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7,145
OBSERVATIONS
SUR
LA
V É R IT A B L E C O N ST ITU TIO N
D E
LA PROVENCE,
Au fujet de la Contribution des trois Ordres aux
charges publiques & communes.
POUR L*U S A G E DES PROPRI ÉTAI RES
DES
A
FIEFS.
A I X,
Des Imprimeries de B. G ibelin -D a v id & T. E meric-David , Avocats
Imprimeurs Ordinaires du Roi Sc du Corps de la Noblefle.
M.
DCC.
LXXXVIII.
�*
---------------------- ----------------------------------
E X T R A I T
Des Regiflres des Délibérations du Corps
de la Noblefle de Provence.
D
A N S r Affemblée du Corps- de la Nobleffe de Provence y
tenue le premier Décembre mil fept cent quatre-vingt-huit :
Meffieurs les Syndics ont repréfen té qu il paraît journellement
des ouvrages évidemment contraires , tant à la Confiitution, qu’ aux
droits reconnus des deux premiers Ordres de la Province ; que
quelques-uns de ces ouvrages font anonymes, & renferment des
licences très-criminelles ; que tous fans exception préfentent les
erreurs^ les plus graves & les plus condamnables fur les principes
du Droit public en général, & fur tous ceux qui ont fervi de bafe
à la Confiitution Provençale ; que /’Adminiftration ayant defiré que
les titres
qui régïffent les droits de la Province en général, &
ceux de chaque Ordre en particulier, fuffent développés , & que
chaque Membre de l ’ Ordre pût s’ en procurer une connoiffance exacte ,
il avoit été fait fur ce plan des obfervations qui paroiffent rem
plir cet objet, & qui néanmoins font trop étendues pour qu’on puijfe
en faire la diftribution en copies manuferites , ce qui en rend l ’ impreffion abfolument néceffaire ; quil en a été ufé de-même dans
tous les cas de même efpece} mais que d’un autre côté cet ouvrage
formant un recueil précieux de titres & de citations , il feroit con
venable d’en prévenir les contrefaçons.
Sur quoi l* Affemblée a unanimement délibéré que les obfervations
déjà connues de plufieurs Membres de l ’Ordre, & par eux ap-
�prouvées, feront imprimées, aux frais de la Noblejfe, par M M .
Gibelin-David & E merie-David fes Imprimeurs-Libraires, &
ce
ju/ques au concurrent de quinze cent exemplaires, pour être d if tribuês à chaque Propriétaire de F ief du Pays ; que de p lu s, il en
fera fait un dépôt de trois cent dans les archives du Corps ; qu'ils
nen feront tirés qu'enfuite d'une délibération : & pour obvier aux
incom éniens des contrefaçons, il a été délibéré que le Greffier f ignera tous les exemplaires, qui ne feront avoués par la Noblejfe,
Signés ,
SUFFREN DE S t . TROPÉS , Syndic ; GALLIFFET ,
Syndic $ GASSIER, Syndic de Robbe $ B e r t r a n d , Greffier.
qu’autant qu'ils feront
munis
de
Collationné,
cette
fignature.
figné B e r t r a n d .
OBSERVATIO NS
SUR la véritable Conflitution de la Provence , au fujet
de la contribution des trois Ordres aux charges
publiques & communes.
L a reprife des Etats généraux du Pays , a fait
éclore des prétentions
& des fyftêmes qu’on n’auroit
/
pas ofé produire fans cet événement. Depuis 1639
la Conflitution provençale étoit en quelque maniéré
anéantie. La fufpenfion de nos E tats, & la perpétuité
d’une adminiftration qui 11e devoit être qu’intermé
diaire & paflagere fuivant nos Loix , faifoient delirer
à tous les bons Citoyens le retour de l’ordre & du
régime conftitutionnel.
�( 6)
Cet avantage ineftimable , fouvent promis par le
Gouvernement, nous a été rendu en 1787. L ’an
nonce des Etats de la Province n’a pas plutôt été
faite , qu’on a vu naître la queftion des contribu
tions des trois Ordres aux charges tant royales que
communes. Cette queftion étoit pourtant fixée par
une foule de titres connus ; par une poffefiion conftante, foit avant, foit après l’époque de 1639 , tems
où la fufpenfion de nos Etats avoit commencé ; par
une foule de Déclarations, d’Arrêts & de Décifions.
Jamais principe ne fut mieux avéré , plus confiant,
plus authentique , mieux fuivi que celui qui doit
fervir à fixer les réglés de cette importante matière.
Ce principe remonte aux premiers âges de notre Conftitution. Il fe lie avec le droit univerfel de l’Eu
rope, 6c de tous les pays de l’Univers où les Fiefs
font connus ; avec tous les titres qui peuvent avoir
force de loi en Provence ; avec les aveux faits par
le Tiers & fes Adminiflrateurs , foit dans le tems
de nos anciens Etats , foit dans les tems poftérieurs.
Il efl donc bien étrange que dans l’infiant même
où la Conflitution provençale devoit reprendre toute
fa force , on ait entrepris de la pervertir, en pré
tendant que tous les biens, fans diftinélion , dévoient
être fournis à la charge de l’impôt royal &c réel. On
(7)
a pofé la queftion fous un faux point de vue. Les
trois Ordres , a-t-on dit , doivent - ils contribuer
également Sc à proportion des revenus de leurs fonds,
à l’impôt territorial ? On a préfenté trop adroitement,
& d ’une maniéré très-inexaéle , la queftion qu’il falloit traiter. Il ne s’agit ici ni des ordres ni des per
sonnes , mais de la nature 8c qualité des biens. Le
Tonds roturier paye la taille dans les mains du Noble ;
le fonds noble eft exempt de la taille où de l’impôt
réel , quoiqu’il foit poffédé par un Roturier. Les
régies Tont les mêmes pour ce qui concerne les poffeflions de l ’Eglife. Celles de l ’ancien domaine font
affranchies
par la Conflitution
, de la contribution
■' >
»
y
f
j
.
à l’impôt réel. Les biens acquis par l’EgLife après
l’époque de 1471 , font hors de fon ancien domaine.
Ils fupportent la charge réelle , comme les fonds
roturiers. Ce font là tout autant de principes qu’il
faut refpefter , parce qu’il font d’une force 8c d’une
vérité auxquelles on1ne peut réfifter avec décence.
Dès-lors les queftions élevées au nom du TiersEtat roulent fur le point de favoir , non fi le Clergé
8c la Nobleflê ont des privilèges , mais s'il peut 8c
s’il doit exifter des domaines affranchis de la con
tribution à l’impôt royal & réel. C ’eft le combat des
Fiefs 8c des F e u x , des fonds nobles 6c des rotures.
�#
(8)
La quefiion ainfi pofée , avant d'entrer dans le
détail des impofitions qui font levées en Provence ,
il faut examiner li les biens nobles
ont conftitu-'
- t
' ■' •
rionnellement des prérogatives fur cet ob jet, 8c
s’il eft pofiible de les en priver. Cet examen fera
la matière de la première partie de nos Obfervations. Nous développerons dans la fécondé les prin
cipes 8c les titres relatifs à chaque efpece d’impôt
dont la perception fe fait en Provence j 8c la troilieme 8c derniere partie comprendra l’expofition de
nos principes locaux fur les droits de l’ancien D o
maine de l’Eglife, 8c fur les reves, qui ne font
autre chofe que les impofitions aflifes fur les entrées,
ilfues 8c confommations des Communautés dans lefquelles elles font établies.
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ï JS; V. . . { 1J .
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(9)
part.
PREMIERE
C H A P IT R E
PARTIE.
P R E M IE R .
^^OUS avons annoncé que les prérogatives des
biens nobles 8c féodaux tiennent aux principes d’un
droit univerfel. Nous ajoutons qu’elles prennent
une force nouvelle dans l’Hiftoire , ,8c les difpofitions du droit tant public que local. Il réfultera de
ces deux principes que l’on va développer, que ces
prérogatives font indeftruâibles , 8c qu’on ne fauroit y toucher, fans ébranler la Conftitution , 8c
porter atteinte au droit de propriété.
Par-tout où il exifte des F iefs, les biens nobles
8c féodaux font exempts de tout impôt réel. En
Allemagne , par exemple , la maxime efl univerfellement reconnue par les Jurifconfultes. On peut
voir ce que dit Leifzer. Jus Georgicum , five trac•
tatus de Prœdiis liv. 1 , chap. 11 , de Prœdiis nobllibiLs Cet Auteur fuppofe 8c attefte l’exemption des
biens nobles, c’eft-à-dire, des biens tenus en F ief
noble. O11 trouve dans fon Traité le tableau de
nos principes locaux fur cette importante matière.
Si le Roturier, y eft-il d it, acquiert un F ie f noble,
PREMIERE
I
CITA P. I
�(io)
PART.I.
CHAP. I.
il jouit de l’exemption. Si le Noble acquiert des
biens roturiers, il n’a point de prérogative à faire
valoir. C ’eft: la qualité des biens , c’eft leur nobilité
féodale qui les met à couvert de l’impôt. La nobleffe de la perfonne n’efface pas la roture de la
propriété. La nobilité du domaine féodal fe com
munique au poffeffeur roturier. Tout cela fuppofe
8c prouve l’exemption 8c la nobilité des domaines
féodaux.
On en trouve encore la preuve dans les affertions
de Carp^ovius , autre Jurifconfulte Allemand, qui
dans fa Jurifprudence confiftoriale, défin. 347, après
avoir établi que tous les Paroiffiens font tenus à la
contribution ou réparation des E glifes, 8c que les
Nobles y font fournis comme les Roturiers , obferve
néanmoins que cela ne doit pas être pris dans un
fens univerfel 8c abfolu ; excipi, dit-il , debent ab
hifce bona nobilium feudalia quorum refpeclu régula rzrer, tàm quoad ordinarias quam extraordinarias colleclas, libertati innituntur. Albert, 8cc. Cet Auteur
rapporte fur ce principe tous les Docteurs A lle
mands qui ont écrit fur cette matière , 8c qui ont
uniformément attefté la maxime.
La feule qualification de F ief noble efl: une preuve
de leur liberté.
Ils ne font ainfi nommés qu’à rai-
O O
fon de leur exemption. Le F ie f noble , difent tous
PART. T.
les Interprètes, efl: celui qui 11’eft fournis qu’aux C II A P . 1.
offices 8c devoirs propres aux Nobles, tels que la Diftionairc
raifonné des
foi , l’hommage, le fervice militaire. L ’affranchif- Sciences 6c
des Arts, v
fement de tout impôt r é e l, efl donc de la fubf- F itf noble.
LeiJzer, Loto
tance 8c de la nature du F ie f noble, qui dérive des citaco , & à*
pr&d. feudal.
Chaflauée ,
mains du Souverain qui l’a concédé avec la Juftice, Coutume
de
Bourgogne àe
pour en jouir comme il en jouiffoit lui-même.
ftUii. rubriq.
3 > §• 7> ▼*;.
Delà les Jurifconfultes Efpagnols 8c Italiens ont Selon
la na
ture d’icelui ,
reconnu uniformément la franchife des Barons 8c n - 5.
de leurs biens nobles. En Catalogne, le F ie f paffe
du pbffeffeur noble à l’acheteur roturier, qui jouit
des droits des poffeffeurs des biens nobles, non tan- Cancerius,
Variar. refol.
quam Nobilis , fe d tanquam Baro. On retrouve les de Jur. Caftror, n'1. 304,
mêmes principes dans tous les Auteurs Italiens, qui
diftinguent entre les biens nobles, bona feudalia ,
8c les biens roturiers, bona burgenfatica , les biens
•
'(
•
nobles qui font partie du fief, les biens roturiers
qui en ont été féparés \ les biens nobles qui font
exempts de tout impôt ré e l, 8c les biens roturiers
qui en fupportent tout le fardeau ; les biens nobles
dont l’exemption fe communique au poflèfleur rotu
.
rier , parce qu’elle efl: réelle comme l’impôt, 8c les
biens roturiers dont la main du pofleflèur noble n’ef
face pas la roture , qui demeurent toujours tels, lors
B ij
�même que le Seigneur les acquiert de novo par titre
volontaire. Tous ces traits nous ramènent, comme
on le verra bientôt, aux principes de notre Cons
titution.
Mais cela prouve fur-tout que la prérogative des
biens nobles dérive d’un principe univerfel, d’un
principe qui fe lie avec les Loix fubftancielles des
Fiefs; Loix précieufes, tenant, comme toutes les
autres, au droit inaltérable de propriété; Loix qu’il
ne faut pas rapporter aux défordres
aux ufurpations de l’anarchie féodale ; Loix qui ont pour bafe
un contrat légitime, pafle entre les Seigneurs & les
Communautés , puifque les concédions immenfes qui
ont .Suivi les inféodations, & qui en énervant les
Fiefs, ont énormément accru la malle des rotures,
n’ont été faites que dans la jufte confiance que les
feux fupporteroient tout le fardeau de l’im pôt, &
que les biens nobles continueroient de jouir de la
PART. I.
CH A P. I.
Novarrus de
Gravtm. l’affal. qucft.
J57 > page
119-
Barbatus de
D ivif Frità.
part, i , cap.
ÿ. "*• S9Capiblancus
de Jur,
cjf_
Biron. in
primat, u,
n°. 9 .
prérogative antique, conftitutionnelle & *patrimo
niale qui leur eft & leur fut de tous tems attachée.
Les exemples les plus énergiques & les plus frappans de cette prérogative Se reproduifent dans tout
le Royaume. Dans toutes les Provinces où l’impôt
' eft réel, les biens féodaux n’y font pas afîiijettis.
Bornier, v°
Teudum , art
3-
Defpeiffcs
’
tom. j.
On peut voir ce qu’en difent les Auteurs du Lan-
C u ')
guedoc & du Dauphiné. Le même principe nous
PART. I.
eft attefté pour la Bourgogne par les Auteurs de CHAP. I.
cette Province. Nous ne terminerions pas de long- Salvaing ,
Trr.ifé de l’Urems cette difeuftion, fi nous voulions entrer dans f.ige des Fiefs ,
pag*
&
le détail de toutes lés Doctrines qu’on peut ramaftér 1,91.
Chorricr fur
Sur cette matière. Ce qu’on vient d’en dire Suffit Gui pape, pag.
lit.
décif.
pour prouver à tout ieâeur impartial que la préro- Buërius
14*.
i
fur
gative féodale fur laquelle ou a voulu répandre des ChafTance
la. Coutume
de Bourgonuages, eft établie par-tout où les Fiefs Sont connus 2 ne , tit. des
Jaftices, §. +,
& où l’impôt eft réel. L ’impôt réel Se leve Sur les u . 6 i.
biens; non Sur tous les biens, mais Sur ceux qui doi
vent le Supporter par la loi de l ’Etat ou du Pays.
C ’eft la loi publique qui fixe la nature & qualité
d-es domaines & des propriétés, qui les rend contri
buables ou exempts , Suivant qu’ils ont perdu ou
qu’ils conServent encore le caraétere de féodalité
d’où naît leur immunité.
Ainfi , nous ne pouvons trop le répéter : La queftion roule fur la qualité des biens , & non Sur celle
des perSonnes. Peut - on à préfent demander , de
bonne f o i , fi les biens nobles & féodaux doivent
contribuer à l’impôt réel ? Ils ne Sont féodaux &
nobles, que parce qu’ils font exempts de cette con
tribution. On ne pourroit les y Soumettre Sans les
dégrader , Sans enlever aux pofléfléurs une partie
�A
Os)
(h )
eiienrieJle de leur propriété ; & ces principes qui
' L font vrais, refpe&ables, facrés dans toutes les MoCHAr*L
.
\ ,
narchies où l’on connoît les fiefs & leurs droits, ne
peuvent que recevoir une force nouvelle en Pro
vence où cette nobilité , cette prérogative de patri
moine fe lie avec les loix & tous les principes progrefiifs de la Conftitution nationale. Ceft ce qu’on
va démontrer.
CHAPITRE
IL
Développement des Loix provençales fur la
prérogative des Fiefs.
L a difcuflîon des titres locaux feroit bientôt faite,
fi nous n’avions des erreurs fans nombre à réfuter ,
des erreurs auxquelles on n’auroit pas dû s’at
tendre. Nous allons tout approfondir fans déguifement. Quand on écrit pour l’inftruâion des Ordres,
on fe voue à l’obligation de rechercher la vérité ,
ainfi qu’au devoir de l’expofer toute entière.
Trois differents ouvrages ont paru coup fur coup,
pour foutenir que la diftin&ion des biens n’avoit
jamais exifté , ou que tout au moins elle devroit
être abolie. Commençons par prouver qu’elle exifte,
& qu’elle a toujours été reconnue, même refpeêtée
par le T iers-E tat, par ceux qui ont écrit en fa fa
PART. I.
veur , par tous nos Jurifconfultes , par toutes les CH AP. ir.
L o ix , toutes les Décidions & les Arrêts intervenus
fur cette matière. Nous citons ici tous les monumens, toutes les délibérations des Etats & des Affemblées, tous les titres de légiflation : C ’eft pour
la première fois qu’on a fait éclorre aux yeux du
P euple, le fyftême impolitique , autant qu’illégal &
injuffe, de l’égalité des biens , mafquée fous le voile
trompeur de l ’égalité des perfonnes, quant à ce qui
concerne l’impôt. Perfonne, jufqu’à nos jours, n’a
voit ofé dire que les biens nobles étoient contri
buables ; perfonne n’avoit ofé fe permettre d’avancer
qu’ils l’avoient été de tous les tems 3 6c c’eft néan
moins ce qu’on a fait, dans l ’objet fans cloute d’infinuer que la prérogative des Fiefs n’étoit rien de
plus qu’un droit ufurpé dont il falloit faire cefîer
I’abus.
Cependant cette prérogative qu’on trouve par-tout,
n’avoit jamais celfé d’exifter en Provence où elle
a précédé toutes les Loix connues fur la matière
des contributions.
En difcutant l ’intérêt du T iers-E tat, 011 a dif- Mémoire fut
tingué quatre époques 3 la première finiflant en Q°fcss
14 0 6 , tems de l’Ordonnance de Louis I I 3 l a u&fuiv'
�(i6)
— . .. . féconde en 1448, époque de l'Ordonnance du Roi
P^RT {
René ; & les deux autres embraffant tous les tems
CHAP. II.
pofférieurs.
Dans la première , a-t-on d it, les Nobles avoient
contribué par le fervice perfonnel, 6c par le fervice
pécuniaire ; dans la fécondé, la Nobleffe feule fut
difpenfée du fervice en argent, ou de l'impôt ; en
Ibid f ag- i l .
1448 , tems où commence la troifieme époque , le
Souverain ne diflimula pas à-la-Noblefle qu’il étoit
1
1
mal édifié de fa réfiftance à contribuer aux charges
communes ; 8c depuis lors la Nobleffe , repréfentée
par les Propriétaires des Fiefs^ a offert de con
tribuer en argent, 8c elle y a été condamnée quand
on l’a pourfuivie fur les objets de cette nature.
Ces proportions ne font rien de plus que tout
autant d’erreurs. Tous les monumens 8c les titres
de la Province s’unifient pour le prouver.
Commençons par la première époque qui prend
depuis la naiffance de nos Fiefs jufques à l’année
1406. La Nobleffe , dit-on , fourniffoit alors le
double fecours du fervice militaire 8t pécuniaire.
Tous les Auteurs, tous les Féudiftes, 8c même
les Publiciftes nous attellent que plus on fe rap
proche de Forigine des F iefs, plus on trouve que
les Seigneurs ne dévoient rien de plus que le
fecours
(u )
fecours noble du fervice militaire ; que ce 11’étoit
qu’à raifon de ce qu’ils n’étoient pas fournis à d’au
tre obligation , que leurs Fiefs étoient réputés no
bles j que le fervice en argent étoit le fardeau des
Roturiers dans les lieux où l’impôt eft perfonne}
ou mixte , 8c des rotures dans les lieux où il. eft
‘ •
' 1
: •'
■ n
•1
..
réel.
'
•
On obferve en vain que dans les premiers tems
les Etats, ou Parlemens , ne fe tenoient que par le
Clergé 8c la Nobleffe , 8c qu’il n’exiftoit point de
Tiers-Etat. A lors, a-t-on dit encore, le don en
argent n’étoit payé que par les deux Ordres affiffans
6c votans aux Etats. Mais n’auroit-on pas dû voir
1 '. que nous n’avons aucune trace d’un pareil ufage
en Provence, où les plus anciens titres nous préfentent le Tiers-Etat comme affiftant 6c votant dans
toutes les délibérations , 8c les rotures > repréfentées
par les feu x, comme fupportant le poids des impôts
établis , ou , pour mieux dire, des dons accordés par la
Nation? Et quand nous aurions en Provence 6c dans
nos faftes des monumens 6c des preuves des Etats ou
Parlemens tenus fans l’afliffance 6c la coopération du
T iers-E tat, n’en fortiroit-il pas une raifon de plus
contre le fyftême que nous réfutons ? Dans les tems
anciens, où les communes n’exiftoient pas, tout
C
P A R T . l'.
CHAP. II.
Diftion. Encyclopéd. loco
citât o , y °.
Fief noble.
�\
PART. I.
CHAI». II.
Voyet les
Commcotaiies fur les
Coutumes, au
fu jet des biens
taillables à la
diferétion &
vouloir des
Seigneurs ,
haut Cf b a s,
m
velonti.
(18 )
étoit délibéré, tout étoit réglé par les Prélats &
les Nobles ; 8c s’ils donnoient des fecours en argent,
ne les prenoient-ils pas fur leurs Sujets ou Vaffatix
taillables, foit à volonté pour la plupart, foit pour
les cas où le Seigneur aVoit quelque dépenfe à fairé
& quelque fomme à fournir? Qui ne fait que la
taille feigneuriale, depuis réduite par les Arrêts aux
quatre cas impériaux, n’a pas eu d’autre objet dans
fôn origine ?
Mais ces confldérations font trop générales pour
la queftion. Rapprochons-nous de nos titres locaux,
& voyons s’il eft vrai, fi même il peut l’être, que
dans la première époque, comprenant depuis la
naiffance de nos Fiefs, jufques à l’année 140 6, les
Seigneurs ont toujours contribué par le double
fervice militaire 8c pécuniaire.
On nous oppofe les Etats de 1574, ceux de 1390,
de 1394, 8c de 1404. On croit y trouver des preu
ves de la contribution forcée des Fiefs, quant au
fecours en argent.
Nous demandons d’abord ce qu’on a fa it, foit
dans les tems antérieurs, foir dans les teins inter
médiaires depuis 1374 jufqu’à l’époque donnée de
1406. La NôblefTe, repréfentée par les F iefs, a
donné quelquefois des fecours, même en argent, dans
)
(*9 )
cette première époque. Mais ces dons étoient pure
ment volontaires. Ils n’ont été faits que dans de
grandes occafions de crainte 8c de calamité géné
rale. Ce trait de vérité fort des titres mêmes qu’on
va bientôt parcourir, 8c de tous les autres monument
de notre hiftoire.
Voilà donc dans cette première époque deux ocçafions différentes dans lefquelles les Prélats 8c les
Nobles ont confenti des contributions. Quel étoit
le droit 8c l’ufage antérieurs ? On témoigne de la.
part du Tiers des regrets bien marqués fur ce que
les Etats de 1374 font les plus anciens qu’on ait
pu recouvrer. Ce n’efl: pas la peine de s’en affli
ger. On peut y fuppléer, i°. par le D roit commun
8c univerfel ; 20. par des titres qui le renforcent en
l’expliquant; 3 \ par les Etats eux-mêmes dans lefqwels la Nobleffe a délibéré de fournir des fecours
pécuniaires ; 40. par ce qui fe trouve dit dans les
Etats contemporains 8c intermédiaires ; 8c finale
ment, par un titre authentique 8c folemnel qui ter
mine cette époque, c’eft la Déclaration de Louis
I L donnée en 1406, titre déclaratif pour le pafie ,
autant qu’impératif pour les tems qui devaient le
fuivre. Développons ces confidérations ; la décou
verte de la vérité fera ceffer les regrets qu’on afC ij
*
PART. I.
CHAP. TI*
�fefte de montrer fur la perte des titres antérieurs
p a r t . i.
à IJ 74D ’abord , on ne préfumera pas que les Fiefs de
Provence euflênt perdu leurs droits daiis un tems
où la prérogative féodale exiftoit dans toute fa
vigueur 3 dans un tems où tous les biens que le
Seigneur poffédoit dans fon F ief, étoient nobles , par
cela feul qu’ils étoient dans la main du Seigneur ;
dans un tems où, comme on le verra bientôt, nos
impofitions étoient mixtes, parce que, comme difent
nos Auteurs locaux, indicebamur perfouis pro rébus,
8c où les Seigneurs réuniffoient fur leurs têtes un
double titre de liberté, à raifon de leur noblede
CHaflanncc
«
cLe.rzcrjoc. perfonnelle 8c de
celle de leurs Fiefs. Alors,
les
r/tjt Tcusum *
,
.
n
'blU t‘ f0' Fiefs ner pouvoient être rpodédés que
par
les Nobles, *
n,va notnuur.
T.
r
8c l’inveftiture que le Prince accordoit à tout vaffal
même Roturier, fuffifoit pour ennoblir fa perfonne.
Mais heureufement quelques titres ont échappé à
CHAP. II.
Poutrage des tems ; 8c ces titres prouvent qu’avant
l’époque de 1374, on tenoit pour réglé en Provence
que les biens du F ief n’étoient pas fournis à l’impôt.
Armoirei<
î.
Il exifte dans les Archives du Roi une Sentence
S,
arbitrale du 26 Avril I2 ç6 , rendue par le Prévôt
F,ca‘
de Grafle , le Bailli 8c le Juge de Nice 8c celui
de Grafl’e , entre les Seigneurs 8c les habitans de
la Turbie
dépendant de la Comté de Nice ,
»
%r
•
-•
*
qui faifoit alors partie de la Provence. Ce titre eft
précieux. O il y troùve lés preuves les plus énergiques de notre Constitution. En effet, on a préfenté les Seigneurs , même confidérés fous ce feul
rapport de Seigneur, comme étant abfolument étran
gers aux affaires de la mftfrféipalité. C ’eft encore
une erreur que nous auront ôccafion de réfuter dans
\ fP f
a
c •
* v.
le cours de nos obfervations , 8c qui fe trouve d’ail
leurs combattue dans le Jugement dont nous par
lons.
Qttando fiet collecta , y eft-il d it, Jeu quifla in
clicio cajlro aliquâ ratione > diclt Domini eligant duos
vel très vel plures , f i vifum eis fuerit, probos homines
diai cajlri quod fidélité r & cequaliter prout meliùs
& utiliùs eis videbitur y imponant & dividant fecundùm facilitâtes cujujqüe , quiflam inter homines diai
cajlri, & recipiant diaatn,■ quiflam, & rationern indè
reddant di3 is Dominis, & in prefentiâ aliquorum prcborum hominum diai cajlri.
:
On voit par là que les Seigneurs n’étoient pas
étrangers à l’Adminiftration. Ils nommoient les Exac
teurs ; ils leur faifoicnt rendre compte , car c’étoit
aux Seigneurs que compte étoit rendu, le texte
eft formel là-de du s.
PART. !.
CHAP. II.
�Dira-t-pn que cette difpofitiçm ne touche pas à
fe queftiop des çorçtrihutions ? Mais çette partie du
texte doflfle d’abord le plus gr^nd jour fur cet
objet. EUe établit que l ’impôt étqit mixte 9 famines
çollectabantur pro poffeffiombus, fecundùm façufates
cujufque. D ’ê t r e part, ce texte établit Taffiete de
l’impôt, St la contribution mer famines dicli caflri.
be Seigneur ne s’y trouve pas compris.
Mais toute difficulté difparoît à l’afpeft des au
tres difpofitions que ce titre renferme. Les habitans
demandoient que les Seigneurs fuflent fournis à la
contribution pour les quêtes Sç cavalcades. Ils en
furent déboutés. Supra ea vero quod dicli Sindici
petebant nomine Univerfetatis quod dicli Domini darent
& conferrent in omnibus quiflis & eavalcatis quœ fiebant in diclo caftro >diüos Dominos à prœdicta petitione
abfolverunt : St remarquez bien que % à cette époque
reculée , on ne connoifloit d’autre impôt que celui
des quêtes St cavalcades.
In
Cônfolidatiofl, le fdnds qui en âvoit été détaché
reprenoit fa première nature par fa rentrée dans
le Fief- Les Arbitres firent là-deflus la même
opération qui fut enfuite faite par l’Arrêt folemnei
de
56. Item , dit la Sentence y fupra petitione
quam faciebant dicli ho mines , fcilicet quod dicli Do
mini darent & conferrent in quifiis & colleclis pro
pojjejjîonibus quœ fuerunt quorumdam hominüm dicli
caflri y quœ ad eos pervenerant, diclos Dominos dicli
arbitri abfolverunt.
tribuer , quant aux biens d’ancienne contribution
qu’ils avoient nouvellement acquis , 8t qui avoient
ci-devant été compris dans la levée des impôts.
Tamen flatuerunt & ordinaverunt dicli Arbitri qiiod
de pojjejjionibus quas dé cœtero ement, f i eas ad
manus fuas resinere voluerint, quod pro diclis pojfeffionibus ponant in quiflis, colleclis & eavalcatis, &
conférant ficut fiacere confiueverant illi qui prœdiekts
pojfejfiones ptiùs tenebdnt, pro modb & quantitàte
diclarurti pojfejjionum. De iis vero pbjfe(fionibüs quœ
causa coitimiffi vel aliâ juflâ ratione ad eos venirerit,
in qitïflis feu colle3is pro diclis pojjeffionibus poneré
nec aliquid folvere teneahtur. Voilà nos principes
conftitutionnels j tels qu’ils exiftent eù'core , St qu’ils
ont été fixés par l’Arrêt provifoire de iÇ4ÿ> fondu
dans l’Arrêt définitif de 1556* St dans £elui,plus
folemnei encore que voué les autres > du 7 Février
On penfoit alors que la réunion au F ief opérant
1702.
Ce n’eft pas tout: les.habitans de la Turbie prétendoient qu’au moins les Seigneurs dévoient con
Cette décifion fut acquiefcée par toutes les
part.
1.
CHAP. H .
�( *4 )
PART. I.
c Ha p . ii.
Parties, & fuivie d’une tranfa&iôn qui renferme
exaâement les termes propres de la Sentence.
En 1 3>20 , la même queftion s’éleva entre le
Seigneur de Villeneuve , F ief fitué en Camargue 7
& la Communauté d’Arles. Les Confuls d’Arles
vouloient faire contribuer le F ief de Villeneuve
aux, quêtes, cavalcades & taillés levées au profit
de la Communauté. Ils avoient fait procéder à des
exécutions. Le Seigneur de Villeneuve en avoit
demandé la caflation, avec défenfes au Sequeftre de.
fe deffaifir. Les Confuls d’Arles & les Exafteurs n’oferent pas comparoître fur lès premières aflignations.
Ils fe montrèrent enfu.ite pour interpeller le propriétaire du F ief de juftifier de foh exemption. Il
remit fes titres. La caufe fut renvoyée à quin*
fcaine , pour donner à la Communauté d’Arles &
aux Exafteurs le 'tems de les examiner. Il en réfultoit que le domaine de Villeneuve étoit un F ie f
établi & tenu fous la mouvance de l’Eglife d’A rles,
& qu’il n’avoit jamais été compris dans la levée
des tailles, collettes, quêtes & cavalcades. En conféquençe r les Confuls d’Arles furent condamnés ,
.
parce qu’il conftoit de' la qualité du F ie f, & qu’en
conféquence le domaine de Villeneuve n’avoit ja
mais été compris dans les précédentes levées.
Voilà
C25)
Voilà quels font nos antiques principes. Voilà
notre droit bien expliqué , bien développé pour CIIAP>ri#
ce qui concerne la première époque. Mais puifqu’on a cité quatre tenues d’Etats , pour en in
duire que le droit & l’ufage de la première époque,
prouvent que la Nobleffe étoit foumife aux contri
butions pécuniaires , pourquoi n’a-t-on rien dit fur
les Etats intermédiaires qui fe trouvent entre 1374
& 1406? C ’efl parce qu’on trouve dans ces Etats
& dans leur confiante uniformité , des preuves
évidentes que la Nobleffe ne devoit rien , & que
les dons qu’elle avoit confentis dans les occafions
dont on veut fe prévaloir aujourd’h u i, étoient li
bres & volontaires. Si les autres Etats avoient pu
fournir quelque induéiion favorable au fyfïême dont
nous détruifons les bafes , on n’eût pas manqué de
les relever.
C ’efl la réflexion que tout leéteur impartial a dy
faire. La première époque fur laquelle nous raifonnons , embrafié environ trente ans. On trouve
dans l’intervalle plufieurs Etats convoqués. Com
ment & fur quels principes a-t-on marché dans ces
Etats intermédiaires ? Le voici.
En 1391 , tems de la guerre du Vicomte de Turenne , époque de défaflre & de calamité pour la
D
�1
c*o
« - - r " 1 Province , il avoit été délibéré une iinpoiitiou en
cum’, ii. deniers , à laquelle les Prélats & les Nobles avaient
confenti de contribuer. Le produit de cette levée
fut infuffifant ; il fut fait un emprunt pour y fupptëer. En conféquence les Etats fupplierent la Reine
Marie 8c Louis I I , de leur permettre de contraindre
les Seigneurs, Prélats , Barons, Gentilshommes &
Communautés de contribuer au payement de P em
prunt. Ilsf demandent la même contrainte contre les
Eccléfiaftiques, pour leurs biens temporels 8c patri
moniaux. Que répond la Reine? qu’elle y confent,
en tant que cela fe pourra de droit.
En 1393 8c le premier Février, les Etats font
convoqués à Aix. On y délibéré un fecours ex
traordinaire , 8c ce fecours eft une reve qui doit
être prife fur le fel 8c fur la farine. La révolte du
Vicomte de Turenne caufoit alors le plus grand
défordre. On a toujours dit que la délibération de
ces Etats prouve l’exiftence de la prérogative féo
dale : on va le prouver bientôt. Mais en attendant,
obfervons que dans la même année , 8c le premier
Août, les Etats font convoqués à Avignon. Ils y
*
~r
•
/
établirent une impofition pour la paye des gens de
r ■ •
/•
•
. . . .
guerre 8c pour deux m ois, à raifon d’un demi franc
par feu pour chaque mois. C ’eft toujours à la fuite ou
0 7 )
dans le tems des troubles du Vicomte de Turenne , ;
PART.
qu’on voit encore des Etats fans date portant la con CHAP. H;
tinuation des mêmes levées , la ceflation de toute
prérogative 8c immunité pour raifon d’icelle \ mais en
même tems on trouve dans ces Etats, tenus à A v i
gnon , que les Délibérations 8c Ordonnances qu’ils
viennent de faire par évidente nécefflté de leur Sei
gneurie & du Pays , nayent de valeur que pour cette
fois tant feulement , & fans préjudice de leurs privilè
ges , franchi]es & libertés , ni d'aucuns du Pays , &
qu après le tems jé g lé pour leur exécution , elles de
viennent milles & que les Souverains & leur Cour ne
puijfent en tirer aucun avantage pour Vavenir, La même
proteftation fe trouve dans les Etats tenus à Marfeille , à raifon d’une impofition délibérée dans le
même tems 8c par les mêmes motifs.
Les Etats tenus dans ces tems orageux avoient à
faire les plus grands facrifices. Les Nobles 8c les
Prélats préfents confentoient à contribuer de bon
coeur au moyen des reves. Mais ce 11’étoit que fous
proteftation 8c fans préjudice de leurs droits. C ’é~
toit toujours en difant que les tailles &c quittes 11e
frappoient de droit que fur les rotures. A in fi, dans
ceux du 31 Décembre 1394 tenus à Tarafcon , art.
16 , les Etats ohfervent que, comme les Payfans payent
i
r
\
�(2 8 )
fans tirer à conjéquence, 8c la réglé relie pour tous
les autres tems.
( *9 )
dévoient, payer au Roi , foit en nature foit en
argent, il ell dit dans toutes ces Délibérations qu’au
moyen des fournitures librement confenties par les
Seigneurs, Barons 8c Communautés , il n’y aura
point de cavalcades à payer ou à fournir pendant
le cours de l’impofition délibérée.
Tous les Etats qu’on vient de parcourir , font
tenus dans le tems de la guerre du Vicomte de
Turenne. Ceux de 1374 font les feuls dans lefquels
l’impôt frappe fur les Fiefs ou fur le revenu féodal.
Dans tous les autres , les deux premiers Ordres ne
confentent à fupporter que des reves ou levées fur
les confommations y 8c dans tous les Etats où l’on
délibéré des contributions à fupporter par les deux
premiers Ordres, on trouve la fufpenfion des immu
nités librement confentie par les deux premiers , avec
proteflation 8c réferve de tous leurs droits conftitutifs , fous la déclaration faite par tous les Etats
aflémblés , que cela ne doit pas tirer à conféquence,
8c que la charge de l’impôt tombe de droit fur les
rotures. Voilà ce qu’il falloit dire, 8c ce qu’011 n’a
pourtant pas dit.
Voilà donc des contributions confenties par la
Il eft même à remarquer que le fervice militaire
11e confillant qu’en cavalcades, que les Féudataires
Noblefle dans deux tems différens ; en 13 74 , la le
vée fut afiife fur les fruits \ en 13 9 1 , 8c tant que
les tailles 8c quilles 8c fupportent les charges du
Pays , & quil ejî expédient au Seigneur & à fon Fifc
que fes Sujets foient opulens , ils fupplient la Reine
de donner fes offices à fes fideles Sujets 8c non aux
Etrangers. Côtoient donc les Payfans , c’eft-à-dire ,
les Roturiers , les feux qui de droit payoient les tailles
& quifles. Les Etats eux-mêmes nous l’aflurent, 8c
cette aflertion dans un tems orageux où -tous les
Ordres fe faifoient une gloire d’entrer en contribution
pour la néceffité commune , ell un monument bien
authentique de notre Droit conftitutif. Ainli dans
d’autres Etats fans date, tenus dans le même tems
8c pour le même objet, les trois Ordres confiderent
que les grandes charges du Pays pour la guerre font
fupportéespar le Peuple ‘ ils ordonnent que pour cette
fois les Prélats, Perfonnes eccléfiaftiques, exemptes
Sc non exemptes , Commandeurs , Barons 8c Gen
tilshommes ferviront 8c contribueront perfonnellement, ou feront fervir fuivant la taxe qui fera faite
pour le bon état b foulagement du pauvre Peuple.
C ’e l l , comme on v o it, pour cette fois tant feulement,
PART. 1.
CH AP, II.
�. (î°)
dura la révolte .du Vicomte de Turenne, elle fut
faite en argent, ou fur le fel & les farines. Ces
deux époques font marquées comme époques de défaftre & de calamité. On n’a qu’à voir fur la première
ce qu’en dit l’Hiftoire ( i ) . Il n’eft point de Proven(1) O r, menaçoient les Bretons, peuples allez farouches & mal
apprivoifables, d’entrer en Provence -, parce que environ ce tems
même , Charles V du nom , furnommé le Sage , Roi de France ,
avoir acquis la ville de la Rochelle fur les Anglois -, laquelle depuis
par eux reprife & recouvrée , & derechef réafliégée & renforcée
par les François , fe rendit à Louis d’Anjou......... où eft à conjec
turer que pendant ces troubles & ces guerres , ce Duc angevin
qui ne penfoit & n’avoit les refiorts de fon efprit bandes , que
pour lâcher du trouble aux Provençaux fideles & loyaux fujets
de la Royne Jeanne, parce quelle ne vouloit l’adopter en fils ,
faifoit courir un bruit par tout fon Gouvernement de Languedoc >
que les Anglois appelles Bretons , étoient entrés bien avant aux
marches du Languedoc & de la Guyenne , & s’étoient avancés
tellement qu’ils avoient mis le pied jufques dedans la ville du SaintEfprit fur la riviere du Rhofne, dont les Provençaux ne reçurent peu
de troubles ni un petit coup de marteau. Ces foudaines tempêtes &
ces nuages qu’ils craignoient bientôt venir fondre fur eu x , les éveil
lèrent fi vivement, qu’incontinent &: en diligence ils en mandèrent les
avertifTemens à la Rx>yne , laquelle à ces nouvelles manda de tenir
les Etats , afin de pourvoir aux inconvéniens qui fembloient me
nacer l’afTurance de fon pays , & qui fe pouvoient enfuivre de cefl
abord.. . . . les. Etats ténus, Scc. Noflradamus, pag. 4 3 1 &: 433.
Véyez encore fur ce fait le chapitre 7 de cette première Partie.
( î1)
Çâl qui 11e foit inftruit des malheurs Sc des ravages
occafionés par la révolte du Vicomte de Turenne.
Cette guerre terminée , & fes fuites fe trouvant
effacées par la confommation des paiemens & des
dépenfes faites à cette occafion , les chofes ren
trent dans leur état ordinaire. L ’impôt cefle d’exifter
far le fel & fur les farines. T out eft rejette fur les
feux. A infi, dans les Etats du 16 Octobre 1399 ,
tenus à Aix , 011 trouve qu’il exiftoit une impofition
de fept florins par feu. On foumet les Eccléfiaftiques au paiement des charges, quant à leurs héri
tages & biens patrimoniaux, & cela attendu la mifer e & la nécejjité du Pays.
Il efl à remarquer que dans ces mêmes Etats de
13 9 9 , le Roi demande des fecours au Pays pour
fon paffage à Naples : c’étoit la feule dépenfe cou
rante qu’011 eût à fupporter alors , parce qu’on avoit
laifle fubfifter encore en 1399 l’impôt de quatre gros
par quintal de f e l, pour un an tant feulement, à
l’effet de payer les dettes contractées & les gens
d’armes levés pour la guerre du Vicomte de Turenne.
Sur cette demande, les Etats délibèrent un don
gratuit de cinquante mille florins, & de quatre cent
marcs de vaiffelle. Comment ces deniers furent-ils
délibérés par les E tats, & levés en conféquence de
leur délibération ? Sur les feux.
VVîanrï
PART. i.
CIIAP. II.
�(
Il exiftoit alors, pour toute impofition, une levée
de dix-fept gros impofés par feu. Les Fiefs 6c les
biens du domaine de l’Eglife ne payoient donc rien.
Perfônne ne murmuroit là-deffus, parce que tels
étoient le droit 6c la maxime du Pays. Les Etats
de 1401 fe contentèrent d’ordonner que les Eccléfiaftiques payeroient pour leurs biens temporels 6c
patrimoniaux. Ils reconnurent' donc que les biens
du domaine de l’Eglife 6c ceux que les Seigneurs
poffédoient dans leurs Fiefs, ne dévoient rien.
On voit à préfent ce qu’il faut penfer des exemples
cités dans les Mémoires produits au nom du Tiers.
Dans les tems que cette première époque embraffe ,.
les Nobles avoient confenti volontairement de con
tribuer dans deux conjonctures difficiles 8c calamiteufes. La guerre du Vicomte de Turenne dura
depuis 1391 jufqu’en 1399. Dans le même tems,
les biens nobles ou exempts des deux premiers
Ordres ne payèrent rien. L ’impôt foncier n’étoit
affis que-fur les feux. Les Prélats 6c les Nobles .ne
payoient qu’en argent ou fur leurs confommations >
ils ne payoient que parce qu’ils l’avoient délibéré, 6c
leur confentement libre n’avoit été donné qu’avec
proteftation 6c réferve. On nous parle des Etats tenus
en 1404. Nous ne les voyons pas. Louis I I . voulut,
dit-on
( 35 )
dit-on , aller à Paris. Il demanda* des deniers à cet
PART.l.
effet. On prorogea l’Edit de la gabelle fur le f e l, CHAp. h.
établie avec renonciation à toute exemption en
1591. L ’hiftoire 6c les titres démentent ces faits.
Louis 11. en 1 annee X404 j époque de la înort tom. %, pjjj.
de Marie de Blois fa mere, ne fit pas le voyage ^3i
de Paris. Il n’ avoit pas befoin d’argent pour le
faire. Il n’auroit pas eu le courage d’en demander
à la Nation , épuifée par les énormes dépenfes de la
guerre du Vicomte de Turenne, tandis qu’il venoit
de recueillir dans la même année une opulente fuc- m. raPon.
tcra. 3 , pag»
ceffion en argent, s’élevant à deux millions fix cent J00douze mille livres , ainfi que l’Hiffoire en fait foi.
On voit dans la fuite de nouvelles traces d’un
nouvel impôt fur le fel. Mais la gabelle établie en
1391 pour la guerre du Vicomte de Turenne,
n’avoit été prorogée en 1399, que pour un an
feulement. Les Etats l’abolirent en 1401. Celles
qui peuvent avoir été établies enfuite appartien
nent à la fécondé époque que nous allons bientôt
difcuter ; 6c l’on n’a pas befoin de faire obferver
qu’une gabelle établie, foit fur le fe l, foit fur les
farines, confentie librement par les deux premiers
Ordres dans des tems difficiles , ne peut fournir
aucune efpece d’in d u âion , à l ’effet, de faire fou-.
E
�r
PART.I.
CH AP. II.
Tag. J4 I.
C 34)
mettre lès biens ue l’ancien domaine de l’Eglife ,
& moins encore les biens nobles 6c féodaux, à
contribuer à l’impôt réel.
Mais notre Conftitution n’eft-elle pas bien dé
veloppée , bien expliquée par le Jugement ou la
Déclaration de Louis II. donnée en 1406? Alors
il n’exiftoit plus de motifs pour engager les exempts
à des contributions volontaires. La Communauté de
Barbentanne vouloit faire contribuer fes Seigneur^
in donis , fubfidiis, talheis & impofitionibus nobis concefjïs , dit l’Ordonnance de Louis II. & aliis oneribus incumbentibus univerfitati. Ce qui comprend ,
comme on voit, tous les motifs 6c toutes les bafes
rî’impofition. Les Seigneurs foutenoient au contraire
qu’ils n’y étoient fournis pour rien 6c en aucune
maniéré y negabant fc ullomodd teneri in uliquu. La
décifion en forme d’Edit irrévocable , dit l’Hiftorien
Noftradamüs, fut que les Seigneurs ne dévoient être
ni fatigués ni moleftés par de pareilles prétentions,
& en conféquence il fut déclaré 6c ordonné, quod
à ccetero Nobiles Condomini caflri prœdicli de Barbentane > & alii Nobiles diclorum nofhorum Comitatuum Provinciæ & Forcalquerii Jurifdiclionem habentes ,
non contribuant > nec teneantur contribuere in diclis
donis, talheis , impofitionibus & onerïbus fuprà diclis ,
nec aliquid folvcre occafione ptœmijforum.
(35)
Après ce que nous venons d’obferver fur les
tems antérieurs 6c fur les principes des Fiefs , pourroit-on propofer férieufement que cette difpolition eft
conftitutive d’un droit nouveau ? Mais pourra-t-on
s’en permettre l’idée, à l’afpeâ de cette difpofitionultérieure qu’on trouve à la fuite de celle que nous ve
nons de rapporter ? Ni fi tamen ipfi Nobiles in Confiliis
generalibus vel alibi ad contribuendum in diclis donis y
talheis , impofitionibus & oneribus pro centenario vel
alias , ficut retroaclis temporibus factum efl , voluntariè
confentirent. N’eft-il pas évident après cela que les
contributions faites dans des tems antérieurs 6c dans
des circonftances difficiles, avoient été librement
délibérées 6c volontairement confenties ?
Voilà donc la première époque éclaircie. Il étoit
inutile de faire fur le Jugement ou l’Edit de Louis
I I. un commentaire qui ne dit rien , 6c dans lequel
on manque évidemment l’efprit du texte. Le Sou
verain n’étoit ni fatigué ni tourmenté, ni moins
encore fcandalifé par le recours des propriétaires de
Fiefs à fa juftice. Il ne vouloit pas que les Sei
gneurs fuffent inquiétés fur cet objet. Il vouloit pré
venir les défordres 6c le fcandale que les préten
tions des Communautés contre leurs Seigneurs em
portent après elles. Tels font les propres termes de
E ij
PART.!.
CH AP. II.
�Ton Edit. En condamnant la prétention des- habitans de Barbentanne, Louis I L crut qu’il étoit de
fa juftice de mettre pour jamais les Seigneurs de
tous les Fiefs du Pays à l’abri d’une pareille de
mande. Et s’il étoit vrai que dans cette occafiou
Louis I L par un effet de fa bonté, eût diminué
les tailles ou charges de fes Sujets, en auroit-il
moins fixé les bafes de la Conftitution provençale ?
La Province étoit alors tranquille. Il falloit ren
trer dahs l’ordre , déclarer que les Nobles ne dé
voient aucun impôt pécuniaire pour les biens qu’ils
poffedoient dans leurs Fiefs. Si dans ces circonftances le Prince avoit fait remife par la même Loi
d’une partie de ce que les feux ou les Communautés
lui reffoient devoir, cette grâce n’auroit aucune
relation avec l’a&e de juftice qu’il venoit d’exercer
en prononçant fur la prérogative des Fiefs ( i ) .
(37)
DeVoit-on fe permettre de dire qu’en établiflant
la prérogative conftitutionnelle des Fiefs & foulageant les fe u x , le Prince prit fur lui la portion
des Fiefs dont il prononçoit l’affranchiflement ? C ’eft
raifonner contre l’expreflé teneur Sc le fens évident
du titre. Le Prince déclara nobles les biens des
Seigneurs dans leurs Fiefs , parce qu’ils l’étoient
conftitutionnellement. Il les déclara tels pour le
préfent & pour l’avenir , en voulant pour tous les
change la première lettre du premier mot ; qu’on mette à la place
nolumüs tamen. On aura dès-lors une difpofition claire , conféquente,
bien fuivie. Le Prince au lieu de dire qu’il vouloit donner aux
feux un foulagement quelconque , auroit dit au contraire qu’il n’en
tend pas néanmoins qu’à raifon de fon
Ordonnance la charge
des feux Toit diminuée en aucune maniéré, aliqualiter. Faut-il donc
lire volumus ou nolumus ? Cela ne formoit pas une queftion dans
le tems de M. de Clapiers. Cet Auteur, fi bien inftruit de nos
L o ix , rapporte l’Edit de Louis II. * Après avoir mentionné la
(1 ) On veut bien raifonner ici fur le texte , comme s’il étoit tel
première partie de la L o i, il rend compte dans les termes fuivans
que la Province le rapporte : Volumus tamen quod propter ordi-
de la derniere partie fur laquelle nous raifonnons : declarando ul-
nationem & declarationem noftras prœfentes , de fummâ pccuniœ
terlus quod nulla ex hoc fieret plebeis hominïbus focorum defalcatio
noftrœ Curiœ débita & debenda per dietos incolas Barbentanœ &
aut colleclarum diminutio. Il faut donc dire que les Fiefs furent
alios dictœ noftrœ patriœ Provinciœ aliqualiter diminuatur. Cette
alors déclarés immunes, fans diminution des feux.
phrafe ainfi conçue eft bien louche. Le fens en eft incomplet &
mal fuivi. Que feroit-ce d’ailleurs qu’une diminution quelconque que
le Prince aurok voulu accorder, fans la défigner ni la fixer ? Q u ’on
* Cauf. 50 , qucft. 1 , n°. 1 1 .
Après avoir vérifié le texte, on peut affirmer que M. de Clapiers I’avoit bien lu. On y
tfcouvc le mot NOLUMUS.
PART.l.
CHAP. II.
�(î*>
tems. que les Seigneurs ne puffent être frappés que
PART.I.
par des contributions volontaires y 8c qu’ils auroient
CHAP. II.
librement délibérées..
P^g. U.
L ’Auteur du Mémoire fur les contributions décele un grand embarras fur la claufe de l’Edit , nifi
Jicut retroaclis temporibus voluntariè conjentirent. Il en
tire d’abord cette conféquence, que la Noblefle contribuoit donc avant cette époque, Jicut rétroactif
temporibus. Cela dit qu’il étoit quelquefois arrivé
à la Noblefle de confentir à des contributions vo
lontaires , 8c non que les Nobles euflent toujours
contribué. Il ajoute que par la tournure du titre y
le Prince difoit à la Noblefle : vous exigez que je
prononce comme Souverain 5je vous dois jujlice ; je
vous la rends. La Déclaration de 1406 eft donc un
titre de juftice, du propre aveu du T iers-E tat, ou
de ceux qui le repréfentent. Elle n’eft donc pas
conftitutive d’un droit nouveau. Pourquoi fuppofer
dès-lors que le Prince avoit voulu dire ce qu’il n’a
pas dit? Pourquoi raifonner fur le texte, comme
s’il contenoit une exhortation à la Noblefle de con
tribuer à l’avenir 8c dans tous les tems ? Quand
cela feroit, l’exhortation ne feroit pas un précepte \
mais tel n’eft pas l’efprit du titre. La queftion étoit
générale. Les Seigneurs difoient : nous ne deyons
(39)
rien. Le Souverain répondit de même, en leur dé
p a r r. 1.
clarant qu’ils ne feroient fournis qu’à des contribu GHAP. II.
tions libres , volontaires , 8c telles qu’ils les avoient
faites par le pafle , dans les grandes occafions où
les Citoyens de tous les Ordres étoient générale
ment 8c individuellement intéreffës , comme par
exemple , lorfqu’il avoit été queflion de faire ceflér
8c -de réprimer les dévaluations du Vicomte de
Turenne.
Faut-il à préfent recueillir les Doélrines locales
fur cette première époque ? On peut voir Lucas de
P en a, Jurifconfulte provençal, écrivant ou avant
ou dans le tems fur lequel nous raifonnons. Il at
telle l’immunité des Seigneurs féodaux fur la Loi
agros limitatos 3 , Cod. de fund. limitroph. Il faut y
„ Vcl- r >
joindre celle de Bertrand , donnant fon vœu fur Conf.
141
une conteftation élevée au fujet des contributions
entre les Seigneurs 8c la Communauté de Montfegur. N’oublions pas fur-tout M. de Clapiers, qui Cailf. f o ,
1 , uJ.
examine la queftion de favoir fl la prérogative féo 11.
dale tient à quelque privilège. Il établit la néga
tive : in Archivis nullum de hoc reperitur privilegium.
Il parle enfuite de l’Edit de 1406. Mais regarde-t-il
cet Edit comme portant l’établiflêment dTun droit
nouveau ? Il dit précifément tout le contraire :
N*.
x i.
�( 4° )
—■
chapmi!
Hujufmodi immunitas quamhabent Feudatarii, ut diclutn
efl > Pro omnibus rebus quas poffident intra limites
feudi, F W T CO N FIR M AT A Anefto Regis I llu f
triffimi Ludovici Secundi, Comitis Provincial 3 anno
1406*, rfie quintâOclobris. Ne trouve-t-on pas le même
P* é d * Pr*nc*Pe encore dans Mourgues, là où il dit que
de ié)S.
les lieux inhabités n’étoient pas compris dans les
feux , parce qu’ils étoient cenfés appartenir entière
ment aux Seigneurs qui n’étoient pas fournis aux
charges ? A la page fuivante , il parle de l’Edit de
1406: il le rapporte, non comme ayant décidé que
les biens féodaux dévoient. être exempts des tailles
à l’avenir, mais comme ayant prononcé fur l’immu
nité de droit. Cet Edit efl: tout à la fois titre ju
diciaire 8c titre de légiflation ; titre particulier pour
les Seigneurs 8c habitans de Barbentanne, 6c titre
univerfel pour tous les Seigneurs des Comtés de
Provence 6c de Forcalquier. Il déclare les droits
des Seigneurs de Barbentanne ; 6c comme ces droits
dépendent d’un principe univerfel 8c local, il les ap
plique à tous les Seigneurs du Pays. Ajoutons à toutes
Tomi, pag. ces aflêrtions celle de l’Auteur du nouveau Commen
taire de nos Statuts, qu’on n’accufera certainement pas
d’être feigneurial, non plus que Mourgues qui l’avoit
précédé. Il nous attefte qu’anciennement les Seigneurs
(4 1 )
en Provence ne contribuaient à aucune taille pour les
biens qu'ils pojfédoient dans Vétendue de leurs Fiefs
& Jurifdictions......... & qu’ ils furent M A IN T E N U S
dans cette exemption par le Jugement de Louis 1 1 .
Qui pourra dire à préfent que la prérogative féo
dale n’exiftoit pas avant l’époque de 1406? Com
ment foutenir que l’Edit de cette année l’a intro
duite comme un droit nouveau ? Difons au contraire
que cette prérogative efl née en Provence, comme
ailleurs, avec les F iefs, 6c que Louis I I . en
1406 n’a fait que la reconnoître 6c la confirmer.
Et comment a-t-on pu conclure que les deux pre
miers Ordres contribuoient à raifon de ce que-les
deniers étoient perçus par le Tréforier des Etats?
N ’auroit-on pas dû voir que le Tréforier qui per
çoit Pimpôt fur les feux , fut de tous les tems le
Tréforier de tous les Etats? Les deux premiers
Ordres n’étoient-ils pas -adminiflrateurs comme le
troifieme , des feux 6c de l’impôt qui s’y trouvoit
aflis ? Les Membres dont ils étoient compofés n’avoient-ils pas hors de leurs Fiefs des rotures com
primes dans les feux ? A in fi, lors même qu’il n’exiftoit
que l’impôt fur les feu x, dans les tems tranquilles ,
6c lorfque rien 11’engageoit la Nobleflè à confentir
des contributions volontaires, les Tréforiers étoient
• F
PART. I.
CHAI’. II.
�( 4 0
PART.l.
CH AP. II*
(4?)
nommés par les Etats. Ils étoient les Officiers des
Etats. Ils percevoient les denier^ des Etats, quoi
que l’impôt ne fût aflis que fur les feux 8c les
rotures. Il fuffit pour s’en convaincre , de parcourir
rapidement nos monumens hiftoriques 8c les déli
bérations prifes dans les Aflémblées de nos Etats
provençaux. En voila bien allez 8c peut-être trop
pour ce qui concerne la première époque. Venons
à la fécondé.
Seconde
£TOO.UE.
Commençons par les délibérations prifes par les
Etats. Nous difcuterons enfuite les Loix 8c les titres
que cette époque embraflé.
En 1410 , on délibéré un fecours ou don gra
tuit de 16500 florins. Comment eft-il affis ? Sur
les feux , qui par le précédent affouagement s’éle-
\
voient à 5051 un quart. L ’impôt eft par conféquent
de trois florins trois gros 8c un denier par feu.
On n’ofera probablement pas dire que l’affouagement
comprenoit alors les Fiefs 8c les biens nobles.
En 1419 , les Etats tenus à Aix délibèrent un
don gratuit de 50000 florins. Le Souverain l’accepte
8c remercie, plas nos & regratiam. L ’impôt eft dé
libéré par les Etats, pour être levé fur les feu x,
c’eft-à-dire, fur les V ille s, Cités 8c Bourgs, à raifon
de fix florins par feu. Il refte au moyen de ce un
excédant de 429 florins dont le Pays délibéré l ’em
ploi , 8c qu’il applique aux frais de l’exaâion > en
indiquant les Communautés fur qui cette fomme de
429 florins, fera levée. Le Prince adhéré à cet ar
rangement, pourvu que les 50000 florins délibérés
par les Etats lui demeurent francs 8c nets. L ’impofition eft fur les feu x, elle n’eft que fur les feux \
elle eft cependant délibérée par tous les Ordres.
Les exemples de cette efpece fe reproduifent dans
toutes les délibérations de nos Etats provençaux.
En 1420 , les Etats tenus à Aix délibérèrent un
don gratuit de 100000' florins. La fomme étoit
exorbitante pour le teins. On voulut foulager les
feux , en établiflant un petit impôt fur le fe l, qui
fut affermé 40000 liv. Il n’y eft pas d it, comme
dans les impôts délibérés* du tems de la guerre du
Vicomte de Turenne, que l’impôt frappera fur les
exempts. Le refte eft certainement affis fur les feux.
Les Communautés demandent qu’il leur foit permis
d’établir capages, reves, entrées 8c iffues. Les Sei
gneurs , pour leurs biens féodaux , ne dévoient donc
pas y entrer, puifqu’il eft de principe de droit ÔC conftitutionnel qu’ils ne font pas compris dans les reves.
D'ailleurs l’impôt délibéré par les E tats, c’eft-àF ij
�\
( 44)
dire, par les trois Ordres, eft littéralement afîis fur
p a r t . i. jes feux< Les biens nobles 8c féodaux ne s’y trouCHAP. II.
,
n
J
vent donc pas compris.
On trouve dans les Etats de 1429, qu’en 1426
il avoit été délibéré de lever cent cinquante hommes
d’armes 8c trois cent arbalétriers pour deux mois
pour le Pays, 8c cinquante hommes d’armes 8c cent
arbalétriers pour les Terres adjacentes 8c celles de
l’Empire, le tout à la charge des Vigueries, par
Bailliage 8c par feu. On délibéré en 1429 un fupplément de levée de vingt arbalétriers par cent feux.
Voilà donc encore tout le poids de l’impôt rejette
fur les feux. Il étoit pourtant délibéré par les trois
Ordres.
En 1432, Louis I I I . notifie aux Etats fon futur
mariage avec Marguerite de Savoie. Il fait demander
par M. de Beauvau , fon Lieutenant général, un fecours en argent. Les Etats accordent ce fecours,
qu’ils fixent à cent mille florins de 16 f. proven
çaux. Ils ordonnent que l’impôt fera levé par feu ,
fuivant la coutume.
Voilà quels étoient les principes de nos peres ;
voilà quel étoit le vœu de tous les Ordres , en
exécution de nos maximes conftitutionnelles.
En 1434 , les Etats accordent au Roi un don gra/
(45)
mit de trente mille florins. Qui doit le fupporter ?
La délibération nous le dit en termes exprès : toutes
les villes, lieux 8c cités qui fe trouvent affouages.
Ainfi les trois Ordres conftitutionnellement convo
qués 8c réunis, délibéroient l’impôt qui fe levoit fur
les feux, 8c jamais fur les Fiefs \ à moins que la
Nobleffe, repréfentée aux Etats par les propriétaires
des Fiefs 8c domaines nobles , ne voulût confentir
à la contribution , nif i voluntariè confentirent.
En 14 3 7 , le Roi René, féant fur fon Trône ,
demande aux Etats aide 8c fecours pour fon paflage
en Sicile. Les Etats fe retirent pour délibérer. Ils
accordent enfuite un don gratuit de cent mille flo
rins , auquel chaque ville, cité ou château fera tenu
de contribuer , fuivant l ’affouagement fait en dernier
lieu. Il efl: à remarquer que dans ces Etats , comme
dans une foule d’autres, on demandoit la contribu
tion des Eccléfiaftiques pour leurs biens patrimo
niaux ) 8c jamais il n’entroit dans l’efprit des D é
putés du T ie rs , ni de perfonne, de demander que
les biens nobles 8c féodaux fuffent fournis à l ’impôt.
La même demande fut renouvellée contre le
Clergé en 1440. Mais il étoit conftamment 8c paifiblement reconnu que les biens nobles ne dévoient
entrer dans aucune contribution. Ces mêmes Etats
PART. r.
CHAP. II.
�PART.I.
<?JPAP. II.
( 46)
de 1440 accordèrent un don gratuit de cinquante
mille florins. Mais la levée n’en fut faite que fur
les feux.
1
En 1442, les Etats furent de nouveau convo
qués. Ils délibérèrent un don gratuit de foixante
mille florins pour le Roi René , de mille pour le
Duc de Calabre, & de pareille fournie pour la Ducheffe fon époufe. Il fut dit tout de fuite que les
villes , bourgs & cités payeroient ladite foinme , fuivant l ’affouagement. Voilà l’hiftoire exafte & rapide
de tous les Etats dont on peut avoir connoiffance
entre les deux termes donnés de 1406 & de 1448,
qui forment la fécondé époque. Quelle conféquence
faut-il en tirer, fi ce n’eft qu’il étoit alors paifiblement & conflamment reconnu que l ’impôt réel
ne devoit tomber que fur les feux & les rotures,
& jamais fur les Fiefs & les fonds nobles?
Mais on voit en 1448 des Lettres patentes du Roi
René, confirmatives de l’Edit de Louis 1 1 . & c’eft ce
texte qui a fervi de bafe à tout ce qu’on a dit pour
donner une forte de couleur à la prétention élevée au
nom du Tiers Etat. Il faut donc difeuter & bien connoître ces Lettres patentes. Il en fortira de nou
velles preuves qui fortifieront notre démonftration.
L ’Edit de 1406 portoit, fans diftinCtion, fur tous
(47)
les biens que les Seigneurs poffédoient dans leurs
p a r t . 1.
Fiefs, même fur les biens d’ancienne contribution, CH A P . II.
c’eft-à-dire fur ceux qui après être fortis du F ie f,
y étoient enfuite rentrés par titre volontaire.
En 1448, les habitans de Barbentanne , Commu
nauté qui fe trouvoit fur les frontières, deman
dèrent que les Seigneurs fuffent tenus de contribuer
à la reconftruftion des remparts , fuper refcclione feu
reparatione murorum. La prérogative féodale n’étoit
pas conteftée. Comment auroit-elle pu l’être , après
les principes & les titres dont on vient de parler ?
t , pa^
Le dernier Commentateur de nos Statuts, nous ap Tom.
64 . a°- iSprend qu’on ne conteftoit point aux Seigneurs des
Fiefs l’exemption des tailles pour leurs biens nobles
& féodaux. Mais on foutenoit qu'ils dévoient y con
tr ib u er p o u r les b ien s ro tu riers qu tls avoient acquis des
particuliers ; étant naturel qu on ne puijfe acquérir un
fonds , fans être fournis aux charges qui y font atta
chées. L ’Edit du Roi René prouve effectivement que
tel étoit le fyftême de la Communauté de Barben
tanne. Telle fut la décilion des Commiflàires nom
més pour terminer cette conteftation. Ils fournirent
à la contribution dont il s’agiffoit alors , les fonds
d’ancienne contribution poffédés par les Seigneurs.
Ils les déclarèrent fournis aux colleftes de la Cite
�■■■ '.g
(4 8 )
pour les ponts, les fontaines 8c les chemins ; mais
r) %n t * i
“*■
la prérogative primitive 8c conftitutionnelle des fonds
CK A P. H.
r
nobles fut encore confirmée par ce titre. Delà vient
Koftradamus, que tous nos Auteurs provençaux ont fans celle préMourgucs, fenté les ^ Lettres rpatentes du Roi René 7, comme *
pag * 14.
CommcntTdu confirmatives de ce droit conftitutionnel , & que
l'^pag. r tous les Etats de Provence l ’ont conftamment re
connu de même.
- Réfumons - nous donc fur cette fécondé époque.
Elle nous préfente dans tous les Etats dont elle embrafle la tenue, l’exécution confiante de la D écla
ration de Louis 11 dans toute fa plénitude. Les
trois Ordres délibèrent l’impôt ; ils le portent en
tièrement fur les feux, c’efl-à-dire fur les rotures.
Les biens féodaux 11’eii partagent jamais le poids.
Tous les dons gratuits font a ftig n é s 8c levés fur les
feux. La Déclaration du Roi René ne change pas
cet état des chofes. Tous les Auteurs & les Etats
du Pays l’ont confidérée, quant à ce , comme con
firmative de celle de Louis IL Donner à ce texte un
fens contraire , c’efl vouloir fubtilifer pour obfcurcir
le jour même de l’évidence. Deux traits lumineux
fortent de cette fécondé époque : i°. La prérogative
des Fiefs efl confirmée par l’Edit du Roi René. Tous
nos Hifloriens, tous nos Auteurs, tous nos Jurifconfultes
( 49 )
confultes l’ont reconnu de même, 8c les Arrêts de
tous les Tribunaux du Royaume l’ont conftamment
décidé , comme on le verra bientôt. 2°. Comment
n’auroit-elle pas été confirmée ? Elle avoit exifté
dans tous les tems , avant & après la Déclaration de
1406; 8c les habitans de Barbentanne eux-mêmes
ne la conteftoient pas.
On fent après cela quel effet a dû produire la
Déclaration donnée par le Roi René en 1448. La
prérogative féodale a continué d’exifter, comme au
paravant. Les Etats n’ont ceffé de la reconnoître.
Ainfi , le Roi René demandant un fecours aux Etats
tenus à Aix en 1469, obtient un don gratuit de
foixante 8c dix mille florins. Qui doit le fupporter ? Les feux, les Communautés, qui demandent
dans cette occafion, comme elles l’avoient fait dans
une foule d’autres , la permiftion d’établir des reves ; 8c cette permiftion leur eft accordée pour fix
ans.
En 1472 , nouvelle demande de la part du même
Souverain ; nouvelle conceftion de cinquante mille
florins à prendre fur les feux', fuivant le dernier
affouagement*
En. 1473 , nouveau don gratuit délibéré par les
G
PART. I.
CHAP. II,-
T
roisiem *
EroayE.
�CsO
Etats eu faveur du Roi René. Toutes ces conceffions font faites- par les trois Ordres , fous les yeux
CHAP. II.
du Roi René lui-même , auteur de la Déclaration
de 1448. Comment a-t-on pu dire que la Noble fie
ne de voit pas délibérer fur l'impôt aiïis fur les
feux ?
*
Nous ne parlons pas ici des prétendus Etats de
1460, lors defquels la guerre de Naples néceffita >
Mémoire
fur la contri dit-on, /’ établissement d'un dixième fur tous les fruits.
bution des
trois Ordres, Le Peuple , ajoute-t-on , ne fu t pas le feul à le payer.
fag. a*.
Trairé dn
Les deux premiers Ordres en payèrent leur contingent
Droit public
de Provence ,
comme lui. Si l’obfervation étoit exafte en fa it, que
Fal9
pourroit-il en réfulter ? Rien de plus , fi ce n’eft
que les deux premiers Ordres , encouragés par les
lettres & les promettes du Duc de Calabre, qui manGaufridi, doitque la Province deviendroit toute d'or, ou enflam
PART. I.
tom. i , pag.
3M*
més par une brillante viftoire que ce Prince venoit de
remporter, auroient donné leur confentement libre
& volontaire à cette impofition , comme ils en avoient
ufé en 1 3 7 4 , lorfque la Province étoit confternée
par l’annonce de l’invafion des Bretons , & dans
tous les tems des troubles occafionnés par la révolte
du Vicomte de Turenne. Pourroit-on trouver aytre chofe dans ce fait, s’il étoit tel qu’on le pré
fente, que la [reprodu&ion de l ’exception portée
(5 0
dans la Déclaration de Louis II ? Les deux pre
miers Ordres n’auroient contribué qu’enfuite de leur
confentement volontairement délibéré , voluntariê
confenfijjent.
Mais c’eft fans garant, & contre la vérité, qu’on
a dit que les trois Ordres avoient contribué dans
cette occafion. D ’abord on ne voit pas qu’il ait été
tenu des Etats à l’époque de 1460. 20. On voit
bien moins encore que l’impôt du dixième fur tous
les fruits y qui, fuivant les Hifloriens , fut établi
pour une année , ait frappé fur les biens exempts,
& moins encore fur les biens nobles. On trouve
dans Gaufridy la lettre écrite dans cette occafion
par le Duc de Calabre , au Chancelier Des M artins,
Il lui recommande d ’ em p lo y e r f e s cinq f e n s de nature
pour faire la levée , & quil riy ait ni Serviteurs , Mar
chands ,n i Comperes ( 1 ) d'épargnes. Mais y a-t-il rien
dans ce trait qui puiflê indiquer les fonds non fou
rnis à l ’impôt réel? Ces traits, ces défignations n’indiqueraient-elles pas plutôt que l ’impôt ne devoir
frapper que fur les rotures ?
;
•Y,
( 1 ) Suivant l’Auteur du Droit public, les Comperes étoient les
favoris, &: par conféquent les Nobles. Ils ne font pourtant pla
cés. dans le texte, qu’à la fuite des Serviteurs & des Marchands.
G ij
�1
Voudroit-on fe prévaloir encore de ce que nos
PART i
Hiftoriens nous difent que
l’impôt
courut toute la
CH A P. H.
*
r
Province? Cela peut-il dire même indire&ement qu’il
pafr7i"dl’ frappa fur les fonds nobles? N ’eft-il pas prouvé
pagftrAd*muî' d’ailleurs qu’il n’étoit levé que fur les Communautés ?
Bouche, tom.
^
.
i>pag*4*g Celles de Gap oc d’Arles prétendoient avoir un
privilège. La première n’en avoit point; fes titres
Guipape, furent trouvés infuffifans. Un de fes Adminiftrateurs
«jacft. jji.
a
.
fut même contraint par corps. Les titres de la ville
d’Arles étoient au contraire très-bons. Il y fut fait
droit. Ses habitans furent déclarés exempts-: or, fi
cet impôt ne tomba pas même fur les villes qui
produifoient des titres d’exemption , qui pourra pré
fumer qu’il ait frappé fur les fonds nobles & féo
daux ( i ) ?
Un autre titre nous refie à difcuter fur cette
troifieme époque. C ’eft la déclaration des Commif( i ) Il eft clair d’ailleurs que cet impôt de 1460, qui ne frappa
pas fur les Fiefs, avoix
été
perçu fans confulter les Etats. Ils s’en
plaignirent en 1480 -, & Charles d’Anjou, le dernier de nos Com
tes , convint alors qu’il étoit illégal, en confirmant le privilège
antique & conftitutionnel qu’avoient les Provençaux , de ne A p
porter d’autre impôt que celui qui auroit eu pour bafe le confen-
volontaire
Statuvm*
tement
des Trois-Etats,
cum confilio & ajjenfu Trium
(53)
faires qui procédèrent à l’affouagement foleinnel de
"p a r t . 1.
1471. Cette déclaration efl rapportée dans le Nou CH AP. H.
veau Commentaire fur nos Statuts. Elle rentre dans Tons, t ,
pag. 4 g.
les principes 8t dans les difpofitions de l’Edit du
Roi René , donné en 1448. Ce titre devenu conftitutionnel par une foule de Jugemens exécutifs &
déclaratifs , décide que les Nobles , c’efl>à*-dire les
propriétaires des F iefs, doivent contribuer pour les
biens d’ancienne contribution qu’ils ont acquis par
contrat volontaire ou par fucceflion. Ils ne dévoient
donc pas entrer en contribution pour les biens qui
n’avoient jamais été détachés de leurs Fiefs. Il y
efl ajouté que la prérogative féodale doit fe com
muniquer également aux biens d’ancienne contribu
tion que les Seigneurs ont acquis par droit de F ief,
même par droit de prélation féodale ; ce qui fuppofe & confirme toujours mieux l’application de
cette même prérogative fur les biens originairement
nobles, & qui ne font jamais fortis du Fief. C ’eft
.cependant cette prérogative qu’on a le courage de
contefler aujourd’hui.
T el étoit l’état de nos titres & des droits de tous „
les Ordres lors de l’union de la Provence à la Cou
ronne de France. C ’eft dans ces circonftances que
les Provençaux fe donnèrent, d’un coeur franc &
1
�•%
PART. I.
ôHAP. II.
■
( 54)
libre , fous la réferve des droits , franchifes , libertés
& prérogatives du Pays & de tous les Ordres qui
le compofent.
Il reftoit un doute dans L’état des chofes , tel qu’on
vient de l’expofer d’après les titres. La prérogative
des biens nobles &: féodaux n’étoit pas conteftée ;
on peut même dire qu’elle ne l’avoit jamais été. En
1448 , les habitans de Barbentanne ne demandoient
à faire partager l’impôt réel aux Seigneurs, que
quant aux biens d’ancienne contribution qui leur
étoient revenus à titre ordinaire de contrat ou de
iucceffion. Encore ne le demandoient-ils que pour
la conftruftion des remparts. Le Roi René fournit
les biens d’ancienne contribution, non à toutes les
dépenfes, mais feulement à celles de la communion mu
nicipale , telles que la conftruftion & les réparations
des remparts, des fontaines & des chemins & autres
de' cette efpece. Son Ordonnance différoit en cela
de celle de Louis I I , qui ne renfermait aucune diftinâion entre les biens nobles & ceux d’ancienne
contribution , & qui déclaroit les uns & les autres
immunes de toutes contributions quelconques, tant
de celles concernant la charge royale, que de celles
concernant l’intérêt de la Municipalité : in donis>fubfidiis y talhiis & impofitionibus nobis conceffis v & aliis
oneribus incumbentibus univerfitati.
Bt ;i
( 5s )
Les CommifTaires-AfFouageurs de 1471 allèrent
encore plus loin que le Roi René. Ils déclarèrent
les biens d’ancienne contribution ^ fournis à toutes
les charges , foit royales , foit municipales. Mais ce
n’étoit là qu'une déclaration, un vœu donné par les
Commiflaires - AfFouageurs , qui n’avoient aucun
pouvoir pour établir une loi quelconque. Audi
donna-t-elle jour à une conteftation qui divifa les
Ordres du P a y s, & dont les malheureux germes
fubfiftent encore dans quelques efprits, quoique tous
les débats auxquels la prérogative féodale pouvoit
donner lie u , ayent été terminés depuis long-tems
par les titres les plus authentiques & les plus nom
breux.
Ceci nous jette dans une quatrième &c derniere
époque, dont nous avons à parcourir les principaux
traits. Elle embraffe depuis la réunion jufqu’à nos
jours.
PART.
I.
CH AP. U .
QUATRIEME
Ici les titres font encore plus lumineux & plus Epoque.
décififs ; & fi on oppofe de la part du Tiers des
exemples de contributions faites par la Nobleffe , ces
exemples font rares ; ces contributions font toujours
volontaires , & relatives aux malheurs des tems dans
lefquels elles ont été confenties. Tous les Etats,
�PART. I.
CHAI». 11.
( 56 )
toutes les délibérations même du T ie r s , tous les
titres judiciaires & autres de toute efpece, s’unifient
pour établir invinciblement les droits & l’immunité
des biens féodaux.
On ne voit pas qu’il ait été fait des demandes
de la part des Rois de France jufques en 1503.
Louis X II demanda quinze florins par f e u , & l’im
pôt fut accordé.
En 1520, les Etats repréfentent que par les Sta
tuts & Déclarations des Rois , Comtes de Pro
vence , les Seigneurs ne doivent aucune taille des
biens revenus au F ief par le déguerpiflement des
emphitéotes , & par le refus d’acquitter ou de
payer les devoirs feigneuriaux 3 que néanmoins
les Maîtres Rationaux pourfuivent les Seigneurs
pour la taille de ces domaines, ce qui eft évidemment
injufte S t déraifonnable. Les Etats , c’eft - à - dire ,
tous les Ordres requièrent qu’zV foit mandé aux Maî
tres Rationaux yfous grojfe peine , & avec la claufe
irritante, de ne commettre lefdits abus > & de laijfer
les Seigneurs en paix & liberté. Les Maîtres Ratio
\-
r-i
naux font entendus, & il efl: ordonné que le Statut
fera obfervé félon la forme & teneur de Varticle. La
prérogative féodale efl donc reconnue, même quant,
aux biens d’ancienne contribution rentrés dans le
Fief
(57)
Fief. On étoit par conféquent bien éloigné de la
contefler pour les biens nobles
féodaux (1 ).
En 15 3 6 , on propofe, de la part de François
Premier, la levée de 8000 liv. Elle efl d’abord refufée , & enfuite acceptée. L ’aflife s’en fait par les
Etats, fur les feux, à raifon de quatre florins neuf
fols par feu. On y fait une nouvelle propofition de
lever cinq mille cinq cens hommes à pied. La levée
& la folde en font rejettées fur les feux , à raifon
de deux hommes par feu. Les Etats de 1538 accor
dent quinze florins par feu. Ceux de 1539 délibè
rent le même don.
sv—
PART. I.
CIIÀP. 11.
(1) En 1520, tout l’impôt Ce réduifoit à quinze florins par
feu. Ils furent portés à vingt-huit, attendu les dons que les Etats
voulurent faire au Comte de T en d e, grand Sénéchal, qui leur
préfenta fon fils le Comte Claude de Savoie. O r qui payoit cette
impofition, fi ce n’eft les feux? Bouche, tom. 2 , pag. 537; les
Mémoires de Valbelle , rapportés dans les additions fur l ’Hifloire
des troubles de Provence, par Louvet, part. 1 , pag. 414. 11 y
efl: dit que plufieurs Seigneurs pouffèrent à cette innovation, &:
qu ’il ne leur en coutoit rien , parce que les feux fupportoieqt tout.
Cette réflexion n’a rien de bien exaél, parce que les Seigneurs
& tous les autres fupportent l'impôt à raifon de ce qu’ils poffedent far la maffe des feux ou des rotures. Mais ce fait hiflorique
ne prouve-t-il pas que l’impôt n’étoit fupporté que par les feux?
H
1.t r. 'i
/
�( 5» )
En 1540, on impofe trois florins par fe u , com
pris ce qui a été impofé pouf YEtude ( l’Univerfité de la ville d’A ix ) tant pour les dépenfes déli
bérées par les Etats , que pour celles des cas ino
pinés \ & conclufivement , y eft - il d it , ont lefdits
Etats y d*un commun accord , & fans aucune difcrépance, accordé libéralement le don quil a plu au Roi
leur faire demander , qu'efl de quinze florins pour
chacun f e u . C ’étoit donc le vœu de tous les Ordres
qui faifoit l’aflife de l’impôt fur les feux.
En 1541 , le Roi demande la levée de deux mille
hommes. Les Etats, c’eft-à-dire, les trois O rdres,
accordent pour cet objet , fept florins un fol par
feu.
En 1542, on impofe un florin par feu pour les
dépenfes fk cas inopinés. Dans la même année , les
Etats tenus en Novembre, impofent quatre florins
par feu y pour les dépenfes délibérées & les cas ino
pinés ; & de plus, ils accordent le don de quinze
florins par feu y demandé par le Roi.
En 1544, on impofe dix florins par feu pour dé
penfes délibérées & pour les cas inopinés. Dans la
même année, les Etats tenus en Décembre délibè
rent le don de quinze florins par feu.
T el eft le tableau fidele de tous les Etats con-
.
(59)
voqués & tenus depuis l’union à la Couronne , jufqu’à l’époque de 15 4 9 , à laquelle il faut s’arrê
ter. Tous les impôts y font délibérés par les trois
Ordres. Ils font tous rejettés fur les feux, & l’on
n’y trouve aucune trace d’impôt réel aflis fur les
fonds nobles, St fur ceux de l’ancien domaine de
l’Eglife.
Mais il exifte dans l’Hôtel-de-Ville un Livre rouge y
contenant des Délibérations prifes par des Aflemblées intermédiaires , defquelles il réfulte, à ce qu’on
prétend , que les Nobles & les Bénéficiers ont fourni
des contributions depuis 1526 jufqu’en 1529.
Nous ne dirons pas que ce livre rouge eft fans
authenticité ; que les Hiftoriens ne font aucune
mention des Alfemblées qui s’y trouvent mention
nées. Mais nous obferverons que le tems fur lequel
nous raifonnons, préfente la conjon&ure la plus
calamiteufe pour le Royaume de France , auquel la
Province étoit alors unie , c’eft-à-dire , le tems de
la prifon de François Premier. La funefte journée
de Pavie eft placée par l’hiftoire à l’époque du 24
Février 1525. Tous les Ordres s’émpreflêrent alors
de faire éclater leur zele par les plus grands facrifices • 8t néanmoins les Délibérations prifes dans
cette funefte époque , ne fervent qu’à prouver touH ij
�jours mieux
chat, n
O )
combien la prorogative féodale étoit
re/peâée, même dans ces tems difficiles.
Dans le mois de Juin 1525 , 011 délibéré la levée
des gens de guerre, & cette dépenfe eft rejettée
fur les feux. Il falloit fournir un homme en armes
de quatre en quatre maifons. T el fut le vœu de
l’Aflèmblée, fùivant ce qu’on en rapporte dans les
pièces juftificatives tirées du livre rouge. Si les N o
bles avoient été compris dans l’impôt , il nous fuffiroit
de dire qu’il le voulurent, comme ils l’avoient voulu
dans les tems de la guerre du Vicomte de Turenne ;
que les circonftances étoient encore plus impérieufes
qu’elles neTavoient été auparavant. Mais nous ajou
tons que les fonds nobles 11’entrerent alors dans aucune
efpece de contribution. Il fut dit feulement que tous
& un chacun des Nobles de ce Pays doivent fe mettre
en armes 6* équipage. T el eft le premier devoir de la
NoblefTe. Elle fe fera toujours une gloire de le
remplir dans les circonftances eflentielles, pour le
fervice du Souverain , le foutien du Trône , & la
défenfe de la Patrie. Mais peut-011 induire de là que
les fonds nobles payèrent alors des contributions ? On
Mémoiref. r convient implicitement dans le premier Mémoire fait
tion,pag.17. pour le Tiers, que la NoblefTe n’en fournit aucune
& xî,
en argent. L ’impofition pécuniaire fe fit par feu ,
(61)
comprenant les biens eccléfiaftiques, fans en excepter
même l’ Ordre de Malte. L ’Eglife ne fournit-elle pas ,
peu de tems après, des contributions, même fur fon ca
pital, pour la rançon du Souverain ? Mais ce fait pourroitr-il fournir quelque induCtion contre l’exemption
même des fonds de l’ancien domaine de l’Eglife ,
& peut-il avoir quelque influence fur la préroga
tive féodale à laquelle il eft abfolument étranger ?
La délibération de 1526 , également tirée. du
livre rouge , & prife dans les mêmes circonftances ,
reproduit l’impôt des feux , la levée & folde d’un
homme armé de quatre en quatre maifons , le vœu
d’y faire contribuer Mejfieurs de VEgliJe: les Fiefs
n’y font point compris. Ils ont leur charge à part
dans cette conjoncture funefte où il s’agiffoit de la
défenfe du Pays : on délibéré que les Nobles du Pays
tenant Fiefs & Arriéré-fiefs fe tiendront prêts en
armes.
Deux vœux d’Aflemblées, & non d’Etats (car tout
ce qu’on tire du livre rouge n’eft qu’Aftemblées in
termédiaires & non délibérations d’E t a t s ) , deux
vœux furent encore formés en 1528. Le premier
eft du 10 Janvier: on n’y trouve rien qui puifle
influer fur ce qui fait la matière de l’examen aftuei.
Le fécond eft du 27 Janvier : il en réfulte qu’on
PART. I.
CHAP. II.
�demandent deux millions d’or ; que le Pays difoit
avec raifon , que la fournie étoit exorbitante. C ’étoit
probablement pour le paiement de la rançon de
François Premier. On obfervoit que le Pays étoit
conventionné & non taillable , & l’on avoit raifon.
Mais on n’en penfoit pas moins que la convention
fur les fubfides ne tomboit que fur les feux & non
fur les Fiefs. On obferva que le R oi ne pouvoit
pas établir un impôt ; que le Pays ne lui devoit
rien que les dons librement délibérés. On nomma,
dit le Mémoire fur la contribution des trois Ordres,
des Députés pour faire du mieulx que poffible fera à ce
fujety & d y faire contribuer les Nobles pour leur part.
Cela n’efl pas exaâ ; voici le texte : les Députés font
chargés de faire en ce cas du mieulx que poufjible fera,
en tant qiie touche le Peuple, AUSSI LES NOBLES , SI A
TELLE DÉPENSE LES NOBLES
SUR QUI
AUSSI
LA
CHARGE VIENT, VEULENT CONTRIBUER. Sans doute
la Nobleffe fe fera toujours une gloire de contri
buer de toute fon exiflence & de toutes fes facultés
à la délivrance de fon Roi : mais fon d ro it n ’ eft-il
pas bien reconnu par ce trait, qui r e p r o d u i t la teneur
de la Déclaration de Louis II. nifi voluntanè confentirentï Et fi dans ces tems difficiles la contribu
tion de la Nobleffe n’étoit regardée par les autres
(<>?)
Ordres que comme l’effort volontaire de fon ze le ,
quelle reffource pourra-t-il refier au Tiers-Etat pour
faire contribuer les fonds nobles aux charges réelles
de l ’Adminiflration courante ?
Ici fe termine la difeuffion des prétendus titres
contenus dans le Livre rouge. Nous reprenons la chaîne
de nos Etats.
Il avoit été créé des offices pour fuppléer à l’infuffifance des dons faits par la Province dans les
tems difficiles des guerres & de la prifon de Fran
çois Premier. Ces fortes de création, nous diton , n’ont été que des charges déguifées. L ’obfervation efl jufle. La création des offices n’efl dans
le fonds qu’un impôt. Les Etats de 1537 prouvent
que les Nobles payèrent deux mille écus , & Je Clergé
quatre m ille . Il exiftoit des Lettres obtenues fur ce
du Roi. La queftion de la contribution avoit donc
été décidée à cette époque , comme elle l’avoit été
précédemment en 1448. La N obleffe, alors plus
patriote que le C lergé, paya. La preuve en efl
dans les Etats de 1539. Telle efl l’objeftion dans
toute fa force & dans toutes fes parties : voici la
réponfe.
Il fut fait dans ce tems des levées énormes, occafionnées par les guerres, par la prifon de Fran-
part.
1.
CH AP. XX.
lbid. paj,
18 &
i?.
�■
,
"
v
•
"y
.
■,
/'
/
S/
(64)
PAR f. I.
CH AP. TI.
çois Premier , 8c par les malheurs des tems qui réduifirent les habitans du Pays aux dernières extrêmités. L ’hiftoire le prouve , 8c les Délibérations
des Etats contemporains ne permettent pas d’en dou
ter. Avant 1 5 3 7 , il avoit été créé des Offices qui
furent réunis par le Pays. Les feux en fupporterent la plus groflè portion , comme de raifon. Le
Clergé fut cottifé pour quatre mille écus ; les N o
bles en offrirent deux mille. On fent bien que la con
tribution de ces derniers ne pouvoit être que v o
lontaire. Les principes locaux fuffiroient pour le
prouver. Les Affemblées l’avoient reconnu en 1528.
En faut-il une nouvelle preuve ? On la trouve dans
Fol.
69
les Etats de 1539* où il eft délibéré défaire rendre
compte à certains Gentilshommes , ci - devant députés
pour exiger l’argent des N o b le s tpi ils a v o ie n t A C C O R D É
fournir pour le rembourfement des Offices. On v o it,
à tous ces différens traits , de quel poids peuvent
être les preuves que nous avons à réfuter. Les No
bles avoient donc confenti la contribution de deux
mille écus, lors de l’extin&ion defdits Offices. C ’eft
d’après le confentement de tous les O rdres, que le
Roi avoit laxé des Lettres de contrainte , dont les
Etats de 1537 délibèrent l’exécution 8c la pourfuite.
Ce
T
(6 5 )
Ce n’eft donc qu’en fe permettant d’imaginer, ce
que les textes 8c les faits connus réprouvent, qu’on
a pu parvenir à créer des exemples contraires à toutes
nos Loix. Devoit-on préfenter de {impies Lettres
exécutoriales d’un voeu librement porté par les No
bles , comme un Jugement rendu par le R oi, à
l ’effet d’anéantir la prérogative féodale , inébranla
blement établie fur tous les titres de notre Conftitution ?
Et par où confte-t-il que la Nobleffe donna ces
deux mille écus , comme contrainte 8c forcée (1 ) ?
Quel eft le Jugement qui l’auroit condamnée làdeffus , qui même auroit pu la condamner ? Par quelle
inconféquence fe feroit-on même permis de vouloir
forcer la main des Nobles fur cet objet, tandis qu’en
1528 , quand il s’agifloit des deux millions demandés
pour la rançon de François Premier, les Aflèmblées
ne follicitoient la contribution des N obles, qu’autant qu’ils auroient voulu la confentir, dans le cas
où cette levée auroit eu lieu ? Mais peut-il refter
le moindre doute , quand on voit que les Etats de
1 5 3 9 , en mentionnant la contribution des Nobles
(.1)
Voyez ci-deffous,
part. 2 ,
chap.
S:
PART.I.
CH A P. II#
/
�N
( 66)
s— 555 aux deniers donnés, la préfentent comme ayant été
part, i
chap. h
•
J
Volontairement par eux confentie ? Et fa u t- il re
dire i c i , que rien n’eft plus frivole que les induc
tions qu’on a voulu tirer de l’énonciation de 1 a
caifle commune ? Qui peut ignorer , qui peut nier
que la caifle commune ôt des trois Ordres, n’a ja
mais été que celle des fe u x , pofledés par les in
dividus de tous les Ordres ?
Aufli ces mêmes Etats de 1 5 5 7 , defquels on veut
prendre droit, pour en induire que l’impôt pécu\
niaire étoit fupporté par la Noblefle , & qu’elle étoit
Foi. h v^. même jugée là-deflus, énoncent - ils une avance de
9000 liv. que le Souverain demandoit tout incon
tinent. Le Tréforier offre de la faire , pourvu que
les Députés des Communautés , préfens dans l’Affemblée , promettent de ratifier ôc de payer à cha
que quartier. Qui doit donc ratifier, fi ce n’eft
ceux qui doivent payer ? & qui doit p ayer, fi ce
n’eft les VilLes & Vigueries dont le Tréforier du
Pays exigeoit la ratification ? Mais il faut enlever
là-deflus tout prétexte de conteftation & de difpute. Les Etats délibèrent que la fomme fe lèvera
par fouage > c’eft-à-dire , par feu. Que peut-il donc
réfulter de ces Etats de 15 5 7 , fi ce n’eft une preuve
nouvelle & fans répliqué , comme toutes les autres ,
c 67 )
que l ’impôt réel fe levoit fur les feux, c’eft-à-dire,
fur les rotures ? On voit après cela , qu’on n’avoit
pas profondément réfléchi fur les Etats de 15 3 9 ,
quand on en a voulu faire fortir la preuve d’une
contribution forcée pour les Nobles. Ce qu’on en
rapporte dans 'le Mémoire fur la contribution, eft
exa<ft; mais on auroit dû s’appercevoir , i°. que cette
contribution étoit volontaire , puifque , fuivant les
propres termes du texte , les Nobles avoient accordé
de la fournir y 20. qu’en conféquence du vœu libre
& volontaire des Nobles , la contribution étoit de
venue forcée pour les particuliers , individuellement
liés par le vœu de leur ordre, & dont il falloit faire
cefler l ’injufte demeure, par les voies de droit. 3 \
On auroit dû voir fur-tout que , comme nous l ’a
vons déjà remarqué , ces mêmes Etats de 1539 por
tent , fuivant l’ufage , l ’afliete du don gratuit & de
toutes les autres dépenfes du Pays fur les rotures ,
conftitutionnellement repréfentées & défignées par
les feux. Ainfi , dans les teins difficiles de la prifon
de François Premier, 011 trouve une contribution
de deux mille écus , librement confentie par les
Nobles, tandis que tous les impôts pécuniaires tbmboient fur les feux. Comment imaginer que dans
ces tems mêmes d’extrême calamité, la prérogative
féodale n’étoit pas refpeélée ?
I ij
PART. I.
CHAP. II.
Pag. X9.
�(( 58 )
Si les principes en avoient été bleffés par des
faits 8c des exemples contraires , on diroit qu’il ne
faut l’imputer qu’à la force des circonftances ; que
ces tems d’orage 8c de calamité , joints aux malheurs
8c contrariétés des faifons atteftés par les Hiftoriens, ont dû produire pour un tems le fommeil
paflager des principes conftitutionnels. Alors l’Eglife
vendit une partie de fes biens, les Communautés
leurs domaines ; les Nobles, toujours en armes, furent
également écrafés 8c ruinés par la néceffité d’être
fans celle en activité pour la défenfe de la P ro
vince. Si donc la Noblefle avoit fait des contribu
tions dans ces circonftances, quand même elles auroient été forcées , elle diroit avec raifon qu’il faut
écarter ces exemples , remonter aux titres, Sc ne fe
régler que fur les faits qui précèdent, 8c fur ceux
qui fuivent cette funefte époque. Ce langage dans
cette hypothefe répondroit à tout.
Mais quelle doit être la force de la prérogative
féodale, quand on vient à confidérer qu’on ne
trouve dant cette époque de malheurs que la con
tribution de deux mille écus pour la part des N obles,
à l’extinftion de certains offices ; contribution ac
cordée 8c reçue comme volontaire, contribution dé
libérée 8c payée dans un tems où le Tiers-Etat recom
noiffioit que toute la charge de l’impôt devoit tom
PART.!.
ber , 8c où il la portoit fur les feux ?
CHAP. II.
D ’ailleurs, pourquoi ne pas ajouter encore que
dans ces mêmes Etats de 15 3 9 , on établit l’impolition de trois florins par feu pour les dépenfes du
P ays; qu’en outre ces Etats accordent, fans difcrépance & libéralement , le don gratuit de quinze flo
rins par feu ? Comment a-t-on pu fe permettre ridée
d’inftnuer qu’à cette époque la Noblefte étoit foumife à des contributions, 8c que la prérogative
féodale n’exiftoit pas?
Les mêmes réflexions fe préfentent avec plus de
force encore contre les induftions qu’on a voulu
tirer des Etats de 1541 , d’une Aflemblée de 1547,
8c du vœu formé par d’autres Etats en 1544, au
fujet de l’extinêfion du droit de latte. Tout cela
fe réfute aifement, quand on eft une fois inftruit
de l’état où fe trouvoit alors la Province , 8c de nos
Loix conftitutionnelles.
On voit qu’en 1541 le Roi demande qu’il foit
impofé pour lever deux mille hommes. Les Etats impofent fept florins un fol par feu pour le paiement de
ces deux mille hommes de pied. Q u’induire de ce
trait, ft ce n’eft que la levée 8c l’entretien des Sol
dats étoient fupportés par les feux ? Il eft dit dans
�( 7° )
ces mêmes Etats que chacun doit Ce mettre à fon
PART. I,
.
J
.
,
J
cHAr *n' devoir pour le fervice du ban & de l'arriere-ban , fuivant les lettres du Roi. La Noblefle n’a-t-elle pas
toujours dit & convenu que fon devoir étoit de
marcher en toutes convocations de ban & d’arriereban ? Telle eft fon obligation ' à raifon des Fiefs.
Comment donc a-t-on pu dire qu’à cette époque
de 1541 , les deux premiers Ordres furent chargés
du tribut militaire , tandis que la levée & l’entretien
des troupes furent clairement rejettés fur les feux?
pag 3®
. Dès-lors on n’auroit pas dû fuppofer que tous les
Ordres du Pays fupporterent le poids de la levée
de trois mille hommes dont ils avoient délibéré l ’en
tretien. C ’étoit le Pays qui levoit les troupes, qui
fupportoit la charge de l’entretien. Mais le Pays
étoit-il autre chofe que la malle des rotures repréfentée par la malle des feux ?
Il nous refte une derniere induéïion à réfuter.
Elle eft puifée dans le vœu des Etats de 1544 , fur
l ’extinéfion du droit de Latte. C ’eft un droit réga
lien qui fe leve fur tous les individus de tous les
Ordres. Il eût été jufte que tous les Ordres, euffent
contribué pour l’éteindre, d’autant que c’eft là une
preftation perfonnelle , fur laquelle les Fiefs n’ont
jamais eu d’exemption. Le projet de cette abolition
'
( 71 )
ne fut pas fuivi ; il eft inutile d’en rechercher la caufe ; <rw
Tm
sm
rr^
mais en fuppofant là-deflus le confentement de la CHAP/II#
Noblelfe , que peut - on en induire , & comment
pourra-t-on en faire fortir , de maniéré ou d’autre ,
la foumiftion des biens nobles à l’impôt réel & royal ?
Ne trouve-t-on pas ce fyftême invinciblement com
battu dans ces mêmes Etats de 1544? Il y eft quef- ^ ts^ 7 44,
tion de la Compagnie de Mr. de Lorges. Le Clergé
& le Tiers - Etat demandent qu’elle foit nourrie ,
félon le taux accoutumé, aux communs dépens du Pays,
de la fourniture faite par le Tréfbrier d’iceluij & de
ce qu'il exigera fur tout ledit Pays à raifon du fouage.
Ne fort-il pas delà des traits de lumière fur les
fauffes opinions qu’on a tenté d’accréditer? Qui
fourniftoit donc alors la levée 3c i ’entretenement des
Troupes? C ’eft le Pays. Et qu’étoit-ce que le Pays?
Les terres affouagées , les feux , les rotures poflèdées par tous les Ordres , & dont la charge étoit
réglée par les Etats ; & delà vient qu’on trouve
dans ces mêmes Etats de 1544, l ’oêlroi au Roi de
quinze florins par feu. On y trouve encore l’impofition de dix florins par feu , pour fournir aux icpenfes délibérées & aux cas inopinés pendant Vannée.
On a pourtant cité ces Etats comme un monument
fervant à établir le prétendu droit de faine entrer
les fonds nobles en contribution.
�( 7 O
rART. I.
CHAP, II.
Ainfi Ton voit que depuis l’union jufques à l’é
poque de 154 9 , les feux fupportoient tout, en con
formité des Loix 8c Statuts du Pays ; levées, en
tretien des Troupes, frais de garnifons , uftenfiles,
dépenfes intérieures, cas inopinés , frais d’Adminis
tration , tout étoit rejetté fur les feux , fans aucune
contradiction de la part des Communes.
Il ne pouvoit exifter de conteftations que fur
les biens d’ancienne contribution. Ces biens aflis
dans les Fiefs , avoient été déclarés immunes par l’Edit
de Louis I I , qui portoit fans exception 8c fans diftinûion , fur toutes les levées 8c contributions quel
conques. Les Communes revinrent à la charge fur la
contribution de ces mêmes biens. Le Roi René les y
fournit en 1448, quant aux ponts , fontaines , chemins
8c remparts. Ce fut une exception à la réglé, 8c
qui plus eft, une exception limitée aux objets dé
lignés par la Loi , mais une exception qui ne fervoit qu’à rendre la prérogative féodale plus impofante , quant aux biens qui n’étoient jamais fortis
du Fief. En 1471 , les Commifîàires - Affouageurs
allèrent encore plus loin que l’Edit du Roi René. Ils
déclarèrent que les biens d’ancienne contribution,
dévoient payer [les charges réelles, à moins qu’ils
n’euflent été réunis par droit de F ie f, le droit
de
( 7î )
de prélation compris. Ce n’étoit là qu’une déclara
tion , 8c non une décifion judiciaire ou de légiflation y les Nobles perfifterent toujours à foutenir que
les biens d’ancienne contribution qu’ils poffédoient
dans leurs Fiefs y ne dévoient pas contribuer.
Telle fut la fameufe conteftation qui donna lieu
au grand procès fur lequel font intervenus les Ar
rêts de 15 4 9 , de 15 5 6 , 8c finalement celui de 1702.
Ces Arrêts , connus de tout le monde, font vraiment
eonftitutionnels. Il en eft réfulté, en faveur du
T ie rs-E ta t, de nouveaux droits qu’il n’avoit pas
auparavant.
On dit que ces Arrêts font conftitutionnels. Ils
fe lient en effet avec la Conflitution concernant la
prérogative féodale. Ils en pofent les bornes ; ils
en fixent l’étendue. Ils la fortifient dans les cas
non exceptés.
On dit que le Tiers-Etat a gagné du terrein en
force de ces Arrêts. Il eft définitivement décidé'
que la prérogative féodale ne tombe que fur les
biens nobles 8c féodaux non féparés du F ief, ceux
qui y font entrés par droit de F ie f, 8c ceux qui
ont repris en quelque forte leur qualité féodale par
les Loix 8c l’équilibre de la compenfation ; tandisque par les Lettres de Louis I I , tout, étoit noble:
K'
�( 74)
fans diftin&ion ; tandis que par la Déclaration du
Roi René, confirmative de celle de Louis I I , les
biens d’ancienne contribution n’étoient contribua
bles que pour les ponts , les remparts , les che
mins 8c les fontaines , attendu la faveur de tous ces
objets.
Enfin les Arrêts ont décidé que les biens réacquis ■
par les Seigneurs dans leurs F iefs, en force du
droit de prélation , quoique réunis par droit de
F ie f, conferveroient la tâche de roture , fauf le
droit de compenfation ; quoique la Déclaration du
Roi René , 8c celle des Commiffaires-Affouageurs
donnée en 14 7 1, eufîênt décidé le contraire, en ap
pliquant nommément la prérogative fur les biens ren
trés dans le F ief à titre & par droit de prélation.
Tels font à préfent nos droits 8c nos ufages. Ils
n’ont pas varié depuis l’époque de 1 5 56. Le Tiers-Etat
a obtenu tout ce qu’il defiroit, au-delà même de ce
qu’il pouvoit prétendre , dans le grand procès des
tailles. Il demandoit alors l’exécution de l’Edit du
Roi R en é, 8c de la Déclaration des CommiffairesAffouageurs.
Il reconnoifloit la force 8c l’authen
ticité de la prérogative , quant aux biens nobles 8c
non détachés du Fief. Ce fait eft effentiel. Les Com
munes étoient bien éloignées de fe permettre alors
( 75 )
l ’ambition de répartir les charges fur les biens no
bles. Ce procès , dont les livres nous ont confervé
tous les moyens , eft un monument curieux , 8c qui
fournit les plus grandes lumières , foit fur les prin
cipes de notre Conftitution , foit fur l’importante
matière des contributions. Toutes les perfonnes
juftes qui feront bien aifes de s’inftruire , n’ont befoin que de réfléchir fur l’objet de ce procès , &
fur les moyens de défenfe du Tiers-Etat. La queftion commença par les biens rentrés dans le F ief
par droit de prélation. Les Commiffaires décidè
rent que ces biens d’ancienne contribution dévoient
être frappés de roture, quoique rentrés par droit
de Fief. Le Tiers-Etat obtint enfuite des Lettres
patentes , portant que les biens & héritages ruraux
d’ ancienne contribution y en quelques mains qu'ils fnffent advenus , par acquifition , confifeation , fuccefjion
ou autrement fer oient & demeurer oient contribuables
aux tailles & autres charges ordinaires & extraordi
naires j comme ils étoient auparavant.
Ainfi le Tiers-Etat , en dirigeant fa prétention
vers l’objet de foumettre aux charges , tant ordi
naires qu’extraordinaires , les biens 8c héritages d’an
cienne contribution, convenoit de la pleine 8c en
tière immunité des biens nobles 8c féodaux.
K ij
PART. 1.
c h a p . j r.
Papon, A r
, liv. 5 ,
lit. i i , n .
3 9 »où les raifons des par
ties font rap
portées dans
leur entier.
r ê ts
Nouv. Com
ment. du Sta
tut, tom. i ,
Pag. 66.
�PART. I.
CHAP. II.
(?6)
L ’aveu du Tiers-Etat étoit encore mieux déve
loppé dans fes défenfes : Outre plus y y eft-il d it,
ejl vrai qu en la particulière defcription faite en chacun
lieu, n ont point été compris les fonds que lors tenoient
en Fiefs les Nobles ayant Jurifdiclion, qui jamais n a voient été contribuables aux tailles y ains feulement les
héritages & biens roturiers. On voit enfuite que les
Etats de Provence avoient délibéré d’obtenir des
Lettres pareilles à celles que les Etats de Languedoc
avoient obtenues, excepté les gens Nobles & de Juftice pour le regard de ce quils tiennent en F ie f Le
Défenfeur de Rians & fa Vallée ajoutoit que Vim
munité compétoit aux gens d'Eglife , de Noblejfe &
de Jujlice y que pour le regard des biens féodaux, J ont
les parties d'accord...... que tels biens ne font taillablés y & qu'en Provence celui qui tient un F ie f noble
ne paye ni taille ni fouage. Le procès étoit donc
concentré dans le point unique de favoir fi les biens
d’ancienne contribution dévoient demeurer contri
buables dans les mains du Seigneur. Le Tiers-Etat
d’aujourd’hui a-t-il donc plus de lumières fur la
Conftitution que n’en avoit le Tiers-Etat d’alors;
& ce qui étoit v ra i, confiant, indubitable, convenu
à cette époque , a-t-il aujourd’hui changé de nature,
au point d’être confidéré comme un état d’abus ÔC
(7 7 )
d’ufurpation ? Si nous avions continué de vivre fous
le régime inconfiitutionnel de l’Adminiftration in
termédiaire y qîi n’auroit pas formé des doutes fur
la prérogative féodale conftamment reconnue & refpeftée jufqu’à préfent. Les biens nobles pourroientils donc être affervis & devenir contribuables, parce
que notre régime s’efi remonté fur fes vrais prin
cipes ?
L ’Arrêt de 1556 déclara nobles & féodaux tous
les biens que les Seigneurs poffédoient alors. De là
ceux qui font fortis du F ie f après cette époque font
entachés de roture, qui ne peut s’effacer que par
la voie de la compenfation. On n’en excepte que
les biens rentrés jure fe u d i, c’eft-à-dire , par déguerpifiément ÔC confifcation ; car il efi décidé par les
mêmes Arrêts que le caraètere de roture refte fur
les biens rentrés par droit de prélation, dont on a
confidéré l ’exercice comme volontaire. Le TiersEtat , nous le répétons , a donc obtenu tout ce qu’il
demandoit, & même au-delà.
Mais tout cela ne renforce-t-il pas la prérogative
féodale? Ce droit antique, lié avec la fubftance &
l’origine des Fiefs , ce droit établi fur tous les
titres de notre Confiitution, 11e prend-il pas de
nouvelles forces dans l’aveu confiant du Tiers-Etat?
PART. I.
CHAP. 11.
�PART. I.
CHAP. II.
Tapon
ubi
fu fr k .
>
( 78 )
On fentit en 1556 combien il eût été itijufte &
contraire, tant aux titres qu’aux principes de notre
Conftitution, de faire tomber en roture tous les
biens qui avoient été détachés du F ie f, St qui y
y étoient enfuite rentrés. De là l’Arrêt fit une compenfation générale fur tout le paffé. Il déclara no
bles & féodaux tous les biens que les Seigneurs
poflédoient à cette époque \ 8t qu’il nous foit per
mis de le dire en paffant : le Tiers ne fut certai
nement pas léfé par cette difpofition ; car on re
marquent alors de la part de la Noblefle , que les
feux avoient beaucoup plus gagné que perdu de
puis 1471 , & que les Seigneurs avoient aliéné plus
de domaines qu’ils n’en avoient acquis. Quoi qu’il
en fo it, cet Arrêt, 8t tous ceux qui l’ont fuivi ,
prononcent à double titre la prérçgative des F iefs,
puifqu’ils ne font tomber en roture que les biens
qui fe trouvoient hors du F ief en 15 5 6 , ou qui
en font fortis après , & que d’autre part en fourniflant les moyens de compenfer les biens fortis
du F ief après cette époque, ils donnent à conclure
qu’il n’exifte pas même de prétexte pour contefter
l’immunité des fonds & domaines qui n’en ont jamais
été démembrés.
Nous n’entrerons pas ici dans le détail de tous les
/
Arrêts, tant généraux que particuliers, qui fervent
à prouver
confirmer le droit conftitqtionnel des
biens féodaux. Il nous fuffit d’avoir obfervé que le
droit de compenfation ( 1 ) & tous les Arrêts auxquels
il a donné lieu , en font encore tout autant de preuves
frappantes. Ce droit établi par l’Arrêt de
aboli cent dix ans après par celui de 1666, rétabli
1
en 1668 , reflferré à cette époque, afîervi dans fon
exercice aux formalités les plus gênantes & les plus
coûteufes par celui de 1702; ce droit, dont une
( 1) Ce Droit particulier à la Province, n’efl: qu’une fuite du
principe particulier
St
local qui fait tomber -en roture les biens
démembres du Fief fans Juftice. Ce droit n’intérefle en aucune
maniéré les Villes royales. Les Communautés feigneuriales s’en
plaignent comme d’un abus. Elles peuvent y gagner
perdre. Tous les doutes font pour elles
St
St
jamais y
contre les Seigneurs,
dans l’exercice de ce droit, qu’on ne peut confidérer que comme
le germe funefte d’une foule de procès. O11 pourroit s’arranger
Ià-deflus , St fe remettre fous l’empire de la Déclaration de 1 666 ,
follicitée par le troifleme Ordre , St que la Noblefle parvint à
faire révoquer par l’Arrêt de 1668. Les Communautés feigneu
riales ne doivent pas ignorer que la Noblefle auroit donné là-deflus
les plus grandes facilités, St que par une de ces contrariétés aux
quelles les Adminiftrations fucceflives font fl fouvent expofées,
l’Adminiflration des feux n’a pas voulu que ce projet fut confommé.
PART. I.
CH^P. II.
�(S°)
foule de familles & de Communautés ont à déplorer
p a r t . I.
eua p, H, I’exiftence , n’a d’autre objet que celui de rendre
aux biens fortis du F ie f, 8t qui font rentrés dans
les mains du Seigneur , cette même prérogative qu’ils
n’auroient jamais perdue, s’ils n’euftênt été démem
brés, Ce droit n’exifte donc que pour prouver que
les biens nobles non fortis du F ief doivent jouir
de la prérogative , puifque ceux qui en ont été
féparés, peuvent la reprendre par la voie de la
compenfation. Tous les* Arrêts , tant généraux
que particuliers , qui font furvenus jufques à nos
jours fur la compenfation, ont été rendus, fur ce
principe. De là , la maxime que les biens qui font
dans le F ief & Jurifdiftion, font cenfés être de
M o u r g u e s , l ’ancien domaine du F ie f, & par cette raifon ils font
PaS 55«Le N ou re au
préfumés nobles 8c féodaux, tant qu’on n’en prouve
C o m m e n t â t,
pag. X6j ,
pas la roture. De là , notre principe antique & aCtuel
tom. i .
B o n ifie ,
que les Fiefs inhabités n’étoient point affouages ,
t om . 4 , li v .
3 Ktir. i 3 ,
chap. 3.
vu qu’on regardoit tous les biens comme pofledés
N ou ve au
Com m ent,
t om . 1 , pag.
par les Seigneurs en nobilité. Ces maximes & tant
d’autres que nous pourrions invoquer, que les Ju-
167.
rifconfultes locaux n’ont jamais celle de refpefter,
que les Etats du Pays & les délibérations intermé
diaires ont conftamment reconnues, forment tout
autant de preuves &
de monumens, qui 11e per
mettent
(8 1)
mettent pas de douter de la prérogative féodale. *
Les Arrêts fucceflîvement rendus fur le droit de
forain CQmpétant au Seigneur , préfentent les mêmes
inductions. Ils roulent fur la queftion de favoir fi
les Seigneurs , pour leur biens roturiers, doivent
contribuer aux charges municipales , concernant les
avantages de l’habitation tant feulement : or cette
queftion ainfi pofée , ne donne-t-elle pas à conclure
qu’ils ne font contribuables en aucune maniéré , quant
* aux biens nobles ?
Que 11e dirions-nous pas encore pour l’établiflement de ce principe local 8c couftitutionnel ? O11
n’a qu’à voir dans l’Arrêt du 7 Février 17 0 2 ,1e
développement des moyens donnés à cette époque
au nom [du Tiers-Etat. Il ne demandoit que la
fuppreffion du droit de compenfation 8c de celui de
forain: Il convenoit donc de la prérogative des biens
nobles & féodaux. Il conteftoit fimplement le re
tour de cette prérogative, quant aux biens fortis
du F ie f depuis l’époque de 1556. Il convenoit en
core que les impofitions, foit ordinaires, foit ex
traordinaires , ne doivent frapper que fur les feux.
F a u t-il à préfent difcuter les Délibérations ,
tant des Etats que des Aflemblées intermédiai
res? Tout feroit dit dans un feul m ot, fi nous
L
PART, i/
CHAP. U ‘
�n’avions à réfuter des erreurs qu’on s’eft permifes,
en développant les moyens du Tiers-Etat. Il nous
fuffiroit de dire que toutes les Délibérations, de
puis i$$6 jufqu’à nos jours, préfentent la repro
duction du principe conftitutionnel, conftamment
reconnu. L ’impôt y eft aflis fur les feux ; 8c non
feulement l’impôt royal 8c réel , mais encore toutes
les charges 8c dépenfes , foit ordinaires , foit ex
traordinaires.
On nous oppofe les Etats de 1568 : il n’y a qu’à
les lire. On y voit l’impôt 8c toutes les dépenfes
ayant leur aftiete fur les feux. Le Clergé avoit ,
dit-on, contribué pour 12000 liv. , 8c la Nobleffe
pour fort fervice perfonnel. Mais qu’eft-ce donc que
le fervice perfonnel de la Nobleffe , fi ce n’eft le
fervice du ban 8c de l’arriere-ban ? Les Etats reconnurent donc à cette époque que les biens nobles
8c féodaux ne dévoient rien de plus. Cela ne réfute-t-il pas invinciblement tout ce qu’on a dit fur
cet ob jet, dans le Mémoire fur les contributions ?
Les Etats de 1568 impofent quatre florins quatre
fols par feu pour la folde de la Gendarmerie, quinze
florins par feu pour don gratuit, trente-deux florins
par feu pour la folde de trois mille hommes accordés
au R o i, 8c feize florins par feu pour les cas ino-
pinés , qui comprenoient toutes les dépenfes inté_
rieures. Tout fut donc rejetté fur les feu x, par le PART-1CHAP IL
vœu délibéré des Etats. Cela ne répond - il pas à
tous les raifonnemens ? Et les faits ne font-ils pas
plus puiffans que les paroles ? Il eft même à remar
quer que les Etats convenoient alors que la levée,
entretien 8c folde des gens de guerre dévoient tom
ber fur les feux ?
Mais comment répondre à ce qu’on nous dit fur
les Etats de 1569? Un impôt fut établi fous le titre Ibid. pa g. 3 3.
de fubfide, fur le vin du Pays. Il ne pouvoit, diton , que concerner les deux premiers Ordres. Une
Aiïêmblée intermédiaire avoit délibéré d’y faire foumettre le Clergé 8c la Nobleffe. On en avoit même
chargé les Mémoires du fieur de Rogiers, député à
la Cour. Ce dernier avoit obtenu des Lettres pour
faire contribuer les deux premiers Ordres. Il en eft
fait mention dans les Etats de 1569. Le Clergé 8c
la Nobleffe y difent que ces Lettres ont été obte
nues fans délibération des Etats , par obreption, 8c
qu’elles ne font point vérifiées ; 8c fur ce les Com
munes fe font levées en haut , & ont crié a haute voix
qu elles approuvaient & ratif oient ledit article & Let-.
très fur icelui obtenues par ledit fieur de Rougiers à
leur proufit y & entendent qu elles feront entérinées &
�( 8 4 ) .
PART. I.
c h a p. ii.
mifes à exécution , de quoi ledit fieur de Rougiers en
a requis acte; & d'autant, eft-il ajouté, que fur ce
fait y a eu grande altercation auxdits Etats , riy a
été pajfé outre.
Le fieur de Rogiers é to it, comme on v o it, dé
voué au Tiers-Etat. Sa requifition pour l’intérêt de
cet Ordre , le prouve. La conduite qu’il avoit te
nue , le démontre bien mieux encore ; & cette con
duite efi: prouvée par pièces. Une délibération avoit
été prife en Décembre 1568 par une Affembl^p par
ticulière. Le Tiers y dominoit ; il avoit produit le
vœu de faire contribuer tant le Clergé que la Nobleflé , privilégiés & non privilégiés, à l’abonnement
de l ’impôt fur les vin*s. Il avoit été dit qu’on en
parleroit à la première générale Ajfemblée. C ’étoit
un préalable à remplir , avant de s’adrefl'er au R o i,
pour obtenir des Lettres \ & ces mêmes Lettres
avoient été rapportées par le fieur de Rougiers , fans
que les Etats euflênt délibéré |fur cet objet. L ’im
pôt étoit établi , & ne pouvoit l’être que fur le
produit des feux & des rotures. Les Eccléfiaftiques
8c les Nobles rfiavoient donc pas tort de s’en plaindre
(8 s)
Ordres. Ils rompirent l’AlTemblée par un mouvement approchant de la fédition.
1 1
^
p a r t . i.
Ch a p .
Mais les efprits fe calmèrent ; on entendit raifon
dans l’intervalle. Les, gens du Tiers-Etat compri- _
rent que les fonds nobles ne pouvoient être frappés
par la charge du fubfide fur les vins. En conféquence ils délibérèrent, fans contradiction , de rejetter fur les feux tant l’impôt ordinaire que celui
de fecours, s’élevant à zoooo liv.
La queftion revint néanmoins dans les Etats de
15 7 3 , qui reconnurent folemnel-lement que l’abon
nement du fubfide 11e devoit pas tomber fur les
fonds nobles ; quelques Communautés s’oppoferent
à ce vœu , qui n’en pafia pas moins comme Vœu
des Etats qui l’avoient délibéré , & qui ne l ’avoient
adopté que parce qu’il n’étoit en effet qu’une conféquence de notre Conftitution. Dès-lors on voit
dans les Etats de 1578 & dans tous les autres, que
l’impôt fur le vin eft réglé & levé à raifon de tant
par feu ( 1 ) .
(1 ) Il refaite des Etats précédens & de ceux de cette époque,
dans les Etats de 1569. Les Députés des Commu
nes , dans ces derniers Etats , n’avoient rien de fo-
les, T oulon , Hieres & autres, prétendoient a v o ir, par Lettres
lide à répondre aux obfervations des deux premiers
nos Rois ou de nos anciens Souverains, le droit exorbitant 8c
que quelques Communautés , telles que celles de Marfeille , d’Ar
de
ii.
�'( 8 6 )
Qu’on dife à préfent que le fort emporta le foible.
Nous nous contenterons de répondre que l’impôt fur
le vin ne portoit pas, 8c ne pou voit pas même
pgrter fur les fonds nobles ( i ) . Le vœu de le rejetter fur les feux, ce vœu porté dans les Etats 8c
par tous les Ordres du P ays, devoit d’autant plus être
refpeété , qu’il efl de plus foutenu par une poffeffion paifible 8c confiante de plus de deux fiecles.
Il faut encore faire deux obfervations fur cet objet.
i°. En demandant que les Nobles contribuaflênt à
l ’impôt fur le v in , les Communes convenoient de
la prérogative féodale fur tous les autres objets ;
2°. ce ne fut qu’avec connoiflance de caufe 8c fur
conteflation mue là-defïus, qu’il fut déterminé , dans
le fein même des E tats, 8c par un vœu réfléchi ,
non confîitutionnd, de ne pas contribuer à l’impôt fur les feux.
Cela peut donner la clef de quelques Délibérations qui condamnent cette exemption réprouvée par les principes de d ro it, & par
les principes locaux j &
tout Leéîeur intelligent, fe gardera bien
de confondre cette immunité avec la prérogative des
Fiefs.
( i) Cet-im pôt ne pouvoit nuire qu’aux droits des Commu
nautés , parce qu’il frappoit fur les droits d’entrée fur les vins.
V oyez ci-après, fur cet objet, part, i , chap. 3 , au fujet du
fubiîde.
(8 7 )
que cet impôt devoit être rejetté fur les feux.
P A R T . ].
On a dit là -d e fîu s, que les moyens de forme CHAP. II.
qui furent employés pour (ouftraire les deux premiers lbil. p a j .
33*
Ordres à la contribution de Z569, leur ont profité trop
long-tems qu’ il faut que jufice foit rendue au Peuple,
& que Vimpôt étant établi fur tous les vins du Pays >
devoit frapper fur tous les Ordres. On trouve donc
encore ici l’abus du mot. O11 ne veut pas compren
dre que le Pays efl repréfenté par les feux ; que
l’impôt fur le Pays efl l’impôt fur les feu x, 8c que
la caille du Pays efl celle des feux. T el efl pour
tant le langage de nos peres 8c de tous nos titres.
Ainfi l ’impôt fur les vins 11’étoit 8c ne pouvoit être
qu’un droit d’entrée pris fur la confommation. des
Communautés. Le fleur de Rougiers avoit enfreint
les principes de fon mandat, quand il avoit rap
porté 8c furpris à l’infu des Etats, des Lettres pa
tentes pour forcer la contribution des deux pre
miers Ordres fur cet objet. Ces Lettres patentes
étoient obreptices, contraires aux droits des Fiefs.
On obfervoit alors qu’elles n’étoient pas vérifiées.
Il étoit fenfible qu’elles ne le feroient jamais ; 8c
le Tiers-Etat le fentit, puifqu’il confentit à faire
l’affiette de cet impôt, comme celle de tous les au
tres , fur les feux. Devoit-on dire après cela que
t
�( 83)
les Lettres patentes qui portoient cette contribution nont
rien perdu de leur vigueur ? Il falloit dire au con
traire , en partant des principes 6c des titres conftitutionnels, i°. qu’elles n’avoient jamais eu vigueur;
2°. qu’elles n’avoient jamais dû l’avoir; 30. que le
troifieme Ordre étant jugé là-deffus par plus de deux
cens ans de poffeffion 6c d’une poffeflion délibérée
6c approuvée par les E tats, toute difficulté fur cet
objet ne pouvoit que difparoître.
Qu’importe qu’en 1 5 7 1 , il ait été requis par le
Syndic du Peuple que les deux premiers Ordres con
tribuaient à l’abonnement des petits fceaux? Faut-il
fe régler fur la prétention d’un Syndic ?
Pourquoi citer les Etats de 1581 ? Il y fu t, diton , délibéré qu'en cas de guerre , le Clergé fourniroit
l'artillerie , la Noblejfe le ban & Varriere*ban>& le Tiers
un certain nombre de piétons. Quand tout cela feroit
exaél, notre queftion n’en feroit pas même effleurée.
Il s’en enfuivroit que la Nobleffe ne doit que le
ban 6c l’arriere-ban, dans les cas où il échoit de
les convoquer ->6c c’eft ce que nous ne contenons
pas. C ’eft ce qui prouve même que l ’impôt 6c les
frappés par la fourniture de l’Artillerie (1 ) ; & dans
ces mêmes Etats de 15 8 1, on trouve tous les im
pôts rejettés 6c concentrés fur les feux. Les Etats
impofent quarante fols par feu pour le Prévôt, qua
torze florins par feu pour la Gendarmerie 6c Taillo n , cinquante livres quinze fols par feu pour le
paiement des dettes du P A Y S & antres deniers impofés
,
p o u r les gages des Officiers du P A Y S
,&
les bie(^s de l’ancien Domaine de l’Eglife fuflênt
frappés
chap.
11.
autres cas
inopinés . Les dettes du P a y s étoient donc les dettes
des feux 6c les Officiers du P a y s étoient payés par
les feux. Ces traits énergiques fe retrouvent dans
tous les Etats , dans toutes les Délibérations , foit
des Adminiftrations intermédiaires , foit des Affemblées des Communes.
On a fans doute eu raifon de dire qu’en 1584,
il fut q u e f t i o n de l’abonnement des Offices des ClercsJurés des Greffes. Mais ne falloit-il pas obferver
encore que l’établiffement des Offices eft un impôt
établi par le Souverain , 6c qu’aucun impôt ne pou
voit frapper fur les biens nobles 6c féodaux ? Ne
falloit-il pas ajouter de plus que ces Offices n’affe&oient 6c 11e pouvoient affefter que les Juftices
charges du Pays ne peuvent pas tomber fur les Fiefs.
Mais au fonds, le Clergé n’a jamais confenti que
P A R T . I.
(1) N o/ü. Les Erats tenus à Salon en 1584- impofent cinq
florins par feu pour l’artillerie.
M
Ihid. pag,
�«■
( 9° )
■■■ royales, 6c non celles des Seigneurs qui formoient
ntuTii1 & forment encore des’ patrimoines ? Il faut néan
moins en con ven ir; quelque droit qu’eût la No
bleflé de ne pas entrer dans cette contribution , elle
( 91)
des Seigneurs qui leur appartenoient en propriété ( 1 ) .
1>AIU. L
CIIAP. II.
Juillet 1584 , que M. le Grand Prieur a écrit que Us fieurs Syn
De là cette divifion entre les Offices dont la
création porte expreflement fur les Juftices feigneuriales , 6c celle des Offices qui n’affe&ent pas ces
Juftices. La Nobleflé n’a pas feulement contribué
pour les premiers ; elle les a éteints de fes propres
deniers. Ainfi les befoins de l’Etat ayant fait éta
blir fucceflivement des Offices de Procureurs 8c de
Juges Gruyers dans les Juftices feigneuriales , la
Nobleflé a payé pour les éteindre, fans demander
aucune contribution , foit au Tiers-E tat, foit meme
au Clergé , quoique cet Ordre foit poffeifeur de plufieurs Fiefs ; 6c quant à ce qui concerne les autres
offices, ils ont été conftamment à la charge des
feux.
On ne voit pas que les Etats ayent été convo
qués en 1585. Il fut feulement tenu fept à huit B0Ulhc ,
Afîémblées des Communautés. Le Pays fe trouvoit 9. l' ta*
alors déchiré par deux partis animés l’un contre
l’autre, à raifon ou fous prétexte de religion. Il
étoit de plu9 dévafté par trois armées. Les Afîém
dics ne fajfent faulte de apporter les mille écus f o l s , lefquels par
blées tenues par les Religionnaires 11e pouvoient
y donna fon confentement libre 6c volontaire. Elle
confentit 4 payer 5000 liv. fur la fournie de 30000
à laquelle l’extinôion de ces Offices avoit été fixée.
Cette fomme fut effeftivement payée , parce que les
Nobles avoient donné là-deflus d es p a r o le s ( 1 ) à la
Reine mere ; 6c le Gouverneur de la Province fe
fervit de cette circonftance , pour engager la No
bleflé à délibérer 6c conlommer la contribution des
3000 liv. Cela fut fait volontairem ent, fans tirer
à conféquence ; 6c quand enfuite en 1640 il fut queftion d’éteindre les Offices , dont la création avoit
fait tant de bruit en Provence , la Nobleflé déclara
que les Offices créés à l’avenir , ne pourroient plus
concerner que les Juftices ro yales, 5c non celles
(1)
O n expofe dans la délibération de la N o b lefîe, du 18
délibération de la Noblejfe dernièrement tenue à Salon
mis
à
206.
la Royne
mere
du
f u r e n t pro
R o i, pour, & c. Reçift. 1 , fol. 205 b
( 1 ) Voyez, ci-après , part. 1 , chap. 8.
M ij
�(9 0
■
■ ■ ■ !■ que porter des vœux très enflamés contre le Clergé.
- - L II peut avoir été délibéré par quelqu’une d’entr’elles
Mémoire
les deniers des décimés 6c des annates pour
Subvenir aux frais de la guerre. Ce vœu des Com
munes pourroit-il ébranler le droit féodal dont il
n’étoit pas queftion alors ? Pourroit-on regarder
d’ailleurs comme conflitutionnels les aétes de vio
lence exercés dans des tems malheureux de trouble 6c
de difeorde civile ?
Et qu’importe que dans ce tems de défordre, lorfqu’on voyoit tout à la fois des Etats royaliftes 6c
des Etats ligueurs, il foit forti d’une de ces A ffemblées orageufes, le vœu plus qu’infenfé de faifir les biens des Hérétiques ? Cela peut-il avoir la
plus légère influence fur les contributions des deux
premiers Ordres? Mais ce qui ne peut que frap
per au cœur la queftion que nous traitons , c’ eft
que dans les Etats 6c Afl’emblées tenues à l ’époque
de 1591 par l’un 6c l’autre des deux partis, royalifte 6c ligueur , on reconnoît uniformément 6c
coriftamment la prérogative féodale : dépenfes de
guerre , d’artillerie , d’Adminiftration , Maréchauflée , emprunts , rembourfemens 6c dons gratuits , ho
noraires ou frais du Gouverneur, tout efl: rejetté
fur les feux , fans aucune efpece d’exception. Dira-t-
( 93 )
on encore qu’ici le fort emportait le faible ? Mais i #.
tel étoit le principe de tous les tems , 6c dans les
conjonctures les plus tranquilles ; ce trait fe ren
contre, non feulement dans les Délibérations des
Etats , mais encore dans les Aflemblées des Com
munes où les Nobles ne paroifloient pas, 6c dans
lefquelles la force des fuflrages étoit entièrement
concentrée fur la tète dés repréfentans du TiersEtat.
Ainfi , les preuves de la prérogative féodale
fortent avec autant d’évidence que de force des
Etats 6c Délibérations dont on voudroit faire ufage
contre la Nobleflé. Nous n’avons pas befoin de
dire que toutes les autres Délibérations qu’on 11’a
pas relevées dans les Mémoires faits pour le TiersEtat , rejettent uniformément tout le poids de l’im
pôt réel fur les feux 6c les rotures.
On a dit que les Etats de 1596 ne fo n t pas au(fi
fa tisfa ifa n s. On diroit à ce trait que les biens nobles
avoient contribué dans les tems qui précèdent. On
vient pourtant de voir le contraire. Il efl: vrai que
dans ces Etats de 15 9 6 , l’Aflèfléur (1 ) remontra
que les extrêmes nécefjités du Peuple requièrent Vaide
( 1 ) Etats tenus à Aix en Janvier 1569, pag. 1 44-
PARU. I.
Cl!AP, 11.
Pig. 3î-
�(94)
PART. 1.
«HAP. II.
de Me(fleurs du Clergé & de la NobleJJe ; & qu’ ils
doivent Jubvcnir à tant de frais qui ne pourront être
tirés de la /ubjlance du Peuple, au moins de trois ou
quatre cens écas pour chaque Ordre, aux menus frais
de l'artillerie : fubvention (1 légère, quelle ne devroit
être mife en difpute. On fent combien ce trait méritoit d’être mis fous les yeux des letteurs qu’on
eft bien-aife d’inftruire fur la queftion des contri
butions. L ’Alfelfeur d’alors connoilfoit trop bien les
réglés, pour ne pas fentir que fa demande étoit con
traire à la Conftitution. Il demandoit des fecours,
non à titre de droit & de juftice, mais à titre de
faveur & de commifération. Il fe fondoit fur la
mifere du tems 6c des Peuples. Il s’appuyoit fur la
modicité des fecours réclamés. Si dans ces circonftances 6c fur ces motifs la N oblefe fe fût prêtée
aux vues de l’Allellêur, comment pourroit-on fe
refufer à dire que cette contribution auroit été vo
lontaire, comme celles qu’elle avoit faites en 1374
6c pendant les troubles occalionés par la révolte du
Vicomte de Turenne?
Mais à cette époque de 159 6, tous les Ordres
du Pays étoient également malheureux. Les biens
du Clergé étoient pillés & dévaflés par les Héré
tiques ; les Nobles, obligés d’être toujours en ar#
(95)
mes, étoient ruinés ëc écrafés par les dépenfes énor
mes d’un fervice continuel. Les feux étoient furchargés , il faut en convenir. Mais la contribution
fut refufée, comme elle devoit l’être. La preuve
du refus lé tire de la délibération ultérieure, prife
par les repréfentans des Communes, que là ou MM.
du Clergé & de la Noble [Je , durant la tenue des
Etats , ne fe mettront pas en quelque devoir de fubvenir en la préfente nécefjïtc , ils en feront pourfuivis
par devant la Cour de Parlement, & que M. le Gou
verneur fera fupplié d’v tenir la main , & porter Vaf
ffiance de fa faveur. Mais qu’en a r r iv a -t-il? Le
Clergé 6c la Nobleffe ne purent 6c 11e voulurent
rien donner. Ces mêmes Etats impoferent fur les
feux, pour toutes les dépenfes quelconques , fans
en excepter aucune* Sc dans la même année 1596,
dans le mois d’A v ril, tems où les Etats furent de
nouveau convoqués , l’Allêllêur fe garda bien de
renouveller cette prétention, à laquelle on n'avoit
donné aucune fuite.
On conçoit à préfent comment les Etats de 1596
ne font pas (atisfaifans. Ils préfentent dans leur
enfemble 6c dans leur exécution , un des titres les
plus formidables que l’on puilfe defirer en matière
de poflêlîion. Le Tiers demandoit un fecours quel\
PART.r.
CHAP. U.
�conque à titre de grâce , & attendu la mifere des
rems ; ce fecours lui fut refuie. Les Communes me
nacèrent de fe pourvoir; elles implorèrent la proteélion du Gouverneur ; tout cela fut inutile : il
eft aifé de deviner que cette annonce ne fut pas
réalifée. Audi ces mêmes Etats impoferent-ils pour
tous les objets quelconques fur les feux. L ’Affemblée des Communes tenue à Riez dans le cours de
la même année , iinpofa de plus 4 liv. par feu ,
pour le paiement de ce que le Pays devoit au G o u
verneur , 8c quarante fols aufli* par feu , pour fournir
de quoi faire le fiege de Berre. Ce vœu eft aulîi
celui de tous les Etats 8c Affemblées fubféquentes*
La menace de fe pourvoir, faite par les Communes
en 1596, n’effraya pas les propriétaires des fonds
nobles & féodaux. Les Etats 8c les Communes 11’ont
celle depuis lors d’en reconnoitre l’illulion , 8c de
convenir que les poffeffeurs des Fiefs , repréfentés
par la Nobleffe , ne dévoient entrer, fous ce rap
port , dans aucune efpece de contribution.
L ’Affeffeur en convenoit dans les Etats de 1597.
Il y fut queftion d’une levée d’hommes , pour s’oppofer à la defeente des Efpagnols, 8c d’une fubvention en argent que le Roi demandoit , tant à
notre Province qu’aux Provinces voifines.
Il fut
délibéré:
(9 7 )
délibéré de lever 8c d’entretenir trois hommes par
feu , des meilleurs & plus aguerris ; 8c quant à l’im PART. I.
CI1A?. n.
pôt en argent, les Etats accordèrent la levée de
quarante fols par feu. O11 ne propofa pas feulement
de faire contribuer les Fiefs à la fubvention ; 8c
l ’on voit le même vœu fe reproduire dans tous les
Etats fubféquents.
Voilà donc le tableau de notre Conftitution fidè
lement expofé , d’après les titres 8c la poffellion de
tous les tems. Les Etats furent tenus avec allez de
continuité jufqu’en 1639. O11 y trouve par-tout la
reconnoiflance du principe conftitutionnel fur la pré
rogative féodale ; 8c tel a été conftamment le vœu
de toutes les Affemblées tenues depuis cette épo
que , jufques au moment où l ’annonce de la reprife
de nos Etats a produit u n e cfpece de fermentation ,
dont les efforts fe font tournés vers l’objet des con
tributions.
Comment a-t-il pu fe faire que ce qui a été reçu
comme inconteftable , jufques à l’époque de 1787,
ce que la Délibération de l’Affemblée intermédiaire
tenue à Lambefc en 1786 , avoit reconnu comme
maxime, ait changé de nature , 8c foit devenu tout
à coup une erreur à reformer, lorfqu’en 1787 il
a été connu que la Provence étoit enfin rendue à
fes Loix conftitutionnelles ?
N
�r
W
: On a mentionné dans le Mémoire fur les contri
PART. I.
butions , un Arrêt du Confeil qui fixe les dépenfes
CH A P. 11.
à fupporter pour le Gouverneur. Ce qu’on en a dit
eft juile ; ce ne font pas les Etats , c’eft le Pays
qui doit fupporter la fomme fixée par l ’Arrêt du
Confeil, intervenu là-delîus en 1655. Mais qu’eftce que lc Pays > dans le fens , 6c fuivant l’expreffion de nos titres? Faut-il le dire encore? C ’eft la
généralité des fonds qui fupportent l’impôt. Avant
l’Arrêt de 163$ , les feux fupportoient fans diffi
culté les levées qu’on faifoit, tant pour le Gouver
neur que pour fa garde. L ’Arrêt de 1635 ne fut
rendu que pour fixer , une fois pour toutes, les
fommes à payer pour cet objet , 6c non pour chan
ger l ’affiete de cette lev ée, qui fe faifoit comme
elle devoit fe faire, qui continue de fe faire dans
la même forme , 6c fur laquelle on n’a fait éciorre
des difficultés, que lorfqu’on a fu que les Etats gé
néraux du Pays nous étoient enfin rendus (1 ) .
Pourquoi dire que le Gouvernement étoit furpris
r<3 3J. avec raifon , que le Peuple payât les charges , 6c
qu’elles fuflént délibérées par les deux premiers Or-
(1) Voyez ci-après, part. 2, chap. y.
(9 9 )
dres ; qu’en conféquence il n’avoit pas ordonné la
PARI', iconvocation des Etats depuis 1652, parce qu’il en c h a t . n .
»"
reconnoifloit l’inutilité ? Où a-t-on trouvé ce pré
tendu trait hiftorique ? Qui ne fait que le Cardinal
de Richelieu n’aimoit pas les Etats, qu’il avoit même
voulu détruire notre Conftitution , & convertir la
Province en pays d’Eleélion ? Ce Miniftre , qui fe
mettoit li fouvent au-dellus des Loix 6c des réglés,
avoit fait fufpeildre nos Afiêmblées nationales de
puis 1632 jufques en 1638. Les Etats de 1639
furent les derniers , parce qu’il n’en vouloit plus y
6c qu’il établit, de fon vivant , des principes que le
Gouvernement 11’a que trop long-tems adoptés de
puis fa mort, arrivée en 1641.
Quel raifonnement s’eft-011 permis encore fur la
Lettre de cachet adreiïee aux Gens des Trois-Etats,
le 15 Décembre 1638? Sa Majefté , dit-on, y dé
clare que l’objet de Les ordres eft d’obtenir un fecours proportionné à la dépenfe qu’exige l’entretien
des Troupes , qui étoient alors nécefiaires pour la
fureté des Places, des Ifles 6c de la Côte maritime.
Qui ne v o it , après ce que nous venons de dire ,
que la convocation des trois Ordres étoit néceflaire
du
pour obtenir les fecours demandés ? Elle l’étoit de fAflçmblcc
mois de Mats
plus pour nommer les nouveaux Procureurs joints 163».
N ij
�I
I
(10 0 )
—
qui le troûvoient en place depuis 1632, Sc qui par
PAK1 1 cette raifon furent déclarés annuels en 1630. Alors
c ha p . n.
.
.
.
M. Duperier étoit Afléfléur. La charge des feux
s’élevoit non à 189 liv ., comme on Ta dit dans le
js. Mémoire fur les contributions, mais à 21 liv. par
feu tous les mois. 11 fut de plus délibéré un don
de 100000 liv. pour le Roi , 6c pour, Femploi en
être fait en fortifications , 6c de 50000 liv. pour le
Comte de Carces, grand Sénéchal : il if étoit pas
contefté que toutes ces charges ne duffent être rejettées fur les feux. Cette Délibération forme ce
pendant le vœu des Communes , Sc qui plus e ft,
des Communes adminiftrées 6c dirigées par M. D u
perier.
Tous les raifonnemens qu’on s’eft permis fur les
Lettres patentes de 1658 , pour la convocation des
Etats , font de la même inutilité. Ne diroit-on pas
que les Etats de 1639 ne furent accordés que parce
que la Noblefié vouloit entrer en contribution pour
les biens nobles, Sc que tel eft le fens des Lettres
patentes, portant la convocation des Etats de 1659?
On y trouve pourtant tout le contraire. Il y eft
dit avec raifon , que la Noblefié contribuant comme
les autres aux charges de la Province 6c levées qui
fe déterminent dans les E tats, il étoit jufte que
( 101 )
ces Aflémblées fuflent convoquées. Il falloit en
effet donner à la Noblefié le même droit qu’au Tiers ,
puifqu’elle contribue, comme le T iers, fur les feux
qu’elle pofiéde , 6c qui fupportent toutes les charges
du Roi 6c du Pays. Pourquoi donc nous dire que
la Noblefié eut en 1659
d'offrir L'argent
du Tiers , quelle ne délia pas les cordons de fa bourfe ,
que les Etats n ont plus été convoqués depuis lors, &
que c étoit juflice. La Noblefié concourut avec tous
les Ordres pour offrir l’impôt des feux, c’eft-à-dire,
l ’impôt des biens contribuables pofiédés par tous les
Ordres. Elle paya fon contingent comme les autres.
C ’eft une vérité qu’il ne faut jamais perdre de vue
dans cette importante difcuftion. Les Roturiers qui
pofiédoient des F iefs, ne payèrent rien pour leurs
biens nobles. Les Nobles qui pofiédoient des ro
tures , payèrent la totalité de l’impôt, entièrement
rejette fur les feux en 1659, comme dans tous les
tems connus. Il ne fut pas élevé alors la plus lé
gère réclamation fur la prérogative féodale. Jamais
on 11e l’avoit conteftée \ les Communes , dans le
tems de la plus grande effervefcence, n’en avoient
jamais demandé que la modification , quant à ce
qui concernoit les biens d’ancienne contribution.
Il eft vrai que depuis cette époque de 1639,
PART. I.
CHAP. II.
�( io O
_les Etats n'avoient plus été convoqués. Mais les
G1Arn' raifons en font connues de tout le monde. Elles
ne prennent rien lur la prérogative confiante 8c
conftitutionnelle des Fiefs. C ’était jujtice , a-t-on
ofé dire. Mais comment peut-il être jufte d’anéantir
une Conftitution , Sc de priver les deux premiers
Ordres d’une Nation, du droit de vo ter, comme
Ordres , dans fes Aflémblées ? Comment pourroit-il
être jufte d’attacher la reprife des droits conftitutionnels des deux premiers Ordres , à des facrifices
qui ne pourroient que bleffer leur droit de pro
priété ? Et s’ il eft vrai , comme les repréfentans du
Tiers ont été forcés d’en convenir cent 8c cent
fois , que le rétablifl'ement des Etats rendoit enfin
la Province à fon ancienne Adminiftration , fi cet
événement étoit déliré , s’ il devoit l’être par tout
le monde, s’il devoit renforcer le régime provençal
8c non le détruire, comment a - t- o n pu préfenter
au Peuple , comme un a£te de jufiice, la fufpenfion
de ces mêmes Etats , qui n’avoit d’autres principes
que les ordres 8c les vues particulières du Gouver
nement ?
'i
Une réflexion fe préfente ici. Il eft certain que
les Etats n’ont été fufpendus que par le fait, de
puis 1659. Si depuis cette époque les Communes
( i° j )
s’étoient prévalues de cette prépondérance inconftitutionnelle que la force 8c la fatalité des événemens
leur donnoient dans l ’Adminiftration générale ; fi elles
en avaient abufé au point d’entamer ou d’anéantir la
prérogative féodale, la Nobleflêpourroit s’en plaindre.
Le Clergé fe préfenteroit avec les mêmes raifons.
Ces deux premiers Ordres pourroient dire que ce
qui s’eft fait dans des tems de fubverfion 8c de défordre, n’a pas pu prendre le caraétere de réglé,
8c que le rétabliftêment des Etats entraîne, avec le
retour du régime prim itif, celui des principes fon
ciers de la Conftitution > qu’on leur a ravi de force
leurs droits conftitutionnels ; que ces droits étoient
également inaltérables 8c inipérifiables, fuivant les
promefiés de nos Rois 8c les conditions éternelles
de l’union de la P r o v i n c e à la Couronne. Mais ici
nos droits ont fubfifté \ les deux premiers Ordres
avoient, pour ainfi dire , perdu toute leur force dans
les tems de l’Adminiftration intermédiaire , dont
l ’abus actuellement reconnu par tous les Etats, s’étoit
prorogé pendant près de cent cinquante ans ; 8c
néanmoins dans ce tems de fouffrance, la préroga
tive féodale avoit continué d’exifter. Tous les T ri
bunaux, tous les Jurifconfultes l ’avoient refpeftée.
Elle avoit exifté comme vérité fondamentale, comme
�( ï04)
principe de conftitution. Elle avoit, comme elle conferve encore, les bafes, nous ne difons pas feule
ment les plus folides , mais les plus refpeétables.
Comment donc a-t-on pu fe permettre de l’attaquer
dans la circonftance préfente , où le retour de notre
régime ne pouvoit qu’opérer le retour conftitutionnei des propriétés & des droits , foit communs , foit
individuels de chaque Ordre St de chaque nature
de biens ?
Voilà donc, fur la matière des contributions, quel
a toujours été notre droit provençal : il remonte ,
comme on v o it, à l’origine des Fiefs. Il étoit inutile
de citer le Droit Romain, qui pourtant renfermoit
le germe de la divifion des biens dont les uns fupportoient l’ impôt réel, les autres en étoient exempts.
Les uns fupportoient un cens , d’autres une cotité
de fruits fur la produftion ; ce qui nous rameneroit
aux principes que nous avons pofés au premier cha
pitre de cette première partie de nos Obfervations.
Mais il fuffit d’obferver que les Fiefs fe font for
més dans les tems de la décadence 5c de la divifion
de l’Empire Romain ; qu’ils ont cté donnés aux
kudes St fiddes, à la charge du fervice perfonnel,
St pour les pofiéder comme les Souverains les poffédoient
0 °s)
fédoient eux-mèmes. De là l’immunité de tous les
Fiefs de l’Europe St de ceux de Provence; immu
nité liée avec notre Conftitution , qui en a précédé
les premières réglés écrites ; immunité fondée fur le
droit St la poflélîion à l’époque de la Déclaration
donnée par Louis II. en 1406.
Cette prérogative n’a fait qu’acquérir alors un
nouveau caraélere de légalité par ce titre légillatifi
U11 nouveau titre » de la meme nature elt lurvenu
en 1448. Il a reftreint la prérogative féodale, quant
aux biens d’ancienne contribution. Il l’a confirmée
St renforcée quant aux biens qui n’avoient jamais
été féparés du Fief.
Un vœu moins folemnel, mais d’une plus grande
force, fut formé en 1471. On le trouve dans la
déclaration des Commiflaires-AfFouageurs ; il cfl en
core confirmatif de la prérogative , qui fe trouve de
plus folemnellement, irrévocablement, impériflablement confirmée par les Loix St conditions de l’union
de la Province à la Couronne.
Elle efi: confirmée par le vœu du Tiers - Etat.
Il obtient des Lettres patentes pour foumettre à
l’impôt les biens d’ancienne contribution ; il con
vient donc que les biens nobles non féparés du Fief,
ne dévoient pas en être frappés. Il fe fépare des
O
�( 10 6 )
Lj^-r^L,» deux premiers Ordres ; il plaide en 1549 pour faire
PART. I
r
1
c,M u ’ foumettre à l’impôt les biens d’ancienne contribu
tion *, il reconnoit 6c refpefte la prérogative féo
dale, quant aux biens non démembrés.
De là tous les Arrêts , tous les vœux des Etats
6c Aflémblées, toutes les dédiions qui féparent
les biens des Seigneurs en deux dallés ; les biens
d’ancienne contribution font mis d’un côté , les biens
nobles 8c féodaux de l’autre. Tous les débats tom
bent lur les premiers. Jamais dans aucun tems le
Tiers-Etat 8 : fes Défenfeurs n’ont oie dire que les
biens nobles fuflent impofables : ils ont conftamment
convenu que cette nature de biens ne pouvoit pas
être frappée par l’impôt réel, tant pour les charges
ordinaires que pour les charges extraordinaires ; tant
pour la levée des deniers royaux, que pour celle des
deniers des Communautés , dont le produit dans fon
enfemble forme ce que nous appelions les deniers
du Pays , 8c entrent dans fa caillé comme formant
la charge que fupportent les fonds impofables, 8c
qui ed payée par tous les Ordres , puifque tous les
Ordres pris enfemble 8c formant la généralité du
P ays, poflédent la généralité des biens impofables
repréfentés par les feux.
uMco™
aUSifur
tien, pag 4r.
O n * d°nc fait un étrange abus de l’article 3$
C 10 7 ) :
de l’Ordonnance d’Orléans, portant qu’en toute A/femblée (VEtats généraux ou particuliers des Provinces
où (e fera i'oclroi des deniers , les trois Etats s'accor
deront de la quote part & portion que chacun de(dits
Etats portera, & ne pourront le Clergé & la Noblcjjc
feuls délibérer comme fai/ant la plus grande partie.
Cet article a pour objet le droit de participation
que le Tiers-Etat doit avoir dans les délibérations
concernant la concelhon de l’impôt. Dans les an
ciens tems , il étoit feulement délibéré par les deux
premiers Ordres. T e l étoit le droit général avant
l’établiïîément des Communes, qui , prenant enfuite une condftance , ont formé le troifieme Ordre
qui devoit donner aufli fon vœu dans les dé
libérations nationales 8c dans les concédions de
l’impôt. Voilà l’objet de l’article qui fixe là-dedus
le droit du T ie rs -E ta t, fans que ce droit puidé
périr ni même être entamé, par la raifon ou le pré
texte que les deux premiers Ordres forment la plus
grande partie de l’Adémblée. Il faut donc délibérer
en corps d’Etats fur la part & portion que chacun
defdits Etats portera. Cela ne peut s’appliquer qu’au
cas où chacun des Etats délibéré un don particulier
8c perfonnel ; mais quand il s’agit de l’impôt réel
qui doit tomber fur les biens taillables ou impofa-
�( i°8 )
blés, cous les Etats enfemble fixent la mefure de
PART.
l' l ’impôt qui ne fie leve que fur les fonds ou les perCHAP. II
fonnes foumifes à la taille.
Ainfi, par exemple, oferoit-on fe prévaloir de
cet article 35 de l’Ordonnance d’Orléans contre les
Nobles & autres exempts des tailles dans les Pro
vinces où elles font perfonnelles ? Pourroit-on leur
dire : il faut que vous participiez au fardeau de
l ’impôt, puifque vous participez à fa concefiion ?
On peut bien moins encore le dire en Provence 8c
dans les lieux où l’impôt efl réel , puifque les in
dividus de tous les Ordres le fupportent en raifon
des poffeflions qu’ils ont dans la maflé des fonds
tailla blés.
Ajoutons à notre démonftration l’ufage 8c les
principes du Comtat Vénaiflin. Ses Loix confiitutionnelles font celles de la Provence, dont cet Etat
faifoit partie anciennement. Il n’y a qu’à voir ce
fonds no
B'[!us, conf. qu’en difent les Auteurs du Pays. Les
J19.
Sâolcgcr, bles des F iefs, même des Fiefs relevant d’un furcfol. civil,
part, t , chap. zerain intermédiaire , même des Fiefs eccléfiaflù1J*•
ques , ou relevant de VEglife , y font regardés
comme exempts de toute preftation d’impôt, en force
de l ’ufage antique 8c de la loi des Fiefs.
Nous terminons notre difcuflîon par une obfer-
( io 9 )
vation. Dans tous les Fiefs, 011 trouve la préroga
tive conftamment refpe&ée. Dans toutes les Pro
vinces où l ’impôt efl: réel , 8c où la prérogative
l ’eft aufii , on a fixé des époques après lefquelles
les biens fortis du F ie f, font frappés de roture
Ainfi le Languedoc a la fienne ; on en trouve éga
lement une dans le Dauphiné, fixée poftérieurement
à la révolution , qui dans cette Province , rendit
réel l’impôt qui étoit auparavant mixte. Le Comtat
a aufli la fienne, fixée à l’année 1589 , 8c au 15
Novembre, tems d’une Tranfaôtion intervenue entre
les Barons 8c les Communes. En Provence , nous
avons, comme chacun fait, l’époque du 15 Décembre
15 5 6 , fixée par l’Arrêt du même jou r; confirmée
par une foule d’autres , 8c notamment par celui de
1702. Quiconque voudra raifonner , trouvera dans
cette fixation du droit local 8c univerfel, une preuve
nouvelle 8c fans répliqué , comme tant d’autres , de
la légalité de la prérogative féodale , dont nous
venons de pofer les bafes 8c de développer les prin
cipes.
P A R T . i.
chap. 11.
�Quelle efl l'étendue de la prérogative des Fiefs.
cet examen appartienne , dans tous Tes
\
détails , à la fécondé Partie de ces Obfervations,
il convient néanmoins d’en donner ici les notions
générales, avec d’autant plus de raifon , qu’elles
fe lient avec les preuves difeutées dans le Chapitre
précédent.
Q
u o iq u e
Nous l’avons déjà dit. Nos Fiefs de Provence
font exempts, de droit &; de fait, de toutes charges
quelconques, tant royales que municipales. Telle
eft la difpofition formelle des titres 3 telle eft de plus
la conféquence à tirer de tous les aétes poflèffoires
de toute efpece & de tous les tems 3 tel eft enfin
le réfultat de l ’aveu formel de tous les Ordres.
La Déclaration donnée par Louis II en 1406 ,
eft. confirmative & déclarative. Elle parle de toutes
les efpeces de levées , de donis , fubfidiis & taillis
nobis conceffïs. Voilà donc l ’impôt royal dans toute
fa plénitude. Elle parle également de toutes les
charges municipales, omnibus oneribus incumbentibus
cni )
univerfltati. La Déclaration du Roi René confirme
J
PART. I.
celle de Louis II , quant à la prérogative féodale 3 CHAP# m.
la contribution aux réparations des remparts, ponts,
chemins & fontaines , n’eft ordonnée que quant
aux biens d’ancienne contribution. La prérogative
fubfifte donc , quant aux biens nobles, dans toute
l ’étendue des difpofitions renfermées dans l’Edit de
Louis II.
Les mêmes réflexions fe préfentent fur tous les
Arrêts intervenus enfuite , fur les aveux du Tiers
& de nos Aftêmblées , tant nationales que des Com
munes. Jamais les biens nobles non féparés du F ief,
n’ont été compris dans aucun Cadaftre , à l'effet
de fupporter les charges de la Municipalité. T ou
jours les Etats & les Communes ont décidé qu’ils
ne dévoient entrer en aucune contribution. Des
procès fans nombre ont été formés par les Commu
nautés , fur la queftion de favoir fi les biens rotu
riers pofiedés par les Seigneurs , jouiflant du pri
vilège des Forains , dévoient fupporter telle ou telle
charge négociale , qu’on foutenoit être relative à
l’utilité des fonds. Ces procès ont pafl'é fous les
yeux de l’Adminiftration & des Aftêmblées des Com
munautés. O11 a même là-deffus l’Arrêt intervenu Comment,
NouvCauju,
entre le Seigneur & la Communauté de M ouriés,
�le 6 Juin 1753, dans lequel les Procureurs du Pays
avoient été appellés , ainfi que les Syndics de la
Noblefle. Cet Arrêt eft donc bien folemnel 3 il eft
intervenu fur le point de favoir , fi les biens rotu
riers du Seigneur, doivent contribuer aux fourni
tures forcées, faites dans le tems de l’invafion de
17 4 7 , foit à nos Troupes, foit à celles de l’en
nemi. Le Seigneur fut condamné , &C il devoit l’être.
Mais cet A rrêt, la nature de la conteftation, &
celle des moyens fur lefquels la caufe étoit agitée,
forment un monument irréfragable de la prérogative
féodale , quant à toutes les charges de la Munici
palité. La queftion étoit tournée fur les tailles né
gociâtes, tant feulement, c’eft-à-dire , fur la con
tribution des biens roturiers que 1e Seigneur poflede
dans fon Fief. L ’ immunité des biens nobles étoit
convenue de tous tes côtés. La contribution aux
fournitures forcées dans tes tems de guerre 6c de
calamité , eft la plus favorable de toutes tes charges
municipales j & fi tes biens nobles 6c féodaux en
font exempts , ils doivent l’être de toutes tes autres
par majorité de raifon.
Aulfi ces titres font-ils foutenus par la pofleflion
de tous tes tems. Les impofitions faites pour le foutien des guerres préfentes, pour réparer les plaies
des
( 11 } )
des guerres paftëes , ont été constamment rejettées
fur tes feux. Jamais tes Communes en corps , jamais
tes Cpmmunautés en particulier n’ont ofé produire
même 1e defir de faire contribuer aux charges de
la Municipalité, tes biens nobles 6c non féparés du
Fief. Toujours toutes les dépenfes , tous tes deniers,
foit du Roi , foit du Pays , ont été rejettés fur tes
feux. Toujours on a dit que tes biens nobles étoient
exempts des tailles.
Et ce feroit éluder notre queftion , que de partir
du principe que nous 11e fommes pas pays de taille,
mais bien Etat conventionné , pour en tirer une in
duction quelconque, contre la prérogative des Fiefs
6c des fonds nobles , qui n’en ont jamais été fépa
rés. Il ne faut pas s’agiter fur des queftions de
mots. Nos titres même conftitutionnels parlent des
tailles ; de taillis, dit la Déclaration de Louis I I ,
parce que tes deniers étoient levés dans la forme
des tailles. Nos Jurifconfultes , 6c tous nos Livres
employent ainfi 1e mot dans 1e même fens. C ’eft
fous cette défignation , propre ou impropre, qu’on
a conftamment exprimé la plénitude de l’impôt, embrafiant collectivement tes deniers du R o i, ceux du
Pays 6c des Communautés. Tout cela devoit être pris,
6c r étoit en effet, fur tes feux. Quels font nos
P
arwi
PART. 1.
CHAT, III.
�part.
I
CHAP, III
Ci 14)
garans là-deflus ? Nous les avons déjà cités. Nos
titres conftitutionnels , la poftêffion de tous les tems
reconnue par la Nation , par tous les Ordres qui la
compofent, foit raflêmblés , foit féparés , ôc confacrée par tous les Arrêts.
On peut donc donner à l’impôt de Provence le
nom qu’on voudra. Il fera toujours vrai que nos
titres conftitutionnels ÔC la pofleflion qui les ren
force , nous apprennent que les fonds nobles font
exempts de toutes tailles , dons > Jubfides accordés au
Souverain , ÔC de plus, de toutes les charges des
Communautés ; ce que les titres les plus récens , les
Arrêts , les Jurifconfultes, & tous les Auteurs de
la Province , ont exprimé par l’immunité pléniere
de toute levée, tant pour les deniers du R o i, que
pour ceux du Pays.
CHAPITRE
I V.
Peut-on détruire ou entamer la prérogative féodale?
( J ette queftion eft la même que celle de favoir
fi l’on peut détruire ou entamer le' droit de pro
priété.
Les Fiefs, depuis leur origine, font dans
le commerce-, avec l ’excellence ôc la plus-value que
(115 )
la prérogative féodale pouvoit ôc devoit leur don
rÂRÎ. i.
ner. De l à , fi le fonds roturier fe vend fur le pied CHAP. IV .
du cinq pour cen t, le fonds noble s’évalue à raifon
du deux ôc demi. De là , l’évaluation des droits
feigneuriaux au trois pour cent; de là, l’évaluation
des fonds, qui fans être nobles, ne font pas taillables, comme ceux des grandes Villes , où tout
fe paye en reves , fur le pied du quatre pour cent.
Telles font les anciennes réglés d’eftimation qui Bonifaee ,
tom. 1 , fé
compi
nous ont été tranfmifes par nos peres , relativement conde
lation , paj*J3«
à la différente nature ôc qualité des biens.
Si , par une de ces révolutions dont on n’auroit
jamais dû fe permettre d’imaginer le fyftême, parce
que les projets de fubverfion font toujours autant
odieux qu’injuftes ôc impolitiques , les biens exempts
ôc les biens nobles devenoient taiilables ôc roturiers,
tous les poftefteurs de ces biens qui en ont acheté
l’ excellence ÔC la qualité , fous les aufpices de la
Loi publique , ne perdroient-ils pas une partie de
leur propriété ?
De là les fortunes qui confiftent en Fiefs, ne
feroient - eUes pas ébranlées? Combien de patri
moines renverfés ? Combien de familles en défordre?
Les tranfa&ions , les partages , les liquidations qui
règlent le fo r t, le patrimoine ôc la fortune des pofp ij
�(n6)
fefleurs des F ie fs, feroient donc anéantis , Si ces
poflefleurs écrafés. Et que diroit donc le TiersEtat , ou pour mieux dire , ceux qui préfentent en
fon nom le fyftême de l’égalité des biens , l i , fans
refpeft pour les titres St les propriétés , il furvenoit une loi nouvelle qui fît celler, ou les penfions établies à prix d’argent, ou les rentes réfervées fur les fonds, ^lorfque leurs peres les ont
vendus ?
Qu’on y prenne bien garde: le Tiers-Etat forme
la partie la plus nombreufe de la Nation ; mais plufieurs dallés exiflent dans cet Ordre. D ’abord, celle
des Travailleurs St Manoeuvriers exerçant les arts
méchaniques. Cette dallé n’elï pas curieufe d’entrer
dans la difcuffion de l ’impôt. Tous les individus
qui la compofent, St qui forment le gros de la Nation ,
n’ont que deux objets en vue ; celui de vivre , ou
de s’enrichir pour monter aux dallés fupérieures.
Si l’impôt augmente, cette claffe du troilieme Ordre
ne manque jamais de mettre le prix de fon travail
à niveau de la partie de l’impôt qu’elle fupporte.
Elle n’a pas befoin d’être inftruite. Les lumières
(117)
idées d’égalité qu’on a voulu répandre , ne pour
roient germer dans les têtes de ces individus de la
derniere clalfe du T iers-E tat, fans produire l’explolion la plus funefte à tous les Ordres ; car li l’on
vouloit ravir aux biens féodaux &t à ceux de l’an
cien domaine de l’Eglife , leurs droits conftitutionnels , le même principe conduiroit également à autorifer la derniere dalle du Tiers-Etat à demander
le partage des terres & l’extinâion de tous les
droits. La clalfe du Tiers-Etat qui fe trouve à la
tête de cet Ordre , qui par fes richelfes, fes lumières,
devient en quelque maniéré la rivale de la Noblelfe,
auroit tout autant à craindre que les deux premiers
Ordres dans toute révolution quelconque qui pourroit
toucher au droit inaltérable & facré de propriété.
Cette partie choilie du troilieme O rdre, beaucoup
moins nombreufe que les deux premiers , fe fousdivife encore en deux d alles, dont l’une afpire à
tout détruire , & qui voudroit bientôt monter de
l’égalité des biens, à celle des perfonnes : elle jette
dans fes exploitons infenfées les femences d’une R é
publique. L ’autre ellprefque compofée de citoyens (1 )
qu’on pourroit lui donner, feroient même dangereufes, par le mauvais ufage qu’elle pourroit en faire,
( 1 ) Le vrai Citoyen cft membre de la Patrie commune, le
8t par les erreurs qui pourroient s’en enfuivre. Les
défenfeur impartial de fes droits & de ceux de tous les membres
PART. 1.
CHAI’ . IV.
�( ” 8)
modérés, vertueux, amis de l’ordre & de la juftice,
&qui délirent d’être inftruits. C ’eft pour cette clafl’e
du troilieme Ordre que nous traitons ici la queftion
des contributions. Que peut-on attendre de la pre
mière, fi ce n’eft: une révolte ouverte, tant contre
la lumière que contre l’autorité , & des traits d’ir
ritation & d’outrage auxquels on prend d’avance
l’engagement de ne pas répondre ?
Il eût été plus heureux de difcuter cette queftion en
famille 8c dans le fein des Commiflions chargées de ce
foin par les derniers Etats. Les Députés du Tiers
avoient pour eux tous les avantages. Ils étoient inf-
qui la compofènt -, on eft très-bon C itoyen , quand on défend les
droits d’un Ordre avec modération, force &: vérité. On peut être
mauvais Citoyen, quand on veut donner, à ce qu’on appelle le
Peuple, des droits qu'il n’a pas ; quand on fait éclorre des p ro jets
de fubverfîon qui ne pourroient que mettre la Patrie en feu. Le
ferment des Athéniens, qui avoient attaché le plus de dignité à la
qualité de Citoyen, & qui en avoient, mieux que tout autre Peu
ple, fixé les devoirs, contenoit ces deux traits efîentiels, Patriam
nec turbabo, ncc prodam. Les Gracques ne parloient-ils pas pour
le Peuple ? Ne demandoient-ils pas le partage des terres ? L équi
table foûérité ne les a jamais regardés comme de vrais C ito y e n s .
Cette obfervation fera notre feule réponfe à la fécondé édition du
Traité du Droit public de Provence,
(119 )
truits par le Mémoire dont nous venons de renverfer
les bafes. Les Commiflaires des deux premiers Ordres
n’avoient pas le quart des lumières qu’on a depuis
ramaflées. Ils vouloient engager le combat de la difcufiion , & leur invitation 11e fut pas acceptée.
C ’e S , encore un coup, pour cette clafiê de C i
toyens du T ie rs-E ta t, qui defire d’être inftruite
que nous écrivons. Nous afpirons à la convaincre.
Nos armes font la juftice & la vérité. Il n’eft: plus
tems de nous dire qu’il faut que chacun contribue
à proportion du produit de fes domaines ; que l’impôt
eft imprefcriptible, & qu’il n’elt pas julle que le
pauvre Peuple foit écrafé , tandis que les riches poffefléurs des plus beaux héritages 11e payent aucune
contribution.
Ce qu’on appelle le pauvre Peuple, n’efi: vérita
blement pauvre, que parce qu’il ne pofléde point
de fonds. La véritable opulence confille dans le
nombre d’immeubles de chaque pofiéfiéur. Nous ne
parlons pas ici des capitalises qui n’entrent pour
rien dans les charges 8c dans les principes propres
à l’impôt réel. Le pauvre Peuple réglé fon travail
& le prix qu’il y donne, fuivant la charge de l’im
pôt. Il lui relie toujours le regret de ne pas pofféder allez pour payer davantage.
�Or telle eft la loi de l’impôt réel 8 c provençal,
qu’il ne doit être leve que fur les rotures , indiftin&ement poffedées par l’Eccléfiaftique , le Noble
8 c le Roturier , 8 c repréfentées par les feux. Nous
favons que la loi de l’impôt & les principes qui la
régi fient, ne peuvent pas être altérés par la prefcription. Mais cette l o i , mais les principes qui la
gouvernent, font régis par la loi publique, 8 c par
la Conftitution de chaque Nation : 8 c quand on
trouve un principe univerfel 8 c lo c a l, un principe
fondé fur les titres de toute efpece , 8 c la poflêffion de tous les tems ; un principe qui divife les
immeubles en deux différentes mafîês, dont l ’une
eft conftitutionnellement impofable, 8 c dont l’autre
ne peut 8 c ne doit pas l ’être , a-t-on befoin alors
du fecours de la prefeription ? Les loix de l ’égalité
ne font-elles pas fubordonnées aux principes des ré
gimes publics 8 c locaux ? Et faut - il raifonner &
opérer aujourd’hui comme s’il s’agiffoit d’un par
tage à faire entre des intéreffés , porteurs des mêmes
titres 8 c des mêmes droits ?
Notre Conftitution exifte , elle eft inébranlable ;
fuivant cette Conftitution , les biens roturiers font
impofables j ils peuvent feuls entrer dans les affouagemens, portant l’eftimation générale de tous les
biens
(I2l)
biens fur lefquels l’impôt réel peut être aflis. Les
fonds nobles n’y font jamais entrés. Dans tous les
tems , la loi du Pays a défendu de les y comprendre.
L ’égalité des perfonnes fubfifte dans toute fa plé
nitude , puifque tout poflefleur quelconque des ro
tures paye l’impôt, dans quelque état 8 c condition
qu’il fe trouve placé ; 8 c tout poflefleur quelconque
de F ie f, foit noble, foit roturier, n’a rien à payer
pour les fonds nobles. Impôt réel , prérogative réelle,
entière égalité des perfonnes, voilà quel eft en trois
mots le vrai tableau de notre Conftitution.
Dira-t-on que cet Etat eft ufurpé , qu’il faut ré
parer par l’égalité , les crimes de l'ignorance , de la
feduction , & de l'abus du pouvoir ; que l’affranchiffement des biens nobles tient au fyftême des Loix
féodales, qui furent l’ouvrage des Poft'édans-Fiefs
feuls , que le poids de l’impôt eft devenu infupportable pour les feux , 8 c que fuivant la maxime de
Marc Antonin , Nova res j novum remedium Juris defiderat ? Ajoutera-t-on à ces traits , les faillies de
quelques prétendus Publiciftes, qui veulent s’ériger
en réformateurs, 8 c créer de nouveaux mondes? On
pourra répondre à tous ces novateurs , qu’il n’eft
ni ju fte, ni même raifonnable , de détruire les pro
propriétés exiftantes j que la Natian entière ne le
Q
PART. i.
Cil AV. IV.
Droit public
tl i ComtcF.nt de la Pro
vence , Pag.
t io .
�( 122 )
: pourroit pas , parce que la fociété s’eft formée pour
PART.I.
CHAP. IV. la défenfe des propriétés , & non polir les détruire.
Les Nobles ne diront pas que les Fiefs & les
prérogatives qui s’y trouvent attachées, font le prix
des fervices & du fang de leurs peres. Leur défenfe
fera pofée fur un point de juftice commun à tous
les Ordres. Ils répondront que la prérogative féo
dale eft une propriété, & de plus une propriété
conftitutionnelle. Cela répond à tout ce qu’on a
d it, & à tout ce qu’on pourroit imaginer encore
pour la détruire. S’il s’agilîoit de raifonner fur les
vrais principes de l’égalité dans les Monarchies,
Montefcjuicu, nous dirions avec un grand Homme , dont les ré
Elptic des
Loix, liv,
chap. 9 -
flexions forment aujourd’hui le Code de tous les
Souverains , que Vhonneur ejl le principe des Monar
chies y que dans ces Etats les terres nobles doivent
avoir clés privilèges comme les perjonnes y qu’o/z ne
peut pas féparer la dignité du Monarque , de celle du
Royaume ; qu’o/z ne peut guere féparer non plus la di
gnité du Noble y de celle defon F ief ; & tirant enfui te
la conféquence qui fort de ce principe lum ineux,
nous pourrions conclure avec lu i, que toutes ces
prérogatives doivent être particulières à la Noblejje,
& ne point pajfer au Peuple, f i Von ne veut choquer
le principe du Gouvernement, & f
Von ne veut di-
(123)
miruter la force de la Noblejje & celle du Peuple.
PART. r.
S ’il falloit difeuter les devoirs & les droits de
. iV .
la Noblelïé , conlidérée comme O rdre, nous dirions
avec le même Auteur, que la gloire & le partage
de la Noblefle , font de défendre le Trône, qui ne
peut tomber qu’avec elle. Nous répondrions avec lui
au reproche qu’on a fait à cet Ordre , d’envahir
toutes les places ; que cette Noblcjfe toute guerriere, Liv. 10 ,
chap.
qui penfe qu en quelque degré de richejfe que Von foit y
il faut faire fa fortune y mais qti d efl honteux d'aug
menter Jon bien y fi on ne commence par le diffiper :
que la Noblejfe e f cette partie de la Nation qui fert
toujours avec le capital de Jon bien , qui, quand elle
ejl ruinée , donne Ja place à un autre, qui fervira
avec fon capital encore y qui va à la guerre , pour
que perfonne nofe dire quelle n y a pas été y qui y
quand elle ne peut efpérer les richeffcs , efpere les hon
neurs y & qui y lorjqu elle ne les obtient pas y fe confole y parce qu elle a obtenu de Vhonneur y & nous
ajouterions, d’après ce génie fupérieur , qui a confidéré les Loix en Philofophe , & qui en a faili les
vrais réfultats , que ces vicilîitudes dans les familles
& les patrimoines des Nobles , n’en ont pas éteint
l’efprit & les principes ; que Vexifience & les droits
de cet Ordre ont nécejfaircment contribué a la grancipap
Q ij
�( I 2 4 )
■
■■■■ deur de ce Royaume > & que fi depuis deux ou trois
chap^Îv
ficelés, il a augmenté fans cejfe fa puiffance > il faut
attribuer cela à la bonté de J es Loix , & non pas à
la fortune > qui n a pas de ces fortes de confiance.
Mais encore un coup , il n’eft pas queftion de ré' former ; il ne s’agit que de fixer notre Conftitution , St de la refpefter. T el eft le principe adopté
dans le Mémoire fur les contributions, dans lequel
cette Conftitution fe trouve défigurée St pervertie.
On y donne pour réglé des exemples qui n’on exifté
que comme exception à la réglé , St dans lefquels
la réglé elle - même fe trouve fixée dans un fens
contraire. On s’y permet un Commentaire fubtil
fur les titres conftitutionnels dont on veut écarter
le véritable fens. On y foutient que tous les fonds
ont été taillables dans tous les tems, 8t qu’ils doi
vent l’être ; St l’on fe trompe évidemment fur tous
les points. On vient d’en donner la démonftration.
Mais le principe fondamental de cet ouvrage , eft
toujours qu’il faut fuivre la Conftitution , dont les
traits, dénaturés ou mal entendus par l’Auteur , fer
vent de bafe à fon fyftême. Ce dernier, dévoué
par fa place à la défenfe du régime provençal , auroit-il pu fe permettre feulement l’idée de l’anéantir?
?ag. ni.
L ’Auteur du Droit public , plus circonfpeâ: dans
( IZ5)
fes fyftêmes, mais plus extrême dans fes vœux St
dans fon opinion , convient que la fuppreflion de PART. 1.
CHAP. IV.
la prérogative féodale paroîtra finguliere par fa nou
veauté. V oilà donc notre queftion décidée par cet
Ecrivain lui-même ; quoiqu’il ait fournis fon opinion
à la difeuflion publique, il eft clair, de fon aveu,
que fes idées font contraires à nos principes conftitutionnels ; 8t le Cenfeur de cet ouvrage ( i ) n’a
pas même pu fe difpenfer de laifier tranfpirer cette
vérité dans le vœu tremblant qu’il a donné , en ré
férant l’approbation au Chef de la Juftice.
Quoi qu’il en foit , la prérogative des Fiefs eft
un patrimoine. T el eft fon vrai caraétere dans toutes
les Provinces du Royaume , St fur-tout en Provence.
L a patrimonialité des Fiefs s’y trouve établie d’une
maniéré inconteftable , St depuis long-tems avant
l ’union de la Province à la Couronne. Elle ne fut PcifTocel ,
de
que confirmée par le fameux Arrêt de 1668. La pré M. de Cla
coof.
rogative féodale a toujours fait doubler le prix de piers,
10 , queft. t ,
nos Fiefs. Les habitans des Villes principales , dont 0 ° . 1 8 .
toutes les charges confiftent en reves , peuvent comp
ter fur le prix de leurs domaines, à raifon de quatre
l 'h é r é d i t é
des F i e f s .
( 1 ) V oyez le jugement dit Cenfeur, qui eft à la tête de l’ou
vrage intitulé , Droit public du Comté de Provence.
�(.12 6 )
pour cent. Ils fe trouveroient blefles, fi ce droit
p a r r. i.
leur étoit ou contefté ou ravi par quelque innova
GHÀP. IV.
Règle <!es tion qui fournît leurs biens à la taille ; 8c fans doute
cftimat. déjà
citée , dans ils auraient raifon, puifqu’ils feroient réduits à pofBoniface,
tO'Ti. t de la
féder comme taillables , des biens qu’ils auroient ac
féconde compil. pag, i}}.
quis , comme ne l’étant pas , 8c dont le prix auroit
été réglé en conféquence de l’état 8c pofléfiion de
biens non taillables.
Comment donc ofe-t-on imaginer que les proprié
taires des Fiefs ne doivent pas foutenir leurs droits,
qui eft de toute autre nature Sc de toute autre force?
La non-taillabilité des biens afiis dans les terroirs
des grandes Villes , n’efi que de pur fait. Elle tient
à la facilité 8c à la pofléfiion qu’ont ces Commu
nautés de prendre toutes leurs charges fur les confommations 8c les entrées. La prérogative féodale
eft de droit public 8c privé. Elle tient à toutes les
L o ix , à tous les titres qui peuvent conftituer le
vrai propriétaire dans l’état politique 8c civil. Elle
tient même à des principes plus éloignés, mais éga
lement applicables, de convenance 8c de juftice :
car fi l’impôt réel a reçu des augmentations , les
feux 8c leur produit fe font accrus dans la même
proportion. On payoit zoo liv. par fe u , 8c quelque
fois beaucoup au-delà, à l ’époque de 1638 8c 1639.
( 127 )
Mais quelle étoit la valeur 8c le produit des feux
dans cette conjoncture ? Q u’étoit-ce que la fomme CHAP. ‘IV‘
de 200 liv. d’alors, relativement à la fomme de
qoo liv. d’aujourd’hui ? Si l’on avoit daigné faire
ce rapprochement, que nous ne faifons pas pour caufe
8c par pur égard, 011 n’eût pas probablement pro
duit la comparaifon de la cliarge des feux au tems
d’alors , avec celle des feux au tems d’aujourd’hui*
Mais fi les impôts fe font accrus , qu’elle aug
mentation la maflé des feux n’a-t-elle pas reçue ? En
15 4 9 , il étoit prouvé 8c de plus convenu qu’elle
fe trouvoit côn/idérablement groftie par les aliéna
tions faites par les Seigneurs , 8c depuis lors les
feux ont, pour aiilfi dire, centuplé, foit en conte
nance , fait en produit. L ’augmentation des feux s’eft
opérée en grande partie par les conceftions des feianeurs 8c les 1 démembremens des Fiefs. Les Fiefs
O
en ont donc fourni la matière , 8c l’on fait que le
droit de compenfation établi dans la Province , pour
conferver l ’équilibre établi par l’Arrêt de 1 5 ^ 6 ,11’abforbe pas même la moitié des concédions faites par
les Seigneurs après cette époque. Le feul article
des ufurpations 8c défrichemens dans la terre gafte,
iuffiroit pour doubler les terres qui compofoient
les feux en 1556, 8c les défrichemens font pour la
�(iz8)
PART. I
CHAI». IV
plupart impoflibles à conftater , 8c par conféquent
on ne peut pas les propofer en compenlation ( i ) .
Mais notre prérogative tombant en propriété , n’eftelle pas d’ailleurs conftitutionnelle ? N’en trouve-ton pas les bafes dans le vœu de nos anciens Etats,
dans les Ordonnances 8c Edits de nos anciens Sou
verains , dans la poflèflion qui les a précédés , dans
la nature des Fiefs provençaux 8c dans toutes les
promeffes , foit de nos anciens Comtes avant l’union ,
foit des Rois de France après l’union du Pays à la
Couronne ? Quand nos peres accordoient un don
gratuit à nos anciens Souverains, ce n’étoit que fous
la parole donnée par ces derniers que les droits ,
franchifes 8c privilèges de tous les Ordres feroient
confervés. Quand après la mort du Roi R ené, Charles
d’Anjou monta fur le Trône, nos Etats aflemblés
députèrent vers lui l’Evêque de GrafTe pour le Clergé,
le Comte de Sault pour les Nobles, 8c le premier
Syndic
( i ) Il faut ajouter à ces réflexions que les conceflions nouvelles
font tellement multipliées , qu’il n’exifle plus de terres gafles dans
plufleurs Communautés, dont les Seigneurs ont concédé tout le
territoire, qui eft tombé en roture j & que d’ailleurs plufleurs Com*
munautés ont racheté la feigneurie avec extinélion j au moyen
de quoi tous leurs biens font entrés dans les affouagemens.
( I2 9 )
Syndic ou Conful d’Aix pour le T iers, qui requi
rent 8c reçurent le ferment prêté par Charles d’An
jou ( i ) fur la confervation des droits, L o ix , ufages,
libertés 8c franchifes du Pays de Provence 8c Terres
adjacentes , 8c tant des droits généraux du Pays que
( i ) Poft hcec autem dictus excellentijjlmus Dominus nofter, ficut
prœmiffum efl, inclinatus & perfuafus, tenfis fuis ambabus manibus in dicto miffali, prenarrataprivilégia, lïbertates, capitula pacis,
mores, ritus, laudabiles confuetudines diciæ Patrice Provinciæ &
Terrarum adjacentium atque pariter
a T R IÆ
s i n g u l a r u m
p e r s o n a r u m
-
e a
RUMDEM
P
l a r i t e r
in dicto primo capitulo ipforum capitulorum expreffius de-
ET
TERRARUM
,
TAM
CE MER A L IT E R
QUA M
PARTICU
-
fignata & declarata. ( Confirmation des droits de Provence par
Charles d’Anjou du 8 Novembre 1480. ) C e A après ce ferment
que les Députés des trois Ordres reconnoiflent Charles d ’Aniou
pour leur Souverain: Dixerunt <S* palam confeffi funt prœfatum
Dominum noflrum Regem Carolum fore & effe dictorum Comitatuum
Provinciæ & Forcalquerii ac Terrarum adjacentium Comitem, ac
vero rectum , legitimum, fupremum & naturalem Dominum. Si l’on
veut lavoir quels étoient les objets compris dans ce premier cha
pitre défigné dans cette confirmation, on n’a qu ’à lire le délibéré
des Etats tenus le même jour 8 Novembre 1480. Ils y requièrent
la confirmation la plus ample de toutes les conventions, tranfactions, chapitres de paix & Statuts faits entre les anciens Comtes
de Provence & le C le rg é, la Noblefle & les Communautés >
chacun defdits Ordres pour ce qui les touche, ainfi que des pri-,
R
PART. I.
CH A P. IV.
�(13 0 )
de ceux de chaque Ordre & de chaque individu en
PART. I.
particulier.
CHAP. IV.
' Chacun connoît les claufes
■ du teflament
. . de
. .Charles
.(
d’Anjou ; 6c tous les Ordres du Pays ne doivent
jamais oublier que les Provençaux s’unirent libre
ment à la France , fous les conditions imprefcriptibles, dont le teftateur Roi avoit promis 8c juré
l’accompliflèment ; conditions également renouvellées de régné 8c en régné , 8c dans tous les titres
qui peuvent concerner l’Etat de Provence uni à la
France, comme Etat principal 8c non fubalterné.
Ainfi , foit avant l’union , Toit après , foit dans le
tems même de l’union, les Etats ont demandé col
lectivement la confervation des droits de chaque Or
dre. Les engagemens ont été refpe&ifs ; la Nation
qui fe donnoit a promis fidélité ; le Souverain qui
recevoit Ton hommage, a promis protection. Tous
vileges, franchifês, immunités & exemptions quelconques accor
dées par Ildefons, Raymond Berenger, Guilleaume & Guigues,
Charles I, Charles II, Robert, Louis, Jeanne, M arie, Louis II,
Louis III, Ifabelle & René, Comtes & Comteffes de P ro ven ce,&
leurs prédécefleurs ou leurs Lieutenans & Sénéchaux, quand même
il y ait eu non ufage ou abus, ou qu’il y ait été dérogé en gé
néral ou en particulier.
(*$*■ >
les Ordres ont ftipulé la confervation de leurs droits,
PART. I.
tant généraux qu’individuels. C ’eft pourtant au nom CHAP. IV .
d’un de ces O rdres, que la prérogative féodale eA
conteftée, quoiqu’elle fût alors établie fur des bafes
inébranlables, quoiqu’elle fût même confentie par
tous les Etats , 8c notamment par l’Ordre du T iers,
qui n’avqit rien demandé de plus que la contribu
tion des biens, démembrés du F ie f, 8c qui y étoient
rentrés autrement que par droit de Fief. Rien n’eft
donc plus refpeClable que cette prérogative.
Il exifte une troifieme époque , qui mérite de
trouver ici fa place. Après l’abjuration d’Henri I V ,
faite à la fin de l ’année 1593 , l’Ordre de la Noblefie
fut convoqué 8c affemblé le 3 Janvier 1594. Il fut
le premier à reconnoître ce grand Roi^ dont tous
les bons François ne peuvent rappeller la mémoire,
fans attendriffement. Il eut même le bonheur de
prévenir le Parlement , qui fe trouvoit alors dif- Pittoo.
Bouche.
perfé. Il donna le premier exemple à tous les O r L'honoeur
françois.
dres de la Province , qui eut aufii la gloire de le Lettres pa
tentes ou Edit
pacifica.
donner à 'toutes les autres Provinces du Royaume. de
tion du 10
Cette délibération fut accompagnée d’une Applica Mars 15^4.
tion au Roi , à l’effet de maintenir la Province 8c
tous fes Ordres, dans leurs drqits, franchifês , pri*
vileges 8c libertés. On y , trouve fur-tout une fup-
R ij
�( n 2)
plication fpéciale & très-étendue fur tous les priviPARTI.
leges, franchifes 8c libertés de la Cité d’Aix. Les
CHAP. IV.
Kegia. 1 de demandes de la Nobleffe lui furent toutes accordées
■ la Noblclîc
fol.
*par l’Edit de pacification, donné pour la Provence,
le io Mai 1594* C ’efl: pourtant dans cette V ille ,
fpécialement confervée dans toute fes immunités,
conformément au vœu de la Nobleffe, que fe for•
'N
*•
* V
, »
.
nient ces mouvemens d’effervefcence, ces fyftêmes
enflammés dont on démontre ici l’illufiori. Nous de
mandons à préfent fi la Nobleffe doit perdre fes
droits 8c fe$ propriétés , tandis que les habitans d’Aix
cohfervent toute la plénitude de leurs exemptions
8c privilèges.
pacr ,7j.
/
L ’Auteur du Droit public du Comté Etat de Pro
vence , a connu toute la force de nos preuves. Il
foutient que tous les biens, fans diftinélion, doi
vent fupporter le fardeau de la taille, parce q ue,
qui dit impofition réelle , dit une impofition qui frappe
indiflin&ement fur tous les fonds.
Le principe n’eft point exaét. Qui dit une impo
sition réelle, annonce une impofition à laquelle il
faut foumettre indiftinûement, non tous les biens
dans le fens abfolu, mais tous les biens impofables
•
••
fans diftinétion. Cet Auteur eft pourtant de la meil
leure foi du monde fur cet objet. Je m'élève ic i,
c 1 33 )
d it-il, contre toutes les idées reçues, contre tout ce que
P \RT. 1.
les Auteurs du Pays ont écrit, contre la Jurifpru- CHAI*. IV.
dence des Arrêts > contre les décifions émanées du Confeil des Rois de France , contre L ' O P I N I O N L A M I E U X
É T A B L I E y & la plus chere aux Poffédans-Fiefs. D'UN
T R A I T D E P L U M E , j'ejjaie de condamner à l'inutilité
& à l'oubli y d'immenjes recueils faits par les Jurif*
confultes de toutes les Provinces du Royaume. Mais y
ajou te-t-il, on me lira par curiojité, enfuite par in
térêt y infenjiblement l'équitable raifon fe fera jour.
Cet aveu nous auroit difpenfé de toutes nos cita
tions ; mais quand on veut être v r a i, il ne faut
pas l’être à demi. Il falloit dire que les recueils
de Jurifprudence , les décifions des Arrêts , les favantes difcuflions des Auteurs locaux , qui prefque
tous avoient rempli la place d’Affeffeur regardée
depuis long-tems comme le bouclier des droits du
troifieme O rd re, tenoient à la Conftitution, à nos
antiques ufages , à nos Loix primitives , à ces difpofitions ftatutaires 8c fondamentales, fur lefquelles
tous les Ordres de la Province fe font refpeéfivement garanti leurs droits 8c poffeflîons, dans tous
les tems, avant, lors 8c après l’union, 8c dans toutes
les conjonftures où les paftes de l’union ont été
renouvellés 8c renforcés. Nous ne fournies devenus
�g g g g g François, que fous le pafte immortel que nous conchap^iv
titillerions d’être Provençaux, 6c de jouir à jamais
de nos droits , franchifes , privilèges , libertés , tant
générales que particulières, tant à l ’encontre des
tiers qu’ entre nous.
On s’élève donc ex concejfs , contre un principe
univerfel 6c local. D ès-lors, il eft évident que cet
Auteur n’a pas écrit pour donner des lumières , mais
pour les écarter. Il fe conftitue Chef de /efte 6c ré**
formateur. Sans miffion 8c fans cara&ere dans l’Ordre
politique , il fe préfente comme infpiré. Il fe fert de
ht Conftitution pour foutenir, 6c pour amplier même
outre mefure, les droits du Tiers-Etat ; 6c il v e u t, au
nom, 6cpour l’intérêt de ce troifieme Ordre , anéantir
les droits 8t prérogatives même conftitutionnelles , des
deux premiers. Pour tout dire , en un mot, il produit
un projet d’incendie, dont il defire que le germe
produife un jour un embrafement général, par l’effet
infenfible de Véquitable raifort. Mais le cri de la
raifon naturelle 6c légale , n’eft autre que celui des
Loix 8c de Ia^ Juftice ; les vérités de droit public
6c conftitutionnel , les principes qui gouvernent le
droit inaltérable de propriété, ne s’effaceront jamais
par un trait de plume. Sans doute les biens nobles
Droit public,
font pas d9un grain différent dç ceux des biens
(us)
roturiers , quoiqu’on ait prétendu, d’un autre cô té,
P.*iRT\ l.
que les biens nobles produifoient plus que les ro CHAP. IV.
turiers y 6c quoiqu’il foit vrai que les biens des Mémoire fut
les contribu
Seigneurs, livrés à des Fermiers, ne font commu tions,
pag. 47
nément ni plantés ni cultivés , comme les rotures.
Mais la prérogative féodale n’eft pas fondée fur la
nature 6c qualité matérielle du fol. Elle a fon prin
cipe dans les Loix univerfelles , locales 6c confti
tutionnelles qui régiflènt l’importante matière des
contributions. Les fonds féodaux ont naturellement,
légalement 6c conftitutionnellement le droit de rejetter la charge de l’impôt réel fur les rotures, de
la concentrer fur les biens de cette derniere efpece.
C ’eft, fi l’on veu t, une fervitude, mais une fervitude d’ordre 6c de droit public. Les rotures n’ont
été concédées , les Communes ne font fe formées que
fous cette condition. Faudroit-il abolir les penfions
foncières, parce qu’elles font fupportées par le pro
priétaire-cultivateur , 6c qu’elles ne contribuent pas
à l’impôt réel?
�( u 6)
PART. I.
----------------------- --------------------------------------------------------------
CHAP. V-
C H A P I T R E
V.
Rcponje à l'objection tirée de ce que les deux premiers
Ordres ne doivent pas voter dans les Etats, puifqu’ ils ne veulent pas contribuer à l'impôt.
S i les deux premiers Ordres n’entroient eii aucune
maniéré en contribution , ils n’en auroient pas moins
le droit d’aflifter 8c de voter dans les Etats du Pays,
qui ne font rien de plus que l’affemblée 8c le con
cours des trois Ordres.
On raifonne toujours, dans les Mémoires pro
duits au nom du T iers, comme s’il s’agifïoit d’une
fociété privée dont il faudroit aujourd’hui régler le
régime 8c pofer les premières bafes. Dans ce cas, il
pourroit être vrai de dire que pour vo ter,. il faut
être contribuable, 8c que la force & le nombre des
fuffrages doivent être proportionnés à la mefure de la
contribution. Encore dans ce cas y auroit-il beaucoup
à dire à raifon de la prééminence des deux premiers
Ordres, 8c de l’intérêt indireét qu’ont les Seigneurs
à ce que les deniers de leurs Communautés foyent
adminiflrés avec exaftitude & fidélité.
Mais i°. nous avons un régime, une conftitution
'
qui
(ï? 7 )
qui nous réglé , 8c de laquelle il faut partir. Le
PART. I.
Souverain en nous rendant nos anciens Etats, a fait G H A P . V ,
un a£te de juftice. Il a voulu remonter notre Conftitution fur fes vrais principes j il ne faut donc pas
s’en écarter.
Dans le principe, les Communes n’exiftoient qu’en
très-petit nombre. Les Seigneurs choififloient les
Syndics de leurs habitans ; ils infpeftoient leur adminiftration \ ils s’en faifoient rendre compte. Les
deux premiers Ordres délibéroient fur tout, 5c tout
étoit payé par les rotures. Les Communes, appellées
progreflivement 5c en plus grand nombre à l’Adminiftration générale dans les derniers tems, voudroientelles reffembler à ces derniers venus, qui veulent expulfer les anciens maîtres ? Après la création des
Communes Sc leur entrée dans lesà-» Afîêmblées
na^ ^
. . .
\
tionales , les gens d’Eglife ne payoient rien ; les Sei
gneurs ne fupportoient non plus aucune contribu
tion pour tous les biens quelconques qu’ils poliedoient dans leurs Fiefs 8c Juftices; ils délibéroient
fur tout, même avec très-grande prépondérance, 8c
néanmoins toute la charge de l’impôt fe concëntroit fur les feux. T e l elî le tableau de notre droit
dans les premiers tems. Ce n’étoit ni la contribution
ni fon importance qui décidoient du droit des deux
S
�/
( ii« )
premiers Ordres, & qui en régloienc l'exercice.
PART.!.
c*à*. r .
Et qui peut dôuter du droit des Seigneurs dans
iTiypothefe fur laquelle nous raifonnons ? D e droit
commun , le Seigneur eft le pere 8c le protecteur de
fa Communauté. Il a un intérêt direét à ce que les
deniers de la Cité foyent bien employés, 8c cet in
térêt le touche directement, tanquam caput univerfitatis. De là , les Arrês ( i ) fans nombre qui ont jugé
Caneeriu*► que l’aétion du Seigneur étoit recevable, foit pour
tjT'n\ îijn. attaquer les impofitions auxquelles il ne contribuoit
£>r.bmtc». pas, foit pour coutelier fur les objets du régime
fu ftr pragm.
;
*
J
u
caf. m. auquel il n’eft pas fournis. De là, l’ufage conftant du Parlement, de n’homologuer aucun Régle
ment des Communautés, même fur les objets qui
n'intércflent pas directement le Seigneur, fans foitmontrc à ce dernier. Il ne faut donc pas être furpris fi les Etats ont délibéré , même avant la
réunion & dans le tems du débat entre les deux
Ordres fur les biens d’ancienne contribution , de
s’adrefler au Souverain pour faire maintenir les droits
i
{i) Arrêts de la Cour des Aides du 27 Juin 1764, en faveur
des Seigneurs de Vence, contre la Communauté, & du 9 Juillet
1782, en faveur du Seigneur, contre la Communauté de Val-
iauris.
^
que les Communautés avoien t, 8c dont elles étoient
jaloufes, de députer elles-mêmes leurs Seigneurs aux
Etats (1 ) . O11 voit à tous ces traits que le Sei
gneur (2) , par fa feule qualité de Seigneur, eft plus
intérelfé que tout autre à tout ce qui peut concerner
l’avantage de fa Communauté.
Il joint à cette première branche, celle de fon
intérêt direCt & perfonnel. Plus l’état de fes Com
munautés eft fiorifiant, plus fes Fiefs profperent,
& plus les droits de fa feigneurie en font augmen
tés. Voilà donc beaucoup de titres de vocation ;
voilà plufieurs bafes du droit qu’ont les Seigneurs,
comme tels, de voter 8c délibérer même fur ce qui
ne concerne que les rotures.
Mais il en eft une derniere, dont il eft impoftîble
de fe dillimuler la force. Les biens impofabies font
les feux. Les votans de d roit, indépendamment de
la Conftitution , font les polfeffeurs des feux : or
qui poffede les feux en Provence? Faut-il le répéter
encore ? Les trois Ordres. Le Clergé n’a fon im
munité que quant aux biens de l ’ancien domaine *
(1) Etats de 1440, tenus à Aix.
(2) Voyez ce qu’on a dit ci-delïus, part. 1, chap. 2, fur le
jugement rendu entre les Seigneurs Sc les habitans de la Turbie.
Sij
�( 14° )
& les Seigneurs pour leurs biens nobles & féodaux.
cdAP v ^ ûe ^aut Pas comPter pour rien
feUX q110 les
deux premiers Ordres pofledent. Dix Repréfentans de
la NobleÆe, dans les derniers Etats , en pofledoient
autant que tous les Députés du Tiers pris enfemble.
Ne fait-on pas d’ailleurs que les Feudataires contri
buent aux reves ou importions fur le comeftible, non
à la vérité dans leurs Fiefs ,' mais dans les grandes
Villes où ils font une rélidence habituelle , & plusieurs
d’entre eux une rélidence non interrompue ? La to
talité de l’impôt, dans les grandes C ité s, ne fe prend
que fur les reves. Les Étrangers, & fu r-to u t les
Seigneurs qui vivent avec plus de fafte, payent donc
l ’impôt des rotures, dans ces Cités fortunées où les
immeubles n’ont abfolument rien à fupporter. Qui
pourra douter après cela du droit qu’ont les Sei
gneurs , de voter dans les Affemblées de la Nation ,
lors même qu’il ne s’agit que d’établir & régler
l’impôt réel fur les feux ? Et comment a-t-on pu dire
qu’en délibérant fur cet objet, les deux premiers
Ordres payoient de Vargent du Tiers ( i ) ?
■.
ii
_
i
«
{ , 1
(i) Ce quon obferve au fujet des reves fupportées par les Sei
gneurs ré/idant hors de leurs Fiefs & dans les grandes Villes, me-
( *4 * )
Nous ne parlons pas ici de l ’étrange idée de propor1
A
* parr i
tionner le nombre des fuffrages & des Repréfentans à CHAPt r
la portion des contributions de chaque Ordre. Il feroit autant difficile que contraire à la Conftitution,
de faire une féparation de ce que chaque Ordre en par
ticulier pofîede, & paye dans la malle de l’affouagement. D ’ailleurs les Seigneurs avoient le droit de
voter lors même qu’ils ne payoient rien. Tous les
Fiefs avoient conllitutionnellement le droit d’être
repréfentés par leurs Seigneurs. Si le Tiers-Etat furprit des Lettres patentes au milieu du feizieme liecle , à l ’effet de faire réduire les Repréfentans des
rite d’être approfondi, & les Citoyens intéreifés à la bonne adminiftration de ces grandes Cités où tout fe paye en reves, doivent
y faire les plus férieufes réflexions. La ville d’Aix, que nous pre
nons pour exemple, puife tous fes revenus dans le produit des
confommations. Elle renferme dans fon fein plus de cent familles
nobles qui n’y pofledent pas un pouce de terre, & qui cependant
payent, fans s’en douter., une fomme énorme à la décharge de
la territorialité. Qui pourra dire, après cet exemple non exagéré,
que la Noblelfe ne paye rien ? Nous foutenons au contraire qu’elle
fupporte au moins la moitié des levées qui fe font en Provence,
foit par l’afflorinement des biens nobles, foit par la taille de fes
biens roturiers, foit par les droits municipalement établis fur les
confommations.
�C *4 * )
dew premiers Ordres > pour n’être tous cnfemble
guVu nombre égal à celui des Députés des Com
munes , ces Lettres patentes étoient contraires à la
Çonftitution. Elles furent bientôt révoquées. Les
Etats Provençaux reprirent leur forme conftitutionnelle. Ils dévoient la reprendre ; & le Tiers-Etat
fut forcé d'en convenir en 1622 , époque de l'adop
tion du Réglement de 1620, qui donnoit à chaque
F ief le droit d’avoir fon repréfentant en perfonne.
C H A P I T R E
VI .
Réponfe à Vobjection tirée du Service militaire.
Q uels font les vrais principes de la prérogative
féodale ? M. de Clapiers en rapporte trois : le pre
mier , que les Seigneurs poffeifeurs des Juflices ne
peuvent être compris dans les levées de leurs Com
munautés. Ce m otif, légitime dans les anciens tems
où l'impôt étoit m ixte, ne vaudroit peut-être rien
aujourd'hui ; mais les deux derniers fubfîftent en
core dans toute leur force.
Les F iefs, dit cet Auteur , font fournis au fervice militaire , c’eft-à*dire , aux cavalcades & autres
fervices portés par leurs titres. C ’eft à cela que fe
\
( C 145 )
réduit toute leur charge dans l’ordre politique âc
PART. I
civil. Il ne faut donc pas leur en impofer une fé cH\r. vi
condé , fans quoi ces biens feroient frappés par une
double charge ; au lieu d’être d’une nature plus ex
cellente, ils deviendroient d’une qualité pire, puifqu’ils feroient frappés tout à la fois par la charge
des Fiefs , & par celle des rotures.
- La troilieme raifon que cer Auteur damne , eft
fans répliqué pour tous les cas. Les Seigneurs ont
reçu les F iefs, pour en jouir aux mêmes titres, &
fous les mêmes prérogatives que le Souverain qui
les leur a donnés, & les biens du Souverain n’étoient pas fournis à l'impôt : o r , ces deux derniers
motifs font tout à la fois dans l'ordre des principes
du droit public univerfel, & dans celui du droit
public local & provençal. Il relie toujours vrai ,
fuivant nos moeurs & nos Loix , que les Fiefs confervent toute l'obligation de cette forte de fervice
militaire & perfonne! que l'inféodation imprime fur
la tête des poflelfeurs. Il demeure toujours vrai tpie
les Seigneurs doivent continuel' à les pofleder avec
immunité de tout impôt réel, qui ne peut fe prendre
que fur les feux.
Et là - deflus il faut commencer par écarter une
erreur qu’on a très - adroitement inünuée fans ofer
�la développer. Il ne faut pas confondre le fervice
militaire avec la convocation du ban 8c de l’ar
riéré - ban. Les Seigneurs , les fideles, les feudataires doivent leur fervice perfonnel en guerre ;
mais ce n’eft là qu’une partie du fervice militaire.
Chaque F ief pouvoit tout au plus fournir un homme
d’arme 8c tous fes accefloires. Mais le fervice mili
taire étoit dans tout le refie fupporté par les feux.
Les preuves en feront développées dans le détail
des objets que l’on fe propofe de parcourir dans la
•fécondé partie de nos Obfervations. Les Nobles fe
tenofent en armes, 8c par ce moyen toutes leurs obli
gations étoient remplies. En exaêle rigueur , ils ne
dévoient être en armes que pendant le tems porté
parleur inféodation, o u , à défaut de titre parti
culier , pendant le tems porté par la coutume. Chacun
fait que tels étoient l’inconvénient 8c le danger des
convocations du ban 8c de l’arriere-ban. Le Sei
gneur avoit le droit de quitter YOfl , 8c de revenir
dans fa maifon après le tems de fon fervice rempli.
Nous ne parlons ici que du pur droit 8c du fer
vice vraiment conflitutionnel. Il faut tout pefer,
tout éplucher vis-à-vis le Tiers-Etat : car vis-à-vis
le Souverain , la Nobleffe n’a qu’un mot à dire :
elle e f l, & fera toujours difpofée au facrifice
de
( * 4S)
de tous fes biens 8c de la vie de tous les individus
qui la compofent , quand il fera queftion de la défenfe du Roi , de la gloire du T rôn e, 8c de la profpérité de la Nation.
Ainfi, dans tous les tems, tandis que les Etats délibéroient que les Nobles refleroient en armes pour
la défenfe commune, ils délibéroient en même tems
la levée, foit de gendarmes, foit de piqueurs, foit
d’arbaletriers , 8c de foldats de toute efpece. Ils
en établifîoient la folde 8c l ’entretien , 8c toutes les
dépenfes qui fe prenoient fur les feux.
On s’efl donc permis une grande erreur, quand
on a raifonné fur la convocation du ban 8c de l ’arrie re -b a n , pour donner à conclure que toute la
charge du Service militaire tomboit fur les Nobles;
8c quand on a préfenté cette obligation des Seigneurs,
comme formant la part 8c portion qu’ils dévoient à
la maffe de l’impôt commun. Les Seigneurs dévoient
leur fervice perfonnel au Souverain, 8c tout le refie
du fervice militaire étoit dû par les feux. La preuve
de cette vérité fera développée dans la fécondé partie.
Nous la regardons comme déjà faite , parce qu’elle
exifle dans tous les cahiers de nos Etats , 8c même
des Délibérations prifes par les Communes , pour
tout dire en un m ot, dans tous les monumens qui
T
part. i.
yi
�(14 6 )
appartiennent , foit à notre hiftoire , foit à notre
PART. I.
Conftitution.
CHAP. Vf.
Il eft pourtant curieux de favoir ce que c’eft que
l’obligation des féudataires, quant au ban 8c à l’arrierè-ban. La plupart des Communautés s’y trouvoient aufli foumifes. Dans les cas où l’on faifoit
la convocation, on appelloit tout à la fois les poffelTeurs des Fiefs & Ici gens de focagi. La convo
cation ne peut s’en faire , à titre de droit 8c de juftice, qu’en cas d’invafion des ennemis en Provence.
On ne peut pas fe former des doutes la-deffus. Telle
eft la conféquence néceftaire de l ’union de la Pro
vence à la Couronne, fous la claufe 8c condition
t
que le Pays formera toujours un Etat principal 8c
non fubalterné. Cela n’a rien que de conforme au
vœu des Etats porté en 14 8 1, aux Déclarations de
Charles IX 8c de Louis X I I , Rois de France, qui
fixent 8c limitent le fervice du b an 8c de l ’arriereban, à l’effet de fervir dans la Province tant feu
lement. La derniere de ces Loix énonce encore
l’obligation de fervir dans le voifinage, ce qui ne
s’entend que pour le cas de guerre dans les Pays
voifins qui avoient fait autrefois partie de la Pro
vence.
Nous demandons à préfent fi la ceffation du ban
t
(1 4 7 ) '
Sc de l ’Arriere-ban peut fournir à l’Ordïe du T i^ s
ÎMRT.t.
une raifort ou même un prétexte pour faire ce fier t f l A h V h
la prérogative féodale. La Déclaration de Louis II
indique à la vérité le fervice perfonnel des féodataires, ‘ comme une des principales bafes de cettè
prérogative, cittento maxime, 8cc. Mais elle n’exclut
pas les autres* Il refte toujours que les Fiefs ont
été donnés, qu’ils ont été ppffédés conftitutionrtdlem ent, ainfi 8c de la maniéré que les Souverains
eux-mêmes qui les ont concédés 3 qu’ils ont été tranfmis aux Nobles pour être poffédés à jamais, fous les
charges 8c conditions nobles des Fiefs, 8c du pri
vilège éternel de ne pas être confondus avec les feux
8c les rotures. La Déclaration du Roi René , loin
d’exclure cette bafe conftitutionnelle 8c fondamen
tale , en fuppofe au contraire l’exiftence.
D ’ailleurs , l ’Ordre du Tiers eft-il recevable à fe
prévaloir de ce que le ban 8c l’arriere-ban ne font
pas convoqués ? S’il plait au Souverain de ne pas
faire cette convocation , l’obligation de fervir dans
*
le cas du ban 8c de l’arriere-ban n’exifte-t-elle pas
toujours ? Les propriétaires des Fiefs ne reconrtoiffent-ils pas l’obligation de la remplir ? Un Arrêt du
Confeil d’E ta t, en fixant le droit de franc-fief qui
1:
T ij
�049)
, — - doit être payé par les roturiers poflefleurs des Fiefs,
PART. i. jes avojt difpenfés, au moyen de cette fomme, de
GH AP. VI.
Rcg.
,
, , fervir dans le cas de ban & d’arriere-ban. La Node la
^°bfofc,.74’ klefl’e fe pourvut contre cette difpenfe, attendu que
Maï^0.1*
fervice perfonnel du ban & de l’arriere-ban étant
conftitutionnel, ne pouvoit être fufceptible de dif
penfe que dans le cas de droit : & fi cette obliga
tion fubfifte y s’il ne tient pas à l’Ordre des Nobles,
repré fenté par les Fiefs , qu’elle ne foit remplie ,
de quel droit peut-on fe prévaloir de ce que le Sou
verain n’exige pas le fervice promis par les Fideles
& dû par les Fiefs ?
Nous ne dirons pas que depuis le commencement
du fiecle, les Fiefs ont été fucceflivement chargés
de plufieurs impôts évidemment inconftitutionnels.
Tels ont été dans le tems les dixièmes. T els font
encore les droits fur les huiles & les vingtièmes.
Ces charges font infiniment plus fortes & plus onéreufes que le fervice perfonnel du ban & de l ’arriere-ban. Elles acquittent, foit par leur importance,
foit par leur permanence , dix fois au-delà de ce que
les biens nobles pourroient devoir pour raifon du
fervice perfonnel du ban & de l’arriere-ban. Cette
réflexion eft d’une évidence , d’une force à laquelle
on ne rélîfte pas. On la trouve dans un ouvrage
adopté par le T iers-E tat, qui en a délibéré Fimpreflion ( i ) .
Mais nous obfervons que l’obligation du fervice
P A R T . i.
« h a p . VI.
pour le ban & l ’arriere-ban fubfifte encore \ que
cette convocation eut lieu en 1 5 4 0 , 8c par deux fois RCgifîrC(J.
en 1659; qu’en '16 74 , la Noblefle donna 50000 liv.
au lieu & place du fervice perfonnel de l ’arriere- l6o&kfl*
ban. Et remarquez bien qu’alors tous les deniers du
Roi & du Pays fans exception, étoient levés fur
les feux. Nous ajouterons qu’en 170 7, M. de Grignan , Commandant en Provence, donna l’ordre
de convocation du ban & de l’arriere-ban. Tous Reg. fol.
34?.
les féudataires du Pays étoient difpofés à fe mettre
en armes. On n’attendoit plus que les Lettres pa la Reer&• i j
NobIc/f c
tentes fur ce nécejfaires , lorfque le fiege de Toulon
•t>V,
fut le v é , & que la Province fut évacuée par le Duc Juin 7 7>
de Savoie.
j
(1 ) A u lieu de ce fervice M ilitaire, les Poffédans-fiefs. ont con
tribué d'une autre maniéré aux dépenfes de la guerre. Les biens
nobles ont été compris dans l ’ impofition du dixième ordonné par la
Déclaration du Roi du 14 Octobre 1710, celle du ig Novembre
l373 * ceü c du 29 Août 174 1 î
dans l ’impofition du vingtième
impofé par l ’Edit du mois de Mai 174c), & des vingtièmes fubféquens. Nouveau Comment, fur
n°. 2.
le
Statut, tom, 1 , pag. 1 5 4 ,
c
�(*s°)
■ -*
imrt. r.
€NAP. VI.
Nous dirons encore qu’en 1745 > la Nobleffe n’atfencjjt pas j es orc|res du Gouvernem ent.
#
L a Pro-
r
vince étoit menacée d’une invafion des Troupes Au
trichiennes. MM. le Marquis de Palïis, de Suffren , &
de La Barben, Syndics, furent députés par l ’Ademblée
vers M. le Maréchal de M aillebois, qui fe trouvoit
fur les bords du Var, pour lui offrir les fervices du
Corps. La même offre fut également délibérée &
faite à fon Altefîe Royale l ’Infant Dom Philipe,
ainfi qu’à M. le Maréchal de Mirepoix. Le Corps
écrivit encore à ce fu jet, tant à M. le Gouverneur
ôc M. de Brancas, Lieutenant général, qu’à M. de
Saint-Florentin , Miniftre de la Province , & à M,
d’Argenfon, Miniftre de la Guerre. Il fut répondu
que la levée du ban Sc de l’arriere-ban n’étoit pas
néceffaire \ qu’on ne l’ordoimeroit que dans le cas
d’extrême néceflité. M. le Maréchal de Maillebois
accepta néanmoins l ’offre qui Jui fut faite par les
Députés T de la levée ôc fourniture de deux régimens , dont les Officiers furent pris parmi les mem
bres de l’Ordre , anciens Militaires. Les frais d’é
quipement furent faits en entier ; ils furent Sup
portés par l’ Ordre. La levée étoit même commen
cée , lorfque les Ennemis évacuèrent la Provence.
Tout ce détail n’eftpas inconnu à l’Ordre du T iersy
O s* )
puifcru’il fut tenu des conférences fur cet objet entre - ■ ■ —les Syndics de la Noblefle 5c les Procureurs du CHAr. VI.
Pays. Les feux dévoient fournir les hommes, fui- Regiftre det
vant l ’antique ufage ; la Noblefle fourniffoit les Of- Nobiefl*e,rcg.
,
.
î , fol. 4 3 4 fîciers, ÔC tout l’équipement. Le Roi accepta les
offres de la Noblefle. M. le Maréchal de Bellifle 5,
441
fit choix des Officiers , fur la lifle qui lui fut préfentée par le Corps. Ce Général donna fon voeu
ÔC fe s ordres au fujet des fournitures qui étoient nu t0j44é
à la charge de la Nobleffe. Les Procureurs du Pays
furent en demeure de fournir leur contingent , ÔC la
fourniture qui étoit à la charge de la Nobleffe fut
complettée. Tous les Seigneurs délibérèrent de plus Rcgiftre 3^
de fournir leurs propres voitures pour le trcLnfyort des JDadib-°<iu t
47
équipages 5c fubfinances. Tous ces faits font exaCtement vrais. L ’obligation du Service perfonnel, dans le,
cas de la convocation du ban ÔC de l’arriere-ban , fubfifte donc encore. Les biens nobles payent de plus la
charge très-onéreufe des Vingtièmes. Toutes les ob
jections qu’on a voulu puifer dans ce que les Fiefs
ont cédé de fupporter la charge du Service mili
taire , ne font qu’un recueil complet d’erreurs 5c
d’illufions. Le Service militaire n’a jamais été fupporté que par les feux ; Sc les Fiefs fupportent en
core aujourd’hui ? comme dans leur origine , la charge
�du Service perfonnel , dans les cas du ban 6c de
l’arriere-ban.
Et fi par le fait les Seigneurs fe trouvoient entière
ment difpenfés de la charge du ban & de l’arriere-ban,
pourroit-il en naître une raifon pour faire partager
aux Fiefs la charge des feux? Dans tous les Etats
de l ’Europe, il exifte des troupes enrégimentées,
dont la permanence rend le Service perfonnel des
féudataires à peu près inutile ; 6c néanmoins dans
ces mêmes Etats , la prérogative féodale fubfifte. En
France tous les Fiefs font frappés , au moyen des
Vingtièmes 6c de l’impôt fur les huiles , de preftations pécuniaires infiniment plus fortes que celle
qu’il faudroit établir en compenlation du ban 6c de
l ’arriere-ban , fi l’obligation en étoit éteinte: 6c fi
nous nous trouvions dans ce cas , fi d’autre part les
Fiefs n’étoient pas frappés par les Vingtièmes , s’il
y avoit en un m ot, quelque ombre de juftice à
donner une fomme quelconque pour la convocation
du ban & de l’arriere-ban , cette charge des Fiefs
ne tourneroit pas à la décharge des feux.
Au furplus, ce n’efi: que par fuppofition que
nous venons de faire ces dernieres obfervations.
Trois grandes vérités, trois points indubitables for
ment , fur cette difficulté, la défenfe des féudataires :
i°. Iis
(15 3 )
i°. Us ne doivent que le fervice perfonnel, dans
le cas du ban 6c de l’arriere-ban , 6c non des preftâtions en argent, foit pour la levée , foit pour l’en
tretien des hommes , foit pour toutes les dépenfes du
fervice militaire ; 2°. ils payent actuellement toutes
les années au-delà de ce qu’on pourroit exiger d’eux
dans les cas rares du ban 6c de l ’arriere-ban, là où
le fervice feroit converti en argent; 30. l ’obliga
tion du ban 6c de l ’arriere-ban fubfifieroit encore
au befoiu , puifque le Prince a permanemment 6c
imprefcriptiblement le droit d’ordonner la convoca
tion dans tous les cas qui peuvent la comporter , 6c
que jufqu’à préfent, les Fiefs 11’ont celle de reconnoître , d’une maniéré ou d’autre, cette efpece de
fervice , toutes les fois que l ’occafion de l ’acquitter
s’efi: préfentée , 6c qu’elle a donné naifiance en fa
veur du Souverain, au droit de l ’exiger.
Nous remarquons néanmoins, non dans l’objet de
donner des bornes au zele de la Noblefiè , pour tout
ce qui peut concerner le fervice du R o i, ainfi que
la gloire 6c l’intérêt de la patrie commune, mais parce
qu’il importe de bien connoître , 6c de fixer les li
gnes de démarcation , quand il s’agit des droits 6c
des charges des differens Ordres ; nous obfervons
que tous ces exemples de convocation du ban 6c
V
�PART. I
CHAI'. VI,
C 154 )
d’arriere-ban, de fommes payées au Souverain, ou
de fournitures faites à fa décharge en compenfation
ou acquittement du ban & de i’arriere-ban, font an
térieurs , foit à Tépoque de 1750 , tems de l’établiffement des Vingtièmes, foit à celle de la con
vention , par laquelle la Noblefie a confenti de
contribuer à l’abonnement des droits impofés fur
O 55)
Le fait eft certain. La contribution a exifté. Elle
PART. I.
exifte encore , quant à ces deux objets ; & cette CHAP. VI».
contribution , par les titres auquels il faut la rap
porter , prouve que les biens nobles ne font pas
fournis aux impôts , quant aux autres objets.
Chacun connoît les circonstances dans lefquelles
le Dixième fut établi (1 ) . La Monarchie étoit ébran-
les huiles.
(1) O11 a dit, dans le traité intitulé, Droit public du Comté-Etat
CHAPITRE
VIL
Réponfe à l’objection, tirée de ce que les biens nobles
contribuent à Vabonnement des Vingtièmes & des
droits impofés fur les huiles 3 & conclufion de cette
première Partie.
de Provence, pag. 9 9 , qu’en 1 529, François Premier établit un
dixième qui fut payé par les Nobles. Nous n’avons aucun monu
ment qui parle de cet impôt. Les Etats de cette époque man
quent, & tous les Historiens du Pays n’en difent rien. Les re
gistres de la Nobleffe de Provence ne commencent qu’en 1549.
M aison fuppofe qu’en 1529 un Edit ait paru, portant l’impofition du dixième fur tous les biens ou les revenus du Royaume, en
y comprenant tous les Ordres fans exception, certainement l’Ordre
L es Fiefs ont contribué pour les abonnemens du
Dixièm e, établi au commencement de ce fiecle,
fuccefïivement fupprimé & rétabli. Après l’extincrion du Dixième , ils ont contribué & contribuent
encore aux Vingtièmes , ainfi qu’à l’impôt fur les
huiles. De là , l’on a voulu conclure que les Sei
gneurs , propriétaires des F iefs, avoient reconnu la
néceflîté de contribuer toutes les fois qu’ils avoient
été pourfuivis à cet effet.
des Nobles n ’auroit pas refufé cette contribution * il s’agiffoit alors
de la rançon de François Premier, & de retirer les Enfans de
France donnés en otage à l’Empereur. En 1 527, François Premier
aiïembla les Notables du Royaume pour avifer au moyens de payer
la rançon promife. Le Clergé offrit, par fes repréfentans, un don
gratuit de 1300000, en fuppliant le Roi de vouloir bien s’en con
tenter. La Nobleffe tint un autre langage: le Duc de Vendôm e,
parlant pour ce fécond O rdre, dit : » Je parle au nom d'un Ordre
qui fait mieux agir que difcourir,
S
ir e
,
nous v o u s offrons la moitié
de nos biens • fi la moitié ne fuffit pas , la totalité, & pardeffus
V ij
�Sïï lée jufques dans Tes fondemens. Tous les Ordres
yn] de l ’Etat furent plutôt invités que fournis à faire
cette contribution. Tous acceptèrent l’impôt 3 il
frappoit fur tous les revenus, tant nobles que ro
turiers. Les biens nobles ri’avoient à cet égard au
cune prérogative, puifqu’ils étoient textuellement
frappés par la loi du titre.
Il en eft de même de l'impôt fur les huiles. Les
Nobles & les Fiefs, compris par exprès dans le titre
conftitutif, ne pouvoient prétendre de s’y fouflraire
tant que ce titre exifteroit. Les Vigueries abonnè
rent cet impôt. Elles voulurent enfuite faire con
tribuer les Fiefs à cet abonnement. On a contefté
nos épées & jufqu’à la derniere goutte de notre fan g. Mais je ti en
gage que ceux qui font ic i; les autres ne peuvent l'être que par
l e u r
c o n s e n t e m e n t
l i b r e
.
Envoyé f dans les Provinces des hommes
accrédités, ou donneq commijfion aux Baillis d’affembler la Noblejfe de leur diftricl ; quils lui expofent ce que vous nous aveq fait
entendre, & foyeq ajfuré qu’ il ne fe trouvera pas un Gentilhomme
en France qui penfe autrement que nous. « Hifi. de France, conti
nuation de M. Garnier., tom. 2 4 , pag. 314. Voilà le tableau
raccourci de la Conftitution Françoife & Provençale. Si tous les
Ordres de l ’Etat avoient donné à cette époque une partie de
leurs biens -, fi la NoblefTe en avoit donné la moitié ou la totalité,
pourroit-on en prendre droit pour rejetter aujourd’ui fur les Fiefs
les charges des rotures?
Os
7)
pendant long-teins de part & d’autre 3 des C o n s
tations avoient été rapportées en différens tems 3
•il avoit été tenu des conférences, fans qu’on pût par
venir à s’entendre. La défenfe de la Noblelfe confiftoit à dire que les Fiefs ne pouvoient pas être
impofés , & qu’ils n’étoient contribuables, ni pour
les deniers du R o i, ni pour ceux du Pays. La ma
xime étoit convenue : & comment auroit-on pu la
contefter ? Ce principe n’eft rien de plus que le réfultat de tous nos titres conflitutionnels.
Mais 011 ajoutoit de la part du Tiers , que les
Edits portant établiflement de l ’impôt fur les huiles,
frappoient textuellement fur les Nobles , 6c fur les
fruits des fonds nobles. Faites révoquer l’E d it, difoient les Adminiftrateurs des Vigueries 3 & s’il efl
décidé que les huiles des fonds nobles ne doivent
rien fupporter , nous obtiendrons une diminution de
notre abonnement 3 mais tant que l’Edit fubfiflera,
il fera vrai que nous payons le contingent des No
bles , & par conféquent à leur décharge. L ’argu
ment étoit fans répliqué 3 il étoit impofîible de faire
révoquer ou reftreindre la loi d’un impôt, qui, tout
inconftitutionnel qu’il étoit, avoit pourtant pris une
conliftance dans la Province , foit par fa perma
nence , foit par l’abonnement délibéré par le vœu
PART. 1
CH AP. V it
�C I 58 )
de l’Aflemblée des Communautés. La Noblefle confentit à payer par ces confidérations , 8c parce qu’elle
étoit textuellement comprife dans l’Edit.
Les mêmes confidérations fubfiftent, quant à ce
qui concerne les Vingtièmes. L ’impôt fut établi gé
néralement fur tous les revenus, tant Eccléfiaftiques que Nobles 8c Roturiers. C ’eft ainfi qu’il exifte
avec fes augmentations fucceflives. Il n’y a jamais
eu de difficulté , tant fur le Dixième que fur les
Vingtièmes. Les befoins extraordinaires de l’Etat,
ont exigé ces fubventions fur tous les revenus des
Sujets , en y comprenant littéralement les revenus
nobles. Nous regardons comme principe , 8c comme
vérité confiante, que les fruits 8c revenus nobles
ne peuvent être frappés par l’impôt , quand ils n’y
font pas expreflement fournis ; 8c ce principe eft
fondamental en Provence. Mais quand la Loi les
frappe dans fon texte , ils deviennent contribua
bles , tant que la Loi fubfifie.
De là , nonobftant la contribution des Fiefs &
des biens nobles à l’impôt fur les huiles, au Dixième
8c Vingtièmes ; contribution devenue légale par le
confentement, foit formel , foit préfumé des No
bles , la prérogative féodale fubfifie encore dans fa
plénitude fur toutes les autres levées. Les biens nô-
0 5 9)
blés ont payé les contributions pour les Vingtiemes. Ils contribuent à l’abonnement de l’impôt fur lARr L
r
CIIAP. VII.
les huiles, en force des difpofitions légales qui le
portent par exprès. Ils n’ont rien payé fur tous
les autres impôts quelconques ; 8c les Adminiftrateurs du troifieme O rdre, ont reconnu dans le même
tems que' les biens nobles ne dévoient rien payer.
On n’a qu’à voir toutes les Délibérations des Com
munautés , qui ne font que la fuite des principes
conftitutionnels , renforcés par les titres les plus folemnels , 8c la pofleffion la plus antique 8c la plus
confiante. On n’a qu’à voir encore tous les procès
qui ont pafiè fous les yeux des Adminiftrateurs du
T ie rs-E ta t, ou dans lefquels ces derniers font in
tervenus. Toutes les Confultations données par
l’Ordre des Avocats , toutes les décidons d’Arbitres , foit M agiftrats, foit Jurifconfultes, fuppofent , reconnoifl'ent ou déclarent l’exiftence de cette
prérogative , qui remonte aux premiers tems de notre Conftitution , 8c s’incorpore indivifiblement avec
elle. En difant aux féudataires qu’ils dévoient con
tribuer aux Dixième , Vingtièmes , 8c à l’impôt fur
les huiles , en rejettant tout le refte du fardeau fur
les feux, le T ie rs-E ta t a convenu, les Jurifcon
fultes ont penfé , 8c les Tribunaux ont décidé que
1
�(16 0 )
s- la contribution aux abonnemens de l’impôt fur les
PART.
huiles & des Vingtièmes , ne pouvoit lêrvit* ni de
tHAP. V „
motif, ni de prétexte pour faire contribuer les biens
nobles à tous les autres objets, qui furent dans tous
les tems, qui font 8c devront toujours être à la
charge des feux.
Voilà donc encore un coup le véritable tableau
de la Conftitution de Provence, quant à la contri
bution aux impôts, 8c quant aux principes qui les
gouvernent. Beaucoup plus étendue qu’aujourd’hui
dans l’origine des F iefs, cette prérogative a fouffert
des variations 8c des réductions, quant aux biens
d’ancienne contribution. Elle n’a jamais fouffert l’at
teinte la plus légère ; elle ne peut en fouffrir au
cune , quant aux biens nobles 8c féodaux ; 8c le fort
des biens d’ancienne contribution, eft définitivement
réglé par les Arrêts folemnels de 1556 & de 1702.
Comment donc peut-on, au nom du Tiers-E tat,
attaquer cette prérogative , ainfi reconnue 8c refpeétée dans tous les tems ? Que pouvoit-on efpérer
de quelques exemples ifolés , équivoques, obfcurs,
8c q u i, bien entendus , font tout autant de preuves
de cette même prérogative , tandis qu’un titre for
midable a dit à tous les Ordres en 1406, que
d’u/àge & de Conftitution, les Fiefs de Provence
n é t oient
n’étoient tenus de droit à aucune contribution, foit
quant aux charges royales , foit quant à celles de
la Communion ; que celles qu’ils avoient fupportées
par le paffé, dans des tems orageux , ne pouvoient
être regardées que comme des facrificesgénéreux 8c
volontaires ; 6c qu’il faudroit porter le même Juge
ment à l ’avenir de celles que leurs poffellêurs pourroient s’impofer dans les mêmes circonfiances ?
Ainfi , avant l’Edit de Louis II , nous n’avons
qu’un exemple de contribution réelle, 8c quelques
exemples de" contribution perfonnelle fur les reves ;
mais contributions volontaires , 8c confenties dans
des tems de calamité. Après cette époque, nous 11e
trouvons plus aucun impôt réel, même dans les tems
les plus critiques, c’eft-à-dire , dans les tems de la
prifon 8c de la rançon de François Premier. Que
voit-on avant 8c après ces époques, 8c dans tous
les tems intermédiaires? L ’impôt, dans toute fa plé
nitude , tomber 8c fe concentrer fur les feux , enfuite du vœu formé dans le fein des Etats, dans
le fein même des Communes , q u i, dans des tems
d’orage 8c de détrefle ont demandé de légères con
tributions à titre de grâce, fans pouvoir les obte
nir ; 8c qui n’ont menacé de fe pourvoir à l’effet
de les faire ordonner , que pour rendre les. droits
X
p a r t . 1.
c:i ap . v u .
�( 162 )
imrtT
^eS
touj ours plus impofans , 8c pour prêter
«hap. vu. de nouvelles forces à la poflellion exécutive de nos
titres conftitutionnels.
Voilà donc notre but rempli. Le droit des Fiefs
ne peut pas être méconnu. On a dit vainement, pour
colorer l’erreur du fyftême produit au nom du
Tiers , qu’on ne vouloit tromper perfonne, 8c qu’on
avoit donné le jour de l ’impreffion aux titres dont
on s’étoit étayé.
Sans doute le deffein de tromper n’étoit point dans
l ’intention des Ecrivains dont nous venons de com
battre les erreurs. Mais les intentions les plus droites
doivent fe garantir des écueils de la prévention. Si
l ’examen de la Conftitution avoit été fait avec im
partialité, on ne fe feroit pas contenté d’extraire quel
ques exemples qui ne prouvent rien ; on auroit parlé
de la poflèffion antique qui prouve tout. Sans cette
prévention, en raprochant les exemples dont on abufe
de la Déclaration de Louis I I , on auroit vu que
les Nobles n’avoient contribué que palfagerement,
dans des tems difficiles , 8c toujours parce qu’ils
l’avoient voulu , avec le droit de ne pas le vouloir.
Chacun connoît combien les tems étoient malheu
r i i fi
reux en 139$ > & dans les années fuivantes , tems
de la guerre du Vicomte de Turenne en 1525 8c
il
;
( i 6 3)
quelques années fuivantes , tems de la prifon 8c de
PART. 1.
la rançon de François Premier ; 8c cependant dans CH AP. VU.
ces deux époques , on ne trouve même aucun exem
ple bien précis de levées faites réellement fur les
biens féodaux. Les feuls exemples bien clairs d’une
pareille contribution , fe trouvent dans ce qui fut
fait dans les Etats tenus à Aix en 1374 : or c’eft
même dans ces Etats , les plus anciens qu’on ait
pu fe procurer, qu’011 trouve les traits les plus
expreffifs de tous les principes que nous avons cidevant pofés fur notre Conftitution.
On a déjà vu dans quelles circonftances ces Etats c,f“®
nv™*
furent tenus. Elles font relevées par Noftradamus, f8Al§x ’ p3g*
8c par Pitton. Elles fe lient même avec l’Hiftoire
générale. On connoit le fait des grandes Com
pagnies y qui , après que les troubles de Bretagne eu
rent été appaifés , fe liguèrent entre elles , pour
s’établir dans les Provinces de France, ou pour les
ravager \ on fait que du Guefclin reçut 8c exécuta
la commiffion de les conduire en Efpagne ; qu’elles
paflerent par Avignon , où la Ville , le Pape 8c fa
Cour qui y fiégeoit alors, furent rançonnés. Tout
ce détail eft dans l’hiftoire de ce Connétable.
Ces grandes Compagnies ne comprenoient pas Tom. Mir.
3 , pagv 3
tous les débris des Armées, que la paix de BretaX ij
�(16 4 )
; gne avoit fait renvoyer. D ’autres bandes fe formè
PART. 1
par l’exemple 6c le fuccès des
chap . vu, rent , encouragées
grandes Compagnies. Arnaud K nolles, dit Pitton,
ou Servoles , dit M. Papon , appellé VArchiprêtre ,
fuivit la même marche.
Les Tardvenus vinrent en<i
fuite. Ces troupes étoient compofées de Gafcons ,
de François, d’Anglais 6c de Bretons. Tous les
pays qui compofent aujourd’hui le Royaume de
France , étoient fucceflivement menacés. La Pro
vence avoit été dévaftée 6c rançonnée. Il avoit
même été délibéré de rafer tous les Villages non
Pitton ibU. fortifiés. O11 craignit une invafion nouvelle en 1374.
Les Etats tenus à cette époque, ne permettent pas
d’en douter. Ils furent tenus pro adveniu focietaiis
Briconorum y c’efl ce qu’on voit dans ce titre. Ils
furent convoqués pour avifer aux moyens de mettre
la patrie commune en défenfe, contre ces hordes,
d’enragés, dont la Provence fe trouvoit encore me
nacée, 6c pour la mettre en état de réfifler aux ef
forts ijlarum pefliferarum gentium qui hanc patriam
invadere jarn minantur. Ce trait, pris dans le texte
même, indique aflez qu’elles étoient alors la force
6c la calamité des circonftances.
On y délibéra la levée de deux cens lances qui
feroient prifes dans l’Ordre des Nobles, 6c parmi
'
. (165)
tous ceux qui fe trouvoient en état de porter les
armes. Il fut dit par exprès que les terres du D o
maine , des Prélats 6c Barons contribueroient aux
dépenfes néceflaires. Les Prélats 6c Barons fe fom
mirent , par une difpofition particulière, à payer
deux florins fur cent florins de revenu. Il fut dit
que tous les autres fervices dus au Souverain, c'eflà-dire les cavalcades, cefièroient dans la circonftance. Il y fut dit fur-tout que toutes les immu
nités feroient fufpendues ; 6c cela ne fut ainfi déli
béré par. les Trois-Etats , que fous la proteflation
exprefie que cette délibération ne feroit jamais ti
rée à conféquence , quod ipfi vel aliquis ex eis non
pofjlt trahi ad confeqiicntiam per facram excelientiam
reginalem diclorum Comitatuum Frovinciœ & Forçaiquerii CommitijJam & Dominam , nec per diclum Dorninum Senefcallum , feu aliquem Ojjicialem reginalem ,
pro fatnro tempore NISI PRO ISTA VICE TANTUM
EA ORDINAVERUNT DE GRATIA SPECIALI ET ABSQUE PREJUDICIO PRIVILEGIORUM , LIBERTATUM ET
IMMUNITATUM
T r IUM STATUUM ET CUJUSLIBET
EORUMDEM QUIBUS SEU EORUM ALTERI
MISSA NON
PER PRÆ-
INTENDUNT PRÆJUDICARE IN ALIQUO
NEC ETIAM DERROGARE.
Cela répond en même tems aux induftions qu’on
PART. I.
CHAP, VII.
�(i66)
voudroit tirer des Etats fans date, ou pour mieux
dire, des fuppliques faites par les Etats, 6c répon
dues par le Sénéchal de la Reine Jeanne , qui compofent la première des pièces prétendues juflificatives produites dans le recueil , en foutenement du Mémoire du troifieme Ordre. Il y a
tout lieu de penfer que ces fuppliques ne furent
faites qu’en exécution du voeu des Etats de 1374;
6c dès-lors cette piece s’explique par les Etats de
cette époque, fuivant ce qu’on vient d’en dire.
Veut-on au contraire, comme quelques-uns le pré
tendent fans garans 6c fans preuve , que ces fuppli
ques fe rapportent à l ’année 1367 ? On trouvera dans
les tems d’alors les mêmes raifons 6c les mêmes ca
lamités, pour exciter la contribution volontaire de
tous les Ordres. Cela n’aura pu fe faire 6c ne fe
fera fait que fans tirer à conféquence, 6c fous la
réferve des droits compétans a chacun d’eux, avec
d’autant plus de raifon, que cette réferve fe trouve
bien développée , 6c de plus acceptée 6c con
venue par tous les Ordres en 1374; 6c cela fe
trouveroit encore mieux expliqué, 6c de plus for
mellement confirmé par la Déclaration de 1406, qui
rappelle les tems difficiles dans lefquels les Seigneurs
avoient volontairement contribué pro centenario, 6<
( ï 67 )
qui déclare que ces contributions avoient été vo
PART.I.
lontaires 6c de pure générofité ( 1 ). A infi, nous en CHAP. V U .
convenons , les pièces juftificatives ont été fournies
de bonne foi. Mais ne refte-t-il pas toujours dans
l ’efprit de tout leéleur impartial 6c qui veut s’inftruire, la curiofité de favoir pourquoi l’on s’eft con-
( 1 ) On trouve dans cette piece une désignation qui peut embarraffer le Leéleur. C ’efl: celle du mot glavium, qui ne fe ren
contre ni dans les Hifloriens , ni dans les vocabulaires. Le texte >
loin de réfoudre la difficulté, ne fert qu’à multiplier l’embarras. II
parle vaguement de tallia glaviorum. Il ajoute qu’il efl libre à tout
le monde de le fournir en nature, en retenant les deniers: Dummodo parati exijlant & aperti ut ad primum mandatum pojjint cunt
cœieris accedere cum glaviis, armati à capitc ufque ad pedes, vcL
aptos alios mandare ad cognitionem Conneftabili...... pro quorum
glaviorum quolibet viginti procurentur floreni : ce qui pourroit in
diquer une impofition relative à la fourniture d’un homme d ’armes,
d’autant plus que fuivant le texte, les florins à lever font déclarés
devoir être employés in prœdiclis glaviis. Au refte, cet objet efl
plus curieux qu’utile pour notre queflion ; mais ce qui pourroit
renforcer nos principes, fi toutefois ils en avoient befoin, c’efl
qu’il efl dit que l’impofition de glaviis fera fournie pro deffenfionç
hujus Patrice & infrà diclam Patriam, & non extrà ; ce qui nous
rapproche du ban & de larriere-ban , & donne un nouveau jour
aux maximes ci dtvant rappellées, tant fur cet objet que fur I’enfemble de notre Conflitution.
�C
PART. I
CHAP. VII
tenté de ne ramaflér que quelques traits ifolés, qui,
bien approfondis , prouvent démonftrativement l’exiftence de la prérogative, 6c pourquoi Ton n’a pas
mis fous les yeux de la Nation qu’on, vouloit inftruire, les traits fondamentaux , invariables 6c conftamment reconnus par tous les Etats du Pays , con
firmés par tous les Souverains, réclamés par tous
les Ordres, 8c même par les Communes dans tous
les tems ; ces traits, dont l’origine fe perd dans la
nuit des tems, en fe confondant avec l’origine des
Fiefs. D ’où vient que ces traits caraCtériftiques 6c
décilifs font pleinement 8c fyflêmatiquement écartés
dans les difcuflions imprimées dont nous venons de
parcourir les principes? D'où vient qu’on a préfenté
comme réglé ce qui n’a jamais pu exifter que comme
exception j comme exemples de contribution forcée
8c de droit, ces cas rares, calamiteux, 8c au-defiiis
de toutes réglés, qui ne préfentent que des contri
butions volontaires ? D ’où vient qu’on a gardé le
filence le plus abfolu fur les grandes occafions dans
lefquelles nos débatsont été jugés, nous ne dirons pas
par les Ordonnances de nos Souverains, tant anciens
que modernes, nous ne dirons pas non plus par les
Arrêts de tous les Tribunaux , ce qui néanmoins
fuffiroit pour mettre nos queftions à l’abri de tout
doute,
i !&>")
doute , puifqu’il n’appartient qu?aux Loix publiques,
locales 8c conftitutionnelles d’établir des principes
fur cette importante matière , mais par tous les Affefleurs, par tous les Jurifconfujtes nationaux, par
le vœu confiant, 8c fans celle reproduit de toutes les
Délibérations de nos Etats , 8c même des Affemblées
des Communes de Provence. Ainfi notre objet eft
rempli. Deux traits de la plus grande vérité fortent
de notre difcuffion : i°. nous avons renverfé toutes
les, indu&ions qu’on vouloit tirer des pièces juftificatives, mifes fous les yeux de tous les citoyens.
Nous avons prouvé que ces pièces , bien approfon
dies , 8c difcutées avec exactitude , formoient des
bafes nouvelles, pour établir 8c confirmer la pré
rogative des Fiefs ; z°. nous avons prouvé de plus
que cette prérogative inconteftable , n’avoit même
jamais été contcftée. La reprife des E tats, malheureufement fufpendus depuis près de cent cinquante
ans , eft donc la feule caufe de cette efpece d’effervefcence qui a produit les conteftations actuelles.
Vous voulez délibérer, a-t-on dit aux deux pre
miers Ordres , il faut donc que vous partagiez tout
le fardeau de l’impôt., Cette erreur n’a féduit que
ceux qui veulent l’être. La Province eft telle qu’elle
étoit en 1639. Ses Loix n’ont pas varié depuis cette
Y
�( 17 ° )
—■ époque. Elles ne l’auroient pas pu. Mais de fait,
jJ* elles ont fubfifté, ncnobftant que rAdminiftration
fût en fouffrance depuis la fufpenfion des Etats.
Quelles étoient donc nos Loix à l’époque de 1659?
Les Etats de ce tems , conformes à tous nos titres,
donnent là-deffus les plus grandes lumierés ; & ce
qui s’eft pratiqué depuis cette époque dans les tems
poftérieurs, où les repréfentans du troifieme Ordre
avoient toute prépondérance dans rAdminiftration
générale , met les principes que l’on a ci - devant
pofés au-deflus de toute conteftation. Ainfi la pré
rogative exifte dans tous les fens & fous tous les
rapports pofîibles. Elle tient à toutes les bafes qui
peuvent foutenir un droit quelconque , & le rendre
facré dans l ’ordre de la fociété politique & civile :
Loix d’origine, fortant de l’ordre & de la nature
des chofes , Loix conftitutionnelles ; Loix promul
guées par les Souverains , acceptées par la Nation ;
Loix de propriété ; Loix de pofîelîion , & de poffefïïon cimentée par tout ce qui doit attirer le refpeô des Nations, en matière de droit public & privé.
Voyons à préfent quels font les objets que cette
prérogative embraffe. C ’eft la matière de la fécondé
Partie de nos Obfervations.
PART. II.
SECONDE
CH APITRE
PARTIE.
PREM IER.
Obfervation générale.
J*OUR bien connoître l’étendue de la prérogative
féodale , il faut rapprocher les titres de la polfeffton. Il faut voir ce que nous en avons dit dans la
première P artie, en difcutant la Déclaration de
Louis I I , & la poftéflioil qui l’avoit précédée &
fuivie. Les biens nobles font exempts, non feule
ment de tôute contribution aux charges royales,
mais de toute colle&e relative aux deniers communs,
de donis > talheis & oneribtis nobis concefjis > & de
omnibus oneribus incumbentibiis univerfitati. Par la poffeftion , les biens nobles & féodaux font également
exempts de toute contribution à la levée des deniers
3 u Roi & du Pays : voilà nos réglés.
Et quand nous parlons de pofîelîion, nous fommes bien éloignés de vouloir pofer ici les bafes d’une
pofleflion prefcriptive. Nous favons que les impôts
appartiennent au droit public ; que l’immunité ne
peut en être acquife par la poffeflioii même la plus
Y ij
CH AP. h
�'?W
'
( *7 2 >
ancienne. Mais la poffeflion n’efl-elle pas formida
PART. II.
ble, quand elle marche à la fuite de la loi publi
CHAP. U
que 6c des titres conflitutionnels ? C ’efl à la loi pu
blique qu’il appartient de fixer la nature 6c qualité
des biens taillables , & de ceux qui ne le font pas;
&C la pofiéfiion interprété la Loi dont elle n’eft que
l’exécution.
Mais la; Loi conflitutionnelle eft la plus impérieufe 6c la plus facrée de toutes , puifqu’elle tient
aux principes éternels fur lefquels la fociété s’eft
formée ; principes fous l’empire defquels tous les Or
dres- ont promis de vivre à jamais , 6c dont ils fe
font refpeéiivement garanti l’obfervation. Il fuffiroit donc à la Nobleflé, qui fe préfente fous les
aufpices des droits conflitutionnels 6c de la pofîèffion la plus impofante, d’avoir établi que la charge
royale 6c les charges communes ne doivent pas. tom
ber fur les biens nobles.
Mais il faut prouver fpécifiquement que les Etats
repréfentans tous les Ordres de la Nation Proven
çale , ont conflamment reconnu cette réglé fonda
mentale de notre Conflitution. Il efl donc tems
d’entrer dans là particularité de tous les objets que
cette difcuflion embraflé. Cela devient d’autant plus
néceffaire , qu’on prétend , dans un des ouvrages aux-
( i? î )
quels ces Obfervations répondent, que la nature
des impofitions oblige les trois Ordres de contribuer
à leur payement, fuivant la force 6c l’étendue de
leurs poffefîions. Après ce que nous venons de dire,
il faut prendre la propofition contradictoire, 6c l’on
fera fixé fur une vérité confiante. Les détails vont
en donner une nouvelle démonflration.
C H A P I T R E
IL
Le Don gratuit.
O n n’étoit certainement pas bien inflruit, quand
on a préfenté cet o b jet, comme devant naturelle
ment être levé fur les Fiefs 6c fur les feux. Tous
les titres, monumens 6c exemples que notre Conftitution préfente , prouvent invinciblement le con
traire.
N’oublions jamais la Déclaration de Louis I I , 6c
toutes les concefîions des dons gratuits dont notre
hiftoire nous offre l’exemple. Le î^rince demandoit
des fecours ; les Etats offroient 6c donnoient une
fomme ; ce don étoit gratuit, c’efl-à-dire volontaire.
L ’expreffion même de don gratuit, fe rencontre dans
une foule de Délibérations : o r , ces concefîions faites
part . il.
CHAT». I.
Droit public
du Comte Etat de Pro
vence , chap.
t , pag. iS.
�( 174)
• par la N ation, par le vœu réuni des trois Ordres
1
PART. II.
dont
elle
étoit
compofée,
devoient-elles
fe
lever ôc
CFI A P. II.
Te levoient-elles en effet, fpr les Fiefs ou fur les
feux? O fera-t-o n prétendre que les biens nobles
dévoient y contribuer? La Déclaration de Louis II
*
-
•
nous dit le contraire. Elle déclare les biens des Sei
gneurs exempts in donis > talheis & fubfidiis nobis
concefjis. Remarquez bien les termes de ce texte ,
toute impofition royale s’y trouve comprife , in
talheis & fubjîdiis. On y trouve de plus l’exprelfion
formelle du don gratuit, in donis nobis conceffis.
Nos peres ne s’y font jamais trompés. Ils offroient au Souverain une fomme déterminée , plus
ou moins forte, fuivant le tems , les circonftances, les befoins & les moyens. Ils en ordonnoient
tout de fuite la levée fur les feux , c’efl-à-dire fur
les biens roturiers.
A préfent que la Conftitution efl connue, il n’efl
plus tems de dire que les Eccléfiaftiques & les No
bles avoient la gloire d’ojfrir l'argent du Tiers. Ils
offroient leurs propres deniers, comme poffefîeurs
des rotures & des feuls fonds qui fuffent fournis au
fardeau de l’impôt. De là , l’on voit dans prefque
toutes les concédions , accordées pour la plupart
fous la dénomination de don gratuit, la fupplica-
O 75 )
tion de tous les Etats , pour faire accorder aux C i
PART. II.
tés le droit d’établir des reves , à l’effet de mettre CIIAP. II.
le Pays, c’eft-à-dire les feux , mieux en état de
foutenir le fardeau des charges délibérées : & l’on
doit remarquer que les Etats reconnoifloient euxmêmes que les Seigneurs n’étoient pas fournis aux
reves impofées par les Communautés ; de maniéré
qu’ils avoient conftitutionnellement le droit de ne
pas contribuer, tant au payement de l’impôt, pour
ce qui concernoit les biens féodaux, qu’aux charges
perfonnelles établies dans leurs Communautés, T el
éto it, tel eft encore le droit commun. Cette dou
ble prérogative a fubfiflé jufqu’à préfent.
Pourquoi donc les Etats demandoient-ils la permilîion , en faveur des Communautés, d’établir des
reves , fi ce n’eft parce qu’il étoit reconnu que le
don gratuit qu’on venoit de délibérer , étoit à la
charge des Communautés , dont les terroirs renfer
ment toutes les rotures poffédées par les Membres
des trois Ordres ?
Mais a-t-on befoin d’une preuve conjefturale ?
N’avons-nous pas là-deffus les titres les plus politifs & les monumens les plus authentiques ? Dans
les premiers tems, le Souverain 21e prenoit en Pro*
vence que des dons volontaires. Qui les délibéroit?
�PAKT. 11.
CIIAP. II.
Tom. i ,
psg. itx .
Droit public,
p g . 18.
(176)
Les Etats. Qui les payoit? Les feux, formant la
maflê des biens impofables, & appartenant aux indi
vidus de tous les Ordres.
A in fi, quand l’Auteur du traité fur notre Adminiftration a dit que la Nation entière contribue en
corps au don gratuit, il a produit une vérité à
laquelle tout le monde doit rendre hommage. Mais
il ne falloit pas en pervertir le fens. La Nation en
tière paye y parce que la charge tombe fur les feux
poffédéspar la Nation entière. Pouvoit-on fe tromper
là-defliis ? Tels étoient le droit & l’ufage. Il n’exiftoit même fur cet objet ni conteftation ni prétexte
à conteftation , lorfque cet ouvrage a paru.
Anciennement, nous a-t-on dit, le foiiage étoit un
impôt royal. Comme tel > il étoit demandé aux trois
Ordres & accordé par tous fous le titre de don gra
tuit. Voilà donc notre queftion décidée. Le don
gratuit étoit demandé aux trois Ordres. Il étoit de
mandé à tous, & accordé par tous. Mais qui le payoit,
fî ce n’eft les feux ? Les fonds nobles entroient-ils
en contribution? La Déclaration de 1406 nous dit
qu’ils n’y étoient (jamais entrés. Le droit commun,
la nature des Fiefs, les Jugemens locaux qu’on a
pu fouftraire à l’injure des tems„ confirment cette
vérité.
Elle
c 177) _
Elle l’eft de plus par une foule d’exemples cou^
,
.
T1 PART. II.
temporales.' Un voit un don gratuit en 1419. 11 (HAp n
eft aflis fur les feux, fans aucune efpece^de contra
diction. Bouche l’hiftorien nous attefte à la vérité Tom. 1 ,
qu’en 1 5 3 1 les Etats généraux affemblés à Aix , ac- p s cordèrent un don de quinze florins par feu. Mais
cela ne confirme-t-il pas tout ce que nous -avons
déjà dit là-deflus ? Si le don étoit à raifon de tant
de florins par feu , il n’étoit donc aflis que fur les
feux. Dans ces mêmes Etats , on impofe encore trois
florins par feu , pour l ’Univerfité & les dépenfes
de l’année. On pourroit ajouter que les Etats ou
l ’Aflemblée des Communes , tenue à Marfeille le 6
Décembre de la même année , délibérèrent la levée
de deux mille hommes , pour raifon defquels il fut
impofé fept florins deux -fols par feu. Quelques
Communautés protefterent de leur prétendue exemp
tion. On fent bien que les Seigneurs n’avoient rien
à dire ; les biens nobles , qui n’ont jamais été com
pris dans les affouagemens, n’étoient pas touchés
par ces impôts.
Au furplus , rien n’eft plus expreftif que le tableau
de nos Etats. Quelquefois on accordoit une fournie
déterminée, & la levée en étoit de fuite ordonnée
Z
�( ï 78 )
■ ■ ■— par égalifation fur les feux. Plus fouvent encore,
p a r t . il. l’impôt &
l’aflife étoient délibérés, par la même
CHAP. II.
/
1
oraifon, à raifon de tant par feu. Dans un cas
comme dans l’autre, l’impôt étoit toujours aftis fur
les feux.
Les Etats de 1442 délibérèrent plufieurs dons,
foit en faveur du Roi R en é, foit en faveur du Duc
de Calabre, & du grand Sénéchal. Si les impôts , à
cette époque , avoient été portés, fans exception ,
fur tous les biens , cet effort feroit volontaire. On
le rapporteroit à la faveur ou à la force des circons
tances. Mais on ne voit pas comment on a pu dire
biie^pig. H. fur ce fa it, que , quand même Vhiftoire ne nous diroit
pas que les trois Ordres en payèrent leur contingent,
il feroit aifé de fentir que le Tiers-Etat feul ne devoit pas être obligé de payer un don gratuit de cette
nature. On fent à ces traits combien l’Auteur eft
tremblant & peu fur dans fes affertions. Il veut éta
blir la contribution au don gratuit dans tous les cas.
Il cite un exemple dans lequel il pouvoit être queftion de la rançon du fils du R o i , fuivant ce qu’il
en dit lui-même. Si les F ie f avoient contribué dans
cette circonftance , il faudroit louer le zele volon
taire & généreux de la Nobleffe , 5t non affervir
.
fes biens féodaux au don gratuit. Mais où trouve-
0 7 9)
t-on que les biens nobles foient entrés en contribu
tion dans les levées délibérées par les Etats en 1442 ? irART. U.
Cil A?. 11.
On fuppofe finement que l ’hiftoire l’attelle , & les
Hiftoriens n’en difent pas un feul mot, Dès-lors
la préfomption de droit feroit que ces levées furent
afiifes fur les feux. Mais on n’a pas befoin de pré
fomption y les Etats de 1442 font fous nos yeux.
On y trouve la concefiion de 60000 florins en fa
veur du Roi René, de 1000 en faveur du Duc de
Calabre , de pareille fournie pour fa femme , & de 1 500
florins pour le Sénéchal ; le tout accordé à titre
de don gratuit : & de plus , les Etats ordonnent que Etat* de
chaque Lieu , Ville & Cité feront tenus de contribuer 17 7 v ' . y air.
pour leur part audit don, fuivant le nombre de feux :9.
& le dernier ajfouagement. De fuite, ils demandent
en faveur des Communautés la permilîion d’établir
des reves. Il en eft donc de ce don gratuit, comme
de tous les autres ; il fut fupporté par les feux.
C ’eft ce qu’on trouve encore dans tous les Etats
fubféquents , où toutes les fommes demandées par
le Roi , & délibérées par les E tats, ne font ac
cordées que pour être levées fur les feu x, & où
tous les Ordres conviennent que telle eft la Loi du
Pays.
Remarquons que cette Loi doit principalement
Z ji
�1 frapper fur le don gratuit. Dans les premiers tems ,
p a r t ii
chav.*h
•
^
!ic* Pas
^es -^tats ne connoifloient d’autres charges que celle
du don gratuit, qu’ils étoient les maîtres d’accorder
ou de refufer. Ces dons comprenoient tous les im
pôts établis au profit du R o i , pour quelque caufe
qu’ils fuflént demandés. Il falloit expofer des befoins, pour engager la Nation à donner des fubfïdes. Comment donc a-t-on pu propofer férieufement le projet de rejetter le don gratuit fur les biens
nobles , tandis que ce don comprenoit autrefois toutes
les demandes & les befoins du Souverain , & que
conftitutionnellement, d’ufage antique & lé g a l, cet
impôt qui les comprenoit tous , étoit fupporté par
les feux ?
En 1639, les derniers Etats établirent, fuivant
l’ufage , fur les feux le don gratuit ou les levées
qui en tenoient lieu. Les Affemblées qui ont fuivi
cette époque, ont conftamment adopté le même principe. Elles ont délibéré le don , tant pour elles que
pour les Etats, & fauf leur ratification ; à la bonne
heure : mais les Etats auroient-ils fait & pu faire
autre chofe que d’afféoir fur les feux la charge du
don gratuit, qui eft à la vérité le tribut de tous
les Ordres , mais le tribut de tous les biens con
tribuables pofledés par tous les Ordres. Et quel avan-
( 181 )
tage pourroit-on tirer de ce qui s’eft paffe dans les
PART. 11
derniers Etats de 1787? Si les intentions Ôt les CM A P . I I .
inftru&ions de MM. les Commiflaires avoient été
fuivies, tous les Ordres feroient réglés, comme ils
devroient l’être , fur les contributions. Le don gra
tuit a été demandé aux Etats \ il a été par eux dé
libéré comme il l’étoit dans les anciennes Affemblées
de la Nation, c’eft-à-dire, comme impôt royal &
réel , dont l’aflife conftitutionnelle ne pouvoit être
faite que fur les feux.
Mais ne s’eft-il pas formé un nouvel ordre de
chofes depuis l’époque de 1661 ? Alors le don gra
tuit fut aboli par un traité folemnel fait avec le
Roi ; & s’ il a été rétabli de nouveau , c’eft à raifon
des prétentions du Roi à l’effet de rentrer dans fes
Fiefs & Domaines \ l’Arrêt obtenu par la Nobleflé en 1668, qui déclara les Fiefs de Provence
héréditaires & patrimoniaux, fut le prix du rétabliffement du don gratuit. T e l eft le développement
de l’obje&ion préfentée avec une obfcurité qui pa'
/
roît affeftée \ voici la réponfe.
.Le don gratuit fut fupprimé en 1661 , tems du
trop fameux Edit du Minot. Cet Edit fut la fuite
d’une convention délibérée dans une Aflêmblée des
Communautés. Le prix du fel fut alors augmenté ;
\
�(182)
& par les augmentations qu’il a progrefïivement reçues
PART. II.
après ce funefte exemple, le fol ingrat & flérile de
CHAP. TI.
Provence a perdu le feul avantage qu’il tenoit de
la nature, celui des troupeaux & des engrais qui
peuvent feuls aider à l’infertilité naturelle de nos
fonds ( i ) .
femens, que chacun voit que le peu de fruits que l'on recueille ne
O »,)
Par cet arrangement, qui tenoit lieu de don gra
pa r r. n.
tuit , les deux premiers Ordres fupporterent une CHAP. Il*
charge qu’ils ne dévoient pas. Le Clergé & la Noble/fe voulurent s’aflembïer pour s’oppofer à l’enrégiflrement de l’Edit. Cette Loi pouvoit être jufte
pour le T iers, en mettant fur le prix du fel la
charge du don gratuit jufques alors rejettée fur les
feux. Mais elle étoit injufte ÔC cruelle pour les deux
premiers Ordres. Un Arrêt du Confeil d’Etat, por P r o c c î-v c r bal du 4 Seprcir.brc i 6 6 \ ,
tant défenfes, foit au C lergé, foit à la Noblelfe de dans
les R c s de la
fe convoquer pour délibérer , pour quelque caufe & giftre
N oblcflc, Reif t. 1 , f o l .
fous quelque prétexte que ce puiffe être , fût lig gliu
nifié à Me. Duperier, Syndic de robe, au moment
où les repréfentans des deux Ordres alloient s’affembler chez lui.
Auroit-on dû fe permettre de fuppofer que les
opérations de 1661 avoient un rapport quelconque
avec la rentrée du Roi dans les Fiefs & domaines
engagés, & fur-tout avec les conteftations qui s’é
levèrent fur la patrimonialité des Fiefs de Provence?
Il n’a jamais été ni tranfigé , ni fait aucun traité
fur le droit qu’a le Roi de rentrer dans les domaines
aliénés en engagement. Quant à ce qui concerne la
patrimonialité des Fiefs de Provence, elle a fait
peuvent être vendus. La quantité des troupeaux en Provence a
matière d’une difcuflion judiciaire, qui n*a été ter-
( i ) Les malheurs occaûonnés par la cherté da lel avoienr cté
prévus. Us comrnençoient à être fends en 1668, tems où Me.
Gaillard, AfTefTeur , obfervoit que par la Déclaration de Sa Majejlè
de Vannée 166 1, le prix du fe l ayant été augmenté jufqu'au double y
dans la Province, qui par le bienfait de la nature, le donne &
le diftribue aux autres Provinces , Sa Majcflé lui a promis, foi &
parole de R o i, de la décharger de tout don gratuit à perpétuité >
& de toute forte de demande qu'il lui pourroit faire pour la fubfiftance des Troupes , quartiers d'hiver ou autrement, & de plufieurs
autres dépenfes y exprimées ; ce qu elle a plus de droit d'attendre
à préfent que par le pajfé , puifque la paix a été confirmée dans
ce Royaume ; néanmoins il efl obligé de dire que cette Province
n'a encore reffenti aucun effet de cette Déclaration de Sa Majcjlê,
dont elle fupporte la charge avec tant d'incommodité , que la grande
cherté du fe l a détruit prefque toutes les ménageries de la Province,
les gens des champs ne pouvant entretenir leur bétail à faute de
f i t , * où viennent tant de mauvaifes récoltes & flérilités ordinaires
qui font que les fruits ne peuvent fujfire aux tailles, voire même
la Province a fouffert en général & en détail de f i grands épui-
décru depuis lors de plus des neuf dixièmes.
�i
— ■ - minée que par le fameux Arrêt de 1668.
PART n
1
1
Le re-
cii^r n cueil , fait là-deflus par Me. Gaillard, lors Syndic
de la Noblefle , eft connu de tout le monde. Ou
y voit que les Fiefs du Pays furent déclarés patrie
moniaux , comme ils dévoient l’être, par l’Arrêt du
15 Juin 1668. Ce titre eft confirmatif de tous les
droits de la Noblefie de Provence. Il prouve que
nos Fiefs font de vrais patrimoines, dans toute la
plénitude des droits qui leur font attribués par la
Conftitution du Pays. Ce titre n’a rien de commun
avec les difpofitions de l’Edit de 1661 , qui n’eft
rien de plus que le développement du traité fait
alors avec le R o i , & par lequel les feux dévoient
être foulagés du don gratuit, par la promefle de n’en
plus demander à l’avenir.
Cet arrangement ne fut pas plutôt conformité,
qu’il parut un Arrêt du C onfeil'du premier Juin
1662 , & une commiffion aux Officiers y dénom
més , à l’effet de drejjer leurs Procès-verbaux de l'état
des derniers affouagemens des Villes & Lieux dudit
Pays de Provence ( & Terres adjacentes ) , enfemble
de tous les changemens qui peuvent y être faits.
voy. l’Arrêt Cette commiflion parut alarmante ; elle l’étoit en
Je 1664, dans
icfccoo'i voi. effet. On vit dès-lors qu’il
ne feroit *plus auefiion
eu nouveau
1
*
£a™rnpagtl
40>
^on Sratu^5 ma^s Cïue
f° uage étant abonné,
.
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-
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Y/’ •‘
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( l8î )
le Gouvernement demanderoit l ’augmentation de cet
PART. a.
abonnement proportionnellement à l’augmentation c h a p . n .
furvenue dans la valeur & le produit des feux.
D e là l’Affemblée de Lambefc tenue en Mars 1664
délibéra le don de 300000 liv. pour faire révoquer
l ’Arrêt de 1662, & la commiffion donnée en conféquence. De là le don gratuit a toujours été renouvellé. Il a été fucceffivement porté à la fomme
de 700000 liv. Mais toujours il a été reconnu dans
les Affemblées des Communautés que cette l evée,
conftamment préfentée fous la défignation de don
gratuit, 11e feroit prife que fur les feux. Jamais jufqu’à préfent on n’avoit ofé propofer de l ’afféoir fur
lés Fiefs & les fonds nobles.
C ’eft, dit-on, l’hommage & le tribut de tous les
Ordres. Propofition inexafte autant qu’infidieufe :
il falloit dire que le don gratuit efl le tribut St
l’hommage des feux pofîëdés par tous les Ordres.
Après 1664, dit-on encore, le Gouvernement motivoit cette demande fur la nécefiité de purger les
mers du levant, St autres objets de cette efpece. A
la bonne heure 5 mais, i°. tout ce qui tend à lever
des deniers' pour la guerre , 11e peut pas concerner
les Fiefs, qui ne font fournis qu’au fervice perfon*
n e l : 2 0. qu’importent les motifs oftenfibles du don
A a
�(*86)
gratuit, quand ori fait d’ailleurs que le vrai prin
PART. II.
cipe de fon renouvellement eft pris dans le double
CH AP. II.
objet, i°. de conferver la liberté des affouagemens;
2°. de prévenir l’augmentation d’abonnement du
fouage que le Gouvernement auroit pu ou qu’il fe
propofoit de demander ; $°. 8c finalement, on n’a
qu’à voir nos titres conftitutionnels : ils portent l’ap
plication de la prérogative féodale fur les dons,
tailles & fu b fd es, ce qui comprend les impôts de
toutes les efpeces, quelle qu’en foit la dénomina
tion. Qu’on y joigne encore le vœu permanent des
Etats 8c des Communes fur l’exiftence 8c l’authen
ticité de cette prérogative, tant dans les tems anté
rieurs à l’union que dans les tems poftérieurs, tant
avant qu’après l’époque de 1659. Si l’on ajoute à
tous ces traits le vœu de tous les Jurifconfultes
locaux 8c de tous les Alfelfeurs, on fera forcé de
renoncer à l’évidence, ou de convenir que la pré
rogative s’applique encore plus eflentiellement au
don gratuit qu’à tous les autres impôts. Il y a même
une raifon de plus pour le don gratuit, tel qu’il
exifte de nos jours 8c après l’Arrêt de 1661 , puifqu’il n’eft rien de plus dans le fond qu’un fupplément du droit de fouage inconteftablement dû par
( i 87 > ,
Et quel avantage peut - on tirer, de ce qu’en asan
PART. II.
1745 , le don gratuit de 700000 liv. ne fut ac CH A p. 11.
cordé qüe par les Procureurs nés 8c joints ? Ces der* Droit pu
blic , pag. i f .
niers firent alors ce que l’Afièmblée des Commu
nautés auroit fa it, fi elle eût été convoquée, ce
qu’elle faifoit auparavant, ce qu’elle a fait dans la
fuite farns difficulté : Ils firent l’affiete du don gra
tuit fur les feux.
On fent bien que ce don n’a pas changé de na Ibid.
ture, quand la demande en a été faite en 1787. Le
don gratuit demandé'aux Etats, remis en aftivité , 8c
par eux accordé , eft le don des Sujets du Pays de
Provence, le don de la Nation entière & en Corps.
Tous les Poffédans-biens impofables en payent leur
part 8c portion. Ce don eft le même que celui de tous
les tems, foit avant, foit après l’union 3 foit avant,
foit après l’époque de 1639 ; foit qu’il fût délibéré par
les Communes , ou par l’Aflemblée racourcie 8c repréfentée par les Procureurs nés 8c joints 3 foit en 1745 ,
foit à toute autre époque 3 à l ’exception néanmoins
des conjonêtures orageufes 8c difficiles , qui ont paru
mériter aux féudataires le facrifice généreux d’une
contribution volontaire , nifi voluntariè confentirent.
Voilà donc des principes fur le don gratuit : ti
les feux.
tres conftitutionnels 8c de tous les tems 3 Jugemens
A a ji
�(i88)
de tous les Tribunaux, qui font conftamment partis
de ce principe fondamental, & qui en 'ftatUant fur
le droit de Forain, ont décidé que le don gratuit
étoit le tribut des feux, que par conféquent les deux
premiers Ordres né dévoient y contribuer que pour
les biens compris dans les affouagemens ; 6c puifqu’il faut tout dire, défaut d’intérêt de la part du
troifieme Ordre ; car , fi par une infra&ion de notre
Conftitution , 8c par un attentat aux propriétés féo
dales , il pouvoit être ftatué que les biens nobles
doivent contribuer au don gratuit, ce qui eft impolîible à prévoir, dans une Monarchie gouvernée
par les L o i x , le troifieme Ordre n’y gagneroit rien.
Le don gratuit feroit augmenté à proportion de l’augmention fürvenue dans la malle des biens contribua
bles. Les Fiefs feroient dépréciés contre tout droit
5c juftice , Sc le Gouvernement, en attentant aux
propriétés, en détruifant les droits 6c la confiance
des Ordres, fe permettroit la plus injufte 6c la plus
impolitique de toutes les opérations , puifque la Noblefle regarde comme un de fes plus beaux droits,
l’obligation volontaire que tous fes Membres s’impofent, dans les cas de calamité, de facrifier leurs
biens 6c leurs vies pour la défenfe du Trône 6c de
la Patrie.
f :r\
PART. II.
CIIAP. III.
C HA P IT RE
III.
Fouage y Taillon, Subjîde.
N OUS
confondons ces trois objets d’impofition ,
parce qu’ils font confondus dans les difcufiions qui
en ont été faites. Le fouage, a-t-on dit, étoit un
impôt royal , 6c comme t e l , il étoit demandé aux
trois Ordres, 6c accordé par tous , fous le titre de
don gratuit. Honoré Bouche , dans fon Hiftoire de
Provence, rapporte que les Etats généraux affemblés
à Aix en 1541 , accordèrent, pour contribution,
un don de 1 5 florins par feu.
Pourquoi s’attacher à prouver que le fouage étoit
un impôt royal ? Il ne peut exifter aucun doute làdeffus ; 6c c’eft parce qu’il étoit impôt ro yal, qu’il
devoit être, 6c qu’il étoit conftamment rejetté fur
les feux. Il ne falloit pas citer feulement les Etats
de 1541 , rapportés par Bouche, 6c ceux de 1442.
Il falloit dire que tant que le fouage a exifté , il a
été pris, comme il devoit l’être , fur les feux. Le
fouage eft le don gratuit que les Etats du Pays accordoient au Souverain. On le prenoit donc, fuivant Bouche, fur les feux. Tous les Etats enfemble
Droit public ,
pag. 18 & 51.
�C r9° )
1 1 le délibéroient. Chaque Ordre avoit Ton confenteciiAp1 ni! lîient à donner, pour fixer & afleoir l’impôt fur les
feux. Ce qu’on voit dans ces Etats, fe rencontre
dans tous les autres. Les trois Ordres délibèrent
«•
Vf. '\ \ t }m
l’impôt, & la levée en eft faite fur les feux , c’eftà-dire, fur les rotures poffédées indiftin&ement par
les Membres des trois Ordres.
Pag. jo.
Le taillon , nous dit-on , eft un objet purement
militaire, dans lequel le peuple ne devoit pas en
trer. Il étoit à la charge des F iefs, qui en 1549,
étoient encore obligés de lever des Troupes j & de
les foudoyer.
Ce n’eft qu’une nouvelle erreur dans tous les rap
ports fous lefquels cette propofition peut être confidérée. Le taillon eft un fupplément de taille ; &
certainement la taille n’a jamais été prife que fur
les feux. Il étoit impofé pour l’entretien de la Gen
darmerie. Mais il ne faut pas confondre les dépenfes
pour des objets militaires auxquels les Fiefs n’ont
jamais été fournis , avec le fervice perfonnel du ban
& de l ’arriere-ban , dans lequel les obligations des
feudataires fe trouvent concentrées. Les levées &
l’entretien des Troupes font à la charge des feux,
chap. *Ac Nous l’avons déjà prouvé. Nous le prouverons enla première
tàitit.
core mieux, & avec plus de développement, quand'
0 9 0
è
il fera queftion de difeuter cet objet dans tous fes
P ART. Udétails.
CH AP. III.
Quand nous difons que le taillon étoit levé pour
l ’entretien de la Gendarmerie, nous nous fondons
fur tous nos monumens. L ’Auteur du Traité f u r Tom-t>Pas,
,8,‘
l’Adminiftration de Provence, le fait remonter à
Henri I I , & à l’époque de 1549. Il cite là-deflus
le Commentateur des Statuts. Mais ces Doctrines
font furabondantes. On n’a qu’à parcourir tous nos
anciens Etats, & les Délibérations des Communes;
on y trouvera par-tout l’impôt pour l’entretien de
la Gendarmerie , affis & levé fur les feux jufques
en 1632, tems auquel il fut abonné par les Etats.
• Ainfi , par exemple, dans ceux tenus à Marfeille
au mois de Février 1578 , on voit l’impofition de 14
liv. 4 f. par feu, pour la folde de la Gendarmerie.
On trouve la même levée , la même application,
& la même affiete dans la Délibération des Etats
tenus à Saint - Maximin en Février en iç8o. Les
Etats de 1 5 8 1 , tenus dans la même Ville & dans
le mois de Juillet, délibèrent la levée de quatorze
florins par feu , pour la Gendarmerie & taillon. On
voit dans les Etats de 1596, le Comte de Carces
& le Marquis d’O raifon, requérir d’impofer encore
un écu par feu pour ïentretenement de la Gendarmerie.
�i
PART. II.
CHAP. III.
(19 2 )
Après un premier refus, les Etats y confentent. On
impofe encore fur les feux pour rentretenement de
la Compagnie des Gendarmes , dans l’Aflèniblée
des Communautés, tenue à Salon en 1598. En
1568, les Etats tenus à Aix , avoient également
impofé par feu pour le même objet.
Pour tout dire en un mot, dans tous les tems,
les Etats 8c toutes les Aflemblées ont conftaminent
reconnu , fans aucune efpece de difficulté , que le
taillon eft le repréfentatif des frais d’entretenement
8c folde de la Gendarmerie : Or cela confirme tous
nos principes ; i°. le taillon eft taille ou charge
royale, il eft donc à la charge des feux ; i°. quoi
que fixé par les Etats, il n’en eft pas moins fupporté par les rotures, 8c non par les Fiefs ; 30. les
fonds nobles ont Ià-deflus titre 8c poftêffion , 8c poffeffion reconnue , tant par la Nation , que par les
Communes aflemblées , délibérant fans gêne 8c fans
contradiction ; 40. ce font les Etats qui délibèrent,
8c ce font les feux qui payent r parce que les Etats,
délibèrent pour les feu x, 8c n’obligent régulière
ment que les feux 8c les rotures.
Cet impôt du taillon, repréfentatif des frais de
l ’entretien delà gendarmerie, fut abonné en 1632
pour la fournie de 70000 liv. annuellement payée
au
0
09?)
au Roi. Qui doit payer cette fournie ? Qui l’a payée ?
Après les obfervations que nous venons de faire
fur cet objet, il eft évident que le paiement ne
-peut en être fupporté que par les feux. Que le
taillon foit un don, une taille ou un fubfide, la
dénomination eft indifférente. Cet objet eft frappé,
quant à la prérogative féodale, par les principes
8c les titres de notre conftitution. Il étoit conftamment rejetté fur les feux avant l’abonnement. Auroit-il changé de nature après cette époque ? L ’abon
nement repréfentatif de l ’impôt ne devoit-il pas tou
jours, comme l ’impôt, être payé par les feux? Cela
n’a jamais fait matière à difficulté. Auffi depuis 1632
jufqu’à préfent, les feux ont-ils conftaminent payé
la fournie abonnée, fans qu’il foit jamais entré dans
l’efprit de perfonne de vouloir y foumettre les
Fiefs. Nous n’avons pas ici des Etats 8c des Affemblées à citer en détail. Un feul mot vaut des
pages entières d’indications. Dans tous les tems l’en
tretien de la gendarmerie , repréfenté par le taillon,
8c le taillon repréfenté par l’abonnement, ont été
pris 8c levés fur les feux.
Le fubfide , eft l’extinClion par abonnement de
l ’impôt fur le vin. C ’étoit un impôt : les Fiefs ne
le dévoient donc pas, non plus que les fruits en proBb
PART. II.
CHAP. III.
�C r 94 )
cédant. Nos titres conftitutionnels font certainement
PART. IL
clairs & bien impofans. Le fubfide ne fut
CHAP. III. bien
Adminiftrar. établi d’abord que pour fix ans ; il fut enfuite pro
du Corme de
Provence ,
rogé. Il eft abonné depuis 1703 à la fournie de
tom. i , pag,
i ÿO.
20000 liv. L ’objet ne vaut pas la peine d’être cité.
Cependant comme il faut tout difeuter , nous n’avons
f
befoin que de rappeller ce que nous en avons déjà
fuprA , dit. Le fieur de Rogiers avoit abonné ce droit, &
paît i > chap.
z.
cet abonnement n’eut pas lieu. Les Communes vouloient le tenir & faire contribuer les deux premiers
Ordres. Elles avoient furpris là-deffus des Lettres
patentes dont elles vouloient faire ufage. Sur l’oppofition des deux premiers Ordres, elles firent un
Etats du 15 mouvement, en s’écriant à haute voix qu’elles apNov.
prouvoient & ratifioient l’article , ainfi que les Let
tres patentes fur ce obtenues. Les deux premiers Or
dres ne ratifièrent ni l’article ni les Lettres patentes,
& leur confentement eût été néceffaire autant que
celui du troifieme. Mais les Etats & les Délibéra
tions des Communes ont reconnu conftamment, de
puis cette époque , que cet objet devoit tomber fur
les feux, & cela n’a pas fait matière à difficulté à
l’époque de l’abonnement fait en 1703, ni depuis
lors.
Qu’étoit - ce d’ailleurs que le droit de fubfide ?
V iâ .
O 95)
On voudroit fe prévaloir de ce qu’il eft établi , fans
diftinftion , fur tous les vins du Pays , avec exclufion de toute exemption & privilège. C ’eft ce qu’on
n’a pas manqué de relever ^ même avec beaucoup
d’affe&ation, fur l’Edit de fon étab lifte lient qui eft
du 2 Septembre 1561 ; mais on s’eft bien gardé de
dire que les Fiefs n’y font pas compris nommément.
On s’eft gardé de dire encore que cet impôt
n’étoit établi que comme une fubvention paftagere ,
pour éteindre les dettes de la guerre paftee , & pour
acquitter des dépenfes qui n’étoient & ne pouvoient
être qu’à la charge des feux. On s’eft gardé de dire
fur-tout, que ce droit n’étoit pas aftis fur la pro
duction , mais fur chaque muid de vin qui entreroit
dans les villes clofes du Royaume. C ’étoit un droit
d’entrée ; il attentoit au droit que les Communautés
prétendoient avo ir, d’impofer fur les entrées & confommations, pour alléger le fardeau de l’impôt réel.
Les Communautés feules fe trouvoient intéreflées à
l’abonner ou à l’éteindre ;
c’eft: encore une confidération majeure, qui fervit, comme tant d’autres,
à faire rejetter l’impôt fur les feux.
On voit à préfent quel étoit l’intérêt des Com
munautés , & l’objet qu’elles avoient en vue, lors
de cette explofion enflammée qu’elles firent dans les
B b ji
P A R T . II.
CHAI>. III.
�(19 6 )
:----- -
Etats, fur l’annonce de l’abonnement fait par le
PART>n* heur
c
a
R
*
c h a p . in.
de
Kogiers.
Elles vouloient avoir tout le produit des reves,
& le Roi vouloit le partager avec elles , en impofant fur les vins d’entrée. Les deux premiers Or
dres ne répugnoient pas au traité ; mais ils difoient
avec raifon , que l ’extinâion du droit tournoit toute
entière à l’avantage des Communautés, qui, par cette
raifon , dévoient feules le fupporter j & la vérité
de cette exception eft aujourd’hui plus frappante que
jamais. Outre la reve impofée fur les vins forains,
par la prefque totalité des Villes clofes, deux Villes
confidérables exigent en Provence, qui reçoivent
prefque tous les vins des Vallées voiftnes , foit pour
la confommation de leurs habitans, foit pour ali
menter leur commerce & leur fabrication. Les vins
perçus dans les Fiefs voifîns payent l ’impôt , non
de cinq fols par muid , mais de trente fols par millérole \ ce qui produit à ces deux Villes une fomme
énorme. Les Seigneurs des alentours payent, par
ce moyen , à ces Communautés majeures , audelà même des 20000 liv. pour lefquelles le fubfide eft abonné par la Province. La Noblefte trouveroit à gagner , fi les vins des Fiefs payoienr
au Roi cinq fols par muid, au lieu des reves , qui
007)
font généralement établies par toutes les Commu
nautés des Villes clofes.
part.
ir.
C H A P. IIU
C H A P I T R E
I V.
Levées des Troupes > dépenfes fur cet objet, &
Milices.
IL ne faut pas perdre de vue la diftin&ion qu’on
a faite ci-devant, entre le fervice perfonnel du ban
& de l’arriere-ban , & la levée, folde & entretenement des gens de guerre ftipendiés. Cette derniere
dépenfe n’a jamais celfé d’être à la charge des feux.
Le Tiers-Etat en convenoit en 1549. Il obfervoit Anèit ie
Papon,liv. f ,
qu’on connoiftoit en Provence deux fortes de fub- tic. 11 > chap.
i , , p a g . 183.
fides , l’ un nommé fouage, qui ejl certain fur chaque
feu de quatre écus par an; Vautre eft incertain &
ample, fans limitation & indéterminé, concerne la dé~
fenfe & confervation du Pays de Provence, ajjls en
frontière près de la mer méditerranée oppoftte au Pays
d>Afrique , & à ces moyens Juhjet à incurftons & pz7leries que font journellemant les Pirates & Ecumeurs
de mer Africains , bien fouvent vus en grand nombre
de galeres & galiotes > & à quoi il faut obvier ; &
pour ce faire font contraints Provençaux entretenir
�( >9* )
— bonne & sûre garde tout le Ions: de la côte de la mer
PART. 11.
çmap .
f V
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iv # A U X D É P E N S D E S
VILLES ET VILLAGES
n
DUDIT P A Y S ,
( c’eft-à-dire aux dépens des feux ).
Souvent pour cette caufey & même en teins d'été,
font contraints fortifier la garde & lever les fouages,
qui efl par fois deux hommes pour chacun fe u , qui
font fept ou huit mille hommes payés par le Pays au
fo l la livre. Davantage ledit Pays efl fujet au pajfage
des armées de mer de l'Empereur & des Genevois , pour
aller d'Italie e\ Efpagnes, & au contraire des E[pa
gnes en Italie & par mer, ce qui ne peut fe faire fans
paffer tout le long de la côte de Provence & y féjourner ; fur quoi faut que ledit Pays tienne bonne garde
& que de rechef il ajfemble les gens de fouage pour
la défenfe des lieux maritimaux...... lefquels fouages
ne peuvent être levés quils ne coûtent goooo ou 40000
liv.
Ne peut le Roi envoyer gens en Piémont fans pajfer
par la Provence, dont le pauvre populaire efl contraint
fournir vivres & faire étape qui efl une charge prefque
ordinaire, & auffi d'avoir & entretenir la garnijon de
deux ou trois compagnies, vivres> logis , bois & ufi
renfiles pour les petfonnes , & fourrage pour les che
vaux. . . . la fortification & entretenement des forterejfes
que le Roi fait journellement faire & les pionniers, ma-
O 99)
nœuvres , munitions & argent qu'il faut fournir , l e s -----~=
_
^
ia
«
*11
^ l A 1 II*
réfections des ponts & pajfages, clôtures des villes & CHAP i v .
autres infinies charges dudit Pays de Provence...... &
fi efl le plus chargé & le plus ajfervigé de tous les
Pays de ce Royaume, tellement que chacun fe u , tant
des charges ordinaires qu'extraordinaires par chacun,
an y efl chargé de cinquante écus qui revient à plus de
deux cent mille écus. On a voulu mettre ce pafTage
en entier fous les yeux des Le& eurs, parce qu’il
efl: très-inftruâif fur notre conftitution, & parce
qu’il renferme les aveux les plus folemnels de la
part du troifieme ordre fur la prérogative des Fiefs.
Et qu’on y prenne bien garde. Le T iers-E tat
partoit d’une grande erreur, quand il préfentoit
toutes ces charges portées fur les feux, comme tom
bant fur le pauvre Peuple y puifqu’elles frappoient.
fur les Membres de tous les Ordres , poiïedans des
rotures ou des biens affouagés \ & c’eft ce qu’on ne
manquoit pas d’obferver de la part des Gens d’Eglife , Nobles feudataires , & Magiftrats privilégiés.
Mais un point majeur fe préfente là-deffus. Le TiersEtat convenoit que toutes les dépenfes dont on vient
de parler, dévoient tomber fur les feux. Il fe gardoit bien de demander que les Fiefs & les fonds
nobles en partageaient le fardeau. Sa prétention
�—
— n’avoit d’autre objet que celui de le faire partager
jjr
aux biens d’ancienne contribution. On regardoit
«HAP. IV.
donc alors, & on préfentoit au Parlement de Paris,
comme un principe incontestable , que toute la dépenfe relative à la levée , folde 8c entretien des Mi
litaires , devoit tomber fur les feux.
Et quand nous n’aurions pas ce monument, com
bien d’autres de toute efpece n’en trouveroit-on pas
dans les diverfes Délibérations des Etats 6c des Affemblées mêmes des Communes ? On a dit dans un
Droitpublic, ouvrage, que les F eudataires étoient obligés de lever
des Troupes & de les foudoyer. Cette étonnante pro
position a flatté les Membres du troisième Ordre,
qui l’ont accueillie comme une vérité démontrée.
Elle n’eft pourtant qu’une erreur inexcufable , qui
ne peut procéder que de ce qu’on a mal à propos
confondu le fervice militaire , constamment fupporté
par les feux, avec le fervice perfonnel du ban 8c de
l ’arriere-ban, formant la charge des Fiefs. Cette
confuSîon fe reproduit dans tous les ouvrages qui
ont paru fur la matière des contributions. On a dit
que toute la charge du fervice militaire retomboit
fur les Nobles, pour en conclure que toutes les
levées relatives à cet o b jet, doivent tomber fur les
Fiefs.
Tel
( 201 )
T el n’étoît pas le langage de nos peres en 1547,
ni dans aucune autre époque. Dans tous les tems
il a été d it , & on a tenu pour confiant, que les
levées des Troupes fe faifoient fur la maSTe des
feux , & des perfonnes foumifes à la taille, 8c que
la charge des Fiefs étoit acquittée par le fervice
perfonnel, ou par les preftations réglées dans le cas
du ban 8c~de^l’arriere-ban. C ’eft principalement
pour la levée 8c l ’entretien des Troupes, que les
tailles ont été établies, 8c que les dons ont été ac
cordés & augmentés dans les Pays d’Etats. Cela
fe démontre avec force 6c clarté, par la chaine
des titres conflitutionnels de la Province. C ’étoit
à raifon des guerres qu’ils étoient obligés de foute n ir, que nos anciens Souverains demandoient
des fecours à la Nation. Ils expofoient le poids
des dépenfes militaires qu’ils avoient à fupporter ;
& la Nation , en leur offrant des fommep détermi
nées , en ordonnoit la levée fur les feux.
Quelquefois les befoins étoient tellement prefîans ,
les cas qui les faifoient naître tellement extrêmes,
qu’ils requéroient le concours de tous les Ordres,
6c de toutes les efpeces de fervice. Alors il étoit
dit que les Nobles fe mettroient en armes, 8c qu’on
PART. II.
CHAT. IV .
«/
feroit des levées y foit; d’arbaletriers , foit dç lan-t
Ce
/
�ciers, foit de gendarmes , en nombre déterminé
par les circonftances ; & toutes ces dépenfes , foit
de lev ée, foit d’entretenement, étoient aftîfes fur
les feux. Ainfi , dans le même tems, dans les mêmes
E tats, dans les mêmes Àflemblées, on faifoit cette
diftin&ion fondamentale , fur laquelle on voudroit
s’aveugler aujourd’hui. En ftatuant qu-e les Nobles
fe tiendroient en ar(nes , il étoit décidé qu’ils rempliroient par là les devoirs qui leur étoient impofés
par les Loix & conditions de leur inféodation ; en
remettant fur les feux toutes les levées pécuniaires,
relatives au fervice militaire, il étoit également dé
cidé que telle étoit la charge des rotures : car après
ce qu’on a déjà d it, il eft de la derniere évidence
que toute levée impofée fur les feux , étoit, par
ce feul trait, fans aftion & fans aucune prife fur
les Fiefs, qui n’ont jamais été compris dans lès affouagemens.
Dans d’autres circonftances moins extrêmes., on
délibéroit les dépenfes militaires, foit'dans les Etats,
foit dans les Aflemblées des Communes , & l ’on ne
faifoit jamais difficulté de les afleoir fur les feux.
Levées, logemens , étapes ( i ) , ufteniiles , folde,
---------- -------------------- ------- :---—---—----------------( i)
Au fujet des étapes, voyez tous les Etats .& toutes les
AfTemblées qui en parlent * voyez fur-tout au fujet des vivres
(2 0 3 )
entretenement, tout étoit pris fur les feux , en compenfation de plus fortes fommes, que le malheur ou
la nécéflité des circonftances auroit mis le Souverain
en état de demander en augmentation du don gra
tuit. T el eft le voeu de la N ation, tel eft l’hom
mage qu’elle n’a jamais ceflé de rendre dans tous
les tems aux principes de notre Conftitution. Toutes
TAflemblée de la Nobleffe & des Communes, tenue à Riez en
1 589, où l’on délibéré la levée de neuf cens hommes de Cavalerie, fept cent Piétons, mille Pionniers, & la dépenfe pour le
paiement des diverfes T ro u p es, & entr’autres des Suiffes, de l’ar
tillerie , munitions, vivres & garnifons. On impofe pour tous ces
objets vingt écus par feu. V oyez l’Aflemblée des Communes du
6 Juin de la même année , qui impofë de plus dix écus par feu
pour les vivres de l’armée. V oÿez enfin l’Affemblée en forme d ’Etats
tenue à Pertuis au mois d’Ocfobre d ’après j vous y trouverez une
imposition de trois mille charges de bled &
avoine , à lever par
cotité de feux fur les villes & lieux de la Province, & une autre
de trois écus par feu pour munitions. On pourroit en rapporter
une foule d ’autres de la même force , & notamment l’AfTemblée
de 1590, portant impôt de deux charges de bled & une d’avoine
par feu pour l’entretien des forces étrangères $ celle de 1 5 91 , impofant deux charges de bled & deux d’avoine par feu> &c les Etats
tenus à Brignoles en 1 692, qui impofent quatre écus par feu pour
le rembourfement des gens de guerre, ainh que ceux de Riez ,
qui délibérèrent deux écus par feu pour les munitions.
C e ij
PA HT. II.
CH À?. IV.
�\
( 2 0 4 )
les dépenfes du fervice militaire tomboient fur les
feux , lorfque les Fiefs n’avoient rien à payer, parce
qu’on ne fe trouvoit pas dans le cas de la convo
cation du ban & de l ’arriere-ban.
Quelle doit donc être la furprife de tout le&eur
impartial, à l ’afpeû de toutes ces preuves fur lefquelles on ne peut former aucune efpece de con
tradiction ? Le Syndic du commun populaire , qui ne
fut établi qu’en IÇ49, à l’occafiondu grand procès
de la taillabilité des biens d’ancienne contribution,
avoit' donc raifon de dire , au nom du troifieme
Ordre , que toutes les dépenfes de la guerre , toutes
les preftations pécuniaires & relatives au fervice mi
litaire , tomboient fur les feux 3 & s’il ne s’en plaignoit p as, s’il reconnoiifoit que la prérogative féo
dale devoit exifter , quant à cet objet 3 s’il fe fervoit même de cette circonflance , pour en induire
que les biens d’ancienne contribution que les Sei
gneurs avoient acquis dans leurs Fiefs, dévoient en
trer dans tl’affouagement, & partager la charge des
feux , comment fera-t-il permis au troifieme Ordre
de changer aujourd’hui de langage & de fyfiême ?
Les Arrêts de 1549 & de 15 5 6 , auroient-ils al
téré ce point fondamental de notre Conftitution ?
N ’eft-il pas évident au contraire qu’ils l ’ont affermi?
(2 0 5 )
En foumettant à la taille les biens qui feroient dé'
tachés du F ie f, & reacquis après cette derniere épo- CHAP/IV
que , ils ont introduit un nouvel ordre de chofes,
pofé de nouvelles bafes fur les biens d’ancienne con
tribution 3 mais en même tems ils n’ont fait que
rendre toujours plus folides & plus inébranlables
les droits originaires, primitifs & conftitutionnels
des biens vraiment féodaux.
Ce droit auroit - il donc perdu de fa force par
- l’exécution qui a fuivi ces Arrêts ? Il en auroit bien
plutôt acquis de nouvelles , puifque depuis lors il
n’a jamais été contefté que toutes les dépenfes du
fervice militaire dévoient tomber fur les feux. Toutes
les AlTemblées, foit univerfelles de tous les Ordres ,
foit partielles , & de chaque Ordre en particulier , ont
conftamment reconnu le principe. Nous ouvrons les
regiftres de la Noblefle , nous parcourons ceux du
Pays ( 1 ) 3 nous en voyons fortir deux traits lumi-
( i ) Rien n’efl plus ancien & mieux fuivi dans la chaine de nos
Etats que l’ufage de rejetter les dépenfes militaires fur les feux.
En 1 374, outre les contributions délibérées volontairement par
tous les O rdres, chaque Bailliage & Viguerie fournit la portion
de lanciers & arbalétriers le concernant.
En 1429,
les Etats
délibèrent la levée de
cent cinquante
�( 206;
neux qui excluent tout prétexte de doute: i°. on
ne trouve aucune trace même de prétention de la
hommes d’armes, trois cens arbalétriers, en y
comprenant les
( zo7 )
part du troifîeme Ordre contre celui de la Nobleflé,
PART. II.
à l’effet de faire partager aux Fiefs les dépenfes mi GHAP. IV.
litaires ou les levées établies pour cet objet ; z°. les
Etats > & lès Affemblées même des Communes, ont
Terres adjacentes 8c celles de l’Empire, à {apporter par Bailliage
& par feu.
En 1396, lors de la guerre du Vicomte de Turenne, la taxe
des hommes de pied 8c des lances fut établie fur tout le Pays ,
c’efï-à-dire fur les feux.
En 1 536, on délibéré la levée de cinq mille cinq cens hommes,
8e tout ell rejette fur les feux.
En 1 537, les fonds manquoient ; on impofe fur les feux, &
le Tréforier fournit fur la reiponfion des Communautés. Alors on
convoqua le ban 8c l’arriere-ban, 8c de plus on leva des Troupes
qui furent payées par les feux. La même circonflance fe repro
duit en 1541. Il y efl dit que chacun fe mettra à fon devoir pour
faire le fervice du ban & de V arrière-ban, fuivant les Lettres du
Roi : voilà le devoir dés Fiefs rempli. On impofe fept florins un
fol par feu pour le paiement des deux mille hommes demandés
par le Roi : voilà la charge des rotures.
En 1568, il n’y a point de convocation de ban 8c d’arriereb aiiv
Les Etats impofent douze florins par feu pour l ’impôt du
vin , vingt-trois florins par feu pour la folde de trois cens hom
Les Etats de
1578 accordent quinze florins par feu pour 40000
liv. accordées pour les Troupes. Ceux de 1580 donnent 12000 liv*
pour la folde des arquebufiers à cheval , 8c impofent 12 fols
par f e u , outre quatorze florins quatre fols par feu pour la folde
de la gendarmerie.
Ceux de 15R2 impofent 12 fols par feu pour les dépenfes mi
litaires.
L ’Aflemblée particulière de 1580 avoit impofé pour' le même
objet 40 fols par feu ; une autre de la même année en avoit
impofé 15 par feu y celle de 1 5 8 1 , outre l’impofition de: 11 fols
par feu pour le Prévôt, avoit établi celle de 7 fols 6 den* par
.
feu pour dépenfes militaires. On retrouve par-tout les mêmes traits,
foit dans les Affemblées
des Etats, foit dans celles des-Com
munes. Depuis cette époque, toutes les dépenfes militaires font
rejettées fur les feux. Tel ell le tableau de nos Etats 8c des A f
femblées des Communes. On y trouve ce qui concerne les Trou
pes, folde, entretien, vivres, étape, logement, 8c par confequent
les Milices qui font nomément désignées depuis leur établîfiement
m es, & feize florins par feu pour les cas inopinés, 8c pour fournir
dans plufieürs Délibérations d’Etat , 8c notamment dans celle de
à la folde 8c entretenement dçs compagnies de Sifleron.
1639, &
dans toutes les Affemblées des Communautés laits
L ’Alfemblée de j 572 accorde 15000 liv. pour les fortifications,
cliftin&ion. Ces mêmes Etats impofent 8 liv. 10 fols par feu pour
8c impofe 50 fols par feu; celle de 1573 impofe 20000 liv. pour
les Milices. On rencontre les mêmes traits dans plufi'eurs Etats
la folde des quatre compagnies.
antérieurs 8c dans toutes les Délibérations pofiérieures.
/
�(208)
■i
— — conflamment reconnu que ces levées ne dévoient
p a r t . n. fe prencJre que fur les feux.
CH AP» IV.
.
.
.
Faut-il joindre encore l ’autorité des Arrêts dont
le concours avec l’aflertion des Auteurs locaux, ne
peut qu’établir une maxime refpe&able à tous les
Ordres ? Il fera facile d’y parvenir , en parcourant
rapidement ce que nous tenons en Provence, & ce
que nous avons conflamment reconnu comme réglé
inviolable au fujet du droit de forain dont les Sei
gneurs peuvent ufer, & qui a été définitivement
concentré fur la tête des Seigneurs poflëdant la moitié
de la Jurifdi&ion.
Chacun connoît la fameufe diftinâion des deniers
du Roi & du P ays, qui répond à celle des tailles
royales & négociâtes. Ces dernieres fe divifent en
deux parties 3 les unes concernent l’utilité des fonds,
les autres ne regardent que celle de l ’habitation.
Les Seigneurs ayant la moitié de la Jurifdiftion,
jouilfent du droit de Forain. Us y ont été main
tenus par l’Arrêt du Confeil de 1702. Ces principes
font connus de tout le monde ÿ les fources n’ont
pas même befoin d’en être indiquées..
Il eft également certain que les Seigneurs jouiflant
du droit de Forain, ne font pas fournis aux tailles
négociales concernant l’utilité de l ’habitation, mais
feulement;
(2 0 9 )
feulement au paiement des tailles négociales, con- p—■> 1■
n â y np » *
cernant l’utilité des fonds , quant à ce qui touche
.
1
1
CH AP. IV .
leurs biens roturiers ou d’ancienne contribution tant
feulement. Les biens nobles en font exempts dans
tous les cas, foit que les tailles négociales, ou les
deniers du Pays concernent l’utilité des fonds , foit
qu’ils ne tombent que fur l ’utilité de l’habitation.
Telle eft encore notre maxime ( 1 ) établie par
tous nos Auteurs , & par tous les Arrêts intervenus
fur cette matière. Les logemens & toutes les dépenfes des gens de guerre , ont toujours été re
gardés comme matière de tailles négociales relatives
à l’utilité des fonds 3 & fous ce rapport, les Sei
gneurs , quoique jouiflant du privilège des Forains,
y contribuent, quant à leurs biens roturiers. Mais
en pofant &C difcutant ainfi la queftion relativement
aux biens roturiers du Seigneur, les repréfentans
du troifieme Ordre ont toujours fuppofé & avoué
que les biens nobles & féodaux étoient exempts,
quant à ce , de toute contribution. (2)
( 1 ) V oyez le Nouveau Commentaire fur le Statut, tom. 2 ,
pag. 220 j La Touloubre, titre des biens nobles, art. 59 & 6o j
Boniface, tom. 5 , liv. 6 , tit. 4 , chap. 1 3 Decorm is, tom. 1 ,
col. 861.
Voyez l’Arrêt de Mouriés rapporté ci-deflus, part. 1,
chap. 3.
Dd
(2)
�\
( 2 1°)
Et quron ne dife pas que c’eft ici un droit ufurpé
PART. II.
depuis les tems où l’Adminiftration fut abandonnée
CHAP. IV .
à l ’Aflemblée des Communautés. C ’eft du fein des
Etats & de la Nation aflemblée , que fortent les
principes que Ton vient de pofer, fur tout ce qui
regarde les dépenfes militaires. En 160 7, par exem
ple,* on faifoit la diftimftion des tailles négociales ,
concernant futilité des fonds, & de celles concer
nant Futilité de l’habitation. Alors il n’étoit pas
queftion de rejetter les dépenfes militaires fur les
F iefs, mais feulement d’en faire partager les charges
aux fonds roturiers des Seigneurs jouiftant des pri
vilèges des Forains, & l’on reconnoifloit, fans diffi
culté , que les fonds nobles & féodaux en étoient
exempts. Ainfi , pour nous réfumer en deux mots,
les Fiefs font fournis à la charge du fervice perfonnel, dans les cas de convocation du ban & de
J’arriere-ban ; 6c tous les impôts, 6c toutes les pref-^
tâtions relatives au fervice militaire , font à la charge
des feux ( 1 ) .
(2 11 )
R«Pi
____________________________________________ ____PART. II.
CHA1\ V.
C H A P I T R E
V.
Appointemens & dépenfes à payer au Gouverneur.
Q u i pourroit croire , après les principes que nous
venons de pofer fur la Conftitution , que les Fiefs
doivent contribuer à ces objets? Ils font payés à la
décharge de la dette royale, 8c en diminution de ce
que le Pays doit au Roi. Les feux feroient plus
chargés , s’ils n’avoient à payer cette charge qu’ils
ont toujours fupportée depuis qu’elle exifte.
Avant le Réglement de 16 3 5 , qui réglé les ap
pointemens du Gouverneur 6c les frais de fa garde,
les Etats accordoient tous les ans des fommes plus
ou moins fortes , fuivant les circonftances, tant pour
fon entretien que pour fa garde ; 8c par un voeu li
bre , réfléchi, conféquent à nos principes locaux ,
ces fommes étoient aftifes 6c levées fur les feux.
ûirement le Tiers-Etat. 11 raifonnoit mal dans tous les lèns, même
(1 ) Le principe eft tellement vrai &
reconnu pour tel, que
fuivant fon principe,
puifque tous les Ordres fupportent avec
dans les Etats tenus à Riez en 1 5 9 1 , comme il fut propofé d’aug
égalité la charge des feux. Mais ne fort-il pas de ce trait l’aveu
menter les gamifons, le Syndic remontra que Meffieurs de la No-
bien formel que les charges pécuniaires du fervice militaire, ne
hlejfe ne pouvoient pas opiner en ce fa it , parce qu'il regarde
en-
dévoient être affifes que fur les feux ?
D d ij
�/
PART. II.
tHAPi
mU M *
WM 1
(m )
Nous ne finirions jamais, fi nous voulions en citer
\V»r tous les exemples.
A
On fe plaignit de l’excès des fommes demandées
pour cet o b jet, 6c q u i, dans certaines circonftances, excédoient les forces du Pays. Ces plaintes
produifirent le Réglement de 1635 , qui donne 36000
liv. au Gouverneur pour ion p la t, 6c 15000 liv.
pour la Compagnie de fes Gardes, fans que cette
fomme puiflé être augmentée dans aucun cas 6c fous
quelque prétexte que ce puiflé être.
Il efl: à remarquer qu’à l’époque de ce Régle
ment , perfbnne ne fe plaignoit que les dépenfes re
latives au Gouverneur fuflent prifes 6c levées fur
les feux. Tel étoit l’ufage conforme à nos principe^
constitutionnels, fuivant lefquels toutes les char
ges , tant royales que négociales , doivent être aflifes fur les feux, 6c jamais fur les Fiefs. Il efl
donc évident que Je Réglement de 1635 n’a rien
changé fur les principes de cette preftation 3 il n’eft
intervenu que dans l ’objet de la fixer, 6c non dans
celui d’y faire contribuer les Fiefs ou les fonds
nobles.
Quel motif 6c quel prétexte pourroit-on avoir,
pour les foumettre à cette contribution ( 1 ) ? On
(1) Les Etats de 1442 accordèrent au grand Sénéchal un don
WM
a d it q u e
du
par
le
t it r e q u i
f'e g le le s a p p o in te itie n s
G o u v e r n e m e n t , la c h a r g e é t o it lit té r a le m e n t re-
de quinze cent florins, qui fut pris fur les feux, comme tous ceux
qui furent accordés à cette époque. Ceux de 1439 lui avoient
fait préfent de trois mille florins, qui furent également pris fur les
feux. On demanda que les biens patrimoniaux des Eccléfïaftiques
fulTent fournis à la levée des dons confentis à cette époque. Les
Prélats réfifterent, Domini Prœlati non confenfiunt. La demande
fut accordée pro bonis patrimonialibus vel proprio nominc acquifuis. On étoit bien éloigné de demander alors la contribution
des Fiefs & des fonds nobles. L ’AfTemblée des Communes du 2 5
Juillet 1583 impofe quatre florins par feu pour le don du Gou
verneur. Les Etats de 1583 établirent le même impôt de 4 liv. par
feu pour l’entretien de la garde. Ceux de 1584 délibèrent aufïï 4 liv.
par feu pour le même objet. Le don de 4 liv. par feu efl renouvelle
par l’AfFemblée du mois de Juillet 1584, ainfî que par celle du mois
de Décembre 1585, & e n 1586.. Après ces époques, on trouve dans
toutes les AfTemblées & dans tous les Etats l’impôt délibéré pour le
don & la garde du Gouverneur, & la levée portée fur les feux.
On ne revient pas de la furprife où nous jette ce qu’on a dit dans
le traité du Droit public, pag. 54 , qu’en 1 621 , les trois Ordres affemb'lés prirent une Délibération qui fournit le Corps général du Pays
fans exception à Véntretenement de la compagnie d’ordonnance du Gou
verneur. Nous ouvrons le cahier de ces Etats ; ils font conformes à tous
les autres. On y trouve l’impôt de 5 liv. 2 fols par feu pour le
plat & d o n gratuit de M. le Gouverneur, & de 3 liv. 1 fol par feu
pour fa garde. Toutes les autres Délibérations, foit d’Etats, foit
d’AfTemblées, foit avant, foit après le Réglement de 163 5 , pré-
PART. II.
chap,
y.
�fèntent les mêmes traits. A p r è s ces faits bien confiâtes, il faut dire
avec le même Auteur, quï/ n ’y a p lu s aucune réflexion à faire.
On peut néanmoins obferver que quelques Communautés le prétendoient exemptes de cette contribution. De là pourraient venir
les mots fa n s ex c e p tio n , s’ils le trouvoient dans les Etats de \ 6 i \ .
Il n’en feroit pas moins vrai que l’impôt ne tomboit que fur les
feuxj & nous ajoutons de plus que les mots ne Te trouvent pas
dans le texte dont nous avons la copie. Au furplus, il ny 'avoir
qu’à voir les Etats de 1639, où l’on trouve qu’il fut impofé 4 liv.
5 fols 6 den. pour le p a iem en t de la fom rne de 51000 li v . accor
(2 1s)
niers du P a y s, ne s’entendent que pour les deniers
qui font le produit des feux , & ne s’appliquent
qu’à la caiflé du Pays , remplie par le produit de
l ’impôt fur les feux , indifféremment poffédés par
les individus des trois Ordres.
Ce qu’on vient de dire, ne fouffre point'de ré
pliqué dans l’ordre de nos principes locaux, & prend
de nouvelles forces dans leurs difpofitions. Dans
toutes les Délibérations de nos Etats 8c des Affem*
blées même des Communes , on trouve l’énonciation
du Pays y indiquant les feux, dont la pofleflion
appartient indifféremment aux trois Ordres. C ’eft
le Pays qui emprunte , qui impofe , qui délibéré,
qui difpofe de la deftination des deniers ; 8c tout
tombe fur les feux.
,
<.
>
Ce principe p ofé, le titre qui fert de Réglement
pour fixer les fommes à payer au Gouverneur, dé
cide notre queftion en faveur des Fiefs. Pour qu’ils
foyent contribuables à une levée quelle qu’elle foit,
il faut qu’ils foyent littéralement exprimés dans le
titre : l’énonciation du P ays, n’exprime que les
feux, c’eft-à-dire, les Communautés ou les ro-tures
dées p a r A r r ê t du Confeil du dernier M a r s 1655 à Monfeigneur
qui font partie des territoires municipaux 8c cadaf-
Ï 2I 4 )
jettée fur le Pays ; cfoù l’on a conclu que tous les
p a r t . ii. Q rcjre s
tQUS jes k j e n s du Pays doivent la fupchap.
j
v.
r
porter.
Ce raisonnement, fi fouvent réfuté, n’eft qu’un
fopliifrae. Le P ays, dans le fens & les termes de
tous nos titres conftitutionnels , n’eft rien de plus
que l ’enfemble des biens impofables. Ainfi les em
prunts faits par le Pays, font faits à la charge 8c
fous la refponfion des feux. Les fommes impofées
par le Pays, ne font aflifes que fur les feux. Les
Réglemens faits , les Loix intervenues fur les de-
le G ouverneur , tan t pou r fo n p la t & entretenem ent extraordin aire»
que pour la fo ld e & entretenem ent de f es G ardes pou r chaque
année*
\
traux.
O11 ne l’entendit jamais autrement en Pro
vence.
Ainfi le titre ne porte que fur les feux ,
PART. IL
CHAP. V ,
�(zi6)
■■ foit par fou*filence fur les F ie fs, foit par fa difcHAr. v p o tio n textuelle fur le Pays. Nos peres ne s’y trompoient pas avant Je titre. Ils impofoient fur le Pays-,
c’eft-à-dire fur les f e u x , pour les levées concernant
M. le Gouverneur & fa garde. Après 16 35, ils con
tinuèrent à impofer de même pour cet objet, c’eftà-dire , en portant l’impôt fur le P a y s, ou , ce qui
revient au même, fur les feu x . D evoit - on après
cela, faire naître des doutes fur la nature de cette
levée, & fur les fonds qui doivent la fupporter?
fciî?r°pag 53"
®n a dit au contraire que les Fiefs font obligés
de contribuer aux appointemens de ces Officiers ma
jeurs y parce qu'ils font difpenfés aujourd'hui des ap
pels militaires & des convocations. Les fommes qu'on
applique à ces Officiers font pour un fervice auquel les
Pojfédans-fiefs font principalement defin es par leur
état & par leurs Fiefs. Le fervice du Gouverneur &
du Lieutenant général tendent à la défenfe commune....
Pourquoi les Pojfédans-fiefs d'aujourd'hui voudroient-ils
charger le Tiers-Etat feul de payer cette fomme ?
Encore un coup , il ne s’agit pas ici du TiersE tat, mais de la diftin&ion des biens impofables 6c
de ceux qui ne le font pas. Il ne faut pas interroger
les Seigneurs d’aujourd’hui ; il faut fuivre l’exemple
de nos peres, & ne pas perdre de vue les vrais prin
cipes
(2 17 )
cipes de notre Conftitution. Les Seigneurs d’aujour_j_d’hui ne veulent que ce que tous les Ordres de la PART I1
Province ont toujours voulu 6c dû vouloir, tant
dans les Etats que dans toutes les Aflèmblées des
Communes. Si l’on regarde cette dépenfe comme
militaire, elle tombera fur les feu x , la chofe eft
déjà démontrée. Veut-011 la regarder comme munici
pale? Les feux devront encore la fupporter. Fau
dra- t - il la confidérer comme repréfentative d’un
impôt royal ? Sous ce rapport encore, elle deviendra
<
la charge des feux ; 6c noùs dirons fur cet o b jet,
comme fur tous les autres, que les Fiefs font fondés
en droit commun, en titres 6c en poffeiïion : en
droit commun , parce qu’il eft de la nature des Fiefs
de n’être fournis qu’au fervice perfonnel du ban 6c
de l’arriere-ban; en titres, parce que les deux O r
donnances conftitutionnelles de Louis IL 6c de René
exemptent les biens féodaux de toute prédation pé
cuniaire, quel, que puiflè en être l’objet j en poffeffion , puifque dans tous les teins connus, fans au
cune exception, le plat 6c la garde du Gouverneur
n’ont jamais ceffé d’être aiîis fur les feux.
« Ouvrons, nous dit-on encore, les anciens procès- ^ .
Droit public,
verbaux des Affemblées politiques du Pays. Nous y pas' î3,
trouverons que les Nobles contribuoient aux dépenfes
E e
■
r
�ïSÉI- '•
( ll8)
■ ....■ des troupes, même de celles qu ils
commandoient. Com’ * ment ne pas admirer l’imprudence de cette invita
tion ? C ’eft précifémant dans les faftes politiques de
la Nation que l’on trouve de nouvelles armes pour
combattre le fyftême dont on vient de développer
l’erreur. On y trouve la preuve lumineufe, conftante 8c non interrompue du rejet de toutes les
dépenfes militaires fur les feux. Jamais les Etats
6c les Communes n’ont ofé prétendre que ces dé
penfes duflent porter far les Fiefs. Jamais cette pré
tention n’a été mife au jour pour les appointemeris
8c la garde du Gouverneur. Dans tous les tems,
PART II
la Nation aflemblée, 8c les Communes elles-mêmes
n’ ont ceffé de délibérer le rejet plein 6c abfolu de
1
* •; ' ?
' y»
•
cette charge fur les rotures.
Et puifqu’il faut ouvrir tous les regiftres qui peu
jr
[
T
vent nous guider fur l’hiftoire de nos impofitions,
8c nous fournir des lumières fur la contribution des
Yr* •
i-+
*
»
Rcg.i, foi. Ordres, ouvrons ceux de la Nobleffe , nous y trou401.
J
verons qu’en 1600 , il fut queftion de bâtir un hôtel
pour M. le Duc de Guife , Gouverneur; que quel
ques Membres de l’Ordre infinuerent dans l’Aflemblée du 13 M ai, qu’il convenoit que le Corps of
frît d’entrer dans cette dépenfe ; qu’en conféquence
il fut volontairement accordé qu’il feroit levé la
\
( 2 I9 )
fournie de 3000 liv. pour cet ob jet; qu’il fut dit
dans une autre Aflemblée du 26 Févriér 1601 4 que PART. H.
GH Àp.
cette fournie n’avoit été fournie , & ne feroit déli Ibid. fol.
vrée qu’en confidération die' la perfonne de M. le
i,
Duc de G u ife, & que ce dernier ceffant d’êtrç Gou
verneur , ou venant la maifon à être vendue , l’Or
dre reprendroit les 3000 liv ., fauf à la Communauté
de vendre la maifon, ou d’en difpofer comme elle
trouveroit bon.
v/
En 1641 , le Comte d’Alais ayant pris fon loge*- Reg. 1 1 fol.
ment dans un autre quartier , 6c délirant qu’on eut : 6<f.
pour lui le même égard qu’on avoit eu pour M. Iç
D u c de Guife , la Municipalité ne fit pas difficulté
de fe prêter à fes vues. Il fut queftion de vendre
l ’ancienne maifon , ÔC d’en acheter une auprès de
l’hôtel où réfidoit le Comte d’Alais. La Nobiefle
y
fut priée de ne pas exiger les 3000 liv. , 8c de confentir à ce que le prix de l’ancienne maifon fervît à
en acheter une nouvelle , fous les conditions 8c
les réferves portées dans la Délibération de 1601 ;
elle voulut bien s’y prêter. La ville d’Aix a de
puis difpofé de cette maifon ; 8c l’on ne voit
pas dans les regiftres de l’O rdre, 8c dans la chaine
de fes affaires qu’il lui ait été fait compte de cet
article*
E e ij
.
IL.4
�(220)
- i! N qüs lie citons pas ce tra it, pour en faire un
PART. II.
1
p’v# reproche à la Communauté d’Aix ; mais pour dire
que fes Adminiftrateurs , Procureurs du P a y s, con
venaient alors que la Noblefle ne devoit rien four
n ir, qu’elle n’avoit accordé les 5000 liv. que comme
un don volontaire qu’il lui étôit libre de reprendre;
& quand ces aveux ont-ils été faits ? E11 1600 &
1601 , époque où l’on impofok fans difficulté, fur
les feux, toutes les fommes délibérées , tant pour
le don , que pour la garde du Gouverneur ; & en
1641 , tems poftérieur au Réglement qui fixe le
plat duGouverneur & fa garde à 51000 liv. , tems
encore où l’on reconnoiffoit, fans aucune efpece de
tontradiftion, que cette fournie devoit être afîife &
levée fur les feux. Nous ne parlons pas ici du
Lieutenant de Roi de la Province , puifque cet ar
ticle eft de la même efpece que celui du Gou
verneur , & qu’il doit être régi par les mêmes prin
cipes.
(iz i )
(ni
*,A 34:
il O .c
r r- i I
C
CHAPITRE
I U;
ï 1 J,~' . , La Maréchauffée.
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itidÜ sb -7
à
la
sû r e té p u
b r ig a n d s
q u i l e s iri~
Drtfit pu
blic ,pag. 71.
C ’eft ce qu’on a dit au nom du trioifieme
Ordre ; d’autres difent , fans l’imprimer, que ces
frais font une partie des charges des Juftices feigneuriales. Il échappe à certains défenfeurs dii TiersEtat, de prétendre que les Fiëfs devraient les fupporter en entier.
Il eft pourtant certain que depuis l’établifTemént
du Prévôt & de la Maréchauffée , les Etats & les
AfTemblées en ont conftamment pris les fonds fur
les feux. Cela s’eft pratiqué de même fans difficulté
jufqu’en 1769. La Maréchauffée fut établie en Pro Traite fur
l'Adminiftrac.
vence en 15 77. On a pu cônnoître dans un ou du Comte deProvence ,
vrage public, que les Etats de 1 6 1 2 , impoferent, tom. 1 , pag.
pour cet o b jet, 5 liv. par feu. Il faut tenir pour
indubitable, que depuis l ’établiffement de la Maréchauffée , la N ation, foit dans fa plénitude, & par
un vœu des trois Ordres, fdit dans les Aflêmblées
des Communes, a conftamment décidé que cettè dé-
�PART. II.
CHAI*. VI.
(*** )
penfe ne regardoit que la maffe des fonds impofahles , c’efr-à-dire, les feux , a Tëxctufîori dés Fiefs.
Le premier vOeu enjfutüiiêiiie porté dans une Affemblée des Communes ^ tenue le 15 Mai 1580. On
y délibéra l’impôt de trois florins par feu , pour les
arrérages dus au Prévôt. Cette levée à conflamment
été -ordonnée par lqs Etats ou par les Affemblées,
fur les feux, d’abord fous la dénomination de frais
du Prévôt y & enfuite fous celle de folde ou paye
de la Maréchaulfée. Il ne s’eft jamais élevé de conteftation. fur cet objet ; & jufques en j 769 inclufivement, on avoit regardé cette dépçnfe , comme
tombant fur les feux, & comme ne pouvant tomber
que fur eux.
Qui ne voit à préfejnt que cetîte poffeflion n’eft
qu’une conféqvience , & la pure exécution de nos
titres conftitutionnels , qui mettent nos Fiefs à l’abri
de tout impôt royal & municipal ? Elle tient à ce
principe refpeâafcle & toujours refpeéfé par tous les
Ordres , que lesv biens nobles ne font impofables ,
ni pour les deniers du R o i, ni pour ceux du Pays ;
& c’efl fur la foi de ce grand principe, que les feux
ont reçu les acGroiffemensf énormes, qui ont énervé
la plupart des Fiefs du Pays.
Que n’aurions-nous pas à dire , en raifonnant fur
la nature même de cet établiffement j & en la ra- SSTT*
prochant des principes locaux qui règlent la pré- OTAP, V1
rogative des Fiefs de Provence? Il en naîtroit une
conféquence, dont nos peres ont reconnu la jufti&e
pendant près de deux flecles.
T
7
Cet état des chofes a changé par le vœu de l’Afe
femblée des Communautés tenue à Lambefc en 1769.
Il y fut délibéré de rejetter cet objet de dépenfe fur
la capitation , c’efF-à-dire , qu’on foulagea les feux
pour irtipofer les têtes.
jiCette étonnante opération fut l’effet d’un de ces
■
mouvemens dont on trouve peu d’exemples dans
les Adminiflrations bien réglées. Le Gouvernement
accordoit une augmentation de Maréchauffée qu’on
lui avoit demandée. Mais il vouloit que la Province
fupportât la moitié des frais de cette augmentation.
On avoit demandé que cette augmentation fût fupportée par le Gouvernement, parce que la Maréchauffée efl à la charge du Roi. On avoit raifon
fur le principe : mais le Gouvernement ne vouloit
pas revenir fur cet objet j & fi la Maréchauffée efl
à la charge du R o i, les deniers levés pour cet objet
forment donc une charge royale dont les Fiefs font
t
conflitutionnellement exempts.
Quoi qu’il en fo it, il avoit été unanimement con-
�( 224 )
venu, dans le comité de la veille, que les propo
rtions faites fur cet objet par le Gouvernement ne
feraient point admifes. La plupart des Membres du
comité revinrent de cçtte opinion dans les pour
parlers du foir, ou par les réflexions de la nuit ,
6c p enfer ent, qufil falloit adhérer aux offres du Gou
vernement* L ’Afiçflêur n’en fut pas iuflruit. Ü fut
doïicifrien
étonné,
quand lesv Membres
du comité
•i
.
portèrent un vœu contraire à ' celui qui avoit été
préparé la veille. Il fe crut joué ; il y mit du perfonnd. Il propqfa de fon chef une opinion à laquelle
perfonne n’avoit lieu de s’aptendre^ Ce fin celle de
porter la charge de la Maréchauflee fur la capitar
tion j 6c ce vœu , qui n’avoit pas été réfléchi, fut
accueilli par la pluralité des fuffrages. On ne vit
pas alors qu’une impofition par tête efl la plus dure
dans l’ordre des principes \ la plus réprouvée, furtout fuivant l’e/prit-î. 6c les ~maximes de* notre ^Conftitutiçn. On jne^vit pas que, cette opération affranchiffoi^ de cette contribution , tous les, Officiers,
gens en place 6c penfionnaires , qui payent leur capi
tation au Tréfor royal , 6c par retenue fur leurs
gages, appointçmens ou penfions. La Délibération
fut prife , par la prépondérance de trente-fix Com
munautés, 6c des deux Procureurs joints pour le
troifieme
(2 2 5 )
troifieme Ordre , fur le vœu des deux Députés de
chacun des deux premiers. Ce vœ u, réduit à quatre CHAn yi
repréfentans, 11e pouvoit qu’être étouffé par le nom
bre de ces contradicteurs , toujours prêts à fe foumettre au joug des propofitions faites par l’Affefiêur.
Tous les Adminifirateurs d’alors font instruits de
cette anecdote , qui forme encore une preuve de la
prérogative féodale : car l’Afiéfiéur n’ofa pas fe li
vrer au travers de prétendre que les biens nobles
clufiént être frappés par les dépenfes de la Maréchauffée. Il fe rejetta fur la Capitation , en reconnoifiant l’impuifiance de rien prendre fur les Fiefs.
Pourquoi donc fe plaindre aujourd’hui de ce que
les deux premiers Ordres protefierent contre cette
Délibération ? Les véritables droits du troifieme O r
dre y font autant bleffés que ceux des deux pre
miers. C ’efi: fur-tout le peuple qui fe trouve foulé
dans cette converfion de l ’affife de l’impôt. Le Tra
vailleur qui fe courbe- vers la terre , l’Artifan qui
ne trouve fa fubfiftance 6c celle de fes enfans , que
dans le produit de fa fueur, payent une charge
qu’ils ne fupportoient pas auparavant , 6c qu’ils n’auroient jamais dû fupporter. Telles font les réfle
xions que tout bon Citoyen doit faire fur l’opéra
tion de 1769. La Nobleflé n’a jamais dit qu’elle ne
Ff
�( 226 )
dût pas être comprife dans la capitatioii, qui forme
un objet perfonnel -> & nous ne parlons pas ici des
franchifes de cette efpece. Elle ne fe prévaudra pas
de ce quelle marche toujours arméey & les principes
de dignité qui la gouvernent, l’empêcheront toujours
de répondre à tout ce qui n’eft que perfiflage. Mais
elle dira, & toutes les perfonnes impartiales St juftes
le diront avec elle , que le rejet de cette charge fur
les têtes, eft autant inconftitutionnel que contraire
à tous les droits enfemble ; que l’aflife de l’impôt
fur les feux, étoit fondée en titres St en pofléffioii;
que le parti de l’afleoir fur les têtes , eft double
ment injufte St même atroce, foit parce qu’une
grande partie de la Nation , prife dans les trois Or
dres , n’en partage pas le fardeau , foit parce que
cette partie , qu’on peut véritablement appeller le
pauvre Peuple , en fupporte la charge contre tout
droit & raifon , & même contre les principes de
l’humanité.
PART. II.
C H A P I T R E
VIL
CHAP. VH.
Emprunts 6* Dettes.
J l eft naturel que celui qui a fait l’emprunt paye
la dette. On ne le prétend pourtant pas de même,
dans* le fyftême de i ’infurre£Hon~du troifieme Ordre
contre les deux premiers. On y dit que les Procu
reurs joints pour les deux premiers Ordres dans un Droit public,
Pag- 57.
tems, & les deux premiers Ordres dans Vautre , ont
afjîflé à Vétablit]ément de toutes les anciennes & nou
velles rentes y que comme Adminiflrateurs , ils ont ac
cédé aux emprunts.................comme habitans y ils ont
profité de Vemploi des fommes empruntées ; comme ci
toyens ils s'en font chargés à la folidaire avec le
Tiers-Etat.
Tout cela prouve qu’on a raifonné fur notre Conftitution 7 fans fe donner la peine de l’approfondir.
Les emprunts n’ont jamais été faits que fous la refponfion de la matière impofable. Combien d’exem
ples ne trouve - 1 - on pas dans nos Etats & Aftemblées ( i ) , d’emprunts délibérés & rembourfés ? Ils
"
■* • . . . .
( i ) L ’Aflemblée des Communes en 1591 délibéré huit écuspar
feu pour rembourfement. Les Etats de Riez de h même année
F f if
�( 228 )
étoient délibérés à la charge des feux. Ils étoient
rembourfés par le produit de l’impôt fur les feux.
Qu’importe que les emprunts foient délibérés , foit
par les Etats aflemblés, foit dans les Aftêmblées in
termédiaires ? Ces emprunts ne fe font jamais que
par le Pays 8c pour le Pays , c’eft-à-dire , par les
repréfentans des feux 8c pour les feux.
Les Etats les délibèrent ; mais c’eft pour les ro-
déliberent divers emprunts pour dépenfes militaires, & ces c m*
prunts furent enfuite payés par les feux. Ceux tenus dans la meme
ville en 1592 imp.ofent deux écus par feu pour le rembourfement
des dettes. Même Délibération dans les Etats tenus à Brignoles en
1593. Il eft fans exemple qu’011 ait ofé feulement prétendre que
les biens nobles fuffent fournis à contribuer au rembourfement des
fommes empruntées. Les Etats de 1639 f°nt fur-tout à remarquer
là-deffusj ils impofent 1 liv. 4 fols 6 den. par fe u , pour payer les
pendons des 51000 liv. empruntées par le Pays en l ’ année 1635,
à tant moins des fommes accordées au Roi. Voilà deux traits éner
giques. Les emprunts tombent en moins impofé pour les charges
courantes. D ’autre part, ces emprunts font faits par le P a y s, &
ne tombent que fur les feux, auxquels feuls il eft donné de repréfenter le Pays. Les emprunts font tellement à la charge des
feux, que dans les Etats de 1 392, le Pays ayant befoin d’em
prunter , plufieurs Seigneurs eccléfiaftiques & féculiers fe conflituerent cautions de l’emprunt. Auroit-on eu befoin de ce caution
nement, ü l’emprunt eût lié les Fiefs & les domaines de i’Eglife ?
( 229)
turés poffédées par les trois Ordres. Ils engagent
les biens qui compofent la généralité du Pays 5 mais
cette généralité n’eft que celle des rotures , 8c non
les Fiefs qui forment une clalfe de biens à part, 8c
non comprife dans la généralité du Pays. Ce font
les trois Ordres qui délibèrent l’emprunt 3 mais ce
font les feux poffédés par les trois Ordres qui le
payent. Jamais rAlfemblée intermédiaire n’eut le
droit d’engager les Fiefs ou les biens nobles. Ja
mais les Etats eux - mêmes , en délibérant des em
prunts , n’entendirent que les biens nobles 8c les
Fiefs en fuftent frappés.
D ’ailleurs , de deux chofes l’une : ou l’emprunt
eft fait pour les dépenfes courantes , ou il eft fait
pour prêter crédit au Roi. Dans le premier cas , il
tombe en moins impofé fur les feux. C ’eft donc aux
propriétaires des feux à le payer. Dans le fécond
cas , les fommes empruntées pour le Roi font dé
duites avec les intérêts fur les importions fubfé. 1
quentes , qui forment la charge des feux. Quel pré
texte pourroit-il donc refter, pour y foumettre les
Fiefs 8c les fonds nobles? Les Seigneurs donnent
leur voeu dans les Etats , ou par leurs repréfentans
dans les Affemblées intermédiaires. Ils ont le droit
de le donner , foit comme Seigneurs 8c protecteurs
p a r t . 11.
CFIAP. VII.
�I
( 2 J ° )
PART. 11.
CHAP. VU.
de leurs F iefs, ce qui leur donne titre pour entrer
aux Etats, foit comme pofléfleurs de biens roturiers
& taillables, foit enfin comme payant les reves hors
de leurs Fiefs. Prote&eurs
poflefleurs des feux
ou des rotures, c’eft à ces différens titres qu’ils
coopèrent à l ’emprunt ; mais leurs F iefs, leurs fonds
nobles font étrangers à tous ces objets, puifqu’ils
les pofledent conftitutionnellement, avec toute im
munité des charges , tant royales que de la commu
nion, & fous la fimple foumiflion du fervice perfonnel , dans le cas du ban & de l’arriere-ban.
C ’efl: ici qu’il efl: tems de dire un mot fur la fon
dation de M. de St. Vallier. On ne s’attendoit pas
que cet objet dût jamais être compris dans les mo
tions faites au nom du T iers-E tat. Les Vigueries
fe chargèrent des fonds de cette fondation en 1756.
Elles en firent ce qu’elles trouvèrent bon ; St cer
tainement il n’en entra pas un fol dans la caille
des Fiefs & des fonds nobles \ &t l’on ofe infinuer
que les charges de ce capital doivent être partagées
par cette caifle , parce que les Procureurs joints des
deux premiers Ordres accédèrent au contrat dans
une Aflemblée intermédiaire. Sans doute ils y confentirent comme tous les Députés des Commnautés.
Mais y confentirent-ils, pouvoient-ils même y con-
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fentir autrement que comme Députés des deux pre- ;
.
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PART. II.
miers Ordres intéreflès comme le troifleme, dans CHAP, V15.
l’Adminiftration des feux ? Pourroit-on prendre un
engagement valable pour la généralité des feux, fans
le concours des deux premiers Ordres ou de leurs
repréfentans ? Le mandat des repréfentans de ces
deux premiers Ordres roule-t-il fur tout autre objet
que fur ce qui concerne les feux ? Pourroient - ils
donner des engagemens valables contre les droits des
Fiefs & des biens de l’ancien domaine de l’Eslife
?
O
Ces engagemens pourroient-ils être légalement confommés autrement que par une Aflemblée de la Noblefle pour ce qui concerne les Fiefs , & par une
Aflemblée générale du Clergé provincial, quant à
ce qui concerne les biens de l’ancien domaine de
l’Eglife? Voyez aufli ce qui s’en efl: enfuivi. L ’ Ordre
de la Nobleflé 11e fut point confulté ; celui du Clergé
ne le fut pas non plus. Tout fut fait & confommé
par l’Adminiflration intermédiaire, qui ne pouvoit
représenter que les feux. Voyez de plus ce qui s’e/1
fait en conféquence. On a conflamment obfervé de
rejetter furies feux les charges de cette fondation,
dont les fonds avoient été verfés entièrement dans
la caifle des feux.
Il efl vrai que ces charges font en faveur de la
�O rO
«■■■
■ Noblefie fiefée 6c non fiefée. L ’application en eft
pari . il pa*te ar jes L 0jx refpeftables 6c éternelles de la
CHAI». VIr.
A.
1
fondation. La Noblefle n’a pas fourni les fonds,
mais le Fondateur les a donnés pour qu’elle en pro
fitât. Les Adminiftrateurs des feux les ont reçus,
fous la promette 6c la charge de l’emploi des in*
térêts déterminé par la fondation. Le Fondateur
n’a contrafté qu’avec les feux. Comment les Fiefs
qui n’ont pas profité des fonds pourroient-ils être
déclarés contribuables à cette dépenfe ? On ne s’eft
pas trompé là-dettus, 6c les rentes procédant de ce
capital, comme toutes les autres, ont été constam
ment prifes 6c réparties fur les feux.
Ainfi, furies objets des dettes, fans en excepter
celles de la fondation de M. de St. V allier, la pré
tention du troifieme O rdre, fi toutefois il ofe jamais
la former, trouvera toujours contr’elle les principes
de notre Conftitution , ceux du Droit commun, les
maximes de notre Administration provençale, &
l ’exécution confiante de tous les emprunts faits par
le P ays, dont le fupport en entier a toujours été
rejetté fur les feux. Jamais le Corps de la Noblefle
n’a emprunté que pour les dettes particulières qu’il
avoit à payer ; 6c dans ces occafions il a payé fes
dettes fans le fecours des feux. La modicité de fes
reffources
( 2?î)
refiources ne lui permet pas de recourir à cet allé
PART. II.
gement paflager, 6c qui, pour peu qu’on s’oublie, CHAP. VII.
conduit à la deftru&ion. De là fa réfolution conftante de ne plus emprunter. Quand l’occafion d’une
dépenfe fe préfente , elle fait les plus grands efforts
pour payer ; 6c certainement elle n’a jamais compté
ni dû compter que les emprunts faits par les feux ,
pufîent dans aucun cas 6c fous aucun prétexte être
reverfibles fur les Fiefs.
C H A P I T R E
. . . .
VIII.
#
Création & extinction d'Offices.
création d’Oflices eft un impôt déguifé pour
le Peuple, qui racheté l’Office pour l’éteindre. On
l’a dit dans les réclamations du T iers-E tat, 6c ce
mot doit refter , parce qu’il renferme une vérité dont
il n’eft pas même permis de douter. C ’eft parce que
toute création d’Offices efi un impôt, que les biens
nobles doivent en être exempts. Auffi cette réglé n’a-tTOUTE
elle jamais été méconnue en Provence. Il eft vrai
que la Noblefle a fait par deux fois des contribu
tions pour les Offices \ l’une en 15 3 7, à raifon de
Gg ' ;
,
/
�>
,■
ghapTvi!!
( * 54)
ces nombreufes créations qui furent faites pour la
rançon de François Premier ; l’autre, en 1584, par
voyez ci- £omplaifànce pour la Reine mere , Catherine de Me?
îdici'si^ ÔC en exécution des paroles que les principaux
Adminiftrateurs de l’Ordre lui avoient données lors
de fon paflage en Provence. Mais on fen t, après
tout ce qui a été dit ci-deflus , que ces deux contnbutions furent volontaires ; Tune , à raifon des circonfiances majeures pour lefquelles les Offices avoient
été créés ; l’autre , enfuite de l’engagement pris par
les principaux Adminiftrateurs du Corps.
Mais nous demandons à préfent, qui a payé l’extinétion de tous les autres Offices qui ont été fucceffivement établis dans la Province ? Il en fut créé
fans bornes & fans mefure en 1659. Plulieurs de
ces établiflémens ne furent point reçus ; celui des
Prélidiaux eft de ce nombre. L ’hiftoire nous dit que
Bouche, tom. la malignité du Jiecle étoit trop grande , pour les faire
tous avorter. Mais il fallut payer pour plufieurs,
dont le Gouvernement accorda le rejet, parce qu’il
étoit légal & nécelTaire. L ’Aflêmblée des Communes
de 1639 délibéra fur ces Offices , qui furent éteints
ou rachetés. Elle ordonna que le montant en feroit
ftfis dans la caille du Pays. On fe garda bien alors
de prétendre que les Fiefs duflent y contribuer. Au
O 35)
. .
.
contraire, il réfulte des titres.du tems d’alors , que
Part . ii.
quelques-uns des titulaires des Offices nouvellement CHAP. VIII.
eréés, ayant voulu porter leurs fonftions dans les
diftri&s des Juftices feigneuriales , la Noblefié fe
montra vivem ent, & délibéra qu’il ne falloit pas
le permettre , d’autant que, fuivant la Conftitution , Délit», de la
Noblcfle »reg.
les établiflémens faits par le Roi dans les Juf i , foi. 168.
tices , ne pouvoient jamais avoir lieu dans celles des
Seigneurs qui les poflédent en pur patrimoine.
On a donc fait une inutile diflértation fur les Droit public >
pag J6 & fuiOffices de Commiflaires aux failles réelles qui avoient vaoccs.
été créés par l ’Edit de 1689. Ces Offices, ainli
que ceux de Contrôleurs aux failles, n’étoient que
des impôts. Le Gouvernement excitoit le peuple à
les abonner fk à les éteindre. Ces extinctions furent
payées, comme elles dévoient l’être, parles fe u x ,
indiftinÔement poflédés par les Membres des trois
Ordres. Cela fut fait fans réclamation , parce qu’en
effet, l’impôt, foit direét, foit indirect, ne peut
tomber que fur les feux.
De là vien t, que le Pays ayant acquis en 1697
les Offices de Mefureurs de bled, créés pour les
befoins de l’E tat, & les ayant éteints, ainli que
ceux d’Infpeôteurs , Viliteurs , Contrôleurs aux
entrées des eaux de v ie , vins & autres boiflons >
G S ij
�N
(zj6)
la Noblefle refufa de payer. Les Procureurs du Pays,
PART. II.
fiiivant leur marche ordinaire, firent rendre une
CHAI*. VIH*
Ordonnance par le Commiffaire départi , qui fixa
la portion que la Noblefle de voit fupporter fur cet
l’oppofition de l ’Ordre, les
Rcgift. He la abonnement ; 8c fur
NoblelTe.reg.
reconnurent que tout devoit être pris
i , fol. î 8 4 Sc Aflemblées
7o£.
fur les feux.
Ce fut en force de ce principe, qu’il a été re
connu 8c jugé par des Arrêts, tant du Confeil que
de la C ou r, que l’établiflement des Greffes de l’Ecritoire , ne peut pas porter fur les Juftices feigneu*
riales.
Les Seigneurs contribuent fuffifamment à toutes
ces dépenfes , par les levées qu’ils fouffrent fur les
biens roturiers qu’ils pofledent, foit dans leurs Fiefs, '
foit ailleurs. Il eft quelquefois arrivé que le JRoi a
créé des Offices, avec attribution de droits 6c de
fondions dans les Juftices feigneuriales. Ainfi, par
exemple, en 1693, 1694 8c 1699, il fut créé des
Rf gift. de la
■NoblclTe, rrg.
taxes fur les Offices de Judicature dans les Fiefs,
53J>
55ï » 54° »
ÎÏ* . 573 » fur ceux de Procureurs 8c Subftituts dans les mêmes
» *•
Juftices. Il en coûta à la Noblefle 75000 liv. pour
faire cefler tous ces établiflemens. Chacun fait qu’au
commencement de ce fiecle , les Gruyeries ont été
créées, 8c que la Noblefle les a éteintes. De là,
0
17)
deux confêquences : i°. quand les befoins prefian^
PART. II.
de l’Etat ont forcé le Gouvernement de demander e u A P . vm.
des fecours pécuniaires aux Fiefs , par la voie de
la création d’Offices , ces établiflemens ont été faits
dans les Juftices feigneuriales ; z°. dans ce cas, la
Noblefle a payé feule l’impôt, fans demander la con
tribution des feux. Comment donc les Repréfentans des feux pourroient-ils demander la contribu
tion des F iefs, quant aux créations d’Offices, qui
ne tombent que fur les feux, 8c non fur les Fiefs?
On diroit en vain1 que le Seigneur profite de l’extinftion. La création étant à la charge de la com
munion, le Seigneur contribue 8c paye fa portion
par la taille de fes biens roturiers , 8c par les im
pôts fur les confommations. Ne pourrions-nous pas
dire à notre tour , que la plupart des Citoyens du
troifieme O rdre, profitent aufli du bénéfice naiflant
de l’extinftion des Offices dans les Juftices feigneu
riales ? Que par l’établiflement des Gruyeries , la
Noblefle a rendu aux Communautés le fervice im
portant , ineftimable , de n’être pas foumifes aux inconvéniens fâcheux, quelquefois déplorables, des
Maîtrifes? Cependant la Noblefle a payé toutes ces
extinftions , fans rien demander aux Repréfentans
des feux. Il étoit donc plus qu’inutile de venir
�rale du Pays de Provence. Ils ne font donc pas
frappés par fon Adminiftration. Ils ne doivent par
conféquent pas contribuer aux dépenfes que cette
Adminiftration entraîne. Les poflèfleurs des Fiefs
font Adminiftrateurs dans les Etats; mais les Fiefs
ne font pas adminiftrés par les Etats.
Nous ne dirons pas que les Fiefs ont leur atnniniftration particulière, dont ils payent feuls les
charges , fans que les feux y contribuent ; que par
conféquent les Fiefs ne doivent pas contribuer à
( 239 )
poids, il n’en eft pas moins certain que tels font
PART. U,
les principes de notre Conftitution, que les Etats CHAJP. IX.
n’ont aucun droit d’adminiftration fur les Fiefs.
A in fi, dans les premiers tems, lorfque la Noblefli:
n’avoit point encore de régime particulier, avant
l’époque de 1549, les Etats impofoient toujours
pour les cas inopinés., & ces impofitions étoient
prifes fur les feux. Il y en a d’ exeniples tout autant
qu’il y a d’Etats , & cela réfultoit même de la nature
de nos principes locaux ; car les Fiefs n’étant £ra.p+
pés que dans certains cas par des impofitions, & ne
pouvant jamais l’être que par des impofitions vo
lontaires, il eft bien fimple que les frais d’adminifi
tration ne pou voient être qu’à la charge des feux.
Ce n’eft pas affez que d’avoir un titre qui exempte
les Fiefs de toutes charges relatives aux deniers du
Roi & du Pays. La Noblelfe a de plus les prin
cipes locaux d’après lefquels les Fiefs ne font & ne
furent jamais compris dans la communion, repréfentée par les trois Ordres propriétaires des fonds
impofables.
Quels font les cas inopinés pour le fupport defquels on impofoit fur les feux , & jamais fur les
l ’adminiftration des feux repréfentant la généralité
Fiefs ? Cette défignation comprenoit abfolument &
du Pays ; quoique cette raifon foit du plus grand
indiftin&ement toutes les dépenfes d’adminiftration,
c z m
L-iiLiiiLü rebrouiller fur ces excinûions d’O fiices, dont les
^
fonds ont été payés de part & d’autre , fans regret
& fans retour,
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■
CHAPITRE
I X.
Frais d9Adminiflraiion.
JL ES Fiefs ne participent-ils pas au bénéfice de TAdminiftration générale? Pourquoi n’entreroient-ils
donc pas en contribution pour cette dépenfe ? Telle
eft l’objeêtion : voici la réponfe.
Les Fiefs ne font pas dans la communion géné
�* ~
(2 4 o )
-PART H*
chap
les gages des Officiers & Prépofés du Pays, les
a
ix ëaSes ^es Subalternes, les voyages. On trouve ce
développement dans plufieurs délibérés, foit des
E tats, foit des Aflemblées des Communes ; & de
puis que nos Aflemblées ont exifté , jufqu’à préfent,
toutes les dépenfes de cette efpece ont été cons
tamment payées par les feux.
Quel feroit donc le principe en force duquel on
pourroit foumettre les Fiefs aux frais de l’adminiftration des feux ? Dans tous les tems les Seigneurs
font venus aux Etats à leurs propres dépens. Dans
tous les tems encore, quand les Etats ont nommé
des Députés pris dans les trois Ordres , foit pour
aller hors de la Province, foit pour les Etats gé
néraux du Royaume, chaque Ordre a payé les liens ;
& dans tous ces cas, le troifieme Ordre a cet [avan
tage que les Députés pris dans fon fein font payés
des deniers pris fur les feu x , c’eft-à-dire dans la
maffe de la communion, dont les deux premiers
Ordres partagent les charges, tant'"par le paiement
des tailles levées fur les biens roturiers que par
celui des reves \ au lieu que les biens propres aux
deux premiers Ordres, & qui n’entrent point dans
la communion, fupportent tout le poids des charges
{k députations propres à chacun d’eux. Mais tout
ce
(M O
ce qui eft frais d’adminiftration interne r locale &
PART. II.
commune doit être & a été conftamment pris fur CIIAr. IX.
les feux.
Pourquoi donc révoquer en doute aujourd’hui ce
qui n’a jamais fait matière à conteftation , ni même
à prétention de la part du troifieme Ordre ? Et fur
quoi roule la prefque totalité des frais d’adminiftration ? F a u t - il le dire? & tout le monde ne le
fait-il pas ? Sur le régime des rotures , &c fur l’im
pôt aflis fur les feux. Les deux premiers Ordres
payent.là-deflus leur contingent, foit au moyen des
reves, foit fur-tout au moyen des tailles , que la
généralité du Pays leve fur les biens de la commu
nion , c’eft-à-dire , fur les biens roturiers pofledés
par les Membres qui la compofent.
Remarquons encore que les dépenfes d’adminifitration n’augmentent pas à raifon des Etats. On a
toujours dans le Pays les mêmes Officiers, les mêmes
Bureaux. Les Députés du Tiers font payés par les
feux , c’eft-à-dire , par la caifle commune des trois
Ordres. Les Députés des deux premiers , y vien
nent à leurs frais.
Il eft vrai que la dépenfe des députations de
l ’Ordre du Tiers , s’eft augmentée en raifon de Baugmentation des Députés de cet Ordre. Mais n’étpiti
Hh
�( 242 )
■■■■ Il pas tems i n’étoit - il pas de toute juftice que
par t . il. jes Communautés, membres des Vieueries , euflént
CM AP. IX.
^
des Repréfentans, foit dans nos E tats, foit dans
les Affemblées du Tiers? D ’autre part, fi le nombre
des Députés eft augmenté, c’eft la caifle des feux
qui fupporte cette augmentation , & les deux pre
miers Ordres y contribuent. Il feroit donc fouverainement injufte de faire entrer les deux premiers
Ordres en contribution, dans les dépenfes de l’Adminiftration. Nos peres, mieux inftruits que nous
de la Conftitution & de fes principes , nous ont
donné dans tous les tems l ’exemple uniforme & conftant de ce qu’il falloit faire fur cet objet. Ils ont
reconnu que les Fiefs, exempts de toutes les charges
des Cités , étrangers d’ailleurs à la communion, n’avoient aucune contribution à fupporter pour une Adminiftration qui n’étoit pas établie pour eux.
La pofieflion des Fiefs ( i ) , quant à cet objet,
(*4 3 )
eft antique. Elle eft de tous les tems, fans inter
ruption , fans conteftation , fans prétention, même PART. II
CHAI*. IX.
été opiné la veille fur la fatisfaction des vacations du fieur de
Rogiers ; queplufieurs Communes avoient opiné que MeJJieurs d’Eglife
& Nobles doivent être contribuables au paiement defdites vacations
& voyages faits par ledit fieur de Rogiers ; ce qui femble 6* eft
une chofe nouvelle & non accoutumée, & que l'on ne devoit in
troduire novelleté ne nouvelle couftume , ains que Von doit procéder
en ce & toutes chofes , ainfi qu on a accoutumé par le paffé , pour
vivre en amitié les uns avec les autres ; A QUOI LESDITS E t a t s
ONT AVISÉ, ET DÉCLARÉ QU’iLS N’ENTENDENT AUCUNEMENT
INTRODUIRE
AUCUNE
VEULENT VIVRE ET
NOUVELLE
COUSTUME ,
AINS
QU’lLS
SE ENTRETENIR ENSEMBLE EN BONNE
\ *
UNION, COMME ILS ONT PAR CI-DEVANT ACCOUTUMÉ, ET
NON AUTREMENT.
Les Etats de 1541 , fol. 1 1 3 , impofent 20 fols tournois par
feu pour
les dépenfes du Pays. Ceux de 1589
un écu par
feu pour les cas inopinés. L ’Affemblée des Communes de
1^91
impofe quatre écus par feu pour les cas inopinés, gages du Prévôt
& Archers. Les Etats de Riez en 1592 établiffent l’impôt de deux
S
'
(i) Tous les Etats & toutes les Affemblées des Communes
rejettent avec raifon tous les frais d’Adminiftration fur les feux.,
Il feroit trop long de les citer; mais le vœu des Etats de 1536
doit être connu. On a vu que le fieur de Rogiers avoit fait di
vers voyages pour le Pays, comme Député des Etats: on y voit,
au fol. 10, qu’il fut expofé par l ’Evêque de V en ce; qu’il avoir
écus par feu pour le même objet. Ceux de
1591 , aufîi tenus à
Riez, impofent quatre écus par feu pour les cas inopinés Sc falaires. Ceux de 1 596, tenus à Ai x, fol. 199, impofent 37 fols 6
den. par feu pour les gages des Officiers, voyages en Cour & dans
le P a y s, dons , récompenfes, intérêts & autres cas inopinés. Les
feux fupportoient tout, quoique poffédés par les Nobles, même
les frais de l ’Affemblée des Communes. Les Etats de 1581 avoient
H h ij
�de la part du T iers; & cette pofleflion n’eft pas
préfentée comme engendrant un titre de prefcription. Elle n’eft que la fuite d’un principe local, &
l ’exécution d’un titre conftitutionnel. En principe
lo c a l, les Etats n’adminiftroient que les feux St non
les Fiefs. Nos titres conftitutionnels nous difent que
nos Fiefs ne doivent rien, ni pour les deniers du
Fuoi, ni pour ceux du Pays, qui n’eft formé dans
fa généralité que par la colleûion & l ’enfemble des
feux & des rotures.
impofé 50 Iiv. 15 f. par feu pour le paiement des dettes du Pays,
St autres deniers impofés pour les gages des Officiers du Pays &
autres cas inopinés. V oyez l’Aflemblée du mois d’Oêlobre 1598 j
voyez les Etats de 1597 tenus à Marseille, qui impofent 20 fols
par feu pour divers objets , & notamment pour les frais des voyages,
gages des Officiers & cas inopinés. Les Etats de 1599 impofent
40 fols par feu pour les cas inopinés. Ceux de 160 0 , 40 fols par
feu pour les cas inopinés. Pour tout dire en un m o t , on trouve
les mêmes traits dans tous les v œ u x , foit de la N ation, foit dans
ceux qui font fortis volontairement du fein du troisième Ordre
jufqu’en 1786.
PART. II.
CHAP- X.
Abonnement de iCc)i pour les droits de directe, ca~
valcades > albergue 6* autres dus au Roi par les
Communautés.
O n ne conçoit pas comment on s’eft permis l’idée
de faire contribuer les Fiefs à cet abonnement. Il
paroît qu’on en ignore l’objet, ainfi que les circonflances dans lefquelles il eft intervenu.
En 1675 , le Fermier fit relever tous les anciens
droits de directe, albergue, cavalcade, & autres qui
pouvoient être dus au Pvoi par les Communautés ,
fuivant les opérations des anciens Clavaires. Il en
fut fait un état fort étendu & fort avantageux, re
lativement aux idées de fifcalité qui gouvernoient
cette opération. Il intervint en conféquence le 11
Avril 1676 un Arrêt du C on feil, qui portoit con
trainte contre les Communautés comprifes dans l’é
tat; il fut dit en outre dans cet Arrêt, qu’e/z cas
que les Communautés juflijîent par pièces valables, que
les fufdits droits ont été donnés vendus ou aliénés
par les anciens Comtes, à des conditions non expirées,
Sa MajeJlé les a renvoyées pardevant M. Royer,
�(2 4 6 )'
Commijfaire député en Provence, pour leur être dit
PART. II.
droit , le Fermier ouï.
C H A I’ . X.
Cet Arrêt ne frappoit ,que contre les Communau
tés , & non contre les Seigneurs , à qui les inféo
dations ont tranfporté tous les droits que la Cour
royale avoit auparavant. En Provence , les conceflions en F ie f, font toutes, ou de fait, ou de préfomption , dans la forme la plus ample. Les réferves
n’y font, ni connues, ni préfuméés. Quelques Com
munautés , même feigneuriales, s’étoient foumifes à
des droits, foit de fouage, foit de cavalcade 8c au
tres , après l ’inféodation. Le Fermier avoit compris
dans fon relevé , des droits qui appartenoient aux
Seigneurs. Les Affcmblées délibérèrent de tout abon
ner , pour mettre les Communautés à couvert de toutes
recherches } c’eft pour cet o b jet, qu’en exécution
Dccorrris> du Traité de 1691 , le Pays paye annuellement au
tom i , coi1088.
Droit public,
pag. 40.
Roi 3 5000 liv.
T el eft l’objet défigné par droit de nouvel acquêt,
dans les Mémoires du troifieme Ordre , fur lequel
on propofe des contributions à la Nobleffe. Il fuffit
d’expofer la queftion , 8c de fixer la nature des droits
abonnés , pour fe convaincre que les Fiefs n’ont rien
à payer là-deflus. A cet égard, nous ne nous con
tenterons pas de dire qu’ils ont titre 8c poflèfiion:
047 )
nous ajouterons qu’il eft de plus impoflible de faire ag»Ms jw t/ a »
Part . ii.
fupporter aux Fiefs les charges des Communautés , CH AP. X.
foit feigneuriales , foit royales.
Ici tous les prétextes manquent au troifieme Or
dre. L ’Arrêt du Confeil de 1676 frappoit fur les
Communautés. La contrainte qui s’y trouvoit pro
noncée étoit pour les droits dus au R o i, par les Com
munautés comprifes dans l’état relevé par le Fer
mier. Les Fiefs devroient-ils payer les dettes des
Communautés ?
Ces dernieres ont voulu, dans le tems, tirer une
indu&ion toute contraire de l’abonnement de 1691-,
Quelques Seigneurs ont des droits feigneuriaux d’albergue 8c de cavalcade qui leur ont été cédés par
nos anciens Souverains, foit dans les inféodations,
foit autrement. Quand ils en ont formé demande ,
les Communautés leur ont oppofé que ces droits
étoient éteints par l’abonnement de 1691. Les Sei
gneurs ont dit au contraire que cet abonnement ne
frappoit que fur les droits dus au Roi par les Com
munautés , 8c non fur ceux dus aux Seigneurs. La
queftion fe préfenta en 1703, entre le Seigneur 8c
la Communauté de Volonne. Le Seigneur demanda
le droit de cavalcade, porté par fes titres, 8c fuivant la converfion en argent, reçue par les Loix
�PART. II.
©HAT,
(2 4 8 )
ou Ufages du Pays. La Communauté de Volonne
prétendit qu’elle ne devoit rien , & que toutes les
cavalcades dues par les Communautés , étoient étein
tes par l’abonnement de 1691. Elle fut condamnée
par une Sentence arbitrale, confirmée par Arrêt du
Parlement de D ijon en 1728.
Le P ays, repréfenté par les feux ou les Commu
nautés , voulut intervenir dans les conteftations qui
s’étoient formées pour la liquidation des droits ad
jugés. Son intervention fut rejettée par A rrêt, fous
la réferve de fe pourvoir par appel envers la Sen.
tence de 1703, ou par oppofition envers l ’Arrêt de
1728. On fent bien que cet appel & cette oppofi
tion n’ont jamais eu lieu. Il, auroit été plus qu’abfurde , de préfenter aux Tribunaux de Juftice , la
.
quefiiou de favoir , fi les droits feignçuriaux étoient
emportés ou éteints par un traité d’abonnement fait
entre le Roi & les Communautés. Ce ne feroit pas
afléz que les Seigneurs ne puflênt, ni profiter, ni
fe prévaloir de ce traité* Comment pourroient-ils
y perdre une partie de leurs'droits légitimes?
D ans le même tems, la Noblefie ayant eu con-.
noilfance des mouvemens que l’Adminiftration des
R cg ift.d d a feux vouloit faire fur cet objet, déclara dans une
Noblcffc,icg.
.... ,
3»foi *77.
Délibération y
V
Délibération , que Vabonnement de 1691 fait avec le
R o i, ne concerne que les droits féodaux que les Com
munautés fervoient au domaine de Sa Majeflé, & nul
lement ceux dus par les Communautés à leurs Sei
gneurs. Elle fit confulter. On devine quel fut le
réfultat de cette Confultation. Le Seigneur de V o
lonne , 6c tous les autres dont les titres portent le
droit d’albergue 8c de cavalcade , en jouifiént paifiblement ; 6c d’autre part , les Adminiftrateurs des
feux ont conftamment reconnu , d’un côté , que les
droits compétans aux Seigneurs, n’étoient point frap
pés par l’abonnement de 1691 ; 6>C de l’autre, que
les 35000 liv. de cet abonnement, dévoient être
fupportées par les rotures, puifque les droits abonnés
étoient la charge des rotures , & non celle des Fiefs,
auxquels l’abonnement eft par conféquent étranger.
■11
)'
■■
-
C H A P I T R E
1
■■ - ■ r
..
XI .
Abonnement du droit fur les Huiles & des Vingtièmes>,
L es Fiefs contribuent à ces abonnemens. On v o it,
par ce que nous venons de dire, qu’ils n’auroient
pas dû y contribuer , parce que les- droits impofés
fur les huiles ÔC les vingtièmes, n’auroient pas dû
Ii
�C*s°)
Mais les befoins de l ’Etat ont
( *sO
fixer les proportions des oliviers nobles & des ro
cefler, ou fufpendu , quant à ce, la préro
gative féodale. Les titres conftitutifs de ces deux
impôts comprennent textuellement les huiles pro
cédant des biens nobles , & tous les revenus quel
conques , tant nobles que roturiers. Tant que ces
Loix fubfifteront, la Noblefle payera fa portion dans
l ’abonnement de ces deux objets. Les deux Adminiftrations font même liées là-deflus par des conven
tions provifoires pour les fommes à payer dans le
moment., & qui ftatuent fur la maniéré dont les con
tributions à ces deux objets feront réglées pour l’a
venir , pendant la durée de ces deux impôts.
Ainfi la contribution de la Noblefle à l’abonne
ment des droits établis fur les huiles , eft fixée fur
le pied d’un vingtième , par une convention faite
en 1782 par la médiation de M. de La Tour,qui
a toujours defîré la paix , & qui l ’a fouvent établie
entre les deux Adminiftrations. Ce titre porte des
réferves, fans lefquelles la Nobleffe n’auroit point
contra&é. Il y eft dit que les deux Adminiftrations
venant à faire procéder aux opérations conjointes
de l’affouagement & de l’afflorinement, fuivant leurs
précédens accords, les Commiffaires-AfFouageurs &
Afflorineurs, feront chargés, de part & d’autre, de
turiers , & de la confommation refpe&ive, pour
faire enfuite , entre les deux Ordres , une fixation
nouvelle, s’il y échoit, laquelle , dans ce cas, 8t non
autrement, fervira de réglé pour la contribution*
En attendant cet événement, que tout le monde
doit defirer, & dont les feux ont à redouter l’effet,
comme on le verra bientôt, la Nobleffe paye provifoirement un vingtième fur le total de l ’abonne
ment depuis cette convention.
S’il falloit régler la cotité fur le rapprochement
des revenus des deux mafiês du Noble & du Rotu
rier , la Noblefle auroit certainement à s’en plain
dre. Le revenu noble 11’arrive pas à un cinquan
tième du revenu roturier. Mais il n’y a pas même
lieu de s’établir fur cette bafe : car en confidérant
l’impôt comme perfonnel, relativement aux confommations , la Noblefle n’auroit pas, à beaucoup près,
un centième de l’abonnement à fupporter. Les fa
milles nobles ne font pas en Provence dans la pro
portion d’un fur cent fur les familles roturières.
Nous fuppofons qu’il exifte un million d’individus en
Provence , on n’y comptera jamais dix mille perfonnes nobles \ on y en trouvera bien moins encore,
fi l’on ne compte que les propriétaires des Fiefs.
1 i ij
frapper fur eux.
cTiAp.x,.'
�O sO
PART. U
CH AP. XI
Voudroit-on fe régler fur la proportion des oli
viers complantés dans les fonds nobles , 5c de ceux
complantés dans les fonds roturiers ? Dans ce cas,
la contribution de la Noblefle fera toujours exceffive. Communément les terres des Seigneurs ne font
point plantées ; 5c tout bien compté , on ne trouveroit pas un olivier dans un fonds noble , pour deux
cens oliviers plantés dans les fonds roturiers. Cela
peut paroître exceflif à ceux qui ne jugent pas du
total par l’enfemble ; ÔC certainement cet apperçu
n’a rien que de jufte, pour toutes les perfonnes qui
voudront prendre une connoiflance exafte des différens terroirs de la Province.
Les deux Adminiftrations fe trouvent également
réglées, quant à ce qui concerne la contribution aux
vingtièmes. Cet impôt eft abonné, 5c les Adminiftrateurs des feux, quand ils ont fait Cet abonnement,
ne fe font pas fouciés de confulter la Noblefle j
mais ils ne l’ont pas oubliée dans la répartition.
Ils ont commencé par rapporter un Arrêt du Confe il, rendu fans l’entendre , par lequel ils faifoient
fixer à 125500 liv. le contingent de la Noblelîé \ ce
qui la mettoit à la cotité d’un huitième. L ’excès de
cette fixation étoit intolérable. Les mouvemens &
les plaintes cle la Noblefle ont produit d’abord une
Os?)
convention du 4 Juillet 1760, par laquelle la con
PART. H.
tribution des Fiefs a été réduite à 105500. Cette
CHAP.
fixation nouvelle étoit encore d’un excès révoltant.
La Noblefle ne s’y fournit que parce qu’il fut éga
lement convenu dans le même titre qu’on procéderoit inceflamment à la comparaifon du revenu des
feux 5c des florins , parce qu’il n’y avoit en effet
que ce moyen qui pût établir entre les deux Adminiftrations des bafes légales 5c juftes de répartition.
On s’occupa de part 5c d’autre du foin de rap
procher les tems de cette comparaifon, fur laquelle
les deux Adminiflrations s’étoient refpeêlivement
engagées.
O11 commença par reconnoître que pour le rap
prochement des deux mafles , il falloit affouager 5c
affloriner en même tems , 5c que ces opérations dé
voient être faites par des Commiflaires conjoints.
O11 prépara cette double opération ; 5c l’on étoit
prefque au moment d’y procéder, lorfqu’il fut dé
claré à la Noblefle que des raifons fupérieures forçoient l’Adminiftration des feux à fufpendre l ’exé
cution des arrangemens concertés entre les deux
Ordres. La Noblefle foulée par la convention de
1760, ne voulut y confentir que fous la condition
qu’il feroit procédé à une répartition nouvelle qui
t
�( 254 )
ne feroit que provifoire, en attendant les teins ou
PART. II.
l ’on pourroit procéder de part & d’autre à l’opé
CH AP. XI.
ration conjointe de l’afflorinement & de l’afFouagement.
La Noblefle fut bien aife de marquer dans cette
occafion une certaine condefcendance. Elle confentit
par une troifieme convention faite en 1776 par la
médiation de M. de La T o u r, à fupporter pour fon
contingent à l’abonnement des deux vingtièmes, la
fomme de 101666 li v ., ce qui met la contribution
dans la cotité d’un douzième fur le total de l’abon
nement ; & tel efi le dernier état des chofes fur cet
objet.
Après l’expofition des faits, qu’il nous foit per
mis de placer ici deux réflexions. On a dit dans
les Mémoires produits au nom du T ie r s , que le
revenu des Fiefs étoit à la proportion d’un fixieme
fur les revenus des rotures. On l ’a dit fans titre
& fans garant. On a là - deflus invoqué la foi de
l ’hiftoire, qui n’en dit rien. D ’autres ont dit au
contraire que le revenu des Fiefs étoit dans la
proportion d’un à huit fur celui des rotures. La
Noblefle ne le penfe pas de même, & fes raifons là-deflus font à la portée de tout le monde.
On peut mettre fous les yeux des Lecteurs un ap-
(j"r.' ■
F
( 25 S )
perçu qui pourra contenter les perfonnes jurtes, &
qui font bien-aifes de s’inflruire. Nous difons donc
que le revenu noble de chaque Seigneur dans fon
F ief, pris l’un dans l’autre, & le fo r t, comme on
dit, comportant le foible, peut être fixé fur le pied
d ’un dixième: cela n’a certainement rien d’exceflif;
quelques Seigneurs pofledent au-delà de cette cotité.
Mais certainement on vérifiera le contraire dans la
prefque totalité des F ie fs, où le revenu roturier efl:
de quinze à vingt fois au-deflïis du revenu noble.
Combien de Seigneurs, même parmi ceux qui n’ont
que des revenus nobles, n’arrivent pas à la vingtième
du produit total des rotures qui font dans leurs Fiefs?
Et combien d’autres n’en trouve-t-on pas qui poffédent plus en roture qu’en nobilité ? Ainfi , cette
première bafe n’a rien d’immodéré , rien d’avanta
geux pour la Noblefle.
Il faut joindre à ce calcul les Fiefs eccléfiafliques , dans lefquels les rotures font plus étendues, fur
lefquels la Noblefle ne prend pas un fol de revenu,
& qui tournent prefque en entier au profit des feux.
Ces Fiefs arrivent au moins, par toutes ces circonftances, à la moitié du revenu des Fiefs laïques ; & dèslors le contingent de la Noblefle, en ne calculant
que le produit des feux compris dans les Fiefs, feroit
�( 25?)
à raifon d’un quinzième. La Noblefle paye pourtant
fa contribution actuelle à l'abonnement des vingtiè
mes fur le pied d’un douzième.
Mais ne faut-il pas encore ajouter à ces bafes du
revenu roturier que nous venons de former, celle
des feux formés par les villes royales. La ville de
Marfeille feule ne vaut-elle pas plus que deux cent
Fiefs? Les villes d’A ix , d’Arles, Grade, Tarafcon,
8c toutes celles du fécond 6c du troifieme ordre qui fe
trouvent dans la Province, ne produifent-elles pas
autant que tous les Fiefs enfemble ? Et fi le contin
gent de la contribution des Fiefs ne feroit que d’un
quinzième, en n’opérant que fur les feux compris dans
les Fiefs T foit laïques., foit appartenans à l’Eglife ^
ne faudra-t-il pas réduire ce contingent au trentecinquième de l’abonnement, quand on opérera fur
tous les feu x , en y comprenant toutes les Villes
royales , fans exception, comme on doit les y com
prendre ? Et que n’auroit-on pas à dire encore, en
joignant à cette malle du revenu roturier,, celle du
loyer des maifons dans les V illes, qui n’a rien de
commun avec les F iefs, 6c celle de l’induftrie perIbnnelle, dont le Vingtième ne tombe que fur les
individus du troifieme Ordre ? La contribution de la
Noblefle à l’abonnement des Vingtièm es, eft donc
çxceflive,
exceflïve, intolérable fur le fimple apperçu des deux
maflés qu’il faut rapprocher 6c comparer; 6c de là, CHAP ‘XI<
il arrive dans plufieurs F iefs, que les biens nobles
d’un Seigneur, qui n’ont à fupporter que les Ving
tièmes , l’impôt fur les huiles, 6c les charges de
l ’adininiftration de la Noblefle, font à peu près au
tant chargés que les biens roturiers de ce même
Seigneur, qui fupportent toutes les charges établies
pour la totalité des impôts, comprenant les deniers
du Roi 8c du Pays.
Obfervons encore que les conventions , tant celle
de 17 8 2 , comprenant l’impôt fur les huiles, que
celles qui font fucceflivement intervenues entre les
deux Adminiftrations , au fujet de la contribution
de la Noblefle à l’abonnement des Vingtièmes, portent toutes les réferves poflibles, fans tirer à conféquence y 8c fans qu’on puifle en rien induire pour
toute autre efpece de contribution. On a donc raifonné , non feulement contre les principes conftitutionnels, mais encore contre les titres communs aux
deux Adminiftrations, quand on a voulu prendre
droit, de ce que la Noblefle contribuant nix abonnemens de l’impôt fur les huiles 6c des vingtièmes,
devoit également contribuer à tous les autres de
niers du Roi 6c du Pays.
K
k
�C 2 58 )
par t . iî.
chap.
xr.
La contribution à abonnement des Vingtièmes
fur la cotité d’un douzième, a fait payer à la NoI , f"\ f
b lefle, à la décharge des feu x, des fommes énor
mes , & qui indemnifent abondamment le troifieme
Ordre , de l’abandon qui fut fait au fujet des ar
rérages de la contribution à l’impôt fur les huiles.
Le troifieme Ordre eût été fondé à demander ceis
arrérages, on doit en convenir, parce qu’il faut
être jufte. Mais la Noblefle en fut déchargée, foit
à raifon de ce qu’elle confentit à la cotité provifoire d’un Vingtième , dont l’excès efl évident fous
tous les rapports, foit parce qu’elle pouvoit faire
cefler à chaque inflant l’arrangement provifoire d’un
douzième au fujet de fa contribution aux Vingtiè
mes , portée par la convention de 1782. Il s’eft
depuis lors écoulé fix ans \ & les feux ont déjà re
tiré deux ou trois fois , fur l’abonnement, des Ving*
tiemes , le montant des arrérages de la contribution
de la Noblefle à l’impôt fur les huiles , dont la con
vention de 1782 renferme l’abandon ( 1 ) .
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VfICC.
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PART. II.
CK A P. X I I.
C H A P I T R E
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Les frais de la conjlruction du Palais.
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ES Fiefs contribuent à cette dépenfe, volontairer
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v.
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ment délibérée par les Repréfentans des feu x, &
plus volontairement encore confentie par la No
blefle.
Mais il peut être utile de favoir que le projet
de contribuer à la.recooftruftion du Palais, qui efl:
à la charge du R o i, & à laquelle les Fiefs ne font
certainement pas. fournis, fut propofé dans l’Àfîemi)lée des Communautés de 1784. Cette dépenfe y
fut préfentée, comme devant s’élever à la fomme de
1200000 liv ., dont le Roi devoit fupporter les deux
tiers , & la Province le tiers refiant ; & il y fut
dit très-adroitement, que la portion de la Province
continuation de la contribution préexiftante à l’abonnement des
(1) Remarquez encore que la Noblefle n’avoit point d’arré
rages à payer pour les tems pendant lefquels elle avoit confenti
à ce qye la levée des droits fur les huiles fût faite en nature, &
quelle n’auroit jamais confenti la fixation au vingtième, & la
vingtièmes, fans l’abandon de ces. arrérages. Si l’adminiffration des
feux vouloit en venir à un ri Aliment avec effet rétroaifif, pour
fe régler définitivement en conformité des rapprochemeus qui font
à faire dans l’opération conjointe, la Noblefle y confentiroit vo
lontiers.
K K ij
�C
)
s’élevant à 100000 liv. par année, ferait prife au
PART. II.J marc 7a livre des Vingtièmes. Cela ne parut pas aflez
CHAP. XII.
développé aux Procureurs joints de la Noblefle, pour
C a h i e r de
l ’ À l l e n i b l ^ c d e mériter une oppofition de leur part.
Cette expref17 8 4 , pag. 14.
fion recherchée pouvoit indiquer feulement la, ré
partition à faire entre le Corps des Vigueries &
les Terrçs adjacentes fur la cotité dçs Vingtièmes,
8c l’on crut alors, dans l’Ordre de la Noblefle,
que fi les Adminiftrateurs des feux avoient eu l’in
tention d’aflujettir les Fiefs à cette contribution,
ils leur auroient manifefté franchement le projet
qu’ils avoient là^defîus , en les priant d’engager auffi
l ’Ordre des Nobles, à fe prêter dans cette occafion
aux demandes du Gouvernement. La Noblefle n’eût
pas manqué d’y confetir \ ce qui s’en eft enfuivi,
ne permet pas d’en douter.
D e là vient que fes Adminiftrateurs, 8c l’Aflemblée de la Noblefle, tenue le 22 Décembre 1784,
prirent en considération le délibéré de celle des
Communautés. Il fut dit alors verbalement qu’on ne
pouvoit faire aux Adminiftrateurs du T iers, l’in
jure de fuppofer qu’ils avoient voulu fe ménager
une voie fourde & détournée, pour préparer la con
tribution du Corps , qu’il eût été plus honnête de
requérir ouvertement 8c avec franchife 5 que néan-
(
>
moins la 'contexture de la délibération prife à Latn- gwi ' jl
1
PART II
befc , pouvoit envelopper le germe d’un venin contre CHAP/XIU
lequel il étoit prudent de fe précautionner ; en conféquence , les Syndics furent priés de conférer avec
les Procureurs du Pays , pour leur déclarer que le
Corps ne confentiroit jamais à aucune contribution
nouvelle au marc la livre des Vingtièmes ; 8c de
fuite il fut écrit dans le délibéré, que des rai•
fons importantes au Corps exigeaient de fufpendre toute
délibération fur ce qui s*étoit pajfé à la nouvelle A f
(emblée des Communautés , dernièrement tenue à Lambefc.
On annonça qu’il n’étoit plus queftion de la con
tribution de la Province, 8c qu’on prendroit d’au
tres arrangemens ; 8c c’eft 'néanmoins dans cet état
que les Adminiftrateurs des feux furprirent un Arrêt
du Confeil , revêtu de Lettres patentes, par lequel
le projet annoncé, fut confommé. L ’Arrêt portoit
que la Province payeroit tous les ans 100000 liv*
pour les frais de la reconftruftion du Palais , 8c que
les Fiefs y contribueroient pour la fomme de 8355
liv. 6 f. 8 den. C ’étoit un douzième fur les 100000
liv. promifes par les feux. Cet Arrêt fut rapporté,
fans que la Noblefle en eût été prévenue. La con
vention de 1776 n’avoit déjà que trop duré, quant
�)
C
—
■ - a u x V in g t iè m e s . I l y a v o i t é t é d it q u ’ e lle n e pour-
CJMp *XII‘ roit être étendue à d’autres objets. Quand en 1782
la Noblefle avoit accepté la cotité d’un vingtième
pour fervir d’état provifoire , en attendant le Ré-*
glement définitif, ce n’avoit été qu’avec la plus
grande répugnance , & en exigeant encore la même
claufe, que cette cotité d’un vingtième ne tireroit
pas à confequçnce. On favoit bien que fi la ma
tière avoit été difeutée, comme elle auroit dû l’être
entre les deux Adminiftrations , la Noblefle, en confentant à donner un fecours pour la reconftruétion
du Palais, n’auroit pas accepté la cotité d’un ving
tième , qu’elle regarde comme très-injufte, & qu’elle
n’avoit acceptée que par condefcendance , 6c parce
que lès Adminiftrateurs des feux abandonnoient les
arrérages, lors de l’arrangement intervenu fur l'a
bonnement de l’impôt fur les huiles.
Au moins le dernier état étoit pour la cotité d’un
vingtième. L a Noblefle fut offenfée , tant du pro
cédé, que de Vinjuûice qu’on vouloit lui faire, en
appliquant à la conftruftion du Palais la cotité fixée
fur les Vingtièmes, fous le joug de laquelle elle eft
écrafée. Elle étoit au moment de demander qu’il fût
procédé tout de fuite aux opérations conjointes de
l ’afflorinement 6c de l’aifouageinent. Ce mouvement
C 2<5r )
étoit naturel, légitime , nécefîaire ; ij fut calmé par
M. l’Archevêque d’A ix , qui parvint à faire réduire PART. II.
GHAP. XII.
à un vingtième , la contribution de Ja Noblefle, aux
frais de la reconftruétion du Palais. Et l’Ordre ,
quoique très - léfé par cette x o tité , confentit à la
fupporter ; parce que les tems où les forces des deux
Adminiftrations feront connues, raprochées 6c com
parées , ne peuvent pas être bien éloignés ; parce que
l’affouagement 6c l’afflorinement font indifpenfables ,
attendu les arrangemens pris depuis long-tems entre
les Adminiftrateurs des feux 6c ceux des Fiefs ; parce
qu’enfin chacune des deux Adminiftrations a le befoin le plus preflant d’avoir une nouvelle répartition
dans fon intérieur.
A in fi, la Noblefle fupporte tous les ans la con
tribution volontaire de 5000 liv , formant un ving
tième fur les 100000 liv. fournies par le Pays pour
la conftruôtion du Palais. Mais après les divers dé
tails dans lefquels on eft entré fur les objets cidevant difeutés, tout Lefteur jufte conviendra que
la Noblefle, loin de fe permettre des procédés avan
tageux, en a fouvent fouffert de la part des Ad
miniftrateurs des feux. Dans l’origine de la divifion des deux Ordres au fujet des taillés, ils furprirent une Déclaration qui, fans entendre les deux
�\
premiers Ordres* limitoit le nombre de leurs Repréfentans dans les Affemblées générales de la Na
tion à la moitié des Députés du Tiers. Ce titre
pervertifloit la Conftitution. Il fut révoqué, & les
Etats de 1622 reconnurent qu’il avoit dû l’être, en
adoptant le Réglement délibéré par la Nobleffe en
1620.
En 16 6 1, quand il fut queftion de l’augmentation
du prix du fel , les Administrateurs du troifieme
Ordre fe munirent d’un Arrêt du C on feil, portant
défenfes aux deux premiers de s’affembler. En 1697,
ils rapportèrent une Ordonnance rendue par le
Commiffaire départi, fans entendre la Nobleffe, pour
la foumettre à contribuer au prix des Offices éteints.
Quant aux vingtièmes, ils fe font armés d’un Arrêt
du Confeil. Ils ont fuivi la même marche fur la con
tribution au Palais, 8c ces différens titres ont été
' c
fucceffivement rapportés, fans avoir confulté l’Ordre
'8c fans l’entendre. On fent quelles font les facilités
que doivent trouver en pareil cas des Adminiftra
teurs qui traitent des abonnemens. On ne reprochera
pas à la Nobleffe des procédés de cette efpece ; &
ce que nous obfervons là-deffus n’eft point un re
proche. C’eft une réflexion qu’il falloit faire, pour
mettre le Lefteur en état de fentir que les droits
0 5 )
____
des Fiefs ne tiennent pas à des principes d’ufurpa- r —
r
1
r
PART. II.
tion 8c d’oppreffion.
c h a p . x ii.
C H A P I T R E
XIII.
ConJirucHon & entretien des Chemins * Ponts, & autres
ouvrages de cette nature.
^/VvANT la tenue des Etats de 17 8 7 , la Nobleffe
ufoit de tous fes droits. Elle ne contribuoit pas aux
chemins. Les Communautés ne payoient pas les
biens nobles 8c ceux de l’ancien domaine employés
pour l’emplacement des chemins, tandis qu’elles rembourfoient la valeur des fonds roturiers pris pour
cet ufage.
Par Conftitution, les fonds nobles ne dévoient
rien. Cela réfulte des principes ci-devant établis.
Les deniers levés pour la conftru&ion 8c répara
tions des chemins, font partie des deniers du Pays*
qui ne dévoient être levés que fur les feux 8c non
fur les Fiefs (1 ).
( 1 ) Les Etats Sc les Délibérations des Affemblées l’ont cons
tamment reconnu de même. On trouve dans les Etats du mois
d’O&Qbre 1624 un Règlement qui içérite d’être connu. Il eft dît
des
L 1
fv
_
V
�/
(2 6 6 )
Cela réfulte encore du vœu de tous les Etats &
Affemblées. Par-tout où Ton voit des Délibérations
fur les chemins , Ponts 8c conftru&ions, la charge
dans l ’article 6 du délibéré: A
l'avenir la conftruclion des ponts
& chemins, lorfque les dépenfes n excéderont tyo liv ., feront toutes
faites aux dépens du Lieu où lef dites réparations feront à faire ;
de 150 liv. en haut, & jufques à 1000 liv ., ledit Lieu pour les
150 liv ., & le reftepar toute la Viguerie dans laquelle ledit Lieu
fe trouvera; & lorfque la dépenfe excédera 1000 liv ., fi cette ré
paration fe fa it à un Lieu affouagé de vingt feu x en bas, ladite
dépenfe fera fupportée , 150 liv. par ledit Lieu , 1000 liv. par toute
la Viguerie , & le fur plus par tout le Corps & général du Pays,
au paiement duquel furp bus lef dits Lieu & Viguerie contribueront
aufji comme tout le refie du Pays à coûté de feu x ; &
quand
feront à faire à des Lieux affouagés de vingt feu x en haut v la dé
penfe en fera fupportée, un tiers par le Lieu ou la réparation fera
faite, 1000 liv. par les autres Lieux de la Viguerie, & le furplus
par tout le Corps du Pays , fors ledit Lieu qui en fera tenu jufqu'au
paiement dudit tiers. Ce Réglement fut calqué fur ceux qui I’avoient
précédé, & qui rejettoient également toute la dépenfe des che
mins fur les villes, Vigueries &
la généralité des feux, fuivant
l’importance de chaque dépenfe* V oyez les Etats de 1621, fol.
271. De ces textes & de tous les autres connus, il naît d’abord
cette conféquence, que quand les Etats parloient des charges du
P a y s , ils ne parloient que des charges des feu x } ajoutez-en une
fécondé, c ’eft que les cherpins, ponts & co n trario n s publiques
n’étoient quà la charge des rotures ou des Communautés.
(2 6 7 )
en eft contaminent portée fur les feux. Le troif eme ■— ■ r-/"
Ordre ne celle jamais de dire que les Fiefs en pro- cHAp ’.m
fitent ; 8c l’obfervation e t jufte en fait. Mais que
peut-elle opérer, 8c quel fruit peut-on en attendre,
dès qu’il e t certain en Provence, que les Fiefs ne
doivent rien , foit pour les deniers du R o i, foit pour
ceux du Pays? Les deniers du Roi ne comprenentils pas tout ce qui e t impôt, foit dire& , foit in
direct, dont le produit entre dans les coffres du Roi ?
Et les deniers du Pays font-ils autre chofe que les
dépenfes délibérées 8c faites pour des objets, foit
intérieurs foit extérieurs, d’utilité générale ?
D ’après nos principes locaux , la Nobleffe avoit
à fe plaindre de ce qu’on prenoit les fonds nobles
pour les appliquer aux chemins , fans en payer la
valeu r, tandis qu’on payoit celle des fonds rotu
riers ; ce qui produifoit encore un nouveau préju
dice , attendu que le fonds noble du Seigneur non
protégé par l’Adminitration , étoit choit par préfé
rence : 8c par ce moyen, quoique les Fiefs ne duffent rien pour l’objet des chemins , ponts Sc confîruétions , les Adminiftrateurs des feux leur faifoient
fupporter au-delà de leur contingent, en prenant les
domaines nobles fans payer.
La Nobleffe a généreufement 8c volontairement
L 1 ij
�( 268)
■
offert, lors des derniers Etats , d’entrer en contriiAkr. ii. j)Utjon> Elle a même plus fait ; car elle a fait l’offre
d’une contribution proportionnelle , en comparant
les deux maffes du revenu noble 5c du revenu ro
turier.'La fixation définitive de cette contribution,
dépend du rapprochement des deux mafles , 6c par
conféquent de l ’opération conjointe de l’afflorinement Sc de l’affouagement. En attendant, la Noblefle a fixé l’offre de fa contribution à la cotité
d’un vingtième, parce que tel eft le dernier état
porté, tant par la convention de 1782 , au fujet de
F abonnement de l ’impôt furies huiles, que par les
ordres donnés par le Gouvernement pour fixer fa
cotité aux frais de la conftruêtion du Palais.
Ces offres ont été critiquées. Pourquoi , a-t-on
di t , l’offre feroit-elle reçue comme volontaire ? On
a démontré que les Fiefs ne devant rien , la con
tribution à laquelle leurs Adminiftrateurs repréfentant l’Ordre des Nobles, vouloient bien confentir,
ne pouvoit être faite 6c reçue que comme volontaire*,
6c pourquoi la priveroit-on de ce mérite , que les
loix de notre Conftitution lui donnent ?
Cette offre, a-t-011 dit encore, n’eft pas pleine
6c fuffifante. Mais d’abord peut-il être queftion de
fuffifance , quand il s’agit d’une offre libre 6c de
pure générofité ?
O 69)
D ’un autre côté , la Noblefîe s’eft conduite dans
cette offre , tout comme fi les loix du Pays avoient
exigé de fa part cette contribution , dont elle a été
conftamment affranchie , tant par conftitution, que
par pofteffion.
PART. 11.
CHAP. XIII.
Elle s’eft fixée à la cotité d’un Vingtième , par
provifion. Elle a dit aux Repréfentans des feux ,
qu’elle confentoit à ce que les deux Ordres fe fioumifient à fe bonifier refpeéfivement , même avec in
térêts , ce qui , par le réfultat de l’opération con
jointe de l’affouagement 6c de l’afflorinement, fie
trouveront en defliis ou en de flous de la fournie
portée dans la contribution, fur le pied d’un ving
tième.
Cette offre n’étoit-elle pas bien noble, bien fran
che ? Cependant elle éprouve une nouvelle cenfure
dans la Délibération des Communes , prife par la
derniere Aflémblée de Lambefc.
On y voit avec étonnement que la contribution
une fois jugée néceffaire , on doit la régler dès-au
jourd'hui fur le pied de la contribution de la NobleJJe
aux Vingtièmes ; quil ne faut pas expofer un Ordre
à payer à Vautre une rnajfe d'arrérages dangereufe
en f o i , & plus encore dans les circonflançes \ .........
que toute charge publique 6* commune doit être prife
Pag. 78
�O 7° )
fur les fruits ; que lors des deux conventions de
part . il. g, même lors de celle de 1782 , les contributions
CHAP.
XlîT.
t <
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/
r
r
y
r
fu -
rent provifoirement fixées Jans arrerages y qu’ennfl le
troifieine Ordre ne craint pas le réfultat de l’opé
ration conjointe , & le rapprochement des revenus
refpe&ifs ; qu’il aura même à gagner en fin de caufe,
mais qu’il prévoit qu’il faudroit aboutir, comme en
178 2, à faire le facrifice des arrérages paflës.
T ou t cela 11’eft pas bon pour produire même un
moment d’illufion. %D ’abord il faut écarter toute
idée de contribution néceflaire, tout fyftême qui
tendroit à faire regarder les Fiefs comme participant
aux charges de la communion univerfelle. La com
munion générale du Pays de Provence ne fe forme
que par les feux. Tous nos titres le difent ; tous,
fans exception , 8c l’Edit du Roi René , expliqué par
tous les Arrêts , par l’ufage confiant de la Province,
par le vœu combiné de tous les Ordres dans les Etats
nationaux, ne porte que fur les biens d’ancienne
contribution , c’efi-à-dire, fur les biens roturiers
pofiedés par les Seigneurs.
Le troifieme Ordre nous dit que le revenu no
ble eft à raifon d’un huitième ou d’un dixième fur
le revenu roturier. La Noblefle place cette propor-
( 271 )
tion fur la relation d’un à cinquante. Si le TiersPART. IL
Etat a pour lui la fixation de la contribution à l ’a CHAP. XIII.
bonnement. des Vingtièmes, la Noblefle a pour elle
deux titres plus récents, qui fixent fa cotité fur le
pied d’un vingtième. Au furplus , on a tort de s’at
lariner fur les arrérages ; il faut qu’ils foient payés
avec intérêts , d’après le réfultat de l’opération con
jointe. La Noblefle en a contracté l’engagement le
plus folemnél. Elle entend que le troifieme Ordre
loit également lié de fon côté. Les Adminiftrateurs
des deux Ordres annoncent qu’ils auront des reprifes
à former. C ’efi une raifon de plus pour que de part
& d’autre on s’en réferve le droit.
Et qu’on ne s’y trompe pas. Quand la Noblefle a
parlé des ponts & chemins , elle n’a pas entendu
comprendre dans fon offre ni les chemins de Viguerie , ni les ports &C môles demandés par les Com
munautés , ni les réparations faites ou à faire au bord
de la Durance.
Quant aux Vigueries , les Seigneurs n’en font
pas partie , la Noblefle n’y entre pour rien ; c’efi
une Adminiftration à part, dans laquelle les chefs
de Viguerie n’aimeroient pas à voir figurer les Sei
gneurs. Il feroit même impoflible de les y placer
de droit & de fait: de droit, quand les Seigneurs
/
s
�O 73)
0 7 0
P A R T . Il
Cil AP,
XU
ont voulu le demander, on le leur a refufé ; de fait,
il feroit difficile de compofer des Affemblées de
Viguerie , de maniéré que les deux Ordres y furent
placés en nombre requis pour balancer les fuffrages
du Tiers. D'ailleurs les Nobles n’entrent dans les
frais des Vigueries que pour leurs biens roturiers (1),
Telle eft la L oi du Pays , exécutive de nos droits
conftitutionnels , 6c confirmée tant par les Réglemens locaux que par divers Arrêts du Confeil d’Etat
8c de la Cour des Aic}.es.
Quant
(1 ) Etats tenus à À ix en 1 4 3 7 , art. 61. Les Etats confiée*
rant qu’ils ne peuvent pas toujours être afTemblés ni s’afTembler
facilement, nomment, fous le bon plaifir & confentement de Sa
Majefté, des Procureurs. & A&eurs tpour pourfuivre l’exécution
de leurs Chapitres, là où il fera befoin, avec toute pleine puiffance en tel cas requife ; favoir, un Seigneur en chaque Viguerie
ou Bailliage, & tous les Syndics préfens ou à venir de chaque chef
de Bailliage ou Viguerie, & chacun d’eux.
Réponf du Roi René
Non eft confuetum.
Les charges des Vigueries font comptées parmi les tailles né
gociâtes concernant l’utilité des fonds. Les Seigneurs ne doivent
donc y entrer que pour leurs biens roturiers tant feulement. On
n’a jamais ofé prétendre que les Fiefs duffent en partager le
fardeau»
Quant aux ports, môles, 6c ouvrages fur la D u
rance , les principes font les mêmes. Ces objets en
trent difficilement dans la communion générale des
feux. Les Seigneurs locaux peuvent faire des offres \ ils
en font quelquefois pour favorifer ces établiffemens.
Tout cela n’eft que volontaire 6c de plus particulier.
Jamais la généralité dçs Fiefs n’eft entrée dans les
dépenfes de cette nature: 6c combien de projets 'de
qette efpece n’a-t-on pas vu avorter, par cela feul
que la généralité des feux ne vouloit pas y contri
buer ? Ce font-là des dépenfes de contrée , de V i
guerie, fur-tout de volonté, 8c notamment quant à
ce qui concerne les Fiefs , qui n’ont rien de commun
avec les feux*
Les offres de la Nobleffe dévoient d’autant moins
être critiquées, que les chemins ne font brifés 8c dé
truits , comme chacun fait, que par la pefanteur exceffîve des tranfports relatifs au commerce : ils feroient
éternels , s’ils n’étoient foulés que par les voitures 6c
charretes de ménagé. La Nobleffe auroit eu raifon
de propofer cette confidération, 8c de dire que le
commerce devoir contribuer à la conftr-u&ion 8c ré
paration des chemins, avec d’autant plus de raifon,
que la contribution par elle confentie , étoit fixée
M m
P A R T . II.
CHAP. X III.
* À' 4
�provifoirement fur la bafe des vingtièmes. Elle n’ea
a pourtant pas voulu faire ufage. Elle a fait fou
offre, tout comme fi fes individus partageoient les
profits direfts & perfonnels du commerce, qui ne
font perçus que par les membres du troifieme Ordre.
D evoit-on dire dans ces circonftances, que la Nobielle de Provence a reçu des exemples dont elle
aüroit du profiter? Le premier & le plus beau des
exemples, eft venu d’ elle. Elle l’a donné, dans un
tems où tous fes droits étoient conteftés par un
mouvement d’effervefcence dont les germes avoient
été jettés dans le troifieme Ordre. Elle auroit été
la première à demander l’abolition des corvées , fi
elles avoient exifté. Notre Conftitution , qui les a
conftamment réprouvées , l’en a difpenfée. La Noblefîe de toutes les Provinces a fait des facrifices
fur les chemins. Celle de Provence a fait les pre
miers & les plus grands, puifque la Conftitution du
Pays lui donnoit le droit inconteftable de rejetter
.•
fur les feux cet objet de dépenfe.
( *7 S )
il:
l.«>
Hu.r. fi
>•
CHAP. JC1Y.
CHAPITRE
XIV.
Entretien des Bâtards.
C hacun connoît les réglés du droit fur cette ma
tière. Chaque Communauté doit nourrir fes pau
vres. T el eft le vœu de toutes les Ordonnances.
Les Arrêts du Parlement font fans nombre làdefîus. On a vu fouvent naître des débats entre
la Communauté de la naiflance & celle du domicile
effeâif. Les Arrêts ont décidé la queftion contre les
Communautés du domicile. Mais la conteftation dans
fon objet, & la décifion dans fes principes, ne per
mettent pas de rejetter l’entretien des pauvres fur
d’autres que fur les Communautés, ou fur les feux.
Les Bâtards font dans la claffe des pauvres. De
là , l’aftion des Hôpitaux contre la Communauté dans
.laquelle les enfans ont pris naiflance , aâion qui
jamais n’a porté contre les Seigneurs. Ces derniers
feront-ils conftitués débiteurs par le retour de nos
Etats, & parce qu’il a plu à l’Adminiftration des
feux, de former le plan d’une adoption générale de
tous les bâtards de la
. 1Province ?
V>
Nous fommes bien éloignés de blâmer cet étaM m . ij
/
�/
(2 7 6 )
PART^r ^^*ement >
pourroit pourtant être amélioré, &
. x iv . <
ïu* doit l’être , fans quoi les Hôpitaux des Villes
du fécond ordre feront abfolument écrafés. Nous
blâmons bien moins encore les principes qui l’ont
gouverné. Mais nous n’en fommes pas moins en
droit de dire , qu’en exacte réglé , les Fiefs ne dé
voient à cet égard aucune efpece de contribution j
que cet objet de dépenfe ne p o u vô it, par fa na
ture , tomber que fur les feux ; parce qu’il n’eft 8c
ne peut être autre chofe , qu’une charge du Pays,
qui ne pouvoit être payée que des deniers du Pays ;
& ces deniers ne font autre chofe que le produit
de l’impôt fur les feux.
Avant le Réglement, la dépenfe des Bâtards étoit
prife fur les feux de chaque Communauté de leur
naiffance ou de leur conception. Jamais aucun Sei
gneur ne put ni ne dut être mis en caufe pour un
pareil objet. La charge aura-t-elle changé de na
ture, & les Fiefs feront-ils devenus contribuables,
parce que la dépenfe a été rejettée fur la généra
lité des feux ?
Ainfi la Nobleffe auroit même pu dire aux Adminiftrateurs des fe u x , qu’il leur avoit été libre de
faire un Réglement d’adoption générale des Bâtards,
pour en faire le régalement fur tous les feux du
chap
( *77)
Pays ; qu’en faifant une charge générale de ce qui
n’étoit primitivement qu’une charge individuelle des
Communautés où les Bâtards avoient pris naiffance,
il avoit dépendu d’eux de ne pas être touchés des
injuftices de détail que cette opération ne peut
manquer d’entraîner ; mais que la Nobleffe , qui ne
devoit rien , ne pouvoit pas fe conduire fur ce prin
cipe. Elle a pourtant fait une offre , qui jointe à
celle du Clergé , va beaucoup au-delà de la portion
que ces deux Ordres auroient à fupporter dans une
répartition proportionnelle, qui auroit eu pour bafe
les revenus refpeéïifs.
Le troifieme Ordre 11’en eft pas content. L ’offre,
dit-il , a été faite à titre d’aumône 3 elle n’eff pas
fuffifante.
Mais comment la défignation d’aumône pourroitelle bleffer ? Ce n’eft pas aux feux que l’aumône eft
faite, c’eft aux Bâtards. S i, d’une part, la contri
bution eff volontaire , f i , de l’autre , elle tombe fur
une oeuvre de charité , peut-on la confidérer autrement
que comme une aumône ? Ainfi le troifieme Ordre,
tant qu’il perfiftera dans fon plan d’adoption géné
rale de tous les Bâtards de la Province , doit s’efii»
r
•
mer bien heureux , de ce que les deux premiers Or
dres veulent bien contribuer à cet établiffement,
pa rt.
CHAP.
11.
XI V.
�078)
au moyen d’une aumône qu’ils offrent à ce fujet.
Si la contribution eft volontaire , fi dans le fond
elle n’eft qu’une aumône , peut-on décemment propofer la queflion de la fuffifance ? D ’ailleurs, com
ment faudroit-ii régler les proportions entre les Or
dres ? S’il falloit fixer les portions fur le nombre
des perfonnes , la Nobleffe auroit offert cent fois
au-delà de ce qu’elle pourroit devoir. Elle a même
offert au-delà de fon contingent , dans le cas où l’on
voudroit établir les contributions fur lé rapproche
ment 6c les bafes des revenus refpeâifs.
Mais les Seigneurs ne jouiffent-ils pas des droits
de bâtardife feigneuriale ? S’ils fuccedent aux bâ
tards , il eft donc jufte qu’ils fupportent la charge
de leur nourriture 6c entretien.
Cette objection eft dans tous les Mémoires faits
au nom ou pour l’intérêt du troifîeme O rdre, & no
tamment dans le Procès-verbal de l’Affemblée des
Communes, tenue dans le mois de Mai 1788.
Ce feroit contre le Domaine qu’il faudroit agiter
cette queftion : car le droit de bâtardife feignes
riale n’eft qu’une illufion. Chacun fait que pour le
réalifer , il faut le concours de quatre circonftances, de la naiffance , de la réfidence , de la mort du
bâtard, & de la fituation des biens dans l ’étendue
O 79)
de la même Juftice. Ce cas eft fi rare, qu’on n’en
PART. 11.
citeroit peut-être pas un feul exemple en Provence. C H A P . xfv.
Les Seigneurs ne feroient donc aucun facrifice , en
renonçant à ce droit fi difficile, ou pour mieux dire
impoffible à réalifer au profit des Fiefs.
Mais au fonds, il n’exifte aucune efpece d’ana
logie, entre l’obligation de nourrir les Bâtards, 6c
le droit de recueillir leurs fucceftions. C ’eft le D o
maine qui les recueille en totalité ; 6c l’on n’ofera
probablement pas dire que le Domaine doive fupporter la charge de l’entretien des Bâtards, foit dans
les Villes royales , dans lefquelles les Seigneurs n’ont
aucun droit , foit dans les Fiefs , dans lefquels ils
n’ont à cet égard qu’un titre illufoire.
C H A P I T R E
XV.
Conclufion.
I l n’eft donc plus tems de dire que les Fiefs de
Provence prennent fur les feux des avantages injuftes. Il n’eft plus tems de donner à entendre que
les droits de nos Fiefs font des droits ufurpés , 6c
que la Nobleffe préfente un fyftême oppreffeur.
On pourroit obferver à plus jufte titre , que les
-j
�( 2.8.0 )
Repréfentans du troifieme Ordre fe font fouvent pré
PART. I.
valus de la faveur du Gouvernement , & des circonfCH A P. XV.
tances dans lefquelles on peut s’attendre à des facilités
de fa part, pour miner fourdement les droits des deux
premiers Ordres , en les privant même de la liberté
de les faire valoir..
Nous pourrions dire que les augmentations fur
le fel remplacent les charges des immeubles ; que
dans les derniers arrangemens eonfentis par les Coin:
munautés , il. doit fortir tous les ans une fournie de
150000 liv. au profit du P ays, & qui doivent être
diftribuées & appliquées fuivant les befoins les plus
urgens. Cette fournie tourne en entier au profit des
feux y & jamais à celui des Fiefs.,
Nous dirions encore qu’après la guerre de 1746,
tout ce qui avoit été pris par nos Troupes pour
leur fubfiftance, tant dans les feux que dans les
Fiefs , a été liquidé & alloué. Cet article, montant
à plufieurs millions , comprenoit tout à la fois les
denrées prifes dans les Fiefs,. & celles prifes aux
habitans des Communautés. Les feux ont profité du
tout, comme fi tout avoit été pris dans les feux.
Cette fournie a fervi en partie pour le paiement des
Mairies acquifes par la P rovin ce, qui s’eft payée du
refte en moins impofé, & par des déductions qui
lui
(z8i)
lui ont été paflees en compte fur ce qu’elle avoit
[
u
•
a payer au K01.
On vient néanmoins nous dire aujourd’hui qu’il
exifte une communion, & que les Fiefs qui en font
■■
p a r t . 11.
chap. xY.
partie doivent en payer les charges; que même le ArTcmbi^cdcs
don gratuit elt une charge de la communion; qu il tésde i7n,
en eft de même du fubfide ; que la matière n’eft pas fuir. 7?
fufceptible de prefcription ; que les emprunts doi
vent être à la charge des Fiefs ; que les nouvelles
dettes viennent de la guerre de 1744; que d’après
l’Edit du Roi René & les Réglemens de nos an
ciens Etats, la Noblefie n’a jamais eu d’exemption
des charges communes.
Nous ne finirions jamais, fi nous voulions réunir
ici tous les détails des objets auxquels le vœu des
Communes voudroit faire déclarer les Fiefs contri
buables.
Heureufement, outre ce que nous venons de
dire fur chaque objet , nous avons des prin
cipes généraux & conftitutionnels qui frappent fur
tout.
Ils nous apprennent qu’une Communion exifte
en Provence ; c’eft celle des feux pofièdés par les
trois Ordres.
Mais en partant de ce principe, falloit-il comNa
�r
(2 8 2 )
prendre dans les charges de la communion, le don
p a r t . 11. gratuit aftuel, qui n’a été établi foncièrement, que
CHAP. XV.
pour éviter l’augmentation du fouage , que le Gou
vernement étoit ou croyoit être en droit de de
mander ? Il eft inutile, 6c peu digne d’ailleurs de
la franchife qui doit regner en matière d’Adminiftration, de recourir à des détours. En rapportant
les événemens , il faut en démêler les vrais princi
pes, 6>c ne pas les déguifer. Le don gratuit, avant
1 6 6 1 , étoit à la charge des feux. Il fut éteint par
l ’augmentation du prix du fel. Il fut reproduit fous
prétexte des arméniens de mer , & d’entretenir la
fureté du commerce , en purgeant nos mers des Corfaires levantains. Mais le vrai principe de ce rétabliffement , ne fut autre que celui de prévenir
l’augmentation imminente du droit de fouage, qui
ne pouvoit que fuivre les opérations d’un affouagement forcé. De là vint le nouveau don confenti à
cette époque par les Repréfentans des feux.
Pourquoi parler encore du fubfide , qui frappoit,
d it- o n , fur tous les états, taudis qu’il eft dé
cidé , depuis près de deux fiecles, 8c par le vœu
des Etats eux-mêmes, que les Fiefs ne dévoient pas
en être touchés ? Pourquoi préfenter comme dépenfe
de communion, ce qui n’eft 8c ne peut être qu’im-
\
(*8 ?)
pôt royal, dont les Fiefs furent toujours exempts?
Mais ce fyftême de communion , dans laquelle
on voudroit faire entrer les Fiefs , n’eft-il pas con
damné par toutes nos Loix 8c par.tout ce qui tou
che à notre Conftitution ? Sans doute il exifte une
Communion en Provence. Mais cette communion
n’eft que celle des feux. Quand 011 a parlé de la
généralité du Pays dans tous les titres, foit de conf
titution , foit de légiflation, foit de poftèftîon, on
n’a jamais entendu parler que de la généralité des
feux des Comtés de Provence , Forcalquier 8c Ter*
res adjacentes. Voilà notre Conftitution en deux
mots. Les feux poftedés par les trois Ordres font
la feule matière impofable. C ’eft fur les feux tant
feulement qu’il faut lever les deniers du R o i, repréfentatifs de l’impôt. C ’eft aux feux encore à fupporter toutes les charges de la communion , qui for
ment le produit de ce qu’on appelle les deniers du
Pays.
Tous nos Etats établirent ce principe conftitutionnel. Mais il exifte à cet égard un Afte de no
toriété, donné par les Etats eux - mêmes en 1607.
Ce titre doit être bien connu ; toutes les queftions
qui divifent les Ordres , quant aux contributions ,
s’y trouvent décidées,
N n ij
PART. II.
OHÀF. XT*
�(*8 4 )
y
—
En 1607 , il exiftoit des procès entre différentes
p a r t . ii. Communautés
de la Province f i ) . Ces procès
CHAI*, XV.
V
r
étoient pendans pardevant le Confeil d’Etat. Ces
Communautés raifonnoient diverfement, & chacune
fuivant Ton intérêt, fur les principes de notre Conftitution. L ’AflèfTeur d’alors expofa que le Confeil
defiroit un avis , & qu’il convenoit que cet avis
fût délibéré par la Nation aflemblée. Il fut
dreffé en conféquence , & après la lefture qui en
fut faite, il fut approuvé par tous les Ordres du
Pays , pour être la coutume en icelui véritable. Les
Etats en délibérèrent de plus l’enrégiftrement. On
efl fans doute curieux d’en connoître la teneur ;
la voici : Lefdits Etats donnent avis que les impor
tions générales qui fe font par les Etats & Affemblées du Pays fe font généralement fur tout le Corps
& Généralité des Villes & Villages du Pays à coûté
des fe u x , & que chaque Communauté de la Province
y contribue à coûté de feux , fans que lune réponde
pour Vautre , fe faifant Vexaclion defdites impofilions par le Trèforier dudit Pays 3 fur Vétat général
qui lui ejl expédié par lefdits Etats , conformément au
fouage général de ladite Province (2).
( 1 ) Etats de 1607, fol. 99 v°, 8c fuiv.
(2) Cet A fte de notoriété eft conforme à tout ce que les Etats
(18 5 )
Voilà notre Loi bien atteftée , après mûre mé> /
•
ditation,’ rpar les Etats eux-mêmes. La Généralité du
--- ---------- -----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------—
_—
—
avoient dit dans tous les tems, & à tout ce qu’ils ont dit cons
tamment depuis cette époque. Dans les anciens Etats, c’eft tou
jours furies feux que l’impôt eft réparti. En 1 37 3 , il s’agifioit
d’une fubvention demandée par le Roi, 8c qui, fuivant les inftruéfions, de voit être égalifée fur Vuniverfel du Pays. Que difent
les Etats ? Que les deniers doivent être impofés à raifon des feux
fur Vuniverfel de tout le Pays de Provence, En 1580, les Etats
impofent 12 liv. par feu fur tout le corps & généralité du Pays.
Mêmes expreflions dans les Etats de 1587. Dans l ’AfTemblée en
forme d’Etats de 1591 , on énonce les deniers du Pays qui n’étoient que les deniers procédant de l’impôt fur les feux $ le Tréforier du Pays qui ne perce voit que le produit de l’impôt fur
les feux j enfin, on impofe deux écur par feu fur le corps &
généralité dudit P a y s, pour les gages des Officiers, voyages, &
autres cas inopinés. L ’Affemblée de 1594 impofe fur tout le Corps
& Généralité du Pays deux charges bled annone , deux charges
avoine y & dou^e écus par feu. Les Etats tenus à Aix en 1596 im
pofent huit écus & demi par feu fur tout le Corps & Généralité
du P a y s , pour les charges du Pays. L ’Affemblée de 1797 impofe,
pour l ’entretien des militaires 8c pour le paiement des dettes du
Pays yfur tout le Corps & Généralité du Pays ■ 8c ces impôts font
aflis fur les feux. Dans les Etats de 1598, on donne pouvoir à
la prochaine Affemblée d’impofer fur tout le Corps & Généralité
du Pays, pour le paiement de cinq mille deux cent quarante-fept
écus dus à M, de Lefdiguieres * 8c les impofitions s’y font toutes
PART II
CHAP. XV,
�(z86)
Pays eft repréfentée par les feux. Le Tréforier du
PART. II.
Pays eft le Tréforier des feux ; les charges du Pays
CHAP. X V .
font les charges des feux ; & toutes les fournies qui
les Syndics de la Noblefle pour l’intérêt des Fiefs ou des fonds
■ (>87 )
.
la loi publique de l’impôt. Mais quand la poffeffiofl
remonte à tous les7tems poflibles , quand la préro- PART*11,
1
1
CHAP. XV.
gative fe lie avec l’ordre ou la nature des chofes ;
quand elle eft prononcée par les Loix conftitution*
nelles ; quand elle embralfe tous les tems connus ;
quand elle eft de plus prononcée, comme ici, par un
voeu délibéré dans l’Aflemblée de la Nation , cette
poflêffion ainfi renforcée fera-t-elle fans force ? Et
pourra-t-on férieufement en préfenter les réfultats ,
comme tenant aux loix de la prefcription ?
Il refte un dernier mot que plufieurs perfonnes
du troifieme Ordre invoquent. On eft à préfent à
portée de favoir que les motions faites par les ou
vrages faits pour l’intérêt du troifieme Ordre , font
abbatues par tous les titres de notre Conftitutionî
On commence à dire , & ce fera la derniere reffource du fyftême dont on vient de détruire les ba*
fes , que la Conftitution eft vicieufe , que rien ne
peut en fauver l’abus ôt qu’enfin les tems font
arrivés , où toute diftinftion entre les immeubles ,
doit être à jamais abolie.
Mais peut-on oftênfer ainfi le droit de propriété l
Que le troifieme Ordre attaque donc, s’il en a le
courage, la Conftitution provençale; qu’il ofe en
nobles.
demander la réformation, & commencer par fouler
fe lèvent en Provence , font fupportées par les Com
munautés, conformément au fouage général de la
Province. Ainfi *ce qu’on appelle le Pays de Pro
vence , la partie impofable de ce P ays, eft la Gé
néralité des feux compofant les terroirs des Com^
munautés.
Seroit-ce pour tendre un piege à la Noblefle,
qu’ on a parlé de prefcription ? Sans doute le cas
n’en eft pas fufceptible. On ne prefcrit pas contre
par feu. Les Etats de 1600 impotent, pour divers objets, fur tout
le Corps & Généralité du Pays ; & les levées délibérées y font
aflignées fur les feux. On rencontre uniformément les mêmes traits
dans tous les Etats & Aflemblées poflérieures à l’époque de 1600.
Les Procureurs du Pays ne peuvent pas repréfenter les Fiefs.
Ils n’en exercent pas les droits. Quand les Cours locales défirent
que les Défenfeurs des Fiefs & ceux des feux foyent entendus,
elles ordonnent que les Syndics de la Noblefle .& les Procureurs
du Pays feront préalablement appelles & entendus. On en trouve
une infinité d’exemples, tant anciens que modernes. Les Procu
reurs du Pays font appellés dans ce cas pour l ’intérêt des feux;
�( 2B8 )
aux pieds les conditions effentielles de Funion de
PART. 11.
la Provence à la Couronne de France. Nous ne lui
CHAI». XVdirons pas que la prérogative des Fiefs tient aux
principes de la juftice \ qu’elle fe lie avec les ioix
facrées de la propriété ; que les feux fe font énor
mément accrus par démembrement des Fiefs ; que
les rotures n’ont été concédées avec profufion, que
pour augmenter d’un côté la force des feux, & ren
dre de l’autre les droits des Fiefs toujours plus refpeûables ; que rien ne feroit conféquemment plus
abufif que le renverfement d’un ordre &. d’un état
fur lefquels repofent les patrimoines de toutes les
familles nobles du Royaume.
Nous ne mefurerons pas même ici la force ac
tuelle des feux , & nous nous difpenferons d’obferver que les changemens dont on ofe entrevoir
la poffibilité , ne peuvent que produire une de ces
fecouffes violentes, q u i, par le renverfement des
droits conftitutionnels, ne peuvent qu’ébranler, &
quelquefois renverfer les Empires.
Mais en nous rapprochant du troifieme Ordre luimême , nous dirons aux auteurs de cette étonnante
opinion : rentrez en vous-mêmes , & contemplez les
fuites de l’opération que vous avez le courage de
méditer : voyez vos rentes établies fur les immeu
bles
(2 8 9 )
blés vendus par vos peres ; le Cultivateur va vous
1 p a r i . ii.
d i r e l e fonds m’appartient; je l’arrofe dem afueurj Ch a p . x v
j ’en paye toutes les charges. C ’eft à vous à les
payer , puifque mon fonds produit pour vous. Il faut
au moins que vous en partagiez le fardeau propor
tionnellement à ce que vous en retirez. Qu’aurez^
vous à répondre à cette prétention ? Vous direz :
le fonds appartenoit à mes peres ; ils ne l’ont donné
que fous la réferve des fruits portée par les titres , St
fous la condition que l’impôt feroit rejetté fur le relie
du produit. C ’efl ce que la Nobleffe dit au troifieme
Ordre , St elle le d it, non en force d’un contrat par
ticulier, mais appuyée de toutes les Loix publiques
qui peuvent fervir à régler les bafes de l’importante
matière de l’impôt..
Nous leur dirons encore : Voyez ce qui fe paflé,
ce que vos peres ont établi dans les glandes Cités
de la Province , où tout eft pris fur le produit des
confommations. Les immeubles y jouiflent d’un droit
bien plus confidérable que celui des biens nobles.
Les domaines nobles fupportent les vingtièmes ,
l ’impôt fur les huiles , la conftruftion du Palais ,
St les frais de l’adminiftration des Fiefs. Les Nobles
11e réfident dans les villes principales, que pour en
partager les charges qu’ils fupportent avec excès., &
O o
�(2 9 0 )
pour en affranchir les domaines. S’il étoit pofiible
. de toucher à la prérogative féodale , que deviendroit le régime de ces villes majeures dont les
Bourgeois attaquent les droits des Fiefs avec tant
d’injuftice ? Que deviendraient leurs territoires cul
tivés 6c engraiffés par les deniers des N obles, qui
font les plus forts confommateurs ? Que deviendroient enfin les poffeffeurs de ces domaines plus
que nobles, qui'jouiffent pailiblement d’une liberté
contraire au régime national, tandis qu’ils attaquent
avec tout le fang-froid de l ’injuftice la plus réflé
chie , des droits effentiellement liés à ce même ré
gime , 6c qu’aucune puiffance ne peut détruire?
Nous leur dirons : Voyez dans toutes les parties
de l’Etat, ces établiffemens de toute efpece formés
par le malheur des tems, 6c qui ne font foncière
ment que tout autant de levées faites fur les fujets.
Voyez tous les Offices qui ont été créés 6c levés
fur la foi d’une perpétuité promife par des Loix
qui ne font pas même nationales. Si les droits conftitutioimels des Fiefs pou voient être détruits, ne
faudroit-il pas avoir auparavant porté le fer 6c la
flamme fur ces établiflêmens précaires qui n’exiflent
que pour être à charge, foit au T réfor ro y a l, foit
à la Nation? Et quels défordres une pareille opé-
> (* 9 0
ration n’entraîneroit-elle pas après elle ! S’il faut
refpeâer les propriétés , quoiqu’imparfaites 6c mo
biles des titulaires , comme il n’efl: pas permis d’en
douter, comment fera-t-il poffible de toucher au
droit conftitutionnel, 6c par conféquent inaltérable
des Fiefs ?
Nous leur dirons enfin : Vous attaquez les Fiefs,
& vous voulez donner le fimefte exemple d’attenter
au droit de propriété. Mais n’avez-vous pas à pré
voir que cette partie de votre Ordre, qui n’a que
des bras, 6c point ou très-peu de terre , ne vdus en
demande le partage ? Si donc vous voulez conferver
votre propriété, refpeftez celle des autres. Ne vous
égarez pas avec ces prétendus réformateurs à qui
vous donnez le nom de Public! Ares, 6c qui ne font
que de dangereux novateurs. Soyez juftes, au moins
par intérêt pour vous-mêmes ; 6c confldérez que le
feu que vous voudriez allumer contre
F ie fs, ne
pourroit que s’étendre 6c dévorer de fuite vos pa
trimoines.
J* #
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PART. II,
CHAT. XV.
�TROISIEME
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PARTIE.
ôitu.<-o |
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«. • .
L ê S autres prérogatives , & notamment celles du
Clergé , touchent également à la Constitution, ainfi
que les reves , dont les Seigneurs font exempts.
On fe propofe d’en donner une notice rapide , à
raifon de la relation que ces objets peuvent avoir
avec les droits 8c la prérogative des Fiefs. On pré
voit bien que le peu qu’on en dira, ne plaira pas
à tout le monde. Mais quand on écrit dans l’inten
tion franche d’éclaircir la v é rité , il faut s’aban
donner avec intrépidité, foit à la crainte , foit même
au dégoût des improbations.
CHAPITRE
PREMIER.
Confdérations fur le Clergé
L es biens du Clergé peuvent être divifés en trois
claffes : i°. les Fiefs ; 2°. les domaines non féo
daux ; }°. les dîmes.
Ce que nous avons déjà dit fur les Fiefs en gé
néral , s’applique tant aux Fiefs laïques , qu’à ceux
(2 9 3 )
que l’Eglife poffede ; 8c fi les propriétaires roturiers
des Fiefs 8c des fonds nobles , profitent de la pré- PART* 111
rogative féodale, qui efl autant prédiale que l’im
p ô t, les Eccléfiafliques pofîêfTeurs des Fiefs, à rai
fon de leurs titres, doivent en profiter aufîi.
Les biens non féodaux que l’Eglife poffede , doi
vent être divifés en deux clafîês : les uns font pa
trimoniaux 8c propres à chaque Eccléfiaflique , les
autres font attachés à des titres de bénéfice. Les
premiers font taillables par conflitution , puifqu’ils
n’appartiennent pas à l’Eglife , mais aux perfonnes,
qui 11e peuvent avoir aucune efpece d’immunité,
en matière d’impôt réel. Les autres appartiennent
à l’Eglife , 8c fe foufdivifent en biens de l’ancien
domaine, 8c en biens d’ancienne contribution , qui
font parvenus à l’Eglife après l’époque de 1471 ,
donnée par nos Loix , à l’effet de féparer 8c de fixer
les biens de l’ancien domaine de l’Eglife.
Le Clergé n’a donc à difputer que fur l’exemp
tion des biens de cette derniere qualité. C ’efl là le
feul objet qui le concerne en particulier. Les dî
mes ne font pas fufceptibles d’impôt réel.
Cette immunité des biens de l’ancien domaine efl
conflitutionnelle. Il ne paroît pas qu’on s’occupe
du foin de l’attaquer. Elle efl: en effet à l’abri de
�PART. III.
CHAT. I.
Traité inti
tule , Droit
C o fri tut i f de
'Province ,
P»g 19-
( 294 )
toute atteinte. Ou a dit dans un des trois ouvrages
que nous avons ci-devant annoncés , qu’il ferait
knpoflible au Clergé d’afîigner une bafe à fon exemp
tion. On avoit dit dans un autre Mémoire produit
dans d’autres rems par les Adminiftrateurs des Feux*
que le Clergé ne jouiflbit que d’une exemption de
pure tolérance, qu’on feroit cefler quand on voudroit.
Il y auroit de grands reproches à faire aux précédens Adminiftrateurs des feux , fi pouvant faire
cefler par des voies légales, une immunité d’ufurpation, ils ne l ’avoient pas fait. Mais l’exemption
étoit conftitutionnelle, 8c dès-lors on s’eft bien gardé
de l ’attaquer.
Anciennement la taille étoit mixte & non réelle
en Provence. Chacun étoit cotifé dans fon domi
cile , relativement à fes facultés impofables. Il fallut
des Statuts exprès, 8c le vœ u des E tats, pour
faire ordonner à nos anciens Souverains , que les
tailles feroient payées ,. non dans le lieu de l’habi
tation du redevable , mais dans celui de l’afliette des
biens ; 8c ces Réglemens ne font devenus titres fiables
& définitifs, que par l’Ordonnance des Commiffaires qui procédèrent à l’affouagement folemnel de
14 7 1.
( 29 S )
' Mais l ’impôt n’en demeura pas moins impôt mixte,
PART. III.
nonobftant ces Réglemens. Il n’en étoit pas moins CM A P. I.
établi fur les têtes , en confidération des patrimoines
impofables ; 8c quoiqu’il fût en quelque maniéré perfonnel, il avoit néanmoins un caraéfere prépondé
rant de réalité, puifqu’il étoit aflis fur les perfonnes
pro rebus. De là , les Seigneurs jouifloient de l ’e
xemption , d’abord pour tous les biens de leurs Fiefs ,
8c enfuite pour tous les biens nobles , ou affranchis
par compenfation. De l à , les Eccléfiaftiques n’é' toient point impofés pour leurs biens. De là , les
Marchands étoient impofés par des Statuts exprès
pour leurs capitaux. De là , vient que M. de Cia- Part. 1>_cauf.
piers attefte que de fon tems , les tailles formulent
encore un impôt mixte, établi fur les perfonnes pro
rébus. Elles l’étoient encore à plus forte raifon en
1471 , puifque les Commiflaires-Affouageurs les énon
cent comme impofées fur les perfonnes, à raifon des
pofleflîons , quod ab indè in antea unuf'qnifque contri
buât pro quibufeumque bonis taillabilibus pro modo
facultatum.
Dans le principe, les Eccléfiaftiques prétendoient
pofleder avec immunité, 8c fans diftiftinâion des
biens; & fuivant Antiboul, Jurifconfulte Provençal,
cette franchife ne leur étoit pas conteftée, même pour
«fr
�!
(2 9 6 )
leurs biens patrimoniaux, pourvu qu’ils ne les eufPart . iii.
fent pas fait mettre fur leur tête par dol 8t fraude.
CHÀP. I.
Dans la fuite , les Etats demandèrent, à diverfes
reprifes, que les biens patrimoniaux des gens d’Eglife
fuflent déclarés contribuables. Ces demandes fuppofoient l’exemption des biens appartenans à l’Eglife.
Telle eft la conféquence à tirer des fuppliques nom*
breufes préfentées par tous les Etats jufqu’à l’épo- que de 1471.
Il ne faut pas prendre ici pour réglé, ni ce qui
fe pafla en 1 3 7 4 , ni les contributions volontaires
faites par tous les Ordres dans le tems de la révolte
du Vicomte de Turenne. Les Seigneurs firent alors
des contributions volontaires , 5t le Clergé en offrit
aufïi de la même efpece ; le tout fans tirer à con
féquence, 5c pour cette fois tant feulement, comme
en 1 3 7 4 . L ’impôt général s’y trouve délibéré libre
ment 5c volontairement, attendu les circonftances,
p o u r cette f o i s . En 1 5 9 3 , les Etats tenus à Marfeille,
en comprenant le Clergé dans la contribution, dé
clarent qu’ils n’entendent préjudicier à fes exemp
tions > im m unités y fr a n c h i f es & p r iv ilè g e s . Le Clergé
de Provence avoit donc des privilèges fur l’objet
des contributions. Quels étoient ces privilèges ?
Ceux de l’E g life , dont les biens n’étoient point
affouagés,.
C z 97 )
affouagés, & ne dévoient pas l’être (1). Aufîi dans ■ — ' ' ■ ■
toute, la fuite des Etats rpoftérieurs à la révolte du PA
i*'T‘ ni<
CHAP. I.
(1) L ’Auteur du Droit conftitutif de Provence, pag. 41 , cite
donc mal-à-propos les Etats de 1393 St 1396- A la pag. 4 2 ,
il rapporte la doélrine de M. de Clapiers, qui fixe norre Conftitution, cauf. 2 4, queff. 1 , n*. 2 , en conformité du Statut qu’il
rapporte. 11 y eft dit : quod Clerici debeant contribuere pro bonis
temporalibus in talhiis & fubfidiis Regis & oneribus Provinciœ y
s a l v a
i m m u n i t a t e
p r o
b o n i s
E
c c l e s i æ
.
Voilà donc notre
Conftitution bien établie, & l’immunité de l’ancien domaine de
l’Eglife bien développée, tant pour les deniers du Roi que pour
ceux du P ays, in talliis & fubfidiis Regis & oneribus Provinciϥ
Mais on ne fait pas pourquoi ce même Auteur du Droit conf
titutif n’a pas parlé des Etats pofférieurs à la révolte du Vicomte
de Turenne. Il y auroit vu qu’en 1399 les Etats demandoient la
contribution des Eccléfiaftiques aux charges, pour la nécefîité occurente, quant à leurs héritages St biens patrimoniaux. L ’immu
nité des biens formant le patrimoine de l’Eglife, étoit donc alors
reconnue par les Etats,.qui ne demandoient la contribution que
des biens patrimoniaux St propres aux Eccléfiaftiques, encore ne
la demandoient-ils qu’attendu la mifere St la nécefîité du Pays.
Dans des Etats antérieurs, & en 1396, on avoit délibéré que les
Eccléfiaftiques contribueroient pour leurs biens patrimoniaux St
Chapellenies. La réponfe fut, placet Domino de bonis temporalibus
& patrimonialibus quod contribuant ficut Laïci. En 1420, les Etats
demandent que les Prélats St Eccléfiaftiques contribuent pour leurs
biens patrimoniaux ou pour leurs biens Eccléfiaftiques d’ancienne
p
\
/
s o l u m
r
�( i 98>
Vicomte de Tufenne, la Nation fe borne-t-elle à
demander la contribution des Eccléfiaftiques, quant
contribution. Le Prince répond : placet quod contribuant juxtà formam juris. En 1 432, 1434 & 1 437 , même demande de la part
des Etats pour les biens que les Eccléfiafiiques poffedent non
amortis &
d’ancienne contribution 3 réponfe du Souverain con
forme à la demande des Etats. Le Clergé n’y confent pas. Même
demande par les Etats de 1440 pour les biens patrimoniaux &
taillables des Eccléfiafiiques. Le Roi l’accorde de même. Dans ces
Etats, on trouve la confirmation des privilèges , Statuts, franchifes,
us &
coutumes accordés, tant aux Seigneurs Eccléfiafiiques &
Nobles, qu’aux Communautés & Particuliers du Pays. En 1441,
même demande pour les biens patrimoniaux & tous autres tail
( z9 9 )
à leurs biens patrimoniaux. Les réponfes du Sou- rr.yj
• t
r r
PART. Il]
verain fur ces fupplications graduelles, font d’abord CHA1>* Jt
qu’il confent à cette contribution, fi elle efl: de
droit ou d’ufage 3 & finalement les Etats viennent fi
fou vent à la charge, que cette contribution eft or
donnée par le Souverain pour les biens patrimo
niaux 5c propres aux Eccléfiafiiques.
De là ne fau t-il pas conclure que les biens du
patrimoine de l’Eglife , étoient conftitutionnellement
exempts de toute contribution ? Ils furent déclarés
tels par le vœu des CommifTaires en 1471. Ce droit
étoit acquis 5c bien afiis, lors de l’union de la Pro
vence à la Couronne. L ’exemption du Clergé efi:
lables. Réponfe du Roi René: placct, fi confuetum fit folvere pro
dictis bonis, vel f i talia antequam pervenijfent ad inanus
Eccle-
fiafticorum tali fuiffent oneri fcripta vel affecta. En 1471 , les
cipe ni dans le contrat de 1 580, ni dans- les Déclarations de
CommifTaires terminent cette grande quefiion, en limitant la pré
1725 & 1751. Les bafes en font dans les Loix, titres & coutumes
rogative de l’Eglife à tous les biens qu’elle avoit précédemment
qui forment la Confiitution de Provence. Elles font de plus ren
acquis. Après ce titre, il n’exifte plus aucune difficulté là-deflus.
forcées par le fameux Arrêt de 1556, qui expliquant & appli
Le Roi René, dans les Etats de 1472, confirme tous les Statuts,
quant tous les titres de la Confiitution, quant à Ce, déclare nobles
libertés & franchifes, tant eccléfiafiiques que temporelles, & Charles
eu exempts tous les biens que TEglife pofiedoit lors de l’affoua-
d’Anjou en fait de même en 1480; les immunités des biens de
gement de 1471. Aufii tous nos Auteurs, Duperier, Mourgues,
l ’ancien domaine de l’Eglife font de plus reconnues & confirmées
D ecorm is, & M. de Julien, Ex-AlTeffeurs, & certainement très-
par les Lettres patentes de 1482, par la Délibération des Etats
inftruits des maximes du Pays, & des droits des Ordres compo-
de la même année, & par les lettres d’incorporation données par
fant la Nation Provençale, ont-ils regardé l’immunité des biens
Charles V III, Roi de
de l’ancien domaine de l’Eglife, comme tenant à une vérité de
C lergé, quant
France, en i486. A infî, la franchife du
aux biens de fon ancien domaine, n’a fon prin-
Confiitution.
ppij
�C *0.0 )
x "—Lt, donc conftitutionnelle. Elle dérive des principes an«
Pchat m' t^ uès ^ur lcfquels la Conftitution s’eft formée. Elle
eft appuyée fur le voeu des Etats , fur les Ordon»
nances de, nos anciens Souverains, fur celle des
Commiffaires-Affouageurs , 6c fur les maximes tuté
laires qui préfiderent à l’union du Pays de Provence
à la Couronne, puifqu’à cette époque les Trois-Etats
ftipulerent la confervation des droits refpeftifs, tant
de la Nation en général , que de chaque Ordre en
particulier.
Suivant le principe primitif, tous les biens de
l ’Eglife étoient immunes. A préfent l ’immunité fe
trouve limitée aux biens de l ’Eglife , formant fon
ancien patrimoine , c’eft-à-dire , aux biens poflédés
par l ’Eglife depuis l’époque de 1471. Ces biens n’ont
jamais été compris, ni dans l’affouagement fait alors,
ni dans aucun autre. Cette époque de 1471 eft de
venue pour l’immunité eccléfiaftique, ce qu’eft l’é
poque de 1556 pour la prérogative féodale. Tout
ce qui eft entré dans les dotations des bénéfices de
puis l’époque de 1 4 7 1, a refté dans la mafié des
feux. Telle eft la difpofition des Arrêts, tant géné
raux que particuliers, qui ont été rendus fur cette
matière 3 $c ces Arrêts, ces Réglemens établirent
u n e m a x im e d ’ a u ta n t p lu s r e f p e ê t a b l e , q u ’ e lle n ’ eft
✓
^
(joi)
que la conféquence 6c l’application du vœu de nos ———Etats , confirmé par nos anciens Souverains , 8c for*IL
niant à ce titre une portion des Statuts du Pays.
Et lors même que les biens de l’ancien domaine
ont été aliénés pour caufe de fubvention , l’immu
nité a pafté aux premiers acquéreurs. Elle ne fe perd
que par le tranfport du fonds , en faveur du fécond
acquéreur non privilégié. Voilà nos réglés fur cette
franchife , qu’on n’a pas encore attaquée dire&ement , 6c qu’011 menace néanmoins d’attaquer un
jour (1 ).
Il exifte encore d’autres exemptions qui remontent
également aux principes de notre Conftitution. Telle
eft celle des Palais épifcopaux , qui font exempts
des tailles , 6c déclarés tels par le vœu de tous nos
Jurifconfultes 6c de tous les Arrêts. Telle eft celle ton^ riArl
de la Magiftrature , bornée par les Tranfaftions & io“^IICt,T*
Arrêts , à un certain nombre d’Ofticiers de l’une 8c
de l’autre des deux Cours Souveraines du Pays (2).
Tout cela paroît, au premier coup d’œ il, étranger
(1 ) V oyez Mourgues, pag. 329, & le nouveau Commentaire
du Statut, tora. 2 , pag. 49 & fuivantes.
(2) Le même, pag. 330, & le nouveau Commentateur de nos
Statuts, tom, 2 , pag, 275,
�( 502)
èlèik' ■ .■!% à notre difcuffion. Il étoit pourtant néce flaire d’en
'ÏL parler, parce qu’il falloit mettre tout lefteur, ja
loux de s’inftruire , & de former un vœu de jus
tice fur l’objet des contributions , à portée de connoitre l’enfemble de notre Conftitution & de nos
réglés fur cette matière.
D ’ailleurs il fe préfente là-defîus deux réflexions:
i° . ces franchifes tombent fur la taille. Elles embraflent conféquemment toutes les levées qui fe font
en Provence, tant pour les deniers du Roi, que
pour ceux du Pays. Ce principe local eft encore
confacré par les Arrêts. La franchife des tailles
comprend t out , c’e f t - à - d i r e , tous les im-pôts,
tous les abonnemens , toutes les dépenfes de la
communion. Les Arrêts rendus à la requête du
troifieme Ordre ou de fes Repréfentans , n’en ont
excepté que les Vingtièmes. L ’Adminiftration des
feux a écrit dans un tems aux Communautés, des
lettres , portant que la franchife des tailles , quant
aux biens acquis en département avec l’expreiTion
de cette immunité, ne comprenoit pas les Vingtiè
mes. Elle a donc décidé qu’elle comprenoit toutes
les autres charges , fans exception. Deux Arrêts l’ont
jugé de même ( i ) , en déclarant que la franchife
( i ) Arrêt en 1 7 66, en faveur du Baron d’O ppede, contre la
Cî ° î )
tenant, ces biens dévoient payer les Vingtièmes à
la caille des feux. Et fi , du propre aveu du troi
fieme Ordre & de fes Adminiftrateurs, la franchife
des tailles, ftipulée en département, tenant à des
titres privés & particuliers , emporte exemption de
toutes contributions , à j ’exception de celle des Ving
tièmes ; fi les Arrêts l’ont ainfi jugé , dans ce cas,
du propre aveu des Adminillrateurs des feux, com
ment ne donnera-t-on pas le même effet aux préro*gatives qui dérivent de la Conftitution ou des Loix
générales , antiques 6t publiques du Pays ? Cela
prouve toujours mieux ce que nous avons dit fur la
communion des fe u x , deftinés à fupporter toutes
les levées territoriales, quel que puifle en être
l’objet.
La fécondé de nos réflexions fe tire de ce qu’on
11’attaque , ni les immunités du Clergé , ni celles de
la Magiftrature. Seroit-ce parce que on fe dit inté
rieurement que la deftruâion de la prérogative féo-
Communauté de Varages, au rapport de M. de Duranti La
Calade.
Autre Arrêt du 9 Juillet 1 7 7 9, au rapport de M. de Gaflaud,
en faveur de la Dame du Puget, contre les lieurs Confuls & Com
munauté dudit Lieu.
PART. III.
CH AP. I.
�(î° 4)
■ i. ■ ■ ■
dale entraîneroit la chute de toutes les autres ? ConPAR.T. iii. tentons_nous de dire qu’ elles font toutes refpefta-
blés 5 que celle des Fiefs, eft la plus inviolable de
toutes, puifqu’elle eft la plus ancienne , la mieux
établie , la mieux reconnue , 8c qu’elle tient autant
8c mieux que toute autre au* droit inébranlable de
propriété patrimoniale.
C H A P I T R E
II.
Des Reves.
L es reves qui fe lèvent fur les entrées , confommations & ifîues, forment-elles un impôt réel?
Les Adminiftrateurs des feux l’ont foutenu de même
dans le grand procès qu’ils ont gagné contre l’Ordre
de Malte. Peut-être cette Adminiftration , en met
tant au jour cette erreur, avoit-elle des vues ulté
rieures. Peut-être vouloit-elle établir des bafes pour
contefter un jour l ’exemption conftitutionnelle des
Seigneurs.
(? °5)
immeubles. Les droits pris fur les meubles, marchandifes 5c fruits , indépendamment du fol qui les PART' ur
Cil AP. II.
a produits , ne peuvent donc être que perfonnels ,
puifqu’ils ne font pas dus ratione foli. L ’impôt eft
r é e l, quand il eft pris fur les fruits 8c la produc
tion des fonds impofables. Alors l’impôt eft d û,
fuivant que le fonds eft ou non taillable ; il eft dû
proportionnellement à la production ou à la valeur
cadaftrale des fonds ( i ). L ’impôt, dans ce cas,
n’eft rien de plus que la taille, qui fe leve fur les
fruits en nature , au lieu de fe lever fur les fruits
convertis en argent.
Mais quand il s’agit des droits d’entrée, d’ifliie 8c
de confommation, tout eft indépendant du fonds pro
ductif des fruits. Tout eft relatif à la perfoime qui
confomme 8c qui paye. L ’impôt eft , de fa nature ,
( i ) Chaffanéefur la coutume du Duché de Bourgogne, tit. des
Juftices, §. 4 , n°. 23; Philip!, prifc, nojlror.que muner fumm. n°.
1.0, & M. de Clapiers en l'endroit ci-devant cité, établiffent la
différence de l’impôt réel à l’impôt perfonnel, du tribut qui fe
Quoi qu’il en fo it, l’impôt établi fur la confom*
mation des perfonnes , ne peut être que perfonnel
leve fur les fonds, & les reves ou gabelles qui fe lèvent fur les
par fa nature 8c fon affiette. On ne peut connoître
fonnelles, comme l’obferve Bertrand, tom. 3 , part. 5 , conf. 150,,
d’autre impôt ré e l, que celui qui fe leve fur les
,
immeubles.
U0* 5-, & tom. 4 , conf. 30.
meubles, du tribut qui eft prédial, & des gabelles qui font per-
Qq
�( J°<0
perfonnel. Le citoyen ifolé , poflelTeur du patrilI* moine le plus opulent, ne paye que pour lui. Le
pere de famille chargé d’enfans, paye pour toutes
les bouches qui font à fa charge. Un impôt de cette
efpece , aflis fur les meubles , marchandifes & den
rées qui pafîént, peut-il ne pas être perfonnel ?
De là tous les Auteurs ont diftingué, entre le
tribut qui eft la charge des fonds, & qui eft réel,
foit qu’on le paye en argent, ou en fruits produits
par les fonds taillables, 8t les Gabelles, qui tom
bent fur les confommations ou les entrées, vecligalia ( i ) . Il n’en eft aucun qui n’ait dit que les
.
'
C 9°7 )
impôts de la derniere claflê font vraiment *perfonnels.
•
Que 11’a-t-on pas imaginé , pour préfenter les nnque perfonnelles, verè & propriè perfonales ; & les habitans d’Aix
eux-mêmes dans le fameux aefe de 1399 fe firent accorder divers
privilèges d’exemption, fuper veciigalibus $ privilèges dont ils jouifi
fent encore, 5c dont ils ne pourroient pas jouir,
fi
les charges
de cette nature étoient réelles Ces réflexions répondent à ce qu’a
dit l ’Auteur du nouveau Commentaire fur les Statuts, tom. 2, pag.
348, en atteftant que les reves & importions fur les fruits, den
rées & marchandifes font réelles & de même nature que la taille.
Le mot eft vra i, quant à ce qui regarde les impofitions fur les
fruits de produélion. Cet impôt n’eft pas fupplétif, mais bien
repréfentatif de la taille, & fe paye ou non, fuivant que le fonds
eft exempt ou taillable. C ’eft proprement la taille ou l’impôt réel
( i ) Les reves font ce que les Auteurs appellent vecligalia, ga
pris fur les fonds. Mais les droits établis par les Communautés fur
belles. On n’a qu’à voir tous ceux qui traitent de l ’impôt fur les
les fruits d’entrée, de confommation ou de fortie, n’ont aucune
confommations. Tous établififentpour principe que cet impôt eft per
efpece de réalité ni d ’affife immobiliaire. Ils font levés fur les
fonnel, quœ imponuntur Juper veciigalibus verè & propriè funt per•
denrées d ’entrée, vente, confommation ou fortie, abftraéhon faite
fondes. D e Luca , de regdib. , difc. 5 2 , n°. 6 , 12 & 54, & difc.
du fonds qui les a produits ; & le même Auteur l’a bien dit tout
189 ; Chafianée , dans fon Commentaire fur les coutumes du Duché
de fuite, en obfervant-que ce neft point le champ qui paye les
de Bourgogne, tit. des Juftices , au §. 4 , n°. 16 5c 28 ; Riccius,
reves, mais la denrée que l'on vend ou que l'on confomme, qui
dans fa pratique univerfelle des queftions de droit, tQm. 2, réfol.
entre dans un lieu ou qui en fort. C ’eft de ce dernier trait qu’il
129, attellent également les mêmes principes. On les retrouve,
fait fortir la conféquence, que nul ne peut s'en prétendre exempt.
ainfi que les réglés fondamentales de l’exemption des Seigneurs,
Mais il falloit prouver que les reves font réelles, 5c c’eft ce que
dans Novarrus de gravam. vaffal., gravam. 1 7 6 5c fuiv. Difons
en un mot qu’aucun Auteur n ’a oie dire que les reves, vecligdia gabelles, font munera realia.
dit
au
Tous, fans exception, ent
contraire que ces charges netoierit &
ne pou voient être
l’Auteur n’a pas fait; c ’eft même ce qu’il ne pouvoit pas faire,
parce qu’on ne prouve pas l’impoflible : o r , il n ’eft pas dans
l’ordre des poftibles de convertir en impôt réel ce qui eft indé
pendant de tout fonds quelconque, 5c ce qui d ’autre part ne
frappe que fur les perfonnes.
Q q ij
HAD T
ITT
CHA P. U .
�0 8 )
pots de cette derniere efpece, comme réels? Il faut
ici tout expofer , pour mettre le lefteur en état de
juger. Les Adminiftrateurs des feux , battus par les
réglés & les principes , fe font épuifés en fubtilités. i° . Ont-ils dit, les reves font établies fur les
chofes , fuper rebus ; elles font donc réelles : 2°. les
reves font fubrogées aux tailles , elles* font établies
pour foulager les fonds ; elles font donc réelles :
3°. les reves font réelles encore parmi nous, parce
que la Provence eft un pays d’abonnement. Telles
font les raifons qu’on a données en Provence, &
qu’on reproduit au Confeil , où l’on ajoute encore
que les reves doivent être réputées réelles par l’o
pinion locale.
Il n’y a dans tout cela rien de v ra i, rien d’exaft,
rien de plaufible , rien qui puiffe tirer l’impôt dont
il s’a g it, de la claffe des impôts perfonnels. Les
Communautés lèvent les reves pour foulager les
fonds ; mais c’eft toujours un impôt perfonnel qui
diminue le fardeau de l’impôt réel. Sans doute les
reves fe lèvent fur les chofes, mais c’eft fur les
chofes mobiles ; & tout impôt qui ne fe prend que
fur les meubles , ne peut jamais être réel. Qu’im
porte que la Provence foit un pays d’abonnement?
En eft-il moins vrai que quand les Communautés
(3 0 9 )
ufent du droit qu’elles ont de lever des reves , elles
ne font qu’établir un impôt qui touche fur les perfonnes, & qui n’affeâe pas les fonds ? Et qu’a-t-on
voulu dire, en parlant de l’opinion locale ? Les
expreiïions de quelques Adminiftrateurs des feux,
infpirés par le projet de détruire les exemptions ,
pourroient-elles former ce qu’on appelle une opiniôn locale , c’eft-à-dire , l’opinion univerfelle , &
qui tient lieu de principe ? Et cette opinion ellemême , pourroit-elle détruire ce qui eft établi, tant
par la Conftitution, que par l’ordre & la nature des
chofes ?
O r , il exifte là-deiïùs un premier principe en
faveur des Seigneurs, un principe étouffé dans tous
les ouvrages qui avoient été faits fur les imposi
tions de Provence. Les Seigneurs font exempts dans
leurs Fiefs des reves établies par leurs Communau
tés , non pojfunt ab univerjïtate colleclari ) c’eft le mot
de M. de Clapiers, 6c le germe de ce mot eft dans
nos Statuts. Les Etats de 1437, après avoir déli
béré les dons &C impôts, demandent la permiftion
en faveur des Communautés du Pays d’établir des
reves , per fuportar plus laugiéramen lou doun fubredich , & murés carts, aldich pais aucurrans e occurredouns. Ils la demandent, en reconnoiftant que les
�I
( î 10)
■
■ Seigneurs ne doivent pas y être fournis dans leurs
P/iRT. m. c ommunautés y fenfa prejudici ciels Senhors que auren Senhorié au clrech d'encan en tais luechs > & aiffo
Je entenda que Je refervoun los Senhors que aurien
Senhoriès en tais luechs > lofquals non Joun reflrechs
a pagar las dichas revas. On trouve la même reconnoiflànce du privilège feigneurial dans la fupplique
préfentée par les Etats convoqués en 1447. N°us
rapportons ces deux titres , en les joignant enfemble , parce qu’ils nous fournirent l’occafion d’obferver que la mention du droit feigneurial qui s’y
trouve bien formelle , 8c dans les termes qu’on vient
de rapporter, a été fupprimée dans l ’ouvrage de
Mourgues 8c fucceflivement dans tous les autres qui
ont été faits fur les Statuts ; de maniéré que perfonne ,. jufqu’à nos jours, n’avoit pu remonter aux
fources du principe; & le dernier de ces deux Statuts,
établit en maxime 8c en termes exprès , que non fi
revoun los Senhors que aurien Senhorié en tais luechs.
Non feulement les Etats avoient reconnu le droit
feigneurial, mais le Prince le réfervoit 7 quand les
Etats n’en faifoient pas eux-mêmes la réferve. Ainfi
la permiffion d’établir des reves , ayant été demandée
par les Etats tenus en 1440 , le Souverain ne l'ac
corde que in quantum Curia tangitur & citrà privile
O 11)
gium Prœlatorum , Baronum & Nobilium. En 1442 ,
les Etats l’avoient reconnu de même. Ils délibérè
rent des dons gratuits , foit en faveur du Roi René,
foit en faveur du Duc de Calabre 8c de fon époufe,
& même du grand Sénéchal. Ils demandèrent qu’il
leur fût permis d’établir des reves , fans préjudice
du droit des Seigneurs , qui n’y pouvoient être fou
rnis. Le même aveu fut fait par les Etats tenus en
1469; & ceux de 1631, en délibérant de demander
au Roi la confirmation du Statut de 1410 , dont
nous aurons occafion de parler , réferverent le droit
des Seigneurs & des perj’onnes exemptes. Rien n’efl
donc plus authentique , rien n’efi: mieux établi que
la franchife des Seigneurs, en matière de reves impofées par leurs Communautés.
Tous ces titres étoient ignorés, ôt tout ce qu’on
en favoit, c’efi: que les Seigneurs de Vence avoient
été déclarés exempts par deux Arrêts rendus en 1662.
Plus d’un fiecle après cette époque, ils voulurent
faire ufage de leur exemption. La Communauté de
Vence prétendit que li les Seigneurs vouloient ne
pas contribuer aux reves, ils ne dévoient pas par
ticiper à leur bénéfice, 5c qu’en conféq.uence ils dé
voient être cotifés fur les biens roturiers, tout comme
fi les reves .n’exifioient pas. Cela fut ainfi dit par
�\
C î 12)
= l’Arrêt, attendu que les Seigneurs de Vence y couPART. III
fentirent.
CHAP. II.
Mais ce confentement n’étoit pas néceffaire. Les
forains ne contribuent pas aux reves. Seroit-on en
droit par cette circonftance d’augmenter leurs tailles?
L ’Adminiftration des feux a conftamment foutenu
la négative ; 8c le vrai principe de là matière eft,
qu’étant libre à la Communauté de prendre tout
l ’impôt fur les tailles, ou de le divifer de maniéré
qu’une partie en foit prife fur les confommations
en foulageant les fonds, ceux qui payent plus ou
moins fur les confommations, ou qui ne payent rien
du tout à cet égard, ne doivent pas par cette raifon
payer fur leurs fonds une plus forte taille que les
autres propriétaires du terroir. Ainfi , lorfque le Sei
gneur ufe de fon. exemption conftitutionnelle fur les
reves, la taille de' fes fonds roturiers ne doit pas
en être augmentée. Le droit feigneurial feroit indi
rectement anéanti, fi les Seigneurs étoient furchargés
dans leurs fonds roturiers , quand ils ufent de leur
exemption' fur l’impôt perfonnel de la reve. L ’ufage
eft contraire à la prétention élevée dans le tems
par la Communauté de V ence, 8c légèrement confentie par les Seigneurs de cette V ille. Les Evêques,
tes Gommandans & autres x font exempts des reves.
Le*
*
O 1*)
Les Chapitres, les Curés 6c le Clergé paroilîîal pro
PART.
fitent de cette exemption fur le piquet, qui n’eft ÇU AP.
rien de plus qu’une reve fur les farines de confommation. On n’a jamais ofé dire que cés exempts duf
fent être cottifés, quant à leurs biens roturiers, féparément, 8c comme fi les reves n’exiftoient pas.
Par quel principe pourroit-on le dire aux Seigneurs?
Seroit-ce parce que leur immunité , quant à cet
objet, efi la plus conforme aux principes, ainfi qu’aux
textes multipliés de notre Conftitution ? Ainfi, les
Seigneurs fo n t, d’une part, exempts des r e v e s ; 8c
de l’autre , les Communautés , quand ils ufent de leur
exemption , n’ont pas le droit de les impofer fur leurs
biens roturiers , comme fi les reves n’exifioient pas.
Les Communautés peuvent tout p r e n d r e fur les
fonds , 8c n’affeoir aucun impôt fur les confomma
tions. Dans ce cas les Seigneurs n’ont rien à dire.
Ils payent fur leurs biens roturiers les deniers du
Roi 8c du Pays , cemme tous les autres poïfédansbiens dans le terroir. Mais fi les Communautés établifient des reves pour le foulagement des fonds ;
les Seigneurs, qui, quant à leurs biens roturiers,
font membres de la Cité , doivent profiter' du
foulagement que l’établiflement des reves procure
aux fonds du terroir 3 8c s’il en étoit autrement ,
Rr
4
III.
II.
�(314)
le privilège feigneurial feroit ou éteint ou dénaturé#
* Ce privilège 11e confifte pas en une fimple option fur
le choix de l ’impofition , ou fur la maniéré d’y con
tribuer , mais à ne pas'contribuer du tout, foit di
rectement , foit indirectement à l’impôt qu’il piait
aux Communautés d’établir fur les confommations;
& certainement il n’entrera dans l’efprit de perfonne que les Seigneurs ne doivent pas avoir dans
leurs Communautés, les mêmes droits que les forains.
Ajoutons que le droit des Seigneurs étoit telle
ment reconnu fur cet objet, que les Etats de 1437
demandant pour les Communautés la permiflion d’éta
blir des reves, demandent aufli celle de les vendre
à l’encan public, fans être fournis au droit d’inquant
envers les Cours , fans préjudice des Seigneurs qui
auroient de pareils droits dans leurs F iefs, & qui ne
pourroient être fournis à j payer les reves. Ces mots
portés dans la fupplication des Etats , ne préfententils pas un monument bien frappant & bien refpectable, foit de l ’immunité des Seigneurs dans leurs
Fiefs, foit de la nécefîité de les maintenir dans la
pofTeflion de tous les autres droits, quand ils jouif*
fent de l’immunité?
(31$)
~
'
PART. III.
ciiAr.
C H A P I T R E
III.
Continuation du même fu je t , & de Vexemption
prétendue par VOrdre de Malte.
O n avoit dit au nom de l’Adminiflration des feux,
dans le procès contre l’Ordre de Malte , que le droit
qu’ont les Communautés de Provence d’établir des
reves , étoit co-éternel. Ce droit feroit certainement
bien refpeCtable dans cette hypothefe. Il feroit conftitutionnel à toute forte de titres.
Mais la Conftitution nous dit le contraire. Dans
tous les tems, jufqu’en 1 41 0, quand le Pays délibéroit des dons ou des impôts, les Etacs ne manquoient jamais de demander au Souverain la permiflion d’en prendre une partie fur les confommations , pour que les fonds puflent plus aifément fupporter le reftant. Les reves étoient, comme on voit,
impofition de fublide, &: de plus une impofition
dont rétabliüèment étoit fubordonné à la permillion
du Souverain , & tellement fubordonné à cette permiffion , que quelquefois le Prince le refufôit , &
plus fouvent encore il le limitoit, foit en le fixant
à la levée des impôts délibérés, foit en limitant les
R r ij
�(316)
! tems pendant lefquels cette permifïion devoit avoir
lieu , foit en difant qu’en conformité du d roit, l’im
III.
pôt ne feroit levé que fur les habitans & non fur
les étrangers.
En vain a-t-on voulu foutenir le contraire , fur la
foi des Délibérations prifes par les Etats en 13 9 5 ,
& dans les années fuivantes , c’eft-à-dire, dans le
tems de la révolte du Vicomte de Turenne. Mais
pourquoi n’a-t-on pas voulu fentir la différence qui
fe trouve entre l’impôt délibéré par le Corps entier
de la N ation, St les droits établis individuellement
par chaque V ille ou Communauté ? La Nation peut
s’impofer dans fa totalité, ainfi 8t dans telle forme
PART. III
CHAP-
qu’elle trouve bon de délibérer dans le concours de
tous les Ordres. Les Communautés auroient - elles~
cette puiflance ?
Elles ne l’avoient, ni par le d ro it, ni par la
poffeflion. Tous les Auteurs établiffent cette grande
regle , que les Communautés qui n’ont pas le pou
voir fuprême, & quœ recognofcunt Jîiperiorem , ne
peuvent pas établir des levées fur les entrées St confommations, fine licentia Principis. On n’a qu’à voir
ce qu’en difent Riccius dans fes Colleftions, Colleft.
90 0 , Novarrus, de gravamin. vajJaL gravam. 335,
1 & feq* Bertachinus, de Gabcll, in princip. ; Pe-
(3 17)
trus de U baldis, de Collecl. n°. 3 ; le Cardinal de —i : — :
L u ca, tit. de Régal, difc. 44 , n. 1 8c feq. Gabellœ
^
funt de regalibus, ideoque neque per Communitates
fn e Principis licentia imponipojjlint. L ’on peut ajouter
à ces D octrines, celle de Barbatus, de divif. frucl.
part. 1 , chap. 8 , n°. 9 , St de tous les autres, fans
exception , qui ont écrit fur cette matière.
Les reves nous viennent d’Italie, & avec elles;
tous les principes qui les gouvernent. Telle eft en
core la maxime générale de France. Les Ordonnances
du Royaume , rapportées par Philipi, Arrêts de cü/iJéquence, Arrêt 9 4 , établiffent le même principe,
ainfi que tous les Auteurs François, fans excep
tion.
On a cité avec autant d’imprudence que de lé
gèreté , la L o i 10 , Cod. de Vectigal. & Commijf
pour en induire que, de droit commun , les Com
munautés avoient le droit d’établir des reves. Mais
l’Auteur du Droit conftitutif convient avec raifon Pag. i9.
que ce n’eft pas dans ce texte qu’il faut puifer les
vrais principes du droit des Communautés fur cette
matière. Cette bafe feroit tout à la fois illégale 8t
dangereufe, par les raifons qu’il en donne. Il ne
faut que lire le texte , 8t le rapprocher des prin
cipes , pour fe convaincre que les Communautés ne
�PART. III.
CHAP. n i .
M. de Tournefort dans
Con Recueil.
( ?l8 )
peuvent prendre là - deffus des délibérations, qu’à
l’effet de lier les citoyens membres de ces mêmes
Communautés , f i b i , dit la Loi. Les forains 8c les
exempts ne peuvent être compris dans ces levées.
Un Magiftrat de la Cour des Aides , dont les ré
flexions font connues de tout le monde , a dit que
les reves & autres impo/itions fur les denrées y fur les
perfonnes par capâge, n'avoient été introduites que pour
rendre moins onèreufes les impojitions qui dévoient
porter Jur les fonds , qui dans les premières & vérita
bles Conjlitutions de cette Province , étoient les Jeuls
propres à fupporter les charges dejlinées pour les befoins de l'Etat y & les néceff tés du Pays. Suivant cet
objet y les impofitions de cette nature ndur oient dû re
garder conféquemment que les perfonnes qui pojfédoient des biens fonds dans les Communautés où elles
étoient établies y qui trouvoient en cela un moyen d'ac
quitter d'ailleurs des charges auxquelles étoient tenues
leurs pojfeffions foncières. Audi les Auteurs ( i ) éta-
( i ) Bertrachinus, de gabell. & veciigal. 7 , n°. 8: le Préfident
B oyer, décif. 6 0 , n°. 5 j Tufchus, vu. Statutum, concluf. 502,
5 54 & 5° 4 î & dicitur forenfis , difent les mêmes Auteurs, in hâc
materiâ qui cfi alteriiis fo r iy vel non efi de corpore univerfitatis
loci de quo agitur.
(3 19 )
bliffent-ils en principe , que les reves délibérées dans
■■ »
le fèin des Communautés , & par tous les Repré- 1ART‘ Iir'
1
1
chap. iii.
fentans de l’habitation , ne frappent pas fur les fo
rains , & par conféquent fur les exempts. Ainfi les
Etats du Pays pourroient avoir délibéré des reves
en Corps de N ation, fans qu’on puiffe induire de
là que les Communautés euffent le même droit. En
liant tous les Ordres , le vœu des Etats lie tous les
individus qui fervent à les compofer. En exaâe regle , le vœu d’une Cité fur l’impôt perfonnel , ne
peut donc lier que ceux qui font membres de l’univerfalité.
Mais que n’aura-t-on pas à dire, quand on verra
que dans les Etats 6c dans les grandes occafions où
les* deux premiers Ordres délibéroient volontaire
ment l’impôt même perfonnel, cela ne fe faifoit
qu’avec la permiffion du Souverain ? On n’a qu’à
voir ce qui s’eft paffé en 13 9 1, 1393? & pendant
tout le tems qu’a duré la révolte du Vicomte de
Turenne.
Et quand enfuite il s’agiffoit, non d’une impo/ition délibérée par tous les Ordres, mais de donner
individuellement, à chaque C ité , ou à chaque Com
munauté du P a y s, le droit d’établir des reves. Les
Etats en demandoient la permiffion au Souverain ,
�( jzo)
qui la donnoit ou la refufoit ; qui quelquefois ne
PART.
IIL la donnoit que fous des conditions Sc des reftricCHAP. [ii.
*
t i o n s , & n o ta m m e n t fous celle que les forains n ’ y
f e r o i e n t pas CGm pris , &. q u e par conféquent l ’ im p o f i t i o n n e t o m b e r o it q u e f u r les Membres de la
Cité.
Un Statut de 1410 donne le droit aux Commu
nautés, pour le'.préfent & pour l’avenir, d’établir
des reves à leur gré. Cette conceffion, faite à la
requifition des Etats , eft dans la forme la plus am
ple ôt la plus illimitée. Mais les Etats eux-mêmes
la regardoient comme peu folide, puifqu’ils conti
nuèrent à demander là permiflion. Nos Souverains
en portèrent le même Jugement, puifqu’ils raccor
dèrent en la lim itant, ou la refuferent, fuivant les
circonftances, après cette époque ( 1 ) .
Ce
r
ç . . . 1 r f 7 <.
O
Les Etats de
n ,
.
L 3 21 J
Ce fut dans cet état des chofes que l’union fut
faite. Après l’union, le vœ u de nos Etats a varié
PART. ni.
CÎÎAP. 111.
voient être pris fur le fe l, demandèrent la permiflion d’établir des
reves pour dix ans, à l’effet de pouvoir payer plus facilement les
foixante mille florins reflans, & la permiflion ne leur fut accordée
que pour fix ans.
La même fupplique fut renouvellée par les Ecats de 1429, pour
rapporter la permiflion pendant l’efpace de dix ans. Voici la
réponfe : Dominus confuevit requifitas revas & vintens gratiosè
concédere. Veniant igitur & déclarent fuprà quibus & res à quibus
exigi debet reva & dabitur provifio quod recedant à diclo Domino
contenti. La permiflion ne fut pas accordée en général. Le Roi fe
réferva le droit de la donner aux Communautés individuellement,
fuivant les cas & les circonflances. Les Etats de 1432 demandent
la permiflion générale pendant dix ans pour la levée des impôts
délibérés. Dans ceux de 1 434, même demande de la part des
Etats, & pour dix ans. Les Etats de 1437 préfenterent encore la
meme fupplication, & le Roi René y confent, pourvu que les
Communautés en ufent d'une maniéré raifonnable. En 1440 , la
1419 comptoient fi peu fur la conceflion
permiflion eft encore demandée au R.oi René pour dix ans, ainfi
illimitée, arrachée ou furprife par ceux de 1 41 0, foit à Louis II,
qu’on l’a ci-devant obfervé. Le Roi répond : Flacet in quantum
foit à Pierre d’Acigné Ton Lieutenant général * qu ayant à délibérer
Curia tangitur & citrà privilegium Prælatorum, Baronum & No-
un don gratuit de trente mille florins, ils commencèrent par prier
bilium. Même demande pour le te ms & terme de douze années
la Reine Iolande & Louis III Ton fils, de permettre aux Villes,
dans les Etats de 1442. Réponfe: Placet R égi, falvo eo quod
Bourgs & Communautés du Pays d’établir des reves pendant dix
in quantum in eodem articulo fit mentio de intreitis & exitis, non
atiSj ce qui leur fut accordé. Ceux de 1420 délibérant un nou
intdligatur concefiio & approbatio facla in prœjudicium exterorum.
veau don gratuit de cent mille florins, dont quarante mille de-
Il dépendoit donc du Prince de ne pas permettre aux Corning
Ss
�( ? 22)
là-defîus. Les premiers qui s’occupèrent de cette
question , décidèrent que les Communautés ne pou-
( 3l 3 )
volent établir des reves fans Lettres patentes. Ils
le firent ainfi juger par Arrêt de 1624. Ceux de
nautés de faire fupporter l’impôt aux étrangers, qui , de droir,
?
*
•
;
tuelles? D evoit on encore, comme on l’a vu de nos jours, fe
ne peuvent y être fournis. En 1469 , les Etats demandent encore
livrer à la fuppofition hardie dont on s’ed permis lexpreflion dans
la permifîion pour dix ans. Le Prince ne l’accorde que pour fix.
le procès de l’Ordre de Malte , en affirmant que le droit qu’ont
Tous ces traits font poftérieurs au Statut de 1410.
les Communautés de Provence d ’établir des reves, ed co-éternel
La Nation
a donc conftamment reconnu que la concefiion de 1410 n’étoit
comme la Conftitution?
pas pleine , abfolue & pour tous les tem s, puifqu’elle a cru dans
Il ne faut donc pas être furpris des obfervations faites là-deftus
tous les Etats fuivans devoir en demander de nouvelles, puifqu’elle
ne les a demandées que pour un tems * & nos Souverains , par
par un Magiftrat de la Cour des A id es, qui avoit puifé dans les
fources pour étudier notre régime. Voici quelles font fes réflexions
tant du même principe, ne les accordoient que pour' un tems ,
au fujet du Statut de 1 4 1 0 , & du délibéré des Etats de 1631 :
fous telle reftriêhon & modification qu'ils trouvoient bon d’y joindre.
Sou qu’on Le f î t à deffein, ou quori ne connut pas le véritable
détails, fi
état des chofes , on fa it choix dans cette propofition , pour fonder
l ’on ne connoiftoit notre Conftitution dans cette partie, que par
une pareille prétention , de cette fapplique préfentée en l ’année
ce qu en ont dit Mourgues &
ceux qui l ’ont fuivi. Pouvoit-on
1410 , ou des tems critiques, voifins de la révolte excitée par Ray
imaginer que le premier Commentateur avoit dénaturé le texte
mond de Turenne, contre l’ autorité légitime du Prince, avoient
dont il travailloit la glofe ? C ’eft pourtant ce qu’il a fait. Il a rap
pu enhardir des fujets à s’ exprimer dans cette fupplique d’une
porté les derniers Statuts dont on vient de parler. D ’une part ,
maniéré plus libre , & même, on peut dire, plus audacieufe, en
il en a fupprimé tout ce qui pouvoit préfenter l ’empreinte de
demandant que cette liberté de faire ces impofitions eût lieu , nonobf-
l ’exemption feigneuriale dont on a déjà parlé, & de l’autre , il
tant toutes Sentences , Ordonnances , & connoiffance qui en pourroit
a rapporté les fuppliques & les concédions comme faites fans limi
être prife par Sa Majefté
tation & pour tous les tems à venir. Ces deux menfonges ne font-
féquence dans cette même propofition, que cette fupplique n’étoit
ils pas bien graves ? O n dira que cet Auteur avoit en cela les
que la fuite des précédentes , faites au même fu jet, où on recon-
meilleures intentions du m onde, & nous le croirons. Mais d’abord,
noiffoit fucceffivement que ce n’ étoit que des permiffions momenta
falloit-il faire difparoître toutes les traces du droit feigneurial ; &
nées qui étoient demandées, & à limiter, fous le bon plaifir du
d’ailleurs l’Adminiftration des feux devoit-elle fe permettre d’abufer
Prince; ce qui eft encore mieux déterminé par les fuppliques des
de ces concédions temporelles pour les préfenter comme perpé-
années 1432 , 143-/ & 1447 ci-dejfus rapportées ; & on fe déter«
O n ne feroit certainement pas inftruii de tous ces
fes-Officiers. On laiffie ignorer en con-
S s ij
part.
cuap.
ni.
m.
�\
PART. III.
C H A f . III.
v-4
*::r \\ir
ï 6 $i penferent au contraire que les Communautés
avoient, par le Statut, le droit arbitraire 8c illi
mité d’établir des reves. Mais en prenant cette dé
libération , ils invoquèrent le Statut de 1410. Ils
ne firent aucune mention des Statuts fubféquens ,
qui fo n t, de la conceflion de 14 10 , un droit mo
bile , révocable, 8c même révoqué. Ils ne difent
pas que quelques Communautés avoient rapporté des
concédions particulières , à l’effet de pouvoir établir
des reves à jamais. La Communauté de M arfeille,
par exemple, obtint en 1448 des Lettres patentes
du Roi René , qui lui donnoient ce droit pour tous
les tems. En auroit-elle eu befoin , fi la conceflion
de 1410 avoit continué d’exifter? Obfervons en
core que les Etats de 1651 réfervent les droits des
Seigneurs 8c des exempts : car, dans tous les tems,
on a regardé l’impôt perfonnel des reves , comme
fufceptible d’exemption.
mine fur un titre auffi hafar dé, à délibérer de pourfuivre L'exé
cution d'un tel privilège , qui excluroit toute permiffion à cet égard,
non feulement de la part du R o i, mais de fes Officiers ; ce que
ces mêmes Etats rétractèrent enfuite bien expreffiément, ainfi qu'on
11
le verra, en fe réduifant à des propofitions à ce fujet plus rai-
( 3*5 )
D e là , les Arrêts de Réglement qui font rapportés dans Boniface , mentionnent les deniers procédant CHA? ^
des reves , comme des deniers d’o ftro i, 8c comme
ne pouvant être levés qu’avec une permiflion du
R o i, donnée par Lettres patentes, ou par décret
des Cours locales. De là , l’ufage confiant, fous le
quel on a vécu pendant longues années, de ne
point établir des reves , fans une permiflion de la
Cour des Aides ; 8c fi l’on s’eft enfuite départi de
ce préalable , on a toujours confervé des vertiges
du principe conftitutionnel, en tenant pour réglé
confiante, que les délibérations des Communautés,
portant établiflêment des reves , ne peuvent pas être
exécutées, fans avoir été auparavant homologuées ;
ce qui ne fe pratique pas, quand il s’agit de la
taille , foit en argent, foit en fruits, attendu que
cet im pôt, qui tombe fur les fonds , dans un cas
comme dans l ’autre , eft le feul conftitutionnel.
De là, il fuit encore qu’on ne fouffriroit pas qu’une
Communauté changeât le fyftême de fçs importions,
au point d’abroger l’impofition terri/oriale , foit en
argent, foit en fruits, 8c de porter tout le poids de
l’impôt fur les confommations. Une pareille délibé
fonnables 6* plus convenables j & abandonnant totalement ce pré
ration feroit regardée comme oppre/Iîve vis-à-vis les
tendu Statut de 1410,
membres du troifieme Ordre , parce qu’elle conver-
�\
■ f
I
O 26)
: —J.1.~~~ droit en impôt unique , celui qui n’eft que de fubPART 1il
^
A
ciiAr. m. tide & de fupplément. Elle affranchiroit les fonds,
au grand préjudice des confommateurs 3 & dans ce
cas , il y auroit raifon de dire que le pauvre Peu
ple feroit écrafé. Cette vérité ne peut pas être étouf
fée , puifque les Arrêts ont cafl'é les impofitions des
Communautés, quand elles prenoient trop fur les
reves, quoiqu’elles laiflaflènt toujours fubfifter la
taille ou l’impofition en fruits.
Quelques Communautés ont le droit d’établir des
reves , par des titres particuliers. Elles font eii trèspetit nombre. Mais le droit d’établir des reves, 11e
doit pas fe confondre avec le droit de rejetter fur
les conformations , la charge entière de toutes les
levées, tant royales que de la communion. Les reves
11e font, de leur nature, qu’une impofition de Pub
liée , pour aider les propriétaires des fonds taillab lés, à fupporter plus légèrement les charges du
Pays. La nature de l’impôt provençal tient progreffivenient de l ’impôt mixte & de l’impôt réel. L ’im
pôt mixte eft en grande partie réel, puifque chaque
contribuable doit être taxé fuivant la valeur de fes
fonds taillables. Quand les Communautés non fon
dées en pofleflion , ont voulu délibérer, & porter
des levées exorbitantes fur les confommations, leurs
1
C i'2? )
délibérations ont été cafl'ées , comme trop avanta- ’---- —
geufes aux propriétaires des fonds taillables, &
*
comme opprelîives à l’encontre du Peuple. C’eft ce
qui fut jugé dans la caufe de la Communauté de
Sallon 3 8c l’Arrêt rendu là-deflus , a été inutile
ment attaqué au Confeil. Un Arrêt plus récent,
auquel on pourroit en joindre une foule d’autres,
l’a jugé de même le premier Juillet 1778 , contre
la Communauté 'de Saint-Maximin. Ces Arrêts éta
blirent un principe conftitutionnel. En réglé, l’im
pôt fur les confommations ne doit jamais être le
plus fo r t , ôc moins encore peut - il être l’impôt
unique ?
Perfonne n’a droit de s’offenfer de ce que nous
venons de dire , puifque nous ne parlons que fur
la foi de la Conftitution & des principes. On ne
doit pas même s’en allarmer. S’il faut être citoyen, il
eft encore plus indifpenfable d’être jufte envers tous
les Ordres de la fociété 3 & l’on doit s’eftimer bien
heureux , quand on aboutit à des réfultats qui con
cilient les pofleffions actuelles, avec la Conflitution.
L ’Auteur du Droit public a dit avec raifon , que
les dons extraordinaires des Villes procédant des
deniers dyo c t r o i ne pouvoient pas être levés en
Provence. Le produit des impofitions , faites fur
�PART. II/.
CH A P . IU .
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Jü
■, {;
1
(jz 8 )
les confommations , ne peut tourner qu’au profit
des Communautés qui les établiffent. Le Roi ne
peut rien lever en Provence, fans le confentement
des Etats. Les reves font un allégement , devenu
néceffaire, par l’accroiffement des impôts. Le pro
priétaire , le cultivateur feroient forcés de tout aban
donner y fi l’im pôt, avec les accroiiïemens qu’il a
reçus , étoit concentré fur les fonds. La permiflion
donnée anciennement par nos Souverains, quand
ils réfidoient fur les lieux , efl à préfent accordée
par la Cour des A ides, qui les repréfente dans cette
partie , 8c qui , fe r a p p r o c h a n t , a u t a n t qu’il étoit
poflible, du Statut de 14 1 0 , a laifle la délibération
libre , fous la [réferve feulement d’une jufte modé
ration, 8c de l ’homologation préalable.
D ’autre p art, on a déjà dit que quelques Villes
de Provence , ont rapporté , dans le teins , des ti
tres particuliers pour la permifiion d’établir des re
ves. Telles font celles d’A ix , de Marfeille 8c au
tres. Les autres ont acquis ex confuetudine quœ vim
legis obtinet, la permiflion de les délibérer fans préa
lable. Les Auteurs nous attellent ( 1 ) que ce droit
peut
(1) Barbatus, de Divif. fruct. part, r, chap. 8 , n. 18. De Luca,
de Régal, difc-. 78.
<(î*9 )
peut êtte acquis par les Communautés
conjuetu'r
dine prœjcriptâ. Ainfi les Communautés de Provence,
qui de plus, ont pour elles deux Arrêts du Confeil
rendus en 1642 8c 1645 , qui ne difent pas pourtant
tout ce qu’on voudroit leur faire dire, ont acquis
le droit d’établir des reves à leur feul profit \ 8c le
Gouvernement n’a nulle participation à prétendre
fur le produit de ces impôts perfonnels.
;
D e plus , les Communautés qui avoient des privileges à l’effet d’établir des reves , s’çn font fervies
pour porter tous les impôts quelconques fur les confoinmations. Elles font: à cet égard dans une poffeflion antique , à la vérité , mais foncièrement abufive. Le territoire de ces Communautés efl: plus que
féodal. Il ne fouffre aucune efpece d’impôt, pa$
même l’application des Vingtièmes abonnés par la
P rovin ce, 8c levés, tant fur les feux que fur les
Fiefs. Il efl vrai que les habitans de ces Villes fupportent de fortes charges fur les confommations y
mais i°. ces charges exceflives font partagées par
toutes les familles opulentes qui viennent partager
les douceurs de l’habitation, fans qu’elles y poflédent un pouce de terre ; 20. le poids en efl: encore
partagé par les étrangers, que la néceflité de leurs
à
affaires y appelle j 8c, ce qui efl encore plus inTt
\
1
uu
�—
par ceux qui font forcés d’y réfider à raifort
‘ deJfëur état; j°. elles font illégalement; fupportéeî
par le pauvre Peuple', qui ne pofîede rien , & qui paye
tout fur Tes confommations y tandis que lé riche pro
priétaire ne payé abfolument rien fur lés fonds qu’il
poffede, & dont les revenus réels s’augmentent ,
par 1 leuri pofition , dans le territoire des grandes
Cités.
'
1 ü*
C ’efl pourtant dans ces grandes Villes que fe for
ment les cris St les fyftêmes produits fur l’univer*
falité de l’impôt territorial. On y regarderoit comme
ificendiaire tout plan qui tendroit à mettre à la taille
les domaines affis dans leurs terroirs, St cependant
on s’irrite fur la prérogative antique, conftitutionîièlle & patrimoniale des Fiefs.
i
Que conclure de ce que nous venons d’obferver?
Q u’il faut refpeêter l’état même de poffeffion dans
lequel les grandes Communautés fe trouvent, mais
qu’il faut dire en même tems que la prérogative des
Fiefs doit fubfifter par majorité de raifon ; & de
plus, que l’impôt perfonnel établi fur les confom
mations , eft de fa nature très-fufceptible d’exemp
tion.
On avoit toujours convenu de cette
(îîO
des reves,' a
pouvoit l’accorder de maniéré que
l’impôt
a
* f1" 'm.st
HI
ne tombât pas fur les exempts. Les Etats de 163 ï aIAL..Ilu
en citant ceux de 1410, St en voulant donner aux
Communautés du Pays le droit conflitutionnel d’éta*
blir des reves , convenoient fans difficulté que les
exemptions étoient légitimes fur cette matière. L ’Edit
de 1661 , propofé par les Adminiftrateurs des feux;
St en quelque maniéré rédigé par eux ou d’après
leurs idées , réferve les exemptions fondées fur bons
St valables titres, St les Auteurs du Pays n’avoient
jamais varié là-deffus (1 ) .
i
( 1 ) Me. Julien, colleêb manufc. v°. Civitas, chap. 5 , litt. H ,
examine la queflion de favoir fi les Eccléfiafiiques font de droit
exempts des reves. Non eximuntur, dit-il, & opus habent fpeciali
diplomate. Me. Saurin, canfultant au commencement de ce fiecle
pour la Communauté de Cafïis, difoit que, quoique le droit commun^
les difpofitions canoniques & les Ordonnances de nos Rois exemp
tent les E celéfi afl'pues des droits d'entrée des Villes , ces exempt
tions n ont lieu que dans les Pays d’élection, Ü non dans les Pays
d’ E ta t, comme la Provence & le Languedoc. Nous ne connoi/Tons
en Provence de franchifes de reves
QUES y QUE CELLES
des
titres
en faveur des
QUI LEUR SONT ACCORDEES PAR DES
particuliers.
E cclesiasti -
LoiX
OU PAR
Ce ne fout-là que des Do&rines, nous
derniere
en convenons; mais il n’eff pas dit encore, 6c probablement il
Vérité. Le Prince en accordant le droit d’établir
ne fera jamais dit, quii faut tout effacer 6c tout brûler; 6c quarx^
T t ij
�(???)
On s'eft donc joué de l'évidence elle-même ,
r* quand on a foutenu, dans le procès contre l ’Ordre
de M alte, que les reves n’étoient pas fufceptibles
d’exemption, 6c que le Souverain ne pouvoit en
accorder aucune , quant à cet impôt perfonnel, qu’autant qu’il prendroit fur lui la portion des exempts.
Cela n’a jamais pu fe dire qu’en matière d’impôt
réel, 6c non dans l ’hypothefe d’un impôt perfonnel,
dont la perception dans fon origine 6c dans toutes
fes progreflions a conftamment été fubordonnée à la
permiflion du Souverain.
Les droits de l ’Ordre de M a l t e remontant aux
premiers tems de notre Conftitution, fe trouvoient
renforcés par une foule d’Arrêts de toutes les Cours
fupérieures du Royaum e, 6c par ceux que les Cours
locales du Parlement 6c de la Cour des A ides, avoient
conftamment rendus fur cette matière. L a queftion
avoit été mue depuis peu de tems , entre le Bailli
de Fontblanche , 6c le Fermier du piquet de la Com
munauté de Ceirefte. Les deux bafes fur lefquelles
cette queftion réfide, avoient été pofées. On avoit
examiné i° . fi la matière étoit fufceptible d’exeitip- —
* P a r t iii
tion. 2°. Si l’Ordre de Malte avoit des titres lé- o
l4 *tir
CHAr, n r 4
gitimes à cet effet ; 6c ces deux qüeftions , traitées
fous les yeux de l’Adminiftration des feux , avoient
été jugées par un Arrêt folemnel en faveur de cet
Ordre. Dans l’intervalle, un ouvrage , le nouveau
Commentaire des Statuts a paru , dans lequel la
queftion a été expofée incomplètement, d’une ma
niéré adroite , 6c propre à faire naître, des doutes
fur le droit 6c les titres d’exemption invoqués par
l’Ordre de Malte.
La Communauté d’A ix , cent fois condamnée fur
cette queftion, eft rentrée en lice. On eft parvenu,”
non fans peine , à la foutenir par une délibération:,
de l’Affemblée intermédiaire. La queftion a été do
nouveau difcutée ; &C par un dernier A rrêt, l’Ordre
de Malte a perdu fa caufe. On fait que ce dernier
titre n’a été rendu que multis magnique nominis contradicentibus. Sur neuf Juges , quatre ont voté contre
l’Arrêt. C ’eft donc par le fuffrage d’un feul Ma-'
tions , en matière de reves font dans l’ordre des Loix & des prin
giftrat ( car il n’en faut pas davantage pour déter
miner l’Arrêt dans la Cour des Aides ) ; c’eft, difonsnous , par la prépondérance d’un fuffrage unique ,s
que l’Ordre de Malte auroit perdu fon exemption,
cipes conffitutionnels. O n l'a déjà démontré.
fondée fur la Conftitution, fur la poffefiion la plus.
on brûleroit les livres, les Loix refteroient toujours : o r , les exemp
�( S 34 j)
antique fur lep Arrêts Ues plus nom breux, &. fur
' les Lettres- paténtæs de tous uosî Souveraine. La
queilioii celi pendfontei.au ConfeiJ, où l’Ordre s’eft
pourvu æiî cafiàtian de cet Arrêt ifo lé , contraire
à tous les - autres qui avaient été rendus fur pareille
matière.
o -r t
L
ai'
C ’eft là que deux queftions font agitées ; i° .
Fimpôt de la rêve eft-il fufceptible d’exemption par
titres? z°. L ’Ordre de Malte a-t-il des titres fuffifa 'n s p o u r appliquer cette exemption à fes mem
bres.
~
'
Les-1exemptions ont jex'ilïé de tous les rems. Les
Etats les ont recbnnués , & cela répond à tout. Elles
ibftt d’ailleurs dans-ta nature de l’impôt \ i° . parce
(Jue le droit éft perfonnel ; 2°. parce que les Com
munautés de Provence n’en joui fient que par conconcefiion du Prince. Comme perfonnel , il eft fuf
ceptible d’exception ou d’exemption : ce n’eft que
dans le cas de l’impôt réel , qu’il a été établi que
le Prince ne peut exempter , fans prendre fur lui
la portion de l’exempt.
Mais fi le droit d’établir l ’impôt n’eft que de conceflion ( i ) , l’exemption eft encore plus légitime.
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■ Comment douter déâ forces du pouvoir fuprëmê,
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dans les cas de cette efpecë ? Si les Communautés PAR1*‘ Ilr*
verain. Les grandes Cités d’Italie, qui fe font depuis formées' en
Républiques, en rapportèrent une pareille lors de la paix de (Donttance. Toutes les Ordonnances du Royaume & les Auteurs Fran
çois ne donnent aux deniers produits par ces importions, que la
qualification de deniers d’octroi, pour indiquer que ces deniers
dérivent de l ’ufagc d’un droit qui ne peut exifter que comnie
O&royé par le Souverain. Les droits d’entrée n’exiftent en France
qu’en force des titres concédés à cet effet parle Prirtce. La Pro
vence "étoit régie par ce principe dans le tems de 'nos anciens
Souverains , nonobûant le Statut* de 1410. O n en £r également
donné la preuve.
Nos Etats en étoient bien convaincus, puifqu’ê'n 1624, ils firent
rendre un Arrêt du Confeil privé, en date d u '3 Avril, qui ca/Ta
les impofitions de 6 & de 4 fols par millerole de vin établies pat
les Communautés de Cafiis &: de la Ciotat, avec défenfes à ce$
deux Communautés & à tous autres, d’en faire de femblabîes à
l’avenir, pour quelque caufe que ce foit, fans Lettres patentes dê
Sa Majefté. En 1631 , les Etats du Pays changèrent de fyfiême;
ils invoquèrent le Statut de 1 4 1 0, fans parler de ce qui lavoir
fuivi. Eti 1640, on vit éclorre le grand procès des Tréforiers de
France, qui voulurent mal-à-propos établir des droits domaniaux
fur le produit des reves. Ce fyftême étoit contraire aux droits dit
Pays, parce que les reves établies pôur alléger le fardeau des
tailles, ne dévoient tourner qu’au profit des Communautés. La Pro
( i ) O n a vu ci-devant que la permiffion d’établir des reves ne
vince plaida contre ce fyllêtne-; elle gàgria ùi caufe. fl fi.it décidé
peut appartenir aux Communautés que par la concefiion du Sou; ..
que les oft’rois de Provence rvétoient pas domaniaux, mais patrie
�C 357)
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de Provenue tiennent de leurs Souverains, Toit an*
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moniaux. Mais il. fut dit aufli que les deniers en procédant n’en
étoient pas moins deniers d’offcroi, c ’eft-à-dire que la levée tenoit
au droit concédé par le Prince aux Communautés. Tous les Réglemens rapportés par Boniface , tom. 3, pag. 95 & fuivantes,
parlent du produit des reves comme des deniers d ’octroi. Ils. prou
vent qu’on ne pouvoit en faire la levée qu ’en préfentant les let
tres fur ce obtenues à la Chambre des Comptes. Des Réglemens
poftérieurs ont fuppofé que cette Cour pouvoit donner les permiflions d’établir des reves, & de lever les deniers d’octroi. Par
des Réglemens ultérieurs & faits de nos jours, les Communautés
ont pu;fe dilpenfer de rapporter la permifîion préalable à la D é
libération portant établifîément des reves. La Chambre des Comptes
s ’eft relâchée là-deffus j elle a permis aux Communautés de dé
libérer &
d’établir l ’impôt fur les confommations. Mais il refie
toujours que les Délibérations prifes fur cet objet ne peuvent être
exécutées, fans qu’elles ayent été préalablement homologuées.
V o yez les Réglemens rapportés dans le nouveau Commentaire
fur les Statuts de Provence, tom. 2 , pag. 342,11°. 5. L ’exercice
de ce droit, fubordonné dans le principe à des Lettres patentes,
enfuite à la permifîion des Cours locales avant la Délibération,
& aéluellement à l’homologation préalable avant l’exécution, porte
dans toutes ces gradations l’empreinte de fa nature 6c de fon
origine. Il ne fe préfente encore, nonobstant les facilités données
là-deffus aux Communautés du P a y s , que comme un droit de
concefüon, & par conféquent fufceptible d’exemption,
fommations de ceux qui ne font pas membres de la
1
4
C ité , qui n’y font que pour leurs befoins ou pour
leurs affaires, comment fe refufer à dire que la
même puiffance qui leur a donné ce droit exorbi
tant, en peut limiter l’exercice en exceptant une
clafle privilégiée de forains? Tous les Auteurs du
Pays ont conftamment reconnu la validité des exemp
tions fur cette matière. On ne peut pas même dire que
cette exemption foit un privilège ; elle eft dans le
droit naturel. Elle n’eft en derniere analyfe que le
droit de n’être pas touché par le privilège que les
Communautés ont fur cette matière. Le fameux Edit
ou Arrêt du minot de 16 6 1, rédigé fous les yeux
des Adminiftrateurs des feu x, puifqu’il n’eft au fond
qu’un traité fait avec eux , exempte des reves ceux
qui feront fondés en bons & valables titres. Les
exemptions font donc légitimes en matière de reves.
Les titres de l ’Ordre de Malte font connus. On
a fubtilifé fur leur fuffifance. Elle étoit déjà dé
montrée par une foule d’Arrêts j les Adminiftrateurs
des feux avoient formé le projet de les contefter
en 1661. Ils avoient fait prononcer la révocation
des exemptions non fondées fur bons & valables
titres. Ils y avoient même fait inférer nominative
ment l’Ordre de Malte. Dans ce même tems, le
V v
»-
PART IIL
Ch a p . m .
�O î$ )
Receveur au grand Prieuré de St. Gilles plaidoii
* contre les Confuls d’A ix , qui furent condamnés
honobftant l’Édit ou l’Arrêt de 1661. Ils le furent
encore en 1663, parce qu’il fut vérifié à toutes
ces époques que l’Ordre étoit fondé en bons & va
lables titres. Combien ne pourroit-on pas citer en
core de décifions, foit du Parlement, foit de la
Cour des Aides , foit du Confeil d’E ta t, intervenues
fur l’exiftence & la validité des titres portant cette
exemption !
Ces titres font de deux efpeces : Titres légiflatifs
exiftans de tous tems , &: tout au moins depuis le
commencement du treizième fiecle ; Refcripts des
Empereurs , Ordonnance d’Henri I I , la Clémentine ,
devenue en Provence loi politique & civile , les
Ordonnances rendues par tous nos Rois , & conftamment fuivies de régné en régné ; & toutes ces
loix frappent uniformément fur les reves de toute
efpece , fans en excepter aucune.
Titres exécutifs, remontant aux premiers âges
de notre Conftitution , qui, dans les cas extraordi
naires , où les deux ^premiers Ordres confentoient
des contributions volontaires, énonçoient les exemp
tions des Commandeurs ou de l’Ordre de M alte,
comme formant celles auxquelles il étoit le moins
(n?)
permis de toucher. .Les Arrêts de tous les tems 'ren- ~
l m
PART III
d u s, même avant l’annexe de la Clémentine; le riIA '
vœ u de tous les Auteurs locaux, le fait de tous
les AfTefleurs qui avoient conftamment reconnu l ’jexemption. La queftion avoit été développée dans
tous fes rapports, lors de l’Arrêt rendu en 1764,
fous les yeux des Adminiftrateurs des feux , qui fourniffoient alors tous les titres à la CommunaUté de
Ceirefte. Cet Arrêt n’avoit été rendu que fur l’exa
men le plus ■ réfléchi des deux points ci-devant an
noncés : i ° . Les reves font-elles fufçeptiblçs d’exempt
tion ? z°. Les titres de l ’Ordre de Malte font-r ils
fuffifans ? La Cour des Aides n’avoit douté, ni fur
l ’ un, ni fur l’autre. Les principes de cette matière
font-ils donc verfatiles ? & ce qui avoit paru jufte
dans tous les tems, & notamment en 17 6 4 , dans la
caufe de la Communauté de Ceirefte, dont les Adminiftrateurs des feux connoiftbient & alimentoient la
eonteftation , a-t-il pu changer de nature , & devenir
in jufte en 1779 , lorfque les Adminiflrateurs des
feux , identifiés avec les Confuls d’A ix , font venus
au fecours de cette derniere Municipalité , déjà
condamnée cent & cent fois , &. par tous les Tri-*
bunaux, fur le même objet ?
Ces réflexions nous paroifTent néceflaires, parce
V v ij
*
�Cependant les deniers procédant de ces levées,
font patrimoniaux. Ils fuppléent à l’infuffifance de
l’impôt fur les fonds. Dans plufieurs Cités , ils en
fupportent tout le fardeau ; ôt prefque par-tout où
C' m 1 )
,
.
.
■
bant fur le pauvre Peuple, & foulageant ou affratt- =?
ohiflant les fonds, préfenteroit des réflexions que1 C H A P‘ .m 1.
nous nous abftenons de développer , parce que l’objet
de ces ôbfervations, ert d’écarter tout ce qui polir-:
_* ,0
,
r
K
roit être pris, comme renfermant, ou la CritiqueX
- r
*
»
•
/ î T ■; T
de l’Adminirtration, ou un reproche d’abusv Mais peut-on fe garantir du fenthhént d e fu f-1
prife , quand on confidere que les queftions de cétte*
efpéce ,' s’élèvent dans les grandes Cites:, oùFles fonds1
ne'payent rien, & dans lefqu elles la mafle^ entière'
«
de l’impôt eft prife & pàyéé fur le produit des re-'
Vds?*B o r n o n s encore !ici nos Réflexions, &t contentons-nous d’obferver que nous fommes citoyens,'
comme tous Ceux qui pourront nôus; reprocher dë
ne pas l’être. Nous laifloitë aux -Communautés du*
P a y s, le droit néceflaire Bt par elles acquis, d’éta
blir des reves, Bc de difpôfer de leur produit; mais
nous arrivons à ce buî", en fuivant notre Conftitution , & nous établirions le droit général, en con-Y
j •
r*
; r
r
• -.
y
fervant les prérogatives de tous les Ordres. Il faut
fur-tout conferver les droits inconteftables de l’Ordre
de Malte , qui doit fon établiflement à la Provence ;
dont les Membres ont eu de tous les tems le.
droit de fiéger , & de voter dans les Etats de la
les revts exiftent, Timpôt fur les confommations ton>
N ation; de cet Ordre hofpitalier, militaire. & fou^
(M°)
que POrdre de Maflte appartient à la Noblefle ;* parce
*-^T‘ m* que plufieurs ouvrages ont jetté même fur l’impôt
CHAP, III*
des reves, le germe de plufieurs erreurs, condam
nées par notre Conftitution ; parce que les Sei
gneurs o n t, fur cette mafiere , dans leurs F ie fs ,
des droits conftitutionnels, qu’il importe dé conn o ître
'& de fixer.
' '
\_
. . .
Ainfi la matière des reves eft très-fufceptible d’exemption. Les Communautés ont le droit de les
établir. Mais elles ne tiennent ce droit que de la
conceflion du Souverain ; conceflion favorable , fil’on véut;, mais [ c o n c e f lio n ,- dont les traits bien
marqués par nos anciens Etats , préfentent encore,
dans la marche de nos ufages aftuels, les vertiges
de fon ancienne origine ; conceflion qui ne peut
que rendre abfurde le projet de vouloir limiter ,
quant à c e , le pouvoir du Souverain : car fi le
Prince pouvoit ne pas permettre , il pouvoit, à plus
forte raifon , ne permettre qu’avec des réferves &
conditions.
j, y
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lité p ^a£q, -adoptée comme légale par le nouveau
Commentateur de nos Statuts , & dont l’iliufion a
été ci-devant démontrée. La fi&ion ne peut pas
rendre réel ce qui eft fpbftantiellement perfonneh
L a fiction imite la Nature y mais elle ne peut la
contrarier. Il eft vrai qu’un ouvrage fait à Paris ( 1 ) ,
nous attefte que les reves font réelles en Provence,
v_
C 545 >
y
- \feraiflj dont le fmge principal dans Pille de Milite ,
* fërt de barrière , de défenfe & de refuge aux poVts,
havres , & navires de la Méditeranée y qui verfe une
grande partie de fes revenus dans 1g. Province , où
fe trouve une de fes principales recettes, & dont
l ’Hôpita.1, ouvert aux Marins de tontes les Nations ,
fournit journellement les feçours les, plus abondans
& ^es plus utiles au^ Matelots de Provence. Il eft
4onç bien ^tonnant que fes droits , reconnus par
tout ailleurs* n’aient été attaqués, qu’en Provence ;
plus étonnant encore, qu’un Afrêt les ait anéantis.
Cet A rrêt, attaqué au Cçuifeil, n’eft q u ’u n atten
tat, tant à notre Çonftitution, qu’à l ’autorité de
no.s Rois y
tout cela devoit fe dire ic i, parce que
cet Arrêt eft pofé fur la bafe erronnée de la réa
,
( 1 ) Répertoire uniyerfel & raifonné de Jurifprudence, tom, iy 3
r°, Reves.
mais cet article n’èft que copié' du nouveau Com*
mentaire de nos Statuts y & l’on a déjà vu que cet
ouvrage fuppofe la réalité des reves, ftns la prouver. Il ne faut donc pas être furpris, fi le Magiftra;
de la Cour des Aides, ci-devant cité, attefte, comme
un principe, que les reves forment un impôt per-*
fonnel.
--------------
-
CHAPITRE
•
4
I V.
Continuation & fin du même fujet.
. .
a d é jà d i t q u ’i l n e f a u t p as confondre avec
les reves établies par les Communautés, ces impofitions générales que les Etats peuvent délibérer fur
les confommations. Ces dernieres impofitions font
établies par la Nation entière y elles font confenties
par tous les Ordres, qui peuvent dans ce cas re*
noncer à leurs exemptions. Nos anciens Etats en
offrent des exemples. On y voit, dans des tems dif
ficiles , un impôt établi par tous les Ordres y on
peut même dire qu’en exaéfe réglé leur vœ u , quant
à c e , n’eft pas même fubordonné à la permiflion
du Souverain. Dans ces mêmes Etats les trois Ordres
demandent pour les Communautés du Pays la permifO
n
fion d’établir des reves. Nous n’avons pas befoin de
�1 344)
faire fentir la différence de ces deux hypothefes.
La Nation entière a des droits que les Communautés
n’ont pas. Les exempts renoncent dans les Etats à
des exemptions dont les Communautés ne peuvent
pas les priver. Chaque Communauté doit ouvrir fes
portes, fon habitation 8c fes. commodités à ceux qui
doivent en jouir. Il ne leur eftpas donné d’impofer
fur l’induftrie, fur le commerce , ni même pour les
rues broyées par les voitures étrangères, 8c dont
l ’entretien eft à la charge des Cités. Les Arrêts font
fans nombre fur cette matière, 8c ces Arrêts forment
tout autant de m a x im e s . L a N a t i o n n é a n m o i n s auroit
ce droit ; elle pourroit en u fe r, foit pour fon plus
grand avantage, foit pour le foulagement des fonds,
foit pour trouver dans une caillé commune de quoi
fupporter plus facilement ou même en entier les
charges auxquelles tous les Ordres contribuent.
Nous avons déjà d it , 8c nous croyons l’avoir
prouvé, que la communion générale du Pays de Pro
vence n’efl: autre chofe que celle des feux. Les Fiefs
en l’état fupportent proportionnellement l’abonne
ment des vingtièmes , celui de l’impôt fur les huiles,
ainli que la portion des frais impofée fur les feux
pour la conftruftion du Palais. Tout cela tient
aux principes que nous avons développés dans la
fécondé
( 345 )
fécondé Partie de nos Obfervations, relativement à
chacun de ces objets. Voilà donc des dépenfes aux
quelles les Fiefs contribuent. La Nobleffe a de plus
offert une contribution proportionnelle fur les che
mins. Ne pourroit-on pas établir une reve générale
qui ferviroit au paiement de toutes ces charges, 8c
dont le réfidu feroit employé à des objets utiles?
Il exiffe des établiffemens de cette efpece dans d’autres
Pays d’Etats. Il feroit heureux pour tous les Ordres
qu’on pût en former un pareil en Provence. Nous
en jettons ici le premier germe, dont le développe
ment, élaboré comme il peut l’être, pourroit pro
duire les plus grands biens , 8c fur-tput celui de la
conciliation que tout Citoyen bien intentionné doit
avoir en vue. Nos peres nous en ont donné l ’exemple
dans des tems difficiles. En 1391, dans les années
fuivantes 8c dans les tems des malheurs qui fuivirent
la funefte journée de P avie, ils laiffoient fubfffter
l ’impôt prédial, parce que la calamité ne doit pas
affranchir les rotures ni dégrader les Fiefs. Ils établiffoient en outre des reyes générales , votées fans
difficulté par les trois Ordres, 8c que les deux pre
miers fe faifoient une gloire de fupporter , conjoin
tement avec le troifieme, 8c proportionnellement,
foit aux revenus, foit aux confommations.
X x
�C *46 )
r><~
par
r. ni.
( 347 )
!► * *"
CHAT. V .
C H A P I T R E
-f
.
.
V.
Réponje à quelques Objections.
—
' V O I L A notre tâche remplie ; 8c nous nous rendons
cette juftice intérieure, que nous n’avons voulu
offenfer perfonne, ni rien altérer de tout ce qui
peut toucher à la Conftitution du Pays de Pro
vence. S’il s’eft g 1ifle quelque erreur dans notre
difcuflion , nous fommes prêts à la rétraéter ; 8c
nous aurons de plus des grâces à rendre à ceux qui
nous auront redreflës.
On voit à préfent ce qu’il faut penfer des trois
ouvrages dont nous avons entrepris la réfutation.
II- n’eft pas étonnant que n’ayant que l’erreur pour
guide , leurs auteurs aient varié fur les principes qui
dévoient fervir de bafe à l’établiflement de leur
fyftême.
L ’Auteur du traité furj les Contributions, infinue
dans fon ouvrage, i°. que les Fiefs doivent être
fournis à contribuer à toutes les levées, tant pour
les deniers du R o i , que pour ceux du Pays ; z°.
que cette contribution, qu’il veut rendre univerfelle , avoit exifté dans tous les tems , qu’elle eft
même légitimée par les titres eonftitutionnels, qui n o w r e r r e n
PART. III.
comme on vient de le v o ir , en repouiïent invinci
c h a p . y.
blement le fyftême, en déclarant les Fiefs exempts
de toute levée , tant pour les deniers du R o i, que
pour ceux du Pays.
Mais le même Auteur a cru devoir préfenter enfuite un plan plus mitigé dans l’Affemblée des Coin,
munautés, où l’on fe replie fur les dépenfes com
munes , dont on veut faire partager le poids aux
deux premiers Ordres ; ce qui préfente une double
erreur , en confidérant le don gratuit Sc les frais
du fervice m ilitaire, comme dépenfes communes à
tous les Ordres , tandis qu’il eft confiant que ces dé
penfes ne font point, par leur nature, dépenfes de
communion , mais bien charges naturelles, légales 8c
conftitutionnelles des feux ; z°. en énonçant la com
munion générale du Pays de Provence , comme formée
par les biens de l’ancien domaine de l’Eglife , par
les Fiefs 8c les feux , tandis qu’en exafte réglé , 8c
d’après tous nos titres, la généralité du Pays n’eft
formée que par les feux , poftedés par les trois Or
dres , & fournis dans tous les tems à toutes les char
ges , tant royales que de la communion.
Et voilà pourquoi, comment 8c dans quel fens
les Procureurs du Pays font les Procureurs des trois
X x ij
�( 348 )
= Ordres. Ils en ont le mandat pour tout ce qui tou*
PART.
*II# che l ’Admiiiiftration des feux , repréfentant la gé
CHAP.
néralité du Pays de Provence. Les Procureurs du
Pays nés 8c joints, leurs Affemblées même renfor
cées , n’ont jamais pu rien ftatuer de valable contre
les droits des deux premiers O rdres, autres que
ceux qui peuvent intéreffèr leur propriété fur
les feux. L ’Adminiftration des Fiefs n’a rien de
commun avec celle des feux. Elle a fon régime à
part ; régime indépendant de la généralité du Pays ,
qui n’eft 8c ne peut être formée que par les feux.
Nous pourrions en dire autant du Clergé , qui
n’entre, dans la communion générale, qu’à raifon
des biens taillables qui font poffédés, foit par l’Eglife , foit par fes Membres.
L ’Auteur du Traité du D roit public dément pleii
nement les principes du Traité fur les Contributions.
Après une difcuflion qui n’a rien de complet ni
d’exaft , frappé par les difficultés que les titres locaux
lui préfentent, il coupé Je noeud, qu’il fent bien
ne pouvoir pas être délié ; 8c d'un trait de plume j
il condamne les titres 8c les propriétés des deux pre
miers Ordres (1 ). Jl efface toutes les D octrines,
( 1 ) Cet Auteur affe&e toujours de confondre les biens nobles
dans la généralité du Pays. Il raifonne à la page 103 fur l’Or-
(3 4 9 ;
toutes les maximes , 8c révoque, tant les Ordon
nances intervenues , que les Arrêts progreffivement
rendus fur la matière des contributions.
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dormance de Charles I X , du 21 O&obre 1 5 7 1 , qui porte , con
formément à celle de François Premier de 1542 , qu’il faut veiller
à ce qu’aucun abus , fraude ou larcin ne fujfent faits au mande
ment des deniers communs du Pays & Comté de Provence qui font
levés & mis fus par les Gens des trois Etats audit Pays pour les
affaires des guerres ou autres affaires du Roi ou d’icelui Pays. Il
veut induire de ce trait que les deniers étoient levés, tant fur les
feux que fur les Fiefs, &: les biens de l’ancien domaine de l’Eglifej
& tous nos titres prouvent que ces deniers n etoient levés que fur
les feux. Ils étoient communs aux trois E tats, impofés par eux,
parce qu’ils étoient fupportés par les trois Ordres fur la généralité des
biens roturiers par eux indiflin&ement pofTédés. 11 dit au même
endroit, que les Etais de 1624 établirent des impenfes pour les
chemins fur tout le Corps du P a ys, fans exception. Il veut donner
à entendre par ces mots que les Fiefs & l ’ancien domaine de
l ’Eglife furent compris dans la levée. Mais telle n’eft pas la difpofition du texte, qui dit dans le Réglement ci-deffus énoncé dans
la fécondé partie de nos Obfervations, chap. 13 , que jufques à
une certaine fomme les Villes & Vigueries Apporteront la dépenfe, &
que le reffe fera rejetté fur tout le Corps général du
Pays : o r, le Corps général du Pays n’a jamais confîflé que dans
les feux. D ’ailleurs, n’eft-il pas certain que les dépenfes des che
mins ont été prifes fur les feux dans tous les tems ?
A la même p a g e, l’Auteur cite encore les Etats de 16 18 , comme
�(35°)
Un troifieme Auteur s’efl mis fur les rangs ; c’effc
celui du Traité intitulé , Droit conflituiif. On y
( îs O
trouve des vérités fondamentales, même les titres de
PART. III.
notre union à la Couronne ; titres formidables ÔC CIIÀ?. v.
terraffans contre les fyftêmes novateurs, tendans à
changer la Conftitution & les droits des Ordres.
L ’Auteur paroît penfer que la reprife de nos Etats Pag. 37.
ayant defiré le vœu de l’Affemblée des Communes pour I’établiffement de l ’ordinaire en pofte. Cela- ne diroit rien fur la que Ri o n
des contributions. Mais le trait n ’eâ pas rapporté comme il devroit l’être. L ’Affemblée du mois de Septembre 16 17 avo.it déli
béré le traité de cet établiffement, fa u f L’approbation des Etats ,
& ceux de 1618 ratifièrent le traité. L ’Affemblée des Communes
s’étoit jugée elle-même. Elle avoit reconnu fon infufftfance ifur cet
objet, quoiqu’il fut entièrement à la charge des feux.
A la page 104, cet Auteur cite
Ertata de 1629 comme ayant
collcBivement offert & payé à Louis XIII la fomme de 900000 liv.
Nous avons le cahier de ces Etats. Nous y trouvons effe&ivement que le Roi demandoit, par M. de Bullion fon Commiffàire, la fomme de 1500000 liv. -, que le Pays en offrit 900000,
à la charge & condition de faire ceffer les créations & novations
dont on étoit m enacé, dans la levée de laquelle fomme feroient
comprifes les villes d’A rle s, M arjeille, Salon & Terres adja
centes, & autres Villes & Lieux exempts de la Province. Mais il
n y fut pas même propofe d’y comprendre les Fiefs & les biens
de l’ancien domaine de l’Eglife. Cette fomme fut offerte par les
E tats, comme toutes Les autres qui dévoient être prifes fur les
feux.
A la même page 104 , l’Auteur cite les Etats de 1 6 3 1 , ou l’on
agita., dit-il, la queftion de favoir fi la Noblejfie & le Clergé dé
voient payer leur contingent de l ’argent donné au Roi pour les
impôts & les impofiuions, iL’obfervation n’eft pas exaéte. En 163 r ,
le Roi demandoit 1500000, outre le doublement du taillon. Les
Etats délibérèrent d ’offrir les 1500000 liv., fous les conditions y
exprimées. C ’efl dans ces Etats que le Conful de Tarafcon fe
leva pour foutenir que le Clergé & la Nobleffe dévoient entrer
dans la contribution de cette levée paffagere. Ce Député reconnoiffoit pourtant que les biens nobles n’étoient pas fournis aux
tailles. Sa. motion étoit inconféquente, aurant qu’attentatoire à la
Conflitution. Tous les Députés des Communes déclarèrent pour
tant y adhérer. C ’étoit probablement un coup monté. Les deux
premiers Ordres réfifterent à cette entreprife, dont le mouvement
fut calmé tout de fuite, en convenant que la motion auroit l’effet
d’une proteftation. Les Etats délibérèrent, & firent de fuite un
traité portant offre des 1500000 liv., auxquelles les Communautés
qui fe prétendoient exemptes ne contribueroient pas, & fauf au
Roi d’impofer ces Communautés exemptes comme il le trouveront
bon. Mais ce traité ne fut pas ratifié par le Roi, qui fit demander
deux millions aux Etats de 1632., qui furent forcés d’accorder
effectivement les deux millions, fous la déduétion des fommes déjà
payées en exécution du traité de l’année d’auparavant. Ces Etats
furent tranquilles. On y reconnut fans balancer que la fomme dé
libérée devoit être Levée en entier fur les feux.
* >
�I
4
Ü P )
devoit produire la néceftîté de faire entrer les Fiefs en
PART. III.
contribution proportionnelle. On pou voit, s’il faut l’en
CH A P. V .
croire , dire aux deux premiers Ordres : V d u s voule^
concourir à l*Adminif l ration , contribue\ à fes frais.....
Vous voule^ voter dans les dons & fubfides ; /apporte%en votre portion : car il ne vous appartient pas plus
d'adminijlrer ce qui n efl pas à vous , que d'être libéral
du bien des autres. Ce raifonnement eft préfenté dans
cet Ouvrage comme conféquent. Il manque cepen
dant par fes deux bouts ; on l’a démontré. Le prin
cipe en eft erroné \ puifque les deux premiers Ordres
fupportent l ’impôt dans toute fa plénitude, quant
à ce qui concerne les biens roturiers formant la
généralité des feux \ puifque d’ailleurs le Clergé ,
? ér
C
U ic i.
tout comme la N oblefle, ' par l’éminence de leurs
Ordres, par les feigneuries qu’ils pofiedent, par leur
poffeflion antique 8c conftitutionnelle , auraient le
droit de délibérer dans les Aftemblées de la N ation,
comme repréfentant fes deux premières claftes, dans
le cas même où ils n’auroient au fonds aucune con
tribution à fupporter.
Cependant le même Auteur fent que l’argument
dont nous venons de renverfer les bafes , ne pourroit que conduire à des conféquences exceflives. Il
convient en termes exprès qu’il doit être réduit. Il
e ft,
C 353 )
eft, d it-il, des charges fur lefquelles le Clergé & ******
l’Ordre des Nobles ne peuvent pas être forcés à
entrer en contribution. Il en eft d’autres dont ils
doivent partager le fardeau avec le Tiers-Etat. De là,
l’Auteur ramene la diftin&ion des charges
ordinaires 40P
as- 3° &
O
.
& des charges extraordinaires. Les Fiefs & le Clergé
ne font pas fournis aux premières 3 ils doivent fup
porter les autres. Il fonde cette diftin&ion fur les
Etats de 1393 & fuivans, où l’on trouve des exem
ples de contributions volontaires occafionnées par
la révolte du Vicomte de Turenne, 8c dont on a
fi Couvent parlé. Mais il fe g a r d e bien de citer la
Déclaration donnée par Louis II en 1406, qui ex
plique les exemples dont on a voulu fi fouvent abufer ;
exemples qui étoient eux-mêmes des monumens refpeélables de nos vrais principes, puifqu’on y trouve
la preuve formelle de la liberté des contributions
faite par les deux premiers Ordres, 8c de la réferve
de leurs droits conftitutionnels.
Le même Auteur ajoute que la Nobleftè jouit de pag.
fes exemptions, à raifon du fervice militaire , 8c
que la Déclaration de Louis II le prouve. Com
bien d’erreurs dans ce feul mot ! i°. Qu’on ceffe
de confondre le fervice militaire, avec le fervice
perfonnçl du ban 8c de f arriéré - ban j 2°. ce fer1.
Y y
�C 354)
vice du ban & de Tarriere-ban eft plus que payé
par les charges que les Fiefs fupportent fur les
Vingtièmes 8c les droits établis fur les huiles ; $°. fi
çes droits n’étoient pas payés 8c furpayés par ces
charges annuelles, la Nobleflé n’auroit point d’im
pôt à fupporter. Ne lui fuffiroit-il pas de dire qu’elle
eft toujours prête à marcher ou à payer , dans le
cas de la convocation du ban 8c de l’arriere-'ban ?
Enfin la Déclaration de 1406 eft encore mal rap
portée dans cet endroit, puifque le fervice militaire
s’y trouve énoncé comme un des motifs , 8c non
Comme caufe unique de la p r é r o g a t i v e des Fiefs,
L ’ouvrage fe termine par une réflexion fur les
dépenfes communes. Les Fiefs en profitent , nous
a-t-on d it , pourquoi n’y contribueroient - ils pas ?
Parce qu’ils ne font pas dans la communion géné
rale du Pays ; parce que leur droit antique 8c conftitutionnel,‘ eft de ne pas entrer en contribution
pour la levée des deniers deftinés à payer la charge
royale 8c les dépenfes du Pays. On doit donc favoir gré à la N oblefîe, du confentement qu’elle
a donné fur quelques-uns de ces objets. Si les Etats
du Pays n’avoient pas eu lie u , on 11’eût pas ofé
propofer de forcer les Fiefs à des contributions
nouvelles. Quel doit être l’effet de la reprife de
nos Etats
?
(3 5 5 )
Celui de nous remettre , tant pour la
p— —
■ «
forme des Alîêmblées , que pour le fonds des droits PART*IlI‘
^
r
.)
C M A P .y ,
refpeâifs , dans la même pofition où tous les Or
dres fe trouvoient à l ’époque de 1639. Le Roi s’eft
expliqué^ là-defîus , quant à ce qui concerne la forme.
Les Etats de 17S7 ont été convoqués; ils ont été
tenus comme l ’auroient été ceux de 1640, fî la
convocation n’avoit. pas été fufpendue : or, le vœu
de juftice que le Souverain a fait éclatter fur la
forme, ne milite-t-il pas encore avec plus de vigueur
fur le fonds des droits conftitutionnels appartenant
à tous les Ordres en général 8c à chaque Ordre en
particulier ?
On s’eft inftruit, depuis que l’on agite de la part
du Tiers la queftion des contributions. On a fenti
que les vrais principes de la Conftitution provençale
avoient été méconnus dans tout ce qui avoit été dit
jufqu’à préfent fur cet o b jet, 8c que la Nobleflé
ne manqueroit pas de les invoquer avec le plus
grand fuccès, quand ils feroient bien connus. On
a faifi le mot de l’Auteur du Droit public, j'efface
tout par un trait de plume, comme un germe heureux
qu’il falloit échauffer 8c féconder. Les titres font
pour vous , dira-t-on à la Nobleflé, quand ces titres
a.uront fait leur explofion ; mais peut-il exifter des
; Y y ij •
�C? s O
établiflemeiis , même conftitutionnels, qui contrarient
le droit naturel & l’ordre public ? De là vient un
nouvel Ouvrage ( i ) qu’on vient de lancer, pour nous
apprendre qu’il faut brûler titres 8c Chartres , 8c non
maintenir la Conftitution telle qu’elle eft, mais la
créer telle qu’elle devroit être.
On y d it, (j. 6 , que le Tiers-Etat efl la Nation >
moins le Clergé & la Noblejje. Ne peut-on pas en
dire autant de chaque Ordre en particulier ? Ne
forment-ils pas la Nation moins les deux autres ?
Ne devroit-on pas le dire à plus forte raifon de
chacun des deux Ordres qui primitivement compofoient la Nation entière , à l ’exclufion du troifieme ?
Mais ce m ot, quoiqu’inutile 8c peut-être mal-adroit,
prépare un argument qu’on a voulu rendre trèsimpofant. Le Clergé fera compofé de deux ou trois
cent mille individus. Suppofez-en tout autant dans
l’Ordre de la Nobleffe. Doublez ce nombre, fi vous
voulez , 8c raifonnez fur les deux premiers Ordres,
comme s’ils fournilïbient un ou deux millions de
perfonnes. Il reliera toujours vingt-quatre millions
d’hommes dont le troifieme Ordre fera compofé, qui
( i ) Conlidérations très-importantes pour l’intérêt du Tiers-Etat,
adrelTées aux Peuples des Provinces,
O 57)
n’ont point de privilège. Ces vingt-quatre millions - .l
1
u
t
' part. Il
d’hommes forment le Corps de la Nation, la pépi- cHAp‘
niere des Nobles & du Clergé : pourquoi feront - ils
traités en efclaves ? Pourquoi fupporteront-ils tout
le poids de l’impôt ?
Mais remarquez que fur ces vingt-quatre millions
d’hommes, il en efl: au moins vingt-deux à qui le
poids de l’impôt réel 8c territorial efl indifférent,
ou, pour mieux dire, qui feroient plutôt intéreffés
à demander cet impôt unique, parce qu’ils n’auroient
rien à payer fur les confommations. Sur les deux
millions qui relient, vous trouverez plufieurs poffefleurs de fonds exempts, qui vous diront qu’il faut
refpeêter les titres 8c les pofleflions. Vous y trou
verez encore des hommes juftes, aimant l’ordre &
la paix, qui tiendront le même langage , fans intérêt,
8c même contre leur intérêt perfonnel. Il vous reliera
fans doute une grande partie de ces deux millions
d’hommes qui continueront de crier à l’égalité , qui
vous diront que la diflinêlion des biens blelfe les
principes du droit naturel 8C de l’ordre public. Mais
vous leur direz que le droit naturel n’efl pas le droit
dépuré nature j que quand les conventions font faites,
quand les Nations font formées, quand les Conftitutions font établies, le droit naturel 8c l’ordre
�(?S8)
111 ........ public s’unifient pour exiger que chaque Ordre 8c
p a r t . ni.
j
jn(jjv icjus j e chaque Ordre confervent leurs
titres 8c leurs propriétés, jus Juum cnique tribuere.
T el eft le premier principe du droit naturel , du
droit public 8c du droit politique. Le Jurifconfulte
Sc l ’homme d’Etat ne peuvent pas en adopter d’autres.
Q u’importe que le troifieme Ordre foit la pépinière
des deux autres ? Peut-il en naître d’autre conféquence
que celle qu’il faut entretenir le principe d’émula
tion 8c d’aftivité qui donne aux membres de la
troifieme clafîe le defir de monter aux premières ?
Cette roue efl: efientielle pour la profpérité de l’Etat;
& quand les mouvemens en font bien réglés, ils
font concentriques avec ceux de la roue de l ’intérêt
général. Si par contraire ils font divergeas, ce n’eft
pas la faute du Gouvernement ni de fes L oix ,
mais celle de l’ambitieux qui veut en abufer ou les
détruire.
L ’Auteur voudroit abolir toute diftin&ion d’état
dans les Afiemblées de la Nation. Mais s’il n’exifte
point de réglé là-defi’us , n’aura-t-on pas tôt ou
tard les défordres de la difcorde à redouter ? S’il
faut régler les,préféances 8c les diftinftions , pourra-ton fe difpenfer de les accorder aux membres des
deux premiers Ordres? Seroit-il poflible, feroit-il
C3 59 >
même convenable de les en. dépouiller, quand ils
pnt pour cela titre 8c pofleflion?
1 ÇHa p . y .
Les E tats, ajoute-t-on , font des Afiemblées con*
tribuantes. Il faut donc y entrer pour contribuer
comme les autres , ou n’y entrer pas. Combien d’er
reurs dans ce feul mot ! D ’abord, les Etats font
des Afiemblées contribuantes ; mais ils ont aufii des
Réglemens à faire fur une foule d’autres objets•
D ’autre part, où trouve-t-on que pour entrer dans
les Etats , il faut contribuer comme les autres ?
Fallût-il fuppofer la nécefiité de la contribution gé1 jft'
nérale , la maniéré de la remplir pourroit entrer
dans les droits de chaque Ordre en particulier. Ou
trouve-t-on encore que les deux premiers Ordres
ne contribuent pas? Ne fupportent-ils pas les ving
tièmes , la capitation, 8c tous les impôts quelcon
ques qui font afiis fur les confommations ? Ne les
fupportent-ils pas avec plus d’excès que tous les
membres du Tiers-Etat ? N’entrent-ils pas d’ailleurs
en contribution , comme ces derniers, pour toutes les
rotures qu’ils pofledent ?
N ’ouvre^ point nos livres, dit-on encore, vous y
trouveriez toutes les contradictions. Mais entend - on
comprendre dans cette profcription , nos Chartres ,
nos voeux nationaux, 8c tous les monumens de nos
�C j6 o )
droits coüftitutionnels ? Si on veut les détruire, on
PART. III.
eft donc incendiaire. S'il faut les laiflér fubfifter, tous
«HAT, V.
nos livres font bons à garder , ils ne font rien de
plus que l'explication 6c la cle f des Conflitutions.
Ne confulte\ pas > dit-on encore au T iers-E tat,
la conduite de vos dieux. Ils nav oient point de priacipes & ils étoient avilis. Mais pourquoi ne pas
voir que nos aïeux étoient guidés par des titres ÿ
que loin d’être avilis , ils avoient autant 6c peutêtre plus d'énergie que la génération préfente ? Pour
quoi ne pas voir que les titres conftitutionnels, dont
ils fuivoient les principes, établiffoient a l o r s le droit
de propriété, 6c qu'ils le gouvernent encore ; 6c
qu’eft-ce que le prétendu bon fe n s , fous lequel on
voudroit faire plier toutes les Conftitutions, finon
la perverfion de tous les titres , 6c par conféqucnt
celle de tous les droits ?
Reprenez votre place & votre afeendant, car vous
êtes la Nation. On ajoute dans un autre endroit,
que les deux premiers Ordres ne font que dans la
Nation. Le troifieme Ordre abforberoit donc les
deux premiers. Pourquoi l’exhorter à reprendre une
place 6c un afeendant qu’il n’a jamais eus ? Ne falloit-il pas au moins lui parler avec franchife, 8c lui
j
dire : ufurpez l’un ôc l ’autre ?
Nous
Ç f* 0 ’
Nous ne parlerons pas ici des vrais intérêts du
Roi y ce que nous pourrions en dire n’entre pas
dans notre plan , 6c la difcuiïion ne nous appartient
pas plus qu’à l’Auteur des Obfervations très-impor
tantes. Mais peut-on laifler paffer ces proportions
étonnantes , que les Corps particuliers font les enne
mis naturels du Roi & de la Nation ; que le troifieme
Ordre a le mérite de ne s’être jamms oppofe à l'Au
torité royale , qui a fouvent trouvé des embarras 6c
des obftacles dans la lutte de divers Corps ? Qui peut,
à plus jufte titre que la Nobleife , fe préfenter
comme le foutien du Trône 6c de l’honneur de la
Nation ?
Le troifieme Ordre , nous dit-on, ne demande
que la liberté dans fon induflrie. Mais qui la lui
contefte ? Les deux premiers font prêts à s’unir pour
lui conferver cette liberté commune à tous les mem
bres de la patrie. La Noblefle demande la confervation de fes titres, foit d’honneur, foit d’exemp
tion. L ’opération qui tendroit à l’en priver, feroit
tout à la fois la plus extravagante 6c la plus injufte. Il ne faut pas dire qu’elle ne veut pas contri
buer , puifqu’elle contribue fans contradiction. Mais
le point à difeuter eft de favoir fi elle doit con
tribuer autrement qu’il n’efl: porté par fes titres, fi
Z z
�( ? 6 i)
- -j”
les formes & les proportions antiques doivent être
chap. y.
abrogées , les droits de propriété détruits , fous pré
texte de faire fortir Vordre du défordre même, &
dans le fonds, pour faire éclorre les plus grands défordres , dont l ’objet 8c l’effet ne pourroient être
que celui de tout confondre dans le troifieme O r
dre , 8c de rendre le Peuple Roi.
Et quand on parle de l ’intérêt général, peut-on
entendre autre chofe que le maintien de la paix
8c de l ’union de tous les Ordres ? Mais pourroit - on trouver la paix dans l ’abolition des prin
cipes de chaque Conftitution ? Pourroit-on fe flatter
d’entretenir l ’ordre 6c l’union dans la fubverfion
générale de tous les titres 8c de tous les droits ,
même de celui de propriété ? L ’union fe maintient
& fe fortifie par la# tendance de tous les Ordres
vers le bien commun. Mais chaque Ordre ne doit
y vifer qu’en raifon combinée de fes forces 8c de
fes droits ; & les biens non impofables par Confti
tution , ne doivent jamais être impofés.
Nous ne dirons rien fur l ’abolition des pouvoirs
intermédiaires. Cette matière eft étrangère à la queftion des contributions ; 8c nous nous difpenfons,
par la même raifon, de traiter des intérêts particu
liers des Corps, 6c de la diftin&ion des rangs dans
/
(363)
un Etat. L ’Auteur des confidérations importantes ne ^ _ J!5
dit rien de nouveau fur cet objet, rien qui ne foit lART* 111
'
.
CHAP. V.
fapé par les réflexions de M. de Montefquieu. C ’eft
t
4
par la force 8c la bonté de fa Conftitution ,
que la Monarchie s’eft foutenue jufqu’à préfent ,
quelquefois même par fes propres forces , 6c par la
bonté de fon organifation. Sa permanence n’eft pas
un jeu de la fortune 8c du hafard , qui nont pas
ces fortes de confiance. Nous l’avons dit ; 8c plus
on lit l’ouvrage que nous difcutons , plus on trouve
à fe convaincre que fon Auteur veut tout concen
trer dans le Peuple ; 6c d’après fes principes bien
combinés, le Peuple renverferoit le Trône, après
en avoir brifé les marches.
On y difcute enfin les privilèges de la Nobleffe,
qui font de deux efpeces ; privilèges d’illuftration,
8c privilèges d’exemption. La diftinâion eft bonne ;
mais quoiqu’on en dife , la Nobleflé héréditaire eft
effentielle à conferver, fur-tout dans une Monar
chie. Par ce moyen , l’amour de la gloire parcourt
toutes les générations. Le pere s’illuftre pour fes
enfans , qui contractent l’obligation de lui reffembler. Si par leur naiffance , ils font plus raprochés
des décorations , ils font par elles plus efîentiellerçient dévoués aux principes de l’honneur 6c de la
Z z ij
/
�C?64 )
vertu. Cet heureux germe eft précieux dans tout
les tems , & fur-tout dans ceux de vertige & d’égoïfme , où les Ecrivains rapportent tout à leur
fens , & les hommes à leur intérêt perfonnel.
Les exemptions, ajoute-t-on , font mal entendues
dans leur origine. Elles grèvent la maffe commune ;
elles font funeftes dans leurs abus. C ’eft ce qu’on
pourroit dire contre les grâces perfonnelles, qui ne
feroient pas fubordonnées à des loix publiques , &
qui feroient, par cette raifon , fufceptibles d’une
extenfion arbitraire &t abufive. Mais il n’en eft pas
queftion ici ; nous parlons de l’impôt réel, 8c de
l ’exemption réelle. L ’Auteur des confidérations im
portantes trouve dans nos principes Vabus le plus ri
dicule de tous } eh quoi , dit - i l , les champs font
exemptés comme les hommes ! Ils jouiflent aufli de
la Noblefle héréditaire! La moitié des campagnes du
Royaume efl parvenue à fe faire exempter , fous le
titre pompeux ou plutôt barbare , de F ie f !
Mais pourquoi parler de l’exemption réelle, comme
d’un privilège , tandis qu’elle forme une propriété ?
Pourquoi parler d’exemption , tandis que la préro
gative féodale a précédé même la contribution des
rotures ? Pourquoi diflimuler que les Communautés
feigneuriales qui contribuent à la mafte de toutes
( ? < 5S )
les impofitions, ne fe font formées que par les démembremens des F iefs, qui ne dévoient &. ne pouvoient être fournis à d’autres devoirs qu’à celui du
fervice perfonnel ? Pourquoi confondre encore la
charge de- ce fervice , avec la charge indéfinie du
fervice militaire , qui n’a jamais ceffé d’être fupportée par les Communautés ? Pourquoi dégrader les
F iefs, fous le prétexte de ce que le fervice p e r f o n n e l
du ban & de l’arriere-ban ne fubfifte plus, tandis
que l’obligation fubfifte ; tandis que , le cas échéant,
elle peut être remplie, ou en nature , ou par des
équipollens pécuniaires ; tandis qu’elle eft plus que
remplie par les preftations d’argent auxquelles les
Fiefs font a&uellement aflujettis ? A-t-on pu férieufement fe permettre l’expreffion du fyftême d’é
galité , entre les Fiefs & les rotures, tandis que ces
propriétés fe trouvent diftinguées conftitutionnellement par des caraCteres qui mettent la valeur & le
prix des unes , au double du prix
de la valeur
des autres? Et s’il s’agiffoit de donner un rempla
cement du fervice perfonnel auquel les Fiefs font
fournis, fi ce remplacement n’étoit abondamment
payé par les Vingtièmes, qui pourroit contefter à
la N oblefle, le droit de dire que la Charge primitive
cafuelle des F ie fs , devroit toujours être telle ,
�0 67>
( i 66)
ll
- ,r,a* que tous les autres impôts tombant fur les rotures,
•a r t
iii .
1
1
çfiap, y. & les Fiefs ne fupportant que le repréfentatif du
fervice perfonnel, clans le cas ou de droit il pourroit écheoir, la diftinêtion entre les Fiefs & les
/
rotures, feroit toujours la même.
On fent que les droits des Fiefs font une pro
priété. On prévoit l ’obje&ion: mais l ’a-t-on réfutée?
Pouvoit-on meme la réfuter ? On a dit au troifieme
O rd re, que quand la Noblefîê fairoit valoir fon
droit de propriété, il répondroit à fon tour que
fes champs font auffî des propriétés ; qu’il les a acquis
lorfqu’ils ne portoient qu’une certaine taxe dont il
fupporte aujourd’hui les accroiffemens comme impofition nécejfaire à la chofe publique ?
Mais n’a-t-on pas dû voir que les biens roturiers
exiftent dans le commerce comme contribuables * à
tous les impôts fans lim itation, tandis que les Fiefs
font affranchis fans lim itation, de toute charge
d’im pôt, foit r o y a l, foit de communion ? A la bonne
heure que les Fiefs doivent le fervice ou de la perfonne ou de l’argent repréfentatif du fervice per
fonnel ; mais n’eft-il pas certain en droit qu’ils ne ’
le doivent que dans le cas échéant ? N ’eft-il pas
certain en faitf^qu’ils payent infiniment au-delà de
«e que la charge de ce fervice pourroit comporter?
Que deviennent à préfent ces idées vagues d'une
grande propriété commune > dont toutes les propriétés
particulières J ont tributaires ; qu 'aucune ne peut être
difpenfée de fervir la propriété commune? N’eft-il pas
encore plus vrai que chaque propriété doit coopérer
au fervice commun, fuivant fes droits & fes obli
gations conftitutionnelles ; que la Conftitution eft
la réglé générale de la communion ; qu'il faut placer
chaque perfonne 6c chaque immeuble dans la claftê
que la Conftitution lui donne ; que nous avons des
Loix dont on ne peut brifer le frein , 6c que fui
vant ces Loix , l ’impôt dans fa plénitude tombe fur
les rotures, tandis que les biens nobles ne font
fournis qu’au fervice perfonnel ?
On peut, après cela, infifter tant qu’on voudra
fur V équité générale , fur une juflice compofée de l'in
térêt de tous , devant laquelle les équités particulières
difparoijjent & deviennent quelquefois des injuflices.
La pompe des mots ne couvre pas ici le vice de
l’objeêtion. Les Loix fous lefquelles la Nation s’eft
conftituée, fous l’empire defquelles elle a promis de
vivre & de maintenir tous les Ordres qui la compofent, font éternelles comme la Conftitution. Il
faut donc refpe&er la prérogative particulière fur
la tête de chaque propriétaire, & la prérogative
�0*8)
i ■■■■■«■ générale fur la tête de tous. Ces principes étoient
chap
reconnus par nos peres dans des tems ;neme plus
difficiles que ceux d’aujourd’hui , 6c les reflources
des feux pour le fupport des charges étoient infini^
ment moindres. Nos Etats fe font toujours affemblés pour le bien commun, avec la foumiffion de
la part de chaque Ordre d’y contribuer chacun dans
fa partie , fuivant les Loix publiques 8c locales de
la Nation.
En effet, auroit-on convoqué les trois Ordres pour
étouffer la Conftitution à l’encontre des deux pre
miers ? Si tous les Ordres font c o n v o q u é s , c’eft
pour le bien commun, 6c pour rendre à la Confti
tution toute la force qu’elle doit avoir. Les deux
premiers Ordres y font pour délibérer, comme le
troifieme pour voter fur tous les objets : 8c combien
de titres n’ont-ils pas pour délibérer , même fur
l’impôt dont par furabondance ils fupportent le
fardeau ?
Nulle fociété , d it-o n encore, n’a jamais com
mencé 6c ne commencera jamais de maniéré à fouf-<
traire une partie des biens au paiement de l’impôt;
Mais qui ne fait que toutes les fociétés générales
qui exiftent en Europe , font formées fur le plan
d’une pareille inftitution ? Les poffeffeurs des Fiefs
s’armoient
( 569)
s’armoient dans le cas de guerre ou d’invafion. Les
poffefleurs des domaines ruraux payoient l’impôt.
Q ui ne fait que les Communautés feigneuriales fe
font formées, 8t que les feux fe font accrus au dé
triment des Fiefs , fous l’empire 6c fur la foi des
principes conftitutionnels ? Jamais la prérogative
des Fiefs ne fut plus reftrainte qu’elle l’eft aujour
d’hui. On fuppofe dans les C o n f i d é r a t i o n s impor
tantes , que les biens nobles compofent la moitié des
biens du Royaume. Les revenus nobles, dont la
plus grande partie confifte en droits feigneuriaux,
n’en f o r m e n t pas le quarantième. Les immeubles
féodaux arriveroient à peine au centième de la malle
entière des rotures qui fupportent l’impôt réel. On
fe permet donc le double excès d’exagérer les faits
outre mefure , 8c de combattre les principes fonda
mentaux qui régiffent le droit inaltérable de pro
priété.
Et qu’importe à notre queftion, que l’Europe ait
pris , depuis plus d’un ftecle, une face nouvelle ?
que la fociété fe foit améliorée du côté des arts 6c
des fciences ? que la France foit dans la plus heureufe de toutes les pofitions? qu’elle puifiè ou don
ner des Loix à toute l’Europe, ou s’en rendre l’ar
bitre? Tout cela n’effleure pas même la queftion
A aa
�C Î7°)
des contributions. La prérogative des Fiefs n'ent*
leve rien à l’Agriculture , ni à la liberté du Com
merce. Il faut refpecler les droits *lu Tiers-Etat. V oilà
le feul mot qui doit faire la loi commune. S’il faut
refpeéïer les droits du troilîeme Ordre , il ne faut ,
donc pas lui donner des droits que la Constitution
lui refufe. Il ne faut pas dégrader une propriété ,
pour améliorer les autres* Quand on parle des droits,
peut-on entendre autre chofe que des droits acquis,
des droits légitimes , des droits conftitutionnels , 8c
fur-tout de ceux qui touchent à la propriété? Fau
d r a - t - il anéantir des droits réels, p o u r en créer
d’illufoires ? Et s’il faut reipefter les droits du TiersE tat, le même principe ne conduit-il pas à refpeôtçr
la prérogative 8c les droits des Fiefs ?
Mais d’où peut donc venir cette infurreétion,
contre ces droits légitimes , 8c faifant partie de nos
propriétés ? Les propriétaires des grandes Cités ne
payent rien, pas même les Vingtièmes. Les ven
deurs , créanciers du p rix, échappent à toute efpece de contribution, au bénéfice des paôtes de franchife qui rejettent tout le poids de l ’impôt fur le
cultivateur. Les propriétaires des rentes foncières
8c cenfùelles , font à l’abri de tout impôt. Tout cela
paroît raifonnable 8c dans l’ordre aux auteurs des
C 37 O
motions dont on vient de détruire les bafes, parce s s f — que les citoyens du troifieme Ordre en profitent.
On n’en veut qu’à la prérogative des Fiefs. Seroitce parce que ces propriétés éminentes appartiennent
plus communément à l’Ordre des Nobles qu’au TiersEtat? Mais quels que foient les motifs de tant d’at
taques, la Nobleffe n’en efï point ébranlée. L ’Or
dre des leudes 8c des fideles, invariable 8c ferme
dans fes principes , dira toujours au Roi : comptez
dans les grandes occafions , quand l’Etat fera me
nacé , votre Autorité méconnue, votre perfonne at
taquée , comptez fur l’offre volontaire de tous nos
biens, de nos v ie s, 8c de toute notre exigence.
Votre Trône ne peut s’écrouler, tant que les Confi
titutions ne feront point ébranlées. C ’efî d’elles que
découlent ces grands principes, qui infpirent à votre
Nobleffe , comme un devoir , fon entier dévoue
ment à le foutenir , 8c comme une loi, l’honneur
de s’enfevelir fous fes débris.
. . . .
Il dit au troifieme Ordre : vous êtes, comme nous,
membres ■ de la patrie. Loin de nous tout fyfiême
qui tend à vous préfenter comipe ferfs., 8c même
comme affranchis. Vous êtes francs 8c libres, comme
les membres de tous les Ordres. Mais rejettez, cîe
votre côté , tout ce qui pourroit tendre à l’ahéanA a a ij
�(?72)
tlffemeiit des droits & des pouvoirs intermédiaires*
‘ Ne longez pas à brifer les anneaux de cette chaîne
politique , qui vient aboutir dans la main du M o
narque , pour le bonheur général de tous les O r
dres , & pour le maintien de leurs droits refpeftifs :
que les bafes des Conftitutions foient par vous refpe&ées. Tenez bien pour principe , que les reftaurations ne s’opèrent jamais par voie de fubverfion.
On a commencé par vous dire : la Conftitution eft
pour vous y les droits de la Nobleffe n’ont pour prin
cipe que la tolérance & l’ufurpation. Vos moteurs
vous difent aujourd’hui que les vérités conftitutionnelles ne font que des erreurs à réformer, qu’il faut
tout effacer & tout brûler, pour établir un nouvel
ordre de chofes. Ils ofent contempler , & vous
préfenter de fang-froid, la perfpeêtive effrayante
d’une révolution deftruêtive de la Royauté , par la
fupprefîion de fes forces légales & conftitutionnelles -, des deux premiers Ordres , par l’enlevement de
leurs droits & de leurs propriétés 9 & du troifieme
Ordre lui-même , qui , après avoir renverfé les co
lonnes du temple, feroit lui-même écrafé fous fes
ruines,
( 575 >
part. in.
GUAP. vi'
C H A P I T R E
V I.
De la Conftitution ; & Conclu/ion,
ÎS jo u s avons donc une Conftitution en Provence:
Tous les Ordres du Pays font réclamée dans tous
les t-ems. Récemment la Nation a dit au Roi : n o u s
avons une Conftitution , dont les Loix font indeftruc*
tibles ] & le Monarque, qui ne veut regner que par
les L o ix , a reconnu cette vérité.
Le Mémoire fur les contributions, ouvrage d’un
des principaux Adminiftrateurs des feux, porte en
core , tant dans fon enfemble que dans tous fes dé*
ta ils , l’empreinte de ce même principe. Il eft vrai
que les erreurs de toute efpece abondent dans cette
oeuvre purement hoftile, & non d’inftruftion. Les
faits y font dénaturés , les titres obfcurcis , la difcuflion tronquée, 8t le régime perverti. Mais on
voit furnager un principe fur toutes ces Ululions,
& ce principe eft que nous avons en Provence une
Conftitution, à laquelle tous les Ordres de la Nation
doivent déférence & refpeft.
Ce principe tranfpire encore dans les écarts de la
derniere Aflemblée des Communes tenue à Lambefc*
�\
C 3/4 )
On s'y permet entr’autres la double erreur , de
P«uAp.*vil ^uPP°^er que ^es Fiefs font frappés par les charges
de la communion, & de mettre même le don gra
tu it, qui n’eft que l’impôt pris fur les feux, dans
la clafle des charges communes ; mais toujours eft-il
vrai qu’on y faifit encore l’aveu, que nous avons en
Provence un régime conftitutionnel dont il ne faut
jamais s’écarter.
Il exifte en Provence , comme ailleurs, un Ordre
qui tient à tous les autres , un Ordre qui veille fans
cefle pour conferver le feu facré des maximes, qui
renferme dans fon fein le g e r m e des v e r t u s , le foyer
des lumières, & l ’amour imperturbable de la vérité;
un Ordre enfin dont les nobles fondions font tou
jours dirigées vers la défenfe des Citoyens , des Loix
& de la Patrie : o r , quel eft le membre de cet
Ordre qui pourra nous dire que nous n’avons point
de Cônftitution en Provence ?
Ils ont tous attefté le contraire dans la lettre élo
quente qu’ils ont adreflêe au Chef de la Juftice, au
fujet des Edits du 8 Mai dernier. L ’Auteur du pré
tendu Droit public de Provence s’y trouve figné
comme tous les autres, & cet ouvrage renferme dans
prefque toutes les pages l’exprefiion de cette augufte
vérité, que nous avons en Provence une Conftitution, à laquelle aucune puiflance ne peut déroger.
(.175 )
Et fi nous n’avions pas une Conftitution en Provence, il cefiêroit d’être vrai que nous formons une
Nation principale & non fubalternée, un Royaume
que les Rois de France ne peuvent gouverner que
comme Comtes de Provence. Il cefferoit d’être vrai
■i
/
c
*
’
j
que nul impôt n’y peut être établi que du confentement des Etats ; que les Tribunaux fouverains &
vérificateurs doivent y réfider ; que les caufes des
Provençaux font inévocables par privilège. Tous
ces droits , & tant d’autres que la Conftitution nous
donne *, feroient donc■ anéantis
!
*
- *
Si nous avons une Conftitution , il ne refie qu’à
l’éclaircir, il faut en fixer tous les principes : 5c
toute pcribnne qui voudra s’infiruire, n’a qu’à mettre
d’un côté le Traité fur les Contributions, & nos
Obfervations de l’autre. Nous les préfentons avec
cette noble & ferme confiance que donne le fentiment de la conviction, fondée fur la jufiice & la
vérité. Combien de LeCteurs du troifieme Ordre
vont lever le bras en prenant ce livre ! Nous n’avons
qu’un mot à leur dire : Frappe, mais écoute.
Et qu’eft-ce qu’une Conftitution ? C ’eft le code
d’une Nation; c’efi ce qui réglé fa maniéré d’exifier,
celle de fe repréfenter dans tous les Ordres qui la
A
eompofent ; c’eft la collection des droits généraux
p a r t . iii .
c HAT, YI.
�O tO
qui refluent fur tous les individus de tous les Ordres ,
8c de ceux qui concernent chaque Ordre en parti
culier. C ’eft l’union de cet enfemble qui forme la
Conftitution. Chaque Ordre doit y trouver la fûreté
8c la garantie de tous les autres , tant dans les objets
communs que dans les principes protefteurs de fes
droits.
O n n’a pas befoin d’une chartre folemnelle pour
former une Conftitution. Les ufages antiques de la
N ation, les principes conftamment refpe&és dans
toutes fes Aflemblées , les Loix promulguées par fes
Souverains , les maximes atteftées par tous les
Ordres, 8c confignées dans les monumens nationaux
pour fervir à jamais de réglé dans les diffentions
intérieures : chacun de ces traits pris féparément ,
fuffiroit pour former une Conftitution. La préro
gative des Fiefs de Provence tient à chacun de tous
ces principes *, 8c cette Conftitution acquiert dans
toutes fes parties une force nouvelle par les capi
tulations qui nous unifient, tant à la France qu’à
l’augufte Maifon qui la gouverne avec tant de gloire,
puifque Louis X I 8c Henri IV font devenus nos
R o is , fous la promeffe 8c la condition de protéger
nos droits 8c nos propriétés.
O u i, nos propriétés. La queftion qui s’agite en
Provence ,
C 377 )
Provence, confifte dans fa derniere analyfe, à faPART.
voir fi la Noblefle fiefée du P ays, la plus pauvre CHAp
de toutes , doit perdre dans un moment, 8c par un
coup de fïfflet, la jufte moitié de fon patrimoine.
Nous avons acquis nos biens nobles fur le pied du
deux 8c demi pour cent. Nous avons payé le prix
de cette éminente qualité , fur la foi de notre Conf-,
titution. Qu’on les place au nombre des rotures ÿ
on enleve par cette opération aux propriétaires des
biens nobles , la moitié de leur patrimoine conftitutionnel.
Un aéle de cette efpece ne pourroit tenir qu’à la
violence. Il fuffiroit feul pour ternir la gloire d’un
beau régné. On n’en vit jamais de pareil dans
les faftes des Nations bien gouvernées. Il eft audeffus de toute puiflance. Jamais l’Ordre de la
Nobleffe de Provence n’y donnera fon confenteraent ( i ) , fans lequel cet événement ne peut s’o-------- i----------------------(i)
------------- :------------------- — ----- --- -
Les moteurs enflammés du troilieme Ordre ofent propofer
à la Noblefle de Provence l’abandon de fes droits légitimes,
c ’elt-à-d ire, la perte de la jufle moitié de fon patrimoine. S’ils
ofoient fe montrer, nous prouverions qu’ils ne feroient pas le facrifiçe d’un pouce de terre. Ils ont cité avec autant de légéreté
que d ’imprudence l ’exemple du Dauphiné. Ils ont donc voulu
• «
Bbb
III.
�\
( 57^ )
pérer. Serions-nous condamnés à ne laifler à nos
enfans qu’une Conftitution dégradée , & pourrions-
tromper la Nation Provençale. Il exiffe en Dauphiné des biens
( 579)
nous nous difpenfer de leur tranfmettre, avec la dou- —— 1■■
leur défefpérante de l’avoir perdue, le defir immortel de la recouvrer?
------------------------------- ------------------------------------------------------------
nobles, comme en Provence ; ces biens nobles f o n t , comme en
confiru&ions des chemins, ponts, murs d’enceinte , fontaines , fours
Provence, pofledés indiffin&ement par les Nobles & les Roturiers.
Sc autres ouvrages publics. Cette Tranfaéfion n’étoit point exé
O n a propofè de fupprimer la difiinéfion des biens nobles & des
cutée. Les ponts & chauffées n etofént confiants & réparés qu’au
roturiers $ mais ce n ’efk qu’en indemnifant les propriétaires des
moyen de l’impôt pris fur les fonds taillables. Le Tiers-Etat fup-
biens nobles -, ce que tout le monde regarde avec raifon comme
portoit feul la corvée. Par les derniers arrangemens des Etats du
impraticable ; ce qui le feroit encore plus en Provence qu’ailleurs,
D auphiné, il a été dit que tous les fonds, tant nobles que tail
dans le cas où les poffefleurs des Fiefs voudroient donner leur
lables , contribueront aux impofitions pour ces travaux, & que les
confentement là-deflùs j confentement qu’ils devroient refufer , parce
deux premiers Ordres fupporteront l’impôt en remplacement de
que d’un côté les feux ne gagneroient rien, & qu’ils ne pour-
la corvée, à proportion de leurs facultés, & de la même maniéré
roient que perdre dans cette opération , & que d’autre part les
que le Tiers-Etat.
propriétaires des biens nobles en feroient écrafés. Les
feux n ’y
gagneroient rien, parce qu’il faudroic les charger d’une
Comparons en deux mots ce qui s ’efi fait en Dauphiné avec
dette
ce que nous avons offert. Nos biens nobles étoient exempts de
énorme, & d’ailleurs fufceptible d’une infinité de coutefiations qui
tout impôt & de toutes charges de communion. Nous avons con-
continueroient toujours à divifer les deux Ordres. Les Fiefs en
fenti à contribuer aux chemins, aux bâtards & à la confiru&ion
feroient dégradés -, & quelque fomme q u ’on pût donner à leurs
du Palais, quoique nos biens nobles fuffent confiitutionnellement
propriétaires, ils ne feroient jamais indemnifés. O n feroit d’ail
exempts de toutes ces charges. Nos offres, infiniment plus avan-
leurs difparoître une valeur qu’il importe au contraire de conferver.
tageufes au Tiers-Etat que celles de toutes les autres Nobleffes,
Cette valeur feroit perdue pour le Pays. Quoi qu’il en foit, les
les ont précédées. Elles ont été faites dans les derniers Etats, &
quinze cent feux nobles ou exempts qui fe trouvent dans le Dau
les moteurs du troifieme Ordre fe permettent le projet plus qu’in-
phiné , fubfiflent avec leur exemption conffitutionneile, qui pro
fenfé de changer nos biens nobles en roture ; & l’on ofe même
bablement ne ceffera jamais d’exifler. En D auphiné, comme en
poufiér le délire jufqu’au point d ’imaginer que nous y ferons forcés
Provence, les trois Ordres pofledent
des biens roturiers, dont
par les délibérations enflammées de plufieurs Communautés, fur
ils payent la taille indiffinétement. Par une Tranfaélion de 1554
lefquelles la Nobleffe de Provence fe flatte d ’obtenir fatisfaélion
tous les Ordres étoient fournis h contribuer aux réparations tk
&: juffice, quand il en fera tems.
B b b ij
�——
0 8° )
Mais cela n’arrivera pas. Les mouvemens déré-
^chap^VI1 8^s > (Tuo^cIue combinés, d’une foule de Municipa
lités , & les efpeces de feux phofphoriques qu’on
voudroit faire prendre pour celui de la fédition,
n’en impofent à perfonne. Les différences qui fe
trouvent dans les voeux des Communautés , ne font
que tout autant de piégés qu’on tend à la Patrie
commune. Les unes attaquent les droits du Clergé,
d’autres la prérogative des Fiefs; quelques-unes les
privilèges d«e la ville d’Aix ; mais fi la Conftitution eft entamée par quelqu’un de fes côtés , ne
faudra-t-il pas , de proche en proche , la réfoudre
en entier dans le moule du troifieme O rd re, ou
pour mieux dire, de fes moteurs?
Encore un coup, cela n’arrivera pas. La force
de nos preuves & la juftice de notre R o i , nous
donnent là-deflus une entière fécurité. Que deviendroit l’Ordre de la Nobleffe , repréfenté par les Fiefs,
fi ces mêmes Fiefs tomboient en roture ? Le fécond
Ordre de la Nation cefferoit donc d’exifter !
Cet Ordre eft pourtant compofé , dans fa prefque
totalité , des defcendans de ces mêmes Gentilshom
mes poffédans les Fiefs de Provence, qui devinrent
François en 1481 ( 1 ) , qui renouvellerent leur fer( 1 ) Les Seigneurs qui aflifterent aux Etats de 1 4 8 2 ,
font à
O 8 1)
ment en i486 , époque de l’incorporation, & qui
donnerent à tous les Corps du Royaume , l’exemple CHAP V1
de la foumiflion aux droits légitimes d’Henri IV ,
en Janvier 1594 (1). Toutes ces époques, poftépeu près les mêmes que ceux qu’on retrouve en 1 4 8 7 , affemblés
après les lettres d ’incorporation. On en voit l’énumération dans
M . Papon , tom. 4 , pag. 9. in not. Les Députés à ces Etats
étoient les Ev êqu es, item magnificis ac potentibus egregiis quoque
ac generofis viris ; Fouques d’Agout. Palamedes de Forbin. J. B.
& Honor. de Pontevés. Georges de Caflellanne. Honôr. de Pontev és, Seigneur de Bargeme. Georges de Caflellanne ou de Forcalqu ier, Baron de Ccyrefle. Jacques de Graffe. Laurens Le Faur,
pour François de Luxembourg. Guillaume de kM °n<da r> pour le
Vicom te de Valerne.
lion de Villeneuve.
Honoré de Berre. Guigonnet Jarente. HeJean de Glandeves. Honoré de Caflellanne.
Charles de Caflellanne. Bertrand de Marfeille ( Vintirnille). Pons
de Villeneuve. Elzear Amalric. Louis Rodulphe, Seigneur de Limans. Ant. de Pontevés. Foulques de La T o u r, Seigneur de Roumoutes. Hugues du Puget.
de Sade.
Geoffroy de Caflellanne. Balthafard
Helion de Sabran. François d’Arcuffia. Pons Flotte.
Pierre lfouard.
Louis de Pontevés. Louis du Puget. Antoine de
Villemus. Durand de Pontevés. Elzeard Rodulphe. Pierre de Sabran. Etienne Robin. Fouques de Caflillon. Jacques Targue. Jean
de A cucio , Seigneur des Tours. Louis Gerente. Alexis de Villeneuve. Antoine, Marquis de Seve. Antoine de Mataron. Jean de
1
1>
R occas. Jacques de Foz.
( 1 ) Regifl. de la Nobleffe ,Reg. 1. fol. 266. Seigneurs préfents
à la Délibération du 3 Janvier 15 94*
1
�\
PART. III.
CH AP. V I .
o « o
Heures à l'union , font marquées comme une foule
d’autres qui precedent, par tout autant de titres
Le Com te de Carces ( Gafpard de P on tevés, grand Sénéchal
& Lieutenant général au Gouvernement de P ro v e n ce ). M . de Fonbeton. M. de Fuveau - Durand ( Syndics ).
M . le Marquis de
Trans. Le fieur de M onclar. Le fieur de SoIIiers. Le fieur de la
Fare. L e fieur de Crozes. Le fieur Baron d’O ife. Le fieur de Janfon. Le fieur de Merargues. L e fieur de T orves.
Le fieur de la
Verdiere. Le fieur de Cucuron. Le fieur Baron d’Anfouis. Le fieur
de Greouls. Le fieur de Sainte - fCroix. L e fieur de Crottes. Le
fieur de Bezaudun. Le fieur de Coullongue. L e fieur de Sam t-V incens. Le fieur de Saint-Jannet. Le fieur Chevalier de M erargues.
Le fieur Chevalier de la Molle. Le fieur de G obert.
Chateauredon. Le fieur d’O rry. Le fieur de Sue.
L e fieur de
Le fieur de la
Garde. Le fieur de Fuveau Vitalis. Le fieur de Porcils Vitalis. L e
fieur de Sainte-Croix Ferrier. Le fieur de Chafteuil. Le fieur de
Magnan. Le fieur d ’Auribeau. Le fieur de Fabregues. L e fieur de
*
Lamanon. Le fieur du Perier. Le fieur d’Entrages. L e fieur de Por
cils Honorât. Le fieur de Rainier. Le fieur de Montauron. Le fieur
d’Aynac. Le fieur de Chafteuil Galaup. Le fieur de Luynts.
Le
fieur de Montravail. Le fieur de Calliftanne. Le fieur de Talloires.
Le fieur de Vaubonettes. Le fieur de Lagremufe. L e fieur de Villem us, & le fieur de Chaudol,
Cette Délibération , prife par les
membres de la Nobleffe qui fe trouvoient alors à A ix , opéra la
levée du Siégé de cette Ville , la démolition du fort de St. Eutro p e, & l’entiere expulfion du D uc d ’Epernon. Elle fut fui vie
de plufieurs autres, danslefquelles tous les Gentilhommes fieffés de
eonftitutionnels ( i ) ; titres bien chers à nos coeurs,
__s
& par lefquels nos peres, en fe dévouant fans ré- CIIAli* UI*
Provence adhérèrent fucceftivement au vœu porté dans la Délibé
ration du 3 Janvier j & les Fiefs du Pays font encore poffédés,
en très-grande p artie, par les defcendans de ceux qui délibérèrent
à cette ép oqu e, ou qui adhérèrent enfuite au .vœu de cette D é
libération, à laquelle, tous les Seigneurs du P a y s ,fe fournirent
dans le cours de cette année.
;
( 1 ) Voyez Jà-deflus ce que dit M. Papon, tom. 4 ,
pag. 2
9
not. 1 , en parlant des Etats de 1 4 8 2 , qui ne fe donnèrent à
Louis X I que fous la condition de l'a confirmation des privilèges,
Statuts & coutumes du Pays, Ces privilège? , dit-il, étoisnt fondés
fu r une poffeffipn immémoriale ; & non feulement on doit regarder
comme une Loi fondamentale de la Confiitution de la Province les
Statuts faits par les Etats & avoués par les anciens Comtes de
Provence, mais encore ceux accordés par Charles I I I , le dernier
de ces Princes de la maifon d’Anjou, dans les Etats tenus en 1480.
Son tejlament ,/e s Lettres patentes données par Louis X I en 14829
la Délibération des Etats du mois de Juillet i4 8 6 , les Lettres
patentes de Charles VII I de la, même année, celles du 10 Juillet
i4£)S données par Louis X l l , & celles du mois d’Avril 1515 ac
cordées par Prançois Premier -, toutes des Loix confirment expreffément les Statuts de 1480 , dans lef quels fe concilient enfemble Les
droits d’ un Peuple qui obéit par devoir & par inclination, & l ’ au
torité d’un Souverain qui fait qu’ il ne commande point à des efclaves. O n voit par-là qu'un de nos principaux titres, eft la con
firmation de 1 4 8 0 , jurée par Charles d’Anjou notre dernier Comte $
elfe eft rapportée ci-deffus, part. 1 , chap. 4 , pag 129 in not•
C ette piece eft une chartre; elle en a tous les caraéieres.
�Ordres.
Voilà nos droits : ils ne font pas fubordonnés aux
fyftêmes verfatiles des Ecrivains , q u i, fans million
8c fans titre , s’érigent en légillateurs , 8c veulent
changer l’état 8c les droits des Nations. Que peu
vent fart d’écrire, l’illufion des fophifmes, la vé
hémence des déclamations , 8c la rage de réformer,
contre les titres de propriété même privée , 8c furtout contre les privilèges des fociétés générales 8c
les Loix des Empires ?.
On eft donc bien fo r t, quand on eft pofé fur
la bafe d’une Conftitution. Les flots les plus ora
geux ne peuvent que fe brifer contre elle. La pro
tection que le Monarque lui prête , eft un a£te de
juftice , puifqu’il a promis de la défendre \ un aCte
de prudence , puifque les droits du Trône n’exiftent
que par les Conftitutions \ un aCte de bienfait pour
la Nation entière , parce qu’après les tems d’orage,
il furvient des jours purs 8c fereins , dans lefquels
( ? 8 S)
tution, n’en reffentent que mieux le bonheur de la
pofîéder encore , 8c.le prix de la proteftion qui la
leur a confervée.
T els font les principes qui gouvernent les Gen
tils-hommes propriétaires des Fiefs de Provence. Ils
favent que tous les Ordres font freres. Ils en dé
firent ardemment l’union. Ils n’ont pas à fe repro
cher de l’avoir rompue. Ils ont demandé 8c obtenu
la reprife des Etats. Tous les Ordres, dans le tems
de leur meilleure organifation, dans les époques
de leur plus grande énergie, n’en avoient-ils pas
demandé le retour ? Les Nobles , à qui cet événe
ment eft d û, fe font donc conduits en vrais Ci
toyens , quand ils l’ont provoqué. L ’Adminiftration
des feux ne l’a-t-elle pas reconnu, lorfque le retour
de nos Etats étant enfin décidé , malgré fes fourdes
oppofitions, elle nous a d it, dans le Mémoire fur
les Contributions , que la Province étoiî enfin rendue
à fa Conjlitution ?
Voudroit-on nous reprocher des torts fur l’objet
des contributions ? Il faut diftinguer le fond de la
queftion 8c les procédés. Au fond , nous étions ré
glés avant la reprife des Etats. Nous l’étions en con
formité des principes conftitutionnels, 8c de plus,
tous les Ordres réunis fous l’étendard de la Confti
tution ,
reconnus par nos peres, dans toutes les Alfemblées
Ccc
O 84)
ferve à leurs Souverains , à la Maifon régnante ,
4>^ T* llL aux Princes auguftes du Sang ro ya l, ont mis fous
la fauve-garde 8c la proteCfion de la Couronne ,
notre régime national , comme un dépôt facré qui
devoit fubfifter, 8c faire à jamais la loi de tous les
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de la Nation. Nous avions feulement à nous plalnpart. iii. j re
i’extenfion de nos contributions, & de l ’inéCHAP. Y ) ,
galité des répartitions. Au fond encore , nos motifs
& nos titres refpeêtifs font à préfent connus. Tout
homme jufle efl en état de juger.
Quant aux procédés, les Adminiflrateurs de la
Noble/fe furent inflruits d’un furcroît de demande
que le Gouvernement devoit faire , s’élevant à 400000
liv. Il leur fut propofé d’en porter la moitié fur le
don gratuit, & la moitié reliante fur les V ingtiè
mes. Ils répondirent qu’il ne falloit pas donner
l ’exemple d’une augmentation d’un don gratuit déjà
trop lourd, d’un don que les Fiefs ne fupportent
pas, & qu’il falloit la rejetter fur les Vingtièmes
auxquels les Fiefs contribuent même avec excès.
Cela fut fait en conféquence. Ce fait auroit-il le
malheur de déplaire aux moteurs du troilieme
Ordre ?
Mais les Députés des Communautés n’ont-ils pas
été baffoués ou méprifés par les Repréfentans des deux
premiers Ordres dans les derniers Etats ? Non. Les
Repréfentans des Municipalités ont fouvent, & pref•que toujours , manqué de confiance & d’égard. Ils
ont refufé fyflématiquement, dans les commifiions,
d’entrer en difculfion fur l ’objet des importions*
O g7 )
Qui ne fait que le Mémoire fur les Contributions,
f i
r r
y i
iPART.’
répandu avec prorulion, au moment ou les Etats cha?
alloient s’ouvrir, avoit exalté toutes les têtes des
Repréfentans du Tiers? Que de là naquit, dans le
fein de cet O rdre, une ligue , dont les mouvemens,
toujours négatifs dans l ’intérieur des commifiions, 8t
quelquefois offenfifs au dehors, v is-à -v is les perfonnes en place , firent avorter tous les plans de
conciliation fur lefquels on auroit pu s’entendre?
Qui ne fait que des ennemis de la paix & de la
Conflitution tentèrent de porter la divifion dans
l ’Ordre même de la Nobleffe ? Sans ces funeftes
manoeuvres, la Provence auroit peut-être eu la gloire
de donner l’exemple de l’union à toute la France.
M ais, nous dit-on enfin , la Nation efl fous le
poids d’une dette énorme. Il exifle dans les finances
un déficit effrayant. Il faut que chacun paye avec
une égalité proportionnelle. Le Parlement de Paris,
les Princes du Sang en ont porté la déclaration au
pied du Trône. Tous les privilèges doivent difparoître.
Les privilèges, à la bonne heure , quoiqu’il fût
tout à la fois plus jufle & plus légal de dire, que
le mal étant paflager, le remede doit l’être aulli 3
C c c ij
�088)
& cela rentre dans les termes de notre Conftitu-'
* tion , dont on a ci-devant pofé les principes.
Mais les propriétés des Nobles doivent-elles s’éclipfer, quand tous les autres Ordres confervent
leurs patrimoines ? Sans doute la Noblefle doit don
ner l ’exemple. Nous nous retrouvons tous dans la
déclaration faite par le Duc de Vendôme, au nom
de la Noblefle françoife , dans l’Aflemblée des N o
tables de 1527. Nous dévouons nos biens
nos
vies à la défenfe du Trône 8c de la patrie. Mais
pour une opération d ’ a r g e n t , i l n e f a u t p a s con
vertir les Fiefs en rotures, enlever les propriétés,
8c renverfer la Conftitution.
Dans plufieurs autres Provinces, il 11’exifte au
cune , ou prefque aucune différence , entre les biens
ruraux 8c les Fiefs ( 1 ) . En P rovence, la diffé
rence efl: du double ; telle eff la fuite naturelle du
droit conftitutionnel , d’être affranchi du joug de
l ’im pôt, 6c de l’Adminiftration.
(3 8 9 )
Cette différence eft une propriété, un patrimoine
pour les familles. La converfion des Fiefs ou des
biens nobles en rotures , le feroit difparoître à ja
mais. Et quels feroient les effets de cette opéra
tion , non feulement inique , mais atroce ? Elle groffîroit d’un cinquantième, tout au plus , la mafle
des biens impofables ; 8c d’autre part, elle anéantir o it, avec nos propriétés, les hypotheques 8c les
droits de tous les tiers intéreffés à leur confervation. Elle détruiroit encore l’organifation fonda
m e n t a l e de n o t r e C o n f f i t u t i o n , fuivant laquelle le
fécond Ordre 11e peut être compofé que de Gentils
hommes poffédans-fiefs (1).
( 1 ) Il refie une derniers refiource aux moteurs de nos divifions.
C ’efi celle de faire lutter la Noblefie fieffée, avec celle qui ne l’eft
p as; les Gentilshommes fieffés qui ont leurs preuves, avec ceux
de cette claffe que des obftacles particuliers &: paffagers ont em
pêché de les remplir. L a naiffance, dit-on, ne conftitue-t-elle pas
la Noblefie ? Et comment les vrais Gentilshommes ne feroient-ils
pas admis dans les Affemblées de la Nation, au banc des Nobles,
( 1 ) Dans plufieurs autres P rovinces, la franchife efl perfonnelle.
en cette qualité ? D ’où vient, a-t-on dit encore, cette différence
Elle fe réduit à deux ou trois charrues, quand le Seigneur les fait
entre le Seigneur fieffé qui a fait fes preuves, &: le Seigneur
valoir par lui-même. Les Seigneurs n ’abandonnent rie n , ou ils
fieffé qui ne les a pas faites? La Conffitution va répondre pour
abandonnent très peu de ch o fe, en offrant le facrifice de leurs
nous. O11 n’a qu’à la bien méditer.
exemptions.
L ’Ordre des Seigneurs ou de la Noblefie n’a jamais été repré^
�Ç j 9° )
D ’après ces préjudices frappans, dont toute ame hon
P A R T . IJL
CJfAP. VI. nête & jufte ne peut qu’être effrayée, comment pour-
{enté dans les AfTemblées de la Nation P rov ençale, que par les
Fiefs. T e l eft l’ufage de tous les tems. D ans les anciens E t a ts ,
com m e dans les plus récen s, les Nobles n’étoient pas nommés par
leurs n o m s, mais par leurs Fiefs. Chacun d'eux repréfentoit fon
F ie f, & tous enfèmble ils repréfentoient l’univerfalité des Fiefs.
En 1 6 2 0 , les Etats fe plaignirent de ce qu’un feul & même Fief
avoit plusieurs repréfentans, & fur-tout de ce que les cadets des
Seigneurs n’ayant point de F ie f, venoient s’afféoir & voter dans
l’Ordre des Nobles. Il fallut convenir que ces repréfèntations mul
tipliées 8c illégales, étoient contraires à la Conftitution. L a N o
bleffe fit le fameux Réglem ent de 1 6 2 0 , qui fut porté aux Etats
de 1 6 2 2 , 8 c par eux approuvé, comm e titre conftitutionnel, &
il rétoit en effet. II fut établi par ce Réglem ent que chaque F ie f
n ’auroit qu’un repréfentant : on n’avoit pas befoin de dire qu’un
N oble qui n ’avoit point de F ie f ne pouvoit voter dans le banc
%
des Nobles du Pays. Cela s’y trouve pourtant dit en plufieurs ma
niérés. C e droit de voter dans l’Ordre de la Nobleffe fut même
refufé aux poffeffeurs des Arriere-fiefs non affouagés en Corps de
Communauté.
Notre Conftitution e ft, quant à c e , femblable à bien d’autres,
qui compofent le fécond Ordre des principaux Membres de la
N ation, P r o c e r e s , M a g n a te s , D u c e s , B a r o n e s , & c . Nous ne connoiffons pas le Baronage en Provence. Le droit de voter dans
l’Ordre de la Nobleffe a toujours appartenu aux Nobles poffédantFiefs.
La Conffitution a toujours exigé ces deux qualités, de Noble
1
(3 9 O
roit-on allivrer nos biens nobles ? Quelle Puiftaflce
pourroit nous donner des Loix là-deflus ? Quelles fe*
&■ de poffédant-Fief. A infi, le propriétaire d’un F ief, qui n’a pas
fait fes preuves, ne peut pas exiger que les Syndics le convoquent.
D e l à , tous les poffeffeurs des Fiefs de la plus ancienne Nobleffe
du Pays ont rempli leurs preuves auprès des Syndics dans la forme
prefçrite parles Délibérations de l ’Ordre ; Délibérations qui n’ont
d’autre objet que celui d ’entretenir l’efprit de fraternité, par les
principes d’égalité qui les ont déterminées. De là , les Gentilshommes
qui ne poffédent point de F ie f, mais feulement des rotures, ne
peuvent avoir place
8c voter que dans le banc du troifieme O rdre,
dont les repréfentans n ’ont le droit d’aïïïfter 8c d e v oter que pour
l’intérêt des rotures. Rien n’eft perfonnel en Provence; tout a été
dans tous les tems mixte ou réel. Il n y a que les Membres du
C le rg é , ayant dignité par leurs titres ou par leurs Fiefs, qui puiffent remplir la place de ce premier Ordre. Les Fiefs feuls don
nent droit aux places du fécond. C eft la poffeffion des rotures qui
donne place au troifieme. La perfonne la plus qualifiée qui ne
pofféderoit que des rotures, ne pourroit avoir place & voter que
dans le troifieme Ordre. Et qu’on y prenne bien garde; la per
fonne la plus éminente qui ne pofiederoit rien, nous feroit étran
g è re : ca rie s Députés ne font appelles que comme Confuls, &
nul ne peut l’être fans pofféder un allivrement. On commence à
donner jour à certains lÿftêmes par lefquels on veut fe fouftraire
aux réglés établies par nos peres. On voudroit rendre le choix
des Communautés & des Vigueries libre & indépendant. Si ces
nouveautés venoient à paffer, on entendroit bientôt les plaintes
�(?9 0
roient ces Loix ? Quels troubles 8c quelles défolations
PART. 111
CHAI*. V I.
lors de leur exécution ? La N obkfle de Provence
n’eft pas ce qu’elle paroît dans nos Cités princi
pales. On y voit quelques familles nobles , vivant
dans l’opulence , & fuivant la dignité de leur état.
Mais combien d’autres n’en trouve-t-on pas , qui
reléguées dans leurs Fiefs , attachées en quelque
maniéré à la glebe , comme les Bourgeois , ne trou
—
------------
--------------------------------------------------------------- - —
vent ,
-
les plus ameres &; les mieux fondées contre les novateurs.
—
Les
députations tom beroient par préférence fur leç intriguans qui les
recherchent, qui courent après les troubles, foit par principe de
cupidité, foit par l’amour déréglé d’une célébrité mal entendue j
& les Délibérations feroient livrées à des repréfentans qui n’ayant
aucun intérêt dans la com m union, feroient trop facilement difpofés
à l’oubli ou au facrifice de fes droits.
Remarquez b ie n , pour l'intelligence de ces obfervations, que
dans le fens de tous nos titres, les Nobles font les Seigneurs.
Barones & Nobiles , difent tous nos Statu ts, ce que d ’autres textes
& M . de Clapiers développent avec la plus grande cla rté , en les
(3 9 3 )
v e n t, clans le produit de leurs terres, que de quoi — ——
’
1.
n
^
fubfifter avec peine? Quelques-unes empruntent pour
fournir aux dépenfes du fervice de leurs membres.
D ’ autres n’ont pas même la reffource des emprunts.
On voudroit donc mettre la claflê opulente des No
bles de Provence dans la détrelfe, 8c réduire l’autre
à la mifere.
Mais ce que nous venons d’obferver, tend-il à
refufer toute contribution ? Non. Il faut payer la
dette de la Nation. Tous les Ordres de l’Etat 8c
les individus qui les composent, doivent donner
l ’eflor à leur zele , 8c faire les plus grands facrifices ; mais les Conftitutions ne doivent pas être
anéanties. Celle que nous défendons, nous trace
là-deffus des exemples , dont les principes font dans
nos cœurs.
Il faut combler le gouffre de nos dettes. Il faut
y pourvoir par une fubvention générale. Clergé ,
Nobleffe , Magiftrature (1 ) , Financiers ( z ) , Capi-
défîgnant dans les termes lui vans , Nobiles Jurifdiclionem habentes.
Ainfi le banc des Nobles n’e ft, n’a jamais é té , & ne peut être
des Gentilshommes
CO O*1 doit tout attendre du zele des deux premiers Ordres.
fieffés ; & les Nobles qui ne poffédent que des rotures , ne peuvent
L a Magiftrature qui leur appartient, fe fera fans doute une gloire
s ’afféoir & voter que dans le banc des C om m unes, puifqu’ilsn e
de féconder leurs efforts.
dans les Etats
de P ro v e n ce , que le banc
peuvent avoir d’autres titres & d’autres intérêts que ceux qui peu
vent naître de la poffeffion des rotures.
( 2 ) Le Noble ayant 100000 liv. de revenus en terres, foit
F ie fs, foit rotures, paye au moins 20000 liv. en tailles, afîlorine-
D dd
part ,
chai*,
ni-
vx.
�C 594 )
= pitalîftes, Bourgeois ( i ) , Commerçans & Mar111' chands ( z ) , perfonne ne doit en être affranchi..
nem ent, 8c droits fur les confommations. Le Financier &
le C a
pitalise ayant le même revenu, payent les droits fur les confom
mations. S ’ils vivent avec (plendeur, ces droits fe montent à 2 0 0 a
liv. au plus. Le reffe de leurs revenus, leur demeure franc 8c net.
C e tableau fe vérifie dans toutes les grandes Cités. O n
trouve
là-deffus dans la ville d’Aix quelques objets de comparaifon. O n
nous dira peut-être que les C apitalises fupportent les vingtièmes
( ? 9î )
Les claffes peuvent en être faites par les trois l,11
Ordres ,7 au1 par leurs Commiffaires dans chaque
lART’
Ur*
1
CHÀP. V I.
Cité : la Nation doit commencer par regarder comme
ennemis communs, ceux qui cherchent à divifer les
Ordres ; & comme novateurs dangereux, pour ne
rien dire de plus, ceux qui veulent détruire les Conftitutions, fous prétexte de les régénérer. Que la
fubvention proportionnée aux revenus , comprenne
les Vingtièmes , fuivant l’abonnement (1) fait avec
au moyen des retenues que leur font leurs débiteurs ; mais i°. notre
réflexion fubfiSe quant aux Financiers ; 2°. la plupart des C api
talises fpéculent même fur les vingtièm es, &: leur revenu leur par
fenté comme une opération d’ordre 8c de bonheur pour les re
vient en entier fans détraéfion à la grande furcharge de leurs dé
devables. Il faut avouer que la charge
biteurs. 3 0. Qui ne voit que dans l’état des chofes , les Capita
lises ne payeroient pas à beaucoup près leur contingent, quand
même ils contribueroient avec une exaéfe rigueur aux vingtièmes ?
( 1 ) Cette clafle qui fait valoir les terres, qui forme une clafle de
propriétaires, mérite la plus grande attention.
Dans la prefque
totalité de nos Communautés, elle paye la taille ; dans les autres,
elle tire tout le produit de fes fonds qu’elle féconde. Elle e S une
des plus intéreflées à ce qu’il ne foit rien changé dans notre Conf-
d’abonnement, on y trouve
étant adoucie par voie
un double avantage: i°. celui d’al
léger le poids de l’impôt -, 20. celui de fouflraire.le redevable au
crédit, 8c puifqu’il faut tout dire, à la tyrannie des exaéleurs
fifeaux. L ’impôt fe leve en conformité des Loix modérées & pa
ternelles de nos formes municipales. On ne peut pas néanmoins
fe diflimuler que la répartition intérieure de la fomme abonnée ne
renferme une injuftice énorme. On la concentre fur les proprié
taires des fonds , tant nobles que roturiers j mais l’impôt des
titution.
( 2 ) Le vingtième comprend toute
( t ) L ’nhonnFmpnt des vingtièmes nous a fans ceffe été pré-
forte d’induSrie , ô c tous
vingtièmes frappe tant fur l’induflrie que fur le loyer des maifons
Les profits en réfultant. Pourquoi l’induSrie du M archand en fe-
des Villes. Ces maifons ne font point encadaftrées dans les grandes
roit-elle affranchie? Le Statut rapporté par M ourgues, pag. 3 3 7 ,
Cités. Dans les autres, elles ne font ailivrées que pour la valeur
& dans le Nouveau C om m entaire, tom. 2 , pag. 282 , ne porte-t-il
des fonds tant feulement. En rejettant toute la charge de l’abon
pas que M a r c h a n d s O N u ir r ig u iç r s dcvoun m ettre to u t lu r c a p ita l
nement fur les terres,. on procure la pleine exemption à tout le-
en t a illa
commerce , exercé par les Citoyens du troifieme Ordre j & de plus
D d ci i]
�C
C?96 )
- les Provinces , & la Capitation , qu’elle foit repartie
fur tous les Citoyens , fans diftinêtion d’O rdre, avec
abrogation de tous les privilèges. Allons même plus
loin 3 joignons à nos efforts communs & patrioti
ques , un aéte d’humanité. On nous parle fans
ceffe de douze ou quinze millions d’hommes qui
n’ont que des bras pour tourmenter la terre ,
vers laquelle ils font fans celle courbés, ou pour
fournir dans les atteliers au luxe de nos Cités. On
veut nous attendrir fur cette partie de la Nation ,
aux maifons clés V illes, prefque entièrement pofTédées par
les
mêmes perfonnes. L ’opération efl donc injufle fubflanf ellement ; elle
feroit atroce dans le cas d’uoe fubvention qui reprcfenteroit tout
à
la fois le vingtièm e, la capitation du Citoyen qui n ’a que des
b r a s , & le furcroît qu’il faudra verfer dans le Tréfor royal pour
éteindre les dettes de l ’Etat & remplir la mefure de fes charges.
Il faut dès-lors opérer fur d’autres principes. Toutes les ren tes,
tous les revenus quelconques doivent fupporter la fubvention dans
une égalité proportionnelle, puifque cet im pôt g rav e, mais p a f
fag er, repréfentera tout à la fois la capitation qui
efl due par
7
)
dont toute la vie n’eft que fouffrance 6t travail.
Déclamateurs imprudens, vous feriez bien coupables,
fi vous parveniez à l’émouvoir ! Et fi la chofe étoit
pofîible, vous en feriez les premiers punis. Mais
pourquoi vous contentez-vous de leur préfenter le
tableau d’une fenfibilité faélice, ou tout au moins
ftérile ? Ce pauvre Peuple> cette partie laborieufe
de la Nation , qui traîne dans le befoin 6c l’obfcu?
r ité , fa pénible exiftence , qui trouve dans les deux
premiers Ordres des protefteurs par principes, par
devoir & p a r i n t é r ê t , c o n t r e les opprefïions des do*
minans du troifieme , ne connoît 6c ne craint d'autre
charge que celle de la Capitation : que toutes les
claffes aifées ou rentées, fans diftinétion d’Ordre
ni d’éta t, prennent encore fur elles cette dette ,
que les préventions , les haines, les tyrannies lo*
cales rendent encore plus dure à fupporter que l’im
pôt lui-même ( 1 ) 3 6c que du fein de nos difeordes
fortent tout à la fois le patriotifme, la bienfaifance
6c l ’union.
toutes les perfonnes proportionnellement aux revenus ; les ving
tièmes qui doivent être pris fur tous les revenus quelconques ,
même fur ceux d’induftrie j & le furcroît de la fubvention, q u i,
( 1 ) Chacun connoît les injudices partielles que les Adminif
fuivant le vœu porté par nos auguftes P iin ces, par le Parlement
trateurs des Municipalités fe permettent fouvent dans la réparti
de Paris, doit être fupporté avec une égalité proportionnelle &
tion de la capitation; mais on ignore communément que les Com
fans diflinftion d 'O rd re, de perfonne & de qualité.
munautés inférieures fe permettent là-defiiis une marche trop fa-
pa r t .
IIL
VI.
�( ? 98 )
Comme Sujets 8c François, n’oublions pas que
nous devons au Monarque qui nous gouverne, &C
dont les intentions méritent à fi jufte titre le refpeft 8c l’amour de fon Peuple ,. les plus grands
efforts d’un zele qui ne doit connoître d’autres bornes*
que celles de l’impuiflance ) que l’honneur de la
Nation exige de nous les plus grands facrifices ; que
nous devons la confiance la plus entière à ce M i
nière que tous les autres Peuples nous envient,
dont le cri de la joie publique a fignalé le retour,
qui par la fupcrioritc de fee vuec7 jnintp aux vertus
les plus folides , ne peut que procurer à la France
entière le bienfait de la refiauration , 8c qui connoiflant mieux que perfonne la force des Conftitutions , a toujours donné l’exemple du refpeft que
toutes les Puiffances lui doivent, puifque ces mêmes
Puiffances, établies pour les protéger, font fans force
pour les détruire..
Comme C itoyens, comme Provençaux , comme
vorable aux Citoyens adminiflrateurs ou taxateurs, & qui tombe
en oppreflion contre le
Peuple,
Airrfi, par exemple , les plus
fortes taxes tombant fur les plus ric h e s , font extrêmement mo
dérées , &
fon fupplée à Pinfuffifance , en augmentant la cotir
Cation des claffes moyennes 8c des dernieres..
(399 )
Frétés , rallions-nous fous les drapeaux de la Conftitution. Nous l’avons toujours vantée , 8c nos voifins avec nous , comme le premier 6c le plus beau
de tous les régimes. Nous regarderions comme impie
la main de l ’étranger qui voudroit y toucher. Tenons
tous pour confiant que l’offre des Princes, liée avec
les droits de la Nobleffe , 6c 11e pouvant, fous ce
rapport, que préferver la Monarchie des malheurs
dont elle eft menacée, le vœu du Parlement de
Paris fur l ’égalité des répartitions, ne prennent 8c
ne peuvent rien prendre fur les Conftitutions des
Provinces unies par des capitulations 5 que les
Etats généraux du Royaume ne peuvent pas dé
roger aux traités par lefquels les Provinces fe font
unies à la Monarchie. Pourroient-ils en brifer les
liens, fans détruire l’union elle-même ?
Tenons encore pour certain que les formes de
notre Conftitution font refpeftables comme fes prin*
cipes 3 que les changemens même paffagers fur cet
objet , ne font jamais fans dangers j que les confentemens que la Nobleffe peut y donner dans des
tems d’orage , font tout autant de facrifices qu’elle
fait à fon amour pour la paix , 6c à fon zele pour
le bien commun \ 6c qu’enfin toutes les Communes
réunies, en quelque nombre que fulfent leurs repré-
PART. III.
CH AP, V J.
�r
\
PART. III.
CHAP- V I .
»t
H*
(400 )
fentans , ne fauroient jamais porter ou faire pré
dominer un vœu valable , à l’effet de dégrader nos
Fiefs 8c de leur impofer le joug des rotures. Un
feul propriétaire de F ie f, la Conftitution à la main,
rendroit fans effet cette fougueufe entreprife. La
Conftitution feule nous défendroit par fes propres
forces. Nos droits conftitutionnels ne peuvent périr
que par le facrifice que nous pourrions en faire ,
qu’il feroit abfurde ' de nous propofer, 8c que nous
ne ferons jamais.
Suivons les invitations refpeûables dont les mo
teurs du t r o i f t e m e Ordre voudroient abufer, mais
firivons-les dans l’ordre 8c les principes de notre
Conftitution. Conformons-nous à l’exemple de nos
peres. Des tems de calamité générale font arrivés :
des temps plus doux nous font promis ; ils ne peu
vent manquer de venir. Unifions-nous pour en
preffer le retour. Allons en paix aux Etats géné
raux du Royaume. Occupons-nous dans cette augufte
Affemblée de tous les objets qui peuvent intéreflér
la gloire du Monarque 8c le bonheur de fes Sujets.
On y réglera le contingent de toutes les Provinces.
Nous répartirons enfuite le notre dans l’intérieur ,
en laiffant toujours fubfîfter les traits caraétériftiques
&
( 4O l)
& difttnftifs des Fiefs 8c des rotures. Les impôts
préexiftans continueront d’être pris fur les feux , PART' II[
ainfi que les charges de la communion. La fubven.tion comprenant les vingtièmes, 8c la capitation,
même celle du pauvre Peuple qui n’aura rien à payer,
fera prife avec égalité fur tous les Citoyens de tous
les Ordres, fans autre diftinftion que celle de la
mefure 8c de la proportion de leurs revenus.
Ainfi , dans le tems même de cette calamité, qui
ne fera que paffer, tous les fonds, qui ne font déjà
que trop chargés t ne fciunt pas frappés par des
charges nouvelles qu’ils feroient hors d'etat de fupporter. Le poids de l’impôt fera même adouci, parce
que les Vingtièmes feront pris 8c diftribués fur les
perfonnes , proportionnellement aux revenus \ par ce
m oyen, on foutiendra l’Agriculture , le premier 8c
le plus utile de tous les arts. Les Fiefs continueront
d’être dans le commerce, comme auparavant, 8c
comme ils doivent y refter à jamais \ 8c les poffeffeurs de ces domaines éminens, conferveront, foit
dans les tems de la fubvention, foit après , la plé
nitude de leurs patrimoines.
Citoyens d’Aix , vous propriétaires des biens dans
les grandes Cités , vous pouvez vous ménager les
mêmes avantages. Nos Fiefs , fauvegardés par la
E ee
�c
(402 )
Conffitution, ne feront jamais allivréjs. Ils ne doi
vent & ne peuvent pas l’être. Mais fi vos domaines
étoient une fois touchés par un encadaftrement, la
tache pourroit en être ineffaçable , Sc le préjudice
éternel. Et vous, Citoyens de tous les Ordres, qui
poflêdez des rotures , fongez que l’Aftre de la Confi
titution fe leve pour tous les Membres de la patrie;
s’il échauffe, s’il ranime aujourd’hui le germe de
vos droits 6c de vos privilèges, fera-t-il deffécher
6c périr celui de nos titres 6c de nos propriétés ?
N ’oubliez jamais que nos peres , dans les teins de
calamité , ne manquoient pas de foumettre les feux
aux charges ordinaires ; lorfque les circonftances
excitoient les contributions volontaires des deux
premiers O rdres, que ces contributions paflageres,
comme le principe qui les avoit provoquées , ne
prenoient rien fur les prérogatives conftitutionnelles ;
6c convenez que nous ne devons pas trouver la dé
préciation de nos Fiefs 6c la fubverfion de nos for
tunes , ni pendant le cours, ni après l’entiere confommation des facrifices dont nous vous donnons
l’exemple , en vous exhortant à nous imiter.
( 40 5 )
U
T
DES
A
B
L
E
CHAPITREStx JJ
E xT R À IT des Regiflres des Délibérations de la Nnblejje de Provence ,
pag. 3.
Observations fur la véritable C onfinition de Provence
au fujet de la contribution des trois Ordres aux
charges publiques & communes > pour l’ufage des
Propriétaires des Fiefs,
. ... >
5.
P R E M I E R E
;
a
P A R T I E *
-' •5'
C H A P I T R E
- 1'
.
p r e m i e r
T
*
v
,
De la prérogative des Fiefs en général ,
9»
C H A P . II. Développement des Loixprovençales fur la
14-
prérogative des Fiefs ,
Ee e ij
lL
�( 404)
CHAP. III. Quelle efl Vétendue de la prérogative des
F iefs,
no.
(40? )
CHAP. V . Appointemens & dépenfes à payer au Gou
C hAP. IV . Peut-on détruire ou entamer la prérogative
CHAP. , V l .
féodale 3
114.
verneur ,
211.
La Maréchauffée ,
221.
C h ap . V I I . Emprunts & Dettes ,
227.
V . Réponfe à Vobjection tirée de ce que les deux
CHAP.
V I I I . Création & extinction d'Offices,
premiers Ordres ne doivent pas voter dans les Etats ,
puifqu ils ne veulent pas contribuer à Vimpôt 3 136.
CHAP.
IX . Frais cTAdminijtration
C H AP.
/
V I. Réponfe à l 1objection tirée du Service mi
litaire ,
142.
V I I . Réponfe à Vo b je c tio n tirée de ce que les
b ien s n o b le s contribuent à V abonnement des Vingtièmes
& des droits impofés fur les huiles ; & conclujion de
cette première Partie,
;
154.
238.
X . Abonnement de iGyi pour les droits de Di
recte 9 Cavalcades, Albergue, & autres dus au Roi
CHAP.
C H AP.
CHAP.
3
255.
par les Communautés ,
245.
X I. Abuuuziutni du droit Jur les huiles & des
Vingtièmes ,
249,
C hap.
X II. Les frais de la conflruction du Palais3
CHAP.
259.
XXII. Conflruction & entretien des chemins ,
ponts & autres ouvrages de cette nature 3
265.
CHAP.
S E C O N D E
C H A P I T R E
P A R T I E .
P R E MI E R .
Obfervation générale 3
CHAP.
II. Le Don gratuit ,
C
hap
III. Fouage , Paillon y Subfide ,
C
hap
.
X IV . Entretien des Bâtards
C hap.
X V . Conclufion ,
3
275.
279.
pag.
T R O I S I E M E
189.
IV . Levées des Troupes , dépenfes fur cet objet ,
197.
& Milices 3
.
CHAP.
C H A P I T R E
Confldérations fur le Clergé
C
hap
.
II. Des Rev es y
P A R T I E .
PREMI ER.
3
*
pag* 292.
5° 4 *
��
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Observations sur la véritable constitution de la Provence, au sujet de la contribution des trois Ordres aux charges publiques & communes. Pour l'usage des propriétaires des fiefs
Subject
The topic of the resource
Droit fiscal
Finances publiques
Législation & réglementation
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gassier, Jacques (1730-1811 ; avocat)
Gibelin-David, Barthélemy (1747-1831 ; imprimeur-libraire)
Emeric-David, Toussaint-Bernard (1755-1839)
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES 7145
Médiathèque de la Maison méditerranéenne des sciences de l'homme (Aix-en-Provence), cote YM-7
Publisher
An entity responsible for making the resource available
B. Gibelin-David & T. Emeric-David (Aix-en-Provence)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1788
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/201845059
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES_07145_Observations_constitution-vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol
406 p.
in-4°
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/269
http://e-mediatheque.mmsh.univ-aix.fr/Collection/imprimes/provence/Pages/FR_MMSH_MDQ_HP_MG_022.aspx
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Provence. 18..
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Description
An account of the resource
La levée de l'impôt en Provene au 18e siècle et sa généralisation à tous les biens
Abstract
A summary of the resource.
Généralisation de l'impôt à tous les biens au temps d'une constitution provençale
Clergé -- Impôts -- Droit -- France -- Provence (France) -- 18e siècle -- Ouvrages avant 1800
Noblesse -- Impôts -- Droit -- France -- Provence (France) -- 18e siècle -- Ouvrages avant 1800
Provence (France) -- Conditions économiques -- 18e siècle -- Ouvrages avant 1800
Tiers état -- Impôts -- Droit -- France -- Provence (France) -- 18e siècle -- Ouvrages avant 1800