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FACULTÉ DE DROIT D'AIX
THÈSE POUR LE DOCTORAT
DE LA COLLATIO BONORUM
EN DROIT ROMAIN
DU RAPPORT .
DANS LE DROIT FRANÇAIS ANCIEN ET MODERNE
PAR
PIERRE
CARBUCCIA
AVOCA1" A LA COU!\ D' APPEL DE BASTIA
Lauréat du Concours de Licence (18'72)
4§sli 1;»
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:B.A.ST X .A.
IMPRIMERIE V·
EUGÈNE
1876
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10021 5 529
OLLAGNIER
�A LA MÉMOIRE
DE MON PÈRE & DE MON FRÈRE
A LA bJÉMOJRE DE MES ONCLES
ln omnibus quidem, mlWimi tamen in jure, œquitas spectanda est.
PAUL,
LE GE NERAL CARB UCCIA ET P. CATON!
L. 90. Dig. de ~eg. jur. 00. ~7.
A MA MÈRE, A MES SŒURS
�DROIT ROMAIN
DE LA COLLATIO BONORUM
Dig. XXXVII, 6 et 7. Cod. VI, 20
flic titulu.s manifestam habtt
œquitatem.
( L . 1 pr. Dig . 37. 6.)
l
A Rome la législation des Douze Tables
reconnaissait à tout citoyen, paterfamilias, le
droit absolu de disposer par testament de la
totalité de son patrimoine. Ce principe était
une des conséquences du pouvoir illimité
qu'exerçait le père sur la personne de ses
enfants. La loi n'y apportait aucune restriction
et ce n'était qu'à défaut de testament ou si
le testament ne pouvait produire d'eCîet, qu'elle
intervenait pour régler la dé,·olution de l'hérédité : la succession était alors déférée aux
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hél'itirl's siens d'abord, puis aux agnats et
enfin am gentils.
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Son. r empire de cette législation , les héritiers siens n'avaient aucune garantie contre
la liberté testamentaire du père de famille ; ils
étaienl exclus de la succession par cela seul
qu'il les omettait. tilais à une époque indéterminée, les Jurisconsultes frappés du défaut
d'analogie existant entre cette liberté et le
principe de droit civil sur la copropriété de
famille ( 1) imposèrent au père qui voulait
déshériter ses enfants l'obligation de le déclarer formellement : l'exhérédation expresse
fut donc nécessaire. Ce n'était, il est vrai,
qu'une pure règle de forme; mais, en exigeant
une déclaration formelle, elle laissait pressentir
que bientôt le père ne pourrait plus dépouiller
ses enfants sans causes sérieuses.
/1
Cette mesure de protection que la coutume
~ avait introduite en faveur des héritiers siens
ne s'élendait pas aux enfants émancipés. Ceuxci, en effet, neque sui hœredes sunt, quia in
potestate parentis esse desierunt, neque alio ju1·e
per legem vocantur; en sortant de la famille
na_turelle, ils perdaient tout droit à la copro-
priété du patrimoine de leur père (2). C'était
(1) JuS"r. IL 49 - CA10s, IL 457 - L. 4 ~ Dig. 'l8 2 Tin L1VB, X.XIY. u.
· ·
('l) • La succession su.ivait le lien de la puissance ; on
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là un des vices les plus choquants du systl~me
des Douze Tables, et il es t aisé de se rendre
compte de l'injus tice de ses conséquences puisque, même en l'absence de tes tament, l'émancipé
perdait tout droit à la s uccession de son père.
Le Préteur, n alurali œquitale motus, apporta
de bonne !heure un adoucissement à cette loi :
il rappela les enfants éman cipés à la succession
,
d;"palerfamilias, et, en leur accordant le béné- ' 'J/f•,,..,G- ~v/"'
fice de la bonormn possessio, il leur permit de r1·c:.t~ j "f.•>.,,.....,
coneourir avec les hœredes sui. ( Inst. § 9. cle
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hœred . quœ ab intesl. clefert. ) . Cette bonorum
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p ossessio introduite par l'édit réparait ainsi à (,, .. ,~ /' ,
l'égard des émancipés une injustice du droit c;.tfî. ~ ·
civil; mais il était à craindre qu'un mal nou- /J<c • (vic-14 1-. (,../,
veau ne succédât à celui auquel on venait de 4c,..1,..,f._,
porter remèrle : d'un cô té, en effet , tout ce que
pouvaient acquérir les sui faisait partie de la
succession du père, et les enfants émancipés
devaient y prendre part ; d~n autre côté ceuxci conservaient de droit tout ce qu'ils avaient
acquis depuis l'émancipation. Le Préteur ne
pouvait donc pas, sans blesser la plus stricte
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n'était héritier qu'autan t qu'on était uni par le lien de Ja
puissance civile. Quiconque sortait de cette communauté
» par l'émancipati on perdait ses droits de succession; il ne
» lui restait que la pare nté naturelle incapable de les con» server . » - TROPLONG, ln fl . du GhriM. sur le dr. civil des
Rom ., page 321.
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10 -
équité, appeler les émancipés à la succession
du de ctiju" ans les assujettir à faire à la
ma ·se l'apport préalable de leurs biens personnels 1collntiol: coasequens esse c1·edit tit sua
quoque bona in medittm conferant, q tû appetiint
-
11 -
la nouvelle institution n'a plus rien de commun
avec celle introduite par le Préteur et présente
de grandes analogies avec le rapport du droit
français.
patcnrn.
c·e t dans cette collatio qu'il faut rechercher
l'origine du rapport ùu ùroit français; dans ce
premier état de la législation romaine, il est
difficile d'apercernir l'idée moderne du rapport
à uccession. ~on seulement le Code civil n'a
pas reprodmt les règles de l'émancipation, mais
ùe plus l'objet de la collatio diffère de celui du
rapport. puisque l'obligation imposée à l'éman c1pé porte sur des bien~ qui n'ont jamais été
compris dans le patrimoine du père. li y avait
plutôt apport que 1·apport. Mais l' institution
devait receYoir plus d'extension ; son premier
caractère se modifie à mesure que s'effacent
les différences entre les enfan ts émancipés et
ceu".\ en pmssance ; la nature de la dot donne
naissance à une collatio qui dans certains cas
e l un Yéritable rapport, et l'assimilation devient
plus complète lor~qu'au Das-Empire les jurisconsultes introùuisent dans cette théorie l'id ée
d'une égalité à établir entre tous les enfants qui
ont reçu. des libéralités de leurs ascendants.
A cette époque il est encore question dans le
Code et dans les ~ovelles d'une collatio, mais
CHAPITRE
I.
DE I.A. ()OI..t..ATIO DOl'fORIJltI.
« Le rapport ou collat'io bonot·um consiste
» dans l'obligation imposée aux descendants
» émancip és de partager leurs biens personnels
» avec les sui hœredes arrivan t en même temps
>) qu'eux à l' une des bon. poss. contra tabulas ou
» unde liberi . » Nous examinerons sur cette
collatio : 1° d ans quels cas elle a lieu ; 2° quel
en est l'objet; 3° comment elle s'effectue.
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-
SECTION I.
Dans quels cas a lieu, la collatio.
La collatio a lieu dans les bon. possessiones
déférées par le Préteur aux descendants ; elle
est évidemment étrangère à toute autre bon.
poss. comme la bon. poss. secundum tabulas où
elle co ntredirait la volonté du défunt. (L. I.
Cod. 6. 20.)
Deux conditions sont nécess aires pour que
l'émancipé en s oit tenu :
a. Il faut d'abord qu'il obtienne la bon01·um
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possessio ; la collatio n'est-elle pas, en effe t, une
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e~ ~ tfl • ~ Ainsi, si le fils émancipé renonce au bén éfi ce
de la poss . bon. pour s'en tenir aux biens qu'il
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a personnel lement acquis, il abdique tout droit
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à la succession de son père et se soustrait par
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là à l'obligation de la collatio. (L. 2. § 5, L. 1.
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De même cette obligation cesse pour l'éman~ 1.......- t · C') .,• ....._ d ·1 .
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1:ttJ 1, tl'l ~ . J i.. _ sans le secours du Préteur. Cela se produit
dans le cas où !'émancipé est institué héritier,
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vel max imè autem tune emancipatum conferre
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non oportet, si eliam jttdicium patris meruit, nec
quidquam ampliits nanciscitttr, quam ei pater
dedit. (1) (L. 1. § 6. h. t.). Ce principe a été
appliqué par P apin ien dans une espèce rapportée
par la loi 6. Dig. 37, 7 : Un père voulan t déshériter sa ftlle institue pour héritier son fils émancipé; la fi lle exhérédée intente la querela inofficiosi lesfamenti, et ayan t triomphé dans l'action,
elle prend pour sa part la moitié de la succession (2). Pourra-t-elle exiger de son frère la
collatio bonontm? Non esse paùem bona propria
con ferre cogendmn, dit Pap inien, nam el liber1
lates competere placiât.
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b. Le rapport n'est dû qu'autant que le bonorum possessor en venant à la s uccession cause ~ <o.- , :..t/ ~{.jt~j /
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un préjudice au wus. (L. 1. § 3. h . t.) C'est là ( ,. .__ dfi/
la s econde cond iti on nécessaire pour qu'il y
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ait Jieu à collatio. En voici quelques applica- /(',/.. tians :
Un père meurt intestat laissant quatre enfants, deux émancipés e t deux en puissance;
tous les quatre venant à la succession, chaque
(1) Toutefois l'émancipe institué héritier serait tenu de la
collatio si le père en avait fait une condition de l'institution.
(1. .1. Cod. 6. 20).
(2) Si dans la mème espèce, le testateur n'avait institué
son fils que pour moitié et qu'il eût, pour l'autre moitie,
institué un étranger, ce ne serait que pour cette moitié de
l'étranger que la querela annulerait les effets du testa.ment.
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émancipé sera tenu de partager ses biens avec
les sui. (L. 3 . § 3. h . t.) Mais la collatio ne
pourra être exigée dans les rapports de~ éma~
cipés entre eux, car si le rapport a é~e admis
servandœ œqualitatis inter fratres graliâ, cette
maxime n'est vraie qu'à l'égard de deux frères ,
dont l'un seul a été émanci.p6, ila ut si uftinque
emancipati sint, dit Pothier, cessante collatione,
devra-t-il la collatio à son frère? Non, dit d'abord Scévola, dans L . 10. h . t. , parce que sur ce
point le texte de l' édit du Préteur est form el ;
mais ce jurisconsulte s'empresse de revenir sur
sa première décision e t il en donne les motifs
suivants: Secl magis sentio, ut, quemaclmodum
pro parte l1œreùilatem relinel jltre eo, qiwd bonorum p ossessionem pe fete posset, ita et conferri ei
debeat; 1ûiq1te quum injuriam per bonoriim possessionem vatiatnr. Il semble donc résulter de
nullam Jwjus œqualitatis ralione1n haberi manifestum est.
Le de ciijus a institué pour ses héritiers un fils
en puissance et un étranger, et a omis son fils
émancipé. Si la part assignée au suus dans le testament est inférieure ou au plus égale à la moitié de la succession, !'émancipé qui aura obtenu
la ]Joss. bon . contta tab . prendra la moitié dupatrimoine paternel sans être tenu de partager avec
son frère ses biens personnels . Dans ce cas, en
effet, le motif qui a donn é naissance à la collatio
fait défaut et l'héritier sien ne devait pas pouvoir exiger le rapport de celui gràce auquel
il obtenait une part plus forte de l'hérédité.
( L. 1. § 4. b . t., L. 8. § 14. Dig. 37. 4.)
Mais quelle décision adopter dans l'espèce
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l'interprétation donnée par Scévola qu'en matière de collatio bonorum. 0n doit plutôt s'inspirer de l'esprit qui a dicté l'édit du Préteur que
du tex te littéral de cet édit. Cette opinion n'est
pas généralement admise par les auteurs : ainsi
Cujas qui adople sur la ques tion le sentiment
du jurisconsulte romain restreint la solut101f
donnée par Scévola à la seule hypothèse prévue par la loi ·10 : inlet frat res twn donmm collcttioni locus est, <J lrn m eodem jure ueniunt ad bo11a
paterna , non etiam si div erso jure(sur la L. 6.
Dig. de dot. coll. Jet à l'appui de son opinion
Cujas invoque les dispositions des lois 20, § 1,
de bon. poss. contra tab. 6 et 7. Dig . de dot. coll.,
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purement et simplement l a succession de son
père. Si l'émancipé obti7J1t cette bon. poE.:.l_
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mais ces tex tes et les raisons qui en découlent
·ne nous paraissent pas assez concluan ts pour foi(
re écarter la règle établie, et l'on pent, suirnnt
)
nous, poser en principe que toutes les fois que ( )
le fils émancip é Yena11t à la succession ~
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(a_,, •
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Lsecours du droit prétorien causera au sims un
.
préjudice, la COllatiO Sera clUe. (1).
~ / (<A <Quelles personnes doivent la collatio? S'il
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1
~lait s'en tenir an texte de l'édit, la collatio ne
<»..,.; ~ ,; (v-- o.;:~~ devrait s'appliquer qu'au !ils éman"i n P. c:: eul visé
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~ "~ par le Préteur ; mais cette obligation doit rece.(\ "
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1
,; ( l<V1.. , voir une plus grande extension ; il faut la faire
·,~' J~t,.
supporter par tous ceux qui sont ~ d e
!>i.. o. "' q •
par la loi prétol'ienn e; or il rés ulte de la théorie
0
!:)1 • L tl-"f \''~rétorienne s ur les s uccessions, que l'on doit
regarder comme héritiers siens non-seulement
ceux qui sont tels d'après la loi civile, mais
même « les héritiers à qui la loi ne dénie cette
» qualité que par s uite d'une copitis diminutio
» petite, moyenne ou grande, so ufferte par eux
>> ou par un de leurs ascendants, pourvu toute>> fois que les descendants dont il s'agit jouis » sent des droits civils. >> (2)
Ainsi on soumettra à la co llatio le fil s du de
cujus qui a été adopté et que son père naturel
G. 4 •
.....
r\"1l 1.
J.\
1
(1) La discussion qui s"éleve sur la loi 10 n'a plus sa raison
d'être si l'on admet avec le Président Favre que la fin de la
loi a été ajoutée par Tribonien. Mais cette interpolation est
peu probable, le Président Favre étant, comme l'on sait, l'adversaire ardent de Tribonien. 4 Quand il croit avoir surpris
Il le conseiller de Justinien en ftagrant délit d'interpolation
» il s'écrie avec indignation : Novum Triboniani {acinus / »
-
op . cit. : 36~
(.t) VERNET. Quclité di.ponible, 63.
Î ROPL•>NG,
-
17 -
a institué héritier (1 ). Si l'omission d'un autre
enfant donne ouverture à la (J OSS. bon. c. tab .
!'adopté peut ou demander celte poss. bon . ou
s'en tenir à la part qui lui a été assignée
dans le tes tament ; il n'y aura pas lieu à coUatio
dans ce dernier cas, mais elle sera obligatoire
dans le premier si la bon. poss. fait avoir à
l'adopté une part supérieure à celle qui lui a
été léguée. Et la loi 1. § '14 ajoute : non ipse
con ferre cogiltir, sed is qui eiim habet; en effet,
puisque l'enfant es t encore in f amiliâ adoptivd,
c'es t à dire al ieni jurùs, à la mort de son père
naturel la collatio sera due par ses ascendants
qui l'o nt en puissance et qui prendront sa part
dans l'hérédité.
Mais de quoi sera due la collatio? On ne peut
l'exiger de tous les biens composant le patrimoine personnel du père adoptif ; cet ascendant
n'est pas héritier et il n'a un droit que parce
qu'il tient sous sa puissance le véritable institué. Dans le silence des textes il faut dire qu'il
y aura à faire un e es tim ation des bie ns acquis
par l'enfant depuis on adop tion; ce sont ceuxlà qui auraient augmenté la succes ion du de
li) Dans la loi 1. § li, il ne peut éYidemment s'agir que
d'un adopté institué, puisque la loi, dans la suite, suppose que
1
'émanci pation donne une vocation personnelle à la succession . Or ceci n'a lieu que dans une succession ab intestat
(L. ~ . § 10 de hœr. ab. int.)
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cujus et c'est de
~8
/~ur
-
que la co llatio sera
due. Sur ce point Pothier fait observer avec
raison que l'obligation du rapport disparait si
l'enfant est émancipé par son père adoptif avant
de demander la bon. poss. : Ila 1·escriplo divorum
fratrum expressum est, à moins toutefois qu'il
n'y ait fraude.
A qui doit être faite la collatio ? « De l'idée
» même qui sert de base à l'obligation du rap>' port on conclut que le droit de l'exiger et
» d'en profiter n'appartient jamais qu'aux sui. »
( AccARlAs, dr. rom. L. 3. §§ 2 et 3, h. t. )
Mais i\ serait inexact de cr~ire que tout l~ éritier
sien a nécessairement dro tt à la collatw. Son
droit est subordonné à cette condition précédemment établie, qu'il y ait un préjudice à lui
causé par le concours de !'émancipé. (L. 1 § 5.
h. t .) His duntaxat confett emancipat.us, qui bus
aliquid ex bonis patemis aufert. Cette idée est
appliquée dans les lois 6. § 3. Dig. 37. 4. - 1.
pr. § 1. Dig. 37. 8, dont les espèces ont soulevé
'/~
de graves difficultés.
Un père de famille meurt laissant un fils
émancipé et des enfants issus de ce fils qu'il a
gardés sous sa puissance. Comment se règlera
1a succession ? Dans cette hypothèse la bon.
poss. accordée par le Préteur au fils émancipé
cause un préjudice aux sui, seuls appelés
d'après le droit civil, mais qui étant à un
-
..
19-,
degré plus éloigné que l'émancipé seront par
lui exclus de la s uccession. La difficulté ful
tranchée par un édit noiweaii que SalviusJulien ajouta à l'édit perpétuel ·: ('l) Ei (filio
emancipato) liberisque quos in ejusdem f amilid
habuit si acl eos hœreditas siw nomine pertinebit
bonorum possessio ejus partis datur quœ ad eum
pertineret si in potestale permansisset. Ainsi cette
disposition de l'édit appelle au partage de la
succession du de cujus le père en co ncours arnc
ses enfants ; !'émancipé prendra la moitié des
biens, et les enfants auron l l'autre moitié (2).
Hoc ediclwn œquissimwni est. ajoute la loi.if. § 1,
h . t. , ut ueqiw emancipatus solus veniat et excluda l
nepotes ùi potestate manentes, neque nepotes jure
(1) Le jour de son entrée en fonctions le Préteur publiait
l'edictum perpetuum dans lequel il consignait les principes de
son àdministration future ; les edicta perpetua e uccédant
d'année en année, les mêmes dispositions se reproduisaient
dans tous les édits ; lorsque le Préteur apportait dans son
édit une vue nouvelle, cette dispo ition s'appelait edictum
nouum.
(2) Sur l'édit de Salvius-Julien il y a une étude fort intéres_
sante à faire pour fixer la part afférente à chaque coheritier
dans le cas où !'éman cipé et ses enfants ont en concours avec
d'autres descendants du de cujus. La olution de ces differentes questions est toujour dominée par cette idée que
!'émancipé et ses enfants ne comptent j amais que pour une
seule personne à l'égard des autre' bonornm possessores. ( L. 5
§ 2. Dig. si tab . te1ta null. 37. 6.)
�- 20 -
potestatis objiciantur patri suo. Mais à q ui l'émancipé devra-t-il la collatio? A ceux-là seuls évidemment quibus aliquid aufert, c'es t-à-dire aux
héritiers siens, .puisqu'en obtenant la possession
de biens il ne fait tort qu'à ces derniers, illis
solis injuriam facit . (ULP. loi 1. § 13. Dig. 37. 8.)
La même règle ressort clairement ùes lois 3 §
6. Dig. 37. 6. , '1. § 18. Dig. 37. 8.
-
21 -
1
4- "<,"
. ')
De l'objet de la collatio.
« La collatio s'applique à tons les biens qui,
» sans l'émancipation, se trouveraient à l'épo» que de la mort du de cujus compris dans sa
» succession. »
Cette règle doit ê tre entendne d'une manière générale, et il n'y a à faire aucune distinction relative so it à l'origine des biens qui
composent le patrimoine du fils soumis à la
coUatio, soit à la manière dont ce fi ls en a acquis
la propriété.
Toutefois il est naturel que les biens ne soient
rapportés que sous la déduction des deltes qui
les grèvent au jour du décès : (ilius in bonis
( tt
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habere éenseli"r quod deducto œre alieno superest.
11
( L. 2. §1 .. ~ig. 37. 6., 15 Cod. de coll.) Si la dette 1<Jv.
.(~k·~ 1 :. ~
est con d1twnnelle elle n'est pas mise en compt 1' Mr 1 ~/ e' Vtfi,.~.i~ '
dans le calcul
du rapport, mais les sui donne 1--(,Vl.,,C>1:· •/ f ( C.."'" '1 ~
•
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.. 1
ront caution pour le cas où la condition vien 1·~ fa (' J fdrait à se réaliser . ( L. 6. Cod. 6. 20. )
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I . 'l\ ~ '• 1
L'obligation de la collatio ne peut porter sur
, · t,
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1
les biens de l'émancipé qui n'auraient point été l "1.: • H. T~'Jl1
acquis au de cujus s'il fùt resté sous sa puis- ~"'~"'c...I"
., 11" • A· ':
sance. Cette exception s'applique au peculium 4'i·...Mç,
~
castrense et quasi castrense (1). ( L. 1 § -15. Dig.~.,,.,~ ( ~ r,...
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SECTION Il.
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37. 6.)
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Il doit en ê tre de même de la dot que l'érnan\....A-- l l "'
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le mariage
dure encore ou
s'il. a été dissous par Y'(.,.../"'""
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le divorce ; dans le premier cas, en effet, la dol
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est spécialement affectée au..1: charges du maria- """ :;"~ !},..,. \ af1'
ge (2), (L. 56. § 1. Dig . 23. 3.) et dans le second ..w: le.
f"et-lt. <- (,.,....
elle n'est plus en la possession du mari.
e<- / '' ,, ()...... ,......
1 1
Mais cette solution sera-t-elle maintenue en 41 "''-\'--"" • y\"V'"'"""l
cas de prédécès de la femme? (3) Des auteurs 1•"' c... 'r~ l f { . (.
;l
r...l •.., -.. ..
(1) Dans la loi 1. § 15, les mots quasi castrense ont été ( Ct J
ajoutés par Tribonien ; il n'y avait point de pecule castrens \ ·
au temps d'Ulpien. On retrouve cette interpolation dans les
lois 1. §. 6. Dig. 36. 1. , 3. § 5. Dig. 37. 1., 7. § 6. Dig. 39. s.
(2) Ceci explique pourquoi le fils alieni JUris prélè•e la dot
de sa femme dans la succession de son père. (L. 20. § 2. Dig.
10. 2.)
(3) En général le mari, dans ce cas, gardait la dot. ( UPL.
Reg. de dot. '· 5.)
t•.......
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,...
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, .........
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22 -
ont soutenu qu'alors la dot devait être rapportée ;
le mariage est dissous et les biens dotaux n'ont
plus un: caractère spécial qui les distingue des
autres biens de l'éman cipé (1). Telle n'était pas
l'opinion d'Ulpien qui décide dans la L. 1. § 20,
h . t. que la collatio ne tloit pas s 'appliquer à la
dot : filius emancipatus, si dotem habeat ab u x 01·e
acceptam, hoc minùs confert etsi antè uxor decesserit; et le jurisconsulte Julien rapprochant ce
- 23 -
ou promis de donner dignitatis nomine. ( L . 1. §
16. h . t. )
( L. 3. § 4 lL t. )
En général la collatio s'applique aux ac tions
comme aux autres biens de !'émancipé. Il n'y a
d'exception à ce prin cipe qu'à l'égard des actions qui ne se trans mettaient pas aux héritiers.
(ULP. L. t . §2t ., Dig . h . t.) Telles étaient l'action
appartenant à l'adstipulator, dans l' ancien droit
( G. IV. 113,) l'action d' injures quœ magis vindiclœ quam pecuniœ habet pe1·sewlionem ( L. 2. § 4.
h. t.) et encore la querela ino/ficiosi lestamenti.
/ I nsl. IL 18.)
L'éman cipé é tait également dispensé de rapporter les biens que so n père lui avait donn és
(11 M. DE ÜAQUER AY.
RechPrches historiques snr /p Rapport.
r.
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C)
cas du prédécès de la femme de celui où Je
mari e t alieni jttl'is, dit également : sicut is qui
in potestate est dotem u x oris p1'œcipit , ila emancipatus quoque, q'l.lasi prœcipiat retinere debet.
r
.
.
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Enfin la collalio ne s'appliquait pas aux cho- -7 1 7 ~
ses acquises par !'émancipé depuis la mor~ ~e
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son père. ( L. 1?. Cod. 6. 20 ). Cet~e règl~ faisait~ ,., fc. ~
•
naître, en pratique, de graves d1fficultes pour
'.)"\........; l "' ~
fix€r l' époque précise de l'acquisition ( Cf. L. 2~ ><-.. ... 9/1/'-'I
§ 3., 1. § 2'1. h . t ., 19. § 3. Dig. 49. 17.)
a. /;___ r c...-- -· ,...
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SECTION III.
,.,_ ( uu..'
C01nnienl s' effectir,e la collatio ?
A1tl re, aut cautione fa cienda collatio est. (ULP.
L. 1. § 11 , h. t.) Le rapport avait lieu re quand
!'émancipé versait réellement ses biens à la
masse à partager ; il s'effectuait cailtione quand
le fil s donnait caution de rapporter. D'ailleur
l'édit du Pré teur n 'exigeait que le rapport cœutione : Jubet pl'œtor ila fi.eri collationem, ut rectè
caveatul'. ( L. 1. § 9. h . t.) Mais !'émancipé qui
partage ses biens avec les sui satisfait aussi bien
à l'édit que celui. qui donne caution ; cette atLfaction peut cependant ne pas être complète,
car le fils soumis à rapport peut avoir des bien_
inconnus contre lesquels, une fois le partage
11
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/.
~}
-
-
obtenu la possessio bonorum ne fournit pas caution ? On dis tingue s uivant qu'il y a de sa part
contumacia ou inopia : s'il est de mauvaise foi ,
contumax , la bon. poss. est considérée comme
non avenue el les actions héréditaires lui sont
r efusées; ( L. 3. pr. §s 2, 8. h. t. - L. 11._ Cod.
6. 20. ) mais il pourra recouvrer ses droits en
revenant s ur son refus de donner caution. (L. 8
Dig. 37. 6. N. obst. L. 75 Dig. 50. ·17. ) Si au contraire il épro uve des difficultés à trouver de
fidéjusseurs, inops, Paul dan L. 2. ~ 9. ùit_ qu'on
ne doit point le dessaisir de la possess10n de
biens, mais qu'il faut attendre qu'il puisse tro~
ver des garants (1). Cette déchéance ne serait
même pas encourue par l'émancipé s' il se trouvait dans l'impossibilité absolue de donner ca~
tion. Dans ce cas curalor portionis ejus consti-
consommé, les sui ne pourraient exercer aucun
recours. Cet inconvénient es t nettement signalé
dans la L. ·1 § 11. h. t.
Il était généralement admis que cette caution
pouvait être valablement donnée par des gages
ou des fidéjusseurs . ( L. 1 § 9. h. t. 7 Dig. 46. 5.)
L'e-xécution de la collatio était-elle une condition préalable de la formation de la demande
en possession de biens ou n'en était-ell e qu'une
charge ? La plupart des textes reconnaissent que
le Préteur en exigeant la caution a simplemen t
entendu tracer la marche à s uivre pour procéder au partage d'une succession : prœtor non
ri
sub conditione collationis ùonorum possessionem
contrà tabulas promittit, sed demonstrat quid data
bonorum possessione fieri oportet. ( L . 3. pr. h. t. )
Et il ne pouvait en être autrement, car si on
avait subordonné la demande en possession de
biens à l'exécution de cette oblicra tion le fils
0
'
aurait pu n'être pas en état de satisfaire immédiatement à l'édit, et s'il était mort dans cet
intervalle il n'aurait transmis aucun droit à ses
héritiers. Paul dans ses S entences n'a pas prévu
( ce d~n ger : Emancipati liber·i prœteriti, si velint
se miscerepaternœ heredi tati, et curn his qui in po-
.}.
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testate remanserint communis patris dividere hœreditatem antequam bonorum possessionem petant
de conferendo cavere _eu~ ~atisdat_ione debebun t.
(Sent. V. 9. § 4.) - Quid s i 1 émancipé après avoir
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auss i le cas où il y a dans la suc: ut tamen ~e
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detur, ipsiqtu caveant in medium collaturos. St cantum eis ,utrit.
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W La même loi prevoit
ces~ion des choses susceptibles de se détériorer
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tuitur , apucl quem. r efecta pecunia collocetur; ut
tune demum recipiat qiwd ?·edaclum est, quum
bona p1·opria contuleril. (L. 1 .. 10., 2 § 9. h. t.)
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25 -
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- 26 -
CHAPITRE
II.
DE LA. COLL.tl.TIO DOTIS
impériales pour devenir sous Justinien la seule
base de la nouvelle collatio .
SECTION l.
Dans quels cas a lieu la collatio dotis ?
Qua~d la fùle émancipée venait, par le secours
du Preteur, au partage de la succession de son
pè~·e, il était ~out naturel. et conforme à l'édit
quelle . corn.prit dans la collatio la dot que son
pè1~e lm a-rait donnée; de même la fille sua qui
~tait restée sous la puissance de son père devait
ega1e1?ent r.apporter la dot constituée par le
d.e cu7us, puisqu'à l'égard des autres héritiers
siens, cette dot lui faisai l une situation analogue à celle des émancipés.
Il est utile de remarquer que dans ce dernier
cas l~ collatio était due soit que la dot eût été
constituée par Je père (dot profectice) soit par
t~ut autre as ~endant ou é lranger (dot adven tice).
Si la dot était profecti ce' ce n'était plus d'un
apport ~u'il s 'agissait mais bien d'un véritable
rapport a la succession du cons tituant puisque
la fille faisait rentrer dans le patrimoin~ du père
des ch.oses qu'il en avait dis traites. Cette idée
apparait pour la première fois dans la théo .
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d
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romame e la collatio, elle ira toujours en se
développant sous l'influence des constitutions
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Filiœ dolem in medium ila demum confe1're coguntur si vel abinteslato succedant vel contr a tabulas p etant. (L. 4. Cod . 6. 20.) Ainsi la collatio dotis
a lieu soit que la nue succède ab i ntestat s oit
qu'elle n' arrive à la succession que par le secours du Pré te ur. A l'ori gine l'édit n'avait pas
exigé le rapport lorsqu e la fill e sua succédait
jure civili . Ce point a é té é tabli p ar un rescrit
de l'empereur Antonin où on lit : Etiam eam
quœ non p etierit bonorum J)Ossessionem ad co llationem dotis p er arbitriiim fami liœ erciscundœ
posse compelli. ( L . 1. pr. Dig . de dot. coll. ) Le père
pouvait d'ailleurs dis penser sa fille de la collatio.
(L. 39, § 1 Dig . 10, 2.)
Mais la fille instituée héritière dans le tes tament de son père n'e t point soumi e au r apport
de la dot que celui-ci lui a co ns tituée niû
pater hoc ipsum specialite1· designaverit. ( L. 7.
Cod. 6 . 20.) On trouve une application de cette
�-cis -
-
idée dans la L. 35. § 2. Dig. 10. 2. fani. ercis. dont
voici l'espèce : Un père avait donné en dot à sa
fille prœdia des fonds de terre en stipulant que
les revenus en seraient payés à so n gendre ; à
la mort du constituant la fi lle, qui é tait institu ée
héritière par égales portions avec ses frères,
éleva la prétention de retenir par préciput ces
fonds de terre sur la succession de s on père.
Papinien fut consulté et il répondit: justam causam r etinendœ possessionis habere filiarn, quoniam pater prœdia, de quibus quœrebatur, dotis
esse voluit et matrimoni·u m post niortem patris
steterat.
De même, il y aurait li eu à dispense de rapport s i la fille dotée renonçait à la succe~sion du
consti tuant. (L. 9. Dig. de dot. coll.) Tryphoninus
qui nous rapporte cette décision nous apprend
qu'on n:avait pas toujours été unanime s ur
cette ques tion ; la rais on de douter provenait
de ce qu'à l'origine la dot ne se distinguait pas
encore nettement du patrimoine du constituant·
il était donc vraisemblable qu'en renonçant
ses droits sur ce patrimoine la fille entendait
par cela même renoncer à la dot. C'est !'Empereur Marc-Aurèle qui dans un rescrit décida qu'à
l'avenir la fille qui s'abs tiendrait de l'hérédité serait dispensée de rapporter sa dot: Divus Marcus
à
rescripsit non compelli abstinentem se ab hœreclitate patris. Il résulte également de ce rescrit
29 -
que si la dot n'a été que promise, la fille pourra
après la mort du cons tituant en poursuivre le
paiement contre ses héritiers .
SECTION Il.
Qiœlles personnes doi venl la collatio
dotis, et à qui elle est due.
Le rapport de la dot doit être fait par la fille
soit qu'elle vienne à la s uccession comme hœres
sua, soit qu'étant émancipée elle invoque le
bénéfice de la bo n. possessio. Rappelons qu'il n 'y
a d'exception au principe gé néral de la collatio
emancipati que dans le premier cas .
Cette collatio est due aux héritiers siens qui
sont restés en puissance e l qui soufTrent du
concours de la fille dotée. (L. '1. f;~ 2, 4 Dig. de
dot. coll.) On doit même reconn aitre qu'à raison
des motifs s péciaux qui ont assuj etti au rappor t
la dot donn ée ù la fille, la collatio profitera aux
frères éman cipés quand la dot sera profectice.
Cette question trè discutée dans le droit classique a été décidée dans ce en par une constitution de Gordien. (L. 4. Cod . 6. 20.)
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-
30 -
SECTION 111.
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textes lui reconnaissaient ce droit lorsqu'elle était
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<n;<-V,
Dans le premier chapitre de cette thèse nous
avons s ignalé le progrès que fit faire à la théorie de la collatio la législation du Bas-E:npire.
Celte législation, so us l'empire de laquelle les
traditions et les préjug6s du vieux droit quiritaire ont perdu Lous les jour de leur prestige,
s'est appliquée à développer dans le régime s uccessoral l'idée d'une certaine égalité à établir
entre les enfa nts. C'es t cette idée, empruntée à
la collatio clotis, s ur laquelle les constitutions
impériales vont baser tou tes leurs réformes et
qui, en attén uant les différences qui exi laient
entre les enfant émancipé et ceux en pui sance, fera <ii paraitre l'ancienne collatio emancipati et ùonnera naissance à une nouvelle
.rui juri$ ou qu'étant in potestate, la dot lui avait été constituée par un autre ascendant que le père. V' '·~ ~- \ ( ~ c; <.c;.c.c.. ,_.----.
("JM!t..4l·~- f 11,-- L 11 ~·
(I
tll~( ~1--11
;,
' ?,'~)v-" ~ ÎlROfrDu CBAS~~Mi:iRi /..;, 2'-~
Les textes ont é tabli une distinction :
Si par suite de la mort du mari, ou autrement, la fille, lors du décès de son père, a entre
les mains les biens composant sa dot, la collatio
s'en fera sans difftculté ; si au contraire à cette
époque le mariage dure encore, le rapport consiste seulement en ce que la fille prend d'autant
moins sur la s uccession du cons tituant (L. 5.
Cod. 6. 20. - 73. § 1. Dig. 23, 3.) Dans les deux
cas la mise en demeure fera courir les intérêts.
(L. 5. § 1. Dig. de dot. coll.)
Mais la femme dont le mari es t devenu insolvable doit-elle néanmoins la collatio dotis?
D'après la Novelle 97 le rapport était dû si la
perte de la dot était imputable à la femme;
ainsi il y avait faute de sa part quand pouvant
agir seule (1) elle n'avait pas exigé la res titution,
durantematrimonio. On ne pouvait a u contraire
V'i.
soumettre la femme au rapport lorsqu'fe l v
n'avait rien à se reprocher ; dans ce cas 1
Novelle décide que la fille sera libérée en ra ;1 portant l'ac tion qu'elle a contre la success·
de son mari (1). (' , .7,9,7, ,t.?-.. / •u~1< ?t/.'~ ..,~ ' e........ """"
t ri( .. ~t ~ ,} u-. ""'-- '(, ~ ' I PJ~4 h 7 ,.. /c J,r._
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Co1n1nent se fait la collatio dotis.
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31 -
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(1) Le Code civil a reproduit dans l'art. 1573 la disposition de la Novelle 97.
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-
-
32 -
ins titution qui n'au ra que le nom de commun
avec celle introd uite par le Préteur.
Nous examinerons séparément le droit du
Code et celui des Novelles.
LE CODE .
!
Le Code renferme sur la théorie de la collatio
plusieurs constitu tions; nous les étudierons
d'après l'ordre chronologique.
La première cons titution est relative à la
co llatio dotis; elle es t de Gordien. (L. 4. Cod.
6. 20.) Elle décide que le rapport de la dot profitera aux frères émancipés quand la dot sera
profectice: His etenim qui in /amilid clefuncti non
sunt, profectitiam lantwnmodo dotem posl varias
Prudentium opiniones conferri placuit.
D'après une co ns titution de Théodose les
descendan ts par les filles qui n'avaient jure
civili aut prœtorio aucun dro it à la succession
de leur ascendant ma ternel, y étaient appelés au
même rang que les descendants par les mâles
(L. 1. Cocl. Th. 5. 1. Inst. de hœrecl. ab. inlest. §15.)
Mais pour que leur conco urs ne préjudiciât
point aux en fants en puissance, il fallut exiger
d'eux le rapport de la dot donnée à leur mère
'
,
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,f"' ' Cl t
33 -
c'es t ce qu'établit la loi 5. Cocl. de leg. hœred. 3. 1.
Les plus importantes modifications ont été
introd uites par une constitution ùe !'Empereur
Léon de l'an née 4û7. ( L. 17. Cod. de coll.) Elle
dis pose en premier lieu que la collaUo sera due
dans la successio n des ascendants maternels.
Cette décis ion découle de cette idée que l'ascen. dant qui a fa it une donation n'a pas eu l'intention d'avantager le donataire au détriment des
autres enfants. Il y a là une application de
l'idée d'égalité qui s'affirme de plus en plus.
D'après le même texte, la donation ante nuptias
faite au fils dena être rapportée, (cette donation n'est-elle pa une dot pour le fils?) et le
rapport aura lieu entre tous les enfants sui vel
alieni ju,ris. Ains i, quant au rapport, la constitution de !'Empereur Léon a assimilé les enfants
émancipés à ceux en puissance et fait disparaitre les effets de l'émancipation ; ce point de
droit sera généralisé par Justinien dans la
Novelle 118 et application en era faite en matière de succession.
Les deux dernières constitutions du Code sont
de Justinien ; elles sont reproduites dans les
lois 20, 21, h. t. et sont relatirns aux biens que
comprend la collatio.
D'après la loi 20, sont rapportables tous les
biens que le descendant successible émancipé
ou resté en puissance a reçus du défunt, et qui
3
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-
3• -
régulièrement s'imputent sur la quarle légitime.
(L. 6, 8, § 9. Cod. de inoff. test.) Ains i on soumettra à la collatio la dot, la donation p1·opter
ni"ptias, celle faite ad milfüam emendam, c'està-dire pour subvenir à l'achat d'un grade militaire. (L. 29, 30, Cod. de ino/f. test.) Mais la réciproque ne serait pas exacte et il y a des libéralités qui ne s'imputent pas s ur la quarte légitime, et qui pourtant se rapportent, et d'autres
qui ne se rapportent pas, bien qu'elles s'imputent sur la légitime ; tels sont les legs et Les
donations à cause de mort. On en donne pour
raison que la collatio ne s'applique pas aux biens
acquis après la mort du de ciijus.
La collatio s'applique-t-elle à la donatio simplex
faite par l'ascendant de cujus à son descendant
en puissance? (1) Le § 1 de la loi 20 l'exige
dans deux cas : quand le descendant donataire
oblige ses frères et sœurs cohéritiers à rapporter la donation ante niiptias ou la dot qu'ils
détiennent , et lorsque la collatio a été expressément stipulée par l'ascendant dans l'acte de
la donation. (L. 25, pr. Dig. 5. 2.)
Enfin de la loi 2-1, Cod. h. t. il résulte que la
(1) Une pareille donation faite par le pere n'était pas
valable dans l'ancien droit. (L. 1. pr . Dig. prodonato .) On finit
par l'autoriser à la condition que le père mourrait 1i0n
mutata voluntate. (PAUL, Sent. 5. 41. § 3., L . ~8 Cod. 3. 36., L. 25
Coà. 5. 16 .)
•
35 -
collatio ne pourra être exigée toutes les fois qu'il
s'agira de biens qui échappent à l'acquisition du
père ; ainsi on n'y soumettra point les bona
castrensia ou quasi castrensia. IL y avait doute
pour les biens adventices: Jus tinien les regarde
en effet comm e étrangers à la collatio, (L. 6. § 2.
Cocl. 6. 61.) et cependan t on lit dans les Basiliques : P eculium profectitium, vel ususfructu s adventitiorum conferlur.
LES NOVELLES.
Trois Novelles de Justinien se rattachent à la
théorie de la collalio : ce sont les Novelles 18,
97 et 118.
1°. NovELLE 18. - Dans son chapitre VI cette
Novelle, dont le but est de régler la légitime des
enfants, dispose que sive qui,s decedat intestatus,
sive testalus ( quoniam incel'ltlm est, oblitus ne
eorum, quœ data sunt, an perl11rbationem mortis
pressus menlionem illius rei non fecerit) omnino
collatio œqitaliler fiat, ttti jam constittdmn est nisi
ille expresse disposuerit, se collationem fieri nolle.
Ains i désormais la collatio sera due dans toutes les h érédités testamentaires ou ab intestat, nisi
ille expresse dispositerit, à moins que le de cujus
�-
r.
36 -
-
n'en ait autre'n10n t décidé. Jnstinien prenant pour
base de la collatio l'intention présum6e du testateur cette solution se comprend aisé ment; et
on ;e peut pas dire qu'elle soit en contradiction
avec l'idée d'égalité que les cons li tutions impériales ont constamment développée, puisque la
Novelle en parlant d'héritiers instilués s uppose
évidemment que ce sont ceux qui e n l'absence
de testament auraient recueilli ab intestat la succession du de cujus. Quelle raison aurait, en
effet , le législateur de vouloir établir l'égalité
entre ceux qui sont héritiers par la volo nté du
testateur? (1)
20. NOYELLE 97. - Cette Novelle règle le cas du
rapport de la dot qui doit être effec tué par la
femme dont le mari est insolvable. Nous l'avo ns
étudiée en détail à propos de la co llatio dotis.
30. NovELLE 118. -Dans celle Novelle Jus tinien
établit sur de nouvelles bases la dévolution des
successions ab intestat ; « Désormais le degré
de l'affection entre parents règle l'ordre des
successibles, ce n'est plus le lien de la puissance
civile qui sera compLé, c'es tle lien du sang». (2)
Aussi les premiers appelés son t-ils les descendants, sans distinguer suivant qu'ils sont
(1) Cette interprêtation de la 'ovelle 18 est repoussée par
Levru;seur dans son traité de la Quotité disponible, page 1 H .
(i ) TROPLONO. Inff,. du Chri".st. p. 347.
•
37 -
émancipés ou en puissance, nés ex filio ou ex
filiâ .
En l'état de ce nouveau régime successoral,
que devient la collatio emancipati? N'est-elle pas
de plein droit supprimée par la Nov elle? Une distinction nous parait nécessaire: si les enfants
viennent à la succession de leur père ab intestat, il
es t éviden t que l'ancienne collatio n'a plus de raison d'être; elle repose en effet sur une fiction que
la Novelle a fait disparaitre en assimilant le fils
émancipé au fils en puissance. Mais si le père
a fait un testament, e t que l'émancipé y soit
omis, la collatio emancipali doit encore, à notre
avis, recernir application, car la Novelle disposant pour le seul cas d'une s uccession ab intestat, (son titre en est une preuve manifeste :
Constitiitio quœ jiwci adgnatormn tolW, et successiones ab intestato definit) la théorie de la bonorum possessio contra tabulas demeure entière.
Cetle opinion provoque, il est vrai, une contradiction fl agrante entre l'idée fondamentale de la
Novelle et les principes de la bon. possessio c. tabulas ; mais en l'absence d'une disposition expresse des textes, il est plus sûr de se prononcer pour le maintien du droit antérieur. Le fil
émancipé viendra donc à la uccession de son
père par le secours de la bon. possessio et les
enfants en puissance pourront encore exiger de
lui la collatio bonomm .
�-
39 -
DROIT FRANCAIS
0
ANCIEN DROIT
OU RAPPORT A SUCCESSION (•)
I.
Pays de droit éc rit.
1
Les provinces de droit écrit ont emprunté au
Code de Justinien ses règles sur le rapport à
succession. «Elles s'y sont conformées, dit
Merlin, (Répert., V. Rapport,§ 1. n° 2), sans difficulté ni 1·estriction, et actuellement encore elles
ne connaissent point d'autres lois sur le rapport
que celles qu'elles y ont puisées ». Il nous
(1) On le désignait ainsi dans l'ancien droit, pour le
distinguer du Rapport à loi qui était un acte de dessaisint
ou devest.
I<.
�-
s uffira donc de renvoyer pour l'étude de cette
matière dans les pays de droit écrit, à la partie
de ce travail qui traite de la législation romaine
sous Justinien.
II.
Pays de cout,w nes.
<<Sur la matière du rapport, nos coutumes, dit
Lebrun, sont bien opposées les unes aux autres. »
Les règles, en efîe t, variaient à l'infini, et l'on
n'aurait jamais fini si l'on voulait rapporter
toutes leurs dispositions s ur ce sujet. Aussi
sans entrer dans un exposé qui ne serait d'aucun intérêt, nous contenterons-nous de donner
une idée générale des différents sys tèmes qui
se partageaient la France coutumière au suj et
des r apports.
Cette théorie reposait dans l'ancien droit sur
deux règles d'origine différ ente :
1° Règle du rapport.
2° Règle de l'in compatibilité des qu alités d' héritier et légataire (1).
A la vérité le rapport est de droit commun, dans les
» pays coutumiers, mais on ne laisse pas de trouver un assez
( 1)
1:
-
(0 -
4t -
La règle du rapport est un e règle romaine.
Les mêmes raisons qui avaient fait introduire le
rappor t chez les Romains, l'ont fait adopter par
quelques coutumes. Une de ces raisons tirée
'
de l'équité naturelle, tend à maintenir la paix
dans les familles en conservant l'égalité entre
tous les enfants.
Ces principes devaient restreindre l'obliga tion
du rapport à la seule ligne directe descendante (1). Auss i à l'excep tion de quelques coutumes cette règle ne s'appliquait pas à la ligne
collatérale. (LoYSEL, I nst. cout. Liv. u , tit. iv,
règle .121 .)
Ains i quelque donation qu'un des héritiers
du défun t eù t reçue de son vivan t, il ne devrait
pas la rapporter, parce que les biens d'un défunt
n'étaient déférés à ses collatéraux que par une
espèce de bienfa it volontaire; ils sont réputés
étrangers, et ils ne peuvent contester le8 dispos itions entre vifs faites à l'un deux. (BRODEA U
s ur LOUET, lettre D, som . '17, non. 10.)
La ques tion faisait doute, au contraire, pour
la ligne directe ascendante. Fenière croit qu'il
» grand nombre de coutumes dont les unes le rejettent for-
» mellement, et les autres ne l'ndoptent qu'avec differente
11 modifications. u (l\IsRL.lN, Rép. Y. Happort. § t n• '!.)
( 1) 11 Nos anciens nvaient pensé que l"egalité n'etait ,·eritablemen t essentielle ù maintenir qu ·entre les enfants. o ( DllMOL, Suce. v. 57 .)
i>
�-
ne peut s'agir de rapport ici, car le motif essentiel fait défaut, puisque la s uccessio n de leurs
enfants es t une succession à laquelle ils ne
devaient pas s'attendre et qui ne leur échoit que
turbato mortalitatis ordine. (FERRIÈRE, sur l'article 301 . Cout. Paris. )
La loi de l'incompatibilité des qualités d'héritier et de léga taire es t d'origine nationale,
c'est une r ègle essentiellement coutumière et
formulée par la Cout. de Paris de la manière
suivante. « Aucun ne peut être héritier et légataire d'un défunt ensemble. » (Art. 300. V. aussi
Cout. d' Orléans, art. 288.) - On ne pouvait donc
pas venir à une succession comme héritier et
comme légataire. Ces deux qualités ne pouvaient
s'asseoir sur la même tête ; il y avait incompatibilité.
Il n'est pas aisé de déterminer l'origine exacte
de cette règle. Lebrun (Suce. m , chap. 7.) rapporte qu'elle avait été introduite pour maintenir
les p1'opres dans chacune des lignes. Il fallait
donc empêcher que l'héritier des propres d'une
ligne pût être légataire de ceux de l'autre :
«.... Que de tels prélegs, dit-il, qui se feraient
>) bien plus communément que des donations
» entre vifs, ruineraient e ntièrement cette des ti» nation et cette affectation des propres à leur
» ligne ; au défaut des raisons et du motif du
» rapport, l'on a eu recours à l'incompatibilité
43 -
» des qualités d'héritier et de légataire .... ».
Cette explication paraît douteuse, et Lebrun
lui-même finit presque par en convenir quand
il se rappelle que les réserves coutumières
suffisaient bien à maintenir l'affectation des
propres à chaque ligne; « et tel était en effet partout le contre-fort de cet ancien établissement
coutumier.» (DEMOL. Suce. V. 176.) Suivant Ferrière, cette in compatibilité serait toute naturelle : « C'est le titre universel d'héritier qui
» empêche celui de légataire, puisque autrement
» le légataire serait créancier de lui-même, c'est» à-dire qu'il serait tout à la fois créancier et débi» teur. » (Sur l'art. 300, Cout. Patis.) La raison
est aussi vicieuse que celle de Lebrun, et Pothier
l'indique s uffisamment en disant que si cette
incompatibilité existe pour la portion à laquelle
le légataire est appelé en même temps comme
héritier, elle n'existe nullemen t pour les portions
auxquelles ses cohéritiers seront appelés, lega1·i
a semetipso non potes/, a cohœrede potest.
La meilleure explication est donnée par Pothier : « Cette disposition a pour settl fondement
» l'in clination de notre droit fran çais à conserver
>) l'égalité entre les héritiers, comme un moyen
>) de conserver la paix el la concorde des familles
» et d'en exclure les jalousies auxquelles donne» raient lieu les avantages que l'on ferait à l'un
» des héritiers par dessus les autres. Il était
�-
» d'autant plus imp~rlant de maintenir cette éga>> lité à l'égard d'hommes guerriers el féroces tels
»qu'étaient nos ancêtres plus susceptibles que
» d'autres de jalousie, et toujours prêts à en
>> venir aux mains et aux meurtres pour les moin» dres sujets. » (Siicc. ch .1v. art. 3. §2). Et Demolombe, commentant ce passage de Pothier, ajoute
.
que la préférence qui résultait d'un prélegs était
naturellement plus blessante et devait dès lors
susciter plus de jalousies que celle qu'engendrait un don entre-vifs. oilà donc pourquoi
l'on a voulu voir une incompatibilité entre les
deux qualités d'héritier et de légataire. Cette
explication, reproduite in extenso par Bourjon,
est en effet la plus vraisemblab le et surtout la
plus conforme à l'esprit des coutumes (1).
Cette loi de l'incompatiblité avait pour conséquence directe de mettre le successible en
demeure d'opter entre son Litre d'héritier et sa
qualité de légataire. Arrivait-il comme héritier
ab intestat, sa part ne pouvait être plus forte que
celle ùe ses cohéritiers. Préférait-il rester légataire, il prenait la part qui lui était assignée,
(t ) L'explication de MM . Aubry et Rau (sur Zacharire) est
toute germanique : ils rattachent cette règle au système de
la copropriété des familles, condominium, et la déduisent de
ce principe que l'un des communistes ne peut s'enrichir aux
dépens des autres. (AUBRY et fü.u. v. § 298 et§ 305.)
.[.
l
\5 -
sauf l'application des lois sur la légitime et les
réserves coutumières.
Rappelons enfin que ces deux règles, base de
la théorie contumière sur le rapport, n'ont trait
qu'à la succession ob intestat . Ce principe est
écrit dans un article de Laurière (sur Loysel)
duquel il résulte que « quand l'homme, en exécution des lois mêmes, dispose de ses biens et
de ses successions, soit par des legs universel
ou particuliers, par ùes institutions con tractuelles, ou des donations entre-vifs, il peut alors
accumuler les différents tilres, comme il lui
plait, et faire un enfan t clonalaire entre-Yifs et
légataire universel, ou donataire entre-vifs et
héritier contractuel, ou enfin héritier contractuel et légataire uniYer el, et le autres enfants
au préjudice de qui les avantages sont fait ,
n'ont que leur légitime à Llemantler. » ( LAURlÈRE,
Des Test. texte 10).
Après avoir exposé les règles fondamentales
du rapport à succession dan les pay de coutumes, nous indiquerons le principaux systèmes c.les coutumes sur le rapport, et pour que
cet exposé puisse nous être util e clans l'é tude
�-
46 -
du droit actuel , nous nous placerons sous l'empire des coutumes de Pari et d'Orléan s.
Priricipaux systènies des coutu11ies
siw le Rapport.
Lebrun , dans son Traité des successions développe les règles de on.:e gen res de coutumes
différentes. Nous nons bornerons, dans cette
étude, à citer les di spos itions les plus importantes que l'on peut cons idérer comme formant
le droit commun des provinces coutumières .
Coutumes d'égalité parfttile (1). Sous l'empire
de ces coutumes, point de dispense de rapport.
Les enfants devaient rapporter tout ce qu'ils
avaient reçu de leur ascendant, e t la renonciation à la s uccession ne les dispensait nullement
de cette obli gation : « P usonne coutiimière ne
:o peut directement ou indirectemen t, par con» trat de donatiou, encore que ce fût en faveur
» de mariage, vendition , arrentement, échange
» ou autrement, faire la condition d'un de ses
(1) Ces Coutumes ét aient celles d'A nj ou (art. 250 et 33.l);
Maine {art. 3}6) ; Touraine (art. 309). Dunois (art. 6i ). et
Lodunois, (ch. xx1x . art. 12).
-
47 -
» héritiers meilleure ou pire que l'aulre » (1).
Cela s'appelait dans la Flandre fl amande faire
enfant chéri ou de p rédilection. (Coutume d'Ostende.)
Nous trouvons donc ici le type réel du don
en avancement d'hoirie, e t quelle que fût la
donation faite par un ascendant, cette donation
se transformait forcément, sous l'empire de ces
coutumes, en don e n avancement d'hoirie· ce
carac tère ressort c lairement d'un passage ' de
Basnage : « La co utum e, y es t-il dit, a ajouté que
>> toutes donations fa ites par les père et mère
» sont réputées arnncemen t d'ho irie, de sorte
» que tous ce ùons étan t des partages an tici" pés de leur s nccession, les enfan ts ne les peu)) vent pas retenir, p uisqu'à l'égard de leur
» frères et sœurs, ils ne les peu\'ent posséder
» que comme hér itiers et comme aYancés en la
>l s uccession, e t par ce moyen, soit qu'ils renon» cenl 011 qii'ils viennen t à la succession, le
>) rapport de ce qu'ils ont eu es t toujours néces>) saire et forcé. » Demolombe nous fai t remarquer que ces coutume étaien t, en tre toutes les
{1) Persvnne coutumière, disent ces coutumes; donc la disposition n'était pas generale, et ne liait que les roturiers.
Sur ce point, il serait intères ant de rechercher quel a été
dans ces coutumes jusqu'à la publication de la Loi du 17
nivôse an II l'effet de !"abolition de la noblesse prononcée
par la loi du 19 j uin ~ 790. - Y\M BRLIN. loc. cit. V. Douaire
�-
autres, les plus conformes au génie de notre
vieux droit national qui exigeail en effe t l'égalité
la plus parfaite entre les enfants .
Coutumes de ptécipii,t. - Celles-ci admettaient
la dispense de rapport (Nivernais, Berry, Bourbonnais), non seulement à l'égard des héritiers
renouçants, mais même en faveur de ceux qui
venaient util ement à la s uccession . Nous passons
sous silen ce quelques difficultés de détail relatives surtout à la qualité des dons, qualilé qui
influait sur la dispense; ne traitan t la question
qu'au point ùe Yue des principes généraux, nous
mentionnerons en lerminanl quelque coutumes
tout-à-fait exceptionnelles « qui s'opposaien t
>> an rapport, même dans le cas où les dons
)) avaient été faits expressémen t en avancement
>) d'hoirie.» (1) (DE~fOL.) Artoi s, art. '18; Go uvernance de Douai, art. 48; Valenciennes, art . 107 ;
(V. GUY-COQUILLE. Chap. XXV IT , art. 7.)
Coutumes de simple égalilé. - Parmi ces coutumes, on compte celles de Paris et d'Orléans.
Sous l'empire de ces coutumes, qui étaient de
beaucoup les plus nombreuses, l' héritier donataire ne pouYait être dispensé du rapport (2),
(t ) Merlin avait jugé la disposition tellement exceptionnelle, qu'il fait de ces coutumes une classe à part dans son
énumération. - (MERL. Ré.pcrt. v. Rapport,§ I. )
(2) a Père et roere ne peuvent par donation faite entre-
49 -
mais il pouvait «s'abstenir de l'hérédité en s'en
» tenant à son don.»
De même dans l'art. 1, rubr. 20, de la coutume de Bergues s l Winock c< l'enfan t ou les
>> enfants don ataires du père ou de la mère ou
» de l' un deux, en avancement de mariage ou
>> autrement, peu t, avec la donation, s'abstenir
)) de la s uccession du donateur si bon lui sem>> ble. >> Il est aisé de comprendre que rien n'est
plus facile à un père dans ces coutumes. que
d'éluder la défen e qui lui est faite de déroaer
0
au rapport. Il lui suffil de léguer à un de ses
fils, déjà donataire entre-,·ifs, une part du disponible assez grande pour balancer celle que
les cohéritiers prendront dans toute la masse
de la succession. Le même but pourra être
atteint «s i la seule part héréditaire n'excède pas
>> ce dont il es t permi.s de 1lisposer par testa\) ment, bien qu'elle l'excède jointe aYec la do» nation. >> ( LEBRUN.) Le don en aYancement
d'hoirie changeait donc, sous les coutume de
simple éga1ité, de caractère, e t se transformait
, vifs, par testament et ordonnance de dernière volonté ou
•autrement, en manière quelconque, a\·antagerleurs enf~nts
• venant à leur succe>ïsion les uns plus que les autres ,
- IArt. 303. Co11t Parrs.)
« Néanmoins, où celui auquel on aurait donné se voudrait
• tenir à son don, faire Ir peut, en s'ab tenant de l'hèredite
» la légitime réserYée au"X autres. » - (Art. 307. h. t.)
'
l
�-
~o
-
en une donation pure et simple. Ce rés ultat en
apparen ce contraire à l'intention primordiale
des parties avait frappé Dumoulin, qui imagina
une distinction des plu s ubtiles : La donation
était-elle expressément faite à titre d'avan cement d'hoirie, ou n'était-elle que présum6e?
Dans la première hypo thèse, Je fil s donataire ne
pouvait garder la donation, s'il venait utilement
« à l'hoirie sur laquelle on avait vo ul u lui faire
» une avance.» C'était une s tricte in terpré tation de l'intention des parties : Si postea donataritts n on veli t esse hœres, resolu itw· clo natio,
tanqttam causd finali n on secu ta, et res revertitu r ad co rp us successionis ad commodum quorumcumque etiam renio tiorum, et collateralium
hœredum , vel etiam ad commodum, cl'editorum ;
non licet igitur hoc casu filio se tenere ad donationem sibi f actam, abslinenclo ab successione sed
necesse habet vel adire vel rem donatam 1·estituere, et solùm lu cratu1' fructu s puceplos durnnte
vitd dona toris.
Si, au contraire, la donation n'ayait pas été
stipulée àYancement d'hoirie, le donataire pouvait, abstinendo ab successione, garder ce qui
lui avait été donné : si causa anlicipationis non
sit expressa, sed solùm fo citè insit et prœsurnatur,
tum liberum est filio, si velit abstinere ab hœ1·eclitate donatoris et dono suo se contentare, n ec
tenebitur ad aliqua onera hœt editaria .
-l~
(
-
51 -
Ces deux textes de Dumoulin sont précis,
el la d istinction q u'ils établissent es t des plus
nettes. Mais celle d is tin ction ne reposant s ur
aucun article de la coutume ne pouvait êlre
acceptée sans discussion , et elle devait sûremen l ê tre repouss6e par to us les auteurs qui ne
seraient pas, comme Dumoulin, esclaves de la
leLtre. La J urispruùence condamna la doctrine
de Dumoulin par un arrèl du Parlement de Paris
de juillet 1 3~, qui permit à un fils renonçant
de retenir un don qu'il avait reç u, avec clause
expresse d'anticipa tion, arrêt qui fut bientôt
suivi de l'art. 307 de la nouvelle coutume de
Paris . (1)
L'exposé des prin cipes des coutumes s ur le
rapport serait incomplet s i nous ne le faisions
sui\Te de. règles qui régis aient tou te celle
importante théorie, dans l'ancien droit. Nous
(~ ) 1 ous ne pouvons citer cet arrêt du parlement de Paris
sans en critiquer un considernnt cr la distinction proposée
» par Dumoulin, .) est-il dit, ne peut être aùmise, car elle
» heurte la maxime donner et refrnir ne vaut . l) La raison est
mauvaise, car le don eu a' nncement d'hoirie renferme une
condition résolutoire, à savoir qu'il viendra utilement à la
succession .
�-
fixerons spécialement notre attention sur les
points suiYants dans lesquels nous 'grouperons
tous les principes relatifs à la matière :
1. Dans quels cas y a-t-il lieu à rapport?
Il. Quel est l'objet du rapport?
III. Comment s'effectue le rapport?
C'est aux coutumes de Paris et d'Orléan5
que nous emprunterons les règles dont le développement suit, car ce sont les coutumes qui
étaient le plus en vigueur, et celles dont les
dispositions ont le plus inspiré les législateurs
du Code civil.
SECTION 1.
Dans quels cas y a-t-il lieu
à
-
51 -
rapport~
" Tous les enfants, dit Ferrière, venant ab
» intestat à la succession de leur père et mère
' sont obligés de rapporter à la masse tous le~
" avantages qu'ils ont reçus d'eux en avan» cernent d'hoirie, pour être confondus avec
» les autres biens de la ::;uccession et partacrés
» entre ceux qui rapportent, et leurs coh~ri
» tiers. )) L'auteur ne distinguait pas suivant
53 -
que les enfants venaient à la succession de
leur chef, ou en vertu d'un rappel. (1) C'était
un moyen par lequel une personne qui devait
être exclue d'une succession, devenait habile
à y prendre part.
Par un juste corollaire des principes, ceux
qui étaient tenus du rapport pouvaient l'exiger.
La question ne faisait doute que dans les coutumes d'égalité parfaite. Dans ces coutumes
les renonçants qui étaient tenus au rapport,'
pouvaient-ils l'exiger? La solution était différente suivant qu'on considérait le droit d'exiger
le rapport comme un attribut de la qualité
d'héritier, ou un droit de chaque enfant. Ricard,
dans son Traité des donations, admet la première interprétation comme la plus conforme
à l'esprit des coutumes. Lebrun semble partager l'opinion contraire. (Suce. I. 65).
Le rapport n'était pas un droit personnel à
l'héritier ; c'était un droit estimable, pécuniaire
qui était in bonis; partant, ce droit pouvait être
exercé par les créanciers personnels de l'héritier, du chef duquel il leur compétait. (LEBRUN,
op. cit. 68). Pothier, sur ce passage de Lebrun,
ajoute même que cela ne peut souffrir aucune
difficulté. (POTHIER, Sitcc. Chap. 1v. art. n. § 6).
(1) Sur ce genre de rappel, V. MERLIN, Rt!pe-rt. V. Rappel à
IUCC.
,•
•.
�-
I
La solution est différente pour les créanciers
héréditaires. On admettait généralement qu'ils
ne pouvaient ni demander le rapport, ni en profiter, car, dit Pothier, ({ils n'o nt de droit que sur
)) les biens de la succession ; or les choses
» données n'en font point partie, puisque le
« débiteur s'en est dessaisi de son vivant.>> C'est
dans ce passage de Pothier que les législateurs
modernes ont puisé l'art. 857. C. c.
Qu id de l'héritier bénéficiaire? En acceptant
sous bénéfice d'inventaire, devra-t-il rapporter
ce qu'il a reçu? On soutenait les deux systèmes
contraires; celui qui avait fini par prévaloir, et
à bon droit selon nous, militait en faveur du
rapport. Les partisans de cette doctrine, à la
tète desquels on cite Ferrière (1), faisaient justement remarquer que l'héritier bénéficiaire, en
acceptant sous bénéfice, n ·en cesse pas moins
d'être héritier ; que cette acceptation ne produit
d'effet qu'entre l'héritier et les créanciers de la
succession, et qu'elle ne modifie en rien les
droits et obligations des cohéritiers entre eux.
Et à l'appui de ces arguments, Ferrière, remon(1) Ferrière n'avait adopté cette opinion qu'après bien des
hésitations. On lit dans son traité : o Il est assez difficile de
» se déterminer sur cette question, car quelque parti qu'on
» prenne, on trouve de très grandes difficultés qui combat" tent l'opinion qu'on aura suivie. "
((
-
54 -
55 -
tant à Justinien, la meilleure des sources en
matière de bénéfice d'inventaire, reproduisait un
extrait de la loi Scimus : « Adeant ( hœredes) hœ1·editatem sine periculo, et nihil penitus ex sua
substantid am,iltant >> en y ajoutant ce comrnentairs de la glose sine periculo creditorum ultrd
vim,, et en faisant remarquer que la glose ne
dit pas sine periciûo collationis (1). Cette opinion
avait fini d'ailleurs par être acceptée par la
jurisprudence du Parlement de Paris qui l'a
consacrée dans les deux arrêts de principe, du
20 avril 1682, ( Chavogne) et du 23 février 1702,
(1\1. de Marigneux). - «Il fut en même temps
» ordonné, dlt Merlin (Rép. v. Béné{.) que cet
>> arrêt serait lu et publié au Châtelet pour
>> servir de règlement à l'avenir en pareil cas. »
A quelle succession le rapport est-il dû? «Il est évident, disait Pothier, que ce n'est qu'à
» la succession du donateur que l'enfant doit
>) rapporter ce qui lui a été donn é.» (Intr. au tit.
xvn, Cout. Orléans). Le rapport, en effet, ne tend
(1) cc Il est certain que Justinien n'a point eu d'autre inten» tion, quand il a introduit le bénéfice d'inventaire, que de
» joindre tous les héritiers d'une succes'sion, pour les défen» dre des attaques de leur ennemi commun qui est le créanD
cier. Mais il ne leur a pas fourni des armes pour se dé-
» truire entre eu-x, ni pour leur ôter les droits qu'ils pou» vaient avoir les uns envers les autres. » - ( Rapport du
cons.
MÉRAULT
nii
POINVILLE.)
.·
·.
�-
56 -
qu'à établir l'égalité entre les héritiers de celui
qui a donné. Il suffit donc de rechercher quel
a été le véritable donateur.
Le doute n'est possib le que pour le cas où
une dot a été cons tituée à un enfant par le père
et la mère, en e!Tets de com munau té. - A Rome,
en effet, c'était au père à doter sa fill e et non à
la mère. Dolare filiam patris est officittm non
matris. (L. 19. Dig. de ?·1ï. nupt. - L. 16. Cod.
de dot. prom. ) Tels n'étaient pas les principes
coutumiers. - Si la femme a parlé dans la donation, et a donné conjointement avec son
mari, le rapport se fera de moitié à la succession du père, moitié à celle de la mère ; (POLLET,
Partage, 3, § 66, 11° 5) et cela, que la femme
accepte la communauté ou y renonce. Le parti
pris par la femme lors de la dissolution de la
communauté es t à considérer dans le cas où le
mari a doté seul en effe ts communs. La femme
est présumée donner avec son mari jusqu'à
concurrence de sa part dans la chose (1); et si
elle accepte, le rapport de moitié devra se faire
à sa succession. - La donation est-elle d'un
propre de l'un des époux, la règle ne varie pas,
et le rapport se fera pour le tout à la s uccession
(i ) a Dos est commune onus utriusque parentis maxime in patrt'd
» connubiaUs bonorum societati.s. »
u. Tit. 1.)
ICBOPPIN :sur Paris, Liv.
-
67 -
du donateur si seul il a doté; pour moitié à
chaque s uccession s i le père et la mère ont doté
conjointement.
A ce principe général, Lebrun avait proposé
une res triction pour le cas où la dot étant cons·
tituée conjointement, e t la donation ayant pour
objet le propre de l'un des épo ux, la succession
de cet époux. s'ouvrait la première. Il ex..igeait
que le rapport de la totali té fùt fait à ce tte
succession parce que cc il n'est pas jus te d'obli>> ger les cohéritiers de poursuivre un remploi,
» tandis que l'un d'eux a dans ses mains le pro» pre de la succession ; et de fait, si le père était
) insolvable, il serait vrai de dire, qu'encore que
» le père et la mère eussent donné conjointement,
» néanmoin s toute la donation se trouverait faite
» aux dépens de la mère. » Et Lebrun ajoute :
~ Quoique le père soit solvable, il est encore de
» l'ordre que les biens du cô té du père suivent
» la succession du père, et ceux du côté de la
» mère celle de la mère, pourvu que ces biens
» soient existants. » On le voit, le principe
Pa.terna paternis, materna maternis, se fait jour
à travers cette théorie (1) (2).
(1) Le Code civil n'a pas reproduit la règle Pat~rna .. . et la
distinction de Lebrun doit aujourd'hui être rejetée.
(2) Les coutumes de la Flandre flamande renferment sur le
rapport du prix. des fiefs acquêts, des règles d'une grande
originalité. (V. MERLIN. Répert. v. Rap.)
�-
I
58 -
A qui faut-il que la donation ait été faite pour
qu'il y ait lieu au rapport? Pothier, sur cette
ques tion, examine s uccessivement si le rapport
es t dù de ce qui a éLé do nné à ses enfants, à ses
père et mère, ou à son conj oint. L'étude de ces
trois hypothèses forme la matière des 1·apports
pour aittrni, source des articles 847 à 849. C. c.
A. La donation a été faite aux enfants du
successible. Elle était présumée faite au père
qui, par conséquent, était tenu au rapport.
(( Ce qui a été donné au..x enfants de ceux qui
>> sont héritiers, et Yiennen Là la s uccession de
» leurs père, mère ou autres ascendants, est
>> sujet au rappor t ou à moins prendre. » (art.
306. Cout. Paris.) Car, dit Pothier , regardant nos
enfants comme d'autres nous-mêmes, n'acquérant nos biens que pour eux, nous devons réputer donné à nous-mème ce qui leur est donné,
et nous en devons le rapport. D'ordinaire, d'ailleurs, le grand père fait donation à son petitfils, en la seule considération de son fils, et
même en son acquit (1), et on peut ajouter qu'il
(~ ) Cela était si vrai que la petite-fille dotée par l'aïeul
devait le rapport à la succession de son père lorsque celui-ci
ayant survécu au donateur avait été obligé de rapporter à sa
succession ce que l'aïeul avait donné à sa petite-fille. Ce qui
faisait dire à Lebrun (de la Légitime, Liv. m.) que, de son
temps, il y avait non seulement des rapports de donation, mais
même des donations de t·apport. (BouRJON. Suce. 11, tit. xvu.)
-
59 -
eùt été trop facile d'éluder la loi si le père qui
vo ulai t faire une do nation à son fils, sans que
ce fùt suj et à rapport, avait pu donner aux
enfants de ce fils. Rappelons que l'ar t. 306 de
la co utume ne s'applique pas sous l'empire des
coutumes qui admettent ladispensederapport (1).
B. La dona tion es t fatte au père d u successible. Si le petit-fils arrive à la succession de son
aïeul, de son propre chef, il res te évidemment
é tranger à la donation qui a é té faite à son père,
et il n'en devra pas le rapport. Il en serait tenu,
au contraire, s'il représentait son père dans la
s uccession de son aïeul.
Si tous les fil s du donateur renoncent à sa
succession, chaque petit-fils devra-t-il rapporter
ce q ue so n aïeul a donné à so n père ? Cette
question se rattache à la précédente, car tout
dépend du poin t de savoir si les enfants respectifs des renonçants succèdent de leur propre chef ou par représentatio n, en d'autres
termes, si c'est par tète ou par souche qu'ils
s uccèdent. Or, il est hors de doute que, dans
l'espèce, la représentation est absolument sans
effet, e t que le partage se fait par tête. Cette
(~)Ferrière fait observer qu'il faut restreindre cette loi
dans ses termes précis ; ainsi le fils ne rapportera. pas ce que
son pere a donné à son bâtard, car les bâtards patrem habere
non intelliguntur, nec gentem, nec familiam.
.·
�-
I
I
60 -
solution est contenue dans un arrêt du Parlement de Paris du 1er avril '1686, dans un procès
où Ferrière écrivait pour ses beaux-fils (1).
Dans deux hypothèses distinctes que Pothier
nous relate, un frère peut être forcé de rappGrter une donation dont son frère a été gratifié. « Lorsque des filles par contrat de maria» ge ont renoncé, moyennant une modique dot,
» à la succession au profit de leur frère ainé, cet
» ainé qui succède à leur place à leur portion,
» est obligé aux mêmes rapports auxquels elles
» auraient été obligées, et, par conséquent, au
» rapport de leur dot. » (2). - Le second cas,
spécial aux coutumes qui obligent le père à
rapporter à la succession de l'aïeul les donations faites à son fils , a lieu quand l'aïeul laisse
un fils et deux petits enfants nés d'un fùs pré(4) Lebmn, dans l'espèce proposée, admeLtait une sorte
de représentation qu'il supposait pouvoir se faire de personnes \ivantes « lorsque tous ceux du même degré renoncent
» également et qu'ainsi elle ne se fait point au préjudice d'un
• droit acquis. » Cette opinion est vivement combattue par
l<'errière et Bourjon . (Sur l'art. 308 . Cout. Paris) .
(~l Lebrun apporte à cette règle deux restrictions :
a. Dans les coutumes où les meubles appartiennent à
l'aîné noble, il ne rapporte pas la dot de sa sœur qui a renoncé à son profit quand cette dot consiste en meubles.
(Anjou).
b. L'aîné ne rapporte pas également les dots de religieuses
constituées en argent ou autres meubles.
61 -
décédé; l'aïeul avait doté l'un de ses petits
enfants qui renonce à la succession. L'autre
qui concourt avec son oncle, en représentant
son père, devra rapporter la donation faite à
son frère, car le partage se faisant par souche,
le rapport doit se faire de même; l'espèce est
dans Pothier. Montholon § 109 avait proposé un
autre système qu'il avait tiré d'un arrêt .du
Parlement de Paris du 2J mars 1588, système
d'ailleurs beaucoup plus équitable. « On consi» dérait la donation faite aux renonçants , corn» me prise s ur toute la masse de l'hérédité ;
» on faisait accroitre leur portion héréditaire à
» cette même masse, et on partageait en consé» quence comme s 'ils n'eussent pas ex isté. >> (1)
(C). La donation est faite au conjoint du successible. C'est la partie la plus compliquée
et la plus délica te des rappo·rls pour autrui.
La fille devait-elle rapporter à la succession
de son père, la donation faite à son mari ? La
question qui paraît très simp le, faisait en pratique l'objet des discussions les plus diffuses.
(~ ) Ce cas étrange d'un frère qui est tenu au rapport
d"une donation faite à son frère n'est plus possible aujourd'hui ; car Je Code civil a abrogé les dispositions des coutumes qui assujettissaient le père au rappo rt de ce qui avait été
donné à son fils, et de plus la loi n'admet pas de renonciation aux successions futures. (art. 730.4 130. C. c.)
�-
6'2 -
On se demandait principalement si, au moment
de la donation faite à son mari, la femme avait
ou non des enfants de lui.
(a). Avait-elle des enfants? Le rapport sera
dù de la totalité; la raison est dans Lebrnn :
« Toute femme qui a des enfants doit r é>) puter
comme donn6 à elle-même ce qu i
n est donné à so n mari ; pendant la comb munauté, elle jouit avec lui de la dona)) tion qui lui a été faite; elle n'en jouirait pas
>l autrement si elle avait été la véritable dona)) taire. Après la mort de son mari, cette dona» tion passe à ses eufants pour moitié si elle
» accepte la communauté, pour le tout si elle y
l> renonce. Elle doit donc regarder comme sien
» propre l'avantage dont ils profitent par là. >>
Pothier adopte l'opinion de Lebrun en la critiquant toutefois pour le cas où « le gendre à
J> qui la donation a été faite est mort insolvab le
» et que sa veuve a renoncé à la communauté
'
~ ainsi que les enfants à la succession de leur
» père. Ni cette veuve ni ses enfants n'ont pro>> filé de la donation. » Merlin rejette toutes ces
distinctions et résout la question par les principes généraux : t< Que la fille soit tenue au
)) rappo_rt de la moitié de la donation faile à son
» mari, lorsque la communtluté est dissoute e t
» qu'elle l'a acceptée, c'es t ce que personne ne
» peut révoquer en doute; mais, hors ce cas, il
-
63 -
)) nous parait que la fille ne peut être obligée de
)> rapporter aucune partie de la donation, et
» que ce qui en est échu ou peut en échoir à
» ses enfants, ne doit pas faire à son égard la
)) matière du moindre rapport. >>
(b). Si la femme n'a point d'enfants et qu'elle
renonce à la communauté, elle est évidemmen t
déchargée du rapport de la donation faite à son
mari par son père, puisqu'elle n'en tire aucun
profit. Si elle accepte la communauté, elle est
au contraire tenue au rapport qui est pour
elle, dit Lebrun, d' un e nécessité indispensable.
Mais quel devra en être le qitantum? De la
totalité de la donation , parce qu'autrement il
pourrait y avoir fraude; on trouve, en effet, les
deux éléments qui la constituent ' le consilium
et l'eventus; le consiliwn, en ce qu'un père au
lieu de donner à sa fille donnerait à son gendre
commun en bien avec elle; et l'eventus, en ce
qu'en acceptanl la communauté la fille aurait la
même part de la donation que s i elle lui avait
été faite à elle-même. « Ces raisons dit i\lerlin '
>> sont d'une s ubtilité excessive, et on ne doit
» pas, dans une matière qui tient autant à la
» s imple équité que le rapport, sophistiquer à
>> un tel point. »
S'il y a fraude, en effet, pourquoi distinguer entre l'accep tation et la renonciation·? Le
rapport doit être toujours dû. Du reste, une
)
)
�-
l
6.i -
donation faite à un gendre n'est pas censée
faite à la fille; le gendre peut s'attirer assez
par lui-même l'amitié de son beau-père pour
la mériter ; pourquoi donc la soumettre au
rapport quand il résulte de l'acte qu*elle ne
contient aucun avantage indirect en faveur du
gendre? Nous conclurons, en résumant, que la
femme ne devra r apporter la donation faite à
sou mari que quand il sera certain qu'elle en
aura tiré profit; et le rapport sera dû dans la
mesure de ce profit. ( En ce sens FERRIÈRE sur
l'art. 304. Cout. Paris).
Toutes ces difficultés que soul evait le système
de Lebrun ne faisaient que croître pour le cas
très-fréquent où la communauté subsistait encore lors de l'ouverture de la succession du
donateur. « On ne pouvait se tirer d'affaire que
J> par un expédient très peu satisfaisant» dit
Demolombe, et L*on décidait que la fille ne serait
tenue du rapport que provisionnellement ; mais
nous devons ajouter que les mêmes incertitudes
régnaient pour fixer le montant du rapport.
SECTION II.
Objet du Rapport.
§ I. - Quelles choses sont suj ettes à rapport?
65 -
Tout acte de quelque couleur qu'il soit, qui contient quelque avantage de la part d'un père et
d'une mère au profit d'un de ses enfants, est
sujet à rapport.
Tout acte; l'expression ne saurait être plus
large; peu importe donc que l'avan tage soit
direct ou indirect.
Sur cette matière, les auteurs examinaient
plusieurs questions dont la plupart ne peuvent
avoir pour nous qu'un in térê t historique; nous
passerons en revue les plus intéressantes.
Une mère appelée à la succession d'un frère
unique, dans laquelle il y a beaucoup de fiefs ,
y renonce ; par ce moyen ses enfants mâles
excluent les filles. Seront-ils obligés de rapporter
ces fiefs dans la succession de leur mère? La
négative est soutenue par Pothier, (l ntr. cout.
Orléans, tit. x vII, n° 79) qui se refuse à voir
dans tous les actes d'un père ou d'une mère,
dont un de leurs enfants retire un profit, des
avantages indirec ts suj ets à rapport. Les seuls
actes rapportables sont ceux qui font passer à
un enfant une partie du patrimoine de ses père
ou mère; or, en renonçant à la succession de
son frère, la mère n'enrichit pas le patrimoine
de ses enfants. l\Ierlin donne même à l'appui de
cette thèse un argument d'analogie tiré de la loi
5 § -13. Dig. de donat. int. vir. et uxot·. (Ulpien)
dont voici l'espèce : Un mari renonce à une
5
�-
'
66 -
succession, donationis causd, pour en faire profiter s a femme, vel snbstitu ta sit 11iulie1-, vel etiam
ab intestato hœres futura. En ce faisa nt, le m ari
ne contrevient nullement à la prohibition des
avantages entre époux, neque enim p aitperior
fit, dit la loi, qui non adqitil'at ., sed qiâ de patrimonio suo depositit. Il ne donne rien, il ome t
seulement d'acquérir ; et Merlin d'aj outer :
« Pourquoi ne raiso nn erait-on pas de même re» lativement au rapport ? Dans l'espèce, la mère
» ne donne rien à ses e nfants , rien ne s ort de
)) son patrim&ine pour grossir le leur. L es enfants
>> tiennent les biens de leul' oncle et non pas de
» leur mère; il ne peut donc pas ètre question
» de les rapporter à sa propre s uccession . »
Contrairement à Pothier, Lebrun s outient l'affirmative en se b asant s ur ce que la mère, en
r enonçant, procure un avantage indirec t à ses
enfants mâles, avantage dont rapport est dû.
cc Si elle n'eùt pas renoncé, dit-il, les ftefs se
>> seraient partagés après sa mort, de la manière
» réglée pour . la ligne directe, e t les mâles n'y
» auraient eu que leur droit d'ainesse. >> (Suce.
sect. m. n° 11). (1)
(~ ) La question devait être bien délicate car on voit Pothier et Lebrun changer successivement d'opinion ; ces auteurs ne paraissaient pas être t rès-fermes dans leur doctrine.
(V. DBMOLOMBK, Suce. v. 370.)
-
67 -
Une femme, qui a des enfants d'un premier
lit, renonce à la communauté qui a existé entre
elle et s on second mari pour en faire exclusivement profiter les enfants du s econd mariage.
Les enfants du premier lit pourront-ils exiger
de leurs frères utérins, le rapport de cet avant age à la succession de leur mère ? La négative
semble avoir été consacrée par un arrêt du 27
janvier 1618 dans lequel on lit « qu'une mère ne
» pouvait pas être contrainte par ses enfants
>> du premier lit d'accepter la communauté de
» son second mariage, quoique riche et opu>> lente. » Pothier déclare adhérer à cette jurisprudence ( Coiû. Orléans, sect. vr, art. 3, § 1) :
« Les enfan ts du second lit sont censés tenir
» de leur père le total des biens de cette corn» munauté; leur mère qui y a renoncé, n'y avait
» jamais eu aucune part ; » puis il développe
des r aisons qui s ont tirées de la Loi 4, Dig.
ad stc. '1.'r ebellianum. Nous ferons remarquer que
les idées de ce Jurisconsulte n'étaient guère s ur
cette question plus arrêtées que s ur la précédente ; la lecture du ch. IV, art. 2, § 2 de son
Traité des s1"ccessions suffit pour s'en convaincre.
Dans ce chapitre, Pothier trouve bien dur de
refuser le rapport aux enfants du premier lit,
e t pou r le jus tifier sans se contredire, il imagine une dis tinction dont la subtilité est évidente.
�-
I
I
68 -
Doit-on voir un avantage s uj et à rapport dans
celui que fait une femme à ses enfants du second lit, en acceptant la communauté du second
mariage, qnoique mauvaise, et en se privant par
là de ses reprises? C'est l'inverse de la question
précédente. Pothier a, tour à tour, défendu les
deux systèmes. Il s'est prononcé contre le rapport « parce que le droit de la mère de prélever
» ses reprises ne devait exister qu'au cas de
» renonciation ; or, en l'espèce, elle a accepté la
» communauté » et il l'a admis au contraire en
soutenant que « la femme a véritablement eu
» cette créance de reprise de son apport, quoi» qu'elle dépendit de la condition de sa renon» ciation à la communauté. » Sur ces questions,
laquelle des deux opinions était la plus conform e aux principes du droit ? La question se
retrouve dans le droit actuel, et il y sera répondu en son lieu et place.
§ II. - Quels avantages sont dispensés du r apport ? Les anciens auteurs reconnaissaient que
dans les coutumes qui autorisaient le concours
des qualités d'héritier et de légataire, les dispositions de dernière volonté étaient exemptes
de rapport. (L. 28, 24 Dig. fam. el'cis. L. '17,
et 87 de legatis. L. 16 de collai.) Étendons cette
exception aux actes à titre onéreux que le père
fait avec son fils sans intention expresse de
l'avantager.
-
69 -
Nous avons vu qu'on dispensait également
du rapport l'avantage que le défunt avait procur é à l'un de ses héritiers, sans diminuer en
r ien son patrimoine. Rappelons que le Parlement de Paris étendait les co.nséquences de
cette exception jusque dans les limi tes les plus
reculées, sans tenir auc un compte de la règle
quod contl'à rationem juris introcltictum est, ad
consequentias non est proditcendum. (L. 14. Dig.
de legibus.)
Dans son art. 300, la coutum e d'Orléans groupait certains avan tages que toutes les coutumes
dispensaien t d u rappor t. « Les nourritures, en» tretènements, ins Lructions et apprentissages
» d'enfant, ni les fruits de la chose donnée par
J) un ascendant, soi t héritage, soi t rente, ne se
)) rapportent. » IL ne peut en être de même des
dépenses faites par un père pour procurer à
son fils une maitrise, parce que les frais de
maîtrise se fon t pour l'établissement de l'enfant, plutàt que pour so n instru ction.
La solution était vivement discutée pour les
frais de doc torat. Lebrun et Pothier les assujettissaient au rapport en prétendan t qu'il en résultait une sor te d'établissement. « En quoi cepen» dant l'état d' un docteur est-il plus avancé que
>) celui d'un licencié? » objecte Henrys. « En ce
» que l'honneur du doctorat, répond Buridan,
» n'en parvient pas seule:nent à celui qui en est
�-
t
70 -
, gratifié, mais à toute la famille, partant les
» frais pour y parvenir se doivent porter sur le
)) général et par tous les cohéritiers. » Et à
l'appui de son opinion, le commentateur de la
coutume de Reims (1) invoque la L. 1. § 16,
Dig. de Collat. suivant laquelle, propler. o~er~
dignitatis hoc prœcip1rnm habel'e debet qui dignitatem mettût, iit non solus oneretw·, sed com.mune sit omnium l!œl'eduni ontls hoc debitum.
On se demandait enfin si un enfant doit
rapporter les frais du banquet nuptial que le
père fait en le mariant. La négative parait avo~r
constamment été admise parce que « ces fraLS
» ne tournaient nullement au profit des époux
» et n'avaient pour objet que de manifester la
» joie des deux familles nouvellement alliées. »
Rapeort cles dettes. - Lebrun a tracé dans un
passage remarquable les règles du rapport des
dettes dans l'ancien droit : « Le fils qui a em>' prunté de son père une somme de deniers,
» est obligé de la rapporter à sa succession,
n suivant les arrêts qui sont communs dans les
1>
(t) La. coutume de Reims avait tranché la. question: c Deniers déboursés par père ou mère pour nourriture à leurs
,, enfants, ou pour le fait d'armes. a.u service du Roy, ou l'entretènement d'iceux , tant ès-arts libéraux que mécaniques
• ou pour acquérir degré jusqu'à celui de licence inclusive» ment ne sont sujets à rapport. • - Art. 3~1.
»
-
71 -
» livres; et cetle jurisprudence est fondée sur
i> ce que le père, qui prête et qui n'exige pas
» pendant sa vie, est présum é donner par anli» cipation de succession ; que d'ailleurs le prêt
s'il
>) fait par le père deviendrait un avantaae
'
0
» n'é tait point sujet à rapport ; et que la pre» mière r ègle du rapport est l'égalité, qui, se
» trouverait autant blessée par le défaut du
>) rapport de ce qui a é té prêté que de ce qui a
» été donné; car il peut se faire que le fils ait
» des créanciers an lérie urs au père qui , par la
le urs hypoth~ques, viendront
>l priorité de
» avant les cohéritiers s ur les immeubles dont
» le ms débiteur sera hé ritier; ainsi Je fils pro>> fitera doubleme nt s i ses cohéritiers n'on t la
J> faculté de lui imputer sa de tte sur sa portion
» héréditaire ; et c'est ce qui a é tabli l' usage
» du rapport de la dette en ligne directe. » (Liv.
III. ch . VI. secl. IL n° 2.). Les anciens auteurs
partaient de L'idée qu'un enfant ne pouvait ê tre
avantagé ni directement ni indirectement, et
pour être conséque nts avec eux-mêmes, ils ont
dû assujettir au rapport les sommes prêtées
comme les sommes données.
Dans l'ancien droit, la ques tion n'était soulevée que pour le cas de prê t d'un e somme d'argent fait par le père à son fils. C'était l'hypothèse de Lebrun , de Pothier et de Bourjon, et
leur décision est restreinte à ce seul cas parti-
�·- n -
I
I
culier; aussi nous ne savons pas ce qu'ils
auraient décidé si, au lieu d'un prêt, ces auteurs
avaient eu à se prononcer sur un contrat que
le père aurait passé avec son fils sans intention
de l'avantager. Auraient-ils soumis au rapport
les bénéfices qui. seraient résultés pour Je fils
d'une vente que son père lui aurait consentie ?
Le doute est permis, car il est difficile de voir
dans cette vente l'idée d'un avancement d'hoirie.
L'obligation du rapport appliqué aux dettes
avait, dans l' ancien droit, des effets très-importants. L'ouverture de la succession rendait la
dette exigible. Cette exigibilité entrainait la
déchéance du terme, car le terme es t lui-même
un arnntage rapportable, et faisait courir les
intérêts de plein droit. Enfin la part héréditaire
du fils garantissait sa solvabilité, et ses coh~ri
tiers avaient le droit de prélever une part égale
sur la masse totale. Cette imputation n'avait
rien que de très jus te dans les rapports des
cohéritiers entre eux ; elle faisait toutefois
l'objet d'une intéressante discussion quand on
voulait l'appliquer à L'encontre des créanciers
personnels du fils. Lebrun nous dit qu'elle avait
provoqué au Palais une fameuse dissertation ,
et qne la majorité des jurisconsultes qui y
avaient pris part s'étaient prononcés en faveur
de l'imputation et pour les cohéritiers. Cette
décision était basée sur ce que, en matière de
p;1rlage, la p.nran li<' l·lnil d111• par tous les lol.s
les un s envers les autres. Si donc on avaiL
proc<~dé nu partngc .sans tenir èompte de la
delle de l'nn ~es col1 6riticrs envers la masse,
e t que. ce <léb1leor fllt in solvab le, l'action rn
garnnt1e .se sernil ~xercée s ur les biens rroi
c~m 1~~sa 1 cnl son lot ; et cette aclion étant priv1l8gwe, les co héritiers nurnicnt LoujoL1rs 6ti'·
préférés aux cr6anciers personnels clu débiteur.
Il élaiL donc plus naturel, relerita le conjun gendarurn nclionwn, r1'anloriser l'imputation.
( LEBnUN. Suce. nn 7).
. Cette solution e. Len harmonie avec les principes du droit, mais l'argnnwnl rle Lebrun <'Sl
vicieux; il confond, ~ n efTet, entre l'action en
garantie et l'action en paiemenl de la dette
L'action en garanLic n'a uniqurmen t pour hnt
CJ:Ue de réparlir en Lrc tous les cohbritiers la
perte éprouvée par l'un d'<'nx ; elle s'exerce
proporLionn ellernenl à ln pnrt héréclHaire de
chaque cobéri lier; mais cette sitnation n'est pas
modifiée par ce fail que le débiteur de la succession est un des héritiers. Il est tenu, cornme
clébiLeur, de toute la deLtc; mais comme hérilier,
l'action en garantie ne peut s'exercer qu'en
proportion de sa part ùans raclif de la succescession . La Lhéorie de Lebrun arnit donc le
lo rt de méconnaitre que l'action en garan tir n'a
pas la mt,mc élenù ne qnP l '~r ti on en paiement
6
.................. .......-..-~
--
~
-----
--
-
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-
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i l --
de la dette. (M. LAOB1~. 1)11 1·appol'f tlcs clr l f<>s.
N° 9).
L'assimilation des dettes aux dons en tre-vifs
en trainait l'application aux de tLes des r ègles
s ur le rapport généralement admi ses pour les
donations. C'est ainsi q ue tè fil s devai t rapporter à la su ccessio n de son père la somme que
celui-ci anlit prêtée à on petit-fil s. Le petit-fils
devait également le rapport ù ln su ccession de
son aïenl de la somm e prèt '>e ù son père .
ECTlON Ill.
Cam m ent s' effr'c f'l tP /p 1·apporl ~
« Les enfants venant à la s uccession de pè re
» ou mère doive nt ,·apporter ce qui leur a été
» donné ou moins prendre. » (art. 304. Cout .
de Paris., art. 306. CoHt. Orléans.)
L'application de cette règle d ifférait suivant
que la chose à rapporter était un menble ou un
immeuble.
Rapport cles immeubles. - En principe ce rapport se fait en essence e t en espèce. On l'a ain si é tabli, nous dit Pothier, pour qne l'égalité entre tous
75 -
les e nfants soi Lparfaite ; ol' ce résultat ne serait
pas a Ltein t si l'un d'eux pouvait conserver d e
bons héritages, pendant que les autres n'auraient que de l'argen t, clont ils autaient souvent
cle lei z)eine à {aire un bon emploi.
Le donataire s oumis au rapport n'est tenu
que de sa faute; aussi ne doit-il rapporter le
corps certa in que dans l'état où il se trouve
lors de l'ouverture de la s uccession. Son obligation se trouverait de même éteinte, si la chose
avait entièrement péri par cas fortuit .
Le donataire con tracte l'obligation du rapport
dès la fo rm ation de la don ation, ex antiqud
caiiscî. On déduit de ce t ordre d'idées cette
règle que les h ypoth èques consenties par Je
donataire pendan t la vie d u de cuj'us, s'évanouissent : ?'esolulo jiire dantis, reso luiiur jus accipientis. Pothier e t Bourjon admettaient toutefois
que les hypothèques revivaien t si l'immeuble
gr evé tombait a u lo t du dona taire.
Ce tte obligation du rapport en n ature appliqué a ux immeubles dont le donataire ne peut
même pas ê tre dispensé par le donateur, disparait dan s certain s cas :
1°. Il aura lieu e n moins prenant quand la
chose a été aliénée par le donat air e avant l'ouverture de la succession ; par s uite l'estim ation
ser a fa ite de la valeur de l'immeuble au moment du partage. ( PoTHIE.R. lntrod . tit. XVII.
Il.
((
................... ...............
.
-._.
--
..--.
-
-
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- --
-- -
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-
.
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�- 77-
Cout. Ol'lil<111s, n° 02). Cornrnc11l 1·011<· lli c1 cel le
Llécision avec la maxim e: Nrmo plus jw·is in
alium ti'ansferrr pot es/ q11wn ipse l1 of>el 9 Nos
anci ens anLenrs avaient pen:::.6 qnr l' intérêt
pratique deni.it i ci pn:..,,nlnir, cl on l':wa iL ain si
décid é pour garantir l es acquéreurs d' nn e év iction : re.~ int er collœredes 11011 w11l r111wrè (l'aclandœ. - C:es motifs n 'l"'\ is lant pl nc; pour le
r,intien des hypotl1i,qnes, la so lution de\'a iL
llctemmenl être r es l rcinle nu ras ll'aliénation.
2°. Le second cas cle r apport en mo in s prenant
lieu quand il se tronve clnns la snr cess i on
immeubl e de parei lle \ al c1 1r et bon l é, cl onl
VJ' pnisse form er des lots semb lables l >Onr les
héritiers. L e vCPu <lc> la l oi se l ronYe alors
aucé, et l e part age se l rourc n"gu li èr emen 1
a
nts
~jh;. Enfin l'hL·1ilicr donataire sera autorisé à
pporter en moins prennnl , si ses coh ériLi er s
fusent de lui rembourser les cl épenses qu 'il a
1.ltl es On discnLait l a ques Li on de savoir si le
droit d e l 'héritier donalaire co nsistait dans un
droit de rétention (Potl1ier ) ou dan s une action
directe en rembourse ment des dépenses qu'a\'ail
exi gé l a conservalion cle la chose donn ée .
Merlin admet le cumu l cl es deux actions.
Rapport des meub!Ps. - Les co utnmes n'o nl pa.s
régl emen l é ce rapporl ; il (• Lail cepend ant recon-
nu par la grande généralilé ùes auteurs que les
meubles se rapporlaie uL en moins prenant, et
que leur valeur s'es timait au temps de l a donation . (Pothier). Ferrièr e avait voulu établir une
distinction : il n'autorisait le rapport en moins
prenant qu'à l'égard ùes meubles quœ pl'irno
ltsu consunwnlw', et il exigeait le rapport en
nature des meub les qu e l'usage ne détériore pas .
�-
79 -
,
DROIT INTERMEDIAIRE
Les 101i:, cn il es qui Lraileut da droit succes::;oral d'un e nation sont si étroitement liées aux
principes politiques de celte nation qu'il ne
suffit pas, poLu en régler l'exercice, de suivre
les règles orùinaires de la justice e t de l'équité;
Je législateur doit en outre coordonner ces règles
avec la fo rme et la situation de l'Etat pour lequel
ces lois sont faites.
Ces réflexi ons ùont la Yaleur fut appréciée
des légis lateurs ùc la Ré\'Olution, expliquent
tout le soin qu'ils onl apporté dans l'étude des
réformes à introduire dan cette matière. L'espril
général de ces réformes fut de substituer une
légis lat10n uniforme aux législations diverse::. qu1
s ur cc point se disputaient le;t France, et de
met tre le:-- cl1sp0Bil10ns !(' gales relati\·e au droit
�- su -
-
de s ucces::;io11 e11 l 1u rn10111e <.wec les µr iuci p e~
ùe la nourelle cun"Lil uLion dé1HocraLique.
~ou s
ne
~i gnnl e ro ns
qu e les
m o difi cal i o n ~
relJtires ù ln lll L'Orie du r apport.
C'est un axiom e cle ùroit devenu vulga ire,
» ava it d it ~lirabeuu , qu e les enfants son t les
» héritiers nalurels de leurs parents, ce qui
» inclic1ue j la fois el la légitimité du titre e u
» vertu ùuquel LllH.! fa mille en lre dans l'hérilagc
» laissé par ses cl!cfs, e t l' égali té cl u d ro it que
» lu nature do nne à chacuu de ses me111bres
» s ur cet héritage. » ( 1) Ces paroles de ~ l iral.Jca u
ont donné naissance aux ùeux lois des 7 ma rs
1793 e t 5 brumaire a n [[ ; la premièr e dépouilla
les pères du d ro it d 'ex héréda tion e t a ttribua
à tous les descen d a nls un droit égal s ur le
partage des biens ùe le urs ascenda nts ; la
seconde é tendit aux s uc.cess ions déférées, soit
aux ascendants soit a ux collatéra ux, ce que la loi
clc 1793 avait res lrein L tt la seule li gne d irec te
descendante. Ces lois, ù u res te, au torisaient un e
qualité d is ponible du ~ixième s'il n 'y ava it que
des collatéraux, et d u d ixième s' il y avait d es
héritier s direcls, mais ce dispon ible ne pouvait
ê tre laissé qu'à des élraugers.
Ces dispositions c1ui furent puremen t et simpleme nt reproduites par la loi organique des
«
•
1l) hl!RA.BEhU, 0 1scours ;ur 1 <'Etaitté cle:; partag-1 s.
,"
,..... '.
81 -
s ucf'essio ns c111 17 nivùl::>e a n lI se ressentaien t
trop des exlrnvagances égalil,üres ùu r ègne de
la Con vention po ur lui s urvivre: ell es portaien t
au pouvo ir do mes tique du père la plu s fun es te
atteinte e t, c11 lt1i interdisant de distin guer un
fils s age et res pedue ux d'un fil s rebelle e t s an s
c.:. onùuite, elles faisaient violence aux sentiment
les plus n atu re ls à l'homme; « c'était là, d'ailun véritaùlc a tte ntat au droi t de p ro>) leurs,
'' pri é Lé et l'u ne des ri gueurs les plus senties du
1> régime révolutio nn aire, car la mort frappe tous
expi>) les jours, et des millie rs de mourants
'' raie n t sans po uvoir obéir au penchant de leur
» cœur e n fave ur de ce ux <1ui les a\·aient servis,
1> so ignés, consolés d ans leur vieill esse. » (1 )
Auss i ùès q ue le Cons ulat eù t tend u à la France
sa t ran quillité et assuré son avenir, une loi du '1
germinal a n VIII rut auss itùt parlée qui rendi t
a u père le droi t tlc récompen::;cr , ùe punir, et cle
r éparer en tre enfa nts les inégalités de la nalure
La loi de l'a n VIII co ntient deux innovation;:,
re m a rquables : elle étab lit une réser ve en faye ur
ùes ùescenùan ts, ùes ascenùants et de <...erlalll-;
colla téraux, et per met également lle ùonner ',,
JJl'éèipul ù tout s uccessible une quoli lé Ll '
biens varian L m·ec le nombre Lles résen ï\lait e::;
« Les lihéral ilt"•s, auloris(·es par la presenle lut ,
�-al >> porte l'art. 5, pourront être faites au profit des
» enfants ou autres successibles ùu disposant,
» sans qtl'elles soient sujettes à rapport. » Il s'étail
èlevé, s ur ce point, la question de savoir si la
dispense de rapport é tait de droit ou si el le
devait ê tre exprimée. L'opinion la plus généra- r
lement reçue exigeait dans ce cas l'obli gation J-'l
du rapport, e t à bon droit s uivant nous, car il
n'es t pas vraisemblable que le législateur de
l'an VIU ait entendu donner à ces libéralités un
caractère préciputaire. (Sn sens con traire, füorn ,
21 juin 1809).
-- ~oe -
-
,
~~,of/V
83 -
CODE CIVIL
OES RAPPORTS
Quand nne succession s'o uHe, les héntiers
appelés au partage n'y vie nnent pas tous a\·ec
des droits égaux; un d'entre eux peut avoir été
de la part du de cujus l'objet d' une libéralité soit
entre-vifs, soit testamen taire . Cet héritier prélèvera-t-il sa part héréditaire sans remettre à la
masse les biens qu'il a reçus, ou bien, devra-Hl
les réunir à la succession pour qu'une égalité
absolue règne dans les opérations du partage '?
En termes techniques, y aura-t-il ou non ,·appot'l
à la succession ?
La question est résolue par le premier article
de notre section, art. 8113: l< 'font héritier, mème
» bénéficiaire, 'euant ù une succession, doit
» rapporte1 ;\ ~c::.. t'lllH'nl1cr~ Lont ce qu'il a reçu
�-
du défun t, par clonaLion entre-vifs, d1rcdc>) ment ou intlircctemenL : il ne peut retenir l es
\) dons ni réclamer l es l egs à lui faits par l e
» défunt, ù moins que les clon s et l egs ne l ui
>i aient été fai ts ex:press6ment par prédp ut et
>> hors part, ou aYec dispense du rapport. )>
Le mot rapporL ne co nvien t, on Je voit, qu' aux
donations entre-vifs , << l es seules, en effet, qui,
» ayant été emportées clu patrimoine du défunt,
» sont susceptibl esd'y êlre rapportées.\) (DE.\IOL.)
L 'e-xpression est ùonc impropre pour les legs
comme pour l es delles ; mais le Cocle n'ayant
pas dis tin gué en lre ces tlifîéren tes so rtes de
libér alités, nous ne seron s pus plus puris te qu e
lui, et nous comprendron s clans le rc1pport des
donations le rapport ·
>l
l" lJes tlo11 :; enlre-\ïfs ;
~0
Des legs ;
311 Des Llellei-:
Le rapport e::.t ùo1H.: J'obli galwn tle to u t ll én tier cle réunir ou de l aisser ù la masse tk la
succession les <.:lwses qu'il a re<; ues par J ons
ou par legs, ai11si qu e de l en ir compte clcs
sommes ùont il e:.t clélJiteur enrnrs le défunt.
Les règles générales posées par l'art. 843 nout>
laissent voir que l a no tl\ elle théorie du rapport ,
bien qu\·n g 1 \lll<h~ pat'l1e c111prun lée an clruil
l'i->-
1omni11 <'l nu' coutu111 ei-:, e11 diffP.rc> clan-.. sou
rnsemble ( 1).
A. Rome, en effeL, l es desce ndant étaient
seuls ten us tl e celle obligation ; Je Code J'impose
it tout llérilier quel q11'il soit. En droit rom 8 in
les l egs n'é Laient pas sujets à r apport ; nom:
,·enons ùe Yoir que l 'art . 815 l es y qstreint.
Enfin celle r ègle ne r égit plus aujourd'hui que
les su ccession s ab inle.-;fal, tandis <Jn'elle s'::ippliquait à Rome mêm e aux hérédi tés testamentaires . L es deux l ég1slalions se confonden t toutefois en ce qu'ell es permellenl au donateur <iP
dispenser du rapport celui que l a l oi y sourr.e t
Le principe romain qui res treignait l'obligation
du rapport à l a seul e ligne directe desce ndante,
avait passé dans l es co11 tnmes, et l e Code en
imposa.nt cette obligati on f• Lotis l <'S héritier s
diffère du droit co uL11mier com me il différnit
déjà snr ce point de l a l égislat ion romaine. Cette
extensio n de l'obligalion du rapport est un e
innovati on introduit e par les lo i ~ cle l'époque
interm écliaire. L e Code en a conse1Té le princi pe, m ai s il e11 a adou ci 1:1 ri gne11r en an toric:;an t la rli spensr CX[ll'l'sse d11 rapport
( t ) Auss1 ne prnt-on plus :n1juunl'hu1 inYoqucr les re~les
romnines ou contn mieres sur le rapport, "1 ce n'est pour inter/.
pr!'ter cen' d es nrhclrs rln Codl' qui scrnir.nt l'e,actr rcprorlurtion de ers l'r'l"ll's !C:\ss ·1 1 mni IRIS )
�-
86 -
On voit par là que nous reje tons co mme co ntraire à la pensée qui a guidé le législ ateur
dans cette matière, l'opinion des auteurs qui
basent la théorie du rapport dans notre droit
nouveau sur l'intention présumée du de cujus .
(DEMOL.) Sans doute c'es t ce tte intention qui
devrait être l'idée première du rapport (1), car
les lois sur les successions ne dewaient être
que des lois interpré tatives de la volonté du cle
cujus ; mais telle n'est pas la base du système
du Code puisqu'elle n'est pas en harmonie avec
la plupart de ses dispositions.
On ne peut, en effe t, appliq uer celte idée à
la règle d u Code qui soumet au rapport un
collatéral s uccessible à un degré très-éloigné;
alors surtout que ce co ll atéral n'é tait pas héritier présomptif au moment de la donation. Comment de plus expliquer dans un pareil système l'obli gation du rapport appliquée aux legs?
Un legs est fait à on s uccessible. Quelle pensée
a pu guider le tes tateur ? Il a dù vouloir
• la propriété
évidemment procurer au légataire
de la chose léguée el faire de lui un véritable donataire ; et cela, ind épendamment de
· sa part héréd itaire. Si telle a été son intention, e t difficilement on oserait le co ntes ter,
1) AGNÈS. De la proprieté considél"ù comme principe de conseri·atton el cle l' hél-editil.
1 (..
((
(.(.
-
87 -
commen L ex pliquer que l' arlicl e 843 n'autorise
le prélèvement du legs que dans le cas où il a
été fait par préciput et hors part? On a vainement essayé de concil ier ces deux idées , et M.
Demolombe, qui sou tient la do ctrine contraire
dans son Tl'aité des successions, est obligé de
convenir qu'il faut voir dans cette disposition
une reproduction malh eureuse des principes
coutumiers. Rappelons que l'incompatibilité,
entre les qualités d' héritier et de légataire, avait
été, il est vrai, édi ctée par la plupart des coutu1)1es, mais celles-ci, plus logiques que le Code,
avaient d éfendu d'y déroger.
Il faut donc reconnaître que le rapport a pour
idée première dan le Code civil le désir de
maintenir l'égalité entre t(\us le:; héritiers (1),
id ée fu neste qui, poussée dans ses dernière~
limites, avait donné naissance aux lois r6vo\utionn aires de l'an Il (2).
('' ) o Pour les successions le principe naturel e t le
• principe d'égalité entre les enfants, qui fait que les cadets
» ne s'irritent plus contre les aînés, que les sœurs ne sont
» plus sacrifiées à leurs frère", que ln paix, la connance et
» !"amour regnent nu s"in du foyer dome_tique. • (DUPI:-J,
Proc. gén. )
(2) Dans le nouveau Code italien Io. théorie du rapport a
pour base l'intention p résumée du testateur, et !"obligation
qui ne porte que sur les donations entre-vifs est restreinte
aux seuls desce ndants Y. Le Code rit·il 1talirn t t lt Code
Napoléon, par M Huc p 20 1.
�-
CHAPITRE
J.
DlNS QUEi, CAS IL \1 A LIRU A n1rronT.
Nous diviserons l'étude de ce pre mier d1 apitre en trois sections :
1. Quelles pers onnes doive nt le rapport ~
2 . Quelles pers onnes peuvent l'exiger '!
:3. A quel le s uccession i~ es t <lù '?
.'ECTlON J.
Qiœlles pe!'so11nes doiven t le 1·upporl ?
L'art. 843 répond direr lcment :1 la <rues l io n :
a ToHl hél'ilier do1w/(li1·"··· » Ains i ta ule per so nne
qui es t à la fois héritier e t do nataire est tc nn e
au rapport de ce qn'elle a reçu . Ces deux conditions sont essentielles; l'étude de la pr~ mi ère
nous fera connailre les effe ts de la renon ciation
de l'h éritier donataire ; l'exam en ùe la seconde
nous conduira à parl er clc ln rlis pcnsc du rnp po rl
8!J -
(-'L) Toul hé ritier LloiL le rapporl ; c;'es t lù la
première condition . Il faut donner a u mot héritier le sens de su,ccesseur ab iiitestat: « cette ex» pression comprend dans l'art. 843, non s eu le» ment les héritiers légitimes, mais tous les su c» cesseurs que la loi appelle au partage de la
». s uccess ion. » ( DE.MOL. v . n° 198.) La preuve
en est dans l'art. 857 qui oppose à héritier le
mot légataire pour ne perme ttre qu'au premier
de réclamer le rapport. Il ne pe ut d'ailleurs en
être autrement, car la loi n'a aucune rais on pour
vouloir imposer l'égalité à ceux qui s ont héritiers par la \'Olonté du testateur. Le rapport a
donc lieu s ans qu'il y ait à co ns idérer le degré
de parenté ni la lig ne à laq uelle appartie nt le
successible donataire . En cas de feute dans une
succes sion, l' héritier doit le rapport à tous ses
cohéritiers ; et ce rapport es t dù par lui indhid nellement, car la s uccession est touj ours une,
e t la r épa rtition de l'hérédité ne faiL pas qu'il y
ait une multiplica tion de s uccessions, comme
dis ait Ricard . (Donat . n° 686.) Si tlonc un suc- •
cessible du cô té paternel reno nce à la s uccess ion pour s'en t enir à la libéralité que le défunt
lui a faite s ans clause de préc iput, cette libéralité
n e peut p as s' imputer s ur la pofü o n afférente à
la li gne pate rn e lle. (A rg. art. 818, 807. A.uBnY et
RA U , v. no 307.) Po ur le mê me m olif un coll ah~
ral , a lege vocatu,._, venan t e n <"oncours a,·ec un
7
�-
\lO -
ascendant ~ern tenn du rapport. C:P dernier
point très controversé dans le dernier étal des
coutumes est aujourd' hui hors de doute, et L'art.
843, qui l'a définitivement tr~nché, l' a fait peutêtre dans un sens trop rigoureux (1).
Quid des s uccesseurs irréguliers en général ?
Sont-ils tenus au rapport ? La quesLion ne se
discute pas pom l'enfant naturel (art. 760) ; les
raisons que ron peul invoquer pour so umettr e
au rapport l'enfant na turel con\' ie nn ent à tons
les cas; car l'égalité que la loi veut maintenir
entre les héritiers légitim es es l lout auss i d ésirable entre les successeurs irrégu liers, et on
11e voit pas, par exemple, pourquoi Je rapport
ne serait pas imposé à tles frères naturels
comme il l'est aux frères légitimes. Il y aura
donc lieu à rapport dans les différents cas où
les successeurs irréguliers (enfant naturel , frère
et sœur naturels, père et mère nature ls) viennent à une success ion en rnrtu des art. 758, 765,
766,
c. c.
Le conjoint est aussi un successeur irrégulier, mais ne venant à la s uccession de l'épo ux
(.f ) «
Toutes les dispositions qui ont trait au rapport ont
~ lieu en toute succession directe ou collatérale, la loi établis" sant la même égaliti' entre tous les héritiers . u (Art. 159
du projet )
-
91
prélléc?d é qu 'c11 l'absence de tout s ucces:-,iblt·
même irrégu lier (art. 767) (1), la question dti
rapport semb le ne pouvoir ètre posée. Ou a
cependant imagin é le cas assez rare d' un époux
qui se serait re ndu coupabl e de bigamie; le
second conjoint étai t de bonne foi e t le mariaoe
n
n'a é té annulé qu'ap rès la mort du bigame. (art.
188.) La bonne foi faisant prodilire au mariaae
0
tous ses effe ts civils (art. 202) en faveur de
l'époux qui en j ustifle , les deux conjoints du
bigame vie ndront au même Litre à la s uccession
et le rapport sera obligatoire.
Il ne peut év ide mment èlre ques tion de rapport pour l'Etat qui ne vient qu 'à défaut même
du con joint (art. 768).
Y aura-t-il rapport dans les successions dites
anomales? (art. 35'1 e t 332, 747, 7GG. ) La question se dédouble : e lle ne peut intervenir
entre les pers onnes qui viennent recueillir la
success ion anomale e t ce lles qui prennen t la
s uccess ion ordinaire; ces personnes ne sont
(1) li en serait autreillc:lt si le projet de loi sur les droits
de l"époux survivant ùe M. Delsol, député, était adopté par
l'Assemblée nationale. - La CourdeC11ssationapp&lée ù donner son avis a, le H janvier 1875, reproché au projet ùe loi
son silence sur la double question de la saisint et de l'obligation du rapport à s11ccess1on ; cette lacune a été comblee par
hl. Boissonnade, dans son intére ·saute Histoire de~ droits dt
/' <1po11x Slll"VÎCOlll
�6
-
~l.!
-
pas Jes cohériliers, or l'art. 837 tlispose .q~l~ le
rapport n'est dû que de cohéritier à coherit1er ;
il y a ici a.lia atque alia successio. Il faut, au contr~ire, soumettre au rapport, les différentes personnes qui viennent an partage cle la succession anomale . Ce sont de véritables cohéritiers,
e t la disposition de l'art. 843 es t trop absolue
pour a utori ser une d is tinction entre les successions anomale et ordinaire (1) .
JI est à peine besoin de mentionner comme
étant tenu an rapport l'héritier bénéficiaire; la
loi s'en explique expressément dans l'art. 843.
Cela tient à ce que l'acceptation sous bénéfice
d'inventaire, ne produisant d'e!Tets qu'entre l'héritier el les créanciers du de cujus, ne modifie
en rien les droits et obligations des cohéritiers
entre eux (2). (DEMOL. m , 358, 353. )
Le rapport n'est imposé par l'art. 843 qu'à
l'héritier venant à la succession. Cette disposition s uffirait pour dispenser du rapport l'héritier
renonçant ; le législateur a cru devoir le répéter
dans l'art. 845 . '< L'héritier qu i renonce à la
(4) Cette seconde phase de la question ne peut s'élever
dans le cas de l'art. 74'1 : si le père et la mère ont fait la
donation , chaque ascendant reprend sa moitié et la part du
renonçant accroît à la succession ordinaire.
(2) L'application des règles du ra)Jport à l'acceptation
bénéficiaire en démontre tout le danger ; aussi doit-on regretter que la loi l'ait imposée dan s certains cas. (Art. 46 1)
-
!13 -
» succession , peut cependant retenil' Je don
» entre-vifs , ou réclamer le legs à lui fait, jusqu 'à
>> concurren ce ùe la portion disponib le. » Il
résulte de cet article que le successible ilonataire qui s'en Lie nt ù la libéralité dont Je de
cujit::- l'a gralilié, n'a µus à la rapporter à la
succession à laquell e, par sa renonciation, il se
rend étranger, alienus ab hœredilate. (L. 22, § l,
Cod. De jur. d elib.). Cette disposition est tonte
naturelle; à la mort du défunt l'héritier donataire
revêt deux qualités ; il reste donataire et
devient hé ritier. La loi a rendn, il est vrai ,
ces deux qualités incompatibles quand la donation est faite sans dis pense de rapport; mais
cette incompalibilité es t indépe ndante du droit
d'option de l'h éritier. Si donc le successible
abdique en renonçant sa qualité d'héritier, il
reste do nataire pur e t . imp ie, et n'est tenu
que de l' ac tion en rédnc tion pour le cas où la
donation entame la quotité di ~ ponible . (CorNDELISLE, Du d1 oit de l'éle11tion, n° 203).
Ce tte solution doit ètre maintenue quand la
dou ation es t faite par Je do nateur à titre d'a\'ancement d 'hoirie, ca11sa u p1·essa. Il ne peut être
en e JTe t qu e le Cod e civil ait Youlu faire revivre
la doc trin e ll e Dumoulin que les ancien auteurs
et un e jnris prude nce cons tante du Parlement
de Paris anti ent nni\'ersellement rejetée. Dumoulin <ilrnsail de 1·c t1e i1l6P q11e. le don en avance-
�-!H -
ment d'hoirie esl un do11 cle présuccession , 1111 <'
remise anticipée de la part qui revient au donataire dans la succes ion dn de cujus; c'était ,
co mm e nous l'arnn s expliqné en déta il, exagérer, en le dénaturant, le caractère du don en
a\·ancement d 'hoirie, puisque celle clause (]li <"
Dumoulin interpré tait contre le donataire avait
eu pour but, à l'origine, de lui permettre de
cumuler la don a tion avec sa part hé rédita ire.
(LABBÉ, Dtt don en auanc. cl'l1oirie, n°- 16, 21 .)
Ces considérations doivent également nou:-:;
faire r ejeter un e doctrine nouveJle d'après laquelle le don en arnnceme nt d'hoirie ne se
transforme en donation ordinaire que par la
répudiation du donataire « d'où il est manifeste
i> que le don qui avait, comme avancement
>) d'hoirie, la date du
jour où on l'a fait , n'a
)) comme don ordinaire que la date du jour où
» il devient tel. Or, c'est par ordre de dates
>) que, d' après l'art. 923, les libéralités doivent
>) se réduire en comm ença nt par les dern ières. )>
(MARCADÉ, art. 916, n° û.) Ainsi , d' après ce t
auteur, tes donataires pos térieurs doiven t
être préférés au s uccess ible, e l l'action e u
réduction doit s'exer cer co ntre lui avant même d'attaquer les légataires. De telles conséquences sont trop en opposilion avec les
disposition s du Code s ur les dona tion s, pour que
le priu cipe clont ell e:-; é manent pui sse è lre ac ce p-
l li •
-
95 -
t.é. La loi n'a pa :-; rég lé différemmen t les eflets
d'une donatio 11 s ~1 ~t.1J1 '~e est faite à un successible ou à un
· ~7'~L l'art. 894 qui exige un
1
dépouillement actuel et irrévocable, est trop
absolu dans ses term es pou r a utoriser u11e pareille distinction. Du reste, en visant toute espèce
de donation fa ite à un s uccessible, la doctrine
nouvelle es l mème plus radicale que celle de
Dumoulin qui réservait so n prin cipe à la seule
h ypo th èse d' un don en avancement d' hoirie
expressément stipulé. ( D U MOULI.'.'l sur Paris,§ 26.
En advanc. d'hoirie, n• 5.) (1).
L'héritier r enonçant peut donc garder la donation dont il a é té gr atifi é, mais à quel titre et
dans quelle mes ure la garde-L-il ? Cette question
qui trouve sa place n a turelle dans l'étude de la
réserve se rattache également à la théorie de
l'art. 845. Distinguons s uivant qu'il y a ou non
des hériti ers ù r éserve.
A. Il n'y a pas cl'hériliers ci réserve. - Dans ce
cas toute la succession é la nt disponible, la renon c iation assure à l'héritier donataire l'intégralité de la c l10se tloun ée. La difîlculté ne s'est
t'.·levée q ue r1:; lntiYe ment au partage de la mas P
(Il Ln cond1tton unpo::.ee au donataire de ra pporter à tout
1!vine11tC11t la chose donoee a la sncces::.ion du donateur, e::.t
parfaitement Yal:iblt> et doit produire tous ses effets En c11
:;:<>n s D1nin1, op rit 11• 263 )
�-%-
•
entre les antres cohériLiers. On a s upposé un e
succession dérnlue ü trois cousins paternels
et à trois cousins maternels. Un cousin paternel, donataire entre-vifs du de cujus renon ce à la succession ; cette renonciation qui
le rend étranger à la s nccession ne va-L-elle
pas modifier les droits de ses colignagers
dans la masse héréditaire? (1) La majorité
des au teurs était unanime à reconnaitre qu'il
fallait traiter le donataire comme un étran ger ,
et que le partage de m it se faire sans tenir aucun
compte de la donation faite au renonçant ; en
l'espèce, chaque cous in paternel prendrait un
quart de la succession et chaque cous in maternel un sixième. Cette solution a été combattue
comme contraire aux textes de la Loi et à L'intention du de cujus, par M. Ragon dans sa Théorie
de la 1·étention et de l'imputation des dons (ails à
des successibles. Le Code, dit en s ubstance ce
savant professeur, en conservant l'in s titution du
rapport et les principes de la fente (art. 733), a
eu pour prin cipal but de maintenir l'égalité eT)tre
les héritiers ; s i donc on impute la donation sur
la masse totale, cette égalité se trouve blessée
puisqu'on donne à chaque ligne un droit éga l
(1) Rappelons qu'il ue s'agit pas ici d'astreindre les cohéritiers du renonçant nu rapport de la donation . Le rapport est
dû d~ coh~ritier à cohéritier et. non de ligne aligne. (A.rt. 857 )
-
97 -
dans la s uccession, alors qu' un membre de l'une
d'e lles a déjà reçu une donation entre-vifs. De
plus ce système est contraire à La volonté du
de citj1ls qui, en ne dispensant pas du rapport
le don en avan cement d'hoirie, a entendu faire
un don de présuccession. On évite de tels résultats, dit M. Ragon, en imputant la donation non
s ur la masse de la s uccession, mais sur la part
de la ligne avantagée ; car, bien que l'héritier
donataire ait renoncé à la succession, on ne peut
vouloir que sa renonciation profite à ses colignagers, et nuise allx autres cohéritiers ; c'est pourquo i on doit toujours Lui attribuer une part ficti,·e
de l'héréd ité qll'on imputera sur la somme afférente à sa ligne. Ainsi clans l'hypothèse d'une
s uccession de 36,000 fr. et d'un don de 6,000 fr.
faiL à un co nsin paLernel, l'app lication de cetle
nouvelle théorie conduit à donner 18,000 fr. à la
lign e maternelle et 12,000 francs à la ligne
patern ell e ; chaque héritier prend donc une
part égale dans la succession, et l'égalité la
plus absolue règne clans le partage des forcei-.
héréditaires . Ce système est ingénienx mai~
trompeur , et i\T . l\ Tachelanl , dans une sarnnte
ctissertation, en a démontré toute la subtilité (1).
JI importe d'abo rd rle ne pas ::;p laisser sédnire
(I J :'IJACHEl •. \Rf'
XV. 38 1
llr1
lm/or
1\.
'
-
Yim.."l'l
Rr1· 1•1111
•
�-
•
98 -
par l'exemple habilement choisi sur lequel disc ute M. Ragon ; le résultat n'est plus en effet en
harmonie avec la r ègle si l 'on suppose que le
don fait au success ible èst de 12,000 fr. au lieu
de 6,000 fr. ; la ligne paternelle devrait avoir 6,000
fr. et les 18,000 fr . restant ir,ü ent à l 'autre ligne;
et cependant, sur cette espèce, ~ I . Rago n atlribue une part égale de 4,800 fr. à chaque héri tier .
(no 214.) Cette doctrin e est du reste contraire
au texte des art. 783 et 913, puisqu'indépendamr1ent des r ègles sur la réserve (e t c'est notre
hypothèse) la renonciation d'un ll é1itier l e rend
étranger à la succession , ùe tell e sorte que c'est
eulement en qualité ùe donataire qu'il délient
la ch ose donnée ; auss i Je pariage devra-t-il
i;'efîec tuer comme si le renonçant n 'avait jamais
été héritier. La part des cousins patern el s es t,
i l est vrai, différ ente de cell e des m embres
de la ligne matern elle ; 1nais cela ti ent à ce
que l eur nombre es t moindre, r és ultat auq uel on serait égal emen t co nduit dans le cas
du prédécès du donataire (~lach e l ard.) Observons enfin a\·ec M. Demolomhe qu e ce mode
d'imputation ne peut s'appl iquer à un indigne;
on ne peut dire en eITet de l'indigne ce qu'on
a établi pour Je renon çant, car les co héritiers
de la ligne paternelle ne doivent pas supporter
' les conséquen ces cl ' un crim e nllf1u el ils n'o11t
point partidp<'•.
-'l'l -
( B). i l !/ o dei; luJrilier~ réseruulrtires. A quel
titre cl dan s qu eJl e mes ure l'enfant donataire
.garde-t-il l a don atio n '? L'article du prnjet Jac- ·
qneminot le disait : comme un élra11get pounnil
le fair e. Ce motif n'es t pas reproùui t dan::; la
rédaclion cle l'a rt. 845, et on a bien fait de le
retrancher parce qu 'il n'avait rien de législatif.
Le législateu r en efTet prononce et décide, il 11e
discute pas. Mais l 'idée qui avait inspiré ce
m otif n 'en subsis te pas moins, et nous croyons
qu'elle réflète exactement la véritable pensée du
légis1 ateur; l a renonciation ass ure donc à l'héritier la propriété i11tégrale de la chose donnée.
et l 'imputation se fera exclusi\'ement sur la
quo li Lé disponible. Cette in ter pr étation ne souleva aucuri doute en juri sprt1 dence ju squ'en 1818.
A celle époqne un suctess ible donataire avait
éle,·é l a préten tion , bien qu'en r enonçant à la
::; uccession, cle reten ir tout à la fois la quoti té
disponibl e et sa part dans la rése n ·e. L a cour de
Bord ea ux avait rejeté tette prétention par le
mo tif « que l'étendue ùu droit de r étention de
» l'enfant r enon çan t était déterminée par l'cu'l
» 815, el que les trois qu arts résern~s par la loi
>l appartien nen t aux enfants qui acceptent la suc>l cess ion par l'efTet de l'accroissement ré~ultant
» de la renonciation du donataire.>> Sur le recour:-;
en cas!'1.a l ion, la Co11r. en rejeta nt le pom '01
par 1111 ;1rrl'I p11rlrnt r nw1it nin ti' i'. D ma1n tf'111t lt>
•
�-
tOO -
véritable sens de la loi. C'est l'arrêt de la Roqne
de Mous, resté célèbre comme arrêt de principe .
. Le t:onseiller rapporteur était M. Porriquet, l'un
des collaborateurs du Code au titre des successions (1).
Ce système est d'une netteté et d'une simplicité qui auraient dù en assurer le triomphe ;
on a cependant voulu voir dans son application
de graves inconvénients et des auteurs ont
soutenu qu'il portait atteinte au droit de disposer du père et permettait à l'enfant de dénaturer, contrairement à la volonté du donateur,
le caractère du don qui lui avait été fait. Ces
considérations éloignèrent peu à peu la jurisprudence de la doctrine de 1818. Deux arrêts,
l'un de la Chambre des requêtes (11 aoùt 1829,
Mourgues) et l'autre de la Chambre civile
(24 mars 1831., Castille) déclarèrent le don fait à
l'enfant renonçant imputable sur la réserve
d'abord, el s ubsidiairement s ur la quotité d isponible; mais avec cette restri ction que l'enfant
•
1) Il n' est peut-être pas sans intérêt de signaler que la
plupart des commentateurs qui ont expliqué le Code aussitôt
après sa promulgation, soit qu 'ils fu ssent imbus de la doctrine de la coutume de Paris, soit qu'ils aient YOulu la retrouverdans le Code, ont professé l'opinion que 1enfant renonçant
avai t action pour récl1tmer ln. réserve contre les donataires,
rt quïl pouvait à plus forte rai$on ln retenir par exception
nec la portion clifiponible.
-
tOI -
ne pourra rete11ir le ùon que dans les limites
cle cette quotité. Cetle doctrine qui consacre
la seconde phase de la jurisprudence sur la
question dont s'agit, fut qualifiée par M. Je
Procureur général Dupin de système des imputations fam.tasliqiies. On commençait en effet
par imputer la donation sur la part que le
successible aurait eue dans la réserve, s'il eût
accepté; on laissait ainsi la quotité disponible
libre pour en faire profiter d'autres donataires
qui n'y auraient eu aucun droit si on avait
rigoureusement imputé la donation sur la quotité disponible. (1)
Du système des imputations à celui du cumul,
il n'y avait qu'un pas à franchir. Le courant
des idées y poussa tout naturellement : puisqu'on imputait déjà la donation sur· la part de
réserve du renonçant, on devait bientôt permettre à ce dernier de retenir, outre sa part
dans la réserve, toute la quotité disponible. Ce
résultat admis par la Cour de Cassation (17 mai
1843, Leproust) consacre le troisième sys tème
de la jurisprudence s ur la question . Il consi te
(1) A l'aide de la théorie des imputations. on parnnt a
faire prévaloir un majorat constitué pnr testament sur une
donation entre-vifs et à éluder ainsi l'art. n5qui donnii avec
raison la préférence aux dons entre-vifs sur les liberalttes
testamentaires.
•
�-
10~
-
à é lever la do uble
"
imputation 1.!.La blie pa r le
second s' 'R tème jusqu'à la limite tl e la r éserrn
et de la p~rtion dis ponible cw1wlées, e t n'es t par
conséquent qu'trn corollaire de l a th éori e des
imputations. (1)
Le cadre res treint de n otr e thè, e nous e mpêche de donner à chacun de ces sys tè mes les
dé\'eloppeme~ts qu'il exige ; la ques tion d 'ailleurs touche de plus près à la th éo rie cl e la
réserve et cette di c ussion serait toute nature lle
dan s une é tude s ur la quotité dis ponibl e. Nous
nou s borneron à développer le premie r sys tème qui nous parait le plus en harmonie avec
l'esprit de la loi et qu' un arrêt de cassati on,
(Chambres réunies, 27 nove mbre 1803), a déf1n itivemen t con sacré.
Le nœ ud de la ques tion est d ans l'ar t. 81~
dont le sens doit ê tre exac te men t Jixé, pu isq ue
le but de cet artic le es t de déterminer les <iroits
du renonçant. Or il es t in aclmi s ible que le
lég1s lateur, en disant que le re non çant peut relenir le don jusqu'<l conc11Nencr de la quotité
dispoaible, ait \'Oulu dire que le renonçant, outre
sa ri'!'erve, ponvn il reteni r mê me la porlion
I
1
...+
1) Duranton (v11, n• 286) tranchP la difficulté en propûsnnt de permettre aL\ perc de famille de disposer de la part
ùe résen·e de l'enfant renonçant. Que dev iendrait alors l'art
786'
103 -
lli s po11il>l e; le sens ùe l'art. 845 es l trop restri c tif pour autoriser un e pareille interpré tati on.
Si le législateur avait voulu perm ettre Je cumul.
nolre sentiment es t qu 'il s'en serait ne tteme nt
expliqué, car il n'es t pas na turel de croi re qu'il
eût pens6 que c'était inutile à dire par la raiso n
que ce c umul avait toujours été ad~is. Les
conséquences de ce s ilence avaient s i bien é té
comprises par les coutumes e t par l'ordonna nce
de '1731 que toutes s'en exp liquaient.
Du reste il ne peul être ques tion , en l'espèce,
d e r é te nti on de la réserve par \'Oie d'exception;
cette rétention qui ne sera it pas possible s i
notre r éserve n 'était que l'an cienn e réserve
coutumière (-1) ne l'es t pas a fortiori aux veux
de ce ux qui font particirer la réserve du èoae
c ivil de la légitime du llroit écrit. La réserve
se rattache, en e ffe t, quant à son but, à la
légitim e, ma is avec ce caractère particu lier qui
(1) « La légitime du droit écrit est due aux enfants en leur
qualité d'enfants, lesquels peuvent ravoir au moinsjure
» retentionis, quoiqu' ils aient renoncé à la succession Au
» contraire, la réserve coutumière est due aux héritiers unt» quement en leur qualité d'héritiers. C'es t pourquoi entre
» plusieurs qui sont appeléi.! à une s uccession ceux qui re• noncent pour se tenir à leur leg ne peuYent aYoir aucune
" part dans les quatre q1ûnts des propres que la coutume
» réserve aux héritiers. u ( P OTRIER, In trod . tit. xv1 cout Or/
n• ·'>3.-L&enuN, Suce. Liv 11, ch. 1v.)
o
�-
10!. -
lui a été imprimé par le droit intermédiairet
qu'elle est désormais une portion de la s~c
cession ab intestat. ll ne s uffit done pl.u s . aujourd'hui d'être héritier pour. avo i.r dr0tt ~ la
légitime ; il faut encore vemr ul1.le1_n ent a i_a
succession ; ce qui enlève tout droit a la réser ve à l'h éritier renonçant.
n faut donc tenir que le système de l'arrê t d e
1818 qui est de beau co up le plus s imple d an ~
son application es t aussi le pins conform e a
l'esprit et au tex te du Code c i,·il. Ce système
cré~ il est vrai, une gr ave difficulté en ce que
J'im~utation du don en aYancement d'hoirie
sur la quotité dispon ible peul épui ser celte
quotité, et préjudicier à des rionaLaires po.stérieurs que le dispos an L a m it peut-è lre grattfiés
de bonne foi ; mais ce mal trouve un rem ède
effi cace clans le soin que pourra prendre le père
de famille de s ubordonner le bienfait à l'acceptation de son hérédité (1). Cette doctrine a été
consacrée par la Cour de cassation (27 novembre
1863) et paraît avoir définitivement fixé s ur ce
point la juris prudence. (E:n Ce sens ÛEMOL . XV T.
262. - AuBRY et HAt'. Y. ~ G2û.) (2J
, M. VALETTEÏ'lsoncours
-Dt:R.Yll. 373 . -MOlJRLON , ll.
17G
J.
(2) La nou velle doctrin e <le la Cour s uprème a l'avantage
de ne pas préjuger la question <le savoi r si l'enfant r enon c;ant
doit être com pté dans le ('A.lcul <le ln rescn·c .
i
<"'\·
i' 1
Il •
-
I U5 --
§ f I. - Pour Nre so umi ~ a u rapport nous avons
dit qu' il faut être à la fois hér itier el dona laire
ou léga taire. Dès qn'à la m ort du ùonateur ces
de ux qualités se trouvent ré unies s ur la m ême
tè te le rapport est dù ; et il importe peu qu'au
moment où la donation a e u lieu, le donataire
n e ftit pas héritier présomptif du de cujus. La
condition du donataire doit être recherchée
lors de l'ouverture de la succession : <1 Le
» donataire qui n'était pas héritier f}résomp» tif lors de la donation, mais qui se trourn
» s nccess ible au jour d e l'ouverture de la
» s uccession, doit également le rapport, à moins
le donateur ne l'en ait dispensé. »
>> que
(art. 846). Ainsi un père fait pend ant la vie de
so n fils une d onation à l'un de ses frères, son
fils me urt le premier ; si à la mort da père la
s uccession es t dévolue à la ligne coll atér ale, le
frère qui a reçu une donation en devra le rapport. Ce point est hors de doute, et à défaut de
l'art. 84û, la d isposition s i précise de l'art. 843
nous eùt s uffi pour l'établir. (1)
( 1) On aurait pu ne pas exiger le rapport dans ce cas puisla présomption d'avancement d'hoirie qui est la base
cl u- rapport fait défaut ici ; on a cru cependant être auter
risé à l exiger sur la présomption que si le disposant eût
prévu Je cas énoncé dans l'article, il aurait pu Youloir l'égalité entre ses héritiers . (GRENIEn )
fj ue
s
�-
IOli -
Celle Lléci:-;ion li ent ù rc quP la loi prés nm e
que Je défunt n'aurait pa, di s pos<~ .en faveur cln
donataire ou du légataire s'il arn1t prévu que
ce dernier cte,iendrait lin jollr son héritier . (1)
ll arrivait souvent dam; l'an c.ien droit qu 'o n
étaiL obligé de rapporter r.e qn'on n'av-ait pa~
personnellement reçu. Ces rapport s r.owr a1.1ln'.1
se comprenaient dans nn sys tème qm proh1?a1t
la dispense du rapport , et qni ::ivait_ établi ,la
présomplion que les dons o~ l eg~ faits au fil s
du s uccessible étaient réputes fatts an s uccessible lui-même. (Co1d. Paris, art.. :30û); le principal motif était qu e la loi aurait été trop faci.lement élu dée s i on avait pu donner an fil s, pere
ou conjoint de l'll éritif' r. Mais cette co ns idération ne dernil pas prévaloi r sous l'e mpire d'un e
législation qui autorisai t les libéralités précip~
taires et le donateur devait désormais pouvoir
faire \ndirectemenl ce qui lui était permis de
faire d irectemen l.
Ce principe fut reconnu par l' art. '162 clu projet : « L'héritier n'es t tenu de rapporte r qne le
(~ ) Al.iBRYetRAU, v1, §629. - C FIABOT sur8~3. - DE~10L. xv1,
179. - Nous préféron s ce motif à celui que donne Mourlon :
c L a loi a considéré que 1 ~ donatcu r ayant pu dispenser son
» frèrP de robligation du r11pport en prévision d11 cas où il
~ devien drait son héritier, et n e l'ayant pas fait, n 'a pas en" tendu déroger au principP d'égalité établi entre les hé ri• tiers. o ( 11 , 177.}
IOî -
1> don qui lui n t'· té fait personnel lemenl. » Les
arliC lf'!' Rllivanls 1();1 e t 164 <U"'n>. loppent le S \·stème nouvea n : Art. 163. e< Le père ne r~ p
» porte poinL le don fait à son fil s non
» ~ 11c cess ibl e. >> Art. 164: « Le ftls qui vient
» de s on chef ù la s uccession dn donateur ne
11
rapporte point le don fait à son père soit qu'il
» ait accepté la s uccession de celui-ci, soit
i> qu'il y ait renoncé.» L'article '167 relatif au
ro njoint é tait différent. << Lorsqu'il a été fait un
>> don à l'un des deux époux, qni n'est point
» s uccessib le, ou aux deux époux, dont l'un
>> seulement est successible, le rapport n'a lieu.
>> de la part de l'éponx sncces ib le, que rians
» le cas où il profite du don, et po ur la portion
» dont il profite par l'effet de la commun auté,
>> e l selon les règles établies au titre des Droits
» des épou.JJ. >) Mais cet article fut justement modifi é par la section de législation qni décid a que
>> les don s e t legs fa its au conjoint d'un époux
>> successibl e 11e so nt pas rapportables. » Cette
rédac ti on était des plus claires e t on doit regretter
qu'elle n 'ait pa éLé cléfinitiYement acceptée.
\[alh eureusemen t Tronchet pen. a que tel quïl
Hait réd igé, l'ar t. 167 donnerait lieu à des frauri es, et qu'un père qui voudrait aYantager un
enfant au préj udice cle- autres n'aurait, i cet
<'nfant éta it mari é en com munauté, qu'à donner
a l' autre conjoint. En const"q 11encc l'ora teu1
�-
-
t
1\18 -
concluait au rapport du profil qu e le s uccess ible avait retiré de la donation . M. Tre ilhard répondit que « la section avait cru cette règle
l> inutile attendu qne le père n'a pas besoin d e
)) masquer l'avantage qu'il vent faire au conl> joint s uccessible puis qu'il peut ouvertement
» le dispenser du r apport. i> Le motif éta it
péremptoire e t on aurait bien fait de s'y arrêter;
mais Tronche t ayant fait observer que puisque
« la section é tablissait la présomplion de dis>> pense du rapport, il valait mieux l'exprimer ))
son observation, inexac te a u plu s haut point,
resta s ans r éponse et passa dans la r édaction
des articles 847 et 849. (LocRÉ, Lég. civ. tome X,
127.)
Quelles sont les con séqu ences d e la modification introduite clai1s le projet du Code? MM .
Aubry e t Rau et l\farcaaé soutiennent que l' idée
prem ière du projet a é té ch angée e t expUquent
les articles 847 et 849 par la présomption d'une
interposition de perso nne. Ces auteurs con s idèrent le successible comme ayant réellem ent
reç u ce qui a ét é donn é à son conjoint ou à son
fils, e t, voyant d ans le détour pris par Le donateur l' inten lion formelle de faire un e libérali t.f>
par préciput, ils déclarent cette clon ation rép utée faite avec dispense de rapport (1). C:es au-
te urs ajo ulertl cfaLlle un; que cette interprf> lation
c.;aclre parfaitement arec.; la l11 éorie générale clu
Code s ur l' interposiliou de personne conform ém e nt aux articles 911 et '1100.
Ce système 11 ous parait ètre en désaccord
fl agrant avec l'esprit Ùlt Code civil ; il ne tient
aucun compte des trava ux préparatoires et il
nous semble co ns truit à cô té de la loi. Le sentim ent de M. Demante nous parait préférable :
« Il n'es t pas na turel de croire qu'en présen ce
>) de la possib ili té, sous le Code, des libéralités
» préciputaires, le di sposant ait voulu prendre
» un détour pour a tteindre un but auque l il
>) arrivait directement sans violer la loi. » La
seule préocc upation du légis lateur a été d 'abroger plus s ùreme nt la dispos ition de la coutume
e t il a cru devoir s'en expliquer afin de faire
évanouir les doutes qu:aurait pu susciter le
souvenir de l'ancie n dro it. On doit regretter
cependant crue la formul e employée soit aussi
équivoque. Quant à l'interposition de personne,
elle ne peut ê tre invoquée ici ; elle implique
toujours un e incapacité de recevoir qui ne se
présente pas en l'espèce p uisque le Code civil
n autorisé la dispense de rapport (1).
Le s ucccs tble n'étant pas donataire dans le
(1)
Il,
(1) AUBRY ei RAU, V. §327-'.'130 -
M ARCAOÉ
sur 8~7 r t 8~9 .
109 -
D1rnA NTL~,
179
Ill, 183 />1s -
DE\IOL.
1v,
189. -
hlouRLOi-.,
�•
-
110 -
-
cas des arllde~ 8!iï ù 849, il 1J Y ëHll' ù pd::> lii>11 ù
rapport. 011 pe nt ceµe ndant se dema nde r avel'
M . Demolombe ::;ïl ·erail permis c.l' acl mini::>Ln.~r
la preuve que l'aïeul en fni sa nt un e uona lio11 ù
:;on pelit-lils a en tendu la faire ù son propre
fi ls. La recevabili té de cette preuve aurai!. pour
rés ultat d'obliger le Jil s au rapport de la douation. Sur la question Demolo mbe, repoussan L
deux sys tèmes également absolus de Delvincourt
et Duranton , enseig ne que la preuve ne doit p a:-;
en principe être admise con tre une préso mJJtio11
légale de la loi , auf le cas où le ùo nate ur aur ait
dans l'acte m è1ne de la donation exprimé u11e
volonté contraire (1Y. 192.)
La théorie des artic;Jes 847 à 84~ é tant airi::;i
connue, reprenons en détail chacune des hypothèses prévues.
Art. 847 : « Le don:; e t legs faits au fil s de
>> celui qui se trouve s uccessible à l' époque de
» L'ouverture de la s uccession sont toujours ré» putés fait:> avec dis pense de rap porl. Le pè re
>> venant à la succession du donate ur n'es t pa::;
» tenu de les r appo rter . )) li es t indifférent que
le père en acceptant l' hé rédité de son fils ait
recueilli l'objet donné dans sa s uccession .
Art. 848 : «Pareillement, le fil s ve nant de son
)) chef à la s uccession du donateur, n'es t pas
» tenu de r apporter le don fa it à son p ère ,
» mêm e qn a nd il aurait ac,;ceplé la s uc,;<.;essio 11
1
•
111 -
de ce lu L-ct. ~lai :> si le fils ne vient que par
représenLalio11, il doit rapporLer ce qui avait
,, été· donné à so n vère même dans le cas où
>)
i>
» il a urait répudié sa s uccessio n. J> La question
résolue est la s uivante : le fi ls "enant à la suc,;cession de son aïeul rapporte- t-il ce qui a Né
uonné à so n père '? On distingue :
(a.) Le fils vic11t de son chef : il ne doit pas
rapporter le don faiL à so n père car iJ n'est pa:,
à la fois lil!rilie r el ùonataire, peu importe d'aille urs qu'il ait vrofité de la donation. (AuBRY et
RAU, § 631). La rédaction ùe l'art 848, en ne parlanL pas de dispense de rapport, e t plus correcte
q ue celle des articles 847 e t 8-19.
L'article 848 ne s'ap plique pas aux descendan ts de l' enfan t naturel qui, s uivant l'opinion
généralem ent admi se, pe uvent succéder de leur
chef aussi bieu t1ue pa r représentation (MouRLO ',
sur l'ar L. 759). Le::; ùescenùanls de l'enfant naturel ne pouvant arnir une part plus forte que
cel le que la lo i do nne a u fils naturel (art. 908),
ces héritiers Llcvronl rapporter c.:e 4ui a été
donné à leur père. La disposition de l'art. 848
se trouve ici ne utralisée par les principes qu1
fixen t iurnriableme11t la quotité de ce ~uc1;e:;
seu r itT('gulier.
1lJ). Le til ::;
\ïütl l
par repré~~ntation : il rap-
�112 -
I
portera la donation faite à , on père, car le
représentant es t \'is -à-vis de ses collérilier!';
tenu des mèmes obli gations que le représenté.
JI faut éte ndre aux de ttes envers le défunt ce
que l'article dit des do nation s. (Pnris 1 27 juill et
1850. Dal. 54, 2, 630 . - Cass . 4 mars 1872 .
Dal. 72, 1, 319.)
Dans le cas où il y aurait plusieurs degrés à
fran ohir pour arri ver à la succession. le représentant doit-il rapporter Les dons qui ont été
faits aux ascendants des degrés interm édiaires?
Ainsi un bisaïeul a fail deux donations, l'une à
son fil s, l' aïeul du représentant, l'autre à son
petit-fil s, le père du représentant ; son père et
s on grand-père étant prédécédés, Je représentant rapportera-t-il à la succession de s on bisaïeul les don ations faites à ses ascendants '!
L'affirmative se déduit des prin cipes : la représentation n'opère pas en effet ornisso medio e t
l'arrière petit-fil s n'arrive à la s uccession de son
bisaïeul qu'en montant successivement à la
place de son père et de son aïeul (1). Aussi
le rapport sera d û alors même que par sa renonciation à la s uccession de ses ascendants ,
l'arrière pe ti t-fils n'ait pas profité du don.
Mais que déciderait-on s i l'arrière petit-fil ::;
(1) DBMOL. v. § 237. - D t!MANTE. 111.
HAu , v . 313 - rontrà J1 1\RCA IH~ s ur 848.
<.v
1 8~ bis. -
AUDRY
et
11 3 -
l ui-même avait reçu une donation de son bisaïeul (1)? ~l a rcaclé soutient que « ce n'es t pas
>1 p1'0)Jrio nomine que l'arrière petit-fils vie nt à
» la s uccession , mais bien comme ayant-droit
» e t remplaçant de son père et de son grand)) père. l> On le co ns idèrerait donc à la foi s comm e
héri tier en so n nom et comme héritier au nom
d' un autre si, lui imposant le rapport des donations intermédiaires, on l'obligeait à rapporte1
ce qu'il a perso nnellement reçu . (Marcadé s ur
81-8). Cette doctrine do it être rejetée aujourd' hui
comme elle l'a été dans l'ancien droit. li
es t in exact de dire q ue le représen tant succède
alieno nomine; son d roit est pers onnel e t c'es t
bien jure suo qu 'il arri ve il la s uccess ion. La
pre uve en est da ns la nécess ité que lui ·im pose
la loi d'avoi r une voca tion personn elle à l'hérédité. Si, de so n chef, il était écar té de la s uccession comme indigne, cette ca u ~e l'empêcherait d'y venir par rep résentation . Le seul bénéfi ce de cette ins titution étant de permettre de
s uccéder q uoique à un degré plus éloigné, '"'
représen tant n'en reste pas moins un héritier.
et co mme lei, il doit être tenu de ton tes se~
obligations . En co11séquenc.:e il y a lieu an rap-
(11 La ljlles t 1on ne &e po~r pns pour Jcs füi: lqzitime~ de
1'enf11nt naturel
�· - Il~
J
-
por t ùe la donation qui lu i u étt> faite (l ). Cette
sol ution découle du prindpe que nous a\ons
établi sur la question précédente ; si ou ne soumettait pas le représenLanL rlll rapport de l a
ùonation ùon l il a été gratifié, comment exiger
LJ.U' il rappo r Le ù l a succession de Ro n bisaï~u l l a
chose donnée aux ascendan ts ùes degrés rnLermédiaires ; U/Ji eadem ralio , idem jas.
Art. 81ü. ((Les dons el legs faits au co njoint
1) ù' un époux sncces ible so nl r épntés faits a\·er
» dispense de rapport ~i lrs ùon s et legs l:>O llt
>l faits conjointement à deux époux , dont l'un
,, seulement estsucce:-:.siblc, celui-ci en rappo1·tc
i> la' moitié; si \e;:; ll ons sont rails ù l'épo ux sucn ces~ib le . il l es 1·apporte en entier . l> La ::'- irnpl1 cité Je' la règle uuuvelle ùc l'art. 81,ù c.;onln:ii:.l e
<\\ ee l es anciens principes. LI
sinnulièrnment
c
u'y a même plu:s ù rec.;l1cr cl1 er , comm e so us le
ùroit inlerméù iaire, :-:. i l'l!po 11x ~suc.;t.;ess ib l e a
profilé ùe la ùouation fuile ù so n co nj oinL en
1 rié (2).
rai son du régime sous lequel il e~t tn <
1::,1o ~11111t r1uod 111•pos du11<1ta
11) C'eta1t 1 opi11 iu11 dt: \ oët
e..c cop1le prœdef1rncti parma11l1'111
"110
pos~1Cleat,
suocapite
Ialta e.x
lis hœres ~ri , non /a111 w i11de ~equrtm , 1 um a collatione librrnm
esse; cùm non ita 111 hœrrclitulis auitœ ~ ucces~ionis parentem de{urrctum 1e/lrœ,e11trt , qum et .~imul et: "ud 11r rsonâ 10111 capiat
hœreditale111, /ar111ua111 11nam r11111 patre rtprœsentalo 1ie1wnc1111
(~ll r le· titre Uc·cul/o tio11r .)
constituem
1 Ti>u,1.11:n, 11· 1~n - UL r. '"ro:-- , v11 , .rn-.i.n
-
l l!i -
Cl faut rapprot:herde l'art.lH9 la disposition de
l 'art 1'.:">73, qui s'y Ile intimement : « .ï le lllari était
» ùéjà inso h·alJle et n'avait ni art ni profes::;ion
» l orsque l i> pèr e a co nstitué 11nc <lot à sa fill e
» cell e-ci ne sera tenue de rapporter à la suct.;ei:.n sion du µère qn e L'action qu'elle a contre l'ellt>
» de on mari pour s'en faire rembourser . Mais
» si le mari n'es t de,·e1m in solvable que ùepui le
,1 mariage ou s' i l avait un métier ou une profes» ion qu i lui tenait li eu tle bi en, la perte de l a
,, dot tomhe uniquement sur la femme ... Celle
disposition parait au premier ahord s'écarter des
règles s ur l e rnpport; on ne mit pas en effet
pourquoi la fille ù qui so n père a ronsti tué une
dot ne d oit pas la rapporter , alors s11 rlo11t
<1u'il est reconnu qu' il n 'y a pas f:t rechercher si
la femme avait ou non reliré un bénéfice de la
dot. La Novel le 97 cte Jn stinien ava it déjà r épondu
il l'obj ec tion : 'il es t raisonnabl e qne l a femm e
rapporte la dot dis ipée par . on m ari lor~q u 'e ll e
pOtl\'ait, par la séparation de biens. n a, snrer
la conservation , on ne tloit pa:, l'assujettir au
r apport si ell e e l exempt e il e fau te et si la
perte de l a dot es t exc.;lusi,·ement imputable au
père. Or l a loi ''oit une grande imprudence de
la part du llonateur tl'a,·oir confié l a dot de ~a
fille à un gend re qui se trouvait d ans la situation indiquée pal' la '.\ovell e C'est cett e 1 rlt·~
qui n in ~pin" Ir ll\d~ l alc 11r ~ur l'a rli cll' l :-iï:~
�-
116 -
La loi ne prévoit que le cas où la dot es l
Gonstitnée par le père; mais celle décision
n'étant nullement fondée s ur J'iùée de puissanc e
paternelle, il n'y a aucune raison pour ne pas
appliquer ce système protecteur au cas où la
dot est constituée par la mère ou tout autre
ascendant. Sous J'empire du Code, l'enfanl
n'a pas d'action co ntre ses parents pour un
établissement par mariage ou autrement. (art.
204) (1).
L'art 1573 ùont l'applica ti on est s péciale au
seul cas de la dot mobilière doit être à raiso n
de la place qu'il oc<.;upe ùa ns Je Code res tre int
à la fill e mariée sous le régime tlolal. Sans doute celle ùécis ion est rigoureuse, et il peul arriver, comme le disait le tribun Duveryier, qu'un e
fil le mariée en commun anlé doive rapporter
une dot pel'dae aussilôt que consliliiée; mai s
cette disposition n'ayant 0té introduile dans le
(1) Roo. et l'ONT . l . 136. - TnoPLONO, l V. 3680. - MARC A oF.
sur 1573.- Poullain-Duparc était d' un avis différent : « Ln fille
» est tenue au rapport il l'éga rd de la dot payée par son père
» à son mari devenu in;:,olvnble, parce que Je pere est présull me prendre conseil pour ses enfants : il n'en est pns de
» même suivant le sentiment commun pour les donations
» faites lors du mariage par la mere ou les collatéraux : 111
» fille est admise à céder il ses consorts l'action contre son
• mari devenu insol\•able n (Pri11c11Jl's du droit(rcmçais. X II , 351).
tt, .
-
lt7 -
<·ocle que comm e fai$ant partie du régime <Iota!,
nou s pensons qu'elle ne peut en être séparée. (1)
De la dispense de rappo1·t.
L'obligation du rapport disparait lorsque le
donateur en. a expressément dispensé le donataire. Nous étudierons s ur ce point qui peut
dispenser du rapport, quelles sont les formes
c1e ëette dispense, quels en sont les effets.
(A). Qui p eul disp enser? En principe le donateur seul peut dis penser du rl'lpport ; dans deux
cas ce pendant la libéra lité es t faite au nom de
celui qui est le véritable donateur, mais la
di spense ne peut émaner de lui :
1° Le mari qui dote en eITets co mmuns est
t>t RAL', § 5~ 1 . - DEMOL . x.v1, 210. - co11tra Roo
2, 137 - JI est si vrai que l'art 1573 est etranger au
régime de communautr, que les redacteurs du Code, dans
l'intention bien nrrètee de rejeter le régime dotal, n'ont
dans la discussion de l'art 167 du projet. art. 8 \9 t enu
aucun compte d'une observation du tribunal d·appel de Caen
ainsi conçue . " On pourrait se demand er si le!> sommes
u données en dot à la femme par les pere et mère lorsque lt
>> mari est insolvnblf', denl\ient ètrt> s:.oumise~ An rapport
(1)
A UDRY
Pt Po~n.
�-
llS -
répulé dul 'l' atl nom J e ln con1t1H11rn11 l,·-. St
plus tard la femme ac.ceplc la comm u naulé e lle
aura été donatrice pour moitié (art. 1430). Auss i
a- t-il été jugé par le tribunal de Douai (W ja1wier
1861) que la Jispensc du ra ppo r t uccorJéc par
le mari étan t sans erTet à l'égard de la femme,
l'enfant de\'rait rappo rter la 1noiti é de la dot
à la success io n de la mèr e.
20 Pour le mariage de l'enfant d'un interdit ,
l'aYancement d'hoirie ou la dol ne pe ul Nre
conslitué que par un a\·i du co nsei l de famille .
(art. 511). Il $erait exhorbilant qu e ce co n. e il
pùt joindre à la ùonalion la dispe nse du rapport; son rô le est ici purem enl moral e t la loi
n·a pas dù vou loir qu' il pui$. r ern pil'.•ter s m 1111
droit qui es t ü11 altrib ll l de ln pui s.san ce pat ernel le.
(B). F orines de la clispe111>c. Les art. 81..;i el ûl!J
exigent un e di pensr cx prcs~e et formelle :
" ..... à m oin s que les tlons cl le~..., ne lui a ie nt
» é lé faits expre:::.sénrnnt p ar préciput el hors
>> part ou a,·ec ùi pense Lin rapport. » La loi a
'oulu é\'ite r un e manifestation équivoque clc
IJ rnlonté d n ùbposant; m ais les termes de
t'PS articles n'o nt rien ll e sacramentel et, et le
» tlona teur pe nt inclirTP.rem m e nt se sen· ir cle
11 toute ex.p ress ion équipollente propre à exp ri,, Iller f'fl \'Olo11lr >l (~\ ll lll\r et )\ \l') C'rs l a in s i
-
119 -
que dt'~ a1Tèt s ont v11 Ullf' 'lispe11:-.e 1111 rnpporl
rl'1111 f' r !lo.<:.f' ri !'P11r1ir u n•
da th- Ir don 011 le l11
'fllf' le rlonrt/oirf' l'f'C1tf'illero don s ln s11 cre.c:.sio n,
ou en core clans rette c lanse d' un legs que le
snrplits d es biens .<1,eret égrtlem,f'n/ prwf((gl r11/re lr
us
rlono/nil'f' et lrs au tres hétiliers.
La plupart cl es aute urs reconnaissent comme
emportant clispense du rapport le legs universel (1), le legs de la quotité disponible (2),
la donation sons charge rle restitution par suite
d'un partage d'ascendants (art. -1075), '3) ou par
s uite d'une s ub, titution (le gre\·é n'étant pas un
véritable d onataire) . f4)
En génér al les cl6cision s des cours et tribunaux , s nr la riues tion d P sarni r s ïl y a en rhez
le clon a lenr intenti on de clispenser dn rapport.
sont des ques tion s cle fnil dont la connais ance
éc happe par conséquent à la CoL1r de cassa tion.
Pour que le pourrni soit admis en pareille mati.ère il faudrait qne l'arrèt attaqué interprélàt à
faux un arti cle rln te"X le, re riui se présentP très
rarement . (;))
(1) '.\!ontpelher, 9 juillet 1833 - Ba.<:tia ;!:) mar,.. 1833
('21 C:-ien, 16 deccmbre 1850
(3) Co.en, 2 <lecembrt: 1 8~ 1
( ~ } Ba tia , IG jnillet 1 8~8 Quirl en (':1'< de ..;11b"titution
vulgai re? (V. DBMOt. X\'J, U6
\!i Req rej. n mnr<: I R~3
�-
LW -
On re1·1lèn·ll ern l' intention du tli spo:-.alll dans
la clause jointe à l'acte de do na lion ; nous n 'admettons pas qu'on pnis e puiser tl es éléments
de prem·e so it dans les circon stances qui on t
•
pu précéder ou suivre l a ctonat.ion, soit dan s les
motifs qui l' on provoquée. La uolo11fé, disait le
tribun Jaubert, doit se lire dri m: Ire di.~ 1JC1silioH
elle-même.
Reprenons quelques cas parti culi er s s ur lesquels la jurisprucl ence es l fréquemment appel ée
à slatuer.
Un legs univer el dénote-L-il chez le donateur
l'intention bien form elle de ùispenser clu rapport ? On ne saurait le ni~r : cette disposition
excluant de la sucression tou s les autres héritiers, la volonté (]11 cli. posant ne sera limitée
que par l'application rles ri·gl es sur ln réserve (1 ).
(Rouen, 5 août 1809. D. 71 . 2. 4.)
Faut-il vo ir une dispense du rapport clans le
Jeg de l a quotité disponible fail à l'un des
successibles? ~r. Demolornbe éprotwe quel que
difficulté à l 'admettre; ses rlontes pro,·ienn ent
<le ce que le carac tère préciputaire, qu'au premier abord ce legs semble présenter, disparait
si l e l égataire n'était pas successible au mom enl
de la 1l onation . Qni sa it en e!Tet s i Je défunt ,
!i~I l Con tra LEVASSKUR Traité tir la 1mrlio11 disponible, 1fl2-
1
-
Hl -
dans la 1m"\ 1sio11 q1 1' il recw·ill erail 1u1 JOUI' ,
co mme héritier , un e partie <le sa success ion , lui
eùt légué la quotité ùisponible? \! Au::;si faut-i l
» souhaiter, dit ~I. Demolombe, qu'il se trouve
>l clans l'acte <les élémenls de nature à r lfféler la
» volonté du disposant cle faire cette libéraliLG
)) par préc iput. 1> Ces r é0exion3 so nt forlju<:;Le ;
mai s nous les c ro yons étrangè•res à l a queslio11
qui précisément ne soulève de difficullés qu'P.11
l 'absen c~ des élém ents dont parle l'auteur.
Il est à peine besoin cle mentionner comme
emportant dispense de rapport, la donation grevée de subs lilulion. Si le grevé appelé à la succession ùu disposant ùevait en effet rapporter la
donation, il ne pou rrait conserver l'oujét donn(·
pour le rendre au substitué (1).
Pareillemcn t, les biens com pris dans un partage d'ascendants ne pouvant plus èlre l'objet
d'un nouvean partage entre les enfants (art
-J077) cette donation-partage esl in co mpatible
avec l'idée de r apport. (2)
La solution n'es t pas auss i ~ impie clDns la
question de sa\·oir s'il faut dispenser du rapport la tlonalion déguisée sous la forme d '11 n
contra t it lilre onéreux 011 Bo us une mlerpn...,i-
\I J Contrà
DELV1:scom11', 11 87 -
l'2) GENTY . des f>arto9r'
DuR.\~TON nu, -:!~I
1/'a1-cn1da 111~ .
n• ~O
.,
bi'
�-
1 2~
-
l ion de perso nn e ( l ). L<l llll •:-; l io11 e~ l ct' lèhr e eL
la co ntrover se qu'e lle a ::;oul er ée dès la promul galion du Coc.le n 'es t pas encor e vidée anjourd'hui . N ous exa rnin ern n ~ sépar ém ent les
clenx sys l èm es opposés.
Pour so utenir Lltl'Lrn e cl onati on clégn isée n'es t
pHs. par cel a m êm e, dispensée du rapport, on
im·oque d'abor cl la gé n {·ral ill~ des termes de
l'art. 81!3 don t la dispos ition exi ge, ù défaut de
ùispense expresse, le rapport cl e to nt do n direc t
ou indi rec t ; et comme l 'espri t se r efuse à conce,·oir une libérali té qui ne rentrer ait pas clans
l'une de ces tleux catégori es , les princ ipes du
rapport den ont s'a pp.l iqu er à la do nati on déguisée . Cet ar gument se tr oLl\'e tl 'ai l leurs corr obor6
par l'ar t . 833, d'où i l r ésul te a contrm·io que les
avantages in d irec ts m èm c proven ant de contrats à titre onér enx doiven t être r apportés .
On soutien t enfin qu 'o n ne pent ar g umenter des
raisons d'analogie pnisées dans l 'art . 9'18, à
(1) On pose souvent ln ques tion de la man iere suivante ·
F1\Ut-il voir une intentio n de dispenser du rapport dan s les
précautions prises par le d isposant de masquer la libéralité
sous l'apparence d'un contrat à titre onéreux '? MM. Aubry
et Rau font justement remarquer qn 'en rni on nant ainsi on
"déplace la question , dont l'obj et n'Pst pas tant de sa voir dan s
quelle intention le défunt a eu recours a la simulation que
d'apprécier s i ce fait n'emporte pas une dispense virtuelle
dn rapport. ( AUBRY et R AU , § 633 .)
t <..
-
12:) -
rattsl' du c ara<'lè·r1' ex n·plt o11111 1 •JIH' [ll'Ü~! · 1ll •·
cc l arl i<' I<• ( 1).
( :es ro nsicl éraLi o 11!; IH' 11 011 s parri isse n l 1w s P. tl
pur faiLe ll nnn o11 ic avc(' les prin cipes r e1·11s ~ 1 1 1·
l u m ati ère, r.t. il nous sP1)1bl e q m: l'espri t cou1 rn e
le Lexte ùe ln loi n ou s por tent ti voir un e rl i::;pen se du r appo rt dans \Ps prècanlions pri:-;es
par Ir disposa n t de déguiser ln don ation . Et
ll 'abord , n'es t-ce pas ajo ut er au Lex l e rle la loi
qne d 'invoqu er i ci la g{' n(·ra \ité ries Lormes de
l'ar t. 81.,1 ? En par lan t rie clon s i ndirects, le ::-P11l
b ut de ce l ar ti cle <.1 N é de so um ettre au r app ort
les li bérali t l~S patentes qu i n'inten ·ienn e11I 11i
sous la form e d '11nc ct onal ion ni son s cell 6 d'un
l es tam ent. On a b ir n sout e11u qnc ce t te d is ti nct ion ôtai t i ncx.acl e el q u'il fal lait enlenctre pur
donation inclircc tc Lo ule donati on clt:.guisée ou
non arrivan t au but pr oposé par un m o\ en
déto urn é. (2) Mai s ce l te objec tion es t <lén~1ée
de p reu ves et nous croyons q uè r' est interp r él el
sain em entl 'espri tcl e la loi q ue de rli\ iser snr l'art
843 les c10 11 s i11 d irec Ls en don s déguisés et d ons
paten l s. Un don es l déguise> quan1l il passe pat
1) ~fERl.IN, G REl'lER 0 11Ano1 n•
T ROPLONG,
Donrrl
li ,
;!:;o, Dt RA:-.'To:- v11, n• :l i l
863, P ONT. Rei• <fr /1•g 1 } ;.) I 2 i , DF,10r
Suce. § 253
(2) En ce sens l\l IP con~r.ille r
légis 1857, X 58.
L AFo:>HAl NE. RH
,., il. ,i,.
Y
�-
ltl -
un tiers avant tl 'arriver au vt'.>ri lahl e donataire; il
est patent quand il s' a<lressc direcle me nt à
celui qui doit en profiter ; mais qu'il soit patent
ou déguisé, il n'en res te pas moin s nn don in c1irect. et par là il rentre dan s Io dis tin c tion d e
l'art. 843.
l.a loi a d'ailleurs fait elle-m ême un e application de cette théori e d~ns l'art. 018 qui ne présente nullement un carac tère exceptionnel. Il
résulte, en eITet., de ce texte nn cas oü le préciput a lieu sans titre exprès, et ce cas es t précisément celui d'une donation déguisée. Le sentiment de la loi est donc que la s imulation e mporte par elle-même dispense du rapport. (1)
Enfin on peut repousser l'opinion co ntraire par
l'examen des in conséquences qu'elle entra\ne :
la validité des donations dégui sées es t aujourd'hui. recon nu e par la grande majorité des auteurs, elle a de plus entièr ement passé dan s la
pratique ; si don c on astreint. ces donations anx
règl es sur le rapport on méconnaît l'intention
du dis posant, puisqu'on déchire le voile sou s
lequel il a caché la donation , et on aboutit
ainsi à une choquante contradiction . (2)
1
.....
ir
c
( 1) Cette présomption de !"art. 9 18 n'exis te pas dans les
donations entre époux.
(2) FoURT de CONFLANS sur 8l3 - AUBR\ et RA U, ~ 633
MARCADÉ sur 85-1
-
-
12ti -
La JUrisprnJ e11 ce u' a adoptü auc.u 11e Je 1,;es
de ux , ~JJ~nions ; elle a imagiùé un sys tème l1J te rm ed1~1re qui . loin de rallier les s uITrages ùe
La doc tnne,. a é té, de La part ùes au leu rd, .l'obje t
ù~s plu ~ VLves aLlac1ues . Les donations dégu isee~, ~Lsen t les arrè ts, ne so nt pas de ple in
droLt ù1 s pensées du rapport, si d'ail leurs il ne
rés u.lle des drconslances cle la cause que l'intenl1on du disposant a bien été de joindre la dispe nse à l'acte de donation ('1). C'es t trao:>former
UI~e ques Lton de principe e n une question de
f~1t, et en dé~érer la connaissance à l'appréciaLLon so uvera111c des tribunaux. La base de ce
système es t arbitraire; nulle part en effet la
l~i n'é ta!Jlit celte différence eutre Îes donati~ns
dll'~ctes el les ùoll a tions déguisées que la déclara~Lon ex presse tle dispense de rapport qui est
ex ~gée à L'égard <les premières n'est pas néces::;~1l'e à l'égarü Lies seco ndes, et que pour cellesc1 la preuve ùe l'intention ùu de cujLis peul
résulte r de certaines présomplio11s. Comment
co ncilier une fonnu le a ussi vague avec la disposition s i précise ùe l'art. 843 qui exige pour
Loule doualion <lire1,;te ou indirecte une maniPl « La jurisprudence est faite, elle examine les cas, elle
• p~se les ..:ircoostances, elle se prononce pour ou contre la
" d ispense du rapport , suivant l'impression produite par les
u faits sm la ronsc1ence d<'s magistrats . n \TROPLONG, Donat
11, 863 - Cass 17 jlllllet t 85ti - Cass. 31 décembre 185'5)
�-
IJh -·
Jt' s lat1011 c·qiresse de lu 'o l011 l é du donateur '.'
1l ,. a lù une co nlraLl ic l ion bien (· !range ~
Cette doctrine de ln juri sprudence dvrnil
ahoutir à lks con:,,0t1uences cxcess i\'es; ain ::-:i
nons liso ns dn11s un nrrèt tlc Douai (27 févri e1
1861. - D1~v. 1801, 2, :303) : << .\Llc11du qu e du
» moment où pur un m otif q uel co nque , 1wr
\) e'emple coir1m e dan s l 'cspè<.!e, pour éviter
>l d es dist: us~ io11 s de rami lle, un e personn e disn simul e ::-e::; libéralités. on ne saurnit impuser
,, au Llonataire tl'anlre obliga tion que cell e Ll e
\) démonlrer, par Lle:::; inùices quel conques, lï11J) ten lion dn <loni\leur q uanL à la dispense formel» l e Lle r apporter l'o.IJjet ùonu é... . )) Un an èt de
Ja eunr de Bas tin constate ce relt\chement de la
jnrispruüence en term es r emarquables : << Con)> s idérant que, quel <)UC soit le r elùchernent ùe
» la jurisprudence en cetLe m atière, il n'a p a::,
» été ju \.J.U'i ci cl6ciùé que, on l'absence de tout
» ade, de Lout 6crit con talant la Yo lonté ùu
)) donateur, le donataire v~ut êtr e admis à éta)) blir par l a preuve teslimonial e l a dispense dn
l> rapport qui forme l 'un .tl es él ém ents constitu)) tifs de la douation ~ - que malgré les ten>> dan ees de certai ne:::; d oetrines mani festemenl
)) 1,;ontraires à l'esp ril dn Code Napoléon, il est
» permis d'e::;pérer qu'on ne par lera jamais à ce
l) point J'ouuli tles plus ~a in es r èg les dn droit el
>1 de-; preslTipL11111s 1111pt'· rn li\'Cs iles m·t. 853 el
12î -
( Raslin , ~() clr"cembre 1833 . Ihv :>li .
2, 13). Les n11l<' nrs sont unanim es ù concla111 1iPr
cette opin ion in term édi aire <l e la jurisprudcnr-<·
<< don t la l enclan cc, ici comme en d'autres ma» tièr es, est ri e s'n.fîran clJir <l es formali tés gè» n nn Les. » (Cass. 'JO. nov . J8GJ. D. 62. 1.140. _
Cass . 3 mai '18G1 . D. ü'~. J. 173. - Cass. 12 rna 1
» !>19.
i)
1873. D. 73. I. '194.)
L es liéritier s à qui ce lle présomption de dispense de rapport porte un sérieux préjudice, peuvent omni modo prouver le déguisement. (Cf . arL
134B- '1353.)
La solntion de cette cl él icale question que
dans l' intér ùl cle la d iscussion nous avons restreinte au seul cas d'une don ation déguisée rl oil
èlre général i!=;ée, cl appl ie.a t.ion doit en èlre faite
aux ditîérenles l'Onlbinai::;ons qui cachen t une
libéra li l é.
L 'effet
possible
rend
elle
:
ciouble
t
de ce tte dispense es
le cnmul de la donation et de la part héréditaire,
et elle est une preu,·e éYidente que l e donateur
a entendu gru tifter le success ible sur la quotité
disponible. d'où l a conséquence qu'en \'enant
à la succes:s1011 du clisp0:::.unt . l e don ataire pourra n~ l' l amcr sa pnrl cl an~ l,1 r ésen ·e, san~ qu'il
(C.) E{J'ef .._ d1• la clii;pen."c du l'll.JJJJOl't. -
�-
-
12R -
ai l i\ te1111· t·omptc ù :::;es co ll éntic r:5 de la do nation qui !~1i a é té fa1Lc ( 1).
Happelons qu • ~ ur la ma tiè re de la d ispense
du r <.1pport , la volo11té du ùo11ateur n'est limit ée
que par L'app1ication des règles s ur la réserve ;
ce principe est écrit da ns l'art. 844 : « Dan s le
'> cai:; mème où les ùons et legs auraient é té
•> faits par préciput ou avec dispense du rap» port, l'hé ritie r venant à partage ne peut les
» retenir qne ju ·qu'à conc urrence de la quoti t(~
» ùisponible : l 'e.ccéclan l est s11jet à rapport. n
On a jus tement critiqué sur la fin de l'article.
l'expression de rapport dont s'est servi le législateur; c'est plutô t de réduction qu'il s'agit ic i.
Il ne peut en efîe t è tre ques tion de rapport
puisque l'espèce de l'art. 844 es t dominée par
une dispense form ell e du rapport ; dès le moment au con traire que la quotité dis ponible a
é té dépassée, ce sont les r ègles de la r écluc tion
qui doiven t ê tre appliquées. (N. obsl. art. 866,
918). Ce n'es t pas seuleme nt un e question de
mots; en interpré tant à la le ttre la dis pos ition
llnale de l'art. 841 on fournit un série ux argument aux partisans ùu c umul de la réserve el
(1) Quand Je donataire est fils unique, la dispense de rap··
port est encore utile à l'égard du donateur, qu'elle pri ve do
tout droit de disposition jusqu'à concurrence du disponibl e
ëpuisé par la donation, à l'éi:tnrd des enfants qui pou rraient
naître ;"tprès ln donat ion
129 -
de la qu olit6 di ' pon ible : «S'i l est une fo1g
» prou,·6 que la cl onation ou la partie de la cto>>
nati on lf11i porte sur la part de réserve d'un
'> hér itie r ve na nt à la success ion, est seulement
» s uj e tte à r apport et non à r éduc tion, il sera
prouvé par là mê me que le donataire aurait
» pu re tenir cetté donation ou cette partie de
» donation en re nonçant à la succession d'après
» la r ègle que le rapport n'est dû que pa..r celui
» qu i vient à la s uccession .... ~Il ne faut, 11our
é tablir ce principe, q ue citer l'art 844, à la fin
duquel il est écrit en toutes lettres que dan!'ce cas /' excécla11l r>st .-;11jet à rrrpporl . ( l ).J}
>>
~EC:T ION
I1.
A q1œll es personnes le Rappo?'l
est-1·1 c71{~ 9.
L'art . 857 é tab lit une co rrélation parfaite entr
l'obli ga tion ùe fournir le rapport et le.droit de
l'exiger' : « Le rapport n'es t dù que par Le cohé» ritier à son cohéritier : il n'es t pas dû aux. lt'·>> gataires ni aux créanciers de la s uccession •)
1) \I R.\r.11:--, 01• cit . 1
:us
�-
lJO -
L1;-: mol ht'.'riti er a iri la mèrnc signilicali on que
dans l'art. 81.:..~; il ne s'a ppl iqne C)u'<rn x ucc.:cs~e urs afJ i11 tcslat: si donc le défunt avait institu é
deux légataires nniveescls et qu'i l eùt gr atiÎlt\
l'un d'eux d' nnc donation, l 'autre ne pourrail
pas en exiger le rapport ,\ la succession d n de
c1t i11 s. Celle déc ision es L co nforme au but du
rapport qui es t « Lle mainl C'nir l 'égalité des parts
>l héréd itaires dan s l es proportion s oü le légisii latf' tlr l'a établie. 1> (ü r.:MO L . v. 277).
Le tlroit tl'exiger le rapport n 'es t pas atl a<.:11(>
à la personne ùe l'héritier ; il fait parti e d<~ son
patrimoine et ses créancier s pem·en t l'exercer
en son lien et pl ace ( Art. 1lü6-788). (1).
Dans sa ùeuxième partie, l'art. 837 étab li t que
le rapport n'es t dù ni aux légataires ni aux cr éanciers de l a success ion . Ces deu x ca légories de
per~onn es n'é tant pas des h éritier s, il est tou t
n aturel qu'elles ne pui 'sent pas exiger Je rapport
ni qu'elles ne puissent en profller s'il est efTectué (art. 921 ). Celte doubl e r ègle a besoin d'êLre
exp li quée.
(A ). Le• 1·appor·t 1i"e.~f pas du 6/tu : léyatail'es. - Ce
principe s'applique à la foi aux donations entrevifs et anx legs. Pour l e~ premi i• res il es l u ne
1 La cour de Touloul'c l'a conteste par arrêt du 16 juin
183!5
-
1:11 -
ro 11séqn e11<·<· d11 <·a ra c.:L1" re d' irrévocahililé imprim é par l 'arl. HO/~ ~1 Loule clon atiou enlre- \·ifs:
pour les legs so n effet, si le l egal aire est IJéri1ier , sera llc l11i perm ettre fle r éclamer l e legs
inùépenùamment cle sa parL ll ér étlitair e.
E:n vertu du rn ème prin c: ipe, quand un legs
ne dépasse vas la quotité disponible, le ealcul
se fera sur les bi e11s e'!Ci s'ta.nts da11s l'li érédilé
au moment du clécès, abstraction faite des biens
donnés enlre-\'i fs
Cette idée 'a nous guider pour apprécier
l'éten due de certaine:.; di sposi ti a n ~ te tame11taires.
Le défttn l a. légué la moi tié de ses bien::;
Est-ce la moi tié des l11ens existants lors de son
décès, ou la moi tié tle ses biens y compris
ceux q u'il a clonnés pendant sa vie'? (1) li ne
peu t s'agir <ru e Lle la moi tié des biens laissés
lnrs dll d6cès, par rc q u'ù l'égard des légataire~,
les biens donnés entre-v ifs son t censôs sortis
1) On discutait dans l'ancien droit la question de sa voir
s i le fisc entrant dans le pa rtage des biens d'une succession
comme étant ai1x droits de l'un de!' héritiers, pou \'ait oLliger
les autres héritiers ù rnpporter les avantages qu'ils avaient
reçus - Cette question ne peut se poser aujourd'hui que
dans les cas:. otl la peine de h1 confi::.cation est admise ; mai::;
on ne saurait voir de raison d'empêcher le fisc d'exercer les
droits de celui r1u 'il 1·cpré,;entcrait. 1 ri.RK~nrnetB,,yLF-\In t11 1.ARO
DfJllnt
n• :;o 1
�-
I
/
132 -
du patrimoin e ùu cle cujas (~ l im uN , Bëp. rappol'f
~ 7, n° 4). De m èm e le doute ne peul s'é le\'Cr
Sl le testateur a dit: « Je lègne le liel'S de mes
'> biens y comp1·is ceux que j'ai donnés enl1·e- vi(s .
Ou encore (( j e lèyiie let moitié cles biens à JJrend re
» sur ceux que je laissel'ai à ma mort. » ( Pa r is, 7
mars 1840. - Sir. 40. 2. 425.)
Mais l a volonté Ju de c·u jus ne ressort pas
aussi clairemen t d'un legs ayant pour objet la
quotité dispo nible. Dan s les premiers temps de
l a publication ùu CoJe c ivil , on avait soutenu
que les légataires ne ùevant jamai::; profiter du
r apport ne po uvaient ex iger la réunion m ême
fictive des l.Jiens donnés entre-vifs à la masst
de l'hl:rédité; on appliquait l 'art. 857 clans sa
ùisposition lu plus absolue et on J écidai t co nstamm ent que le 1;alcu l de la q uotité disponible
ùevai t uniqueme11L se faire sur l es· biens existan ts dans la succession. (C:ass. civ. 8 décemb .
1824. - Sir. 25 1 . 124). Cette jurisprudence
combattue pa1· les au teurs (ut bien tôt abandonnée par la Cour de Cassa tion (arrèt sol. du 8
juil let 1826 - St-. l1·ro11wn), et il fu t déso rm ais
établi que toutes les fois qu'il serai t nécessai re>
de déterminer le montan t de "1. quoti té dispon ible, les biens donn és au)lcSuccessibleJen avancem ent d'l1oirie devraient être îi c ti vement r éunis ù la succession. Celle provo sili on aujourd' hui gé11 érnlemcnt ad mise c t cer tainement la
-
seule co11 fo rme à l'esprit de la loi; il était difficile en e!Tet de faire i ci appl ication de l'art. 857 ;
la question avait pour but de déterminer le
montant du di sponibl e et l a so lution ne devait
en être demand ée qu'à l'art. 922 qui indique la
marche à suivre. On a voulu dire il est vrai
'
'
q ue l'art. 922 disposait pour Je cas d'action
en réd uction et non dans l 'hypothèse du rappo r t; mai s Demante a fait justement rem arquer que le cal cul de l a quotité disponibl e doit se faire de la même manière soit
que l a question naisse à l'occas ion d'un e demande en réduction, soit à l'occasion d'une demande en prél èvement de cette qu9tité. «Autre» m en t on ar riverait à cette singulière consé» quence qu' il exis te deux q11otités disponibles
>> différentes, l'une pour Je cas où le de wjus en
» a dépassé la mesure, l'autr e pour le cas où il a
>) précisément donn é ou l égué cette même quo» ti té ,, (1) ( A UBRY et RAu , § 630, n• '13).
Mais on doit bien se garder cle confondre
avec l 'hypothèse prf>cédente le cas où le legs
étant d'une quotité rie bi ens préc isément é'gnle
au disponible, le de t·ujns n 'a pas dit qu'il entendait l ég uer cette quotité . .._ i par exemple un
père de ti·ois en fants fait à l 'un rl'eu:x un legs du
(1) DEMANTE, 111 . 19'2/Jis op cit '290
<..<'
133 -
'fRUl'l.ONG,
Donat
'190 - ÜEMOI
�-
1:1\-
quart de ~ a rorlllll L', il e~ l ;) pn··s 11 111 e1 tllll' 11 •
dP c11j1u: n'H \'Oulu légu er que le quart Ll e~ bi en s
existant ' ùans 1'll ér éùi té. (Ci\·. re.i . :> j 11i 11 el 1~2:-> .
- 'Toulouse 7 aoùl 1820).
Cette pré ompLion qui ~ e d<\ luit 11 c tleni e11L
de l a nature m êm e cl e la dispos ition Joil èl l'C
r epous'ée quand il r ésulte ll e l 'en semb le <l11
t estamenL que le de ('((jus a entendu l éguer la
quotité clisponihle. (Req r ej . 8 j anvi er 1821- -
. ir . 54, 1. 12)
La question ù e ·aYOll' si l e do11 ations faites
an ùi pense de r apport à un hériti er r éser rntaire doivenL s'imputer sur la quotité disponib le
ou sur la r éserve, n'e t pins discutée aujourd' hu i
que pom r endre liornrn age aux princ ipes ; 0 11
admet gé néralem ent que c'es t :s ur la réserv e
que doit se fnire ce lle imputation ; cell e soinLion est confo rm e à l' intenLion clu donateur q lli
en gr atifianl le successi bl e d 'un don en avancem ent !l 'hoirie a ent en du se r éserver intac Le la
Llu otité di sp onih le. n n11s le 1·as où la snccess io 11
e. L clévolnf à plusieurs l1 ériti ers, si \'nn d'entre
eu x est &eut clon al ai re, l'i mputation de l a d on ation 1l effa-l-€'l le se fa ir e snr l a m asse totale de
r éserv e ou ~fnl em e n l sur la p art du don ataire'!
~ous cr oyons aveC' l n maj orité cles auteurs que
la premièr e solnlion cl oil M r e prNér ée. ( 1)
1 ~r
(
(. ( .
Laulir r nsc ig nc l'opi nio n con t rain' op cil . n• in
-
1a5 -
\ IJ.) L ë 1:a1111ort n'1>.~ t p a.~ ilti a UJ' c1·ëoncir1s.
E n ce qui con cern e les legs cette r èg le s'ex pli- .
qne cl'cll e-mèm e, c: es l egs n e sauraient ètrc acquittés qu'aprb> I.e paiem ent intégral cle toits
les c r éan ci ers tle la success ion . Chabot en
do nn e pour raiso n que l'application <le J'arL. 857
doit ètre r es treinLe au x don ations, les legs n e
fai sant pas l 'objet de celte disposition ; m ais
cette e:( plication es t i nexac te et nous pr éféron s
dédui re ce prin ci pe d 'un ordre d'idée::; absolum ent étran ger à l a m atièr e ù es r api;o rls : Nerno
liberct li.s 1 1i.~i libcl'ltl ws. (Cf. art. 922 et 809.)
Quant aux don ations faites p ar l e clc cujus à
l ' un Ll es succes::;ible , le::; cr éan ci er s hér édi taires
n e peurent en ù em ancler le r appor t. Ce prin. c:ipe a r encontré au ~ein cln Co nseil d'État
d e vi ves r ési s tan ces ; quelcpt es me mbres ne
pouvaient pas compre ndre que les l1ériLier s
pussent conser ver le:-; biens cle l a ucce, sion
r ecouvr és par l 'exer c i ce de l' action en r éùuc lion,
al or s que l es créanciers llér étlilair e$ n'l: Lai ·nt
p as int(·gralc1ncn t payés, et il fut tl éc1t11·· qu e
« la r édu cl1011 ne puurrai l èLre Llemanilt:t"' p.u Ifs
n donataire::; on léga taires ni par les c r •ancter :-;
i) d u d éfunL, sauf ù ces c r éanciers à exercer lem
)) llroi t ::;nr les b ien8 lllli ont fa it r ohj "l de l'ac( Fr::~ET, XlI, 1fü ) ~ur la
l) lion en r éduc tion . >l
demande du lril> u1Hlt, Tronchet co ml>all i l l'artic le du proj et el ll t r em arque1· que <1 lnr :--q u' nne
�13G -
dispositio n n'e8 t rela tive c.ju 'à nn in térè t par» ticulier , ce ser ait s'écarter du but de Ja loi
)) que d'en donner le bénéfice à un e a utre pe r>> sonne qu'à celle en faveur de qui la loi l'a
>) é tablie. On a rendu hommage à ce prin c ipe
>l dan s le titre des s u ccessions , où on a décidé
)) que le rapport profilerait aux héritie rs seul e)) ment et non aux. cr éanc iers . >) L'obser vation
de Tronche t était fo rt jus te et la so lu tion qu'il
proposait très jurid ique : les créanciers, en
effel , n'ont pas plus de d roits que leu r débit eur (ar t. 1166, 2092 et 2093) ; or les biens
donnés entre-vifs éch ap pent à l'action des
créanciers antérieurs à la don ation , puis qu 'i ls
sont sortis du patrim oin e du débi teur et ils restent absolument é trangers aux créan ciers pos tér ieurs qui n 'on t jamais p u compter que le ur
gage s'étendrait s ur ces mêmes b iens. Le s uccess ible donataire doit donc ê tre traité comme
un étran ger el le rappor t ne profilera an x
cr éanciers d u de cujus qu'à la charge pour e ux
de prouver CJU e la rtona tion a ét(· fraudu leuse.
(art. 1167).
L'art. 857 n'est plu s appli cable et la règle
précédente cesse d'être vra ie dans le cas où,
par l'accep tation pm e el sim ple de l'hér itier, les
créanc iers <le la s nccession so nt devenus ses
<' réanciers person nels; le droit cl e demand er le
rappor t n'Na11 t pos c: o n ~ i déré co mme cxc lus 1ii
-
137 -
vement attaché à la person11c, il est 11aturel
qu 'il soit compris dans le droi t héréditaire de
celui auquel le rapport est dû ; on ne pourroil
dans ce cas argumenter de l'art. 857, puis que cet
ar ticle es t relatif a ux c réanciers de la succession et non aux créanc iers de l'héritier, et qu e
d'ailleurs ces derniers agissent non en leur
propre nom, mais a u n om de leur débileur. La
preuve s'en t ire de ce que la répartition des deniers provenant de la vente des biens r apportés devr ait se faire par égale part en tre tous les
c réanciers de l'hér itier. (Nimes, 6 mai 186 1'
A uBRY et RAU § 630) (1)
Ma is l'exception que nous venons d 'indiquer
es t Ja seule q ui res treigne l'application de l'ar t.
857 e t celte disposition doit être suivie toutes
les fois q ue les biens de la succession ne so11t
pas confondus avec ceux de l'héritier. Ainsi en
cas d'acceptation bé néfic iai re les créanciers
h éréditaires qui n'ont au cune action sur les
biens personnels de l'hérit ier ne peurnnt demander le rapport ni en profiter. De même en
cas de séparation de patri moines, les bien rapportés deviennent exclusivement le gage des
créanc iers personnels de 1'11 érili er. Cette décis ion n'est vraie que pour ceux qui reconnai f• n t
(1) Ce p rincipe a ète méconnu pt1r un arrêt de ln cour ùe
Toulouse du 16 juin 1835. (Sir. 35. :? . 3n).
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que' la :::-éparaliun dl':" puln111oiJ1e~ 1ie J:Je nn el
pas <.Hl:X créancil'l'S ùe la s urccssio11 non c.:0111 plétemenl payé de venir s ur les biens de \'héritier en concoms avec ses c réa nciers personn e ls
Les créancier s ùe la s uccession peuvent-i ls
s~ufîrir dn rapport? La ques tion se présente
dans l' hypoth èse s uiYanlc: un p ère m eurt tais ant de ux enfants, sa s uccession se compose
d'un ac tif cle 10 el d'nn passif égal ; à sa mort
ses deux fil acceplen l sa s nccession , mais l'un
d'eux donataire par anmcemen l d'hoirie d'un e
s ommé d e 10 es t ins ol\·able . Les dettes se divianl de ple in droit entre les h ë riliers (arl. 1220)
le fils qui · n 'a ri en rec,:u pourra- t-il préte ndre
garder le 10 qu i composent l'acLif de la s u ccession pour lui le nir lieu ri e ce que so n frère u
ùéjà eu en payant la moilié des dettes dont il
est tenu ? Les créanc iers subiraient ains i un e
perte de 50 °/o el cependant l'actif d e la succession est s urflsanl pour les désintéresser . Une
telle conséquence est trop contraire à L'esp rit
de la loi pour que le prin cipe dont e lle découle
puisse être admis, e t pui s que les créanc iers
héréditaires n 'on l auc un droit au rapport , i 1
faut reconnaitre qu'il s ne doivent également pas
en s ou!Trir. ( OEl\I OL.ys11 cc 211i. - HA GON. op. cil .
n° 200).
Un e ver sonne i1eut é lre à la fois hériLière du
défnn 1 e t cr éan c ière ùe la s uccession ; les effets
-
139 -
·
de c<'S deux LJ11,·11 1·L·~""...: ù o 1·, ·e11I e· 1re soigneuse-
m ent tlisLi ngu6s.
'1". L'llériLier créan cièr qui a accepté 8011 ~
bénéf1 cc d'inventaire a le droit de s e faire pa~er
s 11r les valeurs hérédi taires, et s' il a reçu du d e
cujus une don ation e ntre-vifs, les autres créanc iers ne pourront pas exiger qu'il im pute ~a
c réa nce s ur les biens dont il doit Je rapport ,
puisque cette obliga Li o n leur est étrangè re.
art. 857. (Cass. 10 juillet 1844. DEv. 44. 2. 593.
Cass. 5 juin '1'849. DEv. 40. 1. 705). Il est aisé
d e comprendre que La solutio n serait différente
dan s les rapports des cohéritiers entre eux .
2°. L'héritie r qui es t en même temps légataire
par préciput du cle cujus ne peul exiger le
pa iement du legs s ur les biens rapportés .
A propos de l'art. 8:57 il nous reste à examiner deux questions importantes. L'enfant naturel peut-il exiger le rapport des parents
légitimes? Des auteurs ont refll é ce droit ù
l'enfant naturel en so utenant qu'il n'é tait pas héritier e t que d'ailleurs l'art. 837 a\'ait fait de ce lte
qualité une condition essentie lle du droit au rapport. (T OULLIER, 1v, 258. - Lo1sE.\ U, Des enfants
naturels, p. 693). On peut réfuter cette objection
e n rappelan t que le mot héritier de l'ar t. 857
s'applique à Lou t s uccesseu r ab intestat et nou
pas seuleme nt à l'héritier légitime, et que le
Yéri Labl e sens de cet article es t indiqué par sa
�-
1•0 -
seconde disposi tion q 11 1 Ill' 1"1rle llllc? des cr0ancier s et des l égatai res et ne fa i t aucune men lion
des enfants naturel s. De p l us, le sys tème de
Toullier es t en co n tra.dic tion avec l 'art. 757 qni
« alloue à l'enfant natmel une fraction de la
>> portion héréd i taire qu'il aurait obtenue s'il
» avai t été l égi ti me, c'csl-à- clire une frac tion de
n la portion qu'il aurait prise comme enfant
>l l égitime tant dans l e· bien ~ sujets à rapport
i> que dans ceux dont le défunt n'a pas d i sl> posé . >) (Au BRY et RAU § 638). ('1).
(1) Quand le rapport est dù par l'enfant naturel il prend le
nom d'imputation. (art. 760) On discute viYement sur la nature de cette imputation . Des nuteurs s'attachant au sens
rigoureux du mot imputer, enseignent que l'imputation est
différente du rapport et décident que cette imputation n'entraînant aucune résolution de la donation, les en fants naturels restent propriétaires incommutables des obj ets don nés.
Ils en tirent 1·ette conséquence que la somme à imputer par
l'enfant naturel ne doit pas être réunie même fictivement à
la masse hérédiiaire pour la fixation du montant de la
quote part à laquelle il a droit. (CHABOT sur 760 - PouJoL
sur 760). Ce système • dans lequel la position de l'enfant
• naturel serait d'autant plus malheureuse que son père se
• serait montré généreux à son égard u lèse d'une manière
évidente les droits de ce successeur (art. 757) et doit être
repoussé. - On doit également écarter une opinion intermédiaire des arrêts qui, partant de cette idée que le droit de
propriété des enfants naturels sur les objets donnés n'est
point ré;::clu à l'ouverture de IR succession, refusent d'appl iquer à l'rnfant naturel les dispositions rlPs art 85!5, 8'>6, 8li~
Le coh<·ril1er c 11vov1'.: en possess ion provisoire
des biens d ' uu i.lbsenL peu t-i l ex iger le rap por t
de son col 1ériLicr'? La sol ution afflrmative n'esl
guèr e disc utable si l'on réfl échi t que si l'envoi
en pos')ess ion es t Lt n d<''pôt à l'égard de l'absent
(art . 125), entre les envoyés c'est une véri table
et 867. C. c. (PM , 1~ juillet 1827 . Sir. 28, 2, 73. - Cass. H
janvier 1831. Ual. 31, 1, 68 . - Fo uEl'DE CONFLANS sur 160.Montpellier, 2 ~fév ri er 1873.) -Signalons enfin une théorie de
:Il. Demante d'aprè:; laquelle l'imputation de l'art. 760 devrait
être assimilée au rapport en moins p.renant : si donc la donation est mubilièrc on rapportera la valeur du meuble au
moment de la donation (art. 868; ; si l'objet donné est un immeuble on se placera pour l'estimation de sa valeur il. l'époque du décès (art. 912 - DEMA NT&, 79 bis )
Ces différents systèmes reposent tous sur des distinctions
aussi a rbitraires que contraires au texte de la loi. Il n'est pas
adm issible lJUe l'imputation soi t ditférente du rapport et
nolis c royons que dans la pensée du législateur ces deux
mots sont synonimes et expriment la même idée; les termes
différent il est vrai, mnis en se servant du mot imputer les
rédacteu rs du Code paraissent n'a\•oir eu d'autre but que de
mettre la n)daction de l'art. 760 en harmonie avec celle des
nrticles 756 et 757. Il faut donc reconnaître qu'il n'existe au
fond aucune différence réelle entre ces deux opérations et
qu'application devra être faite aux enfants naturels donataires ou légataires des règles du droit commun en matière de
rapport. Cette solution qui se déduit de l'esprit de l'art. 7;;7
se trouve d'nilleurs confirmée par ces paroles de Chabot dans
son rapport nu Tribunat : « L'nrt. 760 est une garantie que les
• enfants naturels n'a uront pn.• plus que la loi ne permet de
~ leur donner •
�-
1~2
-
s ucces:::;1on q ui s'omTc prov isoiremen t. Les
choses c.lc\'l'Onl ùo nc se p asser comm e si la
présomption <.lu décès ùc l'absent avai t fait
place à la réalité e t nul do ulo que dan s cc L:as
le r apport n e fùt dù . Ce résnltaL es t r endu encore plus évident quand il s'agit de legs fa iL.
ans d ispe nse ùe rapport à l' un ùes e nvo yés ;
celui-c i ne peut avoir plus de clroits q ue s' il
était appelé à une \'é ritabl e succession .
SECTlON Ill.
A que/fr> succession le rappo1·1 est d1L
« Le rapport, d it l'art. 850, ne se fait qu'à la
s uccession d u donate ur. l> Ce n'es t ) en effet ,
q ue d ans cette succession q ue l'éaalité entre
les cohéritiers a é té rompue . Ains il:>le petit-fil s
~e rap.p~rte P,~s à la s uccession de son père les
l~ér~ltt~s qu tl a reçues de son grand- père ; il
n e n etatt pas toujours ains i dans l'a ncien droit .
Po ur appliquer l' art. 850, il s uffit donc de
rechercher quel a é té le véritable donate ur .
Cet~e qu~s tion ne s~ ulèvc de difftcultés que pou r
le cas ou ln do nation est fa ite par plusieurs
personne , par exem1llc d::tn . les contrats rie
1>
-
1\3 -
manage. « Dans ce cas, tlisent Aubry el Rau,
» le rap port es t dù à la succession de chactrnf'
>> d'elles pou r La part à raison de laquelle ell e y
>> a contribué ou est censée y avoir contribué. 11
Ce p rincipe est écrit an titre du Conttat de
niariage et des dro its 1·esperlifs cles époux dans
les art. '14,18, llwü, 15G4-2°. - Il embrasse trois
hypothèses bien distin ctes:
1°. Un ùes é poux dole seul personnellement:
il e t alors seul llon aleur el le rapport de la dot
ne sera dù qu'à sa s uccession. (art. 1514)
2°. « Si le père et la mère ont doté conjoin» tement l'e nfan t co mmun sans exprimer la
» portion pour laquelle ils e ntencl nient y conlri)> buer, ils so nt censés avoir dot(' chacun pour
>> moitié ii (art. 1138-1°), et Je
rapport sera
ùù pour 1noitié à chaque s uccession. (Cas . 31
mars 1840. - Sm. 1-0, 1, 337) Il n'y a à tenir
compte ni du régime matrimon ial tles épo ux
donateurs ni de la nature des biens donné::;
(propres ou communs); ces circo nstances onl
l'trangè re~ au rapport et n e peuYent in nuer l{Ue
s ur le règleme nt à inlen'enir e ntre' les épou'.\. .
(Cf. art. 1438) Ce lle règle a été méconnue par
un arrèt de la Gour d'Am iens Llu 10 nov. 185'3
(Oal. ·55. 2 . 108) c1ui a JUgé que s1 la dol co n~li
tnée solidairemen l par le père el la m ère a clé
intè_gralcmenl payée par l'un d'eux, le rapport
en sera d 11 pu11r Ir tout ù la s uc;cc:-.. 10 11 de relui
�-
q ui a payé. L' u1Lc nl ion d'acquitte r seul la de lle
co mmune ne r ésulLc nullem ent du fait de payer
la totalité de la ùo t qui , s uiva nt nous , n'es t que
l'exéc ution de l'obliga tion s olid aire dont le
paie ment ass ure à celui qui le fait nn recours
pour moitié contre so n co njoint.
Il arriYe assez souvent que les père ~t mè1e
tout en dotant conj ointe ment leur e nfant s tipulent d ans J'acte mème de cons titution que la
dona tion sera imputable s ur la s uccession du
prémouran t. Quel effet produit cette c lause
quant au rapport ? La Cour de Paris par arrê t
du 10 aoùt 1843 a décidé que « la s tip ula tion
» é tait un iquem ent faite dans l'inté rêt de l'époux
» s uni va nt et qu'il n' y e n a pas moins deu x
» dona teurs. >> Po thier pens ait au contraire que
cette clause devait ê tre e ntendue en ce se ns
que le prédécès de l'un des époux d evait d é terminer lequel ava it é té donate ur e t pa r s uite à
quelle s uccess ion la dona tion tout entièr e se
r apporterait. La juris prudence a modifié d ans
ce dernier _sens sa premièr e décis ion . (Paris, 16
m ars 1850. Da l. 50. 2. 167 - Amiens , 10 nov.
1853). (1)
3°. La dot cons tituée par le m ari seul à l'e nfant commun en effe ts de communauté es t à la
.
(! ) L'examen de ce t te clause échappe a la cens u re de la
Cour de Cassation . (Cass. 3 juill e t i 872 - Dai. n 1. 370).
l ~I) -
c harge de la co mmun auté. Le m ari es t alor::;
censé avo ir agi non pas en so n nom rersonne l,
mais comm e chef du pa trimoine co mmun . La
question du rapport se trouve don c s ubor do nnée au parti que pre ndra la fe mm e à la di sso lution de la communauté : accepte-t-elle, ell e
aura é té don atrice pour une part proportionn elle à ce qu'elle rec ue ille; (Cf. art. 1520)
renonce-t-elle , le m ari sera censé avoir seul
con s titué la dot q ui se rapporter a pour le tout
à sa s uccessio n. (1)
Sur l'art. 850 rappelons avec Demolombe qu e
ce t article n'a pas seulement po ur but de dé terminer la s uccess ion à laq uelle es t dù le rapport ; il indique également l'époque à laquell e
s'ouvre cette obi igation .
CHAPITRE
Il.
DE L'OBJET DU RAPPORT.
E n commenta nt l'ar t. 843 no us avons \ ' U t1ue
l'obje t du ra pporl es t multiple : il comprend ù 1<1
(-1 ) JI fau t L"nLtnche r n cette hypothèse le cas' où pendant
rabs en ce d u mari , la femm e aurait aYcc 1autorisa tion de JU"
tice c m plo_yé Jeio; bir nio; com muns nrioter un e nfant ( \rt 11,{7 1
�-
-
Llon ~
enlre-vifs, les legs c l les de lles.ous (lonn erons à chacune de ces m atières le
fois le::;
1
1 '~6
dc~,·e l o ppement
qu'elle nous paraitra exiger.
(1 Tout hé ritie r , dit l'art. 813, doil rapporter à
)) ses cohéritiers tout cc q1t'il a reçu ùu défont
)\ par donation entre-v ifs directement ou indirecte» ment. )) On discute beauco up e t avec peu de
fruit sur les difîércnces qui peuvent exister en tre
une donation directe e t une ùonatlon indirecte,
car ce deux genres de donations so nt égalemen l
soumises au rapport .
L'héritier, pour ê tre tenu au rapport, doit
aYoir reçu quelque chose. L',intention chez 18
donateur de lui fa ire un e libéralité ne suffirait
pas si. cette inte ntion n'avait pas é té réali sée.
« Rapporte r c'e t rendre, dit très-justemen t
)) Demolombe, or on ne rend que ce que l'on a
11 reç u.» li faudra donc prou ver
que l'h éritier
a l'éellement reç n; celle pre uve ne pourra ici ê tre
déduite du fait que lo donata ire a perdu, par
suite de la prescription, le droil d 'agir co ntre
son dona te ur o u ses héritier s. Cette prescription
n'engendre qu' une pn'.·somption qui n'es t pas
assez puissan te pour impo er le rapport ; d u
reste l'art. 2219 dit que la prescription est un
moye n de, e libé rer et non un moyen d'acqltérir
un e créance. Celle id<''e doit ètre é Lenclue au cat'
oü le donataire a1tn1 it 'o loulairement renoncé nu
rlroil rl0 rt';l'!nrncr la rlonnti on à lut pro mi se.
-
1 ~7
-
Ce tte hypotli èse é tait très-co1nmune ùans l'ancien droit, e l PoLhie r passe en revue plusieurs
espèces d am; Jesqctelles ce prin cipe reçoit une
applicaLiou cons tanle.
Quid des do nations avec charges ou onéreuses,
et des donations rémunératoires? En prin cipe
toutes ces donations , par cela seul qu'elles
participent du car actère d'un e libéralité, soul
s oumises au rapport; mais encore n'est-il dù
lJU C dans les limites de la libéralité. Pour la
juste appréciation d' un don de cette nature, .on
a proposé le rappor t ùe la totalité de la donation
sauf au donataire :\ réclamer une indemnité à la
succession . .\ i nsi l'héritier donataire aYec
c har<Yes
d'un immeuble devrait~ préalablement
b
.
rapporter à la masse l' immeu?le qu'~ l . a ~'.cçu
sauf ens uite à prélever une mdemnite. S1 la
d onation é tait mobilière, celte difficulté serait
écar tée par la manière dont s'effectue le rapport
des m eubles. Les inconvénients sans nomure
<l'un pareil procédé nous font préférer un S):stème assez généralement adopté dans la pratique
pour des cas analogues. On distingue: la ".al~ur
des services rendus ou des charges acqu1tlee::;
es t-elle s upérieure à la moitié de la ùonation ·~
On ne rappo rtera pas l'immeuble et l'hérilie1
d on a taire paiera la différence; les parties, en
effet, n'on t pas c11 ponr hut principal cle f~ir1•
no rlonntinn CcllL' 'nlc11r C!'L-clle, au conlrn11 c',
�- us mférieure ù la moitié ti c la chose donnée? Le
bnt de l'opération a bien é té une donation et on
la traitera comme telle. On devra donc rapporter
l'imm eub le en en Lier, et le donataire n'aura droit
qu'à wie indem nité. (Argt. anal. art. 866)
Les donations par contrat ùe mariage so nt également rapportab les. (N. obst. art. 1090) Même
solution pour les dona tions mutuelles (1); mais
le point de savoir si l'obligation de rapporter
ce qu'il a reçu du de cujus antorise l' héri tier à
réclamer de son cô té ce qu'il lui a donné, es t
très contro,·ersé. La ques tion d'ailleurs es t fo rt
délicate ; on décide différemment s uivant qu'il
Y a ou non faute de la part de l'un e des parties.
Cette distin ction n'es t pns admise par tous Jes
auteurs.(contrd Oemol. n o3~2 ., V. un intéressant
rapport de M. Troplong dans un arrê t de cassation du 2 janvier 1843. - Dev. 1843. 1. 118).
« Les don s manuels, di sait le tribun Ja ubert,
» ne sont s usceptibles d'aucune forme. Il n 'y a
·
(t ) L "acte par lequel deux époux contractent une assurance
su r la vie au profit du su r vivant ne renferme pas un e donation mutuelle et réciproq ue prohibée par l'art. 1097. u. c ; et
le surv ivant qni vient à la succession de J"époux prédécédé
ne doit pas J' rapporter le capital qu'il a touché : Je contrat
intervenu est, en effet, un contrat à titre onéreux, puisque
é~a~un des époux consentait à perdre sa pa r t en cas de pré~eces pour g agner, en CRS de survie, le montant intégral do
1 assu rance . (Douai, 31 janvier 1876).
>>
là d'autre règle que la tradition , sauf néan-
» moins la r6duc tion et le rapport dans les cas
» de droit. » La dispense du rapport s·a~)pl ique
également à celte nature de donations, mais
elle n'est pas soumise à plus de formes que le
don lui-même, s i cette d ispense accompagne la
donation. (1)
Les dons manuels n'exigeant pas un écrit, la
preuve ne se déduira le plus souvent que de
l'aveu du donataire; mais le rapport pourra être
difficilement exigé, car le_donataire ne manquera
pas d'ajouter qu'il y a eu dispense du rapport,
et l'aveu ne po urra être divisé contre lui. (art.
1356. Caen, 28 novembre ·1861)
« Le rapport es t dû de ce qui a été employé
1> pour l'é.t.ablissement d'un des cohéritiers ou
J> pour le paiement de ses cleLtes . » (art. 851)
Cette dispos ition doit être généralisée ; quelle
que soit l'in tention du do nateur, qu'il nit fait
(1) Pour les dons manuels, la dispense de rappor t peut
également résulte r de la volonté du donateur , volonté dont
l'appr éciation est ab;r ndonnee au pouvoir souverain des juges
du fait. (Oass. 19 uov . 186 1, D. 62. 1 liO. - Cass 3 mai
1 86~, D . 6\. t . 113 . Cass . 11 mars 1873, D 73 . 1 19~ \ Il
faut s ignaler ln partie de ce d erni«r arrêt d'ap rès laquelle la
cou r de cassation s'es t rése rvée le droit de rechercher si la
décision des juges du fait qui déclare que le don manuel a
été fait avec l'inten tion de dispensordn rapport , n'a r 'ls YiOk
le testament du donateur. (Cass. 4 aoùt 1851, D . 5 L 1 ""'
�-
150 -
une li!Jéralilé uu sn ccl~s~ihl c :-.o il ;\ Liln~ de donation , so il s implement co mm e gérant d' :'lffaire~.
l'hérili€r dont l'affaire aura é té faite ùen ·a te nir
compte à la s uccession ùu de rnju. <le cc qui
en aura élé dis tra il. Si cepend ant l'll é ritier
renonçait à la su ccession du donateur, il pourrait garder les dons à lui faits; m ais il ser a il
toujours tenu de rendre à la masse les somm es
que le défunt aurait dépen sées pour lui . :\ la
Yérité ce ne ser ait plus un rapport que le donataire devrait efTec luer, mais bie n nne dette qn'il
auraU à acquitter. Cette re marque a son intérê t
relaliœrnent aux créanciers h éréd it aires. (art.
857)
L'expression ùonl s.'es.t s.en ·i le Code cl an.
l'art. 831 est très-vague. On s'acconle. générn lem ent à reconnnilre qu'il faut compren dre pn r
élablis>;emcn l non se Dlem enl les somm es débonrsées par le dr ci~jus pour proc ure r au s ucrcssible un état , une profession , sans toule (ois co ns tituer des frais d'édncation e t d'apprentissage,
(art. 832) mais aussi tout cc qni, arnn l on après
l'établbse ment, e~ t rie nature à le comp lé ler ou à
en rendre Je résultat plus certa in . Les exemples
abonden t · c'est ain s i que les sommes avec
lesquelles le s uccessible a aèh e té un fonds de
commerce c\c\Tont être rapportées, de même
cle celles d<::ùours.éei:; pour l'arha l d 'un orncc mini s tériel ; s i le l1Lnl nire ùe l'offic e étail
(.
(.
-
15 1 -
,
le de 1·111111<, el qu 'il ::-;e ful dt"mi::, en fa\ eur ùe
s.0 11 lils, le rapport de la vale ur de l'oftice :sera
ùù s'il ren tre drlll · la classe des fon ctions iiour
lesquelles le lil11lairr a un clroit de pc·ésentation
(art. 01 . L. 21 nvril 1816. - Agen , B rna1 1872
Dall . 72. 2 . 145.)
c .. Pour le paiement de ses dettes. » uit l'art
851 in fine. Celte th éorie est é trangère à celle
ùe l'arl. 820 à laquelle nous allons bientùt arnrnr . li s'agit ici non ùe ùeltes contractées par
le su ccessib le em e rs le de cujus comme ùans
l' art. 820, mais bie n de clettes faite par l'héritier
et que le dé funt a acquillées. Et d'abord
ces dettes pouvant è Lre nulles on an nulab les, y aura- t-il lie u à rapport ? Nous ne pouvons le cr oire. En payant pour son flls une
de tte a u p aiement de laquell e celui-ci ne peut être
co11 lrai11t par les moyens légaux., le père ne lui
confère auc un avan tage; des r a isons é trangères
à la logiqne du droit peuvent 1'<.woir détermin é
à agir de la. sorte. 11 a pu \·ouloir satwer l'hon- .
neur de son fils et peut-être le sien, mais on ne
p e ul l ~gnl cm e nt 'oir 1lans ce t ac le une lihéral1ti·
conférée au s ucces~ih l e. La \ érilahle pensée de
la loi $ Ut' la m atière no u ~ est ré' élée par lt•::parolcs de Berlter a.u sein ùu Conseil <l'Etat
« Tl /rlli! ci1·co11sc1·i1 <' l'aclio1t du ,·apport a11.r sc11fr.,
» clell c.-.: pow· le /J{l Îl'lll<'11/ de.<:rJ11e/lrs fr colié1·itic1
» c1111·rri/ /Hl é/1·c 11alr1/1/cinc11f po11r·.<:11fri t'll j11.~li11'
�- 1:n » peu· fr i:n!a11cief' re111bo1tr sJ. )) No us n 'll -.~ il e rons
pas à applique r ce principe nn cas où le père
I
au rait acquilté les de ttes con trac tées par son
fils en minorité. La discussion de celte espèce
au Conseil d'État fut très-vive. Les de ux opinion s
furent chaleureuseme nt d éfendues, el bie n qu e
la disposition de l'art. 851 n'ait pas é té retouchée, la solution qui assujetti ssait le fil s a u r apport parait avoir prédomin é ; quoiqu'il en soi t,
nous r épéterons qu'il n 'y a ici ancu n avan1age
procuré au fils e t que, par conséquent, suivant
l'esprit de la loi, il ne pe u l ê tre question d e
rapport. Et ce que nous c.lisons de cette fausse
doctrine, nous croyons devoir l'é te ndre à un e
opinion interm édiaire dont Duranlon s'es t fait
l'écho : (< La solution dépend beaucoup des cir>> constances et de l'intérèt qu'avait l' e nfant à
>i ce que les de ttes fussent acquillées pour
» n'être pas humilié e t déconsidéré ' de l'âne
t>
>1 qu'il avait lorsqu 'il les a co ntractées, de l'im)) portance de la somme, cle la nature de ln
» dette, et enfin rle la fortune d 11 père. i, (Dun.
v1r. 312). Toutes ces dis tinctions sont arbitraires, e t ne reposen t . ur auc un tex te de loi. (En
ce sens Aubry e l Rau § 031)
La ~olution serait différente si, e n acquittant
la clutte de so n fil s, le père lui avaiL rée llement
procuré uo avantage; ains i on avail fort jus tement soumi s n11 rapport les sommes ùélJoursées
-
1:.;3 -
pur le JJÙI'(' pour exo nérer so n Jils Ju set"dCe
irtilit.1irc (loi de 1868), et <'elle rlécision était
ind6pen c.lan le de la fortune du père et ùe la
modicité de la so mme par lui payée. La seule
clis lin c ti on admiss ible était re lative au cas où
'
en remp laçan t so n fil s, le père l'avait fait dans
son propre intérê t ; il y avait alor::; une preuve
à admin istrer qui é lait à la c.;harge de l'héritier.
(Amiens, 17 mars 1833. Sir. 53. 2. 97.) - Aujourd'hui L'art 4 clc la lo i du 27 juillet 1872 a décrèté
la suppress10n du remplacement militaire et
rendu le service personnel obligatoire. Cette loi
rixe la durée ù u sen'ire actif ù cinq années cle
présence sous les drapeaux (art. 36), mais elle
restreint cette durée à un an sou.:> la condition
de s ubir avec s uccès un examen préalable ; le
volontCtire adm is à celte 6preuve esl tenu de
Yerser à l'Etat une somme de -1,500 fr. Par analogie de la q ues tion précédent~, on peut se
demander si le nts, polll' qu i le père a payé cette
somme, en devra le rapport à la succession
paternelle. Nous ne le pensons pas, car le fait de
ne serv ir q n'une année résulle de l'admis~ ion
aux éprenves exigées et non ùu ,·ersement de
la somme qui est affectée ù l'équipement du
rnlon laire . (arl. 35) (!).
\ 1) Ln snpprcssivn Ùll remplacement militnire i\ putir Ju
I" janvier IR73 a fait Ullltrc ln qn •stion de snvoÜ' quel JeYait
Il
(
�-
l :.i\ -
La remise d'une ùelle l:tant une véritab le
donation est également s uj ette à rapport, mais
. seulement dans le cas où elle a lieu ouvertement. (1)
Nous ne mentionnons que pour mémoire le
bénéfice qu' un Liers succes ible a r etiré d' une
stipulation faite par le cle cujus (art. H21); on
peut voir un profit de ce gen re dan s le fait de
Ja part du d éfunt d'avoir cautionné Je successible. Si, à la mort de la caution , la dette n'a pas
encore é té payée (2) le s uccessible devra rap-
être le sort des traités intervenus après la promulgation de la
loi du '.H ju.illet 1872 pour le remplacement des j eunes gens
de la classe de ~ 87 1 et si, en cas d'insoumission ou de désertion des remplaçants apres le I" janvier ~ 873, les agents
qui n'en pouvaient plus fournir de nouveaux a vaient encore
le droit <le réclamer la totalité du prix du remplacement.
Un a rrêt de Casslltion du 45 juin 1875 ( Dal. 75. 4 , 289) se
fondant sur ce que ces traités étant postérieurs à loi de •1872
ne pouvaient a \'oir d'autre objet pour les remplacés que
l'exonération du service dans l'armée active il. eux assu rée
par une circulaire ministérielle du 29 décembre 1873, a décidé que les traités seraient maintenus et que les agents pourraient demander la totalité du prix stipulé.
(1) Suivantles articles 1'28.2 et 1283 l'aban<lon du titre fait
présumer la libération du débiteur. La qu estion du rapport
sera différemment resolue suivant qu'on regardera le débit.eur comme ayant payé ou comme a_yant été gratuitement
libéré.
i2) Si le de cu7us avait été pourR11i vi comme caution et
-
l l;5 -
putter l'a\ an Lage qu' il aura retiré ùu caulionneme nl, c'est-à-di re qu'il devra en procurer la
décharge <\ ses cohéritiers. (con.trâ. TP,OPLONG,
Donat. JU . '1080). Si le cautionn ement a été fourni dan s l' inté rê t c.lu créancier s uccessible, c'est
lui qui rapportera. (Paris , 21 déc. 181.-3. DEv. 44.
2. 80). Pour le ca. où la c.:aulion es t salariée
V. Cas::;. 29 déc. '1858. Dai. 59. 2. 103.
1l se préseule plusieurs hypothèses dans lesquelles le s uccessible bé néllcie d'un acte fait
par le de cujus e t auquel il n'a point participé; par
exemple le de r11jw; a renon cé à une succession
à laquell e LI éLail appelé aYec son successible
o u IJ1 c11 il a renon cé à un legs ùont le s uccessible é tait grm é. Y a1tra-t-il li eu à rapport '? 11 es t
bie n e nte ndu que l <l question ue se pose que
s'il es t é tabli qu'en ie noni::ant le de ciijus a voulu procurc t· un m c.u1 Lage à son successil>le.
Pour notre part uuus ne saurions exiger le
rapport clans ces diffêrente::; hypothèses, car si
Le success ible es t venu à la ::. tlccession avec un e
part plus forte, cc n'es t pas comme ayant cause
ùu cle cujus, mai bien j 1u·e suo. Cette doctrine
est générale ment uivie en jurisprudence. (G renoble, 2j urn 1 '61-. ÛE\' I L . 61-. 2. 223 -Toulou::-e:~
déc . 1863. DE\' i LL . M . 2. 178. - \" . en sens t:onq11 il eùt
Jlfl\C la dette <ln successiblr, il y aurait heu il rapport eu vertu <le l'a rt 8!) 1 ~·
�-
raire un ·arrêt Lle Cass. du lj mai l t-\Gû. DE' 11.r.
66. 1. 276, qui casse l'arrê t de Toulouse précité).
Les articles 853 et 851 règlent les effets dei:;
contrats à titre onéreux intervenus entre le de
cujtts et soH s uccessib le. Il faut d'abord reco nnaitre que, sous l'empire tlu Code civil, la capa cité de con tracter es t la règle générale et
l'incapacité l'exception (art. 11'23, 159/i-). Le Code
n'a pas reproduit les anciennes prescription s
édictées par les co utumes qui , clans ces occasions, se monlraienl d'une gro nde défiance e t
d'une séYérité ex trême . (1)
Un successible peut don c a ujourd'hui co nLracter avec son auteur comme le ferait un
étranger et ce contrat produira ses eITets ordinaires quand il sera réellement à titre :onére ux
et qu'il ne servira pas à masquer une libéralité.
On a voulu , il est vrai , tirer de l'art. 853 un
argument a conlrttl'io et ex iger Je rapport résultant indirectement du contrat passé entre le
I
(~ ) o Ona mû plusieurs fois, disait Basnage, la question de
• savoir si les contrats entre le pere et son fils, comme la
~ vente qu'il lui fait de son bien, peuvent subsister au pré• judice des autres enfants ? Ces actes son t toujours sus» pects ; pour donner force a ces contrats et effacer les préo somptions de fraude qui en naissent naturellement, il faut
» jus tifier d'un véritable emploi qui ait été fait des denier:>
• soit en paiement de dettes légitimes soit en achat d'autres
» héritages. "(Sur l'a rt. 13't Cout. Vormtmdic)
15ï -
successible el s on auteur Loules les fois qu'il
prés en Le nn avan Lage indirect lors cle sa forma t.ion, mais celle solution est trop absolue et il
faut la combiner avec la théorie que nous avons
adop tée sur les efl'els du déguisement : quand
l'avan tage i nùirect sera patent le rapport sera
dû; le déguisement emportera au conLrairn
dispe nse de rapport quand l'avantage sera dissimulé.
Qnand le successib le est soumis au rapport
do it-il rapporter l'immeuble tout entier ou sim plement le profil qu'il a retiré dn con trat 9
L'intention des parties sera le seul guide dan~
celte opération : ont-elles, arnnt tout, entendu
faire une <lonalion , l'immeuble sera rapporté
en entier . La libéralité ne jouait-elle qu'un rôle
secondaire dans le contrat, l'avantage seul sera
rapport6. Celle ques tion est analogue à celle
que nous avons 6Lncliée pour les donation.;:;
rémunératoires. (1)
L'arL. 854 indique une res lricl1on à la règle
préct}denle. Le législateur a cru Llevoir régl menler un des nombreux contrats qui petwent
inte rvenir entre l'auteur e l so n snccessihlc
l i ) On trOU\'<' au Digeste ,-.ur la quest ion trois s~·stt-me"
cl iffércnb. I.e~ jurisconsultes l'l.>1n:uns l'ont cturliée il l occa~ 10 11 dune H'llh' i1 '11 prl'. faitr pnr un epou" i1 lautrc (L '
~ !> 31 ~ 3
Diu tl1• drm11I inl tir t•I 111·ur
�-
l ilS -
Ce conlral , l'cts:wciation, cleYait éviden1me11 1
é\'eiller son attention non parce q u'il se prè te
plus fac ilem ent qu'un autre à la fraude, m ais
parce que l'importance rles bén é fi ces qui en
résullent peut que lquefoi porter un grave prf>judice au x au tres hé ritiers du de cujus. (1)
(( Pareill em ent,jl n'es t pas dù de rapport pour
>i les associations faites s ans fraude entre Je
)) défunt et l'un d e ~es hé ritier s, lors qu e les
>l condition s en on t été r ég lées par un acte
>l authentique. i> (art. 854) Deu'<. conditio ns
sont ex igée :
1°. Il faut que l'assoc iation interven ue e ntre
l e défunt et l'hériti er nit é té faile sa11s fraude .
Quel pe ut être le véritable sens de ces expressions? Suivant Aubry e t Rau, ces expression s
ont trait à certain es c la uses qu i, s an s être ill icites, s'écartent cer>end an t des règles d 'équité
d'après lesquelles se dé Lermin enL d'ordin ai re
les droits respectifs des associés. (1v § 631 ) Si
t elle é tait la pensée ùe la loi ell e ne ferait q u'exprimer une règle que pen::;onne ne contes te, e t
el le laisserait s u pposer qu'on a réglé clifîére mmen t les e!Tets d'un e as oc ialio11 s uirnn t qu'ell e
interYient en tre le de cujus el son s uccess ib le o u
(1) Basna.ge en donnait pour rai son que ce contrat était un
de ceux qui causent le plus soLwent de h1. bro11illr riP dnns
les famillPs. (Sur l'art H4 Cn11/ IVormanrlir)
-
1:;9 -
entre étrangers . - D'autres auleurs exagérant
le sens du mot pareillement ne voienl dans ces
expressions q u'une re production pure e t stm ple
du prin cipe posé dans l'artic le précédent, à
savo ir que l'associa lion comme tout contrat ne
doit présente r auc un avan t::i.ge i.ndirect(DE~IOL.).
Mais celle exp licalion n'est P.Oint admissible
puis qu'elle ne lient aucun compte de la double
co ndition édic tée par l'art. 854. A notre avis,
en parlant <l e fra ud e L'art. 834 a voulu prévoir
le cas oü une atteinte aurait été portée aux lois
sur la réserve et La quotité disponible, (TouLLTER
1v, 474) e t c'e t à lor t qu'on a contesté cette
relation entre l'objet de l'art. 854 et la matière
cle la r éùuction, puisque l'art. 844 \'ise bien une
dispos ition de ce genre.
20. Les condiUons de l'association doivent être
r églées par 1rn acle autl1enlique. Le but d'une
p areille exigence es l facile à sai::;Ù' : la loi a
voulu que les héritiers du cle cujus fu~sen t toujour s à m è me de g'éclairer sur les clauses de
l'a<:te ù'as.::;ociation. Il a donc fallu préve'1ir le
danger de la suppression de cet acle, el c'est
avec raison qu'on a ex igé l'authenticité , toute
autre formalité comme celle de l'enregistrement
ne po uvant remplir le m ème but.
Si la octé té est commerciale, le~ partle::.
pcuvt'nt a'oir corn,ta lé \'association par un .act~
so u~ ~cin p. prin' e t en arnir r églé ln pnbhc1tf'
�-
1
/
1()0 -
conformément à l'art. 42 du Coùe de commer ce.
N' }' a-t-il pas là anlant de garantie que dans
l'exis te nce d 'un ac tC' a uthe ntique , e t ne doit-o n
pas dire, dès lors , C)tle la première conditi on ser a
seule exigée pour qu'il n 'y aH pas lien au ra11port ? Des au le urs l'ont soute nu , mais leur opinion nous p arait e r ronée en présence du texlc
de notre article, puis que les prescrip tions de l a
loi commerciale laissent s ubs is ter le d anger qu e
nous avon s ignalé. ( A UD RY e t RAu § 36'1 )
Si , à l'inverse, le::; parties ont observé le~ di pos itions de l'arL . 8t>1, sans tenir compte dei::
formalités ex igées par la lo i com mer ciale, l a
nullité de la société pourra évidemment ê tre
demand ée pa r les a ntres h éritiers, m ais celle
nullité, s'il s la fo nt p rono ncer , ne le ur sera d'au cun profit puis que l a jurispruden ce n e lui faiL
produire d'efîe t que pour l' aYenir (Cass. 16
mai 1859. - BRAV.\ RD-V1mR. Dr. com. r. 1ü3.)
Quelle sanc tion entrai ne la violatio n de l 'art.
854? Nous ne dirons pas avec Duran ton (v rr .
341) que l'article ne prononçant aucu ne san e tion, sa violation aura pour eITet d e faire prés umer , jusqu'à preuve d u contr aire, l 'avan tage
ü1direct, auquel cas l' héritier d evrait établir q u e
l'associa tion a été sérieuse. La d isposi tion cle
cet a rticle est cles plu s impér a li,·es e t l 'inobservation d es form alités qu il prescril nou s parJi l
devo ir enlr::ti ner ln nnllit<'· cle l'ac le de sor iét(·
-
H\1 -
Dans cc as l e~ coh éritie rs feron t le co m µte de
Lous les profils que le s uccessible n retirés de
l'associa tion , e t obligeront l'héritier à en r appor ter le montant. Cette s olution , géné ralem en t
adoptée par lef-1 aut eurs, est aussi celle de la
juris prude nce. (Paris, 28 déc. 18.54. DEVILL. 55. 2.
:144 - Cass. rej . 31 d éc. ·1835. DEv. 56. 1. 200) Il
es t du r este bien entendn que le s uccessible
soumi s au rapport pourrait réclamer une indemn ité à ra ison des so ins qu'il a donnés aux afTaires sociales et que bonifi cation devrait lui è tre .
faite ùe l'intérê t des sommes versées à la soc ié té. ('1 )
A propos cle l'objet du rapport nous <leYons
s ignaler quels son t les aYan tages qui, par leur
n ature on par la rnlon ll! lle la loi, n'y sont pas
s oumis. Les artic les 852 e l 85û en clonnen t de$
exemples. On n'est pas d'accord sur le mo lif de
ces exceptions: Duran ton veut~' YOir une appli cation rlu prin cipe élahli pa r l';'lrt. 203 qui sou( 1) En général ln Con r de cnssation se montre très large dnn-:
rappréciaticm d('~ soins donn és par ra~socié. elle l ui n mrm<',
dans un cns spccinl, nlloué à titre cl indcmnitc la totnlité Je.:.
hénéfices qu ' il :\\nit retiré,, (Cass 17 noùt 186\ D e dll . h'i
1. 1 21) Mais cc r r::.ultnt était <li1 i1 certaines circoMtnncb
pnrticu licre!'I nu prücè ~ L oc jus t" limite a l'tc posl'l' pnr la
Cou r d'A ix (H nHil 1858 TlcyiJI 'î9 2 :li') Cet nrri-t lh•
l"in<lcmnit1• a un ta11x infr1·11•111 n1\' henC'tirc~ mnis ~11pliri,.11r
nn ~nln1rr 1\'nn c•o111mts
�t62 -
met les père cl m t\re à l'obligation de nourrir,
entretenir et élever leur enfants ; ces frais ne
doivent donc pas se rapporter puisqu'au liell
d'un 'avantage procuré il y a une dette acquittée .
(CHABOT sur 852. - DELVrN. II. 119). Cette interprétation fort juste en droit romain oû le rapport n'avait lieu qu'en ligne directe descendante
est aujourd'hui rendue in complète par l'extension de l'obligation du rapport à tout héritier
quel qu'il soit. - Il es t égalem ent inexac t <l e
dire que les li béralités dont il s'agit se pre nant
sur les reYenus ne doivent pas ê tre ra pportées,
puis qu e la dispense dn rapport subsisterait
alors même que ponr acquitter ces frai s le
dé funt eût été obli gé d'entamer son capital.
CDE).10L.) Suivant non s, les motifs du rapport
n'exis tent pas ici. Les d épe nses de l'art. 852
confèrent certain e ment un anmtage souYent
très-série ux à celui pour qui ell es sont faites,
m ais on ne pe ut pas Llire qu'elles diminue nt
la fortune du de cujus pour e nri chir d'autant le
patrimoine du successible. (AUBRY et RA u § 63 1.
- TO U LLfER lV . 478) (1)
L'art. 832 ne so ulè ve que ùes difficultés d e
fait dans lesq ue lle l'intention du tes tateur pourra
(Il On discute la ques tion de savoir si les avantages que
rart. Sil~ dispense du rapport tombent sous le coup de J'nr tion en réduction . (fümcy, to jnnvicr 11130. D~:v11.L 30 :! . 21<1
-
(
(.
DE"-•A:-iTR
nr
1ss 11i ~
l
-
163 -
se d éduire des circonstances . L'artic le c lasse
en première li gne comme étant dispen sés clt1
rapport les frais de nourriture, d'entretien, d 'éducation . Ces expressions indique nt assez par
el les-mêmes le sens que la loi y attache pour
qne nous ayon besoin de nous y arrêter. Il
importe toutefo is de ne pas confondre ces dépenses faites ponr l'enfant avec les frais déboursés pour so n é tabli sement ; ces dernier en
eITe t sont s uj et à rapport (851). Ainsi l'achat
de li vres nécessaires aux é tudes constitue une
dépense d'éducation ; de même des frai cle
voyage faits par le père pour compléter l'in trulltion de so n !li ; <c car les \'oyages sont
» aussi, de notre temp::; surtou t, un moyen et
>> des me illeurs d'éch1cation et d'instruc lion. 11
(DEMOL.) On doit également c lasser parmi les
frais d'éduca tion les tlépen es faites pour l'obtention des différe nts grades dans le facu ltés
libres ou de l'Etat, ans qu' il y ait s ur ce point
aucune dis tin c tion t\ faire, comme dans l'an cien droit, entre le gr ade <le licencié et celui
de docteur , entre le doctorat e n droit et lP
rloclorat en m édecin e. Les frais d'apprenlbsage élaien t déjà dans l'ancien droit rt bpen~és du rapport. L'art. 832 excepte aussi le.._
frais d 'équipement qui sont les frai d'éq11i11a!J•
cl'11n e11fc111/ qu'on enuoic c111 sr•n•icc . Nou y a.ioule r ons les frai~ ck no ce <' L prt'.>~ents cl'u~ni:zP:
�t1
16\ -
ce sont, disait Bourjon , pures blenséan ces qne
» l'ascendan L observe plus pour sa propre satis -
)} faction que pour enrichir le des cendant. » (J)
« Les fruits et les inté rêts de choses sujet)) tes à rapport ne sont dus qu'à partir du jour
» de l'ouverture de la s uccession. » (art. 8G6)
Il résulte de cet article que les fruits perçus
durant la vie du donateur ne doivent pas être
rapportés. Cette dis pos ition es t exceptionnelle
puisque l'art. 843 soum e t au r apport toutes les
libéralités émanées du de cnjus, et que les fruits
constituent évidemme nt un avantage indirect;
mais elle est fond ée s ur l'intention présumée
du de cujus qui n'a pu You loir que le donata.ire
dùt capitaliser les fruits cle la chose pour l'es
rapporter . (2)
Ain s i l'obli gation du rapport nait quant aux
fruits dès l'ouYerture cle la success ion ; ell e a
li eu de plein droit e t sans demand e en jus ti ce.
(Cf. art. 1473-181.B) Le principe es t clifTéren t en
cas de réductlon . Pour que le donataire cloi,,e
les fruits à partir de l'ouverture de la succes(1) Si le de CUJUS n'ait formellement soumis au rapport les
frais que rart. s:;~ en dispensr, sa volonté devrait être resprctée; il y a lil une condition fort licite apposée à la donation .
(2) Pothier, sur l'art. 309 de la cout d'Orléans, donne de ce ttr
disposition une raison plu!; subtile que juste : a on ne rap
porte, dit-il , que cr qui n été ùonné , or les fruit~ n ont
point r tr <ionni\s au illlCCessihlc par Il' rJonatcur o
(
-
I G:; -
:;io11 il fau t que la ré<.luctio11 soit ùen1a11dée pal
les llérilie rs à réserve dans l'an née llu décès;
dans le cas contraire les fruits ne so nt dus que
du jour de la ùemande. (art. 928, 1153) Cet te
difTére nc..;e se comprend aisément : l'héritier
donataire qui vient à la s uccession du de cuju.<>
ùoit s avoir que la donation qui lui a été faite
est sujette à rupport ; il devra donc tenir compte
ùes fruits par lui perçus postérieurement au
décès du ùonateur el considérer la chose donnée co mme un ùépôt. A la différence de l'héritier, le donataire étranger ne connait pas
nécessairement, dès le décès du donateur, les
obligations qui lui sont imposées; pour sarnir
s i la libéralit6 doit ê tre réduite il faut d'abord
évaluer les forces de la succession et ce n'est
souvent qu'après de longs tàlonnements qu'on
parvient à découvrir que la q uotité disponible a
é lé exc6dée. L'in action de l'héritier réservataire
pendant un an est donc de nature à faire croire
aux parties intéressées que le de cuj11s est resté
clans les limites de la loi, et cette crovance
s nfflt pour le faire considérer comme pos:::;e seur de bonne foi et le dispenser de re~tituer
les fruits perç u au térieurement à la demande
en réduc tion qui n'aurait pas été faite Jan~
l'année. (1)
1) Cette rcgll' a
été contestel' pl\r nn arr~t de la Cour 11
�-
.,
(.
166 -
IG1 -
La mème sululion doit être alJpliquée aux
Pendant la vie du cle cu,jus l'hé ritier don a taire
ajoui cle L'obj et donné co mme un usufruitie r ;
on se réfèrera donc a ux règles ad mises e n matière d'usufruit pour fixe r la part des fruil perç us que le don ataire po urra garder, e l celle qni
sera s uje tte à rapport. (ar t. 585-586.) Pour Ia
même raison , le donataire d'une rente viagère
ne sera pas pl us te nu de rapporter les arrérages de cette rente que l'us ufruitier n'es t obligé
de les restituer (art. 588); cette décision s'app li que également au,\. rentes perp6Luell es, (art. 530)
e t à celles du es par un Liers au défunt on que
ce dernier s'est engagé à servir. ('I )
' i La donation avait porté ur un usul"rni l , le
c.Jonataire n'aurait pa s à en rapporte r les produits (Cf. art. J5G8); ù mo in s que le donateur
n'ait entendu donner les revenus de l'us ufrui t.
bénéfices que le s uccessible a retirés pendant
la vie du défunt, du bail à vil prix consenti par
le de wjiu;. (1) Il serait étonnant, a-t-on dit, que
les b énéfi ces résultant du bail fussent sujets à
rapport alors qu'on n'y so umet point les fruits
que procurerait au successible l'usufruit de ces
mêmes imme ubles. La loi ne peut pas se montrer d'autant plus rigoureuse que l'avantage est
moindre. A notre avis ce motif n'a rien de juridique ; nulle part, en effe t, la loi n'a subordonné
sa décision à l'importance plus ou moins grande
de la chose à rapporter. Il nous parait préférable de déduire cette solution de l'art. 856 combiné avec les d istinctions que nous avons
é tablies s ur le rapport des avan tages indirects.
(Montpellier, 4 juillet 186:-S. - Sm . 66. 2. ·186). (2)
Bastia (.29 juin 1851 . Dai. 58 . :l. . 65) d'où nous extrayons cet
étrange considorant : «Attendu qu'on n e comprendrait pas
que l'héri tier donat1tire déja avantagé par l'effet de la donation
ou du tes tament dO.t l' être en"ore par la faculté de faire les
fruit siens jusqu'au jour de la demande et qu'en défin iti ve,
l'héritier qu i peut intenter l'action en pétition d'hérédité pendant trente ans n'eût pas le mème droit pour la répétition
des fruits et revenus ..... »
(1J On a mit d'abord YOulu refuser au donataire le droit <le
réclamer apres la mort du de cu;us les arrérages échus et
non encore paséi:. ; mais la jurisprudence a rejeté cette distinction. Toutefois la prescription de ci nq ans dr l'art . .l2i7
devrait s'appliquer a ce:-; atTPrages
( 1) Il est bien évident que l'avantage résultant du bail
cessera pour l'héritier li la mort du de cujus. Il y aura lieu,
suivant les circonstances . a la résiliation du bail ou à une
augmentation de prix.
('i) Lorsqu'une personne a contracté une a:>surance ur la
vie payable apres sa mort à l'un de ses hérit iers, il doit être
fa it à sa succe.;sioo rapport du benefice de l'assurance . .Mais
l'héritier devra-t-il rapporter le montant de primes payees
a la compagnie ou l'intégralité du capital qu' il aura t ouche'?
Cette seconde solution doit être preferée parce que la donation a eu pour objet non le montant des primes, mais bien
un droit éventuel li tout le capital, droit qui doi t être répute
pur e t s imple par l'accomplissement de la conJ 1tion. 1 B e~an-
�-
168 -
-
Il a é té aJrrn s par la Cu ur Lle Cassation , IU
juin 1852, l(Ue les tribunaux pe u\'etll ordonner
la compensation , à compter du jour de l'ouvert.ure de la s uccess ion , des fruits e t des intérê ts
de diverses valeurs qui seraient rc pec live ment
sujettes à rapport .
RA.PPORT DES DETTES
•1
ous avons vu que le Code qualifie de r apport,
l'obligation de tenir compte à la masse lléréclitaire des sommes dont l'un des cohéri Liers p eut
se trouver débiteur envers le de cujus. Le Code
ne renferme que l'art. 820 qui ait trait à celle
matière : « Chaque cohéritier fait rapport à la
i> masse, s uh·ant les règles ci-après établies, des
>> dons qui lui ont é té faits , e t des sommes dont il
» est délJHenr 1) Il ré~ ulle de cette dispositiou
que la loi , en renvoyan L aux art. 813 et s. pour
les r èg les du rapport des de ttes, a entendu ass imiler ce rapport à celui des donations entre\'ifs; nou a urions pu , à la rigue ur, com prendre
cette clouble théo rie dans un e seule et m êm e
c:ou, 1:.i drc 1869 D.11.. 70 2 9;;. Paris 1 A H ll 1867. D AL 67 ~
:rH ,
Y rn sens contrair"
Ili!!-
é twle, mat::> le:. dl; lic;ale::i Lfue~ tiom; 1p1e le rapport des Llclles lail naitre e t :rnrlout le besoin cle
clarté s i néccs~aire à la solution cles difficul tés
qu' il prO\'Oque nous on t paru exiger pour chacune de ces matières un examen séparé.
Nous examinerons trois points principaux :
A. Quels s on t les motifs qui ont fait appliquer
aux dettes l'obli gation dn rapport '?
B. A quelles dettes cette obligation s'appliquet-clle '?
C. Que ls son L les e lTet <le ce rapport?
(A). Les a ute urs de droit t:on tumier avaient
J éjà appliqtté aux. dettes l'obligation du rapport;
ils s upposa ient Louj ours qu'un père prête à son
fils une somme d 'argent , e t ils basaient le
rapport s ur ce que le père e n n'exigeant jamaL
le remboursement, ~a vie durant, avait voulu
a\' an tager son fils . .'.\. ce motif donné par no
anciens auleurs on p eul ajouter que quand une
masse est à partager entre plusieurs cointéressés et que l'un d'eux e t débiteur ù'une
so mme commune, les autres ont Je droit d'impute r s ur la parl qui lui r eY ient la portion qu'il
dé tien t déjà: urrnsqiûsque siui solueudo t iclctur, cl
quocl ad sr alli11 et, diues est. (L. C).2 . Dig . ad. ley
Falcicl .)
1
l l3) . Celte l1ypothèse d' une
omme prèlée par
11
�-
110 -
un père à son fil s, que les au le urs undens prenaient toujours pour exemple, a servi de g11id e
au légis lateur dans la rédac tion de l'art. 829.
Aussi devons-nous ad mettre sans difficulté que
toute somme prêtée dans l'intérêt clu s uccess ib le ou avancée à titre de ges lion d'affaires sera
sujette à rapp01·t ( l). Mais la ques tion doit ê tre
généralisée et l'on doit se demander s i L'ar l. 829
s'applique à toutes les clelles du s uccessible
em·er s le de cujus quelles qu'en soient d'ailleurs
les causes différentes.
Ainsi posée, la question se dédouble et une
distinction nous parait nécessaire. Si le prêt a
été fait au successible dans so n propre in térèt
ou si, plus généralement, Je co ntrat a été à titre
gratuit, l'obligation d u rapport ne saurait faire
de doute. 'Il y a dan s ce prè t un avan tage fait ù
l'héritier que les coutumes soume ttaient déjà
au rapport et qui tombe sous l'application direc te
des art. 829 et 843. Ces di spos ition s devro nt être
suivies malgré le terme dont pourrait ê tre aITectée La dette el qui, en l'espèce, constitue luimême un avantage rapportab le.
Mais de gra' es ùifOcultés s'élèvent rela lfreinent au rapport dans le cas où le con tral qui
(1) La légitimité du rapport des dPt,tcs avnit si bien été
reconnue dans l'ancien droit qu'on finit par l'appliquer môme
en ligne collatérnle
(.
-
l ïl -
a donn é ll a l:-.:->èllll~e à la ùe lle ü été rait dam• le
se ul inl<~ rè1 llu tléfunl Les anciens auteur ... sont
mu ets s ur ce tte seco nde partie ùc la question
et on ne peul argumenter ùe leur s ilence ni
dans un sens ni ùans l'autre. - Ce silence s'explique cependant par ce fait <1ue le prèt à intérêt étant LH'ohibé dans l'ancien droit, l'll ypothèse
prévue par les auteurs était toujours celle d'un
contrat à titre gratuit. - La solution de laquestion doit donc ê tre a ujourd'hui uniquement
demandée aux. principes qui régissent la matière. Pour exiger le rapport de J a dette dans cette
hypothèse, on s'est prévalu de La générali~é tJes
terme Llc l'arl. 820; ce t article, a- t- on tlit, est
absolu el en dis posant qu'il est dù rapport des
sommes don t l'héritier est débiteur, il semble
bien écarter la disLin clion qu 'o n ,·o udrait étab lir
entre les différente:-i classes d.e det tes. Ain l
dans le cas cl' un prêt, commen t as ... imiter ce
conlrat à un e donation? Quelle que , oit la pnrtie dans l'intérêt de laquelle le prêt ail é té fait,
tiue des garanties aient élé accordée e~ de~
intérèls s tipn lés, un prèt n'a-t-il pas touJOUl'h
pour cause principale une somme c.l_'a,1:geot qu'
l'nne des parties reçoit et qu'à la c.l tllerence de
ce qui a lieu en matière de donation elle ~·c 1~
gage ù res tituer'? Or qu'est-ce que cette re~t.l
tntion ino11 un rappor t, puisque entre colw1 lLiers rendre c'es t rapporter ·: Le ::::.ncre sink . . ern
�-
172 -
donc tenu Jan~ tous les ca::- Je l'oliligalion du
rapport qui se fera toujours de la même ma_
nière. (LABBÉ, Dii rapp. clcs dettes)
Nous ne saurioo~ partager celte nrnnière lle
voir qui nous paraît aussi. co ntraire à l'éqnit "
qu'à l'esprit qui a d icté les Llispositions du
Code s ur les rapports.
ious avons déjà répooùu à l'argume nt
tiré de l'art. 829 en r appelant que cet article
était la fidèle reproduc tion d'une disposi tion
de l'ancien droit. En ce qui concerne la seconde objection nous répondron s que si tout prêt
a pour cause une somme d'argent sujette à
restitution , le caractère cle ce con tral peut.varier
avec l'intention des parties; te lle somme aura
été avancée par le défnnt pour venir en aide à
l'héritier, et tell e autre ne l'aura été que parlie
que le de cujus. aura trouvé;: un 'tbo n ~ placement
de son argen t. Dans les deux cas c'est toujours
un prêt qu'on a voulu faire ; mais la natllre de
chacun de ces contrats é lan l d ifîéren le, il est
juste que les efîe ts qui en déco ulent ne soient
pas les mêmes. Ainsi la ques tion posée donne
lieu à une dist inction, c l il y aura toujours une
appréciation à faire de l'intention du de cujus
q u'on déduira des circo ns Lances parlic ulières
à chaque espèce.
L' hypothèse d ' ui1 prê t n 'e~ l évidemment qu'un
exemple et la décis ion qui prérMe devra ètre
1î3 -
appliquée Luu tcs les fois que l'héritier sera
débiteur en vertu ùe contrats inlervenns de
bon ne foi enlre son auteur e t lui, et qui n'auront
présen té, au moment oü ils ont eu lieu , aucun
avantage indirect. (art. 853) (1).
Il faul faire un e res lriction pour le cas où la
dette de l'h éritier résultant d'un contrat à titre
onéreux sera it déjà exigibl e à l'époque clu décès
du cle cujus ; il ne pourrait alors êlre question
(le rapporl , mai il y aurait lieu à un Yéritaùle
paiement qui devail ê tre effectué pour l'exacte
déterm in ation ùe la part afférente à chaque
cohéritier.
Quelle innuence exercera le décès du de cujus
créancier su r une dette à terme dont l'écltéance
n'est pas encore arrivée? Suivant la distinction
précéùenle, s i la convention conclue entre le
défunt el son s uccessible est intéressée, ce
dernier po9rra opposer aux autres cohéritier
l'exception du terme qui lui a élé accordé par
le créanci er. Le terme qui affecte la dette ne
( 1) ~ Toutes les fois que Je défunt, au heu d'~~e~cer u~e
• libéralité en vers son enfan t, contracte avec lui a titre onereux, lui ot ses héritiers doivent, comme tout autre conIls rentrent
• trnctnnt, en subir toutes Je:; cons~quence
., alors dnn~ Ir droit commun ~ (Rapp. de hl le Cons
Lasngni, ('ass. rc11 H aoùt 1 8~3 Cette reflexion du ~a:nnt
mag-i,.;lrnt c:<l dune ~l'an 1 lt' nutontc rn fnveur tlo ln d1 tinct1on 1]\lP nO\h
a\ on" ,.;ou tenue
�-
17~ -
constitue pa~ un profit que lù débiteur relire
ùu con trat (DE~J OL.) C'est un modus de l'obligation qui doit produire touL son effet, et dont la
loi ne prononce ln ù échén nce que sous certaines conditions. (Art. 1180-1913 C. c., 14/t.
C. co.)
C'est encore à l 'a ide ùe la m ème ùistin c lion
qu'on affr~n chira du rapport ou qu'on l 'y soumettra le capital con lre l 'ab andon duquel l e
uccessib1e a constitué une rente perpétuelle
au profit du défunt. (Art. 1909 ; con ltà Aunrw
et RA U § 627) ( 1)
Mais l'obli ga tion du rapport es t-ell e applicabl e
aux dettes dont un héritier peut être tenu enrnrs ses cohéritiers pour des causes postérieures
à l'ouverture de la succession, par exemple pour
la Yaleur estimative d'objets dont il est demeur6
en possession , ou pour la valeur de fruits qu'il
a r ecueillis sur l e. biens hér éditaires depuis l a
mort de son aut~ur. Il faut sans h és itation appliquer à ces difTérent es espèces les règles du
rapport ; il es t vrai que le Code dans l 'art. 138
parait avoir rej eté l a maxim e romaine: Frnclus
augent hœreclilate11i (L. 20, Dig. De hœreclil. petit. )
qu'on inrnque à l 'appui de celle thèse, mais il
est facile d e r épondre à cette objection en faisant
(1) Si 1 heritier renon ça it a ltl succession, il serait autorisé
à continuer la prestati on de la rente
-
175 -
remarquer t1nc ~i le Code t:lvil n'a pa8 adopté
toutes les conséquences de la m axime romaine,
on ne saurait conclu re de L~t <J.U'il l'ait complètem ent abrogée (1).
Cette m ax ime, sanr le cas spécial prévu par
l'art. 138, tl oil au contraire être encore suivie
aujourd'hui dans toutes les hypothèses où .il
s'agit de déterminer la consistance d'une héredi lé. (Cf. art. 1005-1697 . - D EMANTE Hl 162 bis
- Agen , 27 aoù t !8GG. - Grenoble, 10mars1864.)
Chaque héritier est en ou tre tenu de commnniquer à ses cohéri tier s les profits qu:il peut
aYoir retirés en traitant avec des créanciers ou
des débiteurs de l a succession ; en se rendant,
par exem ple, acquéreur pour un prix .i 1~féri~ur
à sa valeur nominale d'une créance de l heréd1té
(2). Ce point de clroit était déjà admis à Rom e,
(1 ) On peut d 'n.utant moins \e·sou tenir qu'il faut plutôt voir
dans l'ar t. 138 u ne exception à ln disposition de la~- 28 Dig
~ 3 0 Orm1e Luet um auferendum esse tam bonœ fidt>1 possPsson
:·quam prœdoni diccndum est » qu'une derogation ù la regle
l'ructus .
('l) Cette ren-lc nedoit pas être a ppliquee au bénefice resulti\nt
"' de l'exercice du rdra1t
· succ~sso.ra1, car, co mme
pour l'héritier
le retrayant, s'il avaitfnitune mauvais-a o-peratton, ne po~rrtut
contrai~dre ses coberitiers it en supporter la p~rte, 11 c,,.t
juste qu' il soit seul t\ bèneficier des profits, qu~m equuntu.r
rommnclci , ru111cl1·111 ''''/UI clt!x·/lt rncommoda .\OBR'> et R.H1 _ '
§ Gi l trr - ' •'\\ ;;cm; contr MEl\LI', llif1• ' 111'/r ~11n ~ 1 l
�-
lîli -
el la L. H>, J)ig . /<1111il. ei·cis. 10, 20, portait
Pto -picuc debel judl'.l', ul <JUOd 1wus c.c hœl'ecliûH s
e.~· te lt cueditariâ Jl t'l'c1'pil, stipulalust1e est , 11011
ad ejus sol i1u~ lue nt 111 perlin ea l. (Cf. L. uli . Dig .
de leyatis).
A propos des cleLtes soumises au rapport, il
nous reste à exo.rniu cr l a question de savoir s 1
J'hériLier peut profiler des causes de libéra tion
qui ont amen é l'ex tincLion de soli obligation . Il
ne peut y avoi r aucun <loute ni pour le pniemcnl
à la suite duquel la ùette a été éteinte, ni pour
la remise consen l ie par les créancieri; <1u1
con titue un avantage rapportable . ( 1) Le c1iff1(1) Quel est l'ett'et, quant i1 l'obligation du rapport, d 'une
remise rés ultant d' un concordat apres faillite? (Art. 507 C.
co.) .O n a soutenu , s ur cette question, des systèmes tres-cl ifforents. Pothier ex igcnit dan s tous les cas le rapport de la
partie de la <lotte que le s uccPssiblA n'avait pas réellement
acquittée ; il basait son opinion s ur ce qui a"ait li eu dans
l'ancien droit confirmé par l'art. 829, et prétendait prouver
quP ln dette du failli est plus qu'une ùctte naturelle en fuis~nt remarquer que jus qu'à l'acq nittement intégral d e cettr
dette, le failli est atteint ùe certaines incapacités. Demolombe
et Aubry et Rau résoh·ent la ques tion à l'aide d 'une distinc tion:« Quand il s'agit <le véritables prêts ou de placements dt•
4 fonds faits par le dMunt dans son intérêt , il ne peut être
v question de soumettre le s uccessible au rapport du mon' tant d<' la remise, lorsqu 'a u contraire il est question d 'nrnnce!> faitci;. rlau ,, l' intérùt <111 o;ucce!:.;;ihlr l'a\antal?C' q111
n;~ultP cle C'f''( a('f P"' r~ t rlr i- n natun., "'llj"t at1 rnpport, Pt
-
117 -
1·111lés ne s 'éll>venL qu'à propos de la prescription . Un arrêt de Paris du 6 mai 184û (Dai. l.t-6
2 . 131-) a décidé d'une m an ière générale que
l'IJ éritier dé biteur é tait so umis au rapport encore
que la de lle fûl prescrite à l'époque de l'ouver-
»
Je successible qui des le principe s'y trouvait éventuelle-
» ment soum is vis-à-vis de ses cohéritiers ne pourra pas,
n
pour s'y soustrnire partiellement , se prévaloir de la remise
» résultant du concorùat. » (AUBRY et RAU§ 631. Req rej 11
av ril t850 . - Sir. :,o 1 510.)
A notre avis, ces tleux systèmes doivent être egalement re_
jetés et la distinction faite par Aub ry et Rau, qui noue; a servi
de guid e dans la plupart des qu estions qui se sont file\ ees 11
l'occasion du rapport d es dettes, ne n ous paraît pas pouYoir
trouver ici un e juste ap2lication La raison s'en tire deo:.
regles exceptionnelles admises en matière ùe faillite . uivant J'nrt. 8~9, en effet, le rapport 11'est dü qu e d es dons 0 11
d es sommes dont l'héritier est débiteur ; or la remise résultant du concordat ne peut constituer un don puisqu'au lieu
d'ètre consentie ar1imo domini, elle a lieu ex w>cessitale; el le
ne rend pas egnlcment le failli débiteur de ses créanciers
puisqu' il n'est tenu que d' une dette naturelle qui n'est garantie par aucune action ci Yi le et que d 'ailleurs " ln monnaie d1·
, faillite, de mau' ais aloi en momie indh·iduelle, est frapvl-c
,. par la loi com mcrcinlr. sous l'empire de la nece~:.-ite, i1 un
,, titre qui lui donne le même cours que ~i elle était monnaie
n véritable v (R ENOU \RP) Ainsi la partie de la det te rcnu"'l'
au failli pnr s uite du concordat n ctant ni une sommr pr~tê1·
nt unr .;;ommc clonn re échnppc a lappli cation de l'art · 2'1 rt
n ·r~ t point so1un1"c au rnpport
�-
17
-
tnre de la s uccession ( 1) Ce tte d éc is ion e t
trop absolue ; ell e s'expliqu e aux yeux de ceux
qui coo ~ id èrent la prescription comme uniquement fond ée s ur la renonciation du créancier à
ses droits , (TnOPLONG, Prescr. 11°1 . - DURANTON,
XXI , n• 89) e t il es t naturel qu'en donnant à la
prescription une te lle bas e philos ophique , on
s oit conduit à la décision c ritiquée. Mais cette
jurisprudence devient diffic ile à expliquer dans
les cas fort no mbreux où le moyen de la presc1iption , a u lie u de ·s upposer un p a ie ment
préexis tant dont le tilre ne serait pas représenté par le débite ur, inte rvi ent au contraire
pour protéger ce débite ur contre la r épé tition
tar diYe d' une de tte ancie nn e, peut-être m ême
d éj à pa yée un e première fois. On peut obj ecter ,
il es t n ai, que di s penser l' héritier du rapport
en cas de pre c riptjon , c'es t ouvrir une issue
aux avantages indirects, m ais cet inconvénient est peu tl redo uter quand o n a pplique à
toutes les questi o ns ùe ce gen re que fait n aitre
le rapport ùes tle ltes la d is tin c tio n précéde m m e·nt é tablie en 1re le. <.l iIT6ren tes obliga ti ons
cont rac tées par l'hé ritie r , e t qu'on cons idère
·urtoul qne dans l'l1 ypo lhèsc où il y a lieu il
11 Y en sen" contra tn• nn arn• t <le Il\ cou r de C1rcnohl e cln
18 aoùt 1 8 ~ 5 - (Dnll Hi 2 13:> )
1 apport
1'79 -
un laps cons 1ùérable de temps est n é<'essaire po ur é teindre la de lle
L' assimilati o n établie p ar l'art. 829 entre les
s ommes données et les sommes prêtées doit
rendre appli cable. aux s ommes dues par l' un
des s uccessibles a u défunt ou à l' hérédité tou s
les eITets du ra pport des donations entre-vifs.
Ains i les dettes seront exigibles à compter
du jour de l'ouve rture de la s uccession (art.
850) ; s i la so mme à r apporter par l'héritier est
plus forte que sa part héré1litaire, nous pensons
qu' il faut laisser à cet effe t toute sa rigoureuse
éte ndue en adm e ttant la déchéa nce ùu terme
même po ur ce t excédan t. (En ce sens D E~IO r,
Suce. 402. - co11li'à L ABBÉ op. cil. page 508.)
De même ces dettes produisen t des in1érê l~
dès le jour du décès au taux légal et ordin ai re ;
c'es t un à.e ces cas où les intérê ts co urent de
plein droit e t san . dem ande en jus ti ce. (Cf.
art. 1473 et. 1840).
Enfin l a part de l' héritier da ns la s uccession
ser a afTectée à l'acquilte me nl de sa delle, cle
telle sorte •que ses cohéritiers auron t le ùroi l
d'en imputer le mo nlanl sur la part qu i lui
revient. Ce tro is ième e!Te t, contre leq uel l' ll éritier débiteur ne peu l é le\ er aucun e prétention ,
a é lé vivem ent contesté par les cr éanc iers tlc
c·et 1J éril1 er . Ce m olle tle pro ·éder parait , en
effet , êl ll premie r abord le ur causer un g 1 <n·e
�-
"
f
(
180 -
prejudice, en ce qu' il a ntorise les c.olié ritie rs
du débite ur, par préfé re nce à e ux, à se payer
s ur les bie ns héréditaires, e t semble ain s i
adme ttre e n ·rave ur de ces coh éritiers un privilége que la loi n'a nulle part é tabli. Mais ce
résultat n'a, a u fond, rien de choquant ; il n 'es t,
au contraire, que l'application pure et simple de
la marche indiquée par les articles 829 e t s.
pour procéd er au partage des forces d' un e S ll Ccession . En imputant la de tte de l'hé ritier s ur
la part qui ~ lni revient, les cohéritier s agissent
non comme créanc iers du débiteur mais co mm e
copartageanls, e t la preuve s'en tire de ce que
la loi le ur perme t de prélever s ur la masse des
biem; e n n ature pour sè re mplir de la part it
r apporter . << Telle é Lait an s urplu s la m anière
n de ,·oir de nos an c iens auteurs coutumie rs;
>' e t c'es t évide mm ent d a ns le but de la san cl> tionn er que les r édac teurs du Code ont, dan s
» l'a 1·t. 829, sou mis c haque h éritier à l'o bligation
•> de rap porter non seulement les don s q ui lui
11 ont été• faits m ais e ncore les sommes don t il
Il e. t dé bite11r. )) (AUBRY e l !Lu; § ·02~)
Le ra ppo rt des de ttes es t so umi s au x rtgles
g0 n t'•rales des arl. 84B et s .
.\tn ~ i l'li ériti er déb ite ur ne sera te nu de J'obl ig:ali on d u rapport que s' il \' ien t util e me nt à la
sncce!".sion . S<1 renon cinli o11 ne peul 6vid e111mc nl avoi r po ur bu l <le le li lll'>rc1·; il 1;Ct a Lo u-
-
181
tenu de la ue tte, m ais il Ùe\ ra etre lra ilé
comme un débile ur ordinaire et' il joui ra dll
bé néfi ce du terme.
De mê me le père n'aura pas à rapporter les
sommes qui a uront ét é prê tées à s on fils, e t le
fi ls venant de s on chef à la succession du créa nc ier ne rapportera pa::; celles dues p ar son
père, à moin s qu'il ne vienne p ar r eprésentation ou qu' il n'en soit tenu en qua lité d'héritier .
La femme commune en biens qui accepte la
commnn aulé r apporter a, de l a somme prê tée
par s on père à son mari , une partie proportionnelle à ce qu'elle recueille dans l'actif de la
commun auté. Mais le mari serait seul s oumis
au rapport s i, lors du décès de son beau-p~re,
la communa uté durait en cor e ; à sa dissolut10n ,
il inlerviendrait un règle me nt de compte entre
la femme e t l es h éritiers du mari . Si le prêt avait
é té contracté s olidairement par la femme et le
m ari les h éritiers du p rêteur auraient action
pour' le tout co ntre chacun d'e ux; l'action ne
ser ait que de moitié s i la dette,· au lieu d'ètre
s~lida ire , é tah s implement conj ointe. (Cf. art.
1847. BE f\TAU L D, Qu est. de Cod. Nap . n•' 646. LABBÉ, op. ci l . n° 32.)
j OUl'S
�-
1g:t -
C HAPITRE
-
111.
COMMENT S'EFFECTUE LE RAPPORT.
Le rapport a pour but de remettre la suc)) cession au même état q ue si l'avantage s uj et
» à rapport n'avait pas été fait. » Deux moyens
pouvaient être employés par le législateur pour
attein dre ce but : il pouvait exiger la restitution
à la masse de la succession de la chose qui en
avait é té distraite (rapport e n nature) ou faire
imputer la valeur de la chose à rapporter s ur
la part de l'héritier soumis au rapport (rappo1·t
en moins prenant). CeP- deux moyens ont s uccessivement été emp loyés par le Code. (art. 858)
<<
SECTION J.
Rapport des donat ions entre-vifs.
Le Code dis tin gue, quant à la manière ùont
doit s'effectuer le rapport, en tre les donations
d'immeub les et relies de meubles.
183 -
(A.) Do11alio11s ll'immenbles. - En règle généra le
le rapport des immeubles doit se faire en nature.
(art. 859) Celui des meubles se fait en moins
prenant. Cette difîérence est ancienne; elle
s'explique par l'idée qu'on se faisait autrefois
de l'importance des immeubles (vilis mobilium
possessio), idée qui a laissé des traces nombreuses dan s le Code, e t par cette raison que l'égalité du part::ige serait blessée << si l'un des en» fants pouvait conserver de bons héritages
» pendant que les autres n'auraient que de
1> l'argent dont ils auraient souvent de la peine
>> à faire un bon emploi! » (PoTHIER.) Ces considérations ont aujourd'hui beaucoup perdu de
leur valeur par suite de l'accroissement de la
fortune mobilière e t l'on peut dire qu'en l'état
de nos mœurs modernes, le donataire satisferait
s uffisamment à l'égalité en rapportant la valeur
de l'immeuble qtü lui a été donné. Ce procédé
aurait le grand avantage de laisser le donataire
en possess ion d'un immeuble qu'il e;-;t depuis
longtemps habitué à regarder comme sien, et
serait très-favorable an crédit en évitant la
résolution de droits réels constitués ur le
fonds au profit des tiers. Quoiqu'il en soit, le
Code en a décidé autrement, et il nous faut
expliquer son système tel qu'il l'a établi.
Le rapport des immeubles dernnt se faire en
n ature, l'héritier clona.taire se trou,·e èlrc clébi-
�-
1 8~
-
leur euvers ses colléritiers d' uu eorp s certain
Plusieurs co nsé4uences se déduise nt de ce prin cipe.
L'immeuble qui a péri par cas fortuit el s ans
la faute du donataire n'es t pas s uje t à rapporl.
R es mnissœ aut perdilœ citrà culpam conferenU;
non ueniwit in collationem quia casus solel nocere
creditori (Peresius). Cette décision es t le corollaire de la r ègle posée dans l'art. 1302 1 d 'après
laquelle le débiteur d'un corps certain es t libé ré
lorsque la c hose a péri sans sa faute. Rappelons
que le cas fortuit ne serait pas s uffisant pour
libérer le débiteur s'il était précédé de quel que
faute de sa part sans laq uelle la perte ne serait
pas arrivée, si mollo non ipsius ciilpà is casus
inte1'venerit. (art. 1808.) - En cas d 'in cendie de
l'immeuble donné la responsabilité du donataire
s'appréciera d'après la r ègle générale de l'art.
'1137. On ne pourra faire dans cette hypothèse
ap plication des d ispositions exceptionn elles de .
l 'art. 1733 qui r end le locataire res ponsable de
l'ince nd ie, parce que cet artic le édic te une pr6somption légale qui ne doit pas ê tre é tendll e à
d'autres cas que ceux pour lesquels elle est faite.
(art. 1350.)- Le donataire ser ait égaleme nt dispensé de r apporter l' indemnité qui lui aurait é té
payée par la compagnie d'ass ura nces à raison de
l'in cendie . C:ette inde mnité n'es Lpas , en e fTe t, la
représentation cle l' immeu bl e in ce ndié; elle u
c
-
1s:; -
pom cause le paiement des primes s tipul ées e t
n'es t que l' ex(!cu ' ion du contraL aléato ire auquel
les cohéritiers sont restés abso lument é tran ger s
(1). - On a inYoqll é les' m êmes raisons pour
re pousser la demande des créanciers h ypothécaires qui vou laient, en cas d'in cendie de l' imm euble gre,·é, faire porter leur droit s ur l'inde mnité payée par la compagnie. (Cass. 22 aoùt
1842)
L'héritier donataire peut se trouver créancier
ou d<·biteur de la succession à raison des augm e n tation s ou des diminutions qu'a s ub ies
l'immeuble depuis la tl onation. La règle a s ui,•re
est fort s impl e : on do it toujours s upposer
que l'immeuble n'est jamais sorti d u palrimoine
du de cujus; la s uccessio n ne pourra pas s'enrichir aux dépens du donataire, et celui-ci ne
ùevra pas réaliser cl c:;; bénéftces au préjudice de
la s uccess ion . C'est ce tte idée qu'appliquent les
art. 861 ù 861'. Elle se retron,·e toutes les fois
qu'un propriétaire recouvre, par s uite d'une
résolution ex rrrnsd antiqud, un immeuble qu'il
ava it précédemm ent aliéné.
Le donataire a droit au remboursement de::-.
dépen ses ntiles; elles lui sont dues jusqu'à
concurrence cle ce dont la rnleur de l'immeuble
(1) La solution serait différente s i c·était le donateur qui,
l'IVUnt Ill donat ion, RYl'lit a:;sul'é rimmeuble qui Il péri
13
�-
186 -
se trou \'e augmentée au te mps du partage. (art.
86'1 .)
Les impenses nécessaire$ faites pour la conservation de la chose seront intégralement
restitu ées an donataire. - Celles d'entretien ne
donnent lieu ù aucune indemnité. Elles sont
une charge des fruits (art. 603); cependant le
donataire serait responsabl e s' il avait om is de
les faire et si l'immeuble avait souffert de cette
omission. - Les dépenses volupt uaires ne
donnent non plus lieu à aucune réêlamation .
cc Le donateur de so n cô té doit tenir compte
>) des dégradations et détériorations
qui on L
>) diminué h valeur de l'immeuble par son fait,
>) ou sa faul e e l négli gence. >) (art. 863) Ainsi
l'héritier donataire doit in demniser la succession quand il a négligé de réparer e t d'entretenir les héritages et bâtiments, e t qu'il en es t
résulté des dégradation s, quand il n'a pas
in terrompu les prescription s à l'égard des droits
fon ciers, toutes les fois enfin que par son fait
ou sa faute et négli gence la chose donnée a
épro uvé quelque dommage. On se placera au
moment du partage pour évaluer le préj udice
causé.
Le donataire serait respo nsable s'il avait omis
de faire en temps u tile les dépenses nécessaires à la conservati on de la chose. C'est en vain
qu'on objecterait que l'us nfruitier n'est pas
<
(.
-
187 -
tenu de faire le:::; grosses réparations et qu'il
doit en être de même du donataire en avancement. d' hoirie. Cela serait inexact parce que les
héritiers présomptifs du donateur n'ont pas
qualité comme le n.u propriétaire pour faire,
pendant la vie du donateur, acte d'administration s ur l'immeuble donné.
En cas de perte to tale de l'immeuble postérieurement au décès du donateu r, le donatall'e
pourra bien répéter les dépenses nécessaires ;
mais il n'aura aucun droit au remboursement
des dépenses utiles ; la succession ne bénéficie,
en efTet, d'aucune plus value au moment du
partage. (art. 86·1)
Dans tous les cas où le donataire a quelques
répétitions à exercer, il a le droit de retenir
l'immeuble jusqu'à parfait remboursement. (art.
867). Mais ce n'est là pour le donataire q~' une
simple faculté, il conserve toujours le droit, _en
' rapportant l'immeuble en nature, de contraindre ses cohéritiers à lui rembourser les sommes
dues pour ses impenses (Cf. art. ~6 1 et 86~) ;
mais ces derniers pour se soustraire au paiement de ces impenses ne peuvent refuser
le rapport et faire abandon de l'im~euble.
Le Code n'a pas maintenn, sur ce pomt , les
dispositi ons de quelques coutumes d'après lesquell es, au cas de non remboursement des
�-
188 -
J épen ses, la Llonalion ::;c rapporla it en m oins
prenant. (1)
L'obligation du rapport produit à l'égard des
tiers un effe t remarquable: la proprié Lé du donataire é tant r ésolue par l'arrivée de la cond ition dont s on droit 6tai t affec té, l'immeuble
donné se réunit à la masse hé rédita ire fran c cl c
toutes les charges r éelles é tablies du ch ef du
donataire. (art. 865.) Cet article n e parle pas
d u cas où l'imme ub le aura it é té alié né, c.;'est
qu'alqr s le rapport se fait en moins prenanl.
(art. 860) Cette di ffére nce entre les deux solutions fut rele vée lor s ùe la discussion a u Conseil d'Eta t. Des membres firent observer que
le donataire ayant la faculté d'aliéner l'imm euble devait a f o1'tiol'i po11voir l'hypoth équer ; les
explication s de Tronchet furent assez vagues,
il r épondit seule me n t qu'il avait touj o urs é Lé
admis, dan s l' ancien droit, que quoique le d onataire pût aliéner, il n'anit j am ais e u le clroit
d'hypothéquer. La di scnssion ne fut pas poursuivie e t l'article fut renvoyé à la section ; m ais
auc une modificati on n'y fut apportée. On a
essayé de jus tifier ce d éfaut de concordance en
Llisant que la don aLio n es t a ffec tée d ès sa na is(1) Le donatai re ne serait pas autorisé, en ve rtu de ce
d roit de rétention, a garder les frui ts perçus depuis l'ou verture de la s uccession. (E n sens contr. Chabot sur 867 )
-
189 -
sance d' une condiLion résolutoire que ùes
cr éan ciers d iligents ne peuvent vas ignorer;
qu' ils doiven t s'attendre, par conséquen t, à la
r ésolution de Jeurs droits hypothécaires dont
le ma intien causerait un grave préjudice a ux
cohéritiers si la s uccession ne r enfermait pas
d'autres immeubles. La loi en a, il est vrai,
a utremen t décidé e n cas d'aliénation; mais le
don en avancemen t d'hoirie aurait-il réellement
r empli son b ut si l' immeuble avait été frappé
d'inaliénabililé jusqu'à la mort du donateur et
s i les tier s acquéreurs ava ient eu le droit de
r ec.ourir en ùommages-in térêts cou tre le donataire qui, e n vendan t, aur ait outrepassé es
droits'? Cette explication ne peut nous satisfaire.
Pourq uoi l'acquére ur sera it-il traité aœc plus
de faveur que le créanc ier h ypothécaire? N'ontils pas tous deux contribué à rétablir le débiteur da ns ses a ffaires, e t le ur situation n'est-elle
pas égaleme nt digne d'in térêt? Ces objection
r estent sans r éponse ; aussi nous borneronsnou s à expliquer le sys tèm e de la loi sans chercher à le jus tifier.
Les biens don nés retournent donc à la ma :::.e
de la s uccess ion francs et quitle Lle toute
charge. Par charge il faut entenùre non-~eule
ment les h ypothèques constituées sur l'immeuble
d u chef d u donata ire, ma i to us les droit qn'on
qualifie générale ment de droil::; réels , lels qnc
�-
1
..
190 -
ceux d'usufruit, d'usage, d'habitation et de servitude réelle. Celte interprétation de l'art. 865
a été contestée, et des auteurs ont voulu restreindre son application aux seules hypothèques
constituées sur Je fonds ; ils traitent les autres
droits comme des aliénations partielles et leur
appliquent les co nséquences de l'art. 860. (DELVJN. 1r. page 41) Mais cette doctrine a été fort
justement repoussée; le mot charge comprend
aussi bien les hypoth èques que les serviludes ;
l'art. 637 en est une preuve év idente. La dernière disposition <l e l'art. 875 ne parle, il es t
vrai, que de créanciers hypothécaires, mais ce
n'est là qu'un exemple qui doit ê tre généralisé. Du reste ces charges seront à cons idérer
comme n'ayant jamais été éteintes si l'immeuble
qu 'elles grevaient tombe, après partage, dans le
lot du donataire. (Cf. art. 883) (1)
Par servitudes nous n'avons entendu parler
que de celles qui son t volontairement constituées par le donataire. Il faut, en effet, soustraire à l'application de l'art. 865 celles que le
donataire aurait été ob ligé de subir. Telles sont,
par exemple, les servitudes qui résultent des
de la loi
lois de l845 et 1847 su r les irriaations
'
0
de 1856 snr le drainage et de l'ar t. 682. Ces
11) La même difficulté se présente à l'occasion des art 929
·
et 930
-
;J
19 1 -
serviluJ es on t un caractèt'e d'intérêt public
e l leur réso lulion ne peut être prononcée, puisqu'o n peut en demander la constitution contre
quiconque détient le fonds grevé. Dans ce caS",
le rapport porterait sur l'indemn iLé payée.
Dans le cas où le rapport d'un immeuble se
fait en nature, les créanciers du donataire peuvent intervenir au partage pour empêcher qu'il
ne soi t fait en fraude de leurs droits. (art. 865882.) Par créanciers, il faut entendre non seulement ceux qui ont hypothèque sur l'immeuble
soumis à rapport, mais même tous les ayants
cause du donataire tels que les personnes en
faveur desquêlles celui-ci a consenti des charges
réelles sur l'immeuble. (Cf. art. 1166)
L'articl e 830 a fait déjà pressentir que le
rapport des immeubles n'a pas toujours lieu
en n:iture, et, pour que cette exception ne porte
aucune atteinte à l'égalité du partage, il dispose
que « si le rapport n'est pas fait en nature, les
>> cohéritiers à qui il es t dû, prélèvent une por» tion égale sur la masse de la succession. Les
» prélèvements se font autant que pos ible en
>> objets de même nature, qualité et bonté que
» les objets non rapportés en nature. » (1) Les
(1) Quand toutes les parties intéressées au pnrtage sont
capables et d'accord, on procède en pratique plus simplement,
par attribution de lots. Au lieu d'effectuer le prélèYement, le
-- ..- - -- .
-
~
-· - ·-
.
..
-
-
-
�-
1 9~
-
art. 859 et 8ü0 viennent com pléter retle disposi tion . Le rapport a lieu en moins prenant :
10. Quand l'immeuble a été aliéné par le donataire avant l'ouverture de la s uccession. Nous
avons indiqué plus haut les motifs de cet te
exception (1). Si l'aliénation n'avait eu lieu que
depuis l'ouverture de la succession , l'hérit ier
devrait effectuer le rapport en nature ; il n 'était
plus en effet propriétaire de l'objet donné qui
aYait été dévolu de plein droit à la succession (2).
Le rapport, dit l'art. 860, est dù de la Yaleur
de l'immeuble à l'époque de l'o uverture. Il y a
là une inn O\·ation : dan . l'ancien droit il avait
lots sont immédiatement composes, et, comme l'entente
règne quant à leur répartition , on impute sur le lot du donataire Ja somme qu 'il doit rapporter et qui représente la
valeur de l'immeuble donné. Si les deux conditions précédentes n 'étaient pas remplies, ce procédé dev rait être abandonné, et il faudrait revenir à la voie plus normale du t irage
au sort.
(4) M. Valette à son cours en donne pour raison qu'il est
plus facile d'apprécier la Yaleur d'un immeuble aliéné que
celle des hypothèques qui le grèYe nt.
(21 L'échange partici pant de l'aliénation, on appliquera
1 art. 859 au bien échangé par ]"héritier donataire. Un principe contraire semble résulter d'un arrêt de Bastia du 5 nov.
1 8~~ (Dall . ~5. 2. 6 .) Mais cette décision est la conséquence
de ce que le bien échangé au lieu d'être un bien donné était
un bien de la succession. En l'espèce le cohéritier ava it ag i
comme le 11r9otiontm gestor de l'hérrd ité
to uj ours été admis que le ùo11ataire devait
rapporter la valeur de l' immeuble au moment du
partage ; on ne tenait aucun compte de sa valeur
lors de la donation , ni du prix de vente qu'avait
pu en retirer le donataire. Le Code a bien
reconnu que le rappor t doit se faire de la valeur
de l' immeuble, mais il place l'époque de l'estimati on lors d n décès du donatem. ll est difficile
de s'expliquer ce changement en présence surtou t des paroles de Tronchet qui avait posé la
question dans des termes précis : « Il est néces» saire de déterminer s i l'héritier rapportera
,, seulement le prix de la vente qu'il a faite on la
>> va leu r de l'immeuble au mo ment du partage; ))
cette derni ère évalu ation semble la plus juste.
Le Conseil d'Etat s'étant prononcé contre le
rapport du prix de y1~ nte, on devait croire que
l'opinion de Tronche t aurait é.té suivie d~ns sou
ensemble; il n'en fut pas ai.nsi. La première des
deux propos itions fut adoptée, c'est-à-dire qu'on
se prononça pour le rapport de la valeur de
l'immeuble; seule ment l'époq ue de l'estimation,
au li eu d'être fix ée au moment du partage, fut
avancée an jour de l'ouverture de la succession
r.ette innovation est regrettable et nous avouons
que tontes nos préférences sont ponr le système
cle l'ancien droit qui. appliquait plus exactement
cette idée générale du rapport à savoir que les
choses doi,'ent ètre traitée:;; comme si l'immeu1t
- ... _ ... - -
·- -
-
...
-
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-
.,.
.
-
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19} -
r 11j11s.
Ains i, c'es t au mom ent de l'ouverture de la
s uccess ion qu ' il faut e placer pour éval uer la
val eur de l'immeubl e aliéné. Si clon e éet 1rnmeubJe a péri par cas fortui t avant le décès du
dona teur, l'h éritier es L compl é temen t libéré,
car au moment de l'ouvertnre cel imm e uble n'a
plus de Yaleur. Pothier avait déjà déd uit cette
conséqu ence d u système précédent: cc T:-e dona» taire est totale ment déchargé du r apport si,
n depuis qu'il l'a Yendu . l'h éritage est totalement
)) péri. Il profite à la vérité du prix qu'il a reçu
>> en le vendant, mai s ce proÎlt lui vie nt de s a
» bonne fortune e t n'est pas un avantage qu 'il
» ait aux dépens de la s uccession du défunt qui
» ne lui a donné que l'héritage, qui, é tant péri,
» ne se trouve rait plu s dans la suceession du
» défunt quand même il ne lui aurait pas été
» donné. >> (Introd . tit. xvn . Cout. Ol"l. no 92.)
Ces règles doivent ê tre appliqu ées sans djstinction entre les al iénations à titre gratuit e t
celles à titre onére ux. Il n'y a d'exception qu'en
re qui concerne l'ali énation nécessaire (1), par
(1) L'ex propriation par suite de saisie-immobilière est
a juste titre, regardée comme une aliénation volontaire e~
tombe par conséquent sous le coup de la regle générale. Elle
a pour c::iuse, en effet, l'inexécution des engagP-ments du
débitPur.
195 -
-
ù le n'é tait jamai s sorti c.lu palrim oi1 1e du de
s ui Le, par ex.emp1e, d'une expropriaLion pour
cause d'utilité publique , de l'exercice d'une
ac tjon e n rescision, ou encore d' une licitation ( l).
Dans ces di[érentes hypothèses le clonaLaire ne
devrait rapp orLer q ue l'indemni té qu'il aurait
reçue, mais elle serait ùue alors mème qu'avan t
la mort du donateur l' immeuble aurait péri par
cas fortuit.
Si la perte de l'immeuble est imputable au
donataire, il en est responsable vis-à-vis de se
co héritiers qui prélèveront sur sa par t un e
somme rep résentant la valeur du fonds au temps
ùu partage . (2) (Argt. a contrai' de l'art. 855)
L'exception posée par l'art. 860 cesserait
d'avoir lie u e t le rapport devrait s'effectuer en
naLure si l'imme uble aliéné était rentré dans
le pa trimoine du donataire lors de l'ouverture
de la s uccession. Mais s i c'est ex cciusa noua
que le donataire a repris cet immeuble, :es droits
( 1) Le cas de licit a tion fait naitre une question i~teres
sante : si le donataire se rend adjud:cataire, pourra-t-il :~n
traindre ses cohéritiers à accepter le rnpport de tout' l i~
meuble et à lui rembourser la différence du prix? L espn_t
de rart. 1667 semble commander l'affirmative dans le cas ou
.
la licitation est provoquée contre le donataire.
(2) On peut soutenir, par analogie de l'art. 860,~ue ce n est
pas au mom ent du partage mais.à l'époque du ~eces du
natcur qu'il fout :.e placer pour ernluer ln 'nlem du fonù::.
d:
(AUllRY et Jhv, ~ 63 \ )
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196 -
-- 497 -
des tiers seront re::;peclés et lu réso lution ùe
l "arl 865 n'atte indra pas les hypothè ques et
autres charges qni pourront grever le fonds.
2°. Le rapport peut s'effectuer en moin s prenant quand il se trouve dans la succession d es
immeubles de même nature , valeur et bonté
dont on puisse former des lots à peu près égaux
pour les autres coh é ritiers. (art. 859.) C'est ici
une pure faculté pour le donataire seul (1); s'il
veut rapporter l' immeuble en nature, il se conforme au YœQ exprimé par la loi , si au con traire
il veut le garder , quels motifs pourraient bien
invoquer ses cohéritiers pour s' y opposer?
3°. Enfin Je rapport de l'immeuble aura également lieu en moins prenant quand telle aura é té
la volonté du défunt. Il faut bien reconnaitre
en effet que le dona teur pouvant dispen ser du
rapport doit a fortiori pouvoir déterminer la
manière dont ce rapport devra s'effectuer. Ce
troisième cas de rapport en moins prenant
n'était pas admis dans l' ancien droit. Cela tenait
à l'extrême rigueur des règles coutumières snr
la dispense du rapport et aussi à la faveur dont
était e ntourée la propriété foncière.
I
(
Dans ces différentes hypothèses il doit être
tenu compte au donataire des impenses utiles
qui ont amélioré la chose, ell égard à ce dont
s a valeur se trouve augmentée ait temps du partage. Cette époque fixée pour l'évaluation de la
plus value (art. 861) est donc différente de celle
à laquelle on se place pour estimer la valeur de
l'immeuble aliéné. (art. 860) 11 y a entre ces
deux textes une contradiction flagrante qui est
due à l'erreur qui s'es t glissée dans la rédaction
de l' art. 860. Mais comme il nous paraît impossible de séparer les deux opérations d'un mème
calc ul , nous n'hésitons pas, malgré le texte s i
précis de l'art. 861, à dire que cette doub le
évaluation devra se faire lors de l'ouverture de
la succession.
Le Code a inter calé dans la théorie du rapport un article qui se rattache plutôt à la
mat;· re de la r éduc tion ; cet arlicle 866 prévoit
l'hyj;t>ti.èse d' une donation faite par préciput
à un successible dépassant la qnolité disponible. Comment se fera le rapport de l'excédant? te Il se fait en nature si le retranchement
» de cet excédant peut s'opérer commodéme nt.
» Dans le cas contraire, si l'excédant est de plus
» de moitié de la valeur de l' immeuble, le don a,) taire doit rapporter l'imme ubl e en totalité
» sauf à prélever s ur la masse la valeur de la
» portion disponible ; si cette porl ion excède lc.1
(4) Dans ce second cas de rapport en moins prenant, tous
les droits réels consentis par le donataire sur l'immeuble
sont maintenus; cela suffit pour justifier l'intervention au
partage des créancier'\ du donataire.
r
�-
1\)8 -
» moitié de la valeur ùe l'immeuble, le don alaire
>l peut retenir l'imme ubl e e n t_otalité sauf à moins
» prendre et à récompenser ses cohéritiers en
» argen t ou autrement. >> Ainsi s i le retran ch~
ment est possible le r apport se fait en naLure,
sinon on applique la maxim e niajor pars l?'ahit
ad, se minorem ; on comparera la valeu r de la
quotité disponible à celle du retrancbem~nl à
effectuer, e t le rapport sera dû de la totall~é de
\' immeuble ou seuleme nt de l'excédant, s uivant
que cette quotité lui sera s upé rie ure o u inférieure .
Cette disposition est exceptionnelle ; d'après
le droit commun le décès du ùonateur devrait
rendre les réservataires copropri étaires pour ce t
excédant avec le donataire e t l'indivision n e pourrait cesser •1u'à la suite d'une licitation ; c'es t
pour évite r cette licitation que l'art. 86G a é té
fait· auss i cet article doit-il ê tre entendu d 'une
manière restrictive, e t s0 n application r éservée
au seul cas qu'il prévoit. Si donc la partie à
retrancher et la quotité disponib le étaie nt égales,
on repous.::;erait L'ar l. 806 et on résoudrait la
questiun à l'ait.le ùes règles tracées par le Colle
pour faire cesser l' ind i dsion.
)
..
'!"
l
(B) Doriation de 1neubles. - En principe, le rapport des imme ubles ::;e fait en nature ; qu and ,
par exception, il a lieu e n moins pre nant, l'c::; li-
-
199 -
mation se fait au tem!Js ùu partage e t, dans un
cas spécial, lors de l'ouverture de la s uccession .
Le rapport des meubles est régi par d'autres
r ègles : il ne se fai t jamais qu'en moins prenant
e t s ur le pi ed de la valeur du mobilier à l'épo. que de la donation. (art. 868 ) Pourquoi cette
différence'? Au Conseil d'État Maleville avait
proposé d 'estimer la valeur des me ubles donnés
non au te mps de la donation mais à l'époque
où l asuccession s'o uvre. Cette règle, disait-il ,
qui est s uivi e à l' égard des immeubles doit
l'être a fortiori pour les meubles qui dépérissent
par l'usage. Si le donateur les eût gardés il faudrait bien les prendre dans l'état où ils se trouveraient. Tronchet se contenta de faire observer
qu'en ce qui concerne la manière d'efTectuer le
r apport, il est jus te de d islinguer entre les
m eubles e t les immeubles ; cetL'Z-ci en effet ne
sont pas diminués par la jouissance; au contrair e, l'u sage es t la seu le jouissan ce qu'on puisse
tirer des me ubl es, et cet usage les dégrade
pour le profit du donataire. (1).
Ainsi le s uccess ible, donataire d'objet mobi( 1) A ces raisons Tronchet ajoutai t que les meubles sont
donnés en pleine propriété : or. res perit domino . Ce dernier
11rgument porte à faux; la propriété des immeubles passe
bien sur la tète du donataire aussi entière que celle des meubles et pourtant ln perte par cas fortuit ne libère P"S de
l'obligation du rapport. :Art. 855.)
�- - iOO -
I
f
t
Hers, en devient propriétaire incommutable d ~s
le jour de la donation. La dette se tran sforme
donc en une dette de guantité, et il demeure
soumis au rapport malgré la perte par cas fortuit de l'objet donné; casum sentit dominus.
La valeur des meubles sera fixée d'après l'état
estimatif annex~ à l'acte de donation (art 968) ;
et à défaut de cet acte, d'après une estimation
par experts, à juste prix et sans crue. Cette
prévision de l'art 868 se concilie parfaitement
avec l'art. 948; elle est relative au cas d' un e
donation qui èchappe à l'application de cet
article, tel est, par exemple, un don manu el ou
un don portant sur une créance.
En rapprochant de l'art. 868 la dis position de
l'art. 535, il est aisé de reconnaitre que les règles que nous venons de poser s'appliquent à
la fois aux meubles corporels et aux meub les
incorpords. Cela rés ulte principale ment du terme mobilier que le légis lateur dan s l'art. 535
oppose au mot imnieuble des art. 859 et 867,
<c pour mieux dénoter son inten tion de corn» prendre sous la première de ces expressions
» tous les objets qui sont meubles soit par
>) leur n ature, soit par la détermination de la
>> loi . >> (AUBRY et RAu § 634) Quelques auteurs
sont, il est vrai, d°Lrn avis con traire : Delvincourt,
entre autres , propose d'appliquer ic i la distinction établie pnr l'art. ·1567 an"lc termes duque l
-
~Ot
-
la uon aLion co n s i ~ Le en créances ou rentes
qni ont diminué de valeur sans faute imputable
au donataire, celui-ci pourra se libérer de l'obligation du rapport en res tituant les con trats .
Mais cette opinion doit être repoussée car el le
confond deux s ituations bien difîéren tes : dans
l'art. 1567 il s'agit du mari s imple nsufruitier et,
par su ite, débiteur à la fin de son usufruit des
rentes cons tituées en dot; or debitor rei certœ
rei interitn liberatur. L'art. 868 suppose au contraire un donataire propriétaire incommutable
oe~ objets donnés et débiteur de la valeur de
ces objets depuis le jour de la donation.
Du res te si on app lique le système que nous
comhattons aux offices vénaux, con~idérés aufourd'hui comme meubles, on arrive à un résultat déplorable: le tit\1 \aire sera, en efTel, dans la
nécessité, au décès du donateur, de se démettre
de sa charge ; celn est tellement anormal que
les anciens auLeu rs, qui cependant donnaient à
ces office un caractère immobilier, n'avaient osé
l'ad mettre, et que, par exception , ils autorisaient
clans ce cas le rapport en moins prenant.
Dans l'art. 869, la loi a réglementé le rapport
pour le cas où la chose donnée est u~e somm~
d'argent. Cet article n'a rien d'exceptt0nnel; . 11
ne fait qu'appliquer aux sommes d'argent la disposition générale de l'art 868. Si le Code a rrn
nécessaire de la répéter c'est que << l'argent
~i
15
�-
'2tH -
n'est pas un meuble 'omme un autre ; il es t
)) plutôt une valeur repr6senlatiYe de toutes les
)) autres valeurs. )). (DE~IOL.) C'es t pour ce cas
qu'il est vrai de dire que le rapport ne peut
jamais avoir lieu en nature puisque l'obligation
porte non s ur les pièces mêmes qui ont été
données lors de la donation, mais sur 1a valeur
numérique qu'elles aYaienL à cette époque.
·rn pecun ia non corpora qiiis cogitai secl quantitalem. (L. 94. § 1 Dig . de solut.) Par suite ce r apport est indépendant de la variation de la valeur
des espèces données.
Si le numéraire compris dans la succession
est insuffisant, le donataire soumis au rapport
a le c hoix ou de fournir de ses propres deniers
l'excédant ou de moin s prendre jusqu'à due
concurrence sur le mobilier, e t à défaut sur les
immeubles de la success ion .
L'art 869 doit-il être é tendu à tous les cas
où le rapport de la donation mobilière ou
immobilière a lieu en moins prenant ? Nous
hésitons à le croire. La disposition de l'art. 869
est, en effet, absolument é trangère au donataire
d'immeuble, et il ne serait pas conforme à l'esprit de l'art. 830 d' autoriser l'un des copartageants à garder un immeuble alors que les
autres n'auraient que de l'argent. ('1) Il devra,
1)
'f
(
4
(1) Si cependant l'immeuble n' avait été donné qu'en dation
-
203 -
au co ntraire, Nre fait application de l'art. 809 à
toutes donations mobilières puisque clans <.:e <.;,as
l'objet ùe la donation n'est autre c hose que la
valeur du meuble au moment où elle a eu
lieu . (En sens contraire DemoL n" 558).
Le rapport en moins prenant donoe-t-il lieu
à l'application du droit gradué d'enregistrement? Le ùoute nous paraît imposs ible en
présence de l'art. 1, § 5 de la loi du 28 février
1872 qui exige la perception du droit gradué
sur le montant de l'actif net partagé : « Le droit
» gradué e L dù s ur toutes les valeurs qui
» composent à un titre quelconque la masse
» inùivise et qui servent aux attributions. i>
(GARNIER) On a objecté, il est vrai, que pour
les valeurs qui se rapportent en moins prenant
le rapport n'a point réellement pour effet de
les comprendre parmi les biens qui son t effectivement partagés, ear les donataires les conservent et ne cessent jamais d'en avoir la
propriété e t la possession. ( Journ . des LVol. el
des Avoc., art. 20320) Mais cette objerlion a le
tort de confondre le fait avec le droit: en fait
le biens, dont s'agi t, ne sortent pa~ ùes mains
de celui qni les détient; mais en droit le litre
en paiement d'une somme d'argent qui aurait eté promise,
l'art 869 serait de nouveau applicable. l Req. ~Août 1852 Oall 52. 1.1 03 - l'ass \ 7 JanYier 1870 Dall 70 1 302 l
�-
-
;'.Oi -
du donatair0 ::;'est résolu comme cel ui rln co héritier qui effectue le rapporL en nature ; les. biens
sont juridiquement rentr6s à la masse et le ur
conserva tion par le donaLaire n'es t qu' un mode
d'exécution du partage, une facilité accordée
par la loi pour les lotissements. ( CasR. 15 mars
1875. - Dall . 75. t. ·:2-12).
205 -
P (J S 1TI0 N S
SECTION Il.
RuzJport des legs.
En ce qui concerne les legs, l' obliga~ion du
rapport a pour effet d'admettre l'héritier légataire à faire le rapport du legs e n moins prenant
dans le cas où ce mode de l'effectuer est compatible avec la nature de la chose léguée. (DEMANTE m , 177 bis . DEMOL. n° 303). Ce systèm e
est le seul qui nous paraisse co ncilier au tant
que possible l'intention dn testateur avec la
disposition rigoureuse ùe l'art. 843. 11 sera d'une
application constante quand le legs portera s ur
un meuble(art. 868), et pourra toujours être iovo- .
qué par l'héritier légataire d'un immeuble quand
il se trouvera dans la succession d'autres imme ubles dont on pourra faire des lots aux cohéritiers . (art. 859. Douai, 5 déc. 1865. - Sir. 66
2. 233; V. en sens contraire : AuBRY et RAU ,
§ 634. - TROPLONG. Donat., 11. 881 .)
DROlT
RO~IAIN
1. - La collalio ùonorum é tait une charge de
la bonorum possessio, et non une condition préalable de la formation de la demande.
II. - La lilis conleslatio n'opérait pas novation.
III. - La maxime Plus est cautionis in re
quam in personâ est é trangère au droit romain
primitif.
DROIT CIVIL
Le don en avancement d'hoirie fait à un
des héritiers ùoit s'imputer sur la masse de la
réserve, e t non pas seulement sur la part de
réserve du donataire.
IJ. -En cas d'aliénation de l'immeuble donn é,
l'es timation rl es améliorations doit se faire à
1. -
�-
206 -
l'époque de l'ouverture de la s uccession, malgré
la généralité des termes de l'art. 861.
III. - Si les créanciers hé réditaires ne peuvent profiter du rapport, ils ne doivent pas non
plus en souffrir.
IV . - Dans le cas de l'art. 782. C. c. les hé ritiers
qui recueillent une hérédité par transmission
ne rapportent pas les libéralités qu'ils ont euxmêmes reçues du premier décédé .
V. - L'arL. 747 C. c. n'est pas applicable aux
successions irrégulières.
VI. - Le privilège attaché aux frais de dernière maladie par l'art. 2101-3° n'est pas nécessairement subordonné au décès du débiteur.
VII. - Une femme mariée à un français et
judiciairemeut séparée de corps ne peut pas se
faire naturaliser en pays étranger sans l'autorisa tion de mari o u de justice.
-
1
'207 -
Lire de son pays peut de nouveau être jugé par
les tribunaux français.
DROIT COMMERCIAL
Le successible failli qui vient à la succession du créancier n'est tenu de rapporter à cette
succession que le dividende établi par le concordat.
II. - Lorsqu'une société en nom collectif est
tombée en faillite, l'un des associés, déclaré
aussi en faillite personnellement, peut obtenir
un co ncordat particulier alors même que la
société aurait obtenu un concordat. Dans ce cas,
les créanciers sociaux peuvent participer à la
formation du concordat partic nlier, concurremment avec les créanciers personnels de l'associé
qui l'a obtenu.
III. - L'acceptation d'une lettre de change ne
peut pas être donnée par acte séparé.
I. -
DROIT CHIMlNEL
l. - Les art. 57 et 58 du Code pénal ne s'appliquent pas au cas où en vertu de circonstances atténuantes, un crime esL puni de peines
correctionnelles.
II. - L'étranger c1ui a commis un crime e 11
l•' rance el qui u été tléflnilivemcnLjug6 par la jus-
DROIT ADi\lINISTRATIF.
I. - Le ùécret du gollvernement de la Défens e
Nationale du 19 septembre 1870, abrogeant l'art.
75 de la constitution de l'an vm, fait échec au
pri ncipe de la séparation des pouvoirs.
�-
LJJ15
fACULTÉ OE pnorT o•)l.rx
'208 -
II. - .f-a loi du 23 mars 1855 a laissé inta ctes
les dispositions de la loi du 3 mai 1841 s ur
l'expropriation pour cause d'utilité publiqne .
DE L'EXPROPRIATION
POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE
EN D RO I T R OMA l N E T E N DR O I T F R AN Ç AIS
Vu par le Doyen, P1·ésident de la Th èse,
CARLE.
THÈSE
1
PERMIS D l Ml;'RIMER :
Le Recletw de l'Académie d'Aix ,
Commandeur de la Légion-d'Honnl'll1'1
POUR
LE DOCTORAT
Ctt . ZÉVORT.
PR~SENT~E
ET SOUTENUE
PAR
DÉIUÈTRE
N6 à DOLGRAD
GRÉCOFF
(Roumaai~.)
/(
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~ ~ l
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~ona\~ ,,
\~,
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AIX
MARlUS ILLY 1 IMPRIM BUR DB LA FACOLTi;: DB DROIT,
RUB DU COLLi;:GB, 20.
18 76
1100215530
ITTIWOO'miififfiîilli11
�
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Description
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Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
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Title
A name given to the resource
De la "collatio bonorum" en droit romain ; Du rapport dans le droit français ancien et moderne
Subject
The topic of the resource
Droit des successions
Successions et héritages
Description
An account of the resource
De l'obligation de tout héritier de réunir ou laisser à la succession les choses qu'il a reçues par legs, par dons entre- vifs ou par dettes
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Carbuccia, Pierre
Faculté de droit (Aix-en-Provence, Bouches-du-Rhône ; 1...-1896). Organisme de soutenance
Université d'Aix-Marseille (1409-1973). Organisme de soutenance
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES-AIX-T-92
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Ve E. Ollagnier ((Bastia)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1876
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/234727586
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES-AIX-T-092_Carbuccia_Collatio_vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
208 p.
26 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/364
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
France. 18..
Abstract
A summary of the resource.
Thèse de doctorat : Droit : Aix : 1876
Le collatio bonorum ou en droit moderne : le rapport des biens à la succession, est l’obligation faite aux descendants émancipés de partager leurs biens personnels avec les autres héritiers de leurs parents.
La première partie de cette thèse traite de ce sujet dans le système juridique romain, elle rapporte son origine, sa portée et ses effets. Cette thèse retrace aussi l’évolution de cette notion durant l’Ancien Régime, avant de l’étudier sous l’angle du Code civil dans la seconde partie. L’auteur y cherche à définir toutes les conditions requises pour qu’il y ait un cas de rapport, l’objet même de ce rapport et les modalités d’application.
Résumé Liantsoa Noronavalona
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Droit romain -- Thèses et écrits académiques
Rapport à succession -- France -- Thèses et écrits académiques
Successions et héritages -- France -- Thèses et écrits académiques