la répression du charlatanisme,- M. le se
Une importante délibération a été prise par la dernière Assem
crétaire fait part à l ’Assemblée des démarches qui ont été faites
blée générale de Paris en faveur des sociétés locales, sur la pro
auprès de l’autorité judiciaire. M. le Procureur Impérial, pre
position de M. le Dr Brun, trésorier de l ’Association générale :
nant bonne note des faits qui lui ont été signalés, a promis de
« Le Conseil général est autorisé à délibérer et à statuer immé
ne pas laisser nos plaintes dans l’oubli. En effet, les sœurs de
diatement sur les demandes de secours qui lui sont adressées
par les sociétés locales pour venir en aide sans retard aux dites
sociétés, si le Conseil en reconnaît l’urgence. »
Saint-Vincent-de-Paul ont pris l’engagement formel vis-à-vis
de l'autorité judiciaire, de veiller dorénavant à l ’observation des
lois sur l’exercice illégal de la médecine, et qu’à l’avenir un mé
M. le Président termine son allocution en faisant appel au
decin assisterait à la visite des malades au dispensaire. Grâces
concours de tous les confrères du département. Que chacun de
aux démarches et au dévouement de M. Verne, l’ un des mem
nous, d it-il, se pénètre bien de cette idée que l’isolement a été
bres les plus zélés de notre Conseil judiciaire, d’autres charla
jusqu’à aujourd’hui la plaie du corps médical. Qui veut la fin
tans, qui ont aujourd’hui leur dossier entre les mains de M. le
veut les moyens, l’ Association seule peut les donner.
Après cette allocution,M. le Président met aux voix l ’admis
Procureur Impérial, seront poursuivis ou surveillés avec le plus
grand soin. Nous avons la conviction , ajoute M. Villard, que
sion des nouveaux membres qui ont demandé à faire partie de
M. le Procureur Impérial nous aidera de tout son pouvoir dans
notre Sociét é locale. MM. Rougier, Viguier, Gouzian, Isaac,
la poursuite du charlatanisme qui, suivant ses expressions, est
Monnereau, Tityé, Deblieu, Castellan et Camoin sont admis à
un véritable danger public.
l’unanimité.
La parole est ensuite donnée à M. Villard, secrétaire, pour la
M. le Secrétaire parle ensuite de la maladie du Dr Fraissines.
« S’il est, dit-il, un homme frappé à la force de l’âge, écrasé sous
�—
—
191 —
190 D
le poids du mal terrible et impitoyable, qui ait excité de profondes
é p e n s e s
:
sympathies, c’est bien assurément notre collègue dont nous re
Une année de gages h la concierge.................... F.
grettons tous l'absence en ce moment. Si vous voulez bien me
Frais d’ adm inistration.......................................
67 70
le permettre, Messieurs, je me rendrai auprès de lui I interprète
Frais de recouvrement.......................................
35
»
de vos sentiments et de vos regrets, et je lui dirai que vous for
Frais d’impression des comptes-rendus de l’As
mez les vœux les plus sincères pour sa prompte et complète
semblée générale, circulaires, lettres de convo
guérison. »
cations, etc...............................................................
100
»
150
»
Après avoir jeté un rapide coup-d’œil sur la situation du
Funérailles du Dr Bally.....................................
journal Y Union médicale de la Provence, M. Villard fait part à
Secours à un sociétaire octogénaire.................
l ’Assemblée de deux demandes de secours qui ont été adressées
Secours à la veuveet aux enfants d’un sociétaire.
400
Redevance à l’Association générale pour 1866.
347 70
Total...............
F. 1,338 80
au Conseil dans ces derniers temps. Après mûre délibération, le
38 40
200
»
»
Conseil a voté: 1° un secours de 200 fr. h M. G***, membre de
notre Société, vieillard octogénaire, courbé sous le poids des
fatigues d’une longue carrière; 2° un secours de 400 fr. h la
veuve et aux enfants de M. X ***, qui avait été un des membres
les plus zélés de notre Association. Tout porte h croire que cette
dernière infortune sera également soulagée par le Conseil gé
néral de Paris auquel M. le Président a adressé une demande
de secours.
Passant enfin à la situation financière de notre Société, M. le
Secrétaire fait connaître le rapport de M. le Trésorier pour
l’année 1866-67, du 30 septembre de la première à la même
Notre avoir s’élève donc a la somme de 5,013 fr. 62 cent.,
dont 3,000 fr. de fonds de réserve; 523 fr. donnés par M. le
Président et destinés au fondsde retraite; 1,490 fr., somme
disponible. Ces fonds sont placés à la Caisse d’épargne.
La Commission administrative propose à l ’Assemblée de porter
à 3,500 fr. le fonds de réserve ; et de plus, de décider que les
intérêts de celle somme joints a ceux des 525 fr. ci-dessus men
tionnés, soient destinés h servir une pension de retraite viagère,
époque de la seconde.
pension qui devra évidemment augmenter chaque année, soit
Avoir le 30 septembre 1866.............................. F. 3,790 75
par l’augmentation du fonds de réserve, soit par les dons qui
pourront être faits h la Société.
M. Villard termine son compte-rendu en remerciant M. le
R
e c e t t e s
:
président Seux du don de 525 fr. qu’il a fait l ’année dernière à
Cotisations et droits d’admission...................... F. 1,896
»
Don de M. le Président pour le fondsde retraite.
525
»
Intérêts des sommes placées..............................
142 67
pareille époque, pour le fonds de retraite de notre Société.
Après la lecture de ce compte-rendu, l’ Assemblée vote la
proposition ci-dessus indiquée.
La parole est ensuite donnée h M. Mittre pour la lecture de
Total
F. 6,354 42
son rapport sur l'assistance médicale des indigents dans la ville
de Marseille.
�—
Dans ce nouveau travail, complément de celui qui fut lu
l ’année dernière en Assemblée générale, M. Mittre rappelle que,
193 —
Arriver à la nomination de titulaire par liste d’ancienneté, et
conserver ce service pendant six années.
dans plusieurs départements, les Sociétés locales ont demandé
Après ce laps de temps, abandonner entièrement les fonctions
des réformes concernant les sociétés de secours mutuels et les
de médecin traitant à domicile pour faire partie de l’Adminis
bureaux de bienfaisance, et que déjà l'autorité départementale
tration. Être de droit membre du ju ry d’ examen, et chargé spé
a introduit d’importantes améliorations dans ces divers ser
cialement de l ’inspection des logements des indigents, à l’effet
vices, notamment dans le Pas-de-Calais. « Inutile de vous re-
de communiquer directement au conseil d’ hygiène toutes les
« tracer, dit M. Mittre, la position fâcheuse des médecins des
mesures propres à la conservation de la santé publique.
t bureaux de bienfaisance ; inutile de vous dire que la routine
« et l ’inditTérence administratives en ont fait une fonction sans
a honneur, sans dignité pour les médecins; sans profit, sans
cr utilité pour les malades......Aujourd’hui les associations ont
Nécessite absolue d’un cabinet de consultations au bureau
central de la Grande-Miséricorde.
Nécessité encore plus grande d’appeler les médecins consul
tants dans les cas graves.
« réveillé l ’esprit public, et le droit et la justice semblent de-
Quant aux émoluments, M. M ittre pense que les suppléants
« voir sortir de leur demeure sépulcrale pour en appeler à l’éga-
devraient recevoir au minimum 4-00 fr. et les titulaires 800 fr.
« lilé et à la raison. »
Les médecins honoraires seraient appelés comme médecins con
Parlant alors de la position qui est faite aux médecins des bu
sultants, juges dans les concours, comme médecins hygiénistes,
reaux de bienfaisance, M. le rapporteur dit que les honoraires
et surtout comme ayant droit à figurer en première ligne sur la
alloués aux titulaires sont de 500 fr. par an, taudis qne les
liste des récompenses honorifiques.
adjoints travaillent gratuitement ; et il ajoute : « que le pharma-
M. le rapporteur, parlant ensuite du service médical dans les
« cien perçoit i,5 0 0 fr. pour une heure de surveillance. Il en est
« de même, d it-il, dans les hôpitaux où celui qui s’intitule phar-
hôpitaux, exprime toutes ses impressions personnelles sur cette
délicate question. Le concours fonctionne à Marseille comme
« macien en chef, parce qu’il est seul, perçoit 3000 f r . , alors que
a MM. les médecins et chirurgiens sont obligés de se contenter
création du concours dans les bureaux de bienfaisance, il y aurait
« de 600 fr. »
dans d’autres villes; mais, d ’après ce qui vient d’être dit, par la
possibilité de donner une partie des emplois vacants dans les éta
M. M ittre examine ensuite l ’organisation du service médical
dans les bureaux de bienfaisance, signale les imperfections, les
blissements hospitaliers à ceux qui auraient obtenu les premiers
numéros dans ces concours pour les bureaux de bienfaisance.
lacunes de ce fonctionnement, et conclut que trois ordres de
Tel est l’ensemble du travail de M. M ittre.
médecins seraient nécessaires pour une bonne organisation.
M. Villard demande à l ’Assemblée si le rapport de M. M ittre
1' Médecins suppléants.
qui a été lu et approuvé par la commission, doit contenir une
2°
»
titulaires.
opinion personnelle comme celle qui a été émise parle rappor
3*
»
honoraires:
teur, alors que cette opinion n ’a pas été acceptée parla Com
Les premiers seraient nommés au concours par une Commis
sion composée de médecins honoraires, en présence de l'A dm i
nistration — trois ans de suppléauce. —
mission.
MM. M ittre et Maurin soutiennent que le rapporteur a le droit
d’ émettre son opinion personnelle.
�—
194
—
M. Rampai ne voit rien d’ impossible dans l’exécution d’ un
-
195
—
Paris relatives h la nomination du Président général sont entiè
pareil programme. Ce serait le moyen le plus convenable de re
rement conformes au premier vœu exprimé par M. M ittre
lever les médecins du bureau de bienfaisance qui ne sont pas
quant au second, M. Mittre peut-être assuré que personne dans,
considérés comme ils devraient l’être.
le corps médical ne s’opposera à sa prompte réalisation.
MM. Chapplain et Villard regardent ce programme comme
La séance est levée.
excellent en principe, mais soulevant les plus grandes difficultés
Le Secrétaire
dans son exécution Le concours, disent-ils, fonctionne très bien
Dr
V
il l a r d
,
.
dans les hôpitaux, il est ouvert à tous les médecins ; il n’ y a donc
pas lieu de demander à l'autorité d’apporter le moindre change
ment h ce qui existe depuis plus de dix ans.
DE L’ARSÉNIATE D’ANTIMOINE
Telle est aussi l’ opinion de M. Fabre, qui considère les em
DANS L’EMPHYSÈME VÉSICULAIRE DES POUMONS
plois de médecins des hôpitaux non point comme une récom
N o u v e lle É tu d e
pense, mais comme une fonction.
P ar l e
MM. Chevalier, M ittre et Rampai développent et soutiennent
wur
la M é d ic a tio n a r s e n ic a le
Dr Ch . ISNARD
(de
M a r s e i l l e ).
par de nouveaux arguments, l’ idée contenue dans le rapport,
( Suite *)•
tandis que MM. Chapplain, Seux et Villard rejettent toute pro
position tendant à modifier le fonctionnement actuel des hô
pitaux.
M. le Président fait observer que le rapport de M. M ittre
contient deux propositions distinctes. La première est relative à
la création du concours pour les bureaux de bienfaisance; la se
conde porte que les médecins issus de ce dernier concours
seraient admis de droit à faire partie du corps médical des
hôpitaux.
Ces deux propositions sont alors mises aux voix séparément
et adoptées à la majorité.
L ’Assemblée décide que le travail de M. M ittre sera adressé
à M. le Préfet du département.
Sur la dernière partie de l’ordre du jour portant propositions
diverses, M. Mittre émet deux \œux: le premier, que l’ Asso
A c tio n
d a n s
l
’e
m p h y s è m e
v é s ic u l a ir e
d b s
po u m o n s
.
—
Je
n’ai pas l’intention d’exposer ici tous les résultats de mes recher
ches sur l ’arséniate d’antimoine ; je veux simplement étudier son
action sur une maladie qui, sans présenter les dangers de cer
taines affections organiques du cœur, n’est pas moins remar
quable par sa fréquence, sa ténacité, sa gravité et par les souf
frances, les angoisses qu’elle provoque, je veux parler de
l ’emphysème vésiculaire des poumons.
J’ai traité une dizaine d emphysémateux par la médication
arsénio-anlimoniale. A la vérité, je n’ai pas toujours recueilli
des observations complètes ; plus d’une fois, comme il arrive
dans les maladies chroniques, j ’ai eu à lutter contre l’inin
telligence,
l ’indocilité, ou le défaut de
persévérance des
ciation medicale des Rouches-du-Rhône soit consultée en temps
malades ; quelques-uns même , satisfaits d’une amélioration
opportun, pour la nomination du président général ; le second,
inespérée, refusaient, malgré ce premier succès, de continuer
que les médecins soient exonérés de la patente.
M. le Président répond que les instructions qu’il a reçues de
leur traitem ent, tant était profond chez eux le sentiment de
(1)
Voir le numéro de Novembre.
�—
197
196 —
leur propre incurabilité. Neanmoins, j ’ai constaté que l ’arséniate
d’antimoine exerce sur l’emphysème une influence vraiment
salutaire et donne des résultats pratiques certains: en effet, il ne
tarde pas à diminuer la dyspnée, la toux et l'expectoration et h
rendre au malade un bien-être perdu depuis longtemps.
d’une fatigue, d’ une émotion, des variations atmosphériques. Le
catarrhe est ordinairement sec ou peu humide, avec expectora
tion épaisse, visqueuse, difficile. La toux est forte, quinteuse,
pénible. De nombreux traitements ont été appliqués sans succès.
Le 5 avril 1866, j ’examine la malade pour la première fois ;
elle est tourmentée par une de ses crises habituelles du prin
Je vais rapporter ici deux observations
temps. Je puis ainsi compléter le lahleau de l’ affection par les
parmi celles que j ’ai recueillies. Elles représentent chacune un
traits suivants ; sonorité de la poitrine exagérée ; murmure vési
type différent de la maladie. La première est un exemple d ’em
culaire très faible ou nul, surtout devant et en haut, masqué
physème classique, caractérisé b la fois par la dyspnée et le ca
d’ailleurs par un râle sibilant très prononcé. Hypertrophie du
tarrhe pulmonaire; la seconde est un exemple, assez rare,
cœur. Respiration laborieuse; inspiration longue et pénible; ex
d’emphysème seul sans catarrhe. Au point de vue de la connais
piration courte et faible. Très forte dyspnée, surtout le malin, au
sance exacte du médicament, la dernière a une importance dont
moment où redoublent les efforts de l ’expectoration; accès de
l ’évidence n’échappera h personne : elle démontrera que l ’arsé-
toux, injection et congestion violacée de la face, indiquant une
niate d’antimoine et les préparations arsenicales en général ont
grande gêne dans l’hématose ; crachats de temps en temps mé
une action curative directe, immédiate sur l’emphysème vésicu
langés de sang. Pouls 74. 20 inspirations. Fonctions générales
laire proprement dit, que cette action peut être indépendante et
bonnes, sauf une diminution de l’appétit, comme cela arrive au
qu’elle n’est pas le résultat seul de l’influence primitive du mé
printemps et en automne, aux époques d’aggravation du mal.
F
a it s
c l in iq u e s
.
—
dicament sur le catarrhe pulmonaire. Nous verrons plus bas
tout le parti qu’ on peut tirer de ce (ait capital, quaud il s’agira
de préciser les effets de l’arsenic sur le tissu pulmonaire et de
déterminer ses propriétés générales.
Traitement : granules antimoniaux du Dr Papillaud ; dose
quotidienne : quatre pendant le premier mois; six ensuite; c’està-dire deux et trois milligrammes d’arséniate d’antimoine. De
plus, dans les moments où la dyspnée augmentera, fumer par
Mme X ..., 56 ans, grande, fortement con
jour, une, deux ou trois cigarettes composées de : arséniate de
stituée, douée de beaucoup d’embonpoint, est atteinte d’emphy
soude un gramme, eau distillée q. s., pour vingt cigarettes ou
sème vésiculaire des poumons depuis l’âge de 46 ans. A la suite
tubes.
Observation 1. —
de progrès incessants, la maladie est devenue aujourd’hui très
intense. Elle a débuté par un catarrhe pulmonaire récidivé. La
dyspnée s’est montrée bientôt après ; elle est continue, fréquem-
30 avril. — Effet décisif des cigarettes ; soulagement rapide
et constant.
25 septembre. —
L ’été s’est mieux passé que de coutume.
mentaggravée pardesparoxysmes, ne disparaît ni l’été, ni l’hiver,
Décembre. — Pendant cet automne, amélioration progressive,
atteint son maximum de violence, dans les saisons intermédiaires,
malgré l ’influence habituellement pernicieuse de la saison ; trans
au printemps et en automne ; elle est proportionnée au catarrhe
formation réelle de la dyspnée, de la toux et de l’expectoration.
qui a sur elle une influence tranchée; en été, quand celui-ci
La malade éprouve, cette année, un sentiment de bien-être inu
cesse ou diminue, elle est généralement plus faible, mais elle
sité. Depuis le mois d’avril, l ’arséniate d’antimoine a été pris ré
redouble aisément sous l’influence de la marche, d’ un effort,
gulièrement.
�_
198 —
En janvier et février 1867, la médication est suspendue; elle
est reprise pendant trois mois à partir de mars.
Au printemps, pas de recrudescence dans Ja dyspnée ni le ca
tarrhe.
Novembre. —
d’arséniate d’antimoine, c’est-à-dire quatre, puis six granules
antimoniaux. En outre, usage des cigarettes arsenicales; elles
seront fumées très lentement an nombre de une, deux ou trois
par jour, principalement aux époques où redoublera l ’oppression.
La situation a continué d’être bonne. N ou
Vers le commencement de ju ille t, Mn,e Z ... accuse, surtout
veau traitement par les granules, en septembre, octobre et
dans la durée et le retour des accès, un soulagement très sen
novembre. Les symptômes de l’emphysème sont considérable
sible, incontestablement dû aux cigarettes dont l'action a été gé
ment réduits. Ils n'incommodent plus ou presque plus la malade.
néralement sûre et immédiate.
Ils ne se manifestent guère que pendant un exercice forcé, une
Dans les mois suivants, l ’amélioration ne porte plus seule
marche ascendante, et encore sont-ils relativement très faibles.
ment sur les paroxysmes, elle s’ étend encore sur la dyspnée
Rétablissement voisin de la guérison.
continue elle-même qui, à son tour, diminue progressivement.
Février 1866. — Sept mois de traitement rigoureux ont
Observation IL — Mme Z ... traverse l'âge de la ménopause,
abouti à un bien-être insolite, tranché, à une amélioration très
elle a 45 ans (1865), et beaucoup d’embonpoint. Elle est névro
remarquable, voisine de la guérison. M me Z ... a repris ses
pathique et sujette h des spasmes hystériques. Pendant long
courses à pied, qu’elle avait interrompues pendant longtemps;
temps, elle a porté des dartres furfuracées sur diverses régions
elle est capable de parcourir cinq à six kilomètres sans fatigue ;
du corps. Ces manifestations herpétiques extérieures cessèrent,
l ’oppression est h peu près nulle dans la marche, et ne se mani
il y a six ou sept ans, pour être remplacées par les symptômes
feste guère que pendant l’ascension d’ un escalier ou d’un lieu
toujours croissants de l’emphysème vésiculaire des poumons.
élevé.
Le 29 mai 1865, je constate l'état suivant : La dyspnée, après
A partir de ce moment, la médication arsénio-antimoniale
avoir augmenté progressivement, est devenue excessive; elle
sera m odifiée;’ au lieu d’être continuée sans interruption, elle
est continue, avec de fréquents accès, variables par leur retour
sera échelonnée par traitements successifs ayant chacun une
et leur durée, mais très intenses, surtout après une émotion, une
durée de deux, trois ou quatre mois, suivant l ’opportunité.
marche ascendante, une fatigue quelconque. Depuis plusieurs
mois, l’oppression est devenue tellement forte que M mt‘ Z ... est
obligée de rester chez elle et de ne plus sortir qu’en voilure. La
sonorité du thorax est exagérée à la percussion, et le murmure
respiratoire très affaibli, en avant et en haut. Il n’y a habituelle
ment ni toux, ni catarrhe pulmonaire. Pas d'affection organique
du cœur appréciable; battements très profondément perçus,
leur rhythme semble naturel. Pouls a 6 5 ; 24 inspirations.
Divers traitements ont été essayés antérieurement sans résultat
marqué.
Prescriptions : tous les jours deux, puis trois milligrammes
Depuis cette époque, la santé de M me Z ... n’a cessé d’être
satisfaisante.
( La suite au prochain numéro.)
�— 201 —
_
200
—
ceux où l’air n’est pas renouvelé, dans les grandes villes, on
observe la même série de phénomènes: accumulation de l’acide
LA C H L O R O S E
Leçons professées à l’Hôtel-Dieu de Marseille par le DrAugustin FABRE,
professeur suppléant à l’École de Médecine ,
et recueillies par M. SDZINI, interne des Hôpitaux de Marseille.
Suite et
fin
(1).
carbonique dans le corps, diminution de l ’oxygène du sang,
aglobulie.
La menstruation paraît agir, d’après notre confrère, dans la
production de la chlorose, à l ’instar du séjour dans les lieux bas.
On sait, en effet, que pendant la vie menstruelle, la proportion
des globules rouges est moins abondante qu’avant l'apparition
des règles ou après la cessation de celles-ci. On sait de plus qu’à
En d ’autres termes, dans les lieux bas Vacide carbonique
s'accumule dans le sang. Mais alors l’oxygène ne peut pénétrer
partir du moment où le llux menstruel s’établit, l'exhalation de
l ’acide carbonique diminue. Pourquoi cela? On l’ignore et nous
dans l'économie ; car, d’une part il se trouve en présence d’ un
n’avons pas, pour l’heure, à rechercher la raison de ce fait
liquide saturé de gaz et peu disposé a en recevoir une nouvelle
extraordinaire. Contentons-nous de remarquer que la mens
quantité, et d’autre part, beaucoup moins soluble que l ’acide car
truation accumule dans l ’économie l ’acide carbonique, et secon
bonique, il peut, moins facilement que ce dernier gaz, s’ intro
dairement —
duire dans le sang, On le voit sans peine, l’accumulation de
qui sont soumis à d’autres causes productives de la ehlorose
surtout chez les sujets prédisposés ou chez ceux
l’acide carbonique dans l’économie a pour conséquence directe
—
la diminution de l ’oxygène, d’où transformation moins complète
voir tant de jeunes filles devenir chlorotiques au moment où
des leucocytes en hématies, d’où aglobulie, c'est-à-dire diminu
s’établit chez elles la fonction périodique?
tion des globules rouges,
amène l’ aglobulie. D ’après cela, doit-on être surpris de
En disant que la première apparition des menstrues produi
Dans les lieux mal aérés, dans ceux où l’air est confiné, le
sait une diminution dans 1 exhalation de l’acide carbonique,
même phénomène se produit. L ’atmosphère de ces lieux ,
nous sommes allés au-delà de la pensée du Dr Fabre. En effet,
comme le fait remarquer M. Fabre, contient une grande quan
notre confrère, tout en paraissant disposé à expliquer les faits
tité d’acide carbonique; nous pourrions ajouter que, par contre,
de celte manière, avoue qu’une pareille interprétation est pure
elle possède très peu d’ oxygène. En conséquence, elle fournit
ment hypothétique. Rien ne prouve, d’après lu i, que la mens
au sang beaucoup de ce premier gaz et fort peu du second.
truation, au lieu d’occasionner dans le sang une accumulation
Dans les grandes villes, la proportion de l’acide carbonique de
d’acide carbonique, ne soit pas une conséquence directe de cette
l ’air est plus forte que dans les campagnes ; en outre, dans les
accumulation elle-même. Sans doute, rien ne le prouve; sans
grandes villes les jeunes filles vont rarement au grand air ; pres
doute si, par une raison quelconque, autre que l ’arrivée des
que toujours elles vivent, soit dans les ateliers, soit dans les
règles, la jeune fille, parvenue à la douzième ou à la treizième
boudoirs, milieux fort différents, sans doute, mais remarquables
année, voyait diminuer chez elle l ’exhalation de l ’acide carbo
tous les deux par leur richesse en acide carbonique.
nique, « la menstruation pourrait agir, en effet, comme sécré
De ce qui précède, il résulte que, dans les lieux bas, dans
( i) V oir le num éro de Novem bre.
tion excrémentitielle et remédier au défaut d’exhalation de ce
gaz; » mais alors il n ’y aurait point, dans ce cas-là, d’accumula13
�— 205 —
tion d’acide carbonique dans l'économie, parlant point d’aglo-
Nous nous trouvons alors en présence de trois faits distincts :
bnlie, point de chlorose. Or, celte dernière maladie s’observe,
1° Les excitations nerveuses hâtent l ’établissement du flux
au contraire, très souvent.
Et d’ailleurs, si la diminution d’exhalation de l ’acide carbo
nique reconnaissait une cause autre que la menstruation, elle
périodique ;
2° Elles font naître Faglobulie ;
3° La menstruation elle aussi est une cause de chlorose.
s’établirait toujours a la même époque. Le fait observé serait
Un lien intime n’ u n ira it-il point ces trois faits? Si une dé
alors le suivant: chez la femme , à partir de tel âge , la quantité
pense nerveuse exagérée donne naissance aux pâles couleurs, ne
d'acide carbonique exhalé diminue. Les choses ne se passent
serait-ce point parce qu’elle a un retentissement direct sur la
point ainsi, car les faits prouvent que l ’exhalation de l ’acide car
menstruation et que la menstruation elle-même amène la chlo
bonique, après avoir cru jusqu’à la puberté, reste stationnaire
rose? Nous avouons, pour notre part, comprendre mieux, dans
quand les menstrues apparaissent ; c’ est bien avec la menstrua
la production de l’aglobulie, l ’action des menstrues que celle
tion qu’elle coïncide et non avec un autre phénomène ; elle
assez obscure et complexe du système nerveux telle que l ’indi
se présente plus tard ou plus tôt, selon que les règles apparais
que notre savant confrère. M. Fabre uous d it qu’ un travail mus
sent tardivement on d’une mauière précoce. La menstruation
culaire exagéré
provoque une dépense énorme de globules
paraît donc agir comme influence morbigène plutôt que comme
rouges, et il en conclut, avec M. Sce, qu’un surcroît de travail
remède comme cause plutôt que comme effet de l’aglobulie. La
du côté du système nerveux — - tel, par exemple, que les excita
difficulté est de savoir pourquoi la menstruation peut produire
tions nerveuses auxquelles sont soumises un gtand nombre de
un pareil phénomène, ou du moins pourquoi elle coïncide avec
jeunes filles, —
une diminution dans la quantité d’acide carbonique exhalé. Là
Mais s’il en était ainsi, les penseurs, les savants, les travailleurs
est le mystère, force est de nous arrêter; avec le Dr Fabre,
devraient être chlorotiques et l’auteur de ces leçons ne jouirait
avouons not^e ignorance, mais ne craignons pas de chercher
pas lui-même de cette belle santé qui fait la joie de tous ses
comme lui, de chercher toujours.
amis. Sans nier absolument que le système nerveux puisse avoir
Les excitations nerveuses produisent la chlorose au moins
pourrait bien également produire Faglobulie.
une action directe sur la production de Faglobulie, il nous sem
aussi souvent que la menstruation ouï e séjour dans les lieux-
ble que l ’on pourrait mettre sur le compte de l’établissement des
bas. Notre confrère explique ce fait par des troubles survenus
règles un grand nombre de ces chloroses survenues,au moment
dans l innervatioo des glandes vasculaires et des capillaires san
de la puberté, chez les jeunes filles soumises à de puissantes
guins, ainsi que par un excès de nutrition du système nerveux.
excitations nerveuses. D’après cette manière de voir, les causes
Ces causes divers s auraient pour effet, soit de diminuer la pro
principales de la chlorose, séjour dans les lieux bas, menstrua
duction des globules rouges, soit d’ augmenter leur destruction.
tion, stimulation du système nerveux, agiraient toutes les trois
Pendant que nous songions à cette explication théorique don
en produisant la même série de phénomènes : accumulation de
née par le Dr Fabre notre esprit se reportait involontairement
l ’acide carbonique dans le sang, diminution de l’oxygène, aglo-
sur une observation faite par M. Brierrede Boismonl. Cet auteur
bulie, chlorose.
a remarqué que les fatigues prolongées et habituelles du système
La question si difficile et si peu connue des souffles chloroti
nerveux avancent lépoque de la première apparition des règles.
ques, de leur siège, de l ’importance séméiotique qu’il convient
�— 204 —
d’attribuer à chacun d eux, a été étudiée avec le plus grand soin
par notre confrère. Pour lui, les souffles continus seuls ont une
grande valeur comme signes de chlorose. Que ces bruits conti
nus soient simples ou avec renforcement,soufflants ou musicaux,
ils n’en constituent pas moins une seule et même espèce de
souffle qui se rencontre très rarement dans des états morbides
autres que la chlorose.
Quant aux souffles intermittents, M. Fabre en reconnaît deux
parfaitement distincts. Le premier est court, saccadé; il donne
à l’oreille la sensation d’ un choc; presque toujours il est accom
pagné d un souffle cardiaque ; ce bruit se passe dans l ’artère ca
rotide et il indique une anémie assez avancée. Le second est, au
contraire, doux, prolongé; il coïncide très rarement'avec un
bruit de souffle au cœur, et a pour siège la veine jugulaire.
M. Fabre considère, 'a la vérité, ce dernier murmure vasculaire
comme un signe de chlorose ; mais un signe transitoire en quel
que sorte, car notre confrère a vu très souvent, sur le malade,
ce bruit devenir de plus en plus prolongé et se transformer en
un véritable murmure continu. Par conséquent, le souffle inter
mittent ne peut-être considéré comme le type habituel des bruits
chlorotiques.
D ’après ce qui précède, on peut prévoir que M. Fabre doit
être porté a attribuer, avec Arau, une origine veineuse aux
souffles vasculaires de la chlorose. Cetteopinion repose d’ailleurs
sur de très sérieux motifs. Une grande raison empêche notre
confrère de considérer les souffles chlorotiques comme des
bruits artériels ; c’est que, malgré les conditions physiques essen
tiellement favorables qui devraient produire à la base du cœur
des souffles intenses, les bruits cardiaques sont, dans la chlo
rose, relativement très faibles, tandis que les bruits vasculaires
sont très forts. Or, comme le moins ne peut produire le plus, si
le souffle est très fort dans les vaisseaux, c’ est qu’il ne provient
pas du cœur, c’est-a-dire qu’il ne siège pas dans les artères.
£n second lieu, pendant les grandes inspirations qui font affluer
—
205 —
le sang dans la poitrine par les veines, les bruits chlorotiques
augmentent d’intensité, tandis qu’ils diminuent pendant l’expi
ration. De plus, en comprimant au-dessus du sthétoscope,c’estk dire en arrêtant la circulation veineuse, on arrête en même
temps ces bruits. Donc, les souffles de la chlorose se produisent
dans l arbre veineux.
Relativement k leur rhythme, le Dr Fabre a observé un fait
fort intéressant, c’est que les bruits chlorotiques, intermittents
[sans souffle cardiaque) ou continus, simples ou avec renforce
ment, musicaux ou non, se succèdent, parfois même très vite,
chez la même malade. Ces différences dans leur timbre tiennent
selon toute apparence, h leur plus ou moins d’intensité.
Il est facile de le voir, ce chapitre de la Physiologie palholo-
gique décèle un esprit depuis longtemps habitué à la réflexion
et à l’observation médicale. M. Fabre, en eflet, n’ en est point
k ses débuts en matière de recherches scientifiques. Tous ses
travaux se fout remarquer par celte abondance d’idées, ce cou
rageux esprit d’investigation, cette connaissance approfondie des
travaux anciens et modernes, dont on découvre k chaque pas la
trace dans les Leçons sur la chlorose. Nous aurions encore bien
des points intéressants a examiner dans ce dernier travail, mais
nous craignons de dépasser les bornes d’une simple analyse.
Bornons-nous, en terminant, k dire un mot de la dernière leçon,
consacrée au diagnostic, au pronostic et au traitement des pâles
couleurs.
Une phrase d’une remarquable précision résume toute la thé
rapeutique de la maladie.
« Contre la chlorose , dit notre
« confrère, nous avons un remède excellent, le changement
« d’a ir; un bon remède, le fer; un remède assez bon, l'hydro« thérapie, et un remède médiocre, l’alimentation substantielle.»
Et cette phrase est très vraie ! L anémie n'est pas la chlorose : tel
régime de viande rôties et de jus de viande, dont se trouveront
merveilleusement bien les anémiques, restera très souvent sans
effet chez les jeunes filles atteintes de pâles couleurs. Répétons-
�— 206 le avec M. Fabre, l’air, les bonnes conditions d’habitat, voila le
véritable remède de la chlorose, et associons-nous au vœu no
ÉTIOLO GIE ET P R O PH Y L A X IE
blement émis par le jeune professeur, que l'assistance publique
crée des fermes-nwdèles où l’on puisse envoyer, loin des grandes
villes, les chlorotiques de la classe pauvre.
En résumé, nous croyons qu’on ne saurait trop recommander
à l'attention du public médical, les remarquables leçons dont
nous venons de donner un aperçu fort incomplet. De nos jours,
les jeunes médecins sont trop portés à se renfermer exclusive
DES MALADIES VÉNÉRIENNES
Oü
Étude des causes et des conditions anatomo-physiologiques qui permettent
la contagion, favorisent et entretiennent la propagation des maladies
vénériennes dans l’espèce humaine et des moyens prophylactiques a leur
opposer.
p a rtie. -
P R O P U Y Ii.tX IE .
ment dans l’expérimentation pour que nous ne nous réjouissions
pas de tout cœur, en voyant un homme distingué comme le
( Suite 1)
Dr Fabre, se faire remarquer autant par la rigueur de ses obser
vations cliniques que par f élévation de son esprit et l ’excellence
Les visites sanitaires de toutes les prostituées, patentées ou
de sa méthode. Si nous ajoutons à ces qualités une érudition
non, pour présenter des garanties réellement sérieuses au pu
des plus sérieuses, une persistance opiniâtre dans le travail, et —
blic, devraient être passées tous les quaire jours au moins et
disons-le—
un certain goût pour le mystérieux, nous voyons
toujours au spéculum; cet instrument permettant seul de bien
que notre confrère a peu de choses à envier a ces rudes travail
apprécier l’état du col de l ’utérus et des parois vaginales. Elles
leurs d'Oulre>Rhin dont il cite souvent les découvertes.
devraient de plus être passées dans un local bien éclairé afin que
L ’ Ecole de médecine de Marseille a donc fait en M. Fabre
le jour vint donner en plein dans le fond de l ’instrument. Ces
une excellente acquisition. Dès le principe, le jeune professeur
visites au spéculum devraient être imposées 'a toutes les filles
a su s’attirer la confiance et les sympathies des élèves; c’est là
publiques sans que, sous aucun prétexte, les autorités locales
pour l’avenir un précieux gage de succès. Plût au ciel que toute
puissent s'y opposer. Les filles devraient être réunies une heure
la jeune génération— médicale ou autre — adoptât, en matière
au moins à l'avance dans le local où doit se passer la visite et là
de progrès, les sages idées du Dr Fabre et dit avec lui : « Le
les agents chargés de les surveiller devraient les empêcher de
« véritable progrès n’est ni révolutionnaire, ni réactionnaire,
procéder, comme elles le font généralement pendant le temps
a il est conciliateur: il unit le présent au passé pour préparer
qu’elles y séjournent, à certains soins de toilette spéciale dont
« l ’avenir! »
l ’unique but est de dissimuler l’existence d’écoulements utérins
Dr Seux fils.
ou vaginaux. Voici les moyens qu’elles emploient le plus habi
tuellement pour obtenir ce résultat :
Avant de sortir de chez elles, elles se font quelques vigoureuses
injections vaginales avec un liquide alcoolique ou astringent,
puis elles introduisent au fond du vagin, contre le col de
(1) Voir les numéros d’Août, Septembre et Octobre.
�-
— 209 —
208 —
fin
ne peut apprendre dans les livres ; la manœuvre du spéculum
qu’elles font disparaître avec adresse quelques instants seule
leur deviendrait familière, tandis qu aujourd’hui beaucoup d’en
ment avant de se présenter à la visite. Toute femme publique
tre eux n’ont pas eu, durant tout le cours de leurs éludes médi
présentant un catarrhe utérin purulent doit être séquestrée, bien
cales, une seule fois l’occasion de se servir de cet instrument.
l'u té ru s , une petite éponge ou un
morceau de linge
que cette affection ne détermine pas toujours chez les hommes
Enfin, il serait bon, ainsi que l a proposé M. Diday, d’appli
l’apparition de la blennorrhagie. Toute femme atteinte d’acci
quer au service médical des visites sanitaires des filles publi
dents syphilitiques suppurés, à quelque période de la maladie
ques, le système des inspections mis en usage dans toutes les
qu’ils appartiennent, devra également être séquestrée; tous ces
administrations où l ’importance de l’emploi exige de la part du
accidents pouvant, dans certains cas, transmettre la maladie aussi
fonctionnaire une assiduité à toute épreuve. « Que l’on crée, dit
bien que les ulcérations primitives. Enfin, les médecins em
cet auteur, des inspecteurs supérieurs, qu’on les choisisse peu
ployés à ces visites devraient être assez nombreux pour pou
nombreux, indépendants par la fortune et la position, spécialis
voir s’v livrer sans fatigue, sans impatience, consciencieusement,
tes, bien entendu , et de capacité assez notoire pour que toute
enfin, et
pas, comme cela se pratiquegénéralement dans les
velléité de contestation disparaisse devant leurs jugements sou
grande villes, avec le désir de se débarrasser le plus tôt possible
verains. (C’ est là, selon nous, ce qui serait le plus difficile à
iîo d
de ce travail fort mal rétribué, qu’ils regardent par cela même
obtenir des autres médecins.) Qu’on leur laisse fixer eux-mêmes,
cotnme une pénible et désagréable corvée. Ces médecins seront
à leur gré, l’époque de leur passage dans telle ou telle ville,
choisis de préférence parmi les plus instruits et les mieux posés
mais qu’ils s’arrangent toujours pour arriver à l'improviste deux
de la localité et surtout parmi ceux qui, appartenant à la spécia
ou trois fois par an, le lendemain même de l ’une des visites
lité chirurgicale, auront été, pendant leurs études, externes ou
ordinaires. Or, dans de telles conditions, s’ils découvrent chez
internes dans un hôpital spécialement afïecté au traitement des
une fille un chancre bien caractérisé ou une sécrétion purulente
maladies vénériennes.
venant de l’utérus, que le médecin visiteur habituel soit destitué
Nous ajouterons de plus qu’il serait bon qu’une clinique spé
sans appel.
ciale, dans laquelle on ne s’occuperait que des maladies des o r
On a proposé encore d’arrêter le mal à la porte des maisons
ganes génito-urinaires des femmes en général et de leurs ma
de tolérance, en soumettant tous ceux qui les fréquentent à une
ladies vénériennes en particulier, fût créée, installée dans
visite préalable faite soit par les maîtresses de ces maisons, soit,
chaque Faculté de Médecine et dans chaque école secondaire de
ce qui vaudrait mieux, par les filles elles mêmes.
quelque importance. Ce serait le meilleur moyen de propager
Cette mesure serait assurément fort bonne, mais elle nous
dans les générations futures d’étudiants les connaissances prati
paraît difficilement applicable ; il est en effet bien îles hommes
ques qui manquent actuellement a la plupart des jeunes doc
qui ne voudraient jamais s’y soumettre, et en admettant même
teurs.
qu’ils s’y soumissent, la compétence (toujours très relative et
Tous les hôpitaux spéciaux sans exception devraient être ou
fort récusable de pareils juges, ferait naître des discussions et
verts aux étudiants possédant huit inscriptions, à plus forte raison
des disputes interminables, sans compter que l’avidité de cer
à tous les docteurs en médecine ; ce qui n’a pas lieu aujourd’ hui.
taines maîtresses de maisons leur ferait bien souvent fermer les
Ils y puiseraient des connaissances spéciales pratiques que l’on
yeux sur la triste vérité.
�— 210 -
—
211
—
Que doit-on faire des filles publiques une lois qu elles sont
de réprobation poursuit encore ceux qui ont commis le péché de
reconnues malades, atteintes de maladies contagieuses? La ré
la chair; les règlements des administrations hospitalières gar
ponse à cette question parait toute simple, toute naturelle ; il
dent la trace des rigueurs que l’exaltation des principes de chas
n'y a, eu effet, aucune hésitation possible : il faut les isoler de
teté chrétienne suggérait, dans le moyen-âge, contre les indi
la société et les soigner le mieux possible, tout le monde est
vidus atteints de maladies honteuses ; plusieurs des corporations
d'accord sur ce point. Mais où, comment et par qui ces soins
religieuses qui desset vent les hôpitaux, conservent la tradition
leur seront-ils donnés? C’est là que commence le désaccord, la
d’une sainte horreur pour ce genre d ’affection ; beaucoup d’ad
véritable difficulté. Ces questions sont en effet loin d’être vidées,
ministrateurs s'imaginent que la crainte du mal physique sert de
et pour montrer toutes les dilïicullés que leur solution comporte
frein à la débauche. Dans ces villes, on fait peu pour empêcher
et donner une idée saine de l’état réel de la question, nous ne
la propagation de la syphilis. On laisse les filles infectées se
croyons pouvoir mieux faire que de transcrire ici textuellement
traiter à domicile, ou bien on les expulse sans pitié du territoire
le remarquable passage suivant de l’excellent traité d'hygiène
de la commune ou du département, comme si dans l’un ou l ’autre
publique et privée de M. l'inspecteur Michel Lévy, directeur de
cas, elles cessaient un seul jour de répandre la contagion. Quand
l’ École de Médecine militaire :
des règlements absolus ne s’opposent pas à ce que ces maladies
« L ’extirpation de cette lèpre de nos temps modernes qu’on
soient traitées dans les hôpitaux, on n’y reçoit que des vénériens
appelle la syphilis, n’est pas au-dessus du pouvoir des États. La
de la localité ; de pauvres ouvriers sont forcés de se trainer sur
séquestration et les léproseries ont fait justice du fléau de la
les routes, d’aller porter leur honte dans leurs foyers domesti
lèpre ancienne ; la peste est l’objet d'un vaste et dispendieux
ques ou de s'exposer par la continuation de leurs travaux à des
appareil de préservation ; tous les gouvernements font des sa
accidents consécutifs qui ont souvent pour effet de les rendre
crifices pour étouffer les germes de la variole ; or, la syphilis fait
impotents et de les faire retomber à la charge de la société. Il
plus de mal 'a elle seule que toutes ces maladies ensemble. Elle
est telle garnison en France, qui, abonnée à l ’hôpital civil de
détériore sourdement les générations ; sa contagion est plus évi
l’endroit pour le traitement de ses fiévreux et de ses blessés,
dente que celle de la peste : pourquoi ne lui oppose-t-on pas,
n’y peut faire admettre ses vénériens qu’elle est forcée d ’éva
dans tous les pays, les mêmes barrières, les mêmes moyens
cuer dispendieusement sur l ’hôpital militaire le plus rapproché.
d’ extinction? Telle est l’espèce humaine; la foudre des épidé
« Les moyens de préservation de séquestration et de traitement
mies insolites qui passent sur sa tête comme le nuage électrique,
des maladies vénériennes, doivent être organisés d'une manière
l’étourdit et la frappe de terreur ; elle s’évertue inutilement à en
uniforme sur toute l’étendue de la France, et, s’il se peut, de
prévenir le retour, tandis qu’elle se familiarise avec les pestes
toute l’Europe et non livrés au caprice des administrations
lentes et continues qu elle porte dans son flanc et dont elle subit
locales et 'a la merci des préventions d’un autre temps. C’est un
le ravage héréditaire avec la même patience que la succession
vœu dont l’exécution facile dans un pays d’énergique centralisa
des phénomènes météoriques. A Paris et dans quelques grandes
tion ferait époque dans les annales d hygiène publique de l ’hu
villes, les vénériens des deux sexes obtiennent dans des éta
manité. »
blissements spéciaux les soins qui leur sont nécessaires ; il n ’en
Ce vœu nous le formons également, et en attendant qu’un
est pas de même dans les autres villes et localités ; là une sorte
règlement général fixe d’une façon claire nette et défini-
�—
212
— 215 —
—
niable jo u rn a l.
tiv e toutes ces questions pendantes, nous dem andons : 1° que les
vénériens et vénériennes, à quelque nation q u 'ils a p p a rtie n n e n t,
Pour le m om ent, je désire fa ire connaître à vos
lecteurs un in cid e n t q ui me p araît de nature à les intéresser.
Dans la dernière Assemblée générale de
so ie nt reçus in d is tin c te m e n t dans tous les h ô p ita u x de France
cins des Bouches-du-Rhône
YAssociation des Méde
, un de mes honorables confrères a
et d ’A lg é rie toutes les fois q u ’il n ’existera pas dans la loca lité
blâmé la p u b lic a tio n , dans votre jo u r n a l, de mon article sur le
d’h ô p ital spécial affecté au tra ite m e n t de ce genre de malades ;
c h e f-in te rn a t, et la discussiou soulevée à ce propos s’étant prolon
2* que si la règle de certains ordres re lig ie u x ou les scrupules de
gée à la suite de la séance, quelques paroles regrettables ont été
conscience de leurs m em bres s’opposent fo rm e lle m e n t à ce q u ’ils
prononcées.
répandent les bienfaits de la charité su r cette catégorie de m a
Je n’insiste pas sur la question de convenance, mais je trouve
lades, on les rem place dans ces services ou hôpitaux spéciaux
réellem ent inconcevable l’o pinio n m anifestée par cet honorable
par des laïques hom mes ou fem m es, s u iva n t le cas, a u xq ue ls on
confrère. C e lu i-c i, en e ffe t, ne je ta it p o in t le blâme sur la forme
d on ne ra it une ré trib u tio n égale à celle que l ’É ta t accorde a c tu e l
de mon a rticle , mais sur le fa it même de la discussion, accusant
lem ent aux sœurs de ch arité employées dans les h ô p ita u x m ili
Y Union médicale de la Provence
taires , c’e s t-h -d ire enviro n cinq ua nte francs par m o is , sans
com pter le lo g e m e n t, le chauffage, le blanchissage et l ’éclairage.
A ce p rix , on trou vera to u jo u rs de pauvres fem m es q u i seront
enchantées de faire ce service, car souvent elles gagnent la
m o itié m oins en tra va illa nt plus de douze heures par jo u r,
Dr A. B o u l o n g n e ,
Médecin-Major de 1r* classe à l’Hôpital militaire de Marseille.
(La suite au prochain numéro.)
d’avoir porté une main sacrilège
sur l’arche sainte du ch e f-in te rn a t !
Eh q u o i! une question capitale s’est agitée dans nos hôpitaux ;
elle intéressait à la fois les malades, les élèves ( c’est-à-dire l’in s
tru ctio n publique), les chefs de service, la science elle-m êm e ; un
jo u rn a l de médecine e xista it à M arseille (1) ; ce jo u rn a l est chargé
de défendre les intérêts scientifiques et professionnels des méde
cins, et l’on v o u d ra it q u ’il eût gardé le silence? Mais s’il se fû t tu
dans une circonstance se m b la b le , c’est alors q u ’on l’eût blâmé ,
c’est alors q u ’on l'e û t accusé d'être une fe uille nulle et im p u is
sante ! E t l’on eût eu raison.
Correspondance
Mon article a paru il y a six mois. La question que j ’ai traitée
je la connais à fond, attendu que depuis d ix ans je vis dans les
4
Messieurs les Membres du Comité de publication de
/ ' U n i o n M é d ic a l e d e la P r o v e n c e .
h ô p ita u x. En la d is c u ta n t, j ’ai usé du d ro it q u ’a to u t homme
convaincu d’exposer p ub liq ue m e n t et en termes convenables son
o pinio n ; mais je n ’ai p o in t eu la prétention de me donner comme
Messieurs,
in fa illib le . Si m on honorable confrère était d’un avis opposé au
Vous avez bien voulu insérer, dans les num éros de ju in et de
m ie n , il était lib re de réfu te r mes argum ents; je suis s û r , Mes
VUnion médicale de la Provence, un a rticle in titu lé : De
l’avenir du chef-internat à Marseille. Si j ’avais conservé quelques
sieurs, que les colonnes de votre jo u rn a l lu i a uraient été large
doutes su r la valeur du p rincip é soutenu par moi dans cet article,
personne de déclarer
le d ernier concours pour riD te rn a t les a u ra it dissipés com plète
cussion d’ un p rincipe.
ju ille t de
m ent ouvertes. En tout cas, je ne crois pas q u ’il soit permis à
acte de haute inconvenance
la libre dis
m ent. Je me propose de revenir plus tard sur celle im portante
question du chef-internat, et j ’espère, M essieurs, que vous vou
drez bien encore, à ce s u je t, m’o u v rir les colonnes de votre esti-
(1) Il y en a deux maintenant, grâce au zèle et à l’initiative de quelques-uns de
nos confrères.
�214
Que directem ent en jeu dans un a rticle on proteste contre de
blessantes personnalités, rien de plus ju s te ;
mais q u ’on veuille
écarter du grand jo u r de la p u b licité une question de p rin cip e , —
su rto u t une question d ’ un in té rê t m ajeur, —
voilà ce que ne p o u r
ron t jam ais concevoir les esprits libé ra ux et amis du progrès. C’est
au nom de la liberté pour tous que je défends, dans cette circo n
stance, les dro its de la presse, et j ’en appelle à tous mes confrères,
TABLE DES MATIERES
l'Union
Sud médical.
spécialement aux membres du comité de p u b lica tion de
médicale de la Provence
et aux rédacteurs du
Je vous prie, Messieurs, de vo u lo ir bien insérer cette lettre dans
votre prochain num éro et d’agréer l’expression des sentim ents de
A nnée 1 8 6 7
respect avec lesquels j ’ai l ’ honneur d’ê tre ,
Votre dévoué confrère,
D r
S eux fils.
Marseille, 6 Décembre 1867.
C hronique L ocale
L ’Union médicale de la Provence a reçu le premier numéro
du journal le Sud-Médical, qui doit paraître, dès le mois de jan
vier 1868. En saluant sa bienvenue, elle est heureuse de voir
s’ élever, dans notre ville, un nouvel organe pour défendre les
intérêts scientifiques et professionnels du corps médical.
— Nous annonçons, avec satisfa ction,a nomination de M .le
Dr Nitard-Ricord au grade de chevalier de Sainte-Anne de
Russie.
— On offre, à Istres (B.-du-Rhône), 2400 francs à un docteur
en médecine qui voudrait s’établir dans la localité. Il aurait la
liberté de faire de la clientèle. Pour renseignements, s’adresser
à Marseille, rue de Rome, 97, à M. le Dr Seux, président de la
Société locale des Médecins des B.-du-R hône, ou bien rue
d’Arcole, 4, à M. le Dr Sicard, président du Comité Médical des
B.-du-Rhône.
Le Comité de Rédaction.
Pages
Association Médicale des Bouches-du-Rhône ; Assemblée générale (suile el fin).
1
Mémoire sur l'ongle incarné, par le Dr D idiot.i................................................ 17
Jurisprudence professionnelle. — Action des médecins pour le recouvrement
des honoraires, etc............................................................................................ 28
Endocardite ulcéreuse chez un homme atteint de syphilis constitutionnelle,
par le D' Villard................................................................................................ 33
Angine couenneuse et croup ; vomitifs, perchlorure de fer, par le Dr Seux fils. 43,54
Intérêts professionnels, parle Dr Mittre............................................................. 47
Association Médicale. — Compte-rendu des séances, par le Dr Villard........... 49
Un procès médical en Angleterre, par le Dr De Valcourl................................. 62
Une phase imprévue de l’histoire de la contagion du Choléra, par le Dr Chapplain............................................................................................................... ;. 65
Association générale des Médecins de France. — Assemblée générale de Paris. 70
Bibliographie : Encore quelques mots sur la contagion, par le Dr Seux, ana
lyse du Dr A. Fabre........................................................................................ 74,88
De l’avenir du Chef-Internat à Marseille, par le Dr.Seux fils.......................81,97
Résection du maxillaire inférieur, par M. Coste. — Revue clinique, par le
D' Chapplain...................................................................................................... 86
Bibliographie : Du Laryngoscope et de son emploi, par le Dr M. Mackensie,
traduction du Dr Émile Nicolas, analyse par le Dr A. F ............................... 108
Trousseau, par le Dr Ch. lsnard (de Marseille)................................................ 111
Relation d’une amputation totale du maxillaire inférieur, par M. Coste........ 113
Étiologie et Prophylaxie des maladies vénériennes, par le Dr A. Boulongne, 124
142,159, 207
�table
des
m a tièr es.
Page*
Du concours que les sciences physiques p rien t à la médecine, par le D'Sirui
P i r o n d i ................................................................................................................................ l37’154
Nécrologie, par le Dr Chapplain......................................................................... 160
Intérêts professionnels. — Les Médecins et le Choléra en Italie..................... 163
Compte-rendu des séances de la Commission administrative de la Société
locale, par le Dr Olive....................................................................................
De l’Arséniate d’antimoine dans l'emphysème vésiculaire des poumons. —
Nouvelle étude sur la médication arsenicale, par le D» Ch. Isnard (de
Marseille)................................................................................................ 174,195
La Chlorose, leçons professées par le D1 A. Fabre, analyse du Dr Seux fils. 180,200
Association médicale des Bouches-du-Rhéne ; Assemblée générale du 3 Dé
cembre 1867.........................................................
*8®
Correspondance : Lettre du D' Seux fils, au Comité de rédaction de 1 U n io n
médicale de la Provence.................................................................................... 212
Revue et Chronique mensuelles................................................... 9, 57, 75, 93, 168
Chronique locale, Nouvelles et Variétés............................ 16,48,80,96, 136,214
t
Marseille. — lmp. Arnaud, Cayer etComp., rue Saint-Perr*ol,ï7.
B
�
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/2/185/TP-40029_Union-medicale-Provence_1868.pdf
0c2d45028119254cffe79da2ca05f1fe
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UNION MEDICALE
DE LA
PROVENCE
JOURNAL SCIENTIFIQUE ET PROFESSIONNEL
Publié sous la Direction d’un Comité de Rédaction
E t sous les auspices de la Société Locale des Médecins
DO DÉPARTEMENT DES BOÜCHEft-DÜ-RHÔNE
Agrégée à l’Association Générale des M édecins de France,
Pour tout ce qai concerne le Journal, demandes d’abonnement, réclamations, échangea, etc.,
s’adresser an Secrétaire de l’Association Médicale des Bonches-da-RbAne,
rue Saint-Jacques, 29 (Affranchir).
MARSEILLE
TYPOGRAPHIE ET LITHOGRAPHIE ARNAUD,
Rue Saint-Ferréol, 57
CAT IR BV
G"
�LISTE DES MEMBRES
COMPOSANT LA
5 e a n née .
UNIO N MÉDICALE
1808.
SOCIÉTÉ LOCALE DES BOUCHES-DU-RHONE.
DE L’ARSÉNIATE D’ANTIMOINE
BUREAU ET COMMISSION ADMINISTRATIVE.
Président : M. Seux# # , prof, à l’Ecole de Médecine, méd en ch. des hôpit., Marseille.
rpour l'arrondissement de Marseille : M. Rivière de la Souchôre
médecin en chef des hôpitaux et du chemin de fer.
*oe~
')pour l'arrondissement d’Aix : M. Rimbaud.
'pour l'arrondissement d’Arles: M. Imbert chir. eu chef de l’hôpital.
Secrétaire : M. Villard, médecin adjoint des hôpitaux, Marseille.
Vice-Secrétaire : M. Ollive, Marseille.
Trésorier : M. Blanchard (Camille), Marseille.
COMMISSION ADMINISTRATIVE.
MM. Chapplain, chirurgien en chef des hôpitaux et profess. suppl.à l’Ecole, Marseille
Broquier chirurgien en chef des hôpitaux, professeur suppl. à l’Ecole, Marseille.
Gasquet membre du conseil municipal, Marseille.
Verne, Marseille.
Candolle. Marseille.
Fabre (Augustin). Marseille.
Martin # , profess honoraire à l’Ecole de médecine, chir. consult. des hôpitaux.
Miltre (Théophile), Marseille.
Mérentié. Marseille.
Martin (Alexandre), Marseille.
Comhalat, chirurgien-adjoint des hôpitaux, chef des travaux anatom., Marseille.
Pirondi (Sirus)
chirurg. censult. des hôpitaux, prof. adj. à l’Ecole,Marseille.
PRÉSIDENT HONORAIRE.
M. Bartoli, professeur à l’Ecole de médecine et chirurgien en chef des hôpitaux.
CONSEIL JUDICIAIRE.
MM. Verne, avocat à Marseille.
Chalaud, avocat à Marseille.
MEMBRES SOCIÉTAIRES.
MM. Armieux, Marseille.
Boxe, directeur de l’établissement hydro
Aubert, Marseille.
thérapique, Marseille.
Aubin, Marseille.
Builly, Marseille.
Audibert, Rousset.
Camoin, Cuges.
Aujoux, Marseille.
Cartier,médecin adj. de l’hôpital, Arles.
Aupban, Marseille.
Cartier, Graos.
Baraillier, Marseille.
Cartoux, Marseille.
Bartbés, Marseille.
Castellan, Aix.
Behm, Marseille,
Cbabert, Maillanne.
Chaffard, Auriol.
i Beisson, Arène.
Bernard (Marius), chirurgien en chef Chauméry, Marseille.
des hôpitaox, Ma^eille.
Chevalier, Marseille..
Beullac (Tbéod.), Marseille.
Chevillon aîné, Marseille.
Chevillon jeune, Marseille.
Blanc. Marseille.
Blanchard (S.-L.), Marseille.
Clappier, Vitroiles.
Boussot, Mouriés.
Clot-Bey C. # , associé de 1académie
Bouisson, m.-ad. des hôp. Marseille
impériale de médecine, Marseille.
Collin, Marseille.
Bourgarel, ebir. adj. des hôp. id.
Compan, Arles.
Boyer, Saint-Mître (les Martigues).
DANS L’EMPHYSÈME VÉSICULAIRE DES POUMONS
N o u v e l l e É t u d e «ur In Sl^ dlcufion u rw ciilcale
P ar l e
Dr
Ch .
ISNARD
j
\
( de Ma r s e il l e ).
( Suite , ).
II
SoMMAinE : — L’emphysèœe permet d’étudier l’action des préparations arseni
cales sur le tissu des poumons et sur les autres tissus de l’organisme. — Néces
sité de s’appuyer sur l’anatomie. — Structure de la vésicule pulmonaire. —
Anatomie pathologique et pathogénie de l’emphysème. — Action de l’arsenic
sur la dyspnée et les lésions de l’emphysème proprement dit ; preuves directes ;
analogie thérapeutique. — Action de l’arsenic sur la dyspnée liée aux autres
affections des bronches et des poumons. — Degré de curabilité de l’emphysème.
— Mode d’administration et doses des préparations arsenicales. — Action de
l’arsenic sur le catarrhe pulmonaire de l’emphysème.
Après avoir constaté au lit du malade l’efficacité de l’arsenic
dans l’em physèm e, il était utile de rechercher com m ent il agis
sait, d’abord sur le parenchym e pulm onaire, ensuite sur les
autres tissus de l’organism e. A ce point de vue, les considéra
tions cliniques précédentes n ’ont pas seulem ent la valeur in trin
sèque d ’un fait particulier, elles ont un in térêt plus gén éral:
elles se rattachent à la m édication arsenicale et servent à
l’éclairer.
L ’em physèm e des poum ons m ’a sem blé très propre à favoriser
ces recherches. En effet, on possède aujourd'hui des notions
précises sur la stru ctu re anatom ique de la vésicule; la maladie
est peut-être de toutes les alfections pulm onaires la plus sim ple,
la m ieux définie. la moins controversée; on en connaît exacte
m ent les sym ptôm es et les lésions, ainsi que les rapports des uns
aux au tres; on peut donc, sans recourir au contrôle des nécropsies, déterm iner les translorm ations histologiques dues à une
(1) Voir les numéros do novembre et de décembre.
i
�m édication, par les modifications <pie celle-ci im prim e aux sym
ptômes eux-m êm es. Mais, si l’on veut poursuivre avec fruit une
pareille élude, il est indispensable de l’appuyer sur les bases
inébranlables de lan ato m ie; d ’o ù , la nécessité des détails su i
vants :
S tructure de la vésicule pulmonaire . — Je n ’ai pas à exa
m iner ici les différentes opinions adm ises dans la science sur la
structure du poum on; je me bornerai à retracer, dans ses
principaux traits et au point de vue de mon sujet, celle qui, au
jourd’hui, semble rallier la plupart des anatom istes, et qui a pour
partisans, en A ngleterre, Tood et Bowman; en Allemagne, K ôlliker; en France, Rossignol, Mandl, M ilne-Edw ards, Sappey,
Morel, etc.
Suspendues aux dernières divisions des bronches lobulaires,
les vésicules pulmonaires ou lobules prim itifs, en se réunissant,
constituent essentiellem ent le poum on. Leur nom bre est très
considérable ; leur volume, chez l’adulte, égale à peine un m il
lim ètre cube.
Par leur face externe, les vésicules pulm onaires d’un m êm e
lobule sont unies aux vésicules voisines de la m anière la plus in
time et pour ainsi dire sans substance interm édiaire. Seules, les
vésicules périphériques de deux lobules contigus sont séparées
par une couche mince de tissu conjonctif interlobulaire.
Chaque vésicule pulm onaire offre une cavité centrale restée
libre, et, sur ses parois, une série d’alvéoles juxta-posés et in
dépendants qui tous s’ouvrent dans cette cavité centrale. On
com pte, en général, douze à quinze alvéoles dans chaque lobule
primitif, La vésicule pulm onaire ressem ble donc à un poumon
de grenouille, et le poumon de l’hom m e peut être considéré
comme une m ultitude de poum ons analogues à ceux des reptiles.
La vésicule pulm onaire a pour élém ents principaux :
1° Une couche de fibres élastiques, formant en quelque sorte
la charpente de la vésicule. Cette m em brane se continue, d’une
part, avec les dernières ramificatious bronchiques intralobulaires,
et se term ine, d’autre part, en cul de sac, tout en se réfléchis
sant intérieurem ent pour form er les cloisons et les alvéoles qui
la tapissent. Sa stru ctu re rend com pte de l’élasticité puissante
du poumon : cet organe , passif dans l’inspiration, est actif dans
l'expiration ; il revient sur lui-m êm e en vertu de l’élasticité de la
vésicule, et rejette ainsi au dehors l’air chargé d ’acide carbo
nique.
2° Un réseau capillaire interm édiaire à l’artère et aux veines
pulm onaires. Ce réseau se dirige de la périphérie au centre de
la vésicule, pour aller s’épanouir su r sa paroi intérieure et sur
la cloison des alvéoles. Les mailles en sont serrées, abondantes,
fiexueuses, pour se prêter au m ouvem ent d’expansion du pou
m on, sans subir «le tiraillem ents; l’espace qui les sépare est plus
étroit que les capillaires eu x -m êm es. C’est dans ce réseau vas
culaire si riche que s'accom plit le phénom ène de l’hém atose, la
conversion du sang noir en sang ro u g e; c’est a travers la paroi
m ince des capillaires que s ’opère le déplacem ent et l’échange
des gaz entre le sang et l’air atm osphérique ( 1).
Les parois des vésicules pulm onaires renferm ent encoredivers
élém ents, en général peu connus, ou bien contestés ou niés.
Ainsi, on y trouve des vaisseaux lym phatiques abondants ; des
cellules plasm atiques ou noyaux em bryoplasliques (Fort). Les
nerfs n ’ont pu, ju sq u ’à présent être dém ontrés (Sappey, Morel).
Les fibres m usculaires que l’on pouvait suivre encore sur les
prem ières divisions de la bronche intralobulaire cessent com plè
tem ent d ’exister sur la paroi de la vésicule pulm onaire ; on n’en
(t) Pour la structure de la vésicule pulmonaire, voir :
Milne-Edwards, Leçons sur la physiologie et l’anatomie comparée, tome II ,
année 1858, p. 323 ;
Sappey, Traité d'anatomie deseriplive, 1864, t. III, p. 406-446;
J.-A . Fort, Traite élémentaire d’histologie, 1863, p. 15 2 etsu iv .;
Morel, Traité d’histologie humaine, 1854 et suiv. ;
J.-A . Villemin, Recherches sur la vésicule pulmonaire el l’emphysème, in-Ar
chives générales de Médecine, octobré ot novembre 1866, p. 385 et 566. — Je
signale d’une manière particulière cet excellent Mémoire. J ’aurai fréquemment
l’occasion de le citer dans cette partie de mon travail.
�5
.découvre plus de traces. Une m ince couche d’épithélium pavim enteux, dernière expansion de la m uqueuse bronchique, tapis
serait intérieurem ent la paroi vésiculaire. L ’analogie et l’obser
vation directe l’ont lait adm ettre par la plupart des m icrographes,
par Sappey, Ch., R obin, F o rt, M orel, H érard. Elle a été niée,
au contraire, par Todd. Bowman, Rainey et Mandl.
M. Villemin, s’appuyant à son tour sur l’observation, nie,
après l’avoir admise, la présence d'un épithélium . P our lui, s jn
existence, n'a pas encore été dém ontrée expérim entalem ent :
c’est une pure hypothèse que l’analogie et le raisonnem ent ont
seuls fait accepter. Le réseau capillaire se trouverait en contact
direct avec l’air, dans la cavité de la vésicule pulm onaire ; cette
opinion serait confirmée parla physiologie, par l’anatom ie patho
logique et surtout par I étude, l’indépendance et les différences
de la bronchite et de la pneum onie.
Ce distingué m icrographe a découvert, en outre, sur la paroi
de la vésicule et sur les cloisons des alvéoles, un élém ent n o u
veau, enchâssé dans les interstices capillaires. Cet élém ent a la
forme d ’un noyau et occupe presque tout l’espace intercapil
laire; ces noyaux interstitiels sont â peu près sur le m êm e plan
que les capillaires. Les fibres élastiques leur sont supérieures
(loc. cit., p. 596). C ontrairem ent à l’opinion généralem ent
admise], la paroi des vésicules n ’est pas une m em brane hom o
gène ; elle est très riche en cellules et constitue une variété de
tissu conjonctif (p. 597).
Depuis les recherches de M. Villem in, le noyau interstitiel
des vésicules a été constaté par d ’autres m icrographes; en France,
par Ch. Robin ; en A llem agne, par D eichler, Henle et Bakody ;
à Bruxelles, par le professeur Crocq.
La connaissance de ce noyau conjonctif, dit M. Villem in,
jette une vive lum ière sur un grand nom bre de faits pathologi
ques aujourd’hui encore très controversés , notam m ent sur
j’histoire de la tuberculose, de la pneum onie, d elà bronchite et
de l’em physèm e pulm onaire. En effet, cet élém ent est l’origine
—
com m une de presque tous les processus m orbides du p >umon ;
il sert de point de départ aux tubercules intra-alvéolaires ; dans
la pneum onie, il rem plit les alvéoles du produit de sa m ultipli
cation (loc. cit., p. 589); il perm et d’établir les différences radi
cales de la bronchite et de la p n eu m o n ie, dém ontre l’indépen
dance réciproque de ces deux m aladies (p. 405) ; enfin, comme
nous le verrons bientôt, il joue un rôle im portant dans l’évolu
tion de l’em physèm e vésiculaire des poum ons. Désorm ais, on
n ’a plus besoin d’invoquer la présence d’un épithélium pour
expliquer l’accum ulation de cellules pathologiques dans les vési
cules: un élém ent conjonctif rend beaucoup m ieux com pte
qu’un élém ent épithélial des phénom ènes m orbides qui se pas
sent dans le poumon (p. 597).
Les dim ensions des vésicules pulm onaires s’accroissent avec
l’âge ; elles atteignent leur m inim um chez le fœtus et leur maxi
m um chez le vieillard (de 70 à 80 ans). L’étendue de la surface
respiratoire semble donc être proportionnelle à l’âge. Le fait est
vrai ju sq u ’à 50 ou 40 ans. Mais plus tard, les vésicules pulm o
naires subissent, com m e nous le verrons b ien tô t, les m odifica
tions propres à l’em physèm e : leurs parois se résorbent, se p er
forent et disparaissent ; plusieurs cellules com m uniquent entre
elles ; leur volum e augm ente aux dépens du nom bre et par
conséquent de l’étendue de la surface respiratoire. (Sappey, loc.
cit. p. 451 ,%456).
A natomie pathologique et patoogénib de l ’emphysème pul monairb . — L’em physèm e offre deux degrés :
Dans le prem ier, il y a dilatation des vésicules pulm onaires
et de leurs alv éo les, avec atrophie des capillaires et affaiblisse
m ent des fibres élastiques : d’où dim inution de la m asse sanguine
nécessaire â l ’hém atose, et ralentissem ent de l’énergie respira
toire ou plutôt de la puissance expiralrice, entraînant elle-m êm e
la dim inution de la quantité d ’air respirable.
Dans le second , il y a raréfaction et perforation des cloisons,
destruction du parenchym e pulm onaire, ce qui dim inue leten d u e
�- 6—
de la surfaoe respirante et aggrave encore les résultats précé
dents.
Si quelques médecins ont invoqué l’hérédité et la sponta
néité ( 1) pour expliquer la form ation de l’em physèm e , les
théories m écaniques ont généralem ent prévalu depuis Laënnec.
Toutes supposent l’existence préalable du catarrhe pulm onaire et
peuvent se ranger en deux g rou p es, suivant qu’on attribue la
maladie soit à la présence de m ucosités adhérentes dans les
bronches et au gonflem ent de la m u q u eu se, soit aux efforts de
la toux.
O utre les reproches qu’on peut adresser h chaque théorie en
particulier, toutes sont passibles de la m êm e objection capitale :
ainsi, le catarrhe n 'est pas constant dans l’em physèm e; quand
il existe, il le suit plus souvent qu ’il ne le précède, et la toux est
ordinairem ent un effet consécutif à la dilatation des vésicules,
comme on la voit naître, à la suite de la pneum onie, de la p leu
résie et de la tuberculisation au prem ier degré (Louis, A ndral,
H ervieux, Jackson, Grisolle, Villemin).
(La suite au prochain numéro.)
BIBLIOGRAPHIE
Clinique photographique de l’h ôpital S ain t-L o u is, par MM.
et De Montméja. — Paris, 1867 (2).
«
H ardy
Ce livre, ainsi que les auteurs le font remarquer dans leur pré
face, est destiné à représenter la nature prise sur le fait et à
suppléer à l’insuffisance des planches représentant les maladies
cutanées en substituant à la copie l’original, à la description de
la maladie la maladie elle-même, à un dessin plus ou moins fidèle
l’empreinte photographique avec sa rigoureuse exactitude. Le nom
de Clinique convient singulièrement à cet ouvrage , car les mala(1) Louis, Andral, Jackson, W aters, Grisolle, Valleix.
(2) Cet ouvrage est actuellement ^n cours de publication. Il formera dix
ou onze livraisons, se composant chacune de huit pages de texte et de quatre
planches photographiées et coloriées.
dies n’y sont pas groupées d’après une classification quelconque
ou d’après les rapports qu’elles affectent entre elles, mais suivant
l’ordre qui les a fait apparaître aux yeux de l’observateur. En
feuilletant ce livre, on croit parcourir une des vastes salles de
l’hôpital Saint-Louis, et l’on voit défiler successivement devant
soi les échantillons les plus divers des maladies cutanées.
On se tromperait, néanmoins, si l’on croyait que l’ouvrage de
MM. Hardy et Montméja est un simple album photographique.
Dans une clinique tout ne se borne pas à la muette observation
des malades ; la parole du maître est là, colorant le tableau, ani
mant l'ensemble, faisant ressortir les moindres détails , et impri
mant en quelque sorte dans l’esprit des auditeurs l’image de la
maladie. Ici le maître est absent, mais sa parole ne fait pas com
plètement défaul. A chaque planche est joint un texte suffisamment
développé, lequel donne une idée théorique très exacte de la ma
ladie représentée sur la planche. La difficulté était de dire beaucoup
en peu de mots et de serrer la pensée de manière à donner dans
une ou deux pages de texte les détails les plus importants de la
maladie, ses symptômes, sa marche, ses terminaisons, son trai
tement. Ce problème a été résolu de la manière la plus heureuse
par le savant dermatologiste que la Faculté de Médecine de Paris
compte aujourd'hui dans son sein comme professeur de pathologie
interne. Esprit ardent et convaincu, railleur et sans pitié à l'égard
de ceux qui ne partagent pas ses croyances, mais avant tout
logique et clair, précis et allant droit au but, M. Hardy a contribué
puissamment à débrouiller le chaos presque inextricable des ma
ladies de la peau. Quoique l’ouvrage dont nous nous occupons
aujourd’hui soit encore en cours de publication, nous pouvons, dès
à présent, apprécier le mérite incontestable de cette œuvre et la
mettre, en dépit de l’auteur, bien au-dessus d’un Atlas exact
pouvant former le complément de tout ouvrage de dermatologie.
Ce que nous avons pu lire du texte descriptif joint à chaque plan
che, nous a paru une merveille de netteté et de précision. Ce textelà, qui pour nous vaut bien des traités, suffit pour faire de la
Clinique de MM. Hardy et de Montméja autre chose qu’un recueil
de superbes planches et pour lui assurer une place importante
parmi les œuvres réellement scientifiques. Dans ces pages si
remarquables par leur concision , soit que le professeur se borne à
une description théorique et presque dogmatique, — comme il le
fait pour les maladies communes telles que Vimpétigot — soitque
la description soit plus spéciale, plus clinique, plus particulière
ment applicable au cas particulier représenté sur la planche , on
reconnaît toujours l’empreinte d’un esprit droit, pratique et émi
nemment observateur.
�— 8
Mais ce que nous trouvons de plus remarquable dans cette
œuvre, c’est l’idée générale qui domine et régit le tout. Rassembler
des faits nombreux et les décrire avec soin, c’est bien ; mais géné
raliser ces faits, les grouper dans un certain ordre, les rattacher à
de grandes divisions de manière à ce que la pensée de l’auteur se
retrouve dans les moindres détails, c’est là surtout faire preuve de
véritable science. Le livre de MM. Hardy et Montméja est écrit
dans cet excellent esprit; il est facile de s’en convaincre en lisant
l’introduction qui précède l’ouvrage.
L’histoire dogmatique de la pathologie cutanée a présenté plu
sieurs phases distinctes. A une époque qui n’est pas encore très
éloignée de nous, l’école anglaise avec Willan etBateman ne voyait
dans les maladies de la peau que des lésions initiales , les altéra
tions anatomiques. Pour elle tout se passait à la peau, et deux
lésions cutanées distinctes devaient forcément constituer deux
maladies. Ces idées eurent cours dans la science d’une manière
presque exclusive, jusqu’au moment où Alibert proposa sa classifi
cation des dermatoses. S’élevant au-dessus des faits de détail et
pratiquant sur une large échelle le système de la généralisation et
de la synthèse, Alibert s’efforça de grouper et de rapprocher les
affections cutanées d’après les phénomènes généraux, les carac
tères communs et l'aspect d ensemble présentés par elles. C’était
là un véritable progrès. Malheureusement, cette classification était
trop spéciale et faisait des maladies de la peau un groupe patho
logique trop particulier, trop isolé, trop en dehors du grand
ensemble des maladies communes.
M. Hardy qui s’est toujours déclaré contre les idées anglaises,
— en ce qui a trait du moins à la pathologie cutanée, — adopta
l’idée d’Alibert et présenta dans ses Leçons sur les maladies de la
peau, une classification basée sur les mêmes principes que celle de
son illustre prédécesseur à l’hôpital Saint-Louis. M. Hardy ne
tarda pas à s’apercevoir du défaut, qu’à l’instar de celle d’Alibert,
présentait cette division des affections cutanées. « Pour ma p art,
« dit-il dans l’introduction de la Clinique photographique, après
« avoir fait comme les autres, et après avoir proposé une classifi« cation qui n'était ni meilleure ni pire que celles déjà indiquées,
« j’ai compris que le tort principal de tous les médecins qui se
« sont occupés de dermatologie avait été de vouloir faire une clas« sification spéciale pour les maladies cutanées, comme si ces
« affections étaient soumises à des lois autres que celles qui ré« gissent les maladies des autres appareils; et j’ai pensé qu’il y
n avait avantage à rentrer dans la pathologie, et à détruire ces
« idées de spécialités qui ne sont fondées sur rien de vrai ni
« d’utile. »
— 9 —
Se basant sur ce principe, M. Hardy divise les maladies de la
peau en onze classes :
4* Difformités congénitales ou acquises (lentigo, ichtyose, etc.);
2* Maladies inflammatoires (ecthyma, zona, etc.) ;
3° Maladies artificielles (éruptions occasionnées par le tartre
stibié, le copahu, etc.) ;
4* Maladies parasitaires (favus, gale, etc.) ;
5° Maladies gangréneuses (pustule maligne, furoncle) ;
6* Congestions de la peau ;
7* Hémorrhagies cutanées ;
8° Hypercrinies;
9° Névroses cutanées ;
10° Affections cutanées fébriles comprenant les fièvres érup
tives franches (rougeole, scarlatine, etc.), les pseudo-fièvres érup
tives (érysipèle, érythèmes généralisés) et les éruptions fébriles
(herpès fébriles, taches lenticulaires, etc.) ;
t f Les éruptions symptomatiques d’une maladie constitu
tionnelle comprenant les dartres , les scrofulides, les syphilides,
les éruptions pellagreuses , les léproïdes et les lésions cancéreuses
de la peau.
Cette manière philosophique et élevée d’envisager les choses
sera comprise de tous, car elle répond directement à ce besoin de
généralisation, à cette aspiration vers l’unité qui est un des carac
tères les plus tranchés de notre époque. Nous devons savoir le plus
grand gré au savant médecin de l’hôpital Saint-Louis, d’avoir fait
précéder une œuvre, dont la forme aurait pu le dispenser de tout
travail supplémentaire , d’une introduction conçue dans un esprit
aussi large.
El maintenant que nous avons payé un large tribut à la partie
scientifique de l’ouvrage, disons un mot des planches jointes au
texte, ou pour mieux dire des épreuves photographiques qui ont
été l’occasion et le prétexte du texte lui-même.
M. de Montméja a-t-il complètement atteint son but? Sans
aucun doute ses planches sont beaucoup plus achevées, beaucoup
plus fidèles que toutes celles qui avaient paru avant lui ; mais
donnent-elles une idée absolument exacte des diverses affections
cutanées? Nous n’osons pas l’affirmer. Pour l’étendue des lésions
locales, leur forme, leur saillie, leur aspect général, la ressemblance
est parfaite; mais il y a dans ces planches un côté faible, c’est la
couleur. Fixer par la photographie les couleurs d’un objet comme
on fixe son image, c’est là un problème que la science n’a pu
encore résoudre. M, de Montméja a donc du se contenter de
colorier aprèscoup les épreuves photographiques; et il a eu le tort,
suivant nous, de ne revêtir de la couleur que certaines parties de
�10 —
chaque planche. Ce procédé laisse toujours beaucoup à désirer.
En effet, il ne faut pas oublier qu’une imageobtenhe au moyen
de la photographie est perdue dans un jeu d’ombre et de lumière
formant un ensemble d’où ne ressort aucune couleur proprement
dite; cela se conçoit aisément puisque la photographie ne donne
que deux teintes, — avec des nuances plus ou moius nombreuses,
— le noir qui est en quelque sorte l’absence de toute couleur, et
le blanc qui est la somme, la résultante, la fusion intime et indis
tincte des couleurs diverses. Si l’on veut sur un ensemble pareil
faire ressortir par le coloris certaines parties du tout, on devra
nécessairement passer par une des deux extrémités suivantes : ou
bien reproduire, au moyen de la couleur, la teinte exacte de la
partie que l’on veut mettre en relief, et alors cette partie perdue
comme une sorte d’îlot coloré au milieu d’un océan d'ombres for
mera un contraste trop frappant avec les parties environnantes et
fera perdre à l’ensemble quelque chose de son exactitude et de sa
vérité; ou bieu procéder par tâtonnements et tâcher de trouver
une teinte q u i, tout en se rapprochant le plus possible de celle du
point que l’on veut faire ressortir, ne paraisse pas trop choquante
à côté des ombres photographiques, et alors, au lieu d’une repré
sentation exacte de la nature, on aura une sorte d’à-peu-près, c’està-dire une reproduction forcément incomplète.
C’est ce qui fait que toutes les photographies dont on se
borne à colorier quelques points isolés ont un aspect étrange. Les
planches de M. de Montméja ne sont point exemptes de ce défaut.
Mieux eût valu, croyons-nous, colorier la planche entière, ou à
défaut, se contenter de la simple empreinte photographique ;
l’ensemble y eût gagné dans les deux cas. Pour ne parler, par
exemple, que de la première livraison, sur la planche représentant
une femme atteinte d’impétigo de la face, les parties malades nous
paraissent revêtues d’une teinte jaune serin par trop accusée : la
syphilide pustulo-cruslacée, quoique d’un coloris plus exact que
l’impétigo, est cependant—pour un type de cette sorte d’accidents
syphilitiques — trop colorée en vert et pas assez brunâtre.
Que M. de Montméja veuille bien nous pardonner ces quelques
observations critiques. Les imperfections légères que nous venons
de signaler n’enlèvent rien au mérite de l’ouvrage non plus qu’au
talent de l’auteur, car elles résultent uniquement du procédé et non
de la main d’œuvre. Ce procédé qui a donné entre les mains de
l’ancien interne de Saint-Louis des résultats relativement très
satisfaisants, nous paraît, d’ailleurs, susceptible d’amélioration;
aussi, croyons-nous, que l’application de la photographie à l’étude
des maladies de lu peau est une innovation très heureuse. Dans le
livre de MM. Hardy et Montméja chaque planche, outre le nom de
l'affection qu’elle représente, porte celui du groupe dans lequel
rentre celle maladie, de sorte qu’en parcourant la Clinique pho
tographique, — surtout si l’on a eu le soin de lire auparavant
l’introduction de l’ouvrage, — on peut se faire une idée générale
très exacte de l'ensemble des affections cutanées.
Quand on songe à la difficulté que présentait autrefois le grou
pement de ces maladies, on ne peut qu’admirer les progrès faits
par la science et que remercier hautement les hommes q u i, à
l’instar de MM. Hardy et Montméja. s’efforcent de rendre à la
fois plus facile et plus attrayante l’étude de la médecine.
Dr Z è d e .
C hronique m ensuelle.
Marseille, 5 janvier 1868.
Elle a tristem ent fini, enveloppée dans son grand linceul blanc,
cette année 1867 si douloureuse pour le corps médical. Civiale,
R ayer,T rousseau, V elp eau ..., grands nom s disparus, personna
lités illustres rangées désorm ais au nom bre des souvenirs !.....
Parm i nous la m ort a égalem ent m o isso n n é, et récem m ent le
public se pressait en foule aux obsèques de l’un des doyens de la
chirurgie m arseillaise , M. le Dr Jacques Reym onet. M ort à l’âge
de 69 an s, cet honorable confrère laisse de profonds regrets
dans notre population qui appréciait à la fois chez lui les qualités
de l’homme et l’incontestable m érite du praticien.
A tous ces vides formés par la m o rt, il faut en joindre de
nouveaux occasionnés par diverses dém issions. Nous avons le
regret de m entionner parmi ces dernières, celle de l’un des
m em bres de notre E cole, M. le Dr B a rto li, qui occupait depuis
dix ans, la chaire de pathologie interne. Les élèves perdent en
lui un professeur consciencieux, dévoué à leurs intérêts, et dont
l’enseignem ent clair et précis dim inuait singulièrem ent pour eux
les obscurités de la m édecine. On le v o it, partout des vides !
L ’avenir pourra-t-il les com bler? Espérons en lui.
�C ependant, s’il ne fallait s’en rapporter q u ’aux résultats
fournis par le dernier concours d’in tern es, nous ne pourrions
nous défendre d’idées assez noires au sujet de la future g énéra
tion médicale. Autrefois, ces luttes pour l'internat étaient île
brillantes joutes dans lesquelles les vaincus, eux-m êm es, m éri
taient parfois les applaudissem ents de l’auditoire. Dans le con
cours tenu à l’Hôtel-Dieu au com m encem ent du mois dernier, le
résultat a été tout autre : à part une ou deux exceptions on peut
d ir e , sans craindre de dépasser la v érité, que les élus se sont
m ontrés peu dignes du nom de vainqueurs. Sans co n tred it, les
élèves de prem ière ou de deuxièm e année qui ont concouru ,
quelques jours plus tard, pour l’extern at, ont été, relativem ent,
plus brillants que leurs aînés. Il y a là un mal sérieux et nous
devons le signaler, quoiqu'il nous en coule, car il im porte d’y
porter au plus tôt rem ède.
La Commission adm inistrative de nos hospices exerce pourtant
sur les élèves une surveillance pleine de sollicitude. Nous n ’en
voulons pour preuve que les m esures prises par elle dans sa
séance du 5 octobre 1867, et portées depuis quelques jours à la
connaissance du public. A côté de détails un peu m in u tieu x , entre
autres ceux relatifs à la couleur des tabliers et au contenu des
trousses , le nouveau règlem ent renferm e d ’excellentes innova
tions : la feuille de p résen ce, par exem ple, tém oin sûr de l’assi
duité des élèves; la possibilité pour les internes qui se seront
fait rem arquer par leur bonne conduite de passer, après leurs
trois ans d’exercice, une quatrièm e année dans les hôpitaux;
la réglem entation des sorties du chef-interne. Cette dernière
m esure, inexécutable dans la p ratiqu e, est au moins très bonne
en principe. C’est quelque chose. On ne peut m alheureusem ent
en dire autant du chef-internat lai-m êm e.
Nous déplorions tout à l’heure la faiblesse des concours; nous
parlions de mal et de rem ède. L’un et l’autre sont désorm ais
connus de tous. L’Adm inistration des hospices aura d ’excellents
élèves lorsqu’elle aura supprim é le chef-interne. Hors de ce trai
tem ent essentiellem ent curatif, tous les efforts faits par elle, tous
les essais de réglem entation intérieure agiront uniquem eut à
titre de légers, de très légers palliatifs ; c’est là un fait reconnu
m aintenant de tous ceux qui sont désintéressés dans la question.
Nos honorables adm inistrateurs eux-m êm es nous on t fait l’hon
neur de tenir com pte, dans une certaine m esure, des idées que
nous avons exposées dans ce journal. Grâce à eux, les conditions
du concours pour le chef-internat ont subi une im portante m o
dification : les candidats ne peuvent plus être aujourd’hui doc
teurs en m éd ecin e, et les chefs-internes ne sont autorisés à
prendre leur diplôme que dans leur troisième année d'exercice.
Voilà déjà un grand point d’o b ten u , nous devons en savoir gré
à l’A dm inistration des hospices et nous espérons qu elle nous
donnera peu à peu satisfaction com plète.
Le grand évènem ent médical du mois a été la discussion so u
levée, à l’Académ ie de m édecine , sur la tuberculose, et le fait
saillaot de ces débats scientifiques e s t , on peut le dire , le re
m arquable discours de M. Pidoux. Voilà un terrible coup porté à
M. Villemin et à la doctrine de la spécificité. Nous parlerons plus
longuem ent de cette intéressante question lorsque la discussion
sera close.
Ne quittons pas l’Académie sans la féliciter de son dernier
vote pour l’élection d’un caudidat dans la section de pathologie
interne. La jeune génération médicale dont le nouvel académ i
cien, M. H érard, est un des plus brillants rep résen tan ts, possède
de très sérieuses qualités. Elle m anque parfois de m éthode,
mais on ne peut lui refuser l’am our du travail et le désir des
choses nouvelles ; aussi, l’Académ ie de m édecine v ien t-elle de
décerner dans sa séance solennelle du 17 décem bre 1807, outre
les prix Portai et C apuron, six autres prix ; quatre de 1000 fr.,
un de 2000 et un de 5000. Sur ces huit récom penses, six ont
été données à des confrères qui exerçent loin de Paris. Voilà un
résultat qui va stim uler les travailleurs ; voilà un fait qui prouve
la force de la province et doit nous encourager à com battre
�15
vaillamment pour la grande cause de la décentralisation in tel
lectuelle.
Ce u est point la ville de G renoble qui nous parait professer
un culte bien vif pour cette dernière idée. Nous applaudissons
de tout cœur à l'application du concours qui vient d ’être faite le
9 décembre dernier par 1 adm inistration des hôpitaux de cette
ville ; il est fâcheux seulem ent que le jurv ait été com posé de
professeurs de M ontpellier. Personne plus que nous ne rend
hommage à l’illustre et savante F aculté; mais enfin Grenoble a
une école de m édecine. Les honorables m em bres de ce corps
enseignant ne sont-ils pas dignes eux-m êm es de form er un jury
sérieux? Nous sommes sûr du contraire. Dès lors nous ne pou
vons que regretter l’infériorité de rang dans laquelle les adm i
nistrateurs Grenoblois viennent de placer le corps médical de
^eur ville. Ce n’est pas que nous blâmions l’intervention, dans
les jurys, d ’un ou deux m édecins appartenant à une ville étran
g ère; les jurys-m ixtes seraient, croyons-nous, une excellente
innovation ; mais nous voudrions que l’application de cette idée
devint générale et égale pour tous. Que les professeurs de Lyon,
de Bordeaux ou de Marseille , etc., fissent partie de jurys insti
tués à Paris, à Toulouse ou a M ontpellier, etc. ; q u ’à tour de rôle
les professeurs des Facultés vinssent dans les écoles de m éde
cine et vice-versâ, rien de m ieux; car il y aurait alors entre les
diverses villes une solidarité qui ne nuirait en rien à l’indépen
dance ou au développement de chacune d’elles. Ce qui nous
parait regrettable c ’e s t’ de voir une grande c ité , possédant
comme Grenoble une école de m édecin e, abdiquer isolément
son action propre, et cela au profit d’une faculté.
N ous ne voulons pas term iner notre chronique sans souhaiter
une bienvenue sincère à notre nouveau journal de m édecine.
L’article d elà rédaction placé en tête du prem ier num éro con
tient , à côté d’opinions discutables, des pensées auxquelles
s’associeront tous les esprits impartiaux et des vœux qui seront
formés par tous nos confrères de M arseille. N ous nous p erm et-
—
Irons cependant de faire une observation au Sud Médical. Il
nous sem ble q u ’en se présentant com m e répondant à une « né
cessité im périeuse, » le nouveau journal a tenu trop peu de
com pte de Y Union médicale de la Provence. N otre feuille entre
cependant dans sa cinquièm e année et toujours elle a courageu
sem ent com battu pour la science et les intérêts professionnels.
Il est certainem ent très heureux d ’avoir à Marseille deux
organes de publicité médicale, mais au moins faut-il rendre à
César ce qui est à César. L'Union de la Provence a le m érite
incontestable d avoir, la prem ière, réalisé cette idée considérée
longtem ps com m e une utopie: possibilité d’une vie active et
durable pour une feuille médicale exclusivem ent m arseillaise.
N otre journal a déraciné de vieux préjugés; il a ouvert large
m ent la voie et, grâce aux efforts du Sud Médical com binés
avec les nôtres, cette dernière, nous l’espérons, sera parcourue
avec un plein succès. Salut donc à notre frère cadet ! Nous
som m es heureux de le voir se joindre à nous. Son apparition
est un bien pour la science, c’en est un égalem ent pour notre
ville.
Si nous ne craignions pas de finir par une pensée trop grave,
nous proposerions à tous nos confrères de la presse m édicale,
d ’adopter avec n o u s , com m e d ev ise, cette phrase qui nous a
toujours paru grande et belle :
«
In necessariis unitas , in dubiis libertas, in omnibus carilas.
»
N ous traduirions volontiers ce précepte par les paroles sui
vantes, expression fidèle de notre pensée : Union et solidarité
entre tous les membres de la grande famille médicale, liberté
entière dans la discussion des principes, respect absolu des
personnes.
Dr S bux fils.
�5 e ANNEE.
NECROLOGIE
Le 20 décembre dernier est mort un des médecins les plus émi
nents de Marseille, le docteur Jacques Reymonet, chirurgien con
sultant des hôpitaux, chevalier de la Légion-d’Honneur Reymonet est le premier à Marseille qui ait employé l’éther comme agent
anesthésique ; il a soumis à la Société impériale de Médecine
quelques rapports judicieux et savants ; mais c’est surtout comme
praticien qu’il s’était acquis une grande et légitime renommée ;
son illustre ami Lallemand l’honorait d’une confiance particulière,
et il expira entre ses bras. Par l’aménité de ses manières, aussi
bien que par la dignité de son caractère, Reymonet s’était acquis
l’estime et l’afïection de tous. Ses confrères se sont rendus en
grand nombre à son convoi funèbre; mais, conformément à ses
dernières volontés, aucun discours n’a été prononcé sur sa tombe.
V ariétés
M. Bartoli, professeur démissionnaire de pathologie interne à
l’Ecole de Médecine, a été nommé professeur honoraire.
— M. le Dr Mittre a été nommé médecin du Dispensaire muni
cipal de la ville de Marseille, en remplacement de M. le Dr Ram
pai, démissionnaire.
— M. Michel Lévy a été promu au grade de Grand Officier de
la Légion-d’Honneur. C'est, jusqu’ici, le premier médecin mili
taire qui ait obtenu cette haute dignité.
— La souscription pour le buste de Trousseau a produit six
mille cent dix-neuf francs.
— On demande un Médecin pour le quartier de Saint-Louis
(banlieue de Marseille).
Le Comité de rédaction.
Marseille. — Impr. A rnaud, Cayer et C., rue Saint-Ferréol, 57.
UNION MÉDICALE
1868. .
//
—---- ■
Commission administrative de la Société locale
des Bouches-du-Rhône.
S éance du 2
janvier 1867.
— P résidence de M. S elx .
M. le Président fait part d’un entretien q u ’il a eu avec M. le
Procureur Im périal, au sujet des em piriques qui se livrent im pu
ném ent à l’exercice illégal de la m édecine. La Société locale des
B ouches-du-R hône , a dit cet ém inent m agistrat, p eu t-être
assurée que le concours des autorités judiciaires ne lui fera ja
mais défaut. Mais il im porte que les faits qui seront à la charge
des délinquants portent avec eux des preuves certaines de cul
pabilité. Plusieurs des individus précédem m ent signalés n’ont
pas été poursuivis parce qu ’il n ’y avait pas contre eux des
preuves suffisantes.
M. le président rappelle ensuite la délibération prise par le
Conseil général, et la réponse faite par M. le M inistre de l'inté
rieu r, au sujet de la future nom ination d’un président général à
la place du regrettable M. Rayer. D ésireux de connailre à cet
égard l’opinion de tous ses collègues du départem ent, M. Seux
se propose de les convoquer en Assem blée générale dans le cou
rant du mois de m ars. Devant se rendre lui-m êm e à Paris, a
l’époque voulue pour élire un successeur à M. Rayer, M. le
Président lient avant tout à connaître les vœux de tous les m em
bres de la Société locale des ‘B ouches-du-R hône sur celte élec
tion. La Commission adm inistrative partage entièrem ent l’opi
nion de M. Seux, et pense qu’une réunion générale sera d ’autant
plus opportune que, d ’ici à cette époque, chacun pourra s’occuper
de cette im portante question de la présidence, qui intéresse 'a
tous les points de vue la prospérité et l’avenir de l’Association.
M. le Secrétaire est prié de vouloir bien tenir la main a
l’observation du réglem ent, concernant les réunions m ensuelles.
�Il n est (jue trop vrai que la plupart des m em bres de la Commis
sion n’assistent pas h ces réunions dans lesquelles l'on traite des
questions d’une grande im portance.
M. le Secrétaire donne lecture d ’uue lettre de M. Amédée
Latour concernant la veuve et les entants d’un sociétaire décédu
dans le courant de l’année dernière. On se souvient que M. le
Président avait dem andé en faveur de cette famille si digne d ’in
térêt un secours au Conseil général, bien que déjà notre Com
mission administrative eût alloué une somme de -400 francs. O r,
M. Amédée Latour dem ande un état de la situation financière
de notre Société, et, de plus, quel serait le chiffre du secours
que le Conseil général pourrait accorder.
La Commission décide, en conséquence, qu ’il y a lieu de de
mander un secours de 500 francs. Prière est faite à M. le T réso
rier de vouloir bien faire connaître celte decision à M. Amédée
Latour.
M. le Secrétaire donne lecture d une lettre du Dr Jourdan, de
Mallemort. Ce confrère se plaint des mauvais procédés d’un offi
cier de santé qui, établi dans le départem ent voisin, vient visiter
des malades dans les B ouches-du-R hône, où il n ’a pas le droit
d’exercer, précisém ent au milieu de la clientèle du Dr Jourdan.
Ce dernier dem ande à l’Association si elle ne voudrait pas,
en appuyant une action civile intentée par lui, se faire allouer
des dom m ages-intérêts auxquels le délinquant pourrait être con
damné. Le D' Jourdan ne fait pas partie de l’Association ; mais
si, pour avoir son appui, il est nécessaire d’y être agrégé, il est
disposé à satisfaire à toutes les conditions de l’adm ission.
M. le Secrétaire est prié de vouloir bien répondre au D’ Jo u r
dan que l'Association ne peut rien pour le m om ent, mais qu elle
examinera ultérieurem ent les faits précités, dès que M. Jourdan
aura adhéré aux statuts de l'Association.
Un propriétaire de lE staq u e adresse une lettre par laquelle il
dem ande un jeune docteur pour le village de Saint-Louis. Un
avis sera inséré à ce sujet dans le prochain num éro de l’Union.
M. le Président fait part à la réunion d’un projet qui four
nirait d'im portantes ressources au journal Y Union médicale de
la Provence : il s'agirait de l’insertion des annonces; la question
des annonces ayant été déjà exam inée et adoptée dans l’A ssem
blée générale du 50 août 1804, la Commission adopte la propo
sition de M. le Président, et prieM . le T résorier de s’en occuper
en ne recherchant toutefois que les élém ents d ’une publicité
convenable.
La séance est levée.
Le Secrétaire,
Dr V illard .
É T I O L O G I E ET P R O P H Y L A X I E
DE3 MALADIES VÉNÉRIENNES
ou
Ùtude dos causes et des conditions anatomo-physiologiques qui permettent
la contagion, favorisent et entretiennent la propagation des maladies
vénériennes dans l’espèce humaine et des moyens prophylactiques à leur
opposer.
•t partie. — PHOPHVi.tXIE.
(Suite et fin
1)
Ce n ’est pas seulem ent par l’interm édiaire de la prostitution
publique patentée que se propagent les maladies vénériennes;
la prostitution clandestine est aussi, nous l’avons dit précédem
m ent, l’une des sources les plus fécondes de la contagion.
Q uels moyens em ploiera-t-on pour en arrêter les funestes
effets? Ces moyens sont nom breux, mais ils n ont quelque
chance de léussite qu'à la condition expresse d’être tous em
ployés sim ultaném ent et avec persistance.
Un des moyens les plus puissants, selon nous, de rendre la
(t)
Voir les numéros d’Août, Septembre, Octobre et Décembre.
�— 20 —
prostitution clandestine moins dangereuse pour la santé publi
que, consisterait à punir d une peine extrêm em ent sévère et sur
tout d’une amende considérable, l’homme convaincu d ’avoir
transmis sciemment l'une de ces m aladies vénériennes dont on
ne peut jam ais raisonnablem ent prétexter avoir ignoré la p ré
sence, tels que des chancres situés dans un endroit visible, ou
bien encore une urèthrite aiguë dont l’abondant écoulem ent
purulent trahit l’existence en l’absence même de douleurs très
vives. Cette pénalité, sévèrem ent appliquée sulïirait, nous en
sommes convaincu, pour faire réfléchir une foule d ’individus
sans conscience, qui ne se font actuellem ent aucun scrupule de
transm ettre volontairem ent à de m alheureuses fem m es, les m a
ladies vénériennes dont ils sont atteints.
Un autre moyen consisterait à inscrire à la p o lic e , et par
conséquent à soum ettre à des visites sanitaires régulières, obli
gatoires. toutes ces filles paresseuses et dissolues h toilettes
ridicules et insolentes qui fréquentent assidûm ent les bals p u
blics des grandes villes, traînent leurs vices en voiture, tandis
que de pauvres femmes honnêtes m archent à pied, et qui, sans
être patentées, n’en sont pas moins de véritables prostituées,
puisquen réalité elles n ’ont pas d ’autres réels moyens d exis
tence que le trafic qu elles font de leur corps.
Quant à ces pauvres filles que l ’on appelle des d em i-v ertu s,
à ces malheureuses ouvrières beaucoup plus â plaindre q u ’à
blâm er, qui se livrent â la prostitution, bien plus souvent par
paresse et vagabondage, à celles enfin qui bien que n ’étant cer
tes pas des modèles à donner aux femmes honnêtes, sont cepen
dant relativem ent sages et tranquilles, nous voudrions que, tout
en les surveillant de près, on fût pour elles plus indulgent que
pour celles dont nous venons de parler, et que loin de les forcer
par une intem pestive sévérité â s’enfoncer de plus en plus dans
le vice, on leur fournit au contraire tous les m oyens possibles de
ren trer petit à petit dans le sentier du devoir, en les m ettant â
même de vivre honorablem ent par les seules ressources de leur
travail.
— 21 —
Pour atteindre ce but, il faudrait encourager chez les fem m es,
les sociétés de secours m utuels, afin de leur perm ettre de lutter
contre les funestes conséquences de ce que l’on appelle la m orte
saison, afin d ’éviter â la jeune fille convalescente et sans
famille, la cruelle nécessité de livrer ses faveurs au prem ier
venu, après une longue et douloureuse m aladie, faute des res
sources nécessaires pour vivre jusqu’au jour où elle pourra enfin
se procurer un travail suffisam m ent rém unérateur. N ous vou
drions de plus, si cela était praticable, q u ’une loi défendit aux
hom m es l’exercice de certaines professions, qui devraient, su i
vant nous être exclusivem ent réservées aux fem m es, telles que,
par ex em p le: la vente des d en telles, des soieries, des fleurs
artificielles, de la lingerie et de la parfum erie ; enfin de tous les
articles de toilette pour femme et en fa n ts, etc. Nous voudrions
encore que l’on réservât form ellem ent aux fem m es, l’usage de
ces désastreuses m achines, inventées dans le but unique de
rem placer le travail manuel spécial propre â la femme : la brode
rie, la coulure, etc. Nous savons bien que de pareilles m esures
sont très-difficilem ent applicables, car elles apporteraient de
sérieuses entraves à la liberté du com m erce, de l’industrie; mais
il faut voir, avant de les rejeter tout à fait, si les in térêts de la
m orale et ceux de la santé publique, ne valent pas en som m e la
peine que l’on restreigne un peu cette liberté de com m erce, au
profil d elà pins m alheureuse et de la plus intéressante moitié du
genre hum ain.
Toutes les m esures de prophylaxie générale que nous venons
de passer en revue, s’adressent presque exclusivem ent h la popu
lation civile et spécialem ent féminine de la société ; il nous
reste, pour term iner le travail que nous avons entrepris, b
exposer ce qui a trait plus particulièrem ent a la partie militaire
de la nation.
D’après les réglem ents ém anés du m inistère de la guerre,
tous les m ilitaires à leur arrivée au corps et au m om ent de leur
libération définitive du service, doivent être soumis à la visite du
�— 23 —
médecin de ce corps. Ceux d ’entre eux qui sont reconnus
atteints de maladies contagieuses, vénériennes ou autres, sont
im m édiatem ent séquestrés, envoyés à l'hôpital ou à I infirm erie
et ne sortent qu après complète guérison. Les soldats et les
sous-officiers doivent également être visités toutes les fois q u ’ils
sab sen ten l tem porairem ent de leur régim ent pour aller en
congé. En dehors de ces cas particuliers, les soldats, caporaux
et brigadiers, doivent être soum is, une fois par m ois, ou plus
souvent si le chef de corps l'exige, à une visite générale sani
taire, instituée dans le but de découvrir ceux d ’entre eux qui
dissim uleraient les affeclious contagieuses et principalem ent les
maladies vénériennes dont ils sout atteints. M alheureusem ent
ces visites ne sont pas obligatoires pour les sous-officiers ; c est
là, il faut l'avouer, un oubli bien regrettable du législateur, oubli
dont les conséquences sont bien plus graves qu’on ne le su p
pose généralem ent. Tous les m édecins m ilitaires qui ont fait
pendant quelque tem ps le service dans les régim ents, savent en
ellel, aussi bien que nous, que c’est précisém ent dans ce grade
que les occasions de contracter les maladies vénériennes sont
les plus fréquentes et leurs atteintes par conséquent le plus
multipliées, et que beaucoup de ces sous-officiers dans la crainte,
plus ou moins fondée, de nuire à leur carrière en dévoilant la
vérité, font tout leur possible pour tenir secret leur fâcheux état
de sauté et continuent leur vie habituelle, donnant sans scru
pule la maladie dont ils ont atteints à toutes les femmes qu’ils
fréquentent.
Il est enliu une dernière prescription m inistérielle, qui enjoint
a chaque soldat de donner à l ’autoriré m ilitaire le nom et
l ’adresse delà femme qui leur a transm is une m aladie vénérienne
quelconque. Cette sage préemption est éludée la plupart du
temps par les soldats, soit qu’ils ne veulent pas, par des motifs
de délicatesse assez mal placée dans ce cas particulier, faire pour
ainsi dire le m étier de dénonciateur, soit, ce qui arrive le plus
fréquem m ent, parce qu'en réalité ils ignorent ce nom et cctt<-
adresse, n ’ayant le plus souvent vu la femme qui les a infectés
qu’une seule fois, et cela dans l'om bre de la nuit, sous une
grande porte, derrière un m ur, ou bien encore dans une maison
publique o ù le s femmes ont toutes des nom s im provisés dont
elles changent volontiers chaquejour suivant les besoins de la
cause.
Si l’on veut que les visites sanitaires réglem entaires imposées
aux m ilitaires présentent de réelles garanties à la santé publi
que, il faut qu elles soient passées au moins tous les quinze jours
et que tou?» les sous-officiers y soient soum is com m e les simples
soldats. Il faut qu elles soient passées nom inativem ent et non en
bloc, comme cela se pratique trop généralem ent : c’est le seul
moyen d’éviter que les individus intéressés à trom per la surveil
lance échappent au contrôle du m édecin. Q uant au côté essen
tiellem ent pratique, matériel et médical de la question, c’està-d ire à la m anière dont il doit être procédé dans ces visites,
nous allons exposer ici en détail ce que l’expérience nous a
enseigné à cet égard.
Le jour de la sem aine le plus favorable pour p ro céd era de
pareilles visites, nous a toujours sem blé être le samedi et voici
pourquoi : Le dim anche, jo u r qui suit le sam edi, est celui où les
soldats ont le plusla possibilité d ’useï ou d’abuser de leur liberté;
il est donc im portant de séquestrer dès la veille, ceux d’entre
eux qui pourraient en profiter pour nuire à la santé publique. Le
samedi offre encore cet avantege, c’est que ce jo u r-là les m ili
taires conservent encore la chem ise qu’ils ont portée toute la
sem aine et sur le devant de laquelle par conséquent, devront se
trouver, en plus grand nom bre qu’à tout antre jo u r, les taches
de pus produites par la b len n o rrh ag ie, la seule des maladies
vénériennes q u ’ils puissent espérer dissim uler en prenant la
précaution d ’uriner quelques instants seulem ent avant la visite.
Le local choisi pour procéder à ces sortes de visites devra,
autant que possible, être fortem ent éclairé dans l’une de ses
parties au moins. C’est là que se placera le m édecin, assis sur
�— 24 —
— 25 —
unechaise, le d o sto u rn é à la lum ière, de façon qu elle projette
en plein ses rayons sur le sujet qu’il s'agit d’exam iner.
Nous faisons généralem ent placer les hom m es sur un seul
rang, par batterie, escadron ou com pagnie. Nous conservons
près de nous, d’un côté le sous-otlicier, chef de cette portion du
corps, muni de la liste d'appel ; de l’autre côté se tient le capo
ral ou brigadier d’inlirm erie. Le sous-ollicier appelle chaque
homme par son nom et le fait passer devant nous ; il pointe avec
soin ceux qui m anquent pour un motif ou pour un autre et se
charge de nous les présenter le leudem ain m atin à notre visite ;
le brigadier d’infirmerie inscrit les observations que nous
croyons devoir faire et prend les nom s des hom m es reconnus
m alades; ces derniers sont, im m édiatem ent après la visite,
internés à l inûrm erie ou dirigés sur l’hôpital, suivant l’espèce
de maladie dont ifs sont atteints.
Chaque soldat doit se présenter devant nous dans la position
suivante : les m anches retroussées, le pantalon entièrem ent
déboulonné, les bretelles détachées , ce qui pour le dire en pas
sen t, n'est pas facile a obtenir d ’eu x ; le pan de la chem ise
relevé et retourné doit être étalé a plat sur le ventre et la
poitrine, afin de présenter sa face maculée. De cette m anière
on aperçoit, d'un premier coup d 'œ il, les taches que peut
présenter celte chem ise, la conform ation générale des organes
g én itau x , des aines du pénil et de la partie supérieure des
cuisses; on voit s'il existe sur ces parties des traces anciennes
ou des signes palpables, évidents, de maladie vénérienne ; enfin,
des parasites dans les parties recouvertes de poils. Ce rapide
examen une fois term iné, nous saisissons la verge avec le pouce,
l'indicateur et le médium de la main droite et nous repoussons
fortem ent le prépuce en arrière du g lan d , de m anière à m ettre
complètement à découvert la m uqueuse balano-prépuciale,
siège le plus habituel des ulcérations spécifiques ; puis, in tro
duisant la main gauche entre la partie supérieure des cuisses,
a la hauteur du scrotum , saus cesser de m aintenir avec la main
droite les organes génitaux, nous faisons glisser rapidem ent
la pulpe de l'indicateur gauche tout le long de la face infé
rieure du canal de l'u rèth re en com m ençant un peu en avant
(I l’anus et en rem ontant ju sq u ’à l’extrém ité du gland. De
cette façon, si le sujet a exam iner est atteint d’un écoulem ent
blennorrhagique et n'a pas eu le tem ps d’uriner im m édiatem ent
avant la visite, nous am enons infailliblem ent une goulelette
de pus à l’entrée du m éat urinaire.
Cette m éthode qui peut paraître un peu m inutieuse et com
pliquée au prem ier abord, devient vite familière et s’exécute,
lorsqu’on en a pris un peu l’habitude, en m oins de tem ps qu'il
n’en faut pour la décrire. C elle m anière de procéder, nous
sem ble bien préférable à celle qui consiste à passer devant les
soldats en exam inant a la distance de plus d ’un m ètre, comme cela
se fait bien souvent, la verge qu’ils vous présentent eux-m êm es
toujours fort mal 'a travers la fente de leur pantalon à moitié
déboulonne. Note/, que dans ce cas, ils ont toujours grand soin
de soustraire a vos regards les parties m alades, les ulcérations,
surtout quand elles siègent derrière la couronne du gland sur la
m uqueuse prépuciale, en la recouvrant com m e par hasard ou
m aladresse, avec la pulpe du pouce ou celle de l’indicateur.
Notre tâche est enfin term inée et si nous n ’avons pas réussi
à rem plir avec succès le program m e que nous nous som m es
im posé, on nous rendra du moins celte justice que nous l’avons
suivi avec conscience. N ous avons, en effet, successivem ent
passé en revue les causes nom breuses de la propagation des
maladies vénériennes ; nous avons essayé, chem in faisant, de
faire ressortir l'im portance spéciale de quelques-unes d 'entre
elles et d ’étudier, plus com plètem ent q u ’on ne l’a fait ju sq u ’à
présent, leurs divers m odes d ’action ; enfin, nous a\o n s décrit,
avec de grands détails, les m oyens prophylactiques destinés à
s’opposer à l’envahissem ent toujours croissant de ces affections.
Reste une dernière question. Quel sera le résultat final de ce
travail? R em plira-t-il le but pour lequel il a été en trep ris,
�c’est-à-d ire sera-t-il réellem ent utile. Nous le souhaitons de
tout notre cœ ur; mais, nous devons l’avouer, nous conservons
peu diffusions à cet égard. L’utilité pratique de pareils travaux
est en effet rarem ent bien grande. Cela tien t, en dehors du peu
de valeur intrinsèque q u ’ils peuvent avoir, à ce que peu de p e r
sonnes les lisent avec l'intention form elle, bien a rrê té e , de
m ettre en pratique les préceptes qu ils renferm ent, et ensuite à
ce qu’ils ont à lutter contre la paresse, l’insouciance des uns, les
préjugés et la routine des au tres; c’est, on l’avouera, beaucoup
plu sq u ’il n en faut pour expliquer leur habituel insuccès.
DE L’ARSÉNIATE D’ANTIMOINE
DANS L’EMPHYSÈME VÉSICULAIRE DES POUMONS
\ o u v e l l e É t u d e s u r lu ll<m ication a r s e n i c a l e
P vr le Dr Ch . ISNARD ( de Marseille ).
( Suite *).
M. Villemin a étudié avec beaucoup de soin l’anatom ie patho
logique et l’évolution de l’em physèm e ; il en a déduit une théorie
plus générale, plus com plète et plus satisfaisante à laquelle nous
n ’hésitons pas de nous rallier.P our lui, l’em physèm e cesse d être
une altération purem ent m écanique, un sim ple accident du ca
tarrhe ; il devient une véritable maladie, affectant le parenchym e
pulm onaire, et ayant ses processus pathologiques, com m e la
pneum onie et la tuberculose ; il débute par une altération des
parois de la vésicule, par une lé»ion toute vitale de ses élém ents,
d'où procéderaient ( agrandissem ent des alvéoles, la perte de leur
vascularisation et de leur élasticité , leur déchirure et leur des
truction.
Selon ce m icrographe , la lésion anatom ique prim itive, essen(1) Voir le» numéro» de Novembre, Décembre et Janvier.
tielle caractéristique de l’em physèm e pulm onaire porte sur les
noyaux conjonctifs enferm és dans les espaces intercapillaires
Elle consiste dans l’augm entation de leur volum e, dans une
sorte d'inflam m ation chronique. Ces noyaux hypertrophiés sont
dissém inés en nom bre variable : sur une m êm e vésicule, on en
trouve à divers degrés de développem ent, en sorte q u ’on peut
suivre les diverses phases de ce processus pathologique.
En s’hypertrophiant, les noyaux ont des effets faciles à prévoir.
Ils écartent les capillaires, agrandissent leurs m ailles, produisent
ainsi l’extension de la m em brane vésiculaire et l’augm entation
de la capacité de l’alvéole. Quand plusieurs noyaux voisins s’hvperlrophient sim ultaném ent, ils se rap p ro ch e n t, se to u ch en t,
com prim ent les vaisseaux interposés h eux , les atrophient et les
réduisent souvent à des débris im perm éables. En m êm e tem ps,
la couche de fibres élastiques est d isten d u e, tiraillée, rom pue;
les forces expiratrices se trouvent ainsi dim inuées; l’air pénètre
donc, sans o b stacle, dans les vésicules m alad es, y séjourne,
les m aintient dans un état d’insufflation forcée qui vient encore
paralyser leur action, tout en donnant aux parties em physém a
teuses leur volum e exagéré et leur aspect caractéristique.
Tel est le prem ier degré de l’em physèm e vésiculaire. D ans le
deuxièm e, l’évolution du processus m orbide c o n tin u a n t, il
survient des altérations plus profondes, plus graves, des d éso r
dres irréparables. Les noyaux se g ra n n le n t, subissent la tran s
form ation graisseuse, sc nécrobiosent et tom bent, laissant à leur
place des pertuis dont le nom bre va se m ultipliant sans cesse.
Les capillaires atrophiés et les faisceaux de fibres élastiques
rom pus, apparaissent souvent sous form e de filaments flottants.
D’ailleurs, à la suite de ces changem ents p ath o lo g iq u es, les
parois vésiculaires devenues plus friables n ’opposent plus de
résistance suffisante aux pressions intra-lhoraciques. La toux ,
les efforts viennent secondairem ent aider à la déchirure des
cloisons. Celles-ci s’é m ie tte n t, pour ainsi dire lentem ent, su c
cessivem ent, laissant plusieurs cellules largem ent com m uniquer
en tre elles.
�Ces désordres peuvent atteindre les vésicules centrales d’un
lobule ou bien celles de la périphérie. Si l’une de ces vésicules
lim itrophes subit b lésion caractéristiq u e, elle se perfore et
perm et à l'air de s ’infiltrer dans le tissu conjonctif interlobu
laire. Voilà com m ent l'em physèm e vésiculaire et l’em physèm e
interlobulaire ont la même origine , et com m ent ils existent
souvent ensem ble. Villemin, loc. cit., p. 066 e tsu iv .)
Les lésions de l’em physèm e ont une rnarehe lente et une
étendue variable ; elles peuvent occuper les deux poum ons, être
lim itées à l’un de ces organes et mêm e à un seul lobe ; elles sont
d autant plus prononcées que les individus sont plus âgés ou la
maladie plus ancienne, l es vésicules acquièrent leur maximum
de développem ent vers le som m et et les bords tranchants des
poum ons; elles paraissent s accroitre de I intérieur à l’extérieur
des lo bules, de sorte que les vésicules centrales sont déjà d é
truites, tandis que les périphériques sont encore intactes. L al
tération est très irrégulièrem ent et très diversem ent rép artie;
elle n'est uniform ém ent distribuée ni dans une m ême vésicule,
ni dans les vésicules d ’une m êm e lobule. On trouve à la fois
sur le m êm e individu des lésions à toutes les périodes, soit au
prem ier d eg ré, soit au second ; ici, des désordres légers ; là ,
des désordres g iaves; plus loin , une destruction com plète.
Action de l arsenic
sir la dyspnée et les lésions de l ' em
physème PROPREMENT DIT ; PBEIVBS DIRECTES ', analogie THÉRA
PEUTIQUE. — Ce 11’estp as sans m otif que j ’ai rappelé la stru c
ture de la vésicale pulm onaire et la physiologie pathologique de
l’em physèm e. Ces détails som m aires étaient indispensables,
m algré une certaine étendue. Ils vont perm ettre de suivre les
modilicaiions qu apporte l’arsenic non seulem ent sur les tissus
élém entaires du po u m o n , mais encore sur les divers tissus,
sur les divers processus sains ou m orbides de l’économ ie; eu
d'autres term es ils feront com prendre le rôle et l'efficacité
Ju m édicam ent dans I em physèm e, dans la plupart des autres
affections du poumon et dans une série de maladie très diffé
rentes.
Le sym ptôm e à la fois le plus saillant et le plus constant de
l’em physèm e est la dyspnée, avec sa physionom ie caractéristique.
Celte dyspnée est la conséquence même des lésions que nous
avons signalées plus haut, les phénom ènes s’enchaînant ainsi :
hypertrophie des noyaux conjonctifs intercapillaires ; atrophie des
vaisseaux ; affaiblissement des fibres élastiques ; raréfaction et
destruction des parois vésiculaires; affluence moins g ran d e,
dans le poumon , du sang et de l’air nécessaires à l’hém atose ;
résultat définitif, dyspnée.
O r, l’arsenic agit efficacement sur la dyspnée de l’em physèm e.
Donc, il rem édie aux lésions vésiculaires qui l’ont engendrée.
T elle est la conclusion nécessaire. Exam inons.
L ’action de l'arsenic sur la dyspnée des em physém ateux est
un fait clinique des plus certains, quels que soient la préparation
ou le mode d’adm inistration usités. Elle avait été constatée,
depuis longtem ps par Trousseau , avec les cigarettes arseni
cales (I) ,et plus lard par Cahen, avec la solution d ’acide arsé
nieux (2). Je l’ai m oi-m êm e souvent vérifiée soit avec les
cigarettes d'arséniale de soude , soit avec l’acide arsénieux ou
l’arséniate d antim oine. Par ces divers m oyens, le résultat défi
nitif est le m êm e. Cependant, il convient d’établir des différences
im portantes suivant le mode d’adm inistration. A insi, grâce à la
rapide absorption par la surface pulm onaire, les effets des ciga
rettes sont im m édiats, mais en mémo tem ps de courte durée et
sim plem ent palliatifs. Ceux des préparations ingérées dans l'es
tomac sont au contraire plus lents, mais beaucoup plus durables»
e t, en défintiive, plus ou moins curatifs. Peut-èlre, les prem iers
seraient-ils eux-m êm es aussi persistants et aussi complets que
(1) Bulletin général de thérapeutique, 1841. tome XX, p. 130.
(2) De l'acide arsénieux dans le traitement des congestions qui accompagnent
certaines affections nerveuses (Cahen Archives générales de médecine, septembre
1803, p. 270 )
�les au tres, si l’on arrivait à appliquer plus m éthodiquem ent les
inhalations arsenicales.
D ailleurs, rem arquons-le , cette action de l'arsenic s’étend à
toute dyspnée quelle qu’en soit l’origine. Q ue ce symptôme soit
essentiel ou lié b une affection organique des poum ons , qu ’il se
rapporte à 1asthm e nerveux, b I angine de p o itrin e, b l’em phy
sème vésiculaire, au catarrhe pulm onaire, b la p h th isie, dans
tous les cas la gêne respiratoire , atténuée ou suspendue, subit
une modification rem arquable.
Mais com m ent, dans l’em physèm e, l'arsenic arrive-t-il a ce
résultat? Quels changem ents im prim e-t-il au tissu pulm o
naire (1 ) ?
Pour résoudre la question, il suffira de reprendre et d ’analyser
les deux exemples précédents, c ’est-à-dire de com parer les effets
des cigarettes et des autres préparations arsenicales, et d ’en
signaler les différences capitales ; dans ce parallèle, on n ’oubliera
pas, bien entendu, que les poum ons em physém ateux contien
nent b la fois des vésicules saines et des vésicules malades b tous
les degrés, depuis la plus légère altération, ju sq u ’à la d estru c
tion complète des cloisons.
(La sut le au prochain numéro.)
0
1) L’arsenic ne borne par son action aux organes intrinsèques de la respira
tion. aux vésicules pulmonaires, il l’étend également aux organes extrinsèques,
aux muscles inspirateurs et expiraleurs, aux intercostaux, au diaphragme. Il
constitue un puissant moyen d’augmenter l’énergie musculaire. Cette propriété
est bien connue. C'est par là qu'il donne une plus grande aptitude la marche,
et qu’il contribue à rendre la respiration plus facile, plus complète. Toutes les
fois qu’on voudra étudier à fond ses effets multiples sur la respiration, on n'ou
bliera pas celle influence indirecte. Je la signale ici, sans m’y arrêter davantage,
mon but principal ayant été Je démontrer l'action du médicament sur le poumon
proprement dit.
à
C orrespondance.
.4 Messieurs les Membres du Comité de Rédaction de
/ 'U n io n M e d i c a l e d e la P r o v e n c e .
M essieurs,
Dans voire num éro de décem bre, vous avez publié une lettre
de M. le Dr Seux fils. Mon jeune et honorable confrère cherche
a justifier sou article sur l’avenir du chef internat dans les hôpi
taux de M arseille, et b ce propos, faisant allusion b un incident
de la dernière assem blée de l’Association m édicale des Bouchesd u -R h ô n e, il écrit : « Un de m es honorables confrères a blâmé
la publication, dans voire jo u rn al, de mon article sur le chef
in tern at, et la discussion soulevée b ce propos s’étan t prolongée
b la suite de la séance, quelques paroles regrettables ont été pro
noncées. Je n ’insiste pas sur la question de convenance, mais je
trouve réellem ent inconcevable l’opinion m anifestée par cel
honorable confrère. Celui-ci, en effet, ne jetait point le blâme
sur la forme de mon article, mais sur le fait m êm e de la discus
sion , accusant l 'Union médicale de la Provence d ’avoir porté
une main sacrilège sur l’arche saiule du chef-internat. »
Bien que je ne sois pas nom m é dans cette le ttre , comme
s e u l, au sein de l’assem b lée, j ’ai appelé l’attention de m es con
frères sur cet article, je suis trop clairem ent désigné pour ne pas
t
avoir le droit et le devoir de répondre, et j ’ose espérer que vous
accueillerez ma réponse avec bienveillance.
Rétablissons d ’abord les faits :
Q uelques mois avant la réunion de f A ssem blée de l’Associa
tion m édicale, M. Seux fils avait publié un article sur l’avenir du
C hef-internat, dans lequel il déclarait que cette institution était
�— 35 —
mauvaise sous lous les rapports. Cette publication coïncidait
avec certains bruits d ’après lesquels il y avait lieu de croire que
l'Adm inistration des hôpitaux, suffisam m ent édifiée, allait réta
blir le C hel-interuat un m om ent délaissé à titre d'expérience.
M. Seux avait écrit son caveant consules avec une vigueur q u 1
tém oigne hautem ent de ses convictions su r ce sujet. Ancien
Chef interne, j ’avais été vivem ent et tristem ent im pressionné par
celte appréciation d une institution a laquelle je dois une posi
tion honorable et pour laquelle j'ai une affection que je ne crains
pas d ’avouer parce qu elle est légitim e. J’avais deux m oyens de
traduire mes hum bles sentim ents : 1° la réfutation dans le
journal qui avait inséré l’attaque ; 2 ° la dem ande d’explication
au Comité de réd actio n , au sein de l'A ssem blée générale de
l’Association. Je m ’arrêtai à ce dernier moyen parce qu’il me
paraissait devoir être m oins bruyant. D onc, au sein de l'A ssem
blée, j ’ai exprim é le regret que le Comité ait publié, sans réser
ves, l’article de M. Seux fils. Je me fondais sur ce que la sanction
du Comité, qui représente l'A ssociation générale, donnait à cette
critique une plus grande portée, qu elle avait surtout l’inconvénient de faire je te r . par l'A ssociation, la défaveur sur une insti
tution chère a plusieurs m em bres. Je concluais en dem andant
que dorénavant, en pareille o ccurren ce, le Com ité eût le soin,
pour dégager la responsabilité de l’A ssociation, de déclarer per
sonnelles à l auleur les idées développées par lui.
En quoi, ju sq u e -là, ai-je excédé m es droits ?
L im o n médicale n ’est-elle pas publiée sous les auspices de
l’Association locale des m édecins du d épartem ent, et sous la di
rection d un Comité de rédaction pris au sein de la Commission
adm inistrative de cette Société ? Dès lors le Comité n 'est-il pas
m andataire de l’Association, et chacun des m em bres n a-t-il pas
le droit de dem ander, en Assem blée g én érale, des explications
sur la m anière dont il accomplit son m andat? Ai-je fait autre
chose? Cela explique-t-il de ma part une négation quelconque
du principe de libre discussion? N ullem ent. Je me suis plaint de
l’usage et de l’application qu'on avait fait de ce principe en pu
bliant une sortie vigoureuse contre une institution qui est une
des gloires de M arseille, et dont on ne saurait, sans injustice,
m éconnaître les incontestables services. On ne m 'am ènera jam ais
à reconnaître la convenance de cette publication. O r, la critique
peut s'exercer sur la convenance et l à propos des appréciations,
sur les argum ents produits, sur leur form e. Mon observation
générale n ’était-elle pas une appréciation de l’article de M. Seux
qui veut bien reconnaître dans sa lettre m es droits à le réfu ter?
Il avait critiqué l’institution du C hef-internat; je l’ai critiqué
d'avoir osé le faire ; j ’ai critiqué le Comité de l’avoir laissé faire.
N 'avons-nous pas procédé l’un et l’autre en vertu du droit de
libre discussion si fortem ent invoqué ? Q u'y a-t-il d ’inconce
vable? A bsolum ent rien, si ce n ’est I inutile tocsin sonné par
mon contradicteur.
J ’aborde m aintenant un point plus délicat.
Je n ’insiste pas sur la question de convenance, dit M. Seux.
C’est assez habilem ent insinuer qu’on y a m anqué; surtout quand
on vient d écrire, dans les lignes précédentes, que des paroles
regrettables ont été prononcées. Q uelles sont donc ces paroles ?
Je n ’ai pas besoin de les cacher au public pris pour juge.
Après la réunion, au m om ent où je sortais, M. Seux vint à
moi pour m ’affirmer de nouveau ses droits d écrire et de publier
son article. Il va sans dire que je ne les contestai point, mais je
déclarai nettem ent q u ’à m on avis cette publication était un acte
d ’une haute inconvenance.
C ’est ce qui a fourni à mon honorable confrère cette jolie
phrase :
« En tous cas, je ne crois pas q u ’il soit permis à personne
de déclarer acte de haute inconvenance la libre discussion d'un
principe. »
J ’avais toujours cru que le C hef-internat était une institution
et non un principe, je le crois encore. De plus, sans considérer
cette institution comme une arche sainte, je la crois digne de
�— 54 —
quelques égards et j ’ai rempli le devoir de le rappeler à ceux qui
fo n t oublié.
Quant à l’expression dont je me suis servi, elle n’était dans sa
vivacité que le retlet de l’attaque. Je suis étonné que M. Seux ne
la trouve pas naturelle dans la bouche d ’un ancien chef-interne.
Suppose-t-il donc qu’ils n ’ont pas de cœ ur les chefs-internes !
En tous cas il m ’était bien permis de le détrom per.
Lorsque M. Seux nous aura donné son nouvel article qu’il
nous promet sur ce sujet ; lorsqu’il me sera perm is de juger sa
pensée toute e n tiè re . j ’ex p o serai, a mon tour, ma m anière de
voir sur cette grave et intéressante question ; et j’espère , a lo rs ,
dém ontrer aux esprits libéraux et amis du progrès, a tout le corps
médical, à tous les rédacteurs de la presse du Nord et du Sud
auxquels on a fait un singulier et inutile appel, que mon opinion
vaut celle de mon confrère, si elle n ’est pas m eilleure.
Je ne puis quitter la plume sans exprim er à mon honorable
confrère, combien me parait regrettable la déterm ination q u ’il
a prise de faire confidence au public, avec une mise en scène
aussi exagérée, de ces détails d’une affaire déjà débattue en fa
mille. Je suis surpris que le Comité de rédaction ne l'ait pas
arrêté sur cette pente du mauvais exem ple. Quel est le lecteur
sérieux qui pourra croire à toute celte fantasm agorie d ésin térêts
scientifiques et professionnels com prom is, de cette liberté défen
due pour tous?
En vérité, je ne croyais pas avoir com prom is tant de choses
en si peu de temps et avec si peu de m ots ; et je ne crois pas que
la dignité professionnelle ait gagoé quelque chose à la lettre de
mon honorable confrère.
Jusqu’à ce jour, j ’ai fait mieux que de rédiger des phrases sur
les intérêts professionnels et sur la liberté : J ’ai fait établir, pen
dant mon C hef-internat, le concours à l'H ôlel-D ieu pour les
places de médecin et chirurgien des hôpitaux ; j ’ai abandonné
dernièrem ent une place qui me rendait seize cents fran cs, e t,
dans l’Assemblée générale, j ’aidéfendu une fraction bien délaissée
du corps m édical, les m édecins du Bureau de bienfaisance.
Je vous prie, M essieurs, de vouloir bien insérer ma lettre dans
votre prochain num éro et d agréer l'expression des sentim ents
respectueux avec lesquels
J ’ai l’honneur d’ê tr e ,
Votre dévoué serviteur,
Dr
Louis
R am pai .,
Professeur-adjoint à l’Ecole préparatoire de médecine.
Le Comité de rédaction a pour règle d^ conduite d ’ouv rir in
distinctem ent, sur une question quelconque, ses colonnes à
toutes les opinions et de laisser aux auteurs pleine liberté et
toute la responsabilité de leurs écrits. C’est ainsi que, sur la
question du ch ef-in tern at, après avoir inséré l’article fort conve
nable de M. le Dr Seux fils, il a publié in extenso la lettre de
M. le Dr Rampai ; mais il n ’entend pas plus se rendre solidaire
des opinions soutenues par M. Seux dans le cours de son travail,
que partager la responsabilité de toutes les assertions émises par
M. R am pai, dans les derniers alinéas de sa lettre. Au sujet du
chef-internat, le seul désir du Comité c’est que, si la discussion
doit continuer sur les avantages et les inconvénients de l’insti
tution, elle ne se prolonge pas davantage sur le terrain des per
sonnalités.
(Noie du Comité de rédaction.)
�— 37 —
— 36 —
Bulletin thérapeutique.
TRAITEMENT DU TÉNIA. — TROUSSEAU.
Premier jour. — Diète lactée.
Deuxième jour. — Le matin à jeun, quatre grammes d’extrait
élhéré de racine de fougère mâle en quatre doses, avec un quart
d’heure d intervalle.
Troisième jour. — Quatre grammes du même extrait pris de
la même manière; un quart d’heure après la quatrième dose,
cinquante grammes de sirop d'éther en une fois; une demiheure plus tard, un looch gommeux avec addition de trois gouttes
d’huile de croton tiglium.
C hronique m ensuelle.
Marseille, 5 février 1868.
S’il faut eu croire un de nos dictons populaires, le Mistral,
Parlement et la Durance, étaient autrefois les trois fléaux de
la Provence. Devons-nous mettre sur le compte de notre grand
souffleur l’afTreuse avalanche de grippes, angines, pneumonies,
catarrhes sous laquelle nous sommes ensevelis depuis deux mois ?
Si oui, malgré son ancienne origine le vieux dicton est toujours
jeune — au moins pour ce qui regarde le Mistral, — et le mot
fléau est encore trop doux pour désigner la cause de tant de mé
faits. Depuis longtemps nos salles d’hôpital n’avaient pas été
envahies par un pareil déluge de maladies thoraciques. On trou
verait facilement au milieu d’elles quelques beaux échantillons de
ces pneumonies à forme peu inflammatoire, à marche lente, cédant
mieux à l'ipéca qu'aux antiphlogistiques, et que l’école de Mont
le
pellier a désignées depuis longtemps sous le norn de pneumonies
catarrhales.
Si au moins cette poussée d’affections aiguës laissait enrepos
les maladies chroniques. Mais poiDt : celles-ci, au contraire, s’en
acerbent et se terminent parfois d’une triste façon ; témoin notre
bien regrettré confrère le Dr Fraissines, décédé il y a quelques
semaines, à un ûge où l’homme, dans toute la plénitude de la vie,
jette d’ordinaire sur l’avenir un regard assuré. Hiver rigoureux
entre tous, rude aux pauvres comme à ceux qui ne peuvent échan
ger leur fortune contre la santé, nous n’oublierons pas que tu
nous a enlevé Heymonet et Fraissines, c’est-à-dire deux représen
tants de l’ancienne et de la nouvelle école, deux des membres les
plus distingués de notre corps Médical marseillais.
Nous ne sommes pas les seuls à nous plaindre de la constitulion
médicale. À Paris, nos confrères de l’hôpital Saint-Antoine et de
la Pitié viennent de se trouver aux prises avec une épidémie de
fièvre puerpérale dont M. Lorain a pris texte pour faire, dans une
des séances de la Société médicale des hôpitaux, une vigoureuse
sortie contre les Maternités. Sterne disait que, chacun dans ce
monde, a son dada, et il raconte très-plaisamment que celui de
l’oncle Toby consistait à élever, dans un jardin, des places fortes
pour les assiéger et les détruire ensuite sans pitié. Le dada de
M. Lorain — cette expression dans notre pensée n’a rien que de
très-sérieux — est la destruction...... des Maternités. Le jeune
professeur a signalé, avec cette chaleureuse conviction que tout le
monde lui connaît, le danger qui résulte pour les femmes en cou
ches de la réunion, dans un même lieu , d’un certain nombre
d’entre-elles, et cela malgré les meilleures conditions hygiéniques.
Certes, ce dada-là est permis plus que tout autre, car il est essen
tiellement utile et basé tout entier sur l’amour du bien.
Si l'encombrement des femmes dans les Maternités est une
calamité réelle, l’agglomération des élèves dans les cliniques
d’accouchement est par-contre fort désirable. Ce dernier fait ne
s’est jamais présenté à Marseille, par l’excellente raison que nous
ne possédons point ici de clinique obstétricale. Cet enseignement
est pourtant presque obligé dans une ville comme la nôtre. Espé
rons que nous ne l’attendrons plus longtemps et que nous l’aurons
�— 38 —
dans des conditions qui lui permettront d’être facilement accessible
aux élèves.
Un tiens vaut mieux que deux u l’auras. Aussi, les promesses
de l’avenir ne nous empêcheront-elles point de nous réjouir vive
ment des conquêtes du présent. Par un arrêté du 31 décembre
dernier, deux chaires nouvelles ont été instituées à Marseille, pour
la Physiologie et la Chimie médicale. Désormais, l’élude des
organes sera, dans notre école de médecine, complètement dis
tincte de celle des fonctions, et le même professeur n'enseignera
plus à la fois la chimie et la pharmacie. C’est là un véritable pro
grès que nous signalons avec joie.
La discussion sur la tuberculose passionne toujours les esprits
au sein de l’Académie de médecine. La savante Compagnie se
prononcera-t-elle en fin de compte pour ou contre M. Yillemin ?
Voilà ce qu’il est encore difficile de dire. Toutefois, on peut voir dès
à-présent que l’inoculation du tubercule, en tant qu’inoculalion
virulente, ne parait point compter de nombreux partisans dans la
première Société médicale de France. MM. Chauffard et Pidoux se
sont franchement déclarés contre M. Villemin. M. Béliier, dans son
discours plein de verve et de spirituelle originalité, ne s’est point
montré aussi absolu ; mais il repousse cependant, au moins jus
qu’à nouvel ordre, l’idée d’un tubercule inoculable et virulent.
Quant à M. Hérard, quoique très-favorable à M. Villemin, il a
pourtant fait ses réserves, et tout en se prononçant pour l’inocula
tion du tubercule, il a attribué, dans la production de la phthisie,
une large importance au terrain, c’est-à-dire à la nature propre
du sujet inoculé. On le voit, l’accord n’est point unanime. Adhùc
subjudice lis est. Attendons le nouveau discours de M. Chauffard
et la réplique de M. Pidoux.
Une discussion moins générale et moins longue, mais non
moins intéressante a été soulevée, à la Société de médecine de
Marseille, à propos d’un rapport de M. Queirel sur YElëphantiasis.
La compression des vaisseaux sanguins alimentant le membre
malade ne peut-elle pas être employée dans cette affection ? Doiton préférer à la compression la ligature? Est-on en droit d’attendre
de l’un ou l’autre de ces deux procédés la cure radicale de la
maladie ? Telles sont les principales questions qui ont été exami
nées par notre Société de médecine. Plusieurs orateurs ont pris la
parole. Nous résumerons les opinions diverses émises dans la
discussion en disant que l’éléphantiasis d’Europe est très-différent
de celui des pays chauds : que, dans ce dernier, attendu la gravité
des lésions, la compression ou la ligature restent le plus souvent
sans effet, surtout sans effet réellement curatif; mais que ces
moyens peuvent être tentés avec quelque chance de réussite dans
l’élépbantiasis d’Europe, surtout lorsque la maladie est prise dès
le début.
Voilà au moins des sujets qui ont été sérieusement approfondis
et retournés sur toutes leurs faces. La question du chef-internat
n’a pas été jugée digne du même honneur. Les lecteurs de YUnion
médicale de la Provence, qui aiment assez d’ordinaire à se rendre
compte de tout, auront été surpris sans nul doute de ne voir per
sonne leur faire connaître le pour de celte question. — Si toutefois
ce pour existe — après que nous en avions nous-même longue
ment exposé le contre. Nous aimons autant qu'eux la lumière et
la vérité, aussi, regrettons-nous bien sincèrement que, sur le ter
rain de la discussion, le principe du chef-internat n’ait trouvé a
Marseille aucun défenseur.
Dr Seux fils.
Nécrologie.
Le Corps médical de Marseille a fait une perte des plus
regrettables dans la personne du Dr Fraissines, décédé le 20
janvier à l’âge de 40 ans. Laborieux et instruit, homme d ’intel
ligence et hom m e de cœ ur, Fraissines était parvenu à une belle
position. Les discours de MM. Seux et Villard ont été l’expres
sion fidèle du deuil que sa m ort a produit dans notre famille
médicale.
�5 e ANNÉE.
N ouvelles et V ariétés.
Deux concours vont avoir lieu à l'H ôtel-D ieu de Marseille ; le
prem ier com m encera le 15 juin, pour une place de chirurgienadjoint, et le second s'ouvrira le 22 juin pour une place de m édeein-adjoint. Nous publierons dans notre prochain num éro les
conditions de ces concours.
— Le Conseil général de l’Association des m édecins de
France vient, sur la dem ande de M. le président S eux, d ’allouer
une somme de 400 francs a la veuve d’un confrère pour laquelle
pareille somme avait été volée par la Société locale des B ouchesdu-Rhône. Cet exemple prouve plus que bien des paroles et
rutililé. de l’Association générale et l’intim ité des {liens qui unis
sent son Conseil général aux sociétés locales.
— A 1 Ecole de médecine de Marseille une chaire de physio
logie et une chaire de chim ie médicale ont été créées ; M. Bertu lu s , professeur-adjoint de clinique interne , a été nom m é
professeur de pathologie, en rem placem ent de M. Bartoli, nom m é
professeur honoraire; M. F abre, suppléant pour les chaires de
pathologie et clinique médicales, a été nom m é prolesseur-adjoint
de clinique interne, en rem placem ent de M. Bertulus.
( La Rédaction.J
Marseille. — lmp. Axnaad, Cayer et Comp., rue Saint-Perréol, 57.
UNION MÉDICALE
1868.
IN TÉ RÊ TS P R O F E S S I O N N E L S
De r u * * i* ( u u c e m é d i c a l e g r & i u l t c d e * I n d ig e n t*
d an * le* cam pagnes.
L ’assistance m édicale gratuite, tant dansles villes que dans les
cam pagnes intéresse au plus liant degré l’adm inistrateur, le phi
lanthrope et le m édecin : c’est par ces trois poinis de vue que le
Conseil général de l’Association générale des m édecins de
France a été guidé, lorsqu’il a mis a l’ordre du jour l’étude de
celte question. A cause de l’étendue du sujet et de la diversité
des m oyens h em ployer, suivant qu ’il s’agit des villes ou des
cam pagnes, l’Association ne s’occupe aujourd’hui que de ces
d ernières,
Ayant fixé mon attention sur ce sujet, en vue oe la prochaine
A ssem blée générale de Paris, j ’ai cru pouvoir être agréable aux
lecteurs de l'Union médicale de la Provence, en leur faisant
connaître la situation de l’assistance médicale gratuite dans les
cam pagnes du départem ent des B ouches-du-R hône, et en expo
sant mon opinion sur les m oyens de la m ettre plus com plète
m ent en harm onie avec les besoins des populations rurales et
avec la dignité des m édecins de cam pagne.
Le départem ent des B ouches-du-R hône contient 547,903
h ab itan ts; il est divisé en trois arrondissem ents, celui de M ar
seille, celui d A ix et celui d ’A rles; le prem ier est de 3 4 0 ,7 5 2
habitants, le second de 114,643 et le troisièm e de 9 2 ,5 0 8 .
L’arrondissem ent de Marseille est divisé en neuf cantons et
seize com m unes; l’arrondissem ent d’Aix en dix cantons et cin
quante-neuf com m unes; celui d ’A rles en huit cantons et trentedeux com m unes. En tout vingt-sept cantons et cent-sept
com m unes.
La ville de Marseille absorbe six cantons et 500,000 âm es,
3
�43 —
les 40,000 âmes que contient le reste du prem ier arrondisse
m ent sont groupées généralem ent soit dans les trois autres
chefs-lieux de canton. La Ciotat, Aubagne et Roquevaire qui
sont de petites villes d'une certaine im portance, soit autour de
ces villes, de sorte que, dans le prem ier arroudissem ent, l’assis
tance médicale gratuite est surtout constituée par les secours
reçus dans les hôpitaux et hospices, dans les dispensaires orga
nisés par la G rande-M iséricorde et ceux que la charité privée a
institués.
Dans les deux autres arrondissem ents des secours sont aussi
donnés dans les hospices que possèdent les villes; mais les cir
conscriptions cantonales étant plus spécialem ent rurales, c’est
surtout dans ces deux arrondissem ents que fonctionne le service
de la m édecine cantonale, organisé dans le départem ent par
l’arrêté réglem entaire du 8 novem bre 1852.
Le service de l’assistance gratuite fonctionne dans quarantesept com m unes formant seize circonscriptions cantonales; à la
tête de chacune d'elles est placé un m édecin nom m é par M. le
P réfet. Les com m unes qui ne possèdent ni hospice, ni bureau
de bienfaisance, jouissent seules du bénéfice de l'institution.
Le nom bre des com m unes com prises dans chaque circonscrip
tion varie de une â cinq. Le traitem ent annuel des m édecins est
de 400 fr. au maximum et de 100 fr. au m inim um . Ces traite
m ents réunis atteignent le chiffre de 5 ,0 0 0 fr.
La liste des indigents admis au traitem ent gratuit en cas de
maladie est dressée, chaque année, par une com m ission com
posée du maire, du curé, du m édecin cantonal, de deux m em
bres du Conseil municipal et du secrétaire de la Mairie.
Malgré les sages m esures prises par l’autorité départem entale,
il n’est pas douteux que de nom breuses lacunes existent dans
l’assistance médicale gratuite dans les cam pagnes du départe
m ent des Bouches-du-Rhône; deux circonstances en fournissent
la preuve. Prem ièrem ent, c’est la nécessité d’un nouveau régle
m ent sur la m anière dont sont distribués les fonds de l’assis
tance publique, nécessité prévue par la haute sagesse de M. le
Préfet, et indiquée dans le procès-verbal du la séance du 27 août
1867 du Conseil général des Bouches-du-Rhône ; « Cette année,
com m e l’année dernière, dit M. R am agni, rapporteur de la
commission des finances, M. le Préfet nous dem ande une som m e
de 6,000 fr. pour le service des m édecins cantonaux, du rap
port de M. le Préfet et de l'état ém is sous les yeux de votre
com m ission des finances, on peut constater une am élioration
très sensible sur la santé générale dans les quarante-sept com
m unes qui participent au bénéfice des m édecins cantonaux.
Malgré cette am élioration, le rapport de M. le Préfet nous fait
espérer un nouveau réglem ent sur la m anière dont sont d istri
bués les fonds de l’assistance pnblique.
« La com m ission espère que M. le Préfet recherchera un
m eilleur m ode de répartition des traitem ents des m édecins can
tonaux, de m anière à rétrib u er les services rendus selon leur
im portance.
« La Com m ission renouvelle le désir q u ’elle a exprim é dans
les délibérations précédentes, pour que les m édecins cantonaux
soient m unis d’une petite pharm acie, conform ém ent aux articles
8 et 9 de l’arrêté du 11 novem bre 1862.
« Sous le bénéfice des observations qui précèdent, la Com
m ission propose de voter les 6,000 fr. dem andés. »
La seconde preuve de la nécessité des m odifications à intro
duire dans le fonctionnem ent de l’assistance médicale gratuite
dans les cam pagnes ressort des distances, seize et m êm e dixhuit kilom ètres, auxquelles le m édecin cantonal est obligé de se
tran sp o rter quelquefois, pour arriver auprès du pauvre qui a
besoin de ses soins. De plus, les réclam ations des m édecins du
départem ent établis dans les com m unes rurales, dém ontrent
que le pauvre est assisté partout, mais que s’il en est ainsi,
c’est que le médecin de la com m une lui donne toujours ses
soins gratuits ; tantôt parce que dans sa circonscription il n ’y a
pas de m édecin cantonal, tantôt parce que ce dernier est si
�—U —
éloigné que 1indigent préfère s'adresser à celui qui réside a
côté de lui.
Il n ’est pas moins certain que les m édecins cantonaux du dé
parlem ent apportent dans l'exercice de leurs fonctions tout le
zèle dont ils sont capables; aussi jouissent-ils de l’estim e publi
que et de celle de leurs confrères ; m ais pour les secours a
adm inistrer dans certaines com m unes éloignées de leur dom icile,
d une part des retard s sont inévitables, d'autre part, ces hono
rables praticiens ne reçoivent pas des honoraires en rapport avec
les services rendus par eux.
L’assistance médicale gratuite existe aussi dans quelques
com m unes aisées, par le fait de l’institution de m édecins rétri
bués spécialem ent par elles, par conséquent, de m édecins com
munaux proprem ent dits.
Des développem ents dans lesquels je viens d’en trer, il résulte
évidem m ent que l’assistance m édicale g ratuite existe partout
dans le départem ent des B ouches-du-R hône, mais qu elle n’est
uniforme et obligatoire, régulièrem ent organisée en un m ot,
que dans quarante-sept com m unes sur cenl-sept que contient le
departem ent.
Il en résulte aussi que, si par la charité, le dévouem ent et
l’abnégation des m édecins, l’assistance gratuite existe de fait,
les intérêts moraux et m atériels de la profession sont bien loin
d ’être sauvegardés; car, d’une part, les honoraires reçus par
quelques m édecins pour les soins qu'ils donnent aux indigents
sont insuffisants, et d ’autre part, ceux qui n ’en reçoivent pas
sont considérés pas la classe pauvre, com m e dans une réelle
obligation de la soigner. 11 est facile de com prendre ce que de
viennent dans une pareille situation les intérêts m oraux et m a
tériels du médecin de cam pagne.
Il est aisé de voir par ce qui précède, que le mal est facile à
trouver, mais il n'en est pas ainsi m alheureusem ent du rem ède,
et je ne puis dire ici avec le père de la m édecine qui sufficit ad
noscendum, sufficit ad curandum, en adm ettant m êm e que la
signification du mot curandum fût traiter et non guérir. Je
crois, en effet, qu’il est très difficile de trouver au mal que je
signale un traitem ent parfaitem ent convenable. En théorie, rien
de plus facile. Il fa u t,d it-o n , m ultiplier les m édecins cantonaux;
mais, ces m édecins, il faudrait les rétrib u er d ’une m anière égale
et convenable, par conséquent, disposer de fonds doubles, tri
ples et plus encore. Voilà nécessairem ent la difficulté qui appa
raît avec le besoin de ce nerf de la guerre qui est aussi le nerf
de toute institution. Pourra-t-on trouver des fonds suffisants
pour l’institution de trois ou quatre m édecins par circonscrip
tion cantonale? J ai de la peine à le croire.
P eut-être serait-il plus facile d’arriver à une solution con
venable par les dispositions suivantes auxquelles, pour mon
com pte, je m ’arrêterais volontiers, si rien dans la pratique ne
s’opposait à leur exécution ; du reste, ces dispositions m’ont
paru constituer les aspirations du plus grand nom bre des m éde
cins de cam pagne qui font partie de la Société locale des Bou
ches-du-Rhône : au lieu de consacrer les fonds votés par le
départem ent aux honoraires souvent dérisoires des m édecins
cantonaux, faire une masse qui, chaque année, serait distribuée
aux com m unes, en raison du nom bre d’indigents q u ’elles au
raient à soutenir; destiner cette som m e, augm entée de celle que
chaque com m une pourrait voter pour l’assistance, aux m édecins
de la localité qui donneraient leurs soins aux pauvres, en per
m ettant à ces derniers de s’adresser au m édecin de la com m une
qui leur inspirerait le plus de confiance. Régler les honoraires
du m édecin en raison du nom bre de visites faites par lui et au
prorata de la som m e destinée à l’assistance publique dans la
com m une, en faire autant auprès du pharm acien de la localité,
au moyen d’un tarif équitable; il va sans dire que dans les
com m unes sans pharm acie, le m édecin ferait fonction de phar
macien en se soum ettant aux prescriptions de la loi à ce sujet.
J'ai déjà m ontré les inconvénients du service de la m édecine
cantonale ; il me sem ble, au contraire, que l'institution des m é
�- 46 —
— 47 —
decins communaux neutraliserait k peu près com plètem ent ces
inconvénients; en effet, d’une part, les malades auraient h pro
ximité le médecin de leur choix, et il est facile de com prendre
combien cette liberté dans le choix relèverait tout de suite et le
médecin et le client, et d’autre part, la profession médicale au
point de vue général et au point de vue particulier y gagnerait
m atériellem ent et m oralem ent.
Je sais que,pratiquem ent, cet ordre d'idées trouvera peut-être
de grandes difficultés d ’application, et la prem ière viendra, sans
doute, de l’impossibilité de disposer de fonds suffisants ; c ’est
pourquoi je disais tout d'abord que le mal était connu, mais que
le rem ède était difficile k trouver. Aux adm inistrateurs habitués
k la bonne distribution des ressources financières, k ju g er si le
plan libéral qui me paraît concilier les besoins m oraux et m até
riels des pauvres et la dignité professionnelle peut-être exécuté
au moyen de telle ou telle com binaison q u ’il n ’est pas de ma
com pétence de discuter !
Dr S eüx père.
m ent a des limites très bornées; qu’il agit seulem ent sur les
élém ents physiologiques du poum on, sar les vésicules restées
saines, sur les fibres élastiques et les capillaires encore in tacts;
q u ’il augm ente m om entaném ent leur activité norm ale et que,
sim plem ent, il leur im prim e un surcroît d ’énergie fonctionnelle,
s’épuisant aussitôt. Cet effet, est plutôt physiologique que théra
p eutique; il peut être com paré h celui qu’on obtient en admi
nistrant l’arsenic contre toute autre maladie étrangère aux
organes de la poitrine ; ou bien il rappelle celui que les paysans
styriens recherchent pour eux et leurs chevaux, quand ils se
préparent a gravir de hautes m ontagnes et qu’ils veulent
augm enter leurs forces m usculaires et leurs aptitudes respira
toires.
*
Tout différents sont les effets de l’arsenic pris par la bouche,
k doses faibles et longtem ps continuées. Au lieu d ’être rapides,
interm ittents, faiblem ent palliatifs, ils sont lents, progressifs et
persistent longtem ps après l’interruption du m édicam ent. Que
conclure de la? Evidem m ent, ce dernier ne se borne plus k agir
sur les vésicules encore intactes, à assurer leur intégrité, k les
m aintenir dans un état de stim ulation fugitive ; il fait su rto u t
valoir les élém ents restés sains et relativem ent sains et répara
bles des vésicules malades. Il produit non plus une sim ple m o
dification fonctionnelle passagère, mais bien une transform ation
organique réelle et profonde, une véritable régénération des
divers tissus constituant la vésicule, k savoir: des capillaires, des
fibres élastiques et des noyaux interstitiels hypertrophiés.
C onséquem m ent, sous l’im pulsion de l’agent m édicam enteux
et sous l’influence d 'u n e nutrition plus vigoureuse, les capillaires
atrophiés deviennent de plus en plus perm éables au sang; ils se
dilatent, tendent k reprendre leur calibre prim itif, tandis que la
circulation y devient plus active. En m ême tem ps, les faisceaux
des fibres élastiques distendus, am incis et affaiblis, recouvrent
leur volum e, leur force rétractile et leur propriété d’expulser
plus aisém ent l’air stagnant dans les vésicules. E t, rem arquons-
DE L’ARSÉNIATE D’ANTIMOINE
DANS L'EMPHYSÈME VÉSICULAIRE DES POUMONS
N o u v e l le É t u d e s u r l a
P ar le
Dr
Ch .
lIé d lc a < lo n a r s e n i c a l e
ISNARD
( de Ma r s e il l e ).
(Suite *).
Les courtes inhalations des vapeurs arsen icales, pendant
qu’on fume une cigarette, n ’ont pas le tem ps de m odifier assez
profondém ent les tissus malades, de faire rétrograder, de rég é
nérer des lésions organiques anciennes et avancées. Le soulage
m ent immédiat et passager de la dyspnée prouve que le m édica(1) Voir les numéro* de Novembre, Décembre, Janvier et Février.
�— 49 le, ce double effet est inévitable ; le rem ède agit sim ultaném ent
sur le réseau vasculaire et sur la fibre élastique; car, si l’un ou
l'autre de ces élém ents était seul modifié, une quantité insuffi
sante d’air ou de sang arriverait aux alvéoles; l’hém atose reste
rait toujours aussi incom plète; le résultat définitif serait m anqué
et la dyspnée persisterait au même degré : ce qui n’a pas lieu.
Enfin, les noyaux inlercapillaires hypertrophiés redescendent
à leur volume normal par une double cause à la fois vitale et
m écanique, soit en éprouvant un arrêt dans leur accroissem ent
pathologique et leur transform ation graisseuse, soit en su b is
sant la compression des parois vésiculaires, des autres tissus
régénérés. En e ffe t, les noyaux interstitiels hypertrophiés
avaient d'abord comprimé et atrdphié le réseau vasculaire, celuici, reprenant son activité fonctionnelle, enserre les prem iers,
les com prime et les atrophie à son tour. Ainsi, voit-on les élé
m ents sains des vésicules prévaloir de nouveau sur les élém ents
morbides qui s’étaient substitués à eux.
Cette triple rénovation des élém ents de la vésicule pulm o
naire, dém ontrée par l’observation clinique et le raiso n n em en t,
va se trouver confirmée par l’analogie thérapeutique, c 'e st-à dire par la connaissance même des propriétés générales de l’a r
senic. Ainsi :
1° Relativement
aux capillaires..
— Si les considérations
précédentes prouvent 1action ém inem m ent réparatrice du m édi
cament sur les capillaires des poum ons , on a constaté depuis
longtemps une sem blable influence exercée par lui sur le systèm e
capillaire en général. Celle-ci se traduit par la vascularisation et
la coloration de la p e a u , la fraîcheur et la rougeur du teint ; elle
est bien manifeste chez les arsénicophages , dans la convales
cence des longues maladies, dans la chlorose, dans les cachexies
nerveuse, palustre, tuberculeuse, scrofuleuse, etc..
2 e Relativement aux fibres élastiques. — Les préparations
arsenicales ont un double effet sur nos tissus : elles activent à la
fois leur propriété générale de nutrition et leurs propriétés spé
ciales : c’est là encore un fait acquis. Ainsi agissent-elles sur le
tissu nerveux, sur la libre m usculaire striée , sur la fibre m uscu
laire lisse , e tc .; de là leur influence tonique et régulatrice sur le
systèm e nerveux ganglionnaire, et sur le systèm e nerveux
cérébro-spécial , sur les m uscles d e la vie anim ale et sur les
muscles de la vie végétative ; de là leur influence non moins
rem arquable sur les tissus à organisation plus com plexe , sur le
tissu des vaisseaux, sur celui de la peau, des m u q u eu ses, des
bronches, etc. É videm m ent, le tissu élastique de la vésicule
pulm onaire ne fait pas exception à la loi com m une : il se trouve
donc modifié avantageusem ent dans sa structure organique et
dans son énergie fonctionnelle, dans sa consistance et son
élasticité.
3° Relativement
aux noyaux intercapillaires hypertrophiés.
— L’arsenic agit de deux m anières sur la nutrition : non seule
m ent il l’active quand elle est devenue languissante, mais encore
il la règle et la redresse quand elle est déviée. En d ’autres ter
mes, il peut en certain cas dim inuer l’hypertrophie ou l’hvperplasie des élém ents histologiques, ralentir et enrayer leurs trans
form ations m orbides, leurs dégénérescences. Depuis longtem ps,
la thérapeutique tire parti de ces propriétés im portantes co n tre
nos maladies chroniques les plus graves et les plus rebelles ;
elle les m et plus ou moins heureusem ent à profit pour com battre
les maladies d e là peau, certaines hyperplasies de l’enveloppe
cutanée, certaines inflammations suppuratives, l’hypertrophie du
cœ ur, l’évolution du tubercule, celle du cancer, et enfin la
régression graisseusse, cette m étam orphose si com m une dans
nos tissus.
Pour ne parler que de celte dernière dont j ’ai plus spéciale
m ent à m ’occuper ic i, je rappellerai les faits suivants :
D ’après la pratique des arsénicophages et des entraîneurs ,
l’arsenic donne de la vigueur, plutôt en favorisant la nutrition
�30 —
da muscle que la nutrition de tout autre p artie, de la graisse
en particulier. M. Devergie ayant co n staté, chez les individus
soumis longtem ps au traitem ent arsenical, une augm entation de
l'appétit et des forces suivie d'am aigrissem ent, sans troubles de
l'économ ie, avait pensé que l’arsenic ralentit et em pêche la for
mation de la graisse; plusieurs lois même, il avait adm inistré ,
avec quelques succès, les préparations arsénicales pour obtenir
la résolution de certaines tum eurs adipeuses. M. Délions de
Savignac va plus loin encore : il suppose qu’il y aurait avantage
Remployer l'arsenic contre la polysarcie; il poursuit actuelle
ment une série d’expériences dans cette voie (1). D 'ailleurs, le
médicament doit à ces m êm es propriétés une partie de l’im por
tance qui lui a été attribuée dans le traitem ent préventif de
l’apoplexie cérébrale : très probablem ent il modifie l’altération
graisseuse ou athérom ateuse de la paroi des capillaires, et par l'a
il fait disparaître une cause fréquente de rupture vasculaire.
A ction de l arsenic sdr la dyspnée liée aux autres affec
tions des broncdes et dbs poumons. — Je ne term inerai pas les
considérations précédentes sans une courte rem arque. En dé
m ontrant, comme je l’ai fait, l’action de l’arsenic sur la dyspnée
de l’emphvsème, on explique en m êm e tem ps, mieux qu’on ne
l'a fait jusqu'à p ré se n t, son efficacité contre le sym ptôm e dys
pnée lié aux autres maladies des bronches ou des poum ons, à
l’asthme nerveux, à l'angine de poitrine, au catarrhe pulm onaire,
à la phthisie. Dans tous les cas, le m édicam ent dim inue ou sus
pend l'oppression, en agissant im m édiatem ent sur les élém ents
anatom iques des vésicules : en favorisant directem ent l’hém a
tose et en sollicitant les puissances respiratoires: c’est là un fait
général, im portant et digne d ’être mis en lum ière. Bien entendu,
on tiendra égalem ent compte de l'effet spécial sur chaque m a(l; Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales, A. Dechambre, 1. VI
(2* parlie), p. 197, année 1867, Article : Arsenic.
ladie, sur les lésions propres à l’asthm e, à l’angine de poitrine,
au catarrhe pulm onaire , à la phthisie : ces deux influences
s'u n iro n t pour com pléter le résultat.
J ’ajouterai un dernier mot ; outre son intérêt particulier, il
répondra à une objection qui trouve naturellem ent sa place ici :
En activant la circulation des capillaires du poum on, l’arsenic
est-il sans danger pour elle ? en d’autres term es, n’expose-t-il
pas aux hém optysies ? Depuis longtem ps je poursuis attentive m ent la solution de cette question, et voici ce que mon expé
rience personnelle m’a appris : J ’ai toujours été frappé , pendant
le cours de la m édication arsenicale, de la rareté des hém or
rhagies pulm onaires, surtout dans la phthisie, là où elles étaient
particulièrem ent redoutables. D ’ailleurs, com m e nous le verrons
plus bas, cette im m unité est conforme à la théorie. En e ffe t,
l’arsenic est un tonique et non pas un stim ulant ; tout eu acti
vant la circulation des capillaires du poum on, il la règle, sans
l’accélérer d’une m anière extrà-phvsiologique ; il harm onise
égalem ent, dans ses fonctions, tout le système capillaire géné
ral ; de plus, il affermit les parois vasculaires en améliorant la
nutrition des tissus ; par tous ces m oyens, il dissipe les conges
tions du poumon et prévient plutôt qu’il ne favorise l ’hém optysie.
D egré
de curabilité de l emphysème . — Nous venons de
préciser le rôle des préparations arsenicales sur les vésicules de
poum ons em physém ateux, m aintenant où s’étend,où s'arrête leur
action thérapeutique; en d’autres term es, quel est le degré de
curabilité de l ’em physèm e?
La maladie, avons nous dit, présente deux degrés ;d an s l’un,
les vésicules affectées sont encore plus ou moins organisées et
réparables ; dans l’autre, elles sont com plètem ent détruites et
irréparables. La thérapeutique peut donc agir avec efficacité
dans le prem ier cas; elle devient im puissante dans le second.
Mais com m ent, au lit du m alade, établir avec exactitude cette
distinction anatom ique im portante? Si l’on ne peut y arriver
�53 —
d'em blée, heureusem ent la connaissance approfondie de l’em
physème fournit encore au médecin de précieuses indications.
Ainsi, n’existe-t-il pas constam m ent sur le même malade à la
fois des lésions h toutes les périodes, au prem ier et au deuxièm e
degré? L ’affection n ’a-t-elle pas une m arche essentiellem ent
lente? Ses altérations ne sont-elles pas d ’autant plus étendues
et avancées qu’elles sont plus anciennes et q u ’elles frappent des
individus plus âgés? La clinique n ’a-t-elle pas déjà produit des
résultats certains?
La solution donnée plus haut à ces diverses questions révèle
la possibilité de lutter avantageusem ent contre l’em physèm e,
cette maladie en général trop négligée et regardée trop facile
ment comme au-dessus des ressources de l’art.
On peut donc et l’on doit toujours faire intervenir contre elle
la thérapeutique, et en particulier la thérapeutique arsenicale.
Les chances de succès, quoique variables, ne sauraient être
mises en doute. Presque constam m ent, il est perm is d’espérer,
au m oins, un soulagem ent rapide, une am élioration certaine.
On approchera d’autant plus d’un résultat curatif que les indi
vidus offriront des conditions plus favorables quant à la g e , l’in
tensité des symptômes, l’ancienneté et l’étendue de la maladie.
La médication arsenicale sera particulièrem ent efficace vers le
début de l’emphysème, au m om ent où vraisem blablem ent les
lésions du prem ier degré l’em portent sur celles du deuxièm e.
Tous ces faits, prévus par la théorie, sont confirm és par la pra
tique. D'ailleurs, le médecin trouvera ultérieurem ent, m êm e
dans les résultats com plets ou incom plets du traitem ent, un
nouvel élém ent de diagnostic, un moyen approxim atif de savoir
dans quelle étendue les vésicules pulm onaires avaient été dé
truites: Naturam morborum curationes ostendunt. A insi, la
disparition de la dyspnée et des autres sym ptôm es de l’emphy
sème dém ontrera que la lésion du deuxièm e degré, la destruc
tion des vésicules, était nulle ou très lim itée; une am élioration
indéfiniment stationnaire tém oignera, au contraire, du progrès
de ces m êm es altérations. Par exem ple, dans mes deux obser
vations (I), le résultat si rem arquable obtenu avec la m édica
tion arsénio-antim oniale ne prouve-t-il pas que, m algré la vio
lence de la dyspnée et l’étendue des désordres pulm onaires, la
désorganisation des vésicules n’avait guère franchi le prem ier
degré, ou du m oins qu ’elle avait atteint le second degré dans un
espace relativem ent circonscrit?
M ode d ’adm inistration et doses des préparatio ns a r se n i
ca les . — U ne régie im portante, indispensable au succès, dom i
nera la thérapeutique de l’em physèm e, com m e elle dom ine la
thérapeutique de toute maladie chronique. L ’arsenic sera adm i
nistré à faibles doses longtem ps continuées, pendant des mois
entiers ou des séries de mois. Quelle que soit la préparation
employée à l 'intérieur (acide arsén ieu x , arséniate de so u d e,
arséniate d ’antim oine, e tc .) , les doses habituelles varieront
de 2 à 8 m illigram m es par jour, rarem ent davantage; dans
les paroxysm es, elles s’élèveront à 10, 12, lo et 20 milli
gram m es. On y joindra utilem ent les cigarettes arsenicales, soit
pour soulager rapidem ent les accès de dyspnée, soit pour aider
le traitem ent cu ratif; m ais, alors, on les fum era d’une m anière
régulière et périodique; par exem ple, une dizaine de jours cha
que m ois. L’innocuité du m édicam ent est, en général, parfaite ;
sa tolérance, pour ainsi dire, indéfinie. Il est difficile d’assigner
d’avance un term e au traitem ent. La cliniqne, l’expérience,
c’e s t-à -d ire l’art du m édecin, peuvent seuls résoudre une pareille
question. Une formule sim ple et invariable est im possible. Pour
réu ssir,il faut, sans hésitation et sans tém érité, savoir dem ander
à une m édication tout ce qu’on peut en attendre. Si l’on s’arrête
trop tôt, si l’on suspend le rem ède au prem ier soulagem ent de
la dyspnée, on risque d’agir plus sur les vésicules saines que sur
les vésicules malades, de produire un effet plutôt physiologique
(1) Voir le n» de décembre 1867, pages 1%, 'i98
�— 54 —
— 55 -
que thérapeutique, palliatif plutôt que curatif; on s ’exp ose, en
un mot, h ne pas suffisamment modifier les lésions réparables
de l’em physèm e. Pour être profonde et durable, l’action m édi
cam enteuse doit être len te, douce et insensible; proportionnée
à l’ancienneté de la maladie, à l’étendue de ses désordres et à la
durée d elà réparation à accom plir; elle doit im iter les procédés
habituels de la nature, suivre en quelque sorte pas à pas les
transformations toujours très lentes des tissus qu’elle est appelée
à régénérer.
(La suite au prochain numéro.)
Bulletin thérapeutique.
POTION LAXATIVE.
Magnésie calciD ée.....................
E a u ...........................................
Sirop de fleurs d'oranger..........
10 grammes.
100
»
15
»
Agitez de manière à former une poiion laiteuse, qu’on fera
chauffer au bain-marie. Ce laxatif, qui doit être pris en une fois,
peut produire jusqu’à sept ou huit selles. Il convient aux tempé
raments irritables et délicats, surtout aux femmes. — S.
Chronique mensuelle.
Marseille, 5 mars 1868.
L’atmosphère médicale du monde parisien a été troublée, il y a
quelques sem aines, par un de ces orages qui font heureusem ent
plus de bruit que de mal. Les journaux de médecine de la capitale
nous ont donné à ce propos, dans le courant du mois dernier,
quelques détails intéressants. L'Association de la Seine avait à
élire un président en remplacement de Velpeau. Grand émoi au
dedans et au dehors de l’honorable Société ; désir manifesté par
quelques confrères de voir le même nom placé en tête de l’4 sso -
dation de la Seine e t de YAssociation générale ;
opposition de
quelques autres, et finalement séance orageuse dans laquelle
YAssociation de la Seine a affirmé hautement son existence propre
et manifesté une fois de plus son désir de vivre complètement sé
parée de YAssociation générale I
Certes, personne ne blâmera une société de vouloir conserver
son indépendance; mais YAssociation de la Seine ne dépasse-telle pas le but? En s’obstinant à poursuivre isolément une œuvre
semblable à celle de YAssociation générale ; en déclinant toute
communauté d’intérêt ou d’action avec celte dernière Société,
l’honorable compagnie ne prendrait-elle point une attitude un peu
trop farouche? C’est à nous médecins, exposés à tant de diffi
cultés — professionnelles ou autres, — qu’il convient d’appliquer
le proverbe: YUnion fait la force. Puisque de l’aveu de tous,
l’œuvre poursuivie par les deux Associations est bonne, pourquoi
ne pas chercher à atteindre ensemble le but commun?
Ah ! sans doute, si YAssociation générale absorbait les sociétés
locales et détruisait l’autonomie de ces dernières, nous compren
drions qu’on s’isolât. Mais nos assemblées de province n’ont-elles
point leur vie propre? Elles se réunissent quand bon leur semble;
elles délibèrent, agissent, votent leur budget, défendent leurs in
térêts dans les grandes assises parisiennes et interviennent direc
tement dans toutes les occasions solennelles. Aujourd’hui même,
notre Société locale des Bouches-du-R hône, réunie en assemblée
extraordinaire, en votant une liste de candidats de son choix pour
la présidence générale de l’Association n’a-t-elle point fait acte
d’indépendance? Toutes les autres sociétés locales n’agiront-elles
point comme la nôtre? Rt le Conseil général en déclarant dans sa
circulaire du 10 février 18G8, « qu’il ne pourrait voir qu’avec
« satisfaction le nom du président d’une de nos sociétés locales
« désigné au choix de l’Empereur pour la présidence de l’Asso« ciation générale, » n’a-t-il point rendu plus solide encore la
base essentiellement constitutionnelle, sur laquelle repose tout
l’édifice de notre Association ?
Chaque société locale, il est vrai, verse annuellement une
somme fixe dans la caisse centrale. Cette subvention serait un im
pôt payé à la tête de l’Association en retour de l’appui moral donné
�aux sociétés locales ou de la haute influence employée chaque jour
pour la défense de leurs intérêts, que nous n’y verrions rien à re
dire. L'impôt en lui-même est légitim e: il est justem ent dû par les
citoyens à l’État en retour de la protection accordée aux individus
et de l’organisation des services publics. Mais la redevance dont
il s’agit ici ne peut pas même être considérée comme un impôt.
La caisse centrale n’est qu’une réserve supplém entaire, destinée à
faire face à des besoins soit locaux, soit généraux; de telle sorte
que les fonds envoyés à Paris par une société locale peuvent re
venir entre les mains de cette dernière, sous forme de secours
accordé à un sociétaire malheureux. Ce fait vient de se produire
pour le département des Bouches-du-Rhône et nous avons vu le
Conseil général allouer généreusem ent à notre Société, une somme
de 400 francs pour Mm* X ..., veuve d’un de nos anciens collègues.
Sans nul doute, si nous n’eussions pas été agrégés à la grande
famille, Mme X ... n’eût obtenu qu’un secours bien modique. Et
ce n’est là que le côté matériel de la question! Quand on sc repré
sente la grandeur du but moral poursuivi par l'Association, quand
on songe que, tout en assistant, celte Société sauvegarde, soutient,
protège et moralise, on ne comprend réellement pas qu’elle ne
soit point défendue par tous les hommes de cœur et d’intelligence.
Ces hommes là ne manquent pas à Paris. Dans notre capitale ne
font défaut ni l’activité pour soutenir les sociétés anciennes, ni le
zèle ou l’initiative pour en fonder de nouvelles. Parmi ces der
nières, souhaitons longue vie et prospérité à la Société de méde
cine légale, fondée le mois dernier, sous la présidence de M. Dcvergie. Le but de celle nouvelle compagnie savante, est l'étude
de toutes les questions relatives aux expertises m édico-légales.
Née d’Aier, elle compte déjà 50 membres; c’est dire qu’elle con
tient de puissants éléments de succès.
Plus encore que cette dernière Société, celle de thérapeutique
eût rendu d’importants services à bord du Leibnitz. Quel désastre !
Sur 442 passagers partis de Hambourg pour New-York, 145 sont
atteints par le choléra: 105 succombent en mer; pendant un lon<x
et horrible mois l’Océan engloutit chaque jour plusieurs victimes*
Et pas un médecin à bord ; pas un homme capable, par des soins
spéciaux, de tenter la guérison des malades et d’opposer une
digue à l’effrayante propagation du mal ! Il est triste d’avoir à dé
plorer un pareil malheur; il est plus triste encore de songer
qu’avec un peu de sollicitude, le désastre eût pu être moins grand.
Pourquoi tous les gouvernements n’obiigenl-ils point, comme le
fait la France, les compagnies de paquebots transatlantiques à
placer un médecin à bord de chaque navire? Faut-il voir dans
cette négligence un effet de la sécurité trop confiante, introduite
dans les esprits par les doctrines anti-contagionnistes? En tout cas,
voilà un fait qui ne donne point raison à ces dernières. Nos vail
lants contagionnistes marseillais, MM. Bertulus, Pirondi, Fabre
et autres.... ne manqueront point de l’inscrire sur leurs tablettes.
Retenons au passage les noms de MM. Bertulus et Fabre pour
féliciter ces deux honorables confrères de l’avancement, mérité à
divers titres, qu’ils viennent d’obtenir. Leur nomination comme
professeur de pathologie interne et adjoint de clinique médicale,
rendra plus évident encore un fait connu de tous, c’est que le
ramage de notre école, — à l’opposé du corbeau de la fable — est
de beaucoup supérieur à son plumage , c’est-à-dire à son installa
tion matérielle. A ce propos, nous espérons que l’acquisition, faite
depuis peu par la ville, de notre ancien Palais de Justice, per
mettra à notre édilité marseillaise de donner à notre second éta
blissement d’enseignem ent supérieur, un local digne de lui. Cette
question est une de celles qui tiennent le plus au cœur du direc
teur de notre école, et personne n’ignore que les intérêts placés
entre les mains de M. Coste, sont défendus par lui avec autant de
zèle que d’intelligence; il nous suffira pour en donner une preuve
de rappeler que nous devons à son initiative éclairée la création
des chaires de Physiologie et de Chimie médicale.
M. Coste n’est pas seulem ent un directeur plein de zèle ; notre
honorable professeur de clinique externe est encore un opérateur
des plus habiles, et nous le voyons tous les jours promener son
bistouri dans les régions les plus scabreuses. Un homme atteint
d’un anévrisme faux consécutif de l’artère brachiale avait été reçu,
le mois dernier, dans le service de la clinique. Le seul moyen qui
pût être mis en usage, avec quelque chance de guérison défini
tive, était la ligature de l’artère axillaire, ligature qui devait être
faite au dessous du petit pectoral. On conçoit toutes les difficultés
�— 58 —
d’une pareille opération. M. Coste l’a pratiquée devant un nom
breux concours de médecins et d’élèves, avec le sang-froid, la
promptitude et l’élégance qui ont fait de lui depuis longtem ps un
chirurgien consom m é.
En médecine, la question à l’ordre du jour est encore la tuber
culose. M. Chauffard qui a pris de nouveau la parole au sein de
l’académie est certainement un des esprits les plus droits que
nous connaissions. Lui aussi, comme M. Béhier, s’accommode
très bien des expérimenls solides , mais il ne croit pas qu’eux
seuls constituent toute la science. Au nom des idées générales,
M. Chauffard a vigoureusement protesté contre la méthode Irop
exclusivement analytique et expérimentale qui caractérise notre
époque. Certes, nous connaissons toute la valeur des expériences.
Nous ne poussons point, avec M. Arthur Mangin du Correspon
dant, le respect pour les animaux jusqu’à n ’éprouver à la lecture
de la Toxicologie d’Orüla « qu’un sentim ent d’indignation et de
« dégoût, » jusqu’à déclarer les vivisections inutiles et immo
rales (sic), jusqu’à considérer comme peu importants et peu pro
fitables « les travaux anatomiques et physiologiques dont on fait
« étalage dans les écoles et dans les académies » (1) Non, nous ne
tenons poiDt un pareil langage, mais nous reprochons à notre
époque de se laisser trop absorber par les faits de détail et de
donner à la pensée une base trop étroite. Nous pesons fort bien
en médecine, nous mesurons dans la perfection ; mais réfléchis
sons-nous suffisam m ent? Nous savions autrefois que dans cer
taines maladies, la sensibilité tactile ou douloureuse était notam
ment réduite; grâce à Yesthésiomèlre de M. Liégeois (Société de
chirurgie, séance du 5 février), nous pourrons maintenant
apprécier la diminution à quelques m illièm es près. Est-ce là un
progrès bien sérieux? Si nous continuous à marcher dans la voie
suivie depuis quelques années, la science de l’avenir ne sera plus
qu’une aride nomenclature sans intérêt, sans unité, sans certitude,
et lorsque dans les sociétés savantes d'alors, quelqu’esprit arriéré
invoquera timidement un grend principe, une loi générale, tous
les académiciens de l’époque se lèveront comme un seul hom m e,
et répondront à l’instar d’un de leurs plus spirituels aïeux :
(i)
Le Correspondant : ferrier 1868. — Revue scientifique.
— 59 —
lîllo esl fort belle assurément ,
Mais le moindre expérimenl
Ferait bien mieux notre affaire.
Tendance fâcheuse et que nous regrettons de voir encouragée
par de remarquables intelligences !
La partie du discours de M. Chauffard, plus spécialement con
sacrée au point en litige a été un développement clair et précis de
la loi de prolifération cellulaire formulée par M. W irchow. Oui,
les inoculations tuberculeuses sont réelles (M. Lebert, de Breslow
dans une lettre adressée à l’Académie de médecine a exprimé la
même opin ion ), mais le travail morbide produit par elles est pu
rement local ; la matière caséo-tuberculeuse inoculée excite la
prolifération des éléments lymphatiques et plasmatiques; elle
donne naissance à du tubercule, mais elle ne produit pas la tuber
culose, laquelle est une maladie générale et primitivement diathésique.
M. Pidoux a occupé la tribune après M. Chauffard. L’honorable
académicien n’est point aussi convaincu que ce dernier de la
puissance des inoculations pratiquées par MM. Villemin, Hérard
et Cornil. — En tout cas, il les expliquerait par une pullulation
des éléments de la maladie tuberculeuse, par une sorte d'infection
du voisinage, un pen analogue à l’infection purulente. Cette hypo
thèse se rapproche de celle de M. Wirchow. Ce qui est complète
ment neuf, original, propre au savant médecin des Eaux-Bonnes,
c’est de vouloir rattacher la phthisie à jtout une classe d’affections
particulières, tenant le milieu entre les maladies virulentes et
celles qui ne le sont pas. M. Pidoux prouvera-t-il son assertion?
Démontrera-t-il également que certaines formes de la phthisie pro
viennent de maladies constitutionnelles, dégénérées et transfor
m ées? Nous ne pouvons nous prononcer sur ce point, mais nous
espérons que ces aperçus nouveaux seront mis à l’étude et dis
cutés à leur tour. Pour le m om ent, il est. nécessaire que la ré
flexion, fille du calme, prenne possession des esprits. L’honorable
académicien l’a dit lui-méme: la question a besoin de se reposer.
Nous ajouterions volontiers..... et le public aussi, au moins pen
dant quelque temps.
De la rue des Saints-Pères au Pont-des-Arts la distance est
�5e ANNÉE.
— 60
courte. Nous la franchirons rapidement pour féliciter M. le pro
fesseur Laugier de sa nomination à l’Institut, après quoi nous
nous acheminerons sans plus tarder vers la gare de Lyon, car nous
avons hâte de regagner nos pénates. Si toutefois, pendant ce trajet,
nous apercevons dans une petite maison de la rue Chanoinesse,
un homme laborieusement penché sur les livres, nous lui dirons
en passant que la salle de la rue Mazarine, ouverte à tous les
pionniers de la science, réserve — nous l’espérons, — un de ses
meilleurs sièges au journaliste convaincu, qui sait être en même
temps savant consciencieux et travailleur infatigable.
Nous ne voulons pas terminer cette chronique, sans nous asso
cier aux regrets manifestés par toute la presse médicale à l’occa
sion de la mort du Dr Jaumes. La perte éprouvée par la Faculté
de Montpellier sera vivement ressentie par les nombreux amis que
l’honorable professeur comptait dans notre ville.
D' Seux fils.
Nouvelles et Variétés.
Désirant faire concourir à l'élection présidentielle du mois d’a
vril tous les membres de la Société locale des B ouches-du-R hône,
M. le président Seux les a convoqués en assemblée générale. Cette
réunion, qui a été très nombreuse, a eu lieu le jeudi 5 du courant;
elle a arrêté une liste de candidats sur laquelle le troisièm e rang
est réservé à un médecin des départements.
— A l’École de Médecine de Marseille, par suite du dédouble
ment des deux chaires d’anatomie et physiologie, de pharmacie et
chimie, ont été nommés :
M. Roberly, professeur de physiologie;
M. Rampai, professeur d’anatomie ;
M. Favre, professeur de chim ie médicale ;
M. Roussel, professeur de toxicologie.
— M. le professeur Jaumes est mort à Montpellier, à peine âgé
de 64 ans. L'Union médicale de la Provence s’associe de tout
cœur aux regrets qu’a provoqués la perte de ce maître excellent.
(La Rédaction.)
Marseille. — Impr.
Arnaud, Cayeii et C., rue
Saiut-Ferréol,
57.
UNION MÉDICALE
1868.
INTÉRÊTS PROFESSIONNELS
Quelques mots sur les rapports des Médecias avec les Sociétés
de Secours Mutuels.
Et crimine ab uno disce omnes.
Viug.,
Èneide, liv. II.
S ’il est une institution bonne et utile, c’est sans contredit
celle des sociétés de secours m utuels qui, basées sur le principe
fécond de l’association, ont pour but d’assurer au prolétaire, en
cas de m aladie, des secours efficaces. La création et la m ultipli
cation de ces sociétés est donc un fait auquel doit applaudir tout
hom m e de cœ ur et chacun, dans la m esure de ses forces, doit
chercher à favoriser le développem ent d’une pareille œ uvre. Le
Corps Médical n’est pas habitué à m archander son concours
quand il s’agit de dévouem ent. Aussi, partout les m édecins ontils accordé leurs services à ces sociétés en acceptant sans
discussion des honoraires minim es, insignifiants, et qui sem
blaient n ’être q u ’un em blèm e de ce qui leur était dû pour prix
de leur labeur. Ce n’est pas chose douce, en effet, que le
service des sociétés de secours m utuels, et il faut au m édecin
quelque abnégation pour se rendre â toute heure de jour ou de
nuit dans la m ansarde de l’ouvrier ou dans la chem inée du cul
tivateur ; mais peu lui im porte la fatigue pour rem plir auprès
de celui qui souffre ce qu’il considère comme un devoir, et tout
serait donc pour le mieux si l’abus n ’était venu gâter cet état de
choses. L ’abus consiste en ce que les sociétés de secours m u
tuels, en général, sont devenues pour le public un véritable
moyen d’exploitation du Corps Médical, une sorte de coalition
ayant pour but d’obtenir, au nom de la B ienfaisance, des soins
qui sont alors rétribués d’une façon dérisoire. Un exemple per
m ettra d ’apprécier ce qui se passe dans la plupart des cas.
�Un chef-lieu de canton de notre départem ent, bien connu de
la renom m ée, et où règne le bien-être qu’anim e un com m erce
im portant possède deux, sociétés de secours m utuels. Ces so
ciétés com prennent la m ajeure partie des habitants parmi
lesquels des cultivateurs, des ouvriers, c ’est vrai, mais aussi des
com m erçants, des industriels dont l’aisance touche de près a la
richesse. Cette catégorie de m em bres devrait retirer, ce sem ble,
à l’œ uvre son caractère de bienfaisance pour ne lui laisser que
celui d’une société purem ent com m erciale avec laquelle on
n ’aurait plus à traiter que sur des bases ordinaires. O r, l’avan
tage qui résulte pour une société de ce genre d'un abonnem ent
contracté pour le soin de ses malades avec un ou plusieurs
m édecins, consiste à leur donner des honoraires moins élevés
que dans la pratique ordinaire, en leur offrant, com m e dédom
m agem ent, la garantie d ’une rém unération lixe et assurée. 11 est
logique, en effet, que si chaque m em bre retire de l’Association
le béneüce de payer moins cher les services des médecins,
ceux-ci trouvent de leur côté une com pensation a la faiblesse
des ém olum ents consentis dans leur fixité m êm e. Il n ’en est
rien pourtant : la société veut conserver à ses m em b res, vis-a
vis des médecins une indépendance absolue, laissant à chacun
le droit de choisir tel d ’entre eux qui lui conviendra, avec la
faculté d ’en changer suivant son bon p laisir; seulem ent, en sa
qualité de société, Quia nominor Léo, elle offre aux m édecins,
pour chaque famille qui daigne les honorer de leur confiance,
\ fr. 25 c. par trim estre. Ainsi, au bout de trois mois, le m éde
cin qui. dans cet intervalle aura été appelé à traiter une maladie
grave recevra comme honoraires \ fr. 25 c., et la société sera
quitte envers lui. « C’est raide » com m e dit Pradeau dans les
Idées de Madame Aubray. E t , bien plus ce n ’est pas seule
m ent dérisoire comme honoraires, mais c’est hum iliant com m e
position, car lesdiles sociétés payent soi-disant, et, par suite
considèrent les m édecins comme étant entièrem ent à leur se r
vice. A ceux-ci donc, aux yeux des sociétaires, il ne resle m êm e
pas le m érite de leur sacrifice, ils ont accepté ces conventions et
ils sont payés: on ne leur doit rien d é p lu s. C'est triste, en
vérité. Un confrère qui a fait ce service-là pendant trois m ois,
et qui a refusé toute rétribution, a calculé q u ’il aurait reçu eu
m oyenne 0 ,1 2 c. par visite, et quelles visites! quelques-unes
dans des cam pagnes éloignées de deux ou trois kilom ètres.
O serait-on offrir pareille rétribution à un com m issionnaire?
Chose su rp ren an te, c’est qu ’il se trouve des m édecins qui
acceptent celte situation hum iliante.
Quand donc l’Association générale des M édecins de France,
qui a pris pour devise ces mots : Assistance, Protection , Mora
lisation , réussira-t-elle à com battre d’aussi déplorables ten
dances? Elles se m anifestent surtout dans les petites localités où
le m édecin, en dehors d’un milieu qui l'oblige nu respect de
lui-m êm e sous peine de réprobation, se laisse quelquefois faiblir
et entraîner à des errem ents qui com prom ettent sa dignité, et
celle de la profession.
Je ne serais pas étonné de voir m ettre quelque jo u r un service
de m édecine aux enchères, il serait adjugé au m édecin qui s’en
chargerait au plus bas prix. Je donne cette idée aux sociétés de
secours m utuels ; elle me paraît très-pratique, et il ne serait 'pas
im possible q u ’il se trouvât des com pétiteurs pour cette adjudi
cation.
Tel est le mal. N ous ne som m es pas les prem iers à le signaler,
mais il est bon d’y reveuir. Le rem ède pourtant très-sim ple est,
à ce q u ’il p araît, d’un emploi difficile, car on n’a pu encore
l’appliquer. Que les sociétés fassent aux m édecins une situation
en rapport avec les services qu’elles attendent d’eux, d ’une
part ; que ceux-ci, d’autre part, n ’acceptent que des conditions
honorables, com patibles avec leur dignité. Q u’un blâme sévère,
enfin, soit donné par T Association m édicale au confrère qui, en
transigeant avec ces principes, porte une atteinte direcle aux
droits et aux intérêts du Corps auquel il appartient. Voilà, en
deux m ots, sur quelles bases devra se fonder la réform e (pie
�—m —
nous appelons de ions nos vœux clans les rapports des m éde
cine avec les sociétés de secours m utuels.
Dr C rocus.
in
S ommaire
DE L’ARSÉNIATE D’ANTIMOINE
DANS L’EMPHYSÈME VÉSICULAIRE DES POUMONS
N o u v e lle É tu d e s u r l a
P ar le
Dr
Ch .
H é d ic n tio n a r s e n i c a l e
ISNARD
( de Ma r s e il l e ).
(Suite *).
A ction de l ’arsenic sur le catarrhe pulm onaire de l ' em
physèm e . — Jusqu’ici, j ’ai seulem ent parlé de la lésion essen
tielle à l’em physèm e, de l’altération des vésicules. Mais la m a
ladie n’est pas toujours réduite à cet état de sim plicité; le plus
so u vent, elle est compliquée de catarrhe, c’est-à-d ire de toux,
avec congestion, épaississem ent et sécrétion de la m uqueuse
bronchique. Le c a ta rrh e , nous l’avons dit, joue un rôle im por
tant dans l’em physèm e; constam m ent, il l'aggrave en redoublant
la dyspnée, en augm entant les souffrances du malade, en accélé
rant la désorganisation des vésicules. O r, com m e l’arsenic exerce
une action réelle sur la bronchite chronique, sur la coqueluche,
sur le catarrhe de la phthisie, sur la toux et les congestions
bronchiques ou pulm onaires de la fièvre typhoïde, de m êm e il
étend son heureuse influence sur le catarrhe de l’em physèm e.
C’est là un lait que j ’ai positivem ent constaté. Il faut donc com p
ter doublem ent sur cet utile m édicam ent : portant à la fois son
action curative sur les deux principaux élém ents de la m aladie,
il aboutira plus sûrem ent à un résultat définitif com plet.
(1)
Voir les numéros de Novembre, Décembre , Janvier, Février el Mars de
rUnion Méditait.
: — Action de l’arsenic sur le système capillaire ; — dans les maladies
du cœur droit et du cœur gauche ; — dans les congestions apoplectiques du
cerveau ; — dans les congestions en général ; — dans l’inflammation et la
fièvre ; — dans la fièvre typhoïde, etc.
Action de l’arsenic sur les produits pathologiques. — Action générale et
locale. — Elle varie suivant : I» l’état constitutionnel du malade ; 2° la nature
et l’organisation histologique de la production morbide, son volume et sa dis
sémination au milieu des tissus normaux; 3» 9es rapports avec l’inllammation
et la congestion.
L’étude de l’em physèm e nous a dém ontré l’action de l’arsenic
sur les capillaires du poumon et sur les noyaux conjonctifs
intercapillaires. O utre leur incontestable valeur, ces deux faits
isolés se rattachent à la question de l'influence du m édicam ent
su r les capillaires généraux et sur les divers produits pathologi
ques de l'organism e; ils se rapportent ainsi à deux autres faits
d 'u n intérêt plus élevé; ils viennent les confirmer expérim enta
lem ent, les com pléter et leur donner une nouvelle im portance.
Voyons m aintenant quelles déductions la thérapeutique peut
tirer de ces deux ordres de faits envisagés dans leur ensem ble;
voyons quelles lueurs en peuvent rejaillir sur la m édication arse
nicale. Tel sera l’objet de la dernière partie de ce travail ; elle
servira naturellem ent de corollaire à la précédente.
ACTION DE LARSBNIC SUR LE SYSTÈME CAPILLAIRE.---- S u iv an t les
principes |de la physiologie m oderne, le systèm e capillaire est
subordonné au grand sym pathique par les nerfs vaso-m oteurs.
Il joue un rôle considérable dans la santé et la maladie, en p re
nant une très large part dans la circulation et la nutrition.
M édicament ém inem m ent névrosthénique et reconstituant,
l’arsenic a pour propriétés essentielles d'activer et de régulariser
les fonctions perverties de ce systèm e; en d’autres term es
d ’équilibrer la circulation, de dim inuer la tension vasculaire, de
soulager l’action du cœ ur, de rétablir, dans leur intégrité, les
actes prim ordiaux d ’assim ilation el de désassim ilation. Aucun
�— 66 —
agent de la m atière médicale n exerce sur les capillaires une iu tluence aussi étendue, aussi profonde, aussi puissante; c’est à
elle, assurém ent, que doit être rapportée, en grande partie, son
action curative la plus générale. De lù, ses rem arquables effets
dans une foule de maladies div erses, aiguës ou chroniques,
fébriles ou non fébriles; dans les fièvres interm ittentes, les pa
roxysmes fébriles des fièvres co n tin u es, dans la plupart des
accidents de la fièvre typhoïde ; dans les co n g estio n s, les n é
vroses vaso-m otrices (Cahen), les congestions apoplectiques du
cerveau; dans les derm atoses; les affections du cœ ur, des bron
ches et des poum ons; dans la chlorose, l’an ém ie, I adynam ie,
les cachexies, etc. D 'ailleurs, pour avoir une idee exacte des
services que peut rendre l’arsenic, par sou action sur les capil
laires, il faudrait passer en revue a peu près toute la physio
logie pathologique du grand sym pathique, à peu près toute la
pathologie, car, les troubles du système vaso-m oteur intervien
nent toujours plus ou m oins dans la maladie.
Sans énum érer ici tous les états m orbides où l’on pouira
m ettre à profit cet utile m édicam ent, je m e bornerai a quelques
exemples variés; ils suffiront, j ’espère, à ma dém onstration.
Maladies du cœur droit. — L’em physèm e, en créant des
obstacles à la circulation pulm onaire et à l’hém atose, a pour
complication fréquente l’hypertrophie du cœ ur droit. O r, que
fait l’arsenic ? Il augm ente ou rétablit la perm éabilité des capil
laires du poumon : par la, il dim inue la tension de l’artère pul
m onaire, modère l’effort du cœ ur, supprim e enfin la cause de
l’hypertrophie.
Maladies du cœur gauche. —
Dans 1 hypertrophie des cavités
gauches, le médicament développe une partie de ses propriétés
curatives, suivant un m écanisme analogue. En dilatant les capil
laires généraux et en y activant la circulation, il dim inue la ten
sion artérielle et dégage le cœ ur g auche; en d’autres term es, il
affaiblit l’intensité de ses contractions et l’énergie du mouve
m ent hypertrophique (1).
C ’est d’ailleurs d e là m êm e façon, c’est en invoquant aussi
l’inlluence vaso-m otrice qu ’on est disposé aujourd’hui à in ter
préter la plupart des effets de la digitale (2).
Congestions apoplectiques du cerveau. — Congestion en
général. — Dans ces derniers tem ps, on a attribué à l'arsenic
une grande im portance contre les congestions cérébrales, avec
tendance aux apoplexies. Trois théories sont nées pour en
expliquer les effets : celle de M. L am are-Piquol (3), celle de
(1) Outre cette action générale, indirecte et si puissante, les préparations arse
nicales (acide arsénieux, arséniate d’antimoine, arséniate de soude. ..) exercent
également une action directe locale sur le cœur lui-mème, sur sa nutrition, sur
sa fibre musculaire II faut tenir compte de l’une et de l’autre, si l’on veut
apprécier exactement le rôle de la médication dans les maladies organiques du
cœur. La dernière est très manifeste; elle a été démontrée par M. Papillaud. Je
l’ai moi-même souvent constatée d’une manière positive surtout dans l’hyper
trophie passive, caractérisée par la dilatation des cavités, l’affaiblissement des
fibres musculaires et la diminution do la contractilité des parois ; j’avais affaire
à des individus des deux sexes et de tout fige, particulièremént à des adolescents
chez lesquels, avec une dépression de la vitalité du cœur, existait l’atonie de
tout le système musculaire, l’anémie, la langueur générale des fondions. Je me
borne, dans cette note, à signaler les effets toniques locaux de l’arsenic sur le
cœur ; j ’en parle incidemment, l’objet principal de mon travail étant d’étudier
une autre face de la médication arsenicale. Et pour terminer, je résume ma
pensée en deux mots : l’arsenic agit à la fois sur le cœur et sur le système ca
pillaire; il augmente la force de l'un, diminue la résistance do l’autre, équilibre
leurs fonctions réciproques et aboutit ainsi, par deux moyens différents, à un
résultat unique, le retour de l’organe central de la circulation à son état
normal.
(2) Essai
Paris 1867.
sur la digitale et
son mode
d'action,
par le Dr A -C. Legroux.
De la digitale et de son action thérapeutique dam le rhumatisme articulaire
aigu, par le Dr Oulmont, in Bulletin général de Thérapeutique, 30 avril 1867,
p. 354.
Etude sur l'action antiblennorrhagique de la digitale, par le Dr Bérenger-Féin Bull. gén. de Thér., 15 septembre 1867, p. 20ü.
(3) Recherches nouvelles sur l'apoplexie cérébrale, Paris 1860, J.-B. Baillière.
raud,
�— 69 M. W ahu (1), celle enfin de MM. Hirtz (2) et Delioux de Savignac (5), suivant que l'on a admis pour cause de la congestion
ou de l’apoplexie, soit une augm entation exagérée des globules
sanguins , soit une jou plusieurs em bolies cérébrales produites
par un excès de fibrine relativem ent au sérum et aux globules
rouges, soit enûn une dégénérescence athérom ateuse favorisant
la rupture des capillaires du cerveau.
La prem ière fait valoir, en thérapeutique, faction déglohulisante de l’arsenic ; la deuxièm e, son action reconstituante; la
troisièm e cherche a régénérer les parois vasculaires envahies
par la transform ation graisseuse.
Ces trois théories répondent inégalem ent à la réalité et sont
inégalem ent applicables. Ainsi, la lésion athérom ateuse étant
une cause fréquente d’apoplexie cérébrale, on sera autorisé a
em ployer souvent les préparations arsenicales dans le but de
modifier la nutrition des tuniques vasculaires. D ’un autre côté,
je crois la théorie deM . W ahu plus générale et plus vraie que
celle de M. L am are-Piquot. En effet, les individus atteints de
congestion ou d’apoplexie représentent rarem ent, par leur âge
et leur constitution, le type du tem péram ent sanguin ; rarem ent,
chez eux, le chiffre des globules a dépassé la lim ite physiologi
que. Au contraire, ils sont habituellem ent ou m aigres, ou chargés
d’em bonpoint et de graisse; dans les deux cas, leur sang est
appauvri; la fibrine l’em porte sur les autres élém ents du sang;
ils se rapprochent plus ou moins de l’état cachectique si favo
rable à la formation des embolies. L ’action reconstituante du
médicament a donc bien plus souvent à intervenir que son action
déglobulisante. Du reste, celle-ci, rem arquons-le, se m anifeste
très rarem ent, presque jam ais, dans la thérapeutique ordinaire;
(t) De l’emploi et de l'action de Canenic en médecine, Paris 1865.
(2) Nouveau dictionnaire de médecine et de chirurgie pratiques, 1865, tome III,
p i i l , article : Arsenic.
(3) Dictionnaire encyclopédique des sciences medicales, Dechambre. 1867,
tome VI, p. 2H, article: Arsenic.
celle-là, nu contraire, très com m une, est d’autant plus évidente
et plus sûre que I on a affaire 'a un sang moins riche, à une
constitution plus détériorée.
Mais l’arsenic, dans la congestion cérébrale, ne se borne pas
à influencer la com position du sang et la vitalité de la paroi des
vaisseaux m alades, il agit encore comme modificateur de la cir
culation elle-m êm e.
A ce titre, il devient utile et m érite d ’être généralisé à tous
les cas; il acquiert enfin une im portance que ne pouvaient lui
reconnaître les théories précédentes. Une grande partie de son
efficacité doit donc, selon moi, être rapportée à son action sur
les capillaires : il contribue à dissiper l’hyperhém ie et à prévenir
l'apoplexie en distribuant uniform ém ent partout le liquide
sanguin ; en harm onisant la circulation dans tout le systèm e
capillaire, à la fois dans les vaisseaux de l'organe malade, dans
le cerveau, dans les capillaires généraux et dans ceux du pou
m on. A joutons que ce dernier organe, recevant dans chacun de
ses élém ents histologiques, une activité nouvelle, favorise l’hé
m atose et sert ainsi doublem ent au résultat final. Tel est le
procédé par lequel le m édicam ent concourt à dim inuer, à faire
disparaître la congestion cérébrale, et, on peut le dire, toutes
les congestions en général (1).
Inflammation.
— Fièvres. — La congestion nous conduit
naturellem ent à l'inflam m ation et à la fièvre; ces trois phéno
m ènes, souvent associés ou m ême solidaires, ont entre eux la
plus grande analogie. Ils ont de com m un la paralysie des nerfs
vaso-m oteurs entraînant la dilatation des capillaires, l’afflux du
sang, l’accélération de la circulation et l’augm entation de la
(1) L’arsenic est un bon médicament, un bon moyen hygiénique, pour remé
dier aux dégradations organiques résultant des progrès de l’âge : telles la
congestion ou l’atrophie des capillaires; l’atrophie des tissus en général; enfin
l’accumulation graisseuse qui est elle-même une véritable atrophie des tissus
normaux envahis par le tissu graisseux. Cette face de la médication arsenicale
mérite d’être signalée dans la médecine et l’hygiène de l’âge mûr et des vieillards.
�chaleur. Aussi, a-l-on assim ilé, avec raison, la congestion et
Kinflammation à nue lièvre locale, et la lièvre h une congestion
ou uue inflammation généralisées.
L histologie, avec ses doctrines diverses, fait constam m ent
jo u e ra la congestion un rôle im portant dans l’inflam m ation.
Ainsi :
La théorie du blastème, défendue surtout par M. Ch. R obin,
en reportant exclusivem ent dans les capillaires le siège pri
mitif de l’inflam m ation,regarde précisém ent la dilatation vascu
laire, ou congestion, comme le degré initial du travail phlegm asique, comme le point de départ de tous les phénom ènes:
exhalation du blastèm e, transform ation des exsudais , suppura
tion, etc.
Dans la théorie cellulaire, développée avec tant d’éclat par
M. Virchow, si l'inflam m ation est constituée par deux faits, d ’un
côté l’hypertrophie ou hyperplasie des cellules plasm atiques, de
l’autre, l’hyperém ie ou congestion vasculaire; si le prem ier est
essentiel, le second, tout eu étant secondaire, n’en a pas m oins
une très grande im portance. Dû a la dilatation paralytique des
capillaires, il est destiné à fournir, avec le sang, les m atériaux
nécessaires à la prolifération des produits nouveaux.
On com prend, dans les deux cas, l’influence que l’arsenic est
appelé à exercer dans l’inflammation, la suppuration et les sé
crétions pathologiques: en réprim ant la congestion indispensa
ble a chacun de ces actes m orbides, il les éteint à leur source
même. De la, son utilité si bien établie dans les affections variées
de la peau avec ou sans suppuration, dans celles des m uqueuses,
dans les bronchites chroniques, dans la réparation et la cicatri
sation des cavernes pulm onaires, des ulcères scrofuleux et
autres.
M aintenant, ai-je besoin de parler de la lièvre in term itten te,
véritable névrose vaso-m otrice générale, essentiellem ent carac
térisée par h frisson, l'algidité, c’est-à-d ire par le resserrem ent
des capillaires? Ai-je besoin de dire com m ent l’arsenic, en p ré
venant ie phénom ène prim ordial, supprim e d ’un seul coup tous
les phénom ènes réactionnels qui en dérivent, la chaleur, la
su eu r, les congestions, en un mot l’accès tout en tier? A i-jc
besoin d’indiquer ses avantages contre d’autres troubles analo
gues de l’innervation vasculaire, contre ces paroxysm es fébriles
si fréquents dans certaines maladies, par exem ple, la lièvre ty
phoïde, la lièvre hectique, etc.? Après les développem ents pré
cédents tout com m entaire deviendrait inutile.
Fièvre typhoïde. —
Il est une maladie où l’arsenic trouve
de fréquentes applications, c’est la lièvre typhoïde, avec ses
accidents variés d ’ataxie. Je prends ce mot dans le sens le plus
large et j ’appelle ataxie la dissociation de l’unité de notre orga
nism e, cette tendance de chaque portion du système nerveux,
de chaque appareil ou traction d'appareil, de chaque organe, à
se séparer de l’harm onie générale et h devenir un centre isolé
et désordonné d ’action. Il serait intéressanlde rechercher le rôle
et la participation des nerfs vaso-m oteurs dans les nom breuses
m anifestations de la m aladie. La thérapeutique et la physiologie
pathologique de la lièvre typhoïde y gagneraient l’une et l’autre
en clarté et en certitude. On y trouverait, en partie, le secret de
l'unité d’action et de la puissance des préparations arsenicales
contre cette série de phénom èm es si divers, dus plus ou moins à
la congestion, au resserrem ent ou à l’atrophie des capillaires;
contre l’ataxie aiguë, le délire et l'agitation des prem iers tem ps;
contre les paroxysmes fébriles et les désordres nerveux de toutes
les périodes; contre les congestions e lle s phlegm asies; contre
l’adynam ie, la cachexie, la dépression et l’épuisem ent des
forces.
Mois une pareille élu d e, sur laquelle d’ailleurs j ’ai déjà
appelé l’attention (1), serait trop étendue pour avoir sa place ici.
(1) De l'arsenic dans la palkobyie du système nerveux, etc., chap. V, p. 184
à 207. Paris 1865. Victor-Masson.
L’emploi Je l’arsenic dans la lièvre typhoïde n’est pas nouveau. Si j’y suis
�— 73 Je me bornerai à dire un moi des congestions passives, des
phlegmasies hypostatiques, et en particulier de celles du poum on
si com m unes dans la dothiénentérie. L’arsenic rem édie, avec
une sûreté incontestable, à ces ataxies, h ces paralysies de l’in
nervation vasculaire survenant au milieu des troubles de l'in n er
vation générale et concourant elles-m êm es à les faire naître ou
à les augm enter. J ’ai rencontré plusieurs lois, — et j ’en ai vu
récem m ent encore des exem ples — la m édication arsenicale
employée b l'exclusion de toute au tre, am éliorer et faire dispa
raître rapidem ent des congestions passives étendues sim ultané
m ent à presque tout le bord postérieur et la base des deux pou
mons. Ces congestions nettem ent révélées par la percussion et
l’auscultation, par la matité et l'absence de bruit vésiculaire, par
une dyspnée considérable, une respiration courte et laborieuse
(35 à 42 inspirations), par une toux opiniâtre, étaient observées
sur des individus âgés de 16 à 40 ans. Chez l un d ’eux, en tre
autres, la double congestion pulm onaire, survenue en pleine
adynamie, vers la lin de la m aladie, au début de la convalescence
avait de nouveau sérieusem ent com prom is la santé par son
étendue et l’intensité de ses sym ptôm es. Au bout d ’une sem aine,
la résolution était accomplie, ou du m oins assez avancée pour
ôter toute inquiétude et réduire la respiration de 42 à 27 inspi
rations, et le pouls de 115 à 80. Dans ces cas, je donne, tous
arrivé, démon côté, par induction et par hasard, déjà il avait été conseillé en
Angleterre et surtout en Allemagne. Récemment, en France, il a été étudié, à
des points du vues différents, par deux médecins: 1° par le Dr Imberl-Gourbevre dans son Mémoire sur l'arsenic fébrigène et son emploi dans la fièvre
typhoïde, (in Art médical, 1865) ; 2° par ie Dr Papillaud dans un travail intitulé:
Du traitement de la fièvre typhoïde par les reconstituants, et adressé à la Société
impériale de médecine de Marseille. (Voir Ie flulletin des travaux, juillet 1867,
p. 134 et 140).
Ces documents viennent confirmer mes recherches personnelles et assurer ma
conviction intime de voir, un jour, les préparations arsenicales prendre un rang
important dans la thérapeutique des lièvres continues et en particulier de la fièvre
typhoïde.
les jours, de 0 à 10 m illigram m es d’acide arsén ieu x , à doses
fractionnées.
Je noterai une dernière observation : j ’ai vu aussi des in d i
vidus, dont la constitution était déjà appauvrie antérieurem ent,
arriver à la lin de leur fièvre typhoïde nécessairem ent plus débi
lités et plus am aigris encore. Soum is à la médication arsenicale,
dès le début et pendant toute la durée de la m aladie, ils
n’offraient pourtant, com m e cela a lieu si fréquem m ent, ni pâ
leur, ni cachexie, ni rougeur à la région sacrée, ni ulcération,
malgré un séjour au lit el un décubitus dorsal prolongés. Au
contraire, ils conservaient, avec l’intégrité des tégum ents, une
sorte de coloration des tissus et de fraîcheur du teint. Leur con
valescence était également rem arquable par la sim plicité et la
rapidité de sa m arche. Il me sem ble difficile de ne pas attribuer
une grande partie du résultat à l'action essentiellem ent tonique
.de l'arsenic sur les capillaires et la nutrition. Je livre ces faits à
la pratique; elle pourra en tirer profit.
ACTION DE L ARSENIC SUR LES PRODUITS PATHOLOGIQUES. --L’action régénératrice de l’arsenic dans la maladie chronique,
est générale et locale.
i° Action générale. — Le m édicam ent règle el affermit la
digestion, la resp iratio n , la circulation, surtout la circulation
capillaire, les secrétions, en un m ot la série des actes aboutis
sant à la nutrition et à la rénovation m atérielle de l’organism e.
Par là, il exerce nue influence salutaire sur la formation de l'élé
m ent prim itif, quel q u ’il soit, blastèm e ou cellule, sur ce fond
générateur où tous uos tissus, sains ou m alades, puisent inces
sam m ent le principe de leur évolution. En définitive, il prépare
et assure l’intégrité physiologique de l’économ ie, m aintient son
harm onie fonctionnelle, lui im prim e la résistance nécessaire
pour s ’opposer à l’éclosion et au développem ent des produits
pathologiques.
�—
74
—
Ces propriétés (ont de l’arsenic non-seulem ent un agoni cu
ratif, mais encore un agent préventif d e là m aladie.
L ’action curative est positive, elle est la mieux connue, la
plus souvent m ise à profit.
L'action prophylactique n'est pas moins réelle; elle n’est pas
une sim ple hypothèse, elle est égalem ent dém ontrée chaque
jour par la clinique.
En effet, toute maladie chronique dont la prem ière m anifes
tation n’entraine pas fatalem ent la m ort a ses interm ittences;
elle offre deux phases distinctes, alternant plus ou moins sou
vent I une avec l’autre : 1° la période d ’incubation, état latent
pendant lequtd la maladie sommeille au fond de l’organism e, et
vit en germ e au milieu des apparences d’une santé parfaite;
2* la période de confirm ation, caractérisée par la série des
transform ations m orbides évidentes. O r, pendant l’une de ces
m anifestations, par exemple dans le cours de certaines affections*
invétérées et rebelles de la peau ou des m uqueuses, et m êm e
pendant une éruption de tubercules pulm onaires, donnez l’ar
senic et vous verrez souvent la m aladie céder progressivem ent
et disparaître : Voilà l’action curative. Ce n’est pas tout ; après
la cessation des accidents, continuez la m éd icatio n , pendant
longtem ps, des mois ou des années, et vous verrez l'action pro
phylactique se révéler: la maladie perdra peu ’a peu sa désolante
et habituelle ténacité ; ses rém issions se prolongeront de plus
en plus ; ses m anifestations, au contraire, deviendront plus
courtes, moins intenses et m oins com plètes ; elles avorteront,
pour ainsi dire, chaque fois, ju sq u ’au m om ent où l’organism e,
suffisamment régénéré par la m édication, sera devenu un ter
rain im propre à leur développem ent, aura reconquis une vitalité
supérieure, désormais incompatible avec l’évolution des produits
pathologiques.
2° Action locale. — Mais, que ceux-ci vienent à se m o n trer
au sein de l’économ ie, à cette influence m édicam enteuse g én é
rale, s'en joindra une nouvelle, toute lo c a le ,d ’ailleurs étro i
tem ent liée à la précédente.
En effet, a m esure que les élém ents m orbides $e développent,
s hypertrophient et se m ultiplient, ils se rapprochent, se confon
dent et font subir diverses altérations à la tram e des tissus nor
maux interstitiels; ils les com prim ent, les affaiblissent, les’ atro
phient, les ab so rb en t, les détruisent et finissent par se substituer
plus ou m oins com plètem ent à eux. Cela a lieu pour les divers
produits m anant de l’inflamm ation simple ou suppurative, pour
la dégénérescence ou infiltration graisseuse des organes, pour les
noyaux intercapillaires dans l’em physèm e vésiculaire des pou
m ons, pour le tubercule, pour le cancer, etc.
Com m ent agit l’arsenic en ces circonstances? Il n ’attaque pas
le produit pathologique directem ent, spécifiquem ent à la façon
d ’un parasiticide. Son action est tout au tre; il s’adresse prim iti
vem ent aux élém ents, aux tissus restés sains ; il augm ente leur
énergie vitale, rétablit leur constitution histologique, oppose
leur vigueur physiologique régénérée aux envahissem ents des
élém ents m orbides, et, en déterm inant un m ouvem ent organique
en sens inverse de celui qu ’avait produit la m aladie, il m et ainsi
les prem iers en m esure de lutter contre les seconds, de les
com prim er, de les atrophier, de les gêner à leur tour, de nuire à
leur évolution, enfin de prévaloir de nouveau sur eux. Toute la
thérapeutique arsenicale, dans les maladies chroniques, repose
sur ces faits dont l’évidence éclate à chaque iustant.
(La suite au prochain numéro.)
Bulletin thérapeutique.
P o m m ad e contre le» fissures su p erficielles de l’anus.
T anuin....................................... 1 à 3 grammes.
A x o o g e ..................................... 30 grammes.
A porter matin et soir sur les points malades avec le bout du
petit doigt. On peu• élever la dose du tannin suivant l’effet pro
duit. Celte pommade peut aussi être utilement employée chez les
nourrices contre les gerçures du mamelon. — S.
�— 76
Chronique mensuelle.
Marseille, 5 .avril 1868.
M. Virchow a doté le tubercule d’une pauvreté qui a fait for
tune, disait M. Guéneau de Mussy, dans la séance du 3 mars de
l’Académie de médecine. Fortune inépuisable, ajouterons-nous ;
car, semblable à ce dieu de l’Inde, dont on nous a fait connaître
les mystérieuses incarnations, le tubercule renaît de lu i-m êm e et
retrouve sans cesse en lui de puissants éléments de vitalité. Alors
qu’il semblait être à bout de forces, il reparaît tout à coup res
plendissant de jeunesse et fournit à l’Académie de médecine la
matière de cinq nouveaux discours. Que sortira-t-il de cette mon
tagne d’arguments? Peut-être la souris du bon L a fo n ta in e. Tou
jours est-il que le tubercule est le roi du moment. Quelques-unes,
bon nombre de nos sociétés de m édecine, — entre autres celle de
Marseille, — nomment des com missions de ph th isiologie; l’Alle
magne joue plus que jamais du microscope, et la Société clinique
de Londres vient enfin de mettre la fameuse question à l’étude.
M. Guéneau de Mussy a eu, suivant nous, le grand mérite de
rester constamment clair en traitant un sujet qui ne l’est pas du
tout. L’honorable académicien, sans nier que l’inflammation ne
puisse favoriser la tuberculisation, se refuse à ne voir dans le tubertule jaune qu’une pneumonie catarrhale. Une regrettable con
fusion a été introduite dans une question qui paraissait, il y a
quelques années, simple et précise. Grâce à cet enfant terrible
qu’on appelle le microscope, il est maintenant à peu près im pos
sible d’être fixé sur la nature intime et l’essence du tubercule.
Quant à l'inoculabilité de ce produit morbide, elle serait com plè
tement démontrée pour M. Guéneau de Mussy si le professeur
Lebert (de Breslau) n’avait pas affirmé qu’en introduisant dans le
torrent circulatoire une substance quelconque, organique ou in
organique, on pouvait produire la tuberculose. Mais, quoique en
core incomplètes, les expériences de M, Villemin ont rendu à la
science un grand service en établissant la possibilité de la conta
gion de la phthisie. Ici ouvrons une parenthèse.
Disons d’abord que M. Guéneau de Mussy « regarde comme
« contagieuse toute maladie qui peut être transmise d’un orga« nisme malade à un organisme sain. » Cette interprétation ne
nous parait pas très rigoureuse; car, en somme, dans la réelle ac
ception du mot, maladie contagieuse devrait signifier tout sim
plement maladie se transmettant par le contact. Mais soit; adop
tons le sens large que M. Guéneau de Mussy donne au mot
contagieux; admettons que la syphilis comme la scarlatine est
une affection contagieuse. Faudra-t-il avec l’honorable académi
cien s’arrêter là et ne tenir aucun compte du mode intime suivant
lequel la contagion se produit? Voilà un syphilitique : très certai
nement le simple voisinage, — quelque prolongé que vous le sup
posiez,— de ce malade ne vous fera jamais contracter la vérole. Il
suffira, au contraire, d’une station très courte auprès du lit d’un
scarlatineux pour que l’éruption vous envahisse. Il y a là une dif
férence bien évidente, qui réside tout entière dans le mode de
transm ission. Si donc vous démontrez que le tubercule est inocu
lable, c'est-à-dire contagieux à la manière de la syphilis, vous ne
serez pas en droit d’en conclure qu’il est également contagieux à
la façon de la scarlatine et que la cohabitation avec un phthisique
peut donner à un individu sain la tuberculose. Car, remarquonsle bien, quand on parle de contagion de la phthisie, on ne songe
qu’à cette dernière transmission, à cette transmission pour ainsi
dire populaire, qui effraie à bon droit les familles et que peut ame
ner, d’un moment à l’autre, le cours naturel des choses. Pour
nous, nous croyons cette contagion sinon démontrée du moins très
probable; mais nous ne basons pas cette opinion sur les expé
riences de M. Villemin ; nous la faisons reposer entièrement sur
la clinique. L’inoculabilité du tubercule serait pour nous démon
trée jusqu’à l’évidence que nous ne croirions point avoir avancé
d’un seul pas dans cette importante question de la contagion de
la phthisie pulmonaire.
Pendant les mois de décembre 1867, janvier et février 1868, les
décès produits par la tuberculisation seule ont atteint, dans les
hôpitaux de Paris, le chiffre de 745. Il n’y a là rien d’exagéré, nous
dit-on. C’est possible; mais cependant nous ne pouvons nous em
pêcher de trouver ce chiffre terriblement significatif. Nul doute
�— 78 —
qu'il ne faille mettre sur le compte de la dégénérescence des races
les progrès faits chaque jour par la phthisie. Nous sommes beau
coup moins robustes que nos aïeux : c’est là un fait certain.
La preuve en est dans la forme adynamique revêtue depuis un
certain nombre d’années par la plupart des maladies. Le tempéra
ment sanguin tend à disparaître; l’économie ne présente plus les
ressources qu’elle offrait autrefois et la médication tonique prend
d’effrayantes proportions. Combien de fois avons-nous entendu
dire à nos maîtres que de leur temps on faisait dans les pneum o
nies jusqu’à six et huit saignées! G;tte manière de procéder était
daDS les idées du moment, dira-t-on. Très bienI mais ces idées
elles-m êm es n’étaient pas nées de rien. Ex nihilo nihil fit. Le
principe de la médecine physiologique, exagéré par les élèves de
Broussais, avait certainement sa raison d’être dans les faits clini
ques. Peut-être la richesse nutritive de cette époque doit-elle être
attribuée aux agitations de la Révolution et de l’Empire qui, en
rendant les déplacements inévitables, les guerres continuelles, les
fatigues plus grandes pour tous, développèrent outre mesure le
tempérament sanguin. De nos jours c’est l’esprit qui est conti •
n u llem en t en jeu; nous exerçons moins notre corps, mais nous
pensons beaucoup plus; les réflexions profondes, les discussions
passionnées, les veilles fréquentes excitent parmi nous le système
nerveux et affaiblissent l’organisme. L’excès de dépense vitale
qu’amènent les travaux intellectuels prolongés ou l’abus des plai
sirs, — abus plus général qu’autrefois parce que les plaisirs sont
plus accessibles aux m asses, — doit certainement prendre place
parmi ces conditions sociales qui, d’après M. Guéneau de Mussy,
sont de puissants auxiliaires à l’envahissem ent toujours croissant
de la phthisie. L’honorable académicien l’a dit avec beaucoup de
sens, c’est de la médecine sociale qu’il faut faire à présent, non
plus de la médecine individuelle. C’est en mieux régularisant les
applications de l’hygiène, en faisant daDS l’éducation de l’enfant et
du jeune homme une part plus large aux exercices physiques, en
favorisant l’agriculture (et en diminuant, par cela seul, le nombre
des individus qui viennent épuiser leur corps et consumer leur
esprit dans Tardent milieu des grandes villes,) que nous fortifie
rons les races et leur permettrons de résister aux atteintes du
79 —
fléau. Celle question est bien autrement importante que celle de
l’inoculation ou de la non spécificité du tubercule. M. Guéneau de
Mussy a fait preuve de beaucoup de scds en appelant sur elle l’at
tention des hommes compétents.
Le discours de M. Bouley est rempli déconsidérations emprun
tées à la pathologie des animaux. Le savant vétérinaire trouve
dans la manière dont se comporte la morve chronique inoculée à
un cheval saiD, une explication très plausible des phénomènes
qui suivent l’inoculation de la granulation grise.. De cette étude
comparative il conclut que le tubercule de la phthisie, de même
que celui de la morve, est un produit local succédant à une mo
dification de la crase sanguine. Avec M. Guéneau de Mussy,
M. Bouley refuse donc de voir dans le tubercule pulmonaire une
simple inflammation de l’organe. Quant à la contagion de la phthi
sie, elle n ’est pas douteuse, et il est du devoir des Académies sa
vantes de faire connaître ce fait au public au lieu de le lui cacher.
M. Bouley a raison. Jamais, au dissimulant un mal, nous n’avons
pu en entraver la désastreuse action. Soyons homme et envisageons
de sang-froid le fléau pour en atténuer les effets dans la mesure
de notre intelligence et de nos forces.
Nous disions dans notre dernier numéro que nous reprochions
à notre époque de se laisser trop absorber par les faits de détail et
de perdre la notion des vues d’ensem bb. Le sobre et remarquable
discours de M. Barth nous a donné pleinement raison. Le micro
scope a proclamé l’existence de la pneumonie caséeuse; mais la
clinique refuse d’admettre celle inflammation étrange et nou
velle qu’elle De connaît pas, qu’elle n’a jamais vue. Le microscope
varie plus encore que le sexe tant aimé du grand monarque de la
Renaissance; la clinique, au contraire, ne change point, car c’est
la nature prise sur le fait : entre les deux, bien fol qui hésiterait.
Aussi, malgré les travaux des micrographes d’outre-Rhin, M. Barth
considère-t-il la prétendue pneumonie caséeuse comme formée
uniquement par ces tubercules en masse que LaeDriec appelait
tubercules crus.
Peut-être l honorable M. Barth est-il allé un peu loin; peut-être
n’a -l-il point tenu assez compte des découvertes de l’école alle
mande; mais ce qui du moins nous paraît évident, c’est qu’à
�— 80 —
force de vouloir remoDter aux éléments premiers des maladies, on
finit par négliger complètement la marche de ces dernières, leur
lieu d’élection, leur aspect particulier. Par le temps qui court, on
laisse trop volontiers de côté ce quelque chose qui réunit en
semble les symptômes et leur donne une couleur spéciale, cette
inconnue, en vertu de laquelle la diarrhée de l'entérite a une si
gnification différente de celle du choléra, et l’élément histologique
observé dans l’exsudât inflammatoire un sens autre que le même
élément constaté dans l’exsudât cancéreux. Avec le microscope, on
ne juge les lésions que par leur structure intim e et l’on en arrive
à ne plus remarquer en elles que la molécule initiale. « A ce
« compte-là, dit M. Barth, on ne verrait dans l’arc de l’Etoile, le
a palais de l’Industrie et Notre-Dame que des composés de pierres.
« Un pont sur la rivière ne différerait pas d’une prison, parce
« que l’un et l’autre seraient bâtis en pierres m eulières; un puits
« serait l’équivalent d’une tour, parce qu’ils seraient construits
« l’un et l’autre de pierres semblables, disposées de plus de la
« même façon. »
Cette phrase a excité la verve railleuse de l’honorable M .Béhier.
Toutefois, dans le discours de ce dernier nous avons vainement
cherché des arguments sérieux et nouveaux. M. Béhier a essayé
de répondre à M. Barth..... et à bien d'autres; il a fait preuve
comme toujours d’une étonnante facilité d’élocution ; il a eu de
l’esprit, beaucoup d’esprit, mais le fond manque un peu dans ce
discours, et pour notre part, si M. Barth nous avait complètement
convaincu, ce ne sont pas les paroles de M. Béhier qui pourraient
nous faire changer d’opinion. Plus sérieuse a été la réplique de
M. Hérard; il ne dépendait pas, toutefois, du jeune académicien
d’introduire de la clarté là où la confusion règne encore en m aî
tresse. Le passage de l’hépatisation rouge à l’hépatisation jaune
(pneumonie caséeuse), nous paraît un fait assez facile à compren
dre, mais fort malaisé à prouver. L’argumentation de M. Barth
reste donc ce qu’elle était avant les discours de MM. Béhier et H é
rard, c’est-à-dire vigoureuse, précise, un peu absolue si Ton
veut, mais du moins très rationnelle et très pratique. Quoi qu’on
en dise, l’observation clinique sera toujours pour le médecin le
seul critérium possible. Certes, ne dédaignons pas le microscope,
mais attendons, pour adopter sans restriction ses décrets, qu’il
nous ait donné des garanties suflisantes de stabilité. Jusqu’à nou
vel ordre, quand le microscope dira oui et la clinique non, disons
toujours non avec la clinique.
Pas plus que l’honorable M. Barth, notre confrère le Dr Villard
n'est partisan des théories allemandes. Dans un mémoire lu à la
Société de médecine de Marseille, travail riche en faits cliniques
et en déductions ingénieuses, M. Villard a trouvé le moyen d’étu
dier les phénomènes les plus intimes de la pleurésie sans faire in
tervenir aucunement la prolifération conjonctive, sans abuser de
la cellule ou du granule, sans tenir compte de la moindre papille.
Par contre, son mémoire, qui est un traité complet de la pleurésie,
a l’avantage inappréciable d’être tout entier basé sur une idée
complètement neuve. Pour le Dr Villard, la thoracenlhèse ne doit
pas être seulement un moyen extrême et héroïque : elle constitue,
dans les cas de pleurésie, une véritable méthode de traitement,
méthode qui remplace avec avantage les vésicatoires, les purga
tifs, les diurétiques, etc., dont l’action lente décourage le malade
et le débilite trop souvent. L’idée est discutable, sans doute, mais
elle est nouvelle et mérite d’être sérieusement étudiée. Nous le
répétons, dans le cours de ce long et consciencieux travail notre
confrère ne s’est appuyé que sur les théories françaises. Indépen
damment du mérite incontestable de son œuvre, nous savons le
plus grand gré au Dr Villard de n’avoir point contribué à satis
faire cet appétit vorace de l’Allemagne, lequel semble vouloir ré
duire à néant tout ce qui n’est pas germanique.
En fait de voracité, aucun animal ne l’emporte sur la louve du
Dr Auzias-Turenne. Non contènte d’avoir avalé une quantité rai
sonnable de poils, de feuilles et d’os, la terrible bête a trouvé le
moyen d’engloutir en outre une mâchoire de mouton, un crâne de
chien et je ne sais combien de doigts d’adulte! Quel robuste appé
tit et quel complaisant estomac! — L’animal était affamé, dit
M. Bouley. — (Peste, nous le voyons bien.) — Il était enragé, ma
nifestement enragé, dit M. Auzias-Turenne; de plus il portait
sous la base de la langue de petites vésicules qui d’après la des
cription faite par le journaliste, ne pouvaient être que des lysses.
�—
82
—
— 11est fâcheux assurément qu’un homme compétent n’ait pu voir
l’animal et examiner ce dernier point Ce fait perdu à peu près
complètement pour la science, aurait peut-être dissipé toutes les
incertitudes relatives à l’existence des lysses chez le loup.
M Depaul, lui, a parfaitement vu, de ses propres yeux vu. C’est
bien sur un véritable cas de cow-pox spontané que l'habile accou
cheur a eu l'heureuse chance de mettre la main. Aussi, les pus
tules obtenues chez plusieurs enfants à l’aide de ce virus ont-elles
été remarquablement belles. Ah 1 si notre confrère de Marseille,
M. le Dr Rougier, pouvait rencoulrer sur son passage un animal
ainsi privilégié, quelle fêle il lui fera t! Nous Rapprendrons rien
à personne en disant que depuis plusieurs années M. Rougier se
livre à d ’intéressantes expériences relatives aux revaccinatioDS, à
l’inoculation animale et à la valeur du virus provenant directe
ment du veau ou de la génisse (1). Notre confrère n’emploie plus
maintenant que le vaccin de source animale, et il en obtient de
magnifiques résultats. M. Rougier a ouvert, avec un zèle digne
des plus grands éloges, une voie daûs laquelle nous voudrions
voir s’engager de nombreux praticiens. Sans parler des autres
avantages que présente la vaccination animale, cette méthode, si
elle était généralisée, permettrait de rendre plus populaires et plus
efficaces les revaccinations. Que ces dernières soient utiles, c’est
ce que personne ne nie ; mais peul-ou les employer sans danger
pendant les épidémies de variole? Oui, disent les uns; non, ré
pond la Société de médecine de Grenoble. Encore sous l’im pressiou de l’épidém ie de petite vérole qui vient de sévir sur cette ville,
l’honorable compagnie s’est, de plus, prononcée énergiquem ent
en faveur de l’isolem ent des varioleux. Paris n’est plus aussi op
posé qu’aulrefois à l’adoption de ce système, et, depuis peu, des
salles spéciales ont été ouvertes à l’hôpital de Lariboisière pour
les malades atteints de petite vérole. Nous applaudissons de tout
cœur à cette mesure. Depuis une dizaine) d’années l’isolem ent
des varioleux est pratiqué dans nos hôpitaux de Marseille. Celte
conduite si sage, si rationnelle d’ailleurs, nous a prouvé que l’ag-
gloméralion de ces malades dans une salle grande et bien aérée,
loin de rendre. — comme le redoutaient nos confrères de Paris,
— plus iDlense et plus actif le pouvoir propagateur de la variole,
dim inuait, au contraire, le nombre des faits de transmission
L'espace nous manque pour parler longuement de l’excellent
mémoire lu à la Société impériale de chirurgie, par M. Paulet, pro
fesseur agrégé au Val-de-Grâce Cette élude a pour objet les suites
immédiates ou éloignées des lésions traumatiques des nerfs.
M. Paulet ne croit pas que le rétablissement des fonctions ner
veuses, dans les parties du corps aüimées par un nerf sectionné
ou détruit en partie, se fasse par la voie anastomotique. Mais
alors quelle route suit donc l’influx nerveux? M. Paulet l’ignore
et la physiologie ne le sait pas davantage. C’est pourquoi, nous
dispensant de poursuivre cette inconnue qui jusqu'à présent s’est
dérobée aux recherches des plus habiles, nous signalerons de
suite à nos lecteurs l’intéressante notice du Dr Sicard, sur YEuca
lyptus globulus. Notre confrère marseillais a étudié avec le plus
grand soin les caractères de ce magnifique végétal et les produits
chim iques que fournissent les feuilles du gigantesque Australien.
Cette étude eût été parfaite si M. Sicard fût entré dans quelques
détails plus spécialement médicaux, et nous eût fait connaître le
rôle que l 'Eucalyptus globulus peut remplir en thérapeutique.
S’il est vrai que les extrêmes se touchent, nous passerons sans
difficulté aucune de la botanique à la chirurgie et de YEucalyptus globulus à l’opération que M. Bernard a pratiquée, il y a
quelques jours, à l’Hôtel-Dieu de Marseille. Il s’agissait celte fois
encore, comme pour le malade dont nous parlions dans notre der
nier numéro, d’une tumeur anévrysmale. L’artère liée parM. Ber
nard est l’iliaque externe, et tout nous fait espérer que celte audace
chirurgicale, légitimée par l’habileté de l’opérateur, aura pour le
malade les plus heureux résultats. Audaces fortuna jucat.
Plaise au ciel que ce dicton tienne parole au courageux explora
teur qui naguère nous entretenait publiquement de ses projets et
de ses espérances. Toutes les sciences ont intérêt à ce que l’expé
dition de M. G. Lambert réussisse. Ajoutons qu e, nous autres
Provençaux, nous serions heureux et fiers devoir un Français
clôturer, par la découverte du pôle Nord , l’ère des explorations
�5e ANNÉE.
boréales, inaugurée 300 ans avant J.-C. par un de nos ancêtres, le
marseillais Pylhéas.
Notre chronique du mois de mars était déjà sous p resse, lors
que nous avons appris la nomination de MM. Rampai et Rousset
comme professeurs d’anatomie et de toxicologie. Dans l’intérêt de
notre école et dans celui des élèves, nous nous réjouissons sincè
rement de ce double choix.
D' S eux fils.
Nouvelles et Variétés.
M. le professeur Bouisson a été nommé doyen de la Faculté de
Montpellier, en remplacemept de M. Bérard, admis à la retraite.
— Plusieurs médecins de Marseille ont fait, ces temps derniers,
avec succès, des Conférences sur des sujets de physiologie ou d’hy
giène, ce sont : MM. Mireur, Maurin, Mittre, (Jueirel, Sicard et
Millou.
— M. Cosle, directeur de l’École de Médecine, a été nommé
membre de l’Académie de Marseille.
SOUSCRIPTION
EN FA V EU R D’UN C O N FR ÈR E M ALHEUREUX
FRAPPÉ
d ’ d ÉMIPLÉGIE
Et qui ne fait pas partie de l’Association.
L’Association Médicale des B ouches-du-R hone..........
MM. Seux père...........................................................
Seux fils..............................................................
Fabre...................................................................
Marseille. — Impr.
C ayer
el C., riu> Sainl-Ferréol, 57.
40
10
10
20
fr.
»
»
»
U N IO N M ÉDICALE
18G8.
DE LA VACCINE
; I !.;■ ;■
Par le D' ROUGIER.
\ ___
E t rte la v accin atio n p a r le v accin rtc g én isfic^,.
En 1804 et pendant trois années consécutives, l’Académie de
Médecine a agité une des plus grandes questions de prophylaxie,
qui intéresse à la fois les peuples et les gouvernem ents. Il s’agis
sait de savoir si la vaccine, pendant soixante-dix ans, n ’avait
rien perdu de sa force prem ière et si en passant de génération en
génération dans l’organism e hum ain, elle n ’était pas susceptible
d ’y puiser des principes d ’alfeclions dialhésiques et virulentes,
transm issibles par la vaccination ; de nom breuses observations
de syphilis com m uniquées avec la lymphe vaccinale n’ont laissé
aucun doute à cet égard.
Les populations, en acceptant avec em pressem ent et recon
naissance les bienfaits de la vaccine, ont toujours m anifesté des
craintes, qui ont été justifiées de nos jours par la science, et que
des m édecins imbus de fausses doctrines avaient repoussées.
C ontrairem ent à l’opinion publique et à celles d’autres médecins,
des plus éclairés, ils ont soutenu le principe que le virus vaccin
ne pouvait com m uniquer que la vaccine, dans sa pureté, sans
autre alliage contagieux; et ceux-là m êmes qui avaient mission
de servir les progrès de la vaccine, la retenaient dans une voie
qui aurait pu com prom ettre ses im m enses services. En effet,
MM. Bousquet et Topain firent un affreux mélange du virus
vaccin avec d ’autres virus, et n'obtinrent par son inoculation
rien autre que la vaccine. Ils en conclurent que le virus vaccin
ne peut contam iner un individu d’une maladie dont un autre est
atteint. Ces fausses idées ont abouti à de cruelles déceptions.
Les m édecins instruits à présent des faits m alheureux de trans
mission syphilitique, savent com bien est dangereux l’emploi de
toute sorte de vaccin.
5
�— 8G D onnons ici tout d'abord, un tém oignage de gratitude au di
recteur de la vaccine M. le professeur D epaul, pour avoir attaqué
de front les erreurs funestes qui entachent la plus belle décou
verte de la m édecine m oderne, et d ’en avoir triom phé par son
incisive et éloquente parole.
M. Depaul, eu portant a la tribune de l'Académ ie de m éde
cine la discussion sur la syphilis vaccinale, a eu non-seulem ent
pour but de faire reconnaître et accepter par tous, la réalité de la
transm ission de la syphilis par l’inoculation de la vaccine, mais
encore d'indiquer le moyen certain d'éviter tous les accidents
malheureux qui peuvent l'accom pagner. Ce moyen que M. D e
paul a présenté a l'Académ ie, est le vaccin de la vache, inoculé
directem ent à l’homme.
E n 1800, Troja inaugura à Naples ce mode de vaccination pour
donner de la force au virus vaccin qu’il pensait devoir s'affaiblir
par des transm issions successives, la com parant au virus syphi
litique qui s’était adouci depuis son invasion.
Galbiati, savant et habile chirurgien de l'hôpital des Incura
bles fut son successeur. 11 ém it en 1810], l’opinion q u ’on peut
inoculer d ’autres virus avec la vaccine de l’hom m e, et voici les
principes de la doctrine qui l'inspirait : « Si dans l'hom m e, d it-il,
il y a plusieurs maladies transm issibles par l’inoculation d ’un
sujet à un autre; si ces maladies ne se confondent pas entre elles
et que leurs germ es développent les effets propres du virus dont
ils ém anent, plusieurs m aladies pourront donc se com m uniquer
avec la vaccine sans se confondre avec elles. Si plusieurs m ala
dies ne sont pas transm issibles à la v ach e, leurs germ es réunis
à ceux de la vaccine dans le virus, restero n t inutiles sur cet an i
mal. La vaccine qui se développera en lui sera donc pure et libre
du mélange de toute contagion, parce q u e lle est le produit u n i
que des pustules vaccinales du virus et des hum eurs propres de
l’animal.
« Ce n ’est pas une panique, ce n’est pas une hypothèse que
l’homme puisse souvent gagner des m aladies avec la vaccine hu
maine, c’est prouvé par les faits, appuyé par le raisonnem ent et
constaté par les m édecins observateurs.
« Celui qui veut dissiper cette crainte, celui qui prétend inspi
rer une folle assurance de ne point m ultiplier avec la vaccine les
m aladies de l’hom m e, quoique le vaccin en contienne les ger
mes, n ’est pas un philantrope. Il se rend par avance responsable
de toutes les victimes qui pourront être immolées à une si folle
croyance. »
Cotagno, son collègue, médecin au même hôpital, disait:
Quand on inocule on inocule tout. « Chi innista lutto innisla. »
G albiati, conséquent avec ses principes, installa a Naples la vac
cination de la vache h l’hom m e, qu'il appela vaccination animale
Il eut pour successeur son élève, le D r N egri, qui se livre avec
un plein succès à cette pratique, adoptée aujourd'hui par tous
ses confrères.
En France, deux m édecins seulem ent avaient tenté l’essai de
*a m éthode de G albiati. Le prem ier, le Dr Jam es, en 1827, vou
lant régénérer l'ancienne vaccine dont la dégénérescence déjà à
celle époque avait pris une grande consistance, se livra à la pra
tique de cette m éthode pendant trente ans sans pouvoir vaincre
l’indifférence des Académ ies et celle de ses confrères. Le D r J a
m es n ’avait pour but que de rendre au virus vaccin sa force pri
m itive, sans envisager l’im portance d ’écarter toute contam ina
tion, par la vaccine de l'hom m e.
Le Dr Friards qui, dans sa longue carrière médicale a toujours
fait une étude attentive de la vaccine, inocula à des vaches le
cow -pox spontané q u ’il avait rencontré le 10 mai 1828. Il en lit
l’annonce par une note insérée dans un journal politique, m ais
des difficultés insurm ontables, des frais sans résultats propor
tionnels ne lui perm irent pas de continuer longtem ps, de sorte
que M. F riards finit par perdre son cow-pox.
Ce n ’est q u ’en 1804 que la m éthode napolitaine a été im
portée de Naples à Paris par le Dr Lannoix, qui y a fondé un
établissem ent de vaccination anim ale. De cet établissem ent a
�— 88 —
rayonné dans diverses contrées celte m éthode que des m édecins
du plus haut m érite font triom pher : les Drs W alorm on a B ru
xelles, P issinà Berlin, P onsorafà S aint-Pétersbourg. Elle vient
d’étre introduite aussi b Floreuce|, a V ienne, et ju sq u ’en A m é
rique.
M. H u sso n ,le savant directeur de l’Assislance publique de
P aris, s'est hâté d'ordonner un service spécial de vaccination,
par le cow -pox de M. Lannoix, dans les hôpitaux de la capitale.
M. Husson satisfait de ses résultats en a pris la défense devant
1 Académie de M édecine. « 11 me sem ble, d it-il, que la vaccina
tion animale a pris aujourd’hui droit de cité. De très nom breuses
vaccinations et revaccinations, par le cow -pox ont été pratiquées
avec succès dans des établissem ents publics im portants, indé
pendam m ent de celles qui s’appliquent aux hôpitaux ; en o u tre,
depuis plus de trois années, la plupart des familles parisiennes
ont eu recours à ce mode d'inoculation, pour se prém unir co n tre
des dangers qui sont loin d ’être imaginaires ; c’est là, d’après
l’avis d ’hommes éclairés, et si I on interroge l’opinion exprim ée
par la commission académique elle-m êm e, un résultat heureux.»
Ces témoignages en faveur de la transm ission des m aladies
par la vaccine, achèveront sans doute, d’éclairer l'opinion m édi
cale et nous dispensent d’entrer dans de plus grands détails.
Après de si grandes autorités qui signalent les dangers possi
bles de la vaccine jennerienne, nous avons cru faire acte de
dévouem ent à la science et à l’hum anité, en fondant à notre
tour, à M arseille, un établissem ent de vaccination avec le cow pox de génisse dont les heureux succès nous encouragent a
continuer la pratique, m algré de grandes difficultés et des frais
peu rém unérateurs.
Si, d’une part, la vache est réfactaire aux m aladies virulentes
qui se transm ettent a l’hom m e ; e t si, d’autre part, la vaccine de
la vache est douée d’une force plus g ran d e; deux avantages en
ressoriiiout : 1° celui d ’écarter tous les dangers qui peuvent
accom pagner la vaccine de l’hom m e ; 2 U de com m uniquer dans
— 89 —
l’organism e humain une im m unité plus grande contre la variole.
Les expériences de M. Bicord, comme celles de MM. F our
nier, Danet, D epaul, pour inoculer la syphilis à la vache n ’ont
am ené aucun résultat.
Mais, dira-t-on, n’est-elle pas sujette à la tuberculose? La tu
berculose n ’est pas héréditaire dans la race bovine, elle est très
rare dans les pays d’élevage, c ’est une maladie qu’elle acquiert
bien rarem ent aussi par un long séjour dans les villes où l’air
confiné des étables peut y créer des miasmes infectants. Quant à
l’affection charbonneuse, les sym ptôm es en sont si m arquées que
de suite on en reconnaît l'existence. Notre honorable et savant
confrère M. le Dr Sirus Pirondi, dans un article inséré en m ars
1865 dans ce journal, réfute victorieusem ent ces objections. Il
ajoute « mais isolé ou à l’état collectif, le charbon sur lequel on
a le plus principalem ent insisté constitue une de ces maladies
qui ne laissent guère place à l’erreur du diagnostic, et ce serait
véritablem ent une chim ère que de repousser le cow-pox, par cela
seul que la vache est susceptible de devenir charbonneuse. Il
est inutile d’insister davantage sur ce point. »
Les sujets que nous employons pour vaccinifères sont des
vêles de deux à trois mois, récem m ent arrivées sur notre marché
pour y être abattues, selon les besoins de notre consommation
et qui dans un trajet de voyage de dix, quinze à vingt jours, au
raient succom bé avant leur arrivée. Du reste, ne sait-on pas
toute la sollicitude du gouvernem ent pour protéger la santé des
anim aux qui servent à la nourriture de la population. La peste
bovine ne passe pas la frontière, cl si par extraordinaire quel
ques cas se déclaraient à l’intérieur, les bêtes atteintes aussitôt
abattues par ordre ne peuvent la propager; aussi, de ce côté,
point de craintes. La vache donne toujours un vaccin pur,
exem pt de toute souillure, qui met à l’abri de tout danger et
dégage la responsabilité du médecin.
Les observateurs convaincus de la dégénérescence du vaccin,
et du ralentissem ent progressif de la durée préservative de la
�— 90 —
vaccine, par une plus grande fréquence de nos jo u rs d'épidém ies
varioleuses, qui attaquent un plus grand nom bre de vaccinés,
ont conseillé le renouvellem ent du vaccin et les revaccinations.
Pour renouveler le vaccin, il faut le puiser h sa source. M ais,
comme le cow-pox spontané est très rare, et qu’il perd après
plusieurs transm issions, la force prem ière, il faut pour lui m ain
tenir cette force, le porter su r la vache, le conserver sur elle,
et le prendre pour chaque vaccination h l’homme.
M. Bousquet, adversaire autrefois de l’affaiblissem ent du
vaccin, aujourd’hui convaincu, a prédit au vaccin animal la m êm e
dégénérescence qu'au vaccin hum ain. Nous nous inscrivons en
faux contre cette assertion toute gratuite, depuis une année que
nous expérim entons, nous avons toujours observé les m êm es
phénom ènes locaux et généraux aussi accentués, au com m en
cem ent qu’à la fin de nos expériences. M .Lannoix, depuis quatre
ans, ne s’est jamais aperçu d’aucune différence dans les résul
tats. M. Depaul, pendant les neuf mois q u ’ont duré les expé
riences qui ont été faites par le cow-pox aux vaccinations de
l’Académie, a vu les dernières pustules aussi belles que les p re
m ières, et il rem arque, en outre que le cow-pox de transm ission
à la vache produisait sur l’hom m e des sym ptôm es aussi intenses
que ceux du cow-pox spontané. M. le Dr D anet, médecin au Mi
nistère de l’intérieur, après avoir inoculé quarante génisses, n ’a
constaté aucun caractère différentiel dans la production de leur
vaccin, si ce n ’est un degré de force plus ou m oins grande selon
la variété de race.
La race qui nous donne ici le plus beau vaccin et le plus fort
est la race suisse.
Les prem iers auteurs ont décrit les sym ptôm es de la vaccine
en tout semblables h ceux que le cow -pox de génisse reproduit
toujours, et que l’ancien vaccin a perdu. Et si le vaccin jen n e
rien avant sa déchéance, avait une im m unité plus longue contre
la variole, aujourd’hui la vaccine régénérée par le cow-pox aura
reconquis son ancienne préservation. Ce raisonnem ent nous pa
raît la logique du bon sens, mais une preuve de plus de la force
du cow-pox ; nous la trouvons encore dans les succès qu’il
obtient dans les revaccinations, car la moyenne de succès est de
20 0/0 avec l’ancien vaccin, et de 40 0/0 avec le nouveau.
L ’exactitude de ce chiffre ressort des nom breuses revaccinations
pratiquées par M. Lannoix dans divers établissem ents publics,
collèges, hôpitaux, e tc ., et p arM . D anet, dans les établissem ents
pénitenciersM u gouvernem ent. Nos résultats a nous leur sont
conform es.
On a objecté que le cow-pox de transm ission de la vache
n ’était pas le vrai vaccin. Mais ne sait-on pas que dans les pre
m iers tem ps d elà découverte, on s’était servi de ce moyen pour
la propager? M. Husson, le savant et zélé secrétaire du Comité
central de Paris, faisait em barquer sur des navires divers ani
m aux, vaches, brebis, etc., qu’on inoculait pour pouvoir la porter
au delà des m ers. Il écrivait [en 1863 :
« L ’art peut à volonté développer le cow -pox en inoculant à
la vache la m atière de la vaccine prise sur l’homme. Cette expé
rience a été faite pour la prem ière fois au village de Fongueux,
près Reim s, par Duquenelle, chirurgien distingué de cette ville,
la maladie a présenté la succession des phénom ènes que j'ai
décrits plus haut ; on a ensuite réporlé la m atière de la vache sur
plusieurs enfants et la vaccine a parcouru sur eux son cours
accoutum é de la m anière la plus régulière. Cette expérience a
été ensuite fréquem m ent répétée par plusieurs m édecins et vé
térinaires avec un semblable succès ; je l’ai faite m oi-m êm e un
grand nom bre de fois.
On a fait a cette vaccine le reproche de ne pas réussir à
l’égal de l’ancienne, les insuccès que les praticiens ont éprouvés
ne sont dus qu’a leur inexpérim encc ; mais lorsqu’on la pra
tique avec attention, on peut avoir m ême de plus nombreuses
réussites; q u ’elle soit num ériquem ent inférieure ou supérieure,
le plus im portant c'est qu’elle écarte tout danger de contagion.
A côté du reproche de presque nullité, on a accusé sa violence.
�— 92 La croyance d’une trop forte action part de Jen n er; il redoutait
tant les effets directs du cow-pox spontané, q u ’il est douteux
qu’il l’ait jam ais pris h sa source, et ce fut de la main de la laitière
Sarah Nilmes qu’il inocula pour la prem ière fois, en 179 6 , le
virus vaccin h l’enfant Philip, âgé de 10 ans. Les inoculations
récentes et authentiques du cow-pox spontané n ’ont eu aucune
suite grave. Le Dr F iard, en 1844, inocula le cow -pox trouvé
sur une vache de la ferme de Magendie ; le Dr B arlhenais fit avec
le cow-pox trouvé à Beaugency, quatre vaccinations et quatre
revaccinations qui ne furent suivies d'aucun accident. Tous ceux
qui ont expérim enté le vaccin de g én isse, n ’ont obtenu que ce
qu’ils voulaient, des phénom ènes inflamm atoires plus prononcés,
indices d'une m eilleure vaccine, phénom ènes qui ont rarem ent
nécessité quelques applications ém ollientes.
Si nous nous en rapportons à ce qui se passe à Naples, la p ro
phylaxie du cow-pox est bien établie. Il est de n o to riété publique
dans cette ville que la vaccine animale préserve m ieux que la
vaccine hum aine, et que les personnes vaccinées de bras h bras
sont plus sujettes h contracter la variole, ce qui fait q u ’au jo u rd’hui la pratique de la vaccination par le cow-pox y est devenue
générale. M. le D r Negri y opère environ quatre m ille vaccina
tions par an, nom bre à peu près égal à celui des naissances.
Aussi les épidémies de variole y sont rares et c'est chez les per
sonnes étrangères à la ville et dans la garnison, com posée de
soldats de diverses contrées que cette maladie fait des victimes.
M. Lannoix cite, dans les m ém oires q u ’il a lus à l’Académie de
Médecine, deux épidémies varioleuses arrêtées dans leur m arche
par le cow-pox de génisse :
1° A la colonie de M ettray la variole exerçait ses ravages; le
m édecin, m anquant de vaccin et dans un grand em barras, vint à
Paris prendre conseil de M. Trousseau ; ce grand initiateur de
tout ce qui pouvait agrandir le vaste cham p de la m édecine et
qui a donué les encouragem ents à la nouvelle m éthode, l’adressa
à M. Lannoix, qui s ’em pressa, selon sa louable obligeance, d'ex
pédier à M ctlray, une génisse inoculée dont le vaccin servit aux
vaccinations et revaccinai ions de tout le personnel de la colonie
et la petite vérole disparut.
2 L’autre épidémie est celle qui avait envahit le Bas-Meudori
près P aris; le médecin de la localité ne pouvant se procurer du
vaccin nulle part, eut recours à M. Lannoix, qui prêta son con
cours dévoué à ce c o n frè re , et ils pratiquèrent ensem ble les
vaccinations et revaccinations, qui arrêtèrent celle épidémie
com m e celle de M ettray.
L ’im m unité qui fut com m uniquée dans ces circonstances aux
personnes vaccinées et revaccinées est une preuve de la toute
puissante efficacité préservatrice du vaccin de génisse.
(A continuer.)
MÉCANISME DE LA DÉGLUTITION DE TRAVERS
ou
D É G L U T IT IO N D É V I É E
Par le Dr II. GUINIER,
Professeur agrégé b la Faculté de Montpellier, médecin consultant aux Eaux de Cauterets.
Personne n ’ignore que si l’on avale de travers , on éprouve
aussitôt des quintes de toux convulsive et même des vom ituritions pénibles qu’il est difficile de m aîtriser, et dont nous som
m es tous tributaires.
Mais peu de personne s se rendent compte du m écanism e de
la déglutition déviée.
En effet, et je rem arque tout d'abord, la locution elle-même
de déglutition déviée est absolum ent inexacte. Il ne s'agit pas,
com m e on va le voir, d’une déglutition, m ais d’une inspiration ;
ce n’est pas la déglutition qui est déviée ou mal faite, c’est le
corps dégltilé ou l’alim ent, solide ou liquide, qui est dévié de sa
voie norm ale par un agent étranger a l’acte de la déglutition,
et cet agent, c’e^l le courant d’air produit au travers du larynx
�— 05 par le mouvement inspiratoire. En d'autres term es, la dégluti
tion se fait toujours de la même m anière, et ses m ouvem ents ne
sont jam ais dévies de leur rhythm e normal ; c’est l’intervention
intem pestive de la respiration (et, dans la respiration, de l m s piration ) qui produit seule l’accident. Enfin, ce ne sont pas les
organes de la déglutition qui sont en cause, ce sont uniquem ent
ceux de la respiration.
La circonstance la plus favorable h la production de la déglu
tition de travers, nul ne l’ignore, c’est la conversation durant le
repas. C’est le plus habituellem ent quand on parle avec anim a
tion, la bouche pleine, que l’on s'expose à avaler de travers.
Que se passe-t-il alors?
L’exercice de la parole se fait au moyen d ’expirations plus ou
moins profondes qui vident la poitrine de l’air q u ’elle peut con
tenir. De là, la nécessité (Yinspirations ordinairem ent incon
scientes ou autom atiques et d’autant plus im périeuses, que la
conversation est plus anim ée, c’est-à-d ire que la poitrine se vide
d’air à un plus haut degré. O r, ces inspirations m aintiennent la
glotte ouverte et appliquent Je bord libre de l’épiglotte et sa face
linguale sur la langue; et plus elles sont puissantes, plus aussi
s’ouvre le larynx (ceci est un point très im portant). Une de ces
inspirations peut s’effectuer au m om ent m êm e où la bouchée
alim entaire préparée par la m astication et réunie en m asse p u l
peuse autour de l’épiglotte redressée, q u ’elle tend à dépasser
dans tous les sens de son bord libre, est su r le point d 'être
avalée..S i le m ouvem ent de déglutition se fait assez vite pour
précéder cette inspiration intem pestive, aucun phénom ène n’a
lieu. Si au contraire, cette inspiration précède la déglutition et
surtout si elle surprend le bol alim entaire dans son passage par
dessus l’épiglotte, il peut se faire q u ’une parcelle, petite ou
grosse, de ce bol alim entaire soit entraînée par le courant d ’air
inspiré, qu elle soit ainsi déviée vers l’in térieu r du larynx large
m ent ouvert, et q u ’elle arrive à toucher celte partie du rebord
des ligaments vocaux gui circonscrit la glotte et qui tapisse la
muqueuse vo ale proprement dite.
À cet instant toujours très
court, la sensation perçue provoque l’action réflexe et la toux et
les vom iturilions se produisent. On dit alors que l’on a avalé de
travers; il serait plus juste de dire que l’on a respiré mal à
propos. Mais la succession du m ouvem ent inspirateur et de la
déglutition se fait si rapidem ent, qu’il est difficile de les distin
guer l’un de l’autre sans un examen attentif, et l’on comprend
que les personnes peu familières aux études physiologiques et
laryngoscopiquesaient plutôt rapporté l’accident à la déglutition;
car on avale en réalité en m ême temps que l’on respire, et l’on
n ’a réellem ent conscience que de la déglutition. De là, les locu
tions vulgaires: avaler de travers, déglutition déviée.
Los accidents de la déglutition déviée s’observent fréquem
ment à C auterels, dans un mode d’emploi local de l’eau sulfu
reuse, dans lequel il ne saurait s’agir en rien de déglutition. Je
veux parler de Yaspiration de l’eau m inérale par les narines, ce
que l’on désigne entre baigneurs sous le nom de reniflement. Ce
mode d’ablution va même me servir, ici, de contre épreuve. Le
m écanism e de l'action réflexe est identique, et cependant la res
piration seule est en jeu .
Les prem ières aspirations d’eau nettoient les fosses nasales
des m ucosités plus ou moins épaisses et abondantes qu ’elles peu
vent contenir, et ne s’accom pagnent d’aucune sensation désa
gréab le; l’eau, en effet, retenue par ces mucosités, ne pénètre
pas très profondém ent. Mais une fois le passage libre, les aspi
rations peuvent devenir assez puissantes pour faire rapidem ent
arriver le liquide dans le pharynx, et il n ’est pas rare alors que
quelque gouttelette soit même entraînée par la violence du
courant d ’air ju sq u ’au travers de la glotte. A l’instant m ême du
contact de ces gouttelettes avec la m uqueuse vocale, les se
cousses de toux convulsive et les vom iturilions caractéristiques
d elà prétendue déglutition déviée se produisent. Les gargarisoirs de La Raillère, à Cauterels, en sont très souvent l’écho.
En résumé; donc, toutes les fois q u ’une inspiration brusque et
�06 —
en quelque sorte irréfléchie surprend un corps étranger dans le
voisinage de l’ouverture vestibulairc du larynx, il y a de grandes
probabilités pour la production des accidents d e là déglutition
déviée. Ainsi la conversation anim ée, pendant la m astication des
alim ents, n’en est pas l’unique condition prédisposante ; le rire,
la toux, l'éternuem ent en buvant ou en m angeant), en un m ot,
toute circonstance, toute action physio lo g iq u e,— qui, vidant
plus ou moins rapidem ent cl énergiquem ent la poitrine de l’air
qu elle peut contenir, nécessite une brusque inspiration au m o
m ent même d e là présence du bol alim entaire solide ou liquide
dans le pharynx, — expose à avaler de travers.
DE L’ARSÉNIATE D’ANTifflOINE
DANS L’EMPHYSÈME VÉSICULAIRE DES POUMONS
^ouveBlc É lu d e s u r l a M é d ic a t io n a r s e n i c a l e
P ar l e
Dr Ch . ISNA11D
( de Ma r s e il l e ).
(Suite *).
L'arsenic exerce une action variable su r les produits patholo
giques, suivant les conditions générales ou locales où ils nais
sent et se développent, c’est-à-d ire: V suivant l’état constitu
tionnel du malade ; 2° suivant la nature et l’organisation
histologique de la production m orbide, suivant son volume et
sa dissémination au milieu des tissus sains ; 3° suivant la part que
l'inflammation et la congestion prennent à sa form ation.
1° Toute détérioration profonde de l’organism e, la période
cachectique des maladies hâtent la m arche des produits patho
logiques, en atrophiant et affaiblissant partout les tissus nor
maux chargés de la résistance et de la réparation. O r, l’arsenic
(1) Voir les numéros de Novembre, Décembre, Janvier, Février, Mars el
Avril de l’Union Médicale,
est particulièrem ent utile dans ces conditions générales fâ
cheuses ; en reconstituant la santé dans son ensem ble , il
devient un des plus sûrs moyens de s’opposer au développement
des productions nouvelles. Ainsi, agit-il contre les scrofulides
et les suppurations superficielles e t profondes qui aggravent la
cachexie scrofuleuse; contre certains catarrhes pulm onaires
accom pagnés de secrétion abondante cl fétide, de fièvre, de
consom ptiou et de m arasm e; contre le parasitisme animal ou
végétal, éclos sous l’influence de convalescences prolongées, ou
de longues maladies aiguës ou chroniques. Les deux plus fu
nestes pseudoplasm es, le tubercule et le cancer, si inégalem ent
influencés par la médication arsenicale, doivent en partie celte
différence, à la différence m ême des conditions générales où
ils ont évolué. En effet, le tubercule apparaît surtout dans la
prem ière m oitié de la vie, dans celte période de laborieux efforts
où l’organism e poursuit son com plet développement physiolo
gique. Au contraire, le cancer naît de préférence dans la seconde
partie de notre existence, au m om ent où nous avons atteint
toute la plénitude de ce développem ent. L un résulte d’une per
version particulière de la nutrition avec insuffisance; l’autre
d’une perversion particulière avec excès. L’arsenic est m erveil
leusem ent approprié à cette misère physiologique (Bouchardat),
à cette décoordination organique (Cross), qui engendrent la
phthisie; il réussit très bien dans la cachexie tuberculeuse,
comme le prouvent les effets plus ou moins solides el durables
obtenus par son emploi. La guérison du cancer p arles prépa
rations arsenicales est m alheureusem ent encore une illusion
thérapeutique, malgré quelques tentatives dont il ne faut mécon
naître, sans doute, ni le m é rite , ni l'utilité. Que peut un agent
reconstituant sur un organism e où la nutrition est dans toute sa
puissance relative? C ependant, ici encore se retrouvent, dans
une certaine m esure, les propriétés reconstituantes du m édica
m ent, et elles sont bien manifestes dans la cachexie cancéreuse,
su rto u t au début.
�— 99 2° Les produits à organisation inférieure, ou à tendance ré
gressive, ceux qui n’ont pas franchi la période cellulaire, sont
les m oins aptes a résister aux tissus sains régénérés par l’arse
nic; j ’en dirai autant des productions peu volum ineuses et desséminées au milieu de tissus norm aux vigoureux. 11 n ’en est plus
ainsi des produits à organisation supérieure; de ceux qui on t
atteint la transform ation fibreuse; de ceux qui tendent naturel
lem ent à se m ultiplier et se généraliser partout ; de ceux qui ont
acquis le volume de tum eurs plus ou moins considérables et qui
ont atrophié, absorbé ou détruit, dans leurs interstices, ju s
q u ’aux derniers vestiges des tissus norm aux. Voilà pourquoi les
tum eurs fibreuses ou cancéreuses sont les plus réfractaires aux
préparations arsenicales; pourquoi on a réussi quelquefois dans
une maladie elle-m êm e très redoutable, I hypertrophie ganglion
naire généralisée, décrite pour la prem ière fois dans ces dernières
années par M. Nélalon (1) ; voilà pourquoi, le tubercule, cette
néoplasie essentiellem ent pauvre, est susceptible d 'être arrêtée
dans sa m arche envahissante; pourquoi la m édication convient
si bien dans certaines inflammations sim ples ou suppuratives,
dons la dégénérescence graisseuse des tissus nerveux, m uscu
laire et cellulaire; par exem ple, dans l'em physèm e vésiculaire
des poum ons, dans l’ataxie locom otrice progressive, dans l’alté
ration athérom ateuse des parois vasculaires, e tc ., voilà pourquoi
les derm atoses, même les plus invétérées et les plus reb elles,
finissent presque toujours par céder, ou au moins par être p ro
fondém ent am éliorées.
3° La théorie cellulaire, on le sait, fait dériver de l’inflam m a
tion tous les produits pathologiques, y com pris le tubercule et
le can cer; par suite, ils auraient tous une période initiale com
m une, l'hypertrophie ou l’hyperplasie des cellules plasm atiques,
et varieraient seulem ent dans les déviations, les m étam orphoses
ultérieures.
(I)
Journal de médecine et de chirurgie pratiques,
Ciiui(|Qe
de M. Nélalon.
Décembre 1866, p. 535 ;
Sans me placer à ce point de vue très controversé et, d’ail
leurs, encore peu accessible à la pratique, je rappellerai que
souvent la congestion et l’inflammation prennent plus ou moins
départ à la constitution, à l’entretien et au développem ent des
néoplasm es. L’arsenic pourra donc les influencer diversement
et nuire même à leur évolution en agissant sur un de leurs élé
m ents habituels. Sous ce rapport encore, les productions m or
bides nous offrent de grandes différences. Ainsi, trouvons-nous
la m édication nulle contre le cancer, très efficace contre les
affections cutanées, les suppurations, etc., très utile contre le
tubercule. En effet, la congestion et l’inflammation n’intervien
nent q u ’exceptionnellem ent dans le prem ier cas; elles consti
tuent un élém ent indispensable dans le second ; elles jouent un
rôle im portant dans le troisièm e, le tubercule et la granulation
étant toujours, suivant la plupart des m icrographes, ou précédés
ou suivis de congestion, d ’engouem ent, de pneum onie.
(La fin au prochain numéro.)
Bulletin thérapeutique.
E x cellen t an esth ésiq u e local. —
A rnott.
Prenez de la glace, pilez-la par petits morceaux dans un sachet
de toile ; mettez deux parties de cette glace pilée et une de sel de
cuisine dans un sachet de gaze ou de mousseline; mêlez exacte
ment et appliquez ce dernier sur la partie du corps que vous
voulez rendre insensible; deux à dix minutes suffisent. Cet anes
thésique est d’une grande ressource pour les petites opérations
souvent très douloureuses qui se pratiquent à la surface du
corps.
�—
Chronique mensuelle.
Marseille, 5 Mai 1808.
L’Association générale des médecins de France a tenu à Paris,
le dimanche 19 avril, son assemblée générale annuelle sous la
présidence du Dr Cazeneuve, président de la Société locale du dé
partement du Nord. L’assistance était nombreuse comme toujours;
aussi, l'Eloge de Rayer prononcé par M. A. Latour a t-il été ac
cueilli avec un enthousiasme dont l’amphithéâtre de l’Avenue
Victoria conservera longtemps le bruyant et émouvant souvenir.
Certes, ce discours méritait les sym pathies de tous, car le secré
taire général de l’Association ne s’est jamais montré plus digne et
plus entraînant qu’en rendant hommage au savant, qui fut homme
de bien dans toute la force du terme, et qui a rendu son nom in
séparable d’une œuvre destinée a vivre éternellement.
Un intéressant discours de M. Gallard sur l’état de l’Associa
tion, un rapport de M. Barrier sur l’Assistance médicale dans les
campagnes, — rapport dont les conclusions ont été adoptées par
l’assemblée et soum ises au Ministre, — enfin le vote pour l’élec
tion du président général, ont été les faits les plus saillants des
séances des 19 et 20 avril. Le résultat du scrutin a été le suivant :
En première lig n e........... M. Tardieu.
En deuxièm e lig n e........... M. Larrey.
En troisième lig n e........... M. Cazeneuve.
La province n’a donc pas été négligée dans celle circonstance,
car elle a eu l’honneur de présider la grande réunion parisienne
et celui non moins grand de figurer sur la liste de présentation
pour la présidence. Nos confrères de Paris se sont d’ailleurs prêtés
avec la meilleure grâce du monde à cet hommage qui, dans la
personne du D' Cazeneuve , s’adresse à tout une classe de con
sciencieux travailleurs.
C’est qu’en effet elle a du bon, quoi qu’on en dise, celle bonne
vieille province et ses productions méritent souvent de marcher
de pair avec celles de la capitale. Lorsque, par exem ple, M. B ley-
101
—
nie, professeur d’accouchements à l’Ecole de médecine de Limo
ges, nous communique quatre cas d’opération césarienne pratiquée
par lui, et dont le résultat se résume en ces mots,— pour les mères
trois succès, un insuccès; pour les enfants trois succès, un insuc
cès; — il nous prouve que la fermeté et la puissance dans les
idées, l’audace et l’habileté dans l’exécution se rencontrent ailleurs
qu’à Paris.
Le magnifique résultat obtenu par le professeur de Limoges est
fait pour donner à réfléchir aux détracteurs quand même de l’opé
ration césarienne. Sur les quatre femmes opérées, la seule qui
succomba avait subi avec succès, six ans auparavant, la même
opération. Quanta la mort de l’un des quatre enfants elle est due
très probablement à une application de forceps pratiquée sans
résultat avant l’ouverture du ventre.
Le travail du Dr Bleynie a paru dans la Revue médicale de Li
moges, excellente publication mensuelle fondée depuis plus d’un
an par le Dr Louis Bleynie fils, et à laquelle nous sommes heureux
de payer un juste tribut d’éloges et de sympathies.
Limoges est trop près de Périgueux pour que le souvenir du
professeur Jarjavay ne se présente point naturellement à nous.
Jarjavay était un enfant de la Dordogne ; il a été frappé à un âge
où il aurait pu faire encore beaucoup pour la science. Sa mort
crée un nouveau vide dans la Faculté de Paris, si cruellement
frappée depuis deux ans. A côté de lui vient de s’étendre au champ
du repos un praticien renommé, M. Alquié, médecin inspecteur de
Vichy, qui s'ôtait fait, par ses hautes relations non moins que par
son talent, une réputation justement méritée.
La mort moissonne et ne se lasse point. La jeune génération
médicale aura fort à faire pour remplacer les hommes qui ne sont
plus. Elle ne faillira point à sa mission, nous en sommes persuadé;
car elle se tiendra en garde contre les dangereux entraînements
de l’esprit et elle n’acceptera pas à la légère les doctrines exposées
dans uno thèse récente. Nous n’avons point l’honneur de con
naître M. Grenier, l’auteur de ce travail ; mais nous prendrons la
liberté de lui dire qu’il est regrettable de voir un esprit sérieux et
intelligent débuter dans la vie en niant Dieu, l’âme, la volonté, le
ibro arbitre, c’est-à-dire toute la partie supérieure de notre être,
�en supprimant les obligations morales, c’est-à-dire les devoirs,
et en réduisant au néant, par cela seul, toute la série des droitsOn avait bien dit de nos jours que les perfectionnements de l’in
dustrie supprimaient l'intelligente main-d’œuvre, et faisaient de
l’homme une machine; on avait abaissé le roi de la création jus
qu’à la locomotive ; mais personne n’avail encore songé à élever la
locomilive jusqu’à l’homme. Qui peut le plus peut le moins, tout
le monde admettait cet axiome; mais personne n’osait soutenir
que le moins peut, à un moment donné, devenir le plus. Et pour
tant M Grenier ne réalise-t-il point cette absurdité mathémati
que lorsqu’il dit qu’il n’est ni impossible, ni contradictoire, —
quoique le fait n’ait pu être constaté — que les locomotives aient
des volontés et des passions ?
En vérité tout ceci est bien triste. M. Grenier est un homme de
bonne foi, nous en sommes convaincu ; il a usé de son droit en
exposant des opinions sincères. Mais ces théories qu’il considère
comme devant réformer l’humanité sont pour nous rétrogrades
et opposées à tout progrès; bien plus, ce sont des doctrines de
mort et nous désespérerions d’une société qui les adopterait comme
ligne de conduite. Heureusement, le mal n’est pas aussi grand
qu’il en a l’air. La publicité de certains systèmes a pour effet inévi
table de créer dans le public une émotion qui exagère considéra
blement l’importance numérique des croyants et des adeptes.
Lorsqu’on va au fond des choses on est étonné de trouver si peu.
Nous croyons pour notre part qu’on s’est trop occupé de la thèse
de M. Grenier. Il ne s’agit là que d'un fait individuel; on a eu
le tort, suivant nous, de l’interpréter d’une manière trop générale,
en l’a ppliquant à la Faculté de Paris.
Il y a eu, il y a encore des matérialistes parmi le personnel de
cette faculté; c’est incontestable. Mais la doctrine émanée de l’école
de Paris n’est point le matérialisme ; c’est l'organicisme, ce qui
est bien différent. Les organiciens croient à Dieu et à l’âme; en
reconnaissant la nécessité d’une impulsion première communiquée
au début de l’existence par le créateur, impulsion qui, transmise
ensuite d'organe à organe et d’individu à individu, constitue la
vie, ils sont peut-être plus spiritualistes que les vitalistes euxmêmes. Nous ne savons si dans l’avenir la faculté de Paris s’in
— 103 —
carnera dans le matérialisme, mais ce que nous affirmons sans
crainte d’être contredit, c’est que trop facilement on a confondu
deux doctrines tout-à-fait opposées, trop légèrement on a consi
déré tout Parisien comme un matérialiste, trop souvent enfin on
a terni la splendeur de la grande et ancienne école, en portant
contre les organiciens d’autrefois et d’aujourd’hui une injuste ac
cusation d’athéisme et de bestialisme. Aujourd’hui comme autre
fois, on peut être élève de la Faculté de Paris, partager les doc
trines de cette école et être franchement spiritualiste. Voilà ce
que nous tenions à établir.
Au demeurant, si tout homme a le droit d’exposer les opinions
qu’il croit bonnes, tout individu a celui de ne point les accepter.
Nous comprenons très bien qu’une famille ne se soucie point
d’exposer ses fils à être en contact avec les quelques professeurs
qui encouragent et patronnent les doctrices affirmées par M. Gre
nier. Mais alors il faut de toute nécessité, ou bien qu’une notable
partie de la population française s’éloigne de nos Facultés, ce qui
serait déplorable, ou bien que l’enseignement supérieur soit libre.
Et pourquoi ne le serait-il point en effet? Pourquoi n’aurionsnous pas, comme en Belgique, à coté des universités de Gand et
de Liège, fondées et entretenues par l’Etat, nos écoles médicales
libres de Louvain et de Bruxelles? L’enseignement n’y perdrait
rien et la conscience publique serait satisfaite.
Un de nos plus spirituels confrères dont le pseudonyme ne cache
à personne le véritable nom, s’exprimait en ces termes dans le
numéro du 11 avril de VUnion médicale : « Un esprit libre et tolé
rant ne peut pas admettre que la science soit le matérialisme, que
le progrès soit le matérialisme, qu’en dehors du matérialisme il
n’y ait qu’erreur, illusion, obscurantisme et rétrogradation de
l’esprit humain. Toutes ces choses se disent sérieusement, sincère
m ent, il faut le croire, quoique quelquefois accompagnées de
commentaires injurieux et blessants. Eh bien I ces doctrines dé
menties par l'histoire de toutes les sciences et des hommes qui
leur ont imprimé les progrès les plus splendides, peut-on en dé
montrer l’errenr aujourd’hui sans s’exposer à l’accusation d’en
nemis de la science et du progrès? La liberté de la discussion
serait-elle tolérée aujourd’hui à la faculté pour les professeurs qui
�— 404 —
voudraient soutenir une doctrine opposée au matérialisme? Si
c’est possible, qu’on l’essaye donc! Et si ce n’cst pas possible, de
quel côté est l’intolérance et l’asservissement. »
Sagement raisonné et puissamment dit. Mais pourquoi le Dr Simplice ajoute-t-il qu’il redoute le mysticisme religieux autant que
le matérialisme? Pourquoi semble-t-il, par crainte de ceux qu’il
désigne sous le nom de scholastiques du moyen-âge, hésiter à
demander franchement la liberté de l’enseignement ? Soyons logi
ques. S’il y a intolérance, réclamons la liberté pour tous; mais si
nous obtenons cette liberté, ne redoutons plus l’exposé public
d’aucune doctrine. Que les spiritualistes, quels qu’ils soient, aient
le droit comme les matérialistes de faire connaître leurs théories
médicales, et que d’autres puissent, s’ils le jugent convenable,
enseigner un système mixte ; tel est le vœu que nous formons.
Nous n’oublions pas surtout cette parole d’un poète que per
sonne ne songera à accuser de partialité pour les scholastiques :
Qu’on puisse aller môme à la messe,
Ainsi le veut la liberté.
Ce que Ja liberté ne veut pas c’est qu’on serve de son nom pour
bouleverser l’ordre établi dans la nature. La femme-soldat est une
monstruosité véritable que l'antiquité nous a offerte avec beaucoup
de monstruosités d’un autre genre, et dont le XIX0 siècle a fait
justice en la reléguant au fond du barbare royaume de Dahomey.
Mais il appartenait à notre époque de nous faire connaître la
femme-docteur, être bizarre s'il en fut jamais, conception souve
rainement anormale et anti-physiologique au premier chef. Dans
notre thèse inaugurale, après nous être efforcé de prouver que la
vie physiologique du sexe se résume en un seul fait, reproduction
de l’espèce, nous posâmes cette conclusion : destinée essentielle
ment à avoir des enfants et à les nourrir, la femme a, par cela
seul, une existence toute d’intérieur ; ceux qui emportés par un
beau zèle portent aux nues la femme-laboureur, la femme-docteur,
la femme avocat, prouvent qu’ils n’ont pas la plus petite idée de la
physiologie, c’est-à-dire de la vie réelle.
Est-ce à dire que la femme ne puisse cultiver son esprit et par
ticiper aux jouissances intellectuelles? Non certes; gardons-nous
105
d’une hérésie pareille. Que la femme lise, qu’elle pense, qu’elle
s’instruise ; rien de plus juste; c'est son droit, c’est même son
devoir. Mais si, ne se contentant plus des joies intellectuelles qui
peuvent se concilier avec les occupations du foyer, elle se met à
courir les cham ps, les hôpitaux ou les cours de justice, nous se
rons en droit de lui dire avec Jean-Jacques : « Il ne faut point les
mômes goûts, ni la même constitution pour labourer la terre et
pour allaiter des enfants.........Les modifications extérieures an
noncent l’intention de l’ouvrier dans les modifications de l’esprit.
Une femme parfaite et un homme parfait ne doivent pas plus se
ressembler d’âme que de visage. Ces vaines imitations de sexe
sont le comble de la déraison......... Enfin, je trouve qu’à moins
d’avoir cinq pieds et demi de haut, une voix de basse et de la
barbe au menton, l’on ne doit point se mêler d’être homme (1) ».
Et cependant l’utopie de la femme-libre franchit les mers, et de
l’Amérique elle passe en Europe. A Zurich, trois Anglaises et une
Argovienne suivent actuellement les cours de l’Université, fré
quentent les hôpitaux, assistent aux autopsies et se livrent à de
délicates études de dissection ! La femme-docteur, nous l’espérons
bien, ne passera pas nos frontières. Nos gracieuses compatriotes
sauront se tenir en garde contre de pareils excès qui feraient per
dre pour toujours à la société française la distinction et le charme
qui la caractérisent d’une si remarquable façon.
Dans sa séance du 8 avril, la Société de chirurgie a reçu la
communication d’un fait très-curieux relaté par M. Tillaux. Il
s’agissait d'un malade qui tenta de se suicider en enfonçant dans
sa poitrine une tige métallique ; celte tige longue de seize centi
mètres traversa le bord antérieur du poumon gauche, le péricarde,
le bord gauche du cœur, la paroi postérieure du ventricule gauche
et tout le lobe inférieur du poumon droit. Pendant quatorze
mois elle séjourna dans la poitrine du malade. Ce dernier finit par
succomber à une hépatisation pulmonaire et à de nombreuses
hémoptysies. On constata à l’autopsie que le cœur ne présentait
pas trace d’infiammation.
(1) J.-J. Rousseau : Nouvelle Hcloue.
�106
Ce fait prouve que les plaies du cœur ne sont pas toujours
mortelles, et que cet. organe, traversé de part en part par une lige
métallique, peut continuer à battre très-régulièrement. Mais
quelle conduite tiendra le chirurgien dans un cas semblable?
Devra-t-il, malgré l’imminence d’une syncope mortelle ou d’une
hémorrhagie foudroyante, extraire le corps étranger ? Parmi les
membres de la société les uns, avec MM. Dolbeau et Desprôs, sont
de cet avis ; les autres avec M. Chassaignac penchent pour l’ex
pectative. En somme, le cas nous paraît fort embarrassant, et
l’illustre société s’est trouvée, relativement à ce fait, aussi divi
sée que l’Académie de médecine au sujet de la tuberculose.
Le mois d’avril a été peu fructueux pour cette dernière.
MM. Briquet, Hardy et Pidoux ont pris la parole, mais sans pro
duire d’incident nouveau.
Le premier de ces orateurs, moins Allemand encore que M. Barlh,
s’est borné à signaler les contradictions nombreuses d’après lui,
dans lesquelles sont tombés nos confrères d’Outre-Rhin en ex
pliquant à leur manière la nature, la production et la mort du
tubercule.
M. Hardy est resté presque toujours sur le terrain de la clinique.
La tuberculose est-elle une maladie virulente et spécifique? Non ;
car le propre de ces maladies est d’être amenées par une cause
spéciale et unique : or, le tubercule se développe spontanément
sous l'influence des causes les plus variées; de plus, il se transmet
par l’hérédité, par la contagion et peut-être par l’inoculation. La
phthisie peut-elle être réellement le dernier terme de certaines ma
ladies ? Sans aucun doute. Seulement, l’honorable académicien ne
croit pas, comme M. Pidoux, que la phthisie ne soit, dans ces cas-là,
qu’une transformation de ces maladies premières; que, par
exemple, l’arthritisme et Yherpétisme puissent, en vertu d’un
changement de forme, produire la tuberculose. M. Hardy n’admet
pas d’ailleurs l’existence d’un état particulier désigné sous le
nom d’arthritisme, attendu que la goutte et le rhumatisme, seules
manifestations qui pourraient constituer cette maladie, sont trèsdilTérentes l’une de l’autre et ne doiveut point, en conséquence,
désigner un état unique. La phthisie survenant chez les goutteux,
semble avoir une marche lente et une tendance assez prononcée
— 107 —
vers la guérison. Quant au rhumatisme, pas plus que l'herpétisme,
il ne paraît exercer la moindre influence sur la tuberculose.
La réplique de M. Pidoux a eu pour but principal d’établir qu’il
n’avait jamais eu la pensée de considérer certaines phthisies comme
des transformations de maladies constitutionnelles anciennes. Ces
maladies, à la longue, dégénèrent et s’affaiblissent en laissant des
reliquats dans les organes. Si alors la phthisie se développe, elle
rencontre dans l’organisme, par le fait de ces restes d’affection
prem ière, une résistance qui modifie d’une manière spéciale la
marche et les allures de ta tuberculose. Telle est la pensée de
M. Pidoux. En somme, qu’est-ce donc que ces restes, ces reliquats
de maladies constitutionnelles ? En quoi consiste ce conflit mysté
rieux qui se livre entre les éléments anciens et nouveaux ; et
comment cette rixe pathologique peut-elle modifier la phthisie au
point de lui donner un cachet spécial ? Voilà autant de points que
l’illustre médecin des Eaux-Bonnes aura grand besoin d’élucider
lorsqu’il traitera à fond cet important sujet.
On le voit, la question a peu avancé depuis le mois dernier.
N’était le fait communiqué à la Patholoyical society de Londres,
par le Dr Burdon Sanderson , nous n’aurions pu ajouter le plus
petit fleuron à la couronne trop riche de la tuberculose. M. San
derson conclut de nombreuses expériences que l’inoculation du
tubercule n’a rien de spécifique ni de virulent, et que, en dehors
de toute inoculation, une simple irritation mécanique suffit pour
faire naître la granulation grise dans les poumons des lapins
sacrifiés. Si ce fait est vrai, que deviennent les expériences de
M. Villemin, de MM. H érard, Cornil, et de tant d’autres ?
Que devient également notre pauvre Algérie au milieu des
fléaux qui la désolent ? Misère, fam ine, authropophagie , typhus,
tous les maux sont réunis contre elle. La saison avance cependant;
l’été peut faire naître de nouvelles et terribles maladies au milieu
de ces malheureux indigènes épuisés par la faim et par les be
soins de toutes sortes. Que l’on veille donc, que l’on s’efforce par
tous les moyens possibles de diminuer l’intensité du mal avant
l’arrivée des fortes chaleurs ; et, s’il le faut, que l’on soit en m e
sure de préserver l’Europe 1
Dr S f,ux fils.
�- 108 —
5eannée .
UNION MÉDICALE
NÉCROLOGIE
Le corps médical de Marseille a perdu l’un de ses membres,
M. Bernard, homme foncièrement honnête, praticien sage et
modeste, estimé de tous ses confrères, aimé de tousses clients.
M. Bernard était membre du Comité Médical des Bouchesdu-Rhône.
Nouvelles et Variétés.
Le scrutin pour la présidence de l’Association générale des
médecins de France a donné les résultats suivants :
En l re ligne................... M. Tardieu.
En 2e lig n e................... M. Larrey.
En 5e lig n e.................. M. Cazeneuve, de Lille.
Bienfaiteurs de la Caisse des pensions de l’Association :
MM. Ricord, 500 fr.: Seux, 100 fr.; Horteloup père, 100 fr.;
Horteloup fils, 100 fr.; Marchai de Calvi, 100 fr.
Madame veuve Lallemand a fait don aux hospices de Mont
pellier d’une somme de 20,000 francs. L ’ancienne salle SaintCorne, de rHôtel-Dieu Saint-E loi, s’appellera désormais salle
Lallemand.
Marseille. — Impr. Cayeu et C., rue Saint-Ferréol, 57.
S é a n c e de la C o m m i s s i o n a d m i n i s t r a t i v e du
Présidence de M. Seux.
8 mai 1 §68<
Acte d’adhésion du Dr Colass, de Marseille.
Lettre du Dr Sanguin, de Saint-Chamas, qui donne sa démis
sion de membre de l’Asssocialion.
Lettre du Dr Albert Pélissier, de Saint-Rémy , sollicitant le
concours de l’Association en faveur de la veuve et des quatre
enfants de M. X ..., mem bre de la Société locale des Bouchesdu-R hône, décédé dans le mois de mars dernier. Déjà, M. le
président avait reçu une demande directe de la veuve de ce
regretté collègue ; mais cette demande n ’étant pas suffisamment
m otivée, M. le président avait dû attendre de nouvelles explica
tions avant d’en référer à la Commission administrative.
La lettre de M. Pélissier contient les trois demandes suivantes:
1* Que l’Association mette la famille de M. A'... à l'abri du
besoin, en lui accordant une rente honorable;
2° Qu'elle fasse obtenir une bourse au plus jeune des enfants,
actuellement au Lycée d'Avignon ;
3* Qu'elle permette au fils aine, étudiant en médecine à Mont
pellier, d'obtenir les quatre inscriptions qui lui manquent pour
obtenir son diplôme d'oIJicier de santé.
M. Pélissier ajoute: Cette famille, virant dans l’aisance pen
dant la vie du père, se trouve plongée dans la gêne depuis sa
mort.
Relativement b la première demande, la Commission, n’ayant
pas la faculté de voter et d’accorder une ren te, alloue b titre de
secours a Madame X ... une somme de 200 bancs.
Relativement a la seconde, la Commission décide que l’Asso
ciation médicale du départem ent de Vaucluse sera invitée par
G
�—
celle des Bouches-du-Rhône h taire une démarche auprès du
Conseil municipal d’Avignon en faveur du fils actuellem ent au
Lycée de cette ville.
Quant h la troisièm e, la Commission décide que les quatre
inscriptions demandées pour le (ils aîné seront payées par l’As
sociation au secrétariat de la Faculté de Montpellier.
M. le secrétaire est prié de faire connaître ces diverses réso
lutions h Madame X ... et à M. le Dr Pélissier.
M. le président rend ensuite compte de l'assemblée générale
tenue à Paris les 19 et 20 avril dernier. Dans la nombreuse
assistance qui remplissait l’amphithéâtre de la rue Victoria, on
rem arquait M. Claude Bernard, les deux vice-présidents de la
Société des Médecins de la Seine, et plusieurs grands person
nages. M. Cazeneuve, président de la Société locale du Nord,
occupait le fauteuil de la présidence. L’allocution prononcée par
ce distingué collègue a été vivement applaudie.
M. Gallard , vice-secrétaire, prenant ensuite la parole , à la
place de M. Amédée Latour, secrétaire-général, qui devait pro
noncer l’éloge de M. Rayer, a fait connaître l’ensemble des actes
et des travaux de l’Association. Voici, d’après ce rapport, l’état
des finances de l’Association :
F. C.
Caisse générale................................................ 56,560 87
Caisse des pensions viagères d ’a ssistance.. . . 108,567 54
Société centrale................................................ 41,549 68
Sociétés locales................................................ 529,551 95
Somme totale............ 555,810 02
L’augmentation sur l’exercice précédent est de 64,274 f. 54 c.
Les secours distribués dans l’année ont été de 19,159 francs,
Les Sociétés locales et la Société centrale ont versé à la Caisse
générale, depuis la fondation de l’Association, 155,849 fr. 27 c.
et le Conseil général nous présente aujourd’hui 164,928 fr. 51 c.
dont 108,567 fr. 54 c. à la Caisse des pensions viagères et
111
—
56,560 fr. 87 c. à la Caisse des fonds généraux ; ce qui fait
31,079 fr. 14 c. de plus que les versements des Sociétés locales
et de la Société centrale.
L ’Assemblée a ensuite adopté une proposition de M. le Dr
B run, trésorier, relative au fonds de réserve dont il est ques
tion dans l’article 26 du Règlement. Pour que ce fonds de ré
serve ne soit pas un obstacle par son importance â ce que les
Sociétés locales aient, en cas de besoin , un fonds de secours à
leur disposition , celles-ci sont invitées â ne placer à leur fonds
de réserve que la moitié au maximum de leurs revenus annuels.
L’éloge de M. Rayer, prononcé par M. Amédée Latour, a été
remarquable â tous les points de vue. C’est une œuvre qui res
tera dans les annales de l’Association.
M. Roger a ensuite annoncé que la statue de Laënnec était
achevée. Il a proposé d’en faire 1 inauguration le 15 août pro
chain. Le chiffre des souscriptions ayant été de 28 ou 29 mille
francs, et les frais n’ayant pas dépassé la somme de 25,000 fr.,
la différence sera versée â la Caisse et portera le nom de Sous
cription Laënnec.
Les candidats à la présidence ont été portés après le dépouillement du scrutin dans l’ordre suivant :
1er tour : M. T ard ieu ............ 59 voix 1
M. Larrey............... 21 T) 1
M. R icord.............. 15 » (- 77 votants.
M. D eoonvilliers... 2 * |
M. B ro c a ............... 1 » 1|
M. C azeneuve........ 1 » 1 ' "
2metour: M. L arrey............... 44 voix 1
M. R icord............... 17 » 1
M. Cazeneuve........ 4 » I
75 votants.
VL B rocca.............. 1 )
»
!
M. M abit................ 5
M. B ouillaud........ l 1) ’
Bulletin b lan c........ 1 0
�112 —
o“e lo«r: M. Ricord................ 17 »
\I. Cazeneuve....... 26 »
66 volants.
M. M abit.................. 17 »
Voix perdues.......... 6 »
Un quatrième tour ayant été nécessaire pour le troisième
nom, le scrutin a donné le résultat suivant :
M. Cazeneuve........ 45 voix
M. R icord.................. 5 »
62 volants.
M. Mabit.................. 11 »
Voix perdues.......... 1 »
Il est donc résulté de ce vote que la liste définitive adoptée par
l'Assemblée generale se trouve composée de la manière suivante:
En première ligne, M. Tardieu.
En deuxième ligne, M. Larrey.
En troisième ligne, M. Cazeneuve.
L’Assemblée a ensuite écouté avec le plus grand intérêt le
rapport de M. Barrier, sur l'assistance médicale dans les cam
pagnes. Les opinions émises par les Sociétés locales ont été
examinées et discutées d’une manière remarquable par le rap
porteur, dont le travail sera envoyé à M. le Ministre de l’Inté
rieur.
Le soir, il y a eu réunion au Grand-Hôtel. A cause de la m ort
de M. Rayer, il n’y a pas eu de banquet.
M. le président ayant terminé cette narration pleine d’intérêt,
la séance est levée.
Le Secrétaire-gentrai,
Dr VlLLARD.
— 113 —
DE L ’ARSÉNIATE D’ANTIMOINE
DANS L'EMPHYSÈME VÉSICULAIRE DES POUMONS
«Air l a M^tllcnUoii a r « e n l c a l e
Par le Dr Gh . ISNARD ( de Marseille ).
N o u v e lle É lud e
( Suite *)•
RÉSUMÉ
I
Récemment introduit dans la chimie et la matière médicale,
l’arséniate d’antimoine est une combinaison régulière, un sel
parlaitem ent défini. Les recherches de MM. Papillaud et Mousnier d’abord, puis celles de MM. Dorvault etChapsal en ont fait
connaître exactem ent les caractères physiques et chimiques, les
divers procédés de préparation, la composition et la formule.
D’après mon expérim entation personnelle, ce sel nouveau a
les propriétés physiologiques et thérapeutiques de l’arsenic. Je
le regarde comme une bonne préparation arsenicale, à la fois
sûre, bien tolérée et d’une commode administration.
A la dose quotidienne de un a dix, et surtout de un a cinq
milligrammes, il est bien supporté et peut être continué trèslongtem ps, pour ainsi dire indéfiniment.
Des essais tentés sur moi-même, en pleine santé, dans le but
de connaître les limites de la tolérance, m’ont permis de cons
tater que, prisen poudre et à doses rapidement croissantes à
(1) Voir les numéros de Novembre, Décembre, Janvier, Février, Mars.
Avril et Mai de l’Union Mèdirnle.
�MA
partir de un centigramme, il ne détermine l'intoxication arse
nicale qu’au moment où l’on arrive a dix centigrammes par jour.
L’arséniate d'antim oine est supporté à doses plus élevées que
les préparations solubles tels que : l'arséniate de soude, l’arsénite
de potasse et, en particulier, l’acide arsénieux qui a provoqué
sur moi des phénomènes toxiques h la dose de cinq à six centi
grammes. Sous ce rapport, il a beaucoup d’analogie avec l’arséniate de fer, autre composé insoluble, toléré lui-même pendant
longtemps à la dose quotidienne de un à dix et même de vingt
centigrammes.
Comme médicament, je l’ai employé avec avantages dans la
chlorose, l’anémie, l’adynamie, les cachexies, certaines névroses,
diverses maladies chroniques du cœur, le catarrhe bronchique
ancien, la phthisie et entin l’emphysème vésiculaire des pou
mons dont je me suis plus spécialement occupé dans mon
travail.
L’arséniate d’antimoine, comme les autres préparations arse
nicales, exerce sur l’emphysème une influence rem arquable; il
ne tarde pas à diminuer la dyspnée, la toux et l’expectoration et
à rendre au malade un bien-être perdu depuis longtemps.
—
II
L’étude de l’emphysème vésiculaire m ’a conduit a rechercher
le mode d’action de l’arsenic, d’abord sur le tissu du poumon,
ensuite sur les autres tissus de l’organisme.
Mais pour tenter avec fruit de pareilles recherches, j ’ai dû
nécessairement m ’appuyer sur l’anatomie, c’est-à-dire rappeler
succinctement la structure de la vésicule pulmonaire, l’anatomie
et la physiologie pathologique de l’emphysème.
La vésicule pulmonaire est constituée par trois élém ents:
une couche de fibres élastiques; un réseau capillaire très-riche;
enfin des noyaux conjonctifs intercapillaires ; ceux-ci, décou-
— H5 —
verts par Villemin, ont été vus ensuite par Ch. Hobin, Deichler,
Henle, Bakody, Crocq.
L’emphysème a deux degrés: 1° dilatation des vésicules
avec amincissement des paro s, c’est-à-dire atrophie des capil
laires et affaiblissement des libres élastiques ; 2° raréfaction,
perforation, destruction des cloisons. Le résultat de ces lésions
est la gêne croissante de l’hématose et de la respiration.
Les théories mécaniques admises depuis Laënnec sont insuf
fisantes pour expliquer l’emphysème. Elles sont toutes basées
sur l’existence préalable du catarrhe pulmonaire. Or, celui-ci
n’est pas constant et, quand il existe, il suit l’emphysème plus
souvent qu’il ne le précède.
L ’emphysème est une véritable maladie ayant ses processus
pathologiques, comme la pneumonie et la tuberculose. Pour
M. Villemin, la lésion primitive, essentielle est l'hypertrophie
des noyaux conjonctifs intercapillaires. En évoluant et se m ulti
pliant, en parcourant leurs phases diverses depuis la simple
augmentation de volume, jusqu’à la granulation et la transfor
mation graisseuse, ceux-ci amènent la compression, l’atrophie
et la disparition des capillaires, la distension et la rupture des
fibres élastiques, c’est-à-dire peu à peu la dilatation, la raréfac
tion, la perforation et la destruction des parois vésiculaires.
Le symptôme le plus saillant et le plus constant de l'emphy
sème est la dyspnée. Or, les préparations arsenicales agissent
favorablement sur elle; donc elles remédient aux lésions vési
culaires qui l’ont engendrée.
Pour apprécier comment l'arsenic modifie le tissu pulmo
naire dans l’emphysème, il faut comparer les différents effets
résultant, soit de l’inhalation de la fumée des cigarettes arseni
cales, soitde l’administration de l’arsenic par l’estomac. Dans le
premier cas, le soulagem ent de la dyspnée est immédiat et pas
sager ; dans le second, il est lent et durable. Dans l’un, le mé
dicament modifie simplement les éléments physiologiques du
poumon, les vésicules restées saines, c’est-à-dire les fibres élas
�tiques et les capillaires encore intacts; il se borne à leur impri
m er, comme chez les arsénicophages, un surcroît d’activité
fugitive. Dans l’autre, il fait valoir les éléments restés sains ou
relativement sains et réparables des vésicules malades: il opère,
sur les capillaires, sur les fibres élastiques ei les noyaux inters
titiels hypertrophiés, une véritable régénération, tendant à resti
tuer à chacun d eux leur structure et leurs fonctions normales.
Ainsi : les capillaires atrophiés se dilatent, reprennent leur cali
bre primitif et deviennent de plus en plus perméables au sang.
Les fibres élastiques distendues et amincies recouvrent leur
volume, leur force et leur propriété d ’expulser l’air. Les noyaux
intercapillaires hypertrophiés éprouvent un arrêt dans leur
accroissement pathologique et leur transformation graisseuse:
ils avaient d’abord comprimé et atrophié les autres tissus des
vésicules, maintenant ceux-ci régénérés les compriment, les
atrophient a leur tour et prévalent de nouveau sur eux.
La curabilité de l’emphysème varie suivant qu’il est arrivé au
premier ou au deuxième degré, suivant que les vésicules ma
lades sont encore organisées ou réparables, ou bien quelles sont
complètement détruites ou irréparables.
A la vérité le diagnostic exact de la lésion anatomique est
très difficile, mais la connaissance approfondie de la maladie
peut y conduire, ou le rendre, au moins, très approximatif.
D’ailleurs, on doit toujours faire intervenir la thérapeutique
arsenicale; quoique variables, les chances de succès sont nom
breuses; d’ordinaire, on arrivera à un soulagement rapide, h
une amélioration réelle; l’on se rapprochera d ’autant plus du
résultat curatif que les individus offriront des conditions plus
favorables quant a l’âge, l’intensité des symptômes, l’ancienneté
et l’étendue de la maladie.
L ’efficacité de l'arsenic s’adresse non-seulement h la dyspnée
de l’emphysème, mais encore à la dyspnée des autres affections
bronchiques et pulmonaires, telles que l’asthme nerveux, l’an
gine de poitrine, le catarrhe pulmonaire, la phthisie. Dans tous
les cas, le médicament a une action commune, indépendante
bien entendu de ses autres effets sur la lésion propre a chaque
maladie et snr les organes intrinsèques de la respiration, les
muscles, par exemple ; il se comporte de la même manière : il
dim inue ou suspend la gêne respiratoire, en agissant imm édia
tem ent sur les éléments anatomiques des vésicules, en favorisant
directement l’hématose et l’expiration. C’est la un fait général,
im portant, très nettem ent mis en lumière par l’étude de l’em
physème.
Les préparations arsenicales ne se bornent pas à attaquer la
lésion essentielle de l’em physèm e, l’altération des vésicules,
elles modifient encore avantageusement le catarrhe concom itant
’a la fois si fréquent et si fâcheux. Ainsi, elles portent simulta
ném ent leur action curative sur les deux principaux éléments
de la maladie et aboutissent plus sûrement à un résultat définitif
complet.
L’acide arsénieux, l’arséniate de soude, l’arsénitede potasse,
l’arséniate d’antimoine, etc., réussissent également bien contre
l’em physèm e. Quel que soit le composé ingéré dans l’estomac,
les doses quotidiennes varieront de deux à dix milligrammes, et
s’élèveront de dix à vingt milligrammes seulement dans les pa
roxysmes. On y joindra utilem ent les cigarettes arsenicales, soit
pour soulager rapidem ent les accès de dyspnée, soit pour aider
le traitem ent curatif ; dans le dernier cas, on les fumera périodi
quement, une dizaine de jours chaque mois. — Dans son en
semble, le traitem ent sera longtemps continué, pendant des
séries de mois plusieurs fois renouvelées.
III
En dém ontrant l’action de l’arsenic sur les capillaires du pou
mon et sur les noyaux conjonctifs interstitiels, l’élude de l’em
physème vient confirmer expérimentalement et compléter deux
�— 118 —
autres faits d'un ordre plus élevé, se rattachant l'un à l'influence
du médicament sur les capillaires généraux, l’autre à son in
fluence sur les produits pathologiques.
Subordonné aux nerfs vaso-moteurs, le système capillaire
prend une très large part dans la circulation et la nutrition. Or,
l’arsenic active et équilibre les fonctions perverties de ce sys
tème, diminue la tension vasculaire, soulage l'effort du cœur,
rétablit dans leur intégrité les actes primordiaux d’assimilation
et de désassimilation. Une très grande partie de son efficacité
doit être rapportée à son influence sur ces propriétés fondamen
tales et communes de notre organism e. De là, ses remarquables
effets dans une foule de maladies diverses, aiguës ou chroni
ques , fébriles ou non fébriles , dans les névroses vaso-motrices,
dans les congestions en général ; dans les congestions apoplecti
ques du cerveau; dans certaines inflammations, dans les derm a
toses , dans la lièvre interm ittente, dans les paroxysmes des
lièvres continues, et en particulier dans les diverses aiaxies ner
veuses et vasculaires de la fièvre typhoïde, dans les congestions
et les phlegmasies hyposiatiques pulmonaires et autres qui la
compliquent si souvent, dans l’hypertrophie du cœur droit con
sécutive a l'emphysème, dans celle du cœur gauche, dans les
affections des bronches et des poumons, dans la chlorose, l’ané
mie, l'adynamie, la convalescence des longues maladies, dans
les cachexies, etc.
L ’arsenic exerce une influence incontestable sur les produits
pathologiques : sur la suppuration ; les sécrétions m orbides; la
transformation graisseuse des tissus cellulaire, nerveux et m us
culaire, celle des parois vasculaires; Uhypertrophie et la dégénéresceuce des noyaux conjonctifs dans l’emphysème; le tubercule;
l’hypertrophie ganglionnaire généralisée; le cancer, etc.
Dans ces circonstances, le médicament possède une action
générale et locale, portant à la fois sur le système capillaire et
sur les divers tissus de l’organisme, sur la localisation morbide
et sur é conomie tout entière. 11 n'attaque pas le produit patho
— 119 —
logique directem ent, spécifiquement, à la façon d’un parasiticide, il s’adresse prim itivem ent aux éléments, aux tissus restés
sains ou relativem ent sains , il rétablit leur constitution histolo
gique et leur énergie vitale, oppose leur vigueur physiologique
régénérée aux invahissemenls des éléments morbides, et, en
déterm inant un mouvement organique en sens inverse de celui
qu'avait produit la maladie, il met les premiers en mesure de
lutter avantageusement contre les seconds et de prévaloir de
nouveau sur eux.
Le succès de celle action régénératrice varie beaucoup sui
vant l’état constitutionnel [du m alade, suivant la nature et
l’organisation histologique du produit morbide , suivant son
volume et sa dissémination au milieu des tissus normaux, sui
vant ses rapports avec la congestion et l’inflammation.
IV
Les considérations précédentes perm ettent maintenant de
juger faction dite altérante de l'arsenic et d’affirmer que, dans
les maladies chroniques et en (are des produits pathologiques,
elle se résum e en une véritable action reconstituante.
Un altérant enraye et pervertit le mouvement de nutrition et
conduit à la cachexie. Au contraire, un reconstituant active et
règle ce même mouvement. Sans doute, l'arsenic est un alté
rant, d suffit de se rappeler que l’anémie et la cachexie arseni
cales ne sont pas rares chez les ouvriers employés aux mines
arsénifères, ou exposés aux vapeurs et aux poussières arseni
cales, mais il l’est exceptionnellem ent. En thérapeutique, sou
action reconstituante est la plus saillante et la plus commune de
toutes; au contraire, son action altérante se révèle très-rare
m ent, presque jamais ; et même, l’état d'aném ie, de détériora
tion organique avancée, la chlorose et les cachexies créent pour
lui une aptitude particulière, une sorte de tolérance indéfinie.
�— 120
Il n'esl donc pas juste de l’appeler altérant, de confondre, sous
une dénomination unique, ses propriétés si diverses, et de vou
loir, comme on le fait trop souvent, un seul mot pour désigner
des effets tout opposés. Le mercure est le véritable type des
altérants; si, exceptionnellement dans la vérole, il peut devenir
un reconstituant, il est avant tout un rapide et énergique anti
plastique et eachectisanl. L ’a rsenic et le m ercure sont les deux
extrêmes de la série, si l'on persiste à les ranger dans la même
classe de médicaments.
Les propriétés reconstituantes et, on peut le dire, les pro
priétés loniques-névroslhéniques de l’arsenic s’exercent par
l’inlluence du grand sympathique et surtout par une portion de
ce système, les nerfs vaso-moteurs, tenant sous leur dépendance
la circulation capillaire et la nutrition. Par là s’expliquent
l’étendue et la multiplicité des effets du médicament, son unité
d’action dans tant de maladies si diverses.
La physiologie moderne et l’histologie viennent donc, à leur
tour, démontrer l'action reconstituante de l’arsenic, confirmer
ainsi les résultats de la clinique et apporter leur sanction aux
travaux des médecins qui, dans ces dernières années, ont cher
ché à approfondir la médication arsenicale.
NÉCROLOGIE.
Le Corps Médical de Marseille a perdu l'un de ses membres
les plus ém inents'dans la personne de M. B ernard, chirurgien
en chef des hôpitaux.— Pour rendre hommage à ce chirurgien
remarquable, dont la perte est un deuil pour notre ville, nous
reproduisons le discours prononcé sur sa tombe par M. le profes
seur Seux :
M essieurs,
Que de coups la mort a frappés dans le corps médical français
depuis quelques années! Maîtres et condisciples, élèves même
— 121
ont été successivement enlevés à notre respect, à notre estime,
à notre affection !
La Société Impérialede Médecinede Marseille, e tl’Association
médicale des Bouches-du-Rhône, corps au nom desquels j’ai
l’honneur de prendre la parole, ont vu depuis quelques mois des
vides bien regrettables se faire dans leurs rangs ! Naguère, nous
étions réunis dans ce champ de repos pour y rendre les derniers
devoirs à Reymonel, puis à Fraissines; aujourd’hui, c’est le tour
de Bernard pour la vie duquel certes nul de nous n’avait de
craintes, car ses forces physiques paraissaient à la hauteur de la
tâche souvent écrasante qu’est appelé à remplir le chirurgien,
qui, comme lui, s’était acquis une réputation bien m éritée d’ha
bileté et de savoir.
Cette apparence de force et les soins affectueux de collègues
éclairés n’ont pu conserver à sa famille et à la cité celui que nous
pleurons en ce moment !
Bernard était sorti de cette pépinière qui, depuis les premières
années du siècle,n’a donné à Marseille que des praticiensdistingués etdes chirurgiens habiles; je viens de noramerde chef inter
nat, qui désigne à notre respect plusieurs maîtres dont chacun
s’efforce de suivre l’exemple.
Élevé 'a cette grande école des hôpitaux, Bernard y a gravi
successivement tous les échelons par son m érite seul; tour à tour
interne, chef-interne, chirurgien-adjoint, chirurgien en chef, il
est mort sur la brèche au milieu des succès que son aptitude
toute spéciale et trente ans au moins d’un labeur incessant lui
avaient assurés; il est mort au moment où sa famille, où les pau
vres, où l’intelligente et généreuse jeunesse de nos hôpitaux, où
une nom breuse clientèle comptaient avec juste raison sur lui!
La Société Impériale de Médecine de Marseille perd un prati
cien des plus éclairés, notre Association des Bouches-du-Rhône
un de ses fondateurs, qui, pendant cinq ans, accupa avec zèle et
dévouement le fauteuil de Vice-Président.
Bernard aimait la science, Bernard aimait passionnément la
�- 122 —
chirurgie, dans laquelle il excellait; mais il détestait le bruit, l’os
tentation, il aimait à faire le bien en silence ; aussi, ne serez-vous
pas surpris quand je vous dirai qu’à son lit de mort il a recom
mandé à son épouse éplorée qu’aucun bruit ne fût lait autour de
lui lorsqu’il ne serait plus, qu’aucune parole ne fût prononcée
autour de son cercueil.
Cette pensée qui dévoile la modestie du savant praticien, ne
pouvait arrêter le besoin éprouvé par ses amis, par ses collègues
des hôpitaux, par les Sociétés médicales dont il faisait partie, de
venir ici au moment de la séparation suprême lui faire ces adieux
qui serrent, il est vrai, le cœur et désolent l ame, mais qui con
solent par l’idée du devoir accompli, qui vous donnent la force
par l’espérance d’un monde meilleur!
Recevez donc, très-cher Collègue, les adieux de ceux qui vous
ont estimé durant votre vie, et qui après votre mort conserve
ront de vous un souvenir durable!
Espérons que votre nom servira d'étoile tutélaire à vos enfants,
et si l’un d’eux veut faire revivre ce nom acquis depuis plusieurs
années à la chirurgie marseillaise, nous en serons heureux et il
trouvera en nous tous, sympathie, appui et protection.
Bulletin thérapeutique.
T ra ite m e n t à e m p lo y e r co n tre l'Im p é tig o «les fo s s e s
nasales.
i° Un purgatif ;
2° Pommade:
Axonge............................. 30 grammes.
Précipité blanc.................. 4 »
En induire tous les soirs, en se couchant, les croûtes et les éro
sions qui existent à l’entrée des fosses nasales.
— 123
3* Pilules :
Calomel............................... 1 gramme.
Extrait de fum eterre........... 4 »
Divisez en vingt pilules égales. En prendre une le matin et par
dessus un demi-verre d’infusion de sassafras mêlé à autant de
lait de chèvre trait nouvellement. — S.
Chronique mensuelle.
Marseille , 5 Juin 1868
Lorsque notre journal, payait le mois dernier, un juste tribut de
sympathie à la mémoire d’Alexandre Bernard, le modeste praticien
mort entouré delà considération universelle, nous étions loin de
nous douter que nous serions dans la triste obligation de couvrir,
quelques jours après, le même nom d’un voile de deuil. Bernard
le chirurgien de l’IIôtel-Dieu vient de mourir emporté rapidement
par une maladie dont il avait déjà ressenti précédemment les
atteintes. Plusieurs discours ont été prononcés sur sa tombe; nous
nous associons de tout cœur aux regrets manifestés dans cette cir
constance par nos honorables confrères.
Si cette mort n’était point venue attrister notre esprit, si quel
ques points noirs ne se montraient à l’horizon, tels que la persis
tance du typhus en Afrique et l’apparition de la fièvre jaune au
Pérou, nous aurions fort allègrement écrit cet article. Un chroni
queur n’a point tous les mois l’heureuse chance de parler à ses
lecteurs de choses qui les intéressent; le neuf, à notre époque, au
rait grand besoin d’être rajeuni et les bonnes nouvelles deviennent
trop rares pour que l’on ne fasse pas très grand cas de celles qui,
d’aventure, passent à votre portée. Or donc, amis lecteurs, prêtez
l’oreille.
Sur la demande faite par le directeur de notre École de Médecine,
M. le Ministre de l’Instruction publique vient de décider que le
concours serait adopté à Marseille pour les places de professeur
suppléant! Selon toute probabilité, dans peu la lice sera ouverte et
�— 124 —
les concurrents se verront aux prises. Voilà une nouvelle qui va
probablement déjouer bien des calculs, déconcerter bien des ambi
tions; c’est triste pour ces dernières, mais au moins l’intérêt géné
ral sera élevéau-dessus des considérations personnelles. Pour nous
qui avons demandé la liberté de l’enseignement supérieur et qui
détestons par dessus tout l’arbitraire et l’absolutisme, nous nous
déclarons très heureux de la mesure libérale qui vient, d’être prise.
En demandant le concours, en usant de toute son influence pour
l'obtenir, M. le docteur Coste a prouvé une fois de plus qu’il com
prenait à merveille son rôle de directeur. C’est là une spécialité
que tout le monde n’a pas ; M. Coste nous permettra de la lui recon
naître, quoiqu’il n’aime pas les spécialistes, comme le prouve son
discours de réception à l’Académie de Marseille. — Ce discours a
fait du bruit. Le temps n’est plus où M. de Voltaire portait aux
nues la virginité de notre Académie, « cette jeune fille qui ne
faisait jamais parler d’elle. » Les années ont marché depuis lors;
VErmite de Ferney ne ricane plus qu’à travers ses rides et la jeune
fille estdevenue une femme accomplie, Grecque doublée de Gaulois,
vraie fille de Provence, au sang chaud, à la fière démarche et dont
les paroles non moins que les actes ont de par le monde un certain
retentissement. M. Coste s’est rangé sous les bannières de notre
charmante concitoyenne; nous le félicitons volontiers. Soutienne
qui voudra que le médecin ne peut sans perdre un temps précieux s’adonneraux jouissances littéraires; nous croyons au contraire que la
culture des lettres et des beaux-arts, en délassant son esprit, lui per
met de se livrerplus fructueusement auxsérieusesméditations delà
science. D’ailleurs, ne l’oublions pas, le médecin est homme du
monde ; à ce titre, il ne doit point négliger d’acquérir les qualités
qui, en rendant son commerce plus agréable, rendent aussi plus fa
ciles les rapports de médecin à malade. C’est avec une vive satisfac
tion que nous constatons les succès littéraires remportés par nos
confrères. Ces succès ennoblissent et élèvent la profession. L’Aca
démie Française en recevant dans son sein M. Claude Bernard,
vient de rendre au savant physiologiste un hommage qui rejaillit
naturellement sur tout le corps médical.
Si les médecins ne s’occupaient pas plus ou moins de littérature,
aurions-nous eu ces intéressantes conférences faites récemment par
quelques-uns de nos confrères, au Cercle Artistique elk l'Associa
tion amicale des anciens élèves du Lycée de Marseille? On a
appelé ces conférences des cours libres ; volontiers nous leur lais
sons ce nom et nous en profitons pour rapporter aux lettres la
part qui leur revient de droit dans le succès qui a couronné ces
essais louables de vulgarisation scientifique. Ce qu’il faut au public,
c’est que le praticien, tout en s’occupant d’études particulières, ne
néglige point sa profession. Tant que les chirurgiens lettrés feront
la splénotomie ou l’ovariotomie comme M. Péan, qui vient de pré
senter à l’Académie de Médecine quatre malades sur lesquelles il
a pratiqué avec succès cette dernière opération, le public n'aura
pointa se plaindre. Tant que les médecins parleront et écriront
comme M. Chaulîard, chacun se déclarera satisfait ; car ce confrère
distingué est un littérateur au moins autant qu’un penseur. Si
l’on en doute, qu’on lise son discours à l’Académie sur la Nouvelle
doctrine d'organologie générale du D' Durand. (Séance du
19 mai.)
La conclusion de ce qui précède c’est que les belles-lettres sont
très utiles au médecin; elles l’élèvent au-dessus du champ sou
vent trop positif de ses occupations journalières; elles élargissent
sa lâche tout en la facilitant; elles le dégagent de ces limites étroi
tes qui s’imposent toujours aux esprits exclusifs.
La discussion sur la tuberculose paraît enfin épuisée; elle a fini
assez tristement et MM. les Académiciens ne semblent pas avoir
fait de grands frais pour ses funérailles. Il est fort difficile, à la
suite de ces longs débats, de poser des conclusions bien précises.
Nous essaierons cependant, dans notre prochain numéro, de résu
mer le plus brièvement possible cette discussion, en insistant de
préférence sur les résultats pratiques qu’elle a pu fournir. Si la
question n’est plus débattue dans l’arène académique, elle ne cesse
point d’ailleurs d'occuper les esprits. La Commission de phthisiologie de la Société médicale des hôpitaux vient de faire appel
à tous les médecins de Paris et de la province en les priant de lui
adresser les faits, détails et renseignements fournis par leur prati
que. Cet appel sera entendu, nous n’en doutons point ; nos confrè
res de Marseille fourniront leur part à l’œuvre dont s’occupe la
�— 12t> —
savante assemblée, sans préjudice des travaux qui seront accom
plis par la Commission phthisiologique de la Société de médecine
de notre ville. On le voit donc, quoique moins visible, moins exté
rieure, la tuberculose est encore à l’ordre du jour.
Uue question plus actuelle pour nous est la réorganisation du
service médical des Sociétés de secours mutuels marseillaises. Les
associations d’ouvriers ont pris à notre époque une très grande
extension. Personne ues’en plaindra, car ces Sociétés, entre autres
avantages, permettent aux honnêtes familles de nos travailleurs
d’avoir à peu de frais le médeciu et les remèdes, et par là d’éviter
en partie les désastres que la maladie entraîne trop souvent à sa
suite dans la classe ouvrière. Bien plus : de nos jours tout se fait
par l’association. Il y a là une tendance instinctive qui prend
sa source au fond même de notre âme, et ce sentiment, en rap
prochant fraternellement les esprits, réunit les efforts de plusieurs
dans diverses œuvres toutes grandes et fortes parce qu’elles sont
poursuivies en commun. Les Sociétés de secours mutuels sont
donc indispensables; d’abord, parce qu’elles rendent service (dans
l’acception la plus réelle et la plus matérielle de ce rnot), puis,
parce qu’elles répondent au désir, à la pensée de chacun.
Mais ce premier point établi, personne, nous le supposons, ne
refusera aux médecins de ces Sociétés la droit de s’associer à leur
tour, rius que tout autre ils ont besoin , en raison de la position
particulière qui leur est faite, de se soutenir mutuellement et de
marcher dans une entente commune. Le médecin de Société remplit
en effet une rude tâche. Accablé par le nombre des malades, écrasé
de travail, obligé de courir aux quatre extrémités de la ville, il
reçoit pour tant de peines, des honoraires fort modiques. Si nous
ajoutons qu’il se trouve souvent en contact avec des familles ren
dues très exigeantes par le besoin et les souffrances, ou avec des
individus qui, en raison de l’allocation qu’ils payent chaque an
née, se considèrent comme ayant acquis vis-à-vis du médeciu des
droits presque illimités, on comprendra sans peine combien les rap
ports établis entre lui et les familles sont parfois difficiles, com
bien aussi sa position peut être fausse, ingrate, pénible même.
Notre confrère, s’il a à cœur de soulager nos intéressantes et labolieuses classes ouvrières, est réellement fort embarrassé pour con
cilier ce désir fort louable avec la nécessité urgente pour lui de
songer à l’aveQir et de ne point négliger une clientèle plus rém u
nératrice.
Nous ne parlons pas ici des temps d’épidémie. Dans ces mo
ments là, certes, la peine et les fatigues redoublent; mais, tout le
inonde sait qu’en pareille occurrence, le médecin ne songe ni à son
temps, ni à sa peine, ni à ses fatigues; une seule pensée reste pré
sente à son esprit: accomplir un devoir que les circonstances élè
vent à la hauteur d’une mission. Nous ne nous occupons actuel
lement que des faits de tous les jours. Eh bien ! il est certain que
très-souvent, même en temps ordinaire, la position du médecin de
société n’est pas tenable. Qui pourra accuser nos confrères, si alors
ils mettent moins de zèle à remplir un mandat régi pardes condi
tions qui le rendent presque inexécutable?
Le Grand Conseil des Sociétés de secours mutuels de notre ville
s’est ému avec raison de cet état de choses. Désireux d’apporter
un remède au mal, il a nommé une commission chargée de pré
senter un projet de réformes. Or, deux causes principales mettent
obstacle au fonctionnement régulier du service médical des So
ciétés: le grand nombre des malades, le groupement des socié
taires dans les points de notre ville les plus éloignés du centre. Le
projet présenté par la Commission nous paraît propre à faire dispa
raître ces deux difficultés. 11 consisterait à diviser la ville en douze
sections et à désigner pour chacune d’elles un nombre de méde
cins proportionné à l’importance numérique des sociétaires grou
pés dans ce périmètre; les médecins devraient de plus être choisis
parmi ceux qui habitent dans la section ou non loin de là.
Sans doute ce projet n’est pas encore complet. Toutefois il nous
semble assez sérieux pour qu’on l’étudie avec la plus grande atten
tion. Nous savons que les médecins des Sociétés de secours mutuels
de Marseille, se sont réunis dernièrement et qu’une Commission a
été instituée par eux. Nous ne doutons point que le projet du
Grand Conseil ne soit examiné consciencieusement, et nous espé
rons que les efforts réunis des Médecins et des Sociétés amèneront
des réformes susceptibles de sauvegarder à la fois les intérêts des
familles et ceux de nos confrères.
Dr S eux fils.
�128 —
N o u v e lle s & V a r ié té s
Le Comité Médical des Bouches-du-Rhône, reconnu par décret
impérial comme établissement d’utilité publique, décernera dans
sa Séance générale d’avril 1869 :
r Une M édaille d’or de la valeur de 200 fr. à l'auteur du
meilleur Mémoire sur la question suivante :
Étude comparative des Constitutions médicales de Marseille
depuis le commencement du XIXe siècle. (Examiner les causes
pathogéniques locales; l’influence du canal de la Durance,; la né
cessité 'du reboisement ; le rôle des grands travaux sur la produc
tion des maladies) ;
2° Une M édaille d’or à l’auteur du meilleur Mémoire sur ce
sujet :
Des anciens Collèges de médecine et de chirurgie comparés aux
Facultés actuelles. ( Déduire de leur étude parallèle les modifica
tions que l’on pourrait adopter pour l’enseignement de la méde
cine) ;
3° Une M édaille d’or pour le travail le plus complet sur cette
question :
Étude chimique des Crucifères, de leur emploi en médecine
et du meilleur mode de préparation de leurs produits pharma
ceutiques.
Les Mémoires, écrits en français, devront être parvenus au siège
du Comité Médical, à Marseille, rue de l’Arbre , 25 , avant le 1er
mars 1869, terme de rigueur.
Les auteurs qui se feraient connaître seront exclus du concours.
— M. Rousset, professeur à l’École de Médecine, a été nommé
membre du Conseil d’hygiène des Bouches-du-Rhône, en rem
placement de M. le Dr A. Fabre, démissionnaire.
— M. le Dr Dauvergne a été nommé médecin des bains des
Catalans.
— Nous avons de bonnes raisons pour présumer que les con
cours pour trois places de suppléants à l'Ecole de Médecine de
Marseille auront lieu en décembre prochain.
Marseille. -» Typ, Cayer et C*, rue Saint-Ferréol, 57.
5e a n n é e .
U N IO N M ÉDICALE
ASSOCIATION GÉNÉRALE
1868.
jJ k s
2
DE PR ÉV O YANC E ET DE SECOURS M UTUELS DES MÉDECINS DE FRANCE
M. le Président de l’Association générale vient d’adresser la
circulaire suivante â MM. les Présidents des Sociétés locales.
Nous nous empressons de publier ces nobles paroles de M. le
Président Tardieu, qui peut compter sur notre confiance et notre
respectueuse sympathie.
P a r is , ie 27 ju in 1868.
« M onsieur le Président et très-honoré Confrère,
« Le vote de l’Assemblée générale du 19 avril dernier vient
de recevoir la sanction souveraine ; et, par un décret en date du
17 juin 1868 , l’Em pereur a nommé Président de l’Association
générale de prévoyance et de secours mutuels des médecins de
France celui que vos suffrages avaient placé en tête de la liste
des candidats. J'ai eu à cœur de vous en informer moi-m ême,
en vous priant d ’en porter la nouvelle à la connaissance des
membres de votre Société , avec l’expression de ma vive grati
tude pour l’honneur insigne que je dois â l’estime de mes
confrères.
« Perm ettez-m oi d’ajouter, Monsieur le Président, que le
sentim ent qui domine chez moi tous les autres, c’est celui de la
tâche qui m’est confiée et des grands devoirs qu’elle m ’impose.
Je ne me suis pas un seul instant abusé soit en acceptant la can
didature à la présidence de notre Association , soit lorsque j'ai
recueilli la majorité des voles que consacre aujourd’hui le décret
impérial. Et j ’ai bien compris que, pour succéder â notre illustre
et vénéré fondateur, il fallait avant tout avoir reçu son inspira
tion directe, avoir été appelé par lu i, dès la première h eure, à
prendre part au grand œuvre qui perpétuera sa mémoire au sein
�- 130 du Corps médical, être enfin, comme je l'ai été moi-m êm e J u
rant vingt-cinq ans, son disciple et son collaborateur dévoué et
reconnaissant.
« C’est la, Monsieur le Président, mon premier titre à votre
confiance et à celle de nos chers associés. J’espère qu’elle ne
me fera pas défaut. Je m’efforcerai, en effet, de rester fidèle a la
tradition que Rayer nous a laissée dans la pratique de cette m u
tualité féconde dont chaque jour accroît et assure parmi nous la
salutaire influence. Je compte, pour m ’y aider, sur la parfaite
communauté de vues, sur l’entente complète qui me lient aux
hommes dont le zèle désintéressé, l'infatigable dévouement et le
talent éprouvé ont si puissamment concouru a la fondation et
au développement de notre OEuvre.
« Ce n'est ni le lieu ni le moment de vous entretenir, Mon
sieur le Président, de quelques idées qui me paraissent, dans un
avenir prochain, pouvoir être soumises a votre appréciation
éclairée et à l’étude de nos confrères associés. M ais, tout en
restant attaché à la tradition, et personnellement très-éloignéde
toute réforme violente et précipitée, je pense qu’il peut être
utile et opportun de faire subir à nos statuts certaines modifica
tions dont une expérience de dix années aurait pu nous dém on
trer les avantages et la nécessité. Je compte m’y appliquer sur
le champ, avec le concours du Conseil général, et vous dem an
der bientôt votre avis à ce sujet. Je considère également comme
l’un de mes devoirs les plus urgents l'examen de la question
si grave pour notre Association, de la reconnaissance d’utilité
publique.
« Je ne veux pas étendre cet exposé ; je tiens seulem ent à
vous répéter, Monsieur le Président et cher confrère, que je me
regarde avant tout comme le mandataire de l’Association, dont
le principe même et l’unique raison résident, ainsi que l’a tou
jours compris le Conseil général, dans une solidarité dont nous
ne sommes que les agents, sans autre mission que de resserrer
les liens mutuels qui unissent entre elles les Sociétés indépen-
— 131 —
danles formées aujourd’hui sur tous les points de la France.
« Je serai heureux de me sentir d’accord avec vous sur tous
les points et en toute circonstance, et je vous prie de recevoir,
Monsieur le Président et cher confrère, l'assurance de ma haute
considération et de mon entier dévouement.
Le Président de l’Association générale des Médecins de France,
Ambroise TARDIEU.
ÉCOLE DE MÉDECINE ET DE m R M A C IE DE MARSEILLE
CLINIQUE CHIRURGICALE
( service d’été )
Première leçon de M. PIRONDI, professeur adjoint
Recueillie par M . E d o u a rd F o ë x , élève externe de l’Hôtel-Dieu.
M essieurs,
Si d’habitude, en prenant le service de la clinique, j’aime
consacrer notre premier entretien à la constatation des progrès
de la chirurgie pendant l’année qui vient de s’écouler, pour cette
fois, sans renoncer complètement à notre marche ordinaire, je,
m ’écarterai d'abord quelque peu de la route précédemment
suivie pour la reprendre ensuite, et je veux espérer que vous en
apprécierez le motif.
Toutes les sciences se meuvent dans un cercle dont le rayon
s’agrandit incessamm ent, mais dont la courbe ne peut être ré
gulière qu’à la condition de pouvoir retrouver en finissant le
point de départ. Ce retour, ou pour mieux dire ce regard jeté
forcément en arrière, représente l’emblème du véritable progrès,
en ce sens que le fait brut ne pouvant changer du jour au len
demain, son interprétation seule a pu se modifier, conformé
ment h la marche progressive du savoir humain.
�Mais si le grand jour de la science moderne a dissipé bien des
ombres qui enténébraient la science ancienne, il n'est pas
moins vrai que de belles intelligences ont, passez-moi encore la
comparaison, devancé l’aurore du progrès moderne et, pour ce
qui concerne plus particulièrement la chirurgie, une bonne part
des conquêtes plus ou moins récentes ont été entrevues , si ce
n'est complètement signalées par nos prédécesseurs. C’est la ,
du reste, croyez-le bien, la plus belle garantie à donner de la
réalité de ces conquêtes, puisqu’elle ajoute a l’autorité de la
tradition la contre épreuve par la toute puissance des moyens
actuels d’investigation.
Mais ici, Messieurs, un sage critérium devient indispensable,
et mon but est précisément de vous dém ontrer aujourd’h u i,
pièces en main, qu'autant i! est avantageux de pouvoir étayer des
méthodes nouvelles ou des procédés nouveaux sur des essais
antérieurs plus ou moins bien réussis, autant il est inutile, nous
dirions presque dangereux, de ressusciter d’anciennes erreurs,
sous le frivole prétexte de remettre sans cesse en doute les faits
les mieux établis, croyant servir ainsi les intérêts de la science,
lorsqu’on ne sacrifie, en réalité, qu’à la manie de tout changer
pour aboutir à ce qu’on peut qualifier de progrès à reculons.
En ce cas, Messieurs, au lieu de fermer le cercle avec le
même rayon qui l’avait commencé, on raccourcit ce rayon et
l’on revient 'a la rencontre d’un cercle beaucoup plus petit;
ce qui constitue, je vous le répète encore, un progrès à recu
lons, ou du vieux neuf, selon l’expression d’un spirituel écrivain.
L’objet de notre entretien étant ainsi défini, permettez-m oi
un complément de préambule que je crois indispensable, car
dans l’intérêt même de votre instruction chirurgicale, je ne vou
drais pas vous éloigner — de l’épaisseur d ’un doute, si mince
qu’il fût — de la meilleure et de la plus pure des sources où
vous puissiez puiser cette instruction.
La Société impériale de chirurgie est incontestablement une
des assemblées savantes où l’on trouve le meilleur choix de tous
— 135 —
les éléments nécessaires aux progrès de la science que nous
cultivons : tous les chirurgiens ayant conscience de leur valeur,
tant en France qu’à l’étranger, briguent l'honneur d’appartenir
à cette jeune, mais déjà illustre compagnie dont le brillant
avenir est facile à prévoir, d’après les immenses résultats four
nis par son court passé. Mais cela dit, avec toute la sincérité de
nos plus intim es convictions, qu'il nous soit permis de vous
soumettre quelques remarques à propos de l’élément le plus
jeune, et par cela même le plus militant de la compagnie.
Il y a là, ce me semble, un petit enseignement qui ne doit pas
être perdu pour vous.
I.
Ce n’est pas aider à construire que de travailler à démolir
sans cesse. On pourra peut-être reprocher à ceux qui onlhaussmanisé Paris d’avoir eu plus ou moins bon goût dans l’accom
plissement de leur projet ; mais, aprèstont, à la placedu mauvais
qui existait jadis, la critique la moins bienveillante est forcée
d’adm ettre qu'il y a aujourd'hui quelque chose de mieux. Que
ne serait-elle pas en droit de dire, cette critique, si à la place du
mieux on n’avait rien mis du tout et qu’on eût abandonné l’en
semble du sol sous de dangereux décombres?
Eh bien ! M essieurs, il serait à désirer que lorsqu’on vi.se à
haussmaniser quelques quartiers de notre pays chirurgical, on
voulût bien prendre la peine d’édifier quelque chose de mieux
que ce qui existait déjà, au lieu de vouloir rebâtir de vieilles
masures d’une époque bien antérieure aux édifices qu’on veut
abattre.
Et vous allez juger de l’opportunité de ces réflexions à l’oc
casion d’un fait qui aurait pu avoir de très-graves conséquences,
si la presque unanimité des membres de la Société de chirurgie
n’eût adopté une opinion diamétralement opposée à celle qu’on
venait lui proposer dans la séance du 13 février 1867, sous une
forme des plus agréables, et je dirais presque sympathique.
�—
134 —
Dans cette séance, notre très-distingué confrère M. Dolbeau,
a lu un rapport sur un travail de M. le docteur de Saint-G er
main ayant pour titre ; De l’Erosion chancreuse ; — et dans ce
rapport, l'auteur pose deux questions d’une portée considérable,
mais avec tant de simplicité qu’on se douterait à peine que
leur solution dans le sens par lui indiqué, put bouleverser de
fond en comble toutes les idées les moins contestées en syphilographie :
Première question. — Faut-il traiter la syphilis ?
Deuxième question. — A quoi sert le mercure contre la
syphilis ?
Après avoir examiné ces deux questions avec beaucoup d ’es
prit et une modération incontestable, mais en appuyant cet
examen sur des arguments qui n’ont pas, tant s’en faut, le mé
rite de la nouveauté, l’auteur semble conclure :
1° Que la syphilis abandonnée à elle-m ême peut suivre son
évolution et guérir spontanément moins exceptionnellem ent
qu’on ne le suppose ;
2' Qu’il est plus utile, plus |commode et surtout plus facile de
guérir les symptômes dits tertiaires, que ceux appelés secondai
res ou de transition; et par conséquent qu’on pourra d’autant
plus facilement guérir de la syphilis, qu’on aura laissé un plus
long loisir au virus infectant de s’épuiser, après avoir imbibé de
son action délétère tous les tissus de l’organisme ;
3° Enfin, que le bichromate de potasse serait à tout prendre
un antisyphilitique bien plus acceptable que le m ercure, car il en
offre les avantages sans en faire redouter les inconvénients.
Celte singulière thèse a trouvé deux appuis, mais deux seule
ment, au sein de la Société de chirurgie, MM. Després et Mau
rice Perrin ; ce dernier a cité à ce sujet, et fort à propos, Je livre
d’un ancien médecin du Val-de-Grâce, Desruelles ; mais il a été
moins heureux peut-être en citant les travaux d'un de nos sa
vants syphiligraphes modernes, M. Diday, de Lyon.
Les travaux de Desruelles sont séparés de ceux de M. Diday
—
135
—
par une période de quarante années, et je m’empresse d’ajouter
que le chirurgien de Lyon, quelque hardi qu’il soit dans ses opi
nions, n’a jamais rien publié, à ma connaissance, qui puisse
légitimer le moindre rapprochement entre ses idées et les héré
sies soutenues par Desruelles, dont le premier travail sur la
matière rem onte a 1827, avec le titre de : Mémoire sur le traite
ment sans mercure , employé à l'hôpital militaire du Val-deGrâce contre les maladies vénériennes primitives et secondaires.
Quelques années plus tard, en 1836, le même auteur publia un
Traité pratique des maladies vénériennes, ouvrage volumineux
et dans lequel, s’inspirant des idées et doctrines médicales qui
régnaient encore à pareille époque, il cherche à prouver la
double thèse émise dans l’introduction de son livre, et qui peut
être résum ée en deux paragraphes :
1° L’existence de la maladie vénérienne et celle de la cause
virulente a laquelle on l’attribue, est problématique ;
2° La raison et l’expérience sont aujourd'hui (1856), d’accord
pour proscrire le mercure du traitem ent des maladies véné
riennes.
Ceux qui connaissent et apprécient depuis longtemps les
travaux de M. Diday ne lui reprocheront jamais des propositions
de cette force; mais il est sincèrem ent regrettable qu’uu chirur
gien de la valeur de M. Dolbeau ait cru devoir ressusciter, après
plus de trente années d’inhumation, une doctrine qui ne trouvait
jadis quelque excuse que dans l’engouement enthousiaste pro
voqué par la réforme médicale que Broussais entreprenait.
Ce que nous devons regretter aussi, c’est que l’opinion de
M. Dolbeau ait été appuyée par un esprit également fort dis
tingué, tel qu’a su le faire apprécier dans d’autres circonstances
M. Maurice P errin; et ce qui est enfin plus regrettable encore,
c'est que tout dernièrem ent (séance du 10 juin 1848), M, Desprès, chirurgien non moins distingué que ses collègues, ait cru
utile de recomm encer une campagne qui n’avait réellem ent pas
été heureuse a l'occasion du rapport de M. Dolbeau, et soit venu
�136
soum ettre a la Société de chirurgie, la lecture d'un travail spécial
sur le traitement des accidents syphilitiques par les toniques, les
bains salés et le traitement local.
N ’ayant pas eu l'avantage d’assister à cette communication et
n'en connaissant encore que le titre, nous ne pouvons nous per
mettre de l’apprécier; mais ce qu’il nous est permis de croire
et de dire, c’est qu’il y a vraiment quelque chose de mieux à faire
aujourd’hui en syphilographie que de se demander s’il faut aban
donner aux seuls efforts de la nature le traitem ent de la syphilis,
ou d’additionner des arguments par trop renouvelés des Grecs
pour prouver que quelques topiques, de bons toniques, et sur
tout des bains salés rendront aux pauvres syphilitiques, et à leur
progéniture, la complète assurance d’être débarrassés d’un
ennemi qui, n'en déplaise aux œuvres de Desruelles, ne nous
semble nullement problématique !
Si les travaux des syphiligraphes modernes n’ont abouti qu’à
semer pareil doute dans l’esprit de quelques chirurgiens , c’est
réellement bien fâcheux pour ceux qui consacrent leur vie au
travail.
Cela prouverait, hélas! que quarante années de recherches,
conduites par l’esprit d’investigation exacte, que l’on attribue gé
néralement à nos méthodes modernes, n’auraient abouti qu'à ra
mener cette partie de la science où elle était en 1827.
Heureusement, Messieurs, il n en est pas ainsi. Les travaux
de Ricord, deCullerier, deD iday, de Rollet, Bassereau, Vidal,
Follin,Virchow, Langlebert, Gros etLancereaux, et tant d’autres
qu'il serait trop long de nommer, vous prouveront que la science
n’en est plus réduite sur ce point à une aussi décourageante né
gation; et en lisant, du reste, dans la séance du 8 mai 1867, de
la même Société de chirurgie, la belle et substantielle réponse
faite par M. Verneuil à la thèse soutenue par M. Dolbeau , vous
y trouverez condensée en quelques pages, la plus victorieuse argu
mentation que l’on puisse opposer à des prétentions si contraires
à ce qu'enseigne tous les jours la plus vulgaire pratique.
-
—
137 —
H
Après avoir tâché de vous dém ontrer à quelles erreurs peut
conduire la manie de l’innovation , je suis heureux de pouvoir
appeler maintenant votre attention sur un progrès réel, nulle
ment à reculons, et qui est précisément d’autant plus positif,
plus incontestable, que longtemps avant il avait été entrevu,
sinon énoncé sous une forme suffisamment attrayante. Du reste,
on dirait que chaque progrès ne peut être accepté qu’à son
heure, c’est-à-dire lorsque diverses circonstances, qui ne son1
pas accessoires, viennent en quelque sorte l’imposer à l’atten
tion générale.
M. le professeur Van/.elti, deP adoue, un des plus habiles
chirurgiens et un des professeurs les plus estimés du nord de
l’Italie, ayant déjà eu l’occasion de vulgariser dans son pays, les
belles idées de M. Broca, sur le traitem ent des anévrismes par
la compression digitale, M. Vanzelti a communiqué à la Société
de chirurgie (Séance du 30 octobre), un nouveau travail fort in
téressant sur la compression digitale artérielle, comme traite
ment des inflammations phlegmoneuses et articulaires des mem
bres .
Cette compression, le professeur de Padoue la pratique, avant
que les tissus malades ne soient profondément altérés ou dé
truits ; son but est d’interrom pre l’afflux trop considérable du
sang dans la partie malade, et il pratique la compression , tantôt
d’une m anière continue , tantôt d’une manière interm ittente et
pendant un certain nombre d’heures qui varie de dix à vingt et
dépasse rarem ent vingt-quatre.
Parmi les observations citées par M. Vanzetti, il faut signaler
un phlegmon très-grave du membre supérieur gauche, u n éléphantiasis de la jambe droite, et une pustule charbonneuse du
membre supérieur. Ces trois faits ont été suivis d’une guérison
complète. Le récit qu’en fait l’auteur, du troisième surtout, en
�— 158 esl presque émouvant, et le caractère de parfaite honorabilité
qu'on lui reconnaît, ne permet pas qu'on oppose le moindre doute
a leur authenticité.
Laissez-moi vous [dire de suite, que nous avons déjà essayé
avec succès la méthode préconisée par M. Vanzetti, et que nous
sommes tout disposé à rappliquer sur une plus large échelle lors
que l'occasion s’en présentera; mais je déclare poser ici une
réserve, c’est que ce nesera pas un cas de pustule charbonneuse
que je choisirai pour vous en fournir un spécimen. Il y a là, vous
devez le comprendre, une question d'infection générale, telle
ment grave et si promptement dangereuse, qu’en conscience je
ne me sentirai jamais le courage de renoncer ici à la méthode
qui a toujours fourni d’heureux résultats : la cautérisation.
Mais ce n’est pas particulièrement sur cela que je tiens à appe
ler votre attention. Le fait capital mis en lumière par M. Vanzetti
est celui ci: que la compression artérielle peut arrêter en fort
peu de temps une inflammation phlegmoneuse dans son évolu
tion. Cette méthode employée par son auteur depuis 1858, épo
que où il a publié un premier travail à ce sujet, a eu de nombreux
adhérents, et M. Vanzetti énumère avec plaisir les diverses re
vues et publications périodiques qui, à partir de 1858 ont publié
des laits à l’appui de sa méthode, sous la signature de MM. Ber
nard!, Furchetti, Tuzzini et autres en Italie; Demme et Neudorfer en Allemagne; Hübhenet en Russie; Lille et Jakson en An
gleterre; ces derniers ayant d’ailleurs montré quelques velléités
de s'approprier l’initiative de ce mode de traitement.
Pour ce qui est de la France, M. Vanzetti cite Follin qui, en
effet, dit un mot de cette méthode dans son traité de pathologie,
et cite encore M. Nélaton, qui, au dire de quelques élèves de sa
clinique aurait employé la compression digitale avec succès dans
un cas de phlegmon de la main et de l'avant-bras.
Si M. Vanzetti est avec raison heureux et lier du concours
que plusieurs chirurgiens dans divers pays ont apporté à la eorilirmation des succès de la méthode qu’il préconise, nous avons ,
— 159 de notre côté quelque satisfaction à ajouter un témoignage de
plus aux succès et à l’utilité d ’un procédé si simple dont la pre
mière application rem onte plus haut que ne le suppose M. Van
zetti lui-même. Il y a en eflet vingt ans que la Revue médicochirnrgicale de Paris, sous la direction du toujours regretté
M. M algaigne, a publié dans le n° de décembre 1848, page 541,
un m ém oire aussi remarquable par sa laconicité que par l’im
portance de l idée-m ère qu’il émettait. Ce mémoire, signé par le
Dr François Henroz, est extrait du Rulletin de l'A cadémie de mé
decine, de Belgique et porte pour titre : De la compression arté
rielle comme moyen de suspendre instantaném ent la douleur
dans le panaris et d’amener en peu de temps la résolution des
parties phlogosées.
Pour rendre hommage à qui de droit, il faut ajouter ici, sans
aller plus loin , que le Dr Henroz a pratiqué la compression a
l’aide de moyens artificiels, ce qui ne peut être confondu évi
demment avec la compression digitale; mais en somme l’idée
principale s’y trouve et l’auteur la résume dans les trois proposi
tions suivantes :
1” A rrêter à l’instant même par un moyen simple et à la portée
de tout le m onde, les douleurs sourdes qui se produisent dans
l’inflammation des doigts ou de la m ain, et cela sans incision n1
effusion de sang ;
2° Em pêcher par ce moyen, quand il est appliqué assez tôt,
toute tendance à la suppuration qui, comme on le sait, esl la ter
minaison presque nécessaire de cette maladie ;
3° Amener la guérison par une résolution sure, prompte et
qui, tout en combattant de suite les accidents généraux qui sc
développent si souvent dans le panaris, permette à l'individu
qui en est atteint de se servir de sa main dans peu de jours de
traitem ent.
Les faits rapportés parjHenroz, sans être nombreux, suffisent,
au dire de l’auteur, et l’auteur a raison, pour signaler l'incontes
table avantage de la compression artérielle dans les inflamma-
�— MO —
— 441
lions des extrém ités.[Ces faits, ajoute-t-il, avec non moins de
raison, ont une immense valeur scientifique, et leur appréciation
par les simples données de la physiologie et de Ja pathologie
sullil pour leur faire reconnaître tous les caractères propres à en
tirer des inductions utiles à la pratique.
Ne vous figurez pas, Messieurs, qu’en citant un travail émané
d'un chirurgien belge, je veuille en rien diminuer le mérite du
chirurgien dePadoue; loin de là, que M. Vanzetli ait ou ri ait
pas connu le petit travail en question, fait à propos de la guéri
son du panaris, il lui reste incontestablement la belle et utile
initiative d’avoir généralisé l’emploi de la compression artérielle
dans les inflammations phlegmoneuses, d'avoir étendu cette mé
thode au traitem ent de l’éléphantiasis, et surtout de l avoir per
fectionnée en substituant la compression digitale à la compres
sion mécanique; et ce sont là d’incontestables titres qui s'ajoutent
à tous ceux qui ont déjà lait connaître et grandement estimer en
France, le nom de M. Vanzetti.
Mon but, Messieurs, est tout autre , je vous l’ai déjà dit en
commençant et je termine par où j’ai commencé. En vous citant
l’un après l’autre deux importants sujets pouvant servir de pivot
à d'intéressants débats, j ai voulu vous faire saisir la différence
profonde qui sépare le premier du second. Dans l’un,la tradition
prouve (pi on a fait fausse roule, et qu’on a exhibé du vieux-neuf
qui ne peut plus avoir cours dans la science, sans détriment pour
la santé publique ; dans l’autre, au contraire, si l’on compulse les
annales de celte science, on y trouve le germe d une vérité qui
s épanouit au grand jour de la clinique expérim entale, avec la
double autorité d’un appui rationnel et d’un appui pratique.
Puisse, Messieurs, ce double exemple vous servir de guide
dans vos études qui seront toujours d’autant plus fructueuses
que, tout en avançant et en apportant votre coopération à l’édi
fice commun, vous ne perdrez pas de temps à véiifier ce qui est
bien fait, tout en perfectionnant ce qui vous paraîtra moins bon ;
et vous serez d autant plus heureux dans votre carrière que vous
vous rapprocherez davantage de cette belle devise d’un ancien
m aître, voulant que toute guérison put, autant que possible,être
obtenue: tuto, cito et jucunde.
Perm ettez-m oi seulement de vous recommander le tuto avant
tout le reste.
QUELQUES RÉFLEXIONS SUR LES CONCOURS
AUX HOPITAUX DE MARSEILLE
Il nous paraît utile de signaler d’une manière spéciale, parmi
les événem ents les plus importants de ce m ois, et d’accompa
gner de quelques remarques les deux concours qui viennent de
se succédera notre Hôtel-Dieu pour la nomination d’un médecin
et d’un chirurgien adjoints des hôpitaux et hospices civils de
Maiseille.
Q uatre concurrents devaient tout d'abord se trouver en pré
sence pour le prem ier combat, de même qu’il y en a eu quatre
pour le second. Mais, dès la première heure delà lutte, un des
com battants a cru devoir se retirer après protestation; et le
bruit, disons même, le trop grand bruit fait autour de cette pro
testation, nous engage à en dire quelques mots.
M. le Dr Picard n’était pas pour nous un nouveau venu. Dans
des travaux scientifiques très-estim ables et dans un précédent
concours, il avait déjà donné des preuves irrécusables d’une belle
intelligence, d’une instruction solide et d’un sens pratique in
contestable; tel est du moins notrs avis, partagé par bon nombre
de nos confrères. M. Picard se présentait donc à cette nouvelle
lutte avec beaucoup de chances de succès. Mais, à notre avis
aussi, il a eu deux torts en se retirant : celui de priver l’adminis
tration des hôpitaux d’un bon chef de service, et celui de motiver
sa retraite sur des considérations qui n’eussent rien perdu de
leur importance en revêtant une forme plus modérée et sans
�aucune de ces regrettables insinuations qui pourraient tinir par
compromettre la plus belle et la plus brillante des institutions,
dans un moment où notre École de médecine elle-même a de
mandé et obtenu que les places de professeurs suppléants fussent
données au concours!
Rappeler d'ailleurs, comme l’a fait \I. Picard, que d’anciens
concours ont pu péeber par de fâcheuses irrégularités, c’est
faire pour la centième fois le procès d’une institution excellente,
mais (jni, à l'exemple de bien d’autres, est toujours perfectible et
sujette par cela même aux inconvénients inséparables de la na
ture humaine.
Est-il bien sûr d’ailleurs, notre cher confrère, que ces irrégu
larités, que ces vices de forme, engendrés peut-être parle népo
tism e, aient été aussi fréquents que l’on tendrait à le faire
croire?
Le concours est établi dans nos hôpitaux depuis douze ans.
Ayant eu parfois l’honneur d’être juge, il ne nous appartient
pas de dire si les suffrages du jury ont constamment porté sur les
plus méritants; mais nous pouvons du moins affirmer que si par
fois l’opinion du jury a pu hésiter entre des candidats d ’une va
leur à peu près égale, jamais elle n’a paru s’égarer sur les plus
faibles; et ce qui prouve que le concours fonctionne â Marseille
avec toute l’équité et toute l’indépendance que peuvent souhaiter
les candidats sérieux, c’est que le nombre et la valeur de ces can
didats augmentent à chaque concours.
Quels sont après tout les griefs formulés aujourd’hui? Nous
allons les énumérer, et cela avec d’autant plus d’em pressem ent
qu’ils ont été réédités par divers journaux de médecine, tels que
la Gazette des Hôpitaux, la Gazette médicale de Paris et quelpeu aussi par le Sud Médical de Marseille, dans un article très
mesuré, du reste , et signé par notre excellent ami et confrère
M. le D1 Ménécier.
Nous ne parlerons plus de cette fameuse question écrite for
mulée le soir, après la première épreuve orale, et tirée au sort le
— 145
lendemain pour être ensuite traitée par écrit et â huis-clos. Evi
dem m ent, si un manque de délicatesse pouvait permettre â un
candidat de connaître par avance le titre des diverses questions
entre lesquelles le sort devrait choisir le lendemain, on ne com
prend pas que la même indélicatesse eût pu atteindre épidémiquem ent tous les membres du jury en faveur d’un seul candidat.
Mais si pareille irrégularité, regrettable à tous égards, a pu par
fois se produire par négligence, à coup sûr elle n’a jamais eu lieu
dans tous les concours indistinctement. Nous connaissons plus
d’un juge qui ne l’eût pas tolérée, et plus d'un candidat qui n’au
rait jamais été assez naïf pour ne pas en demander immédiate
ment la rectification. Les questions doivent être posées et con
nues â l’instant même où les candidats sont appelés à les traiter.
Passons h d’autres griefs qui,celte fois, seraient plus justicia
bles de l'administration des hôpitaux que du jury lui-même.
Il faut, dit-on, pourque le nombre de concurrents sérieux soit
plus considérable, il faut:
1° Que les épreuves soient plus pratiques ;
2° Que les conditions d’accès soient plus fixes qu’elles ne
l’ont été jusqu’à ce jour;
5° Que les soupçons de partialité, même les plus injustes,
soient moins possibles. Et pour cela, décharger les médecins des
hôpitaux de la tâche ingrate, pénible, désagréable, d’avoir à
juger leurs collègues, et confier tout le désagrément inhérent à
celte tâche... aux médecins de la ville.
De semblables propositions valent la peine d’être relevées.
Qu’entendez-vous d’abord par épreuves plus pratiques? Vous
sem blerait-il, par hasard, que l’anatomie et la physiologie dans
toute leur étendue constituent un ensemble de connaissances
oiseuses pour les médecins et chirurgiens d’hôpitaux? Ou est-ce
la nature des questions posées par le jury qui révolte votre sa
voir de praticien?
Dans les récents concours, les candidats ont eu à traiter pour
la question d’anatom ie descriptive: De la région périnéale; et
pour celle de physiologie : De la déglutition.
�- 144
Dans le deuxième concours, la question orale avait pour litre :
Anatomie du rein et ses fonctions.
Sans doute il eût été plus facile aux candidats de décrire les
muscles de l’épaule et les fondions du biceps ; mais les connais
sances vraiment remarquables dont ont fait preuve tous les can
didats, en traitant les questions sus-mentionnées, prouvent que,
pour eux du moins, l’élude pratique de l'anatomie et de la phy
siologie consiste à connaître le mieux possible tout ce que l’ana
tomie, la physiologie, voire même l’histologie enseignent de nos
jours.
Dans le premier concours, les candidats ont eu ’à traiter: Des
plaies pénétrantes de l’abdomen ; et dans le second : De l’ascite.
Je ne sais ce que l’on peut trouver de pas assez pratique dans
ces épreuves, mais assurément l’administration est en droit d’e
xiger que les chirurgiens de ses hôpitaux sachent convenable
ment soigner un pauvre blessé qui aura eu le péritoine ou l’in
testin blessé, de même qu'elle demandera aux m édecins, chefs
de service, de savoir poser un diagnostic différentiel convenable
sur les diverses lésious organiques qui peuvent produire un
épanchement de sérosité dans le péritoine.
Quanta la troisième épreuve, consistant à soumettre aux can
didats, des malades atteints d’affections dites internes ou chirur
gicales selon la nature spéciale du concours, il est évident que
c’est la une épreuve essentiellement pratique et a l’occasion de
laquelle, tout médecin ou chirurgien se croyant capable d’abor
der une lutte publique, ne peut se trouver em barrassé, alors
même que le cas choisi par le jury offrirait de sérieuses difficultés.
Le doute même a souvent servi de texte a de bonnes conférences
et consultations cliniques.
Mais ici vient se placer une remarque qui a son im portance.
On a dit qu’il fallait absolument que les malades choisis par le
jury fussent indistinctement soumis à tous les candidats, et
que, parmi les concurrents on en trouvait toujours auxquels le
personnel malade de nos hôpitaux était plus particulièrem ent
connu.
A notre connaissance du moins, le jury a toujours fait de sou
mieux pour que le même sujet ou des sujets analogues fussent
soumis h l’examen des candidats. Mais on conviendra sans diffi
culté, nous l’espérons, que si quatre candidats, !a chacun desquels
on accorde un quart d’heure d’examen , devaient soumettre un
pauvre malade atteint de pneumonie ou de fracture comminulive
grave à mie heure d ’études et de recherches objectives, l’aggra
vation de la maladie qui en serait certainement la conséquence ,
ne laisserait pas de peser lourdement sur la conscience des juges
et de l’adm inistration.
Quant a ce qui concerne l’avantage supposé à certains candi
dats familiarisés par la nature de leurs fonctions avec les malades
reçus dans les hôpitaux, nous répondrons que le jury choisit de
préférence les sujets admis le jour même et sur lesquels le chef
de service n’a porté encore aucun diagnostic. En second lieu ,
tous les candidats indistinctement peuvent longtemps d’avance
visiter toutes les salles, y examiner tous les malades, et se mettre
ainsi au courant de tout ce que la population nosocomiale peut
offrir de plus intéressant. Il est enfin permis de répondre que
puisqu’on ne peut sérieusem ent proposer au jury d’aller choisir
des malades en ville, il faut bien accepter l’épreuve nosocomiale
avec les quelques inconvénients quelle peut offrir au point de
vue des avantages inhérents à certaines fonctions, disons-le, à
celles du chef-internat.
Certes on ne nous accusera pas d’avoir une grande tendresse
pour celte institution ; nous l’avons combattue et nous la com
battrons encore si l’occasion s’en présente. Mais les questions
de principes 11e doivent jamais se placer en travers de droits
honorablement acquis, et il serait vraiment curieux qu’un jeune
médecin, qui dans un précédent concours aurait noblement rem
porté le prix de son savoir et de son intelligence, ce serait fort
curieux (et le mot est poli) qu’il fût exclu d’un concours plus
important encore, par cela seul qu’il occuperait la place de pre
mier chirurgien-interne dans un hôpital.
�146 —
Mais, ajoute-t-on, ces fonctions donnent une certaine impor
tance; elles peuvent faire pencher la balance et biaiser avec la
justice !
On a, franchem ent, mal choisi son heure pour ém ettre de
pareils doutes, et les faits ont prouvé que beaucoup d’instruction,
beaucoup d'intelligence, d'excellentes habitudes pratiques, peu
vent cependant être vaincues, tout en ayant supporté avec hon
neur une lutte des plus sérieuses.
Les conditions fixes du concours existent, et les divers arrêtés
administratifs sont scrupuleusement respectés par le jury et par
l’administration elle-même, qui pose ces conditions avec un es
prit libéral dont il faut lui savoir gré.
Que si parfois quelques doutes ont pu surgir sur l'accomplis
sement intégral de ces conditions de la part des candidats qui se
sont présentés, il est juste d’ajouter que presque toujours le
règlement a été interprété dans le sens le plus large possible, et
cela en faveur des candidats eux-mêmes.
Mais arrivons a celui de tous les griefs qui,ém isle dernier sous
forme de conseil donné a l'administration, pourrait être pris pour
une mauvaise plaisanterie.
Ecartez, dites vous à l’administration,les soupçons de partia
lité, ne luttez pas plus longtemps contre les docteurs de la ville,
et enlevez à vos médecins des hôpitaux, la lâche pénible déjuger
leurs collègues, tache qui leur crée des inimitiés, leur occasionn e
des enuuis el ne leur donne pas même une satisfaction d'amourpropre (sic).
V raim ent, notre honorable confrère du Sud Médical est
mille lois trop bon de vouloir bien , sans y être obligé , éviter
aux médecins des hôpitaux, des charges, des ennuis, et des
inimitiés dont ils ne s’étaient fort heureusement pas doutés jus
qu’à ce jour. Je dois même ajouter que jusqu’à ce jour, ayant
mis, sans doute, tout leur amour-propre à soigner le mieux pos
sible les malades soumis à leurs soins, ils n’avaient pas songé
que le temps consacré par eux aux concours, auxquels ils sont
invités à assister comme membres du ju ry , pût leur apporter
autre chose que la satisfaction d’un devoir accompli. Ils ne se
seraient jamais doutés non plus, tellement leur orgueil est mani
feste, qu’il suffit d’être attaché au corps médical des hôpitaux,
pour perdre cette sérénité d’esprit el de cœur qui vous fait pla
ner au-dessus de toutes les petites misères confraternelles, se
traduisant par des inimitiés, des jalousies et autres petites fai
blesses dont les médecins privés de la charge hospitalière se
raient uniquem ent à l’abri.
El il faut avouer qu'il serait fâcheux de voir de si belles vertus
n’exister que d’un seul côté !
En admettant toutefois que les membres du corps médical des
hôpitaux de Marseille aient l’humilité d’accepter la position peu
flatteuse qu'on voudrait leur faire, il resterait encore à savoir si
l’administration des hôpitaux, ayant déjà vu à l’œuvre son per
sonnel, et lui donnant tous les jours de nouvelles preuves d’une
confiance que nous croyons parfaitement justifiée, resterait à
savoir, disons nous, si l’a dministration trouverait plus logique
d’enlever une mission de confiance presque obligatoire à ceux
qu’elle connaît et voit journellem ent à l’œuvre, pour la confier à
d’autres qu’elle ne connaît pas. Ce qui, du reste, ne diminue en
rien, hâtons-nous de le dire, leur mérite et leur savoir parfaite
ment appréciés par leurs confrères et par leur clientèle.
Nous n’insisterons pas davantage et nous finirons par où nous
aurions dû com m encer, si une levée de boucliers inopportune
n’était venu compromettre à Marseile l'institution des concours,
pendantqu’on s’exposait, et d’une façon bien plus regrettable ,
à la com prom ettre à Paris.
Nos deux concours ont donné lieu à la nomination de M. le
Dr Villeneuve fils, à la place de chirurgien-adjoint, el à celle de
M. le Dr Aug. Fabre, à la place de médecin-adjoint des hôpitaux.
Les applaudissements par lesquels ont été accueillies ces deux
nominations ont dû prouver aux jurys que leur décision était
sanctionnée par le public.
�Assurément, après la retraite de M. Picard, ceux qui connais
sent et savent depuis longtemps apprécier la valeur incontes
table de M. le Dr Flavard, n’avant pas eu les mêmes occasions de
connaître le degré d’instruction et l’élégante facilité d'élocution
de M. Villeneuve fils, ceux-là, dis-je, ont pu croire d’abord (et
sans déprécier ici le mérite du troisième concurrent, M. Keynaud) que la lutte donnerait un autre résultat; mais en tout cas,
M. Flavard a serré de si près son heureux concurrent, que l’on
peut dire, sans trop de risque, que sa place est déjà marquée
dans les hôpitaux ; c’est pour lui une question d'horloge.
Quant àM . le Dr Fabre, déjà professeur-adjoint de cliniquemédicale à l’Ecole de m édecine, on savait qu’il ne voulait
concourir dans celle circonstance que pour faire en quelque sorte
sanctionner par le feu du combat sa récente nomination univer
sitaire, et les nombreux élèves qui se pressent journellem ent à
son cours, de même que ses collègues, savaient d’avance ce
qu’on trouverait de science, d’érudition, de méthode et de faci
lité d’ex position chez notre jeune et déjà très-eslimé collègue.
Mais ce dont on ne se doutait pas assez, c’est de la valeur rem ar
quable et vraiment hors ligne des trois concurrents qui ont vail
lamment soutenu la lutte avec M. Fabre.
L’administration, par l’organe de son Président semainier, a
salué MM. Nicolas, SeuxetTrastour, non pas comme des vaincus
sortant honorablement du combat, mais comme des futurs vain
queurs. — Elle a fait plus. — En se félicitant avec le président
du jury, M. le professeur Girard , d’avoir à compter sur tant de
talent chez des hommes si jeunes encore, elle les a conviés à
lui revenir aux prochains concours, en leur disant comme salut
final, que tout en regrettant de ne pouvoir, en cette occasion ,
disposer de plus d’une place, elle espérait qu'aucun d'eux ne lui
ferait défaut dans l’avenir.
Une pareille invitation n’a pas besoin de com m entaires, et
nous semble caractériser aussi honorablement qu’on peut le
désirer les concours de Marseille.
S-P.
Bulletin thérapeutique.
P IL U L E S A N TI-G A STRA LG IQ U ES.
Assa fæ tida.................... 3 grammes.
Aloès............................... 4 »
Mêlez et divisez en 20 pilules égales. En prendre une chaque
matin à jeun dans une cuillerée de tisane de chicorée, et boire
par dessus une tasse de cette tisane. — S.
Chronique mensuelle.
Marseille, 5 juillet 1868.
Décidément l’été de 1868 tient à se faire remarquer par la sin
gularité de ses allures. Après des chaleurs d’autant plus accablantes
qu’elles étaient tout-à-fait prématurées, le mistral a pris le dessus,
et notre terrible compatriote souffle et tempête avec uûe persistance
qu’il déploie bien rarement au moment de l’année où nous nous
trouvons. Il en résulte que, depuis un mois, nous sommes sous le
coup de la constitution médicale la plus bizarre qui se puisse con
cevoir. A côté de diarrhées, de dyssenteries, de troubles digestifs,
résultat naturel des fortes chaleurs, se placent des rhumes, des
bronchites, des angines, désaffections rhumatismales même, toutes
maladies qui se montrent de préférence dans les mois de mars ou
d’octobre. Ajoutons à cette liste un certain nombre de fièvres ty
phoïdes graves avec prédominance adynamique ou intestinale,
[/apparition de cette dernière maladie est d’autant plus remar
quable que, depuis plusieurs mois, nous n’avions vu que quelques
rares échantillons de dothiénen térie. Peut-être les conditions anor
males de température auxquelles nous sommes soumis ne sontelles point étrangères à la production de ces cas graves. Malgré
�— 150 —
cette nomenclature assez longue de maux, le point important à si
gnaler, c’est que la santé publique se maintient dans de bonnes
conditions, et que le nombre des décès n’augmente pas.
Cependant, si nous n’avons pas lieu de nous attrister, gardonsnous de nous endormir dans une sécurité funeste- L’ennemi est à
nos portes. Les points noirs dont nous parlions dans notre numéro
de juin ont pris depuis le mois dernier, la proportion d’une nuée
d’assez redoutable aspect. Une forte épidémie de choléra sévit ac
tuellement au Maroc; de l’intérieur, où il s’était abattu sur Fez
avec une grande violence, le fléau a gagné les côtes, et envahi tout
le littoral. Les petites villes de Rabatt et de Casablanca ont été par
ticulièrement frappées. Hàlons-nous de dire, que tous les navires
venant du Maroc sont soumis, dans notre port, à une quarantaine
sérieuse. Nous sommes heureux de constater ce fait qui est l’indice
d’un progrès véritable. Malgré quelques protestations isolées, les
doctrines contagionnistes sont, de nos jours, celles de la très-grande
majorité des médecins. Espérons que, grâce aux sages mesures
prises par les autorités, nous pourrons cette année encore éviter
le fléau.
Laissons donc de côté choléra et quarantaines e t, pour parler
de choses plus gaies, signalons les deux concours qui viennent d’a
voir lieu à l’Hôtel-Dieu pour deux places : l’une, de chirurgienadjoint, l’autre de médecin-adjoint, des hôpitaux. Signalons est
le mot propre, car, moins qu’à tout autre, il nous appartient de
parler longuement de ces deux luttes scientifiques. Aussi nous
contenterions-nous de nous réjouir avec tout le corps médical de
l’application, toujours plus fréquente à Marseille du grand prin
cipe du concours, s’il n'était survenu un incident que nous ne
pouvons passer sous silence.
Dès le début de la première séance du concours pour la place
de chirurgien-adjoint, l’un des candidats, M. le Dr Picard, a pré
senté à MM. les membres du jury un mémoire écrit, dans lequel
il protestait contre certains usages suivis à Marseille dans les con
cours. Nous nous unissons très-volontiers au D>- Picard, lorsqu’il
prie le jury de ne désigner les sujets de la composition écrite, que
le jour même de l’épreuve. Nous sommes complètement de son avis
lorsqu’il émet le vœu que les malades choisis pour l’épreuve clini
♦
— 151 —
que soient pris parmi les entrants du jour. Nous partageons en
core son opinion, lorsqu’il demande que le chef-interne ne soit
poiut autorisé à prendre part à la lutte. Mais, si la plupart des ob
servations faites par le Dr Picard nous semblent justes, nous trou
vons qu’elles ont manqué complètement d’opportunité. Nous allons
plus loin, et nous croyons que tous ceux qui s’intéressent vérita
blement, sérieusement à notre confrère, regretteront,de l’avoir vu
soulever l’incident en question. La cause était bonne; mais le
moyen employé pour la défendre laissait à désirer. En un mot, ce
n’était ni le lieu, ni l’heure.
L’heure est toujours convenable, par contre, lorsqu’il s’agit d’en
tendre notre confrère de Lyon, M. le Dr Chassagny. Pendant le
mois de juin, cet habile praticien a bien voulu exposer dans deux
conférences, faites à Marseille, l’une, à la Société Impériale de
médecine, l’autre, au Comité médical, les idées théoriques et pra
tiques qui ont présidé à la construction de son remarquable for
ceps à tractions soutenues. Dire que le forceps ne doit pas être à
la fois un instrument de préhension, de traction et de réduction,
dire que l’instrum ent du Dr Chassagny ne réalise pas plus com
plètement que tout autre forceps ces trois indications, c’est réelle
ment nier le jour en plein midi. Mais l’instrument est compliqué !
dites-vous. — Qu’importe s'il est meilleur que d’autres I — Mais
il est d’une application difficile ! — Qu’importe si vous vous donnez
la peine d’étudier son mécanisme I
Nous ne croyons pas que celui qui a entendu M. Chassagny luimême expliquer la manière dont fonctionne le forceps à tractions
soutenues, puisse conserver le moindre doute sur la bonté de cet
instrument. Au premier abord, disons-le, on s’étonne de voir notre
confrère de Lyon se présenter avec un aussi puissant arsenal de
pièces mécaniques. Tous ces appareils dont on ne comprend pas
l’utilité, dont on définit à peine la forme effraient un peu l’esprit.
Mais, lorsque M. Chassagny parle, lorsqu’on le voit s’avancer métho
diquement et pas à pas dans son sujet, lorsquejoignant la démons
tration au précepte, il nous montre le but de ses appareils et nous
fait trouver dans la mécanique elle-même la preuve certaine des
principes qu’il avance, l’étonnement cesse, l’effroi est bien loin,
l’intérêt seul reste et s’empare en maître de l’esprit. Pour notre
�— 152 —
— 155 —
p a r t, nous nous souviendrons longtemps de celle parole si me
surée, si démonstrative, si claire surtout.
La clarté, voilà ce qui n’a pas toujours été le lot de la mémo
rable discussion à laquelle le rapport de M. Colin a mis fin dans la
séance du 16 juin, de l’Académie de médecine. Nous nous étions
trop avancé en disant dans notre dernière'chronique que les débats
étaient clos. Dans le courant du mois de juin, M. J. Guérin a pris
la parole, puis M. Chauffard a longuement répliqué, puis ces deux
orateurs ce sont fait mutuellement une contre-réplique assai
sonnée de reparties assez vives. Enfin, tout est terminé mainte
n a n t, et nous pouvons méditer en paix sur le grand évènement
scientifique qui vient de se produire.
Si, passant en revue les nombreux discours prononcés par d ’il
lustres confrères, nous cherchons à tirer de ce qui a été fait une
conclusion précise, nous nous trouvons dans un grand em barras.
Tant de matériaux ont été amassés, tant d’hypothèses soutenues,
tant d’expériences faites; la question a été envisagée à des points
de vue si divers, par des esprits si divers eux-mêmes, que l’idée qui
se présente à nous de prime-abord est celle d'une masse colossale
de forme, gigantesque de figure, mais tant soit peu mystérieuse
d’aspect et pas mal indécise de contours. Dirons-nous cepen
dant avec quelques-uns de nos confrères que, toute cette élo
quence, que toute celte érudition ont été dépensées en pure perte?
Non, certes. Sans doute la discussion aurait pu être raccourcie,
élaguée, moins abstraite; mais, avant tout autre résultat, elle a eu
l’immense avantage d’attirer l’attention générale sur un sujet que
les travaux modernes ont, nous ne dirons pas remis à neuf, mais
à peu près créé de toutes pièces.
Nous traversons en médecine un moment de crise. Depuis une
vingtaine d’années, la science médicale a subi d’étonnantes trans
formations. La physiologie et la pathologie ne sont plus aujour
d’hui ce q u ’elles étaient autrefois; et, non contentes de se modifier
profondément, elles se sont, pour ainsi dire, fondues toutes les
deux en une seule transformation, produisant cette admirable
science moderne que l’on appelle la physiologie pathologique. Il
en résulte, que les esprits empreints des enseignements de la géné
ration précédente, frappés cependant des découvertes modernes,
hésitent, se recueillent et n’ont pas encore choisi la voie q u ’ils par
courront plus tard. A Paris et dans les grands centres d’activité
intellectuelle, il est facile de se tenir au courant de la science;
l’esprit travaille là à notre insu et presque malgré nous. En pro
vince, au contraire, nous sommes en général trop absorbés par
les détails de la pratique; nous ne trouvons point, d’ailleurs, dans
le milieu qui nous entoure, les stimulants qui pourraient exciter
notre zèle et conserver en nous l’am our de la science pure. 11 faut
quelque évènement imprévu pour détruire le calme de ces eaux.
La discussion sur la tuberculose a eu précisément ce résultat.
Grâce à elle on a voulu voir de près ces fameuses masses caséeuses
qui avaient le privilège d’attirer si longuem ent l’attention de Mes
sieurs les Académiciens. Après avoir examiné sérieusement les
faits, on a vu q u ’il fallait absolument renoncer à l'unitarisme de
Laennec, et que la tuberculose différait complètement quant à sa
nature, son origine, son siège, sa marche, de la phthisie propre
m ent dite. On a compris, enfin, la fameuse phrase du professeur
Niemeyer qui, avouons-le, paraît au premier abord si paradoxale:
« Le plus grand danger qui menace les phthisiques c’est de deve
nir tuberculeux. » Ainsi donc, un changement s’est produit dans
les esprits, et nous croyons qu’il faut l’attribuer, en grande partie,
à la discussion soutenue par nos académiciens. Cette dernière
n’aurait eu que ce résultat s e u l , que déjà on ne serait plus auto
risé à la considérer comme inutile et peu fructueuse.
Ah 1 sans doute ces longs débats n’ont point complètement élu
cidé la question et fourni toutes les lumières désirables. En géné
ral, la discussion a été trop exclusivement scientifique. Nous
ajouterons que M. Colin, dans son rapport a encore exagéré celte
tendance en laissant dans l’ombre certaines considérations praliliques qui avaient été exposées devant l’Académie. O u i, la part
faite à la science aux dépens de la clinique, n’a pas été assez me
surée, et M. Barlh a eu mille fois raison de ne pas trouver, dans
tout le cours de ces longs dé b ats, les données fournies par l’exa
men des malades, d’accord avec les expériences des dualistes. Les
unitaires ont beau jeu en se plaçant sur ce terrain ; car — redisons-le aujourd’hui encore — les interprétations basées sur les
données micrographiques ou expérimentales peuvent varier, mais
�la clinique reste vraie, immuable, certaine parce q u ’elle n'est q u ’un
ensemble de faits bien et dû m en t constatés.
Acceptons pourtant ce qui paraît acquis à la science. Les tra
vaux en France de MM. Robin, Empis, Hérard et Cornil, Villemin
même, — quoique ce dernier puisse dire aujourd’hui, — en Alle
m agne, de MM. Lebert, Reinhardt, Virchow, Buhl et Niemeyer
ont à peu près prouvé les faits suivants :
Les granulations grises se développent dans le tissu cellulaire
inter-lobulaire; elles proviennent de la prolifération , par le fait
d’un processus qui n ’est nullement inflammatoire, des corpuscules
de ce tissu. Elles constituent ce que l’on a désigné sous le nom de
tubercules, de tuberculisation, de tuberculose.
Les masses caséeuses se développent dans les alvéoles pulmo
naires elles-mêmes; elles dérivent de la prolifération, par inflam
mation, de l'épithélium de ces alvéoles, et ce processus inflamma
toire en leur donnant naissance, produit la pneumonie caséeuse.
C’est à elles seules qu’il faut réserver le nom de phthisie.
La tuberculisation a toujours une marche aiguë. La phthisie, au
contraire, tantôt marche rapidement, tantôt — ce qui est le cas le
plus ordinaire — procède avec lenteur et présente toutes les allures
des maladies chroniques.
Par conséquent, l’ancienne maladie désignée indistinctement
par les noms de tuberculisation ou de phthisie pulmonaire peut se
présenter à nous sous trois états :
\° Tuberculose: évolution des granulations grises; ancienne
phthisie galopante de Trousseau; marche rapide.
2° Phthisie aiguë: évolution des masses caséeuses; pneumonie
caséeuse; marche rapide.
3* Phthisie chronique : évolution des masses caséeuses; m ar
che lente.
Voilà qui est clair. Mais comment reconnaîtrons-nous sur le
vivant que nous avons affaire à une tuberculisation ou à une
phthisie aiguë ? Mystère. Si nous croyons avoir reconnu l’une ou
l’autre de ces deux maladies, quel pronostic devrons-nous poser ?
Mystère encore. Les orateurs de l’Académie ont longuemnt insisté
sur la constitution intime du tubercule ou des masses caséeuses,
sur la manière dont ces produits infectaient l’économie, sur le che
min parcouru par la granulation grise pour arriver delà peau au
poumon, sur les expériences sans nombre, relatives aux inocula
tions diverses. Ce sont là, sans nul doute, des recherches d’intérêt :
Mais pourquoi ne se sont-ils point efforcés d’élucider la difficile
question du diagnostic différentiel, entre la tuberculisation com
mençante et la pneumonie caséeuse? Pourquoi n’a-t-on point
essayé de s’entendre snr le pronostic propre à chacune de ces deux
maladies? Les traités modernes donnent bien quelques signes pré
tendus différentiels, entre l’évolution granuleuse et la phthisie.
Mais quel dédale! Quelle difficulté pour retrouver ces symptômes
su r le malade 1 D’un autre côté, les avis sont tout-à-fait opposés,
relativement au pronostic. Quelques médecins pensent avec Trous
seau que les masses caséeuses, — c’est-à-dire la phthisie propre
m ent dite, — peuvent guérir, mais que la tuberculisation est toutà-fait incurable. D’autres soutiennent avec M. E m pis, que cette
affection guérit quelquefois, tandis que la phthisie a une marche
fatale. Que faut-il croire?
.Sans doute, nous sommes bien aises de voir queM . Villemin
considère le tubercule comme un virus, que Buhl et Niemeyer en
font une maladie infectieuse, que Rokitansky voit en lui nnedyscrasie albumineuse, Hérard et Cornil, presque une pyrexie. Ladiscussion de l'Académie de médecine, nous a rappelé tous ces détails
à côté de beaucoup d’autres aussi intéressants, mais nous regret
tons q u ’elle n’ait point facdité, en ce qui a trait à la tuberculose ou
à la phthisie, la résolution des trois principaux problèmes qui pré
occupent tout praticien, diagnostic, pronostic, traitement même.
Disons-le, sans plus tarder, à côté des orateurs qui nous ont
laissé entrevoir tous les desiderata de la question, et ont plongé
notre esprit dans une anxiété des plus vives, en nous faisant douter
de nos moyens d’action pour reconnaître un mal qu’ils nous révé
laient sous un jour tout nouveau, il en est d’autres qui ont relevé
notre c o u rag e , en nous donnant une meilleure idée de nos forces
et de notre puissance. Ce sont des hommes comme MM. Barth, Pidoux, Guéneau de Mussy, qui ont pris en main la cause de l’ex
périence, de l’observation clinique, de l’empirisme sage et raisonné.
Que la science poursuive sa m arche, q u ’elle parvienne à élucider
complètement les points obscurs, nous serons alors en mesure
�— 156 —
d ’agir avec pics d e s û r e té , plus de régularité pour mieux dire ;
mais, nous pouvons dès à présent être utiles à nos malades, soi
gner et soulager les phthisiques, comme nos pères le faisaient
avant nous.
Entre les cliniciens dont nous venons de citer les noms, et les
savants tels que MM. Collin, Chauffard, Bouley, qui ont particu
lièrement envisagé la tuberculose à un point de vue scientifique,
doivent se placer un certain nombre d’orateurs qui se sont occu
pés de sujets mixtes, de questions intéressant à la fois le praticien
et le savant. MM. Hérard, Béhier, Hardy, J. Guérin ont plus spé
cialement marché dans cette dernière voie et sont entrés dans
d intéressantes considérations relatives à la spécialité, la virulence,
rinoculabililé, la contagion du tubercule. Eh bien! nous devons
encore sur ce point avouer notre impuissance. A cette question :
la tuberculose est-elle une maladie spécifique et virulente, l’Aca
démie, malgré de nombreux et savants discours, ne nous semble
pas en mesure de pouvoir faire une réponse claire et précise.
Ici, nous nous permettrons d’exprimer un regret, c’est que l’ho
norable M. Colin n’ait point présenté à la fin de son rapport, un
résumé plus complet de la question. Si une conclusion bien nette
avait été formulée sur chaque point en litige, et soumise au vote de
l’assemblée, nous aurions eu entre les mains une pièce scienti
fique qui aurait été un témoignage vivant et précis des opiuions
de l’Académie de médecine. Loin de là : nous connaissons la ma
nière de voir d’un certain nombre d’orateurs, mais nous ignorons
complètement l’impression générale produite sur l’assemblée par
chacun d’entre eux; nous ne savons pasdavanlage ce que la masse
des académiciens pense sur tel ou tel point de la question. Il y a là
une lacune. Il est vrai de dire que l’Académie n’a point encore défi
nitivement abandonné la tuberculose. M. le professeur Bouillaud
— le nouvel élu de l’Institut — doit prendre la parole sur ce sujet.
La discussion a d’ailleurs, tellement agité la savante assemblée,
qu’il est rare qu’une séance se passe sans que le moindre prétexte
ne fasse revenir sur le tapis quelqu’un des points en litige. Nous
pouvons donc espérer encore que l’Académienous présentera,sous
forme de profession de foi, une série de conclusions résumant l’état
actuel de la science au sujet de la tuberculose.
157 —
Mais revenons à la question primitive. La tuberculose est-elle
oui ou non une maladie spécifique? Nous ne croyons pas qu’il
faille donner cette dénomination à toute affection produite par une
cause unique et toujours la même. C’est là, le caractère particulier
des maladies virulentes, de la morve par exemple, de la rage, de
la syphilis. Une affection pour nous est spécifique, lorsqu’elle a
une individualité propre, une marche spéciale, unecaractérislique
anatomique bien déterminée. A ce compte, la tuberculose est cer
tainem ent spécifique ; mais elle n’est point virulente, dirons-nous
avec M. Hardy, parce q u ’elle peut être produite par des causes trèsdiverses, par des excès de toutes sortes, par une mauvaise hygiène,
par l’hérédité, par la contagion. La syphilis n ’est jamais transmise
que par la syphilis ; la rage n’est donoée que par la rage ; le tuber
cule, au contraire, est occasionné par une foule de causes. Si
donc, la tuberculose est pour nous une maladie spécifique, nous
ne nous croyons pas autorisé à la regarder comme une affection
virulente.
Un virus d ’ailleurs n ’est inoculable que par lui-même. Or, que
résulte-t-il des expériences sans nombre dont les résultats ont été
exposés à l’Académie? La granulation grise inoculée a donné la
granulation grise : c’est vrai. Mais, si les premières expériences
de MM. Hérard et Cornil avaient pu faire croire qu’elle seule était
inoculable, il a bien fallu depuis changer d’opinion. En intro
duisant sous la peau des fragments de granulations devenues ca
séeuses, des débris de masses caséeuses primitives, de la matière
cancéreuse, du p u s . . . que dis-je? en produisant une simple irri
tation mécanique, on a toujours obtenu le même résultat, c’est-àdire une évolution de granulations grises. Est-ce là le caractère
d’un virus? Allons plus loin. Peut-on conclure de ces expériences,
que le tubercule est réellement inoculable? Est-on bien sûr que les
granulations obtenues chez les animaux soient identiques à celles
de l’hom m e? En admettant q u ’elles le soient a-t-on la certitude,
dirons-nous avec M. Chauffard,d’avoir obtenu autre chose q u ’une
simple production locale: peut-on affirmer que l’on a fait naître
la tuberculose , c’e st-à-d ire une maladie générale? Voilà autant
de points qui sont encore à élucider.
«
Si le tubercule était inoculable, M. Guéneau de Mussy en con-
�—
—
158
159
—
—
d u ra it, sans hésiter, que ce produit est contagieux. U nous semble
que c’est aller un peu trop vile. Dans sa thèse inaugurable sou
tenue récemment à Paris (1), un ancien interne de nos hôpitaux,
qui a laissé parmi nous les meilleurs souvenirs, s’exprime en ces
termes :
« 11 est craindre que si la tuberculose est inoculable, elle soit
aussi contagieuse. Toutefois, le deuxième fait n ’est pas la consé
quence rigoureuse du premier: la syphilis, maladie inoculable et
non contagieuse cependant, en est une preuve suffisante ». L’Aca
démie de médecine, toutefois, parait croire à la possibilité de la
contagion. On a cité, à ce propos, des faits qui semblent prouver
que la cohabitation prolongée, la comm unauté de milieu et d 'h a
bitudes peuvent, à la longue, transmettre la tuberculisation ou la
phthisie soit de la femme au mari, soit du mari à la femme. Nous
ne prétendons point trancher cette question; seulement nous
croyons que c’est dans l’observation rigoureuse des faits cliniques
et non dans les expériences d’inoculation qu’il faut chercher la
preuve de la contagion de la phthisie.
Que si, maintenant, nous voulions dresser le budget comparatif
de nos clartés et de nos ombres, nous pourrions peut-être ranger
dans la colonne de notre actif, les points suivants :
La tuberculose (granulations grises) est distincte de la phthisie
(masses caséeuses).
La tuberculose est sous la dépendance d ’un état g é n é r a l, d’une
diathèse. C’est une maladie spécifique, mais non virulente.
La phtisie, n’est ni spécifique, ni virulente. Son processus est
toujours l’inflammation. Le tubercule la complique souvent.
La colonne de notre passif serait beaucoup plus longue :
Quelle est la constitution intime des granulations grises et de
quelle nature est le processus qui les produit?
Quels sont les caractères symplômatiques qui difïérentient la
tuberculisation de la phthisie aiguë?
Quel est le pronostic qui convient à ces deux états ?
En admettant que la phthisie puisse guérir, quel traitement con•
(i) Recherches sur l’inoculabilitè de b phthisie, par A. Rouslan.
vient-il d’instituer pour atteindre ce but, et pour empêcher la pneu
monie caséeuse de s’étendre et de se généraliser?
La phthisie est-elle, comme la tuberculose, sous la dépendance
d’un état général?
Le tubercule se transmet-il réellement par inoculation et peutil produire ainsi la tuberculose?
Si la tuberculisation et la phthisie sont réellement contagieuses,
le sont-elles au même degré et de la même façon ?
On le voit, il reste encore beaucoup à faire. La savante discus
sion de l’Académie n’a élé, en somme, qu’un long exposé. Aucune
preuve démonstrative n ’a établi la certitude de la plupart des faits
énoncés ou supposés. Ces débats ont été cependant fort utiles, car
ils ont mis en relief les parties faibles de la question, et, par con
séquent, montré nettement aux travailleurs les points divers sur
lesquels doivent porter les recherches.
Dr Seux fils.
BIBLIOGRAPH IE
Leçons cliniques sur les maladies des vie:llarda et les maladies chro
niques, professées par C harcot et recueillies par B all.
Traité des maladies infectueuses, par G riesinger , traduit par L emattrk.
Parmi les publications importantes qui ont paru ces derniers
temps, nous devons surtout signaler celles dont le litre est inscrit
ci-dessus, et dont l’une représente les tendances actuelles de la
jeune école française, tandis que l’autre nous initie aux recherches
d’un des maîtres de la science germanique. — Plus d’un point de
ressemblance rapproche ces deux travaux ; tous deux appartien
nent à la médecine exacte, scrupuleuse dans ses recherches, com
plète dans ses examens ; mais nous devons constater à l’honneur
de l’école française que le livre de M. Charcot est plus clair, plus
précis, plus sobre d’hypothèses et plus rigoureux dans les déduc
tions.
L’auteur jette d’abord un coup-d’œil d’ensemble sur la patho
logie sénile. Les altérations générales qui caractérisent la vieillesse
peuvent, à ses yeux, se résumer en un seul m ot, l’atrophie. Ce
travail atrophique porte surtout sur les éléments histologiques
dont les tissus se composent. Les diveis o rg a n e s, le cerveau, le
tissu musculaire, le système artériel sont soumis à cette loi dont
deux viscères sont exemptés, le cœur et le re in .— De cette trans
formation organique résulte nécessairement un affaiblissement
fonctionnel. Ces prémisses conduisent l’auteur à conclure q u ’il
existe des maladies spéciales à la vieillesse, que d’autres sont m o-
�5< «
difiécs par l’âge sénile, qu’il y en a enfin contre lesquelles la vieil
lesse crée une sorte d’imm unité.
A ces données cliniques générales succède une étude spéciale de
certains étals morbides et notamment du rhumatisme articulaire
chronique ; il en décrit les s\m ptôm es, il en suit l’évolution, il en
détermine les rapports avec les maladies de la môme famille, et
notamment evec la goutte dont il la sépare sans hésiter, rejetant
avec énergie le mot relaliment vieux de rhum atism e goutteux.
M. Charcot suit ainsi la mode actuelle qui tend à considérer le
rhum atism e et la goutte comme deux espèces tout-h-fait distinctes,
mode dont l’impulsion vient surtout d’Angleterre, depuis le Traité
de Garrod.
Griesinger ne généralise ni ne théorise guère, comme le litre de
son livre aurait pu le faire présum er; mais il décrit successive
ment quatre étals m orbides: 1° les maladies des marais ; 2° la
fièvre jaune ; 3° les maladies typhoïdes, groupe dans lequel j1 réu
nit le typhus, la fièvre typhoïde proprement dite, la fièvre récur
rente, la typhoïde bilieuse et la peste, qui sera sans doute fort
étonnée de se trouver en pareille compagnie; il n'y a que les Alle
mands pour trouver de te s rapprochements; 4° enfin le choléra.
Griesinger s’est le plus souvent borné à décrire ; il l’a fait avec
un grand succès. Bien lui a pris de ne pas trop théoriser.
A. F.
N ouvelles & V ariétés
M. Tardieu est nommé président de l’Association générale des
médecins de France. — L’Association est pleine de confiance dans
son nouveau président.
— Le concours pour une place de chirurgien-adjoint des hôpi
taux de Marseille s’est terminé le 18 ju in par la nomination de
M. Villeneuve fils.
— Le concours ouvert le 22 juin, h l’Hôtel-Dieu de Marseille,
pour une place de médecin-adjoint des hôpitaux s'est terminé le
24 par la nomination de M. Fabre.
On s’accorde h reconnaître que le concours de chirurgie a été
bon et le concours de médecine excellent. Ces deux luttes brillantes
ont fait le plus grand honneur non-seulement aux vainqueurs,
mais encore h leurs émules; aussi, l’administration des hospices
a-t-elle hautement regretté de n’avoir que si peu de places h donner.
— A la suite du concours pour l’adjuvat d’anatomie à la Faculté
de Montpellier, ont d é nommés : I" aide, M. Kobryner; 2* aide,
M. Auzhilhon.
Marseille. — Typ. Cayer et C*, rue Saint-Perréol, 57.
.
UN IO N MÉDICALE
R e la tiv e s a u x b o n s e ffe ts de l ’A c é ta te de P lo m b
d a n s le tra ite m e n t de l ’U ém optysie
Par le D' ROCANUS.
PREMIÈRE OBSERVATION.
Le nom m é Paul C . . . , pilote, âgé de 48 ans, d’une constitu
tion robuste et d’un tem péram ent bilioso-sanguin, éprouvait,
depuis quatre ou cinq ans, Je la suffocation de nature asthm ati
que. Pendant les hivers, il était souvent atteint de bronchite, avec
expectoration de mucosités glaireuses, qui le forçait, par inter
valle, de suspendre ses occupations et de garder la chambre.
Le 26 octobre dernier, sans cause occasionnelle connue, pen
dant un accès de toux, il se déclara une abondante hémoptysie ;
la suffocation habituelle augm enta ; le malade, très effrayé, était
dans un accablem ent profond ; le pouls était petit, dépressible
et fréq u en t; la percussion du thorax n ’indiquait aucune m atité,
et l’auscultation fesait reconnaître, du côté droit, des rôles hu
mides. (Eau de Léchelle par cuillerées a potage de deux en deux
heures ; boissons acidulées et glacées; bouillon froid; sinapis
m es aux m em bres inférieurs.)
Celle médication continuée pendant trois jours n ’arrêta pas
l’hém orrhagie qui se reproduisit trois ou quatre fois, par quan
tités considérables. Dans la nuit du 28 au 29, le malade expec
tora environ 200 gram m es de sang. La percussion et l’ausculta
tion de la poitrine ne présentaient rien de nouveau â signaler, la
toux persistait, le pouls moins dépressible avait conservé sa fré
quence; m êm e suffocation.
Potion gom m euse.................. 120 grammes.
Sirop diacode....................... 50
»
E xtrait de ratan h ia................
5
»
Mêlez, à prendre par cuillerées à potage d’heure en heure.
8
�—
Uoe cuillerée matin et soir de sirop de digitale de Labélonye ;
mômes boissons; aliments légers et froids.
Le 30, l’hémorrhagie, qui avait cédé pendant vingt-quatre
heures, se renouvelle; mon am iM . le Dr Silbert, appelé en mon
absence, suivit le malade quelques jours ; il employa l'acide gai lique a haute dose et l’ergotine ; mais il n ’obtint pas un résultat
plus favorable.
Le 3 novembre, nouvelle hémoptysie d’à peu près 500 gr. Le
malade et sa famille, découragés, m anifestèrent l'in ten lio n d ’une
consultation avec M. le Dr Sirus Pirondi.
Notre savant et digne confrère proposa l’emploi du sous-acé
tate de plomb dont il avait souvent constaté les heureux effets,
et il fut prescrit la potion suivante :
Sous-acétate de plom b........ 30 centigram m es.
Sirop diacode..................... 23 gram m es.
Eau distillée......................... 120
»
Mêlez. A prendre par cuillerées à potage d'heure en heure.
Continuation du régime et des boissons adm inistrées ju s
qu’alors.
A dater de ce jour, l’hémorrhagie cessa com plètem ent. La
médication a été continuée le 4 et le 5 pour éviter toute récidive.
L'inflammation modérée du parenchyme pulm onaire qui se
manifes'a consécutivement dans le poumon droit, fut com battue
par les vésicatoires répétés, par des médicam ents appropriés, et
en dernier lieu, par des cautères. A la fin de novem bre, le ma
lade a pu faire sa première sortie ; néanm oins, il n’a repris son
service du pilotage qu’à la fin de l'hiver, à cause des vicissitudes
atmosphériques auxquelles sa profession l’aurait exposé.
DEUXIÈME OBSERVATION.
Mme D . . . , d ’une constitution délicate et d’un tem péram ent
lym phatico-nerveux, s’est accouchée d’une fille en septem bre
dernier. Pendant les mois qui suivirent, elle eut des m enstrues
très abondantes qui l’affaiblirent beaucoup ; en février, elle fut
163
—
atteinte de toux sèche et convulsive qu elle négligea et qui était
sym ptôm atique soit d’un grand épuisem ent, soit de la présence
au som m et des deux poumons de tubercules crus que j ’avais
constatés précédem m ent. Enfin, le 16 avril, pendant un accès
de toux, il se déclara une hémoptysie abondante provenant du
som m et du poumon gauche.
Appelé à neuf heures du m atin, je fus à dix heures auprès de
la malade que je trouvai très-effrayée, ayant un pouls 'a peine
sensible, les extrém ités froides, la voix presque éteinte, et se
plaignant de dyspnée et d’un malaise général ; elle venait d’ex
pectorer 300 gram m es de sang vermeil et spum eux, et à chaque
effort de toux, elle en rendait encore a pleine bouche. L ’oreille
percevait au som m et gauche du thorax des râles muqueux en
abondance et la m atité, à la percussion, était plus sensible de ce
côté que du côté droit.
Encouragé par le succès dû h l’acétate de plomb chez le m a
lade qui fait l’objet de l'observation précédente, je l’employai de
prim e-abord chez Mme D . . . concurrem m ent avec des sinapismes
prom enés souvent aux extrém ités inférieures, et des boissons
glacées.
Le soir du 16 et le lendemain 17, l’hém orrhagie a conlinué,
mais faiblem ent; le sang expectoré était plus noirâtre et parais
sait avoir séjourné dans les bronches ; la malade en avait toujours
le goût à la bouche. Le 18, les rares crachats rendus étaient
tout-à-fait m uqueux. A ujourd’hui, 13 juillet, celte dam e, tou
jours sous l’inlluence de son affection tuberculeuse est dans un
état de santé relativem ent satisfaisant.
Les observations qui précèdent nous paraissent intéressantes
à plus d’un litre et nous engagent à reproduire dans Y Union
médicale, un travail publié il y a plus de vingt ans dans la Cli
nique de Marseille, par M. le Dr S. Pirondi (1).
(1) Numéro du 16 juin 1846, page 93 et suivantes.
�— 164 —
Il en est des médicaments comme de beaucoup d’autres choses.
On exalte les nouveaux venus et on laisse tom ber les autres en
désuétude; sauf à réserver le même sort à ceux vantés aujour
d'hui et qui se trouveront à leur tour com plètem ent détrônés
demain.
Tous cependant peuvent avoir leur utilité dans des circons
tances particulières, et c'est aux praticiens h reconnaître et h
saisir les indications diverses qui doivent présider h des choix
différents. Que si des indications spéciales ne peuvent pas encore
être form ulées, il restera toujours l’ancien précepte à juvantibus cl lœdonlibus, grâce auquel il sera perm is, par exemple,
de faire appel a l'acétate de plomb plutôt qu’au perchlorure de
fer, au ratanhia plutôt qu’à l'ergoline, et vice versa, là où plu
sieurs de ces substances auraient com plètem ent échoué.
MÉDECINE PRATIQUE
Des bons effets de l’Acétate de Plomb à l’intérieur dans
le traitement de l’Hémoptysie
I
Le mot hémoptysie (crachem ent de sang) est très vague, il
faut en convenir, et l’on comprend qu'il n ’ait pu jouir d ’une
application générale qu’à une époque où l’on confondait, sous
cette dénomination, tous les cas dans lesquels le sang était rejeté
par la bouche, que ce liquide vint des gencives ou de la langue,
de la gorge ou des poumons, etc. P. F rank a été, parmi les
auteurs modernes, l’un des prem iers à établir quelque utile
distinction à ce sujet. MM. Chomel, Roche et Gendrin ont, eux
aussi, cherché à débrouiller la m atière, et peut-être pourrait-on
dire aujourd'hui que si par un seul m ot on désignait jadis des
affections différentes, on accorde m aintenant des noms divers à
désaffections identiques. Ajoutons encore que si, dans quelques
—
105 —
circonstances, la confusion qui régnait dans les term es n ’était
pas sans inconvénients pour la pratique, les nom breux synonimes trouvés depuis, n ’ont guère plus amélioré le traitem ent.
Stoll adm ettait des hémoptysies bilieuses, liées à cet état de
l’estomac nommé depuis embarras gastrique ; et des hémopty
sies vermineuses occasionnées par la présence de quelques vers
dans le tube intestinal.
M. Chomel a nié les secondes, tout en paraissant adm ettre les
prem ières. Beaucoup d 'a u te u rs, au co n traire, n ’ont voulu
adm ettre ni les unes ni les autres. Ils ont tout sim plem ent con
sidéré l’em barras gastrique et la présence des helm inthes,
comme des circonstances concom itantes, malgré les succès
obtenus par Stoll d’abord, et ensuite par Landré-Beauvais en
com battant les hémoptysies bilieuses par l'emploi des ém étiques,
et malgré les quelques observations citées par Bremser d’hé
moptysies verm ineuses.
Au fait, il est assez difficile de pouvoir s’expliquer com m ent
et par quels rapports physiologiques la présence de quelques
vers dans l'intestin ou un état morbide de l’estomac peut pro
duire une hém orrhagie par les voies aériennes. Toutefois, il ne
faut pas se dissim uler que tout ne s’explique pas encore en
m édecine, pas plus que dans les autres sciences.
Dans le courant de ce travail, le mol hémoptysie sera appli
qué indistinctem ent à toute expulsion de sang hors des voies
aériennes, soit que l'hém orrhagie provienne d’une exhalation de
la m uqueuse trachéo-bronchique, soit qu’elle dépende d’une
lésion organique du poumon.
A la rigueur, la question ne saurait être indifférente s’il s’a
gissait d ’établir avec certitude un bon pronostic, attendu que,
toutes choses égales d’ailleurs, si l’exhalation a lieu dans le
parenchym e du poumon lui-m êm e (cas désigné par Laënnec
sous le nom à'apoplexie pulmonaire), ce sera toujours beaucoup
plus grave que si l’hém orrhagie n ’est que broncho-trachéale.
Mais nous n’avons à nous occuper, pour cette fois, que d’un
�—
166
—
mode de traitem ent de l’hémoptysie en général. Il est évident
et conséquem m ent inutile de répéter qu’on aura d’autant plus
de chance de succès qu'il s’agira d ’une hémoptysie moins
grave, autant par sa nature que par l’âge, la constitution du
sujet, e tc ., etc.
Il
est une dernière circonstance enfin sur laquelle il faut appe
ler l’altentiou du lecteur avant de passer outre : c’est que nous
ne parlerons ici que des hémoptysies déterm inées par un état
hypérémique de tout le système ou des organes au m oins où
s’opère l’exhalation, ou des hémoptysies occasionnées par la
rupture d’un ou plusieurs vaisseaux qui se trouvent eu com m u
nication avec les voies aériennes ; quelle que soit d ’ailleurs la
cause à laquelle il faille rapporter cette rupture. Nous laisserons
donc de côté toute hémoptysie produite par un état aném ique
général ou lo cal, ce que l’on a nommé hém orrhagie passive ou
par dépression des forces, selon l’expression de Frank.
(I
On s’accorde à dire, que l’hémoptysie réclame en général une
méthode de traitem ent active. Cette m éthode est d ’ailleurs basée
sur deux données principales :
Suspendre promptement l’hémorragie quand elle existe.
En prévenir le retour quand elle a cessé.
Nous passerons sous silence la seconde indication à rem plir,
car nous n ’avons pas à nous occuper dogmatiquement d'un sujet
qui ne constitue pas le but principal de ces lignes. N oas n ’avons
d ’ailleurs rien à proposer â cet égard qui n ’ait été dit et redit
par tous les auteurs qui ont traité de l’hém optysie. M ais, en
revanche, nous allons nous occuper, avec quelques détails, de
la méthode à suivre pour arrêter prom ptement l’hém orrhagie
lorsqu’elle s’est déclarée.
Pour parvenir à ce résultat, les moyens généralem ent em
ployés sont les suivants : saignées générales et locales, bois
—
167
-
sons
acidulées, froides ou glacées; révulsifs cutanés, repos
et silence absolus, diète. On a eu égalem ent recours à quel
ques agents styptiques tels que infusions de ralanhia, de ca
chou, de sim arouba, de quinquina, l’eau de Rabel, etc. Enfin,
dans quelques cas exceptionnels, lorsqu’on a cru pouvoir re
connaître des hémoptysies bilieuses, on n’a pas craint d’em
ployer les ém étiques, h l’exemple de Sloll, et les purgatifs
précouisés par Sydenham. Ces deux derniers moyens ont été
expérim entés sur une assez grande échelle par Laënnec, auquel
les purgatifs ont beaucoup mieux réussi que le tartre stibié.
Reste â savoir ensuite, si les bons effets obtenus par les laxatifs
doivent être attribués h l'excitation localisée sur la surface
gastro-intestinale par les nombreux partisans de la doctrine des
révulsions et des dérivations ( 1).
Cependant tous ces moyens employés séparém ent ou simulta
ném ent, selon la gravité de 1hém orrhagie, sont loin de produire
les bons effets auxquels on pouvait s’attendre d ’après leur m ulti
plicité ; et souvent l’hémoptysie ne cesse qu’après avoir laissé le
malade dans un état d’anéantissem ent tel à devoir redouter le
renouvellem ent de la plus petite perle de sang. Nous n’avons
certainem ent pas la prétention de m ettre en doute l’utilité rela
tive des agents thérapeutiques sus-m entionnés. Nous voudrions
seulem ent faire constater que leur action est lente, leur effet
tardif; et c’est précisément ce q u ’il faut avant tout éviter, car il
ne s’agit pas seulem ent d’arrêter le crachem ent de sang, mais
de l’arrêter le plus promptement possible. Or, je le répète, les
moyens ordinairem ent employés ne me paraissent pas rem plir
com plètem ent ce but. C’est du moins l’im pression que j ’en ai
reçue autant dans les hôpitaux que dans la pratique civile ; et
fl) Il est presque inutile de faire observer ici qu’à l'époque où ces lignes ont
été écrites, les travaux de Pravaz et Pétréquin sur le perchlorure de fer et sur
le perchlorure ferro-manganique étaient encore inconnus ; et il était fort peu
question de l’ergotine, car le premier Mémoire de Parola sur cet important sujet
est de date bien plus récente.
�— 168 —
c’est ce qui nous a engagé à tenter de nouveaux essais, dont
nous consignons ci-après les résultats.
III
L'acétate de plom b, sel de saturne , connu des anciens sous
le nom de saccharum saturni, a été par eux adm inistré à de
très fortes doses, au dire de Richter ; mais, comme tant d'autres
remèdes, il avait été laissé dans l’oubli jusqu'à l’époque où
Hildenbraud voulut l’essayer sur lui-même à la dose de cinq
grains par jour, sans en éprouver d’autres symptômes qu’une
augmentation d'appétit. Encouragé par cet essai, Hildenbrand
l’administra plus particulièrement contre la phthisie pulmonaire ;
d’après lui, faction anti-phlogistique de ce m édicam ent ne
saurait être mise en doute, et aucun agent thérapeutique ne
serait plus propre à com battre les sueurs, la diarrhée colliquative, et l’excessive irritabilité des ulcères pulmonaires.
Horn, Amelon, Kopp, Ilirschber et Stark surtout (1) ont
également obtenu de notables améliorations dans des cas de
pkihisies avancées. Osiander associait l’acétate de plomb à une
faible dose d’opium, et l’administrait avec succès au début de la
fièvre dite pyogénique.
Stroen, W illiamson, Y ounget Barton employèrent plus par
ticulièrement l’acétate de plomb contre l'hém optysie et la
métrorrhagie.
D upuytren, KorefT et Bertin, l’adm inistrèrent avec succès
dans le traitem ent des maladies du cœur et dans celui des ané
vrismes des grosses artères.
Enfin MM. Fouquier et Trousseau voulurent, dans ces der
niers tem ps, répéter les expériences des auteurs que nous
venons de citer, mais n’arrivèrent pas à des résultats bien posi
tifs, au point que M. Trousseau a cru devoir ém ettre encore
quelques doutes sur les quatorze succès rapportés par Levrat(1)
De usa sacchari saturai in phthisi pnlmonum confirmais.
— 169
Perroton, dans le traitem ent des névroses du cœur et de l’hysté
rie par l’usage de l’acétate neutre et du sons-acétate de plomb à
l’intérieur.
A cela se réduisent à peu près les essais tentés avec un m édi
cam ent auquel Kopp avait depuis longtemps donné le nom de
solamen phthisicorum. Ils sont encore assez nom breux, ce
nous sem ble, et ont paru sous l’égide de noms assez célèbres,
pour être pris en sérieuse considération. Et il y a peut-être lieu
de s'étonner que, dans un de nos plus récents traités élém entaires
de m atière médicale, l’auteur ait cru pouvoir avancer (Ratier,
page 28, tome I) que, dans l'état actuel de nos connaissances,
on ne voit pas quel avantage pourrait avoir iadministration de
l'acétate de plomb à l'intérieur. Nous ne voyons pas, nous, quel
désavantage il peut y avoir à tenter de nouveaux essais contre
une affection (la phthisie) si souvent répétée incurable, dùt-on
n’aboutir qu’à une légère amélioration ; à plus forte raison puis
contre l’hémoptysie dont les suites sont bien moins redou
tables, et, partant, la guérison bien plus probable.
IV
Les effets de l'acétate de plomb sur l’économie malade, ont
été diversem ent interprétés par tous les praticiens qui l’ont mis
en usage, et chacun a fourni son explication d’après la théorie
médicale pour laquelle il éprouve le plus de sympathie. Nous ne
nous arrêterons pas sur toutes ces dissertations théoriques.
Q u’il nous soit seulem ent perm is de faire observer que tous les
anatom o-pathologistes qui ont pu examiner le tube intestinal de
personnes qui avaient succombé à une affection (la colique des
peintres ou saturnine) dans laquelle le sel plombique a dû agir
trop fortem ent sur l’économ ie, tous s’accordent à dire n avoir
pas rencontré la moindre trace d'inflammation et avoir, au
co n traire, trouvé tous les tissus extrêm em ent pâles et dé
pourvus de sang. Nous citerons entre autres P aris, Fontblan-
�— 170 —
M.
que (1), Lacnnec et
Orfila lui-m êm e (2). Nous verrons
ailleurs quelle conclusion ont peut tirer de ce fait ; disons seule
ment que l’acétate de plomb, d'après les effets produits sur
l’homme sain (3), comme sur l’homme malade, doit-être rangé
parmi les remèdes appelés par l’école dynamique Injpostèmsans ou contre-stimulants vasculaires. Cette dénom ination peut
paraître étrange de prime-abord, mais elle rend beaucoup mieux
compte du mode d’action de 1acétate de plomb, que l’ancienne
épithète d’astringent,qui, à notre avis, n’explique rien et renferm e
une idée fausse, ainsi qu’il serait facile de le prouver au besoin.
L ’acétate de plomb pourrait donc être considéré ,comme un
adjuvant de la saignée dans le raitem ent de l’hémoptysie, et
il devra même la remplacer avec avantage, si ce n ’est toujours,
du moins dans la plupart des cas ; et il est permis de l’adm i
nistrer avec d’autant plus de courage que, de l’aveu de tous ceux
qui l'ont employé, il n'y a pas d’exemple que l’absorption de
ce sel ait donné lieu a quelques symptômes d’intoxication, tant
que la maladie, contre laquelle il a été dirigé, n’a pas éprouvé
une notable amélioration. Ce qui rentre au reste sous la loi or
dinaire de la tolérance, si bien définie par l’école rasorienne.
Quant au mode d ’administration du sel plom bique, et aux
circonstances particulières qui accompagnent d’ordinaire son
usage, on pourra mieux s’en rendre compte par les observations
suivantes, choisies parmi celles que j ’ai pu observer moi-même
ou que j'ai recueillies dans la pratique de M. Pirondi père, qui
depuis longtem ps emploie avec succès l’acétate de plomb, dans
l'hém optysie ainsi que dans la phthisie pulmonaire.
(La suite au prochain numéro.J
(1) Médical jurisprud. V. II, page 358.
(f) Leçons de méd. lèg. T. III, pag. 176.
Nous aurions pu citer encore les remarquables travaux de M. Tanquerel des
Planches, car, bien que ce savant écrivain ne se prononce pas trop positivement
à l’égard des lésions du tube intestinal, il est difficile de trouver des signes d'in
flammation dans ce qu’il rapporte à ce sujet.
(3) Lisez les expériences du docteur W. Laidlan dans le The London médical
Gazette, 1830 ou 1831.
— 171 —
Bulletin thérapeutique.
Pom m ade «lu f r è r e Comme c o n tre les cancers cutanés
Arsenic blanc pulvérisé............. 2 grammes.
Cinabre..................................... 4 grammes.
Poudre d’étoffe de laine............. 50 centigrammes.
Mêlant ces poudres avec un peu d’eau on en fait une pommade
dont on couvre le cancer à l’aide d’un pinceau. On place, par des
sus, une toile d’araignée que l’on mouille légèrement. Quand le
premier appareil est tombé on en applique un second, si le cancer
n ’est pas détruit.
Ce caustique réussit surtout dans le traitement des petits can
cers du visage. Il faut l’appliquer avec prudence, c’est-à-dire sur
une surface peu étendue. Un traitement interne approprié doit
être combiné avec le traitement externe. — S.
C hronique m en su elle.
Marseille, 5 Août 1868.
Malgré les chaleurs caniculaires du mois de juillet, malgré la
douce approche des vacances, nos confrères ne songent point à se
reposer. Préoccupés d’améliorations utiles, de créations nouvelles,
ils cherchent sans cesse et, ce qui est mieux encore... ils trouvent.
On n ’en doutera point lorsque l’on connaîtra le projet qui vient
d’éclore subitem ent au milieu de nous, par une température de
quarante degrés et sous un soleil à fendre les crânes les plus ro
bustes. 11 ne s’agit rien moins que de fonder à Marseille une So
ciété médicale des hôpitaux. Cette assemblée se recruterait natu
rellement parmi les médecins et chirurgiens de nos hospices, ou
plutôt ces confrères eux-mêmes se constitueraient en assemblée
scientifique. Entendons-nous sur ce dernier mot. La nouvelle So
ciété ue se proposerait nullement de se réunir toutes les semaines
ou tous les quinze jours pour discuter telle ou telle question de mé
�— 172 —
decine ou de chirurgie. Non, son but serait tout autre. Nous avons
à Marseille la Société impériale de médecine, assemblée scienti
fique fondée depuis longues années, fonctionnant très-régulière
ment et jouissant d’une excellente réputation dans le monde
savant ; de plus, une des sections du Comité médical des Bouchesdu-Rhône est exclusivement scientifique. Il serait donc tout-à-fait
superflu de créer, à côté de ces deux sociétés savantes une troi
sième assemblée régie par les mêmes lois. Diviser les efforts est
toujours nuisible. C’est spécialement à la province que peut être
appliqué ce proverbe si vrai : l'Union fait la force.
La Société médicale des hôpitaux de Marseille se proposerait
simplement de publier un bulletin trimestriel dans lequel, indé
pendamment des résultats statistiques fournis par les relevés
administratifs de nos hospices, seraient relatés les faits intéressants
observés dans les divers services de médecine ou de chirurgie. De
plus, une large place serait donnée dans ce bulletin à l’étude des
questions générales, à l’examen des améliorations à introduire ou
des mesures à prendre.
Tel est le projet. Réussira-t-il? Nous l’espérons. La plupart des
chefs de service ont applaudi à cette idée. Nous ne douions point
que l’administration de nos hospices ne favorise de son côté la
création d’un bulletin spécialement consacré aux hôpitaux de
Marseille. Cette publication, outre qu’elle donnerait une impor
tance nouvelle à nos grands établissements d’assistance publique,
ferait naître sans nul doute autour du vaste foyer d’étude fourni
par les importants services hospitaliers de notre ville une chaude
atmosphère de travail et d’émulation. Favoriser ce projet sera
donc à la fois faire acte de bon citoyen et faire preuve d’un am our
désintéressé pour la science.
Au demeurant, il est très juste que les médecins et chirurgiens
de nos hôpitaux aient un organe dans lequel ils puissent faire va
loir leurs droits et répondre, en exposant au grand jour leurs
actes, aux critiques dont ils sont souvent l’objet. Il est de plus très
convenable que les questions médicales ou professionnelles qui
intéressent plus spécialement nos confrères des hôpitaux, soient
discutées longuement et en toute liberté dans un bulletin spécia
lement destiné à cet usage. La question des concours par exem pl e,
—
173
—
sujet vaste et difficile dont se préoccupent actuellement tous les
esprits sérieux, serait traitée avec une entière opportunité par
ceux qui ont un intérêt direct à ce que ces luttes scientifiques de
viennent de plus en plus savantes, de plus en plus loyales et ne
fassent arriver dans nos hôpitaux que des hommes réellement
capables et méritants.
Quoi qu'on en puisse dire, le concours, malgré les vices inhé
rents à cette institution, est encore le mode de recrutement le plus
libéral qui puisse être. Incomplet souvent dans ses résultats, faux
quelquefois dans son application, le concours est du moins, en
principe, une des plus belles conquêtes des temps modernes.
Y a-t-il beaucoup d’institutions humaines dont on puisse dire
a utant? Ne cessons pas de le répéter avec M. Le Fort : « Le con« cours est ce,'que le font les juges; les hommes ont leurs fai
te blesses, leurs défauts, leurs défaillances; mais une institution
« est bonne lorsqu’elle annihile le plus possible les funestes effets
« de l’infirmité hum aine. » Nous le demandons à tout esprit im
partial, la nomination au choix ne favorise-t-elle pas le népotisme,
beaucoup plus que la nomination par le concours? Si non, qu’on
le prouve; si oui, qu’on veuille bien convenir que le concours, avec
ses imperfections, est un progrès, un grand et réel progrès.
Certes, au moins autant q u ’un autre, nous reconnaissons que
cette institution est perfectible, q u ’elle ne donne pas toujours des
résultats excellents, q u ’elle traverse parfois de fort mauvaises
phases. La mesure récemment prise à Paris et qui recule à 63 ans
la limite d’âge de la retraite pour les chirurgiens des hôpitaux,
prouve que dans notre grande capitale le besoin s’est fait sentir de
dim inuer le nombre des concours afin de donner aux candidats le
temps de se livrer à de plus fortes études. Est-ce la faute des juges
ou celle des candidats si les dernières épreuves ont été moins bril
lantes? Nous n ’avons pas à examiner ce point. Il nous suffit de
constater que le mal a été assez sérieux pour attirer l’attention des
hommes compétents et déterminer l’assistance publique à nommer
une commission de médecins chargés d’étudier, de revoir, de ré
former le réglement des concours.
Voilà ce qui s’appelle comprendre son époque. Au lieu de nier
les résultats fournis par le concours, rendons hommage à cette
�institution basée sur la grande loi d’égalité qui régit nos société*
modernes. Nous ne parlons pas ici de cette égalité brutale et inin
telligente en vertu de laquelle les médiocrités jalouses prétendent
courber sous un même niveau l'homme de mérite et l’ignare.
Par égalité, nous entendons possibilité pour tous, sans exception,
d'arriver par leurs propres forces au premier rang. Celte possibi
lité-là le concours seul la donne. Maintenons-donc cette institution,
rendons son application fréquente, mais en même temps étudions
soigneusement son mécanisme et efforçons-nous de la soustraire
de plus en plus au joug des humaines faiblesses.
Si l’on nommait au concours le chirurgien chargé d’opérer la
séparation des deux frères siamois, nous croyons que les candidats
ne seraient pas très nombreux. Grande, en effet, sera l'audace de
celui qui acceptera une responsabilité pareille. Si les deux frères
persistent dans leur projet, le monde scientifique assistera à l’expé
rience la plus palpitante d’intérêt qui se soit jamais vue. Ce qui
rend affreusement dangereuse toute tentative d’opération, c’est que
Chang en Eng, pendant le cours de leur longue existence n’ont,
pour ainsi dire, formé qu’un seul et même individu. Sensations,
désirs, émotions diverses, tout est commun chez ces deux frères ;
et ce qu’il y a de plus extraordinaire chez eux, c’est q u ’une im
pression quelconque est perçue de la même manière et en même
temps par les deux corps. Cette harmonie si parfaite, cet accord
qui ne s'est jamais démenti, font supposer que Chang et Eng,
quoiqu’ils aient pu procréer tous les deux une assez nombreuse
lignée, ne forment point deux êtres distincts. Pour mieux dire, il
est probable que des liens d’une importance extrême les unissent
l’un à l’autre, liens qui sont peut-être indispensables à leur exis
tence. Mais alors songe-t-on à l’effroyable désordre introduit par
le bistouri dans ce bizarre organism e? L’épaisse membrane qui
réunit les deux frères contient sans doute, outre de très gros vais
seaux, des nerfs de premier ordre, d’importantes ramifications
émanées du grand sympathique. La plaie, quelque vaste qu'elle
soit, pourra cicatriser; la circulation sanguine sera pent-être in
terceptée sans grand inconvénient; mais comment remplacera-t-on
le courant nerveux qui paraît aller incessamment de l’un à l’autre
corps? Que se passera-t-il lorsque ces deux êtres habitués depuis
soixante ans à réagir l’un sur l’autre, — ceci est vrai de toutes les
façons, au physique comme au moral, — verront brusquement
suspendre les communications cérébrales et sympathiques qui les
faisaient vivre d’une vie presque absolument semblable? Chang et
Eng, dit-on, se sont décidés à se faire opérer de peur qu’une ma
ladie mortelle survenant chez l’un d’eux ne devînt également fatale
pour l’autre. C’est bien pensé assurém ent; mais nous craignons
fort que la séparation chirurgicale des deux frères ne soit pour eux
l'occasion d’une réunion suprêm e et dernière...... dans une même
tombe.
Disons à propos de tombe, que la discussion sur la tuberculose
est bel et bien morte et que le discours du professeur Bouillaud ne
l’a point ressuscitée. Ce discours n’a pas répondu à l’attente uni
verselle. Non pas que le nouveau membre de l’Institut n ’ait parlé
comme Bouillaud sait le faire, c’est-à-dire avec l’autorité de son
immense expérience et de son grand savoir. Mais on croyait en
général que l’illustre professeur serait plus complet et plus criti
que; q u ’il résumerait en quelque sorte les débats de l’Académie,
disant à chaque orateur son mot, remettant tout en place, et de sa
parole de maître montrant nettement, à côté des erreurs et des
exagérations desystème, les données sérieuses acquises à la science
par l’expérimentation sage et l’observation clinique. M. Bouillaud
n’a point suivi cette voie. Il s’est contenté de discuter quelques
points de détail, spécialement la contagion du tubercule et l’origine
de ce produit.
Que la tubercule soit un virus, rien jusqu’ici ne le prouve; qu’il
puisse se transmettre par inoculation, les expériences nombreuses
et pleines d’intérêt de MM.Villemin et Colin, ne l’ont point encore
dém ontré; mais sans nul doute la tuberculose peut se com m uni
quer par infection septique lorsque le produit morbide s’est ramolli
et a formé des cavernes. Relativement à l’origine du tubercule,
M. Bouillaud ne partage point les idées de Laënnec et de Louis.
Comme Broussais il croit que la tuberculose dérive d’un processus
inflammatoire, mais l’illustre professeur va beaucoup plus loin
que ses devanciers, car il donne comme siège exclusif de ce pro
duit morbide, le système lymphatique. « Pour moi, dit-il en propres
�« termes, la phthisie pulmonaire est une inflammation des vaisseaux
« etdes ganglions lymphatiques du poumon. » Quant à sa nationa
lité, M. Bouillaud ne la dissimule point; il est Français avant tout.
L’illustre maître rend justice aux travaux modernes, il apprécie
comme elles le méritent, les recherches des Allemands, il ne nie
point l’utilité du microscope, mais il n’établit pas de distinction
entre les granulations tuberculeuses et la pneumonie caséeuse.
L’école Allemande, d’après .lui, a eu le grand tort de s'emparer
des idées de Broussais relatives à l’origine inflammatoire du tu
bercule et de présenter au monde savant cette doctrine comme en
fantée par les cerveaux d’O utre-R hin.
Avec tout le respect que nous devons pour un des plus illus
tres représentants de l’école française, nous dirons que ces paroles
ne nous paraissent pas très-justes. La grande idée que les travaux
modernes — français ou allemands — ont propagée n’est pas pré
cisément l’origine inflammatoire du tubercule; c’est la distinction
radicale enlre la tuberculisation (évolution des granulations grises)
et la phthisie (pneumonie caséeuse). M. Bouillaud n’admet pas de
différence enlre ces deux produits. C’est son droit; mais il n’en
reste pas moins acquis à l’histoire que cette distinction — vraie ou
fausse — est le fait important, capital qui s’est dégagé des recher
ches de MM. Robin, Empis, Virchow, Reinhardt, etc. Le reproche
adressé à l’école Allemande nous paraît d’autant moins fondé que
nos laborieux voisins n’ont nullement reproduit l’idée de Brous
sais relativement à l’origine inflammatoire du tubercule. Ils sou
tiennent, au contraire, que la tuberculose, c’est-à-dire l’évolution
des granulations grises, dérive d’une prolifération non inflamma
toire des corpuscules du tissu conjonctif. Ce que l’inflammation
produit ce sont les masses caséeuses ; or, ces masses-là précisément
ne constituent pas la tuberculose.
Quoi qu’il en soit, nous espérons que Messieurs les académiciens
sentiront, après d’aussi longs débats, le besoin d'un repos pro
longé et q u ’ils cesseront pour l’heure de s’échauffer la bile, chose
malséante en tout temps et fort inopportune au mois d’août de
l’an de grâce 1868. Ici, les chaleurs aidant, chacun s’empresse de
liquider sa petite affaire afin de prendre au plus tôtson vol vers un
ciel moins brûlant que celui de Provence. Nos concitoyens goûte
ront cette année avec d’autant plus de douceur les charmes de la
villégiature que l’état sanitaire de notre ville continue à être des
plus satisfaisants. La mortalité s’est un peu accrue depuis le mois
dernier; mais cette augmentation de décès s’est produite surtout
aux dépens des enfants, pauvres petits êtres qui résistent difficile
m ent aux entérites graves déterminées par les fortes chaleurs et
que vient souvent compliquer le travail de la dentition. Quant au
choléra nous n’en entendons presque plus parler dans nos parages.
Au Maroc le mal diminue de plus en plus. En Angleterre et dans
quelques villes de l’Italie on a bien signalé, il est vrai, la présence
du fléau ; mais il ne s’agit là que de cas isolés. Nulle part on n ’a
constaté la plus légère tendance épidémique.
En pareille occurrence que reste-t-il à faire? Conserver sa douce
quiétude et s’efforcer, par tous les moyens possibles, de se garer
des épouvantables chaleurs que nous traversons en ce moment.
Or doncques, mes amis, esbaudissez-wus et buvez frais si faire
se peult.
Dr Seux fils.
BIBLIOGRAPHIE
T ra ité de la m en stru ation , p ar R acidorski.
Études « u r le s d iv e rse s fo rm e s d’en eép lia lite, p ar H ayem .
Notre journal compte tenir désormais ses lecteurs au courant
de toutes les publications qui résum ent de longues études , ac
cusent des tendances nouvelles ou réalisent de véritables pro
grès. Les deux m onographies que nous leur signalons aujour
d’hui m iriten t à des titres divers l'attention des médecins. La
prem ière est le résultat d’études que M. Raciborski poursuit
depuis un quart de siècle : la m enstruation dans ses rapports
avec l’ovulation et la fécondation, l’hygiène de la puberté et de
l’âge critique, les rapports qu’offre l’évolution m enstruelle avec
les divers états m orbides, les troubles m enstruels et leur traite
�— 178 —
— 179 —
ment. Tels sont les divers sujets que l’auteur aborde successive
ment.
M. Racihorski s’est attaché spécialem ent à résoudre la ques
tion de l’époque de la puberté chez la femme et des conditions
qui la font varier. Ses conclusions h cet égard sont le résum é de
25,592 observations.
Toute une partie de cet ouvrage est destinée à la m enstruation
étudiée au point de vue de la pathologie et de la thérapeutique
générales. La puberté y est examinée dans ses rapports avec la
chlorose, la scrofule, les affections nerveuses et les déviations de
la colonne vertébrale ; cette dernière relation est à la lois singu
lière, im portante et peu connue.
Dans la partie consacrée aux troubles m enstruels, M. Raciborski décrit successivement : 1° la rétention par atrésie ; 2 ° la
dysménorrhée proprem ent dite et ses intéressantes variétés ;
3° l’am énorrhée; 4° la m énorrhagie ; 5° enfin ce q u ’il appelle
l’ataxie m enstruelle. L'auteur term ine par un chapitre de théra
peutique qui est riche de sages préceptes et de moyens ingénieux.
N ouvelles & V ariétés
L’histoire anatomique de l’encéphalite avait besoin d’être
refaite depuis les travaux de Lallem and; il fallait qu’elle fût
reprise avec l’aide des procédés de la science moderne. Telle est
la tâche dont s’est chargé le Dr Hayem , q u i, après avoir bien
dém ontré l’existence du tissu cellulaire dans le cerveau et la
part immense que prend ce tissu dans les infiammations de l’or
gane, étudie successivement les encéphalites suppuratives, hyperplastiques et sclérosiques. C'est là une œuvre n o u v elle, uu
travail sérieux qu’il est bon d ’indiquer à ceux qui veulent suivre
la marche de la science contem poraine.
Les journaux de l’Inde nous annoncent que vu l’extension ex
traordinaire qu’v a prise la culture du quinquina, on n’a plus à
craindre d ’être privé de son précieux produit.
— Un concours pour deux places de médecins et deux places
de chirurgiens adjoints des hospices de Toulouse aura lieu le 8
décem bre 1868.
— Une commission de surveillance des Musées est instituée
près la Faculté de Médecine de Paris.
— Deux décrets im portants ont été signés par l’Em pereur,
le 51 juillet :
L ’un est relatif aux laboratoires d’enseignem ent et à la créa
tion de laboratoires de recherches.
L ’autre est relatif à la création d’une école pratique des hautes
études.
Cette école, dont le siège est à Paris, est divisée en quatre sec
tions :
1° M athém atiques ;
2° Physique et chimie ;
3° Histoire naturelle et physiologie ;
4° Sciences historiques et philologiques.
Il n’est exigé aucune condition d’âge, de grade ou de natio
nalité pour l’admission à l’école pratique ; mais les candidats sont
soumis à un stage. Le directeur les accepte provisoirement.
Après une épreuve de trois mois au p lu s , leur admission est
prononcée par le m inistre. La jouissance des avantages que
confère l ’inscription à l’école pratique ne peut pas dépasser trois
ans. Une indem nité annuelle peut être accordée par le m inistre,
après avis du conseil supérieur, à des élèves de l’école. Ils peu
vent être dispensés des épreuves de la licence pour se présenter
au doctorat. Des missions scientifiques à l’étranger peuvent leur
�5e ANNÉE.
— 180 —
être confiées. Les candidals au doctoral peuvent être autorisés
par le ministre à préparer leur thèse dans les locaux de l’école.
Tous les ans, après examen des rapports des directeurs de
laboratoire et d’études, sur l’avis de la commission perm anente
et le conseil supérieur entendu, le m inistre donne des missions
aux élèves, leur accorde des médailles, des m entions, des sub
ventions ou des récompenses spéciales.
L ’école spéciale des hautes études peut com prendre des an
nexes instituées auprès des établissem ents scientifiques des dé
partements.
— A P aris, une commission composée de MM. Bouillaud,
Tardieu, Richet, Broca, Barthez, Gueneau de M ussy, Lailler,
Guvon et de Cambray, se réunit en ce m om ent chaque jour,
sous la présidence de M. le directeur général de l’Assistance
publique, pour étudier les améliorations a introduire dans l’ins
titution du concours. C’est là un travail utile, dont nous publie
rons les résultats, et dont, il faut l’espérer, non-seulem ent Paris
mais la France entière profitera.
( La
Rédaction. )
Marseille — Typ. Cayer et C», rue Saint-Ferréol, 57.
UNION MÉDICALE
1808.
A Messieurs les Membres du Comité de publication
de t’UNION MÉDICALE DE LA PROVENCE.
M essieurs ,
Je vous écris à la hâte les im pressions qu’a fait naître en moi
la belle fête à laquelle je viens d’assister, dans la pensée que
mon récit pourra être agréable à vos lecteurs par l’intérêt que
tout médecin porte à ce qui se rattache à la m ém oire de Laënnec.
M. le Dr Lediberder de Lorient eut une belle et noble pensée
le jour où , attristé de voir que notre Laënnec attendait encore
la glorification que le pays lui d ev ait, il communiqua à Rayer
l’idée de faire élever par l’Association générale des Médecins de
France une statue à l'une de nos gloires les plus vraies et les
plus pures, à l’illustre auteur de l’auscultation.
Rayer, qui com prenait si bien le but et la puissance de l'œuvre
à laquelle il avait consacré les dernières années de sa v ie , fut
frappé de la bonté de cette initiative ; il crut à la possibilité de
l’exécution au moyen d un appel tait à toutes les Sociétés locales.
Le G ouvernem ent ne pouvait que se réjouir avec nous de cette
pensée, car justice allait être rendue à un enfant de la France.
Les formalités exigées en pareille circonstance furent rem
plies par notre regretté Président g én éral, avec cette ardeur
q u e , m algré son âge , il apportait à toute entreprise noble et
juste ; restaient à organiser les moyens d’exécution.
La ville de Q uim per, qui avait vu naître Laënnec, le départe
m ent du F inistère et la Bretagne entière prom irent leur concours
et tinrent parole; mais c’était surtout sur l'Association que
comptait Rayer, et il n’avait pas to rt; appel fut lait à chaque
Société locale par l’oigane de son Président. Comme vous le
savez, j ’eus l’honneur de m’adresser à vous , et, comme moi,
9
�— 182 —
— 183 -
vous comprîtes si bien la dette de reconnaissance q u e , m éde
cins, nous avions à payer a l’un des plus grands bienfaiteurs de
l'hum anité, à l’une de nos plus grandes gloires m édicales, que
vous fîtes m onter notre souscription locale à l’un des chiffres les
plus élevés obtenus en province.
Une Commission centrale formée à P aris, grâce au zèle de
M. le Dr Henri Roger, son secrétaire, centralisa les fonds, choi
sit l’artiste qui devait reproduire les traits de l’illustre B reton,
et définitivement mena l’entreprise â si bonne fin, qu’en quatre
ans tout fut prêt pour l’inauguration.
C’est à M. Lequesne qu’est due la statue en bronze de l'en
fant de Quimper ; elle a été érigée sur la principale place de
cette ville.
L ’artiste, calculant les dimensions de l’em placem ent et s’ins
pirant de la découverte de L aën n ec, a exécuté son œ uvre avec
un rare bonheur. N otre célèbre confrère est en costum e de pro
fesseur, il est assis tenant son stéthoscope dans la main droite
et portant l’index de sa main gauche â l’oreille, comme pour
in d iq u era la foule l ’immense parti qu’il avait tiré de ce sens
dans la connaissance des maladies et par conséquent dans leur
traitem ent.
L 'inauguration, qui devait avoir lieu au mois de mai d ernier,
avait été, avec juste raison, renvoyée au 45 août, jo u r de la fêle
de Q uim per, du Pardon, nom donné en Bretagne aux fêles
locales.
Depuis plusieurs jo u rs, l affluence était telle à Quim per q u ’il
était fort difficile de s’y loger ; n ’ayant pu y arriver que le matin
de la fêle, j ’ai dû h l’extrêm e obligeance de M. Bigot, architecte
du départem ent, et à la franche hospitalité bretonne la possibilité
d’avoir un lit, et je vous assure que je n’y ai rien perdu , car il
est impossible d’être mieux accueilli, d’être plus fêté que je ne
l’ai été par cette honorable et bonne famille que je voyais pour
la première fois.
Quel curieux spectacle que ce Pardon de Q uim per pour un
hom m e étranger au pays! Quelle variété innom brable de cos
tum es, variété de form es, variété de couleurs, variété de tour
nures. dans toutes ces populations em pressées de venir assister
à la fête, chai)ne canton ayant un costume différent ! On croit y
voir des T yroliens, des Basques , m ême des Mexicains à veste
courte richem ent galonnée avec pantalons si larges du bas, on y
retrouve pour les femmes le costume des grandes dames bre
tonnes du m oyen-âge; et le langage, c ’est celui du pays de
Galles, jargon à n ’y rien com prendre !
Après le Pardon, revue, foire, procession, danses, etc., a eu
lieu â quatre heures la fête médicale.
Plus de cent médecins se sont réunis à l’hôtel-de-ville et sous
la direction de M. le professeur Tardieu, président-général, sont
descendus sur la place, au centre de laquelle s’élève la statue de
Laënnec, à côté de l'im posante cathédrale gothique si bien res
taurée et achevée sous la direction habile de M. Bigot, archi
tecte du départem ent.
Deux députations dans l une desquelles j ’avais l’honneur de
me trouver, ont am ené sur le lieu de la fête M. le Préfet du F i
nistère et M onseigneur l’évêque de Q uim per, au bruit des fan
fares; un ciel de Provence favorisait la réunion.
Un grand nom bre de Présidents des Sociétés locales, beau
coup de médecins delà Bretagne et des provinces environnantes,
plusieurs mem bres du conseil-général de l’Association, l'hono
rable et distingué Dr Barlb, entre autres, étaient sur l’estrade.
Toute la partie éclairée de la Société Quimperloise nous en
tourait.
Huit discours ont été prononcés :
M. le Préfet du départem ent, puis M. le Maire de Quim per,
ont,avec beaucoup de distinction, fait apprécier en qualité d'ad
m inistrateurs, la part qui revenait au gouvernem ent et à la ville
dans l’organisation de celle fête vraiment nationale, puisqu'elle
avait pour but de rendre justice et hommage â l'une des gloires
de la France.
�— 185 —
184
Comme président-général, M. le 1)' Tardieu, dans un magniiique langage, a dém ontré combien l’Association devait être (îère
d’avoir pu faire obtenir a Laënnec, un honneur qui lui était dû
depuis si longtem ps, puisque sa mort rem onte à 1826; cet hon
neur est aujourd’hui rendu non-seulem ent h un médecin illustre,
mais encore à l’un de nos bons sociétaires, car une partie de
la som m e destinée à la statue a pu faire retour à la caisse de
l’Association et fournir une petite rente qui porte le nom de
Souscription Laënnec.
M. Tardieu, d’une bouche émue et sym pathique, a rendu à
Rayer l’hommage qui lui était dû dans cette circonstance, en y
mêlant les regrets éprouvés par tous de ne pas le voir a cette
fêle médicale qu’il avait préparée avec tant de zèle et qu’il aurait
été si heureux, de présider !
M. de Kergaradec, ami de Laënnec, associé pour ainsi dire a
ses travaux, médecin que nous connaissons tous par les appli
cations qu’il a eu l’heureuse idée de faire de la découverte de
son compatriote a l’étude de l’évolution fœtale, a pris ensuite la
parole; il a prononcé, malgré son grand âge, un long discours
sur les titres de Laënnec à l’im m ortalité, et il a eu raison de dire
que le Traité de l'Auscultation, si bien conçu, si rapidem ent
achevé, était le vrai m onum ent qui ferait passer le nom de
Laënnec â la postérité la plus reculée.
Du reste, en face de cette statue, je ne pouvais m oi-m êm e
m’empêcher de dire ; Ce n’est pas nous qui élevons un m onu
ment ’a Laënnec, mais c’est lui qui, avant nous, a élevé un m onu
m ent que nous n ’avons pas à retoucher, aucune pierre ne m an
quant à l’cdiGce.
M. Henri Roger, au nom de l’Académie im périale de m éde
cine, dont Laënnec était m em bre, a prononcé a son tour un
discours plein d’élégance et de bon g o û t, morceau très-rem arquable par le fond et par la forme.
J’ai été enchanté de la m anière claire, précise et gracieuse
avec laquelle il a cherché â faire com prendre â la foule qui nous
entourait, ce que la découverte du médecin de Quim per avait de
prodigieux; il a été surtout plein de charm es, lorsque, s ’adres
sant h l’auditoire fém inin, il a fait voir que grâce â Laënnec, e tâ
M. de Kergaradec son am i, l’espérance la plus douce de la
femme, la m aternité, pouvait de l’état de doute se changer en
certitude.
M. Bouillaud, au nom de la Faculté de m édecine de Paris,
dont Laënnec était professeur, a ensuite, avec cette ardeur juvé
nile que tout le monde se plaît h reconnaître en lui, improvisé
un long discours dans lequel il a cherché à faire ressortir la
gloire de Laënnec, qu’il a mis en présence d’un autre illustre
enfant de la Bretagne, le grand réform ateur Broussais, génie
d ’un autre genre dont les Bretons doivent aussi s’enorgueillir.
11 a décrit la lutte de ces deux grands hom m es, lutte dans la
quelle l’avantage définitif est resté à Laënnec. M. le professeur
Bouillaud a raconté avec une grande distinction, l’histoire d’une
lutte scientifique à laquelle il avait assisté.
M. le Dr L ediberder avait bien le droit de prendre la parole
dans cette fête, puisque c’était à lui q u ’on en devait la pensée ;
cependant il faut lui rendre cette justice qu’il n’en a certes pas
abusé. Q uelques bonnes paroles sur le bonheur qu’éprouvait la
Bretagne h voir glorifier un de ses nobles enfants lui ont suffi.
M. le Dr H alléguen, président de la Société locale du Finis
tère, et qui avait largem ent contribué à l’organisation de la fête,
a clos la série des discours avec une sobriété de bon goût dont
tout le monde lui a su gré.
A huit heures du soir, un banquet par souscriptions, réunis
sait dans une im m ense salle, fraîchem ent décorée, toute la So
ciété médicale et les principales autorités.
Comme représentant des B ouches-du-R hône, j ’avais reçu une
invitation, et la Commission du banquet m ’avait donné une place
d'honneur entre M. le Dr Mabit, président de la Société de la
Cironde, vice-président de notre Conseil-général et M. le Dr
Henri Roger.
�— 187 —
Plusieurs loasis fixés d ’avance oui été portés parM . le Préfet,
M. le président T ardieu, M. A m édéeL atour, M. M abit, M. Barth,
M. Gallard et M. H. Favre.
Cette fête vraiment médicale a eu d’abord l’im m ense avantage
d’élever sur le piédestal qui lui était dû un des médecins qui
m érite plus spécialement le titre de bienfaiteur de l’hum anité ;
elle a eu aussi l'heureux résultat de réunir bien des cœ urs, de
faire nouer ou renouer de bonnes et franches liaisons confrater
nelles; i! en est, du reste, toujours ainsi dans ces grandes ré u
nions que l’Association a créées.
Je n’ai pas voulu quitter la Bretagne sans aller voir les lieux
où Laënnec, h plusieurs reprises, avait pu restaurer son corps
affaibli parle tiavail et les veilles; j'ai tenu â visiter cette splen
dide baie de Douarnenez, où il cherchait pour ses poum ons une
atm osphère qu’il considérait comme souverainem ent utile aux
malades atteints des lésions pulmonaires par lui si m agistrale
m ent décrites.
J’ai eu aujourd’hui le bonheur de faire cette sorte de p èleri
nage en compagnie de MM. lesD rs Barth et Roger, les si dignes
propagateurs et continuateurs de l’œ uvre de Laënnec ; avec eux
je me suis prosterné sur la pierre qui recouvre les restes de
l’illustre Breton, dans le modeste cim etière de P lo a ré , où son
corps avait été déposé par de simples villageois sans pom pes et
sans bruits.
La réparation due à notre m aître à to u s, bien que tardive, a
été com plète; grâces en soient rendues à notre belle institution,
a l’Association générale des Médecins de France !
Je vous prie, M essieurs, de vouloir bien agréer l’assurance
des sentim ents distingués avec lesquels j ’ai l’honneur d’être.
Votre tout dévoué co n frère,
S eu x .
Quimper, 16 août 1868.
PSYCHOLOGIE NATURELLE
Étude sur les facultés intellectuelles et morales dans leur état
normal et dans leurs manifestations anormales chez les aliénés
et chez les criminels.
Sous ce litre, un médecin de Marseille, aussi modeste que
laborieux, le Dl Prosper Despine, va publier très-prochainem ent
un grand ouvrage en trois volumes, actuellem ent sons presse.
Nous nous réservons de faire pour nos lecteurs l’analyse de ce
beau travail, mais nous tenons aussi à leur en donner la prim eur,
en détachant de l introduction quelques pages qai leur en feront
connaître l’esprit et la portée.
Ce n’est point un traité de psychologie que nous présentons
ici. Le but de cet ouvrage est de rectifier diverses erreurs,
d enrichir la science de quelques solutions nouvelles, sans nous
arrêter sur les connnaissances précédem m ent acquises. Nous
introduirons définitivement la psychologie dans le domaine des
sciences exactes, en form ulant la loi qui règle l’exercice des
facultés rétîectives lorsqu’elles fonctionnent sim ultaném ent avec
les facultés instinctives ou morales. Cette lo i, d’une remarquable
sim plicité, nous perm ettra de résoudre des problèmes restés in
solubles jusqu’à ce jour. Nous saurons égalem ent ce qu’il faut
entendre par raison ; et en spécifiant le caractère psychologique
de la folie, soit chez le m alade, soit chez l’homme bien portant,
nous saurons pourquoi la folie et la raison peuvent exister en
m êm e tem ps chez le même individu; pourquoi l’homme le plus
intelligent, le plus instruit, le plus intellectuellement raisonnable
peut être m oralem ent fou, privé de la raison m orale et de la
�— 188 —
liberté morale, et irresponsable m oralem ent de ses actes. Nous
dégagerons la liberté morale qni s’exerce sur des désirs intéres
sant le bien et le mal, et à l'égard desquels la conscience se sent
liée, liberté qui seule rend m oralem ent responsable des antres
libertés, simples pouvoirs de faire ce que I on désire; pouvoirs
par lesquels l’homme veut égalem ent, par lesquels il prend des
déterm inations à l’égard de désirs, de penchants qui sont indiffé
rents devant sa conscience au bien et au mal et envers lesquels
il ne se sent lié par aucune obligation. E nfin, nous dém ontrerons
que, de toutes les sciences, aucune n'est plus féconde en pré
ceptes pratiques que la psychologie, et qu’aucune n ’en donne
de plus importants.
Les philosophes ont interprété en général d’une manière trop
étroite le précepte de Socrate: Connais-toi toi-m êm e. S’étant
étudiés dans le silence du cabinet et dans le calme des passions,
c'est-q-dire dans une circonstance particulière, et n’ayant porté
leur attention que sur quelques individus sem blables à eux, ils
n ’ont observé que les régions pures et sereines de l’intelligence
et de la morale. Dans ce champ limité, ils ont connu partielle
ment quelques hom m es, mais ils n’ont point connu I hom m e :
leur psychologie a donc été incomplète. En négligeant l’étude
des manifestations psychiques dans les diverses races hum aines,
et celle des manifestations anomales de leur propre race dans
les actes bizarres, irrationnels et crim inels, ils se sont privés
d’une source féconde en découvertes psychologiques. Pour faire
progresser une science, il ne suffit pas seulem ent d’attaquer son
objet par le travail de la pensée ; il faut encore que cette attaque
soit dirigée vers le côté où cet objet se laisse le mieux pénétrer.
Or, nous verrons combien l’élude des anomalies psychiques aide
à dévoiler les mystères de la science de 1 esprit. En lisant, sans
idées préconçues, le com pte-rendu des procès crim inels, je fus
frappé de la constance avec laquelle se répétait, chez les indi
vidus qui com m ettent de sang-froid les grands crim es, un étal
psychique caractérisé par l'absence de toute réprobation morale
— 189 —
contre le désir de com m ettre ces actes pendant la préméditation,
et par l’absence non moins absolue de remords après leur exé
cution (1). Je fus alors induit b examiner si cette particularité
appartenait seulem ent aux cas qui s’étaient offerts à mon atten
tion, ou bien si elle était une règle invariable, ce qui aurait été
contraire aux idées que l’enseignem ent et la tradition m’avaient
données sur la conscience morale, réputée universellement res
sentie, et sur le rem ords, considéré comme un châtim ent intligé
aux crim inels. J ’étudiai cette question toute neuve sur la plus
vaste échelle possible, afin d’en avoir une solution exacte. Je
m ’adressai pour cela à la collection de la Gazette d s Tribunaux rem ontant â 1825, et j’acquis prom ptem eut la certitude
que la particularité psychique que je viens d’indiquer était une
règle invariable chez ces crim inels. Le crime commis de sangfroid, n ’ayant lieu que dans une condition psychique constante,
trouvait sa cause indispensable dans cette condition même. Or,
celle-ci étant absente du sens m oral, du sentim ent qui donne la
conscience du bien et du mal, du sentim ent qui inspire la ré
probation contre les désirs crim inels et le rem ords sur le crime
com m is, et cette absence étant une anomalie fort grave, je me
demandai si cette anomalie ne com prom ettait pas la raison et le
libre arbitre de ceux qui en étaient affectés. J ’étudiai donc le
rôle que pouvait jouer le sens moral dans la production de la
raison et du libre arbitre, et je reconnus bientôt que la présence
de ce sentim ent supérieur constituait la condition essentielle à
l'existence et h l’exercice de la raison morale et de la liberté
morale, et cette liberté .seule m éritait le nom de libre arbitre.
Je trouvai ainsi le principe constitutif essentiel de ces deux pou
voirs. De nouvelles recherches sur des faits de toute nature me
convainquirent de plus en plus de la justesse de ces idées. Je pus
alors préciser les conditions nécessaires â l’existence de la raison
et du libre arbitre, définir ces pouvoirs d'après leur nature, et
(I) Celle proposition recevra son explication el scs preuves les plus complètes
�—
190
—
191
—
rectifier h leur égard plusieurs erreu rs considérées com m e des
vérités. La raison et le libre arbitre dépendaient de l’existence
et de la perfection de ces facultés intellectuelles et morales ; dès
lors, la raison et le libre arbitre ne se présentaient plus comme
des pouvoirs qui ne peuvent exister que complets et perm anents,
mais comme des pouvoirs que l’esprit pouvait posséder relative
m ent, partiellem ent et même tem porairem ent. Enfin, les cas
extrêm es par leur anomalie étant ceux djms lesquels les lois
naturelles se laissent quelquefois le mieux apercevoir, je ne
tardai pas à découvrir la loi qui préside à l’exercice sim ultané des
iacultés'réflectives et des facultés instinctives.
Portant également mon attention sur les personnes qui se
trouvent sous I influence des passions; je constatai ce qui suit :
Les unes com m ettent des actes immoraux sans en être détour
nées avant par leur conscience, et sans en éprouver du rem ords
après, c'est-à-dire étant aveuglées par leur passion. Puis, dès
que cette passion s’apaise ou s’évanouit, ces personnes cessent
d’être aveuglées, et ressentent contre leurs actes une réprobation
morale qu’elles ne ressentaient point peu d’instants auparavant.
Les autres personnes, malgré la violence de leur passion, ne
sont point aveuglées par elle; ces personnes réprouvent les
pensées et les désirs pervers qu elle leur inspire, ce qui les em
pêche le plus souvent de succomber à la tentation, et, si elles y
succom bent, ce qui leur cause du rem ords, soit pendant, soit
principalement après l’exécution de l’acte immoral. Je pus, en
analysant l’état psychique des personnes qui se trouvent dans
chacun de ces deux cas, découvrir pourquoi, tantôt les passions,
même peu vives, aveuglent complètem ent l’homme au point de
l’em pêcher de com prendre l’absurdité ou l’immoralité de leurs
inspirations, au point de lui ravir la raison et le libre arbitre ; et
pourquoi, tantôt elles ne s’aveuglent pas et le laissent en tière
ment libre et raisonnable, malgré leur violence extrêm e. Ces
résultats im portants réd ig eaien t, pour être découverts, q u ’une
observation attentive; ils eussent été obtenus par quiconque se
fut livré avec persévéranre à l’élude de la psychologie anomale.
U ne citation de Reid, que nous donnerons plus tard, perm et de
supposer que si ce grand observateur eût étudié les crim inels,
ces vérités lui eussent été probablem ent révélées.
Pendant plusieurs années, je méditai ces questions, cherchant
à m ’éclairer par les faits, sans même avoir l’intention de publier
mes recherches. Enfin, plusieurs des solutions que je viens d’in
diquer devenant pour moi indubitables, et formant un corps de
doctrine dont toutes les parties se soudaient les unes aux autres,
je résolus de ies publier. Mais, en m ettant la main à l’œuvre, je
vis que, pour présenter un travail même original sur la psycho
logie et l’exposer convenablem ent, je devais acquérir sur cette
m atière des connaissances qui me m anquaient. J’employai donc
à m ’initier aux travaux des philosophes tout mon temps dispo
nible. Le fruit que je retirai de celle étude fut très-im portant ;
le champ de mes idées ne tarda pas à s’élargir; des questions
nouvelles se présentant, il fallait en trouver la solution avec les
principes que j'avais aperçus, sous peine de les reconnaître in
suffisants, ce qui m 'arriva plus d’une fois et qui m'obligea de les
com pléter par de nouvelles recherches. Je dois le reconnaître,
sans ce travail subséquent à mes premières études, mon livre
serait resté dans les proportions exiguës, et c’est grâce aux con
naissances puisées dans les ouvrages de philosophie que j’ai pu
lui donner tout son développement nécessaire. Mais quand je
pense à la divergence qui existe dans les opinions des philoso
phes sur toutes les questions qu'ils ont traitées, je me demande
si, en entrant à peu près neuf dans la carrière, et exclusivem ent
dirigé par l'observation et le raisonnem ent, je n’étais pas dans
de meilleures conditions pour trouver la vérité, qu’en parcou
rant cette même carrière puissamment influencé dès le début
par des idées dont un si grand nom bre sont erronées. Partir de
l’ignorance, sauf à la dissiper plus tard, n’équivaut-il pas à faire
table rase du passé, et à prendre le doute sur ce qui a été fait
antérieurem ent comme point de départ de ses recherches, ainsi
que le voulait D escaries, pour arriver à la vérité?
�— 192 —
Malgré les lacunes et les erreurs qui se trouvent dans les ou
vrages publiés jusqu’à ce jour par les psychologistes, leurs tra
vaux n’en ont pas moins droit à tonte notre adm iration, comme
un produit des plus im portants de la pensée hum aine. La vérité
scientifique, si difiieile h apercevoir, est presque toujours extraite
du terrain préparé par l’erreur, l’hom m e n ’arrivant pas du pre
mier jet à cette vérité et ne l’atteignant que peu à peu, en lou
voyant, pour ainsi dire, a travers des concessions de moins en
moins fausses. Ces erreurs sont m êm e, vis-à-vis de l’hum anité,
des vérités relatives lorsqu’elles renferm ent quelques germ es du
vrai, lorsqu’elles conduisent graduellem ent à la vérité absolue,
à la connaissance des lois naturelles. G ardons-nous donc de dé
daigner les premiers pas forcément incertains de la science !
L'invention de ces prem iers éléments nécessite souvent plus de
génie et de travail que la découverte de la vérité elle-m êm e.
Poser les questions et les problèmes dont la solution constituera
la science, me paraît être parfois plus difficile que les résoudre.
Cet ouvrage aurait pu recevoir pour titre : De la raison et du
libre arbitre; de la déraison et de l'esclavage moral : son but
étant de déterm iner les cas dans lesquels la raison et le libre
arbitre ont présidé aux actes de l’hom m e, et ceux dans lesquels
ils n y ont point participé. N 'est-ce pas là le but principal
auquel doit viser la psychologie scientifique et véritablem ent
pratique?
Notre travail se divise en deux parties: la prem ière a pour
objet l’étude des facultés de l’âm e, des élém ents de la raison et
du libre arbitre. L’esprit étant manifesté par un instrum ent or
ganique, nous consacrerons un chapitre à cet organe, au systèm e
duquel il appartient et à certains phénom ènes im portants d ’un
ordre particulier qui doivent être connus du psychologiste, phé
nom ènes pour l’appréciation desquels quelques connaissances
physiologiques sont indispensables. La seconde partie traitera
de la psychologie anom ale, ayant pour objet les diverses formes
delà lobe, soit chez l’homme malade, soit chez l ’homme sain.
L’étude de l’état psychique des crim inels occupera, dans cette
seconde partie, une place en rapport avec son importance.
A près avoir dém ontré, dans la prem ière partie, que le principe
de la raison morale et du libre arbitre réside dans le sens moral,
faculté qui donne la conscience du bien et du mal, nous dém on
trerons, dans la seconde partie, que les criminels sontdépourvus
de celte faculté, qu’ils sont des êtres incomplets sous le rapport
psychique. Cette étude clinique, origine de notre travail, con
firmera tout ce qui aura été établi dans la prem ière partie, les
m anifestations anom ales de l’esprit étant régies par les mêmes
lois que ses manifestations normales.
MÉDECINE PRATIQUE
Des bons effets de l’Acétate de Plomb à l’intérieur dans
le traitem ent de l’Hémoptysie
Suite et fin (i).
V
N° 1 . Un jeune homme du Caire, M. H ..., âgé de 18 ans, fut
envoyé par sa famille à Marseille en 1841, pour travailler dans
une maison de com m erce.
Six mois après son arrivée et à la suite d une partie à SaintPons, où l’on avait beaucoup m arché et même assez couru,
M. H ... fut pris, en rentrant chez lui à i l heures du soir, d ’un
accès de toux que rien ne put calmer d ’abord, et qui fut bientôt
suivi d’un abondant crachem ent de sang.
Appelé à m inuit à donner des soins au malade, je le trouvai
moins effrayé que ne le sont d’ordinaire les hémoplysiques. Le
sang craché dans une cuvette et mêlé à beaucoup d ’air, pouvait
(1) Voir le numéro du mois d'Aoùt.
�-
m —
peser environ 100 gram m es. Face légèrem ent colorée; pouls
fréquent et tendu ; tem pérature moyenne. Je pratiquai une sai
gnée de 200 gram m es, et recommandai au malade de boire
beaucoup de limonade concentrée et de garder un repos et un
silence absolus. Je quittai M. H ... à une heure du matin :
l’hémorrhagie paraissait arrêtée ; la respiration était assez libre ;
cependant il conservait encore un fort goût de sang à la bouche.
Le malade sommeilla avec un peu d’agitation ju sq u ’à cinq
heures du matin, et il expectorait seulem ent, de tem ps à autre,
un peu de salive sanguinolente, lorsque vers les 6 heures l’hé
morrhagie recom m ença avec plus de force encore que la veille ;
le sang sortait, comme on dit vulgairem ent, à pleine bouche.
Toutefois, n’ayant pas été averti, je ne visitai le malade qu’à
8 heures. La pâleur était extrêm e ; le système m usculaire était
en proie à un frémissement général ; le pouls petit et lent ; soif
intense; parole difficile et enrouée ; battem ents aux tem pes ;
douleur fixe à la nuque.
L’état général du malade n’étant pas de nature à m’encoura
ger pour une seconde saignée, j'eus recours à l’acétate de
plom b; je prescrivis quarante centigrammes de ce sel dans 120
grammes d’eau distillée, édulcorée par du sirop de gom m e, à
prendre par cuillerées d’heure en heure et plus souvent même,
si l’hém orrhagie persistait. Boisson froide dans l'intervalle, et
quelques gorgées de bouillon de poulet froid toutes les quatre
heures.
Les crachats ne tardèrent pas à changer de couleur ; la toux,
qui avait repris avec le crachem ent de sang, cessa com plète
m en t; l’hémorrhagie était à peu près arrêtée à cinq heures du
soir. Je fis renouveler la potion, réduisant à 25 centigram m es
la dose de sel plombique pour la nuit. Le malade reposa avec
assez de calme ; quelques rares crachats écum eux mais nulle
m ent marqués furent expulsés sans toux ; urines abondantes;
point d'évacuations alvines.
Le lendemain on renouvela la potion ; réduisant la dose
-
195
d’acétate de plomb à 15 centigram m es seulement dissoute dans
la m êm e quantité d’eau. La même dose a été continuée pendant
deux jours encore, quoique l’hémoptysie fût complètement ar
rêtée. On a augm enté peu à peu les alim ents; le pouls s’est
relevé assez prom ptem ent ; les excrétions ont repris leur cours
ordinaire ; et M. H ... a pu se livrer, quelques jours après, à ses
occupations habituelles.
Dans l’espace de deux ans que ce jeune homme a demeuré
encore à M arseille, l’hémoptysie s ’est renouvelée quatre fois,
mais avec infiniment moins de gravité que lors du premier acci
dent ; et chaque fois on est parvenu à arrêter le crachem ent de
sang sans saignée, à l’aide d ’une, deux ou tout au plus trois
solutions de sel plombique, à la dose moyenne de 20 à 30 cen
tigram m es par jour.
Cependant l’exam en auquel nous avions soumis le malade,
quelque tem ps après la première hém orrhagie, n’avait rien
fourni d’anormal ni par la percussion, ni par l ausculation, ni
par la m ensuration du thorax. Ajoutons que la conduite de ce
jeune homme était, sous tous les rapports, exem plaire; il
fumait seulem ent un peu trop : défaut qui n’est m alheureuse
m ent plus exclusif aux seuls Levantins.
M. H ... est retourné en Egypte depuis vingt-huit mois, et
nous avons appris tout dernièrem ent encore que le crachem ent
de sang ne s’est plus renouvelé.
N° 2. — Une dame, actuellement âgée de 69 ans, fut at
teinte, le 4 octobre 1839, d’une abondante hémoptysie attribuée
à une forte toux catarrhale qui la tourm entait depuis plus d ’un
mois, et contre laquelle elle n ’avait jam ais voulu employer aucun
régim e ni aucun traitem ent.
Il y avait deux jours que le crachem ent de sang continuait,
lorsque je vis la malade. Malgré son âge avancé, et quoiqu’elle
eût déjà peidu beaucoup de sang, le pouls se maintenait assez
ferm e pour m ’engager à la saigner. Mais toutes mes instances à
cet égard furent inutiles, et j’eus beaucoup de peine à la décider
�196 —
■»
h prendre quelques cuillerées de solution d’acétate de plomb.
— Pendant quatre jours de suite cette dame a pris 50 centi
gram m es de sel plombique par jour. Le crachem ent de sang a
dim inué graduellem ent pour cessser toul-à-fait, sans laisser la
moindre trace de lésion dans l'appareil respiratoire.
Depuis cette époque il est rare que celte dam e passe un hiver
sans s'exposer à quelque fort rhum e, faute de prendre les p ré
cautions que son âge semble réclam er. Il est bien plus rare
encore qu’à chaque nouveau rhum e il n’y ait quelque légère
atteinte d'hém optysie, que je parviens toujours à arrêter par
l’acétate de plomb, seul remède consenti.
3. — M. X ... de Constantinople — 50 ans, constitution
ém inem m ent lym phatique — se rendit en France en 1840 pour
se faire traiter de pertes sém inales involontaires, consécutives à
plusieurs blennorrhagies.
De passage à Marseille pour aller à M ontpellier, M. X ... fut
atteint d'une hémoptysie épouvantable, que l’on attribua tout
d’abord à une traversée pénible et aux efforts violents occasion
nés par le mal de m er.
Appelé au milieu de la nuit par la famille à laquelle M. X ...
était recommandé, je jugeai approxim ativem ent, d ’après les
linges mouillés et d'après le sang recueilli dans une cuvette,
que le malade devait en avoir perdu plus de 600 gram m es ; et il
le crachait encore avec tant de violence que je dus partager les
vives inquiétudes inspirées par son état aux assistants.
L ’ensemble des symptômes me fit craindre que l’hém orrhagie
pût devenir prom ptem ent passive ; je n’osai donc pas saigner le
malade. Je prescrivis un dem i-gram m e d ’acétate de plomb dans
120 grammes d’eau distillée, plus 60 gram m es sirop de thridace.
Diète et silence absolus. Cette prem ière potion fut achevée en
moins de six heures; on la fit renouveler, et le malade la prit à
de plus longs intervalles que la prem ière. À six heures du soir
il avait avalé un gramme d’acétate de plomb, et l’hém orrhagie
paraissait com plètem ent arrêtée.
Q uelques crachem ents rougeâtres cependant furent encore
expectorés le lendemain. Le malade ressentait un fort goût de
sang à la bouche, une vive douleur à la nuque et ce frémisse
m ent m usculaire déjà signalés. La potion fut réduite à 50, puis
à 15 centigram m es de sel plombique; j ’avais en outre recom
mandé q u ’on l’adm inistrât à des intervalles de plus en plus longs,
et je perm is au malade quelques cuillerées de bouillon bien
dégraissé et froid.
Il n ’y eut rien de changé à ces dispositions dans les deux jours
suivants, et les rares crachats expectorés ne présentaient plus la
m oindre trace colorée, lorsque M. X ... fut pris de quelques
douleurs vagues à la région ombilicale accompagnées d'un sen
timent de pesanteur a l'épigastre. Je 6s suspendre immédiate
m ent la solution d ’acétate de plomb, et j ’ordonnai 60 grammes
sirop diacode à prendre en deux fois. Les douleurs diminuèrent
un peu ; une seconde dose de diacode en amena la cessation
com plète. Le pouls se releva; les excrétions, d’abord dim inuées,
reprirent leurs cours ordinaire.
Pendant une huitaine de jours M. X ... fut assez bien et j ’en
profilai pour me livrer à l’examen de la poitrine, et pour re
cueillir les renseignem ents commémoratifs qu’on n’avait pu me
donner d’abord. Thorax fort resserré et voussé ; m atité pronon
cée des deux côtés, respiration faible, retentissem ent de la voix.
Il y a eu des engorgem ents glandulaires autour du cou, dont
deux ont suppuré. Depuis plusieurs années M. X ... était
enrhumé tous les hivers, et il était rare que la toux le quittât
com plètem ent dans la belle saison.
Ces diverses circonstances plus ou moins graves, jointes au
retour d’une légère hém optysie, au bout d’une sem aine, me
firent engager le malade à retourner chez lui le plus prom ptement
possible. Je parvins encore cette fois et facilement à arrêter le
crachem ent de sang à l’aide du sel plombique, et peu de temps
après le malade repartit pour Constantinople encore faible, mais
sans la moindre aggravation des symptômes thoraciques sus
m entionnés.
9*
�—
198
—
Dans l'espace de deux m ois, environ, qu’il a séjourné b M ar
seille, M. X ... n ’a pas eu une seule perte séminale ; il n’en a
pas eu non plus de retour chez lui. De légères hémoptysies se
sont renouvelées ; une fois seulem ent on a eu recours a la sai
gnée : la solution de sel plombique parut réussir assez bien dans
les prem iers temps. Mais en 1843 la toux augm enta, au lieu de
céder b la belle saison ; tous les sym ptôm es de la fonte tubercu
leuse se succédèrent rapidem ent; et quoique je n’aie plus eu de
nouvelles de ce malade, il est probable q u ’il aura depuis long
temps succombé b la phthisie.
N° 4. — M. M ..., employé actuellem ent dans le départem ent
du Rhône, était sujet b de fréquents crachem ents de sang depuis
l’âge de 25 ans. Il avait 32 ans en 1834, époque b laquelle
M. Pirondi père fut appelé b lui donner des soins. Voici d’ail
leurs l’état général du malade : constitution délicate, thorax peu
développé, rhum es fréquents, passant facilem ent b l’état de
catarrhes dans la saison froide ; m aigreur prononcée ; respira
tion courte; m atité sous-claviculaire, du côté gauche surtout.
A la suite de trop de fatigue ou d ’une m arche un peu forcée il
était rare que M. M ... ne fût pris d ’hém optysie, et parfois, c’é
tait au point de rejeter une pleine cuvette de sang rouge et
vermeil. Souvent on a associé la saignée b l’usage de l’acétate
de plomb ; dans quelques circonstances le sel plom bique a été le
seul rem ède employé ; la dose a été portée sur ce malade ju sq u ’b
un scrupule, soit \ gram m e et 25 centigram m es.
En quelques heures l’hémoptysie a ordinairem ent cédé. Le
malade a éprouvé plus d’une fois un grand ralentissem ent du
pouls, quelques douleurs dans les m em bres, et a présenté aux
gencives et au collet des dents une ligne gris-ardoisé, quë l’on
attribue avec raison b l’agglomération, sur ce point, d ’un peu
de sulfure de plomb. Quelques douleurs vagues a l’épigastre et la
constipation complétaient les symplômes qui indiquent le pre
mier degré d'intoxication par les préparations plom biques. Mais
tous ces symptômes ont toujours cédé assez facilem ent b quel
ques gouttes de landanum délayées dans de l’eau sucrée.
199
-
M. M... a séjourné b Marseille pendant quatre ans. Les cra
chem ents de sang qui se renouvelaient lous les trois ou quatre
mois dans les deux prem ières années, ont été beaucoup plus
rares b la troisièm e, et ont fini par cesser tout-à-fait. Sans que
la constitution du malade se soit beaucoup fortifiée depuis, l’étal
de l’appareil respiratoire ne s’est pas aggravé, et M. M ... peut
encore vaquer aujourd'hui b ses occupations et remplir des
fonctions peu adaptées au genre de maladie dont il a été atteint.
Le changem ent de climat n’a pas paru d’ailleurs exercer ici au
cune influence, puisque les hémoptysies avaient déjà cessé huit
ou dix mois avant que M. M ... quittât le départem ent des Bou
ches-du-R hône pour celui du Rhône.
N °5. — Un employé de la mairie dans l’ancien départem ent
de P arm e, eut en 1811 , 1812 et 1813 des hémoptysies si
fréquentes et si abondantes qu’on le crut tout-b-fait perdu ;
d ’autant plus que toute sa constitution trahissait un état
phthisique avancé. Cependant de fortes doses d’acétate de
plomb, tantôt associées b la saignée et tantôt sans saignée, par
vinrent toujours b arrêter prom ptem ent l'hém orrhagie. Le ma
lade dim inuait de lui-m êm e la dose du rem ède, ainsi que
M. Pirondi père le lui avait recom m andé, au fur et b mesure
que le crachem ent de sang dim inuait, et jamais aucun accident
ne s’en était suivi.
On était au com m encem ent de 1814, et soit que les événe
m ents politiques eussent surexcité le malade, soit pour toute
autre cause moins appréciable, N. N. fut atteint d’une hémopty
sie si abondante que ni la saignée, ni l’acétate de plomb ne
parvinrent b la m aîtriser de suite comme d'habitude. On dut
conséquem m ent continuer l'usage du sel plombique pendant
plus de quinze jours, et déjà les crachats étaient b peine sangui
nolents, lorsque le malade, pris d’une vive impatience, avala
tout d ’un trait une solution contenant 20 et quelques grains
d’acétate de plomb.
Soit que la constitution fût déjà saturée de plom b, soit (pie
�— 201 —
200 —
l'absorption de cette dernière dose se fit en de trop grandes p ro
proportions, tous les symptômes de I affection saturnine bien
caractérisée parurent, et pendant plus d’un an le malade a eu
à souffrir de celte dernière affection qui n ’a cédé que bien le n
tem ent h tous les moyens mis en usage pour la com battre.
Mais chose digne de rem arque, h dater de cette époque la
personne qui fait le sujet de cette observation, n’a plus eu
d ’hém optysies, et quoique d’un tem péram ent extrêm em ent
délicat, elle est parvenue ju sq u ’à l’âge de 65 ans, sans éprouver
d’indisposition grave, surtout sur les organes du thorax.
N° 6 . — Il est cependant des constitutions qui ne peuvent
supporter l’usage de l'acétate de plom b, quelle que soit la dose à
laquelle on veuille l’adm inistrer. Le cas suivant en fournira un
exemple.
M. S ..., âgé de 27 ans, né en Ecosse de parents très-sains,
et paraissant d’ailleurs fortem ent constitué, fut pris, en 1844,
d'une violente hémoptysie que deux fortes saignées dim inuèrent
sans pouvoir arrêter. J’ai essayé l’acétate de plomb à la plus
petite dose possible ; il a constam m ent déterm iné des sym ptô
mes d’intolérance non équivoques, au point de devoir renoncer
com plètem ent à cette préparation.
Les crachem ents rouges, sans être très-fréquents, persistaient
toutefois assez pour réclam er encore des soins actifs, et l’on ne
pouvait pas, sans im prudence, avoir de nouveau recours à la
saignée. J’essayai la digitale, la scille : point d’effet. Il en fut de
même du sulfate de quinine q u i, dans un cas d’hém optysie à
type interm ittent, m ’avait assez bien réussi.
Tous ces moyens et beaucoup d'autres qu’il serait trop longs
de citer, ne produisant aucun effet sensible, ce jeune hom m e
partit pour les E aux-B onnes, non sans être accom pagné par un
jeune élève ( I) chargé de veiller sur le malade pendant le voyage,
et dont les soins furent on ne peut plus intelligents.
(lj M. Rocauus,interne à l’Hôlel-Dieu.
Dès leur arrivée aux E aux-B onnes, la santé de \1. S ....
s ’améliora considérablem ent ; et cette amélioration progressa
de telle sorte, que depuis lors ce jeune homme a pu se marier,
et n’a plus éprouvé la m oindre indisposition dans des organes si
dangereusem ent menacés.
VII
Je crois inutile d ’augm enter le nom bre des observations,
ayant surtout choisi les précédentes parmi celles où l’acétate de
plomb a été porté aux plus fortes doses. Quelques remarques
générales découlent cependant de ces quelques faits : nous les
signalerons som m airem ent.
« Dans le plus grand nom bre des cas, dit M. Andral (1), l’hé« m optysie se lie à l’existence de tubercules dans les poumons.
« N ous avons observé cependant des individus qui, après avoir
« craché du sang en assez grande abondance, ne sont pas deve« nus phthisiques. » Parmi les observations que nous venons
de citer, il en est qui confirment pleinem ent cette assertion,
num éros 1 et 2 .
Dans d ’autres cas, la phthisie a paru enrayée pendant un
certain laps de tem ps. Faut-il attribuer le fait à l’heureuse in
fluence de l’acétate de plomb ? je n ’oserais l’afïirmer ; cependant
les nom breuses expériences de Stark et de Kopp sembleraint
m ettre hors de doute l’heureuse influence du sel plombiquc
dans l'affection tuberculeuse des poumons. Numéros 4 et 5.
Le frém issem ent musculaire et la chaleur à la nuque accom
pagnent souvent les fortes hém orrhagies. J'ai dû rarem ent avoir
recours à la saignée lorsque ce dernier symptôme se présente
avec quelque énergie ; que s'il est suivi ensuite par de forts
battem ents aux tem pes, il est à craindre que l’hémorrhagie
devienne passive : c’est là un motif conséquem m ent pour pres
crire 1acétate à de plus faibles doses, et pour veiller aux pre
m iers symptômes d’intolérance qui peuvent se présenter.
(1) Clinique médicale, loin. IV
�— 202 —
Les douleurs a la région ombilicale, accom pagnées d’un se n
tim ent de pesanteur h l’épigastre sont les prem iers signes qui
indiquent un excès d'action du sel plombique : dès leur appari
tion, il faut suspendre im m édiatem ent le rem ède ; dans la plu
part des cas cette seule précaution suffit. Mais lorsque, par un
usage plus prolongé de l’acétate de plom b, la coloration grisardoisé des gencives et du collet des dents vient se joindre ( 1)
aux signes précédents, il est à craindre que tous les sym ptôm es
de la maladie saturnine se succèdent bientôt si l’on n ’emploie
quelque moyen actif propre à neutraliser les prem iers effets de
l’iutoxication. A ce propos, je dois déclarer que les préparations
opiacées nous ont fourni les m eilleurs résultats. Je ne puis ni ne
veux nier les bous effets obtenus par MM. Bally et Tanquerel
des Planches 'a l'aide de Yhuile de croton tiglium; je n ’élèverai
pas le moindre doute non plus sur ceux attribués à la limonade
sulfurique, par M. Gendrin : les faits authentiques devant rester
à l a b i i de toute contestation, quelle que soit d ’ailleurs la diffi
culté avec laquelle on peut théoriquem ent s ’en rendre com pte.
Mais, pour ma part, je préfère les préparations opiacées tant
vantées d'abord par Stoll, et dent l’action a été si bien expli
quée par les récents et intéressants travaux de MM. Rogoella
et Gabrini (2).
Le malade n° 5 a vu cesser com plètem ent les pollutions noc
turnes dès le premier crachem ent de sang. Le travail morbide
qui existait déjà dans les organes respiratoires et qui a pris, dès
ce m om ent, une nouvelle intensité, pourrait avoir occasionné la
disparition, ou mieux encore la suspension tem poraire d’un état
morbide moins grave qui s’était fixé ans organes génito-urinaires.
(1) il est à noter que dans quelques cas la succession des signes d’une trop
grande absorption de plomb par l’économie, n’est pas telle que nous venons de
l ’indiquer — Un chimiste anglais, Henry Billion, prétend au contraire que la
coloration gris-ardoisé des gencives précède les symptômes entéralgiques, et que
c'est là le signe le plus constant d’un excès d’action du plomb.
(2) Annales de Thérapeutique, 1843-1844.
Une circonstance non moins digne de rem arque, c’est la
cessation complète d’hém orrhagies pulmonaires chez les deux
malades n° 4 et n° 5, à la suite de l'apparition de quelques symp
tôm es d’intoxication saturnine. J’ai observé déjà quelques
faits de ce genre ; mais ils ne sont pas encore assez nom breux,
ni assez concluants.
Dans la sixième observation, enfin, j'ai voulu m ontrer un cas
où l’acétate de plomb n’aurait pu être employé sans qu’on se fût
exposé à de graves inconvénients. De semblables circonstances
sont à la vérité assez rares ; cependant on peut les rencontrer
— comme je les ai rencontrées m oi-m êm e — et quoique l’on ne
puisse pas s’expliquer l’antipathie de certaines organisations
pour tel ou tel rem ède, je crois utile, indispensable même, d’en
indiquer un exemple de plus.
NOTE ADDITIONNELLE.
Pendant q u ’on réim prim ait les quelques pages qui précèdent,
j ’ai lu avec le plus vif intérêt la Revue de thérapeuthique de la
Gazette hebdomadaire (18 août 18(38, p. 515), où une plume
vraim ent professorale et des plus autorisées, vient périodique
m ent initier le lecteur aux progrès réels de cette im portante
branche de la médecine pratique, et cela, dans un style des plus
attrayants.
M. Fonssagrives a parfaitem ent raison en disant: qu'il faut y
regarder de près quand on prescrit du plomb à l’intérieur. Il
connaît, dit-il, ses méfaits toxiques ; il n ’a guère eu occasion
de constater ses bienfaits cliniques, et il déclare que jusqu’à
recherches et démonstrations nouvelles, il s’abstiendra de faire
courir aux malades des chances d’intoxication saturnine.
Malgré l’énum ération, faite plus haut, des bons effets produits
par l’acétate de plomb employé contre l’hémoptysie, je partage
com plètem ent la très-sage réserve de M. Fonssagrives surtout
depuis q u ’il m ’a été perm is d’observer une véritable épidémie
�—
d'intoxication satu rn in e, avec paralysie des e x te n se u rs, sur
plusieurs personnes em barquées sur un m ême navire, et dans
lequel, par suite d ’un accident passé inaperçu, elles avaient été
exposées à boire pendant une longue traversée de l’eau ayant
subi une action plombique des plus minimes, en apparence.
Mais voici dans quelle m esure notre opinion diffère de celle
de M. Foossagrives.
Dans l’hémoptysie, il s’agit de com battre im m édiatem ent un
accident sérieux qui s’aggrave d’heure en h eu re, et qui peut
devenir prom ptem ent m ortel. Il n’est pas question ici d ’admi
nistrer pendant longtemps un rem ède quelconque et qui, m êm e
à faibles do ses, peut finir par se transform er en agent toxique
des plus dangereux. Dès la première heure, en quelque sorte, il
faut qu’on sache à quoi s'en ten ir; dans l'espèce, l’acétate
plombique agit ou n’agit pas ; si oui, ce n’est pas une dose de
50 ou 40 centigrammes, répétée pendant deux jours qui pourra
occasionner des accidents saturnins un peu sérieux ; si non, en
ce cas l’accident hémoptysique ne peut ni ne doit attendre, et le
médecin est tenu de faire appel a un autre agent thérapeutique.
S’il m ’était donc permis de formuler une proposition au sa
vant rédacteur de la revue précitée, je dirais volontiers : dans
des cas de lésion organique confirmée il n ’y a pas à com pter sur
l'acétate de plomb, pas plus, hélas! que sur d'autres médica
ments ; mais comme l’usage prolongé du sel plombique peut
compliquer la maladie principale par un nouvel état m orbide, il
vaut mieux ne pas renouveler des essais qui n'ont jam ais fourni
des résultats bien positifs. Mais lorsqu’on se trouve en présence
d’une hémoptysie que rien n’arrête, ni le ralanhia, ni l’ergotine,
ni le perchlorure de fer, ni d ’autres préparations dites hém osta
tiques, dans ces cas, usez sans crainte de l’acétate de plomb.
Son administration passagère ne peut fournir aucune com pli
cation grave, et son usage sera fréquem m ent suivi, j ’ose l’es pèrer, de résultats aussi favorables que ceux que nous avons
signalés depuis longtemps.
Sinus PlRONDI.
205
—
Bulletin thérapeutique.
Uoyen «Im pie de fa ire d is p a ra ître l'am ertu m e
du s u lfa te de m agnésie.
Le principal inconvénient de ce purgatif salin, d’ailleurs si
utile, est son am ertum e. On peut la dissimuler par différents
moyens, surtout par l’emploi du café. Il suffit alors, après avoir
dissout 30 grammes de sulfate de m agnésie, par exemple, dans
300 gramm es d’eau, de faire bouillir dans cette solution pendant
quelques minutes dix grammes de café torréfié et réduit en pou
dre. On passe à travers un linge et l’on divise en deux doses à
prendre à un quart d ’heure de distance l’une de l’autre. — S.
C h ro niqu e m en su elle.
Marseille, 5 Septembre 1868.
Le samedi 13 août, un grand nombre de nos confrères se réu
nissait à Quimper pour présenter à jla postérité, sous une forme
matérielle et durable, la grande figure de l’inventeur de l’auscul
tation. Gloire à Laennec. et honneur à l’Association des Médecins
de France qui vient de rendre un si bel hommage à l’un de nos
maîtres les plus illustres 1 Nos lecteurs trouveront dans la lettre du
président de la Société locale des Bouches-du-Rhône, lettre publiée
daDs ce num éro, d’intéressants détails sur la fête Quimperlaise.
Nous pouvons donc laisser de côté l’ancienne et poétique Breta
gne pour sauter brusquem ent en plein X IX e siècle et au beau mi
lieu du laboratoire de l 'École pratique des hautes études.
Instituée depuis quelques sem aines, cette école est appelée à
rendre de très grands services, puisqu’elle permettra aux étu
diants d’acquérir les connaissances pratiques que ne donnait pas
l’enseignement des Facultés. Nous prendrons toutefois la liberté
d’émettre un désir qui sera en même temps une espérance; c’es
�— 206
que M. le Ministre de l’Instruction publique à qui nous sommes
redevables de cette création, complète son œuvre en généralisant
un peu plus l’action de la nouvelle école. Pour nous médecins,
par exemple', ce qu’il nous importe surtout d’avoir ce n ’est pas
autant un grand centre d’études pratiques établi dans la capitale
qu’une organisation générale qui rende plus pratique l’ensei
gnement des diverses Facultés et Ecoles de médecine. L’une des
sections de la nouvelle institution serait spécialement consacrée à
l’étude du microscope et aux expériences de chimie physiologique
et pathologique que le résultat ne serait point encore complet, car
cet établissement unique situé à Paris ne pourrait faire sentir son
influence à toutes nos écoles. Mais nous n’avons pas même cette
ressource. La plupart des opérations qui intéressent spécialement
le savant, le médecin chercheur seront faites difficilement dans
YÉeole pratique des hautes études ; de telle sorte que selon toutes
probabilités l’enseignement médical retirera de forts petits béné
fices de la nouvelle institution. Il serait facile toutefois d’augm en
ter, en les étendant, les bienfaits de cette création si utilePourquoi n ’établirait-on pas à Montpellier, à Strasbourg et
dans nos principales écoles de médecine quelques instituts pra
tiques pour le maniement du microscope, de l’ophthalmoscope, du
laryngoscope, etc.; pourquoi ne créerait-on pas un cours expé
rimental de chimie pathologique? Cette réforme, à laquelle les
villes s’associeraient probablement de fort bonne grâce, aurait
le grand avantage de rendre plus sérieuses les études faites dans
les écoles préparatoires, — études, notons-le, qui pour un grand
nombre résument toute la scolarité — de former d’excellents p r a
ticiens et de développer dans nos villes de province l’am our du
travail et le goût des recherches scientifiques.
Il est de mode, par le temps qui court, de prendre en assez pe
tite considération tout ce qui n ’a point une origine parisienne.
Pourquoi, dit-on assez volontiers, se mettre en frais pour la pro
vince et lui fournir des éléments dont son apathie naturelle l’empêchera de profiter? Raison péremptoire assurément. Le m alheur
c’est que les bons provinciaux interrogés à leur tour soutiennent
que s’ils ne travaillent point c’est q u ’en conscience ils ne peuvent
le faire, les éléments leur faisant à peu paès complètement défaut.
207 —
Il faudrait pourtant s’entendre et sortir une bonne fois de ce
cercle de Popilius. Si vous doutez du zèle de nos écoles de pro
vinces, mettez-les à l’épreuve ; et si vous ne voulez pas tenter l’ex
périence, êtes-vous en droit d’affirmer que nous ne sommes pas
susceptibles d’un travail sérieux?
Un de nos confrères déplorait, il y a quelques jo u rs, devant
nous que Marseille ne possédât point un laboratoire pour les expé
riences physiologiques. C’est là une lacune ; car nous comptons
parmi nous un bon nombre de jeunes médecins pleins de zèle qui
seraient heureux de pouvoir occuper par l'étude et les recherches
expérimentales les loisirs que tout homme a forcément au début
de sa carrière. Les caractères ont grandi depuis un certain nom
bre d’années. L’esprit d’investigation qui s’est emparé du monde
scientifique a éveillé dans le cœur de chacun le désir de chercher et
de trouver à son tour Cette noble émulation a remué plus qu’on
ne le croit la province. En tous cas, il serait bien temps de faire l’ex
périence. Que l’on donne à notre École de médecine de Marseille
une installation sérieuse et définitive ; qu’on lui facilite les moyens
de créer une bibliothèque où les travailleurs puissent consulter à
l’aise les œuvres anciennes et modernes; q u ’on lui permette de
compléter son musée d’anatomie et d’anatomie pathologique, de
créer un laboratoire de chimie et de physiologie, et l’on verra si
ces richesses demeurent improductives Pour notre part, nous
avons foi entière dans l’avenir de la province, parce que nous
voyons autour de nous des hommes qui se sont fait un nom dans
la science par leurs travaux et par les titres q u ’ils ont su obte
nir. Menlionnons parmi eux notre confrère M. le Dr Sirus Pirondi, auquel l’Académie de Médecine vient d’accorder le titre de
membre correspondant. Cette haute et flatteuse distinction s’a
dresse à la fois au praticien et à l’homme de science; elle a valu
à notre confrère de nombreuses marques de sympathie aux
quelles nous sommes heureux de joindre publiquement nos félici
tations les plus sincères.
C’était aussi un enfant de la province, ce Clot-Bey q u ’un nom
breux cortège de confrères et d’amis accompagnait naguère au
cham p du repos. Cet homme de bien s’était courageusement dé-
�— 208
■
!
voué à la cause de la civilisation et du progrès. Si la reconnaissance enthousiaste des contemporains a grandi la personnalité de
Clot-Bey, empressons-nous de dire que les obstacles de toutes
sortes dont il a su triom pher, l’énergie et l’intelligence dont il a
fait preuve dans l’accomplissement d’une noble et difficile mission
constituent des titres sérieux qui doivent rendre sa ville natale
fière de loi avoir donné le jour.
Nous avons la bonne fortune de pouvoir, dès aujourd’hui, a n
noncer au public médical l’apparition d’un livre destiné, croyonsnous, à faire sensation. L’ouvrage dû à l’un de nos confrères de
Marseille les plus savants, M. le Dr Despiue, comprend trois gros
volumes de 800 pages chaque.
Celte œuvre considérable résume une vie entière de réflexions,
de labeur, de patientes recherches. Nous en donnerons plus tard
l’analyse complète et détaillée.
En lisant l’introduction de cet ouvrage, reproduite presque en
entier dans notre numéro, nos lecteurs'pourront d’ailleurs appré
cier le caractère du livre et l’esprit éminem m ent scientifique de
l’auteur. Dire que le Dr Despine traite in extenso et d ’une m a
nière tout-à-fait nouvelle les questions les plus importantes de la
criminalité, de l’aliénation mentale, de la psychologie naturelle,
de la physiologie du système nerveux dans ses rapports avec les
fonctions de l’àme hum aine, suffira pour faire comprendre l’im
portance de l’œuvre et l’honneur que l’apparition de ce livre fera
rejaillir sur Marseille.
La note que vient de publier le Dr Sauvet a quelques points de
contact avec l’ouvrage du Dr Despine. C’est un travail plein d’é r u
dition et rempli d'intéressants détails sur l’hérédité et ses m ani
festations diverses.
La chirurgie dans la personne du professeur Courty a payé son
contingent mensuel sous forme d’une brochure courte et substan
tielle dans laquelle sont relatées six opérations nouvelles de fistule
vésico-vaginaleparla m éthodeam éricaineet toutes suivies de g u é
rison. Parmi ces observations il en est deux qui nous ont vivement
intéressé. Il s’agit de deux femmes chez lesquelles l’habile chirur
gien de Montpellier s’est vu obligé, en raison de la situation de la
y
— 209 —
fistule, d’amener et de fixer le col utérin dans la cavité vésicale.
Les fonctions menstruelles s’exécutent très-bien chez ces deux
femmes et le sang s’écoule chaque mois par l’urètre sans qu’il ré
sulte de cette situation anormale le moindre malaise. C’est là un
beau résultat chirurgical; il ne surprendra néanmoins aucun de
ceux qui connaissent l’expérience et le talent du professeur Courty.
Nous serions injuste si nous ne signalions pas parmi les pro
ductions du mois l’éloge de Jobert (de LambalJe), prononcé par
le Dr Richet à la séance solennelle de la faculté de médecine de
Paris, l e f 4 août 1868. Jobert est, sans contredit, un des esprits
les plus singulièrem ent remarquables du siècle. M. le professeur
Richet a esquissé avec beaucoup de bonheur et dans un très beau
langage cette physionomie si pleine de contrastes, si mobile, si
rude parfois, si intéressante toujours.
Nous venons de parler de notre confrère le Dr Despine. Un des
chapitres de son ouvrage est consacré à l’étude des effets toxiques
occasionnés par l’alcool et à l’influence de ce poison sur la production
des grands crimes. Aussi, croyons-nous que notre confrère donnera
son entière approbation à l'association qui vient de se former en
France contre l'abus du tabac. La nicotine est en effet un poison
presqu’aussi pernicieux que l’alcool. Etudier les funestes effets de
cette substance est une question à la fois médicale et sociale. Le
tabac a profondément modifié la société moderne en même temps
q u ’il a joué et joue toujours un rôle des plus actifs comme cause
morbifique. Il est de bon goût à notre époque de s’empoisonner
par tous les moyens possibles; il est admis que l'on peut jouer
tém érairem ent avec les substances les plus pernicieuses, pourvu
qu'elles ne produisent pas au moment de leur absorption un
effet funeste et immédiat. Que l’on y prennegardel Tous les poisons
lents n ’agissent pas comme le café, et si Voltaire eût connu la
nicotine il n’aurait probablement pas atteint l’àge avancé auquel
il trépassa.
Après l’alcool, le tabac est certainement le poison dont l’éco
nomie s’imprègne le plus. La facilité avec laquelle on se procure
cette substance permet à l’homme de s’empoisonner presque dès
le berceau. Quel est le plus vif désir de l’écolier de cinquièm e?
Absorber de la nicotine. Et pour se procurer ces joies écœurantes et
�-
210 —
pernicieuses, nous le voyons se réfugier dans ces cabinets n a u
séabonds, dans ces antres pestilentiels où les lois de la propreté
sont violées à chaque instant de la façon la plus cynique. Lorsque
l’enfant est devenu homme, les ceicles et les tabagies l’enlèvent au
foyer de la famille pour le donner tôt au lard à la maison de santé
ou à l’hôpital. Oui certes, ta nouvelle association française, en se
proposant pour but direct et spécial d’éclairer les populations sur
les inconvénients et les dangers qui résultent de l’abus du tabac,
a entrepris une œuvre utile et essentiellement philanthropique.
Les difficultés sont grandes, mais le zèle est à la hauteur de la
mission et nous ajouterons que l’organisation de cette société nous
paraît de nature à donner de sérieux résultats. L’association réus
sira dans son entreprise, car elle s'est mise courageusement à
l’œuvre, considérant avant tout l’utilité du but à atleindre et pre
nant pour devise ce mot si fort dans sa naïve simplicité: Fais ce
que dois, advienne que pourra.
Dr S eux fils.
NÉCROLOGIE
Le corps médical de Marseille a perdu une de ses illustrations
dans la personne d’A nloine-Barthélem y Clot-Bey.
Inspecteur-général honoraire du service médical en Egypte,
membre associé de l’Académie impériale de Médecine , m em bre
honoraire et correspondant d une foule d ’autres Académies,
commandeur de la L égion-d’honneur, Clot-Bey était parvenu
aux plus hautes dignités médicales. Enfant du peuple, orphelin
de bonne heure et sans ressources, Clôt était arrivé deB rignoles
à Marseille à pied pour étudier la m édecine; il s’est élevé par
son intelligence et par son travail. Ce q u ’il lui fallut déployer de
génie d’organisation pour créer et faire prospérer en Egypte
l’École de m édecine d’Abou-Zabel et pour y introduire l’ensei
gnem ent pratique de l’anatom ie, pour y instituer une école de
sages-fem m es, pour y généraliser l’usage de la vaccine, on se le
211
ligure h peine. Sa conduite admirable dans les épidémies de
peste et de choléra grandit en Orient le prestige du nom fran
çais. Il usa noblem ent de la haute position qu’il occupait en
Egypte pour y servir toujours les intérêts de la France.
Comme sa v a n t, il a laissé un beau Traité de la Peste et un
ouvrage historique sur l’Egypte, indépendam m ent d’un certain
nom bre de m ém oires sur des sujets divers de chirurgie.
Le corps médical et les habitants de Marseille ont rendu de
dignes honneurs funèbres à cet homme célèbre qui fut un hom
me de bien.
N ouvelles & V ariétés
N otre num éro du mois d’août était sous presse quand a eu
lieu à Q uim per l’inauguration de la statue de Laënnec.
La grève des ouvriers typographes, en retardant la publica
tion de notre num éro de sep tem b re, nous condamne à un
com pte-rendu bien tardif de cette fête nationale. Nos lecteurs
en seront dédom m agés en lisant la lettre qui nous a été adres
sée par un tém oin oculaire, M. le Dr S eu x , président de la
Société locale des Bouches-du-R hône, qui n’a pas reculé devant
les fatigues et les sacrifices d’un long voyage pour aller repré
senter au fond de la Bretagne les médecins de la Provence.
M. le Dr Sirus Pirondi vient d’être nommé m em bre corres
pondant de l’Académie de Médecine. C’est pour notre éminent
confrère et collaborateur un triom phe d’autant plus éclatant
que, parmi ses com pétiteurs, se trouvait l’élite des chirurgiens
de province.
N ous sommes aussi heureux que fiers de son succès.
�— 212 —
Une Commission de m édecins et de chirurgiens des hôpitaux
de Marseille, nommée par l’Administration des hospices, se
réunit à l’Hôtel-Dieu pour e x a m in e r les modifications à intro
duire dans le régime du concours.
La Faculté de Paris a été frappée d’un nouveau deuil par la
m ort presque subite du professeur M onneret.
M. le Dr Lisle, ancien médecin en chel de l’Asile des Aliénés
de Marseille, vient de prendre la direction de l’Asile de S aintRémy.
M. le Dr L ejeune, de l'A isüe, décédé le 14 août deruier, laisse
par testam ent 1,000 francs à la caisse de l’Association générale;
1.000 francs a la caisse des pensions viagères d’assistance ;
10.000 francs a la Société locale des m édecins de l'A isne, som
me qui devra être placée a la Caisse des dépôts et consignations,
et dont la rente devra servir à aider un fils de médecin de cette
Société à faire ses études médicales. Enfin, M. Lejeune donne
une autre somme de 1,000 francs au bureau de bienfaisance de
la commune de Montaigu, dont la rente devra servir a augm en
ter le traitement du médecin.
Nous nous faisons un devoir d enregistrer ces tém oignages
de sollicitude pour la profession médicale, et ces preuves de gé
nérosité pour notre Association.
A> V.
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( La Rédaction. )
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Marseille.
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Impr,Ç\YEn et Kl, w^î&inyfrerréol, 57.
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Title
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Union médicale de la Provence : journal scientifique et professionnel, organe officiel des Sociétés locales des médecins du département des Bouches-du-Rhône
Subject
The topic of the resource
Médecine
Santé publique
Description
An account of the resource
Journal de la Société locale des médecins du département des Bouches-du-Rhône dédié à la défense des intérêts professionnels et également à la publication d’articles scientifiques, d’observations, de mémoires, de revues et d’articles bibliographiques
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Société locale des médecins du département des Bouches-du-Rhône. Éditeur scientifique
Source
A related resource from which the described resource is derived
BU médecine-ondotologie (Marseille), cote TP40029
Bibliothèque interuniversitaire de Santé (Paris), cote 90114 MAGASIN
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n. (Marseille)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1864-1868
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
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notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/202650677
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/TP-40029_Union-medicale-Provence_vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
5 Vols
25 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
publication en série imprimée
printed serial
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
France. 18..
Abstract
A summary of the resource.
A nos confrères,
Dans son assemblée générale du 24 août dernier, l'Association des médecins du département des Bouches-du-Rhône a décidé la fondation d’un journal.
En prenant celle délibération, l’assemblée générale a compris tous les avantages, toutes les ressources d’avenir qui peuvent en résulter.
Jusqu'à présent, l’association n’existait pour ainsi dire qu’en théorie. Une fois par an seulement, convoqués en assemblée générale, les membres de l'association pouvaient espérer trouver lieu de discuter ou d’émettre des motions quelquefois importantes. Et dans ces assemblées dont l’ordre du jour est généralement très rempli, toute étude sérieuse et patiente devient impossible. En créant une feuille périodique, l’assemblée générale a voulu avoir une arène toujours libre dans laquelle seront élaborées et travaillées d’avance des questions qui alors pourront être décidées en parfaite connaissance de cause. Elle appelle ainsi chacun h la participation de l’œuvre commune. La commission administrative, en publiant chaque mois le compte-rendu de ses séances, mettra tous les membres au courant des affaires qui intéressent la société; et ainsi se fera un échange continuel d'idées et de relations entre tous les membres de l’association, jusqu'à ce jour isolés et par cela même condamnés à l’impuissance.
Organe de l’association, le journal sera destiné aux questions professionnelles. Nombreuses et difficiles, ces questions pourront obtenir une solution plus rapide si elles sont bien connues et discutées.
Le charlatanisme et l’exercice illégal de la médecine, cette lèpre de la famille médicale, celte exploitation immorale de la Bêtise Humaine;
La révision des honoraires des médecins requis par la justice;
Les faits de responsabilité médicale, sont autant de questions générales qui intéressent le corps tout entier et à l’élaboration desquelles nous ne saurions rester étrangers.
A côté de ces questions vastes, il en est d’autres plus restreintes peut-être, mais tout aussi importantes, parce quelles touchent plus directement les intérêts des membres de l'association.
La première et la plus importante est, sans contredit, celle des sociétés de secours mutuels; ces sociétés existent non-seulement à Marseille, mais dans toutes les localités du département et des départements voisins.
Le journal sera une enquête ouverte où chacun apportera son dire, et de l’ensemble de toutes les opinions sortira un mode de fonctionnement plus favorable.
Viennent après des questions qui ont également leur importance: telles que le service des vaccinations dans les villes et les campagnes; le service médical des indigens dans les cantons...., etc.
Dans beaucoup de départements, ces services sont régulièrement organisés. A Marseille, les administrations des hospices et des bureaux de bienfaisance y suffisent. Mais dans beaucoup de localités du département et des départements voisins cette organisation est encore incomplète.
Nous ne pouvons aujourd’hui que signaler ces différentes questions. Elles constituent autant de désiderata dont la solution- n’est pas impossible; mais cette solution ne peut être obtenue qu’avec l’étude et la persévérance de chacun.
Du reste, en créant un journal périodique, l’association des Bouches-du-Rhône n’a fait que suivre l’impulsion donnée déjà par d’autres, et a leur exemple, elle convie a sa coopération les sociétés locales des départements voisins; suivant cette idée, elle a donné au journal le titre de : Union Médicale de la Provence; et nous sommes persuadés que nos confrères de Vaucluse, du Var, des Basses-Alpes et des Alpes-Maritimes répondront à notre appel. Ils comprendront comme nous l'immense avantage qui résulte d’un échange permanent de relations. Nos colonnes seront ouvertes à leurs travaux officiels ou particuliers, au même titre que pour nos propres sociétaires.
La direction du journal a été confiée à un Comité de Rédaction, pris moitié dans la commission administrative et l’autre moitié parmi les membres de l’association. Ainsi composé, ce comité représente réellement les intérêts de l'association, et ses efforts sont assurés pour mener à bien l’œuvre difficile qui lui est confiée. Il accueillera avec reconnaissance tous les travaux qui lui seront adressés. Dégagé de tout intérêt personnel, il s’attachera surtout à faire preuve d’impartialité et de conciliation.
Notre publication sera donc consacrée à la défense des intérêts professionnels. Mais la science aura aussi porte ouverte. Les articles scientifiques, observations, mémoires, revues et articles bibliographiques, ajoutant à l’intérêt de notre feuille, trouveront place sans l’absorber tout entière.
Enfin, quelques variétés et nouvelles tiendront nos lecteurs au courant des petites chroniques de notre monde médical.
Tel est, chers confrères, le programme que nous avons dû vous exposer. Pour le mener à bonne fin, nous n’avons besoin que de deux choses : votre bienveillant accueil et votre coopération. Nous comptons sur toutes les deux.
Le Comité de Rédaction
Introduction extraite du document original (Union médicale de la Provence , 1864, vol. 1)
Le SCD d'AMU remercie la Bibliothèque interuniversitaire de Santé de Paris de lui avoir prêter le volume des années 1867-1868 manquant dans ses collections et d'en avoir autorisé la numérisation
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
BU médecine-odontologie (Marseille)
Bibliothèque interuniversitaire de Santé (Paris)
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/185
Santé et médecine