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d5631470fcf1d95cdb612bdf5d53c770
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MÉMOIRE
POUl\.
COS TBl!
M. LE PREFET DES
BOUCHES· DU·RIIO~E .
7,319
�MÉMOIRE
roll'll.
CON'l'BJ!
II. LE PRÉFET DES BOUCHES·DU·RHONE.
LF.
Mémoire que publie M. de Galliffet est destiné à résoudre une
question importante que M. le Préfet du département des lJouchesdu-Rhône a soulevée contre lui.
Il est publié pour prouver, contre Ja prétention de cet administrateur, que les titres, en vertu desquels il possède, depuis des siècles,
la bordigue dite
dt~
Roi, sont de véritables titres de propriété et non
de sir.1ples actes adminis/lrati(s, émanés. de j'alltorité souveraine
des princes qui gouvernaient la Provence, dans le dixième siècle.
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Pour comprendre l' utilité et la nécessité même de ce dessein , des
faits nombreux et remontant à la plus haute antiquité, sont à exposer.
Décrivons d'abord les canaux de Martigues. Nous parlerons ensuit e de ceux
du port de Bouc.
Quand ils seront connus , on connaîtra complètement le bot qu' il lui
En partant du quartier de Jonquière et en s'avançant dn midi au nord vers
faut atteindre, son importance, l'occasion qui a donné naissan ce
Ferrière, on suit une voie publique qui relie en tre eux les trois quartiers de la
à ce débat, et le rÔle opposé que M. de Galliffet d' une part, et M. le
ville.
Préfet de l'autre, y ont joué. C'~st une seconde phase de la lutte
Sur celle voie se troUvent à la suite ct successivement divers ponts sou s
engagée pour le déposséder de la bordigue dite du Roi. Elle est
lesquels passent les eaux de Caronte, qui se mellent en communication avec
portée aujourd' hui devant les Tribunaux administratifs. C'est là que
celles de l'étang' de' Berre. Ils sont construits en pierre. L' un d' eux seulement
va s'agiter et se résoudre la question relative à la nature de ses titres.
construit en bois est un pont-levis. C'est sur ce point que s'est pratiqué de
tout temps le passage des bateaux et navires qui de Caronte vont à Berre ,
Sans autre préambule , voici les faits:
ou de Berre à Caronte.
Les canaux qui amènent ces eaux sont de deux natures différent es. Les uns
sont libres; les autres sont occupés par des pêcheries, dites bordigues, dont l' existence et r établissement se perdent dans la nuit des siècles.
En partant de Jonquière et s'avançant du midi au nord, la première
FAITS.
bordigue est celle dite cana! et bordigue du Roi; elle appartient à M. de
Ga lliffet.
La seconde, cana! et bordigue de la Cabane; la troisième, cana! et bordigue
d' Engassier ; le quatrième , canal et bordigue de Clwpal~l ou Méjeall.
La ville de Martigues est assise à l'extrémit é occidentale de l'étang de Berre.
La propriété de ces bordigu es s'étend du côté du levant au-delà rlu détroit
Elle se divise en trois quarti ers principaux: l'un au nord , Ferrière; l'autre au
de Berre et dans l'étang du même nom, à une distance d' à peu près ·180 mètres,
midi Jonquière; chacun bâti en terre ferme ; le troisième, placé entre les deux
jusqu' au point qu'on appelle la limite des Cèdes; et au couchant la propriété des
autres , l'Ile, au milieu du détroit de Berre.
bordigues confine avec l'étang de Caron te , entre rnêmedans ses eaux jusqu' à
.
~
1\ existe entre la vi lle de Martigues et l'étang de Caronte, et entre cet étang
une limite qui sera ultérieurement fix ée.
et le port de Bouc, divers canaux par lesquels les eaux de la Méditerranée se
On sait , sans qu'il soit nécessaire de \' expliquer plus au long que les hordigu es
mettent en communication d' abord avec celles de l'étang de Caronte, puis avec
ne sont pas autre ohose que des défilés en cannes et roseaux, tracés dans l'int é-
celles de l'étang de Belore.
rieur des canaux qui communillueot d' un étang à un autre , ou d'un Nang à la
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mer, à r aide desquels le poisson est arrêté et pris dans les migrations successi\'es qu'il fait d'un point à l'autre.
Parmi ces bordigues de Martigues, la principale est celle dite canal ou bordi-
gue du Roi , propriété de M. de Galliffet.
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Les autres bordigues sont au nombre de neuf; elles ont divers noms inu tiles
à rappeler et appartienn ent aussi à di vers propriétaires.
Leur régime, leur const.ruction, et leur mod e d' établissemen t so nt semblables
entre elles, ainsi que leur destination.
Outre ces cana ux occupés par les bordigues, il existe le canal dit du POlilet,
celui dit. S' Séûrutie11, et celui dIt Prusage.
Les deux premiers sont libres de bordigues. Ils· sont destinés à laisser une
yoie ouyerte au poisson qui remon te de l'étang de Berre à la mer , et qui viellt
alimenter les aulres pécbene~ et bord.igues qui sont établies, cpmme on le dira
Tel est l' état actuel des lieux. - Voyons maintenan t ce qu'il fut autrefois;
et ne craignons pas de remonter à la plus haute antiq uité. Les lieux n' ont pas
toujours été comme on les voit. La main de l'homme a tracé ces canaux, puisque
sa main seu le les conserve.
bientot, en tre r étaug de Garon te et les ea ux du port de Bouc.
Le canal du Prusage est celui qui passe sous le pont- lev is dont il a déjà été
_parlé, et qui, ainsi que l' indique son nom , sert à la navigtion pout les balea ux
et navires qui de Ca ronte von t à Berre ou de Berre à Garonte.
Aristote ( de mirabilibus auscultalionibus, lib. 2, p. 58. - Guillau9JC Duval,
Paris, MDCXIX. l indique en ces termes de quelle manière les habitants de ces
contrées avaient conçu le premier mode de ces bordigues.
Le plan .versé au procès indique ce passage ct sa direction jusq ues aux bor-
Il dit ; (( on rapporte que dans le pa ys des Marseillais, près de la Ligurie, il
digues ent re Garonte et le port de Bouc , ainsi que le eanal ,aljqllel parmi ces
bordigues. il vient se relier.
(( existe un étang qui change de niveau et qui déborde. Il rejtllt ~ (eo débor-
Dans les canaux de S' Sébastien et du Pontet peul s'opérer le passage des
bateaux plats; mais non des na vires, ni des bateaux à mâts.
(( dant l une incroyable quantité de poissons. Lorsque les venLs éthésiens vien«
nent à souffler 1 il se forme une barre au fond de r étang; le sable s' y amon-
«
celle tellement et le sol devient tel que la barre émerge. Alors les habitants
du li eu la coupant avec des instruments à trois pointes , retirent san. peine
" de l' étang tout le poisson qu'ils veulent. »
«
Entre les eaux de Carvnte et celles du port de Bouc , ex istent égalemen t divers ca naux , daus lesquels SOll t établies, depu'is une époque aussi ancienne,
"des bordigues , ayant la même destination que les premières.
II fau t signaler en premier lieu celle düe du Passage, qui 'appartient éga lé-
Un aulre auteur ( les Annales de Marseille, par le père Guernay, imprimées à
Lyon en 1657, p. 13 l. rapportant ce passage d'Aristote, s'ex.pl'ime de la manière soi \'ante :
« Il existe près de Marseille, da Aristote dans son Histoire des poissons, un
ment à M. de Galli"ffet, et. dont le bana l sert d'e passage aux. bateaux et
na vires \'enant de Martigues et de Berre > pOur 'entrer dans les eaux du port
de BOllc.
u
élang abondant en poissons. Get étang couvre les plans qui en sont voisins.
« Mais lors des vents éthésiens, ces plans sont couv,erts de terre et leur superfi-
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«
cie dev ient so lide. Les habitants du pa ys coupent ces plans pGr de. canaux,
" et ils pêchent du poisson autant qu' ils veulent. »
Voil à l' art des bordigues à son enfance dans les contrées de Bouc et de
~la rtigues. Le passoge d'Aristote s'appliqne évidemment aux étangs de Caronte
et de Berre. Les vents d'Qll est devaient formel' une barre avant le cl'eusemcn L
des œ naux.
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" LES
PÈ~DERlES, TAH
«( LA MER;
ou RO O~E, DES lURAIS ET
ÉTA ~GS,
QUECULES ORS BORDS
DE
Il
Text e latin:. OM NES PISCATORIAS, tam de Rhodano , ET PALUDIBUS ET STAG" S
" QUAM IN MARITIMIS.
départementales)
»
( Voy. au dossier r extrait en forme pris aux archi ves
On remarquera que ce titre de concession n'est pas le premier: qu'il en indique
•
un précédent, puisqu'il confirme Manassè5, non seulement dans ce que \' empere'lr lui donne actuellement, mais encore dans tout ce que, PAR UN PRÉCÉDENT
Perfection né, cet art donna avec les siècles quelque chose de permanent.
Les canaux que nOliS voyons aujourd' hui furent creusés pal' la main des hommes.
DlPLO'IE, il avait obtenu: «ut super omnes res quas PER PRECE~TUM QUo ND!!! ante-
cessol' suus Rostagnus a predecessoribus nostris sive et a nobis ADQUIlIIVIT.
On se défe ndit contre l' amoncellement des sables; et la pêche, plus fa cile, devint
Et c'est dans le détail des choses qui se trouvent dans le domaine de Manassès,
babi tuell e et permanent e, à l'a id e de ces canaux et des défilés en roseaux qu i
lIue toutes les pêcheries sont énumérées. La charte dit : " Breve de terris quas
y fur ent pratiqu és.
" Manasses, archiepiscopus, INDO:umo suo TENVIT.
Il
L'importance de ces pêcheries. ou soit leur situation sur les bords de la mer,
Une seconde charte de 989 nous montre les successeurs de Manassès, dans
ou sur des étangs qui communiquaient avec la mer par les canaux Caits de mai n
l'archevêché d'Arles, en pleine possession des pêcheries du Martigues, en force
d'hommes, les placèrent dans le domaine des sou verains de Provence.
de leur titre primitif.
L'archevêque Annon dispose, sur la demande du prêtre Paco, au profit de
Ceux- ci en disposèrent et les concédèrent, en vertu du pouvoir sou verain qu i
plaçait le domaine public dans le domaine de la couronne, au profit des arche" êq ue d' Arfes.
La première charte qui les mentionne est celle de r anuée 920 ou 92 ' , donnée
à Vienne par l' empereur Louis.
Louis, dit l'Aveugle, empereur et roi de la Bourgogne cisjuranne, concède
par celLe charte à Manassès, archevêque d'Arles , le diplôme ou la reconnaissance formelle, de toutes les propriétés que l'archevêque d' Arles, ou san prédécesseur Rostang, tient de la libéralité, soil de r empereur lui-même, soit du roi ,
son prédécesseur. L' état, des domaines énumérés comprend , après le droit ,je
lasque et le dixième, et le pâturage d' Istres et de Flls, et de Argenlia: • TOlITES
l' église de Saint Gervais, située à Fos, du dixième de tous les poissons des pêcheries de Ponte. Le texte porte: «Dominus archigera concessit ei quod pe/ebat
slth testificatione 1.11 ibi supra scriptum est , regulariter viveret et (ratres ibi s!lb
"egula adgregaret. CONCESSIT ETIAlI ET DBCllIVN DB TOTOS PISCIÜ, QIJI III PISCATORIAS
DE PONTE FUERINT APPREDENSI. » (Extrait des archives départementales).
On ' sait que le Martigues était alors connu sous le nom de Ponte SanctiGenezii, ou simplement de Ponte. Tous les documents . ultérieurs et l'histoire
en font foi.
Ainsi, par la charte de 989 se complète ou s'éclaire la charte de 920. La
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généralité des expressions ùe la première contenait les pêcheries de Martigucs,
puisque par la seconde l'archevêque en ùispose.
«
En '1,1H, l'histoire nous signale une charle Douvelle, ùonnée à l'archevêque
d'Arles par l'empereur Conrad
III,
et avec elle unjonr nouveau se répand encore
sur les origines que nous étudions.
Dans la première partie, l'empereur énumère les biens el terres qu'il concède
et qu'il accorde à l'archevêque. Dans la seconùe, il confirme les concessions
précédemment faites.
Pour l'une, voici ses expressions et entre autres choses ce qu'il donne:
«
Nous accordons à vous "énérable Raymond de Montroud, archevêque de
• royaux dans la ville d'Arles, et dans l'étendue de votre œrchevéché, sa voir :
le droit de rendre la justice .....
LE S ÉTANGS
des salines ,
LE S LAC S, LE S "ARAI S ,
« les pâturages de Crau ... " »
Le texte latin:
«
« imperalia itaque decreta sequentes et antecessorum
nostrorlllll
clementiam imitantes, tibi, venerande R. Arelatensis civitatis archif.'piscope,
« el per te ecclesire Lure et' successoribus tuis nostra regalia in urbe Arelatensi
«
ET TOT lUS TUI ARCHIEPISCOPATUS,
(1
PALUDES.
scilicet: justitias .... stagna salinanl1ll ,
Et le texte lalin:
« tllum Arelntensis,
«
Ills!lpel' CO~PIR:U.\VIMUS,
Tml DOMlNIUM
quart re partis redùi-
et quc<,.lam pa"lem de Fosso, quod nobiles comes R. Th o-
«
teslamcnto suo noscitur dimisisse; dominium de Trencataliis ...... . abbationes
«
sancti Gervasii cum omnibus suis pertinentiis;
PI SCARI.IM DE
PO~TE
et qltidq"ùl
Arelatellsis ecclesia in civilate vel extrà, per seculares, seu ecclesiasticos, Itabet
« et Jlossidet "EL JUSTE IIADERE bEllET. " (Extrait des archives départementales).
Ainsi, par celte charte, le domaine de l'archevêque s'accroIt. Il avait déjà
!n propriété de toutes les pêcheries de Ponle.
On lui en donne confirmation.
«
Il acquiert de plus tous les étang., et les marais où elles sont situées.
Hien n'est plus clair, ni plus visible.
Nous prouverons dans la ùiscussion, que ces empereurs, Louis, dit J'A \'euglc,
Les étangs, les lacs, les marais, sis dans l'archevêché d'Arles, sont de toute
certitude ceux de Caronte et de Martigues qui étaient renlermés dans la circonscription diocésaine.
et Conrad
lU,
avaient, ainsi que les autres empereurs que nous allons nommer
encore, la souveraineté de la Provence, quand ils concédaient ces pêcheries.
En 1162, f empereur Frédéric 1 donne à Raymond Bérenger, troisième ùe
La dernière partie de la charte, relative à la conf1rmation de ce ,qui est dt'j à
nom , comte de Provence, l'investiture de la Provence , et la cbarte qui la con-
LA pÈellERIE
tient, réserve en termes exprés toutes les concessions déjà faites par lui ou par
ses prédécesseurs aux archevêques d'Ades.
'.
De plus nous' vous confirmons, dit-elle, le domaine du quart des revenus
Papon, t. 2, p. 559, Histoire de Provence, qui reproduit une partie du texte
de celte charte, la cite en ces termes :
nu PON T
«
" testament par le noble R., comte de Tou.l?use, à l' église If Arles, li l'archevêque
" Gibelin et à ses successcuTS ...... LA pÈCUERm DV POH ; et nous accordons à t'ou.!
" R. déjà nommé, à l'église d'A1'ies et à t·os succcsseurs, TOUT CE QUE L'ÉGLISE
" D' ARLES A ET POSSEDE, soil dans la t·ille soit hors la ville, par des personnes ec(, clésiastiques Olt séculières. "
LAces ,
».
possédé par l'archevêque, désigne, entre autres choses, nommement
de la ville ù' Arles; le qua,., de Fos, que nous savons auoi?' été légué dans son
" losallus, A"ela/cllsi ecc/esiœ et Gibelin{) archiepiscopo el successoribtlS suis in
« la ville d'Arles. et par vous à votre église et à vos successeurs, nos droits
«
11
et tout ce qui est possédé pa!' l' a!·cilev~que.
�12
13
L' em pereur dit: • Quod omnia regalia ipsius sint tam in mOlwtis, quam ill
Un historien que nous nous plairons à citer souvent dans le cours de ce mé-
«
por/Ubus, ripa/iris, pratis o' salin'is , et onlllibus aqui~, aquarumque clcw1'Sibus ,
moire, et qui a résumé avec une concision énergique nos annales provençales ,
«
et Gtnnia alia quœ ad jus imperia./e spectant,
en marquant souvent de la haute empreinte de son esprit les pages pressées et
EXCEPTO EO QUOD ARCDlEPISCOPUS ET
a ECCLESIA ARELATENSIS DADET \'EL IIADUIT A CENTUM ANNIS RETRO IN EADE!\! CI\1TATE.
Il
compactes qu'i l a publiées sur cette intéressante matière, M. Rouchon ,
aujourd'hui conseiller à la Cour d' Appel d' Aix,
Le 28 décembre 1212 et dans l'année 121.\., Michel de Morese, archevêque
d' Arles, obtint encore de l'empereur Frédéric ilia confirmation de tout ce qui a nlit
été possédé par ses prédécesseurs. Les letlres de confirmation font aussi mention ,
.
la l'acon le page 174 du
'
Résumé de [' Histoire de Provence. Aprèsavoir parlé de la fondation du bourg de
Barcelonnette, par Raymond Bérenger III, il dit: « Sur l'autre extrémité du
«
Comté. le château de Saint-Giniez se convertit en un bourg considérable
comme les précédentes, (tes étangs , lacs et mm'a-is, pâturages de la Crau , des
«
( les MaTtigues J, qni fut appelé, nonobstant la différence de position géogra-
terres de Châteauveire; de la quatrième partie, du lieu de Fos, ùe l'abbaye de
«
phique, à remplacer l'ancienne moritima, dans le territoire situé entre la
SaiDt-Gervai~, DE LA pÊcnERlE DU PONT , etc .. ... .
• mer, la Crau et les montagnes.
Papon, Histoire de PrOllellCe, t.. 2, p. 583, citant la première de ces chartes,
la résume en ces termes: "En 12'12, Michel de Morese, a7'chevêque d' Arles,
(, obt'lnt de l'empereur Fréd&ric (( la COllfi1'7nation la plus (Impie des d"oits "égaliens
a
dont il jauissait dans la ville d'Arles. »
La seconde se trouve rappelée dans l'arrêt du conseil du 21 décembre 1790 ,
pa ge H .
Mais cette fondation et les premiers travaux tent és par Raymond Bérenger Ill ,
amenèrent, en 1223, un traité célèbre entre l'arcbevêque d'Arles ct le comte
de Provence, où les droits du premier sur les bordigues des Martigues et de
Bouc furent reconnus et fixés pour jamais.
Celui-ci , en s' établissant. sur le sol occupé aujourd'hui par la ville. des Martigues, dans le quartier appelé de l'Ile, portait un double préjudice à l'archevêque.
Enfin jusques dans l'année 1364-, nous voyons ces concessions confirmées par
l' empereur Charles
Il
IV .
Il s'emparait d'un sol possédé par rarcb evêqu~, sur lequel lui ou ses auteurs
avaient établi une église, fond é un hospice, et que les hospitaliers avaient dé-
Ces titres légitimes de concession reçurent, dans leur exécution , la sanction
friché et amélioré.
De plus, le tumulte et le concours des habitants, Cl.'mme le bruit des ouniers
des comtes de Provence, qui dans le cours de ces siècles arrivèrent peu à peu
allaient nuire aux pêcheries de l' archevêque, éloigner le poisson et anéantir les
à gouverner la Provellce, d'abord comme possess~urs dll ce grl\nd fief électif et
revenus qu' elles produisaient pour lui.
héréditaire, puis COmme possesseurs définitifs.
Celle sanction n'élait pas nécessaire. S'Ins elle,les titres e1,1ssent été complets
et efficaces. Mais elle ne leur enlèvera rien non. pl~s de leur efficacité.
En 1223, nous assistoM à la fondation de la ville de Martigues,
Enfin il était encore un autre intérêt qui le préoccupait. C'était celui des possesseurs à qui il avait transporté à bail emphitéotique une partie des pêcheries
qui , dans r origine, lui 3,vaient été exclusivement concédées par les sQuverains
de la Provence, Louis, Conrad et Frédéric.
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A des griefs si énergiques et si justes, le comle de Proyence ne répondait que
JI défendait leurs droits , cn s'opposant aussI aux actes qui pou\'ai cnt les
l'al' lin fait dénué de preuves.
détruire.
Il disait :
L'archevêque d'Arles se pré\'ulait de sa longue possessio n Cl rie ses titres.
Le texte latin du trait é est trop précieux pour ne pas le rapport er ici.
({ Quod antccessores sui , de quorum stirpe ipse decenderat, mdificaverant
({ in insulâ prœdictâ. Quâ cie c3usâ ipse credeba t seaJdiftcarej ure suo.
Les plaintes de l'archevêque sont d'abord ainsi formul ées:
" Conquerebal.ur namque dictus archiepiscopus, prœdicto nomJlle, pro ea
»
L'a rchevêque niait cc fait , ou bien, s'il avait eu lieu , il ne s'était réalisé ,
selon lui, que par la violence, pel" vim.
• quad ( le comte) oeeupaverat dielam insu/am et faciebat eam bastiri : quam
Il y avait là matière à un trai té. Il fut signé le 3 des ides de janvier 1223.
insulam ipse arehiepiseopus et alltecessores' sui archiepiscopi habuerant et 1'11
En voici les conditions. L'arch evêque cède au cornle de Provence les deux
" pace possedera nt à tempore cujus non e..vlat memoria : ita quod, nomi ne Are-
terres ( duos (ermgines) sur lesq uelles le comte veut bâtir. Mais il stipule que
latensis ecclesim, construcla erat ibi ecclesia et. hosp itale, quam ecclesiam
tant ses pêcheries, que celles de ses feudataires seront conservées , respectées
«
«
« et hospilale hospitalarii tenuerunt longo tempore ab ecclesiâ Arelatensi; in
et protégées tant dans le présent qu e Jans
tantum quod infra ips3m insulam prœfati hospitalarii excolerant et redegerant
direc te, ni indirecte puisse leur être portée.
«
ravenir,
sans qu'aucune atteinte
" ad agriclilluram duas ferragines nomine ipsius hospitalis, prœstando ecclesi<r
De son côté, le com te de Provence cède à l'archevêque d'Arles un foule
" Arelatensi censum , videlicet unam libram piperi s , pro ecclesiâ, hospi tale,
" et insulâ supra dicta .
de droits à prendre et à exercer sur les territoires de Saint-Mitre, de Châteal.:veire et autres localités.
l~ t
Les plaintes de l'archevêque continuaient et après avoir indiqué, comme on
vient de le voir, les actes de son ancienne possession , il signalait les dangers
de l' œuvre du comte de Provence par rapport aux pêcheries tant pour lui , que
pOlJr ceux qui les tenaient de lui.
il promet ,d'observer et de subir toutes les condi tions qui lui sont imposées
par rapport aux pêcheries de l'archevêque et de ceux qui tiennent de lui.
Les engagements de l'archevêque et les conditions qu'il impose au comte sont
ainsi formulés dans l'acte :
Item dicebat dictus a-rchiepiscopus ecclesiam Are/atensem et (eudatorios suos
• Nos Hugo, Deigratiâ, Arelalensisarchiepiscopus cODsiderantes etdiligenler
«
plurimùm damnifiari pTOpler bastimentum prœdictu.l1l , quia impedientibus
({ attendentes manifestam et evidentissimam utililatem ecclesiœ Arelatensis,
«
ipso bast;menlo et tu.multu populari et animalium , pisces non poterant Libere
transire, siwt consueverant, AD PISCARIAS PONTIS SANCT! GINEZII , QUARUM PISCA-
«
RI ARUM PARTEM DADET idem fJ.7·chiepiscopus in proprietale suâ, et aliœ pm' les
" om nibus successoribus vestris: SALVO ECCLESiAl Noms SUCCESSORIDUS ET FEUD.\-
ab ipso tenenlur in (eOOum: super quibus omnibus sibi et ecclesiœ Arelatensi
({ (eOOatariis ejusdem intolerabile detrimentum et prœjudicium mani(eslul1l (am
« in piscariis quam ;n aliis videbitl<r in(erri. "
({ URUS NOTRIS , IURE QUOD IN PISCARIIS S.'NCT! GENEi li PER NOS \"EL PER IPSOS FEU-
«
«
«
«
donamus tradinll<s et cOllcedil1lllS titu10 permulationis , duas ferragines prœ-
({ dictas, in' insulâ prmdictâ, vobis Ra ymundo Berengarii prmdicto, et per vos
({ DHARIOS POSSIDERE DlGNOSC1MUS "EL UADERE ; ita tamen qI/ad PR.flDICTJE PISCAR1",
�16
• twbis val st/ccesson'b liS, ve1 fieudatal'l'/'S lIoslris coml?etenles IN ALiQUO NO~ AR« CENTUR, "EL MINU.\NTUR, \"EL DETERIORENTUR per vos vel per homines vestros,
R
nec patiamini quod aliquid fiat ab hominibus vestris, vel ab aliquibus aills
ft
PROPTER QUOD piscariœ prœdictœ in aliquo aI'een/UT, 11lillllan/ur, veZ dele-
n
17
Une fois établi dans l'tle Saint-Giniez, en foree de traité de 1223, le comte
de Provence y multiplia ses actes. Il chercha à s·agrandir. C'est le propre de
tOllt pouvoir.
rwrentur ..... ))
Ceux du comte de Provence le sont de la manière suivante:
(( Et nos Raymundus Berengarii comes pl'ovinciœ supra dictas RECII'IENTES à
«
vobis domino HugO/le, Dei gratiâ Arelatensi arcfliepiscopo, prœdictas ferragines
«
nominepermutationis, CUM PACTlSET CONVENTION/BUS SUPER/{jS
«
EXPRESSAT1S, cum consilio et voluntate consiliariorum nostrorum prœ-
«
dictorum, donamus, cedimus, solvimus et in perpetuliUl desemparamus vobis ..
«
albergas, cavalcatas, justitias sanguinis et alias justitias, etc., etc ........... . .
«
Concedimus etiam (suivent d'autres concessions ) .... ....
»
Puis le pacte est terminé par \' obligation que s'impose le comte de respecter
!,lt de faire à toujours respecter ses engagements.
«
Promittenles vobis et SlICcessoribus vestris, pel' nos et per nostl'os suc,ceSSf)res
" in bonâ (ide nos/ra et sub obligatione omnium bonol'ttm nostrorum, prœsentùlln
" et futurorum, universa et singula supra dicta salvare et defenderc jure et
• judicio. Ab omni violentia et ea rata et (irm~ habere. In perpetuum et nuUo
« tempore contra prœdicta venire ...... »
Par ce traité, le c~mte de Provence reconnut donc pour jamais la force du
titre constitqtif d~ bordigues du Martigues et d ~ Bouc.
Il pyomit solennellement de 'le défendre, et de ne pas l'attaquer.
Le corn le voulut luller contre l'archevêque.
li s'était emparé du sol, qui forme aujourd'hui une partie de la ville des Mar-
tigues. appelée Jonquière et qui, dès cette époque reculée, portait déjà ce même
nom.
Il s'était de plus emparé d'une bordigue joignant le terrain de Jonquière. Il
ava it rlécoré cette bordigue du nom de bordigue du Roi.
Il y avait dans ces empi/ltements de quoi réveiller l'attention de l'arcbe,,êque
d'A rles, et si celui-ci ne fut pas assez vigilant pour prévenir l'usurpation , il
fut assez ferme pour la faire attaquer, en son nom, et en celui de l'église d' Arles
par le prieur de Saint-Giniez des Martigues.
Cette double réclamatiun donna naissance à la transaction du 28 juillet i 292.
Mais ponr obtenir la restitution entière du quartier de Jonquière, le prieur.
au nom de l'archevêque, céda tous ses droits de propriété sur la bordi~lle dite
".
du Roi, et les transporta au comte de Provence .
L'acte s'exprime en ces termes:
i
0
Sur la res6ilution que fait le comte du lieu de Jonquière par lui occupé :
" Sacra regia majestas l'emùü, res/i{ui·/ et iil pace desempamvit et quasi
(( t1'a,lidit prœfato priori, prœsen/! et recip1enti nomine et pro parte dic/œ
« ecclesiœ prœdictam JONQUBRIM/ sl/perius dis(itlclam et confrontalam CI/Ill omnibus
« juribus .. ... »
Il en fit son obligation personnelle. C'est une première vi<;toire de ce titre
qu' il faut noter.
Ce ne sera pas non plus la dernière que nOIlS llli verrons remporter dans le
cours des âges.
2° Sur la cession faile par 1al'éhevèque de la bordigue, dite du' Roi:
E conversa prl1idictus PI'ior remisit, desempamvit prœfalœ ragiœ majeslati
" et successcribus suis, Olf~E JUS ET DOmNIUM et actùJtlem quod compe/it , SClt
(( competere posse~ prœdicto priori tlomille et PI'o parle ecclesiœ ~uœ et eidell~
«
�19
18
«
ccclesiœ, I~ PISCAR IA PR<E DICT ,\ SC!l occasione ipsius, ccl/ells et tralls(erCIl& oll1llia
jura, acliones, reales, seu personalcs, Uliles, sell di'rectas , miœtas, seu ,'el
«
persecularias quœ ejusdem piscariœ l10mine eidem priori
«
et
ejus ecclesiœ
(0111-
petlmt sel! competere pOSSltllt, ET POTESTATE~I CONCESSIT idem prior, /lom!ne quo
supra memom/œ regiœ majestatj, PURGANDI, Al\IPLIANDI, REFIr.\EN DI PR~DICTU!I
«
«
« BURDIGULDM SIYE PISCARlA1\I, et
à ceux-ci tou s les droits qu'ils tenaient de leurs titres primitifs sur les étangs et
les Lord igues ,
Il faut dire comment celle cession s' opéra, quelles en furent les condi tio ns ,
ce qu e devinrent les bordigues et ceux qui les possédaient..
C'est un derni er acte qui sc passe en tre les archevêqu es d'Ad es el le comte
de Prov ence, fi clôture la série de leurs rapporls et de leurs débats,
O1n11ia alia in co {aciendi pel' quœ reddi/us rt
Le 19 mai 14-57 un traité est signé entre René, comte de Provence, et
(, pl'Ovenlus dicti bure/iguli augeri: cOllservari el amplia?'i possint, , , , .. "
Et comme si la supériorité du droit des archevêques d'Arles o' ét~it pas déjà
l'archevêque d'Al'ies , dont 'Voici 1« substance,
suffisamment manifest ée, le comte de Provence, a soin de stipuler que l' arche-
de Martigues et lieux environnant et notamment tous les droits, tous les domaines
vêque d'Arles donnera sa ra tifica tion au transport qui lui est fai t.
qu' il po;sède sur les eaux et les étangs de M«rtigues , de Caron te, de Berre el
«
Fuit etiam aclum in /el' pa,'tcs, porte ce t acte cn terminant , quoe/ dominu s
«
prior {aciet et {acere promisit , cllrabit
«
el conuenlttS montis majoris et
• singula confirmabunt,
et
et
L'a rchevi'Jq ue cède au comte de Pro l'en ce tout ce qu' il' possède dans le lieu
r li e de
procurabit se (acturum qltod aMas
ARCIiIEPISCOPUS
Arela,tensis pTœdicta omn.ia
et
Le texte latin de l'ac te fera mieux connaître les objets cédés par l'archevèqu e d'Arles."
solenniter approbabunt, "
Tant était universellement reco nnu e l'origine légitime du droit des arche-
Martigues,
«
Castra, vil/am, (Qrtalicia, terras e t dominia, homincs et subditos ae juris-
, diClionem, census, prot,entus ac ,'editus et 011lnia alia uni versa
vêques d'Arles su r les bordigues! Tant il étai t vrai qu'en lui seu l résidait le
« et
pouvoir de le transférer au comte de Provence! ! !
«
et
singu/a jura
{emporalia cast1'Orwn Ferrariorum (de Ferrière ), Sallcti Mitri, Caslri
l'eteris,
et
seœtœ pOl,tis locis de Fossi, sitorum in dictâ diocesi Are/a/ellSi :
pertinentes ret'erendissimo arcltiepiscol'O,
Ainsi voilà le lieu de Ferrière, de Saillt-Mitre, de Cha/eauveire, et la sixième
p«rti<,: du lieu de Fos, et tous les droits qu' y percevait l'archevêque, cédés,
«
Celle reconnaissa nce de 1292 valait donc bien ce lle de 1223,
Elle a quelque chose de plus énergiqu e encore,
Voici maintenant le tour des étangs et des bordigues,
Le droit du comte de Provence à la bordigue dite du Roi repose su r celui ues
archevêques d'A rles d' où il émane et qu'i l'a produit.
L'a rchevêque cèùe encore:
contre les empiètements des com tes de Prov ence, soit calcul libre, éclairé ct
Nec non omnia universa e t singlila j1l1'a, ac/iones et juridictiones, e/ DO« lI1lNIA temporale! tame1l et temporalia quœ et quam prœra/us R, aI'chiepis-
yolontaire de leur part, la scène change. Les archevêques d'Ad es s'efface nt
«
Un siècle et demi plus tard, soit lassitud e des archel'êques d' Arles rie lull er
pour l'objet, qui nous occupe. Ils font place aux com tes cie Provence, Ils cèdent
«
copus Arelatensis habet et ltabcre prœtendit
IN SUPKRDICTIS AQUIS ET STAMNIS DE
•
�20
• MARTlCO, ET
DE
CORE HE
ET .HnS
IN LOCIS BERRIE ET ISSULIE MARTICI, qualiler-
«
cwngue el quomodocumque sire
«
tincant et pcrlil/cre possint aut debeant sive ralione hommagii aut alio qllo-
«
wmque jure, titllio sit'e cOllsâ, Clim omnibus suis singulis juribus el perli-
.f(
nenliis ........ )}
ea;
quâcumque causâ diclo archiepiscopo per-
En échallge, le comte de Provence abandollne à l'archevêque un péage
ann uel dans la ville et cité d'Arles, plus nn impôt également annuel de 40
florins à percevoir sur les terres d' Istres,
comme on l'a vu dans l'acte de 1223 , à divers, une partie des bordigues ,
l'arche\'êql1e qui stipule en 1 ~57 et qui cède tous ses droits au comte de
Provence snr les bordigues qui Ini appartiennent, a soin de réserver les droits
des preneurs emphitéotiques qui tiennent de lui ou de ses prédécesseurs,
traité de 1 ~57 qui repose, comme celui de 12'23 el celui de t 292,
SUl'
la
reconnaissance Pilr les comtes de Provence des droits des archevllques d' Arles
sur les bordigues et pêcheries de Martigues et de Bouc,
Au surplus, en dehors de ces trois actes généraux, qui dominent loute celle
longue période, et qui montrent les bordigues dans le domaine et la possessioll
premiers souverains qui gouvernèrent la Provence, il est une foule d'actes qui
donnent le même résultat et qui nous moutrent encore les bordigues dans les
mains exclusives des archevêques d'Arles, ou de ceux à qui ils les avaient
données à bail emphitéotique,
En voici la série:
II le fait en des termes, qui, joints à ceux contenus dans l'acte de 1223,
complètent la charte constl'tutive des droits des bordigaliers :
1u Le premier est un acte du 12 septembre 1235 par lequel Bertrand ùe
Fos et Cécile Huguette vendent à l'Archevêque d'Arles des pêcheries , usages et
I/em cont'clleront el pep;gerunl diclœ pal'/es, qllod diclus a-rchiepiscopus ,
• Silique in diclo archiepiscopatu successores HOMINESQUE PRIESENTES YB/. FUTURI
droits qu' ils possédaient à Caronle à r entrée du port de Bouc jusqu' au pont
Sai nt Giniez,
«
diclœ .,41'elatensis ecclesiœ ERUNT PERPETUO L1BERI ET QUITTI ATQUfJ FRANQUI
«
ONERIBUS et muneribus impositis et imponendis in dictis aquis et stamnis dc
aux archevêques, parce qu'ils déclarent n'a voir jamais possédé ces biens que
«
Marlico el de Corente PRO FRUCTIBUS OJ.fNmUS ET BONIS SUIS sic
comme llfl fief qui leur était venu des archevêques eux-mêmes;
«
et qllemadmodllm cOllsucverant esse temporibus pelJletuis:
AD
Et l'acte ajoute encore à celle pérogati\'e, celle-ci:
«
Il y es t dit par les vendeurs que celte vente n'est qu' un retour de la chose
Voici le te;xle:
(l
Con{essi {uel1lnt ea quœ sequan/ur se et prœdecessorel
SilOS
lia quod possinllibere Iran sire et Tedù'e per dictas aquas et stamnct absqlle
soluliolle aliwjlls oneris impos'i/i vel imponenlli, »
• lencre et lelillisse ill {eudl/m ab archiepiscopo Arelatensi et sub domin;o ejus
« ql/œ amnia vendiderunt diclo domitlO Arelatellsi, »
2° Le second est un acte, du 12 avril 1309 , de foi et hommage rendu à
Et celie-c.i ;
I"arcbe\rêque d'Arles par Raymond Gaufridi, écuyer, de tout ce qu'il possédait
<
•
Le comte souscrit à toutes ces conditions et c'est ainsi que se consomme le
des archevêques d'Arles, en force des titres que ceux-ci ayaient rapporlps des
Mais comme les archevêques d' Arles avaient donné à bail emphitéotique,
«
21
Quod passint et l'aleant in slamno de IrJarliao piscal'i libere cl quemadmodltlll
" cOllSucverunt""", -"
«
dans la suite des eaux de la mer et de Martigues, selon et en la form e que SOli
père en avqit fait \'.aveu aux précédf;!l1lS archevêques d'Arles,
�.22
23
30 Le troisième ('st un acle du 18 novembre 1319 conlenant foi et hommage
rendu à l'archevêque d'Arles par le prieur de Sainl-Ginicz de Marligues, de>
Et c' est-aillsi que tous les titres , ici ex posés, se prêlant IIne force mutuelle ,
la bordigue de Méjean el do tout ce qu'il possédail dans les pêcheries et dans
on comprend mieux , quand on connait le détail des actes des archevêques
l' élang de Marli gues.
J ' Arles touchant les bordigues de ~lartigucs et Je Caronte , le·soin qu' ils prirent
.1° Le quatrième est un acle de reconnaissance, du 28 seplembre 132 '1 , de
dans les actes de ,1223 et J e 1 .. 57, de stipuler pOUl' eux-mêmes et pour leur s
Berlrand de Porcellet , en faveur de rarr:he\'êque d'Arles, de tout cc qu' il
preneurs emphi téotiques la conservation de tous les droits inhérents à celle
possédait dans les eaux de Martigues, de Saint-Giniez el de Caron te.
propriété.
5° Le cinquième est un acte de reconnaissance du 13 juin 1326, par lequel
Reymond Garini, reconnait posséd er sub dominio al'chiepicopi, dans les eaux ,
so it daos les pêcheries, I~
AQUIS
seu
PlSCAnlIS
ponlis ilIsu/œ Sancli Gcne.::ii, la
demi de la bordigue d'ElIga.siel' qui confronte d' un côté avec la bordigue de
l'église de Saint-Ginie.:: et du levaut avec la cabane Baussenque:
«
ab tilla
" parle cum bUl'digulo ecclesiœ Sancli Gene.::ii, et ab oriente cum cabanâ Baus(( senquâ .. ..
' .J'
les étangs de Martigues et de Caronte, et sur les bordigues qu' y possédaient les
archevêques d'A rles tous les droits de ces derniers. Voyons ce que dev iennent les
bordigues qui leur appartiennent et qllel sort , sous leu r domination , subirent les
propriétaires des bordigues primitivement concédées par les archevêqu es.
Le comte de Provence possédait après 1 ~57 : 1° la bordigue, dite du Roi. On
))
6° Le sixième est une série J e règlements faits et publiés par l'archevêque
d' Arles , pour les hordigues de Martigues et de Caron te, dep~is l' année 128 5
jusques en l'année 1310.
i o Le septième est une enquête faite le 19 février 1332
Nous touchons maintenant à l'époque où les comtes de Provence ont obtenu sur
l'a vu par l'acte de 1292 qui la lui transporte;
20 La bordigue dont parle l'information prise le l e, juin 13î9, par les comtes
de Provence sur le détail de leurs dl'Oils dp. propriété aux lieux de l'tle Saint-
SUI'
les droits qll o
les archevêques d' Ades a vàient SUI' les bordigues ou pêcheries , s'ur le pont SaintGiniez et dans l' étang de Caronte. Elle en renferme l'historique et le détail.
8° Le huitième est un hail emphitéo tique consenti le 28 mars 1408, par
l'archevêque d' Arle. à Salvadùr Turc, du lieu de Saint-Giniez de Martigues de
Giniez, Jonquière et Ferrière. (V. au dossier, )
30 Une partie des produits in quodam burdigulo Baucenquorum
CV.
le mêm e
acte, )
Il succéda eu outre, en 1'\'57, à celles qui éiaient alors restées dans les mains
sept bordigues situées dans l'étang de Caronte , appelées AvcART , Fa/COll,
ries archevêques d'Arles.
1I1ais ces propriétés ne restèrent pas longtemps dans ces mains. Nous arri\'ons
Gentil , Fauge, .Bauge, (Cau Bourguignon et Nodal.
à l'époque où la Provence vint s'adjoinpre au royaume de France, et c'est
Ces bordigues avaient fait retour dans les mains de l'archevêque, par l'aban-
auss i,à la même époque que le iJernier comte de Provence, Charles du Maine,
don qu'en avaient fait les premiers preneurs emphitéotiques, qui les avaient
par le même testament qui adjoignait la Provence 11 la Fl'ancc , léguait à
laissé se dégrader , et qui avaient encouru la commise ou so it leur dépossession
François de Luxembourg, son cousin, la vicomté de Marligups Jont les bor-
légale, en vertu d'une sentence définitive prononcée pal' le juge de Salon.
digues formaient un e Mpend~nce.
�2,t
25
Le 10 décembre 1481 Chorles du Maine fai;;ait à Marseille ce testa[uent ct
ce legs solennel.
Ce legs dunna li~u à diverses diflicllltés que, dans l'intérêt du domainll de la
COUfOllljO, les a(,/,ministrateurs de ce domaine avaient soulevées,
Mai~ en~ f\lren~ successivement l'ésolues au profit du I&gataire et de ses
Le 11 décembre suivant il mOUl<lit.
Chacun connallles term es du testament q4i léguaient la Provence à la France',
On connaît moins cenx du legs fait à François de Luxembourg, Les voici:
U
Item pariter legavit sive reliquit jam dictus excellentissimus dominus IlOSte.'
l'ex teslator excellenti Francisco domino de Luxemburgo, ejus consobrino
«
clarissimo et suis hœredilJUs successoribus quibuscumque per in perpetuulll
héritiers, par les décisions solenAelle~ du p.arleJllent de Paris et du conseil d' éta "
ct par des leI.trcs pateotes royalGs,
,
« prp quam pluribus gratis et acceptis servitiis per ipsum Franciscllm dominum
,
Un arrêt d~ parlemcn~ de l?\Iris, du 21> septembre 1068, condamna d abord
«
Ic procureur général du roi
à mettre Sébastien de Lu'xembours en possessiou
de la v(comté' du Martigu~s, qui lui avait été
I?rivé j\lsques alors,
dispu~ée,
et dont il avait élé
de Luxembul'go sibi omni lempore bellorum eb paeis fideliler et curiosè
Un arrêt du c'lnseil d'état du 9 ao(\\ 1701 compléta ce premier ~ct\ldejuslicl',
• prœstitis; item et in compensationem multorum'Iaborum quos ipse Francis'cus
en déclarant ql!e le ,roi se désislait et renonçait à la réserve qu'il s'é!jlit faitc
" de LII~emhurgo non si ne magois sumptibus ill suosserviti() toleravit pro quibus
touchant la principauté du l\1artigues , dans l'arrêt de 1568, Il porte Eln outl'e
tex tu ellement:
«
" recognovit et confessus est, idem dominus n()5te~ rex ~stator ipse FraflciscOi
«
de LU:iiemburgo muhùm dcliert, ~'ice comitatum MarCiei- totum cum omnibus
" Quc le sie1{I' duc de Vendome , ses hoirs ou ayants-cau~e cJemeurer()tlt prol)rÎ/!tail'es incommutables de l(l principauté de Mar,tigues , cQnlenWjces et
" j uribus , dominiis , proprietatibus , rediLibus, pro"enübus ae emolumentis
«
" ipsius vice-coaütut(\s, item et.. .... Cum montibus, plàllis, silvis , nemoribus
« dép~ndq.nces, sa~
9u'ils y l'Il issent étre tl'Qublés, ni inquiéLés pa,r qui qlle ce
«
ac garrigiis, pratjs" ... " Item padtet 'cum aqois " aijuœductibus, roo/endini;;,
" soit, sous prétçxte de ipdite l'éserve , ct vQulant tra-iler {(lvr;rablernent le sieur
«
furnis et aliis '!.niversis et singulis rebus et bonis' ad diclum vice-comilatu11l
" de Velldâme, sa Majesté lui a permis et permet de dispo~ en tout o~ en partie
« de la principauté de Mal·tigues, méme rie ucndre et d'aliéner par démembremPIII
« les terres, fiefs et seigneuries unis et incorporés à icelle""" "
" pertinentibus ae p<,rtinere. seu speelare potenlibus et debentibus, modo quo" cumque et quâcumqll~ ratione sell causâ,."""., , ac curo omnibus et singu/is
« prœemineotiis, prœrogativis, 5ERVITUTIBOS, censibllii et. servitiis, et demum
« generaliter cum omnibus et singulis juribus realibus, et personafibus et a/ils
u
quibuscutl)que. quœclltl)qu~ et qua/iacumque sint e~quorumeumque nomine
« censeantur, »
François de Luxero.bou(g fu! donc le, légataire des bord,igues, d'e Maptigues
01 cie Bouc qU,i appa(l'eoJlient a1.l, dernien roi, comte de Pr.o>venc~,
Pal' ce testament, elles sortirent du domaine d.e! la couronne, pour hlmbep
dans le domaine d'un simple particulier,
Enfin le 26 avril 1702, des lettres patentes furent délivrées par le roi de
France au duc de 'Vendôme qui cons/lcraient' le dispositif de l'~rrêt du conseil
d'État du 9 aoOt 1701,
Et ces lettres patentes furent el\regis~rées au parlement de ' Provenoe, par
arrêt, du, 5 ari(\~ 47.92, CV, ces pièces au 0QSSier }.
. Ainsi' le legs,du dèrni~r, comte de Pro\(enc.e fut conserté dan, toute son iRtégr.ité; el,les-.bordj"gues: PliS 'plus que les'autres p~opr.iétés qu'il oooienail, ne
furent perdues PQor le légataire et ses sucoesseqrs
�26
La propriété de la vicomté de Martigues ( qui avait été érigée cn principaut é
27
par- les lellres patent es de juillet 1580 ) passa avant d'arriver à M, de GallifTet ,
Vui là le sort ct les mutations que subirent, depuis. le dernier comte de ~ro
da ns les mains de plusieurs possesseurs , qui , tous aussi , la conservèren t entière,
ycnce en 1408,1 jusq'les en 1772, les bordigues qni étaient restées la propriété
tlt> ce nernier de nos souverains provençaux.
De François de Luxembourg, elle avait passé à Sébastien de Luxembourg; de
celui-ci à la Famille de Vendôme, dans la personne de César, duc de Vendôme ;
puis à François de Vendôme, duc de BeauFort, son fils; puis à Marie-Françoise
de Lorraine, en vertu d' un droit de retour, et. de celle-ci à Louis-Joseph, duc de
Vendôme, à titre d'héritage; de celui-ci il Marie-Anne de Bourbon, duchesse
de Vendôme; puis au marécha l de Vi llars et au duc de Vi llars, et enfi n à la
\1 est à
l'~marqu er qu' il
ya .;ne concordance parfaite en tre les ' actes d'ac-
quisition de 1771 et de 1772, touc.han t les bordigues, acquises par François
de Ga lliffet, ~t ceux qui c~nstatent le nombre de bordigues qu'avaie~t posséll é
les comtes de Provence à Martigues.
On cn a "u déjà le déta il dans l'acte de 1379, ci-dessus rapp~lé. Le voici plus
dame Sophie-Élé~nore de Choiseul, veuve' de Jean-Charles-Joseph d'A nd igné .
co mplet dans un acte du 10 avril1550 , faitet passé sous le règne de François .e"
comte de Vesun , pour la moitié; et pour l'autre moitié au comte de Vogué, il
alors que la vicomté de Martigues était encore disputée à François de Luxem-
,
.
'lui le duc de Villars, prince de Martigues, l'avaitléguéeconjointem{)nt, chacun
pour une demi.
Le 16 mai ,177 '1, Louis-François de GallifTetacheta , par un acte sous celte dat e,
la portion d' Éléonore de Choiseul , veuv e d'Andigné, comte de Vesun; et par
un acte de li citation intervenu , le 20 mai 1772 , entre ledit M. de Galliffet
et le comte Vogué, le premier resta adjudicataire de la loca lité de ladite principa uté, moyennant la somme de 2,000,000 fr.
Dans ces diverses mutations, les bordigues restent toujours unies à la principa uté.
Et·dans les deux actes d'acquisition qu' en rapporta M. de Ga lliffet , on en
ou à. ses héritiers, et avant l'arrêt tl e 1568 qui en ordonna la restitution
cn f«v eur de Sébasl ien de Lux embourg.
Le 10 «vril 15:;0, il y eut co ncession temporaire de la seign eurie de Martigues
et de toutce qu',elle contenait E~ PÈC;IERIES
ET
DORDIGUES et autres ebjets , mai s
concessioh révo'cab le, au gré du roi de Fra~ce, en faveur'du duc d' Astri,
La
con ~esslon
fnt faite mo ye nnant le prix de 30,000 liv., restituables par le
roi tle France, dans le cas où la révoca tion de la concession se réaliserait.
Mais comme ceUe concession n'était que temporaire et révocable, il Y eut
un état estimatiF et inyentaire des objets qui étaient l'emi; en jouissance au du c
ll'Astri.
C'est dans cet ùlt>e/llaire des c1wses que possède et a le roi en sa ~'icomlé dl'
Martigues ( termes de l'acte ) qu'on lit :
trou ve la preuve,
Au non.bre des objets vendus se trouvent:
" LA GRANDE BORDIGUE,
b o ur~
DITE
DU ROI, celle du passage de Bouc, le huit'ième de
«
celle d' EtlfltUsier, le tiers du poisson d'été de la bordigue de la cabane de Baus -
«
senque et de celle de Dommergal ; c'est-à-dire; depuis la SaintéJean, jusqu'à la
• Saint-Michel ; la boutique à poisson.. .. .. " . ( V. au dossier ),
JI possède : (/ Item al/près de Jonquière une pêcherie DITE LA GRANDE BORDIGUE
" avec la ma'ison et limites, dans lesquelles personne n'ose pécher hormis le "oi Olt
«( ses fermiers ;
" Item un huÜième au bou,;'digon d'EIIgassicr,
" Item une bordigue qu'on appelle du Passage avec sa maison et limites ,
•
(/ dedans laquelle nulle personne n'ose pêcher hormis le roi ou ses fermiers ; et
�28
" sans qu'aucune barque y puisse demeurer pour y prendre port ,
l!
1ll3lS
seu-
lemeut passer et pour ce a été nommé la bordigue du Passage;
(( Item une bordigue que l' on appelle le Dommergal avec sa maiso n et limit es,
(( el
«
dans laquelle aucun u' ose pêcher hormis le IIOi, ses fermiers ou em-
phytéotes. "
Ainsi , à la lueur de ces divers actes, on arrive à la possession de la famill e
de Galliffet , saliS avoir perdu la trace de ce qu'avaient possédé les comtes de
l'royence, dans le domaine de leur CGuponne, et de ce qu'ils av!lient librement
et volontairement aliéoé. 1
29
Aydi n, ùe deux ellchènes faIsant la qllatrièmè partîe de la bordigue d' EnfJass'icl',
sise dans l' étang de Carollte.
'27 1l0vembre 101~, aveu fournÎ no même Cc5mmi1saire (lar Jacques Aycard ,
d' une euchène et demie de la bordigue de la cabaMBc(ù"senque.
'2 Décembre 151.4, semblable liveu pa'r Mathieu de DrHéhin de deux euchèllCs
ùe ladite bordigue.
18 Novembre ·1~ll, autre aveu fourni par Jacques Laurent cl' un hùitièmc
par indivis de la bordigue appelée la Cabane.
28 Novembre 15,. 1, semblable aveu fourni par la veàve de Robert Aymès :
1 ° de la IllQitié de la bordigue appelée de Na1!illon, près la Tour de Bouc de
Mais, si l'histoire des documents relatifs a u ,~ bordigues, propriété de
M. de
,f
Galliffet,
~st
si facile à sui vre, quOen est.il de celle des autres bordig ues du
lieu, s(>rties ou primitivement de.s main,s des archevêques, ou plus tard de
celles des com tes de ~ro vence, avant la réuniÇln du comté à la France? Des
Martigues; 2° tl e la moitié de la bordigue pppelée Canal Vieil, sis au même lieu;
3 u d'un 'huitième 'appelé Eogassien daés fétaog Je. Caronle de Martigues.
16 Mars' ·1576, 3I'Fêt du parlemeot d'Aix qui a déclaré que la directe de la
bordigue de Mourgues appartenait à Hugues Curnier.
actes au t~eo tiq ues prouvent encore la légitime possession ùe ceux qui les ont ou
acquises, ou reçues en héritages de leurs pères. ,
Il est un caractère commun à toutes ces bordigues, c' es~ qu'elles oot toujours
Voici quelques actes qui le prouvellt. Et comme plus tard, on verra les
bordigues en .géuéral, soit çelles de François de Galliffet, soit celles de tous les
autres possesseurs, attaquées, mais sorties victorieuses de la lutte, il n'est pas
i.nutile de montrer.en quelques mots ou leur origine, quand nou~ les con naisso ns,
ou les actes qui montrent leur légitimité. ~ 00 le fera rapidement.
,
été encadastrées et considérées comme des biens patrimoniaux.
Un ex trait du cadastre de 158~ prouve l'encadastremenl des bordigues: t o
Dommergal: 2° de Mourgues; 3° de VaUl'oux ; ~ o de Ira'L'illon ; 5° cie callal Vieil ;
6° de Goules.seque ;, 7" de Fauges; 8p de Gentil. E~ 1f}S noms de tous les pro"
priétaires qui les possèdent y sont indiqués (V. au dossier ).
1 1 Août 1 ~ 7 ~ , le tires de concession dopnées. par C harl e~ d'Anj.ou à Jea n
Cela résulte ei/core de deux autres ext ra~t s du cadastre de t6~6 et de 16 \.G
'l'Arles, go u verne u ~ de Martigues, de la place d' une borpigu es appelée Mourgues, si tuée dans l' étang de Caronte.
pour l es ',?o urdi g~es de l\'a«ea!c, de Faucoll, . d'au Bourguigllon , de Seguret., la
1
1
caballe
Bausscmnue,
Roque,
d'EllgassÎeT,
Cham·ruV etI
Rigord.
Les noms des
~
~t't
. !
2i Août suiva nt, bail emphytéo tiqu e perpétuel, passé par ledit Jea n d' Arl ~s
à Michel Cou ture et Jacques Rodolphe de ladite bordigue de MOUTguCS.
, ,
'14 Novembre 15-1~ , aveu fourni au mattre rational de Provllnce par Joac)lim
propriétaires y
sop~
également. indiqués.
Enfin un certifica t général, délivré le 11 janvier 1727 pur les conmls dos
Martigues, l'atteste en ces termes :
�•
31
30
•
certifions ct all es-
1<) Févriel' t 688, autre J' ugement des mê mes com mIssaires
.
qui décharge
son
M. le duc de Vendome et Ics autres propriétai res des bordigues du Martigues ,
" COMPRISES COllIIE D1E~S 1l0TUI\IERS dans les cadastres tant l'ieux que nOln'eaux, qu e
de la demande form ée contre eux par le fermier général en ex hibition de leurs
" notre communau té à fait faire en divers tempset notamment dans celui fail en
litres, sinon qu e les bordigues seraient réunies au domaine (V, au dossier).
,,1723 et pour être la vérité telle, avons ~i g n é les présentes... » (V. 'au doss ier;'
2'" Février i 733, décision du conseil d'État qui décharge les propriétaires
de,; bordif;uesde Màrtigues taxés à 3960 liv., parce que ces bordigues sont el,
«
«
:-Ious consu ls et adminislr<llcurs de la ville de
tons à tous qlJ'il appartiendra, QUE TOUTES
LE';
~Iarl igup.s,
DORDIGUES DE CErrl!
\'lUE
Il en est de même aujourd·hui. Toutes Ics nordigues sont. encadastrées , et ln
bordigue du Roi paye 2351. fr. d'impositi on,
O~T TOUJOVns ÉTÉ
DES BIE NS
PURE.IENT PATRIMONIAUX (V. au ' dossier).
En fin 28 av ril' i 752, décision du conseil qui 'Mchao'ge les propriétaires des
Ce caractère leur fut su rtou t reconnu dans nne longue série de décisions
judiciaires et administratives, tout es les fois qu'il plaisa it aux admini strat eurs
du domaine de la couronne, de frapper ces propriétés, de les imposer des
droits que le domaine avait coutume de percevoir sur toutes les aliénations
faites précairement et à titre révoca toire, ou d' en demander la réunion à la
couronne.
Dans toutes ces ci rCvnstances les propriétaires revendiquaient toujours le
caractère de patrimonialité de leurs propriétés, et ils étaien t reconnus exempt s
bordigues de Martigues de la taxe du vingtième sur les offices et droits. Le dirccleu'r y reconnaît qu' ils sont des biens patrimoniaux , sujets à des cense,;, l'ede"ances seigneuriales, soumis à la taille et au tres im posi tions de la communauté,
.
.
.
comp ris dans le cadas tre, et qu'ils ne dilTèrent en ri en de,; au tres biens fonds;
1
.
.
que les jugements rendus pal' 1 intendant de Provence et les commissa ires du
domaine el la déciJion du conseil du 2~ février 1733 qui les décharge du droit
de confirmation, en SOllt une preuve bien convaincallte. Pourquoi le directeur
es time qu' il est juste d'acco rder la décharge sur les rôles arrêtés au consei l.
de celle réunion et de ces droits qui ne pouvaient les alleindre.
La série en est importa~te à con~allre, la voici:
i 2 Mars i 627, jugement rendu par les com~issai res du domaine d') Provence
contre le procureur du roi en celle commission , qui demandait la réunion au
domaine de la bordigue de Mourgues. Gaspard Chaud y, propriétaire de celle
bordigue est renvoyé de la demande.
2i Aotlt i ,6,j,6, jugement rendu par M. de Champigni, intendant en Provence, par lequel, sur la représentation de partie des titres qui ont été ex posés
en ce mémoire et qui so nt visés dans le jugement , les propriétaire,; des bordigues ~e l' ~tang de Caronte et de celles situées près Martigues, sont déchargés
des dr:'ts de confirmation, dus il la couronne par tout possesseur révocable, il
C<1l1se e joyeux avèoprnent (V, au dossier ).
Une dernière preuve allendait les propriétaires des bord igues , François
de Ga llifIet et les au tres possesseurs,
C'est la dernière phase des attaques dirigées contre eux , sous l'allcienne
Ic\gi,;lation. dont ils ~o nt sortii vi/ltorieuJl .
Ce récit -a, avec la lulle nouvelle qui a été engagée contre M. de GallitTet
seul , trop de relations : il y a dans les arrêts qui
r ont
fait triompher alors,
trop de lumières à puiser, pour ne pas raconter avec soin quelle fut celle lull e
ct quelle en fut l'issue.
En 1780, M. de Ga"ifTet al1aquai L par tieree-opposition , devant le consei l
du roi, un arrêt de ce conseil du 23 aoOt ,( 7i8, lors duquel il n'avait
�pa> é{é entendu, daus Icq uel il n'avai t pas élé partie, et qui pOUl'Lan' blcSSilit
ses droits-et ecux des autres propriétaires de bordigue3,
Il élevait alors uoe double réclauli!lioll. Il dema,ndait d'ubQrd à Nre ~conllu
propriétaire de tous les é tang~ de B ElIT~ , de Marti gue~ et de ,Carol/lp , comme
fa isaot r;artie de la principauté, de Mar ki!;u e~ , '
'
bordigues, pêcheries et droils utiles qu.'il \lvait dro,it dE: \,cr<;e\'o(r, notflmll1C!Jl
des bordigues nommées cil. R@f, d~ Pl{s~ag:e d'Istres, e,t d'un, ?1.\ilième de celle
pO,ssE:s~eurs
des. sept
huiti~ m es
de ces bordigues et des autres les dcoit~ auxquelles elles étaient assujéties,
Les ~oclu.sions de celte rel{llêle en t.ierce-oppositiQn sont rappelées el texluellement rapporlées par l''1rrêt dlt.25 allôt 1781, en
(1
li demandait principalement à être déclaré propriétaire incommulable, comme
CeS !~rme:
1
pal,rimoniale ;
A M faut, et dans le cas où le Roi penserait que ces choses ou une portion
d' entre elles, avaient jama is fait partie du ùomainedes com tes de Provence, il
demandait à en être encore reco nn u propriétilire incommutable, en verlu de
l'édit de juin 1668, qui, sur les réclama tions de la Provence, avait maintenu et
décla ré irrévocables loutes les aliénations du domaine de la couronne faites pal'
les com tes et rois de Provence,
1 Mai/lte/lir at garcler le suppliant dans la propriété incommutable
DES
'J
1
dll 9 avril 1568, avec juridiction e! dù'ecte, CO)1lTl1e. (aisant
lIal'(ie
de la 1)riO.. 1,
•
(
(( cipauté de Martigues, )}
C'était là le premi er objel :
(( 2° Ensemble
DES BORDIGUES, P ÊCHERIES
(( est en d1'Oit d'y percevoir, notamment
D'ISTRES ,
et d'un huitième
)jE CELLE;
Il
Et dans le CIU> où sa majesté l'roliverait quelque d'ifficulté à considérer le sup-
•
«
et droits utiles qu'il a COli/ume et
DES n ORDIGUES NOMMÊES DU ,ROI, \lU PA SSAGE
D'ENGASS,IJ~: R, et danS le dl'oi( de ,percevoÎr
des possesseurs des sept huitièmes de ce. bordigues ct des autl'e$ ill(~ocI,és les
"
u cens et redevances. et tous les d'roits et devoirs aua;quels ils
sont assujétis, )}
u
C'était là le seconù objet de ses conclusions,
1
En fioisSapt, il conclu~it aussi au maintien des proprjétaires des aulres bor'
digues, eo ces termes:
u
de défense emprunté à ses litl'cs,
0
(( EAUX, SOL E T TERR A IN DES É TJ;tNGS énoncés
et limités1 dans.!' arrêt
'1
. 1
"
M, de GallifIet, à l'a ppui de ses demandes, (\le\'ait un double syslème
ayant sur les choses revendiqu ées un droit qui, de toult emps, ava it été propriété
f
Il demanùait, eo secood l~e u , cl:'ètP~feeol\nU el L\~~laré propriéta,ire des
([,EllgasS'Îer, el dans le dro.il de percevQir des
33
3° Maintenir pareillement les possesseurs desdites bordigues et pêcheries da';s
• leur propriété. pour ~n jouir sou,s les charges portées par ~rs aveua:>. recon• naissances et déclara.!ions, )}
1 ,
(( pliant comme ayant eu de
TOUT TEMP S, LA PIlOPRlÊTÊ PATRIMONIALE DESDITES EAUX,
Il ÊT.\ ~GS, BORDIGUES ET PÊCHERIES,
et qll'ils eussent (ait, en quelque portion, partie
" du domaine des comtes cie Provence, ( cOllclut à ce) que l'édit du mois de ju.ill
(( '1668 .Iera eώcutc selon sa (orme et teneur, et en con$~quellce le MAINTENIR
« PAREILLEMENT DANS LA PROPRIÉTÉ I N<:OM~IUTA DLE DESDITS OnlETS ensemble dans tous
(( les dl'oits qui lui sont attribués par les titres,,,
Jl
Un arrêt interlocutoi re du 13 aou t 1780 ordonna,
QU'AYANT FAmE DROIT ,
il se-
rait procédé, par l'intendant et commissaire de la généralité d' Aix, eo présence
de M, de GallifIet et des aulres propriétaires de bordigue, et de tel officier
de l'amirauté de Marligues, ou de telles antres personnes qu'il jugerait à propos
d'y appeler, à une visite: (( 1°
DE SEAUXET ÊTANGS DUDIThIEUIJEMA RTI GUES ;
(( QUE DES DORDIGUE S CONSTRUITES SU R LEDIT ÉTA'NG,
2° AINSI
à l' eITet de reco nnallre si
« lesdites bordigues sont nuisibles à la navigation et à la pêche, ct si elles
• peuvent porler quelque préj udice tant au port de Bouc qu' au cana l par
�3~
« lequel le:;
El<1UX
de la mer entrent dans ledit étang; indiquer, audit cas, les
« moyens de prévenir ou empêcber ledi t préjudice.
Il
35
(Termes de l'arrêt).
" conseil clu 13 MQt 1780, sa ns s'a rrêter à la demaode des mai l'e et échevins
,
L'inleodant était de plus autorisé à se faire assisler des hommes de l'art :
" co nsuls et communauté de Martigues, aux fias d'être reçus parties interve-
De recevoir leurs dires et observations, d'ente ndre celles de M. d e Galliffet
" na nles, dans laquelle sa majes lé les a déclarées non-recevables,
el. des aulres propriélaires de bordigues.
c( l'tJ..\INTENU, GARDE ET lUAINTIENT LEDIT SIE UR DE GALLIFFET DANS LA PROPRIÉTE DES
« TROIS OORDIGUE S, APPELÉES DU P.\ SSAGE U' [STRES, DU ROt,
De dresser un procès-verba l du tout, pour le tout être so umis au conseil du
«
roi et être ordonné ce qu'il appartiendra .
M.U~T1ENT également sa majesté, les propriétaires des autres bordigues, sitltée~
proche la v·ille de Martigues et dit port de Bouc , DAN. LA PROPRIÉTÉ D'ICELLE S. "
«
des l'aisseaux marchands: 3° des synd ics des maUres constructeurs de bâliments
«
de mer; 4° des consu ls de Martigues; 5° des députés des communautes de
des bordigues; 7° enfin, uo plan des lieux dressé par le capilaine de vaisseau
Plé vi lle.
Rieo oe manquait à cett e procédure: tout y é lait propre à faire découvrir
la rérité; les éternels ad versaires des bordigues, représentés par lous les co rps
di,'ers que nous l'enons de citer, tous les titres, tQutes les objections, lout fut
On le voi t sur les deux ques!ions, soumises a u consei l, une seule avait été
réso lue, ce fut celle de la propriété des bordigues. Mais elle fut complètement,
entiè remenl, sans rel our. L'arrêt contient dans le surplus de son dispositif, quelqu es conditions imposées aux proprié laires de bordigues, qui al.Lireront dans la
di scuss ion totM noire attention, mais qui pourle moment peuvent être négligées,
et ces conditions mêmes indi'luent toujours mieux que la question des bordigu es
é lai t délinilivement "idée.
écouté, entendu; l'iotérêt de la oavigalioo, la prétendue nucuité des bordig ues.
Eh bien ! loute cette solenoelle inv estigalion aboutit au triomphe des propriélaires de bordigues,
Leurs titres sortirent vielorieux de r épreu" e; et plus celle que l'arrêt inl er-
Celle qui ne le fut pas par le consei l du foi, et qui fut réservée à M. de Galliffet
pour se pourvoir ainsi qu' il appa rtiendrail , fut celle de
ilES
cl usions de M. de Galliffet; qu' il avait for~ulée par ces mots énergiqu es:
U
consacra pour la dernière fois leurs droits, est devenu puissant et irrésistible.
qu ée comm
Le dispositif en est a i~ s i conçu :
LA PROPRIÉTÉ DE S EA UX
tTA~GS, comme dit l' arrêt, celle qui avait formé le premier objet des con-
locutoire du 13 aoû t t 780 leur ava it f,!it subir éta it grave , plu s l' arrêt, qui
Le 25 août 1781 , le conseil d 'Étatrendit son arrêt.
à se pourvoir ainsi qu' il appartiendra, quant à la pro-
" pri élé des ea ux ;
1° de.s pêcheurs , dits de l'art même de la pêche; 2° du corps des cap ila ines
Berre et de Sa int-Chamas; 6° de M. de Galliffet et des autres propriétaires
et d' ItIl huitième dall.~
celle d' Engassier;
« Sa uf audit Galliffet
4 Décembre 1780, rapport de l'intendant, auquel furent joints les mémoires ;
« LE ROI ÉTANT EN SON CONSEIL , conformément
A GARDÉ ET
PR OPRI ÉTÉ DES EAUX, SO L ET TERRAIN DES
FAISANT PARTIE DE LA
ÉTA~'GS, celle enfin qu'il avait revendi-
PRl~CIPAUTÉ
DE MARTIGUES.
Mais ce qui ne fut pas jugé en 1781 sur ce point, le fut dans une autre instance devant le conseil du roi, clèluré par un arrêt postérieur de plus de neuf
à l'av is dEsdits sieurs com-
" miSSall'eS, faisant droit sur l'ioterlocutoire ordonné par l'arrê t de sondil
a nnées à celui dont le détail vient d'étre rapporté.
Un mot de cet arrêt devient ici indispensable, comme complément his lorique
des fai ts.
�36
37
III. de Ga ll iffet, en vertu des droits de propriété et de juridiction, qu'il n\'~it
«
sur les étangs de Berre , de Caronte, renfermés dans sa principauté, ava it
«
obtenu divers arrêts du :p~rl ement d'Aix, qui avaient fait respecter ses droits
«
marque/' les filets des ]lécheurs à ses armes, et qu'ils lui avaient ettt/'ibué les
amendes . .. ce faisant, main tell i,' et garde/' le sieur duc de Penthièvre et PO!!/'
lui les ofliciers de l'amirauté de Martigues, en la possession, jo!!iSs.lnce et wel'-
exclusifs sur la propriété de ces étangs.
Vu arrêt du '15 j~nvier 1780 avait ordonné l' exécution des arrêts et règle-
Il
cice de la haute j'ust ice et de la po{;ice SUI' toutes les ea ux de lct mer de Martigues :
ments concernant la pêche da ns les eaux et éta ngs de Martigues
« arm es les fil ets employés à la pêche dans ces eaux ; ... maintenir encore le
Un autre du 23 fév rier, même année, avait co ndamné un sieur Ripert à I~
mende, pour a\'oir pêch é la nuit au flambea u dans l' étang de Caronte
Ull autre du 30 ma i avait prononcé des condamnations con tre les pêcheurs sur
les étangs de Martigues.
« f~ ir e
inhibitions et défenses
~udit
sieur de Galliffet de faire marquer à ses
« sieur duc ci e Pen thi èvre dans le droit de possession de perceyoir lui seu l à
«
so n profit, excl usivement aud it sieur de Galliffet, toutes les amendes qui avaient
«
été ou pourraient être prononcées à raison des délits et con traventions sur les
«
mêmes eaux ...... (p. 3 de J' arrêt de 1i90).
Il était impossible de mieux marquer la nature de la prétention cie M. de
Enfin un dernier du 21 juillet 1780 avait fait défenses aux pêcheurs et autres
Ga lliffet. Et en même temps de lui opposer une prétention contraire plus éner-
'de pêcher dans les étangs de Martigues.
tous les étaugs que M. de Galliffet avait revendiqués devant le conseil du Roi ,
gIqu e.
L' une et l'autre montrent qu' il ne s'agissait plus ici des bordigues, mais bien
lors de l'instance terminée par l' arrêt du 25 aoCH 1781.
et exclusivement de la prupriété, de la juridiction , et de la haute police des
C'étai t tout au tant d'actes qui ca ractérisaient ce droit général et absolu
SUF
Ces arrêts du parlement de Provence furen t atlaqués aux co nseils du Roi :
étangs de Berre, de Martigues et de earoute.
Les pêcheurs et les communautés de Martigues ct de Sai nt-Chamas, au con -
1 0 par le procureur du Roi au siége de l' am irau té de Martigues; et par M. do
Penthièvre, amiral de France. On verra bientôt leurs motifs.
2 0 Ils le furent encore par les pêcheurs, la comm unaut é de Mart,igues et la
traire attaq uaien t par tierce- opposi ti on l' arrêt du consei l clu 25 ao(1I178 1, puis
ensuite les arrêts du parlement de Provence plus haut rappelés.
Par un e première requête ( p. 4, de J'arrêt de 1 ;90) ils concluaient p/'inCÎ-
communauté de Saint-Chamas.
M. de Pen thièvre , amiral, et le procureur du roi à l'amirauté de Martigues
paiement:
Il
se réunissaient dans leurs efforts. Ils concluaient dans un intérêt univ ersel :
A ce qu' il plOt à sa majesté leur donner acte de ce qu'en taot que de
« A ce qu'on leur donnât acte de l'opposition qu'ils déclaraien t. form er
«
besoin ils c~llve rti ssaie nt la demande en cassa tion formée par la précédente
co mm e tiers non ouï auxd it s arrêts du parlement d'A ix, des 3, 23 fév ri er et
«
requ ête, contre l'arrêt du conseil d'État du 25 août1781, en ti ercp-opposition
« 21 juill et 1780, en ce qu'on pourraH en induire con tre ledit sieur du c de
«
audit arrêt: ce faisant, leur donner acte ci e r opposition, et ordon ner que les
Penthièvre et les officiers de 1am irauté de Martigues, que ces arrêts C11-'aient
«
bordigues construites su r la mer ou éla ng de Martigues sera ient détru it es ct
«
supprimées comme nuisibles, tant à la navigation qu 'à la pêche sur ledit
«
étang faisant partie ùe la mer Médi telTallée.
«
«
• attribue à M. de Galliffet, en sa qual-ité de seigne1l1' de Mw·tigues, la justice et
• la police sur les ea1.lX de la mer à !fartigues; qu'ils l'avaient etu.Urrisé à {etire
�38
39
Et subsidiairement:
II al'ait hésité, à celle époque , à rcconnaltre la propriété des étangs ct du
go lfe. Il la lui refusa, ~n y déclarant la p(\che libre.
« Ordonner que les réseaux d\!s cloisons des bordigues seraient. tissus, savoir:
( suil un détail inutile à rappeler ).
Tel fut l'arrêt du conseil rendu le 21 déc~m bre 17!l0, au moment où par les
Par une seconde requête (p. 5 de l'arrêt de 1790 ), ils demandaient qu'il
lois générales du royaume, tout es les p" érogatives des seigneuries et des prin-
plat à sa majesté:
cipautés s'étaient évanouies pour se confond l'e dans la· puissance publique.
En voici le texte:
" Casser et ann uler les àrrêLs du parlement d'Aix des 15 janvier, 3 et 23
«
février, 30 mai ct 2 1 juillet -1780, et tout ce qui s'en était ensuivi ou avait
«
pu s'ensuine; condamner les sieurs de Galliffet à rendre et à res'.ituer toutes
«
• arrêts du parlement d'Aix des 15 janvier, 3 et 23 février, 30 mai et 21
" avaient é t~ contraints de payer en exécution du susd it arrN rendu sur l'avi s
«
«
des sieurs commissaires ou de ceux du parlement d'Aix.
" desdits arrêts, et notamment à rendre à M. I"amiralles sommes qui leur ont
«
• Comme cont'raÎl'es aux lois du l'oyaume et à la puissance publique, en consédans le libre eœercice de la pêche DANS LE GOLFE DE MARTIGUES, comme faisant
partie des mers publiques du royaume; en se conformant par eux aua; lois de
«
police et générales de l'ordonnance de '1681 , arrêts et règlements postérieurs
" sur le fait de la pêche. »
«
Ainsi le litige était double. Les pêcheurs demandaient la rétractation de l'arrêt
du conseil du 25 aoat 1781.
Le duc de Penthièvre, le procureur de l'amirauté de Martigues et les pêcheurs
demandaient de plus la liberté de la pêche; ils contestaient à M. de Galliffet la
propriété, la police et la juridiction des état:gs.
Il était facile de prévoir quelle allait être la décision du conseil du roi .
Ordollne sa Majesté que ladit e ordonnance sera exécutée su ivant sa forme
«
et teneur dans les étangs de Garonle et de Berre et golfe de Martigues; en
«
conséquence déclare que la pêche sera et demeurera libre dans lesdits étangs
«
et golftl, comme dans le reste de la mer, salis que les sieurs de Galliffet puissellt
«
y prétendl·e, ni exercer AUCUNS
« CO~CESSro~s
DROITS AUTRES QUE CEUX RÉSULTANTS DES TITO ES DE
DE LEURS BORDIGUES.
Veut au surplus sa Majesté que l'arrêt de la
• chambre des comtes de Provence, du 9 avril 1568, et les arrêts et règle«
menls rendus en conformité, soient exécut és par provision eljusqu 'à ce qu' il
« ~n
ait été autrement ordonné, en ce qui ne sera pas contraire à \' ordonnance
« de 1681.
.
Celui-ci n'avait pas hésité en ·1781 à recon naltre à M. de Galliffet la propriété incommutable des bordigues. Ilia reconnut et la proclama de nouveau,
en repoussant la tierce-opposition à l'arrêt du 25 août.
été adjugées et qui auraient dO être prononcées au profit dudit sieur amiral ,
• aux termes de l'anlicle 10, du til. 1, liv. 1 de l'ordonnance de la marine
« de ·1 681;
• quence qu'il plût les maintenir et garder, ensemble tous les sujets de sa majesté
«
juillet 1786, ainsi que tout ce qui s' en est ensuivi ou pu s'ensuivre; condamne
« les sieurs de Galliffet à rendre les sommes qu'ils ont perçues en exécution
Par une troisième ( p. 2 eod. ) ils avaient demandé la cassation des arrêts du
parlement d'Aix de 1780.
«
missaires, faisant droit SUI' l'in stance, a cassé et annulé, casse et annule les
o
" les sommes que les habitants de Martigues et consorts, ou aucun d·eux.
Le roi étant en son conseil, en présence et de l'avis desùits sieurs com-
Sur les demandes des habitants de Afartigues, Saint-Chamas et autres,
!:ONCERNAN'I" LEUR TlERCB OPPOSITION A L'ARRÈT DU 25 AOUT '1781 , ensemble Slll'
tout.es les autres demandes respectives des parties, LES MET DORS DE COUR, sauf à
«
•
«
�40
. d ra a' la. police de la nav i"..a« être ult érieuremen t pourv u, ai nsi qu , il appartlen
tio n et des pêcheries dans les étangs de Berre et de Caront e. »
«
Aiosi l'a rrÔt du 25 ao Clt 178 1 fut confirmé.
Ainsi une seconde fois, M. de Galliffet fut déclaré propriétaire incommutable
de ses bord igues et les autres propriétaires des leurs,
Ainsi la liberté de la pêche dans le golfe de Martigues ne fut rendue qu e sous
les cond itions de res peGter les droits inhérents aux titres des bordigues.
Ainsi enfiu triompha, même sous l' ère nou velle de nos lois, le droit de propriété que tant cie tit res ùéfendaient, et que, par lant d'efforts multipliés, on
avai t vou lu renverser.
4\
«
chen t à tirer de la feodalité et de la liberté de la p~clre paraissent déstitués de
« fondement. On ne voit auculle trace de féodalité dans l'acte de 1223. C'est
" tOllt simpl pment un e concession de fonds à titre d'échange avec des cla uses
(' qu e les parties contractant es avaient bi en certainement la faculté de stipuler.
« A l'é,gard de la liberté de la pêche, les habitanls de Martigues ne pourraient
« l'in voquer qu e dans le cas où ils sel'll ient pri vés de ce droit ; ce qui n'est pas.
« D'ailleurs, ils ne peuvent réclamer d'a utres droits qu o ceux allachés au ler«
rit oire sur leq uel leur's auteurs ont consenti à s'éta blir. Les pêcheries su bsis-
«
taie nt avant ces établissements. Elles onl été reconnues et peu t-être Martigues
n'ex isterait point si l' échange n'eut point eu lieu. »
«
Sigcé DEcHAMP.
Vers cell e même époque, 16 janvier 1790, sentence du lieutenant de l'amirauté de Martigues, qui condamne les prud'hommes pêcheurs, pour avoir fait
jo(ller dans le ca nal de la hordigue du Roi. Elle en fait respecter la propri ét é'~
Puis arrivent des temps malheureux. M. de Galliffet père émi gre. L' Etat
Les faits qui vont sui vre et qui nous amèn ~ront à l' époque acluelle sont tous
conformes à ces précédents.
s'empare de ses biens et de ses bordigues. Mais il les conserve telles qu'elles
sont. Elles son t ad min istrées durant quelques années par la régie des domaines;
2 Niv ôse an x, jugement du tribunal correctionn el d' Aix, qu i condamne le
et consu ltée par les administrateurs locaux sur la légalité et la légitimité des titres
patl'o n pêcheur Jourdan, pour a"oir ca lé ses fil ets dans le canal d'une bord igue.
sur lesquels repose cette propriété, elle s'ex prime par la bouche de ses adminis.trateurs généraux, à la date du 26 ni vôse an
IV ,
ainsi qu'il suit :
" Au citoyen Rippert, directeur.
«
No u! avons, citoyen, examiné le rapport qui était joint à votre lettre et
" autant qu' il est possible de juger la validité des droits dont on n'a pas les
«
titres sous les yeux, nous pensons que ceux de la république sont bien fond és.
«
«
«
En effet ils dérivent d' un acte authentique passé entre des personnes qui
pouvaient contracter. Ils sont confirmés par une possession longue et constant e
et reconnus par des jugements solennels, Les moyens que les habitants cher-
Dans l' année 1816, même jugement émané du tribunal civ il d'Aix, el confirmé SUI ' l' appel, qui condamne des pécheurs pour avoir tendus leurs filets dans
le ~a nal de la bordigue du roi .
Depuis sa réintégration , M, de Galliffet a ~ait repris la jouissance de son droit
ùe propriété.
Jamais il n'y ava it élé troublé.
Voi ci l' occasion ou la circonstance dans laquelle , durant ces derniers temps,
l' administration de la marine et les palr<) ns pêcheur;; ont cherché à renouveler ,
mai. sans succès, leurs anciennes prétentions.
�43
42
Le Il novembre 18H, douze patrons pêcheurs J e Martigues, vinrenf poser
Les masses qui se sentent ainsi appu yées osent bea ucuu p. Ce tf\meraire secou rs
et établir leurs fi lets, Jits gal1guis, dans le ca nal même de la bordigue du Roi .
les enhardit et il se trouve que lorsqu'il faudrait prêcher hautement et partout le
Se ulement ils eurent soin de les placer derrière les ca nnes et roseau x J e la bor-
respec t (j e la propriété, parce qu e là seulement est le salut (je l' État , les max imes co ntraires ne peuvent qu'avoir de fatales conséqu ences.
d i ~ u e. Ma is ils le fi rent dans les limites de la hordigue.
;:)
.,
"
,
Sur la plainte portée par M. de Galliffet contre cellE' atternte a sa proprIete,
le tribuna l correcti on nel d'Aix fut in vesti.
Tout annonçait qu' uu acte si flagrant d' illéga lit é, qui n'était qu e la violation
du droit de propriété , fa it e pa r une fraction assez nombreuse de la classe des pêcheurs, et avec assez de co ncert pour pour lui donner le ca rac tère d' une invasion
prémédi tée , serait flétri pa r l' administration de la marine.
11 n'en fu t rien. Cell e-ci se hâta de couvrir de son uom ce délit é vident . Elle
prit le fait et ; use des ma ri ns pêcheurs poursuivis, et se présenta en justice pour
les défendre.
Après un jugement du tribunal correctionn el d'Aix, du 1 q. mars 184- 5 , qui
ne fi t pas droit à la plainte de M. de Ga lliffet , elle fu ~ conronnée d' un plein succès
devant la Cour royale,
12 Juillet 184-5 , arrêt de la Cour roya le d' Aix qui qualifie de délit\' in vasion
faite par les patrons pêcheurs, qui les cond amn e à des réparation s civiles et
•
Parlons plus clairement.
Les prud' hommes des patrons pêcheurs qui, jusques en 1840 , ava it co nstamment Jemandé à M, de Galliffet la permission de faire dans le ca nal
de la borrligue du roi la joOte pour leur fête patronale, ainsi que le prou vent
leu,'s demandes écrites adressées à M. de Galliffet, celle année ont tenu
un autl'e langage.
Ils ont voulu avoir de force et pal' la violence, ce que jusques alors, ils n'avaient
obtenu qu e du consentement libl'e du propriétaire.
Le 29 juin 184 5 , ils se sont introduits violemment (jans le canal de la
bordigue.
- Une joûte publique y a été fait e.
Un pl'ocès-verbal a été rédigé con tre eux et une instance civile s'est engagée
cIeva ntle tribunal d' Aix
qui repousse l'adminstration de la marine dans toutes ses prétention s.
Les pêcheu rs et l' administration de la marine, le 5 août sui vant, acqui escèrent à l'arrêt, sans se pourvoir en cassation et sa ns se plaindre de l' acte de j ustice qui venait d' être rendu contre eux.
Celle leçon n'aurai t pas dû être perdue pour l' administration de la marine,
Elle allendai t sans doute une nou ve lle occasion , pour soulever encore contre
M. de Galliffet une prétention large, complète , et qui pût enfin faire périr pour
Le i août 18 4-5, les si eurs François Bory, Richaud , Pierre Degaye et Claude
Féli x furent cités en conciliation devant M. le juge de pai x, pour se concilier
sur la demand e que M. de Galliffet se proposait d'introduire en justice , en
payement de la somme de deux mille francs, à titre de dommages-intérêts,
jama is , bea ucoup mieux qu e sa première tentative n'était ca pable J e le faire ,
Le 28 aoM suivant, ils furent ajournés aux mêmes fin s, deva nt le tribunal
civil d 'A ix,
un droi t de propriété sur les bordigues que ses préposés aux Martigues rêvent
Le procès, ainsi engagé, entl'e M, de Galliffet et ses défendeurs, était pu-
d'anéan tir,
�44l'ornen t civil ; il se renfe rmai t dans d'assez étroites limit es. Il fut, bientôt agraudi
par l'intervention d' un nou\'el adversaire.
Le 6 juin 1M6, l'administration de la marin e inter\'int au procès. Elle demanda que le canal dit du Roi fut déclaré dépendance du domaine publi c
maritime , nOD susceptible de propriété privée, et r~servé au public pour la navi ga tion comm e pour la pêche ; de plus, que M, de Ga ll iffet fut condamné à
enlever et détruire les pieux ct barrières qu'i l avait établis dans ledit canal,
,(3t qui nuisaient à la circulati on des barqu es; et faute par lui d'exécuter le
jugement à intervenir, qu'il fut permis à l'administration de faire faire ell emême tous les ou,'rages et travaux prescrits aux frai s de M. de Galliffet.
M' de Galliffet , en présence d' une prétention si nouvelle, qui n'allait à ri en
moins qu 'à le déposséder de la bordigue et du canal dit du Roi, opposa un e
vive r&sistlluce.
Il publia un mémoire imprimé. (CehJi-Ià même qui est joint au dossier actu el
et auquel il a déjà renvoyé et il renverra souvent pour abréger l'exposé des faits
et la discussion à laquelle il va se livrer),
Là fureut ex posés et démontrés successivement les points suivants:
'l o Que la bordigue du Roi, ou soit le canal de ce nom , avait été originairement aliéné par les empereurs et rois, souverains de la Provence en 9:20 et
années suivantes;
2 0 Que tout au moins il t'avait été au profit des auteurs de M. de Galliffet
par les comtes de Provence;
0
3 Que les uns et les autres avaient le pouvoir de faire ces aliénations, et
que le droit public de Provence, comme le droit public français , les avaieut
légitim ées 'et rendues irrévocables ;
• ,0
Qu'au besoi n, la prescription acquIse avant la réunion de la Pro\' ence
à la France aura it définitivement assis sur la tête des auteurs de M, de Galliffet sa proptiété;
45
5° Que les objectiuns prises dan s les lois nouvelle; contre ce genre de propriété étaient insuffisa ntes pour la détruire;
Gu Enfin; que ce genre de propriété ne pouvait subir que les affectations
énumérées par les titres anciens, ct qu' il n'était pas pemlis d'y rien ajouter
aujourd' hui.
Outre ces moyens. pris du fond même de la questiJn, M. de GallilJet repOlissait l'administration de la mal'Îne comme n'a ya nt pas qualité pour introduire
un e action civil e en justi ce et pour revendiquer le domaine public, toutes choses
réservées au préfet civil du département des Bouches-du-Rhône.
Conséquent avec lui-même, M, de Galliffet assigna, le -17 novembre 18iG, le
prèf~t des 'Bouches-du-Rhône pour, par fUI, ' prendre dans I;instance telles
fins qu'il jugerait convenables, soit sur lés fins de non -recevoi r , opposées à
l' administration de la marine, soit sur le fond du procès.
Le 17 'avril 1847, lè prèfet des Bouelles-du-Rhème proposa , en la forme
réglée par l' ordonnaùce de juin 1828 ' stir les conflits, un décli'natoire, aux fin s
que le tribunal civil se déclarât incompétent et re'lvoyilt la connaissance des
qu estions du procès à l'administration.
'Trois motifs etai ent mis en avant pour déterminer le tribumil à se désinvestir,
Le prem ier consistai t à d'ire qu'il s'agissa it d'une qu estion dé limitation de la mer;
~e second , qn' il fallait dans la cause appliquer et interprèter des traités et des
actes diplomatiques; le troisième, qu'il s'agissait au moins d"une question de
grande voirie, le canal du Roi étant ou devant être assimilé à une grande ,"oie
de communication:
'M. de Galliffet répondit à cette demande
e!l déclinatoire ' par divers moyelù
dé-œloppés dans la consultation imprimée du 30 avril 184 7, également joint e
a u 'dossier.
Il établit sur divers teJl.tes de loi la co mpétence du t/'ibunal. Il refut a successi.
vemen1 chacun des trois motifs mis cn a vant pour faire réussir le déclinatoire,
�46
pa r lequel il re poussa
Le '29 juin suivant, le tl'I'lluna l civil re ndit un J'u !!:ement
v
1 {!écli natoire et déclara retenir la ma tiè re.
e Lil l ' j uillet suivant, M. le préfet d es Bouches-du- Rhône t'le va le conflit ,
q~i
faisai t présager la d e,maode e n décl ina toire, e t slIr le d é pot d e l'arrê té d e conflit
au greffe d u tl'ibunal civil , le tribunal d écla ra qu ïl serait sursis à toute proc.édure.
Le conflit porté d eva nt le conseil d 'éta t , juge natu~e l d e celle qu es tion , le
conseil d'eta t a sta tué sur la cont esta tion , le 3 décembre 18 .~ 7 , dans les te rm es
SUl \'an ls :
47
pêche, e t conda mne r M. d e Ga lliffe t à e nlel'er et dé truire les pie ux e t barriè res
qu' il a é tablis da ns ledit ca naJ e t qui nui sent à la libre circula tion d es barqu es;
e t, failte pa r lui d'exécuter le jugemellt à int ervenir da ns les 2 ~ be ures de la
sig nification , permis à l' admilli stra ti on d e la marine d e faire fai re elle· mê me
tou s les ou v rages e t truva ux prescrits aux frais dudit M. d e Galliffe t ; le co nda mne r e n outre à tels d ommages-inté rê ts qui d e droit ct au dépens.
" Vu l' ex ploit du 17 nove mbre 184 6 , par lequel M. de Ga lliffet, refu sa nt' de
reco nnaître à l' administra tion de la ma rin e le droit d e représent er l' e ta t a u p rocès e t d 'y intervenir , assigne le Préfet des Bouches -d u-Rhône pour par lui,
• Vu l'arrêté de conflit pris, le 14- juillet 1 S~ 7, pa r le Préfet d es Bouches-duRhône dans une instance penda nte deva nt le tribunal d e pre miè re inslance d ' Aix
entre M. de Gall iffel, d' une pa rt ; e t d'autre part, 1° Richaud, Bory, Degaye
e t Félix , patrons pêche urs domiciliés à Martigues (Bou ches-du-Rhône); 2 ° l'administration de la ma rine, poursuite e t diligence du Pré fe t maritim e du 5 me a rrondissement ; 3° l' é ta t en la personne dudit Préfe t d es Bouches-du-Rhône ;
"VU l'exploit introd uctif d ' in sta nce, du 28 ao(lt 1 8~·5, pa r lequ el M. d e
Gall iffet assigne les sieu rs Ri chaud , Bor y e t consort s d e va nt le tribunal civil
d'Aix, pour s'entend re conda mne r à 2, 000 fra ncs d e d ommages-inté rê ts, ,pour
s'être introduits sa ns son a utorisa tion dans le g rand ca nal, dit du Roi , appa rt enant au dit M. de Gall iffet e t sur lequel il y a une bordig ue, e t y avoir célé bré
une joûte ;
« Vu l' acte en da te d u 6 juin 'I S<\' 6 , par lequ el l' administra ti on de la ma-
r ine, poursuite e t diligence du Préfe t ma ritime du 5 00 • arrondisse me nt inte rvenant en l' insta nce , d ema nd e que les sieurs Richaud, Bory et consorts soie nt mis
hors de cause, et q ue par le tribunal, il soit d écla ré que le canal, dit du Roi, situé
à Ma rtigues, est un e dépend eDce du domai De public ma ritime non susceptible
de propriété privée, et réser vée au public pour la navigation comme pour la
pre nd re da ns l' installce telles fin s qu' il jugera convenables soit sur les fi ns de non
rece\'oir opposées à l'admi nistra tion de la ma rin e, suit sur le fond d u procès.
,
"VU le mémoire e n d éclina toire p roposé au tribu nal d'A ix pa r le Préfctrlcs
Bouches-du-Rh ône, le 17 a HiI1 847;
«
Vu la consulta tion, e n date du 3 0 avril 18 n , proùuite en'fa veui' de M. J e
Galliffe t, sur le déclinatoire proposé;
« Vu les conclusions d es sieurs Ri cha uù , Bory e t consort s e t d e l' admin istra-
tion d e la marine, te ndan t au reje t. du d éclinatolrc;
« Vu les conclusions de notre procure ur près le trib unal d 'A ix tendan t éga-
Iement a u reje t d u déclina toire.
« Vu le jugemen t, e n dale d u 29 juin 1847, par lequel le tribuna l repousse le
déclina toire el. d écla re re tenir la eau se ;
"VU un second jugement, e n da te du 17 juillet 184-7, rend u sur le dépôt de
l' arrê té d e confli t., par lequel le tribunal d'Aix d éclare qu' il sera sursis à tou te
procédure;
"V U l' ex trait du registre d es co nflit s tenu a u parqu et dudlt tribunal co nstar
ta nt que les formalités prescrites pa r l' ord onna nce rO)'B le d u 1 or j uin 1828, ont
é té rempli es;
"V U ,les Ic ttres d e notre sa rde des scea ux .a u secréta ire général de notre
�1.8
conseil d'état, deslluC'lles il résulte que les pièces de l'affaire, pan'enues il la
chancellerie les i ct \6 août
18~ 7,
ont été renroyées au secrétariat généra l du
dit co nseil d'élal , les 7 et18 août 18lÎ ;
« Vu un mémoire produit au nom de M. de
GallilT~ t
sur l'arrêté de conflit,
ct euregistré au secrétariat généj'al du conseil d'état, le 19 août '\847;
" Vu l'article '2 du décret du 22 novembre, 1 er décembre 1790 ;
" VU
l'arti c l e ~, l.l cr,
seclion
I ro
dudécretdu28septembre, Goctobre \791 ;
• Vu l'arlicle 538 du code civil ;
" Yu l' article 2, section
3mo
" Vu le décret du 10 a vril1812 ;
" Vu les lois des ·16 - 24· août 1790 et 1 Gfructidor an
sont des chartes des comtés de Provence des 1 om~, 13"1< et fi."''' siècles, des
transactions entre lesdits comtés et [es archevêques d'Arles , et retestament de
Cl1arles Ill, comte du Maine;
(( Que ces actes
0' Ollt
pas été produits clev'an( nous;
(( Que le préfet des Bouches-du-Rhône, tant dans son déclinatoire, que daus
a~l.icle
Galliffet, sont émanés de l'autorité souveraine, agissant dans l'exercice de son
pouvoir administratif;
• Que dans ces circonstances, il y a lieu, aU' préalable, de dMerminer le
III ;
(( Vu les ordolluances royales des -\ cr juin 1828 et 12 mars' \831 ;
15.
caractère desdits actes, et qu'â l'autorité adminislrat.ive senle, il appartient de
s l'abu~' à cet égard.
(( Ouï M. Delaborde, avocat de M. de GallilTel..
" Notre conseil d'état entendu,
" Ouï M. Cornudet, mallre des requêtes, commissaire du roi .
(( Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit:
" Considérant que l'action intentée devant le tribunal civil d'Aix par. M. de
(( AnT. 1 e , . L.'arrêt~ de conflit pris, le H juillet 18~1, par le préfet des
Ga lliffet, contre les sieurs Richaud, Bory et consorts, patrons pécheurs à Martigues, a pour objet de les faires condamner à lui payer des domma"'es-intérêts
.
pour établir les droits de propri~lé qU'il prétend exercer sur fe'canal du Roi',
l'arrêté de conflit ci-dessus visé" soutient que les actes, invoqués par M. de
de la loi du 22 décembre 1789, janvier 1790 ;
" Vu notre ordonnance du 19 juin 1840,
« Considérant que dans l'espèce, ley titres sur lesquels s' appuie ~f. de GiJ.Uiffet,
"
pour s'être introduits, sans son autorisation, dans le canal du Roi à Marti"'ues
" '
dont ledit M. de Galliffet se dit propriétaire.
Bouches-du-Rhône, est confirmé.
« ART.
2. Sont considérés comme !lOI!' avenus: 1 0 l'acle introductif d' ins-
tance du 28 aoOt 1845, l'acte' du 6 juin 18i6 et I"assignation du 11 novembre
-1846; 2 0 le-jugement du tribunal de première instance d'Aix du 29 juin 1847.
" Que l' administration de la marine, intervenant dans l'instance, a demand é
« ART. 3. Notre garde des sceaux, ministre de la justice e~ des cultes et nos
que les sieurs Ricbaud, Hory et consorts fussent mis hors de cause, et que le
ministres de la marine et des travaux publics sont chargés, chacun en ce qui
le concerne, de r'exécution de la présente ·ordonnance.
tribunal déclarât le canal du Roi , dépendance €lu domaine public maritime, nori
susceptible de propriété privée, et réservée au pub lic pour la navigalion et pour
la pêche;
«Approuvé, le dix-sept décembre mil-huit-cerit-quarante-sepl. "
" Considérant que l'autorité administrative est seule compétente pour déterminer les limites de la mer, sauf le jugement par qui de droit des questiryns
de propriété;
Il résulte de cette décision, qu'ava!!t de résoudre ll!s questions que soulève
le débat engagé contre M. de Galliffet, il ya une.question préjudicielle à résoudr&,
�50
5t
celle du caractère des actes produits et iuvoqués par ce dernier, et que c'est
un véri table droit de propriété irrévocable sur les choses qui en avaient été
devaut l'autorité admini~trati\'e qu' elle doit être portée.
Comme au surplus la décision du conseil d'état n'ordonne pas que ce sera
distraites et qui en étaient légalement sorties, soit qu'elles appartinssent au do-
devant lui que cet examen doit être fait, il en résulte que la règle ordinaire doit
Enfin, dans une troisième partie, i'i faudra voir les actes en question, en
être suivie. C'est donc le premier degré dejuridiction administrative, c'est·à-dire,
eux-mêmes, et dans leurs dispositions, délinir leur véritable caractère à l'aide
le conseil de préfecture des Bouches-du-Rhôn~ qui doit être investi et. qui doit
des notions péliminairement établies , et en lin les comparer avec les actes pure-
l'être uniquement de la question préjudicielle et préalable..
ment administra tifs émanés de ces anciens soùverains aux époques corres-
C'est à celle fin que le présent mémoire est publié et que M. de Galliffet pro-
maine public ordinaire, soit qu'elles appartinssent au domaine public maritime.
pondantes.
Yoque contre ~on adversaire naturel, M. le préfet des Bouches-du-Rhône, la
Aprés celle v ue d'ensemble el de détail, il sera permis de conclure et la
solution qu'il lui importe d' obtenir.
. La discussion à laquelle )e conseil d' état a ramené les parties, sort des discus-
conclusion que tirera alors M. de Galliiiet aura le Iriple avantage de s'appuyer
Sllr l' histoire, le droit public de Provence et sur les vives lumières que l'un et
sions ordinaires et communes, Elle a un caractère tout particulier qu'il est im-
l'autre auront projetées sur la question.
portant de' définir et de préciser; et pour =Iue M, de Galliffet ne soit pas exposé
au reproche de trop agrandir le cercle de ses démonstrations, il doit aussi montrer
la nécessité qui lui fait un devoir d'en agir ainsi.
DISCUSSION.
Pour apprécier avec vérité le caractère des actes qu'il invoque, voici l'ordre
d'idées qu'il ei t nécessaire de parcourir et les points que, dans son intérêt, il
raudra loucher. Il cn est de préliminaires: il en est qui se rattachent au fond
même des titres, à leurs expressions, et à leur vrai carac tère.
Parmi
I~s
PREMIÈRE
PARTIE.
premiers , nous verrons quels étaient les souverains de la Provence ,
à l' époque où remontent les actes produits par M. de Galliffet; ce quO~taient les
archev êques d' Arles, à qui, primitivement, la bordigue avait été donnée ; enfin
Dl\'l'.A.IL8 m8'l'OllIQ1l1l8.
ce que furent , par rapport à ces sou verains primitifs et à ces archevêques d' Arles,
les comtes de Provence avec qui ces derniers firent des pactes et des stipulati ons
touchant les bordigues de Martigu es.
A ce premier point, il faudra enjoindre un second non moins important; il
faudra exposer le droit public de celte primiti\'e époque, qui permettait à ces
sonv.erains d'aliéner le ~omaine public '. et ,montrer que de ces aliénations naissait
Les actes dont se prévaut M. de Galliffet émanant, selon lui, des souverains
qui gouvernaient la Provence en 921 , 989, 11 H, 1162, 1212 et 1l81 , un
coup d' œil sur l'histoire de cette époque devient ici indispensable.
Il servira à fixer plus tard le vrai caractère de ces actes.
�52
53
/.
• En 879, dit M. le président Renault (Abrégé Chronologique, p. 95) BOlon ,
• beau-frère de Charles le Chanve el mari de la fille de l'empereur Louis
~
établille royaume d'Arle> , qui renfermait
. « -au~urd' hui
u
LA PROVENCE,
Il ,
ce qu'on appelle
Je1)auphiné, le Lyonnais, la Savoie , la Franche-Comté et une
partie du duché de Bourgogne. "
Le mêwe fait est attesté par BouCle,
1 i . ., , p.
~Ii)
· l·
SUI~·. -
et
P
apon t
•. :..'> ,
r.()~ume
" de 1 C~'pere\1r Arll,{)lIld et se fait déclare! ,roi de la Bourgo,gne kansjura ne. "
C' es~à Rodolphe li, suc~esseur de R.odolphe 1er , que fut transporlé p~r Hugues
le royaume de la ,Bo!lrgogne lQisjur<1n.e.
Par cette réunion, sur1la1lêle de Rollolphe,li, des delalBourgogues, Se form a :
p. 132, ., 37 - Rouchon, p. 68 et 89.
Le
1"' ' à peu ,près cn mê me temps q\1e Dozon fondait à A;rles le royall)lle de
Bourgogne cIsjurane (Bouche l 1 P 7;;6) fe d'l
l
l 'en ces ermes: " AIS ,même
' . , ."
" ,temps,que BozGn se re~Ïile • de l' ob~jssanoe de, France II' 1c'Il se 1,a1',"1 couronner
" a MP.lllal~, ) rQi d'Arles el de Provence . l'au 8i9 en lJlême le
,
".
, "
l " , , ' /!WS prElsque et
" a sO,n ImitatIOn, sa vpir 8 ,ans après, n.od9Ip~e le, *11 sépare de l' ob~issa;ncc
que IPnda Bozpn prit le nom de Bourgogne cisjllrlme (Hénault .
p. 98 - Delavigne, manuel du Baccalaur.éa.t, p. 393, à la note -
Bouche ,
p. 758 ).
D'après Bouche, t. 1, p. 755, il comprenait: " Nou-seulement tO'lte la
" Provence, mais encore ·Ia Savoie et le Viennois , qui est maintenant le
t. " ,
" Dauphiné. "
Louis , fils de BOlon, lui succéda (8~7 ) , il fut couronné à Rome en féni er
90 1 (Papon, t. 2, p. ., 49). La couronne impériale était vacante par la mort
d' Arnould , roi de Germanie (Rouchon, p. 95). Louis, appelé plus tard l'At·eug/e.
fut empereur et roi de la Bourgogne cisjurane (Bonche • t. " , p. 750 à 78l-
~
" ,le coyaume, nommé dans les 'chartes "Iles Allemands et-lle Provence, que l'on
" .appelle aussi de flow'gogne, de ·Vie/me , El' A1'ies. .Par -ee 'pacte, r~glé sur la
" .manche la plus habituelle de 'l'invasion territoriale, le chef septe'ntrional de
" la Roullgogne .descendit·en Provenee J(Rouéhon, p. (8).
A partir de cette époque, la Provcllcé fut donc sous l'empîre des rois de la
Heurgogn~ rransjlirane, q1li en ~ta\ent les légitimes souverains.
A Rodolphe II sûccéda Courad le Pacifiqu e~ e,t à celui-ci Rodolphe lfJ dit le
Faitléanl etle "Lâche.
'
,
il
Au suj et de ces de!lX derI\iers souverains, M. aou~hQ.o s' e.~cill).e .de la
. manière slli vante, p. 109: " Le royaume de,s AVemands, fondé.par Rodolphe je"
Papon , t. 2, p. 536 - Rouchon , p. 9Q, 96 ).
" dans .s~n gOln;ernement du Jura , augm~nté .par _Rodolphe .u des PQs~essions
Bugues succéda à Louis (I!ouche, t. ", p. 785 et suiv.) Mais à la suite de
divers évènements, il céda (933) re l'Opume. (}.est-à-dire-, les provinces ecclé-
" cl e H~gues de ~rol'ence, ét~it pa~\'enu sous pe mê,rne COlu;ad Je Pacifique , .à
" son plus haut 'terme de prospérité. Ce prinûû recnla la fronti ère septentrionale
siastiques d'Arles, d' Aix, d' Embrun, IjlS diocèses de Vienne, de Grenoble,
" du royau~ej~squ'à ,la,R~us , et maintint l' én,ergie de,J'état Par I~s fréquilnl es
" co nvocatIOn des assemblées n~\iQn~le~ , .il eut )pour ,sueoesseur so n fils Rou dolphe III , surnommé le Lâche elle Fainéant
"
,'
So us la domination de Conrad le Pacifiql,le, les premiers .CQmtes de Pro\,encE',
de \'nlence, de la province de Vienne et le diocèse de Lyon, de la province ci e
ce nom (Ronchon, p. 91, 98) à R,oilolpQe
( Bonche, 't. 1, p. "KH - Rôuchon , eod:).
Il,
ro\ de la Bourgogne transjurana
Le royaume de Bourgosne tran.sjura~e avait elé fondé en 88i, par Rodolphe
conn us sous le nom des Ilosons dL! nOfD de ,BOZOll n., premier comte d'Arles ,
�54.
55
restèrent ce qu'ils étaient, de simples gouverneurs. Sous Rodolphe
ils cher-
113i
Conrad
11 52
Frédéric
" La faiblesse du roi régnant , Rodolphe III, dit fort bi en à cet égard M. Rouchon ,
il 90
Henri
.' p. 112, favorisa l'ambition de ces princes, s'ils en eurent. Ce fut pour le
Frédéric
.. royaume des Allemands et de Provence une époque d'a narchie qui an non-
12" 0
121,6
Conrad
.. çait sa prompte ruine. La dispute au sujet de la succession du roi qui n' avait
421, i
Guilleaume.
" point d'enfants s'ouvrit de son vivant même. Eudes , comte d e Champagne,
1274-
Rodolphe.
à la main lui demander sa
1292
Adolphe .
roi de Germanie, puis
1298
Albert
•' empereur , fils de Gisèle, sa sœur puinée. Les gouverneurs d' en delà l'Isère se
130i
Henri
" soulevèrent cOIlt1'e Rodolphe, pal'ce que l' héritier de la couronne leur semblait
« lnp l'edoulable, et quoiqu' ils fussent. défaits dans une bataille, ils n'en jetèrent
13 1.\.
Louis v.
1\1 ,
chèrent à devenir quelque chose de plus.
« son neveu par l'une de ses sœ urs, vint les armes
.. couronne, et Rodolphe indigné, l'assura à Henri
Il,
13 ·~6
-
1\1
(1).
Je"
dit Barberousse (2).
YI.
Il
(3) .
JV •
J•
YII.
Charles
JV•
.. pas moi ns les fond ements solides de leur souveraineté, Alors le pOlJvoir royal
A partir de Conrad, dit le Salique ( ., 032), un double fait historiq ue se ma-
" n'eut plus guères de vie que sur les deux rives du Léman, dans le Valais et
nifeste, c'est celui de la tendance des comtes d'A rles ou de Provence à s'af-
" dans la Suisse. La mort de l'empereur Heori
franchir de r empire, et celui de la résistance de l'empire à conserver le droit de
Il ,
prince hériditaire du royaume
à Conrad le Saliqlle,
" des Allemands et de Provence, et l'adoption nouvelle que fit Rodolphe le Lâche
-souverai neté , que la transmission faite par Rodolphe
.. de son petit neveu Conrad le Salique, aussi empereur et roi de Germanie , ne
du roya ume d'Arles, avaiL créé en sa faveur et pour ses successeurs.
" ramenèrent point l'ordre dans l' état, ni la force dans le gouvernement. Les
" défiances et les révoltes des gouverneurs continuèrent. "
JJI
Au milieu de cette double tendance, on en rencontre une troisième, celle des
comtes inférieurs qui veulent rester soumis à r empire.
C'est par la transmission faite à Conrad le Salique, empereur d'Allemagne,
Toules ces tendances se formllie nt en actes importants qui , du cèté de l' em-
que le royaume des Allemands et de Provence, dans lequel, comme on l'a vu, se
pire, marquent la souveraineté, et du côté même des comtes de Provence, la
trouvait le royaume d'Arles, passa sous l'empire de cet empereur et de ses.
reco nnaissent. De telle sorte, que dans cette lutte , qui a pu durer quelqu es
successeurs.
siècles, le droit de la sOlJveraineté de r empire s'est constamment conservé et il
Voici leurs Doms et la date de leur avènement à l'empire :
1032
Conrad
1039
Henri
III.
1056
Henri
JV.
1106
Il ,
dit le Salique.
n'a cessé qu'à l' époque extrême où les empereurs y ont tacitement renoncé. et
c'est aussi à cette dernière époque que nous avons arrêté nos in vestigations.
(1) V. BOUChe, t. t , p. 820, pour les 8C le.!j de souvera ineté.
Charles ' Henri v.
(2) V. DouChe, t t , p. 8~~, 823, pour le3 actes do sou ver ainoté.
{al V. Bouche, 1. t , p. 826, pour les,Dc tes Dombrcu,x. d" souverain,eléjaits par lui sur le rOy8tJme d',\rlej
�56
57
Les historiens des diverses époques se sont plu à recueillir ces actes de soun'raineté et parmi eux Bouche a eu soin de les énumérer.
L'hi storien racont e av ec délails plusieurs de ces acl es , puis il ajout e:
" vint en Provence et
Nous n'emprunterons à cet auteur que les faits donl SOD livre eslla plus heu-
s' ufl'~la
« Il
quelque temps en la ville d'Arles, où, comme
reuse compilatiou. Nous ne dirons rien de sa critIque historique qui est certes
" il se cOllige de quelques anciens documents conservés dans les archiv es de
« l' église métropulitaine de cetle ville, -il (tlL couronné avec sa (emme et son (ils
loiu d' égaler sa connaissance des détails.
«
Au sujet de Conrad
«
III
('1131), cet a\rteur dit, t. 4-r p. 820:
Philippe à Il'n jour de dimanche, le 7
~es
èalchdes d'aotH et l'an 1178, pal'
" Haimond de Holène, arch e \'~que de celle ville .. " . ,.
Il a fait plus d'actions de haute sodveraineté cn ce royaume d'Arles
«
Élanl. en celle ville , il con(il'ma tOlites les grâces et (aveurs que Conrad ,
(( qu'aucun de ses devanciers, non-seulement sur le lyonnoÎs et Viennois , où
«
sOI! !letallciel', avo'it accordées à l'archevéqlle et aux chanoines de la même
(( il priva de leurs fiefs quelques seigneurs, qui ne le voulaienl pas reconnaître
«
ville , et e.l ajouta d'autres plus avantageuses; comme aussi étant en la même
« pour haut souverain, l'an 1,14-6.
«
viII!" il fil, le 20 des calendes d'aoOt de la même année 1 ,178, de belles 0"-
(( Et en Dauphiné, à Vienne, ayant confirmé les privilégesde l'église de cette
ville, disant : ( suit Je texte latin ).
" donnances et oonstitutions pour le bOIl régime et gouvernemenl temporel, pOlir
« toute l'étendu e de l'évêché de Valence..... »
• . . . . . Mais enC'ore, en Provencè, accordant à Raymond de Mont-Ro.nd ,
(( arChevêque d'Arles, les mêmes régales impériales, et
plusieu~s
autres grâces
• particulières pour la ville d'Arles, lui confirmant tous les biells déjà acquIs à
« son archevêché, dans une bulle surnommée aussi
En pariant de sa fin, l'historien continue : « Étant allé en Syrie, en la guerre
« sainte contre les Infidèles, il y laissa la vie, ènglouli dans une rivière l'an 1190,
«
A~S,
Aurea-, en date de l'an ~ 1 H,
Enfin , au sn jet de Frédéric
• tout au long rapportée par le sieur Saxi, p. 226, dont les principales paroles
« sont celles-ci : (suit le texte latin du titre ).. . .•. .
«
Les notaires dataient lenrs contrats de son règne .. ... Il mourut le 15 {evrier
If
«
a.près avoÙ' gaut'erné l'empù'e env'iron 36 ans et le ROYAUME n'ABLEs 38
de 1'an i 152, laissant l'empire et le royauTTIf! d'Arles à Frédél'io 1er, surnommé
(( Barberousse. »
«
Au sujet de Frédéric l or Bar~erou5se (J f52), le même autenr s' expr.iqle de la
manière suivante, t. 1, p. 822 :
1\
(1210), il dit ,
1.
1, p, 826: « \1 favorisa et
donna la main aux l't'bellions des barons des Baux, de Castellanne , des
«
vi comtes de ~farseille el autres qui ne voulaient pas reconnaltre pour so uverains les comtes de Provence. Il permit aux ,'illes d' Arles, de Marseille
«
et de Nice de se rendre républiques et de se distraire de la fidélité qu' elles
«
devaient à leur souverain le comte de Provence.
« \1 y fit encore beaucoop d'actes de sooveraineté , comme d'avoir reçu
" l'hommage de Raimond
\'li,
comte de Tolose, pour le comté Venaissin , et
« Si l'empereur Conrad fi~ tous ses efforts pour se bien maintenir en la sou-
u
l'avoir contraint de revendi!!Juer par I\!s armes ce même comté , des mains
veraineté du royaume d'Arles, ce Frédéric Barberousse en a fait davantage
«
« et a rendu plus d'actions de souveraineté qu'aucun autre de tous s'es devan.
«
de ceux à qui il l'avait r'lmis l'an l235, d'avoir ôté le comté cie Forca lquier
à Raymond Berenguier v de nom, comte de Provence, et l'avoir duhné au
« ciers et de tous ses successeurs en ce royaume. •
• susdit Raimond
«
VII ,
comte de Tolose, \'an 1239 ; d'avoir cOIl(irmé à Michel ,
�58
59
à B e rn~rd , P\(\qu C'
'
n, (
à Robert
(( d, \ y 19no
, él'êque de Gap , les pl'il'1Ngcs que Frédér ic IN , SOI!
(( aïeul, avait accordés à leurs &glises , Cl de lem en al'oir encore donné de plIJ~
• archel'êque "'Arles, à
Aym~r, archel'êque d' Emurun ,
L'auteur llIud cru c quc nOli s citons, arrivé au récit de la fin de l'hi stoire
_~
« ~mr l es ....
(( SUI'
«
Et pardessus tout, d'avoir donné toutes les prétentions qu'il a,'oit
le royaum e d'A rles, à Guilleallme de Baux, prince d'Ora nge, avcc pro-
mcsse de l' en co uronn er, »
Anibcrt (Mémoires historiques
des lIozon , s' cxprimc cn ce, tenn cs, p, '120, ct 121,
Arles , l. " , p, 1~ Cl \ 5) s'exprime al"E'c
ncll elé sur lous ces actes qu'il résuDle dans le
pa~sage
sui,·ant: " Depuis l'an
J(
103'2, dit-il, la suil e des rois de Bourgogne ou de Pro\'e nce, vulgairement
«
appelés rois d' Arles, est la même qu e celle des empereurs d'Allemagne, A
" celle époqu e jusque l'ers le mili eu du
XIII e
siècle, temps anquc l la Provence
" passa dans une branche de la maison de France , les relations que celle pm" l'ince, et la vi lle d' Ar les principalement, eut avec l' empire produisirent un!)
" grande co nrormité de lois, de mœ urs et d'usages entre nos con trées et cell es
" qui étai ent soumi ses co mme elles à la domination impéria le, »
les oppositiuns qu e
rencontraient les COOlies d'Ad es ùan s leurs agl'audissements et Icurs usurpa•
tiuns coulre l' empire, (( On pense bicn que dal.s ce désordre les ramill es
CO lll-
(( tal es et vicomt~les n'o ubliai ent pas Ic soin de leurs int érêt., Dn IIhône aux
" Alpes ct de la mer à 1 Isèl'C',
SUI'
SUI'
S UI'
le territoire de l'un et de l'autrc marquisa t,
«
parmi les chers des cVllllés, ceux qui portaient le joug suzerain cherchaient
«
à le secouer , et les autres le repolIssaient avec constance, pour se maintpllir
dans la mourance immédiate du royaume uni el du Saint-Empire,
«
Plus tard , p, 13ii, J' histori en parlanl J e l' empel'eur Conrad
\1\
(I I \,6), dit :
({ L'empereur put dOliC s'appliquer aux affaires du royaume uni et la Prot'ence
({ orientale fixa Sail attentioll, IL CûllPnlf CE QU'IL 1- Al'AIT A FAIRE POU R RE~
«
FOnSEn
L'A UTORITÉ
n , ,,' ALE ET IMPÉRIALE
aux dépens de la souveraineté de"
" marquis proveIlraux cie l'es/. D6jà depuis deux aos , la conqu~le de la juri({ diction d'Arles, raite par l'archevêque contre Bertrand, avait reçu sa sanction,
({ Il l'oulut alors oppose r à hl maison régnant e , la plus puissa nte ramille du
«
Un autre hi stori en, M, Bouchon , sourent déjà cité par nous, el qui a résum é
marquisat CI aux hériti ers de Douce de Pro\'enc.e, les hériti ers d'É t-ienncll C,
" Les seign eurs des Baux rurent investis du marqui sa t ori ental.
r histoire de Provence, avec une sagacité et une hauteur de critique remarquable,
En 1162, le co mt e de Pro vence lui même, Ba ymund Bérellger, reCOllllut
a marqué bien nellement ces résistances et ces lutt es, les usurpations des comt es
le pou,'oir souverain de l'emp ereur, (. Le vieux Ba ymond Bérenger, dit le
de Provence, les actes de so urerainetéde l'empire, et déclaré, avpc un e énergi e
«
et une vérité qui J'honorent , le d7'oit de l'empil'e(olldésll1' les titres, Onsentà cett e
" lui demanda la main de sa ni èce""" Le com te de Provence conlinoa seul
mani!)re d'écrire J'histoire, que l'aut eur es l dégagé de tou tes les entrav es qui
(( le voyage, L'empereur l'accueillit avec empressement , révoqua J'inréoda-
embarrassaientl'espril de Bouche, lequel vivait sous l' anci enne monarcliie,
({ lion raite à la maison des Baux , et l'investü non seulement dl' marquisat
Cil
même auteur, p, 13ï , se ntant la nécessité de se l'approcher de J' empereul',
de la Provence orientale, de la mer à la DlIranGe et des Alpes au Rhone ,
présence de rois, qui port aient enco re le titre de com tes de Provence , CI
«
r~isait plu s ou moins adroitement sa co ur aux puissances de l' c\poqu e,
" mais ellcore du comté de Forcalquier , qu'il déclara fief de Provence , et de
" la ville d'AI'les, SAU F CEPE~DHT LES DROIT S DE L',<RGliEI' ÈQUE ET DE L' ÉGLISE, »
Le même, parlant du couronn ement de Frédéric l e , à Arles , dit : « Fré-
Cil
niant les raits historiqu cs les plus éclatants, ou en leur donnant lInc cou leur
partia le,
�61
60
« uéric
1er
étanl venu ( II ï8 ) à Atles, se faire couronner roi ues mnins de
« l'archevêque, Raymond de Bollène, ne vil point Raymond Bérenger , el.
«
Ulême il renouvella son alliance avec la maison ues Baux, à laquelle il
«
assura la prérogalive de marcher enseignes déployées, depuis les Alpes
«
jusqu'au Rhône et depuis l'Isère jusqu'à la mer. L'empereur 't·oùlait, en
«
" Tandis que l'empereur assurait l'indépendance de la t'ille d' Ades et 'reCOIlSliluait ell faveur des Baua; l'an cien j'oyaume uni des Allemands et de Pro-
." t'el/ce, une ville voisine. sans secou,'s él ranger........ chassa it du' pouvoir
te
sa maison seigneuriale.
Terminons l'énumération de tous ces acles de souverainct6 sur le royaume
seul grand fief , l'alicien gOll1'er-
d' Arles et de Provence, réalisés par les em pereurs d' Allemagne ùans le cours
nement d'Arles et r ancien marquisat des Alpes maritimes, opposel' tout à Ict
des siècles que nous venons de parcourir, par le jugement que l'historien a porté
• fois la maisoll des Balla; ct at/a; marqtûs de l'est, cl a.ttœ comtes de FOl'cal-
sur le droit qui les Irgitimai t et sur les usurpations des COOl ies de Provence qui
(( constituant
«
SOllS
ulle forme simulée, dans
U1l
quier et à la maisoll de TOl/louse. »
Un acte de souveraineté fort graye, oublié par le précédent histori en ,
«
est rappelé par l'historien moderne, p. 146: (( Nous lie pOllt'ons, dit-il ,
«
passel'
«
de Frédéric
«
connu sous le nom de j'oyaume de BOU1·gogne:. de j'oyat/me d'Arles et de Vienne ,
«
à Rich01'd, roi d'Angleterre, duc d'Aquitaine pour le dédommagej' de ses
«
mauvais traitements. Gelle bulle impériale n' était poinl aussi insignifiante,
«
qu'elle le paraissait d'adord, puisqu'elle donnait au plus puissant seigneur de
SOliS
silence la cession que fit l'empereur Henri
1er ,
\"l ,
fils et successeUj'
(1193) , dit j'oyawne des Allemands et de Provence, alors
« l'ancien royaume de sud-ouest ou d'Aquitaine, la suzeraineté du ro ya um e
«
de sud-est ou de Bourgogne...... »
A la p. 159 , il dit eocore: « L'empereur Fl'édé1'1'c 11 , fils d'Henl'i
VI , Sll/'
s'efforçaient de l'absorber.
«
«
Comme dans notre Europe , dit-il page 1 5'2 en
jelant lin coup d' œi l rétrospectif sur toules ces lulles, le genre humain n' est
(, point slationnaire et ne s'arrêle point dans la carrière du mal , ni da os celle
«
du bien, le principe féodal fut atlaqué presque en même lemps que le prin-
" cipe théocratique, la r,lison nationale cherchanl, enlre ces deux extrêmes,
un corps d'état mieux proportionné. Il y avait cela de "emarquable en Pro• l'ence que l'empereur-mi et le comte devaient également sc dispuler la souverai-
«
du pays. L' E~IPEREun-nOl HAIT poun LUI LES ANCIENS TlTllES; le comle de
• Provence les vieilles habitudes, l'immensité dl! corps de l'empire qui séparait SO/I
« Ile té
" fief de la 1'ésidence impériale.
Quand l'histoire, écrite de nos jours, avec toute l'indëpendance qu'i ls nous
ont donnée et les lumières qui l'ont éclairée, lIOUS li ent ce langage, il est diffi1)
«
rhumble requête de ï archevêque et de la commune d'A1'les , confirma à l'lm
cile d'hésiter entre les vieilles erreurs et les vérilés nouvelles.
Nous disons donc que les titres, le droit, la légitimité se trouvaient dans les
«
sa t'icairel'ie impét··iale, à l'autre son elat ';onwlœire.,.. . . »
Puis p. 460, il ajoute: « (12 15), plus l'ibéral que ses devanciers ~~l vers
actes des empereurs par toutes les preuves que nous venons de parcourir, et qu e
«
le baTon des Baltœ, Frédéric 11 lui accorda l'inves tü1tre du royatvme des Allemands et de Provence, autl'ement dit de Bourgogne d'Arles 011 de Vie/NIC.
lim er plus lard par le cours des siècles, mais qu'il celle heure primilive de la
.«
«
C'es t ainsi que la fière maison ries Baua; étendait
r oTgueil
di ses prétentions .
• Investie d'abord du marquisat de la Provence oTientale ,.... .. .... elle l'était
«
enfin de tout le royaume des Al/ema/uls et de Pro vence. ... .. »
les lenlalives, les essais, les usurpai ions des comtes de Prov ence ont pu se I ~g i
lulle leur droit n'élail pas né encore.
Oulre le témoignage de l'histoire, notre législalion provençale tien t encore
�62
lin lan"8"e conrortn e. La Provence a toujours co mplé a u nombre des lilres q"i
~
0
.
63
11
onl élabli chez elle la patrimonialilé des fi ers, leu,' hérédil é parOl i nuu s, e e
l'ole qu ' ris ont juué tians ces lem ps rerulés, les donalions q\li IcUJ' furent raile,
droil il ré\"ocablc de lous ce ux qui ava ient rapporl é des concessions graluil es ou
P,Ii' ces sOll" crains, el le clroil qu e ces dona lions leur tran~porlai en l sur les choses
données.
onereuses de 1'1 pari de nos co mi cs de Provence. les acles émanés des empere"rs
d'Allemagne.
La pr(,lllière donalion
f~ile,
pal' les souverains roi s li' Arlcs, l'lit co nscnli e par
Lo rsqu'en ,\ 668 ln noblesse de Prov ence fil rédiger ces remonl ran ees célèbres
Buzon ,i Hoslan , arclle l'ê(!uc d' Arles. Elle est rappel ée dan sla Calliachistialla ,
qu i lui yalurenl r éd il du \ :i juin 1668, lequel mai nlinl ln "alidil é des ali éna-
1. 1, p. 5'\'. Elle sc place natu I'cllement enlre l'année Bi!), époqu e du règne de
li ons failes par les cOOlies de Provence, elle iu\"ùquail co mm e preu,'c de l' alicna-
Bozon el l'nnnée 920 ou 92 1, où Louis en lit unc second e il
de Hoslan dans l'archevt\ché d'A rles.
bililé du domaine de la couronn e, dans lequ el le. co ml es de Prorence ava il' nt
slJcces,ivement puisé, deux pi èces décisives. Elle se prévalait d'abord ( Remon-
trances de la lIob/esse, p. 50) de l'invesliture donn ée par l'empereur Frédéric
Ce ll e seconde donalion de
no rappelle la
~Ianassès, successeur
prem ière. Elle renrerme le détai l
à Raymoud , cOOl ie de Barcelonne, du caillié de Pro vence, en 1162, sa ns y
dc lous les objels etlerres rl onn és par l'empereu r, et la confirma iion des lerres
précédemmenl données.
apposer aucune prolJibilion d'a liéner ; el en seco nd li eu ( p. 52) des lellre. de
Les aCles su bséquenl s de donalion sont de Il H, de 1 162, de 120 \" J e '12 12
co nfirmai ion de l' empereur FrérlP. ri c Il , en ravenr de Ray mond-Bérenge r, comle
el 136.>' Ils sont ou des ùonalions nOllv ell es, ou des co nfirmalions de choses
de Prov ence, de 12 26. où l' emperenr ne déclare poinlledit comté inaliénable
précédemm ent données. Bouche, 1. l, p. 82 1, rapporle r acle de 'II 411 , et, 1.
el indivisib le, mais par leq uel il lui perm et de le posséder de mt!me fa çon qu e
ses prédécesseu r•.
p. 132 , ce lui de 1162 : celui de 12 /2 es t cilé par le mt\Ole aul eur , l. " ,
p. 20ï.
Enfin l' arrêt d'J conseil du '\ 5 juill 1668 ( p. 230) et les leures patenl es en
No us avons vu plus haut les passages cités de [;e l aul eur où Co nrad Ill, Fré-
forme d'éd it qui le sui viren t, sont basés enlre autres sur les lelU'cs patent cs de
F"Méric Il du mois d'oclobre 1226.
déric (cr cn '1'157, Frédéric Il en 123 9, onl confirmé Ioul es les donalions précédemm ent fai les aux Hl'ch ~ "êques d'Arles.
Et par là s'achève et se complèle noire preuve hi sloriqu e louchant les sou' e-
Ces ac les de libéralil ps avaient co n; lilué ces arche\ êques propr iélai "es in com-
raios qui ODt eu empire sur la Provence aux aUl)ées correspo ndanl es aux lilres
que produit ~I. de Ga liilTel.
mU labl es des objels donnés. C'é laitle droit de l' époque; et il ne fauclrait pas
li ,
croire qu e ce ne f(\t qU' lin simple usurruil , un e simple jouissa nce qlli leu,' elH
élé Iransporlée. C' élaitle plein domaine qu ils en ava ienta cquis, qll ' ils relenaient
11.
sll,' lcur lêl e et qu' ils Imnsmell aicnt à leurs successeurs. 11 n'y a pas mêm e à se
préocc uper, à cel ég<lrcl, des co nflrmniions qu e les divers so uv erains venaient
A coté de ces souverains à qu i avait élé dévolu l' empire sur le ro ya llm e
successi" ement ajoul er aux donalions précédenl es, ni à en concl ure qu echaq ll P
d 'Arles, il est temps de vo ir maintenant ce qu' étaient les archevêq ues d' Aries, le
nOIl" ca u règne surv enant , il f'lilait un lilre nou" ea ll deslin é à remp lacer le lil re
ancien détruil ou anéan li par le décès du clonaleur, ou clu donataire.
�6'~
" me
• nO 1\ des brilléM. Guizot , dans ses Essais sllr l'his/oire de F'1'(lrICe, '~ essai,
'
.
fices, a expliqu é celle matière avec la puissance de sa critique et les vl\' es
lumières de sa science historiqu e.
Il yatlaqtlC avec succès celle division
" bé néfi ces n' a donc jamais été le droit avoué du donateut' , la condition légale
" du bénéfi cier .. ... »
Au sujet de l' époqu e consid érée généralement, comme celle des bénéfices
progressi~e raite
pal'l\orrertson, Mon-
h6rédi taires, J'auteur ajoute encore, p. 106: " CeLLe conquête n'étai t point un e
tesquieu et Mably , touchautles bénéfices, lesquels selon ceu,,-ci rurent d'abord
" nouv eaut é jusqu es là sans exemple, et la prétention qu'elle deva it faire
révocables et toujùurs à la disposition du donateur, donnés ensuite pour un
tem ps déterminé, plus tard concédés à vie, enf\ll héréditaires. « Je ne pense
pas, dit cet auteur, p. 96, que les faits se soient assujettis de la sorte
«
~
« ULle marche régulière et systélDa~iqne, ni que les savants qui la leur ont allri« huée les aient considérés d'assez haut , ni d' assez près.
«
Au premièrcoup d' œil et par la simple inspection des monuments, on aper.-
Cl
çoit, quant aux bénéfi ces, deux tendances contraires, et qu'il est aisé de pr é-
«
sumer: celle des hommes qui les ont reçus à les garder même héréditairement :
«
celle des rois ou de tout autre donateur à les t>eprendre à volonté ou à ne les
« co ncéder que temporairement. »
Puis arrivant ~ exa miner de plus près la première t'poque signalée comme
celle de l'amovibilité des bénéfices , il dit , p. 98 : « L'amovibilité absolue et
" triomph er était aussi ancienne que ces bén éfices mêmes. Bien que l'hérédit é
«
ne fot point leur condition gé nérale et primitive, ell e ne leur était pas non
" plus abso lument étrangère. Que les possesseurs des bénéfi ces se soient efforcés,
..
de s' en assurer la propriété héréd itaire, on en convi ent. Mais
(1 d~
es l' oflgllle,
" on ni e que les roi s mérovingiens aien t jamais sa nctionné leul's préten tions. Les
" documents repoussent, à mon aviô, ce système. Quand le traité d' Andely en
" 587 et l' édit de Clotaire
Il
en 6 15, en parlant des concessions de domaines
" rai tes par les rois à leur. fid èles, se serven t des mots omni (I:l'milale perdu.rent ,
" s/ab'ilitcl' conservetur , il est difficile de n'y pas reconnaHre l' admission de
" l'h érédit é, et dans le même trait é, elle est expressément établi e en faveul'
" des bénéfices de la rein e Clot ild e, Que les terres, y est-i l dit, qu ' il plaira à
" la reine de conrerer à qu elt[u ' un , lui apparti ennen t à perpétuité et ne lu i
" soiont retirées en aucun temps ( Baluze, 1.
!,
p. 13 ). MarculY nous a con-
« arbitraire d'une faveur quelconque, bien plus encore d'une conGes sion terri-
" serl' é la formule de la concess ion d'un bénéfice héréditaire (Marc. Form.
" toriale, a qu elque chose d'imprév u et de violent, qui choqu e les plus simples
" lib. l, cap.
XII' ).
Ce 'l ui prouve qu'au huitième siècle, de semblables
«
idées de justice naturelle, et peu d' hommes consentiraient à recevo ir une
• concessions étaient fréquentes ; et une loi des Visigoths que je ci te comme
«
grâce qu' ils seraient léga lement ex posés à perdre au premier ca priee. Dès
" sy mptôm e de l'u sage général des peuples, ordonne rorm ellement que si
«
que deux intérêts sont en présence, c'est une nécessité de la nature humaine
" l' homme qui a reçu des bénéfi ces du prince vient à moul'il' sa ns tes tam ent ,
«
que le droit s'introduise dans leurs rapports et soit réclamé, quelque fréquente
" ces biens passeront à ses hériti ers selon \' ordre léga l. »
« qu'en puisse être la violation. Telle r'lt . dans l'origine ·, la si tuation ré ci-
proqu e des donateurs et des possesseurs de bénéfices. Jamais les derniers ne
/vi, Guizot, dont \' espI'it embrasse tout et se plait à se rendre compt e de toutes
" rec.ounurent aux prem iers le droit de les en dépouiller arbilrairement .... »
les nllances, se demande enfin ce que peuvent prouvel' ces confirmations de
El plus bas, après avoir rappelé les monuments législa tifs, qui jusüfient sa pro,-
bénéfices que l'on voit se renouveler si sOllvent" même après l' époque où d' un
I(
position , il conclud en ces termes: " L'alDovibilité absolu e et arbitraire des
�66
67
commun avis lous les aut eurs s'accordent à recon naître qll e l'h érédit é des bénéfices devi nt leur condi tio n commune.
«
En S.H, l' empereur Louis el. 10 bénéfi cier Jea n sont mort s : Teu tfl'ied, fils de
«
Jea n, sc présent e à Charles-le-Chauve, fi ls de Louis, avec les deux donations
Voici co mm ent il ré pond :
« Ce fut, dit -il , p. 108, ap,'ès la mort de Charl emagne qu e J' hérédi té devinL
" ant éri elJres, lui demande ci e l'ou loir bi en les co nfirm er de nouvea u, ct Charles
«
la condil-ion commune des bénéfices. Plusieurs co ncession s de Lou is-Ie-Débo n-
« l'edevance, »
a
naire eL la plupar t de celles de Charles-le-Chauv e son t faites fI ce ti tre. (E n
" 860, do nati on héréd itaire de Charl es -l e-Chauve à son fid èle Adalgise. - Ba-
a lu ze, L Il , p. 14- i5. - En 869, du même à Dod on, "assa i d' Otgel'. «
p. ,1~88. -
" le lui accorde, afin que toi et ta postérité vous possédie;;;
CeS
biens sans aUCllI1e
Après ce lte longue ex position, l'aut eur co ncilld en ces termes remarquables
qu i nous ferùnl renlrel' dans notre suj et :
Ibid .
« Ainsi malgré l'hérédité du titre, chaque fois que le bénéficier ou le donateur
En 87i, du même à Oliba, comt e de Ca rcasso nne. - Ibid, p.
« venait à mourir, le IJossessew' croyait avoir besoin d'être confirmé d'lIls sa pro-
du Recueil des historiens de France,
priété, /('Ilt l'idée primitive et la personna lité de cette n lat ion et des droits qui en
" découlaient était profondémellt empreinte dans les esprits. »
" 1500. - On peul voir da ns les L VI el
VII
u un D'rand nombre de charles semblables de Lou is-le-Débonnaire el Charles-Ie-
"
u
«
Chaul'e. ) Enfin , en 87i, ce dern ier autorisa ses fid èles fi disposer après sa
«
morl et comme il leur co nviendrail des bénéfices qu'i ls tonaienl de lui , so us
do nc de véritables propriétaires des obj ets contenu s dans les donations <lu i
« la cond it ion tout efois qu' ils ne transmettraient qu 'à cl es homm es capab les de
leUl' al' aient été fai tes. L'é poq ue de l'héréd ité des bénéfi ces étail depuis long-
« servir
r étal.
-
Balu ze , t.
Il ,
p. 26.\.. -
Les arche l'êques d'Arles en 920, ·11 H , '11 62 et atlllées sui va nt es étaienL
temps arri vé, el les conG rmati ons plusieul's fois répétées qu' ils en eurent des
Cependanl el hi en qu'e lle fOt deve nu e Lln fail presqu e gé néra l, J' hérédité
empereurs, ne so nt ni lIn 0 preuve ùe l'amovilJ ililé de leurs titres, ni une
" d% bénéfi ces n'était poi nt encore alors un droil uni versel el reco nnu . On voiL
preuye d' un e simple jouissance à tit re préca ire, l'évocabl e ou tem poraire,
" les bénéficiers le so ll ic it er et l' obtenir indi viduellement , ce qui n'eul poinl eu
A la lumi ère que projètent les sava ntes démons trations de M. Gu izo t, ces vérités
so nl inallaq uables,
«
«
lieu, si ell e eut été de droit. Un exemple singuli er montrera combien ce
«
genre de prop riété étai l enco re préca ire ct ava it besoin de confirmations
« répétées, En /95, Charlemag ne ava it donné à un nommé Jea n , qui ava it
" "aiocu les Sarrasi ns dans le com té de Barcelonn e,
11 0
domain e dil Fontes,
« Silu é près de Na rbonne, pour que ledit Jean et ses descendan ts en jOllissen t sans
«
aucun trouble ni redet'Qnce, tant qu'ils demeure1'ont fidèles à nous et à nos fils.
Aussi bi en J' hi storien Bouche, l. 2 , p. 24. 0 , remarqlle-t-il qu'e n J' aonée
1232, lorsque le co mt e de Provence bàtit à ~la rti g ll es Jonquière, l' Isle el
Ferrière, il le fil après en avoir ob tenu la permi,sio n de J' archevêq ue d'Arles,
au domœil1e et juridiction de qu.i se trouvait le Martigues,
" En 8 1 ~, Cbarlemaf!;ne meurt ; en 815, le même Jea n se présente à Louis-leu
Débon naire, avec III donali on hérédit aire qu' il tenail de Charlemagne, el en
• solli cite la confirmation ; Lo uis la confirme et l' étend à de nom'elles terres,
La conséqu ence de toules ces donatio ns fut de co nstituer les archevêques
" afin que ledit Jean et ses fils et leur postérité en jouissent en vertu de nO/ll'e d01!,
d' Arles propriétaires des objets, terres el domaines qui leur furenl départis ,
�68
69
et de les rendre indépendants des com tes de Provence, au moins durant
u Arles en particu li er r autorit6 archiépiscopale gêna en plus d' une occasion
l'époque où ceux-ci cherchaien t par des usurpations successives à établir leur
«
celle du comte et lui servit de frein. Le prélat fut , à l' égard de ce dernier
empire sur la Provence.
Ils éta ient presque leurs éga ux , el il n'est pas difficile d'expliquer ce fail.
u
un surveillant d'a utant plus attentif, qu' il étai t intéressé à se maintenir
« avec lui dans un e éga lité parfa ite. L'archevêque n'étant pas assez for t poUl'
«
Depuis longtemps, dit Anibert , p. 21 , les évêques de France avaient
«
se rendre abso lument souverain, entretint plutôt par poliüque que par
«
atliré à eux toute l' autori té municipale, par la réunion qui s'était faite à
«
nécessité, ses relations de vasselage avec la cour de Bourgogne, ou la
• leur dignité, de l'important emploi de de{enseul' de la cité; lequel dans les
«
cour impériale; il ne souffrit pas qu e ses diocésains perdissent un seul ios-
vi lles, jadis soum ises à l'empire romain représentait les tribuns de l'ancien-
«
tant ridée de cette dépendance primitive; aussi les com tes ne purent-ils
«
« ne Rome, ( V. le traité de l'origine du gouvernem~nt français par M. Ga rnier,
« travailler aussi efficacement qu'ailleurs à rompre la chaIne qui liait la ville
« p. 224- et suiv.) J'ignore si celle réunion se fit de la volonté du peuple
«
d' Arles à la domination royale.
« C'est donc dans l'opposition des intérêts du comte et de l'archevêque, qu' il
«
faut chercher l'origine de la république d'Arles. C'est là qu 'on déco uvrira la
«
ou si les évêques par charité, voulurent bien s'attribuer eux-m êmes la
• protection de leurs ouai ll es. Il résulte du moins des canons du sixième conci« le d' Arles , tenu en IH 3 , que dans notre contrée l' évêque remplissa it tout es
«
les fonctions de clé{enswl', puisqu'on lui fait un devoir de protéger les op-
« primés , d'arrêter les injustices des comtes et des officiers subalternes, d'en
« porter plainte au roi, si le cas y échoit , (V. t.
«
l'II,
de la collection des conci-
les, p. 1233.)
« A cela intervint le consentement du moins tacite du peupl e, qui trouvant
« dans son pasteur un patron plus accréd ité auprès du trÔne, que n'eussenl
" base de l'autorité temporelle des prélats, durant lou! le temps que notre vi lle
• se g0U\'erna pal' elle-même. »
Enfin l'autorité des archevêques d' Arles se voit très clairement dans les stipup. 2 '. 3, 244- p. 2 16 ). Ell e se voit encore très énergiqu ement dans
lations pom la reddition de la république d'A rl es ( Bouche, L.
258 , et Anibert, 1.
111 ,
Il ,
l' illvestiture donnée en ·l 't 62 pa r l' empereu r Fréd éric à Raymond Bérenger
( Bouche,
t. Il ,
P 132, -
Papon, t.
Il,
p. 559 ).
« été de simples ci toyens, cessa désùrmais de se choisir un défenseur parmi
« ces derniers.
Et à la p. 23, le même auteur dit encore: « Ceux- ci, ( les archevêques
Ill.
• d' Arles) jusqu'à la réunion d'Arles à la Prov ence sous Charles d' Anjou , furen!
« les pairs du comte , pour me serv ir du langage du temps. Comme lui ils ne
(( relevaient que du roi: et avant l' établissement de la répub liqu e (d' Ar les),
« les ciloyens étaient suj ets , vassaux ou emph ytéo tes, tant des uns qu e des
«
autres. -
p. 25, cette p'lissance s' éleva au point que les com tes eurent
«
bientôt lieu de se repentir d'avoir trop aidé à son agrandissement. Dans
Après ce qui précède, il y a peu de choses à dire pour démontrer que le
po uvoir des co mtes de Provence ne mt, à son origine etjusq u'a ujour où l'empire
abandonna ses droits sur la Provence, qu' une usurpati on successive contre le
pouvoir des empereurs.
�70
71
Les auteurs précédemm ent cilés ont monlré les moment s , les époques , les
temps où ces empiètements
fur~ nt
miellx
m~rqu és ,
plus hardi s, plus so ul enus.
Il suffit desy rl'frrer.
DE UXlj~II1E PARTIE.
Celle donn ée historiqu e ex plique pourquoi les comtes de Provence trai lèrent
à diverses reprises avec les arche\'êques d'A rles, soit en 1223 pour les bord igues
de Martigues, soi t en '1,·57, soit en 1292. Elle mon Ire, réun ie à la précéden le,
les qualilés qu'avaien t les archevêq ues d'A rles pour Irail cr, Iransiger et stipu ler
al'ec eux. Car on voit sur la lêle des archevêqu es d'A rl es des propriétés,
des domaines, des droits dont ils pouvaient dispose r el dont ils disposè rent
comme mati l'es. Et l' on voit auss i , chez les com tes de .Provence, le désir
DROIT PUULIC TOUCliANT LES ALI ÉNATIONS
ou
DOMAINE PUDLlf.,
sous
LES EMPE REUR S
D' AI.LEMAGNE ET LES COMTES DE PROVENCE.
de s'agrand ir, d'acquérir, d'ajouter à leur empi l'C ou à Icurs propriélé;;
des propriétés nouvelles. De tell e sorl e qu 'à J' aid e de J'histoire lout s' es t
éclairci, et qu'en re lenanllcs trois points hi sloriques qu e nou s venons d'élablir,
savoir : 1 ° la souverain eté des empereurs d' All emagne aux époqu es indiqu ées,
2° les donations rai tes aux archevêques d' A i-I (~s, et leur posil ion pu li liqu e et
1.
indépendan le, par rapport aux CO Oli es de Provence .. 30 enfin cell e de ces
mêmes COOl ies de Provence, nou s poulTons apprécier plus tard la force et
Le domaine pub lic pouvait à ce lle 6poque êlre aliéné pa l' le soul'erain.
J'aulorité des titres que produ it M, de Ga lliffet, lesquels remontent à ces empereur's, à ces archevêques et à ces COOl ies.
C'é laitla co nséqu ence nalurelle du pouvoir so uverain dont était investi celu i
Mais avant d'arriver à ces titres, il est encore un point préliminaire à élahlir,
qui régnait, el encore de ce prin cipe (lue le roya um e de Pro vence élai t palri-
c'est celui du droit publi c de ce lte primitive époqu e, touch~nl J' ali énation du
domai ne public, lequel permettait au souverain de r aliéner et de co nstitu er au
profi t des aliénataires un droit de propriété ent ier el parf~it.
monial.
Il ne faut pas juger du droil puhlic de cette époque primiti ve par le droit
public qui ex iste de nos jours. If faut au contraire remollt er aux principes alors
en vigueur et les adm ettre, qu elle qu e soit leur différence avec ceux qui nous
régissent.
Or vo ici ce que les publicistes d' un autre âge onl pensé des roya umes patrimoniauœ et ce qu ' ils en ont dit.
Puffendorf, t.
«
III ,
p. 206, s'ex prime en ces termes: " Dans la suite . ...
011
commença à reganler comme des l'oyaltmes patrimoniauœ ceuaJ qui avaient été
�72
dGnllés aua; prillces arec plcill pou uoir de les aliéller, cOI/une b~lIle~tI' semblerail ,
, d'aliéner paraissant le ca ractère le plus essentIel d un e .vérItabl. e
ce pouvoIr
«
«
«
tie nt vérilablement : c' est-à-dil'e, ainsi qu e nous l'avons reruarqué ci-dessus,
«
par le roi , s' il possède le roya nm e comm e un patn:moine. •
« propriété. Pour les autres rQis à qui on n'avait pas accordé le drOIt de dl s-
• poser ainsi de leurs ro yaumes, ils furent censés
Il' en
Ainsi, d'après le (Ir'oil publi c an cien, le propre des royaum es palrimollictUx ,
jouir qu e comme de
c' élait, qu e le sOllvèrain pOt les aliéner en toul ou en partie; les transférer par
Et à la paae 2 17 : " Dans les royaumes patrimoniaux, continu e-t-il , chaque
rlonation ou testam ent, dans leur ensembl e ou dans un détail, en vendre tHl'~
parlie et retenir l'aulre.
" simples usufruitiers. "
:::> •
)
ï
Dans ce syst ème, on le co mprend , le domain e public était comme le ro ya um e
«
roi est en droit de régler la succession , comme il le juge à propos, et, lorsqu
ft
a expressément déclaré sa volonté là-dessus, on doil la suivre tout de même
lui-même dans la disposilion du sOllv erain. Celui qui pouvait le plu s, pou\'ait
«
qu es' il s'agissait du leswmenld' un simple parti culi er, "
l'!I moins. Une parti e du domaine public ou du domaine de la couronn e p ~uv a it
Et à la page 380, li v.
VIll ,
1
chap. v, § IX , le même auleur ajoute : « Voyons
«
maiutenanl si un roi peul aliéner le roya ume, ou quelqu' une de ses parties.
«
00 co mprend bien d'abord qu' il s'agit ici des l'Oyallm es établis par un consen-
" temenl volontaire du peuple, el non pas des roya um es /Jal1"im.oniaux ;
CAR .•
Grotiu s professe aussi les mêmes principes: « Il y a quelques 'rois , dil-il , L.
« p. '165, cbap.
«
«
Ill ,
Le ro yaum e d'A rles uni , comm e on l'a vu , plus lard à l' empire, puis la Provence elle-même, fllr enttous des ro yaum es ou des empi 'es pat1 Î17l onÎaux , Oll
l,
§ XI , qui possèdent la courollne e ll pleine propriété . . , ,
Rien n'empêche, ajoule-l-il, p. 170 , qu ' un roi n'a il un droit de propriété
On en trollve les preuv es recu eilli es dans les Remonlmnces de la nobresse de
l'rol'ence de '166S , flui précédèrent el amenèrent l' édit de 1668, p. 37, en ces
lerm es :
sur certains peuples, en verlu duquel il pourra les aliéner, s' il le veut" et on
u trou ve dans l'histoire quantilé d'exemples de souv erainetés accompagn ées
" de ce droit.
valabl ement ali éné, par celui- là même qlli pouvait ali éner le royaume.
dans lil plus haute antiquité, on mit en pleine vigueur les principes rappelés par
PulTendorf et Gro tius.
L' ËG ,\ RD DE CEU X- Cl LA c nOSE NE SOU FFRE PA S DE DlFFlCU LTE. ))
tt
~t re
»
«
On voit, y esl-il dil , qu e Bozo n s'é tant fail co uronn er roi de Provence ou
« d'A rles, en réunissa nt la Bourgogne transjuranne , Hugues , fils du coml e
« Thibaull , s'empara de la muitié de la Bourgogne, appelée cisjuran ne, el se
A.vant , à la p. 168, il ava it dit: « Pour ce que j' ai dit qu' il y a des souve-
-
" qualifia duc et marquis de Pro\'ence; et depuis, étant appelé au roya um e de
" rainetés qu e l'on possède en pleine propriété, c'est-à-dire, dont le souverain
,
« est maitreeomme deson patrimoine, quelques savants comball ent celle pensée
«
Lombardi e, céda son du ché de Provence à Rodolph e
«
13ourgogne el de Provence, Après lui , ses successeul's jusqu es à Co nrad , ont
" par la raison que les personn es libres n' entrent poinl en commerce, Mais,
u continu é de la posséder, et en ont fait plusieurs cessio ns el. transports; entre
«
'1
Il
qui se qualifia roi de
( suit ici laré(ulation de Cobjec tion. ) •
" autres, l' empereur Henri v en fil cession à Conrad, du c ùe Zerin guen, et le fil s de
Enfin à la p. 366 , le même publiciste ajoule encore: « La souveraineté
" Conrad la remil à Frédéri c Barberousse, Maisenviron l' an 960, Guillaum e, fi ls
peut être aliénée, comme toutes les autres choses, par celui à qui elle appar-
• de Ray monù , prince de Co lti ce, s'en empara , eut pour fil s un autre nommé
�H
75
• Guillaume, qui r ul deux enfanls, Eud es l' alné, qui fuI coml e de Prol'e nce, ct
«
le ca del de Forco lq uier ; à Eudes succéda Gilibert, CI ft Gilibert les deux fill es
«
Fai tide et Douce, mariées aux COOlIes de Toul ouse et de Barcelonn e, qui p~r
«
l~gèrenl cet élat ; ct depuis en faveur de leurs descendanls.
" Comme aussi Réné, fil s de Louis 'II , institua son neve u, à l' exclusion de sa
«
fi lle mari ée avec le du c de Lon'aine, à son imitation , Charles d' Anjou , derni er
à Loui s 1cr d'A nj ou les droits qu' il avait tant sur le coml é de Prol'e nce qu e
«
coml e , institua le roi de l"rance Loui s X"
IV ,
« sur les autres fi efs, TANT IL EST VERITABLE
(e ÉTÉ
(C
, er
de la maison de Lux embourg, céda
« En l' an 1365, l' empereui' Cbarles
Cf
Au co mt e Rouert snccéda Jea nne, sa petit e-fill e, laqu elle adopta Loui s
« d'A njou ,
«
IXALlÉ~ADlE. ~L\lS
QUE LE DOM.II NE DE PROVENCE N' A JAMAI S
• sœur mari èe dans la maiso n d' Arma gnac,
({ Si tous ces prillces, ajuutentles remontrances, ont possédé le comté de Pn -
IL A ÉTÉ PERPÊTUE LLElI EXT CE DE, TRA:'\SPORTÊ, QVl TT E ET
EXPOSÉ AUX VO LONTES ET CU.\NGEl IE XT S DE LA
FO RT U ~ E
ET DE L \
\' O lO~ Tf:
DE SES
« SOUYERAINS.»
Et, dans li n autre passage de ces remontrances où so nt rappelés les ali énations
({ t'ence avec cette liber té de le polttoil' aliéner, permuter, tendre et transporter,
«
peut-on douter qu ' ils ne fussent en droit d' inféoder et aliéner les petits fi efs
«
de ce comté?
du com té de Provence lu i-même, le même li vre, p, 29 , ajoule :
«
à l' exclusion des enfants de sa
,,, "
Ains i donc la nutul'e de roya ume pa trim onial ne sa urait être refu sée au
Ils ( les comtes de Provence) ont eux -mêmes possédé le comté de Protence
royaum e d' Arles, de Pro ve nce et au comté de Provence lui-mème. L' hi stoire
«
avec la mém.e liberté (l' aliéner, vendre, lJermuler et sllbslitller, qu'ils avaien t
«
accordée à lellrs féodataires ell leurs fiefs; et pOUl' preuv e de ce, Girbergn e,
NOliS ajoutons maintenant qu e les souv erains qui y ont régné, ont babituelle-
«
comtesse de Provence et la dernière de la famille de Hozon , maria sa fill e Dou ce
ment usé r1u droit qu e leur donnait lel)r souveraineté, qu' ils ont aliéné à dil'€'rses
" al'ec Raymond , comle de Barcelonne, laquelle fit ùonati on à son mari et à
époqu es, et dans une foul e de circonslances, soil des parties notables du comlé
" leurs en fants de tous ses bi ens, et, en défaut d'enfant , aux hériti ers de son
Ini-même, soit des fracti ons moin s imporlantes de ce comt é, qui co nsislaient en
«
et les monum enl s qu e nous venons ri' explorer le démontrent.
man .
terres, bois, pêcheri es, on eo d'autres co ncessions tant sur la mer qu e su r la
• Raymond en disposa en faveur de Raymond Beranger, so n neveu, fil s de
terre ferm e,
• son frère, lequel épousa la nièce de l' empereur Frédéri c, en l' année '11 6'2,
«
Raymond Berenger avait quatre fill es qui fUl'ent mari ées à quatre rois;
Parmi les premières, il faut co mprendre les aliénations .\ ° du comté de Nice,
2° celle de la ville d' Avignon , 3° celle de la vicomté de Marti gues.
({ ma is ildisposa du comté de Pro vence en fav eur de Béa trix la pulnée, laqn ell e
({ porta le eomté dans la maison d' Anjou par son mariage av ec Cbarles
Les remontrances déjà cit ées, le disent en lermes formels, p, 30 : " Lou is
l e ,' ,
Ct
~
fl'ère de S'-Louis, et les autres sœurs n' y apportèrent au cun contredit.
«
Charles , er eut pour fils Cbarles n, et celui-là eul plusieurs enfant s, le troi-
u sième desquels qui était Robert , emporIa le comt é sur les enfanl s de son
Ct
I cr
aliéna le comté de Nice qui élait de Provence, en faveur d'Amé, comte de
" Savoye, La reine Jeann e aliéna la ville d'Av ignon en faveur du pape. Tous
" ces princes par leurs testament s ont légué des fi efs et des biens immeubles
«
de leur domain e à leurs ser viteurs qui les ont possédés, Etle dernier co mte a
Il
même légué le vicomt é des Marti gues à François de Luxembourg, son cousin,
frère, par le conseil du jurisconsult e Bald e,
�76
ii
" qui l'a depuis obtenu SU I' ce titre pal' arrêt du parlement de Paris du 23 s<'p" tembre 1568, »
Pa rmi les secondes, il faudrait citer la plupart et peut-être tout es les pro-
11.
prié tés jadis seigneuria les, constituant des fiefs, et aujourd' hui formant les
propriétés patrimoniales de tout ce qui avait appartenu à l'ancienne nob lesse,
Toutes ces terres prove naient ou de ventes, ou de uonations, faites par les comtes
A coté de ce principe de droit puhlicqui autorisait les aliénations du domaine,
de PI'ovence, de biens qui le ur ayai e nt appart e nu e t qui faisai e nt partie de leur
il en est un autre qni en est le co rollaire et la conséquence; c'estque ces alié-
doma ine,
nations transportaient à ceux en faveur de qui ell es étaient faites , nn :droil
Nous pouvons citer ici les terres d e Château-Renard , cell e u e Mey rargues ,
celle de Bouc et une foul e d'a utres,
absolu de proprié té SUI' les choses, les hiens, les terres, les pêcheries qui leur
éta ient on vendus ou donnés,
11 sera facile de le justifie r,
Peissone l, traité de l'hérédité des fiefs en P"01Jellce, e n fait co nnattre plusieurs
a utres, Il cite, p, 172, la vente faite par le roi Réné e n 1 4. 72 à d' Arcussia de la
L'a uteur du traité de l'hérédité des fiefs en Provence, Peissonel, é tablit d'abol'd
terre d'Esparron de Palières ;-p, 487, la uonatiun de la terre de Monts, faite e n
.dans son ch~p, "', p, 143 e t suiv" qu e les fi efs é tai ent Jans le comm erce, qu' ils
faveur de la maison de Villeneuve, en l'année ' 387 , par la reine Marie; p, 4.62,
pom'aient ê tre vendus par ceux à qui les concessions en avaient été faites , et
la donation de tout le golfe de S'-Tropez faite à Gibelin de Grimaldy , e n l'ann ée
achetés par des ti ers,
980 ( Bouche, t.
Il ,
SUI' la mer, faite à l'ahbaye de S'-Victor par la reine Jeanne en 1364 , et rapportée par Latouloubre, t.
l,
p, 90,
Et, si nous ne rapportons pas ici les actes sur lesquels se fonde M, de Galliffe t,
pour é tablir son droit d e propriété sur les bordigues d e Martigues, c'est-à-di re,
les actes de 920 , 11 U et les autres , pour ne pas empiéter sur la dernière partie
de la discussion , il ne peut pas nous êtl'e permis de les passer entièrement sous
si lence, Nous les mentionnons donc comme de nouveaux exemples de l' us~ge
fait par ces anciens souverains du droitde disposer des choses cont enues dans le
domaine public,
({ Si le droit et la liberté, dit-il , de disposer des fiefs pal' testament est une
liv, 9 , p, ~2) ; et enfi n la concession des réga les et du mol e
({ prenve de leur hérédité, le droit ùe les vendre et de les alié ner en est une
" a utre preuve plus certaine; ca r la ,'c nte d'un fief justifie qu'il esten commerce
" de même que le restant d es biens, , ' , Si l'on fa it voir, ajoute-t-i l, que sous
«
le règne des comte. de Provence les fiefs é taie nt généra le ment vénaux, qu' on
" pouvait les vendre, les échange r, les donner, que même les comles de Pro" vence en achetaient e l en vendaient, et qu'enfin toute sorte de disposition
" des tiefs entre vifs é tait permise , on prouve suffisamment qu' ils é taient héré({ ditaires et patrimoniaux, »
Nous renvoyons à l'auteur pour les pre uves qu' il apporle d e son prlOClpe,
et une seule observation doit trouver ici sa place, Le droit de vendre les fi efs
concédés par le prince ne prouve-t-il pas , au plus haut degré, que la concessiou
avait transmis le droit absolu de proprié té sur la chose concédée? Le con ce,...
�i8
ï9
sioonaire aurai t-i l pu l'enure , s'i l n'a vait pas élé propriéta ire? Qu'aurait-il
" üu aulre dl! consril rlu l!l se pl. 16f.0 , en fay eur de Gaspard de Vinlimille,
seignl'u l' de Figanière, conlre les consu lsel haLilanls duditli eu,
«
lransmis ?
" Un au lre uu conseildu1 7 nov. 1660, en fa "CUI' du seigneu l' de Mirabeau
En secoud lieu , le même au teur , abordan t de plus près la difficull é. n' hésil e
pas à la trancher dans ce sens. A la p. 351, il dit fort nellement :
«
«
LOl'sque le
prince inféode une ternen ((),t'eur de quelqu'un et de ses wccesseurs, soit mâles ,
« soit filles,
IL REMET LES TERRE S I~FtODEES DHS SON l'HRIlIOINE , Don IL PEUT DlS-
~, P0SER) Dt; Mf;Me QUE ou REST.\Nr DE SES BlE:'iS, ET L.\.. PE(\'lI ::iSIO~ DE LES \'E1'\DRE E S1'
u
USE CLAUSE SUPE RfLUE ) PARCE QU' Ii!LLE EST DE DROIT .
«
Cl de Beaumond , conIre la communaulé de Beaumond .
« Ell«n celle question
A TOUJOURS tTÈ
jugée en (at'ell1' de,\ se;!J!lI'tt1·s de la pro-
" vince; et il est l'e11lQ1'quable que ces arrêts sont rendus
" des ecclésiastiques,
DES ACQUÉREUR S,
Cil
{a veur des {emm es ,
et de personnes de di1:crses (amilles. "
Cetle longne série de décisions ne prouve-t-elle pas qu e le droit d'aliéner
l)
les biens co ncédés élait le droit commun? et., pur suile, que la concession avait
En troisième lieu, le même autenr loppelle, p. 38 1, 382 et 383 , les nombreux
monumenlsjudiciaires qui l'ont ainsijugé, en maintenanlles divers acquéreurs
des biens primitivemenl inféodés pal' le prince et aliénés pal' les cOllcessionflaires.
Iransporlé un droit de propriété absolu av ec elle ?
Ces prin ci pes con cordent parfaitement avec ce qu e nous ayons vu dériver de
la doctrine professée pal' M. Guizol , lou chant les bénéfices ecclésiasliques ou
ci "ils, que nous avons rapporlée plus haul.
La. quest'ion, dit-il, a toujours été jugée contmelictobrcment en {avellr (les
Enfin. il l' a de tout ce qui précède un monumenl législatif, qui ne permet
possesseurs des biens, 10l'sque }J. le procureur dIt roi, ou les hab,:tanls ont rle-
plus ni doute, ni incertitud e: c'est l'arrêt du conseil du ·15 juin '1668 et l' édit
u mandé de se racheter ; il yen a un , arrêt Ju parlement de Paris du 25 sepL
perpétuel, donné en formes de leUres-pa tentes, enregislré au parlement de
u 1568, en faveul' d' Antoine, Ballhazar, François, Melchior Villcens ct Mar-
Provence, le 28 juin 1668 ( Précis des ordonnances, de Montvallon, p. 481 ).
" gueri le de Bouliers, vicomtes Je Reilhane, con Ira M. le procureur du roi ct
" les habitants duditlieu ;
Ils furent rendus, sur les remontrances el réclamations de la noblesse de Provence, qui demandait à être maintenu e dans la propriété et possession des
Il y en a un arrêt du conseil du 2 déc. ,1614 , en faveur du sieur de Vau-
lieux primitivement sorlis des domaioes des an ciens souvera ins de la Pro-
clause, du prieur de Seillans el de f évêque de Fréjus contre le lrai lant clu
" domaine.
vcnce, Ce sout ces mêmes remontrances dont nous avons déjà rapporlé plusieurs passages, qui ont été colligées en corps d' ouvrages et qui forment un
" Autre arrêt du conseil p';vé du roi , en fa\' eur de Chal'les el Alexandre de
des documents les plus curieux. de notre ancien droit public proven,al. Ils
«
Grasse, contre les habilants de Briançon et Gayel , du 9 nov. 1616.
portent l'un et J'autre la reconnaissance formelle du droit de propriélé abso lue,
«
" Autre co ntre les habitants de S'-Michel. en fav eur de Paul de Marin , seigneur du lieu , du 1 mai '1 63l .
«
«
«
«
transmis à chacu n des concessionaires et ils clôlurent le grand débat ouvert
sur le point de savoir si ces concessionaires obtinrent par leurs concession s
un droit l'évocable, ou un droit définilif , transmissible , et co nso mmé sans
" Autre du 28 juin 1633, enlre les consuls d'Ollioules et Magdelon de Vinli" mille, des com tes de Marseille,
J'etour. L'arrêt du conseil porte : « Ouï le rapporl du sienr Co lbert co nseiller
�81
80
" tou tefo is des domaines el d,'oits don nés à temps, ou à vie , ou à du réede
• du roi au co nsei l roya l , cont rôleur géné ral des fi m1l1CrS, tout co nsidéré le
" familles, dont les temps so nt ex pirés ou les familles éteintes, dans lesquels
" Roi étant en son co nsei l , a ordonné et ord onne qu e les cngngistes ou do-
.. nou s sommes en droit de rentrer ; voulons et nous plalt qu e des susdit s
• nataires des fiefs, terres , seigneuries et autrrs droit s joint s à ice lles dépcn-
" domaines, droits, justi ces et fi efs en dépendant., il n'en ~oit fait à présent ,
" dant dudi t com té gui Dllt appartenu et fait partie des r1omail1es desdits
.. ni à l' avenir aucun e recherche, ni poursuite, sous quelqu e prétex te que ce
,. comtes el co11ltesses de P1'Ot'ence, et qBi ont été par eox ou leurs li eut enant S'
" soit , et même celui de mon édit général de réunion, auqu el, quant
« sénéchaux , et autres ayant pouvoir d' enx , vendus ou engngés à prix d'a l'-
.. nous avons dérogé et dérogeons par le pré. ent édit : et, à cet efTet, nous
" gen t., inféodés, échangés, donnés ou légués, ou alltrement d1'sposés par qllel-
.. avons pleinement maint enu t0US les possesseurs desdits bi ens, droits el
til.,'e et pOli!' guelque cause que ce soit, joui ro nt cl esdits fi efs , terres,
" domain es en la possession et jouissa nce d' iceux, pour en disposer à vie el
seigneuries et d roits joints à icell es, com me ils en ont joui a "3nt l'u nion
" dudit com té à la co uron ne et du dupuis j'Jsqu 'à présent , sa ns que sa
.. à mort et co mm e tout paisible possesseur peut faire de son domai ne , an" cien et propre h6ritage; défendons très expressément au x co mmunautés
" majesté, ni ses successeurs puissent préteudre y ren trer, ni avoi r droit d' y
" de troubl er lesdit s propriétai res desdits domaines, so us prétex te de rachat,
• ren trer., .. , . ... Veut et en tend sa majesté , que les propri étaires qui auront
.. ni ven te, II i autrement , ct si aucun's ava ient été dépossédés pa r arrêts,
" été dépossédés desdi ts domaines seront rétab li s en la possession et jouissa nce
.. vo ulons qu ' ils soien t rétablis nonobstant lesdits arrêts, qu e nous avons
.. qlle
«
«
d' iceux, nonobstan t tous arrêts à ce co ntrair es.,., .. . A maintenu et ma in-
" cassés et annulés, à la réserve de
G ardann ~ ,
~
ce
que QOus aVOnS retiré com-
" tient les acquereurs et possesse urs desdit s domain es en la possession dc
" me domain e nouv eau ; imposon s silence à llO Ire procureur-géné\'al et fi t04s
" leurs fi ers, j ustices, droits seigneuriaux et tous autres droit s et pl'Opri été
.. nos orficiers, fermiers et adjudica taires des droits de domaines, a\lX fin s qu' ils
" joi nts à iceux, dans tout ledit comté de Provence, Forcalquier et terres
" n'a ient à rechercher lesdit, propriétai" es des acquisitions et possassions <1C-
" adjacentes, pOlir les pOli voir posséder incommutablement et à perpétuité, en
.. quises auparava nt l'union de la Prqvence à la co uronne , par quelq\l e till'e
«
disposer à vie et à mort, sans qu 'à l' avenir ils y puissent être troublés, )
L'édit perpétuel porte: • No ns avons par notre présent édit per'pétll el et
(, inviolable déclaré et déclarons: qu e nous ni n()s successenrs roi s ne sont en
" droil de rentrer daos iceux do maines, droits, justices fie fs en dépendant.,
" quiootété ve ndu" aliénés et transportés, cédés, quittés, permutés, échan« gés, donnés en recompense ou autrement. , par qu el titre, pour qu elqu e
" cause, sous qu ell e cond ition qu e ce soit , par les comt es et comt esses de
«
Proveuce , leurs sénéchaux et li eut enants et autres aya nt disposés en leurs
«
noms dans toute l'étendue dudit comté de Pro vence, Forca lquier et ter-
o.
res adjacen tes, jusqu' à l'union dudil comté à, la co uroone , à la réserve
«
que ce soit , comme étant pl ei nement et paisiblement acq ui ses par droits ,
" titres et possessions... (V. l' arrêt et l' édit avec le préambule qui le pvécède
d~n s
le mémoire impri mé par M. de Ga ll iffet , déjà cité, p, 68 et SUtv . ~
enoore les R~m olll ra"ces de la noblesse, p. 226 et suiv, -
y.
et p, 236 et sQi v,
où le tout est raPp()rté i1l extBllso),
Ces notions préliminaires établi es, nous POUVO!)S m a iBte n ~ n~ aborder les
qu estions que l'arrêt du conseil d'élat du 3 déeelllbre '18471) précisées ct
qu' il résume, en disa nt qu'il y a lieu entre M, le préfet d' uue part et M,
�82
de Ga lliffet de l'aut re, de déterminer le caractère des actes invoqllés p~r co
dernier,
83
ad ministratif , mais bi en des actes d'aliénation destinés à porter sur d'autres
têLes le droit de pl'oprieté qui, jusques alors, avait résid é su r la leur,
TROISIÈME PARTIE
§ 1.
LES ACTBS INVOQUES PAR
M,
Série des actes invoqués par AI. de Gctlliffet.
DE GALLIFFET, ET LEUR VÉRITABLE CA RACTÈRB ,
Après l' exposé Je tous les titres qui justifient la propriété de la bord igue
Celle tl'oisième partie éta nt le fond même du litige et destinée à recevo ir
l'application des principes ci-dessus posés, il est impol·tant de signal er à l'a·
dite du Roi , sur la tête de M. de GallilIet, ex posé fait au commencement de
ce mémoire. il ne raut plus qu e les classer en diverses ca légories, les
vance les divers points qui y seront développés pour obtenir la solution récla-
grouper en masses détachées, à fin de les mieux reconnattre et de leur ap-
mée par l'arrêt du conse il d'état du il décembre 1847.
pliqu er plus ~ i sément plus tard et à chacun d'eux les prin cipes qui doi vent
A cet effet nous verro us: 1 tous les actes dont se prévaut M. de Ga lliffet,
0
pour justifier qu'i l est proprié taire incommutable de la bordigue du Roi.
2° Nous fixerons avec précision ce qu'ils ont été et ce qu' ils so nt pour lui ,
à savoir : des titres de propriété, soi t par les termes mêmes dans lesq uels ils
Jes régir.
La pl'elllièrc ca tégo ri e dc ces titres comprend les donations faites aux archevêq ues d'Arles par les sou,'erains qui gouvernaien t le royaume d'Arles:
ce sont les actes et Jonation de
no,
1 1H, 11 62, 1212 et ~ 3M.
sont conçus, soit par le jlJgement que divers auteurs en ont porté, so it par
La deuxième ca tégorie se compose des traités rails par les archevêques
les exemples ana logues qui peuvent être ci tés; soit enfin par l'appli ca tion
d'A rles.., co nstitués propriétaires par les actes précédents d e~ bordigues de
à leur faire des principes ci-d essus ex posés tou chant le droit public de l' époque oà il son t intervenus.
Martigues, et parmi elles de ce lle dite du Roi, relativement à ces mêm e.
3° Nous prouv erons enfin que ce ne sout pas de simpl es actes administra-
borJigues; ce so nt les actes de 1223, de 1292 et de 1457,
La troi sième consiste: 1° Dans le testament de Charles du Maine , dernier
tifs, ou soit des ac tes de souverains agissant dans l'exercice de leur pouvoir
com te de Prov ence, du 10 décem bre 1,,81 , comprenant en raveur de François de Luxembou rg le legs de la vicom té de Martigues et de la bordigue
du Roi ', 2" dans les nombreux actes juridiques émanés soit du consiel dll roi ,
�84
soil des parlements, qui on l décla ré valide cette transmission par lesk1ment et
85
qui l'ont à tout jama is consac rée; 3 0 Enfin dans les actes d ' a cqlJisiti~n . du
les exemples analogues, soi ll es principes de dl'oit public ex istant à \' époqu e Oll
ili sont intervenus.
16 mai 11ï 1 el 20 mai '1772, qui O'lt fait arriver ces choses par acte a li tre
onéreux . à M. de Ga ll iffet.
La quatrième cl dei nière em brasse les arrêls du conseil de i 780 el 1 ï90,
ainsi que Ioul es les aulres décisions du domaine, qui onl reco nnu à celte pro-
!.es dona/ions de 920 , Il .1,4. ct 1212.
priélé des bordigues, sur la têle de M. de Gall iffet, le ca ractère ùe propriélé
patrimoniale, el qui l'onl à ce titre aS5 uj elti e à lïmpot, à l' éga l des autres bi ens
patrimoniaux.
Après avoiraiosi distingué ces titres, il sera plus fa cile de voir sortir ci e chacun
Les lermes du prem icr acte, la donation de 920 , faile pal' l' empereur Louis,
d' eux le vrai caractère qu~ nous leur allribuons, celui d'être des titr es de pro-
dit l'aveugle, que nous avons vu em pereur et roi de la Bourgogne cisjurann e,
priété. On voit même tl'ès clairement déjà l'enehalnement qui les unit et 10
sont, on ne peut plus clairs touchant le droit de rnopnlliTÉ qu' il confère.
force qu'ils se prêtent l'un à l'a ulre, car, en les suivan t, la propriété de la bordi-
D'abord le diplom e impérial concédé ù J'arcbevêque Manassès est accordé
gue du roi peut être ai nsi résum ée, depuis son ori gine jusqu 'à uos jours : elle a
pOUl' confirmer ce qu e déjà par un pr6cédent diplÔme, le prédécesseur de Ma-
passé d'abord de la tête des souvera ins du royaum e d'Arles sur celle des a rche-
na s3ès dans \' archevêché d'Arles, Rostang, avait ACQUIS de l' empereur ou de ses
Yêques d' Arles; puis de ceux-ci sur celle des com tes de Provence; puis de c€s
prédécesseurs: " Ut super Onilles l'es. porl e le diplôme, quas pel' pl'œceptum
derniers à François de Luxembourg, et enfin de ce dernier aux auteurs directs
de M, de Ga llilfet et à lui-même,
« quondàm all/ecessor suus Ros /agnus à prœdecessoribus nostris sive el à nobis
«( ADQUlsn'lT. ))
Il est donné pour quc Maoassès les obi ienlle, les gouveme, et les possède,
§ II,
Ces actes SQllt de véritable$ titres cle pt'opriétti,
plus ferm ement et d'une manière plus ass urée: " Ut (inlliùs et seCllriùs obtinere,
" l'egere et POSSIDERE valeret. »
Ce diplôme est fait, afin qu' il ait et possède à toujours, et qu ' il en fasse ce
qu'i l voudra, pour le droit et la Pl'01)1"i6té de [' église de S'-Étienne, les ciloses qu ' il
il
demandées:" UT
AD
JUS ET pnoPRIETATR~1 EI:CLESUl saneli Stephan; OMNI TE!I-
" PORE TENEAT ET POSSIDEA'!',
Celte vérit é sera facile à établir, en considérant successiv ement chacune des
catégories d'actes précédemment faites, et en cousultant soit les lermes dans
lesquels ils sont conçus , soit le jugement que divers auteurs ell ont porté, soit
u FACl.tT
1
Er
NEMINE CONtRADJCENTE.
IN SUOS PROPRIOS USUS QUlDQUID FACE nE VOLUERIT,
Il
N' est-ce pas là le ca~aclère du droit cie propriété, marqué à son plus baut
ùegré?
�87
L'au torité impérinle s"lI"! êtc {' lI c-m~me ici dcvant le droit qu'elle avait conféré aux archevêques d'A rles pm' les précédentes donations, c'est-à-d irc, cell es
86
Enfin, quand le diplôme énonce cn dét~il toutes les propriétés possédérs p~r
r"ites à Rostang, à Manassès et à Raymo nd de Montrond . Le droit de propriété
J'archevêque Manassès, tant celles données primitivement à Ros tnng que celles
primiti vement transporté pouvait-il être reconnu pal' une autor it é plus hau te?
qui lui ont éte donné0s il lui-même, ct qu c dans ce t inventaire nou s tr01l\'ons
( Voir dans Bouche. l.
lw les les pécheries tanl d" Rhône que
ni ère comp lète. )
dll
bord de la mrr , OMNES PISCATORI.<S. TAlI
DE RnODANO, ET PAL umDU S ET STAG~IS, QUAM I N MARITIM1 S, n o us
lisons e n co r e
Il ,
p. 132, l' ac te ell entier. 11 y est rapporté d'une ma-
qu e ce!
choses sontlN DO.llINIO sUO: J'ncte le dit en ces termcs: " Brel.'e de terris quas Ma-
Le quatrième acte , hl co nfirmati on donnée en 1 162 par l' ompereur FréJéric
• nasses aI'chiepiscopus I~ I) Jm~1O suO tenuit. "
L'acte pouvait-i l mieux marqu er le droit de propriété de l'nrchcvêq ue? One
dans l' archevêché ùe cell e ville y ava ient posséM, compreod , comme on l'a
expression plu~ énergiquc pouvait-ell e être employée?
\'u, la pêcheri e de ~Iar ti gues, piscal'i(lm de Ponte.
JI
à Mi chel de Morose, archevêque d' Arles, de tout ce que ses prédécesseurs
Cet act e conu l'nlC dans les choses donn ,;es l' archevêque el ses snccesseurs en
Le second actc, celu i de Il ~". , éman é de r em pereur Con r~d
III ,
est tout
aussi positif.'
101
Dans la deuxième partie de ce titre, où J' em pereur co nfirm e à Raymond de
Montroud, archevêque d' Arl es, entrt! autres propriétés, ce lle de la pêcheri e de
Martigues, PISCARlAM
" libi
DOMI~IOM
ces term es: " Hœc omnia Are/a/ ensÎ episcopo, ejusqlle Sltccesso/'ibus conf/'-
OF.
PO~TE ,
il esl dil à plusieurs reprises: « Con(i/'mavimus
.... piscariam de Ponl e.
Il
marnus. )
" n' y a que le droit de propri été qui puisse ainsi être co nfirm é et passel' à
tous les succcsseurs clu donataire primitif.
( Voir la cha rt e rapport ée en enti er dans Bouche, t.
Il ,
p. 207. -
Et Saxi,
Ponlificitt.1/l. Arelatcnsis , p. 25 1. )
Et dans le cours de l'acte, il indique que c'est non seulemcol à l' a rch e '' ~que ,
mais à tous ses successeurs, que la dona tion el la confirmati on so nt faites:
«
\t
Tibi, venerande A/'elcltensis civitatis archiepiscope et pel' te ECCtESIJE TU.'!! ET
SUtCESSORIB l1S TUi S.
Il
Le troisième, l' investiture de la Provence donnée par l' empereur Frédéric ICI'
à Raymond Bérenger, en 1162, est conçu dans le même es prit.. Cet aote transfère au com te de Provence: la vilte d' Arles, les l'egaies sur les monnaies, le~
POI'tS, les bords des fleuves, les prés , les salines , les cours (l'eau, el tOllt ce qui tienl
au pouvoù' impérial, à l'exception de ce que l'al'chevêq!le d' Al'les et l'égl'ise d' AI'le~
possède depuis cent ails: " EXCEPTO RO QUOD ARCIIIEPISf.QPUS ET ECCtESIA .\REI..\\( TENSIS DABET "El RABUIT A CENTUM ANN IS RETRO. ))
Impossible donc d' équivoquer sur la portée de ces actes ct SU I' leurs termes.
Ils ont const itué une propriété parfaite au profit des archevêques d' AI·les.
Cela se voil de so i et se verl'a bi en mieux à la clarlé des principes du droit
public , existant à
l' ~poq u e
où ces aotes sonl ioter\'en us, et de la lu min euse
doctrine qu e nou s avons em pruntée à M. Guizot S UI' les bénéfices royouw. Al' ec
les premi ers, il faut dire que le pouvoir impérial qui céda it , <l li énait ct donnait
les' pêcheries de Martigues aux archevêques d' ,I\:rles , en availle pou"oir, parce
qu'i l pouvait aliéner le dumaine public et ses dépendances. Avec le second ,
�88
il raut ajout er que ces actes successirs de confirma ti on des dona tions primlt il" Cmcnl rai tes n' étaient pas la preuve d' un d roit imparfait ()ulempo ràire'sur la têle
89
des premiers concessionnai res, mais uniq ue Ul enl la preu ve d' une ra tifica tion
6eraie nt revêtus ù' un cara ctère Ilouyeau par les trailés de 1223 et H a7,
lI ouv eile du droit primitif, re nouvelée sa ns nécessité e! non exigée pal' le droit ,
Comment le pouvoir actuel pourrait- il méconnaître ces actes soleoll els émanés
mais incap'lble d'alfdib lir pa r sa répétition la rorce du droit primitir con cédé.
du poovoiran'cienql1'il représente et aux obligationsduql1el il a sucoédé, lors de
r ac~ession de la PrOl'ence fi la France ?
Les Il'ailés des archevêques If Arles avec (es comics de PrOt'ellœ
de 12;23, 1292 cl 1.. 57,
Le lestament de Charles du Maine, dernier comte de Provence, du f 0 décemlm !
U8 t , l' arr~t du parlement de Paris , du 25 septembre 1568 ,
l' arrél du C01/scil d'état dtt 9 1I011t 1701, les lettres patentes dl/26 a-vri11702,
Ces trois trairés conti ennent d'e la par t d'es co mt es de Pro vence, soul" e raln ~'
(le cell e prov in ce, la reconnaissa nce la plus expresse du droit de propri été des
a rche l" êques d'Arles SUI' ~es bord igues de Man igues et notamme nt sur la hord i:
g ue du roi , Celui de 1223 , en s' imposant J' obligation de ne rien faire
qU I
altè-re, qui diminue 011 qui entrave ce genre de proprié té; celui de 1292, en
achetant de J'archevêq ue la bordigue d u roi ; celu i tde 1 ~57, en s' éngagea nL à
Si jamais il y e ûl uo droit de propriété cà ractérisé , ce fOt sans doute celui
q ue J' on pa~ fonder et appuyer sur un testament.
Le testament a toujours été réputé un moyen du droit civil d'acquérir le doma in e des choses,
respecter les bord ig ues q ue l'archevêq ue ava it données à ba il emphy téotiq ue
à divers, Ces trois actes s' unissent dans M l
o bj e~
el leur sens , comme leur
parlée, ne ~oLlI pas susceptibles td u moind re doute,
Si don c M, de Ga lliffet ne pouva it pas in voqu er, comme il le rait , le testa ment
d u dern ier com te de Provence, d e 1 ~ B 1 t et qu' il rOt réùuit à exciper du droit
d es archevêques d' Arles pour justifier du sien , les titres de pl'opl'iélé de ces
derniers qui résident daoil les donations de 92 0 , H U , -Ii 62 et 1 ~ 12 " se
Cela se voit dans le droit romain, dans le droit sui Vi dans le moyen.âge,
comme dan s notre droit actuel.
L'a utoriser serait chose inutilll ef oiseuse,
La bordig ue du roi étant donc au nombre des biens possédés par le. COIllLe
de Provence dans la vic?mté de Martig ues, ainsi que le prou vent le traité de
~ 293, l'acte de 1379. et celui du 10 a vril i 550, le testament par lequel il la
tra nsmit à François de Luxembourg, est donc un vrai tilre de propriété,
Cela est d'auta nt plus
cer~io que le t~sta m e~t n~ tra nsmi t pas sur
CP (l c
�90
bordigue un droit trl11por~ire , ni lin droit révocable, ni
91
Utl
simpl e droit J'usu-
.
1ère de titI") Irgitim e de propriété? C'est que la réunion de la Prov ence à la
France a élé opérée sous l
. qne 1es cl'
.
a ,con' d'Illon
rUlts antérieurement
~l cq l]i s dans
èe lte province il des ti ers et foncl és sur le dro it puhli c cie la province soit sur ses
et 1,\'5'7,
Cela est d'autant plus certain encorëqu e, quand même ce ll e bord igue n'a urait
lois, ses usages, ses co utum es et ses pl'iv il èges parti culi ers, seraient main tenu s
Pt respec tés pal' la Fi'a ncp. C'était la cond ition imposée par le testament de
pas été ainsi dans le domaine privé du com te de Provence pal' l'acq uisition qu ' il
Charles d'Anjou qui inslituait le roi de France, Louis xr , so n héri ti er dans la
cn avait faite, et qu' {'I! e eût eté une dépendanee directe du domaine pub lic,
propriété du com lé de Provence, et qui la lui léguait; elle est conçue en ces
d'après le droit publi c de l'époqu e, cc souverain aurait pu en détacher une
termes: " Patriam ac lerras ipsas adjacentes lIOn sol'1t/ll in /IIi/II precium suarwII
partie, l'aliéner au profit d' un tiers et ['investir d' uu droit abso lu et définitif. On
«
l'a vu plus hau\.
Enfin ce n' est pas chose nouyelle ni étrange que celle que soutient ici M. de
W LECIIS, LlDERT.-\TIRUS, FR.\ NC II1 SII S, STATUTlS, CAPIT ULlS, EXCEPTIONIHUS ET PR.EROGA-
« TI\' 15; ETIAM ET ITEM I~ USlnus, Rrnous , MORIOUS , STiLlS, AC U,UD.\DILIBUS C(JNSUE-
Galliffet, et ce titre de propriété fondé sur le testament de '1(t8 1 , a été reconnu
(( TUDH\IOUS , QUAS, QU~ ET QUOS ACCEPTARE, RATIFICARE , APPRODARE AC COSF 1R)J.4.R f:
comme tel et déclaré irrévoca ble par les arrêts du parlement de Paris du2 5 se pl.
• DIGNETUR AC
« vence). "
fruit mais tout le droit que le COlute de Provence avait sur elle comme proprié-
,
taire légitime et comllle acquéreur des archevêques d'Arles pal' l'a cte de 1292
1568 , du consei l d'étal du 9 août '1'701 , et les let,tres patentes du 26 avril
~
suscipiat amabililer, VEHUM ETIAM IN surs PACTIONIBUS , CO~\'ENTIOXIO US , PRII'I-
Louis
'702.
Ce que l'on veut faire juger aujourd 'hui a donc été ju gé depuis long temps,
XII ,
l'ELIT
( Testament de C harl ~s d' Anjou , demier comte de Pro-
da ns le pa cte solenn el fait en juin 1.. 98 avec les députés des états
de Provence, à Senlis, accepta cell e cond ition et promit de l'exécuter. II adjoignit la Provence il la France:
par les plus hautes auklrités, pal' les tribunaux administrati fs et judiciaires de
l'ancienne monarchie. Alors, comme aujourd' hui , on exam ina si le testamen t
«
Sans préjudicier ni déroger à leursdits privileges , et ell outre tous et
était un titre de propriété, si celui qui l'avait fait avait pu disposer, et si ce lui
" chacun Les droits, priviLèges, libertés et {ranchises, convenliOllS , chapitres
en faveur de qui la disposition testamentaire ava it été faite avait pu acquéri r,
(1
de pœiœ,
LOIS,
COUTU~fES,
DROITS , STATUTS,
pol'ices cl manières de vivre ès -
" dits pays .. , ....... qui lew' ont été donnés, octroyés, confirmés et COllli1lluis,
et la conclusion fut en faveur de ce dernier.
L<I question est donc déjà résolue, et on pourrait à bon droit s'étonner que
«
tant pal' lesdits seigneurs, ROIS, reines et comtesses d' ;,ceWl) pays , qui ci-
la solutivn en rot de nos jours de nouveao si péniblementl'eche rchée pal' l'admi.
«
devant ont été auœdils pays, leurs lieutenants, gOllvcl'Ileu1'S et gl'ands séné-
nistration.
fi
chauœ ,
Faut·il maintenant rappeler le motif déterm inant qui a amené la recollnais"
«
PROUVE, CONFIRMONS, LOUONS ET APPROUVONS, POUR E~ JOUIR PAR
sance et la consécration du testament de 1/.81, so us l' ancienne mûnarchie, et
«
d'eua>, tout ainsi et pm' la {orme et manière qu'ils ont par ci-devant dû-
qui doit l'amener encûre an jourd' hui ? ou faut·il indiquer pourquoi on a especté
u
ment et juslement joui et usé, jouissent et usent , promel/ant en bonne roi
,
.
ce titre de propriété, et pourquoi encore on ne pouvait pas lui en lever le carac -
•
NOUS LEUR
.4.. YONS DE NOUVEAU ET
n' ABONDANT CONfI RM}~,
LOUÉ ET .4.P-
EUX
et chawn
" et PAROLE DE ROI, et jurant leur gal.,I,.)' . obserl'C)' ct cntreten i,.. ( E\t!,1 it
«
des llrchiv.
d'; """ I ' I(,Il"!"fll n l ,,~' ."
�92
Il avait ete précédé lIe l'édit d' octobre 1~86, donné par Charles
,' III ,
dan~
Je même objet, et conçu daos les mêmes termes ( Isambert, collecL lAJis an-
ciennes,
t.
XI, p, 166 ), Il fut su i vi de celui d'avril '1 515, donné par FI'ançois 1e<,
coufirmatif des précédents ( Recueil des traités, L
p, 128, -
Isambert , 1.
XII,
p, 55, -
Noël Gaillard ,
p, 33), Et l'historien Bouche nous apprend, t.
p, 488, qu'il fûl confirmé: • par Henri
Il,
• 1560; par Henri IV, l'an 159,} ; par Louis
«
Il,
l' an 15.\.7; par François
XIII,
Il,
l'an
Il,
en son entrée dans la ville
d'Aix , l'an 162,2, 'et par Louis XIV, son fils, par patentes clu mois de mars
« 1660, »
93
Sous quelque Ipgi,lation IllIe nous nOlIS pluriol:s, le titre que produit M, de
Galliffet, le testament du comte du Maine de U81, ,est donc un vrai titre de
propriété , les loi s de 1790 et de r an VII, dans les articles prérités', n'ayant pas
eu d' autre objet que de maintènir celle transmission de propriété, qu 'auturisaiL
le droit public et civil de Prol'ence, au moment olt elle a,'ait lieu,
En résullat donc, quand même M, de Galliffet ne puiserait son droit que dans
ce titre, ce titl'e devrait être ljuallfié titre de propriété, A pins fonte raison
cela dOit-il
r être,
quand , subrogé aux droits du comte de Provence, il
r esl
enco re par celui-ci même, à lous les droits qu'avaient primitivemeot les arche.
C' est donc sous la protection de ces actes législatifs qu'est placé le titre, la propriété de M, de Galliffet; et pourrait-{)n aujourd'hui lui contester d' être un
\'êques d' Arles ,
el que
leurs titres à la bordigue étaient aussi des donations,
\'«.Iritables titres de propriété,
titre vrai, translatif, irrévocable, un vrai titre de droit civi l ?
La législation moderne est d'ailleurs d' accord avec ce que proclame la légis-
lation de l'ancienne monarchie, Les lois qui ont été rendues en France, depui. '
1789, sur le domaine et les aliénations qui on\ pu en être faites, sont conformes, .-,
Elles répètent aussi que les aliénations consommées dans les pays adjoints plus
tard à la France, et consommées avant leur adjonction, sont rpgies et gouvernées
par les lois alors en vigueur dans ces
pay~,
LeJ
arr~ts
du comeil de 1780 et i 790 , a'insi que toutes les déc isions du domaùle
qui ont cOTlsidàé la proprieté de la bord'igue comme biens patrimoniauw,
ou par les traités de réunion,
La loi du 1" déc, l 'i90'porte en effet dans sIm aTI. 37: (( Les dispositiol\!
« Mmprises au présent ~éGret ne seronl exécutées à l'«.Igard dl's provillce~
« réunies à la France, postérieurement à l'ordonnance àe 1566, qu'en ce qui
« concerne les aliéoations faites depuis la date de lellr réunion respective :
Ces titres ont une valeur importante, qui ne pouvait être négligée, ni mécon-
les al'iénations précédentes tkvant iltre "eg/ées suivant/es lois , lors en u$((ge dan ~
« ces rn'ovinces, •
uue, Car, si pendant des siècles les titres de propriété pour les bordigues vut
«
Et celle du ,14. ventôse an
En
ont été assimilées par l'impÔt, par les charges qui ont pesé sur elles, aux hiens
« ce qui concerne les pays réuois postérienrement à la ,publication de l'éd it de
patrimoniaux, il faut bien convenir qu'autant de fois qu'oo l'a ,linsi pmtiqué,
«
VII,
art. 2, sur la mêmjl roatière, dit encore:
ét&jugés des titres irrél'ocab les, de vra is titres de propriété; si les bordigues
l'
février 1566, les al'iénations failes avallt les époques ,'especlives'des réunions,
«-sel'ont reglées suivant les lois, lors en usage'dans les pays réunis, ou suivant les
• Irai tés de paix ou de réunùm, •
jugé
o~
décidé, autant de fois
aujo~rd'hui
00
a résolu d'avance la question dont
uoe nOllvelle , mais inutile.soJution,
00
cherche
�9!~
Or,
1:90 9
SUI'
9:5
cc point , quel reg l'ct peuy en t laisser les arrNs du co ns eil de 1ï80 ct
Ils on t consen 'é la prupriété des bordigues à
~J.
de Ga lliffel et aux autres
M, de Galliffet, il se ra Facile dc réduirc à trois natu res ùiv erses d'ac tcs, ceux quo
crs so u\'eraius pouvai ent réa liser cn vcrtu de leur pouvoir, comme monarque"
possesseurs dc borùigues ' ils l' oo t fuit conlre des réclamations répélées, en pré-
Ils ava ient ù'abord Ic droit de Faire des lois; puis celui de Fai re tous Ics règlement s
scnce dc tous les prétex tes d' utilit é publique, de nocuit é pour la oavi ga tion et
d'administration nécessa ircs soi t à l' exécution des lois, soit à la policc de Icurs
la pêche, à l' encontre des argum ents les plus spécieux, Del',lIül es ti tres produits,
Nats , ce qui constituait précisément leurs actes administratiFs ; ils ava icnt cn fill
toul r échalTuud age de ces prétext es faux s' pst éyanoui : la juslice administrative
cclui de di spose r ct d' alié ner le domain e de l' état, soi t le domaillc public, en tout
la plus haul e s'est inclinée, ct, le droit a triomphé,
ou en partie, en fa\'eurd c qui bon Icur scmblait , soit pour réco mpenscr des ser-
Il faut. donc renoncer à justifier , plus qu' on ne l'a Fait jusqn 'à présent , la
\' ices publics. soi t pour Faire des ac tes dc libéralité,
vérité doot l'arrêt du consei l d'état du 3 décembre 1sn a demand é la démons-
Il est év ident de so i qu e nul de ces actes ne peut être conFollùu avocl'au tre;
tration, Si nous vo ulons quelques lumières de plus sur ce point. il faut. exa-
que, quand leso uv cra in portai t une loi , il agissa it autrement , ùans un but dilTé-
miner l'bypothèse gra tuite dans l''q uelle M, le prPfet du département a voulu
rent , quc lorsq u'il F"isa it un simp le règlement adm inistratiF, ou qu' il donnait el
se placer, el rechercher si tou s les titres que nous avons so;gne lls~lllent. classés
aliéllait , à titre dc récom pensc ou autrement , une parti e ùu domain e, une terre,
dans la prem ière, la seco nd e et la troisième ca tégorie, ne sont qu e des ~ct es
un c propri été, un e pêchcrie sur le bord de la mer, Dans le premier cas, le
adm inistratiFs éma nés des souvera ins de Prov ence ngissa nt dans l' exercice de
leur pouvoir admini stratif.
monarque exe rça it sa plus bell e prérogative, dans les deux aut res il Faisa it u~
acte moin s étendu ,
A qu el signe pou rl'a-t -o n du ne recon naître qu e le mona rque a Fa it l'une d ~
ces trois choses, ou une loi, ou un acte aùm inistratiF, ou un acte d'ali éna tion ?
§ Ill.
C'est à la nature précise de l' a'cté réa li sé, Si c' est un ordre destin é à l'égler et à
régir l'uni versa li té des suj ets, c'e;t un e loi ; ell e est portée pour tous el con tre
Les tit1'es précédemment exammés
Ile
SOllt pas
des actes émanés des souverains de Provence , agi~sallt dans l' exe1'cice
de lc'l.w pouvoir adminùtmlif.
'tous, Si c'est un ac te ou un règlement adminis tra tif, il a pour objet encore d'atteindre le publi c, mais da ns unc mo ins grande coll ection : c' cst qu elq'JeFois un e
fr~ ction
de province qui cn est l' objct ; c'est one province entière ; c'est le roya'l-
meentier, si l' on veut, mais la perso nn een particulier n' es t pas considérée,
,
~'es t
â la masse qu e l' acte s'ad resse, c'es t ut unù'e/'si qu e l'acte profit e, Voi là tou l. Si
c'est au
co ntr~ire
un acte d'aliénati ùn du rlomaine du souverain, ou priv é ou
Si on l'eut distingu er, à l'aide de nos id ées actuelles , ce qui est un peu confus
public, oud e donation, c'est alors un acte particu,li er qui s'~dresse à un seu l, 011
dans le pouvoir souverain des princes qui gouvernaien lla Provence eo 920 et
à quelques-uns dénommés: c'est une Faveur ; elleesl spéciale; tous n'y pcuvent
autres années correspondanles à celles où se placent les divers tilres qu'invoqu e
prétend re. Elle se restreint à celui qui en est l'obj el. Jamais un souverain lÙ\
�96
donné en masse à tous; jamais il n'a aliéué au profit Ù~ tous, ou ~e personne»
non dénommées.
Appliquant ces p/1ncipes tout de suite à 1ancien royaume'de Prol ence, noUs
allons, en rechercha nt dans les monuments que /lOUS a transmis J' histoire, retrouve/' chacune de ces classes d'actes elles reconnaÎtrc dans la pralique, après les
avoir distinguées dans la th éorie.
Nous consid èrerons ct l'on consid èrera avec nous, comme émanés du poul'oir
quOavaienlles comtes de Provencc de faire des lois, les actes législatifs suivant!>,
ceux que Julien, Statuts de PI'Ol'I'IlJ:e, a commentés al'CC une science si complète
et si sOre, savoir: 1366 ( Julien , 1.
l,
L' édit de la reine Jeanne SUI' les appellatians du 15 juill
p. 1, 2, 3 ) ; -
l'édit de Réué snI' les tutelles ( p. 101 ),
- sur les donalions de '1,172 ( p. 182 ); -
le statut. su/' le retrait lignager (p.
261 ) ; - sllr la directe ( p. 312 ) ; - su/' les subtitutioos ( p. 365); snI' 'la
quarte trébelliallique (p. 4-33); sur les successions ( p. 4.33 ): - et enfiu tou s
Ou considèrera certainement avec nous comme simples actes adminislratifs,
les actes suivants émanés des comtes de Provence: '10 Le règlement fait le mois
d'aoOI 1.259 par Charles 1er el la comtes3e Beatrix, son épouse, pour la sortie
des sels de Berre, cité par Coriolis ( Traité de l'adm,:nistl'atioll du comté de Prot'tnce, p.,j. el 5); - 2 0 les privilèges conférés à la ville d'Aix par Louis
lentes de Charles
Il,
Il ,
en
les lettres pa-
année 1299, portant défenses d'entrer ùu vin, ni raisin»
étrangers dans Aix ( Privilèges d' Aiw, p. 2.\. ); - tous ceux qui sont énoncés
au même livre, p, 25, 26, 27, 28 et suiv. jusqu'à 43;- un acte de 1 ~28 conlenanlla confirmation par Charles 1er, comte de Provence, et Beatrix, sa femme,
des privilèges des Marseillais (Histoire des actes et des délibérations.d1t corps et mu-
nicipalité de Marseille, par MM. Méry et Guindon, t.
l,
~1 ,lI'sc ili e choisisse ses consul s, ct conserl' e la même juridiction qu'avaient ses
anc' icns \'i comtes (eod. p. ',35 ) ; - enfi Il la plnpart des actes qui so nt inscrit s
dan s le livre no i/' , dont Ics rn ~rnes auteUl's on t donné l'analy se et le sommaire,
1.
1\' •
p. 333 à 3GO , con scrv é aux archiv es de Marseille , ct qui est comme le
blilletin des actes Hdministratifs dc nos com tes de Prov cnce.
'l'ails ces actes sont génr rallx : ils s' adrcssent ail pllblic ; il s ne co nfèrent ri en
du droit de propriélé à personn c. Le poul'oil' qui les a réali sés pelll les retil'Cr,
les modifi er et les reprendre. On le sent pal' la nature mêm e de ces act es.
En es t-il de même des actes qu e nou s avons examinés? de la donatioll de
!l:20 , de 1 Hl·, 1 162, '12 1'2 9 clu pact e clct223 , de celui ci e H 57? du testament de 1 •.8 1 du derni er comte ci e Prol'ence? Qui pourrait so ut enil' que ces
actes émanent du so uverain agissant dans J' exercice de son pouvoiradmioistrati f'?
Il s transport ent un droit de propri été, nous J'm'ons
YLl .
Il s le donnent li une
personne dénommée; à un 3rchel'ilq ue ; à un e église; à un légataire. C'esl
les autres qui suivent, et qu' il serait trop long d'énumérer.
l'année 1399 (p. 1 à 23 du livre intilulé Privilèges d' Aia:> ); -
97
p. 395); _ un acte ~~
1243 , .par lequel Raymond Bérenger, comle de Provence , consent à ce que
.<lu droit civil qu'i ls émanent'. C'es t par lui qu' ils son t régis dans leu rs elTets. Cc
n'est j1as par mesure de poli ce qu' ils sont pris. C' est pour récompenser des serl'i ces ; c' est. pour faire un acte de libéralit é; pour transport er sur la tôle d' ulle
pe rsonne etde ses successeurs, les al'an ta gcls ùe l'act e. Jamais un acte administratif a-t -il eu ces ca racl ères singuliers? Enfin il est arrivé dans le cours des siècles qlle , quand on a contesté l'efficacit é de ces titres, qu ' Oll a l'oll iu reprendre
la chose , le possesseur a résist é; qu' il a fait triompher son titre en 1580 , en
'17 80 et. 1790 ? Était-ce donc un acte administratif qui avait celle puissance ?
Veut-on faire mieux? recourir au tex te précis de ces actes 9 On velTa qu' il s
sont fait s pour toujours, sans clau se révocatoire, sans limite ; qu'il constituent
précisément , les premiers, ceux de 920, 11 H , '1162 ct 121 2, ces bénéfi ces
ro yallx. dODtnons avons démontré l'hérédité et la transmissih ilité avec la doctrine de·M. Guiz~l; ct les scconds, le tes tam ent surtout de 1481 , un titre de
propriét é que défendent les lois anciennes et modernes, le pacte qlli a uni la
�98
Pr<l\"ellce à la France, Ics lois de 1790 et du 14. r ent ôse ~n
HI,
Est-cc là le
ca ractère d' un acte ad ministratif, lequel n'attribue rien à personne nommément ,
qui peut être retiré, et dont ni les lois anciennes, ni les lois moderne, n' ont cherché à garantir l'irré\'ocabi lité? Et, pOlir faire ici comme ce philoso phe à qui o!'
niait le mouvement et qui se mit à marcher, ne pourrions-nous pas dire : la
preuve qu e les titres qu' invoqu e M, de Galliffet ne sont pas des actes admini stratifs , c'est qu' ils ont été respectés et exécutés jusqu'à ce jouI' depui s des sii.'cles, alors que des masses d'actes administratifs que chacun de ces dix siècle;
arait vu éclore, ont disparu avec eux? Le titre de propriété seul peut donc
ainsi rester debout au milieu des âges et de leurs flu ctuations,
SUI'
les ana logies, examiner comment
la jurispl'Ud ence so it judiciaire, soit administrative a qualifié des aot es de concession émanés des anciens souv erains de Provence,
~t
bli e, Le neuve rentraut llans celte catégorie, le pont , di sait-il , n'avait pa.
lIne autre nature,
La \'ille d' Arles, au con tl'a ire. en force des stip~l a tions qui avaient présidé
,.tl la réunio n de la Provence à la France , et de l'obligation que s'étai ent
impQsée les l'ois de France d' exécuter les aliénations des comtes de Provence,
leurs prédécesseurs , et de respecter les droits acquis aux provençaux ,
Cil
défendaient pOUl' elle la propriété exclusive,
Elle sortit victorieuse de la 'luLle devant, la Cour ro yale d' Aix et devant
la Cour de cassation , qui , l'un e ct l'a utre, reconnurenl la puissance de ce
principe,
Voici l'arrêt de la co ur de cassation qui résum e d'une mani ère co ncise ces
1\ est enfi n un dernier argument qui doit encore ici trouver sa place et corroborer ce qui précède, 1\ faut jeler les yeux
99
rechercher si ell e a vu
en eux des titres co nstituanl une propriété ou de simples actes administratifs,
haut es co nsid ération s de droit pllblic, lesque lles font de cell e décision un
monum ent remarquable de jurisprudence,
Sirey, 1. 39, l '· part.., p,
~ 7,
le rapporte dans les termes suivants :
" SUI' le premier moyen relatif à la violation des traités el des lois du 1"'
" déce mbre 1790"" ", d'où le demandeur conclut que la Yille d'Arles n a
" ni ret euu, ni conservé la pl'opriélé du pont.
«
Altenrlu que devenu e trop faible pour se préserv er des invasions qUi
la menaçaient et co nserver so n ind épendance, la ville d' Arles traita, en
121> l , d,) sa réunion à la Provence, sous la réserve des libertés et pri vi lé-
Ju1'ispl'llllence Judicim:l'c,
ges énoncés dans plusieurs articles du traité , notamment de son trésor, de so n
hôt el-d e-v ille, du droit de nommer elle-même ses conseils et de son pont
SUI' le Rhône ; l' article 9 interdit au comte de Provence l'é tablisse ment d' un
PREMIÈRE EXEMPLE, - L'arrêt de la Cour d'appel d' Aix, du 6 mai 1836 et de
de la Cour de cassation du 28 novembre 1838 (Sirey, 1839, 1, p, 47),
péage, et l' article '19 porle que si les revenus du pont ne suffisent pas à l' entretien, les citoyens y pourvoiront sans que le comte y [asse aucun [l'ais, Des difficultés s'étant élevées en tre la ville d' Arles et le souverain qu' elle s'é-
1\ s'agissait de la propriété du pont d' Arles , établi sur le Rhône,
lait donné , il Y fut pourvu en 1385 , et par une transaction solennelle tes
L'état le revendiquait comme une propriété dépendante du domain e PlI-
francl~ises,
. ..
: '1J",*",
':. ' ; ~
,
•
privilèges , libert és et propriétés de la ville sont reconnus et main-
�100
tenus, notamment la pleine po sess iùn des bo is, pèc heries, l'pneries, cllasse,
~L d' ,\I ue rl as les l'e\'endi qll ait cn force de la concession que le roi Réné
pâturages et au tres dro its et profi ts, et autres cll oses quell es qu'e ll es so ient ,
a\'ec in terdiction réité rée au com te de Provence tI 'é taulir au cun péaqe nou\·eau. -
Ce furent des trait és de puissa nce à puissa nce, qu e la pnissa nce la
a vai t fai te à so n au teur , Art aluc ll e d' ,\ lIagon ia, pa r ac te du 26 fév rier 1>'12,
de tout es les iscl es do la Durance.
So n adversa ire les lui disput ait , en repolissa nt so n li tre.
pl us for te exécut a religieusement , puisqu e Charl es d'A njou imposa par so n
testament, au ro i de Fru nce, la co ndit ion ùe res pecter tous les I!ro its ac quis aux pl'oven{'a ux ; que Lou is
XI
jura ci e maint enil' ct ouse rv er les condi-
tioDs cie la réu nion de la Provence i\ la Fra nce: qn' iI en fut de même
Ù
chaque avénemen t; ct qu'en 1665 un arrê t ùu co nsei l, r nreg istré au par-
Deva nt le tri bunal ct de rant la cour , sur noire plaid oirie et
dant le terme convenu avec l' entrep reneur chargé de reco nstrll ire le punt.
de la Provence de ces iscles, porti on in tégra nl e d' une ri vière qoi fa it partie cl u do main e pub lic , fur ent mai nt enus au profit df) M. d'A lbertas, ct
déclarés \'a lab les.
Ce t arrêt et la discussion appro fondie , qu i l' a précédé, ont été reclleil lis
arec beauco up ci e soin, da ns le rccueil des arrêts de la co ur , année 1841:i,
p. 'i et su i v.
• Attendu que de 1667 à 1792 la ville d' Arles a joui clu pont cn tout e
liberté, le faisant rccons tl'uire au moyen tlu péage toutes les fois qu' il fut
emporté pa r les ea ux; en 1792 ce pon t (ut enco re emrurté, un bac fut étbli eu dessous et le pon t fut reco nstruit en l' an
nos
défenses éc ri tes, le titre cie co ncessio n et l' aliénation fJite par le souvera in
lement cie Provence et su ivi cie lettres pa tentes, consacra litt éralement le
droit de la vi lle d' Arles au po nt et au péage, do nt la quotit é fut réglée pen-
SUI'
La ru briqu e port e:
«
«
d'après le droit co mmun de Prorcnce , les iscles des
riv ières navi gables ou Ilult ables cL particulièrement de la Durance apparte-
" naient au so uverain , à l' exclusion des r ropriétaires riverains.
»
moyennant un péaf(e
" En conséquence les concessions {ailes pa1' les comies de Provence, onl
pendant yi ngt-neuf ans, en vertu des ordres et de l' autorisa tion du go uv er-
pour effet de trans{érer légitimement aux concessionnaires la propriété
" des iscles.
XII ,
nement: qu'aiosi , loin de violer les traités, la Cour roya le d' Aix ( par l' arrêt
allaqué du 6 mai '1836 ) en a fa it une juste applica ti on : d' ull il rés ulte qu e
le pont d'Arles n'ayan t jamais fait parti e du domai ne public, les lois nouvelles sur les domaines de
(l'Arles, »
r état ont
« tu
Et le tex te de l' arrê t , su r cc po int, di t énergiquement el lacon iquement :
été invoqu ées sa ns droit co ntre la vill e
DEUX IE11E EXEMPLE . -
L'arrêt de la Co ur d'appel d' Aix, du 2 mai 1 841~,
Il s'agissa it entre M.
Ù' Albertas
«
Considéra nt que, d'ap rès le droi t co mmun de la Provence, les iscles des
«
ri vières naviga bles ou !lottables appartenaient au sou verain , il l' exclusion
«
c1 es propriétaires ri vera ins;
«
Que la concession de 1 H2 fait e par le roi Réné a donc légitimement
« transféré la propr iété des iscl es litigieuses à Art aluche cl ' Allogonia et par
ct M. Du bertaud de Fronfroid e, de la
propriété cles isdes de la ri vière de Du rance, Ilottab le co mme chacun sa it ,
qlli se trouvaient sit uées en face du do main e de ce dern ier, dans la Co mmun e
de Me yrargues.
« conséqu ent à madame d'A lbert as qui le représente auj ourd 'hui. ( Du 2 mai
« 18M. , 1 1'0
« M~i.
ch. M. Lerouge, présid ent , M, Desso lliers, ,1er avoca t-générnl
\3enoit et A, Tayel'nier , avoca ts, ) "
�103
102
• Considérant que le. lois sur les domaines engagés sont ioapplicables à
TRlllSIÉ.\lE EXE .\lPLE. -
L'ar rN de la Cour de cassa ti on du 27 jan\'ier
ï 807
( Bulletin ciri l, an 1807, p. 11 ).
un e terre, dont la patrimonialit é a été recon nue par la puissance souveraiue,
ct est devenue la co ndition so us laquelle la Lorraine ct le Barrois ont été
cédés à la France.
Elle a jugé le 27 ja nvier 1807 ( Bulletin civil des a rr~t s, an 1807 , p.
·11 ) que les lois su r les domaines étai ent inap plicables à une terre dont Ir>
«
les domain es engagés ct \' iolat ion de traités de paix de 'I 73G.
Pm' ces motifs: « la cour casse et ao nlille lediL arrêt de la cour d'ap-
patrimoniali té a eté reconnu e par la puissa nce so ul'emi ue et est deve nu e la
condition sous laquelle la Lorraine et le Barl'Ois on t été cédés à la Frauce.
D'o ù il suit qu'il y a dans l' arrê t attaq ué, fau sse applicatiun des lois SU I'
pd cie Nancy, clu 19 uil'ose an
XII,
etc.; du 27 janvier 1807.
En voici les mo tifs :
«
Ouï le rapport cie ~J . Cochard.
" Vu la déclaration du 28 aoùt 1736 faisant partie du trai té de paix
Qun m È)1E ET DERNIER EXEMPLE. -
L'arrêt de la Cour d'appel d'Aix du 16
mai 1824.
dudit jour , ainsi conçue:
«
Le roi traitera selon toute justice et éq uit é et même le plus favorable-
ment qu'il se pourra, ceux il qui depuis la signature des préliminaires, "
Il est relatif à J'étang cie Be/mOlli qui communiqu e avec l' étang de Berre,
ct reçoit. ses ea ux et le poisson que ce dernier lui transmet.
a été rendu des domaines; et dès à présent sa maj esté consent à lai sser suh-
Malgré les prétentions des deux communes riv era ines, celle de Château-
sister tout ce qui a été ai nsi fait en faveur de IvIM. de Craon et de Merley.
neuf et celle de Marignane , une foule de jugements et J 'a rrêts émanés du
sans, ]Jour raison de ce, rien défalquer sur la somme qui doit ~tre payée
Tribunal civ il et de la Cou r , ont déclaré cet étang propriété privée et ex-
annuellement à M. le duc de Lorraine.
clusive des hoirs de Caumont et de l'hoirie de Marignane.
Considérant que celle décla ration a été ratifiée pal' Louis xv, qu'ell e
Pour ne pas multiplier trop nos cita tions, nous indiyuerons, entre autres
forme par conséquent un des articles du traité de paix du même jour 28
décisions, le jugement du Tribunal civi l du 12 mars '1833 et l'arrêt de la
août. 1736, eL devient dès lors loi des parties qu'elle intéresse ; considé-
Co ur du 1-i mai
fant que par leLLres patentes du 23 avril 1736 , la terre de Merley avait été
soire les hoirs de Caumont dans la possession exclusive de cet étang. Il vise
rendue à la famille Beau\'eau, avec déclaraLilln qu'elle n'avait jamais été
leurs titres de propriété, qui ne sont autres que la concession de la rellle
domaniale;
Yolande à Barthelemy de Va lori de J' étang de Belmont. JI s'exprime de la
«
" Que le roi de France, en déclarant par t'organe de son ministre qu' il
par conséquent, c' es~ à titre de patrimonialité que ledit sieur Beau vea u la
possédait;
qui l'ont ainsi jugé. Le premier maintient au posst'S-
manière suivant e:
Jaissait subsister tout ce qui avait été fait pour M. de Bea uv eau, a pris \' engagement de reconnaître que cette terre n'avait jamais été domaniale , et qu e
1 82~,
" AUendu que les titres produits pour les sieurs de Ca umont paraissent
«
établir 'que l' étang de Belmont est leur propriété;
« Que çes titres son t : ,10
L'acte de 1<\.27 par lequel la reille l'olande
dOlllle
�101.,
105
«
à Barthelem!l de ralm'i le châtcoli de Ma l'Îgnane, y comJlrls /'étal/g,
cr
est celUI de Belmon t"", " "
L'a rrêl de la cour du 1., mai 182 \, dil enco re au sujel ci e cr m6me élang"
el pou r la par lic qui
«
Cil
qlll
~ le. isclcs dc la Durance , (jans la comm une de Meyrargues,' semblables à
,<
ce ll es inl clyc nu cs en fa l ' CUI' d~ la comm uoe d'Orgoo, le
«
Cl
" er
aVilill S'I3,
cn fa vcUI' dc la coml))une dc Sé llas , le 27 juillet 181 ... "
appa rl ient à Ihoirie de Marigna ne;
Alienclu au fond qu'i l r6s11lle des tilres \' crsés au procès , de la
P OSS QS-
cr
sion co nslanl e , cl cl es fail s de la ca use , qu e le ci -clCI'anl se igneu r d<,
«
:\Ial'ignall e posséda il en pl einc propri élé
rélang
ci e cc nom......
D~UXlt\JE
EXB!IPLE, -
Il e$.1 emp l'Unté a U ll c0ocessjons roya les des eaux d ~
la Durance, ri l' ière notl ah lCl, faite$. pal' le souverain, Celle qui fuI,. faite à ~dam
de Ctaponne date de 1556, Un arrêté du pr-éfet du: départE\ment des Bouchesfi li-Rhone, du
ao septembre 18 ' 8,
pris pour la police ' de ce canal d'irriga tion ,
en parlant de celle cOllcession, dit formel/CUlent qu'el/e consti tue
propriété,
lm
droir de
Jurisprudence Adm ln Ist rat il'e,
Puis don c que pour ces divers cas, on reconnaH ~u e chaq ue concession
11
conslilué un vl'a i tilre de pl'o)lri(>I\), pourquoi ne le recbnnalll'ait-on pas ici?
PREMI ER EXE~PLE, -
II émane de la direcli on des doma ioes, II est relali f
encore aux iseles de la Durance dans la commune de Meyrarg1les, La décision
est ainsi racont ée par M, Eslrangin , sur Dlibreuil , Législalion sur les Ea ux , t.
p, 5 1,L
Il ,
Opposerait-on deux alT~ l és du conseil de p\'éfeeture du département ùes '
Bouches-do-Rhone, l'un du 9 mars 1808 , l'autre du 19 mars 1839 ; pour en.
conclure que les ti(res des propriétaires de b\lrdigues ne sont
p~s
des litfes cI ~
propriété, que leur cll'oit n' est qu' un usage, révocable à vo lonté, que ces dEllix
" En '1810 , l'inspecteur cles forêts de la 16 me conservai ion , dressa des
" procès-verbau x de visite et de l'econnaisance des isoles de la Durance cen• sées appartenir au gouvernement , en conformité de l'articl e 560 , IiI' , '2
Il
Les possesseurs , com munes ou particuliers, s'eu émuren t , recherchèrent
" leurs titres, les produisirent aux agen ts du domain e, et la proposition de
" réunir les iscles de la Durance au (Iùmaine de l' état fut abando nn ée,
" Alors interv int la décision domaniale du 5 aoO t 1813 , qui
«
r ont ainsi jugé?
que par couséquen t les précédents que nous cherchons
soo t contraires à la demande d~ M, de GalliH;el.
1
Voyons de près cette objection et examinons aIVecsoin ce qu'il faudrait pen
e~
de s(ln exaetitude , si elle nous 6tait adressée, El, poUl' Rrocéder avec plus dl'
du code civi l.
«
~I'I'~ tés
Jl' est
qu ' un e
reconnaissance de la validité des titres de madame d' Alberlas, touchant
cla rl ~, q' ~pt ~e l'arrêlé du ~ mars i 808 qu'il, faut d'abor<;\ ,s' occuper,
L'arrêté du 9 mars 1808 fut pri~ par le consei l c\~ préfectu\'e des Bouches-du- '
Hhône , à l'occasion de div()l'ses plaintes a~ressées à l'jlutorité par les pêcheu rs
de~ commu,nes riv erai'les de l' élang d\! Berre, par les
nul: hommes. pêcheurs
de Martigues, elA par les pJ\Opl'iétaires de bordig,ues, à cau,e des salines construi-
�106
an port ùe Bouc ,
le;
SUI'
107
remplaceme nt ùe divers cmulU x de bord igues, qui
D"aient été att erris et con\'ertis en sa lines parl eu rs propri étairL's. Ceux-ci a "aient
" rl (entrée dll puisson à Il< mer dans cet étallg , et par conséqUCIIl à la péclw et 11
" l'écoulement des cal/X pllll'itl(e~ qui sejottent dans l'étang ;
changé ct altéré IH' nature €le leurs bordigues: ils les a\'H ient con \"Ol'li es en
«
Que
bES CONCESSIONS ,'w r ES P.IR
L ~S
ASCIKNS SEIGSEUIIS
de /(/ faculté d'établir
salines.
, Sur ces plai nt e;;, le conseil de prércct.ure examin e ce qu e sont ces ca naux ci e
" des bOl digues ou pêcheries dans ce bras damer, Il' ont jamais Plt nuire 'Î sa dest;« nation Ilaturelle, ni entraver la nav igation , r ~ ntréc du poisson da ns l'étnng
bOI'digues ainsi att erris; il étab lit que ces ca naux doi vent conserver leur des ti-
• de Berre ct l' éco ul ement des ea ux. "
nMion première, q'J'en la cbangean t. on a nu i à l'utilit é publiqu e, ct il ord onn e
Celte donble assertion est in exacle. En voici 10 preuve.
~ di " elos de les rétablir tels qu' ils existaion t al1t l'dois.
L1\ statis(ique du d~pa rl em e nt tl cs Bouches·du-Rhone, l.
Jusques là on ne comprendmiL pas comment ce précéden t pourrait ètre opposé
Il ,
p. 9.56, rait connaη
Il'e r élat des Jicux ant érieurement Il la construation des bord igues, et il est bien
dans la question actuell e. Au con tra ire, il ma intient le titre des bordigues: il
éloigné de ressemble)' à cc qu' Cil ùi t r " rrtlté: « Dans /es temps, dit-il, qui
les l'appelle à leur origi ne ; et on ne voit pas co mm ent de ce qu e le proprié.-
«
précédé les opératiolls militaires de Marius, ces îles, occupées maiatenant pa,.k,
taire d'un e bordigue nepoll rrai t pas la co nvertir en sa lin e, il ne den ait pa~en
"1
l'ille de Mart'igues ,
être rega rd,) comme le propriétaire. To ut.a u plus pourrai t-on peul-être el~ con -
'\ DANS Tour
clure que ce genre de pl'op ri élé a ulle des tination parti culi ère , par son rapport
" bOU/'digues de Bouc.
ayec l'u tilité générale, qui ne permet pas qu'e ll e soit alt érée. Mais, hors du cas
.. à [navers ces bourbiers , et se rendaient à la mer par deux embouchures qui
le propriétai re vO\ldrait la cbanger, el toûles les fois qu' il youdra au contraire,
.. entourent aujourd' hui l'Ile où est bâtie la tour de Bouc. t es anciens historjens
011
Ollt
ÉTAIENT ENV IR ONNEES 0 ' UN TER RA. N FASGRUX QUI s ' ÉTE~DAIT
L'ESP.\ ~E QU'OCCU PENT LES DOU RDIGUES.
Le~
U/, autre marais eœistail
atl$
eaux surabondantes de l' étang de Berre s'écoulaient
ct géog ra ph es, soit grecs, soillatins, ont consid éré ces embouchures comme
con)ritllidans l'espèce actuell e, lui consen 'er sa nature et lous ses effels , la pro-
«
priété cIl sera pleine et ent ièl'e sur sa têle. Tel est le sens é"ident de r a rr ~l é du
" celles d'u n fleuve qu' ils ont a ppelé Glmus, par abréviation de cœnodus, bour-
9 'nlars t 808 . .
.. beux, plei n de fange, à ca use des ma l'a is boueux quï ll raversa it. Le nom <je
Sahs doure l! dans les mo tifs de l' arrêté ri y a des inexactitud es historlqu es
les aperçoit même très clairement el sa ns effort , quand oU'place
« Cll1IO- Vieille
ou Vieua:-Camus est resté à l'embouchure orienta le (L. Méryel
.« Guindon , t. l, p. 312, Histoire des actes dit corps municipal de Marseille) .• '
nagran tes;
Oll
~hi~tbr ique
des bord igues de Marligùes tel qu' il résl1 lte des titres ex posés en ce
La donnée historique de l'arrêté est donc inexacte. Avant l' établissemen t
mémoire ',' eo rega rd des ,données incertain es lit. rausses qui so nt contenues
des bordigues, les terrainS {angeuw étaient un obstacle à la nav igation el à la
dans l'a rrêtë. 'Nbùs allons lessigmller pour qu' oll ne puisse pa s s'y t.romper,J
pèche. C' est aux main s seules qui les construisirent , qu'o n doit l'é tat des lieux
Ainsi parmi les considéranl s de cell e décision on lit :
.,
" Qu'a·vant l'établissement des bordigues , ce brtU dé me'r ( celu i qui corn mu« niqoede
l'étang de Berre au pOl·! de Bouc ) servait, colnme il'sert ehcore;' à hL
" ,ia /Jlg alion des communes n'l'erct1!1e~ 'de rétahrJ'de Bl:tre,' à celle de Mar tigues ,
'alltuels.
f.
La secoode assertion, qui attribue aua> cOtlcessiOlIS raites par les allci6!1s sei-
glleurs l' existence de ces pêcheries, n'est pas moins ,inexacte. Ce ne sont pas
les seigneufs qui ont fa it cei concessions. Ce sool, comme
Oll
l'a vu plus ~aut ,
�108
t09
le soul'erains du l'Qyaumc d' Al'les, de Prol'ence et lI' Allcm<1gne, Et il y n toul un,
" de /te pOllt'oi,' fJêner lit pêche , ni let llll-vifJdtion AU-DELA DES LI/diTES Plli~F.S
monde et uue infinie différence entre ces denx faits, Et c'est pour l'al'oir méconflue ou ignorée, quc nOLIs \'erruns biC'nt6tl'aIT~té du 19 mars 1839 tombcr
-à cet égard dans de si gr3 ves erreurs,
Si dOIlC , oomme l'histoire nous l'apprend et commo l'arr~ t é de 1808 10 redi t
. • l'OU"
LI
LOl"GUEU"
DES
OBDES, d'cntretenil'Ies ca naux à la pl'orond clII' prescrite
n
pal' les règlements, de laisser le libre p'usSage pOUl' les ba'teaux 1 les bfltiOlents
«
el le poisson; de ne point faire de barrages qui puissent nùillOft la l'iIJrc cirau,laiion dcs eaux ct ùu poisson , etc, , etc. ,.
«
après elle, le pOlll'oir puhli c, c' est-à-dirc le parlemenl, les com tes de Provcnce
A part ccll e circo nstancc que , rurrêlé co nsidère comme insérée ùans le~
ct J'administration cnfin, ont jugé utile ,.dans l'int érêt public, d'obliger les pro-
concessiol\sprimili ves et an léricures à elles" ces diverses conditions, qui ne iont
-priétaires des bordiguos, à maintenir en bon état les canaux qL\' ils a "a~e nt pr'imi-
s.urvellu es qtl'après l'élnblisse ment des bordigue, pal' sim~ l emeslJrecLe poliGe,
Üvehlent creusés, ils en ont eu le dmit et co droi t li été fond é-slir l'avantage (lu i
cL pal' suite du pou voi t· qu'a l'autorilé dc régir tout ce qui intére se le public,
devait en rel'enirsoilaux bordigues elles-mêmes, soit à la pêche d<1l1S l'étang oe
l'arrêt é proclame bi en haut. qll c ce n'est QU'.w
Berm, soit aux nécessités de la na,-igation, Car uno fois qne lc creusemen t dei
'lue les propriélaires qui les possèdent ne pem-enl gêueu ni la navigation , ni la
canaux de bordigutlS eul produit tous oes heureux effets , pm' mesure de hallt e
ptiche. Pal' là il reconnaît donc clairement qlle,
adlllinistration et de haute police , 10 pouvoir a dù agi r ainsi el on l'oi t qu'il r a
licùe, qu'elle est mainleouc ct reco nnue par l'autorité, 01' n'est-ce ,pas là recon-
comprend bien qu'on 10 faisant , il
llaUre un vrai dnoit de pl'opriété? EL M, de GaHiffet, comme les 'Iu tres proprié.
fuiL ainsi en...! 506 , Hi08 et l628, Mais
OB
n'a ni diminué le droit des. propriétaires de bordignes, ni Illéconnu leur litre,
taires ci e bord igues,
Ll' cn
DELA DES LumES
MN! CBS
DES BOUnmGUES,
UIII1'ES, cetle gêne esl
demande pas davantage.
Aussi il est fOl't essentiel de remarquer cc que dit l' arrêté do 1808 touchant.
TOlIl est donc clana,oe mot; là est le secret de la puissanoe des titre de conces-
, les diyers règlements de police interVenus SUl' cellc matiçtie, Ils oot bien dérendu
.siou; quapd , comnle l'a rt·t!té de '1808, 0'll'adniet" il il'ilsl plus possible, souS
allx propriétaires de bordigues de prolonger leurs 'canaux
au~de l à
des limites
posées ponr, en déterminer J' élenduo, Il leur csL aussi enjoilll d' entretenir ces
aucun 'prétexte., de les contrarier,
En uu mot" on peul réduirc l'arl'êté et toutb sa pMs6e il cell e distinction :
LIMITES des bordigu es, le titre est efficace; en dehors de ces limites, il
cana ux dans ub état (le profondeur déterminé, Mais' ulle fôis oetle limite, main-
"ANS tES
tenue él ces conditions remplies, la propriété des bordigues est recomlee devoir
ne l' esl plus. Mais qu' y a .. t-i l eu cela cI 'éfon nant ? De ce que ma propriét a une
êlreTespecfée par tous , l'emporter sur toute. autl'es prétendues nécessités pu-
limite, s' ensuil-il qu'elle soit moins à moi
bliques, p~ises soit ' de l' inléJlêt de la nal'igatio\l, spit de la pêohe, etéoDsl ituel'
gaire el de tout tcmps admise qu 'a boutit l'arrêt é de 1808 , il con firm e, au lieu
\ln litre iÔlltiaquable,
ç1e la conLraricr , la th èse
«
1 )
"
Il j'ésulte de tous ces règlements, dit l'arrêté ( en parlant de celui de jlllHlet
- ~ t ;;0.6, de Il a'f11ê,t dè la COOl' des oomptes du 9 -avril, 1S68, du rapp~l't dà M,
«
le . oonseillêr'<lo Paule dn 28 janvlel' 1628 ) qqe.les pêcheries, appelé~s
« btmrilijJlIllS , h' olltété.COllCédées et autorisées 'Id à, la.chaiige,pw' {es_pl'Opr:iét(l.~rr.~
sou t en~e
~
Et, pUisque d est à celle \'édté ul-
,pal' M. ,de Ga lli!l'et.
1
- , Ve.yÙ,DS l'llaintenQJlt ee qll' il (ln est du sétiollcl Ql'rê'léll celui Il-ü 19
.J
11a!(
c
rI\l"
JL.'
La circonstance qui lu i a donné ntH ahce fist à léôn ria'lU'è.
n1~ r s
183
1
1
p J " ln us 1
�IrO
111
La canstruction du môle Ju pori de BOllc el l'élablisseme nt du canal ù' _ \l'Ie~,
D'abol'd il esllJlilc de sa ,-oir qu e M_ de Galli/Tel s'élanl pourvu , ùcva nlle
'réa lisés par J'État JurJnt les années IS3t et années suivanl es, dans le dpparle-
cO II<eil d'élal , conlre ccl arrêté du co nseil de pl'éfcolure, il Y inler'l'int le '20
mellt des Bouches-d u-Rhôue, apnl diminué le produit ues bordigues possédées
par M, de Ga liilTel SUI' l' élallg de CaTollle el aux MI/I'ligucs , celui-ci sc POUI" 'It!
,Iéct'mure ,18 Vi! une ord onnance royale qui refosa d'enl él'iner el de consacrer la
. in guli ère proposilion qui y élail co nl enue_
del'ant le conseil de p r~ fecltll'e, le 22 noyclllbre 18 38, pOUl' obtenir de l' f:tat
- Dcs dc~x motifs donnés pal' l'al'l'êlé, le conseil d'éla l n-acce ple pas 10 premier_
une indemnilé, en réparalion du préjudice, pal' lui soulTerl ,
Ill e n'jèlo même, pour n'acceplel' {lue le second ,
Devant le co nseil de préfecture, il fonJ ait sa uemand e SUI' une Jauble propo!iliou, Il sou lenait 10 qu' il élait propriétaire de ces dil'erst's bordigues, et 2'
qu'en fait , les ouvrages entrepris et réa lisés avaiel\t diminué
11'$
avanlages
Le rcc ueil des arrêls du co nsoil d' l'lai ( Ledl'll-Rollio , 1.
-l'~pporl c
0'1
soil les produits de sa pl'Opriété,
l'lU ,
f- UG ) le
cn ces lermes :
/l,
" Consid érant que , alors Il,éme qu' il st'rail proUl'é qu e 1(\5 lra,-aux exécul és
" pour la co nstru clion du môle du pori de Bouc
SUI· ce , le conseil de préfecture, dans sou arrêlé pr<:'c ité, considère que la
Il
" ca nal d'Arles, ont
Cil
e~
pOlir l' élab1issement du
pou r eITel de diminuer les produits ues
p~cherics
'I)
_propriété des bordigues ne constitue pas une pl'Opriéle vérilable, mais une
« des élangs de Caronte et de Ben'e, cell e juslification n'élablirait poinl
concession gratuite, révocable, soumise à tailles les chances de ,'es titlltion ou de
t'ét'Ocabilité, qui pourraielll naUre des besoins du sen.;ice public, ou des morlificaiionx,
" droil du requ érant il nne ind emnilé, allCII1Ie loi n' imflosa nt à,
'" li.on de 1'I''parel' le domma ge indiret'e n\ eo~ eau sé pal' 'Ies Ira" '~n-x qu' il (jxée(tla
eœigées par l'inaliénabilité dll domaine national.
" potlr le service palilic; qll' ~in si c'051a"ec naisen qu e IŒGO lheil dopréfectuto
Il considère en outre qu'en fait, ce n'est pas la construclion du môle, ni l' tita-
blissemenl du canal d'Arles à Bouc qui ont diminu é les prod'Jits des pêcheries;
que ce sont des causes étra ngèl'cs qu' il indique, el, en droit, qlle l' état ne uoit
réparation ou iodemnité que lorsquïl s'empare malériellement des
proprié l é~
particulières,
El, pal' ces motifs, il refuse tOlJte indemnité_
Voilà l'arrêlé, ses motifs et son dispositif.
«
l' é talll obliga~
a rejeté la uemand e on ind COlllilé'clf> nlll s-agit. ,.
M, do Ga llilTetavait l'chlin] le con3eil d'Mat sur la
1/.
I ~~ i fimité
de son li I.e , ;;ur
sa 'nallll'o, sup son il'ré oca uil M, 'et cc fui Sllr ct'Ile demonslrn'Iion que le c.onsçil
d' élat pr-ononÇà sa décision, qui ne l'eprodu it ien tle la premi~l'e IIFopol!ilion
long u e m e n~
et si péniblement élab lie dans l' arr6lé,
si
.1
On peul douc dire que CCl arrêlé a -perdll , sur Cè'poihl , ,Ioul e
,'al~w
lèfI.ole,
'pu is.g'J ' il a élé réformé d ~ n s ses mol ifs', pal'Iti subslilution de molifs dTtTéron ~aîl
premi er qui avait délermin é le conséil de préfectUl'e,
Si c'était de la première des prcrpositi.ons qu'il a consacrées, que l'on voulût
, Mili s , ~e l1 oul're, il s,iJ ffit de parcourir 1'3 pidement la. série eTes'raisons dGnnécs
1" 1Iss0rlioo que nou s-a':o6s i 19nal\)e plus haut tou ohMt la nat lÎrg
s'autoriser, ,dans la contestation actuelle, pour l' ériger en précédent capable
par 1'\1 1'1'616,
d'être opposé à M, de Galliffet, voici la série des réponses que ce dernier pré-
de la propriélé des bordigues de M, de' Gaillffel, pour 'eh comprcndre tOlll'1
- cf e,
.1.
'. l ,
l
)ïnexacllllJ
' -.
Le premi er motif donné par l',m èlé, \l'csl que M. de G'alli lTet ne prolluisil 'pa;
senterait, pour l'écarter à tout jamais comme document propre à écla irer
l'auto rité, et qui lui enlèverait toute valeur, -
SUI'
:
1
.
,
.
�11'2
le tilre lie concession Je ses bOI'digncs, cL
'1U C
fOIl\i('I ' ? Il e ogure-t-elle pas au cat/astre? n' y a-t-elle pas toujours été portéè
étaient insuffisants pour le remplacer.'
Rien de pareil
Ile
~ l'li
peut êll'c dit auj{)urd ' hni, .dôns la cau se, On
les titres
dc 920, de I1U , de 1162, de 12 12, 10 testamont d'li , IQ déc. 1,\.61,
. prodllit ~
aujourd',lllli Pllr M. J e Gnlliffel. Cel te démoUfo trJtiQn , esLS\lf ce point complète.
.
Qu' importerait donc qu' cn 183 \J, M. de Galliffet ne
féndlA dev8 0t le cO llseil de
préfl'~ture
,e fût pas, va lablemont dé
? Il répara colle omission detnM le. cOl\sei l
d'état; et illa réparerait encore aujonrd' hui .
Le
sccQnd .. c· est,' disait l'arrêté, 'que
•
1
113
cenx dû 12 16 , 1217 cl 122 3
le droit (éqdal Cl la
1
,.
viol~llae '
•
avaient. été
l'origine de la constituJi?n d~ bordigues. , Le droit (bldql ! Mais <l'est de l'al1toTiré des souvelôioS qu! gouvernaien t le ro~(aume d:Arles qu'elles énialient , el
ilulrer"i, co mm e anjourd ' hui ? Ile consislc-l-elle pas tn des fran cs bords, appelés
,èd~s,
Cil
terre ferme, da lls une IO'lgue élendne ? en des fran cs bords ~o usma
ri il S appelés lambres? en 11 11 fond s de terre co uv erl d"ea u , constitutif du canal
dc la bordigue? Tout cela n esl-il pas immobil ier ? De ce qu'" ca use rie l'int él'èt
pub lic, la bord igne a été so umise à cert ains règlemcn ts , cesse-t- elle d'être propriété immobi lièl'e? Les immeubles qui doiv ent des servitudes soi t à l'État ,
soil -à la comm unc, soi t à des particuliers , perdent-ils pour cela leur nature?
\"a-l-on pas vn, dans l'h is toriqu e des faits. les décisions du domaine qui les
assimi lent au co nlraire! à la propl iété imlllobilière?
41 n' ':i a Eieu. de' pl!ls oppos~ à l'idée de (éodàl-ilé q'JC celle du pou voir j·oyal. Il
L'arrêté ne pellt pas dire, il en co nvien t, jusqu'à qu el point cet usage a été-
faudrlli Unier l"I~toire ell ti è r~, pour !le' pas reCO)lna1Lre que d n ~ lé p.ouVoir
,alleiut pal' les lois qui ont aboli ln féodalit é el proclamé l'inviolab ilit é du domaine
Fo,yal, il'j' ay)njou\'s eu 'u.n e sourceipure d'autori té. I,'usurpation du djoit peut
,llUb lie. Nous le cro)'ons rermemen t, ct cela par une raison décisive: c'est lllle
êtreda,\& ,\a féodalité; elle ne fut jamais darls la rOYltlllâ , iQ~I,i\ut,i()Jl a us$i · viei ll e
.Ies lois aboli tives de la féoda lité n'ava ien t rien à voir dans un e concession royale,
que le mond e, qui a comba ltu et v\lilYcu enrrn la premi ère. '
cL que les antres sur l'ioviolabi lit é dn domain e pnblic n'avaienl rien à enlever à
4
"
'toUlletlCe ! 'Mais on a vu daos le long historique' des titres, ta propriëtè tIes
des concessions faites dans des pays qui n'a ppartenaient pas à la France, quanct
hordisuj!s cofDmencer, se continuer et se produire avec le droil, jilmais , a'~ec III
elles ont eu lieu, qui ava ient leur droit public différent, qui admE:tlaient l'alié-
violeilCe, A toules les époques, les' pQuvoirs constitués les reçolllli\iss nt .. ej)
nation du.d.omajn e public, alors su rtout qu e les luis de 1790 el du 14- v!lnl6s~
1223, en 1292, en 14;)7, en
·1 ~8 1,
an
et sous la monarchie.
LeltrQisièQ:lc wolif de l' arrêté,
c' estfqu '1à défaut de titrel
de aQIl~~sioll
le droil
•
'
"1
de M. de Ga lliffet n'était qu'un ' ~sage, souwis à,toutes les lois <:le po,hc~ .. Mqi
en présence du titre pourr~it-on a\lj~ur~ ' \rui te9 iq cc, '1\\ngageJ?
,
'1
pour qUiltrième mo~if, il aj04te "<I,ue s'i l ne p,~u~ p~s dir\!iius,qu'à. quel pqinl
<le~ u~ge a él~ att.ejDI, Pllr"~s loi~ <LlJi
001
\I.bqlj ,Ia.ré?dali~é el pro.clilmé l'.invi~la
bilit~ du '(I!)m~ ine ,p,ul;lliq., la joyi~sal\cC qe.l)Qrqigues ne rE)ssemble en rien ~ 'un~
propriété immobilière. Mais pourquoi noo ?
.
l
'
l
"
'1
'
1
CeUe p'ropri~té 1p: es.t-eJie :pas .c<)Ulllle J'~utre ill'/posée 9Ljfr~J?P~Il. de ll'il}1pôt
\'11,
dans leurs ait. 37 et 2, déja rapportés plus baut, toucbanlces a li é nation~.
les out form ellement consacrées et maintenues, et ont voulu qu'on jugrât de
leur valid ité par le droit public des lieux où elles avaienl été faites .?
POIJr cioquième motif, l'arrêté rap elle les divers règlements \lui, de 1506 à
1781 : ont fi xé la po lice des lieux où reposent ces bordigues, puis il en conclulqu c
ces bordfgues ne doivenl pas gêner la pêcbe. -
C'est une fausse conclusion.
C'P.st une mauvaise conclusion qu e l'arrété du 9 mars ·1808 n'avait pas lirée el
•
qu'il avait au contlôire tout autrement formulée. Car, eo raiso nnant sur ces
mêmes règlem ents, il avait dit seulement qU'AU DELA
DE S
LIIIIITES des bordigues,
�lI\
celles-ci ne po urraient "toner IIi la p~che, ni hl na l ig"tioll. Et 1''''T~ti; de 1R3Ç)
s'esl écarté l'isiblement de ce ll e so lutiOii.
11 5
plus qui assimile cc genrc de propriété à la prnl'riétp ordi n~iro : mais ri eu de
difTpre nt n'CII pr ut sortir.
C'est par la distinc tio ll fai te par l' arrêt é de ,1808 qu'il fau t c1 0nc co rriger
celui dè 1839.
Quan t ~ dir e que lesob ligH tiolls iml!oséps par ccs ui vers rè;:)lements pourraient
a ll er .iusqu 'à la réroca tion de la pr'op ri été des bordi 3"es, c'est ulle dernière el
l'ious dirons enfin, en terminant, qu e les deux dei ni ers motifs de cet arrêté
for t gral'e co nfusion des notions les plus si mples. Ces règlemenl s obligent so us
ne sont pas plus sérieux; qu'e n raisonnant (j'ahord sur l'acte de '14·08 qu' il cit t',
ries peines CI ui so nt f1x~es pal' les lois. Ce son ld es pénalités pécnniaires. C'est
et sllr les arrêtés de 1808, 182l et '1832 qu' il rappelle, il ne dit rien qui afTa i-
l' ordonnance de la nlll rinc dc 1G8 1 qui les a prononcées. Mais on n'y Irolll'c
blisse le lh'oi t de propriété Sll l' les bordigues. Pour ceux-ci, nous ,n'ons dit
pas ce lle de la l'évoca ti on de la propriété. L'arrêté est dOllc sorli du \'l'ai sou'
mille fois que les règles J e po lice, prescrites à l'occasion des bordi gues, ne
IIn e foule de poi nt s de vue dirers. Et on ne demeure plus surpris après l'examen
prouven t rien con tre le droit Je propriété Iju'elles co nstitll ent. Des II sin es, des
qui l'ient d' en être fait , qu e le consei l d'é tat n'ait pas l'oulu le confirmer.
fabriques , des é t~b li sseme nt s industri els ne so nt-ils pas tous les jours so umi s fi
Au surplus diso ns , pour exp liqu er les erreurs historiqu es des arrêts de 1SOI!
des règles spécia les, à des précau ti ons, à des formalit és à remp lir ? en so nt-ils
qui les possèJ ent ? La loi n' a-t-ell e pas défini
ct 1839 , que la matière étail alol's neuve, peu ex plorée, peu élu cidée pal' la
la propriété dans l'art. 54-4 du code civil: « le droit de jOltir et disposcr ries chosc,'
produclion des titres ; qu e l'histoire ava it été peu mise à co nlribution pOUl' les
moins la chose irrévocab le de
CC LI X
" de la manière la plus absolue,
«
PAR
PuURVU
QU'o~
N\N
FA SSE PA S
U~ USAGE PR o mo;:
LES LOIS ET LES ni:GLEMEHS? .. 'l'oule propriété es t donc limi tée par l es loi~ ,
par les j·èglemellis. Maiss' il n'yen a donc point qui soit exe mpte de cet te règle,
pourquoI en argumenler con tre les bordigues , pour leur enl cYeI' leul' carac-
édairer, pour montrer leur véritabl e origine, pour di scerner ce qu 'a uj ourd ' hu i
nous voyons très cla irement , le droil public ancien et le pouvoil' so uvera in des
empere urs d' Allemagne. Auj ourd ' hui que lou t est con nu , ces erreurs ne son~
plus possib les, et le trionlph e des doctrin es contraires parait assuré.
tère ?
Pour l'acle J e 14,08 , qu'importe que l'archel"êque d' Ades ait rep ri s, selon
la loi qui régissait le bail emphytéotiqu e, les bO I'd igues qu e les preneurs ava ient
CONC LUD à ce qu ' il plaisea u co nsei l cie préfecture, vidant la question préju-
aballdonu ées par dégnerpissement. Ce la oe prouv e qu' une seule chose, c'es t
diciell e so ulevée pal' J' arrêt du co nse il d'État du 3 déc. 180, ,reialive au poillt,
que les bordigues étaient dans le plein domain e des 31'chev()lju es d'A rl es, en
de sa l'oir qu e! es t le ca rac tére des titres invoqués par M. de Ga lliffet, touchant
.fol'(·e Ms concessions que nou s avons l'apportées; qu'ell es y l'eutrèrent, en force
1,1 bordi gue dit e du roi , dire ct décla rer que les actes de 920, 11 H , 1'162,
du droit commu n qui permettait au preneur emphy téo ti que de se dégager des
i 2 12, 1223, 1 t.(:i7 et 1 .. 8 1, el les au tres qui en onl été la suit e, invoqués pm'
~ffe ts de son contrat pal' le déguel'pissemen t. ; et Iju' eo ce la les uns et les autres
\1.
l'éali;aienlun colrtrat ordinaire, de .droi t ci , il et commun. Ce_st un argument de
)lO/'digue dit e du roi , so ut eO'eCli"ement des titres de propl iété confér~s par les
de Ga lliffet, comme des tit res consti tutirs de soo droit cie propriété su r la
�11 6
anciens sou\'eruÎns de
I~
Provence, ct. Ll OIl des actes émanés du pouvoir souv e-
MÉMOIR E
rain, agissant. seuleme nt da ns r exercice de son pou voir administratif ; ordonner
que M. de Ga lliffet. sera aut.orisé il en ti rer toutes les inductions léga les pour la
just.ification de ses droits sur la bordigue dite du Roi ; el de même suite décla rer
A CONSULTER
que les parli es seronl rell voyées parde\'a nl qui de droil , pour êlre staliJ é sur le
fond .
POUR
.t
Tn E R~I E R , ho cal il
M. DE GALLIFFET,
la Cour d'Appel d'Ai\ ,
POUR SERVIR DE
wieD"ill ollllier,
•
il.
RÉPO~SE
UNE EXCE PTION D' I NCOMPÉTENCE ET AU MÉMO IRE
DES pt CHEURS DE MARTIGUES .
. .........
. ,
JO
•
,
AIX,
IMP RI MERIE VEUVE TAYERNlE'R, GÉRÉE PAR "A. RIUS IL LY,
Ru e du Collége, 20.
1850.
�LE Mémoire que M. de Galliffet publie aujourd'hui devait être
produit devant le Conseil de Préfecture des Bouches-du-Rhône.
Il était destiné à établir la compétence de ce conseil , sur les
questions qu'il lui avait soumises en exécution d'un arrêt précédent
du Conseil d'État du 17 décembre 1847.
•
Il avait encore pour objet de réfuter de très graves et très nombreuses erreurs touchant la Bourdigue du Roi, . contenues dans
�4
MÉMOIRE
un mémoire publié au nom des Pêcheurs de Martigues, et de compléter ainsi la défense de M. de Galliffet sur cette propriété importante.
A CONSULTER
!\lais le Conseil de Préfecture, par le résultat de circonstances
inutiles :à rappeler, a prononcé sur sa compétence le 15 octobre
dernier, et s'est déclaré incompétent , avant que le trava il , destiné
POUR
M.
DE
GALLIFFET,
à l'éclairer, ait pu lui être communiqué.
POUR SE RVIR DE nÉPONSB
On a pensé q ue ce travail n'en devait pas molUS être publié!
JI servira: à deux fins: Il démontrera la nécessité de la réformati on
de l'arrêt du 15 octobre. Il mettra toujours plus au grand jour les
droits de M. de Galliffe t sur la propriété de sa bourdigue.
A UNE EX CEPTIO N D' INCOMP ÉTENCE ET AU
DES Pf;CHEURS DE MARTIGUES.
MÉMO IR E
"' IS!
DEPUIS la
publication dn mémoi re produi t pal' M. de Galliffet deva nt le Conseil
de Préfecture du dépa rtement des Bo uches-du-Rhône, en exécution de l" arrêt
du co nseil d'Étal du 17 déce mbre 1847, un fa il nouveau s'est produ it. Un mémo ire annonçant le dessein de réfuter chacune des propositions développées par
M. de Galliffe t deva nt l'autorité administra ti ve, a été publié au nom des sieurs
Richand, Bory, Degaye et Féli x, patrons pêcheurs du lieu de Martigues. On
a ajouté, pour donner plus de poids à cette œuvre, qu'elle a été faite sur la
•
�6·
dema nde du corps des pêcheurs de celle même ville; ainsi un nouvel adversai re
en triom[5hant toujours, même en 1790, des poursuites qu'on lui a suscitées,
a surgi et s'est fait entendre dans la luU e.
d'entendre encore proférer contre elle ces cris impuissa nts, ces mots cre ux c
A un certain point de vue, M. de Ga lliffet serait peu touché de ce tte inler-
vides de sens, d'usurpation, d'audace, de vexation, de féodalité ; enun il est si t
veut ion ; elle est illégale. Ce mémoire doit rester en dehors du procès. M. de
urg~nt dans les temps où nous vivons, de redresser r opinion publique que r on
Galliffet n'a qu e l'Étal pour adversaire, et il n'en reconnalt pas d'autres.
fausse, de défendre la propriété qu'on veut anéantir, d'arr êter les masses que
Il es t donc autorisé à en demander le rejet.
l'on. égare, que se taire dan s une pareille conjoncture serait coupable; ne pas
Ce mémoire d'ailleurs ne lui a pas élé signifié; ces loyaux adversaires ont
montrer tout le faux et l'odieux de l'attaque, une lâcheté; laisser l'ignorance
agi slJ ivaut des règles à eux seu ls connues.
Ils ont publié leu r écrit, et cel ui à qu i il 6tait destiué comme réfutation, a élé
historique triompher, une com plicité condamnable; et ne pas éclairer les intel-
le seu l oublié clans la Jistribution que cette œuvre un peu ténébreuse a reçue.
ligences contre des pièges si S"ossiers, une connivence avec ceux qui poussent
la société aux abimes et qui battent des mains à sa destruction.
Si en fin elle est parvenu e eu ses mains, et si elle a élé conn ue de lui, c'est
Le débat élevé à cette bauteur, M. de Ga lliffet ne peut dune plus se taire. II
encore ma lgré eux et à leur insu.
va parler de nou vea u, démasquer ses adversaires, redire plus clairement, avec
Tous ces motifs di spensera ient donc M. de Ga lliffet de répondre.
plus d'autorit és à l'appui, ce qu' il a déjà fai t connal tre, et mettre un terme à ces
~Iais
sa ns les accepter pour des adversaires légaux, et en les repoussa nt du
divaga tions, à ces erreurs historiqu es, à ces co nfusions volontaires, qui fontlout
admi ni stl'M if, où il s ne sont pas parties, M. rie Ga ll iffe t a ce p ~ ndant,
le fond du mémoire des Pêcheurs du Martigues.
tribun ~ 1
à celte occasion, nn uevoi r nou\"cau à remplir.
Celle œuvre, pour lu i donner so n vrai nom , est un e œ uvre de passion. Les
allteurs de lI. de Galliffet et lui-m ême y sont si ridicu lement incrimin és; l'Hi s-
Si la vérité a ici une nouv elle occasion de se faire voir, ell e sera due au zèle
aveugle et inintelligent de l' allaque, au ca ractère de passion qui s'y niocoutre,
et aux hardiesses dont, à défaut de raison , on a compos6 et mêlé
SO li
langage.
toire de Provence y est si gravem ent méconnue; les prin cipes du droit publi c
Par la même occasion , M. de Galliffet comblera une lacune que l'on a pu
ancien y sonl si fort ignol'és; on y fait des principes nouveaux et des principes
peut-être regretter dans so n premier mémoire. Pour prévenil' les doutes sur
anciens un s: singulier ama lga me; on y tran che à chaque pas d' un ton si suffi-
la compétence du Consei l de Préfecture devant lequel l' exécuti on de l'arrêt du
sa nt les plus sérieuses questions; on s'y vante avec lant d'assurance, de les avoir
Conseil est poursuivie, il dira un mot sur ce ll e compétence.
vingt foi s 1 ésolu es, quand on ne les a pas même effl eurées; on dén ature si étran-
Ce point, omis dans le premi er mémo ire, trouvera ici sa place naturell e.
gement le droit de propri été qui protège les bourdigues; on avance sur les
En le fixaut en première ligne et avant toute réfutation , M. de Galliffet ajou-
co ncessions, bénéfi ces et fi efs , transportés par les empe reurs d' A ll em~g n e aux
tera encore à ses premières démoustrations une base essentiell e: prius de judice
archevêqnes d' Arles, ùe si étonnantes propositions; il est si dou teux que leurs au-
quam de lite; c'est un axiÔme rationnel autant qUi! juridique; il est vrai en droit
teurs en les faisa nt, se soient compris eux-mêmes; il est si étrange, à l'occasi on
administratif, comme devant les tribu naux civils.
d' un e propriété qui remonte à une si antique origine etqui a tra versé neufsiècles,
�8
9
" Considérant que l'autoritli administratit'e est seule compétente pour dé-
,
PRElUIERE
" terminer les lîmites de la mer, sauf le jugement par qui de droit des questions
« de propriété :
PÂRTIE.
" Considérant que dans l'espèce les t.itres sur lesquels s'appuye le marquis de
" Galliffet pour établir les droits de propriété qu'il prétend exercer sur le cariai
«
du /loi sont des chartes des comtes de Provence des dixième, treizième et
«
et quatorzième siècles, des trnnsactions entre lesdits comtes et les archevêques
« d'Arles , et le testament de Charles
Compétence du Couseil de Préfecture.
III,
comte du Maine;
" Que ces actes n'ont pas été produits devant nous;
« Que le préfet des Bouches-du-Rhô n~ , tant dans son déclinatoire que dans
«
l'arrêté de conOit ci-dessus visé. soutient que les ~ctes invoqués par le marquis
«
de Gall iffet sont émanés de \' autorité souveraine, agissant dans r exercice de
La première qu estion qui se présente, en examinanL cell e qui est soumise
par M. de Galliffet au Conseil de Préfecture, en exécution de l'arrêt du Conseil
«
son pouvoir administrat.if; que clans ces circonstaoces il y a lieu , au préa-
d' Éta t du 17 décembre 1847, est de savoir si elle a été portée devant le juge
compétent.
« Im tit·c seule il appartient de statuer à cet égard;
La réponse affirmative ne saurait être un instant douteuse, il suffit pour s' en
« l ~ bl e,
" Article l e, : l'arrêté de conOit, pris le 14 juillet 1847 par le préfet des
«
convaincre, d'examiner les termes dans lesquels est conçu l'arrêt du 17 décembre 184,7 et d'en rapprocher les principes qui gouvernent la matière.
Il porte :
de déterminer le caractère desdits actes, et qu'à l'autor·ité adminis-
Bouches-d'J-RhÔne est confirmé ;
«
Article '.l : sont considérés comme non avenu s: ,1° l'acte introductif d'ios-
«
tance du '.l8 aoÎlt ,18 .. 5, l'acte du 6 juin 184·6, et l'assignation du 17 no-
«
vembre 1846; '.l0 le jugement du tribunal de première instance d'Aix , du
«
'.l9 juin ,181,7. »
" Vu l'article 2 du décretdu 22 novembre, 1 cr décembre 1790. - Vu l'article
• 4, titre 1 er , section 1 re du 28 septembre. « 538 du code civil ;«
(1
6 octobre 179'1. -
Vn l'article
Vu l'article2, section 3la loi du 2'.l décembre 1789. -
Janv ier ·t 790 ; - Vu le décret du 10 avril 1812; - Vu les lois des 16-2 4
aoOt 1790 et 16 fru ctidor an lU . . .. .
Il ressort des termes de cet arrêt très sensiblement deux choses :
La première, que l'arrêté de conflit a été maintenu. d'abord parce qu' il s' agit
e'ntre les parties rie délimiter ou de déterminer les lùniles de la mer, c'est-à-dire,
de savoir, en fait, si le canal du ,Roi rentre ou non daus ces limites ; et ensuit e
�10
11
parce qu ' il s'agit de déterminer le caracLère desactes invoqués par M. de Galliffet;
par ces motifs: «que la demande n'a pas été prése ntée par lui ( le réclamant )
La seconde, qu e, pour rune et pour l'autre d e ces opérations, c'est pure-
a u co nseil de préfecture, et qu e dès-lors elle ne saurait nous être soumise di-
ment et simplement à l'autorité administrative que l'arrêt du consei l d'État a
renvoyé les parti es.
"ectement (même recueil , p . 333) . •
26 Ao()t 1846 ( affaire Pommereau) le conseil d'État dit :
Que peuvent donc signifier ces mots: l'autorité administrati~'e? Indiqu e nt -
Une demande en expertise pour la première foi s formulée devant lui : «Con-
ils que le conseil d'État reti ent pour lui-méme la con naissance de ces deux point s '!
• sidérant que le sieur Pommereau ne justifie pa s avoir soum is ce chef de de-
Nullement. Ils ex prim en t l'autorit é administrative selon sa hiérarchi e, selon
« mande ail conseil de préfecture et qu' il ne peut nous être déféré directement
l'ordre établi par la loi , selon sa manière d'être ordinaire.
" ( même recueil , p. H4). "
Ils ne créent don c rien d' exceptionnel, et ils laissent subsister le droit commu·n .
Ainsi jugé en matière de travaux public, le 18 juin 1816 (affaire Rang el
Maintenant qu ell e est la première règle de cette maâè re? Quel est le droit
consorts), il est dit dans l'arrêt: «Considérant que ces conclusions (celle de
comm un? Peut-il être permis de fran chir le premier degré dejuridiction? D' omet-
Rulamonet ), constituent une demande
tre le prem ier tribunal adm ini stratif pour inves tir le tribunal supér ieur, le conseil
sentées
DIRECTEM ENT
NOUVELLE
et ne peut'Cllt nous eLre pré-
(même recueil, p. 3H).
d' État qui ne connalt que par appel des décisions du premi er ? Non, sans don te ;
Ainsi jugé en mat ière électorale, le 29 juillet 18 46 (affaire Cochi-Mancon) ,
et la règle qni veut que même en matière administrative, on s'a dresse d'a hord
pal' ces motifs: • cons idérant que ces griefs n'on t pas été articulés devant le
au premier degré de juridiction, est certaine et chaqu e jour appliquée par le
" co nseil de Préfecture, et qu'ils ne peuvent nous être soumis directement en
conseil d'É tat, comme elle l'est en matière civile pour les tribunaux judiciaires.
« notre consei l d'État ( même r~cueil, p. 424). »
En voici des exemples nombreux; nous les empruntùn s aux décisions du
conseil d 'État rendues dans les dernières années, lesq ue ll es, comm e plus récentes, nous di spenserons de remonter aux années an téri eures.
Ainsi il a été jugé, le 20 février ·1846 (a /Tail'e Labeu ni e et O~penh eim). cn
matière de contributions directes que: les concl usion s qui n'ont point é té présentées devant le consei l de Préfecture ne peu\'ent ê tre soumises direc tement au
conseil d'État (recueil de Lebon, p. 96).
Même décision le même jour (a ffaire Grandin , même recuei l. pag. 98 ).
Le 8 avr,11846 (a ffaires Thibaut, Cha bert, La vril et Larsonnière, même dé cision, mêmfl recuei l, p. 240).
18 Mai 18~6 (affaire Pagny, même décision. même recueil , p. 285).
9 JUillet 1846 (a/Taire Bressans frères), le co nsei l d'État n' pousse la dema nd e
Même décision, le 2', juillet 1 S47 (affaire Bargy, en ma tière de travaux
puùlics , même l'ecuei l1 84 7, p. 488) .
Même dé0ision, le 20 ao()t184 7 (a/Tail'e Clauzel, en même matière, même
recueil , p. 587 ).
Même décision, le 25 août 1848 (affair e Prad elle, en matière de contribution,
même recueil, p. 53 0).
Même décision , du 30 no vemùre 1 8~8 (a/Taire Godefroy, même l'ecuei l ,
p. 657 ).
Même décision , du 20 décemhre 1848 (a /Taire Clermont, même recueil,
p. 712).
�12
Celle règle des deux dcgrès cie juridiction est donc certaine en matière administrative, comme en matière civi le.
13
et de fixer les limites de la mer, C'est là que couduisent diverses lois essentielles à rappeler, et surtout la dernière d'entre elles, celle du 10 avril 1812,
M. de Ga lli ffet devait donc s'l' conformer; et i;'il n'eut pas porté devant le
La loi du 29 floréa l an x attriblle aux consei ls de Préfecture la connaissance
conseil de préfecture des Bouches-du-Rhône la double question, résenée à
des contraventions en matière de grande voirie,
l'autorité administrative par l'arrêt du conseil d'État clu 17 décembre 1847,
il aurait violé celle première règle, encouru un reproche fondé, et exposé sa
Le décret du 16 décembre 1811, titre 9, leur a maintenu ct même étendu
cell e juridiction,
demande, s'i ll' ayai t soumise directement au conseil cI'État, à être repoussée
Enfin, le déc ret du 10 avril1812 y a ajouté le pouvoir de connaltre et de
comme l'ont été toutes celles dont les exemples viennent d'être rappelés.
Il faut donc conclure, sous ce premier point de vue que le conseil de pré-
juger de ce qui concerne les canaux, rivières navigables, ports maritimes de
commerce et travaux à la mer, il porte:
«
fecture a été compétemment investi.
«
Vu la loi du 29 floréal an x, le titre 9 de notre décret du 16 décem bre
1811 , nous avons décrété: Article 1er
:
Le titre 9 du décret précité est ap-
" plicable aux canaux, rivièrts navigables,
«
Celle même vérité l'a ressortir maintenant d' un autre principe, tout. aussi
certain que le premier.
L'arrêt du conseil du 17 décembre 1847 a décidé qu'il yavait, entre l'État
et M, de Galliffet, avant de résoudre la question du fond qui les divise, à fixer
la délimitatiou de la mer; c'est-à-dire, à faire reconnaltre et dire, pour la localité où est situé le canal du Roi, où commence et où finit la mer; c'est le sens,
\' esprit et le texte même du prem ier de ses motifs que nous avons rappelés cidessus. II ajoute que cela doit être fait avant et sauf le jugement par qui de (b'oit
des questions de propriété, qui resteront à résoudre après celle opération préalable,
TRAVAUX A LA &ŒR,
PORTS MARITmES DE COMMERCE ET
sans préjudice de tous les autres moyens de surveillance
,; ordonnés par les lois et décrets .... ,"
II est impossible de douter que la portée de ce décret ne soit pas celle que
nous lui donnons ; car si le consei l de préfecture est charg6 de réprimer les
délits, les usurpations ou les contraventions, commis en matière de ca naux,
rivières na vigables, 1Jorts mal'ilimes de com merce et travaux à la mer, c'es t qu'i l
est investi du soin de régler aussi ce qui y touche, et par suite d'en déterminer
leô limites, quand il ya litige sur cc point.
Cela est tell ement vrai que l'arrêt du conseil d'État du 17 décembre 1847,
d3us le débat élevé sur ce point, en tre l'État et M, de Galliffet, en allribuant cc
clroit à l' autorité administrative, a cité et invoqué le décret du 10 avri1181 2,
comme la loi de la matière,
Or, il n'en faut pas davantage pour qu'il sorte de là une nouvelle raison
Comment donc maintenant le consei l de Préfecture du département cl es
pour investir le conseil de Préfecture cie la connaissance de celle question
préalable,
BOllches-du-Rhône n'aurait-il pas été léga lement in\'eslÎ par M, de Galliffet?
C'est lui qui est signa lé par la loi du 10 avri l 1812, comme le juge compétent :
En effet, il ne peut appartenir qu'aux conseils de Préfecture de rechercher
c' est donc à lui que le dema ndeur del'ait aller. En portant la question devant
�14
le conseil c1 'État, il ~UJ'ait violé la dispositio!l précise de cette loi; il se ~erait
écarté de son texte.
15
se prétendent lésés par les mesures de l'administration, et qui , ùès-Iors, ont
« un caractère content ieux.
«
« \1
Il est fa cile ùe donner encore à cette démonstration
certitude.
U11
plus haut degré de
D' aprè; les principes généralement admis, on tient que le conseil de préfec ture
est le garùien et le conservateur-né du domaine public.
On a déduit ce principe des diverses attributions qui lui ont été donnée. par
«
conse il de Préfec ture, en matière de grande voirie, a des attributions de deux
«
na tures différentes; les unes sont purement contentieuses administratives, et
«
sous ce rapport, le conseil fait l'orfice d'une juridiction civile, les autre~
• consis tent à réprimer le, contraven tions, et sous ce point de vue il remplit le
« rôle d' une espèce de tribunal correctionnel. »
Et à la page 2 ~ , le même auteur, après avoir rapporté le tex te du décret du
les lois précitées, sur tout ce qui en form~ une dépendance.
Le co nseil de préfecture est investi en effet d'une double attrib ution par rapport à lui. Il co nnal t comme juridiction civile, du contentieux q11Î peu t s'élever
10 a \'ri 118 12, et parlé de la compétence attribuée par cette loi aux conseils de
Préfecture, pour ce qui tou che les ports maritimes de commerce et travaux à la
mer, contin ue en disan t :
à son occasion dans l'intérêt des tiers; et il juge au ssi comme tribuna l de répression les emp iètement s et les contravent.Îons qu i le vio len t et qui y portent
atteinte.
M. de Serrigny, Traité de la compétence administrative, 1.
Il,
p. 6, di t fort
résu lt e, ajou te-t-i l, des tex tes qui vi ennent d'être rapportés, que le
« \1 fa udra it dire la même chose ùes contraven tions
à l'ordonnance ùe 1681 .
«
liv. 4, tit. 7, arl. 2, qui ùérend de bâtir sur les rivages de la mer, d'y planter
«
aucuns pi eux, ni faire aucuns ouvrages qui puissent porter préjudice à la
• navigation ; outre que cela rentre dans le texte du décret précité, cela est
bien à ce sujet, en parlant des motifs qui ont fait allribu er aux consei ls de pré-
«
conform e à la nature de la juridiction ùu co nsei l de Préfecture, qui est le
fect ure la répression en matière de gr~nde voirie, des ports mari tim es et des
Ira"aux à la mer ;
«
«
gardien des choses du domaine public. Or, les riva ges de la mer font partie
du ùomaine pub lic ; donc les contraventions de ce genre doivent rentrer dans
«
sa compétence ( '16 janvier '1822, Descamps; 6 avril '1836, Jullien ). "
• De là, la nécessité d' un tribunal de répression avec des formes simples, une
«
in stru ~tion rapide et sans f"ai s, et surtoul porté à protéger les choses du do-
• maine public, et animé d' un espri t favorable aux mesures de l'administra ti on
" qui tendraient à cet.te fin ... . .... C'est un tribunal prolecteur et conservateur du
«
domaine public ...... La compétence du consei l de Préfecture est aussi fondée
• sur ce que l'action administrative en celle matiè re, appartient au roi et aux
" préfets ses délégués, qui remplissent les fonctions de grands-voyers. C'est
• pour cela qu'il est en outce appelé à statuer sur les réclamations des tiers qui
Cela posé, il est de tou te évidence qu e la question élevée entre l'État et M. de
Ga lliffe t cons tit ue l'un de ces points ùu contentieux du consei l de Préfecture.
Car l'É tat, soutien t, d' une part, que le canal du Roi fait partie de la mer et
du domaine public.
Et M. de Galliffet., soutient, d'autre part, au co ntrai re, qu Oil n'eu fait pas partie
et qu'il en est di stinct.
Qui don c jugera entre eux ? Ne sera-ce pas et ne doit-ce pas être en premier
ressort le co nseil de préfect ure? C'est lui qu e la loi constitue gardien du domaine
�16
17
public; c'est donc à lui à dire ce qui en fait partie, et non au conseil d' Étal, Arri ver
à celui-ci sans passer par celui-là, ce sera it omellre le juge' naturel constitué par
ordiuairemenl, ou bien déclareront que rien de ce qui constitue le droit de propriété n'a pu en sortir,
la loi en première ligne, pour investir celui qui ne doit coonaHre que par appel
C'est, on le voit, du contenl'ieuœ .encore enlre l' État et M. de GallitTet. Il est
de la décision sollicit ée,
d' une espèce particulière, d' un genre à part, si l'on veu t ; car ce n' est pas une
qu estion de voirie, d' usurpatiùn sur le ri vage de la mer, et autres d] celle
nature ; mais pourtant c'est du contentieux , c' est-il-d ire, c' est un point sur
Yeut-on maintenant exam iner la qu estions de compétence sous une au tre
face? Voir si la seco nd e question iudiquée par l'arrêt du conseil du 17 décembre
t 817 doit cbanger cell e solution? M, de Gallilfetconsent volontiers à faire subir
à son système celle nouvelle épreuve; il en sortira vainqu eur,
Cet arrêt renvoie en second lieu à l'a utorité administrative, pour que celle-ci
détermine le caractère des actes invoqués par M, de Galliffet,
lequel l'État dit ou i, sur lequel M. de Ga ll iffet dit non, et qui doit recevoir une
solution.
Par qui doit-elle êl re donnée? Évidemment par l'autorité qui a été cons tituée
juge du conten tieux en matière ordinaire du domaine public, ou des choses
qu e r on prétend en faire parLie.
Ici la question , pour porter sur le caractère des litres, n'en est pas moins née
du débat primilif relatif à une chose prétendu e du domain e public pal' l'un ,
Qu'en tend-il par là? Et quelle est son int ention ?
ap part enant au domaine privé, scion l' autre: ell e doit donc être so umise au juge
La voici, fort clairement indiquée. II veutque l'autoritéadm inistrative (Iécid c
si les actes invoqués par M. de Galliffet so n't des titres de proprié.té, s'i ls en ont le
dn débat principal. Le jl/ge de l'action l' est aussi de l' exception.
bi en si ce sont des
A ce point de yue donc, rien n'autorise à penser que le co nsei l de Préfecture
ne soit pas compé tent.
actes de pure ad ministration, de police, ~e règlementation adm inistrati ve ,
Dirail-on, pour démon trer le contraire, qu'il est de priuoipe que les ordon-
caractère, la nature, s'ils peuvent en prod uire les effets ;
OIJ
émanés des souverai ns de Provence dans l' exercice di! leur pouvoir administratif.
nances roya les, et les actes des souvera ins qui ont gouverné les provinces de la
France, avant leur réunion , doivent être soumis au conseil d'État , quand il
C' es t là la seconde question que l'arrêt du co nseil signale c.omme motif de la
s'agit de leur ùlterprétation, et qu'il en doit être de même ici, quoiqu'i l ne
confirmati on de l' arrêté de co nOit. On en comprend fa cil ement la portée, Les
s'agisse que de caractériser les actes invoqu és par M. de Galliffet, parce que
tribunaux civils qui auront plul turd à résoudre les questions de propriété sou-
ces actes sont aussi éman 6s de souverains, et que pour juger les actes d'une au-
levées pal' M. de Galliffet ne peuvent pas, selon le co nseil d'Élat, ca ract ériser
torité de cet ordre 61evé, il faut aussi le premier tribunal administratif ex istan t,
ces litres. C'est un droit, selon lui, réservé à l'administration. " faut qu e ce
le plus élevé, le consei l d'É tat enfi n, et pas du tout un tribunal inférieur su-
préalable s'accomplisse; puis ensuite les tribunaux civils, prenant ces lilres tels
ba lt erne, placé au premier degré de l' échelle administ.ra tive? Celle objection
qu'ils auront été caraclérisés, en feront l'application, diront s'ils ont pu ou non
n'ébranlerait nullemen t nos principes, et l'analogie que l'ou voudrait établir
fonder un droitde propriété, leur donneront toute l'efficacité qui s'y ratta che
entre ces cas manquerait comp lètement de justesse.
�19
18
On comprend, en eflet, qu'a u conseil d'État se ul puissent être por tées 1e6
deux questions. Eh hien 1 En consu liant le. habituues du langage rlu consei l
interprétations des ordonnances royales et des ac tes des sou verains qui en son t
d'État, en pareilles occurre nces, on demeure convaincu, que lorsqu'i l a entendu
susceptibles: c'est la conséquence du principe: ejus est interpretari cujus est
se réserver la co nnaissa nce de la matière ou la uécision ultél'ieure d' un poin t,
condere. L'interprétation ajoute ou retranche à un acte, elle en étend ou en res-
ou le jugement u' une questi on pn>j udicielle, il a employé des expressions
tou tes diffprentes.
lreintla portée. Dans ce cas, c' est du même pouvoir de qui émane l'acte, que
doit sortir lïnterprétation. Un pouvoir inférieur ne le pourrait pas.
En voici des exemples:- Dans l' arrêt du 30 août 18\·2 ( GallilTèt), en an-
Mais telle n'est pas la nature de [. opération que l'arrtlt du conseil du 17 dé-
nonçan t que s'il était nécessaire de pourvoir à la salubrité pu blique par le des-
cembre 1847 a ordonnée. Il n'a pas prescrit l'interprétation des actes invoqués
séchement de l'étang du Pourra, il devai t y être stat ué par le conseil d'État ,
par M. de Galliffet. Ce n'est pas sur uu sens douteux, ambigu, contrad ictoire
il disait: « A supposer qu'i l importât à la sa lubri té pub lique que cet étang
qU 'on leur prête, qu'il faut être fixé. Ce n'est pas pour les étendre ou les. res-
" fut desséché, il n'appartenait qu'à nous en not're conseil sur le rapporr du mi-
treindre, qu 'on est divisé. C'est seulement sur leur camctère. L'un dit que ce
" n!stre des travaux pub li cs, soit d'ordonller le dessèchement , soit d'en ué« te~m in er le mode et les condi tio ns. •
sont des titres de propnété, l'autre rép lique que ce sont de purs actes adminis-
tratifs. C'est pour savoir ce qu' il en est qu' ils doivent être prod uit s et j ugés.
Ainsi dans l' arrê t du 6 !Dai 1836 (Pas-de-Calais), il es t enco re dit:
«
Con si-
En tout cela rien ne ressemb le à une int~rprétalion. Le j uge admin istra tif
, déran t, da ns l' espèce, que l'acte en vertu duquel le dépar tement du Pas-de-
appelé à se prononcer, n'ajoutera et oe re trancher"!. rien à ces ac tes; il les
, Calais réclame la p"opriét6 du bâ ti ment dont s'agit, est un décret impérial
Ya donc pas ici à dire: ejus est ùlterpretari cujlls
" qui aurait disposé de celle propriété nationale en fav eur de ce département ;
est condere. C'est au contraire le cas ordina ire de tout juge, civi l ou admin is-
" que, dès-lors, l'autorit é judiciaire n'est pas compétente , pOllr statuer sur la
tratif , qui voit un titre, qui l'applique, qui dit ce qu'i l est , de quelque part
«
qu' il émane, de quelque autori té qu' il descende.
n ma ine de l'État, et qu'il n'appartient qu'à nOliS, en not1'e conseil d' État, d'ap-
Mais si point d'analooie avec le cas prévu
a précier l' étendue et de déterminer les effets de la disp05ilion dont il s'agit. •
laissera dans leur entier. Il
"
0'
, pas de lIécessité de remonter
au conseil d'État et d' ometlr~ le juge ordinaire.
questi on de propriété engagée ùevant ell e entre ledit départ ement et le do-
Ainsi dans l' arrêt du 12 juillet 1836 ( prince de Wagram ), il est dit au sujet
de la valid it é des échanges de biens provenant de dotations sur le domaine extrao rdina ire et des contestations qui en peuvent naltre :
Il ya une seconde raison de le décider ainsi, c'est que l'arrêt du consei l du
1,7 décembre ,1847 a clairement manifesté par ses termes ce qu ' il entendait que
1 on fit pour 1exécutIOn de ses disposit ions.
, Nous avons eu l'occasion, en effet, déjà de faire remarquer qu' il s'est borné
a dire Simplem ent, que c' était à l'autorité administrati"e a'
prononcer sur les
•
«
Co nsidéran t que, d'après les articles 402 et 66 du décret du 1 er mars 1808 ,
«
et l'article 5 du décret du .\ mai 1809, il n'appartient qu'à nOliS, en noIre
«
conseil d'Étal, de statuer sur la validité des échanges relatifs à ce genre de
«
biens, et sur les contestations auxquelles ils peuvent donner lieu ;
�20
21
« Considérant que le décret du 6 janv ier 181,j. avai t pour objet d 'autoriser
" une aliéna tion des domaines nationaux; qu'il n'appartient également qu'à
llOltS ,
en harmonie et e n accord avec lui-m~me l'arrêt du consei l du 17 décembre
18~7 dans les deux di spositions dont il se compose. Pour rune, cell e relati l'e à
«
en notre comeil d'État, d'interpréter ledit décret aimi :que les ordo/1nances
la délimitation de la mer, il a Msigué très clairement , le consei l de Préfecturt, ,
«
royales gui en ont été la suite.
comme l'autorité qui doi t ê tre in vesti e; pour l' a)ltre, celle du caractère ùes actes,
Il
Ainsi l'a rrêt du 23 avri l 1837 (com mune de Prétin ), en an nulan t l'inter ·
il ne pent pas avoir voulu en désigner une autre. Sans cela le jugement de ces
prétation donnée par un consei l de préfecture à uu décret impé rial, a dit:
deux qu es tions d evrait être scindé;
" Considérant que ledit consei l , e n statuant sur (interprétation d' un décret im-
degré, l'autre devant celui du deuxième degré; et l'arrêt cependant ne fait pas
" périal , laquelle ne peut être donnée que par nous en notre conseil ri État, a
cette scissiol'), ne trace pas ces deux marches opposées, ne divise pas enfin
" également excédé ses pouvoirs. »
en tre ces juges di fféren ts la solution à donner.
Ainsi dans l'arrêt du 29 janvier 1841 (Payssé), il est dit : au sujet d' une in-
Si
r on disait que
r une êt re portée devant le juge du premier
là n'est pas un e d ifficulté, et que la juridiction supérieure
r es-
doit tout attirer à elle , nous répondrions qu'outre l'illéga lité d'une pareille pro-
« pèce, il s'agit de donner su r renl'oi de l'autorité judiciaire , l'interpré tation de
cédu re, il y aura it encore d ésavantage dans sa marche, moins de facilité pour
" l'arrêt du 25 avri l 1760 (du conseil royal des finances ct com merce), e t que
la jnridiction supérieure de résoudre la question de fait , ùe localité dont les
" cette interprétation a é té avec raison déférée à
élémen ts sont .sous la main du ju ge local et qne ceux-ei échapperaient à un juge
terprétation qui lui ava it é té déférée directement; " Considéran t que dans
NOTRE JURIDICTION
contentieuse.
Sans pousser plus loin ces citations qui pourraient être mult.ipliées, il e n résulte
placé trop loin d'elle,
que toutes les fois que le conseil d'État a voulu indiquer que c'était de lui que
devait ressortir la connaissance d' Ijne contesta ti on, il l'a dit clairement e t é nergiquement ; que celte formule; il n'appartient qu'à nous en notre conseil d'État ;
ou celle-ci;
NOTRE juridiction
contentieuse, son t les formules consacrées à produire
et manifester son intention, et qu' elles sont assez significatives par elles-m êmes,
pour ne laisser, quand elles sont employées, aucun doute sur leu r portée.
Terminons celte démonstration par un dernier Irait qui résume en lui, s' il
est possible, ceux qui prf'cèdent et qu i les confirme.
Ce qui autorise à penser qu'il y a une différence immense entre interpréter
' un acte et le caractériser, c'est que le conseil d'État, dans la matière des do-
Il doit nécessairement suivre de là, que lorsqu'il n'a pas jugé à propos de s'en
ma ines engagés n'hésite pas à renvoyer devant les tribunaux civi ls pour qu e
servir; que lorsqu'au contraire, il en a ado pté une toute opposée, plus géné-
ceux-ci fix e nt le caractère d es actes invoqués, tandis qu' il se résen 'e à lui-même
rale , moins précise, celle par exemple qu'i l a suivie dans l' espèce, son intention
r interpré ta ti on.
a été différente aussi; qu'on reste alors dans la règle ordinaire, et qu'il n' y a
pas lieu d'en sortir.
C'est ce qu' il a décidé le 28 aoQt 1837 ( d'Hoffelize ), en attrihuantaux tribunaux civils, en force de la loi du 14 ventôse an
VII,
la connai"ance du
caractère d es titres invoqués.
Il ya enfin une troisiè me raison pour le penser ainsi, c' est qu'il faut me Ure
Pourrait-i l ê tre que le conseil d' Etat admIt que le jugement de ces questions
�22
put apparteni r à l'autorité judiciaire et au premier degré de juridiction de ceLLe
23
autorité, et en même temps que là où s'écartant de la loi du 1 ~ ventase an "" ,
il aurait retenu pour l'autorité administrative la connaissance et la solution do
cette difficulté, il en eut dépouillé le premier degré de la juridiction adminis-
§ I.
rative? Il y aurait tout à la fois contradiction et anomalie dans celte décision
contraire.
REPONSE A LA PREMIÈRE OBJECTION.
En dernière analyse, le Conseil de Préfecture des Bouches-du-Rhône, investi
par M. de Galliffet était donc, aux termes de l'arrêt du conseil du 17 décembre
1Sn , le seul tribunal qui dût et pût l'être. Il éta it et il est compétent. pour COTlnallre et juger les questions qui lui sont soumises.
Voici la première objection du mémoire des pêcheurs :
Les char tes, y lit-on, p. 22 à 27, invoquées par M. de Galliffet , en attribuant aux archevêques d'Arles les pêcheries du Martigues, les leur firent passer
à titre de souveraineté et non de propriété patrimoniale.
Elles restèrent toujours dans le domaine du souverain, dont les empereurs
d'Allemagne, les archevêques d'Arles, et les comtes de Provence furent la
personnification.
Ces actes son t donc placés en dehors de la sphère des intérêts privés;
Le mémoire ajou te que les archevêques d' Arles furenl de véritables souve-
rains, parce qu ' iIs obti nreu1 des em pereu rs les droits régaliens et que ces droits
portèrent SU I' toute l'étendue de l'archevêché dont le Martigues faisait partie.
Réfutation du Mémoire des Pêcheurs,
Il Y a dans celle ohj ection des erreu rs capitales, d' une énormité tell e, qu 'il y
a lieu de s'étonner de l'assu rance avec laquelle on la présente.
La réponse est dans cett e triple idée: que les archevêques d'Arles ne furent
pas des souverains; qu'ils furent seulement , par les chartes rappelées et par les
On va, dans cette dernière partie, suivre pas à pas les objections con ten ues
dans le mémoire des Pêcheurs, les examiner et y répondre, en les groupant
dans le même ordre où on les a présentées.
•
concessions des propriétés qlli y son t mentionnées, pourvus ou investis par les
empereurs d'A llemagne, d'un bénéfice ecclésiastique ou soit d' un fief; et qu' enfin ce fief fut leur propriété patrimoniale et qu'ils purent en disposer soit en
partie , sail en totalité .
�24
25
Les preuves de ces propositions sont faciles à rournir:
C'est la réunion de ces cinq caractères qui constitue la souverainete; c'est
!. Et d'abord à lJùels signes reconnait- on la soulIcraùlCté? Quel cst l'ind ice
aussi l'ex istence de ces cinq pouvoirs sur la tête du même individu qui constitue
le sauverai".
qui rait ten ir pour certain, qu'elle a' été transportée ou transrérée sur la tête
C'est ce qu'enseigne rort clairement Purendorrr, t. 3, p. 140, ail chapitre 4,
d' une personne par celui en qui elle réside? On pense bien qu e ce poiut de droi t
livre \"Il, en ces termes: « Quoique la souveraineté, dit-il, soil erl elle-même quelque
public est fixé depuis longtemps et les raisons alléguées sont lJien futiles pour
" chose de simple et d"indivisible, cependant comme elle s'exerce par divers
prévaloir contre les règles qui, de tout temps, ont été sui,'ies sur celte matière.
" actes distincts, selon les différents moyens qn'il raut nécessairement meUre
Or voici ce que sur ce point on a toujours tenu pour certain:
«
Bodin, Républiquc, chapitre 10, des 1.'mies marques de souverailleté, réouit
cn usage pour la conservation de l'État, on y conçoit diverses parties: car
La première
" ce n'est pas lin tout composé de parties de différente nature, qui, qlloiqlle join« tes ensemble, PUISSENT SUBSISTER cnAcUNR SEPAREMBNT, »
«
mar<jue du prince so uverain, dit-i l, p. 221, c'est la puissance de donner lois
Le même publi ciste réduit encore (même chapitre) aux suiv31ltes les mar-
«
«
à lous en général et à chacun en particu lier,
ner la guerre ou traiter la paix ,
«
les principaux orriciers. , , , .
au x cinq caractères suivants, les signes de la souveraineté:
«
. la seconde c'es t cie ùécer-
ques de la souveraineté, savoir: « Le pouvoir législMir; celui d'infliger les peines;
, la troisième est d' in stituer
«
le poltvoirjttdiciairc; le camc/ère de ce pOltvo'Ï?' coilsiste, est-i l dit pa l' l' anno-
, la quatrième marq ue souvera ine, c'esl
«
tatenr, à pl'OIlOllCer Cil demiel' l'essort et sans appel, par opposition aux tribu-
(, à savoi r du dernier resso rt , qui est et a toujours été l'un des prin cipaux
" naux que le souverain Ini-même établit, et qui tiennent de lui toute leur au-
• droits de la souveraineté, , , . , . . , . la cinquième est d'octroyer g' âce
1<
«
aux condamnés par dessus les arrêts et contre la rigueur des lois, "
torité; le droit de meltre les impôts. »
Les auleurs q'li ont eXdmin é de plus près ce qui, dans ces diverses marques
Loyseau, Traité des seignellries, chap, 3, dil, à so n tour, nO' .\.,5, ct 6: « Les
, droits concernan t les pouvoirs des seigneuries souverain es qui peuvent être
de la souveraineté, la caractérisait le plus énergiquement, ont pensé que c'était
le dernier ressort de la justice, ou soit le pouvoir de juger en dernier ressort.
proprement appelés actes en cas de souveraineté, sont cinq en nombre, à
1\ exis te SUl' cc point un arrêt de la Cour de cassation du 30 janvier 1821 ,
« savoir: faire lois, créel' orficiers; arbitrer la paix et la gucrre, avoir le dernier
Cet arrN s'est élévé pal' la hau teur de ses considérants aux plus belles théories
« ressort de la justice, etrorger monnaie; lesquels cinq droi ts so nt du tou l insépa-
ùu droi t public ; il résume les plus exactes no tions de l' histoire ; et il forme un
« l'ables de la personne du souverain , et tellement allachés à la souveraineté
monument qui honore le l:omdu présid ent Brisson, à qui la rédaction en esldu c,
«
que quiconque en entreprend quelqu' un eotrepend quant et qlJant la souve-
Il s'agissait de reconnallre si les ducs du Bar avaient le droit de souveraincté
«
raineté, et est coupable de lèze-majesté; le premier d' iceux concerne l'iostru-
dans le duché du Bar, La Cour de cassation décide qu'ils ne l'avaient pas parce
«
" ment de la souveraineté, le second les ministres d' icclle et les trois autres
«
regardent les trois diverses,ronctioosqui sont en tout éta t: savoir est, Ic troisiè-
«
me Ics armes, le quatrième la justice et le cinquième et dernier les finances.
1)
qu' ils n' avaient pas le dernier l'essort de la justice,
«
«
Allendu, dit-elle, que le pouvoir de donner des lois et celui de les faire
exécu ter sont deux corrélatifs inséparables;
»
�27
26
«
AUendu que t'exécution des lois ne petit être
« DKR~IER
égalem~nt
aSSllrée QUE
PAR
LE
RESSURT UE LA JUSTICE, puisque celui qui n'aurait pas ce dernier ressort
• serait obligé de déférer a des tribunattœ étrangers les infractions auw actes
« qu'il appellerait des lois et que ces tribunauw, sur lesquels il n'aurait aUClille
«
supériorité, ne statueraient que quand et comme ils le jllgcraient à propos; et de
«
là cet axiome si connu: point de souverain Sal1S COUl' souveraine, •
«
" Que le chance lier d'Aguesseau, dont l' aut ori té es t si grave dans les ques" tions de droit public, reprochant aux juges de bailliage du Bar d'avoir mé" connu la souverain..eté ùu roi, disa it, en parlant des mêmes actes, que si ces
" officiers les avaient mi eux co nsult és, ils auraient aisément reCOIlIlU, dans Ir,
" rés€l've expresse de l' hommage-lige et du l'essort , ce double caractère de wpé« l'iorité d'lin coté et de dépendance de l'autre, QUI COSSTITUE TOUTE L'ESSENCE D8
" LA SOUVERAINETE ( Sirey 1821-1-1 4-6 ), ))
Attendu qu'il est si cOllstant, particulièrement en F1'allce, que le demier
• l'essort de kt justice est le signe caractéristique de la souveraineté, que même
• dans ces temps, à peine séparés de nous par Uli intervalle de quatl'e siècles, oil le,~
« hauts baro1lS jouissaient dans leurs terres des droits l"égaliens les plus éminen ts ,
«
comme battre montlaie, imposer des tawes, faire la paix et la guerre, ON RE CON-
Ces principes POSp.s, ilu' y a plus, pour savoi r si les archev~ques cl ' Arl es, furent,
comme on le so utient, des souverains, et si les bi ens, qui leur furen t transm is par
les em pereurs d'Allemagne, le furent à titl'e de souveraineté, qu'à consu lt er les
term es et les clauses des chartes dont s'agit.
Il NAISSAIT GENÊRALEMENT QUE LA SOUVERAI NETE DU ROYAUME ÉTAIT ATTACUEE A LA
"
COURO~~E,
• poids des jugements Cil dernier l'essort que l'on a vu s'affaisser l' énormp, puissal1ce
«
de parler, cela prouve moins
« Olt
«
«
l/ll
droit reconnu qu' llll plus haut dCgl'é de ral'eUr,
des ménagemens cOllseillés par la politique;
Att endu que celle théorie subordon nait la difficult é qui s'é tai t élevée en tre
le Préfet du département de la Meuse et le sieur Bourlo n , à la question de
" savoir à qui du Roi, ou du duc de Lorraine ap part enait le dernicr resso rt dc
«
1roisième de 12 12 ; les subséquentes ne fur ent qu e la répé tition de celle-ci ,
La p,'em ière de 920 dit , ùans son préambu le, en en traduisant les terJJles:
des grands reuda(aires; et que s'il en est tels , que les ducs du /Jar qui se soient
• maintenus plus longtemps dans l'exercice de ces grandes régales dont /' on vient
«
Ell es sont au nombre de trois, la prem ière de 920, la second e ùe 114-4, et la
PARCE QUE LA ÉTAIT LE DERNIER RESSORT DE LA JUSTI CE; que c'est sous le
la justi ce, et par conséquent la souverai net é du duché du Bar:
«
Que ce tt e question pu:'cment de fait était résolue par un grand nombre de
• pièces du procès dont la série embrasse le laps de plus cie cinq siècles:
«
Que dans la plupart des aotes, il est dit qne les ducs du Bar tiennen t leur
• duché sous l'hommage-lige du roi, et que les jugements des tri bu naux du
• Barrois ressortissaient au bailliage de &Ils pour les cas présidiaux, et PO'II"
• tout les autres cas au parlemen t de Paris, "
• 1\ co nvi ent à sa majesté impéria le de récompenser par des bienfaits favorab les
" l' affecti on et la fidélité de ceux qu'elle sait parfaitement lui être dévoués, C'est
" pourquoi que tous les fid èles de la Sain te-Église de Dieu et les nàtres, tant
" présents que futurs, sachen t que Manassès, archevêque de la Sainte-Église
«
d'A rles, notre très cher parent, nous a demandés de lui accord er un diplÔ,me
«
pour tout ce que son prédécesseur Rostang a au trefois acquis également par
«
un dip lôme so it de nous, soit de nos prédécesseurs, afin qu'il puisse avoir ,
• go uvern er et posséder ces choses même plus fermement et d'une manière
" plus assu l'ée, Il Et, dans son disposi tif,
«
ell ~
ajou te: « No us, consentan t à sa
demande, pour son invio lab le attachement, nous avons ord onné que le présent
" uiplàme fut fai t, afin qu 'en vertu de ce dip lôme, il ai t et possède à toujours
• (omn i tempore) pour le droit et la propriété de l' église de Saint-Éti enne, les
• choses qu'il a demandées, savoi r : l'abbaye d'Omionis, cell e de notre dame de
�•
28
«
Gourdon eLde Crtldutis avec touLes leurs dépendan ces: même lé droit uu port
• d'Arles, tant sur les grèves que autres arrivan ts; nec !l011 telollcum sirnul cum
«
monetâ (termes de l'acte); et qu'il en use à son gré, perso nne ne le contreo-
«
disant. En outre que la susdit e égl ise jouisse à perpétuité de toutes les choses
« que son prédécesseur a ob tenu es dè notre pr~d écesse ur, savoir le droit sur les
«
juifs. Et afin que celle concession soit à jamais ferme et durable nous l'a vons
«
signée de notre main.
l)
Su it après cette
pi ~ce
ce qu' elle appelle l'état des
29
«
lacus, paludes, pascua de Cravo, ut ~lbeas el. perpetuà tu et Al'elatensis eccles ia
" auctoritate nostr<c munificc ntiœ in pace possideas, et pel' te lui successores
«
qui cunqll e in ecclesi:l Arelatcllsi calbolice ex tilerint. CONCEDlMVS ETIAI! TIBI
ft
JVRlDICTIONE!1 POST NOS in civitale Arelatensi; insuper confirmamus tibi domi-
«
nium quartœ partis reddituum Arebtelltsi ci"i tatis.. , . . . , . . . .
«
PISCAnlAll DE PONTE, ct quiqllid Arelatensis ecclesiœ in civitate vel ex trà pel'
«
secularcs seu ecclesiasticas perso nas. habet , . . . .
)J
domaines qlli appm·tiennent à Mùnassès , et dans leq uel se trouv ent énumérées
toutes les pécheries tant du Rhône, des marais et étangs que cel/es des bords de la
La troisi ème de 12 12, dit encore dans so n préambule, comme les deux précéden tes;
rn/w.
La seconde de li U. , dit encore dans son préa mbul e:
u
" du roya ume.et la pratiqu e des empereurs et rois romains nous portent à ce
" qu e nOliS nous appliquions à subvenir aux besoins des églises suj ettes à notre
({ commandemen t, el d' one manière spéciale à l'église d' Arles, à l'égard de
({ laquelle nous som mes ob ligés par une certaine préroga tive de ses privilèges
«
et à ce que nous donnions tous nos soins à pourvoir nous-m ême à la défense
({ des clercs, à la conservat.ion inviolable de leurs biens, pour la louange el la
({ gloire de J. - C. , et surtout à ce qu'ils oe soient pas opprimés par quelqu e
({ . tyrannie des méchants. Si qu elques dommages leur sont ramés inj ustement
«
«
L'ancienne coutum e
et sans motifs, c'est à nous à y rem édier, en amendant pi eusement et miséri -
" cord ieuscment. Suivant don c les déc rets impériaux et imitant la cl émence de
" nos prédécesseurs; » Puis elle ajou te dans le dispositif qu e nous reproduison s
dans le tex te original, pou r n' y ri en altérer, même involontairement.
Tibi, venerandc Rairnunde, Arelatensis civilatis etTchiepiscope, et pel' le
" ceclesiœ t!lœ et suecessoribus tuis noslra regalia in urbe A,'elatensi et totius lui
«
" arehiepiseopatus coneedimus, scilieet: jus tüias, monœtam, judœos, (ornarias ,
« cordam, qu;nlale, sesta,'ium, "eddilus navium, montationes, stagna salinarulll ,
Ad imperiali s eminen ti œ pertin et maj estatem ecclesiarum jura sive posses-
<t
siones
«
dine perturbenlur, sui privilegii munimine roborare, Cunctis igitur tam pre-
u
senti bu s quam futuris imperiiqu e fid elibus volumus esse cognit um, quod nos
«
Arelatensi ecc/esiœ dignitatem dignè considerantes ET
An
• YlNCIAl ET
IIONOREM IMPERII ill œsas servare, et ne pravorum hominum inquietu-
PRI~C IPALEM
SEDEM n1PERII
ET
EA li
TANQUAM CAPUT PRO-
DOMINI IlIPERATORlS, et ali is quœ pertinent
• ad honorem; » Puis ell e ajo ute dans son disposi tif : « Volenles secundum
" antiquam ell'a ti onabilem prœdecesso rum nostrorum regum et impcratorum
«
concessionem, confirmam us tibi i\Jichael venerabilis archiepiscope et pel' te
• successioriblls tuis, regalia lotius diocœsis Arelatensis ecclesiœ, et ipsum ci"i«
tatem pro indil'iso, et plenam juridiction em in cil'itate, in crea ndis co nslllibus,
" et
RETlNMD.'
CII'ITATE
AD
SERl"lTlUftl IMPERII
ET
DOilllNI liIIPERATORIS, ct ali is quœ
" pertin ent ad jllridictionem tu am sicllt sunt : Telollca, Pœdatica, justicias,
«
jlldœos, co ru am, quilltalc, plJamariu m, monctam , portu s, montatione., el
«
"edditus navillm, stagna, lacus, pa lu des, flurnin a, pascua de lapidoso agro,
" ita videli ce t ut de ol11ni fructu et utilitate, qllœ ex his qu::c supra descrip«
simlls , potemnt provenire, ccclesiœ Arelatensi , et Michae l ejusdelll ecclesiœ
" archi epi scope
h ~beas ,
cl possideas mellie/at em eL per te tui successo res
�30
«
ca tholici, quicltlllque imperio (ide/es eœliterint, eamdem etiam mediam parlem
n tiili tuisqu e successo ribus praesenti scripto confirmamus et imperiali al]c toritate
(\ com muOimus. l)
«
Confirma mus etiam.
.
. PISC. ni AM DE
• jura seu possessioues et tu Micbael archi episcope, tuique successo res
deilea tis suiljacere uisi
nementl'id ée dans ces actes. Après les avoir lus, il sera it ridicule de prétendre
le co nt raire.
En second lieu, il n' y pas dans ces trois chartes un seul mot qui indique que
P O~ TE.
. statuill us eLiam ut ecclesia Are latensi et ejus
u • • • • • . . • . . •
3\
la souverainté ait été transportée. On a vu plu s haut quels en étaien t les carac-
NU LLl US
tères et les marques. Ils ne son t ni con férés, ni réunis, ni accumulés sur la tête
tantum nostri sqae
des arch el'êques. Onu'y dit pas qu'on veui ll e les leur départir; ni le pouvoir de
•
UNQ .U! P OTEST.lTI " E L DOM m O
«
successoriilus
regibus romanorum. Hune aut em omnia Are-
faire des loi s, ni celui de faire la paix ou la guerre, ni le deroier ressort de la
n
latensi archi episcopo ejusque successoribus confirmam us et conced imus
j ust ice, ni le droit de faire grâce; rien de pareil ne s'y rencontre. Où serait
«
SALYA IN OlI NIB US JUSTITIA HONORE ET UTILITATE IMPERIAL!.
« . . . . . . . . .' . si quis vero hujus nostra. . . . . . . . . au toritate
donc celle so uv erainet é invisiille'l
edictum temcre viol are prescripserit , libras auri pro pœna se compositurum
em pereurs de qu (émanent ces chartQs.
«
UlP ERATORIDUS seu
NODI S
cognov erit, dimiùium fisco 11os1ro et dimidium prœd icto arch iespiscopo et ej us
« ecclesiœ.
En troisième lieu, la so uve raineté y es t exp ressément réservée au profit des
«
D'a ilord le tex te de la charte de '11 H le dit par ces mots:
T IDI JURlDlCTIONE M
CO~CEDIMUS KTIAM
POST NOS. Par là l' empereur s'est reservé pour lui le demie!'
ressort de la justice; et, on ra vu plus haut, c'est le signe ca ractéristiqu e de la
De ces tèx tes, examinés soit dans leurs préa mbu les, soi t dan s leurs dispositi fs,
il ne peut sortir
. qu
, une seul e vérité, celle si étrangement méco nnu e par le
mémoire des Pêcheurs. Ils prouvent au plus baut degré que la souveraincté n'a
pas été tran spo rtée par les em pereurs d'A llemagne aux arche"êques d'A rl es,
so uvera ineté.
Il le dit cncore énergiquement par ces mots: AUCTORITATE nostrœ mllnificentiœ.
. Ces mots signifieut que l'archevêq ue ne doit posséder que sous la puissance
impéria le. Tel étai t au moyen-<ige le sens d'auctori/as.
Ainsi dans les lellres d' Henri l, données à Orléans, imprimées dans le 1"'
avec les hiens, terres et pêcher ies ci e Marti gues, qui leur avai ent été donn ées.
Cela ressort de plusieurs enùroit s. On nou s permell ra de les signaler.
l'olume dcs ordonn. du Louvre, l.aurière oilserl'e, sur les mots noslnl! aucto-
D'abord le ilut et J' esprit de ces chartes n'é tait pas de tran sporter aux arche-
,·;talis, p. '1, note C, cc qui suit:
" Auctoritas se doit, dit-il , pl'end're ici pour
vêques d' Arles la souveraineté. Leurs préamilules font ,'air très clairemen t qu Oil
LA PUI SSANCE ROU LE .
Dans la
s'ag issa it seul ement de protéger, de défendre leur patrimoine ct de le conserver
" mo yenn e et la basse latinit é, ce mot seu l signifiait auss i une charte du ,'0;,
contre les atteintes qui pourraient y être portées. C'é tait auss i pour maintenir
n
J' bouueur et r écla t des ég lises, et notamment celle d'Arles, siège principal du
" l'an 8 15. ),
comm e il sc voit par ce qui sui t d'un e charte de Loui s- le-Déilonnaire de
pouvoir de r em pereur. Mais point d'intention, de but politiqu e, point de démen-
Il faut en dire autant de la charte de '12 12. Elle cède bien il l'arche\'êquc
bremeut de souverai neté, p~int de partage de r empire. On en chercherait vai-
ple-nam juridictionem in cil'-ilalc, ma is c'est sous la résen 'c importan te et décisi ve qui est rapportée tout aussit ot : SUVA I ~ omnibus JUSTITIA no~onE ET UT ILI -
�•
32
THE
IMPERIA LI. Ce qu i n'es t pas autre chose encore que la justice supérieure du
A chaque pas celle chart e montre que la so uverain etéa été re tenu e et ga rdée
souveraineté y avait été réserv ée au profit des empereurs d'Allemagne. En faudrait-i l davantage pour conclure que les droits de 7'égales qui y sont concédées
ne doivent pas être confondus avec elle?
par l'empereur. Si le uroit de créer des consuls est accordé à l'archevêque, il
Cell e vérité devient plus sai llante, si on examine en détailla nature des uroits
demier ressort, en d'a utres termes du souverain, qui est rése rv ée.
doit re tenir la yi lle sous le service de l' empereur, 1'etillenda civilate ad serrilium
de l'égales transportés, qu e ces chartes ont én um érés et comptés un à un.
illiJllwii el domilli imperatoris; il ne devra reconnaltre et rechercher d'autre
Les voici, tels que la science diplomatique les définit et les fait connaître.
pouvoir, ni d·au.tre domaine que celui de l' em pereur, nul/ius ullquam pOles/aU
1 . -JUSTITIAS. Ce mota plusieurs sign ificati ons. Il sign ifie les profils pécuniaires
vel dominio debea/is subjacltre, nisi l\"0BIS tautum 110strisquc sllccessoribus. La
charte indiqu e encore la yille d'Arles comme le siège principal du pouvoir de
cie la justice, tels que les amendes; redevances dues et aussi amendes (M. de
Pastoret, ordon. du Louvre, 1. X"", p. 184, note A.)
l' empereur, PRI~CIPALE!I SJ!DEII I~IPERII ET DOMIl\"1 IMPERATQRIS. Cela serait -il si
L'ancien usage de prendre les frais de jugemen ts sur la chose jugée était en-
c'était une ville appartenan t à un souverain nouvea u.? Si r éd it contenu dans
core en vigueur au temps de l'em pereur Frédéric, qui fit une fixation de ce que
l'acte impérial n'est pas ohservé, la' peine de 50 livres sera suhi e et les 50 IiI'.
les seigneurs pouva ient prétendre clans le juge ment des diverses causes. Voyez
Calls tillltiones simt, lib. l , lit. 60 ct tit. ilO.
acq ui ses moitié au. fisc de l'empltreur, Fiseo NOSTRO. Cela pourrait-il être si la
souveraine té avait été transférée?
Eufin la cession des droits réga li ens n' est faite par r empere ui' dans la charte
Le se igneur ava it le droit au XII! siècle ùe prendre le prix des amendes civi les
011
cri min elles prononcées par le juge (Monteil , T7'ai/é des tnaté7'iaux manuscri ts,
de 1-1 H que pour un QUART, et dans celle de 1212, que pour la MOITIE. L'u ne
l, p. 230). L'établi ssement tle la féoda lité soumi t à la volonté des seigneurs
dit: cOllfirmamlls tibi domillùan QUARTA! p.'Rns REDDITUUM Arelalensis cit"ilalis.
J' admi nistration de la justice. Chaque seigneur devint juge ùes hommes q1li
demeu raient dans son fief.
L'a ut re dit: MEDIETATEM possideas. . . . . . . et per te tui successo res, . . .
•
33
eamdem meiliam paTtern tibi et tuis successorib us confirma mu s. Sillgul ière SOUl" eraineté que celle des archevêq ues d'Arles qu'ils auraient posséuée pour un
QUART ou pour une MOITI':;" !
Sera-t-il maintenan t nécessaire, en terminant cell e démonstra tion , de dire
que la concession des réga les, 1'egalia nos/ra , faite dans ces chartes, ne sa urait
A cell e époqu e les souvera ins mêmes reconnaissaient aux prélats une j urid icti on en matière temporelle"'.
Rien en cela n'a trait à la souv eraineté, alors surtout que dans les chart es
ra pportées, le derni er ressort de la justice est reten u par l'empereur.
2. - MONETA~1. C'est un droit de seigneuriage sur les monnaies, nommé sOllvent
entraîner le transport de la souvltraineté? C'est ce qu e le mémo ire des pêcheUi s
a si hardiment con fond u, sans se dout er de la distance infinie qu' il y a entre
ces deux choses.
00 a \'u, plus haut, les signes caractéristiqu es de la sou'veraine/é ; on a vu
aussi que les chartes examinées ne les renfermait pas; on a vu enfin que la
. Yoyez les ordonn ances des rois de France de 1<1 Iroistème ra ce, le llres de 1299 accordoos aux é\'êques
de Normandie, par Phil i ppe-l~-Del, t o. vol. p. 334. - L'ordonnan ce de 1302 en faveur des préla ts du Langued oc, p. 340, - Voyoz d'autres exemples, m ~me r('cceil , t. t, p. 814; tom. 2, p. G03; 1. 3, p. 59, !ll'Mchevequt>
de la ville du Mans. Dom Bouquet, t. 4, P 663, li. l'archu\'eque de Langres. Brussel, l 1J do l'li sage des liefs
p. 197 , Ducange, glossa ire, 1. 2, p. 564, li. l'arche''êq ue do Tours e t i) j'é"èquo de Pari!' , Lebrel, Irailé de '<1
sO Ul'era ineté, li v.~, chap. 13. OUm, 1. p. 7, V. an 1265, elc. elé. li. l'abbé de Corbie, Charfutarium nigrum corbritnJt, pa!J~ 3" ,
�•
34
35
mOlléage. V. Secousse, préface des ordonnances du Louvre, t. 3, p. 11 , - id.
1.
3. -
JUDIJlOS. C'étaient les impôts perso nnels do nt étaient frHppés les juifs.
'l , p. 55 1, art. 2, - p. 588 , arl. 2.
Ceux-ci étaient, dans ces siècles, considérés co mm e des ma rchandises, soumises
Le Illonéage, dit Mon tei l, l, p. 289, était pri miti vement un impôt payé par
à payer un droit d'entrée. De Vi llerant et Bréq uigny, ibid., t. x, lettres de
les suj ets subditi, aux seigneurs, pOUl' qu'ils ne cbangeassent pas la va leur des
monnaies.
Charles VI, du 22 avril 1383, p. 134-. Pastoret, t. XVI, préface, p. XCVI.
4.. -
CORDAM , QUINTALE. Le droi t de poids et de mesure.
Comm e droit de battre monnaie, Cbop in cite daos so n trai té sur le rl omai ne
Sui vant les éditeurs de la nouvelle édition de Ducange, QUiNTALE était \10 impÔt
des ro is de France, t. II, p. 3 3~ , trente- un seign eurs à qui le ro i de France
qui se payait pour les choses que l' on pesait, et CORD.m pour celles que l'o n
laissa le privilège J e faire ba ttre monnaie. Tobiese Duby a fa it , en deux tomes ,
mesurait. Secousse, t.
un tra ité des monnaies des barons.
IV,
des ordonn. des rois de France, p. 61 , note TT.
Quelquefois c'éta it une impositi\ln qui se pa yait aux communes, voyez un
Berenger, évêque de Magnelonn e, fit frap per da ns son diocèse une mo nnaie
arrêt du conseil du roi du '17 décembre 1754, en faveur de la communaut é
étrangère qu'il appelait des milm·ets. Vaisselle, bistoire du Languedoc, III, 532.
de Cannes sur l' imposi ti on du droitde poids. Voyez les déli bérations du pays
de Provence, ca hier de 1756, p. 35.
Ce t historien énumère les monna ies seigneuriales qui après la réuni on d u Languedoc à la France , eureut cours dans ce lle provi nce, et suivant M. Be ugnot,
il en a omis, telles que les Benundins et les Bemal·dins. Il donne dans son tome
Le poids public et les droits de pesée étaient au i eigneur, dit Monteil , l,
p. 23 0.
5, plancbe 8, numéro 5, une monnaie des seigneurs d' And uze . Au moyen-âge
Le droit qu'avai ent les seigneurs de régler les poids et les mesures se trouve
on chercbait aussi des profits dans l'a ltération des monna ies dans le royaume de
France.
exprimé dans presque tou tes les chartes. Voyez décisiuns de Jean Desmares,
arti cle 295; il vi va it sous les roi s Cbarles V et Charles VI.
On a vu dans l' arrêt de la cour de cassation du 30 janl'i er 182 1, cité pl li S
5. ·- TELONEUM. Droit de douane sur (es marcbandises transportées par terre,
haut, que le droit de battre monnai e, exercé par les bauts baro ns comme conséquences des droits régali ens , n'était pas caractéristiqu e de la souvera ineté.
Merlin , réquisito ire du 25 fruc tidor an
XIII ,
di t aussi :
«
On a yn da ns les :m e
« et till e siècles, de grands seigneurs et des évêques joui r de qu elqu es droits
(f
régali ens, de celui , par exemple, de ba tt re monna ie, sans être p OU!' cela sou-
ou par ea u (Guéra rd, p. cuv, numéro 119 ).
6. - PEDAGIUM. Le péage était un droit de passage qui se percevai t da ns certains lieux déterminés sur les rou tes et au bord des rivières. (id. id. nO120).
7. - SEXTARIUM. C' était le droit de sex térage. Le sMier, su ivant M. Guérard ,
p. CLXXI, mesure qui était le sixième du conge.
8. -
REDDITUS NAVIU!1. L' impÔt su'r les nav ires, ancrage.
«
verains; parce qu'ils n'é taient que des sujets lorsque ces droits leur ava ient
été concédés; parce qu'en leur concédant ces droi ts le monarq ue ne leur
9. -
MO~TATION BS.
«
avait accordé, pour ainsi dire, qu' une portion de la superficie de la souve-
10. - STAGNA. Les revenus des étangs.
«
raineté, parce que la racin e et le tronc de la souv eraineté étai ent dem eurés
dans les mains du monarque. •
11. - SALINOIlU.U. Le droit dt! sel.
«
«
Remonte et ha llage des navires, deux tax es de navigation.
12. - LACUS. Des lacs,
�36
13. - PALUDES. Des marais.
•
14,. -
PASCO. DE CRAVO. Tribut sur les pâturages de la Crau.
'15. -
PR.dlDATlCA. Les péages, sui vant Ducange.
,16. -
PDA~ARIAM
ou
PDAR~ARIAM.
37
• celui qu'il accorde. C'est ce qu'exprime Sixlintls dans son l'I'ailé des régales ,
" liv. l, chap. 8, numero 3: quocumque modo princeps alii regalia iuuulgeat,
" major lamen penes principem relinquitur regaliorum poleslas.
Les fonderies, suivant le même auteur.
te
C'est aussi, continue-l-i l, lin principe admis par lous les auteurs qui ont
" traité de ces matières, que dans la concession des droits régaliens, les droi,ts
C'est donc une étrange confusion que de mêler des choses si distinctes, la
souveraineté avec ces droits utiles, ces fruits, qu'à l'époque à laquelle se rapportent les charles dont s'agit, on retrouve -chaque jour concédés pal' les
soU\'erains à de simples particuliers.
Il appartenait à coux qui, dans leur mémoire, ont donné de si fréquentes
preuves de leur oubli des vrais principes de la matière, de se permettre celle
énormité historique, touchant le droit puhlic -du moyen-âge, de se dispenser
non spécialement expliqués n'y sont jamais wmpris, et que, quelque générale
" que soit la concession de ces droits, cetle généralité n' ~st jamais asse= puissante,
" ni assez énergique, pour coml'l'endre un dl'oit plus fort que celui qui est eœpri« mé: NEC TAME~ IlA CLAUSULA TAM EFFlcn EST, UT PROPTER EAII EXTENSIO FIRRI
«
« lJEBEAT
«
AD MAJORA EXPRESSlS, VEL POTIUS RESTRI~GENOA AD SIMILIA VEL AlINORA.
Six-
tinus, chap. 5, num éro 75; Boërius, décis. 50, numéro 13; Dumoulin,
• traité des fiefs, art. 1, gl. 5, verbo le fief, uuméro 53.
d'autoriser leurs erreurs par le moindre texte, la mo indre doctrine, la moindre
lumière, et de croire que leur affirmation dût suffire pour anéantir des doctri oes
aussi viei lles que l'époque où elles remontent.
La tranchante affirmation du mémoire des pêcheurs est donc suffisamment
démontrée fausse, inexacte, erronée, par l' exposition des principes.
Elle va maintenant l' être hi en davantage, si on la rapproche des faits, et Si
on interroge l'histoire.
Achevons enfin notre démonstration par l'application d' un dernier principe
Les archevêques d' Arl es, transformés si gra tuitement ell souverains, on! tou-
qui gouveJne toute cette matière, et qui domine les droits l'égaliens. Il est admis
jours fait hommage aux comtes de Provence et aux rois de France, successeurs
universeltement sur ce point, que, quelque étendus qu'i ls soien t, celu i qui le;
des empereurs d'A llemagne, comme à leurs souverains.
Les détails qui vont suivre son t pris dans uue notice que M, le préfet du
concède, retient toujours la souveraineté; et encore, que les droits non spécialement expliqués n' y sont jamais compris.
Le journal des audiences, année 17Hl" t 7, p. 334, résume cette doctrine
d'Arles, Voici celle notice:
en des termes trop précis pour ne pas les rapporter ici. Il dit:
«
Cour des comptes d'Aix et archevêché d'Arles.
• C'est une meumme certaine, en matière de concession de droits !'éga/ùms ,
" que quelque grâce, quelque largesse gue le souverain {asse à un de ses vassaux ,
«
Dans les archives de l'ancienne cour des comptes de Provence, on tl'ouve
" plusieurs hommages collectifs des archevêques, évêq ues et prélats de la
LES DROITS DE LA SOUVERAINETÉ, dont il ne
" province, faits aux comtes qu'ils reconnaissaient pour leur seigneurs et souve-
U
IL BEnEST TOUJOURS LE CARACTÈRE
ET
• peut jamais se dépouiller, et il conserve un droit plus fort et plus éminent 'lue
,
département a fait rédi ger ct tran smettre, il y a peu de temps, à M. le maire
( rains.
0
�38
f
39
Le plus ancien de ces hommages est de 1238. InMpendamment de ces
« hommages co llectifs, il ex iste plusieurs hommages prêtés par l'arch e v~que
d'Arles, que nou s allons énumérer.
3° Octohre 1560. Leltres patentes de François Il, par lesquelles le roi de
»
France déclare conserver le cardinal de Lenoncourt, archevêque d'A rl es dans
1° .. de calend. de novemhre 1250, hommage de l'archevêque fait au
« comte de Provence (Charles 1er ).
les terres, seigneuries ct châteaux de Salon de Crau, St-Chamas, Trinqlletaille,
a
«
a
Yeire, Mornas et plusieurs autl'es châteaux dépendants duditarchevêché d' Arles,
« 3° .\. nov. 1280. -
dans les droits, privilèges, fran chises, j'ibertés et exemptions octroyées par les
(eus empereurs, comtes de Provence et IWS prédécesseurs 1'ois de France successivement.
2° 1274. - Hommage fait au comte Charles Il, pour les terres et seigneu.
• ries possédées par l'archevêq ue. »
«
Mai llane, Fourques, le Yernègues, Avalon, Dorin, Mont··Dragon, Grans, Castel-
Autre hommage rendu par le même archevêque pour
les terres et seigneuries qu'il possède au nom de l' église d'A rles.•
el
• .\. 0 120cto. f 306. - Deux hommages rendus par le même archevêque.»
• 5° 13 aoOt 1319. - Hommage rendu par l'archevêque de tout ce qu'il
• possède au nom de l' égli se d'Arles. »
« 6° 8 mars 1324. -
«
Pareil hommage faiL au roi Robert. »
n'appuye et que tout confond .. . . A un certain point de démonstration la
vérité n'a plus besoin de lumi ère,. Que pourrait-on ajouler à la clarlé du jour ,
«
7° 22 mai 1342. - Hommage fait au roi Robert et à ses descendants.
u
8° 25 janvier 1550. - Hommage fail pal' l'archevêqu e d' Arles au roi de
France des biens et seigneuries dépendantes de son archevêché.
Arrêtons-nous. - C'est assez triomph er d' un e assertion téméraire, que rien
»
»
Plaisante souveraineté, que celle qui se perd so us des dehors si humbles'! 1 Il
faut avoir l'oeil bien fin , disons mieux, l' oeil bi en prévenu , pour l' y Mcouvrir! ! '
quand le soleil l'illumine de ses feux ?
Faisons un pas de plus et prouvons que les archevêques d'Arles ne furent, par
ces diverses charles, qu'investis d' un simple bélléficeecclésiastique, ou soit d' un
fi ef, dont ils purent dispose r cn tout ou en partie, et dont ils disposèrent légitim ement.
Voici maintenant de nouveaux actes, qui montrent encore sur les archevêques
d' Arles le pouvoir souverain en pleine vigueur dans les main s des souverains
réels auxquels ils étaient soumis.
1° 17 décembre 1322. Commission du roi Robert à deux de ses officiers ,
pour exam in er la requête de Gall iard , archevêque d'A rles, qui demandait que
sa monna ie eu t cours en Provence et voulait justifier pardevant le commissaire
du roi qu' il ava it droit de la fai re battre.
2° 3 juin 1386. Assignation faite par la reine Marieà l' évêq ue de Gênes,
de 300 florins pal' mois de pension, jusq lJes à ce qu'il soit paisible possesseur de
l'archevêché d'Arles.
II. En se rap portant aux termes mêmes des chartes de 920, 11 H, 1212 et
suiv., on demeure convaincu que les empereurs d' Allemagne, par ces actes,
reconnaissaient ou conféraient sous certaine~ conditions, aux archevêques d'Arles
des droits réels sur des terres, des propriétés, des pêcheri es, des domaines.
détaillés avec soin, et en outre la perception de certains droits uliles que nous
avons défini s un à un , et qui étaient à percevoir soit sur les choses, soit des
persounes.
Or c'était là uu fief, ou soit un bénéfice ecclésiastiqu e qui était créé, constitué
ct établi. Ce n'é tait pas, on ra vu, une souveraineté qui étai t fond ée; c'était tout
�40
simplement, ce que d'après le! lois et les usages et le droit public Je l'époquto',
les sOllveraios
réa li s~ i e nt
chaque jour, soit dans l'ordre civil, soit dans l'ordre
ecclésiastique. L'histoire a ainsi qualifié ces actes.
On nommait bénéfices les fi efs ecclésiastiques. C'est par celle dénomination
caractéris tique, que Pierre Saxi , l'historien des prélats d' Arle~ , désigne les
chartes des empereurs germaniques en faveur des archevêques d'Arles. Il dit
qu'en 1 178 l'empere ur Frédéric confirma les BÉNÉFICES accordés par l'empereur
Coorad à l' église d'Arles: stata deinda et firma esse sancivit CONRADI BENEFICIA
( Pontificium ,\relatense, p. 237, - édit. de 1620 ).
41
• dochiis quœ per diversos comilatus esse videntur, ut regalia sint, et quicumque
« ea habere voluel'it, ]ler BENEFIClVM domini regis habeat ».
La déclaration du roi de 1725 (Héricourt, L
Il,
p. 237), dit également:
• ceux de nos sujets qui seront, à l'avenir pourvus d'archevêchés , évêchés,
• seront tenus de nous faire, les foi et hommage qu'ils nous devront pOlir
" raison des terres, FIEPS et seigneuries dépendantes de LEURS BÉNÉFICES ... .. "
Pour prévenir toute confusion sur le point qui nous occupe, il suffit seulement
de distinguer dans le bénéfice ecclésiastique l'office, de la tempomlilé.
Tous les juriconsultes qui se so ot occupés des matières ecclésiastiques, pro-
L' office, c'est la charge; c'est ce qui a pour objet l' exercice de l'autorité ecclésiastique.
clament comme une vérité historique que les bénéfices ecclésiastiques sont de
La temporalité, ce sont les biens lem]101'els et les revenus temporels des évê-
véritables fi efs, soumi s à toutes les lois des fi efs "
Selon Montesquieu, liv. 30, chap. 15. Esprit des lois, les mots bénéfice et fief
«
sont synonymes.
«
des biens fiscaux , DES BÉNÉFICES, des honneurs, DES FŒPS, dans les divers auteurs et dans les divers temps. »
«
«
Les biens réservés pour les leud es, dit-il, furent appelés
Au li vre 31, chap. ·15, le même écrivain ajoute:
u
chés et des abbayes, (M. de Pastoret, ordonn. du roi de France, t.
73l\, not. D. ).
XVIII,
p.
C'est sur cette partie seulement du bénéfice que porte l'assimilation complète
r~it e par les lois et par les auteurs entre le fief et le bénéfice.
Il faut remarqu er qu e
• les fiefs ayant été changés en biens d' égli se, et les bi ens d'église ayant été
Cela posé. il est hors de doute que le droit transféré aux archevêques d'A rles
• changés en fiefs , les fiefs et les biens d'église prirent réciproquement quelque
sur leur fief, a été un véritable droit de propriété, et que ceux-ci ont pu en
disposer.
«
chose de la nature de l'un et de l' autre. Ainsi les biens d' église eurent les
• privilèges des fiefs , et les fiefs eQrcnt les privilèges des biens d'églisto'.
Ici revient cette vérité déjà exposée par nous, à savoir que les fiefs ont été,
Vu capitulaire de Charlemagne de l'an 793 est formel à cet éga rd. Par ce
dès l'origine, patrimoniaux, héréditaires, la propriété absolu e de ceux à qui ils
ca pitulaire ( Baluze, t. ·1 , p. 259, an 793, chap. 5) Charlemagne ordonne qu e
avaien t été co ncédés; que ceux-ci ont pu eu détacher, vendre et aliéner une
les différentes églises qui sont dan s le district des comtés seront régaliennes et
pa rti e, et que les archevêques d' Arles out eu le mêm e droit que les autres pos-
. qu'on ne pourra les posséder qu'en BhÉFICE royal:
«
De monasteriis et œeno-
?essellrs de fi efs.
Le mémoire des pêcheurs n'ose pas nier çeUe yérité. Il tente seulement de
. Vorez les mémoires du clergé de France el les rapports de J' Agtflct, f9 "01. in-rolio, notamme nt le rapport d,e I~A,ence de t780 ju sque!J en t7e" p. :I V à CCLXXV des pièces j ustificat ives, CI la MCense des droit s
du f Ol (t (85) s ur cett e question: Lu tccli.iudiquu doillmt-its à .a majt' U lo roi et hommag,? f v. in •• Pari s 118S
l' affaiblir en faisa nt remarquer que si, d'après M. Guizot , les fi efs ont été héréditaires ct transmissibles, dès l'origine; d'a près Montesquieu, Robertson el
�42
Mably, ils ne le son t deve nus que par le trait du temps, et comm e par un développement successif du droit qui les a régis.
Va ine observa ti on! Sa ns portée dans la ca use et que qu elques court es ré flexions feront à tout jamais écar ter.
eu une époque où les fiefs son t del'enus patrimaniaucv et héréditaires.
Montesquieu le dit plusieu rs fois avec énergie. Il établit d'a bord la perpétuit é
définitive des fiefs aux cbapi tres 29 et 30 du li \'re 3 1 de l' Esprit des lois.
Puis au chapitre 33, in titulé: quelques conséquences de la perpétuité des fiefs, il
BIE~TOT LES FIEFS PU REXT E T RE TRA NSPORTES AUX ETRANGERS COMME UN
« BlE~ PAT RIMONI AL.
patrimoniaux et héréditaires plustôt dans le premier de ces pays, que dans le
second . Montesquieu le dit form ellement au chap. 30 du liv. 31. Robertson ,
histoire de Charles-Quint, t. 2, p. 67, le dit aussi.
Robertson fixe avec précision l' époque où, selon lui , ils le so nt devenus en
D'abord tous ces auteurs sont d'accord et unanimes sur ce point , qu' il y a
ajoute: ((
43
Cela fit naUre le dToit de lods et ventes , établi dans presque
France et en Allemagne. Pour la France, il dit, p. 55, d'après Mabl y, que c'est
Louis-le-Débonnaire , qui le premier les rend it héréditaires. Et Mably, cité par
lui , nous apprend, t. l, p, 429 de ses observations sur l'histoire de France, que
c' est en 8 15 , 832, 836 , 839, que Louis-le-Débonnaire le fi t. Les preuves qu'il
en donne sont décisi yeso On peu t les voir.
Pour l'A llemagne, Robertson, t. 2, p. 67, fixe à Conrad
Il
et en l'an née 1 02~ ,
l' époque de l' hérédité des fiefs.
tout k l'oyaume. • Et au dern ier chapitre de l' Esprit des lois, le 34.°, il termi ne par ces mots décisi fs: (( Qua nd les fi efs étaient am ov ib les ou à vie, ils
les mêmes résultats pour la France et pnur l'Allemagne. Pour ce pays, c'est à
(( n'appartenaient guères qu' aux lois politiqu es. C'es t pOUl' cela que dans les
Comad et à l' année 102 4 qu'il vo it le commencement de l'hérédité des fie fs. Pour
(( lois civiles de ces temps-là, il est Ca it si peu de ment.ion des loi s des fi efs. Mais
la France, c'es t à Charles-le-C hauve, qui a com mencé de régner en 84·0 et qui
" lorsqu'ils devinrent héréditaires, qu'ils purent se donner, se vendre, se léguer,
est mo rt en 877. Ell e se conti nue sous Charles-le-Simple ( 898). Elle s'achève
«
« ils
appartillrent et aucv lois politiques et aucv lois civiles. Le fie f, co nsid éré
" comme une obligation au serv ice mi litaire tenait au droi t politique; considéré
«
comme un genre de bien qui éta.it dans le commerce , il tenait au droit ci vil ;
" cela donna naissance aux lois civiles
SUI'
les fie fs...
Montesquieu ( IiI'. 31 , ch. 30 ) établit aussi le même point d'histoire. Il fixe
sous Hugues-Capet (89ï).
~l a bl y,
observations sur l' histoire de France, t. 2, p. 218, dit également que
pour l' Allemagne c'est à Conrad II , et en 1024, que l'hérédité commence et
peu ùe temps avant Frédéric 1er qn' elle devient définiti ve.
En second lieu ces auteurs ne diffè rent de l' opinion de M. Gui zo t . qu e sur le
Peu importe donc qu' on adopte le système de M. Gui z9t, ou celui des trois
point de savoir si dès l'origin e, il en a été ainsi ; et celte di ffé rence est ici sa ns
autres auteurs. Ils conviennent tous de l'époque où les fi efs so nt devenus pa tri-
importaoce et sa ns intérêt , parce qu e tous ils fi xent l' époqu e de l' hérédité et dc
moniaux et héréditaires. Les actes d'aliénation , consentis par les archevêqu es
la patrimonialité des fiefs, à une époq ue de beaucoup antérieure à ce lle où les
d' Arles aux com tes de Provcnce, touchant les pêcheries de Martigues, so nt
archevêques d' Arles ont alié,né et tra nsporté aux com tes de Provence, les pêcheries de Martigues.
interl' enus à un époque postérieure à celle où les fiefs étaient pa trimon iaux; ils
Voici en effet leur opinion
SUI'
cette époq ue.
On a distingué su~ ce poin t la France de l'A ll emagne. Les fiefs sont de yen us
se sont réalisés SOU Bl' empire de la loi qui les réputait et les considérai t comme
tels.
Peu im porterait que l' on voulut distinguer ici les bénéfices civil$, des bénéfices
�44
45
ecclésiastique. La perpétuit é et l' hérédité e t la patrimonialité se pouvait trou l'el'
du Roi; que par suite elle n'a pas é té transmise par les comtes de Provence aux
dans les uns com me dans les autres.
au teurs de M. de Ga ll ifTel.
L'archevêché d' Arles, ou soit la temporalité, constituait un établissement public ,
ayant des représenlants successifs dans la personne des archevêques, capab le
L'erreur est tellement sa illante, qu'i l n'est pas possible de rester de bonne
foi, en présentant celle objection.
de posséder, de recevoir et de transmettre. C'est encore le principe admis de
Voyons d'abord ce qui concerne le testamen t de 1 ~8 '1 et sa portée.
nos jours et par nos lois. On le voi t clairement par la loi du 2 janvier 1817 et
Les termes en ont été rapport és par nous, p. 2~ du mémoire de 18~9 . Il en
par l'ordonnance d u 2 avril même année. Aussi l'auteur du traité de l'adminis-
résulte que le comte de Provence a légué à son cousinllu Luxembourg la vicomté
tration du cu lte catholique, M. Vui llerroy, mattre des requêtes au conseil d'État ,
de Martigues, avec tout ce qui la compose sans en rien excepter, sous quelque
à la p.
26~, V O
évêché, . existence civile, dit-il avec bea ucoup de sens:
nom que ces choses soiellt comprises, de quelque manière qu'elles s' y rattachellt .
• L' évêché, ou le titre ecclésiastique institué pour le gouvernement du dio-
Voila la traduction lillérale des termes que nous avous so ulignés dans la ci lation .
cèse a une existence distincte du diocèse et qui lui est propre; il est re-
Cela posé, il ne s'agit plus que de savoir si la bourdigue du Roi était ou non
« conuu par la loi; il constitu e en co nséqu ence un établissement public, apt e
à l'époq ue du testament, une dépendance de la vicomté de Martigues, et si
«
elle étai t au nombre des propriétés qui y étaient jointes.
«
à recevoir par legs et donations, à acquérir et à posséder tou te sorte de
«
biens meubles et immeubles ". . . .
Sur ce point les actes ne laissent pas le moindre doute.
" L' évêché est représen té par les évêques successifs. "
Le comte de Prov ence l'a vait acquise de l'arche\'êché d'Arles par racle du 28
Or ce qui est vrai encore aujourd' hui. sur cette matière , l' é lait à plus forte
juillet 1292. Il l'avait dès celle époque jointe à son domain e (V. racle au dossier).
Le 15 octobre 1331, une information est prise, d'ordre du comte de Pro-
raison autrefois où l'existence des bénéfices ecclésiastiqu es était dans toule sa
vence, et ULle enquê le esl reçue par le magislrat délégué par l'auloril é com-
force et son efficacité.
pétente, celle du comte, pour constater les droits de ce dernier sur la bordigue
du Roi, super facto
PISCARtAl NOSTRI REGIS,
porte le préa mbule de l'information .
De nombreux témoins sont en tendus sur \' origine de cetl e bourd igll e, sa con-
§ Il.
sistance, sur ses li mites, et sur les droits et les pri vilèges qui y so nt a ttachés:
RÉPONSE A LA DE UXIÉME OBJECTION.
L'objection consiste à dire que le testament de 1 48 1 , l'arrêt de 25 septembre
1568 du parlement de Paris, les leUres patentes de juillet 1580, l'arrêt du conseil etl'édit de 1668 ,' et les lettres patentes de 1719 sc taisent sur la bourdigu e
«
Ut informavÜ ipsum inquis-itorem diligenter de
«
«
domini l'egis et comitis /lllbet in dictâ tllSulâ sallcti Genesii, in quibu$ consistit,
qualiter confrontatuT et limitatur , ae omnibus juribus CIe pertinentiis ac
«
privilegiis ipsius
PISCAn"'l.
PISCARIA
qllam cUl'ia prœ fati
»
L' information est prise et de nombrenx témoins attestent la propri été en la
possession du comte (V.
r ex trait des registres de la cour Il es comtes ).
�46
Enfi n le 1 ~ mai 1 ~ 67, le comte de Pro\'ence nomme des commissaires
47
pOU7'
la conservation de son grand bo~rdigue ( V, l'arrêt dll conseil d'État de 1790,
p, 12 de l'exemplaire imprimé, )
désigne par une clause générale tout ce qu'on pourrait avoir négligé de noul'eau
par son nom propre et particulier,
S' il s'agissait d' une l'ente ou d' un legs ordinaire, trouverait-on ùans ces term es
Et ainsi on arri ve à 1 ~8 1 , en voyant la bourdigue du Roi , dans les main s du
si fortem ent répétés, une omission de la bourdigue du Roi ? Ne ùirait-on pas
comte de Provence, partie intégrante de ses possesions du Martigues, sans
avec raison qu e la volonté de tout transporter est trop claire , pour la révoquer
jamais en être séparé: et c'est en cet éta t qu'jllègue à Lu xembourg tout ce qu i
en doute? Enfin u'appliquerait-on pas la maxime que celui qui dit TOUT n'ex-
compose sa vicom té ou ce qui y est attaché,
cepte RIEN?
Qui pourrait douter qu'elle y fut comprise?
II en doit être de même ici, puisqu'il ne s'agit qu e des règles ordinaires du
Peu importe que J ans l' énumératio n détaillée des biens qui sont des dépendances de la vicomté, on ne rencontre pas le mot de bourJigue, Il n'en est pas
droit civil , qui régissent le testament de 1 ~8 1 , comme celui d' un si mple particulier,
moins \Tai que l' acte transporte:" Vice comi/atum martici cum OMNIBUS JURlBUS,
« D01U~US, PROP RIETATI DOS, REDDITID US, PRO"ENTIB US AC EMOLUME NTI S. ))
-II n' en
est pas moins vra i encore que l'acte transporte la vicomté: " cum montibus ,
" planis , sylvis, nemoribus, garriguis , pratis, pascuis, devesùs et vetati$ , _
" n'eu est pas moins vrai encore que l' acte transporte la vicomté: "
cùm AQUIS,
Ce n'est pas d'a illeurs le testament seul de 1.\.81 , qui nous fournit cetle preu,e:
les actes des rois de France, institués béritiers du comte de Provence, par le
même Litre qui renfermait le legs de la vi comté du Martigues en faveur ùe Lu-
" aqllœdllctibus, molendinis , {umis et ALIIS universis et siugulis 1'ebus et bonis
xembourg, vont nous en fournir un e nouvelle et fai re faire
" ad dictum vice com'Îtatum perlinenlibus , et spectantibus, ac pe1'tinere seu spec" tare potentibus et debentibusmodo quocumqueet m tione quâcumque seu causâ, -
notre démonstration,
Il n'en est pas moins vrai enfi n que pour ne rie n omettre et tout enchasser,
Lu xembourg la poss'lSsion de son legs J e la vicomté du Ma l,tigues; qu' il pré-
l'acte ajoute que le legs comprend, dans sa Jisposition , la vicomté avec ce qui
tendit qu e c'était là un ensemble de biens et de terres non aliénables; qu' il s'eD
la compose de quelque nom que la chose soit appelée: " DEMUM GENERALITER
mit en possession , en dépouillant Luxembourg ; qu e ce derni er lutta longtemps
" cum omnibus et singulis juribus REALlnus et p€rsonalibus, et ALlIS quibuscumque ,
" QUAlCUMQUE et QUALIACUMQUE, SINT, et QUOCUMQUE NOMINE, "
contre celle prétention ; qu'il souti'nt qu ' il n' y 31'ait rien d'a près la loi proven çal e d' inali énable dans ce legs, et qu'e nfin justice fut rendlte à Lu xembourg,
Dans celle longue énumération , qui n'est pas limitati ve et qui ne sert au
lequ el fut définitiv ement réintégré dans sa propriété de la vicomté et de tout es
contraire que comme démonstration , rien
0 ' est
donc excepté: plusieurs énon-
Ul]
pas de plus à
On sai t qu e le roi (le France, hériti er du comte de Prol'ence, con tes ta à
ses dépendances, par l' arrêt du parlement de Pa ris de I 568,
C'est pendant l' époque intermédiaire J e la jouissa nce des rois de France, que
ciations même peuvent s'appliquer directement aux bourdigues, telles qu e cellesCI r.UM AQU IS, , , , • ,
se place la preuve dont M, de Ga ll iffet se prévaut. Les rois de France fi rent
Enfin , com me si par prév isiou , l' obj ection actuelle avait été entrev ue on y
procéder , durant leur possession , à des in ventaires détaillés de tout ce qu i
�48
49
composait la \'icomté de Martigues; et ou (rou ve dans ce détail, par deux fois,
et a,ec une exactitude rigoureuse l'énumération de la bourdigue du Roi, et de
quelques autres, nttachées, comme celle-ci, à la vicomté.
EN LA MER ET EAU,
à titre onéreux , consentie, en 1550, par le roi de France de la vicomté, au
profit du duc d'Astri et de sa femme. Pour s'assurer, le cas de restitution arrivant, que le concessionnaire opèrerait une réintégration entière de la chose,
la précaution de l'inventaire fut prise; et c'est là que l'on voit, avec une scru-
PESQIJERIES,
racle en ajoute une seconde :
« Ce fait, continue-I-il, le procureur du roi nous a requis de "ouloir faire
«
Cela fut fait , notamment, à l'occasion de la concession révocable, viagère et
et sous ceux-ci des
visite, estime et évaluer les maisons et bâtimenls, tant de l'auditoire royal
que le roi vicomte
" tient et possede audit t'icomté, desquels ' ensemble des droits que ledit sire
" et château de Ferrière,
QVE DES DOURDIGUES ET PÊCHERIES
«
prend aux villes et lieux d'icelle, et bailler inventaire, afin que rien ne dé-
«
périsse et que le lout soit bien entretenu et gardé par iceux duc et duchesse ,
" duquel inventaire la teneur s'ensuit. »
puleuse exactitude de quoi se composait la vicomté de Martigues, qu'elle n'éEnfin la troisième et dernière désignation la plus détaillée et la plus complète
tait pas un titre purement honorifique, mais qu'elle embrassait une réalité de
biens, de terres, de bouniigues, qui en faisaient une immense et belle pro-
est celle que contient l'inventaire : cet acte s'explique en ces termes :
priété.
lnventaire des maisons, bâtiments, etlou5 au/res dl'OilS, que le roi a et pos• sède en sa vicomté de Martigues ...... .
«
Le p~ocès-verbal de l'opération de 1550 constate d'abord la mise en posses-
«
sion du concessionnaire, en v<!rtu du mandement des maîtres-rationaux. Et
c'est là d'abord qu'il est question une première fois des bourdigues de la vicomté.
L'acte le dit par les termes suivallts, par lesquels le magistrat, délégué par celte
mise en possession, rend compte de ce qu'il a fait:
« Nous sommes partis dudit Berre, et transportés en la ville de l'isle de Mar-
«
et basse juridiction, censes et levées tant en blé qu'en argen!. .....
«
" Item auprez de Jonquière , UNE Pf;CHERlE DITE LE GRAND BOURDIGUE avec sa maison et l'imites, dans lesquelles personne n'ose pécher, hormis
le l'oi et ses {ermiers:
«
• tigues avec ledi t archil"aire, pour et aux fins de continuer ct achever l'exécu• tion denotrecommission; en laquelle ville sommes arrivés, et après leu l' avoir
«
( aux consuls de Marti gues) fait entendre la teneur de ma commission, avons
" mis le procureur desdits duc et duchesse en possess'ion de ladite vicomté, ju-
" ridiction, ensemble de tous d-roits pril1cipauœ et accessoires de ladite vicomte du
• Martigues, ses appartenances et dépendances, TANT EN LA MER ET EAU
u
que des droits à la terre; c'est à savoir: DES PESQUERIES, censes, servi-
« ces, lots, ventes et autres droits appartenant au roi vi comte, non réservés,
«
ni exceptés au dictum et appointemellt fait en la chambre des comptes . ....
Après cetle première désigllation des bourdigues, faite sous le nom
0)
DES DROITS
En premier, en ladite ville de l'Isle et lieu de Ferrière, haute , moyenne
«
Item,
«
Item, ulle bourdigue qu'on appelle du Passage avec sa maison et limites ,
lm
huitième Olt bourdigou d' Engassie'l' ;
« dedans laquelle nulle personne n'ose pêcher hormis le roi ou ses fermiers et
" sa ns qu'aucune barque y puisse demeurer pour y prendre part, mais seu(, lement passer et pour ce a été nommé la bourdigu,e du passage;
It em, une bourdigue que l'on appelle Dommm'gai avec sa maison et limitEli
et dans laqu elle aucun n'ose pêcher, hormis le roi, ses fermiers ou emphytéo tes. »
«
«
«
Et c'est ainsi que celle procédure meL en évidence et en lumière la boul'digue
du Roi eL les autres, comme inhérentes à la vicomté de Martigues.
�•
50
51
Continuera-t-on à dire que celles-ci et les autres ne furent pas comprises dans
le legs de la vicom té fait à Luxem bourg? Ce n'est plus possible.
Si le concessionnai re viager, révocable , momentané, à qui il avait plu au'
de la buurdigue, qui le transporte et le fasse arriver dans le'JrS mains; Il faut
donc reconnaltre que dans tous les temps, la vérilé en ce moment exposée a élé
admise: et qu'enlever au testament de 14-81 la portée que nous lui donnons ,
roi de France, de faire cession de la vicomté de Martigues, a joui des bour-
0' est
rendre inex plicable et incompréhensible la possession, et la conservation
digues, comme en é tant une dépendance; comment le léga taire véritable,
sur la tête des auteurs de M. de Galliffet de cette propriété, et encore plus inex-
Luxembourg, investi par le testament de 1.\.81, o' en aurait-il pas joui au même
plicables et incompréhensibles les triomphes obtenus en force de ce titre en
titre? Le roi de France n' avait 'rien ajouté, ni distrait de la vicomté? Elle é tait
1568 , en 1781 et 1790.
sur sa tête ce que le comte de Provence l'a vait faite; elle fut donc sur celle de
Luxembourg ce qu'elle avait é té d'abor<l dans les mains du comte, puis dans
celles du roi , puis dans celles du co ncessionnaire viager.
Enfin , lorsque l'arrêt du parlement de Paris , du 25 septembre 1568 ,
ordonna la restitution au profit de Luxembourg de la vicomté rie Martigues, il
Est-il nécessaire maintenant de suivre l'obj ection des pêcheurs dans sa seconde
partie? Que dit-on quand on répète pour l' a rrêt de 1568, les lettres-patentes
de 1580, celles de 17 '19 etl' édit de 1668, ce qu'on a dit du testament de 1.\.8 ,1 ?
Rien de sérieux, ni de raisonnable; c'est un vrai non sens.
sans limites. L'arrêt effa ça la possession interm édiaire ,
L' a'Têt de 1568 avait à prononcer sur la question de la réintégration géné-
et le testament de 1.\.81 fut maintenu dans toute sa force et valeur. Voici les
rale de Luxembourg dans la propriété de la vicomté de Marti€;ues. C'était uu
termes de son dispositif: (( No tre dite cour a condamné et condamne notre dit
tout qu'i l revendiquait, L'arrêt n'avait pas à s'occ,!per par une dispos ition spé-
(( procureur généml à {aire audit de Luxembourg réelle et actuelle délivrance du
cia le d' un détail isolé.
r ordonna entièrement,
ft
vicomté de Martigues et ses appm·tenances , poor en fouir par lui doresnarant
(( comme de sa chose, et sans restitution de fruits pour le passé. »
Nous en disons aulant des leltres.pa ten tes.
Quant 'à l' éd it de 1668 et à l' a rrê t du conseil de cette époque, c'est bien
plus encore évident. C'était une loi généra le, rend ue par le souverain, pour
'S' il fallail à tont ce qui précède une troisième preuve, nous la tirerion s encore
de la possession de la bourdig ue du Roi , dans laqu elle Luxembourg d'abord ,
puis ses successeurs immédiats, puis enfin MM, de Galliffet, leurs représentants
actuels , ont toujours été maintenns et da ns
l a qu ~lIe
ils sont encore. Celte pos-
session ne leur est venue que du tes tament de 1.\.81 . C'est lui qui a amené
1arrêt de 1568: c'est lui encore qui a servi de fond eme nt a ux ventes successives qui en ont été faites; c'est lui enfin qui a toujours fai t triompher les propriétaires de celte bourdigue de loutes les difficnltés, à div erses époques ,
suscitées contre eux. On ne voit pas après ce titre de 1 ~8 1 , de titre acquisit;r
fix er le principe provençal en matière d'a liéna lion <l es biens de la couronne: Cet
édit devait maintenir en possession, dans toute la Provence, , ceux qui avaient
achelé, posséd é ou prescrit des biens ayant autrefois appartenu aulL comtes
de Provence. Il interv enait sur les réclamations de la noblesse ,de · Provence.
N'est-i l pas absurde, diso ns le mot, qu 'on 'Y demande et qu'on veuille y trouver
une disposition spéciale pour la bou rd ig ue du roi? Une loi régil el embrasse
tout ; et l'éd it de 1668, qui est une loi déclarative du droit provençal préexis· lant à la réunioc de la Provence à la France, ne iaurait être éludé par une
, auss(puérile objection.
�52
53
Fixons d'abord, comme point historique, celle vérité universellen;ent admis\',
à savoir: qu'avant 1566 et l'édit de cette année, on a tenu ' en France, en
§ III.
Provence et ai lleurs le domaine de la couronne comme aliénable.
Empruntons pour cela l'autorité la plus haute , celle d' un grand publiciste,
nÉPONSE A LA TROISIÈME OBJECTION.
celle de Montesquieu, Esprit des lois, liv. 31, chapitre 7, qui juge cette question avec la supériorité et le laconisme d'une intelligence à qui rien n'a manqué,
ni la lumière, ni l'étendue.
Cette troisième objection, à laquelle il faut maintenant répondre, roule sur
Dans ce chapitre intitulé: des grands offices et des fiefs sous les maires du
palais, il dit:
" J'ai des réflexions particulières à faire sur les fiefs. Je ne puis douter que,
l'inaliénabilité prétendue dl] domaine de la couronne, avant l'édit de 1566.
A cet égard, le mémoire des pêcheurs renferme des propositions étranges,
« dès ce tem ps-là, la plupart n'eussent été rendus héréditaires.
qui s'éloignent des opinions universellement ,admises, et de la législation actuelle;
« Dans le traité d' Andeli , Gontran et son ne\'eu Child ebert, s'obligent de
et ce n'est pas la moins téméraire de leurs prétentions. Ils veulent aujourd'hui
• maintenir I.. s libéralités faites aux leudes et aux églises par les rois, leurs pré-
changer ce que la voix des siècles publie,
" décesseurs ; et il est permis aux reynes, aux filles, aux veuves des rois, de
Selon eux, le domaine de la couronne aurait donc toujours été inaliénable ,
« dispo~er par testament et pour toujours des choses qu'elles tiennent du fisc.
« Marculfe écri\'ait ses formul es du temps des maires. On en voit plusieurs
avant l'édit de 1566, soit en France, soit en Provence.
où les rois donnent et à la personne et aux héritiers: el comme les formul es
Voici maintenant comment ils essayent de le prouver.
«
Ils disent d'abord que nous ne rapportons pas de monuments provençaux qui
" sont les images des actions ordinaires de la vie, elles prouvent que sur la
établissent le contraire pour la Provence, et ils en alléguent quelques-uns qu'ils
" fin de la première race, une partie des fiefs passait déjà aux héritiers. IL
I~ALII~
veulent transformer en preuve de leur proposition, Ils invoquent ensuite, pour
(f
s' EN
la France, quelques monuments du droit français desquels ils veu lent induire que
,«
N"ABLE; C' EST ONE CnOSE TRÈ S MODERNE ET QU'ON NE COI'(NAISSAIT ALORS NI DANS LA
même avant 1566, c'était le droit commun.
«( rntoRrE, NI DANS LA PRATIQUE.
Enfin , ils repoussent \' édit de 1668 , par nous invoqué, comme étant pos-
FALLAIT DIEN , QUR L'ON EUT 1 DANS CE TEMPS-LA, L'IDÉE D'UN DOMAINE
• 011 verra bientôt sur cela des preuves de fait: et siie montre lin temps où ill1e
térieur à 1566, et ne pouvant rien protéger, et les autorités et les faits par nous
• se Il'ouva plus de bénéfices
mis en avant, comme impuissauts à rien pronver.
" faudra biell couvenir que les anciens bénéfices avaient été aliénés. »
Nous allons les suivre sur chacune de ces objections, et l'on vérra bientÔt
leur pauvreté et leur misère.
POIlI'/' QI'rnée ,
ni aucun fonds pour son entretien, i/
D'autres auteurs, ont aussi posé et reproduit ce principe. Ce sont les jurisconsu lt es; et si leurs paroles n'ont plus l'éclat ni la hauteur de celles du grand
�55
esprit que nous venons de citer, elles n'en ont ni moins d 'e xactitude, ni moins
« inaliénabi lité, liv, '2, t. 1, commence- t-il par citer l'édit de 1566, comme
d' autorité.
Denizart, v· Domaine de la couronne,
« étant un des plus anciens qui l'ont reconnu.
§ 2, s'exprime sur ce point en ces
1(
Il serait difficile, rI'après des
autorités si respectables el si précieuses de soutenir que le domaine de la cou-
" l'onne a tOujOU1:S été inaliénable. »
termes:
• On se tromperait grossièrement, si l'oh regardait l'inaliénabi lité du do-
Merlin, ré pert. vo, Ina liénabilité.
§ 3. dit encore, énergiquement :
u
Il s'est
« mai ne comme une loi reçue de tous les temps en France et qui jamais n' é~
(' écoulé plusieurs siècles, pendant lesquels les chefs des, états s'en regardaient
« prouva d'atteinte. Les pre miers' volumes du recueil des ordonn. du Louvre,
«
« sont remplis de cbartes particulières de nos rois, qui accordent
à différentes
comme propr.iétaires et agissaient comme tels. Les monuments des deux pe" mières races de nos anciens rois nous offrent des preu.ues sans nombre que le
• villes et seigneuries le privilége de ne pouvoir être aliénées et distraites du
«
domaine de leur couronne s'aliénait alors avec la m~me liberté que le domaine
1(
domaine. Si le domaine eat été, en effet, inaliéna.ble, quel eat été r objet de
«
d'un simple citoyen; et l'on doit convenir qu'il y aurait autant de dureté que
«
ces cbartes et de ces priviléges ? Aussi les éditeurs de ces ordonnances
«
disent-ils form ellement dans une note insérée au tom. 1 , p. 665, sur une
(, d'impolitique à dépouiller aujourrI' hui, ou ce qui est la m~me chose, à regarder
" aujourd' hui comme de purs engagistes, les possesseurs d' hé"1Lages qu'on prolt-
• ordonnance de Philippe-le-Long, du 29 juillet 1318: Que sous les deux pre-
" t'erait avoir été aliénés ou inféodés par les descendants de Clovis et de Char-
« miè res races de nos rois, et mê me sous les premiers rois de la troisièmlt
/' '' lemagne.
l)
La législation moderne, qui nous régit, a elle aussI consacré ce princifJe et
« race, le domaine d e la couronne n'ètait pas inaMnable.
r inaliénabilité d'u domaine n'a pas été reçue sous
fixé à r édit de 1 56 6 r é poque où seule ~ commencé l'inalié nabilité du domaine
« les d e tlx pre mières races de nos rois, ni sous les premiers rois de la troisième ;
d e la couro,nn e. Dan s son système, les alié nations antérieures à l' édit sont inat-
• et quelque faveur que puissent mériter les lois qui r ont prescrite, on ne peut
taqua bles ; celles qui lui sont postérieures peuvent seules ê tre révoquées:
• Il est donc démontré que
L'a rticle 23 de la loi' du 1 6r d écembre 1 i90 , dit : « Tous contrats d 'e nga-
«
cependant se dissimuler que ces lois ne sont pas aussi anciennes que la mo-
u
narchie.
« gement des biens et droits domaniaux
• M. le cba ncelier d 'Aguesseau lui-mêm e, était loin de prétendre que ce do-
" sont suje ts à rachat perpétuel ; ceux d',une date antérieure n' y seront assu-
maine eilt toujours été inalié nable. Dans son mémoire, au sujet de la terre de
" jettis qu'autant qu' ils en cont iendront la clause expresse.
l(
te mps qui a précédé l'ordonnance faite à Moulins en 1566 , sur le domaine
« du roi ; un deuxième temps qui a suivi cette ordonnance. Dans le premier
« temps, on doutait encore si le domaine de la, couronne ne pouvait pas être
• valablement aliéné ,
«
Aussi Cbopin, da!)s son Traité du Domaine, se proposant de parler de son
l)
Et l'arlicle 211 ajoute: • Les ventes et aliénations des domaines nationaux
« Bréval , il dit formellement .qu' il faut distinguer deux temps: un premier
u
postérieurs à l'ordonnance de 1566 ,
,
P.OSTÉRIEVRRS
à l'ordonnance de 1566, seront réput ées simples engagements,
" et comme telles perpétuellement sujettes à rachat.
Et enfin la loi du 1 fi ventôse an
VlI ,
l)
sur la même matière, dans son article
1 er, l'a répé té en termes telle me nt précis et positifs, qu' il n'l'a plus moyen de
,le méconnaltre, Il port e :
�56
57
• Les aliéllations dll domaine de l'État, ccnsommées dans rallciell territoire
«
de la Frallce,
AYANT LA PUDLICATION DE L'ÉDIT DE PÉfRIER
" de retour, ni !'èserve de "achat,
1566, sans clause
DEMEURENT CONPIRlIlÉIIS ••••
Que penser mainteuant de la témérité des pêcheurs qui ont osé OIer ce
principe, enseigné par tous les auteurs et écrit dans nos lois , à chaque disposition que le législateur moderne a tracée? C' est un courage qll' il faut renoncer
à qualifier; c'est une iojure g rossière qu' ils veulent faire à leurs juges et à leurs
lecteurs. [[5 croient en fermant les yeux à la lumière, la dérober à tous et
l'éteindre. Aveugles \'olontaires, vous ne tromperez que vous-même! ! !
En second lieu, nous avons vu l'hérédité des fi efs s'étahlir et être admise
en France et en Allemagne. Les auteurs que nous avous cités en indiq'leut l' époqu e , le moment précis, Ils en conviennent tous. Or, qu' est-ce que l'hérédité
des fi efs, si ce n'est la preuve que les ali énations du domaine étaient légales,
permises, autorisées? Celle hérédité existait en Provence, comme ailleurs.
No us en avons rapport é les preuves aux p. 71 et sui \'. du Mémoire de
18~9.
En troisième lieu, Merlin. au passage cité, ne dit-il pas , d'une manière généra le qu'il s'est écoulo? plusieurs siècles,
ÉTATS
durant lesquels
LES
CflEFS DBS
s'ell regardaient comme propliétaires et agissaien.t comme tels? Or, cela est
vrai, autant des chefs de l' Éta t dans le comté de Provence qu'ailleurs, Nous
avons cité, au Mémoire de
Maintenant ce principe vrai pour la France, ['est-il aussi pour la Provence ,
avant sa réunion 9
Nu l doute, répondrons-nous de suite, qu e le même principe qui avait, e n
'1 8~9,
p, 7 1 et su ivantes, les actes par lesquels les
so uverains de 'P;'ovence en a vaient aliéné des parties et des f" actions notables,
•
notamm en t le comté de Nice, la ville d'Avignon et la vicomté de Mm·tigues.
Impossible donc de douter que le même droit ne mt sui vi en Prov ence, qu e
dans la F rance.
France, fai t considérer avant 1566, les aliénations du domaine comme valables,
licites et régulières, ne fut aussi en plei ne vigueur dans le comté de Provence.
avant sa réunion à la France.
n ya
En "oi ci d'a ill eurs les mOl1uments législatifs provençaux, authentiques, qUI
prouvent ou qui montrent ce droit en plein exercice. Ceci est vraiment le d roi t
de cette vérité des preuves nombreuses , des documents provençaux
irrécusables, et des au torités inattaquables.
public de Provence en cette matière.
C' est d'abord l' acte de partage de l'an 11 25, entre Idelphon s, comte de
Des preuves nombreuses, disons-nous d'abord. Elles se tir.eni, en premier lieu ,
Toulouse, et Ra ymo nd , comte de Barcelonne; par lequ el ils promettent de
de ce que le système sur les fiefs fut universel en Europe; qu'on le voit en
n'alié ner, engager , ni hypothéqu er le comlé de Pro vence, si non en présence de
France, en Allemagne, en Italie, en Angleterre, avec le même caractère et
quatre parents ( V. le titre aux remontances de la noblesse, p . .\7).
les mêmes effets. Le souverain y fait partout des concessions, des aliénations,
C'est, en second lieu, le testament de Raymond Bérenger, com te de Provence
soit aux laïques, soit aux ecclésiastiques. C'est le li en de la vassalité qui s'établit;
de r an 1238, par leq uel il lèg ue plusieurs tm'res de son comté, fait une substi-
c'est le rapport nouveau de cette manière de gouverner et d'être, qui se forma
entre les rois et les peuples,
tution fideicommissaire aux enfants mâles de Béatrix, sa fille : permet aux
exécuteurs testamen taires de vendre de son domaine au(/) cas y eœprimés, et nc
�59
58
défend l'aliénation qu'à la comtesse, sa femme, des biens et domaines, desquels
•
il lui lègue r usufruit ( V. le titre aux remontr., p. 53).
e es t 3°,
Villeneuve, en l'année 1387, par la reine Marie; celle du golfe de St-Tropez,
l' éd it du roi Robert, comte de Provence de l'an 133~, par lequp.1
il déclare ledit com té lui être pall'imollial et héréditaire, et pour le maintenir
en cet état, mande à ses officiers de racheter tout ce qui aUTa été aliéné à temps
ou à faculté de rachat ( eod., p. 58 ).
C'est 4°, le testament du roi René, du 2'2 juillet i.\,7 <\., par lequel il Légue des
fiefs , il dispose, il substitue, comme chacun peut faire d'un bien duquel il est
libre propriétaire; et institue Charles d'Anjou, son neveu , à
r exclusion
de sa
propre fille, mariée au duc de Lorraine ( eod., p. 75).
C'est 5°, le testament de Charles d'Anjou, dernier comte de Provence, du
10 décembre 1'\'81, par lequel il lègue la vicomté du Martigues à François de
Luxembourg, son cousin; institue le roi de France Louis
XI,
Palières; la donation de la terre de Monts , faire "n faveur de la maison de
et après lui Mgr. le
faite à Gibelin de Grimalny, en l'année 980: enfin la concession des régales et
du mole sur la mer faite à l'abbaye de St-Victor par la reine Jeanne en 1364-.
Nous pourrions ajouter i\ ces exemples ceux de toutes les grandes terres de
Provence: la terre de Châteaurenard, donnée à Belle val ; celle de Meyrargues,
à Artaluche c\' Allagnnia et tant d'autres.
Jamais droit fut-i l donc plus réel, plus constamment pratiqué, plus solidement
é t~bli
?
Jamais droit puhlic provençal fut-il plus respecté sous l'ancienne législation
fran ç.aise? Nous avons rapporté, p. 78 du Mémoire de '11l ~9, la jurisprudence
dn consei l du roi qui a toujours jugé ces aliénations licit es, régulières, légales,
qui a toujours repoussé les communes qui les avaient attaquées.
Ponrquoi donc le mémoire des pêcheurs garde-t-il le silence sur tous ces
Dauphin et ses successeu~s rois de France, à r exclusion de sa propre sœur
points? Pourquoi raisonne-t-i l comme si tout cela n'existait pas? Est-ce de la
mariée dans la maison d'Armagnac, comme étant libre en la disposi tion de ses
sin cérité? N' e5t-ce pas de la passion? Et la plus vive et la plus obstinée?
états (eod. , pag. 88).
Toujours nier, ni er encore , nier sans cesse; voilà leur unique système.
C'est. 6°, le premier codicille de Chades d'Anjou, du 1'1 décembre 14-81, par.
lequel il dispose de diverses terres et objets ( eod., p. 100).
e est 7°, le deuxième codicille
de Charles d' Anjou, du même jour ( eod.,
p. 108).
Est-ce ainsi qu'on doit agir dans lIne lull e loya le? Et devrait-il se rencontrer
,les noms honorabl e~ pour couvrir tant de mauvaise foi ou tant de hardiesse?
Voudrait-on remonter à des actes plus relevés que ceux que nous avons rapportés, à des actes émanant des souverains d'Allemagne sur la Provence, pour
Ne sont-ce pas là des monuments publics du droit de disposition, touchant le
. v rechercher la justification du droit public provençal, sur le point qui nous oc-
domaine de la co uronne en Provence? Ces fiefs , ces terres, ces comtés, qui
cupe? L'épreuve serait encore victorieuse pour M. de Galliffet. - Voici deux
étaient ainsi aliénés, en vertu de quoi l'étaient-ils? En force du même principe
nouveaux documents qui le prouv ent.
qu' on a vu en ' vigueur dans la France jusqu'à l' édit de 1566. C'étaient des
L'investiture donnée, en l'an 1'162, par l' em pereur Frédéric à Raymond.
biens dont les comtes se dépouillaient, qui passaient sur la tête de ceux qui les
comte de Barcelonne, dn comté de Provence, fut faite sans y apposer aucune
acquirent , et qui ont été transmis jl!squ'à ce jour aux descendants de ceux qui
prohibitian d'aliéner. On peut en voir le texte entier, 1'emonU'ances, p. 50.
Les letlres de confi,'mation données à Raymond Bérenger, par l'empereur
les avaient ar.quis, Nous avons dEijà vu, à la p. 76 du mémoire de 184-9 , la
vente faite parle roi René , en 44-72, à d'Arcu;sia, de la terre d' Esparron de
�60
61
Frédéric 11, en l'année 1226, ne lui imposent pas davantage cette prohibit ion. Elles
lui permettent au contrai re de le posséder de même façon que ses prédécesseurs.
De quelque côté donc qu'on jelle les yeux, on voit le droit public de Provence conforme à celui de la France, touchant l' aliénation du domaine de la
couronne.
• L'a nci en gouvernement, dit-il au répert. v·, inaliénabi lité, p. 756, a
«
toujours consid éré comme aliénés irrévocablement tous les bi ens domaniaux
«
si tués dans les provinces, qui au moment de leur aliénation, n'étaient pas
«
réunies à la cou ronne, et n'avaient pas encore de lois positi ves qui décla-
«
rassent ces biens inaliénables.
«
Nous ajoutons maintenant, en présence de tous ces documents, que les lois
du 1er décembre 1790 et celle du 14 ventOse an
VII,
sur l'alié na~ion des do-
maines, que nous avons déjà citées et rapportées, ont érigé en droit, donné
force de loi à ces anciens monuments du droit public prov ença l.
L'article 37 de la premi ère de ces lois porte en effet : « Les disposition s
, comprises au présent décret ne seron t exécutées à l'éga rd des prov inces rél!-
Nos lois nou velles n'ont point dérogé à cette jurisprudence , ell es J'ont au
• contraire maintenue de la manière la plus expresse.
Il cite à ce propos les articles 37 ci e la loi du 1e r décembre 1790 et 2 de celle
du 1 .. ven tose an
«
\"li ,
puis il continue par ces mots décisifs:
Cela signifie bien clairement, que si ces provinces n'avaient pas de lois pro-
• hibitives de j'aliénation du domaine de l'Étal, ces domaines ont pu être aliénés
« valablement et à perpétuité. »
nies à la France, postérieurement à l'ordonnance de 1566, qu'en ce ~ui
Puisqu'il en est ainsi, à fortiori les aliénations du domaine sont-elles mainte-
" concerne les aliénations fa ites depuis la date de Jeur réunion respecti ve, les
nu es, quand elles ont eu lieu clans les provin ces où la loi et l'usage les per-
• aliénations précédentes devant être rég lées suivant
mettaient; et la Provence était de ce nombre.
«
« ces provtnces.
LES LOIS
lors en usage dal1s
l)
Et l'article 2 de la seconde dit éga lement : « En ce qui concerne les pa ys
Arrivés à ce point, il ne res te plus qu'à réfu ter les objections de détai ls par
«
réunis postérieurement à la publication de l'édit de février 1566, les ali é-
lesquelles on a cherché à obscurcir ces deux vérit6s; la première en ce qui con-
«
nations du domaine faites avant les époques respectives des réunions, seront
cern e la France, la seco nd e en ce qui concerne la Proveuce.
«
réglées suivant
«
de paix ou de rél/Il ion.
LES LOIS LORS EN USAGE
dans les pays 1'éwlis, ou. suivant les traités
Merlin est allé même plus loin; il enseigne qu'il résulte du tex te précis de ces
deux lois, qu' il suffit, pour que les aliénations faites du domaine de la couronne
dans les provinces plus tard réunies, soient mainten ues, qu' il n'y ai t pas eu de
loi prohibitive formelle de celte aliénation dans ces provin ces, et que le si lence
sur ce point de la législation dans ces provinces aurait élé, à lu i seul , une ca use
légitime pour qu'elles fussent réputées légales, et qu'ell es Je fu ssent encore aux
yeux de la législatiun moderne.
Stll' Ie premier point , on cit e comme ayan t défin itivement établi le principe
de l'inaliénabi lité du doma ine, en France, la fabu leuse assem blée des princes
chrétiens en 1279, les ordonnances de Phi lippe v en 13 18, celle de 1413 et
celle du 30 juin en 1539.
Mais on hési te à réfut er de p<lrei lles puérilités. Quand tOIlS les écrivains et la
loi de 1790 et celle du 1/. ventÔse an VII, ont tous rapport é à l' ordonnance de
1566l'e(Jet d'a~oir seu le fixé la législat ion et de l' avoir fixée pour l' avenir sur
l' inaliénab ilité du domaine de l'Étal, vou loir qu' il en so it au trement , c'est en-
�62
63
lreprendre une œune inutile. C' est peine perdue, et il ne faut qu e sO Uf'ire
devant de si impuissants effort s. -
l'affirme. Il suffit de lire l'article 89 de celle ordonnance, pour en être convaincu.
Voyons pourtant de plus près.
L'assemblée prétend ue cn 1279, c'est un con te repoussé par tous les
loriens. Voici comment en parle Deoizart,
VO
hi~
Domaine de la Couronn e, § 2.
Qu' importe? Tout est bon pour une cause pareille à celle des pêcheurs?
Elle ramasse tout ; les arguments de rebut, délaissés, les lois révoquées, cell es
qui
«
Un praticien anglais, dit-i l, qui a composé un recueil de pratique , connu
sous le nom de FIe/a, a imag iné qu'en 1265 il se tint une assemblée so len-
«
nellc à Montpcllier, où tous les princes chrétiens convinrent par eux ou par
1566. Encore celle dernière, en prohibant l'aliénation du domaine, ne le faitque
«
leurs ambassad eurs que le domaine de leur co uronn e serait ina li énable. De là
pour J'aveni r, et ell e maintient les aliénations déjà faites.
«
qu elques autèU I'S fiscaux ont tiré la conséquence qu e depuis ce lte époque
«
aucune partie des domaines n'a pu être aliénée à perpétuité. Mais Selden,
«
« dans une sal'ante dissertation sur le
Fleta démontre que celte assemblée n'a
Jl ' ont
jamais ex ist é! ! ! Entré dans celle voie on ne recule deva nt rien! ! !
L'ordonnance de 1539 ne fut pas l' ordonnance définitive, ce fut celle de
Les articles 5, 6, 7, 8, 17 de rordonnance le prouvent, et les lois ùe 1790 et
1.\. ventÔse an
VII ,
dans les articles que nous en avons rapporté, établissent ce
point comme la règle de notre droit.
• jamais eu lieu. La ville de Mo ntpelli er était alors so us la domina ti on de Jacques
Que reste-t-il donc de ce vain étalage du mémoire des pêcheurs? La preuve
«
le conquérant, roi d' Aragon. Ce prin ce a lni-m ême écrit sa vie; il Y est
d'un courage sans éga l , ou d' une ignorance complète de notre droit. Dans les
«
en tré dans les plus grands détai ls, et il ne dit pas un mot de ce lt e assemblée. ))
deux cas , il va
lieu de les féliciter.
"
De Laurière, t. l , des Ordonn., p. 665, traite éga lement de fable ce tte prétendue assemblée.
Il ne son t pas plus heureux dans l' énumération des prétendus monumenls
RE'jetons donc celle première objection.
provenç,aux qu' ils exhumen t , pour établi r qu'ayant la réunion de la Provence
Q'Jant aux ordonllanccs de 13 18 de Phil ippe-le-Long, c'est encore une
à la France, le doma in e de la co uron ne n'était pas aliénab le en Provence. On
erreur. Denizart nous dit encore à ce suj et: • Ce prince ne révoqua pas in-
voit que nous voulons parler des lellres-pa tentes du 12 juill et 1382, 139 .. , de
" distinctement toutes les aliénations, mais seulement des aliénations faites
la donation de 1 H2, et des arrêts de 1568 et1582 dool on se prévaut, p. 3 .. ,
" par Philippe-le-Bel, son père, et par Louis Hutin, so n frère, comme ayant été
35 et 36 du Mémoire des pêcheUl·s.
desordollnément {aites, menées et traitees et à cause de plusieurs gl'ands
« malices et (l'audes qui commises ont été. »
principe, l' arrêt du 25 septembre 1568 , rendu au profit de Luxembourg. C'esl
L'ordonnance de H13 , fut l' œuvre de la séd iti on, co nnu e sous le nom des
celui qui maintint l' aliénati on faite par le dernier com tede Provence de la vicomté
«
Il es t ail premi er aperçu assez singulier, que les pêcheurs opposent à Dotre
Cabochiens , ct d' une assem blée de notables. ~Ia i s elle fut annu llée par le roi
Charles VI, par ordonnance dü 5 septembre 14, 1'1 (V. Isambe rt , sur r ordonnance de 1413, colleclion des lois anciennes, \. 7, p. 283, 386 et 4-00 ).
et qui a mis, par ce dernier monument de notre droit public provençal, en
Au su rplu s, la règle n' y es't pas même rappelée comme nationale, ainsi qu'on
Rayons donc des précédents, in voqués contre M. de Galliffet, celui de 1568,
de Martigues, qu i fit tri om ph er Luxembourg contre les prétentions con traires ,
relief et en sa illi e le droit que nous établissons ici.
�65
nous résen 'aot desa isir tout à l'beure et de rompre le lien secret par lequel on
l'aliénation au donataire, Si le droit commun n' eût pas été pour ee deroier, la
"cnl le ratlacher aux autres.
prohibition n' (ltait pas uécessaire. Si le droit commun n'avait pas été pour la
Qu e so nL dODc les Ictlres-patentes de 1382 et 139~? Des promesses faites
reine, elle 0' aurait pas donné.
par Louis d'Anjou et par la rein e Marie, à la ville de Martigues , qu'elle ne
pourrait jamais €/re aliénée.
De quelque manière donc qu'on envisage ces actes, ils prouvent le contraire
de ce qu'on veut leur faire prouver.
Mais nous répo ndrons tout de suite que ces exemples, bi en loin d' affaiblir
l'argum entation de M. de Galliffet, la confirment. Si le droit public el)t été
Quant à l'arrêt du 25 septembre 1568, il est, dit-on encore, la preuve de la
),inalipnabili té du domaioe de la couronne , la promesse était inutile; elle n'avait
domanialité de la \"Ïcomté de Martigues ; car il y fut dit que le roi pourrait tou-
aUCUD seLlS. Elle présup pose dûoc que le droit co mmun, c'était la faculté d'alié-
jours en recouvrer la possession , moyennnant une indemnité à payer à la
ner. -
famille de Luxembourg.
Yuilà pour lcs leUres patentes de 1382.
Nous en dirons autan t de celles de 1394. Ell es oot même nn degré de plus
Remarquons sur celte objection : 1 0 qu'elle ne détruit pas celte vérité que le
de force, puisqu'elles interviennent encore pour créér une exception au droit
parlement de Paris, en rendant cet arrêt, et en ordonnant que la vicomté de
commun, el pour qu e la promesse faite par Louis d'Anjou et qui s'était éteinte
Martigues serait restituée à Luxembourg, malgré les prétentions du domaine,
avec lui , parce qu'ell e n'était que personnelle, renaquit encore sur la tête de
a reconnu le droit public proveo,.al , touchant la faculté pour les comtes de
la rein e Marie.
Provence, de disposer de leur domaine.
II faut répéter ici ce que Denizart, par nou s déjà cité, ùi sait au sujet des
2 0 Que ùans l'obj ection on dtinature la clause dont on parle. Pour la bien
privilèges de ce genre donnés par le roi de France à différen tes villes: « Si le
connaltre et bien apprécier, il faut la reprocluire telle qu'elle es t dan. l'arrêt.
domaineeû/ été en efTet illaliénâble, quel eût été l'objet de ces chartes et de ces
« privilèges?
Il réserve seu lement au roi : (( Toutefois et quantes qu' il nous plaira ( y est-il
«
1)
Quant à la donation de 1 H2 de la reine Yolande, elle est toute aussi mal
«
«
I~CORPonKn au domaine ùe notre couronne,
récompensallt
T..uœembouI·g en autres héritages de pal'eille valeur, que se trouvera étl'e lors
ùit),
L'UNIR ET
CIl
Elle passait de la tête de la rein e SUI' celle de son fils" et cela par une dona/ion ,
(( ladite vicomté ET EN TERRES NON DOMANIALES.
La réserve d'unt?' et incorporer la vicomté de Martigues au domaine de la
couronne es t bien différente de celle de la ,'éunil' à ce domaine. Dans les anciens
un acte de transport, emportant aliéna/ion de la chose.
principes du droit public français, il y avait celle différence énorme entre ces
cboisie. Car si ell e a com pris la ville de Martigues, qu'était devenue 1a promesse
de 1382 et de 1394 de ne pouvoir €tre aliénée? Elle l'était par cette donation.
Si, au contraire, la donation n' a porté que sur la seigneurie et sur les chOies
deux formule s, que la dernière, celle de réunir supposait la domanialité de la
qui la composaien t, c'est un véritable exemple uouveau de disposition du do-
terre ou de la chose à l'occasion de laqu elle la réserve avait eu lieu, tandis qu'au
maine de la cou ronne que le mémoire des Pêcheurs nous offre; et il est d' autant
contraire, la première, celle d'unir et incorpol'er ne la présupposait nullement.
plus fort que la reine en dispose en véritable maltre, puisqu' elle prohibe
(, Le domaine, dit de Coriolis, Traité de l'administration de Provence, t. 2,
�67
66
« p. 262, peut être augment é en deux manières ; par la RÉUNION D'ANCIENNES
PARTI ES, et par l' UNION DE NOUVELLES PARTIES. La di/fénf/1,ce (mll'e ces deuœ moyens
«
roi , dans le cas où il voudrait opérer J'union. li doit récompenser alors Lux emhourg en lui donnant d' AUTRES UERITAGES de pareille valeur , et
EN
TERR ES NON
1l0MANIALES.
" est (1' autallt pl1(~ sensible, que la réwlion n' est pas tallt une augmentation gue le
Quand le roi reprenait, en vertu d' une clause de ra chat , un e terre qui n'avait
«
retour d' tlne pal·tie démembrée à SOll principe, att lieu que l'union produit une
été aliénée qu e sous ce ll e condition , il l'a reprenait saLIs donn er aucun e ré-
«
augmentation véritable. Ce tte l'élmion s' opère de plein droit ; la partie qui
compense, ni aucun autre héritage. D'oil il suit touj ours plus qu' il ne s' agit pas
«
se réunit rent re da ns sa situation naturelle, qui est de n'avoir qu'un seul être
ici de domanialité l'etenue, mais de quelque chose qui se rattache à un autre
• avec. le corps dont elle avait été détachée pour un temps. Le retour des fiefs
·ordre d' id ées, à la faCilité de l'union au domaine, touj ours possible au roi dans
• démemh rés du domai ne concédé ou pour un temps, ou pour un certain nom-
l' ancienne monarchie par la raison de l'utilit é publique.
'.
bre de générations, fournit un exemple de cette réunion , qui n'est eo quelqu e
1\ était ici imposs ibl e de mi eux ma rqu er l'i ntenti on , qu'cn ajouta nt que la
• sorte que la consolida ti on de l' usufruit à la propriété. Il n'en est pas de même
récompcn.e serait donn ée en terres non doman iales. La vicomt é ne l'était plus
«
de [UNION. qui prod uit une augmentation véritabl e et qui peut se faire ex-
puisqu e son ali énation avait été reconnu e licite. 1\ fallait donc une récompense
«
pressément ou tacitement.
« L' ullioll expresse s'opère par lellres-palpntes, qui s' ordounent dans les cas
de même nature, et que la chose substituée reç!lt et ga rc\àt la même nature
oil le souverain le juge nécessa ire. »
Merli n, répert. 1'0, Domai ne public, § 3, dit au suj et de la réunion et de l'union:
Au surplus, et sa ns plus retard er notre dernière réponse, il est im possible
de se méprendre sur le motif unique de ce Lte réserve d'unir et incorporer la
.. On sent la différence de l'u ne à l' autre. La réunion n'est pas tant une aug-
vico mt é de Ma rtigues au dom" in e de la co uronn e. C'était une mesure d' util ité
" mentation, que le relou r d' un e partie démembrée il son principe; au li eu
pu bli que, un e espèce d'exp rop rialion pour ca use d' utilité généra le, qu e le
.. que l' union produ it une augmentation véritable.
souvera in se réserva it, en vertu de son pouvo ir souvera in , pour un cas donn é.
«
«
qu e la chose qui était remplacéC'.
" Aussi J' ttnioll ne se régit-elle pas par les mêmes principes que la réunion. "
La vicomté de Martigues était consid érée alors comme pays {I·on t'ière. 1\ pouva it ,
En appliquant ces principes à J' arrêt de '1568, il faut donc co nclure que la
. dans un cas donné, devenir nécessaire à la s!l.reté générale, que le sou verain
réserve de J' ullion qui s'y trouve, n'affaiblit en rien la portée de la décision ; qu e
l' e!l.t sous sa main. Il s'en réservait le droit.
bien loin de prouver qu e l'aliénation de la vicomté n'e Ot pas été licite , ell e
C'est ce qu e nous apprennent les Remontrances de la noblesse de P.rovence,
prou ve aa contraire qu'elle le fût , puisqu e l'union au domain e de la COlll'oune ,
p. 167, oll l'arrêt du 25 septembre 1568 se t,l'ouve entièrement ra pporté, et où
si elle sétait jamais opérée, ne l' aurait pas rait acqu érir comme une chose ayant
l' anal yse et le sommaire de ce t arrêt es t ainsi donné: " Arrêt du parlement de
toujours ap par tenu au doma ine, mais bi en comm e une chose nouvelle sur la-
" Paris, du 25 se ptembre 1568, qui mainti ent M. de Luxemboul'g en la pos-
quelle le domaine n'a urait jamais eu de droi ts, ou aurait léga lement perdu ce ux
" session du vicomté de Martigues, légué par Charles d'Anjou, derni er comte
qu'i l y avai t eus.
CeUe même conséq uence se démontre par la co ndition que l' arrêt Impose au
" de PrQvence: condamne M. le procureur général de le vuider et désem-
...
�68
69
" parer ; sauf en cas qu e sa maj esté le veuille ré'Jnir COMME FRONTIÈRE.
véritable caractère de la chose jugée, comme nous l'avons fait pour l'arrê t d e
" en le remboursant en terres de pareille va leur e t qualité non domaniales.
-1568.
»
Mais ce mot,if n'a rie n de com mun avec la question actuell e. Que le sou-
Mais cependant telle qu' elle est citée, la décision se comprend ct se me t e n
verain e ut autrefois le droit, dans certains cas, de faire pronollcer l'expropriation
harmonie complète avec nos principes, Ce sera sans doute parce que Charles
pour ca use d ' utilité publique, cela ne nuit en rien
principe de l' aliénabi lité
ava it contrevenu à la condition ùe ne pas aliéner, qui se trouvait dans son titre
d u domaine de la couronne. Au contraire, ce cas d'expropriation prévu comme
d'acquisition , que l'alié nation aura été annullée par le parle ment. Mais en quoi
possible , à l'occasion d' une te rre qui é tait sortie du domaine, prouve au plu5'
cela est-il contraire au principe de la facult é d'alié ner le domaine? Charles
haut degré que celle-ci e n é ta it sortie licitement e t en force du droit public qui
n'était d evenu qu e possesseur précai're , simple usufruitier: sa jouissa nce ne
au toris.~it de pareilles alié nations, puisque , pour y re ntre r , une expropriation
devait pas passer à un a ulre. L'a lié na tion lui avait é té int erdite, c'était la loi
devenait nécessaire eL que le prix de la chose devait ê tre iutégralement payé à
. d e son contrat. Celui qui avait acquis d e lui devait donc subir la même loi en
3U
son propriétaire, avant qu'il en fut exproprié.
vertu du principe: nemo potest in alium lransferre plus juris quàm ipse habet.
Nous reùirons ici e ncore que puisqu' on lui prohibait la faculté d'alié ner, c'est
que la facu lté d' aliéner é tait le droit t ommun : et que si le parlementa annullé
Que reste-t-il donc e ncore deces préte ndus monume nts provençaux , prou va nt. ,
l'a liénation. ce n'est pas qu' elle fOt contraire au droit public, mais uniquement
au dire du mémoire des pêcheurs, l'inalié nabilit é du domaine de la couronne
parce que le prince avait accepté la dé rogation à ce droit qui lui avait é té pro-
en Provence? L'arrêt du parle me nt de Provence du 26 mai i 582.
posée et imposéé dans son contrat, et'à laquelle il lui avait é té libre de se sou-
Ne serait-il pas é trange que cct arrêt eOt seul admis et consacré ce principe ,
-et que t.ous les monuments de notre droit public provenc,u l qu e nous venons d e
recueillir et de citer, fu ssent contraires? Que le parlement de Prove nce, e n 1 58~ ,
les eût méconnus et ignorés? Qu'il e n ait é té ainsi . alors qu'à t.outes les é poqu es,
la noblesse de Pro\'ence a réclamé pour faire triomphe r le principe d e l'a lié nabilité du domaine? Qu'il en ait é té ainsi alors que par l' édit e t l'arrê t d e 1668 ,
la Provence a obtenu snr ce point la satisfaction la plus complè te ? 1\ n'appartenait qu' à des adversaires aussi prévenus de prê ter au parle me nt d e Prove nce
un~
erre'lr a ussi grave et qu' il n'a pas commise.
Le mémoire ne cite ni les termes d e l'arrê t , ni les circonstances détaillées
sur lesquelles il intervint , ni e nfin le fait qui doit s'y trouv er rapporté, Il serait
difficile par conséquent dC' peser chacun de ces point s e t d 'en f,lire ressortir le
mettre,
A toul, prenùre, quanù même tout cela ne serai t pas vrai , que sig nifierait
cett e décision iso lée . sans a ppui, sa ns antécédent; contrariée par tous les documents d e notre droit public provençal, opposée à ces nombreux arrêts que nous
avons nous-mêmes cités et à l'arrêt célèbre du '25 septembre d568, qui ,ost véritableme nt le titre ou l'arrê t parti culier de l'auteur d e \\J, d e Galliffet~ Elle serait
impu issante à ricn asseoir. Ce serait, et rie n de plu s, une epreur juridique, commise dans un cas particu lier, suffisammen t éclairée par mi lle décisions contraires.
saisie, en désespoir de cause par les pêcheurs, comme ils usa ie nt taotôt t1 'ordonnances abrogées, e t se préva laie nt de l'assemblée fabu leuse de 1279, et
d es œ uvres éphémères de la séd ition des Cabochiens,
�70
71
Jusqu 'à présent , nou avons, à dessein, négligé de rappeler l' édit et l'alTêt
du co nseil de '1668, parmi les monuments législatirs et juridiques provençaux .
établissa nt l'ali énabilité du domaine de Prov ence, avant sa réunion à la France.
Nous l'avons aio ' i fait , pour y revenir ell ce moment et. y réfuter l'obj ection
particulière que cet éd it a donné l'occasion de prése ut er.
Le mémo ire des pêcheurs a dit ~pécia l ement et avec un courage, digne de
leurs antécéden ts, qu e cet éd it et cet arrêt étaient sa ns portée aucune, parce qn' ils
étaient annu llés par l'effet de l'ordonnance de 1566, qui n'a plus permis à l'ave ni r l'aliéuation du domaine.
Mais y a-t-on pensé ? Que fail-on , en raisounant de la sorte, de cet édit et
de cet arrêt du conseil de t 668? On les transforme en concessions, en aliénations,
en ventes du domaine de la co uronne. Ces actes du pouvoir royal ne renferment
rieu de semblables. C'est simplement un jugement soleno el qui a été porté par
le prince sur la question de savoir qoel était le droit commun de la Provence ,
avant sa réunion, tou chant les anciennes aliénations du dom ain e des com tes de
Provence. JI a été rendu pal' l' autorit é co mpétente ; c'é taitl ~ so u" era in ou soit
son conseil qui deva it être investi de la question, la r.onnaÎtre, l' élu cid er et la
juger. En le faisa nt , il n'a pas pu violer l'ordonnance de 1566. JI a rend u ju s\i ce
à qui il cro yai tqu'elle était du e.
Remarquon s encore que pal' cet édit , ce ne sont pas des titres nouveaux
d' aliéna tion , qui soot conFérés aux propriétaires et all X possesseurs des bi ens
aliénés par les co mtes de Provence. Ce so nt toujours les titres anciens, primitifs,
originaires qui sont laissés dans leur force nativ e, pOUl' produire tous leurs
effets.
Il suit de là que ce n'est pas l' éd it de 1668 qui constitue leur titre, et qu e
dont se prévau t un propriétaire , c' est le jugement ou l'arrêt qui dev iennent le
titre et que celui-ci se trouve effacé? On sait bien pourtant qu e les choses ne
vont pas ain si, qu e le jugement ou l'arrêt fait bien tomber l'auaque,
m~i s
que
le titre est ai llieurs. Pourquoi donc s'écarte-t-on ici de cette manière ordinaire
de penser et de raisonner?
Comment, d'ailleurs, n' a-t-on pas reculé devant l'absurd e? On veut donc
qu e l' edit de '1668 so it un titre d'aliénation pour toute la noblesse de Provence,
qui réclamai t, faisait entendre ses dol éances, et qui les avait portées aux pieds
du so uv erain . Et pas un nom parti culiel' ne fi gure dans cet édil ; pas une terre
n'est dés ignée; pas un e aliénation en particulier n'est mentionnée. Depuis le
temps qu e nou s renco ntrons sur nos pas les declamations et les exagérat ions des
pêch eurs, ' nous n' y somm es point encore Faits et celle-ci nous étonne encore !
Nous dev rions être au-d essus de ce sentiment de surprise!
Enfin , le raiso nn ement des pêcheurs es t incom préhensib le; il ne tend à ri en
moins qu 'à dire qu' en 1668 l' accès de la justice devait 'être ferm é à la noblesse
de Prov ence; qu'on ne deva it pas l' éco uter, parce qu e se dtSfend re contre les
prétenti ons du donK,i ne, c'était vio ler l' ord onna nce de 1566; qu'on nc devait
pas juger non plu s, par le même motif. Mais qu 'on aille donc jusq u'au bout! Au jourd' hu i enco re, le débat actu el est un c violation de \' ordonnance de '1566.
"faudra bi en qu·onju ge. On oe pouna le faire qu'en prononçant la validit é ou
l' invalidit é de nos titres. Donc encore un e foi s on viole aujourd' hui l' ordo nnance de 1566 !
Où va-t-on avec de pareil s argum ents? On fait divorce avec le vrai. On
adopte le faux. 00 ell dépasse la limite connue 1
Reveno ns ail moins nous-même à la vérit é. L'édit de 1668 couronnera mer-
celui-ci résid e toujours dans l'acte qui fit passer originairement du comte de
veilleusement tou te la longue séri e de nos preuv es. C'est une lumière très "ive
Provence à l'acquéreur la chose qui lui fut transm ise. Autant vaudrait-il dire,
qui se proj ette SUI' ell es et qui part de lui. A cell e ppoqu e, plus rapprochée de
que lorsqu' un tribunal
cl'Ile de la réunion de la Provence à la Fran ce, où le d"oit publi c provençal était
0\1
une cour rejettent l'aUaqu e dirigée contre un titre
�72
73
lDieux connu , plus é tudié, où il élail plus conlemporain de ceux qui vivaient,
où les mOilnmenls hisloriques élaient dans leur plus grande fralch eur, la vérilé
§ IV .
q ue nous élablissons aujourd' hui , apparut à nos pères , au conseil de nos rois,
au souverain lui-même, claire, évidente, inconleslable : elle fut solennellement
RÉ PONSE •
proclamée. Pourra-t-il être que celle voix ne soit plus entendue
q
LA QUATRIÈME ODJ ECTIO~.
Que celle
œuvre, laborieusement faite alors, soit reprise aujourd' hui? Mais au moins celle
pièce d u débat n'en peut être écarlée; c'est une des pièces de conviction du
procès, Elle doit en être le fond ement et la base. Cela peut déplaire aux pê-
Celle quatrième obj eclion du mémoire des pêcheurs roule exclusiv ement sur
cheurs. Cela cOnl'iend ra à la justice administrative qui doit prononcer, et anx
les arrêts de 1568, de 170 l , de 178 1 et 1790. Elle est destinée à enlever à
juges qui nous écoulent.
ces décisions judiciaires, si la chose étail possible, le caraclère protecleu r et
décisif qu e nou s en avons vu sortir pour les propriétaires des bourdigues.
Pour ne pas confondre les arg um ents di vers, employés par le mémoire,
En terminant la série de ses obj eclions , le mémoire en
lai s~e
lomber une
dernière. Mais celle-ci est un vérilabl e Irait perdu. Les lois du ,1er décembre
1790 et 14 ventôse an VII , nous condamneraient, parce que nous ne rapporterions
pas de tit.re antérieur à 1 566, celui de 1 .. 81 ne parlant pas des bordig ues.
C'est un cercle vicieux, et la question par la queslioll. En démontrant plus
ha ut que le titre de 1 q.8 1 avait tout conlenu, nous avons d'a vance suffisamment
répondu à l' objection.
contre ces arrêts. il faut les voir séparém ent, en comm ença nt ~a r. ceux dil'igés
co ntre les deux premi ers. et en venir ensuil e aux deux derni ers.
Celui de '1568 , dil-Oll, réserve a u Roi le droit de reprendre la vicom té de
MarliglJes; e l par là il es t inconcluant : celui de 1701 , en suppri ma nt cette
réserve, a élé conlraire à l' éd it de 1566; il a co nsli tué un e aliéna lion d u domaine , postéri eure à celle époqu e.
Mais ces deux obj ections sont sa ns valeur. 11 est facile de le voir.
Quand il faut à chaque pas, pour détruire une assertion téméraire, ou pour
La premi ère a déjà reçu sa réponse dans le paragraphe précédent. Nous y
relever des erreurs historiqu e., entrer dans des dévell\ppements, qui seraie nt
avons expliqué la nalure de celle réserve, son obj et, son but. Nous y ren-
inutiles avec des adversaires 'de bonne foi , il faut être sobre de répétitions et de
voyons,
Sur la seconde , nous di sons un e chose fort simpl e: c' est qu e l' arrêt de 1791
redites.
ne conlrevinl pas à l' édit de 1566 , par deux raisons décisives; la premi ère,
parce qu' il ne s' agissait plUi là que d' une réserve pour ca use d' utilité publique;
que de l' expropriation de ia terre, comme frontière , et moyennant une illd1'mnilé
préalable ; réserve bien différente d' un droit de domanialité , et que l' ordonnance ou l'édit de 1566 n' était pas fait pour ce cas.
�75
74
hibitions les aliénations antérieures à sa promulgation ; eL que celle qui fut r es-
titres de concessions elles laissant sous le droit supérieur de l' État, pour les règ lements passés et futurs.
pectée par l'arrêt de 1701 remontait à une époque bien antérieure à 1566 ;
Voilà une foul e d'assertions léméraires, un amas d' inexactitud es, un long tissu
La deuxième, parce qu e celle ordonnanee de 1566 exceptait de ses pro-
qu'elle remontait à 14-8 1 et à l'époque an térieure à la réun io n de la Provence
d'arguments fautifs.
On va bientôt en ·être convaincu, en suivant les réponses que M, de Ga liilTet
à la France.
On le voit bien; ces deux objections ne méritent pas une plus longue réfu-
leur oppose.
Et d'abord que peuvent signifier ces circonsta nces, qui ont précédé les
tation et il faut arriver à celles dirigées conti'e les arrêts de ,1781 et 1790.
Les voici, dans l'exactitude la plus scrupuleuse, telles qu'elles ressortent du
mémoire des pêcheurs.
arrêts, contre le droit des propriétaires des bourdigues? Il en sort au conlraire
des arguments très favorabl es à leur cause.
Ces précéden ts prouvent en effet, qu'après examen, on a jugé que les bour-
Les arrêts de 1781 et '1790 , disent ces derniers, sont bien alTaiblis par les
digues ne gênaient en rien la na'i'iga t,ian; qu e les do léa nces ou les plaintes du
circonstances qui les amenèrent cL par les termes dans lesquels ils sont formulés.
commerce élaien t mal fund ée. quant il ce; que r interloc lltoire de 1780 ne se
Ce qui les amena . ce furent les doléances du commerce dès 1739. Les titres
borna pas se ul ement à faire vérifier si les bourdigues nuisa ient , mai s qu'il or-
des bourdigalier'S furent soum is à vérification: un arrêt de 1778 so umit le
donna , que, même dan s cc cas, on vérifierait les moyens d'obvier à celle
sort de ceux-ci à une enqu ête ; un autre arrêt de 1780 à un procès-verbal de
lIocu ité; cc qui annonce très clairement que, même en cas de nocui té, les titres
commodo et incommodo. Tout cela prouve la pr~ca rité du druit.. Si on ava it sui vi
au rai ent préva lu ,. et que tout se serait borné à l'emploi de quelques moyens,
cette donnée première, les bourdigues eussent péri.
de que lques préca ulions , et que jama is la suppression du droit de propriété des
Des termes de l'arrêt de 1781 , continuent-ils , il résulte que l'arrêt ne re-
bounl igues n'aurail été prononcée.
connalt quO un droit de proprié té sur les pêcheries ; qu e les ea ux du Martigues.
Au surplu s, que sont ces précéden ls en présence de l'arrêt de 1781 et de sa
méme celles Olt étaient les pécheries, restèrent dans le domai ne public; et enfin ,
décisioo? C' est là précisément qu'il faol ramener les adversaires , et c'est son
qu' il réserve les droits de juridiction de l'amirauté, et que c'est un simpl e
dispositif qu' il faut bien faire ressortir.
Il établit au plus haut deg"é, au profit de M. de Galliffet el des autres posses-
privilége de pêche qu'il confère.
L'arrêt de 1790, ajou tent-ils encore, fut écrasa nt con t re M. de Ga ll iffe t, parce
qu'il lui enleva la propriété des eaux de Martigues; parce que s' il ne lui en leva
pas celle des bourdigues, c'est que l'État n' y ava it pas conclu, et que les in ter,enants qui y avaient eux-mêmes conclu, ne furent pas appuyés par l'É tat;
el
parce qu 'enfin il ne voulut pas reconnaltre les droits des bourdigaliers , ie
bornant à leur défendre de les exercer autrement que conformément à leurs
sesseurs de bOUl'd igues, la propriété: 1° des bourdigues ; 2° de leurs ca naux ;
3° des eaux y con len ues.
éela rés ulte en effet des points suivants:
1 ° Des termes du dispositif de l'arrêt qui s'exprime en ces 1er mes sur la propriété des bourdigues:
« Le roi .. .. garde et maintient ledit sieur de Galliffe~ DANS LA PROPRIÉTÉ
�76
•
77
«
des trois bOlirdigues appelées du Passage, d' [stl'es, du Roi, et dans un huitième
objets est une pal·tie constitutive de la bourdigue; il en est une partie indivi-
«
de celle d·Ellgassier........ maintient éga lement sa majesté les propriétaires
iible .
«
des autres bourdigues situés proche de la ville de Mart.igues et du port €le
«
Bouc DANS LA PROPRIÉTÉ
L'arrêt même 1781 devient plus significatif encore, si l'on remarque que
les bourdigues ont des limites marquées par l'autorité publique, depuis un temps
D'ICELLES. •
qUi est re-
immémorial, pal' des bornes établies dans les eaux dei étangs de Caronte et de
connu; et toute au tre appcllat.ion de leur droit serait une violation de l'arrêt
B ~ ITe, lesqu elles indiquent le point où commence et où finit celle propriété;
de 1781 .
qu' elles ont en outre des bords, les uns, ell debors des eaux, appelés Sèdes; lei
Qu'ajouter à des termes si précis? C'est
IIIl
droit de
PIIOPRIÉTÉ
2° Cela ressort encore des termes de son dispositif, relatif aux canaux des
autres, sous-marins appelés Lambres; qu'un règlement fort ancien, du 9 avril
o\i:i68, défend et prohibe à toute personne de pêcber dans les limites des bour-
bourdigues. Il leur en reconnalt également la propriété:
Il ordonne : « 4° Que l'ancienne largeur des canallw du Passage, du Pontet,
digues, et que M. de Ga lliffet, en 1781, revendiquait ses bourdigues et la
1
de l'Isle sera rétablie aux frais des propriétaires, conformément à l'avis des
propriété de ses bourdigues, sui vant le carac tère que leur allribuait le rè-
«
experts qui seront nommés ; comme aussi que lesd its canaux du Pontet et d e
glement du 9 avril 1568, c' est-a-dire, avec tout le contenll des limites que
«
l'Isle seront creusés à la prorondeur de cinq pieds dans lear centre, de quatre
l' autorité publiqu e leur reconnai ssait. Il demandait en effet : " Que l' arrét dt!
1
pieds à deux toises de distance dé chaque côté dudit pont. ..... . ; ordonne
" rè9lement de la chambre des comptes d'Aix, du 9 avril 1568, ainsi que ceux
«
sa majesté que la commune de Martigues sera teu ue de supporter les frai s du
• travail nécessaire à cet effet, jusqu'à concurrence de ce qui se trou vera ex«
•
céder la profondeur prescrite par les anci ens règlements, et que le slIrplus
desdits (rais sem à la charge des PROPRIÉTAIRES DESDITS CANAUX.
»
• des an né~s 1516, 1526 , et 1675 et autres, fussent exécutés suivant leur
«
forme et teneur .•
Rien donc n'a échappé à l' adjudica tion de propri été contenu e dans l'arrêt de
,1781 ; il n'a ri en oublié, ai le cana l, ni les eaux de la uourdigu e, ni ses bords.
3° Cela résulte encore des termes de la demande de M. de Ga lliffet, qui portait
sur la propriété entière des bourdigues, sans distinguer en tre les eaux, le cana l,
ses bords et les roseaux, et qui ue faisait de tout cela qu' un seu l tout.
En agissant ainsi, dans sa revenùication, M. de Ga lliffet était conforme a la
nature des choses: ca r un e bourdigue ne peut se co ncevoi r sa ns un ca na l,
sans les eaux qui le remplissent , sans les bords qui le contiennent et qui form ent
le canal , et sans les roseaux servant à la capture des poissons.
Forcément donc , en déclarant' M. de Galliffet, propriétaire de ses bourdigues
et des canaux qui les forment, l'arrêt de 1781 le déclarait propriétaire des eaux
y contenues , comme des bords, comme du plafond du cana l. Chacu n de ceG
On objecte va inement 'que l' arrêt a réservé à M. de Galliffet Je se pourvoir
pOlIr
la propriété des eauw, et par suite pour celle des ea ux conten ues dans les
ca naux des bourdigues. Il est év id ent de soi que celle réserve a porté sur autre
chose. Autrement il faudrait dire que l'arrêt se serait contredit; qu'il aurait
statué et en même tem ps renvoyé, puisqu'il n, comme on l' a vu, prononcé sur
les uourdigues, leurs cana ux et leurs eaux.
Et yuand on lit l'arrêt de 1781, on reco nnait à ses termes, que la réserve a
porté sur la propriété des eaux des étangs de Martigues, que revendiquait
également M. de Galliffet.
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A ses yeux , les étangs de Martigues étaient cboses bi en distin ctes des bourdigues et pêcheries. Celles-ci n' étaient qu' un point dans ce vaste espace des
ea ux composé des étangs de Bel'l'e et de Caronle.
En soi , ces choses étaient aussi parfaitement différentes. II serait absurde de
les con fond rc.
Enfi n daos les co nclusion5 de M. de Galliffet, les deux objets avai ent des formu les de revendicatio n différent es.
79
ce sont les tribunaux admini stratifs ; parfois c'est le jury d'ex propriati on qui en
connalt. Voi là J'ordre actuel des juridictions, par rapport anx propriétés iOlmobili ères. Mais celle variation dans la juridiction n'en cntralne aucune dan s
la nature de la propri été. Elle reste toujours ce qu'elle était. Or, ce qui es t vrai
aujourd' hui , J' était en '1781; ct la réserve de la juridiction de l'amirauté contenu e dans l' arrêt de ce lte époque, ne fut qu' un hommage à un princi pe, qui
d~
près ni de loin ne pClI ébranler le droit de M. de Galliffet.
Qu'on n'in voq ue do uc pas la résen 'e de l'arrêt; elle fut étrangè re aux bourdigues,
Quant aux arguments empruntés à J'arrêt de 1790 , ils ne sont pas plus
séri eux que ceu x qu 'on a cherché à puiser dans l' arrêt de 08 -1. Il est au
Vai nement dit-on encore qu e l'arrêt de 1781 conti ent la réserv e, pour
l'aveni r, de la juridictiun de J' amiraut é sur les bourdigues. On se trompe sur
le sens et sur la portée de cetl e réserve.
contraire, avec ce t arrêt, le plus ferm e appui de M. de Ga ll ilTet.
Le droit de propriété sur ses hOUl'digues y a été proclamé deux foi s par son
di spositif ; une premi ère foi s, contre l'Étal., représenté par l' amiral de France et
En voici le motif ou l' intenti on. L'a rrêt avait dévo lu et attribué la surveil-
le pro~ureur ùe l' amiraut é de Martigu es ; une seco nd e fois, co ntre les pêcheurs
lance des dispositions à exécuter par les parties, il r intenda nt de la province.
de Martigues, de Saint-C hamas et la communauté de Martigues, qui étaien t in-
C'était une exception à la règle ordinaire indiqu ée par l'ordonn ance de la ma-
tervenus, dans l'instance, pour demand er et obt enir la rétractati on de J'arrêt
rin e de 168 1, Celle-ci allribu ait aux tribunaux d'amirau té tout ce qui concer-
de 1i8 1.
na itles matières maritim es et la pêche. A ce titre là, les bourd igues, dont il
L' amdyse de 1arrêt suffit pour le proll ver.
étai t question dans J'arrêt, les co upements et retrauchements de leurs bord s ou
L'amiral de France poursuivit, da ns cette in stance, la cassa tion de plusieurs
Sèdes , le creusement des cana ux à la profond eur marqu ée , toutes ces opé-
arrêts du parl ement de Prov ence, qui
rations deva ient resso rti r de la juridiction de l' amirauté : l' arrêt de 178 1 en
M. de Gallillet, la poli ce des étangs, mer et golfe de Martigues et la percepti oil
disposa autrement. Mais il voulut qu e pour l'avenir , et une foi s celte exception
des amend es. Il sout enait, au nom , de l'État, ~u e la po lice, la j usl.i ce, le profit
terminée ou épuisée, les parties rentrassent dans la règle ordinaire.
des amend es sllr les étangs appartenait à l'autorité publiqu e, et, par une consé-
En quoi donc cela put-il diminuer le droit des propriétaires des bOUl'digues ?
a ~ a i ent
reconnu, attribué, ou maintenu à
qu ence nécessa ire, il demandait la liberte de la pêche, aux termes de l' o rd o n ~
L' ordonnance de 1681 qui reconnaltla propriété des bourdigues comme licit e
nance de ln marin e de 168'1, pour le public,
et légiti me, les soumet pourtant à l' autorité de l' amiraut é. Toute propriété im-
de Martigues,
SUI'
ces mêmes étangs , mer' et gollè
mobilière est j usticiable des tribunaux. Quelqu efois, et le plussouv ent , les tribu -
Il co ncluait: « A ce qu' itlui fut donné ac te de l' opposit.ion qu' il décla rait
na ux civi ls connaissent des contestations qui s'élèvent à son occasion. D'autrefoi s
• former, comm e tiers non ouï, au x arrêts du parlement d'Aix, des 3 e t 23
�81
80
" février et 2 1 juillet 1780, en ce qu'on pourrait en induire contre le au c de
• Penthièvre elles ol1iciers de l'~mirauté de Martigu es, que ces arrêts avaient
en tre ces choses! Comme enfin le droit de propriété su r les bOut'digues, leurs
ca naux et leurs ea ux triomphe!
" allribués au marquis de Galliffet., en sa qualité de seigneur de Martigues,
Mais l'arrêt, dans son dispositif, en dit bien plus. II accorde au duc de Pen-
• la justice el la police sur les eaux de la mer de Martigues , qu'ils avaient
thièv re ses concl usions; il déclare la mer et le golre de Martigues libre, mais
• autori sé à faire marquer les filets des pêcheurs à ses armes , et qu'ils lui
il réserve à M, de Galliffet les droits contenus dans les titre de concession dcs
• avaient allribué les amendes; ce faisant, ordonner qu e l'article 10 du titre
• 1"', li vre 1. ' , l'article 5 du titre 2, li vre l e" et l'article l or du titre 1"',
bourdigues.
Qu'on en juge par ses termes:
«
Le roi .. .. casse les arrêts du parlement
livre 5 de l'ordonnance de la marine de 168 ,1, ainsi que l'arrêt du parlement
.. d'A ix. . . . , Ordonne sa maj esté que l'ordonnance de '1681 sera exécutée,
" d'Aix du 5 janvier 1675, et celui du conseil qui l'avait confirmé du 10 fév rier
.. suivant sa forme et teneur, dans les étangs de Berre et de Caronte et golfe de
seraient exécu tés sni\'ant leur forme et teneur; en conséq uence sans
.. Martigues; en co nséq uence décla re que la pêche sera et dem eurera libre
«
s'arrêter auxd its arrêts des 3 et 23 février et 30 mai et 2 '1 juillet 1780 , qui
.. dans lesdits étangs et go lfe, comme dans le l'este de la mer; SANS QUE LESDITS
«
seraient cassés et an nulés, Mainteni r et garder le duc de Penthièv re, et so us
.. DE GALLIFFET puissent y prétendre, ni exercer aucuns droits AUT'IIS QUE CEUX
«
lui les officiers de l' amirauté de Martigues, en la possession, iouissance et
.. RÉSU LTANT DES TIT " ~S DE CONCESSION DE LEuns BOURDIGUES, Veut au surplus sa
• exercice de la haute iustice et de la police sur loutes les eaux de la mer de
" majeslé que l' alT~t de la chambre des comptes de Provence, du 9 avril 15G8
« Martigues; faire inhibitions et défenses a udit sieur marquis de Galliffet de
.. el les a1'/'êls et 7'èglements rendus en conformité soient exécutés par provision
• faire marq uer à ses armes les fi lets employés à la pêche dans ces eaux ,
" ct jusqu'à ce qu'il en ait été aut rement ordonné, en ce qui
«
« 16i9,
1te
sera pas contraire
.. à t'ordonnance de -168 1. "
«
ordonner que les armes apposées à aucun desdits fil ets en seront détachées
«
et enlevées; maintenir encore le si eur duc de Pen thièv re dans le droit et
Il étai t difficile de mieux marquer que les titres établissa nt les droits de pro-
«
possession de perc~vo ir lui seul à son profit, excl usivement audit sieur dc
priété sur les bourdigues étaient maintenus. Quel peut être donc ce droit rival ,
«
Galliffet, toutes les amendes qui auraient. été ou pourraient être prononcées à
qu'il est permis à M. de Galliffet ù'exe rcer, malgré la liberté de la pêche procla-
«
raison des délits et contraventions cJ mmis sur les mêmes ea ux,
mée par l' arrêt de 1790? Quel peut-il être dans ces mers et golfe de MartiguesJ
»
Les demand es du duc de Pen thièvre étaient sa ns doute fort étendu es; maIs
Si ce n' est le droit à la propriété de ses bourdigues. Était-il possible de mi eux
elles n'allaient pas à récla mer la destruction des bourdigues, ni à en méconnallre
ex primer qu'il y avait là un obs tacle à ce que la liberté du public mt sans limite?
le droit, ni la libre propriété, JI revendiquait pour le public la liberté de la mer
N'est-elle pas apposée en t.ermes ex près? Le publiC' obtient tout, moins la fa culté
et golfe de Martigues, mais non pour lui la liberté de violer les bOUl'digu es et
cie violer ce lle propriété. II pourra aller, venir, parcourir toute cette étendu e
pêcheries du marquis de Galliffet, ni leurs canaux , ni leurs eaux, Comme
des eaux, Mais il ne le pourra pas sur ces points particuliers et isolés qui co nsti-
l'empire du précédent arrêt de 1781 se sent et s'aperçoit ici ! Comme il est
tu ent les bOUl'digu es. On voit bien clairement ici, que l'arrêt de 178 1 a porté
respecté par le duc de Penthièvre représentant ici l'Étal! Comme il y a harmonie
•
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fruit. Ce droit de proprié té sur les cauaux , les bOUl'digues et leurs p.aux ,
Ils concluaient à ce qu'il leur fut : • donné acte de l'opposition qu' ils décla:'
prod uit ici un de ses plus écla tant s r~s ult a ts.
Toutes ces conséq uences qui découlent d'abord de ces mots ; " y prétendre
" raient former comm e tiers non ouïs à l'arrêt du 25 aoOll ~8 1 , faisant droit
3011
" ct exercer aucu ns droi ts autres que ccw:v résulta71 ts des titres de concession de
.. le/lrs bourdigu~, .. sortent encore mi eux de ceux qui les suivent.
Qu'est-ce donc que cet arrêt du 9 avril 1568 dont le roi, en SO D co nseil , en
1790, ordonne l'exécution? C" est le règlement protecteur des bourdigues de
« sur ladit e opposition, ordo,mer que les bou.rdigues constmites sur la mer ou
«
dét ~it es
et supprimées comme nuisibles, t!mt à la
• navigation qu'à la pêche sur lesdits étangs {,lisant parti e de la mer Méditera n" née; à quoi faire le sieur de Galliffet et tou s autres possesseurs desdits bomte
Martigues ; celui qui défend au publi c de pêcher dans les limites des bourdigues;
qui en fait, pour leurs prop ri étaires, un lieu spécial, prohibé, qn e nnl ne peut
étang de lI1m·tigttes seraient
digues seront tenus.
Il
L'arrêt repo ussa celte demand e et mai ntin t de plus fort l' arrêt du 25 août
178 1, en ces termes:
violer saDS encourir des peines; et qui impose de nou vea u à ces propriétaire.
r obligation de creuser les ca naux des bourdigues. Ces
rarrêt redisent do nc comme les premiers, qu e là est un e
mot s du dispositif de
propriété sacrée, qUi
" Sut les demandes des habitants de Ma l·tigues, St· Chamas et autres,
CON(.ER-
embrasse le sol, les eaux, les ca naux des bourdi gues, leurs bords, et tout ce
"
qui y est conten u.
" aul"es demandes "espectives des parties, LES MET HORS DE COUR , saur 11
NANT LE VR Tmn Œ-O pPOSITION A L'ARRt T DO
25
JUIN
178 t , ensemble sur toutes les
Il n'y a pas d'ai lleurs à s'é tonner de ces résult ats qu e nous voyons sortir de
.. être ultérieurement pourvu, ainsi qu.'il appa1"tiendm à la police de la nat,igatùm
l'arrêt de 1790. Ils sortaient aussi de l' arrêt de 178 1. Ils sortaient aussi de
toute la série des titres prod uits en 1790 par M. de Ga lliffet. II suffit de \'oir la
.. et des pêcheries dans les étangs de Berre et de Caronle. "
L'arrêt 'de 1790, en maint enant celui de '1781, précisément contre ceux qui
production qu'i l Nt à cell e époque. L'arrêt les éuumère tous. Ce so nt ceu x là
dcmanda ienlla suppression des !JoUl'digues et leur destruction, comme nuisibles
même qu'il invoque aujourd' hui.
à la nav igation et à la pêche, reJit donc une seconde fois ce qu'il 3vait déjà
Outre cette prem ière face de l' arrêt de 1790, nous en avons annoncé un e
établi contre l' amiral de France, exerça nt les droits de l' autorité publique.
seconde, tout aussi significa ti ve que la première. C'est celle dans laqu elle, on
L'a rrêt est complet; il n'y a plus de prétext e contre lui : l' État et tous les pê-
voit M. de Ga lliffet, en prése nce du second adversa ire qu e l'arrêt de 178 1 lui
cheurs, et Lou s les ri verains de l' étang de Berre et de Ca ronte sont cont rain ts de
avait susci té, triom pher encore de ses prétentions.
respecter les bourdigues; et co mm e dans l' arrêt de 1790 le mo lif déterminant
La co mmuna uté de Ma rtigues, ce ll e de Saint-Chamas, et les pêcheurs de ces
deux communau tés, réunis au sieur Coulet, procureur du Roi près le tribunal
es t l' arrêt de 178 1 ell es titres des concessions, c'est co mme droit de pro priété
qu e l'arrêt de ·1790 ordonne et veut qu'elles soien t respectées.
de l'amirau té de Martigues, ava ien t demandé contre M. de Ga lliffet, la rétractation de l'arrêt de 178 1 et la destruction des bourdigues comm e nuisibles lant
à la NAVI GATION QU'A LA PÈCUE.
Qu' importe, après cela, que r arrêt de 1790 ait restitué à l' autorité publique
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la police des éla ngs et de la mer de ~farligues? En quoi cela touche-t-i ll es bour-
les débou le comme n' élant pas fond és dans leur demand e. Il met sur icelle M. de
digues? On a vu que précisément en regard de ce point, et comme droit riva l
Galliffet hors de COUl'. Rien ne s' opposait donc, dans les qualilés des interv ena nts,
de celui de la pêche, reco nnue libre sur les éLa ngs, l'arrêt a excepté de cette
à la ré tractation de l'arrêt, si cette rétractation n'avait pas rencontré dans le5
liberté les bourdigues. Avant l'arrêt de 1790, M. de Galliffet avait ou croya it
li tres tie propriété de M. de Gall iffet el des autres propriélaires de bo urdigues
avoir deux geores de droits sur ces étangs; le premier, relatif à leur police ,
ues obstacles
insurmontab l e~.
leur règlementation , la justice qui devait se rendre à leur uccasion; le second,
On dit encore, 10llt aussi vainement, que l'arrêt ne qua lifia pas les droit. que
la propriété de trois bourdigues. Par l'arrêt de 1790, il perd le premier ; mais
ceux-ci pouvaient avoir sur les bourd igues, et qu' il leur dérendlt même de les
il conserve le second . L'un \'a se réunir aux mains du pouvoir royal, comme un
exercer sa ns avoir produit leurs titres. Mais c'est là un renverseme nt com plet
fractionnement qui en éta it sorti et qui devait remouter à 5a source ; I"autre
des termes et du sens de rarrêl. fait à plaisir par les pêchenrs; et il est douleux
reste dans le patrimoine privé de celui qui le possède à titre de propriétaire. Si
qu ' ils aient pu croire eux-mêmes un instant à ce qu 'ils avança ient. Le droit que
quelque chose pouvait prouver la force de ce droit de propriété , c'est sans
M. de Ga ll iffet et les autres propriélai res de bourdigue sont reco nnu s avoir sur
doute la victoire qu'il obti nt eo 1790 , à l' époque où rien d'ill égitime, ou de
elles, est suffisamment qua li fié par la relation intime de r arr!'! t ue 1790 avec
douteux, ne survécu t aux efforts soit de nos assemblées législatives, soit à ceux
celui de 178 1. Celui-ci le qualifiait droit de propriété ; l'a ntre le qualifie de
des tribunaux adm inistratifs ou civils.
Quelle puérilité d'ajouter à ce premier argument, que si l'arrêt n' enleva pas
la propriété des bourdigues, c'est que l'État n'y avait pas conclu et que les
'intervenants qui demandaient la rétractation de l'arrêt de 1781, ne' furent pas
appu yés dans leur réclamation par rÉtat 9 On se trompe ici de toul point. L'É lat,
dans la personne de l'amiral de France, avait demandé dans ses conclusions
qu'il fut fait aux éla ngs l'application de l'article l e" lit. l e" livre 5 de 101'donnance de 1681. C'élait sans distinction demandel' peut-être implicitement
que cet article s'étend it à tout. Cependant l'arrêt y apposa la restri ction que
l'on connalt.
De plus, quand même il en eut été de la part de l'Étal comme on le préteud ,
le droit des intervenan ts était entier et complet. Il se suffisait à lui-même.
Demandeurs en tierce-opposition contre rarrêt de 1781, comme tiers non ouïs,
ils y avaient été déclarés recevables ; et rarrêt, ell prononça nt , ne les renvoit
pas de leur action , comme s' ils n'avaient pas eu qualité pour la form er, mais il
même ; la conséquence est forcée. Il n'a vait plus besoin de le reùire et de le
répéter. Comment, en triomphant, leur droil se serait-il altéré? Dans le passage de 1781 à 1790, rien ne l'avait diminué. Et l'arrêt de 1790 étant la confirm ation pure et simple de cdui ùe l 'i81, il n'e n peut être autremenl.
En outre, la lecture seule de l'arrêt démontre qu'a ucu ne production de titres
n'l Ieur fut imposée à nouveau et comme condition du clroit à eux reconnu. Tou6
les titres avaient été produits dans le cours de l'instance. Il surfit de lire la longue
et très délai llée nomenclature qui est contenue ùans le préambule de l'arrêl,
pour se convaincre qu' il n' a demand é plus rien quant à ce. Il statuait SU I' le vu
des litres. N'est-ce pas fo li e de sou tenir qu' il fut rendu sa ns leur production ou
leur examen? Et (jIJ e le consei l d'Élal aurai t fait tl'iompher la ca use des propri étaii'es des bourcligues, en rejetant et renvoya nt à un e époflu e qui deva it
.
At a' uu temps indéfini non marqué dans le disposi tif de sa dé-
sUivre son arrt::
1
1
cision, et il un e autorité qu'i l ne désigne pas non plus, le soi n de faire celte vérificatiou el de la juger?
�86
Enfin le dernier argu menl du mémoire de~ pêcheurs con Ire
87
rarrêt
de .\ 790
glemenls protecteurs soienl même modifiés, en un point ou en un aulrr, jusqu'à
ne vaut pas mieux que les précédents. Ce n'est pas à la discrétion arbi traire des
ce qu e le pouvoir souvera in y ait dérogé. De telle sorIo que tout cc qui tou che
règlements passés ct ruturs qu'il subordo nn e le droit de propri été des bournigucs;
aux bourdigues participe ou doit participer de la stabi lité ct do l'immutabilité
e~
ici encore on a mal lu , mal appliqué, et mal ent endu ses term es et son esprif,
du droi\ de propriété qui caractérise ces bourdigues ; ct bien loin que cc droit
t 'arrêt d'abord se serai t mis en con trad ict ion arec lui-même, puisque, tout en
puisse flott er au gré des règlemeut s, les règlements ellx-u,Cmes Mjà ex istant.
déclarant la pêche libre dans la mer de Martigues, il ava it excepté de celle
en 1790, ne peuven t pas même changer au gré ri es adminislratNII'S suba lternes .
.<\.
liberté accordée au public, les bourdigues.
défaut de ce tte partie de l'arrOt , serait-ce de la seconde que le mr moire des
A ce premier point de vue, qu'on ne dise clonc pas qu e l' arrêt a it pu vou loir
pècheurs a voulu se prévaloir ? Serait-ce de celle où il est dit , au sujel du
soumettre ce droit de propriété à des règlements capables de climinuer cell e
déboutement prononcé con lre les habitants de Martigues, St-Chamas ct autres :
première conséq uence de ce droit de propriété, ct cl en lever à M. de Ga lliffet et
" Les met hors de cour, Salir à éll'e ultérieurement pIJU1't'U, a ins i qu' ·il appart ielldra ,
aux autres propriétaires de bourdigues, le droit d'user seu l, librement , et sa ns
" à la police de la navigation et des pêcheries da/ls les étangs de 8erre et de
l'admission du public dans leurs ea ux, de leurs boUt'digues particuli ères. Cela
({ Caron le?
~his cette réserve ne détruit en rien le droit de propriété reconnu
ressort suffisamment de l'arrêt.
l'
Sllr
les
Mais de plus on se trompe sur ses term es.
hourdigues. En France, tou tes les propriétés sont soumises à des lois cie police.
La première partie de son tex te où il est question de règlement, est cell e où
Cell es-ci n'a ltèrent pas 18 dl'oit de propriété: elles ne le fout pas perdre ; elles
il est dit: " Veut au su rplus sa majesté que l'arrêt de la chambre des compt.es
" de Provence , du 9 avri l 1ii68, et les arrêts et règlement s rendus en con" rormité soient exécutés par provision et jusqu'à ce qu'il en ait été au trement
" ordonné, en ce qui ne sera pas contraire à l'ordonnance cie 1681 .• Ma is il
est évident que ce n'es t pas de cette clause qu'on veut parler. Elle est tou te à
l'avantage cles propriétaires des bourdi gues. Cet arrêt du 9 avri l 1568 est celui ,
commeon l'a déjà dit plus haut, qui rait respecter les limites des bourdigues ,
qui en pl'Ohibe l'accès aux pêcheurs, qui les co ndamn e quand ils violel'Ont ces
limites et ces enceintes. Les autres qui \' ont sui vi, ont été rendus dans le même
but et dans le même dessein. Il n'y a donc rien là qui justifie l'obj ection des
pêcbeurs; et l'on Ile voit pas quelle alleinte leur droit de propriélé peut recevoir
de ces règlemenls qui ont élé raits pour les protéger.
Nous dirons même plus : c'esl que celle clause ne permet pas
r
que ces rè-
règl ent seu lement le mode de la jouissa nce des choses. Ain si . pal' exemple,
le propri étaire d' une maison est asseni par les lois de police à disposer ses toits,
ou l'écoulement de ses ca ux ménagères sur la voie pub lique de telle ou telle
manière . Ai nsi encore, la sai lli e des auvents , l'entretien Ju pavé, si tué en face
de chaque maison, l'éléva tion ou la largeu r des marches qui servent à 1introduction de
!lOS
demeures; tout cela ct une rOll le cie prescriptions semblables,
·accompagne en France r exercice du droit cie propriété. Dira-t-on pour cela que
le droit de propriété change de nature; que mailre de ma mai son, je n'en suis
plus qu' 110 possesseur précu ire, qu'on pourra m'évincer quand on le voudra;
que si on veu t, dans un but d' uti lité publique qu elconqu e, s'emparer de ma
propriété, on sera autorisé à nc pus m' cu payer préalabl~menlla "aleur? Qu'on
pourra enfin me placer sous le régime clu bon plaisir pour me dépouiller? Non,
sa ns doute.
�88
89
On peut encore multiplier les exemples. Les propriétaires de champs et de
police et de règlcmentation. ~ais aussi il est impossible, quand vis-à-vis des
fonds de telTe peuvent être asservis, par des lois de voirie, à établir des fossés
autres espèces de propriété, ce drnit de règlementation ne peut aller jusques à
le long de leurs propriétés; à planter des arbres pour r ornement des voies pu-
eu changer la nature et les principes, qu'on fasse contre les bourdigues une ex-
bliques qui les bordent, à ne pas jeter sur celles-ci des amas de pierres ou des
ception que rien ne légitime, et qu'on les range dans un ordre d'idées et de
immondices, ou des ea ux qui auraient leur écou lement ailleurs Dira-t-on qut'l
principes exceptionnels et hors do droit commun.
leur droit de propriété est altéré ou changé pour cela? Non, sans doute encore.
Ainsi toutes les objections accumulées par les pêchenrs contre les arrêts de
1568, 170 l, 1781 et 1790, se sont évanouies. Il n'a suffi pour cela que de
Pourquoi ùonc le soutiendrait-on pour les bourdigues, parce que à leur occasion , il est dit dans l'arrêtcle 1790, que le pou\'oir royal, tout en reconnaissant
rétablir ce qui avait été altéré, et de porter la lumi ère dans l'amas incohérent
ct indigeste de leurs objections.
qu'ell es cons titueut UII véritable droit de propri été , se réserve de fair e les règlements nécessaires pOlll' la police de la navigation et des pêcheries de Berre et
de Caronte? Cela ne peut pas avoir ici une significa tiou différent.e de ce que
n~lIS avons vu plus haut pour les maiso ns et les fonds de terre. On conçoit, en
§ V.
effet., que dans le mode de jouissa nce des bourdigucs, il y ait des règl ements de
REPONSE A LA CINQUIÈME OBJEC:T10N.
police à faire,
Olj
à restl·cindre. Ainsi, par C'xemple, le creusement ou recII-
rement des canaux peut intéresser le public. Les caux ùe la mer passant par
ces canaux pour se rendre à l'étang de Berre, ùans la localité qui nous occupe,
et. ces canaux, servant aussi de conducteurs au poisson , pour aller tic la mer à
Le mémo ire des pêcheurs consacre une longue dissertation à établir que les
l'étang, on comprend le droit à règlementer cela par des lois de police. Mais le
ti'tres et la longue possession de M. de Galliffet et des autres propriétaires de
droit de propl'iété sur la bourdigue est toujours intact, entier et complet. Il n'es t
bourdigues, sont vains et inutiles, parce qu'ils auraient port é sur la mer, qui est
pas changé. Il subsiste, comme quand il s'agit de nos maisons ct de nos fond s
de terre.
une dépendance du domaine public, et parce qll'il était, selon lui, de principe
autrefois qu e le souverain ne pouvait faire aucune aliénation du domaine public
et que nu lle prescription de ce même domaine n'était admise au profit ùes tiers.
L'arrêt de ~ 790 n'a donc émis ici qu' un principe ordinaire, commun, partout
et toujours admis. Ce n'est pas une restriction spéciale et particulière aux bour-
Pour le prouver, le mémoire cite un fragment de dissertation de Proudhon ,
\' opinion de M. Troplong et celle de M. Pardessus.
digues qui est apportée à leur manière d'être: c'est la règle ordinaire qui leur
' Nous verrons tout à l'heure ce qu'il faut penser de l'opinion que l'on prête
est appliquée, et les propriétaires de ce genrede domaines n'ont jamais prétendu
à ces auteurs, ou :}u' on leur emprunte.
Mais avant, il faut élucider cette qu estion et montrer que le premier mot de
qu'ils ne fusseut pas asservis , comme toutes les autres propriétés, aux lois de
�90
celle matière, le principe élémentaire de toute discussion sur le domaine public,
tel qu' il éta it compris autrefois, a été omis ou oublié par les rédacteurs du mémoire des pêcheurs.
So us l'ancienue légi. lation française, le domaine public et le domaine de la
couronne ét~ient confondus sur la tête des souverains. Ils résidaient exclusivement en eux. Les souverains pouvaient aussi également eu disposer, l'aliéner,
en un mot le transporter à autrui d' une manière définitive et absolue. La mer,
comme les neuves navigables ou notlables, comm e les terres et les domaines ordinaires , tout pouvait devenir l'obj et d'une vente, d' une aliénation , d' un
transport.
Il faut savoir juger les époques historiques par leurs lois : et ne pas transporter
au moyen-âge les iMes, les principes ou les systèmes qui n'ont prévalu qlle
plus tard.
La séparation du domaine public, du domaine de la couronne est moderne.
Elle ne s'est faite que dans le siècle dernier; et c'est alors seulement que r on a
pu dire, avec une certa ine exactitude, que ce qui était permis au souverain
relativement au domaine de la couronne, pouvait ne pas l'être du domaine
public.
Les auteurs juridiques les plus exacts le professent et renseignent. Il nous
suffira ùe citer Merlin, Répertoire de jurisprudeuce, VU du Domaine public,
p. 732, p. 7ol9, édit. 5·: - Le nou vea u Denizart, V ODomaine de la couronne,
p. 593; - Serrigny , Traité de la compétence administrative, t. 2, nO74-1 ,
p. '125.
Nous pou rrions déjà conclure, avec cette seule donnée, qu e le mémoire des
pêcheurs commet ici une grande erreur, et que, puisqu'à l' époque à laquelle
remontent les titres de M. de Galliffet, le domaine public et le domaine de la
couronne étaient éga lement con fondus sur la tête des souverains et également
aliénables par eux , l'argument est fautif , et qu'il aurait fallu démontrer pour
91
être concluant, que l'aliénation dl] domaine de la couronne n' était pas licite , .
ni ce domaine prescriptible.
Ma is avant, nous aimons mieux montrer toute l'étendue de l'erreur que nous
combattons en ce moment.
La législation ancienne repose, en effet, sur celle idée, qu e le souverain était
maitre de ce qu'on range aujourd' hui dans le domaine public, à l' égal de ce
qui était du domaine de la couronne. Elle appelle même chose du domaine de
la cou.ronne, ce qu'aujourd' hui on range dans le domaine publi c.
L'ordonnance des eaux-e t-forêts de 1669, déclare, titre 27, article H, que
les ri vières et neuves navigables {ont partie du domaine de la couronne. - Les
édits de 1683 et 1693 ( p. 209 et 425, collection des lois anciennes d' Isambert),
le répètent dans leurs préambules.
L'ordonnance (le la marine de 1681 est fond ée sur le même principe. Il est
éCI it dans les ar'ticles suivants: arl. ", tit. 3, liv. 5; article 9, eod. : articles 1
et 2, tit. 4.
Et les écri va ins juridiques qui se sont occupés de ces matières disent énergiquem ent et avec vérit é, que la mer appartient au souverain.
Valin. 1. 2, p. 691, le dit en propres termes. Il professe que le souvera in peut
se réserver à lui-même le droit d'y pêcher,
0(1
de le céder à qui bon lui semble.
Et Valin cite Duperier, t. 2, p. 463; -Boutaric, p. 128.
Le même auteur répète le même principe, p. 732, et à la p. 624 il l'établit
avec encore plus de force (V. Valin, édition de 1776 ).
Julien, dans ses Éléments de jurisprudence, p. 137, parle comme Valin , et
Il cite à l'appui de sa doctrine Lebret, Traité de la souveraineté du roi , liv. 2,
chap.
Il,
et Grotius, liv. 2, chap.
JJ1,
nO8.
Joignons à ces principes les exemple et les cas d'application .
\1 n'est pas rare de voir, en effet, dans nos lois anciennes des droits de pro-
�92
93
priété, acquis par prescription ou concédés sur la mer par les so uverains de la
La mer, comme les fleuves, était une dépendance du domaine de la couronne.
France.
Celle-ci é ta it avant 1566 a liénable et prf'scripti ble. Rien donc ne saurait man-
L'art. 4-, tit. 3, li\'. 5 de l'Ordonnance de la marine de 1681 , conserve les
parcs dans la construction desquels il entre du bois et des pie'r res, sï ls ont été
quer à des titres e t à une possession qui s'appuyent sur toute une législa tion si
forme lle et si précise.
bâtis avant 15H, conformément aux articles H et 88 de l'ordonnance de 1584
qui n'exigeait qu'une possession de quarante ans.
Au surplus, on croira bien plus faci lement à ceUe ancienne législation, si l'on
L'a rticle 9 du même titre maintient ceux qui sont en possession avant 15H
veut bien examiner de près celle qui nous régit. En l'étudiant attentivement,
de lever les droits, en deniers ou espèces, sur les parcs et pêcheries, qui se font
on voit très clairement que celle-ci ne prohibe , même pas aujourd' hui, il l'État
en mer, ou sur les grèves, et qui ont partie de la mer pour y pêcher à l'exclusion
l'al ié nation des choses du domaine public, et que la mer, ses rivages, les lais et
des autres, en le prouvant par aveu et dénombrement aux cbambres des
relais, pe uve nt être aliénés par lui d'nne mani ère définitive e t absolue.
comptes.
La même ordonnance. même livre, consacre la propriété de ceux qui possèdent des parcs e t pêch eries au bord de la mer. E lle les nomme propriétaires,
a rt. 2 du tit. 2; et article 43; tit. 4- des madragues et des bourdigues, art. 3,
6 el 8.
On y trouve e ncore établi le droit du roi de concéder des pêcheries dans la
mer. L'article 1 er , tit. .~, veut que personne ne puisse poser des madragues en
Iller et des bourdigues sans la permission du roi. 1\ peul donc en donner.
Le même droit qui existait en France , avait existé ct é tait en pleine vigueur
en Provence.
L'édit ùe 1668, rapporté plus haut, le démontre. L'opinion de Julien, déjà
cité, le prouve; et on peut y joindre encore celle de Coriolis, Tra ité de l'administration de Provence, t. 2, p. 258.
Que faut-il donc de plus pour repousser la d istinction du' mémoire des pêcheurs? Qu'importe, répondrons-nous, que les titres de M. de Galliffet, ou sa
très longue possession, aient porté sur des fractions de la mer, et sur ce que
vous appelez des dépendances du domaine public? D'après le droit ancien , le
souverain pouvait en disposer , l'aliéner, le transporter. Ici il a usé .III son droit.
C'est ainsi qu e les lois du 11 nivôse an
Il
e t 21 prairial an " , ont consacré la
possession des parties du doma ine pub lic maritime.
C'est ainsi <lue l' article ft 7 de la loi du 16 septembre 1807 pe rmt'L r aliénation
des relais de la mer.
C'est ainsi encore que les lois. des 29 juillet 1829 et 3 avril 184.6, ont sanctionné l'aliénation d' une partie de mer, du havre de Courseulles, au profit ù'un
particu lier.
C'est ainsi enfin qu' un arrêt de cassation du 3 novembre 18'24-, l'a aussi jugé>
e n permettant
r exercice
ù ' une action possessoire relativement à des relais de
la mer ( Da lloz, a lphabét., t.
XI,
p. 2H ).
Et si aujourd'hui l'état peut, avec les formes indil\u ée~ par la loi, aliéner une
partie plus ou moinsgrandedu domaine public maritime, comment les souverains
sous l',,ncienne législation, ne l'auraien t-i ls pas pu? En eux résida it alol"s là
plé nitude de la souveraineté. Les formes, exigées par la loi, n' é taient autre que
l'acte régu lier qui renfermait l' expression de leurs volontés. Quand cet acte
ex istait et était produit par eux, l'a liénation é tait définitive et absolue.
L'objection du mémoire des Pêcheurs n' est donc vraie ni pour cequi concerne
l' ~ ocienne législation, ni pour ce qui concerne la nouvelle.
�94
95
Faut-il maintenant répondre aux autorités dont on a emprunté le nom ? On
fond é le droit ùe propriété de la pêcherie. Le mémoire n'en dit rien. Et c'est
voit d'abord très aisément, par les passages des auteurs cités , que ceux-ci n'ont
cependant le point qui seu l pouvait fournir matière à argument.
touché à aucun des points de législation ancienne, par nous rapportés. Ils les
D'ailleurs, dans l'espèce , nous avons pour les bourdigues de M. ùe Galliffet,
ont ou omis, ou oubliés.
les décisions du consei l d'Éta t tontes opposées, celles de 1781 et de 1790, qui
Ils se son t, en seconù lieu, surtout préoccupés de l' éta t de la législation
ont au contraire considéré ces bourdig ues comme une propriété. Que veut-on
moderne. Ils parlent du domaiue public de nos temps actuels. Mais ils se taisent
de plus?
sur l'époque où le domaine public é tait confondu avec le domaine de la cou-
Comme titres et comme exemples de la jurisprudence du conseil d'État,
ronne.
il n'y a rien de plus décisif.
Enfin ils parlent du droit postérieur à l' époqu e de 1566, où l'aliénabilité du
domaine de la couronne fut proscrite. Ils se taisent sur le droit qui était e n
vigueur avan t..
•
§ VI.
Encore moins se sont-i ls occupés des ali éna tions du domain e public, faites
dans les provinces plus tard réunies à la France, mais réa lisées avant cette
R ÉPON~E A LA SIXIÈME OBJECTION .
réunion.
Avec de telles dissemblances, qu e peut au procès actuel, l'opinion de ces
auteurs juridiques? Rien sa ns doute, puisqu e les questions qu' ils ont traitées
sont diverses et que même, dans le coup d' œi l qu e l'un d 'e otre eux a jeté SlJ r
l'ancienne législation, il a commis tant d 'omissions , ou tant d'oublis.
Le mémoire ùes Pêcheurs se préva ut ici des lois des 6 et 30 juillet 1793, et
8 frimaire an
Il,
qui ont supprimé les droits exclusifs de pêche da ns les fleuves
el rivi ères, pour en conclure qu'elles ont aussi supprimé la propriété des bour-
digues.
On a déjà ùans le premier mémoire, publié en 18~6 , réfuté cette obj ection.
Comme dernier arg um ent , ou du mOins co mme ex emple justificat.if de ses
Le mémoire des pêcheurs, malgré cette première démonstration, a insisté, en
théories, le mémoire des Pêcheurs cite un arrêt du conseil d'état du 4. août
invoquant des autorités nouvelles. Il faut donc reprendre de plus haut et d' une
1762, qui aurait refusé à une dame de Montréal une ind emnité, pour la pert e
manière complète ce point. Ce sera le seu l moyen de bi en apercevoir l' erreur
ùe sa pêcherie, entrainée par l' établissement du canal de navigation de Cette
g rave dans laqu elle on veut induire les tribunaux admini stnllifs, et la fausse
au Rhône, et ce par le motif que l' étang, où elle se trouvait, communiquant
a pplication qu e l' on fait des autorités invoquées.
avec la mer, un particulier ne pouvait avoir la proprié té de celle-ci.
L' important aurait été de connaltre de qui émanait le titre sur lequel é\a it
Une première raison de suspecter l'opinion du mémoire des Pécheurs , c' est
J'ex istence, conti nuée jusqu ' à ce jour de la propriété des bourdigues sur la tête
�96
97
de M. de Galliffet et des autres propriétaires, sans qu'aucune autorité ne se fuI
certaines coutumes, contesté par certains âuteurs, et de fait exercé et admis
doutée, depuis 1793, de I(lur illégalité, ni de leur suppressioô, si elle avait été
presque partou!. On peut voir sur tous ces points. Merlin, quest. de droit, v.
portée ou con ten ue dans oes lois.
Cl' qui augmente l' ét<>nnement, c'est que l'État, qui s'est trouvé pendant
pêche,
t'émigra lion de M. de Galliffet père , à ses droits et à sa place, n'eut pas luimême supprimé de fait cette propriété, si elle avait été supprimée déjà de
droit depuis 1793; qu'il ait an contraire joui, comme ses prédécesseurs; et
§ 4.
la légis lation pour la pêche dans les fleuves et rivières navigables et /loUables, était fixée par l'ordonnance des eaux-et- forêts d'aoùt 1669.
Celle pour la pèche maritime était toute entière et exclusivement dans l'ordonnance de la marine de ·1681.
quOenfin, lorsque le moment de restituer à l'ancien propriétaire les bourdigues
qui lui appartenaient est arrivé, l'État les lui ait rend ues sans diminution aucun e
de leur efficaté et de leur puissance.
A côté de cet ordre de législation et en dehors se trouvaient les
lorte de propriétés particulières à la Provence et à nos côtes de la Méditerranée.
A ne juger l'argument des Pêcheurs qu' à raide de celle considération, il est
déjà bien difficile de ne pas le trouver fautif.
Elles avaient tant d'importance; elles constituaient si hi en une propriété
privée (omplète, que l'ordonnance de 1681 leur consacra un till'e spécial; et
Que sera-ce quand tout ce qu'il y a à exposer ici sera connu?
qu'elle en déclara les possesseurs
Or à cet égard , voici qui est certain et ce que le mémoire des Pêcheurs a
les articles 1 à 8 qui le firent.
complètement méconnu et oublie.
PROPRIÉTlJftES.
Ce fut le ti tre
~
du liv. 5 ; et
Il ya plus; ces propriétés furent en Provence, de la partde l'autorité publique ,
Il y avait autrefois, dans la législation fran ça ise, trois ordres ou trois espèces
de lois sur la pêche:
l'objet de règlements spéciaux; el il faut citer parmi eux, en première ligne ,
l'arrêt de règlement de la cour de la chambre des comptes, du 9 avril 1568,
1 ° Le droit féodal qui donnait aux seigneurs la faculté et le privilège :J'e
pêcher, dans les riviéres non navigables, ni /loUables, à
DODROlGUES ,
l'E'xclu~ion
des parti-
culiers, le long même des propriétés riveraines ;
2° Certaines lois civiles qui règlaient la pêche dans les /leuves et rivières
navigables ou flottabl es;
ainsi que ceux des anuées 1516, 1526 et 1675.
Elles furent encore, en 1781 et en 1790, l'occasion de ces deux décisions
solennelles du conseil du roi, déjà rapportées et examinées, qui les placèrent si
énergiquement au rang de propriétés incommutables.
Enfin elles avaient surtout subi, en 1783, une épreuv e particulière et juri-
3° Enfin certaines lois civiles qui règlaient la pêche maritime.
diqu e, de laquell e elles sortirent avec le caractère, désormais in con testable, de
Ces trois choses étaient bien distinctes et ne se confondaient pas, Et chacune
propriétés immobi lières. Il fut jugé par arrêt de la cour des comptes de Pro-
ava it ses règles propres.
Le droit privilégié des seigneurs leur était atlribué par le droit commun
féodal. C'était par analogie de ce qui était admis par rapport aux chemins vici~
naux ou publics, dont-ils étaient censés avoir la propriété. Il était accordé par
vence, le 10 avril 1783, que les bourdigues de Martigues et du port de Bouc
demeureraient sur le cadastre d ~ cetl e communauté pour y être imposées à la
taille, c'est-à-dire, à l'impôt foncier supporté par les immeu bles.
Le débat de celle question fut important. Il était engagé entre les propriétaires
�98
99
des bourdigues de Martigues et de Bouc, d'une part; la province, rep résentée par
vières non navigables ni flottables, à la pêche dans les rivi ères navigables et
les procureurs du pays de Provence; et la communauté de Martigues, de l'autre.
fioltab les, à la pêche maritime et aux bourdigues de la Méditerranée,
Les premi ers cherchaient à faire alléger leur position et diminuer leur cotisatio n_et imposition.
Voyons maintenant ce que fit la législation intermédiaire sur toutes ces dis-
Les parties adverses demandaient le maintien de ce qui s' était pratiqué
jusques alors, et vou l<lien t qu e l'impôt fonci er fut supporté par les bourdigues
comme les champs, les fonds de terre, , les immeubles.
positions législatives; ce qu'elle en supprima, et ce qu'elle en a co nservé.
C'est, on le voit, marcber vers ULle solution el arriver à \' objection même du
mémoire des pêcheurs.
Or, sur ce point, voici encore qui est certain et qui ne sa ul'a it être contesté
Sur ce, l'arrêt du 10 avril i 78;) ordonne:
• Que les boure/igues près du Martigues et du port de Bouc
DE~Eun EnONT SUR
par perso nne,
CO~lIUN.'UTÉ, POUR Y ÈTRE IMPOSÉS A LA TAILLE, savoir:
•
LE r.ADASTRE DE LA
«
les sèdes desdites bourdigues cultiv ées ou culli"ables , pOlir Ioule leu?' valeur,
Les articles 2 et 5 du décret du 25 aolÎt 1792 , en aboli ssa nt tous les droits
• comme les autres biens fonds du terroir, et les pêcheries ou lesdiles bourdigue5
féodaux, abolirent aussi celui de pêche exclusif, que le droit féodal attribuait
• pour la moitié de leur valeur , conformément à la règle établie par l'article 2
aux seigneul's, dans les rivières non navigab les, ni flottables, ct ce au profil des
«
de nol1'e déc/w'ation du 9 juillet 171 5, concernant les l'ltOuZ,ins, les mm'tillets et
• aut?'es effets de pareille nature: à l'effet de quoi , la cour a ordonné et ordonne
propriétaires ri verains.
Les lois des 6-30 juillet 1793 et 8 frimaire an
Il
(28 novembre i 793), le
• que par les experts qui procèdent actuellement à la confection du nouveau
disent for mellement. Ce fut là leur but principal. On s'en convaincra, en consul-
• cadastre , lesd it es bourdigues seront estimées et allivrées sur le nouveau
tant lellr tex te:
• cada,tre con forméme nt à la règle ci-dessus.
»
C' est ainsi que l' ancienne législation et l'anci en ne jurisprud ence avaient constitué ou reconnu la constitution et le caractère des bourdi gues, Une bourdigue
étai t un immeuble imposé, et imposé à l'égal d' un moulin, d' un e usin e immobilière, pour la valeur de laquelle, il fallait prendre en co nsid ération les dépenses d'entreti en et de conservation, en tral nées pal' son exercice et sa jouissance, afin de ne pas l'imposer trop fort ement et pour une valeur in trin sèqu e
qu'elle n'aurait pas eue en réalité.
Voilà, en résumé, toul ce que l'ancienne légi~ la [.ion avait de di sposilions légis!atives différen tes par rapport au droit privilégié des seigneurs dans les ri-
La première, du 6 juillet 1793, porte:
• La com'ention nationale (V, pour le surplus, p. 87 du mémoire de i 846) .•
La deuxième du 30 juillet même année , dit : " La co nvention nationale
(V. id., p. 87 de id. ).
II
La dernière , du 8 frimaire an
Il,
répète encore: , La convention nationale
(V, id" p, 88 de id.:'
Celle-ci fut rendue sur la pétition de plusieurs habitants
RIVERAINS DE LA SE INE
qui demandaient. la suppression du privilége exclusif de pêcbe; et on leur répond que l'abolition est déjà prononcée par les deux décrets précédents.
Impossible dolic de se méprendre. C'est du droit féodal supprimé qu'il s'agit
dans ces lois,
�100
C'est aussi ce seus et celte portée que M. Merlin donne à ces lois, au mo~
organiser la pêche fluviale, Mais encore elle n'est pas allée au-delà; et les lois
pêche, § 1, de ses questions de droit, puisqu'il les rapporte comme preuve de
sur la p~che mal'itime et celles sur les bourdigues ont été maintenues dans
son abolition.
toute leur force et leur vigueur.
Nous allons en rapporter les preuves.
La jurisprudence du consei l d' État est allée même plus loin.
Elle a conclu, du texte de ces lois , que les droits exclusifs de pêche , qUI
La législation intermédiaire s' est occupée de deux manières différentes de la
avaient été concédés dans les rivières navigables et flottables , et qui avaient fail
propriété cles bourdigues: une première fois, en maintenant dans toute sa
l'objet de rarticle .\.1 du lit. 27 de l'ordonnance de 1669 , avaient ~té égaie-
vigueur r ordonnance de 1681 sur la pêche mari lime ; une seconde fois, quand
ment supprimés par elles.
cllea réglé le sort des aliénations du domaine public, faites avant 1566, et celles
C'est ce que le conseil d' État a pensé par un aVIs du 30 messidor an
XII ,
approuvé le 11 thermidor suivant.
à leur réunion .
Cet avis ( rapporté par lIIerlin, quei!. de droit, v· pêche,
§ 2) , décide en
effet: • Que le droit de pêche, dans les fleuves et l'ivières navigables, est irré«
vocable ment anéanti par la loi du 17 juillet 1793 , dans les mains de ceux
1
qui en jouissaient, soit particulièrement,
soi~à
titre d'engagilite ou d'écbau-
• giste, lors même que les titres de possession seraient antérieures à 1566.
C'est aussi dans ce sens et en force de l'avis précité, que fut rendu au conseil
d' État, le décret du 11 avril 181 0 , dans la cause du sieur Leuffroi-Lerollx
qui avait été maintenu, par un
arr~té
faites, dans les provinces plus tard réunies à la France, à une époqu e antériellre
du conseil de pré(ecture du dépm'tement de
Voici le texte cie la première : la loi du 8-1'2 décembre 1790, destinée à
conservel' les lois anciennes sur la pêche maritime, s'exprime en ces termes:
«
Art, 10 ' .
TOUTES LES LOIS, STATUTS e t nÈGLEftlENTS SU R LA POLICE ET LESPROCÈDÉS
par ticulièrement les règlements sur les (aits et procédés de la pl!che
1
DE LA PECUE ,
«
en usage à !Jlarse-ille, autres que ceux du 29 décembre 1786 et du 9 mars
«
1787, seront provisoirement exécutés, l'assemblée se réservant, aprés lat'évision
• desd'ites lois, statuts e t 1'èglements, de (ormel' UII1l0UVeau code de pêche. "
l'Eure, du 16 juin 1807, dans la propriété et possession d'une pêcherie située ell
Bien loin donc cI'inno\'er, ou de détruire, cette loi confirmait tout à la fois
et d' un seul coup les lois sur la p~che maritime, et celles qui règlent la propriété
la rivière de Seine, sous une des arches du pont de Vernon, dite l'arche du Salt/aJ.
des bourdigu es; el elle étendait sa prévoyance non seulement jusqu es à la
L'unique motif qui lui sert de base, c'est l'avis du co nseil d'État, approuvé le
conservation cie ces loi s, mais encore jusqu'à celle dei statuts et règlements qui
11 tbermidor an
:UI,
Tous ces détails sont extraits du recueil des arrêts du Conseil d'État, LedruRollin, t. 1, p, 292,
Mais la jurisprudence, comme la législation intermédiaire se son t arrêtées là.
La loi du 15 avril 1829, dans des temps plus raprochés cie nous, ~st venue
les concernait.
Elle aononçait UD e révision qui n'a jamais eu lieu: et comme jusqu'à ce
moment r ensemble de la législation ancienne doit subsister. Il est vrai de dire que
nous sommes aujourd' hui régis comme nous rétions avant 1789, par les mêmes
principes touchant la pêche maritime, et touchant la propri été des bourdigues,
et notamment par les arrêts du Conseil d'État de 1781 et de 1790,
�102
103
Mais ce n' est pas seulement d' une manière généra le et implicite que cett e
législation intermédiaire a maintenu la propriété des bourdigu cs: elle s'en est
législateur de 1i90 ct des années subséqu entes, peut-on s' emp~ch e r de voir qu'i l
ya ici deux orù res de dispositions législatives opposées? Qu' il ne faut pas les
expliquée eucore , lorsqu e s' occupant du sort des aliénat,ions du doma ine pub lic,
confondre? QU'OII ne peut de l'une co nclu re à l'autre? Que chacu ne doit êt re
faites sous l'ancienn e monarchi e ou dans les provinces de la France, avan t leur
main tenu e, telle que le législateur ra voulu? Et qu'enfin le mémoire des
réunion, elle a fix é les principes de législation qui seu ls leur so nt applica bles.
C'est la loi du , er décembre 1790 qui , d'abord pronon~" sur ce point, art.
pêcheurs, en fa isant le contraire, brouille, mêle et confond dec choses distinctes,
ct porte à la loi une aLLeintevisible? Les lois des 6 et30 juil\et1793 et8 frimaire
3i; ce fut ensuite la loi du 14 ventase an "II, art. 2, qui le fH une seconde fois.
an
Il ,
aiusi que l'a vis du conseil d'état de \' an
XII,
et le décret de 18' 0, ne
La prem ière en di ,a nt : • Les dispositions comprises au présent décret ne
sont fait s que pour les droits exclllsifs de pêche dans les rivières : on ne peut les
• seront exécut ées à J'éga rd dps provinces réuni es à la France, postérieurement
étendre aux bourdig'Jes qui constitu ent des propriétés immobilières. Un ordre
• à r ordonnance de 1566, qu' eu ce qui concerne les aliénat,ious fai tes depuis
tout entier de législation s' y oppose, et les lois et,avi s précités ne peuvent préva -
• la date de leur ré unio~ respective ; les aliénrltions précédentes devant être
loir contre les lois des 8-,12 décembre 1790, 1er décembre 1790 ct 1q. ventase
«
1'èglées suirant les lois lors en usage clans ces provinces. •
an
VII.
La seco nde en disa nt aussi: « En ce qui concern e les püys réunis poslérieu-
t'analogie n'est pas possib le ici, no n plus, puisque les cas sont dissemblables
« rement à la publi ca tion de l'édit de février '1566 , les aliénations des domaines
LES LOIS
et qu e la loi les a réglés différemment.
Il n'y a donc qu'une seule conclusion à tirer de tout ce qui précède, c'est
cc LORS EN USAGE DANS LES PAYS RÉUN I S, OU SUlVA!'i'T LES TRAIT ES DE PAIX OU DE REUNION. »
que le mémoire des P6cheurs est tombé dans des erreurs très graves , et qu ' il
Voilà donc pour les bourdigues , aliénées par les mêmes souv erains de la
a chercbé il dénaturer les autorités invoquées pour leur faire dire ce qu'elles ue
«
faites avant les époqu es respectives des réunions seront 1'églées SUI \'An
Provence, aux auteurs de M. de Gall!tfet, une législation spéciale qui maintient un e seconde fois le droit en vigneul' en Provence, aux époqu es auxquelles
disen t pas.
L' a"is du co nseil d'é tat de l' an
répondent les titres d'acquisition des bourdigues. Voilà un droi t qui s'éca rte
rivières. \1 n'a ri en dit pour la mer, ni pOUl' les bourdigues.
singu lièrement des lois des 6 et 30 juillet 1793 et 8 frimaire an Il .
XII ,
en effet, ne s'est expliqué qu e pour les
Le décret de 18 10 aussi. Il a suffi d'en rapporter le texte pour le voir. Il est
qu elque coté qu'i ls vinssent, soit de l'usurpation , soi t de concessions et de
,
impuissant enco re deva nt les arrêts de 178 1 eL1790.
L'arrêt de Montpeli er du 20 jui ll et '181,3 relati f à r étang (le Sijean et au clro,t
titres.
de péche exclusif qu i y étai t prétendu, ne s' applique non plus qu' à un droit de
Celles-ci détruisaient et abolissaient dans les rivières les droi ts de pêche, d,e
Les autres, au contraire, maitiennent, conservent et perpétu ellt ce qui est ;
ou , pour mieux dire , elles le jugent comme le droit primitif l'a urait jugé.
pêche exclo sif. Il ne se préva ut pas non plus d'autres docum ents législatifs que
les précédents. \1 ne sa urait don c leur donner un e plus grande portée.
L'a rrêté du directoire exécutif dU' 29 germina l an
En suivant donc avec attention ces deux lignes differentes qu'a tracées le
•
\'1 ,
.
que le mémOIre des
pêcheurs dit avo ir été rendu pour les bourd igues et madragu es, et pour empê-
�105
104
d~ns ces provinces , en suivant les traités de paix et d' union, que la légitimité
cher que celles-ci ne fussent aliénées par l'Élat, ou soumissionnées dans ses
et l'irrévocabilité de ces aliénations sera jugée.
mains par des ti ers, oe raisonne encore que par analogie; et,il pose une ana-
A ce point de vue, le motifde l'arrêté démontre qu e ses auteurs n'ont pas
logie arbitraire.
connu toute la loi, puisque celles même qu'ils ont invoqu ées les condamne, et
qu'elle proclame le maintien de toutes les bourdigues, établies avant 1566, et
En effet, de ce que le décret du 28 septembre 1791 , secl. 1, tit. 1, arl. .\.,
dans la Provence avant sa réunion à la France.
porte que: " Nu l ne peut se prétendre propriétaire d'un droit exclusif des
c
eaux d'un fleuve ou d' une rivière navigable ou flottable", il conclut qu'il
Peu importe encore qu e l'arrêté se préva le de la loi du 8 décembre 1790 ,
en doit être de même pour les bourdigues. Et l'on a vu que ce raisonnement par
pour dire qu'elle a maintenu toute sa force il rordonnance dc la marine de 1681 ,
analogie ne pouvait être reçu.
et que celle-ci permet la pêche iDdistinctement à tout le mondc. C' est continuer
En ('ffet encore, il tire la même conclnsion des lois précitees des 6 et 30
e~
de ferm er les yeux â l' évidence; c' cst continner à ne prendre dans une loi
8 frimaire an Il; et c'est toujours le même vice d'argumentation .
qu' un article , que l'on croit favorabl e à sa ca use, et fermer l'œil sur ceux qui
Enfin, quand cet arrêté sort, par ses motifs, de celte voie et qu'il essaye de
suivent et qui y sont précisé ment contraires.
Eu effct, la même loi de 1681 qui déclare la pêche librc, reconnall, admet
. ," , arl .lc1cs l a' 8 , 'et défend
et co nserv e les bourdigucs dans le livre 5, lit.
jnillet ., 793
deux autres motifs, pour légitimer sa résolution, il n'est ni plus heureux, nI
plu s exact , ni plus complet dans le coup-d'œil qu'il jelle sur la légis lation.
Peu import e, en effet, qu' il dise avec le décret du 22 novembre-l er dé-
d' Y pêcher à ce ux qui n'en ont pas la propriété. Etla loi du 8 décem bre 1790 ,
cem bre -1790, par nous invoqué, que : • Les rivages, lais et relais de la mer ,
est cell e-là même par nous invoquéc, qui a maint enu tout es les lois, slaluts et
• les ports, les hâvres, les rades, et en géneral toutes les portions du territoire
?'èglemel1t~ ?'elatifs aux bou rdigues en Prov ence .
c
national qui ne sont pas susceptibles d'une propriété privee, sont considérées
L'arrêté nc pou va it don c êt!e ni plus inexacl , Di plUi iLl COlllpl cl.
«
comme des dépendances du domaine public. » L'arrêté oublie ici le principe
Oue faudrait-il donc en penser? Qu' il aurait méconnu la loi, et que s'i l avait
posé par celle loi même, qui excepte de la révocation les aliénations du domaine
public, faites avant l'édit de 1566, par les souverains de la France , sur quoique
ce soit qu'elles aieot porté, la mer , ses rivages, les lais et relais.
Il oublie qu'il fut une époque où ces aliénations étaient lici tes.
Il oublie aussi l'article 37 de cette même loi qui, pour lesaliéoa tion s faites daoi
les provinces non encore réunies à la France, renvoita~x lois en usage ùans ces
provinces, à l' époque où elles furent faites.
Il oublie enfin l'article 2 de la loi du 1 .. ventôse an
VII ,
qui répète le mêm e
principe ; en y ajo utant encore que ce sera aussi suivant les mêmes lois en usa"'e
"
/
été-a ppliqué et suivi il aurait violé ses dispositions. Mais le mémoirc des p6' 0 n cl ut en effet s'apercevOI r bIen
cheurs nOlIS apprcnd qu,.Il ne 1, a pas éte.
' , a.' réca l' t cornille un c
vite qu' il était cn opposition avec la 101. et ". futi alsse
fau sse lumière qu' il ne fallutt pas suivre.
A ce titre, les pêcheurs l' ODt adoptée comme leur règle. Mai. clle ne dcviend"a jalll ais celle de la justi ce admin istrative ou judiciaire.
A. TAVERNIER. Avocat à la Cout' d'appel d'Aix,
ancien D:\l onnier,
�-
102 -
de la section du contenti eux au consei l d'État, en dale du 26 oclobre 1833,
SUI'
le poun'oi de M, Félicien Agard et Comp" relal if aux élangs du Ga lcgeon
et de la Roque , que le départeme nt de la marine co nsid ère tout ca nal ou étang,
dont les eaux sont sa lées, com me fesant partie du domaine public maritime, et
,
POU R
tout titre ou possession à l'égard d'un étang ou d'un cana l sa lé, comme nul et
non avenu,
Or, si l'on jelle les yeux sur le lilloral de rOcéa n et de la ~Iéditerra née , on
y verra : 1° que les 19]20 des salines ou marais salan ts ont été établis Sur le
L'.HOIRIE DE GALLIFFET
bord de la mer ou d'étangs sur des terrains qui so ot en con trebas du grand Ilot
de Mars et qui ont été conquis
SUI'
l'eau sa lée; 2° qu'une grand e partie des
CONTRE
étangs salés qui bordent les côtes sont eucadas trés comme apputenan t à des
particuliers ou à des communes; qu'en effet, ils sont depuis longtemps dans le
commerce, transmis par des ventes, donations ou successions.
r
L'ETA.T
Donc, en posant un principe aussi abso lu et en cherchant à le faire prévaloir
devant le consei l d'État, le département de la marine met en doute la légitim e
propriété de presque tous les sa lins et marais 'Sa lants et d' un gran d nombre d'étangs, Par ce seu l fait, il déprécie de .la moitié des propriétés qui va lent peutêtre aujourd' hui 100 millions : c'est
confiscation.
p~r' wes' comme un commenceme nt de
AGARD
FÉLICIEN.
JJemb,'e du Corueil Gélléral.
AIX
IvrnUIERlE lLLY, RUE DU COLLÉGE ,
2.0
�-
102 -
de la section du contenti eux au consei l d'État, en dale du 26 oclobre 1833,
SUI'
le poun'oi de M, Félicien Agard et Comp" relal if aux élangs du Ga lcgeon
et de la Roque , que le départeme nt de la marine co nsid ère tout ca nal ou étang,
dont les eaux sont sa lées, com me fesant partie du domaine public maritime, et
,
POU R
tout titre ou possession à l'égard d'un étang ou d'un cana l sa lé, comme nul et
non avenu,
Or, si l'on jelle les yeux sur le lilloral de rOcéa n et de la ~Iéditerra née , on
y verra : 1° que les 19]20 des salines ou marais salan ts ont été établis Sur le
L'.HOIRIE DE GALLIFFET
bord de la mer ou d'étangs sur des terrains qui so ot en con trebas du grand Ilot
de Mars et qui ont été conquis
SUI'
l'eau sa lée; 2° qu'une grand e partie des
CONTRE
étangs salés qui bordent les côtes sont eucadas trés comme apputenan t à des
particuliers ou à des communes; qu'en effet, ils sont depuis longtemps dans le
commerce, transmis par des ventes, donations ou successions.
r
L'ETA.T
Donc, en posant un principe aussi abso lu et en cherchant à le faire prévaloir
devant le consei l d'État, le département de la marine met en doute la légitim e
propriété de presque tous les sa lins et marais 'Sa lants et d' un gran d nombre d'étangs, Par ce seu l fait, il déprécie de .la moitié des propriétés qui va lent peutêtre aujourd' hui 100 millions : c'est
confiscation.
p~r' wes' comme un commenceme nt de
AGARD
FÉLICIEN.
JJemb,'e du Corueil Gélléral.
AIX
IvrnUIERlE lLLY, RUE DU COLLÉGE ,
2.0
�POU R
L'HOIRIE
DE
GALLIFFET
CO~TRE
•
L' uOJRlE de Galliffet a-t-elle la propriété patrimoniale et privée du canal
dit <Ill Roi, de la bordigue qui y est établi e, et des deux bords de ce
ca nal appelés Sèdes, qui en so nt une partie intégrante?
Telle est la question so umise aujourd· hui au tribunal civil d'Aix, et que
cell e hoirie veul fair e juger co ntre l'Étal.
La solution affirmative de celle questioll à son profil sela incontestable Cil
présence du tlroit qui domine la cause, des titres qu'elle protluil , el surt ou t
des deux décisions qu'elle a déjà obtenues du conseil d'Élat , dans r.e mêm e
procès; la prem ière le 19 juin 1856, la seconde le 2~ juillet suivant.
Par la première, le co nse il d'Étal a annulé et cassé l'arrêté du préfet (des
Bouches-du-RhÔne), du .. mars 1852, approuvé par M. de ministre de la
marine, le 19 mars sui va nt, qui avait déclaré que le cana l dit du Roi était
�-5-
-4une dépendance de la mer, et qu'à ce titrc, il faisait partie du domaine
public maritime.
Par la seconde, le conseil d'État a repoussé la prétention de l' admi nistration , de ne voir dans les titres de l'hoirie de Galliffet que de simpl es permissions administratives, révocables à volonté. Il les a tenus pour de vrais
titres de propriété ; et il en a renvoyé l'application aux tribunaux civils,
seuls juges naturels des questions de propriété.
Nous le disons donc avec la plus légitime coufiance. La question du procès
a été déjà implicitement résolue par le conseil d·Étal. Les deux prétentions
de l'administration et du domaine ont été I"aincues. Le terrain pour la
Douvelle discussion à fournir est dégagé de toutes les entraves qu'ils y
al"aient jetées.
Abordons le récit des faits ; nous exposerons ensui te le droit qui regit
celle cause ; puis, enfin, nous invoquerons les titres de l'hoirie de Galliffet,
qui montreront son droit de propriété, aussi évid ent que la lumi ère du jour.
La mer Méditerranée est en communication avec deux étangs situés dans
le département des Bouches-du-Rhône, et connus sous le nom d'étang de
Garante et d'étang de Berre.
Celle communication se fait par divers ca naux qui , ai nsi que nous le prouverons dans la discussion, ont été creusés de main d' homm e.
Les eaux de la mer arrivent du port de Bouc à l'étang de Carante par un
certain nombre de canaux; puis, de Caro11te à l' étang de Berre par plusieurs
autres canaux.
Dans la plupart de ces canaux , se trouvent placés des appareils de pêche
dits bordigues.
Les bordigues ne sont pa~ nutre chose que ries défilés en ca nnes et rosea ux, tracés dans l'int érieur des canaux qui comm uniqu en t d'un étang il
l'autre, ou d'un étatlg il la mer, à l'aid e desq uels le poisson est arrêté ct
pris, dans les migration s succe~sives qu' il fail d'un point à l' autre.
Celle défini tion est d'accord avec cclle qn c donnent Lamarre dans son
Traité de la poli ce (tom e Ill , livre V, titre XXV I, chap. IV , sec!. III) ct
l'alin, dans son Commcntaire sur l'ordonnance de 168' (titre IV du liwe V).
" Les uordigues, dit l'a/in, son t, .. .. des parcs form és de roseaux ou de
« cannes; on lcs construit ord inairement snI' lc; canaux qui commu niqll ent
" Je la mer aux étangs salé; pour prendre le poisson. "
Quelques-uns ,les ca naux dont nous ve nons de parler ne con ti cnnent pas
de bordigues, et, comme on dit, ~ont libres. Tel est, par exemple, le canal
du Passage, qui comm uniqu e de l' étang de Carante à l' ~ tang de Berre. Ce
ca nal sert à la naviga tion des bâteaux ; aussi le pont qui le tra\'erse n' est-i l
qu'un pont-levis, tandis que les autres canaux qui cx isten t enlre les deux
étangs ont des ponts de pierres.
Parmi les ca naux qui ont des bordigues, nous remarqu erons le cana l du
Roi, qui comm uniqu e d' un étan g à l'autre. La possession excl usive de ce
ca nal , de la bordi guc qu'il rcnferme et du droit d' y pêcher appartI ent, depUIS
Ms siècles, à l'hoirie de Galliffet ou 11 ses auteurs.
Ce que nous venons de dire du canal du Roi s'applique à un autre canal
di t du Passage, qui communique de la mer à l' étang de Garante et qUI. con.
.
bord 'I" ue Ce cana l qu'il nc faut pas conrondre a"ec 1autre
lient aussI une
" .
,
. . ..
canal du Passage ci-dessus mentionné, ap parti en t éga lement. a .l home dc
Ga lliffet. D'autres ca naux ayant cles bordigues. appartiennent a diverses per.
onl pas en ca use mais dont les droils sont les mêmes qll c
sonn es qUI ne s
(
(,
ce ux de M. de Galliffet.
Pour prévenir toutc conrusio n, il con,-ient de rcmarqucr que .Ie mot bar~
digue a souv ent, dans les ac tes et les pièces du procès. deux sign ifica ti on,
différentes: l'une plus restreintc, l'au trc plus étcndue.
.'
'lt la bordi"ue n' e,t pas aulre chose que 1cnglll ou appa::>
Dans 1e sens étro
l'cil de pêche, tel qu'il est défini ci-dessus.
1
�-6-
-7 -
Mais, dans le SP.IIS large, l'expression bordigue comprend :
1° L'apparei l ;
2° Le cana l daos lequel est placé cet appareil;
3° Un espace ou portion de terre sit ué entre deux ca naux et désigné
sous le nom de sède, C'est là que reposent les cabanes des pêcheurs , que
ceux-ci amarrent et fixent tout ce qui est nécessaire à la pêche, et qu'on dépose la vase provenant du curage du cana l. En outre, lorsque l'étendue du
terrain le permet , on cu lti ve une partie des sèdes, et on y étab lit des salines.
L'appareil de pêche , le canal et la terre ferme, situés des deux côtés du
canal , forment un tout indivisible, parce que ce n'est qu'au moyen de la
réunion dans une même main de ces trois objets que la pêche à la bordigue
peut s'effectuer.
«
" tiolls de propriété;
.
.
« Cons idérant que, dans r espèce, les titres sur lesquels s'appuIe le marqu Is
" de Ga ll iffet pour établir les droits de propriété qu'il prétend exercer sur
« le canal du Roi, sont ùes chartes des comtes de Prov ence, des dixième,
« treizième et quatorzième siècles, des transactions entre lesdits comtes et
" les archevêques d'Arles, et le testament de Charles Ill, comte du Ma'ne :
u Que ces actes liant pas été produits devant nous;
.'
" Que le préfet deo Bouches-d u-Rhône, tant dans son déchnatolre, que
" dans l'ar rêté de conflit ci-d essus visé, soutient que les actes IIIvoqués par
u le marquis de GaliilTet sont émanés de l'autoritp. souveraine, ag-issant dans
exercice de sot! pouvoir administmti(;
ble, de déterminer
. au pl' éa1a
• Que, dans ces circonstances, il y a /leu,
.
. le
" caractère desdits actes, et qu'à l'autorité aùministrative seule 11 apparltent
"r
Ainsi , lato sensu, avoir une bordigue, c'est avoir le canal, l'appareil et les
sèdes ou bords du canal.
Voi ci maintenant comment la contestation s'est engagée:
" de statuer à cet égard;
" Nous avons orùonné, etc.
.
A or
_
L'arrêté
de
conflitpris,
le
l~juin
'
1
84.;
,
par
le
prefet
des
Il.
Ar t. '1 •
• Bonches-du-Rhône est confirmé, •
.
.
d 'f
o 1acte mtro uclt
.
S ' t
Art. 2. - Sont conS id érés comme non avenu .
,.'
7
..
ù
28
At
'8'"
l'acte
du
6
J
'
uin
1846
et
1
assignatIOn
du
1
d tnstance u
aou " .il,
.'
d' .
AL. '6 .
20
le
J'u"ement
du
tribunal
de
premIère
IIIstance
AIX
novem b re ·, 0+ , "
En 18 .. 5, des prud' hommes pêcheurs de Martigues, s' introduisirent, sans
l'autorisation de M. de Galliffet, dans le cana l ou bordigue du Roi. M, de
Galliffet forma contre eux une demande en dommages.intérêts; et les cita
devaotle tribunal civil d'Aix .
L'administration de la marine intervint pour prendre le fait et cause des
pêcheurs.
M. le préfet des Bouches-du·Rhône inten' int à son tour dans l'intérêt de
l' Éta t.
Le 17 avril 18~ 7, il présenta devant le Tribunal un Mémoire en déc/inatoire, soutenant le Tribunal incompétent pour connaltre du liri ge.
Par jugement du 29 juin 18~7, le Tribunal repous.a le déc/inatoire et retint.
la matière.
terminer les limites de la mer, sau( le jugement pm' qui de droit des ques-
)
du 29 juin 1847,
M de Galliffet s'empressa d' investir le consei l de préfecture, po~r qu.e
.
1 . . l' ~ t d étabhr
cc conseil déterminât le caractère des titres invoqués par UI, a e e
son droit de propriété,
.
. t
M.
,
Né du 15 octoure 1850, ce co nseil sc déclara IIIcompeten
31S, pa l arr
'l d'État le 3 mai ., 851
pour procéder à cett e déterminat ion. Et le conse!
, ,
'
Le H juillet ·t 8 .. 7. M. le préfet des Bouches-du-Rhône éleva le conflit: et
le Tribunal se désinvestit par jugement sous sa date.
Le 17 décembre 18 .. 7, le conseil d' État confirma l'arrêté de conflit en ces
termes:
confirma sa décision ,
'l d'État
Galliffet
porta
directement
devant
le
consel
, ,
d
Ce fut alors qu e M. e ,
'
.1
ort de leur
t l'a ppréciation de ses titres, sou. e rapp
les 9 ma .1 et 1er aouAt 18"(),
• Considérant que l'autorité administrative es t seule compétente pour dé-
nature et de leur caractère..
1 . "
qu' il plut (à Sa
Voici les conclusions par 1UI· pr Ises '. " Il conc ualt a ce
�-
-8• \/ajesté), statuant en exécution de l'ordonnance royal e,rendu e su r conflit
• le 17 décembre 18~ 7, Mterminer le cm'actère, et, s' il ya li eu, donner
« l'interprétation de divers actes, au nombre de tren te-cinq, produits pa"lui,
« et notamm ent dt! deux chartes émanées des anciens souverains de la Pro« vence en 920 et 11 H; de conventions faites par les comtes <le Provence
« avec lesarchev('!ques d'Arles en 1223, 1292 et 1 ~ 5 'i ; du testament de
• Charles Du Maint', dernier comte de Prov ence, du 10 décembre 1481 ,
« et de deux arrêts du conseil d'État du Roi , en date des 25 aotH 1781 et
• 21 décembre 1790; ce faisant, déclarer que lesdits actes ne sont pas émanés
« de l'autorité souveraine agissant dans l'exercice de son pouvoir administratif
« el par suite, que les tribunaux civils sont seuls compétents pour en donner
• r interprétation,
•
«
•
•
•
•
•
•
• Subsidiairement, au cas où il serait reconnu que tous ces actes ou plusieurs d'enll'e eux ont le caractère d'ac tes ,je l'autorité souveraine agissa nt
dans l' exercice de son pouvoir administratif, déclarer, par interprétation
desdits actes, qu'ils ont eu pour but et pour effet de lui conférer, ou de lui
reconnaître un droit de propriété privée, tant sur une p~cherie dit e Bordigue,
située à Martigues (département des Bouches-du-Rhône), que sur le canal
maritime dit du Roi, dans lequel est située cette pêcherie, et qui fait communiquer l'étang de Berre avec {étang de Garante et la mer Méditerranée;
et condam ner r État aux dépens, »
M, le ministre des finances prit , de son coté, sur celle demand e et sur ces
co nclusions , les co nclusio ns suivantes: Il conclut:
• A ce qu'il plut à Sa Majesté, reconnaltre que les chartes des anciens
• souverains de la Provence, de 920 et de 11 H, les transactions inter• ven ues entre les comtes souverains de Provence et les archevêques d'A rles,
• en 1223, 1292 et t 4;;7, ct le testament de Charles Du Maine , dernier
• comte de Pro vence, sont des actes émanés rie l'autorité souveraine dans
• l'exercice de son pouvoir administratif, et statuant par interprétation des" dits actes, déclarer qu'ils n'ont transmis aua; auteurs du marquis de Galliffet
• aucun droit de propriété sur le canal maritime dit du ROI ; que, lors même
• que les actes dont il s'agit auraient Qutorisé les auteurs du marquis de Gal,
9-
Iitret à construire, à maintenir , ou il posséde r uo e bordigu e dans ledit canal ,
• ce qu e d'ailleurs ils n'é noncent pas, il ne résulterait de celte autorisation
" qu'une simple (acullé de pêche précaire el révocable, et condamner le marquis
" de Galliffet aux dépens, »
n
Enfin, les prud 'homm es pêchcu,'s qui étaient interv enus deva nt le consei l
d' État, conclu aient de conce,'t avec J'État:
« A ce qu' il plut il Sa Maj esté, reconnaître qu e le. titre. ùont il s'agit sont
" ùes actes de l'autorité souv erain e agissant dans l' exercice de son pouvoi r
• administratif, et déclarer, par interprétation de ces tit res, qu'ils ft ont
" conféré aux auteurs dtl mal'quis de Galliffet, aucun drQit de propriété sur le
" canal dit du Roi , ma'Îs qu'ils sont seulement l'elaû(s à la concession d ' I/II droit
" de pêche, précaire et l'évocable, et en conséquence, que ce canal Il' a jamais
" cessé d'être une dépendance LIu domaine public mal'Îlime, à laquelle les actes
" produits par le marquis de Galliffet n'ont jamais porté, ni pu porter atteinte,
« et co ndamner le marquis de Galliffet aux dépens, »
L'instance était ainsi liée, devant le consei l d'État, lorsqu' un incid ent viot
la compliquer,
M, le ministre de la marine tran smit des instru ctions à M, le préfet des
Bouches-du-Rhône, les 11 mars t 851 et 26 fév ri er 18!J2,
Il lui enjoignit le port er uo arrêté déc laratif de la doman,ialit é du canal..du
Hoi, Le préfet du départ ement obéit à ces in stl'll ctions, Il l'nt le 4 mars 18n2,
un arrêté qui déclara le ca nal du Roi rl épeudance de la mer,
.
Cet arrêté du 4 mars 1852, approuvé par le ministre de la mann e, le 19
mars suivant, fut ainsi conçu:
(( No us, préfet.... , Vu l' édit de '1556,
(( Vu , ....
,
,
« Consid érant qu e le sieur de Ga lli ffet, cOllcess ionlwü'e tle boni Igues a Mar(( li " ues a élevé des préten tions il la propriété du canal d'l du R OI , dans leq uel
" de' ces hordigues a été établi e;
une
,
'd
é
t
~
led'
,
t
canal
esl
une
des
commuflica
liolls
Iralt/rclles
qUI
« Consl
l'an, que
'
1
d
ét'
na
de
Garante
et par suite, la grande mer avec la fil er
,
t
Cl re llen e grao
'1.,
<t
t
�-
10 -
intél'ie1lre dite étang de Be/Te; qu'il doit, par co nséq uent, êlre co nsid éré
« comme une dépelldance de la mer;
« Considérant que la mer et ses dépendallces sont essentiellement dans le
« domaine public, et ne peuvent, à ce titre, étl'e aliénées et devenir susceptibles
« d'appropriatio;l;
« Arrêlons:
« Art. 1or. Il est déclaré que le cana l dit du Roi, mettant en COffimuu nication l'élang de Garante et l'é tang de Berre, est une dépendance de la
u mer, el, qu'à ce titre, il fait partie du domaine public maritime.
« Arl. 2. Le présent arrêté sera so umis au visa de M. le ministre de la
« marine el ullérieurement llOtifié, aum fins de son exécution, au sieur dq GaIa liffet, ainsi qu'à M. le directeur de J'enregistrement et des domaines, el à
« M. le préfet marilime. »
Le 20 avril 1852, le marquis de Galliffet se pourvut deva nt le co nseild' Élat
contre cet arrêté. Il en demanda J'annulation.
Plus tard, le conseil d'État a prononcé sur ces deux instances pendanles
devanllui, pal' deux arrêts séparés et distinc ts.
Le 19 juin 1856, il a cassé etannu lé l' arr'élé préfectoral du ~ mars 18 5'2,
approuvé par le ministre de la marine le 19, et il r a Cai t de la manière
suiva nte :
«
Yu la r04uête .... Yu l'arrolté attaqué .... \'ules obseJ'l'utions présentées pur no1l'e ministre
de la marine et des culonies;
Ouï ....
Considérant, qu'au' Wrllles de l'arl. '2 du décrel du 2 1 fé\l'ier 1 85~, les limites de la Ole,'
,loirent être déterminée, pal' des décrets rend us dans la forme des règlements d'administ ,'atlon publique, et sous la r éserDc des droits de ~ fiets;
Considérant que l'arrèté ci-dessus \ isé du préfet du département cles Douches-Ju-Rh ône
déclare que la portion d'eau salée, ,lite canal du Roi, est lino dépendance Je la me" ct fait
pa.rtie, il cc litre, du domaine public Olmitimc;
Qu'il n'appartient pas audit préfet de détermi ner l'étendue ct les limites de 1" mer;
Considérant que l'nrrèté précité, non -seu lement ne co ntient aucu.ne réSC1"t6 des dl'oi'~
'lue te marq"is de Galliffet pritelld aroi,· à la pl'op,'iété du canal du Hoi; mais qu'il est
1I1otivé au cûlltrairè sur cc <lue lcùit cana l ne pourrai l, p<lr ~;l n:lIurc, être deycnu l'objet.
d'un droit de propriété pri\ ée;
-
11 -
Que dès lo"s ledil arrêté dn prékt ,lu ''''partemont ,Il'< Douches-du-Rhône est entaché
d'l':\Cl'S de pouvoirs .
.... L'arrl:t est an nulé, ctc.
La ca use, ainsi dégagée de ccl incid ent, le conseil d'État a rendu le 21.
juillet suivant, sa décision SU I' le caractère el la nature des li Ires.
Elle est ainsi conçue:
Considéra nt que le marquis de Oall inet a prod uit de,"nt nous en notre conseil ,l'État
divcl's actes au nombre de 35, aux fins d'en fnire déterminer le caractère, cl, s'il ya lieu,
d'en obteni r l'interprétatio n ;
Considérant que parmi ces actes, ceux qui sont Inentionnés par l' arrêté de connit dont
l'ordonnance royale ci-dessus visue du 1i (Iécembre 1847 a prononcé la co nfirmation, sonl
1('$ seuls dont le caractùrc ct hl naturc doiH'n t être appréciés aujourd'hui par nous en notre
conseil d'Élat j
Consid éran t que ledit alT~lé de co nllit s'cst born é à revendiquer pOUl' l' autorité administrative l'appréciation ùes chartes émanées des anciens sou\erains de la Proven~e ou des
archevêques d'Arles, des transactions intcnenues entre cu:\. , du testament du dorlller comte
de Pro,"ence, cl des arrèts du conseil d'État du roi des 2, aoû t '178 1 et 2 1 décembre '1790 .
Su,r le caractère desdits acles :
En ce qui tou che les l'harte. donnée. en 9~0 cl 11 14 pal' les empereurs Louis ct Conrad
",u:\. archevêques d'Arles, la concession faite en 989 par l' archc"~fJue d'Arles, les eomOIl. .I!1tcrrcnucs en 1z_,
'~3 199"
tians
- - ct 1437 entre les comte'" de Provence et lcs arche\èqucs
,
d'Arles, le testa mcnt de Charles du Maine, dernier comtc de Provence, en date du ,10 dL'l'embre 1,, 8 I, etl'arrèldu co nseil d'État du roi du 2 1 décembre ,1790;
.
Considéran t Ilue les co ncessions fn ites en 9'20 ct 1,111· pal' les empereurs soU \'eral~ls U('
ln Pro,"ence au x arche\èq ues d'ArIC5, la concession fait o en 989 pal' l'a" c"ev~'1 ue cl Arles
;"lU prêtre Paco, les conventions intcrrcnues cn '1223, ,1'292 Cl '14.57 enlr~ les comtcs so,u\orains do la Pl'ovence ct les archevêques d'Ados, e l le testament du dCl'lllcr.Comtc SO ll\ Cl'ain de la Provence, dans celles de leurs disposition s qui auraient pour ob~('t de, d~nncr,
d'échanger ou de léguer loul OU partie de l'établissement de pè; he connu aUJ~ul'(l hu,.,'ou;
le nom de Baul'di[Jue (lIt Rai no sont pas des actes émant5s do 13ut 01'lté SO U\CI;"lIilC 3gl :;s~nl
..
'f , el (JU "11ne 110U:
' al'pal'licn
t pas
dès lors cl Cil
dans l'exercice de son pouvoir àdmllllsirall
;'
'
don ner "interpré tati on ;
,
Considérant que l'arrèt du conseil d'EtaLdu roi du 2 1 ,lécembrc 1790 a été rendu à la
�-
-13-
12 -
suite d'une instance en cassation dirigée contre plusieurs
3rrèlS du
parlement d'Aix
J ÙII I
il
prononce l'a nnulation; que dès lors il n'a pas le caractèt'e d'un acte émané du pouyoi,'
admi nisll'atif et qu'il ne pellt nous appartenir d'cn donner l'i ntcrpt'étation.
En qui touche l'an'ôt dlHO lisoil d'l:.' la t d'" 'l'oi dl< 25 aot1t 1781 :
Considéran t, d'une part, que l' a rr~ t dont il s'agit a été rendu sur l'avis des commissai res
deputés en ycrtu de l'arrêt sus-visé du 21 a ril 172 9 pour la yérifiea tion des titres des droits
maritimes , il la suite de l'opposition formée par le sieur de Galli lTet à un précédent arr';t du
Conseil du 23 aoùt 1778 qui soumettait ses pêche,'ies il cette vérifica tion ; que la yét'ification des litres des droits maritimes ordonnée pal' l'arrê t du :! 1 ;H l'il 1739 t'tait une mesure
générale de haute adminisll'ution destinée à {aire cesser les perceptions illégales fai les all
préjudice de l'État ct du public, et que les décisions prises pOli,.
SOli
exécution sont éga l,~
cil é devant le tribunal civi l d 'Aix, r É ~t , dans la personne du préfet des
Bouches-du -Rhône, pour .s' y faire reconnaltre et déclarer à son encontre, propriétaire du canal dit du Roi , de la bordigue qui y est établi e et des deux
bords du canal.
Et le procès se prése nte aujourd' hui déLarra ssé de toutes les entra ves jetées
par l' administration dans sa marche, On en est revenu à l'id'é e simple et nette,
ex posée pa r le jugement du Tribunal du 29 juin 1 8~ 7, qui avait eu le pressenlim enl , diso ns mienx, la vue cla ire des résullats auxquels a conduit la
procéd ure ad mini slrative,
Ces fail s ex posés rapid emenl , nous abordons la d iscussion du procès,
ment des actes adminislraliCs;
Considérant , d'au tre part, que ledit arrêt du 23 aoùt 178 1 ne s'est pas borné à statuer
su r les droits du sieur de GallilTet, mais qu'il con tient des dispositions ayant pour objet Je
réglementer, dans l'intérêt public de la navigation, la police des pècheries situ ées près de la
, ille de Martigues et du port de Bouc ;
Qu'il suit de là que, sous cc double rapport, ledit arr"t il le caractère d'un acte de l'autorité souveraine agissant dans l'exercice de son pouvoir administratir, et que, dès lors, ce
n'est qu'à nous, en notre conseil d'État, qu'il peut appartenir d'en donner J'in terprétotion.
S lIr l'interprt tat,01l de l'arrêt du cOllseil d' É tat du l'oi dl< 25 Qoat n AI :
Considérant qu'en déclarant « garder et main tenir la sieur de GallilTet dans la propriété
« de la Bourdigue dite du Roi, sauf à lui à se pourvoir, ainsi qu'il appartiendra quant à la
« propriété des caux, » ledit arrêt n'a eu pour but et pour clTet que de reconnaitre, sous la
réserre qu'il exprime, que le sieur de GallilTct t tait propriétai re de l' t tablissement de
pêche appeli BOllrdigue dit R oi .
p our qu e la discussion soit co mplète, et qu e les litres soient parfaitemen~
éclairés même par le droit , nous sui vrons r ordre sui va nt :
Nou s prouverons : 1 0 en droit , qu e les bord igues et leurs canaux sonl
susceptibles tl e propriété pri vée ;
. ,
20 Que les titres desq uels l'hoirie de Galliffet fait dériver celle proprléle,
son t ex près et décisifs ;
30 Que les objections de l'État, sur les deux poinls qui précèdent, sont
dépourvues de fond ement.
Notre conseil d'État au contentieux, entendu , avons décrété :
A RT .
1. -
....
AnI' . 2. - Il est déclaré que l'arrêt ci-dessus \ isé du co nseil d'État du roi en date du
25 aoùt 1781, en gardant et main tenant la sicur de GaliilTet dans la prop,i été de la Bourdigue du Roi, n'a eu pour but et pour elTct que de reconnaltre qu'il était propriétai7'c de cct
établissement de pèche, sauf à lui à se pourroir ainsi qu'il appartiendra quant i. la p,'opriété
des caux.
L' instance a u conseil d' État, a insi évacuée, et le renvoi deva nt les tribunaux
civils pour l'application des titres étant a insi prononcé, l'hoirie de Galliffet a
PREMI ÈRE
PARTIE .
Les Bordigues et leurs Canaux sont susceptibles de Propriété privée.
Quelques détails historiques sur l'origine des bordigues de Marligue~ et
'Ct' tout naturellement leur place. Ils écla Ireront lapde Bou c. trou veront t
plication du droit ,
�-14-
§ Je"
Origine des Bordigues de Martigues et de Bouc.
E n remontant à l'époque la plus reculée, cell e pouttan t qu 'éclai re 1Hist~Jr e:
reconnall comme certain que la co mmuni ca tion qui ex' te alljourd hUI, a Martigues, par la voie des divers ca naux établis entre l' étan'' de
Berre et la mer, n'est pas le fait de la nature,
"
L' intel'valle, existant en tre ces deux points, était occupé par des marais fangeux . Les eaux de l'étang de Berre n'avaient pas un ecuulementlibre à la mer
et réciproquement les ea ux de la m~r ne pouvaient pas pén étrer directemen~
daus l' étang de Berre. Les marais fangeux, ex istan t entre-dell x, y furmai enL
obstacle,. Seulement, par la rOIce des choses, lorsq ue les ven ts pou ssa ienl dan s
I~. dlrectlon de l'ouesLles eaux de Berre vers les marais, ceux-ci pouvai enL
s Imprégner plus fortement des ea ux qu i leur é t ai~n t envoyées. Mais, par
une Just e compensat ion, lorsque les ven ts so uffiaient , dans un e directi on cont,ra Ire, dan~ celle de l'ouest à l'esl, une barrière, doublement infranchissab le,
s opposall a loute commun ication des eaux de Berre à la mer,
Cet état des li eux a\'ait fait donner aux éco ul ements casuels des marai fangeux à la, mel:, un nom qui précisait bien leur nature. On appelait CŒtlU:
ou cœnu:n, c est-a-d u'e bourbier, le poin t par leq uel il s ~'opé raienL. L'écoulement a la mer, quant il avai t lieu , se fa isa it par deux embou chures qui
entourent aujo urd ' hui l'is le où es t bâ tie la tour de BOllc.
'
Dans une époq ue moi ns ancien ne, l' étal des li eux changea.
Les premlel's. habitant s qui vin rent se fixer dans la co ntrée et qui formèren L la première colonie qui, pill s tard, jeta les fond ement s de la vi ll e
de Martigues , com prirent le double ava nt agl' qu' il y aurait pour ellx à
étabhr entre la mer et l' étang de Berre, ces cummuni ca tions di rectes qu e
nous \'oyons aujourd'h ui . Il s <l evaien t gagner à ce la d'abord ù'assa inir la
contrée où ils s'é taien t fix és , d'augmenter eusuile l' étendu e du sol culti-
0:'
-
15 -
vable, en co nquérant sur des marais fange ux le terrain nécessa ire à leu r
alim en tation , enfin d'outenir, ell creusa nt ùes cana ux de comm uni ca tion,
la fa cilit é de pêcher soit dans l' étang de Berre, so it dans les ca naux euxmêmes, soi t dans la mer.
Quand l'int érêt personnel est guid é pal' des instincts si sO rs, ses œuvres
sont promptes à se réa liser. En supposant même qu'il ait fallu du temps
po ur crée r ce qlle nous \'oyons , ce n'est pas à d'a utres qu' à la main de
de l'homme qu'il Ü1. Ut l'attribu er.
Les autori tés les plus graves , iennent le justifier.
Aristote (de mil'abilibus allscultationiblŒ, lib. 2, p. 58, Gui llaume Duva l,
Pa ri s, MDCXIX), racont e qu elques-uns des elTets produits par l' état des li eux
que nous venons de décrire, avant r établissement des ca llaux de comnlunication de Bèrre à la mer.
« On rapporte, dit-il , que c/mls le IJay s des Marseillais, près de la Li" gllri e, il ex iste un étang qui change de niv ea u et qui déborde, 11 re« jeLLe (en déhordant) une incroya bl e quantit é de POiSSOI\S, Lorsque les
" vents éthésiens vien nent à sou ffi rr, il se form e un e barre au food de
« l' étang: le sa ble s'y amoncelle tell ement et le so l devi en t tel que la barre
" émerge, Alors les habitant s du li eu , la co upant avec des instruments à trois
• pointes, retirent , sa ns peine, de l' étang, tout le poisson qu'i ls veulent. »
Impossible J e ne pas ·voir dans ce passage d' Aristo te, l'étang de Berre
et les obstacles qui s'opposa ient alo.rs à son écoulement vers la mer. C'est
d' un étang qu'i l par le; c'est de celui si tu é dans le pa ys des MOI'seillais,
qu'il s'occupe; à cette époque Marseille ava it la contrée so us sa dumination ; celle barre qui émerge et sort des ea ux, qu'est-ce autre chose que
ces terres, ces l'ases, ce sab le boueux , obstacl e à l' éco ul ement des ea ux à
la mer ? Enfin , ce lt e bar't e co upée par les habitants, pOlir prendre du poisson
dans l' élang même, est-ce au tre chose qu e la li mile même qu e formaie nt ~
l'étang les marais fangeux ? El ces tentativ es des habitants pour les co uper,
que Jes premiers trava ll x en trepris pour la ca nalisa tion de celle contrée?
La Stat istiqu e du département des·Boucbes.-du-RhÔne, qui a recueilli avec
soin les tradi li ons loca les et qui de plus s'est inspirée, (Jour les con trÔler, de
�-16-
-
lous les monumenls anciens les plus dignes de foi , s'explique sur ce point
de la manière sui,'allle; el on ne saurait êlre plus explicile el plus précis :
" Dans les lemps qui onl précédé les opémlions mil ilaires de Marius,
• dil-elle, l, 2, p, 936, les Iles occupées mainlenant par la yi ll e de Mar• ligues, étaiellt enviro1lnées d'lm tel'1'ai71 (angettœ qui s'étendait dam tout
({ l' espace qu'occupent les bourdigues. Un autl'e ma1'ais existait aux bour• digues de Blmc. Les eaux surabondanles de l'élang de Berre s'écoulaienl
• à travers ces bourbiers et se rendaient à la mer par deux embouchures
• qui entou renl encore aujourd'bui l'Ile où est bâtie la tour de Houc, Les
a anciens hisloriens el géographes, soil grecs, soit lalins, ont considéré ces
• emboucbures comme celles d' ull fleuve qu ' ils onl appelé Camus, par
• abré,'ialion de cœnosus, bourbeux, plein de fange, à cause des marais
({ boueux quïltraversail. Le nom de CallO-Vieille, ou Vieux CœliUS, esl
reslé à l' em bouchure orienlale. »
j(
"
•
({
«
Le même livre, à la page 259, s'expliquanl Sllr l'épuque probable de
ces comm unicalions, ré pèle encore ce qui précède en ces lermes :
({ Tous ces étangs (ceux silués enlre l' élaug de Berre et la mer) étaient
ell gl'a'lde partie (angel/x et impropres à la navigation. C'esl pourquoi le
cana l qui dégorgeail le surplus des eaux à la mer s'appelait Cœnus ou
CœnulII, qui signifie bourbie.·. Ce n'a été que dans des temps plus voisins
• de nous, qu'on a creusé, dans la t'ase, des canallœ navigables, en amon" celant la boue qu'on m relirait S!tl' les b07'ds des canaux; cc qui aprodllit
« ce qu' 011 appelle mailltellant les bOU/'digues, dont II011S pm'/emns plus tard, »
Enfin, à la page 959, il ajoute ces mols décisifs: «CE FURENT LES MAR« SEILLAIS, QUI COMIlE~Ci:: RENT A Fon&IER CES nOURDIGUES DE nouc ET DE MAR(t
TIGUES EN CREUSANT
DES
CANAUX DANS LES MAR .o\ .S ET EN AMA SSANT
LA
YA SE
nOUEUSE SUR LES DEUX BORDS, •
A l'auloril é de ces documenls, on peu l joindre encore, pour démonlrer
qu'ici loul est dQ à la main de l' homme, ce que l'expérience de plusieurs
siècles a prouvé. Ces communicalions ne se maililiennent libres, que par
des soins incessanls el un recurage annue l, loujours exaclemenl renou I"elé.
Que l'OD cesse d'y porler la main, d'y luller conlre l'amoncellemenl des
«
17 -
sables el de la \"ase, ùe les en ex lraire, Cl de suile tout sc comble, la nature efface les travaux de l'humm e, el loul cet espace, entre l' élang de
Berre el la mer, devient un marais fangeux. Chacun le sail; lout le monde
le comprend, ct c'es l là le molir de l' exactilude apporl ée à empê!chel' ce t
état désaslreux. Telle esl dOliC la uécessilé qui domine cell e con lrée, que
pour la conserver ~e qu'ellc esl, il raul des Irava ux illcessanl s. Qu'en conclure? Qu' 011 dit vrai, quand on parle de r élat primitir de ces lieux;
qu'on n'exagère rien en le rapporlanl; que r Bisloil'e est d'accord ici avcc
la vérilé, el que , puisque la main de l' homme peul seu le conserver cc qUi
esl, c'cst aussi la main de l'homm e qui l'a créé.
11 suit de ce qui précède, que les bordigues qui s'élab lirenl par l'ouverlure des canaux de communicalion enlre l'élang de Berre el la mer, au
milieu ùes vases qui en occupaient la pl,'ce, furenl eornposées de deux
parlies ' dislincles: 'I ode la parlie du sul ouverle aux eaux: el 2 0 de la
parlie du sol reslée lerre-ferm e, assainie et desséchée par l'ouverlure cles
canaux.
Ces deux parlies du sol reslèrent unies dans les mains de chacun de ceux
qui avaienl créé des bordigues. L'une el l'aulre, elles sc serv~IeDI de s~
cours; leur réu nion sur la même lêle rut même llldispensabio pour la pêche.
Il fallail , ûn efTel, pour réaliser celle pêche, ulle porlion de lerre-rerme
où rut établi e la maison ou la cabane des pêcheurs emp loyés aux !Jordlgues;
où ceux-ci renfermassenl leurs cordages et leurs filel~; où Ils pussen~
.
1.
.
de fixer
d' une ma mère solid e: OÙ Il,
ueSOin
l.
amarrer tonl cc qu ,.Ils avalent
pussenl enfin jetcr la vase qu ' ils retiraient ùu fond des cana.ux , pour, les
main lenir conslammenl dans leur étal de libre clrcu lallOn pOUl les eaux.
I l arriva même_que ces parlies de lerre-ferme, inh érentes aux bordlg~es ,
fu renl plus ou mo ins élendues, suivant J' occupalion première ql" en rut r,lIle .
.
olons Ces élendues varièrent sJl1gullèrcl11cnt; el chaqu e
. .
. .
' .
_ é 1é
par 1es pl'em lers c
'I'
l
ons
de
lerre-ferme
aJl1S1
assa
iUl
es
et
dc,s
.c l es par
d
Possesseur de ces pOl
et les consacra en réaill é. quan
l' ouverlure des canaux, les put consacrer
',
.
1 s besoi ns de la pêche, a la cuHui e
il resla un espace libre non occup é par e
.
d '.
é d blé ou en y conslrmsa nt cs Jalordinaire, en y semant chaque ann e u
�-
19 -
18-
dins, ou eu y élel'ant des salines, lorsque ce mode d'industrie fut connu ,
libre eL pratiqué dans nos contrées.
Eu résulta t, et en suivant l'enchalnement de tous ces faits, on peut \'oir
cla irement de quoi se sont composées dès l" origine, eLde quoi se compose nt
encore, à Martigues eL à Bouc, les bordigues qui y existen l. Toute bordigue
a consisté et cou siste encore dans cell e double l oca li~é :
1° En un ca nal, creusé à une profondeur donnée, et exis tanl entre l' élang
de Berre ou l' étang de e aronl e, d' un côl é, et la mer, de l'aulre, des tiné il
la isser un passage libre aux poi ssons, dans ses div erses mj g r~tions de la mer
à l' élang, et de l' étang à la mer ..
2° En deux rangées de lerre-ferme , qui bordenl le cana l à droile el à
gaucbe, en couti enn entles eaux, se conlinuenl av ec le cana l lu i-même , sc
prolongent même au-d elà du point où la pêche se réalise, comme un double
mur protecleur , et enfin dans leur base, sont étab li es 81baignées par les eaux
du ca nal, et, dans leur parlie supérieure , s'élèvent au-d essus du niv ea u de
cell es-ci ;
3° En un réservoi!' ou labyrinthe, élabli dans le cana l, divisé en plusieurs
parti es, appelées cham bres, form é avec des roseaux , el desliné à cont enir le
poisson, à le relenir et à le prenJre ;
4° Enfin, en un e certaine étendu e de lerre-ferme, inhérente et at tachée
au cana l, su r laqu elle repose la cabaoe des pêcheurs emp loyés à la hordigue,
où ceu x-ci amarrent et fix ent ce qui doit êlre fixé clans leur pêche, sur laquelle on dépose les boues el l'ases provenant du recurage
de la bordi "
o-ue , et
~
sur laqu elle enfin , suivant J' élendue de ces porlions de terre-ferme, on réalise
des cullures di verses, ou on établ it des sa lines.
Ces parti es div erses concourent , réuni es, à former une bordigue. Elles so nt
Ioules indispensa bles: l'absence d'une seule empêcherait son existence el la
rendrait absolum ent impropre au but que l' on s'e~t proposé dans l' étab lissement d' un e propri été de ce genre.
Chacune en part iculi er ell es ont un nom qu i leur es t propre. Le canal, c' est
le li eu où se fait la pêche : les deux bords sont les sèdes .. la parlie de ces
sèdes qui est sous l'pau , s'appell e lambres .. le point où le poisson est pris, c· est
le réser'voir ou labyrinthe; enfin, les lerres adjacentes qui s'unissent aux
bords du ca nal et qui en font partie, son t encore désignées sous le nom de
sèdes, du même nom que les bords du ca nal, parce qu' ell es son l de m/)me nalure que ceux-ci, et qu 'elles n'en sont que le prolongement.
C' es t cet ensemble de choses qui form e un e bordigue, à Marligu es et à
130uc. qui se ve nd , qui s'achèle, qui est possédé, qui paye l'impotcomme propriélé immobili ère. et qui constitu e, au profit de chacun de ceux qlli en sont
les propr iétaires, une va leur imporlanle soit par les dépenses qu' elle entralne,
soit par les produils qu'on en retire.
Ce qui vient d'être raconlé et prouvé sur l'origine des bordigues, résulte
aussi des observations scientifiques qu i peuvent être fail es SUI' les li eux.
Nous produisons à ce t égard lin Mémoire de M. Ai llaud, ingénieur civil ,
qui traile ce ll e queslion au puinl lie vue géologique, el qui ra ssemble tous les
faits et les accidents de localité, qui amènent sa solution dans ce sens. (V . ce
Mémoire au dossier).
Ces détails exposp.s, nous reprenons pour la poser de nouveau , noire première proposition.
§ IL
Les Bordigues et leurs Canaux sont susceptibles de Propriété
privée,
En se plaçant dans l'hypothèse vraie, dont nou s veno ns de pa rler , c'es t
un e yérité facile à démontrer.
Mais celle vérité serait tout aussi incontestable, quand même cette hypothèse ne serai t pas adm ise.
Ce double point de vue va être justifié.
�-
N°
-
20 -
1.
Les Canaux des BOl'digues sont susceptibles de P?'opt'iété privée,
parce qu'ils sunt f ouvrage de l' homme.
Voici comment devant le conseil d'Élat, ce tte propo siti on était démonlrép,
pour l'hoiri e de Gallill'et, dans une remarquabl e Consuli ation imprimée, rédigée par M, de Valim esnil , et d ue à ce t émin ent ju risco nsull e,
Nou s ne saurions mi eux faire que de rapporler cell e parti e de sa di scussion. No us n' y retrancherons rieu , pas même cc qni s' y rencontre de Irop
tlatteur pour le signataire du présent Mémoi re, sur les lra vau x juridiques
duquel la Consultalion avait été nemaml ée.
• Le poin l de droit, disa it-il , peut se formuler co mm e il suit : Un canal
fait de main d' bomme, el ser vant de com muni ca tion entre la mer et un élan g
ou lac situé dans l'intérieu r des terres, est-il susceptible, de propriélé privée 9
« L'affirmative ne nous paraît pas doul euse.
« Le conseil d'administralio n de r enregistrement, dans son rapport, fai t
une distin clion très juste enlre ce qu' il appelle le domaine de propriété de l'Etat
et le domaine public,
• Jad is le domaine de propriété de l'Etat ou de la couronne était inali énabl e,
mais ce n'était pas de la nature des cboses que dérivait celte inaliénabilité.
Les forêts, les terres·labo urab les, les prairies, les maisons , dont ce domaine
se composai t, son t des biens susceptibl es, en eux-mêmes, d'aliénation et de
propriélé pri vée. L' ina liénahilil é résuliait d' une loi polilique, savoir r édit de
1566. Aussi, a- t-on respeclé les aliénalions antéri eures il cet édit et même les
a liénations poslérieures, dans plusieurs cas, par exemple, qnand ell es s'a ppli.
quaient aux immeubles connus sous le nom de petits domaines. On a au ssi
mainlenu les aliénations de grand s domaines, lorsqu' elles avaient élé fail es
dans des pays où le pri ncipe de l'inaliénabilité du domaine de l' État n'était
pas adm is, et qu'elles ava ient précédé la réun ion J e ces pays à la France.
Enfin , on a respecté les tr'aités di plomatiques so us la protection desqu els se
21-
trouvai ent placées c ert~in es ali énai ion, (1). Anjourd ' hui, les biens faisant
parti e du domaine de \' Elat sont aliénabl es loutes les foi s qu' une loi spéciale
eo a permis \' ~Ii é n a lion : et, par une conséquen ce naturelle de celle aliénabi lit é, ils sont susceptibles de prescription comm e ceux des parliculiers (C.
Napol éon , arl. 2227).
« \1 en est autrement dll domaine pllblic. Les obj ets qui font partie du domaine public sont par leur nature hors du commerce; ils ne sont pas susceptibles de propri été priv ée : leur usage apparli ent à tout le monde; ct, comme
le dit le s~v a ot pr'o fesse ur' Proudhon, « le domaine public n'est pour le gou" vern ement, qu' un dom~ in e dp pro teclion , pour en ga ranlir la jùuissan ce à
« tou s les individu s qui peuvent en avoir beso in, (Domaine public, l. l ,
u
nO 2 0~ ) . l'
" Cela posé, les canaux creusés par l'indu str·ie humaine fonl-i ls parti e du
domain e publi c?
« Il est manifeste que non,
« Ces canaux ne sont pas comp ris dan s l' énuméralion qu e renferme l'article 538 dn Cod e Napo léon ainsi conçu : " Les cbemins, routes et ru es à la
« charge de l'Elat, les flouves et l'ivières navigables ou flottables, les ri vages,
« lais et relais de la mer, les ports, les bâvres, les r'ades, et génél'Olemell t
« toutes les portion.s du lerriloil'e français qu i ne sont pas susceptibles d'une pro« priété privée , sont consid érés comm e des dépendances du domarne pu blr c, »
" Le législateur n'a pas fait entrer les canaux dans ce ll e nomenclature:
et il n' aurait pas pu les y faire entrer, sans donner un démenti au x farts qUI
élaient sous ses yeux. Les deux premi ers canaux de navrga tron constrUlls e,n
France savoir , le canal de Briare et le cana l du Midi , sont des proprréles
privée: (2). Bea ucoup d' autres canaux d' une origine posléri eure so nt dans la
même silualion .
(1) Voir l'arlicle ' Je 10 loi du 1. venrÔ," ' 1l \'II , les arrêts de la Cour ~c c,,,,.lion des
, _ . . ' 807 .t l .oùl 1833 13 norembre 1838, 10 janvier ,t8'2, cr 1arret de la cour
:.. 1 p n\'lûr '1
"
1
3 6 N
ériod
de Douai du 21 juillet ,t83 1. (Da llo~ , Dictionn. alphab., tome \'1 , p. O , , : rcc. p . .,
.
O'
'8'" 1 7 _ '1833 r ,10,1'.
(De l atl1n esll tl).
1835, l , 93 , - 1838 , l , 4 a, - '1 't~ , ,
,
"1 du 22 avril 18H a jugé quelc canal du ~h(h appar1
,2) La Cuur de cassalJOn, pnr arrc
l
'
,
.•
�-
22-
-
23
Ce que nous venons de dire s'étend aux ri\' ières canalisées. Le cana l du
Loing est une propriété privée, en vertu des lettres-patentes de 1719.
" également vendus les canaux d'Orléans et du Loing , le canal du Centre et
" celui de Saint- Qucn tin. "
" Cependant, il ya dans les cana ux de navigation qu elc(ue chose de public,
lors même qu'ils appartien nent à des parti culiers. Mais, qu 'y a-t-i l de
public ? C'est l'ob ligation qui incombe à leu rs propriétaires J e les entl'e ten il'
et de les livrer à la navigalion, moyennanl le péage ,qui leu r est dù. Cette
obligation constitue une sel vitude d' utilité généra le donl les canaux saut
grevés : mais ils n' en sont pas moins l''objet d' une propriélé privée.
" Aux termes de l'arli cle 2 de la même loi , le produit de la vente devait
être employé à terminer divers ca naux y énoncés.
ft
Les notions qui précèdent se lrouv ent exp liquées de la manière la plus
lumineuse dans un arrêt de la Cour de cassa tion du 5 mars 1829, où on li t
que « s'il existe des canaux construits par l'Etat, ou devenus, par une cause
« quelconque, sa propriété, il exisle aussi des canaux construits pal' des parI
ticuliers , à leur propre camp le et risque, (armant leur p1'Opriété. Sans
« doute les cauaux de la première espèce rouL partie du domaine public :
• mais ceux de la seconde ne sonl que des propriétés pw·ticulières grevées de
« la sel'Vitude perpétu€lle de restel' dans cet état et de li vreT pa~sage à tous
« ceux qui le réclament, con{ormément a~x règlements et tari{s, » (Dalloz ,
1829, l, 169, 170),
« Il suit de là qu' un particulier ou une compagnie, qni possède un canal
à titre de propriété privée, peut l' aliéner, sous l'affectation, bi en entendu , de
la servitude perpétuelle, si clairemeot définie par la Cour de cassation.
«
11 y a plus: ce oe son t pas senlement les canaux appartenant à des particuliers qui sont susceptibles J 'aliénation , ce sont eoco re ceux qui apparliennent à l'Etat.
" La loi du 23 novembre '1809 a rormellement reconou ce prin cipe.
«
L'article 1 er dèceUe loi porte: • Le gouvernement est autorisé à vend re
« les 21 portions 213 appartenaot à l'Etat daos le canal du Midi, - Seront
«
tenait aux ayants-cause Je Riquet de Caraman, en yerlu des lelll'es-patentes de 1766 , ct,
qu'à ce titre, tes possesseurs actuels .yaient le droit d'en jouir en toute p,'opriété, pleinement, irré-oocablement, et arec exclusion de tout ca1'actèrc de domanialité. (Dalloz,
1SU, I , 21 S:.
(De Vatimesnit) .
•
« Rien
ne s' oppose donc à ce que l' Elal, 4uand it y est aulorisé pal' une loi,
vende un cana l tout e nt i~r, comm e il vendrait un e ror~t ou un bôtel. Ainsi, les
cana ux , so it quïls appartiennent il l'E tat , soit qu'ils appartiennent à dèS parlienli er, ne ~on t pas des Liens hurs du commerce: ct l'article 538 du Code
Napoléon ne leur es t pas applicable.
Une qu esti on importanle s'est présentée de\'ant les tribunaux : peut-on
prescrire les rrancs-hords d'un ca nal de navigation, séparément du caoal
«
même?
" Pour soutenir l' arfi rmatil'e, la partie qui in voquait la prescription disait
tlue, le canallout entier étant dans le commerce, chacune de ces parties, ou
chacun de ces accessoires était aussi ùans le commerce, et par conséquenl susce ptibles de presc ri~ lion, aux lerm es de l'article 2236 du Code Napoléon.
La cour de Paris et la Co ur de cassa tion ont repou ssé ce moyen par une
di stinct ion dont la justesse es t rrappan te. Oui , ont-elles dit, le canal pris dallS
son ensemble , avec toutes ses dépendances, peut être aliéné el serait prescri ptible ; mais chacune de ses pal,ties , considérée seule et isolément, est hors du
commerce, et ains'j chaque pa,·tie es t imprescriptible, pal' la mison que l' lisage
auquel les canaux sont consacrés, dans r intérêt généml, Ile permet pas qu'ils
soient démem brés, et qI/ils {OI'men t un tout indivisible nécessaù'e à lellr des ti71atio11. (Arrtlt de la Cour de cassa ti on du 20 aoOt 1837, qui rejette 'Ill pourvoi
contre un arrêt de P;Jris. (Dalla::;, 1837 , l, 1.50).
« La jurisprudence établit don c l' aliénabililé et la prescripti bi lit é d'u n
ca nal entier , pris dans son e11semble avec tOlites ses déperldarlces.
«
1 Ainsi, il raut distinguer entre les rivières navigabl es ou flollabl es, qui
so nt des voies de communica tion oatul'elles, et les canaux, qui so nt des voies
de communication al,tifi cielles. Les premières ne peuvent appartenir qu'à
•
�-
24-
-
l'Etat (t l ; ell es ne sont ni aliénables ni prescriptibl es; tandis que les autres
sont susceptib les d'a li énation, de prescription et cie propriété privée,
" Celte distin ction Il' est pas arbitraire: elle ti ent à l' esse nce même des
choses,
• Quel est le fond ement de la propriété privée? C'est le trav ail. L'homme,
par son travail, modifie les ohjets auxquels ce ti'ava il s'appliqu e; il les améliore, illes rend productifs, il les adapte à ses propres hesoins ou ~ ceux de ses
semhlables, et par là il les fait siens, car la justice veut qu'il recueille le fruil de
ses soins, de son labeur, de sa patience, Quand Dieu a soum is l'homme à la
loi du travail , il a, par cela même, ét,1b li el consacré le droit Je la propriété
priYée, Lorsqu'un particulier appl ique sou industrie ct ses capitaux à la confection d' un canal, J'équit~et la raison veul ent que ce tte voie cie commun ication, qui n'existerail pas' sans cet homme, lui appar ti en ne, à la charge d'en
faire jouir le public, el.que le prod uit de ce canal lui procurent un revenu, de
même qu'une terre qu' il aUl'ait défrichée lui donnerait ri es récol tes, Sans
doute, dans un pays bien gouverné et régulièrement adm ini stré, les particu liers ne peuvent creuser des cana ux de ua\'igation qu'avec la permi ssio n de
l'autorité souveraine, et Id conservation , ainsi que l'u sage de ces cana ux,
l'estent soumis à la surveillance de celte autorité : mais ce n'est là qll ' un droit
de poli ce, nécessaire pour garan tir l'intérêt public. et qui n'empêche pas que
les canaux oe soient l'obj et d' une propriété pri\' ée, Si un ca nal a été construi t
par l'Etat , ce lte circons tance ne change pas sa nature, et il pf'u t, par l'eITet
d' une aliénation, comme celle qu'avait au torisée la loi du 23 novembre
1809, passel' du domaine de l'Etat dans ce lui ù' un p<lrticulier,
Les principes que nous veno ns d'exposer reçoiv ent une app li ca tion ana logue relativement aux lais et relais de la mer, L'arti cle 538 du Code Napo léo n
classe les lais et relais de la mer parmi les obj ets qui , n'étant pa.s susceptibles
(1 Du moins depuis J'ordonnan ce de Loui s X[Y sur les caux el fo rêts, car :wp3raYrtll l,
Jans cer'aines looali ll's, elles pouyaient appartenir au, seigneurs, '\'oir l'ar,icle
Coutume de :\leaux, les Inslilulcs coutumières de Loise l (Ii v.
11 ,
tit.
Il , nO
18~
de '"
5'. les obscr-
,",iono d'Eusèbe de Laurièr e sur ce passage de Loi,.. 1 et les nombreuses au'orités qu'il
cite,.
(de Vati", esnit),
2~-
de propriété p,'juee, font parti e du domaine public; mais dans quelle si tuati on
les lais ct relais de la mer ne so nt-ils pas susceptibles de propriété privée? Ils
n'e n so nt. pas susceptibles, tant qu' ils restent dans leur état primitir; mais
le go uvern ement peut , aux termes de l'article ~1 de la loi du 16 se ptembre
1807 , concéder les lais ct ,'clais et le droit d' endiguage, Cette raculté de
co ncéder les lais et l'clais a tou.iours ex i.té; car les lais et relais étai ent autrefois rangés parmi les petils domaines, ct l' État pou va it co ncéùer non-seulement
les lais et relais cléjà ex istants, mais enco,'eceuxqui se form eraien t par la suite,
(Arrêt de la CO llr de cassa ti on nu 15 no vembre 18.. 2, - Dallo:::, 1843, J, 28),
(( Ce n' es t pas tout : la jurisprudence a établi que les lais el ,'elais de la mer
pouvaient., même en l'absence de tout e concession de la part du gouvernem ent, être l'obj et d' un e action possessoire et être acq uis par prescription,
lorsqu'ils formaient un terrain {crme et produ,cti{. (Arrêts de la Cour de cassa tion du 3 nov embre t 821" Bulletin civil des arrêts ci e la Co ur , tome XXVI,
p, 3 12, et clu 2 janvier 181<4 , Dalla::;, 181,4 , l , 79),
« Ainsi, nou s ret.rouvons enco re la transrermation pal' I~ trava il , co mm e
source de la propr iété priv ée, C'est celle transformation qui fait passer les lais
et relais du domai ne public dans le co mm erce; le go uvernemen t les co ncède
en vue de cett e t,'ans rormatioll ; et même, sa ns concess ion , cell,c transformation les rend prescriptibl es (1l,
« Les règles que nous ex poso ns, en même temps qu' ell es dé ri vent d,c Id
raiso n Cl de J' éq uité, son t d'accco rd avec l'intérêt publi c: ou ne co nstrUIrai t
p<1S ci e ca naux, el on ne mettrait pas en va leu r les lais pt relais de la me", SI
(1) Ajou te/: il ce qui p réGl.:II ~ l'exemple de la cOllcessio n du 111.1\ l'e dl' CO Il.,.sctltle~ ;1 ~n
pHl'licu lier, ci té uans les sara nts m é moirc~ dû .W:l l'a M rnier . Ceuo conCI'.;Slon a cl~ f;\lle
par deux lois, en da,e des '29 juille' t829 e' 3 avril t846; ccpendan' les hÙl'res sont '"l
nombre des objets énum érés tians l'fll'liclc 538 du Cod e Nn pol éo ll ; 111315 la CO llCC6SlOI1 il
trouvé son mot if dans les trar[\ u ~ ~ f;)I I'C.
.
Enfin on lrom c une application de ce prinGipe d:-.ns le dernier pal':lgT[\jlllc de l'nt:liClc. 1cr
de la loi du 1:) al'rilt829 sur la pèche fiul iale, Cc paragraphe ('>Ot'ptc Je la règle qUI ail l'lb","
~ l'Étal le droit de pèche dans les cours d'eau navigables et fl oUables ... les cana"x.~!1 ~OSSfS
existants dan s l('~' p,-opriéUs 1Ja1"ticu,lières cl entretellll. >; ma {l'ai,;; des p"o]J1'utatJ'e.~,
( De l'alim esllil),
�-
-26-
en servant à un usage publi c, procurent en même temps des l'cvenus important s à leurs possesse urs : If esl-il pas év ident qu e ces objets sont susceptibl es de propriété privép.?
" Mais , dit le conseil d'administration de l' enregistremenl ct des domaines,
" les étangs de Berre cL d~ Caronte, étant en communi ca tion avec la Média terra née directemeol ct d' une manière permanentc, font partie de la mer.
« Dès qu' il n' y a pas de dirr. culté à ce t éga rd , il ne sa urait y en a voir non pins
« pour la domanialité publiqlle du canal maritime du Roi, puisqu' il conduit
• les eaux de la Méditerranée dans ces deux étangs, dont il constitu e ainsi
« tlne dépendance importanl e et naturelle. "
" No us so mm es loin de reco nnail re, en fait , que les ca naux dont il s'agit
soient des dépendances de la mer, mais raiso nnons dans l'hypulbèse où ils
auraient elJectivement ce caractère.
" Il Y a, dans l' argum enl ation du co nseil (l' administralion, une co nfusion
d'id ées qu e nous devons nous bâtçr de diss iper.
« De même qu' il faut distinguer la haute mer de la partie de la mer située
près des riva ges, de même il faut distingu er la partie de la mer siluée près
des riva ges, des ca naux artificirls au moyen desq uels l'industrie humaine
inlroduit l'cau de la mer dans l'intér ieur des ten·es.
« Chez les nations modernes. la hau te mer seule es t so um ise à celt e règle
d" droil romain , qlle la mer est co mmune à tous les hom mes ..... commune
ces objets ne devenaient pas la propriélé de, parliculiers qu i les crée nl ou
qui les fécondent.
• La même observati on ponrra it s'a ppliquer aux chemins de fer, aux
pon ls et aux autres œuv res de l'indus lre priv ée,
• Le syslème con lraire mène directement au socialisme,
• Il demeure donc élabli . qu'à toule, les époq ues, sous l'an cienne législalion comme sous la l égisl ~ li o n moderne, les ca naux creusés pa l' le ll'avai l de
l'homme onl constamment été suscept ibl es de propri.>té pri\'ée,
« Prélendra-l-on que ce principe reçoit excep tion à l' ~gard des ca nau x qui
abou tissent à la mer?
• Sur quoi reposerait une pareille exception? E,t-ce que les raisons qu e nous
avons déduites ne s'appliqu ent pas à un ca nal qui élab lilun e com municalion
enlre une rivière navigable el la mer, aussi bien qu'à un ca nal qui met en
comm unica tion de ux rivières na vigables? Es t-ce que lé ca n" l du Midi n'uboutit pas à la mer? La solution ne doil-elle pas êlre la même à l' éga r,1 d' un
canal qui conduit de la mer à un ,é lang 0'1 lac? Ne faudrait-i l pas l' étendre il
un canal (s'i l y en avait uo) qui co uper~ itlln isthme el réunirail deux mers ou
deox bras de mer? Il n'ex isle aucu n molif de dislinclion enlre ces di vers
cas. Ce que l'induslrie bumaine produit. dans loul es les circo nstances que
nous ,'enons d'exprimer, es t éga lemen t suscep tibl e de possession et de propriété privée, à la charge d' observer les règles de police élabli es dans l' inlérêt de l'Etat et du pu bl ic.
il y avait des mara is en lre les deux étangs de Berre et de Caranle,
et entre ce dernier et la mer. Tant que ce. marais ont ex isté, ils n'ont pas
été suscep tibl es de propriété privée; cal' personne ne pouvait les occuper,
les posséder. s'en sen 'ir, en lirer parti: mais ils ont été trnn sform és par le
travai l : à la place de ces ,marais, on vo it aujourd'hui, en partie, des canaux
destinés, les uns, à la na viga tion seule , les autres, à ln navigatio n eLà la
pêche, quelques-uns à la pêche se ul e, et, en partie, des terrai ns ex haussés
qui séparent ces cana ux les un s des autres, qui ne sont plu s in ondés, et SUI'
lesquels on a pu faire des constru ctions ou établir des cultures. Les marais
nn t disparu : l' industrie humaine leur a substitu é de, objets tout différents qui ,
27-
(Institut es, li\'. ", tit. l , § 't ).
Il en est au tremement de la partie de la mer \'oisine des rivages. Les
IJlJ bli cis tes la cons id èrent co mm e susceptible d' appartenir privalivemeDt, noo
aux particuli ers, sa ns doute, mai s iL la !latioll Ù laq!le/le les cotcs appll1'liemlcn t.
, VATEl. entre, à ce sujet , dan s de grands développemen ts qu' il sera il superflu de repl'oduirc ici (§ 28 0 et suivants jusqu'a u § 29~),
0Il>11iwll.
«
« Jadis
•
" C' est d'a près ce principe qu e le Code Na pol éo n classe pal'mi les objets
composa nt le domaine public, non-seulement/es )'ivages de ill mer, que le droit
romain meltait au nombre des choses communes, non -se ul ement les ports ,
mais encore les mdes , qui sont inco nsestablement une parti e de la mer,
• VHEL donne pour principal motif de celte dilJèrence entre la haute mer
�, -
-
28-
ct la partie de la mer voisine des rivages, que la première n'est suscep tible
à'aucune espèce d' occupation, tandis que la seconde est susceptible d' occupal.ion jusqu 'à un e certain il distance ; puis il ajoute : « Tout ce que nous
" avons dit des parties de la mer voisines des côtes se dit plus particulièrement
« et à plus rort e raison des nu/es, des baies et des détroit s, comme plus capa«
bles encore d'éll'c occupés, •
« Il ne s'agit encore là que d'occupation llar un e nation , •
Mais maintenant ar rivons aux ca naux artificiels qui introduise nt t' cau de
la mer daos l'int érieur des terres,
u A cet éga rd, nous trouvons que , Don-seu lement ,d'a près le droit moderne ,
mais encore d'après le droit romain lui- même, tout ravorabl e qu'il es t à la
com munauté de la mer, un tel ca nal est susce ptibl e d' occupation, de possess ion et de propriété au profit des particuli ers,
" La loi l ~ tT, de injuriis est ainsi co nçue: "Sa nè si maris propriu'111 jUi
• ad aliquem pertinent, uti possid etis interdictum ei compe tit , si prohibetur
« jus St/Um exercere, quoniàm ad privatam jam causam pertinet, non ad
« publicam hrec res, »
« Les interprètes se sont demandé qu el était ce droit qu'un particulier pouvai t avoi r sur la mer et qui lui donnait la ra clllté d' intenter un inlerdit, c'està-dire une acti on possessoire; et ils ont reconnu que le droit dont il s'agit
existait à l'égard d' un ca nal ou d' un petit bras de mer artificiel pénétrant dan s
l'intérieur des terres.
" VI~NlUS, dans so n Commen taire sur le titre 1°' du livre 1\ des Institutes,
' après avoi l' én um éré les choses qui , n'é tant pas suscep tibles d' occupation el
de possess ion , ne le sont pas, par conséquen t, de propri été privée, <ljonte ce
qu i suit : " Creterùm illa hic add enda est int erpre tat io ut, si qnid harum
• rerum naturâ occupari possit, id eâ tenOs OCCVPANTIS FIAT, quâlenlls eâ occv1 PATIOKE UStlS publicus sive communis non tmpedituT, quod meritü recept um
1 es l: nàm quùm res ità se habet, cessat exceptio pel' quam fit ut in jus p1'Oprillm
• non Iranseat, Aer occupari non potest , ni si terra occnpetur ; set! neque
«
fil
mare,
" Cell e expli ca tion est cligne du gra nd jurisconsu lte dont nou s venons de
ci ter les paroles.
,
En !,!:énéral, la mer, de même que l'ail" n' est pas susceptibl e d'occttp(ltion;
mais snpposez un e ci rconstance dans laqu elle une portion de la mer devi enne susceptible d'occupation, alors cell e portioo sera acquise en toute propri été à celui qui l'occupera (occupantis fiet), Le motif qui fait qu e la mer Ile
peut pas appartenir aux particuliers (lmllsire Ùl jus proprium) cessera à
l' égard de ce Lle porti on de la mer (cessat exceptio), Eh bien ! c'est ce qui
arriv era lorsqu'on introlluira <.Jan s l'int érieur des terres un e petit e portion de
l'er.u de la mer, au mo yen d' uo ca nal qu' on creusera (exiguâ sui portjone quœ
in (undwn pl'ivCtlwn admittilw) ; c' est là le sens natu,'el de la loi '14 de injltl'iis
(quomodo accipiendn lex 11, de injw'iis) ,
• Ai nsi, relativem ent à la propriété de la mer, il y a une gradation tOllt à
[ait rationnelle,
" La baute mer ne peul appartcllir à aucune nation ni à ancun individu,
parce qu' elle n' es t nullement susceptible d'occupation,
" La mer, dans le voi sinage des cÔles, ne peut appartenir à des particuliers, parce qu' cll e n'est pas suscep tibl e d' occupation de leur part ; mais
ell e peut apparten ir à la nation qui possède les côtes, parce qu 'ell e est susceptible d' occupation de la part <.l e ce lle nation,
" Enfin, le bras de me" arlificiel introduit par l'industri e humaine dans
l'int érieur des terres peut appartenir à <.les particuliers, parce qu' il est susce ptible d' occupation de leur part: et ce qui rend le rait de l'occupation
décisir, c' est, comme nous l' avons déjà dit , qu' il a pour cause première
le travail de l'homm e qui, en modifiant l'œuvre de la nature, a rendu cc fait
possible et util e,
• On voit don c, il tou s ces 'degrés, régner le même prin cip'!' dont les
conséquences ne varien t qu'à rai son de la diversit é des situations,
" Il surfit de parcourir nos tô tes, et notamment celles de l'ouest, pour
noU\'er ,de nombreuse appli ca tions des maximes que nous ,'enons d'ex poser,
relativement à l'introduction de la mCI' dans les terres au moyen de c.1naux
11\151 FO RTÈ EX IGUA SUI PORTIONE QUR IN FUNDUAl PRI\"AT UM .\D~IlTTITUn ;
• 9"omodo accipienda lex 1 ~ de injuTiis,
»
29-
ou bras ar tifi ciels,
�-
30 -
" Comment les ma r'ais s~lants s'a limente nt-ils? Par' des cana ux qui font
ar'l'iver l'eau sa lée dans l'intérieur des terres, qui appa rti enn ent , tantôt à
Ull seu l propri étaire, tant ôt en co mmun à plusieurs, et qui sont cu rés et ent retenus pal' ces propri étaires, Parm i les ca naux, il yen a qui sont assez larges
et assez proronds pour port er des barqu es. Qu ell e différen ce ya- t-il entre ces
canaux et le carlal dl! Roi? Aucune , év id enrm ent.
o l'ÎllnÎus, en é nooçan t l'opini on que nous ~vons ci tée, la subo r'ùonn e
avec raison à la cond iti on que le droit d' usage qui appartie nt au publi c ne
sera pas en tra vé ('luâtellùs ed occ"patiolle IIS11S pub/iclls si ve communis non
impeditur).
u C'est de là que déri" e la police qui appa rti ent à l'État, pour fair e jouir'
le pub lic des avantages auxquels il a droit ; mais ce pouvoir de poliee,
a uqu el nous o'avons cessé de rendre bomma ge, se concilie pa rrait ement av ec
le droi t de propriété de l'individu qui possède le ca nal on bras de mer a rtifi ciel. L'État a in co ntestablement , dans l'int érêt de la naviga ti on, on e au torité de poli ce sur le ca nal d u Midi , le ca nal de Bria re, le ca nal de Givors, etc, ;
ce qui n'empêche null ement les co mpagni rs auxque ll es apparti enn ent ces
canaux de pouvoir eo disposer par vente ou h ypoth èque el d'e n percevo ir
tous les prodn it s util es,
o Il en est de même des canaux qui co mmuniquen t de l' étang de Berr e à
l' étang de Caronte, et de ce lui-ci à la mer. Nous comprenons qu e l'administration prenne des mesures, soi t en fa"eur de la nav iga ti on, soit pour' em pêcher la destruction du poisson, mai s il titre de po lice N en respectanll e d roit
de propriété des possesseurs cie ces ca naux , si ce droit de proprié té cs t ré- gulièrement étab li .
« Après avoi r exami né la qu estion relativemen t aux ca na ux, co nsid érés
en eux-mêmes , exami nons-la relati,'e ment aux ap pareil s de pêche qu' ils contie nn en t.
" Ces appareils de pêche son t-ils suscept ibl es de propr ié té privée?
• Nous pourrions nou s borner il dire qu e, si les cana ux so nt slJsce ptihl cs
de propriété privée, les apparei ls de pêche qu i y sont pla cés onl nécessa irement le même caractère, Toute propriété emporte un droit exc lusir ; l'homme
-
31 -
qu i a la propriété d' un ca nal a don c le droil d'y pècher et ù'empêcher tout
autre d' y pêcher,
" ~la i s il faut répondre au co nseil d'a dmini strai ion de l' enregistrement ,
qui raiso nne co mm e il suit : La p ~ch c mari tim e est libre et. commune à tous :
donc, personne ne peut avo ir un droit exclu sif de pêche daos des ca nau x qui
50nt une sort e de dépendan ce de la mer, En outre, l'ordo nnance de la marin e co nti ent un titre relalir allx madraglteS et bordigues; et, (l' après ce titre,
les étab li,sern ents dont il s'agit ne peuvent Ure cons/rl/its sans /.'expresse pe:rmission dl! gouve1'llement; d'où l' on doit co nclure qu' il s n' ont qu' une ex istence précai re, et qu ' ils peuvent touj ours êlre supprim és par la l'évoca tion
de la permission.
«
Quelqu es
mot~
sur
~h ac un
de ces deux argument s,
" L' ordonnance de ,168 1 déclare la peche à la mer libre ct cOlllmune à tous;
mai s où?
" L' ordoonance ajoute sur le champ ces mots: tant en pleine mer que SIl1'
les grèves.
" Un ca nal est-il uoe grève? non certain emen t. Est-il la pleine mer? bien
moins encore.
« Le co nseil d'administration cil e Valin qu i s'ex prime ainsi: « La liberté
« de la nav igation et de la pêche en pl.eine me1' e st du droit naturel, du droit
« civil et du droit des gens tout ensemble.
Rieo n'esl plus juste ; mais
Valin s'est bien ga rdé de dire que la pêche dans un c~na l rait de main
ù' homme était du droit na/ut'el, dl! droit civil et du droit des gells tOlit ellsemble;
ca r, s' il en était ainsi , on serait co nduit à ce ll e conséqu err ce inadmissible,
que toutes les nation s du moncl e pourrai ent venir pêcher d~n s les canaux en
question , Valin étai t un légiste trop co nso mmé pour tomber d~ns une ,emblable erreur. Au surplij s, on sait qu e les règles généra les, tell es que ce ll e qui
co ncern e la racu lté de pêcher, sont touj ours lim it ées par les droits priv és régu1)
liè rement étab li s.
• Arrivo rr, au titre des madragues et bOl'digues,
• Les dispositions de ce titre présentent, d' uoe manière implicite mais par-
�-
32-
faiteme nl claire, une distinction qui a échappé aux honorables membres du
consei l d'adm inistration de J' enregistrement.
Les aut eurs très habil es et très équitabl es de l' ordonnan ce de 1681 ,
l'un des plus bea ux muuments légi slatifs du règne de Louis XIV, savaient parfaitement qu' il existait des dl'oits acquis en faveur des divers parti culi ers qui étaient devenus légitimement propriétaires de madmglles (é tabli ssements destinés à la pêche du thou ) et de bordigues. Jls voulai ent respecter
ces droits parce qu'ils étaient imbus du salutaire prin cipe ci e la oon rétroactivit é des lois. Al ais, d' un autre côté, ils entendai ent qu'à J'avenir, on ne
constituerait plus de droits de propriété relativ emont à des établissem ent s
de pêche de ce lle nature, et qu e J'État n'acco rd erait qu e de simples pel'misSialIS. Voilà pourquoi dans le titre dont il s'agit il est question tantôt des propriétaires de madragues et de bordigues, tant ôt des personnes qui obtiendront
u
des permissions.
{( Pour saisir celle différence, il sllffit de lire les articles avec que lqne a ttentio n. En voici le tex te:
ART. 1"'. {( Faisons défense à tout es perso nn es cie poser en mer des ma{( dragues ou filets à pêcher du thon et d'y construire des bordigues, sans
{( !wire expresse permission, à pei ne de confisca tion el de 3,000 livres
« d'amende. »
• Faisons défense de construire ,.. .... il esl év itl enl qu e le législateur ne
dispose là que pour l'avenir; il parie de bordi gues à construire et Inn dcs
bordigues existantes.
2. {( Ceux qui auront obtenu de nous les lettres nécessaires pOllr
• l' établissement de quelque madrague ou bordigue seront tenus ùe les faire
« en registrer au greffe de l'amirauté dans le détroit de laqu elle ils de vront
A RT.
(( (aü'e leur pêche.
»
Cet arti cle, de même qu e le précédent , ne concerne qu e les établissemen ts de pêche futurs et non ceux qui existenl déjà..... Ceuœ qui auront
obtenu de nous les lettres nécessaires POUR L'ETABLISSEMENT de quelque madl'aglle
ou bordigue ..... de telles expressions seraient un non-sens , si ell es s'appli quaient à des madragues ou bordigues déj il établies. Les mots ils devront faire
«
-
33 -
leur pêche exprimen l la même pensée; ces muts ne peuv ent s' entendre que
de la form ation d' un nouvel établissement, et non de la con tinuation d' un
étab li ssemen t précédemment formé.
« l:ordonnance LI e H381 respi.'e d' un bout à l'autre le lespecL pour les
ùroi ts acq uis: voilà pourquoi elle n'ex ige de pennissimls que pOUl' les madragu es et bordi gues à venil', et non pou.' celles qui avaient une existence
antérienre réguli ère. Aussi, dans les deux premiers articles ne Irouv e-t-on
pas le mot de propriétaire, parce que les permissions accordées en vertu de
ces art icles ne confèrent qu' un titre précaire qui ne s'élève pas au rang d' un
droit de propl'iété. Mais, dans les articles suivants, on trouv e des règles appl icables non-seulE'l ment aux simples concessionnaires, mais même allX possesseurs qui ont de véritables titl'es ci e propriété; et en conséquence, le législateur va employer l' ex pression q,,' il Il évit ée, lorsqu' il ne s'agississait que de
pel' IIIi ss ions,
ART, 3, « Enjoignons AUX l'ROPRIEHIRES de madragues cie mettre sur les
« ex trémilés les plus avancées en mer des hoirins, bouées ou ga viteaux, à peine
« des dommages qui arriv erout faut e de l'a voir fait , etde la privation DE LEURS
" DROITS, Faisons aussi défense, sous les mêmes pein es, de placer aucllo e
" m"dra gue 011 bordigue dans les port s 011 antres lieux où ils puissel~t nuire a
« la navi ga tion , et J ' y lais,er, en levu nt leurs madra gues, les pierres ou
" bourd es qui y étai ent attacbées. »
.
•
" L'ordonnance l'cco nnall donc qu' il y a des propnétau'es de madragues
et de bordigues : et leurs droits sont respectés puisqu' ils ne peuvent en être
pri vés qu'à titre de pé nali~é , lorsqu'i l y aura, Je leur part , con trav en tion
dûment constatée.
AnT . 6 . " Les PROPRIÉTAIRES et fermiers des bordigues sero nt tenus de curel'
• annuellement les fosses et canau"" chacun à l' endroit et da'll~ /'ételldtte DE
u' il yait ' en tout temps quatTe pteds d ea u au. mOllI S,
« LEUR nORDI Il U E~ , ell sorte q
,
'
1 300 liv ' d'amende et d' y être mis ouvriers à "leurs fraiS. ".
« a peille ( e
" Il Y a dODC des propriétaires de bordigues ;, GeS propl'lélall'es peu\ ent
avoir des fermiers; le législat eur expliqu e ce qu ds sont tenus de faire dan:
leur bordigue. Le droit de propriété n'est-il pas consacré par cette diSposition .
�-
-
34-
« l'alill, dans son Commentaire, remarque que le curage prescrit par
l'arti cle 6 « n'a pour obj et que la sOreté et la facilité de la navigation pour
• les bâtiments qui seraient forcés d'eutrer da us ces fosses et cananx,
« Ainsi, voi là, co mme nous l'avons dit ci-dess us, les règles de police à
côté de celles qui reconnaissent le droit de propriété. Les un es et les autres
se concili ent sa ns peine.
ART. 8. " Ne pourront LES PROPRIÉTAIRES ou fermiers prétendre aucuns
« dépens, dommages et int érêts con tre les marini ers dont les bateaux auront
• abordé leurs bordigues, s'ils ne justifient qu e l'abordage a été fait par leur
« faute et malice. »
• Quoiqu'il ne soi t question dans cet article que des bordigues , VALI~ exprime l'opinion qu' il doit s'appliquer aux madragu es; et cet auteur se sert
de termes rema rquables que nous allons tran scrire: « Il faut en dire autant
« des madmgues et atttres 7Jécheries EXCLUSIV ES.
Ainsi les bordigues et les
• madragues sont des pêcheries exclusives .
« 00 se rappell e qu e le conseil d'administration de l'enregistrement cite
Val.in co mme favorable ail principe de la liberté de la pêcbe : oui , de la
pêcbe en pleine mer, mais non Ile la pêcb e au préjudi ce du droit de propriété,
du droit exclusif des particuliers qui ont des madraglles ou des bordigues
à eux appartenantes.
a Un magistrat, qui n'é tait pas moins expérimenté que Valin en matièr.e
judiciaire et administrative, M. le président Favard de Langlade, proclame les
droits de propriété dont plusieurs madragues sont l'obj et. «Ces établisse• mellts de mad rague., dit-il , Il' ont lieu que sur les cô tes de la Méditerran ée.
" Il en est plusieurs dont l'existence remonte à des époqu es recu lées et
• qui SOllt des propriétés patrimoniales. Quelques-un es même de ces madra• gue" qui ava ient passé entre les mains du domain e, ont été resti tu ées
• à leurs anci ens possesseurs. en vertu de la loi du 5 décembre 181~ , •
(Ré pert. de M. Favard de Langlade, V O pêche, sect. ~ , §§ 1 ei 2).
l)
l)
" En effe t, nou s avons sous les yeux des pièc'es relati ves à sep t madrag ues
qui avaient été co ncédées à un sieur De Boyer, par lellres-patentes du mois
de mai 1603, enregistrées au parlement et à la chambre des comp tes de Pro-
3S-
vence. Les bériti ers du sieui' De Boyer les vendirent à la fami ll e De Rohan ,
sur laq uelle elles furent confisquées pour cause d'émlga tion . En 1814, ell es
furent rendues au prince Charles-A lain-Gabriel de Rohan, par un arrêté de
la Commission de restitution, portant qu e ce prince « sera it réintégré dans le
« d"oit exclusif de la pêche des tbons avec ret s appe lés madra gues et au lres
" engins, etc. - » Le mini<tre des fin ances s'est pourvu , longtemps après,
contre cet arrêté ; mais so n pourv oi a été rejeté par le conseil d'État, le
'18
uov em br~
18"2.
• Ce qu e M. Favard de Langlade dit des madragues qui so nt établi es sur
les cô tes, s'applique à plus fOl'te raison aux bordigues qui sont placées dans
des canaux situ és au mili eu des terres et faits de main d' homme. Lù, le r.aractère de propriété patrimoniale est encore plus in contes tab le, lorsque le possesseur produit des actes en règle ('1).
" Le ti tre de l'ordonnance de 168 1 relatif aux madragues et bordigu'es,
loin d'atténuer les prin cipes généraux que nou s avons établi s relativement
aux canaux de tou te nature, les confi rme de la man ière la plus prononcée. Il
reconnail qu e les bordigues so nt susceptibles de pl'Of'riété; et, lorsqu' il le déclare , il consid ère les bordi gues d' ulle manière complexe, c'est-à-dire
à la foi s comme ca nau x et comme étab lissements de pêcbe. La disposition de
l'article G, qui enjoint (lUX propriétaires de bordigues de curer [es callaux
dans l'étendue de leur bordigue, ne laisse aucun dout e à ce sujet.
« Ainsi, soi l qu'on envisage séparément les ca naux et les appareils de
pêcbe, soit qu'on les env isage dans leul' ensemble (et c'est ce dernier aspect
(1\ No us disons qu'en
ma ti~ rc
do bordigues le caractère de propl'iété patrimoniale ('::; t
encore'1Jl u.s incontestable qu'on matière do madragues. La difrércncc qui existe en fave ur
des bordigues tient, comme nous ve.nons de l'i ndiquer, à la di versité do situarion de ces deux
genres de p<lcherie. Les madragues sont 61ablies sur les coles, wndi s que les bordigues le
son t. dans des canaux creusés de main d'homme, ct auxquels s'a ppliquent directemcnt Cl
évidemment les principes générau..; établis ci-dessus relatiyement à ces SOI'\I'S do canaux. II
suit dê là 10 qu'cn fait Je pmpriité pat1·imoniale, tout ccqui est "rai des madr:lgucs \'(,$1,
C), pllu forte )'aison, des bordigues; 2° que,. lors mènle qu'il intel" iendrait quelque décision
contraire à la propriété patrimoniale des madrngucs, on nc pourrait en rien conclure,
conlre celle des bordigues.
(De Vatimesnil).
�-
-
36-
qui est le vrai, sous le rapport pratique et applicable) , ils sont suscept ible de
propriété privée, et ils ont ce caractère conjointement avec les portions de
terre-ferme qui en dépendllnt, comme servant à l'exploitation de la pê,
cherie,
" Ces vérités n'on t pas pcbappé au consei l d'État, car, lorsqu e, pal' sa décision du 17 décembre 18'\'7, il a confirmé le conflit et a déclaré que l'all" torité administrative était seule compétente pour déterminer les limites de
• la mer, " il a eu grand soin d'ajouter : '" saur le jugement pa'/' qui de droit
• des question$ de propriété. » ; - Le conseil d'État a donc prévu qu' il pourrait
arriv er à la fois que, par un acte régulier (1) de l'autorité administrati ve, un
ou plusieurs canaux ren fermant des bordigues fussent classps parmi les dépendances de la mer, et que cependant il fOt jugé par les tribunaux que ce canal
ou ces canaux formaient une ]Jrop!'iélé pril'ée, Le consei l d' État les a , pat'
conséquent, regardés comme susceptibles de propriété privée. Il
Par respect pour l'autorité si imposante de M, de Vatimesnil, nous n' ayon s
pas voulu interrompre le cours de cette citat.ion; mais arrivés au terme, qu' il
nous soit permis d'ajouter quelques mots encore à l'appui de la tbèse si habilement démontrée par le savant jurisconsulte de la capi tale,
ous voulons en appeler encore au témoignage de plusieurs grands juristes
sur le point de droit, où M, de Vatimesnil a invoqué celui de Vinnius,
Voici d'abord la doctrine de Grotius qui y est entièrement conforme. Elle
est évidem ment magistrale,
Au li v, 2, cbap, 3, Dejure beUi et pacis , nO 10, il dit :
Flumen publicum est, ut scimlls; et tamen jus piscandi in diverticllio
fluminis occupm'i à privato potest; sed el de mari dictum à Paulo est, si maris
proprillm jus ad aliquem pertineat, I//i poss'iden/is interdicturn ei competere,
quoniam ad priva/am jalll caus am T,e!'linet, nO'l ad publicarn "œc !'CS , Et p l u ~
bas: Quod si priva/ortlm {undis aliquid maris potest acccdere, qua/em,s inclu«
37-
swn nempè est, et ita eœigullm u/ {ltlldi pottio cellseri possi! , nec quominus ill
, fiat repugnat jus na/utœ ; quid ni et portio mm'is illclusa litt oribus ejus fiat
populi eorumvè pO]Jlûorum cujus quoru!1Ivè sunt lit/DI'a, dum pars maris ad
territorium comparati non major sit, quam dit'erticulum maris comparatum ad
magnitudincm {undi pri vati? "
Et Barbpyrac traduisan t Grotius, Li, R. 2\H, du même Traité de la paix
('t de la guerre, le r(,pl'oduit ainsi qu' il suit:
" Quoiqu'une rivière apparti enne constamment au public, si néanmoins
ell c entre par quelqul' endruit dons les terres d' un particulie" , celui-ci pCltt
s' app!'Oprier le ,"'oit de pêche dmls cette espèce de branche 0 11 Ile golfe de la
,'ivière, A L'ÉG.llIO MIi!1E DE LA MER , le jurisconsulle Paul dil que si quelqu'un
!J a droit de propriété, il est !'eçu à demander I/n arr.!t du préteur pour la
maintenue; pal'ce que c'est alors une affa-ire particulière, et non pas U!le affaire
qui l'egarde le public; 1Jt1isqu'il s'agit de la jouissance d' tm dTOit que l'on possède à tit·re cl' acquisition privée, et non pas, de la jouissance d'I/n d!'oit comrnWl,
Il s'agit là certainement d' une petite partie des ea ux de la mer, que l'ou
introduit dans le fonds d' lin particulier; comme nous lisons que Lucullus et
d'autres l'on fait au trefois, L'empere ur Léon étendit depuis ce droit, contre
les décision s des anciensjurisconsu lles, jusqu'aux endroi ts de la mer qui 60nt
a u-d eva nt des mai so ns bâties sur le rivage du Bosphore de Thrace, ensorte
qu' il permit à chaque propriétaire d'enclore de bâtardeaux cel espace de
mer , et de se l'appropri er, »
Il est curieux de voir sur quels faits nombreux de l'antiquité GrotIus s'appuye, indépendamment du texte de Paul , L. 14, If, De injuriis (Digest. lib_
47, - tit. x), elùesNovelles 57,102 , 103 , 104 de l'empereur Léon, pour
ju.tilier ce droit.
1\ cite Salluste qui dit en parlant du luxe de son époque: • A privnl'Îs
compluribus maTin cons tructa esse, » (Catilin. , cb, Xlll);
Horace qui reproche aux Romains de rétrécir en quelque façon la mer,
par I ~s digu es qu' ils y jetaient:
, t Celui qui cst émané do M, te préfct dos nOllcllCS-du-fihône n'est régulier IIi en b
forme, ni au fond, comme nous rétabtirons ci-apr!'s,'
(De Vali1>leS1lil).
• Mari!que Baiis obstrepentis urge3
�-
38-
-
Summoverc li tlora.
Lib. i i , Ode Hill vers. 20, 2 1.
tav;t, œstuari,is intercipiendo fluctus, piscium diversos gl'eges srparatos molibus
includendo, ut nul/a tam sœva tem.pesta, incideret, quâ nOIl O"utœ mensœ
val'ietate {erculormn ablmdarent. » Lib. IX, ch. 1, num . ,1.
COlltmcta pis ces œquora selltiullt
Jactis ill alLum molibus.
Lib. 3, Ode 1 vers. 33, 34;
1)
Senèque le déclama teur qui dit: • Maria submocelltur, projectis molibus ;
39-
1)
Pline, le' naturaliste , qui écrit qu'on laisse ronger la terre pa.- l ~s eaux, pour
y faire entrer la mer : • [Il lIIaI'ia jacitttr (terra), aut ut (reta admittamlls,
eraditllr aguis. D Hisl. nalur. , lib. 2, cb. LXIII ;
LampridEô, qui dans la vie d' Alexandre-Sévère, dit que ce monarque fit à
Baies des étangs d' uoe grandeur prodigieuse par le moyen des eaux de la
mer qu' on y introduisait: • Fecit et stagna stttpenda admisso maTi; »
Tibulle qui représente les poissons comme se mOljllant des tempêtes dart
les espaces de mer ain si enclavés:
" Clattdit et illdomitum moles mm'e, lentus ut intl'à
Negligat hibemas piscis adesse millas.
Lib. 2, Élég. VI vers. 27, 28 : »
Pline, le naturaliste qui parle, en passant, de ces viviers fai ts dans la mer.
Hisl. nal. , lib. 3 1. ch. VI:
Columelle, de Re Rusticâ, lib. 8, ch. 16 el 17, où il uit, entre autres
cboses, que la délicatesse des personnes opulentes avait renfermé les mers et .
Nep tune en quelque façon : « Lalltitiœ locupletllm marin ipsa Neptulltlmgue
clauserunt ;
1)
St-Amb roi se, Hexam., lib . 5, ch. iO , et Martial, li b. 10, Ép igl·. 30 v, ln
et sui \'.;
Et enfiu Valère-Maximp, qui raconte et qui décrit les pêcheries de Sergius
Orata, cie manière à nous donner presq ue uo modèle des bordigues actuelles.
Il dit qu' il s'était fait des mers particulières, arrêtant les eaux de la mer uans
cles barres ou des bassins, et faisant diverses digues pour en ferm er à part
chaque sorte de poissons : «Idem Sergius Oratn peculiaria sibi maria eœcogi-
Le droit de propri été S UI' la mer dont parlent Vinniu s et Grotius, d'après
la loi 1 q, de injul'iis, et qu i était devenu si universel d'a près le témoignage de
tous ces allteurs, avait été rle plus organisé par les Novell es de l'empereur
Léon 57°, 102", 103" et '101,".
La première, port e pour titre: « Quanlum in piscatiblts REMORAl PI3CATORI.E
inter se dis tare debeanl. "
La seconde traite : " De prœdiis maritimois ocl REMOUS PISCATORIAS constituendas non wflicientibus, et ut invitus eliam ad socielatem adigntw· »
La troi sième s'occupe: " De iis qui in maritintis prœ,l-iis ad constituendas
RE!lORAS PI SCATOIUAS societatem inel/nt. »
Et la dernière est intitulée : • DE PI SCATonns 8EMORIS, inter quas legitimum
intel'slilium 11011 est "
Et pour qu'il n'existe aucun doute sur la véritable port6e de ces NoYelles, il
su ffit de rapprocher J e leu r tex te le commentaire que Cujas eLl fait, Observationem, lib. XI\', chap. 1, 1. 3, éd it. de Fabrol. II définit d'abord ces piscatoriœ remorœ : RETIA IN !IARI EXTRNSACO"FIXIS PALIS. Ce qui montre leur similitude avec les bordigu es.
Et il dit eo parlaot ùu droit compéteot au propriéta ire de ces PISCATORU;
RE!lORJE : A<:quull1 es t domil1um quemqlle PLENO DOMINIO FRUI.
Écoutons encore Heioecius dans ses préleçons sur Gro tius et su r Puffendorf,
lib. 2, cap. 3, n, 8 et seq. II ùemand e an maris dominillm oCC'ltpa"i possit. Il
discute l'opinion ue Grot ius; et d'a près ce pub liciste, il dit: "Respondel, dwn
{atentul' jureconsttlti, rnal'c esse "es communes nuU;us, id est in commullione
negalivâ constilutas, concedere etiam debcre, id posse occupari. Quœ enim l1ul.litls sunt, cCc/lmt occupanti. Id qllod illustrai exemp/o flumillis , quod cum pllbltct/m sil, admit/at tamen dominium, si quis in divatiet/lo ejus pel' longissimum
lempt/s piscal1/s sit cum aliorulIl exc/usione, L. 7, fT. de div. tempo prœscl'.
�-
-
40 -
comme dépendance rIe quelqu e domain e ri verai n. En pareil cas, la récoll e du
varech, lou s les profi ls de la pêche elles lais ct relais apparli enuenl excl usivemenl au suj el, sous la se ule réserve de ne parler au cun obslacle à la nav i-
I",Jè argumentatur: si ergo mare ill prit'atl potest esse domillio : q!tid ni et in
dominio gellt;s, quœ lel~'as possidet !ttrimque vel cÙ'wm eh'cà?
« Ego, pOUl'sui t- il , quœstianem: an mal'e sit in dominio; ejusclem nalurœ
pulo, ne il/am: ail in dominia sil te7Ta ? Tel'm œque commun;s es t naturâ ne
mœre.
gati on.
»
Enon parmi les modernes n'oublions pas J' aut orité si compl ète ci e Dav iel,
Traité des cours d' eau·, 1. 1, nO 9, p. i 0, qui di t d"J ne mani ère ex presse:
Le droil de propriété privée pourrai l, à ne co nsidérer que la nature des
choses, s' exercer aussi sur la mer dans des limi tes plus é troi tes. Ainsi on peut
construire sur les bords de la mer des pêcberies et des parcs à coquillages;
on peut récolter le varech, enl ever les sables el ga lets, é tablir des sa lines.
Dans beaucoup d'endroi ts on a rormé da ns l'i ntéri eur des terres des bassin s
qui se remp li ssent d'ea u à la marée monla nt e et q ui : se vida nt à marée basse,
font mouvoir des usi nes. Chez les Romain s, de simp les particuliers mellaient
leur ambi tion à agrand ir les cl épendances de leurs maiso ns de plaisa nce a u
moyen de chaussées et de d igues jetées sul' la mer (1),
« Certes Ioules ces choses so nt bien des ac les d'occupa ti on et de possession
sur les bords de la mer. C' est la proprié té tell e qu'ell e dérive de la nature de
l'homme e t de sa puissance sur les choses.
« Seulemenl , celle propriété d'lit ê tre subo rd onnée aux servilud es 'lui
résul1ent de la consécration natu r.elle de la mer à J'u sage de tous les hommes.
« C'est ainsi qu'en Angleterre les lois reco nn aissen t ex pressément qu e des
parties de la mer et de ses ri vages peuven t ap part enir à des parti culiers par
concession, litre ou prescription , sa il principalemenl , soit accessoirement el
«
(1) 1I0'rat. ad.. 1 et 24, lib. 3. - La co nstitnt ion 09 de l'empereur Léo n donna
'1\
41-
,
" C' est ain si encore qll'en Fi'ance, ava nt 15 r. /. : les parli culi ers pOli ra ient
obl enir par prescri plion le droit d'avoir dans la mer des pêcheri es, même
construi les en pierre, C'esl ai nsi que. j usqu'en 168 \ , beaucoll p de seigneurs
ri verains de la mer élaien t en possession de droil s de Inul e espèce sur les
côles: droits d'eau, droits de pêche, de Tirage, de défends, d'épat'es, etc,
« Les borcls de la mer son t donc réellemenl par leur na tu re suscep libles cie
prop riélé privée; mais, en France, depuis l' ordonnance de '\ 5H sur l'inaliénabi lilé cles doma ines de la cou ronn e, et no lam ment depuis l' ordonna nce
sur la marine, de 168 \ , par un e cl isposili on d'ordr e public et d' ul ilil é générale, pour assurer d',lu tant mieux le se rvice de la naviga lion et la sûreté de
nos côtes, les bords ct rivages de la mer ont élé soustr aits 11 la propriété privée, et la dispositi on en a été réservée à la na tion, à titre de souveraineté.
« C' es t donc déso rma is uo e règle de notre droit public int érieur. qu e les
parliculiers ne peuven t acquérir sur ces choses que ci e sim ples fac ull és, soumi ses à un e co ncession fo rm ell e du gouvernemen t, et que les possessions de
ce lle nalure so nt absolumen t ina l i~ n qb l es ct imprescriplib les, comme membres de la so uverainelé. •
Rien donc ne sa urait ébra nler noire propositi on. Elle est au-dessus de toute
a rgum èntali on contraire. Le ca nal d u Ro i et la bordigue y établie sont susce ptibles de propriété pri vée parce que le ca nal a été creusé de mai n d' homm e,
. et qu e, sou s les législations que nous avons parcouru es, la mer appropriée aux
besoin s de J' homm e, la mer enrerm ée dans un ca nal, ou cont enu e dans un
espace qu e l'homme lui a ouvert, parti cipe de la nature de ce ca nal, de cet
espa ce el devient sa propri été.
propriélaire d'une chaussée sur la mer le droit e,cl usif de pèche en cet endroit. Elle abroge
If's lois antérieures, qui nc recon naissaient pas ce droi t : SCCtlt
locis prœter vol/m,...
tiUem do mini ex alieno {Tllctus p ercipere nemini cOllceditur, sic etiam ma.rithni.-:
ObteTnari prœcipimus . -
te'lTe'lti
La loi 13, Commun . Prœdi01', valide un contrat pa r lequel
un vendeur, en aliéna ni une parli. de son hérilage confronlan l à 1, mer, interdit à l'acquéreur tout droit de pêche vis-à-vis la portion qu'il conserve.
Voyo ns mainl enant si dans l'h ypothèse in verse, celle où l' on ne vou drait
pas reconnallre qu e le ca nal du Roi esl l' ouvrage de l'homme, il ne serait
pas encore su sceptible de propriélé pri vée,
�-
42 -
Nous n'hésiLons pas à dire que le droit serait le mêm e et que pour s'appuyer
Sllr un autre principe, il u' en serait pas moins certain .
-
43-
ct de toutes les côtes et grèves qui en sont baignée6.
TRANSLATUlU EST t
OMNE l''PERIU!! I N CIESAREM
OM!'Cl SQUE POPULI ET PLEDIS POTESTAS IN PRINClPEM TRANSLATA .
In slil. lib. 1, De jure Iwtumh . n (Valin , 1. 2, p. 691, édit. de 17ï6).
El à ln p.
Les canaux des bordigues et les bordigues seraient encore susceptibles de prop,'iété privée. quand même ils ne seraient pas /' ou vrage de l'homme.
Après le travail de l'homm e qui peut s'approprier une parti e de la mer , il
y a la concession du souverain qui peut transporter sur elle un "rni droit dr
propriété, et le créer au profit du simple particulier.
Celle seconde cause du droit de propriété compè te nux hoirs ùe Galliffet.
C'est à leurs auteurs que les anciens souverains de la Pro\'ence onltransporl é
ce droit sur le caual du Roi et sur la bordigu e y établie.
Nous le verrons tout à l'heure en exposant leurs litres.
Pour le moment, il faut examiner seulement si celle source du droit de
propriété sur la mer est vraie et incontestable en droit, comme la pre mièr<.'.
Or, aucun doute ne peut ex ister sur ce point.
Dans nos anciens principes. la propri élé de la mer et des fleuv es ou rivi ères
navigables ou flottabl es résidait dans le souverain. C'était en lui qu' elle existait , comme dans sa source première.
TOlls les écrivains jurisles le professenl.
Voici en qu els termes Va lin l'enseigne:
,
• Il est de principe, dit-il , que ce qui n'es t à personne en particulier, mais
apparti ent à la Républiqu e. c'est-à-di re à la communaulé d' un État so uverain, est dévolu de pl ein droit au prince daus un État monarchique , comme
étant le chef ùe la nation , et comme réunissant à ce titre, en sa personn<.', tou s
les droits comm uns à la nation , du nombre de5quels est LE DOMAINE DE LA ME il
.
.
G2~ ,
il dil encore :
" Le domaine de la mer ~e rvant de borne aux côles d' un Élal. domaine qui ,
dans les premiers principes du droil, apparlenai t à la communaulé, cs t dévolu
essenliellem~nt ail souverain , comme réunissan t dans sa personne tous les d'foits et
les intéréts de la communal/té, iL mison de lit puissance publ·jque qui dside Cil
lui seul. A ce titre, lE DO~IAI~E DE LA MER LUI APPARTIENT DONC au liom ct comme
cherde /anatioli, à J' ex clu sion de lous seigneurs parliculiers qui ne so nl que
des membres ci e la nation. Or si le domain e de la mer lui appartienl, le rivage
qu'e ll e baigne lui apparli ent aussi: cl. par nne aulre conséquence éga lemen t
nécessaire, 101Jt ce qui es l Irouvé sur les flots ou qui est tiré du fond de la
mer, ellout ce qu'ell e je Il e à la côl e lui apparlient tout de même, à ùéfaut
de réclamation de la part des propriétaires de ces choses. »
Juli en , dans ses Élément s de jurisprud ence, s'en explique avec aulant
Ù·énergi e.
" La me" même , dit-il, qui at'oisine les cotes , est devenue publique ET APPARTIENT AU PRINCE Olt à la république à qui les ter/'es ,appartiennent. La loi 1311'.
Communia prœdio/'um , dit qu'on ne peut imposer aucune servitud e sur la mer.
par la seule autorité des parliculiers: Lege privalci mal'i servitus imponi nOIl
potest; d'où l'on co nclut qu'i l y peut être imposé une servitude par l'autorilé publique. Ainsi, en France, les rivages de la mer et les mers mêmes qui
avoisinent nos cô les appartiennent au Roi en qui réside J'autoril é so uv eraine. •
(Éléments, p. 136 e(137).
A l'appui de celte doctrine, Ju li en cite Lebret, de la Souveraineté du roi,
li\' . '2, chap. 11 : - Grotius, de jure belli et pacis, li v. 2, chap. 3, nO8;
Loccenius, de jure maritimo, liv. l, chap. ~
Inutile donc d' auloriser plus longtemps ce principe.
Il es t tout aussi certain pour les fleuves et rivières navigables et flott ab les.
�-
44-
L'ordollDance des Eaux-el-Forêls de 1669, le proclame, dans l'arlicle ~1
du IiI. 27 en termes formels:
" Déclarons, y est-il dit, LA PROPRIETÉ de t~us les tleUl'es el rivières, portant
bateaux de leurs fonds sans artifices et ouvrages de main dans no tre royaume
el terres de notre obéissance, FAIRE PARTIE DU DOMAINE DE NÙTRE COURONNE,
nonobstant tous titres et possessions conlraires, sauf les droils de pêche, moulins, bacs, 011 autres usages que les particuliers peuvent y avoir par tilres et
possessions valables, auxquelles ils seront maintenus, »
Dans l'édit d'avri l 1683, il est dit dans le préa mbule: " Comme les 9"ands
« fleuves et les 'rlL,ièl'es 11av1'gables APPARTIENNENT EN PLEINE PROPRIÉTÉ AUX ROI S
• ET AUX SOOI'ERAINS, PAR LE SEUL TITRE DE LEUR SOUI'ER ,\lNETÉ, tout ce qui sc
• trouveren(ermé dalls leurs lits, ...... ' NOUS APPARTIENT}) (Isambert, co ll ec!.
lois anciennes) ,
L'édit de décembre 1693 proclamait le même principe, en di sa ut : " LE
• DROIT DE PROPRIÉTÉ QUE )/OUS AVONS SlIr tous les fleuves et l'ivières navigables
« de notre l'oyat/me, ÉTANT INCONTESTAD LEMENT ÉTADLI PAR LE S LOIS DE L' ETAT,
« COMME UNE SUITE ET U~"E DÉPENDANCE NECESSAIRE DE NOTRE SOUVE RAINETÉ , les
« rois nos prédécesseurs et IlOUS, avons."", l) (Isam ber l, eocl,)
Enfiu les divers textes de l'ordonnance de la ma rin e rapporl és plus haut
et cités par la Consu ltation de M, de Vatimesn il, son t fondés et reposentlous
sur le même principe,
Si donc le souverain avai t la propriété et le plein domaine de la mer et df
ses rivages, il pouvait acco rd er à un simple par liculi er la propriélé d' uu e
d~pendance de celle même ruer et de ses rivages, C'est la conséquence mêm e
de so n droit de plein domaine,
Ce point de droit public n' 6la it pas exclusif à lu France proprement dil e ;
C'était aussi le droit public de la Provence, avant son adjonction à la France,
Nous l'avons déjà \'u par la doctrine de Julien , dans ses Éléments, p, 136
et137, qui reconnaissait, d'après nos prinçipes prov ença ux, qu e le domaine
de la mer et de ses rivages reposait sur la têle du souverain,
-
45-
On peu l le \'(,ir encore par ce que dit De Coriolis, dans son Trai/ é de l'adminis/I'olion du comté de Provence,
• Les Roma ins, dit.il, 1. 2, p, 257 , do nnaient ce !lom (de domaine) aux
terres de 1" rép ublique prises sur ses ennemis"", Dam notre lan9tte, le mot
DOMAINE est devenu pm'tieulier et propre au PATRIM OINE de IlOS 3oU'verains, "
Et à la p, 258: " Entre les différentes sor/es de biells qui composent le
domaine, les uns sont domaniaux pm'leur llo/ure, TELS QUE LA "ER, LE S FLEuvES
ET RIVIÈRES NAV IGAnLES, les grands chemins, les mllls, rempurls, fossés et
co nlre-escarpes des villes; les aulres ne sont domaniaux que parce qu' ils ont
f"il partie dll domain e dès le com mencement de la monarchie, ou qu'ils y ont
élé unis dans la suile, "
Il n' y a do nc pas de différence sur ce point entre le droit fran ça is el le
droi t prol'ença!. La mer et les rivières navigables ou nouables étai ent en
Prove nce par leUl' nnlure même dans le patrimoine du souverain, L'ex pression
de De Corio lis a son énergie, Elle con li ent donc la même co nséquence qu e
nous avons dédu il e plus haut tou cha nt le droit qui régissait la France, Par
J'lin , comme par l'au tre, un droit ùe propri été privé sur la LO erel sur les
rivières navigables, pouvait êlre accordé à un simple parllcuher par le
souverain, cl, à ce po int de vue spécial , nul doute donc que la bordigue et
le c;nal du Roi ne soient snsceptibles de propriété privée, si leur origine
remonte jusqu'à un acte dO aux souverains de la Prov ence"
.
Il existe même dans la législalion ancienne un arrêt du ConseIl et lin édit
du 15 juin 166S , donné en formes de lellres-patentes, ellregislré au parlemen t de Provence le 2S juin su ivan t (Précis des ordonnance~ de Monl, ' 1 )
,' S I) qu i furent promu louées pour main lenil' dan s looles les
\- a on , p, '..
,
"
.
concessions et transpo rls qui avaient élé fa its par les co mt es de Prov ence,
les anciens ~ouverains du pa ys, avan t l' époque de l'adjonctIOn de la Prov ence
à la France, du domaine de ces anciens souverains,
Et ce ducument législalif achève de démontrer le point que nous ch er~
chons à étau lir ici, à saroir que le cana l et les bordigu es du Roi ont éte
susceptib les de propriété privée, si on peut rattacher leur eX istence, sur la
�-
-
46-
tête des au teurs de l'hoirie de Galliffet, à un acte de disposition de ces anciens
souvera ins.
•
Voici le text e du dispositif de l'arrêt du Conseil:
" Ouï le rapport du sieur Colbert, co nsei ller du roi au consei l ro yal, co ntràleur générll l des finan ces. Tout considéré, le Roi étant en son conseil .. .. .
A ordon né et ordonne qu e les engagistes 011 donataires des fi efs, terres
seign euries e t au tres droits joints à icell es dépendant dndit comté qui ont
apparte/1u et (ait partie des domaines desdits rom /es et com /esses de P"ol'ence et
.
'
qUI ont été par eux ou leurs li eutenant s, sé néc haux , et antres ayant pon\'oir
d' eux , vendus ou engagés à prix d'a rgent, inféodés, échangés, donnés ou
légués, ou aut'remmt dispusé par quelque titre ou pOUl' quelque cause que ce
soit, jouiront desdits fiefs, terres, seigneuri es et droits joints il icell es, comme
ils en ont joui avant l'union dudit comté ù la couronne et du depuis jusqu'à
présen t, sans qu: sa majesté ni ses successeurs puisse nt prélendre y rentrer,
01 aVOIr drOit d y rentrer ... .. veut et entend sadit e Maj es té, que les propnétalres qUI a uront été dépossédés desdit s domain es ..... seront ré tablis eu la
possession e t jouissance d'iceux , nonobstant lous arrêts à ce co ntraires .... . . a
maintenu et maintient les acquérenrs et possesse urs des susdits domai nes
en la possession de leurs fi efs, justices, droit s seigneuriaux et tous autres droit s
et propriétés joints à iceux dans tout led it comté de Provence, Forcalquier et
terres adJac~)Otes , pour les poltt'Oi,' posséder incolllmulablemelll el à perpétuité,
cn di sposera \'l e ct à mort, sans qu'à l' avenir ils y pui sse nt être troubl és, etc.•
"oici le text e de Fédit :
A ces causes et a utres considéra ti ons à ce nous mou\'ant, de l'a\'is de
notre Co nsei l, et de notre certaine science, pl ei ne puissa nce et autorit é roya le,
nous avo ns, pal' notre présent édit, perpétu el et inviolab le. déclaré ct déc larons : que nous, ni nos successeurs rois . ne so nt en droit de rentrer dans iceux
domaines, droits, justices, fiefs en dépendant qui ont été vendus, ali énés CL
transportés, cédés, quitt és, permutés, éc bangés, donnés en récompense ou
au tremen t, par quel titre, pour qu elqu e cause, so us qu elqu e co ndition qu e cc
SOit, par les com tes et com tesses de Prov ence, leurs sé néchaux, lieut enanl s eL
autres ayant disposé en leur nom , dans tout e l' étendue dudit comté de Pro«
47-
vence, Forca lqui er et terres adj acen tes, jusqups à l'union dudit comt é il la
couronn e, à la réserve toutefOIS Jes domaines et droits donnés à temps ou à
vic, ou à durée des familles dont les temps sont ex pirés ou les fam ill es
éteintes, dans lesquels nous SOUlllles en droit de rentrer ; voulons et nous plall
que des susdi ts domain es, droits, justices et fiefs en dépendant, il n'en soit fait
à présent ni à l'avenir aucune rech erche ni poursuite, sous quel prétex te qu e
ce soit , et même celui de mon édit général de réunion, anqu el. quant à ce,
nOlis a\'ons dérogé ct dérogeons par le prése nt édit ; Cl à cct eO'et, nous avons
pl ein ement maint enu tou s les possesse urs desJits bi ens, droits et domaines en
la possessio n ct jouissa nce d' iceux , pour en disposer à \'ie ct il mort , et co mme
tont paisi bl e possessenr pellt faire de son domaine, ancien et propre hérilage ; défendons très expressément aux communautés de troubl er lesdits propriétaires desdits droits et domain es, sous prétex te Je racbapt , ni vente, ni
autrem~nt, ct si allcuns avaient été dépossédés par arrNs , vou lons qu'ils
soient rétablis nonobst'lntl esdits 'arrêts, que nous avons cassés et annulés, à
la résel'\'e de Gardanne, que nous avons retiré comme domaine nouveau ;
imposons sil ence à notre procureur-général et à tou s nos officiers, fermiers et
adjudica taires des droits de domaines, aux fins qu'ils n' ayent à rechercher
lesdits propriétaires des acquisilions et possessions acquises auparavant r union
de la province à la couronne, par quelque titre qlle ce soi t, comm e étant pl einement et paisiblem ent acquises par droits , titres et possession.
• Si donnons en mandement à nos amés et féa ux , les ge ns tenant notre COllr
du parlement d'Aix , que ces présentes ils ayent à enregistrer, et le cont enu
en icelles garder, observer et faire exécllter sellon leur forme, etc .. ... "
On n' obscurcirail pas la vérit é que nous venons d'établir, si l'on di sa it , en
forme d' ohj ection , que le domaine était , autrefois, COOlme alljourd 'bui, inaliénable, et que par su it e, le cana l du Roi et la bordigue , en la supposant
émanée des souvera in s, ne pOllrrait avoir créé un droit de propri été permanent et durable. Ce serait llne grave erre ur. - Le domaille Il ' esl J eve nu en
France inali énable que depuis l' édit de ~ 566 . Les alié nalions du domaine
faites avant celle époque sont toutes irrévocables et définitive s.
Ce point de droit lie sa urait être sérieusement ni é.
�-
48-
Voici d'ai lleurs ce qui l'établit solidement.
Mont esquieu, Esprit des Lois, liv. 31, chap. 7. au chapitre inlitulé: De~
grands offices et des fiefs sous les maires du palais, dit:
• J' ai des réflexions particulières à raire sur les fi ers. Je ne pui s douter
que, des ce temps-là, la plupart n'eussent été rendus hé réd itaires.
• Dans le trait é d 'Andeli, Gontran e t son nevcu Child ebert, s'ob ligent dc
maint enir les libéralités raites aux leudes ct aux &glises par les rois, leurs prédécesseurs; et il est permis aux reynes, aux filles , aux veuves des rois, de
disposer par testamen t et pour toujours des cboses qu'ellcs ti cnnentdu fisc.
a ~I a rcllire
écrivai t ses rormules du temps des maires. On en voit plusieurs
où les rois ùonnent e t à la personne et aux héritiers: et comme les formul es
sont les images des actions ordinaires de la vie, elles prouvent que sur la fin
de la première race, une partie des fiers passait déjà aux héritiers. IL S'EN
FALLAIT DIEN, QUE L'ON EUT, DANS CE TBMPS-LA , L' IDÉE D' UN OOiU AINE l:"\..\LlENADLE .
C'EST UNE CHOSE TRÈS
"ODER~E
ET QU' ON NE CONNA ISSA IT ALORS NI DANS LA THÉORIE ,
NI DAN S LA PRATIQUE.
On verra bienlill Sil" cela des prwves de fait; et si je montre un temps
où il ne se trouva p/tJS de bénéfices pour l'urmée, ni aucuns fonds pour son entretiell , il faudra bien COli venir que les anciens bénéfices avaient été aliénés. "
« D'a utres auteurs ont aussi posé et rcproduit ce principe. Ce sont les
jurisconsultes: el si leurs paroles n' ont plus l'éclat ni la hau teur rie cell es ùu
grand esprit que nOlis venons de citer, ell es n'en ont ni moins d'exactituùe ,
ni moins cl 'a utorité.
Deniza,t, v· Domaine de la cou"onn e, § '2 , s' exprime sur ce point en ces
termes :
« On se trompera it grossièrement, si l'on regardait l'ina liénabi lité du domaine com me une loi reçue de tous les temps en France et qlli jama is n'éprouva d'alleinte. Les prem iers volum es du Recue il des ordonn. du Louvre,
so nt remplis de chartes particulières de nos roi s, qui accordent à différent es
villes et seigneuries le privilège de ne pouvoi,' êt re a li énées et distraites ùu
domaine. Si le domaine eOt é té, en effet, inaliénable, quel eOt élé l'obj et de
ces chartes et de ces priviléges? Aussi les édileurs de ces ordonnances di«
-
49-
sent-ils rormellemenl dans une note insérée ail tome 1, page 665, sur Ur18
ordonnance de Phi li ppe- le-Lo ng, du 29 juillct 1318 : Que sous les deux
p"omières races de nos rois, et même sous les premiers rois dc la troisième
r<lce, le ùomain e de la co uronne n'était pas inali énable.
" Il est donc démontré que l'inaliénabilité du domaine n'a pas été reçu e
so us les dcux premières rnçes d~ nos rois , ni sous les premiers rois de la
troisiènH' ; et quelque raveur que puissent mériter les lois qui l'ont prescrile ,
on ne peul cependant se dissimuler qu e ces lois ne sont pas aussi anciennes
que la monarchi e.
" M. le chancel icr ù' Aguessea u lu i-même, était loin de prétenùre que ce
domaine eOt toujours été inaliénable. Dans son Mémoire, au sujet de la terrc
d e I3réval, il dit rOI'm ellcment qu' il faut distinguer deux temps : un premier
temps qui a précé dé l'ordonnauce raite à Moulins en 1566 , s.ur le domain e
du roi ; lin deuxième temps qui a sui\'i cell e orJonnance. Dans le premier
temps, on doutait encore si le domaine de la couro nn e ne pouvait pas être
valablement alién é.
« Aussi Chopin , dans son Traité du Domaine, sc proposant de parler de
so n inaliénabili té. Ii\'. 2, l. 1, commcocc- t-il par ci ter l' édit de 1566, comme .
étanl un des pins ancicns qui l'ont reconnu . Il serait difficile, d'après des
Cll/ torités si respectables et si p" éc ieuses, de souteni!' que le domaine de la COl/,'OIl1Ie a tOlljOW'S été inaliéllable. »
Merlin, n"perl. ,,0 Inalién~bi lil é, § 3, dit encore énergiquement : " Il s'est
l'coulé plusieurs siècles, pendant lesquels les chefs des états s'en regardaient
comme propTiétaires et ag-issa-ielll comme tels. Les monuments des deux premières mccs de nos anciens rois 'lOl/S offnmt des preuves sans nombre que le
domaine de leur couronne s' aliénait alors avec la même liberlé que le domai/l e
d'un simple citoyen ; et f on doit conven'ir qu'il y aU1'ait autant de durete que
d'impolitique à dépouiller aujotld' hui, ou ce qui est la mi!me chose, à "egarder
aujourcl' hui camme de purs engagisles, les lJossesseurs d' héritages qu'on prouvetait avoù' été aliénés ou inféodés pal' les descelldmlts de ClOVIS el de
Charlemagne, "
La législation moderne qui nous régit a , ell e aussi, consacré ce principe
�-
50-
et fixé à l'édit de 1566 l'époque où seu le ~ commencé l'inaliénabilité du
domaine de la couronne, Dans son système, les aliénations antérieures à l'édit
sont inallaquables; celles qui lui SOllt postérieures peuvent seules être révoquées:
L' article 23 de la loi du ,\ er décembre 1790, dit : • Tous contr~ts d 'e n ~
oaoement des biens et droits domaniaul postérieurs à l'ordonnance de 1566 ,
" " sujets à racha t perpétuel; ceux d'une date antérieul'e n'y seront assll sont
jellis qu' autant qu' ils en contiendront la clause expresse, »
Et l'article 2~ ajoute: « Les ventes et aliénations des domaines nationaux
POSTÉRIEURES à l'ordonnance de '1 366, serollt réputées simples engagements,
el, comme tell es, perpétuellement sujettes à rachat , » '
Et enfin, la loi du 14 ventÔS"e an VII, SUI' la même matière , dans son article
lor, ra répété en termes tellement précis et posjtifs, qu' il n'y a plus moyen
de le méconnaître, II porte :
Les aliéllations dl! dmnainc de l'État, consommées dans l'ancien te1Titaire de la France, AVANT LA PUBLICATION DE L' EDIT UE FÉI'RIER 1566, sans
clause de retour, ni réserve de rachat, DEMEURENT CONFIRMÉES, »
u
-51PORTS, ET MÊME DE SOUFFR IR LA PRESCRIPTION ORDIN'IRE
IIatioll introduit petr le Droit romain,
qui est tm mmjen d'az.ié-
(Remon lranl,es de la noblesse, p. 230),
Ell e l'est anssi par le préambule de l'édit perpétuel, de la manière sui»
van te:
Nous avons l'eçu l'humble supplication de notre noblesse de Provence,
co ntenant que bien qne le p~ys soit régi par le Droit l'ornain, suivant les
privilèges confirmés pal' tous nos prtldécesseurs roys et nùm, ct que, par toute
cette raison, le domœine des comtes de Provence, auparavant l'Ilnimi du Comté
à la Couronne, aie pu litre aliéllé, échangé, vendu, prescrit ct trall.\porté par
sorte d'aliénalioll et de transport, ainsi que les syndics de la 1I0biesse Ollt JUSTIFIÉ
«
pm' leurs Remolltmuces et pièce.\ produites, et qu'il ell ait été {ait plusieurs
cessions , transports et aliénations par tous les posse~sellrs dudit Comté, jusques
ŒU testament de Charles d'Anjou, del'niel' comte, du 10 déCe1llbre 14-81 , qui
institua le roi Louis Xl , et tous ses successellrs l'oys de Fmllce; néanmoins
quelques communa ut és",."" ont inquiété l e~rs seigneurs sur les aliénations
Ce principe, vrai pour la France, l'était aussi pour la Provence avant sa
ct tl'a nsports qui leur avai ent été faits par les com tes de Provence aupa ravant
l'union à la couronne, , (Hemol1trances de la noblesse, pag, 236),
Elle, l'est, enfin , par le tex te même de ces deux documents législatifs,
puisqne les aliénations du domaine rurent déclarées valables et m~int en u es,
réunion ,
Nous n' en apporterons ici qu' un seul document l~gislatif, Mais , à lui seul ,
il les renferme tous: c'est l'arrêt du Consei l du 15 juin 1668, déjà par nous
l'apporté, et l'édit perpétuel enregistré au parlement de Provence, le 28 juin
suivant, qui en fut la suite,
Ils ne furent rendus que parce que l'aliénation du domaine de la couronne,
en Provence, était de droit cornil/un,
Ce tt e véri té est constatée d' abord par l'arrêt du Consei l , qui énumère
toutes les preuves historiques qu' on peut en donner, Il s'exprime en ces
NLlus ajouterons maint enant , pour dernier docnm ent sur ce poinl, que les
lois du 1 cr décembre 1790 et 1 ~ ven tôse an \' U, sur l' aliénation des Domaines, déjà citées et r~pportées, ont érigé en droit et donné force d~ loi
à ces anciens monuments du Droit provençal.
L'article 37 de la première de ces loi s porte en elfet: "Les dispositio?s
comprises au présent décret ne seron t exécutées à r éga rd des province.
réunies à la Fra n'ce , postérieurement à r ornonnance de 1566, qu'en ce qui
concerne les aliénations raites depuis la date de leur réunion respective ,
termes:
Après lesquelles preut'es authentiques rapportées par les historiens {mnçais ,
con firmées par les actes, ON NE PEUT DOUTER QUE LES COMTES DE PROVENCE NEUS«
et
SE~T DROlT li' ALIENER, INFÊODER, DO~NER , ET FA.1RE TOUS AUTRES ACTES ET TRAN S·
les al'iénations précédentes devallt étre l'églées suivant LES LOIS lors ell usage
dans ces pl'Ovinces, D
Et l'article 2 de la seconde dit également: • En ce qui concerne les pays
réunis postérieurement à la publication de l'édit de fé\'fier 1566, les alié-
�•
-
-
52 -
nations du doma ine fa ites ava nt les époques respec ti ves des réunions, seront
réglées suivant LES LOI S LO RS EN USAGE da ns lcs pays réunis, ou suivan t les
traités de paiw ou de l·éllllion. •
Merli n, est allé même plus loin ; il enseigne qu' il résulte du texte précis
de ces deux lois, qu' il suffi t, pour que les aliénations, faites du domaine de la
couronne dans les prov inces plus tard réunies. soient maint enues, qu' il n'l'
ait pas eu de loi prohibi tive fo rmelle de celte aliénation dans ces provin ces,
et que le si lence sur ce point de la législation da ns ces prov inces aurait élé, fi
lui seul, une cause légi time pour qu 'ell es fussent réput ées léga les, et qu'ell es
le fussent encore aux l'eux de la législation moderne.
« L'ancien gouvel nement , dit-il au répert. vO, Ina li énabilité, page 756, a
toujours considéré com me aliénés irrévocab lement tous les bi ens domaniaux
situés dans les provinces, qui au moment de leur ali énation , n' étaient pas
réun ies à la couron ne, et n'avaient pas encore de lois posiliv es qui déclarassent ces biens inaliénables.
• Nos lois nouvelles n'o nt point dérog{> à cette jurisprudence ; ell es J' on l. au
contraire, ma inten ue de la manière la plus expresse.
Il cite à ce propos les articles 37 de la loi du ·1e, décembre 1790 et 2 de
celle du 10\. ventÔse an "Il , puis il con tinue par ces mots décisifs:
,c Cela signifie bien clairement, que si ces provinces n'avaient pas de lois
prohibitives de l'aliénation du domaine de l'État, ces domaines ont ptt ét1'e alié"és
valableme"t et à perpétuité. »
Puisqu'i l en est ainsi, à fortio ri les aliénati ons du domain e sont-elles ma inlenues, quand elles ont eu lieu da ns les provi nces où la loi et J'usage les
permell aien t ; et la Provence étai t de ce nomb re.
Celle première objection épu isée, on en essa ierait inuti lément une second e.
, i l' on disa it que ce qu i est vrai des ali énai ions du domaine de la couronne
propremen t dit, ne l'est pas des choses qui étaien t du domaine public comme
la mer ou les fleuves: et qu~, pou r ces obje ts. l ~s souve rains n'avaient pas
le droit d·aliéner.
Celle proposition serait tou t aussi téméraire et inexacte que la première.
53-
_ La distin cti on entre le domœine de la cou,'071ne et le domaine public, est de
création moderne et tout e récente. Ell e est due à la toi du l e, décembre 1790.
_ L' ancienn e legislalion ne J' admellait pas. Ell e confondait sous le mot domaine l'u n et l' autre domaine: et le sou verain av ait, de J'Ull et de J' autre, la
p leine propriélé, ainsi qu' on J' a vu plus haut.
La preuv e de notre afU rmation se retrouve partout. - Citons pour la juslifier seulement quelqu es autorités.
Merlin, l'l' pert. de jurispr., V O Domaine pl/blic, p. 732, di t : « Ces TERM ES
qui, DA NS L' ANCI ENNE LÉG ISLATI ON, ÉTA I ENT SYNONr Ml.S DE DOMAHŒS DB LA couR ONNE, et désignent auj ourd' hui , com me on J'a vu, sous ces mots: les biens
do nt J' État a tout à la fois la pro priété et la jouissa nce
Et à la p. 749, sous le même mot clo'maille public, au § 3, intitulé : Des
objets dont le domaine est composé, le même auteur ajoute:
" Entre les di'fTérentes sor tes de bi ens qui composen t le domaine, les uns
son t domania ux par le nature des choses: tels sont la mer, les fleuves, les
ri vières nav igables; les au tres ne sont c\omaniau x que parce qu'ils unt fait
pa rtie du domaine dès le co mm encement dc la monarchie ou qu' ils y ont été
l)
unis dans la suite. •
D' où suit ~ videm ment que dans la législation ancienne, le domaine embrassa it également ce qui était du domaine pub lic. comme la mer et les
rivières.
M. de Serrigny. da ns son Traité de la compé tence adm in istrati ve, tom. 2,
p. l 25, nOH i , dit aussi :
COURON~E comprenaient aull'erois ce que nous appelons a.ujourd· hui Dv~IAINE PUBLI C et DO"AlNE OE . L' tTA~. -:- Voir notamment
l'ordonnance d' août 1669, lit. 27, art. 4- 1, et 1édIt davn1 1683. »
Les au teur s de la Lé"islation
sur les domaines engagés, en précisan t de
o
. qu
. oi
;e composa it autrefoi s le domaine de la couronne, professent le même pn nclpe.
cc L' origine du domaine de la cour0117lC, dise nt-ils. p. 9, se perd dans la
« Les mots
DOMAI NE DE LA
nuit des temps.... . .. .. .. ·
cc Il y ava it des biens domaniaux par leur Ilature, et d' autres qui avaient
été déclarés tels par les lois et ordonnances.
�-
-
54-
" Les premiers étaietll les bietls darlt l'usage était com111un â tOl/S, mais dont
la propriété appartenait à la puissance publigue: tels étai ent les ,'ivages de la
met', les rivières navigables et flottabl es, (l égislation
gagés, par MM, Pi et et Rogron, p, 9 et i 0),
l)
SUI'
les domaines en-
l es auteurs de la Revue critiq ue de jurisprudence ct de Irgislati on ,
disen l aussi, t. 2, p, 763, en terminant un e dissertation sur la matière :
" De l'examen attentif de la législation {1ncien ne ressort cc tt e tripl e vérité;
« Que la distinction ent"e le DOMAI~g DE LA COURONNE et le DOMA INE PUBLIC ne
date, dans not,'e Droit, gue de la loi du 22 novembre- 1er décembre 1790 :
Que depuis la conq uête jusques aux édits de 1566, les cal/X 'Iavigables
n'071t pas c~sé â appm'/enir en PLEINE PROPRIETÉ soi t aux rois soi t aux seigneurs
féodaux, et que dans leurs mains, elles étaient aliénables;
«
Que depuis le se~ond éd it de 1566 jusqu'à la loi du 22 novembre - 1 er
décembre 1790, eUes on t été classées da ns le petit domaine de la COllronne,
et que par suite, eUes ont con tinu é d'appm'tenir en pleille propriété aux rois
et d'étre aliénables, •
«
Enfin M, Daviel, Traité des cours d'eau, en parlant des conrs d'eau qu'il
inlitule du domaine public, et du droit qu 'avaient Sllr eux les so uverains ,
n'bésite pas à dire, t. l, p, 25 :
• Ce nc fut plus pour les souverains un simp le droit de garde et de sun'eillance, ce fut un droit absolu DE PROPRIÉTÉ, de telle sorte que le roi put aliéner
à Jes particuli ers des dl'oits sur les rivières, et leur pel'Olettre, moyennnnt finance, des établissemen ts qui gênaient ou même suppr ima ient l' usage publi c,
« - li vre des fiefs, tit. 56, - Ordonn, de Philippe-le-Bel, 1292, - Sai nta Louis, 1231. - Blackslonne, Lois civiles, li v, 1, chap, 7, nO 2, »
Et par là s'achève notre réponse à l'objection pl'év ue, à r aide des autorités
les plus diverses et les moins contestab les,
Ajoutons seulement qu' elle serai t d'autant moins fondée, qu' aujourd'bui
oncore, les choses même que la loi du 1 er décembre 1790 range dans le
domaine public, peuven t encore être al ié nées par l'État, avec les condi ti ons
tracées par la loi ,
55-
C' est ainsi que les lois du 11 nivôse an Il et 21 prairial an Il, ont
consacré la possession des partips du doma ine public maritime,
C'est .insi que l' article ~7 ùe ln loi du 16 septembre 1807, permet
l'aliénation des relai s de la mer,
C'est ainsi encore que les lois des 29 juillet 1829 et 3 avril 18~6 ,
ont sanctionné J'aliénation d'une partie de mer, du havre de Courcell es, au
profit d' un particulipr.
C'est ainsi enfin , qu'un arrêt de cassation du 3 novembre 1824., l'a aussi
jugé, en permcltant l' exercice d'une aclion possessoire relativement à des
relais de mer (Dallo::; , alphabét. t. I l , p, 2H),
EL si auj ourd' hui l'État peut , avec les formes indiquées par la loi ,
aliéner une partie plus ou moins grande du domaine public maritime, comment ies so uvcrains, sous l' ancienn e législation, ne l'auraient-ils pas pu? En
eux résidait alors la plén itud e de la souveraineté, les form es, exigées par la
loi , n'étaient autre qu e l' acte régulier qui renfermait l' expression de leurs
volontés, Quand ce t acte existait et était prodnit par eux, l' aliénation était
défi niti ve et abso lue, '
Anêts divers qUi
01lt
consacré les p1'incipes jusqu'ici expo$és,
,
1. Le premier à tIlvoquer
est r arr ~t du Conset'1- d'Elat , intervenu, pour le canal
du Roi et la bord'igue y établie, du 19 juill 1856,
li juge ou il préjuge la question même de droit ici débattue,
"
Il suffil de rappeler le dernier de ses motifs: il dit, en effet , po ur Justifi er
l'annulation, qu'il prononce de l'arrêté du ~ mars 1852, déclaratif de la do-
manialité du canal du Roi :
• Que l'arrêté précité, non-seulement ne contient aucune réserve desdroit s
�-
-
56-
• que le marquis de Ga ll iffet prétend avoir ft la propri été du ca nal du Hoi ;
• mais qu'il est 11l0til'é, au cOlltraù'e, sur ce que ledit CalI al Ile poul'rait, par sa
• Ilature , être del'ellu l' objet d'lIll d,'oit de propriété privée; »
« Qlle dès lors ledit arrêté es t ell taché d'excès de pou vain, »
D' où il suit que le Consei l-d' Etat a jugé qu e la Iwture dece cana l n'étai t pas
un obstacle à ce qu'il pùt être l'obj et d' un droit de propri été pril' ée ;
Qu e par suite , sa comm unication al'ec l' étang de DCl'red' un côtéetl' étan<>
"
de Ca rOll te ne s' y op posoit pas ;
Que par suite, soit que ce canal eut été creusé de main d' homme, soit qu' il
fut une dépendance de la mer, dans les deux hypothèses, le droit de propri été était toujours possible,
Ces rénexions on t d'autant plus de portée, que les mêmes questions qui se
discuten t aujourd' hui devant le tribunal , se di scutai ent devant le Conseild' État ; qu e nos moyens élaienll es mêmes , et que la co nsult ati on J e M, de
Vatismeni l y éta it p,'oduite et iuvoqu ée,
Conclu ons donc qu e l' arrêt du Consei l, du 19 juin '1856, est à bon droit invoqu é comme co nsécrat ion , au moins implicite, de nos prin cipes,
La même vérit é se déduit de l'arrêt du Consei l-d 'État , du 17 décembre
18~7 , comme il a été déja dit par M, de Vatimesnil, plus haut p, 6,
Un second ex emple peut êll'e fou rni encore par les hoirs de Galliffet : ce sont
les décisionsjudiciaires, émanées du Tribullai civil d' Aix et de la Cour d' Aix,
"elat",:ement à l'étang de Bolmon , qlli communique avec rétang de Berre ,
pm' !/Il canal établi à trat'ers Le Ja l', el qui reroit de l'étang de Berre ses
eallx salées et. le poissan qu' il lui tra nsmet.
lf,
Ma lgré les pré ten lions de deux co mmunes riverain es, celle de Chal ea un euf
et celle de Marigna ne, une foul e de jugements et d'arrNs éman és du Tribunal
civi l et de la Cour, onl déclaré cet élang propriété privée et exclu sive des
hoirs de Caumont et de l'b oi rie de Marignane ,
Pour ne pas multiplier trop nos citat ions, nous indiquerons, enlre autres
décisions, le jugement du tribunal civ il du 12 mars 1833 et l'arrêl de la Cour du
57 -
14 mai 1811 t , qui l'ont ainsi jugé, Le premier mainlielltall possessoire les hoirs
de Caumont dans la possession ex clusive de cet étang, Il vise leurs titres de
propri été, qui ne sontaulres qu e la concession de la reine Yo land e ~ Barthelemy de Valori de l' étang de Bulmonl. Il s'ex prime de la manièresuivanle :
« Altendu qu e les litres prorluils pOUl' les sieurs J e Caumonl paraissen t établir que l' élang de Bolmont estl ellr propriété;
« Que ces litres sont : 1 0 L'acte de 1427 par' lequel la reine rolClnde donne iL
Bal'thelemy de Valo ri le château de Marignane, y compris l'étang, qui est ce« lui de Dolmont, »
, L'a rrêt de la Co ur du 1 ~ mai 182', dit encore, au sujet de ce même étang
ct pour la parti e qui en ap parli ent à l'h uirie de Marignane :
» Attenùu au fond '-iuII résulte des titres versés au procès, de la possession
« constante, et des faits de la ca use, que le ci-devant seigneur de Marignane
« posséda it en pleine propriété l' étang de ce nom"",
«
llI. Aulre exemple encore all profit de/a ville d' Ades conl1'e l' Btat : il s'agissait de la propriété dll Pont d'A rles établi sur le Rhône,
L'Etat le revendiquait comme un e propri été dépendanle du domaine public, Le neuve rentran t dans ceLle cal égorie, le pont, disail-il, n'avait pas
une autre nature,
La vi ll e d' Arles, au co ntraire, en force des slipulations qui avaient présidé
à la réunion de la Provence à la France, et de r obligation que s'étaient imposée les rois de France d'exécu ter les ali énatIons des com les de Pro vence ,
leurs prédécesseurs , et de respecter les droit s acquis aux provença ux en défendaie nt pour elle la propriété p-xclu sive,
Elle sorlit victori e,use de la lutte devant la Co ur royale d'Aix et devant la
Cour de Cassat ion, qui, l'une et l'autre , reconnurent la puissa nce de ce
principe,
Voici l' arrêt de la Cour de Cassation qui résume, d'une manière concise,
ces haules considérations de d,'uit public, lesquelles font de cette décision Ull
monument remarquable de jurisprudence,
�-
58-
Sirey. tom. 39. 1C parI .• p. '\'7. le rapporte dans les
terme~
suivants,
Sur le premier moyen. relatifà la violation Jes traités et des lois du 1 er
« décembre 1790 ....• d'où le demandeur conclut que la vill e d'Arles n'a ni
« relenu ni conservé la propriété du ponl. »
« Auend u que devenue trop faible pour se préserver des invasions qui la
menac;.aient el conserver son indépendance. la ville d'Arles traita. en 121\1 ,
de sa réunion à la Provence. sous la réserve des liberté, el priviléges énoncés dans plusieurs articles du traité, notamment de son trésor. de son hàtelde- ville. du droit de nommer elle-même ses conseils et de son pont SPI' 10
Rhône: l'article 9 interdit au comte de Prm'ence l' étab lissem ent d'un péage,
el l'article 19 porte que si les revenus du pont ne sufUse nt pas à l'entreti en,
les citoyens y pourvoiront sans que le com te y fasse aucun frais. - Des difficultés s'étanl élevées enlre la ville d'Arles et le souverain qu 'elle s'était
donné. il y fut pourvu en 1385. et pal' une transaction so lennelle les franchi ses.
priviléges. libertés et propriétésdela ville sont reconnus et maintenus. notamment
la pleine possession des bois. pêcheries. véneries. chasse. pâturages et autres
droits el profits. et autres choses quelles qu'elles soient, avec int erdiction réitérée au comte de Provence d'étahlir aucun péage nouveau - Ce furent des
traités de puissance à puissance. que la puissance la plus forte exécuta religieusement. puisque Charles d'Anjou imposa par son testament. au roi de
France. la condition de respecter tous les droits acquis aux provençaux; que
Louis XI jura de maintenir et observer les conditions de la réunion de la
Provence à la France, qu'il en fut de même à chaque avènement: et qu'en
1665 un arrêt du conseil. enregistré au parlement de Provence et suivi de
Jellres-patentes •. consacra littéralement le droit de la ville d'A rl es au ponl
el au péage. dont la quotité fut réglée pendant le term e convenu avec l' entrepreneur chargé de reconstruire le ponl.
» Attendu que de 1667 à 1792 la yill e d'Arles a joui du pont en tout e
liberté, le fesanl reconstruire, au moyen de péage. tout es les fois qu'il fut
emporté par les eaux; en 1792 ce pont fut encore empor té. un bac fut établi
en dessous el le pont fut reconstruit en l'an XII. moyennant un péage pendant
Yingt-neuf ans. en ve rtu des ordres et de l'autorisa tion du gouverneme nt ;
«
-
59-
qu ainSI, loin de vio ler ~es traités, la Cour royale d'Aix ( par l'arrêt attaqué
ùu 6 mai 1836 ) en a fait une juste apfJli ca tion; d'où il résulte qu e le pont
d'A rles n'ayant jamais fai t partie du domaine publ ic. les lois nouv elles
sur les domain es de l'Etat onl été invoquées sans droit co ntre la ville
ù'A ries. II
1 V. Quatdème e.'Vemple que ' IOUS {ol/mit U/l an'ilt très-récent et /l'ès-rema,'quable de la Cour de Cassation dll 21 mai '1855.
II juge que des moulins concédés par le souverain avanl ., 566, dans le IiI
de la Seine. ont constitué une propriété privée; que le souverain qui pouvait
aliéner alors le domaine de la COll1'onne , avait pu créer, dans le IiI dll celte
1 ivière navigable. ce droit de propriété au profit des tiers. simples particuliers; et qu e cett e propriété était aujourd'hui inat taquab le. du moius qu'elle
ne pouvait être supprimée sans une juste el préa lable indemnité.
La Cour de Rou en, par so n arrêt du 20 juillet" 852. avait cru pouvoir
faire contre les usini ers . dans l'ancienne législation, la dislinction en tre le
domaine de l'état ou de la couronne et le domaine public. et établir que SUI' les
rivières navigables. appartenan t ainsi, d'après elle. au domaillepubl-ic, aucun
droit de propriété privée n'é ta it possib le.
Ell e l'avait dit en termes très -formels :
« Attendu que les rivières navigab les n'o nt jamais fail partie du domaine
« de l' état. mais ont toujuurs été une partie iutégranle du domaine public.
« Qu' à ce til1'e elles sont exclusives C
l'!l1l d'roit de propriété privé et absoill. »
La Cour de cassation a vu là une erreur manifeste. Elle a, le 2 1 mai 1855,
CQssé l' arrêt de Rouen par les mo tifs suivan ts:
« Vu l'ordonnance de 1566 sur les grands domaines, celle de 1669 sur
« les Eaux-et-Forêts. article .\.1. titre 27, et la loi du 16 septembre 1807 ;.
• Atteudu qu'avant l' édil de fél'rier 1566 sur les grands domaines, les
c biens et droits dépendants du domaine de la couronlle, n'étaient pas frappés
• d'ina liénabilité. et que l' article 17 de cel éd it porte form ellement qu'il
« ne dispose que pour l'avellir.
�-
60-
Attendu que l'article 41, titre 27 de J'ordonnance de 1669, en décla« rant que ln Pl'opriélé des fleuves el rivières Ilal'igables faisoit partie du do« maille de la couronne, maintient exp licitement les droits de pêche, moulins
« et autres usages que les particuliers peuvent y avoir par titres et posses" sions valables, ,
« Attendu que les lois postérieures n' ont rien changé, ni pu changer aux
c rlroits conférés irrévocab lement, en conformit é ,des lois en vigueur à l' é« poque oùles concessions ont été faites, et que d'ailleurs ces concessions ont
« été confirmées par l'édit du mois d'avril 1683 et celui de 1693" .. , Casse, "
( Sirey 1855-1-56'1),
Inutile d' insister sur J'immense portée de cet arrêt. Il consacre et justifie
tous nos principes, Il répood aux objections prévues, Il éclaire la ca use d'un
jour éblouissant.
«
V. Cinquième exemple, emprunté à la jurisprudence du tl'ibunal civil d' Aix ,
et de la Cou,, d'Aix, pour les iscles de la ri vièTe de Durance, flottable PClI'
sa Ilature, C'est l'alTét du 2 mai 18H-, entl'e le marquis d'Albertas et M, Dllbertaud de Fonfroide, II s'agissait de la concession des iscles de la Durance
(aite par le Roi Réné , comte de P,'ovence, le 26 {évrier 1 H2, h Al'taluche
d'Allogonia, Elles furent maintenues au mal'quis d'Alber/as par la force de
son titre, pnr les motifs suivants:
Considérant que d'après le droit comm lJn de la Provence, les iscles des
• ri\'ières navigables et flollables appartenaient au souverain, à l'exclusion
" des propriétaires riverains; »
u Que la concession de 141.2 , {aite par le Roi Réné a donc LÉGITIIIlE:\IENT
c TRAN SFERE LA PROPRIÉTÉ des iscles litigieuses d Al'taluche d' Allogonia et pa l'
" con séquent à la marquise d'Albertas qui le représen te aujourd'hui , » ( Recueil des arrêts de la Courd ' Aix, année 18 45, p, 7 et sui\', ),
u
Vl. Sixième et demier précédent juridique, qui nOlis {oumit IlIl exemple l'emarquable du l'espect gal'dé par les T,'ibunauœ, envers les stip,ûat'ions et les
-
61-
franchises convenues par les Rois de France, traitant pO!tl' la réunion des
provinces adjointes à la Francp, Ce précéclenl recevra h la cause toule SOli
application, lorsque toul h 1heure 'lOUS verrons, ell examinanl les titres de
l' hoirie de Galliffet, l'acljonction de la Pro vence se {aire à la France sous la
condition de respecter les aliénations consenties pOl' les comtes de Provence,
C'est la Cour de cassa tiun qui nou s fournit encore ce précéùent.
Elle ajusé le 27 janviCl'180i ( Bulletin civ il des arrêts, an 1807 page Il )
que les lois sur les domaines é taient inappli cables à ulle terr e ùont la patrimonialité a été reconnue pal' la puissance souveraine et est devenue la con- '
dition sous latlu elle la Lorraine et le Barrois ont été cédés à la France, En
voici les molifs :
" Oui le rappor t de M, Cochard ,
" Vu la déclaration du 28 aoÛ t 1736 faisant partie du traité de paix dudit
ains i conçue:
Le roi traitera selon toute justice et équité, et même le plus favorabl ement
qu'i l se pourra, ce ux à qui depuis la signature des préliminaires, Ha été l'eodu
des domaines; et dès ft présent sa Majesté consent à lai sser subSister tout ce
qui a été ainsi fait en faveur de M, de Craon et de ~Jerley, sa os, pou~ r~,son
ce , rien défa lquer su r la somme qui doit être payée annuellement a ~1. le
JOIlI',
«
duc de Lorraine,
« Considérant que celle déclaration a été r~tifiée par Louis XV; qu'elle
forme par conséquent uu des ar ticles du traité d ~ paix du même Jour 28
août 1736, et devient dès- lors loi des parties qu elle Illtéresse; conSidérant
que par leltres-pat entes du 23 avri l 1736 , la terre de ~Ierley ava~t été
rendue à la faUlille Bea uveau, avec déclaration qu 'e ll e n ava it Jamais été
domaniale, :
, ,
'Î
" Que le roi de France en déclarant, par l'organe de son ministre, qu ,1
laisserait subsister tout ce qu i avait été fait pour M, de Beauveau , a pliS
\' enoaoe ment de reco nnaître que celle terre n'avait jamais été ùomalliai e ,
et q:e~ par conséquent, c' est à titre de patrimonialit6 que ledit sieur Beauveau la possédait.
�-
63-
62 Considérant que les lois sur les domaines engagés sont inapplicables à une
terre dont la patrimonia lité a été reconnue par la puissance sou veraine , et
est de\'enu e la condition sous laquelle la Lorraine et le Barrois ont été céd és
à la France,
« D'où il suit qu' il y a dans l'arrêt attaqué, fausse application des loi s 'sur
les domaines en gagés et violation des traités de paix de 1736 ,
« Par ces motifs: la Cour casse et annu lle ledit arrêt de la Cour d'app el
de :'{ancy, du 19 nivôse an XII , etc, ; du 27 janvier 1807 (Bu lletin des arrêts de la Cour de cassation rendus en matière civile 1 an 1807, p, Il) •
Cette partie du droit épuisée, arrivons à la deuxième partie , celle des
titres,
On en comprendra beaucoup mieux la portée, maintenant que l'on est fixé
sur le droit et sur la législation qui go uvernaient la Provence aux époques
éloignées donL nous allons parler, et auxquelles se réfèrent les titres invoqués
pa r l'hoirie de Galliffet.
g
~
Influence de l'arrêt du Conseil d'État du 24 juillet 1856
sur les Titres produits.
L'arrêtdu Consei l-d ' Etat du 28 juillet 1856 a jugé une partie ùes question.
du procès: celle de la nctlll,'e des titres in voqués pur les hoirs de Galliffet.
Il y a, sur ce point, chose jugée; et ce ll e déeision , qui tranche et résout
certaines questions jusques alors en diSCUSSIOn avec l'Etat, ne perm et plus
que celle discussion se renouvelle el se reproduise devant le trib~nal ,
,
Il faut donc préciser ces choses, eL préven ir ainsi tOIJLe confusIOn , en Circonscrivant le lili"'e ac tu el dans ses limites naturelles,
En faiL , M, le ~réreL des Bouches-du-RhÔne, par son ar~êté de con[1iL du
1 ~ juilieL 1 8~7, revendiqua, pour l' au torité admin istrative, la connaissance
du liti "'e engagé dès 184.6 SUl' le canal dn Roi et SUl' la bordigue de ce nom ,
Il fit, l'occasion des titres sui va nts, produits par l'hoirie de Ga lliffet ,
sa voir: 1 ° les cha rtes, éman ées des anciens empereurs souveralDS de la Pro!.!.
1212 en faveur des archevêqu es d' Arles; 2° des
vence,i d e 920 . Il 'l'li'
contra ts et actes intervenus entre les comtes de Provence et les archevêqu es
d' Arles en 1223, 1292 el 14 57;
3 0 Du testament de Char les du Maine, dernier comte de Provence, de
1 li 8'\ , en faveur de Luxembourg, au teur des hoirs de ~Ga lliffet ;
,
liO Enfin , des urrêts du Consei l-d'Etat du 25 août 1/81 el2\ decembre
1:
à
1
DEUXIÉAlE
PARTIE ,
Les Titres,
1er ,
,
1790, rendus eo faveur du marqu is de Galliffet.
,
, .
'
Il sou tenait que ces actes n' éta ient que des actes de 13u tOl'l te souv erain e,
'
agissa nt dans l' exercice de son pouvoir admi ni stratif"
A
t
1
17
décembre
18
~
7
le
Conseil-d
Elat
confirma
1
arrêté
Par son arrt: ( U 1
, ail préalable,
d e con [1 1't , e t décida qu' il y aVilit liw, dans cette circonslance
, d "
t'
1
de déterminer le C'\\,ICTÈRE desdits actes , et qu'à l'autol'lté a mlolstra Ive seu e,
1
Il Y aura à voir, dans ceLLe deuxième parti e, les points suivants :
1° L' influence de l'arrêt du Conseil-d'État du 2/i juillet 1856, sur les
titres produits par l'hoirie de Gall iffet:
2° Le texte elle dispositif de ces titres, par rapport au droit de propriété
q u' ils lui confèrenl sur le canal dit du Roi et sur la bordigue de ce nom ;
il appartenait de statuer,
, ,
Sur ce, le Consei l-d' Etat a prononcé le 2~ JUillet 1856,
�-
64-
JI a dit: l ' que SU I' les neuf titres revendiqu és par le Préfet, et retenus
par le Conseil pour les ca ractériser, un se ul, celui du 15 aoû t 178 1 , était
un acte de l'autorité souveraine, agissa nt dans l' exerci ce de so n pouv oi l'
adm inist l'ali f.
20 Que les huit au tres n'avaient pas ce caractère, et qu'à tort on le leur
al'ait attribué;
30 Que le titre du 25 août 178 1, dont il fixa it le ca ra ctère, avai t jugé
au profit de l'auteur des boirs de Galliffet qu'il était PBOI>R1ÉTAIRE de Ù :TADLISSElIE~T DE PÈCRE en question;
.. 0
Enfin, que pour les autres titres, qui ne rentrai ent pas dans la
catégorie du premier, il n'avait pas à les interpréter, et à en fix er le caractère. Il a renvoyé leur applica tion aux tribunaux civi ls.
Tels son t les faits.
Voici maintenant les conséq uen ces en dro it , qui dérivent de ce ll e déc ision ,
au poin t de vue de ces mêmes titres, que de nouveau l' hoiri e de G,alliffet reprodui t devant le tribunal civ il , co mme il le faisa it dès 18 .. 6, et avant
l'a rrêté de conllit.
Et d'abord , pour ce qu i concerne l'arrêt dn 2ti août 178 1, l'arrêt du
Conseil-d'Etat du 21,. jui ll et 1856, contient un e décision so uve rain e, que les
tribnnaux civi ls ,Ioiv ent accepter et à laq uelle ils ne peuvent ri en enlever.
L'a rrêt de '1856 juge deux choses, à l'occasion de ce titre de 1ï81 ; la
première, qu e le marqu is de Galliffet a été, à cette époqu e, par le Consei ld'État, déclaré et reco nnu PROPRIÉTA IRE de la bordigue ùu Roi ; c'est-à-d ire
inves ti d' un droit de propriété patrimoniale et privée;
La seconde, qu'i l a été, non-seulement reco nnu propri étaire de la Bourdigu e du Roi, mais encore DE L'JiTADLISSEI\IE~T ilE P>;Cfl E APPELÉ DOURDIG UE DU
ROI; c'est-à-dire de tout ce qui co nstitu e cet établi ssement proprement di t, à
savoir: le ca nal et le sol sur lequel la Bordigue est établie, aussi bien qu ela bordigue elle-même.
-
65-
C'es t ce double fail qui es t aujourd' hui définitiv ement acquis fi l'hoi ri e
de Ga ll ilTet, en for ce de la chose jugée.
Le Tribunal n'a plus qu 'à app liquer ce poinl.
Nous n'insistons pas dava ntage, en ce mom ent, Slll' les conséqu ences qu' il
faut tirer de ce t aITN; ce la viendra plus tarcl, lorsque nous serons entrés
dans le déve loppemen t et l' ex position des titres.
En ce qui concern e les autres titres, sur lesquels l' arrêt du Consei l de \ StiG
cst int erven u , il Y a encore chose jugée sur un point impor tant , à Sdvoir :
que ces ti/Tes ne sonl pas des actes de t'autorité sou"etaine ((gissa71 1dans l' exercice de son pouvoir adm·inistra t;{.
Et cell e formul e laconiqu e, mais générale, renferm e virtuell ement plusieurs
décisions notables.
Elle juge en eO'et :
10 Qu' on ne pourra plus ùire, ni so ut en ir : qu e par Icur nature et leur caractère , ces actes nc renfer ment que des clroit s l'évocables:
20 QU' OII ne pourra plus avancer qu'ils ne co nfère nt par eux-mêmes aucun droit tl e propriété.
30 Enfin, qu'ils co nstit uent ci e vrais lilres de propriété privée et patrim o-.
ni ale.
Tou l cela so rt ell réa lité Je la décision " 'ppelée, 1\ suffit, pour s'en convaincre , d'e n rapprocher les conclusions qu' y prenai ent l' état, d'abord,
dans la pel'sonne du mini stre des finan ces, et ensuite les intervenants.
Le premi el' co ncluait à ce qlJ' il pllJt au Co nseil reconnaître que les titres
ci -d essus étaient : des actes émanés de l'autorité souveraine dans l'exercice de
son pouvo;,' adminislmt; f, el statuant par interprétation des(lil s actes, DECLARER
(1
(1
« QU' IL S N'ONT TltANSl\HS AUX AUTEURS DU MARQUI S DE CALLlFfln AUCUN DROIT DE PII O·
(1
(1
PRIÉTÉ SUR LE CANAL ftlA RITI~E doit du Roi . . , ( ou tout au moi ns) une simple
facult é de pêche précai/'e et l'ëvocable.
Les seco nd s prenaient aussi les mêmes fin s.
Or, le Conseil-d 'Etal, en rejetant le principe d'où on faisa it découlel' tout
cela , a tout rejeté. En proscrivant la cause, il a proscrit l' effet. La base de
l'édifice en levée, tout s'est écroulé,
�-
66-
Sans doute le Consei l-d'Etat, quand même il aurait déc laré 'ces actes des
actes de l'autorité souveraine, agissaot ,dans ' l'exercice de 'son pouvoir
adm inistratif, aurait pu encorE< y découvrir et y déclarer un droit de propriété privée, co nféré aux auteurs de l'hoirie de Galliffet. Des actes
administratifs peuvent servir, so it de fond emen t, soit de sa nction à un droit
de propriété. Les coucessions de canaux , de chemins de fer, de mines. de
lais et relais de la mer, ne sont-ils pas des actes administratifs desqu els dérivent des droits de propriété privée?
Nous en avons même dans la cause un exemple décisif. L'arrêt du Conseil
du 2 .. juillet 1856 ne juge-t-il pas, en même temps, que l'arrêt du Conseil du
25 aoOt 1781, iuvoqué par les hoirs de Galliffet, est un acte émané de l'autorité souveraine dans l' exercice de son pouvoir administratif, et qu'i l a
conservé un droit de propriété sur l'établissemevt de plJche de la bordigue
du Roi?
Mais qu' on le remarque bien; ici, en ce tte matière, la réciproque n'est pas
possible. La nature administrative des ac tes étan t repoussée, ce rejet entralne tout ce qui était con tenu dans la nature de ces actes, Le droit révocab le
ne pouvant venir que de la nature de r acle adm inist" atif, en rejetant cell e
na ture, il n' y a plus de place il l'acte révocable,
En d'autres termes, et pour être plus clai r et mieux com pris, on ne
pourra plus argumen ter de la nature des ac tes pour en conclure leur révocabi lité.
Il faudra, pour qu' on puisse plaider encore devant les tribunaux qu e les
actes n'ont transféré qu' un droit autre que celui de propriété, ou bien
qu' un droit l'évocable, qu e les actes le di se nt d' uu e mani ère form ell e et précise. En dernier rés ultat, l'argum ent gé nér'! l, absolu, universel, qui se
déduisait de la nature des actes, a péri pour toujours, Si on veut y reven ir,
il faudra qu'on le tl'Oll ve écrit ùans les ades; s'i l n'y es t pas, on ne pOlll'ra
ni l'ajouter , ni l' y supp léer.
Voilà le pas immense que l'arrêt dn Consei l dtl 21. juillet 1856 a fait faire
il la cause.
67 -
Voi là ce qu'i l a jugé!
Quant aux actes qu e l' arrêté de co nllit ùu 14 juillet 1847 n '~va it pas
embra ssés, et qui ne so ot pas tombés sous le co up de la revendication et de
la procédure administra tiv e, ils sont restés avec leur caractère non contesié
ùe titres de propriété pri vée.
Ce la dit, abordons le tex te et le dispositif des titres qui justifient le d,'oit
de propri été patrimoniale de l' hoirie de Galliffet,
§ Il,
Les titres de propriété de l'hoirie de Galliffet
sur le canal du Roi et la Bordigue.
Ces titres se divi sent en trois ca tégo ries différentes, Ce soot :
1 0 Des contrats et ùes testamen ts;
20 Des décisions judiciai res, ayant l'a utorité de la chose jugée;
30 D~ décisions spéciales émanées des juges domaniaux, qui excluent et
repoussent la domanialité, ou qui soumettent à l' impÔt la propriété des hoirs
de Ga lliffet.
pJl.EmimE SUB DIVI S ION.
Les Contrats et les Testam ents,
Les actes nous font connalLre trois transmissions successives, que le canal
et la bordigue du Roi ont subies, daus le cours des siècles qui nous ont
précédés.
�-
GS-
-
Ils on t été transmis d'abord par les empereurs , so u verains de la Provence ,
aux archevêq ues d'Arles;
Des archevêques d'Arles. ils ont été transférés par eux aux comtes de
Provence;
Enfin, des com tes de Provence ils ont été Lransmis aux auteurs des hoirs
de Galliffet.
aucune contradiction (in suos propr.os IISUS quidqllid facere voluerit faciat ,
tlOmiile conlrad'icente),
La chart e y ajou te tOli tes les choses déjà données au prédécesseur de
l' archevêque. Ell e veuL qu' il garde sur ces choses un droit perpétuel ( in.!lper el omnes "es guas antecessor suus ab antecessore meo obtilluil PERPETUO
obtineat JURE ),
Enfin , la chart e se lel'mine par l'indication sommaü'e des terres possédées
EN PLEIN DOMAINE par Manassès ( Breve de terris quas Manassès, archiepiscopus
l' DOMINJO suc TENUlT).
EL c'es l ùans ce ll e partie de r acle qu e se trouv ent énoncées toutes les
bordigues de Martigues, comm e par lui possédées en plei n domaine.
0" y vo it fi gurer d'a bord ;
If Portum de Adauo el de Rhodaneto,
Pllis, pascharium de Campo et de Altavense; pllis encore pascharium cie
J. Première transmlSSIOIl des empereurs , souvera'ins de la Provellce, auw
Archev~q!les cl' Arles.
Les hoirs de Ga lliffeL ont in voq ué et co ntinu en t à iuvoqu er, pour prouver cette première transmission, trois char tes émanées des empereurs, souverains de la Provence, en faveur des archevêques d'Arles; ce sont ce lles
de 920 , 989 eL 11 U ,.
La première donatiou faite par les so uverain s, rois d' Arles, aux archevêques d'Arles, remontf; à BOlon, Elle fut consenti e par lui eo fave ur de Rostan,
archevêque d'Arles.
1l1anassès, son successeur au siége d'Arles, en ob ti nt une seco nd e en 920 ,
de l'empereur Louis, Jit l'AtJeugle,
L'archevêque demaodai t à l'empereur Louis un diplôme royal ou une chal'te
'royale ( PRAlCEPTlfllf ), qui recounut et qui comprit tou l ce que son prédécesseur
Hos~n avait acquis (A DQUISIVIT ) des empereurs précédents et de lui-mêm e
à prœdecessoribus nos tris , sivè et à 1I0bis
Il le demandai t po ur pouvoir lui·m ême posséder avec plus de fermeté et
de sécurité toules ces choses ( itidem ei fa cere jubem!ls prcecepfum, pel' guod
ipsas res (il'mius el securius ODTlNERR, REGERE ET POSSIUERE VALERET).
L'empereu r accède à la demande ( (ieri decrevimlls ) eLla charte de 9'20
est délinée à l'archevêque d'Ar/es.
Elle est doonée, y est-il ùit., afin que l'archevêque ti enne eL possède avec
droi/de propriété ( l~neat el possideat AD JU~ ET PROPRIET.\TE~I ) eL pour touj ou rs
( omm lempore ) les choses Jemandées ( sui t le détail),
Afin encore qu' il fasse de ces choses tout ce qu' il jugera conve nab le, sans
69-
/Stl'O et de At-gentia ;
Puis enfin, tout es les pêcheri es, tant existantes sur le Rhône, les marais
et étangs, qu e sur les bords de la mer : ET OMNES PISCATORIAS TAMDE RnODANO
ET PALVDlUUS, ET STAGN IS, QUAll IN ftfARITIMIS.
t
No us supp rimons le détail qui suit eL qui inrlique lesllrplus des lerres possédées par l' atchevêque, et qui s'élendent bien au·delà de Martigues encore,
en y com prenan t Caslrml! Aluemicwn et de Sa/one (Sa lon) siue de Fossis
( Fos) et Vil/am Molegensem ( Mollégès),
Il surfiL , pour l'objet ùu procès, de s'a rrêLer à ce qui conceme les pêcheries,
La charte y désigne, avec une certiLud e irrMragab l\), le plein domaine
de r af'chevêq ue d' Arl es Manassès, sur les bordigues de Martigu es.
D'abord l' ac te dit: PISCATORlAS; et le glossaire de Dura nge définit ce mot :
10Ctls in quo pisces capillntur. Il s'agi t donc de bOI'digues. 1/ ajoul e: OlINES.
Ioules cell es, sa ns exce ption, qui existent :
Sur le Rh6ne ,ceci nous est élranger :
Sur les étangs , STAGNIS, ceci oous concel'O e; nous som mes en tre l' étang
de Carante eL l' étang de Berre ;
�-
70-
Sur les bords de la mer, irl maritùnis; ceci nous concerne cnCO l'e, la bordigue et le cana l du Roi so nt tellement 111 marilimis, que l' arrêté du ft
mars '1852 les avaient in corporés à la mer, et déclarés dépendants de la mer.
Impossible donc n'équivoqu er,
Il est tout aussi difficile de se tromper sur le caractère de celle propriété
de l'arcbevêqu e cl ' Arles.
e est le droit de propriété ordinaire. Le droit de p,'opriété patrimonial.
Les tennes de la cbarte l'indiquent en mill e endroits div ers,
Il s disent lenuil IN DOMINIO SOO; ils disent ADQUlSIVIT ; ils disent teneat et possideat AD JUS E T PROPRIETATEM; ils ajoutent: perpetua; omlli lempore; lIemine
COli tnul ieente.
Ce son t là les véri tab les caractères du droit de propriété priv é et patrimoniaL
Et l' on comprend mai ntenant très-bi en pourquoi l'arrêt clu Conseil-d'Et"t
du 2~ juillet 1856 , a vu là un titre cie propri été; pourquoi il a refu sé d'y
reconnaître un acte adm inistratif; pourquoi , eolln , il a renvoyé devant les
tribunaux civi ls pour so n app licatioo.
Tel est le premier titre iDl'oqué par l'hoirie de Galliffet,
Voici le second ;
Celui-ci va nous montrer les archevêques d'Ar/es disposant, ell vertu de
leur d roit de propriété, des pêcberi es ou hordigu es de Martigues.
C'est une charte délivrée en 989 par l'archevêque Annou, et qui transporte, SU I' la demande du prêtre Paco, à r église de Saint-Gervais, situ ée à
Fos, lé dixième de tous les poissons des pécheries du Martigues.
A l'époq ue dont oous parlons, l' histoire nous apprend qu e le Martigu es
était désigné sous le nom de Ponte Saneli Genezii, ou simp lement de Ponle,
( V. la charte de 1223),
L'acte de 989 dit expressément qu e l' arch evêque: COllcessit eliam el decimum de lolos pisces qui in PISCATORIAS de Ponle {uerint apprehensi.
-
71 -
Pour di spose r ainsi clu dixième cl es produits des bordigues du Martigues,
fallait en être propri étaire.
L'acte de 989 fut la co nséquence des ac tes précéd ent ~, et notamment de
ce lu i de 920.
.1
Ainsi, par la chart e de 989 se comp lète ou s'éclaire la charte de 920,
Le troisième titre est un e chart e de 114·;', émanée de l' empereur Conrad,
deuxième de nom , au profit de Raimond archevêque d'Arles,
MO par un motifd e Irbéralité ordinaire à ses prédécesseurs, et résultant
d' un e ancienn e co utum e (anliqua consuetudo, et illstitula impera lol'um), l'empereur veut subv enir à toutes les utilités de l'église d' !\rIes (sludeamus subvenù'e ulilil alibus),
A cet eITet, il transme t et concède à l'archevêque, et par lu i à ses successeurs ( et per le ecclesiœ tuœ el successol'ibus I1tis" .,., . . Les étangs, les salines, les lacs , les 1Jaluds (sla.gna, salinarum, lacus, paludes ) de toute r étendue
du diocèse ( lolius titi m'chiepiscopalus ).
En outre il confirme l'arcbevêq ue dan s le plein domaine de diverses terres
et propriétés détaillées avec so in ( irlsuper confil'mauimus t'ibi DOMINIUM) et en
particu lier de LA PÊCUERIE DE MARTIGUES (PISCA RIAM DE PONTE). Tout ce qui
peut avoir élé acqu is et avoir été possédé par l' arcbevêque, il le co ncède
à lui et à ses sll ccesse urs ( tibi et sl.ccessol'ibus cO/lcedimus),
Enfin, pour que ce lte donation ou celle confirmation (DONATIO Se!tCONPIRMAT/O)
demeure élel'1lellement ferm e et stable pour les successeurs de l'archevêque
( posleris tuis elernalüer pennalleat firma et stabil-is ), la charte es t muni e
du scel d' 01'.
Ce lte charte, comme cell e de 920, ne laisse aucun dout e sur le droit de
propriété qlJi y es t mentionné.
Il ne s' y rencontrc rien de li mité, ni de révocab l ~.
.
.
C' es t le domillù.m qui est transféré et reconou . C est pour 10uJours, ele/ rwliler. C' est pour r archevêque et pour ses représ/iIl lanls futu rs ( POSTERIIS
TU IS ),
�-72 -
-
C'est IIne donation, ou une CO llfirmation de donation, Pal' conséq uent c' ~st
un acte qui lransporte la propriété d' ull e maui ère irrévocable,
Enfin, il s' y agil des étangs, des mal'ais , de la pêcherie de Marti gues P'SCAnUl! de Ponte, c'est-à-dire de la bordigue du Roi, el par ce tt.e ex p"ession
rapprochée de la précédente qui la suit : quidquid pel' seculm'es vel ecclesiastieas habet l'el possidet, el qui se réfère à la jouissa nce concédée à Pa co en
989, l'acte embrasse toul ce qui élait co ntenu dans r acle de 920,
L' historien de Provence, Honoré Bouche, l. 2, de son histoire de Provence,
p, 207, l'apporte le texte d' une autre charte de 12 12, donnée pal' l' empereur Fréderic II, en faveur de Micbel , archevêq ue d'A rles, co nçue dans le
même sens et dans le mêm e esprit.
L'"mpereur, mO par les même. motifs de libéra lité qui avaient déter miné
la charte de 1.\.H , confirme de nouveau l'archevêq ue et ses successeu rs
dans le domaine ( dominium) de toutes les p,'opriétés qui y son4é num érées,
el nommément de la pêcherie du Martigu es, ( PISCARlM' DE PONTE) el de
tout ce que l'église d' Ades a, possède el doit avoi r justemen l pRr ell e-m ême,
par ses églises ou par ses personnes sécu li ères ( quidquid ecc/esia arelatensis
73-
Comme primordiattal, il. sont la so urce et l'origine de, dro it s des af'chevêqu es, leu rs Dute urs, et ils en fo urnissen t la preuve léga le,
Co mme recognitifs, ils en fo umis,ent encoro la preuve léga le, puisque d'après l'article 1337 du Code Napoléon, quand il y a plusieurs reconnaissances
conformes, soulenues de la possession el donl rune a h'cnle ans de date, la
production du tit re pr imordia l est inu til e, Cl qu e toutes ces circonstances indiqu ées se renco ntrenl ici avec ex ubérance,
La Charte se termin e par un e prohibition en faveu rcl e l' archevêque et de
ses successeurs ( arehiepiscopo ejusque successoribus ) enve rs et co ntre tous.
de Irollbler, inquiéter et dép0l/.iller desdits bi eo. et possessions, ( lt1'chiepiscopmll
Les actes et chartes, qu e nou s venons ùe parco u";r , se tronv ent tou s couronnés par un dem ier ti tre, qui répaud sur la nature du droit de l'archevêque d' Ades, louchao ll e ca nal et la bordigue du Roi, le jour le plus lumineux;
c'est la charte de 1223, qui a le caractère d' une véritable tran saction ,
Elle int erv int à ce tt e date de t 223, entre Hugo , archevêque d' Arles el
Raymond-Bé ranger III , com te de Prove nce, No tons en passa nt, ct comme
point his torique qu i écla ire les ti tres, que les comtes de Provence, clans le
co urs de ces siècles, arrivèrent peu à peu à gouverner la Provence, cl 'abord
co mme pOS5esse urs de ce grnnd fi ef électif et heréditaire, puis, co mm e possesseurs définitifs: el qll'aiosi ils s u cc~ d èrellt aux .e mpereurs cl' All emagne,
qui ava ient régné d'abord sur la Prov ence,
En 1223, nou s assistons à la fond ation de la ville de Martigues, L'auteur
du résumé de t'histoire de ProtJence, M, Rouchon, le raconle p, 174-, II constate que Raymond-Béranger III en fut le fonda teur, "Sur l'atltre extnimité
et ejus successores moleslare, vel inquietal'e, vel disvestire in pl'œdictis bonis
et possessionibus suis),
" du Comté, dit-il, lechâteau de St-Ciniez se convertit en lm bourg considérable ,
" ( Les Martigues), "
Par où 1'011 vo it clairement reconnu , allribué et conféré par celle char te
de 12 12, le même d,'oit de pl'opririté sur le canal et la hordigue du Roi ,
qui résultait déjà des charles ijolérieures,
Ce furent celle fondation et les prem iers travaux, tenlés par Raymond Béra nger III qui amenèrent, en 1223, un trailé célèbre entre l' archevêque
d'Arles el le comte de Proveoce, où les droits du premier , su,' les canaux
el les bord igues des Martigues et de Bouc, furent reconn ns et fix és pour
pel' ecc/esias, vel sœculm'es personas
DAllET
et
POSS'D ET,
vet juste habere debet),
En droit, que sonl ces titres? ils so nt ou des ti tres primordiaux ou des titres
recognilifs. Et daos les deux cas, ils prouvent la propriété des hoirs de
Galliffet.
jamais.
Celui-ci, en s'élablissant sur le sol occupé aujourd' hui par la vi lle des
�-7S-
74-
Martigues, dans le quartier appelé de l'Ile, portait un double préjudice
à l'archevêque.
1\ s' eillparait d'un sol possédé par \'archevêque, su r lequel lui ou ses auteurs avaient étab li une église. fond é un hospice, et que les hospitaliersavaient
défriché et amélioré.
De plus, le tumulte el le concours des habitans , comme le bruit des oun iers, allaien t nuire aux pêcheri es cie l'archevêqu e, éloigner le poisson cL
anéantir les revenus qu'ell es produisaient pour lui.
Enfin, il était encore un autre intérêt qui le préùccupail. C'était celui des
possesseurs à qui il avai t transporté, à bail emphythéotique, un e parti e des
pêcheries qui, dans l'origine, lui avaient été exclusivemen t concédées par les
souverains de la Provence', Louis, Conrad et Frédéri c.
1\ défendait leurs droits, en s'opposant aussi aux actes qUI pou"aieut les
détruire . •
L'archevêque d'Arles se pr(,valail de sa longue posses?ion et de ses titres.
Le tex te latin du traité est trop précieux pour ne pas le rapporter ici.
Les plaintes de l' archevêq ue sont d'abord ainsi formulées:
Conquerebatur naruque dictus archiepiscopus, prredicto nomine, pro co
" quod ( le com te ) occupavemt dictam insu/am et faciebat cam bastiri : qua11l
«
" insll/am ipse archiepiscoptls et antecessores sui archiepiscopi habuerall t et in
" pace possederant à tempare Cl/jus !wn extat memaria: ita qnod , nomin e Are• btensis ecc\esire, constructa erat, ibi ecclesia et hospital e, quam ecclesiam
« et hospitale hospitalii tenuerunt loogo t~mpore ab ecclesiâ Arelatensi: in
« tantum quod iofra ipsa m 'insulam prrefali hospitalarii excolerant et rede« gerant ad agriculturam duas ferragines nomin e ipsius hospitali s, prrestando
" ecclesire Arelateosi ceusum, vid eli cet nnam libram piperis, pro ecclcs iâ ,
• hospitale et insulâ supra dicta. "
Les plaintes de l'archevêqu e co ntinuaien t , et après avoir indiqué, comm e
on vient de le voir , les actes de son ancienn e possession , il sigoalail les dangers de l' œuvre du comte de Provence par rapport aux pêcheri es, tant pour
lui, que pour ceux qui les tenaient de lui .
u
Ttem c1icebat clictus archiepiscopus ecclesiam Al'elatensem et {eudatorias suos
" plurimùm damnifiari propter bastimentunI prœdictum, quia impedlentibus
« IpSO bastlmenlo et, tumttltu populart et animalium, pisces non poterant Libere
« U'onstre, s,cut cOflsuevemnt, AD plseAR'As PONT'S S'NCT! GENESIl , QUAnUM P' S« r.AR ~ A nUM PAn TEM IIAnET idem archiepisco}JlISin pl'oprietate sucî, e t 1I1'iœ p(l!'tes
• (lb 'pso tenentur '" {eudwn: super qltibus omniblts sibi et ecclesiœ ArelateltSi et
" (euda,tariis ejusdem intolerabile del"ùnentum et prœjudiciunl mani{estltm tllm
" in ]Jiscariis quwn in aliis t,idebitur in{e/Ti. »
A des griefs si énergiqu es et si justes, le com te de Prov ence ne répondait
qu e par un fait dénu é de prtluves.
Il disait:
" Quod antecessores sui , de quorum sti,'pe ipse descend erat, red ificave« raot in insulà prredi ctâ. Quâ de causâ ipse credeba t sc rodifica re jure suo, "
L' arch evêqu e ni ait ce fait , ou bien s' il avait cu li eu, il ne s'était réalisé,
seloo lui , que par la violence, per vim,
Il y avait là mati ère à un traité. Il fut signé le 3 des id es de janvier 1'223,
En voici les cond itiuns, L'archevêque cède au comte de Proveoce les deux
terres ( duas (crragill es) su ,' l e~qu e ll es le comte veut hâtir. Mais il stipule que
tant ses pêcheries, qu e celles de ses feudataires, se,'ont conse,'vées, respectées
et protrgées, tant dans le prése nt que dans l'avcnir, sa ns qu 'aucun e alleinte
directe ni indirccte puisse leur être port ée.
De son côté, le comte de Provence cède à l' archcvêque :1'Arles uo e foule
de droits à prendre et à exercc r sur les territoires de Sain t-Mitre, de Cbâtèau-Veire et autres loca lités,
Et il promet d'observer et de subir toutes les conditions qui lui sont imposées, par rapport aux pêcheries de l'archev êque, et de ce ux qui tiennent de lui .
Les engage ments de l'archevêq ue et les cond ition s qu' il impose au com te
sont ainsi formul ées dans l'acte:
« Nos Hugo, .Dei gratiâ, Arelatensis archi episcopus coosid erantes et diligeo« ter attend entes manifestam et evidentissimam utilitat em eccl esire Arela• tensis, dOllamus, tradimtls et conceclimus titulo permutationis duas ferragines
• p,'redictas, in insulâ prredictâ, vobis Raymundo Beraogarii prredicto , eL
�-
iG-
" per vos omnib us successoribus vestris: SALVO ECCLESId! NùDlS SUCCESSORIBUS
• ET PEUDATA IUlS NOSTRIS, JOREOUOOINPISCAR IIS SANeT! GRNRSII PERNOS VRL PER
« IPSOS FEUDATARIOS POSSIOERE OIGNOSCIIIURVEL HAURRE; ila 'amen quod PRd!DICTN.
« PISCARId! nobis vel successarihus, ve/ {eudatariis nos tris competentes IN ALI« QUO NON ARCENTUR, VEL MlNO,'NTUR, VEL DETERlùRENTUR pel' vos vel per homin es
« vestros, nec patiamini quod aliquid fia t ab hom ini bus vestris, vel ah
« aliqlliblls aliis PROPTER QUOO piscariœ prœdiclœ in aliquo arccn tltr, mWllon" luI', vel deteriorentur" " Il
Ceux du Comte de Provence le so nt de la ma nière suivan te:
• Et nos Raymllndlts Berengm'ii comes provinciœ supra diclas RECEPIENTES
• à vobis domina Hugone , Dei gratiâ A,'e/atellsi archiepiscopo, prœdiclas {e,',~ rag-ines nomine permutatiollis, CUM PACTlS E T CONVENTI ONlB US
• SUPERIUS EXPRESS.4TIS, cum consi lio et vo luntate consiliarium 11 0S • trorum prœdictorum, donamlts, ced imus, sol vimus et in perpetuum desem« paramus vobis" albergas, cavalca tas, justitias sa nguinis et alias justitias,
• etc, etc, etc.... Conced imus etiam (sui vent d -a utres co ncessions), ))
Puis le pacte est termi né par r obli ga tion que s' im pose le co mte de respecter et de faire à toujours respecter ses engagemt!nts,
« Prom-iltentes vobis et S"llccessol'ibus 'l:est"is, pel' nos et pel' nost"O$ sltcces« SOl'es in bonâ (ide nostm et sub obligalione omnium bOllorum nOi trorll1/\., prœ• sentittm et {utul'orum, tmiversa et singu/a supra dicta salvare et de{endel'e
" jure et judicio, Ab omni violentia et ca rata ct firma habel'e, In perpetutlm
• et nullo tempore contra prœdicta 'l:en ire, , " 1>
En résumant la por tée de ce titre et en l'applicant, avee les autres, à la
solutiou du procès engagé con tre l' Etat, il est imposs ibl e de n' être pas rr~p..
pé des conclusions décisives qui en résultent pour l' hoirie de Ga ll iffel.
Le comle de Provence, Raymond -Béra nger, qu i stipule en 1223, c'es t
l'Etal aujourd' hui, Celle représen tation s'est opérée par la transm ission du
comté de Provence, réalisée en 148 1, par le testamenl du demi er comte
de Provence en faveur du roi de France Louis XI. D'~u t re part, les arche-
-
77-
vèq ues d'A I'les, c'est l'hoiri e Ga lliffet, qui détient et possède ce que les archevêqu es d'A rles possédaient , el qui les représenlent, quant à ce,
Donc luus les pactes, lous les engagements pris par le comte de Prove nce
doive nt être tenus par l'E tat , et le premi el' de tous, c'est de respecter et de
reco nnaltre le droil de propriété qui rut solenuellement co nsacré en 1223,
Cell e première co nséquence est incontestable et évident e,
En vo ici une secolllJe 'lu i ne l' est pas moins.
Ce cl roit , tel qu' il ressort de la charle de '1223 esl, comme celui qui se
déd uit des chart es de 920, 989, 1-1H el 1212, un droit de propnélé
pa tri mon ial et privé,
L'archevêq ue y dit qu' il a une parti e des pêcheries IN PROPRIRTATI SUA ;
l' expression ne pouvai t être plus énergiqu e,
Que l' autre, illa tient pa r d'a ulres, à qui il les a inréoMes: ab ipso tenentu,'
Ùl {eudt/m. Ce qui marqu e bien ce qui reste dans ses mains,
.
Il n'a liène les deux terres duas fermgines qu e saur le droit qU'II a sur les
pêcheries SALYO JURE quod in piscariis, et ce droit, il l' a déjà défi01 une
PROPRIÉTÉ.
Il exi"e que ce droit ne soit II i allpré, ni dim in ué, ni méconnu en, quOI
"
'
. 1 deteriorantur. C est le
que ce soi
t in .
allquo non aI'centur, ,'el d'11nmuantur
ve
privi lé"e du droi t de propriété de se raire ai llsi respecter,
En fi~, le com te de Provence accepte toutes ces condi tions, pactis, con-
vcntionibus superius expl'essat-is,
"
Il s'engage sur tous ses biens et il promet garantie stlb omllUtm bonorum
obl-igatione defendere ju,'e et judicio.
,
".
Jamais droil de propriété pri vée ne rut ni mieux ca ractérISé, DI !DIeux
d~re ndu , h mais il ne prod uisit au dehors plus d'effet et plus de pUIssa nce,
,
C'est encore là une co nséqu ence in contestabl e de l' acte,
'è
"
1
ous
sera
permi
s
de
slgoaler
raIl y en a, en oulre, une d erOl re qu 1 n
pidement.
' d
l
xa
C'es t que ce droit de propriété, qu e nou s avous vu sortir es ac es e :
, é
t non-seulemen t sur les bord igues, ma is encore sur les ca naux ou
min s, por e
d'
t d' t dans
elles so nl établies, Il rau t remarquer, en effet, que ces rOlts son 1 s
�-
78 -
-
l'acle de 1223 porter IN PISC1RUS , et dans les cbar les de 920, 989, '1 1H .
porler également SUl' piscarias ou piseatol'ias. Or, l'un el l' autre de ces illo is
désiguenl , non pas un e coll ection d'artifices, de pieux, de rosea ux deslinés à
rorme r les labyrintes des bordigues, mais bien le heu où les poissons sont
'}J,·is. D'après Duca nge, le mol PISCARIA es l défini : LOCUS in quo piscatlw. El
PISCHORIA : LOCUS in q!t~ pisees eapiuntm·. ( V. le Glossa ire de Ducange ).
La même conséq uence se déduit encùre des termes pa rti c uli ~ r s de la cbarte
de 920 , qui , en désigna nt les pêcheries du Marligues, qui sont dans le domaine de l'archevêq ue, les com prend parmi les TERRES, ( breve DE TERRIS quas
Manassès tellltit in dominio sua) . Et leur donn e ainsi le ca ractère de qu elque
cbose de te!Titorial, d'immobii'iel', du sol; ca ractè re qui ne peul exisler : si
les CA~ ..uX des bordigues ne sout , comme celles-ci , comprises dans la
proprié té,
79-
biens qu e co mm e un fi ef qui lenr élail venu des archevêqu es eux-mêmes:
Vo ici le texl e: « Con{essi [uerunt ea quœ sequantur se et prœdeeessores suos
« tenere et tell'uisse in {ew.lwn ab archiepiscopo Arelatensis ct stlb dominio ejus
«
qltœ 011lnia vendiclel'unt dieto domino Are/atcnsi. "
20 Le second est un acte, du 1"g. avri l 1309, de foi et hommage rendu à
l' archevêqu e d'A lles par Haymond Gaufridi , écuyer, de tout ce qu' il possédait dans la suite des ean x de la mer el ne ~J a rlignes , selon et en la fOl'me
qll e su n père en a \'ait fail l'aveu aux précéden ls Arche\'êqu es d'A rles.
30 Le tl'oisième esl un a ~le dn 't 8 novemb re '1310 , conlenanl foi et hom-
mage rendu il l' archevêque d' Arl es par le prieur de Saint Gini ez de Marligues, de la bordigL1 e de Méjan et de tout ce qu' il posséda it dans les pêcheries
el dans l' étang de l\lartigues.
!I,O Le quatri ème est uo 3cte de reconnaissa nce, du 28 septembre 1321, de
Berlrand de Porcelet, en fa ve nr de l' archevêque d'A rles, de loul ce qu'il
possédait clans les ea ux cie Marti gues, de Sa int Gini ez et de Caronle,
II. Deuooième transmission des Arc hevéques rI A1'les aua; cami es de P7'OV€nce.
50 Le cinqUI ème est un acte de ,'econoa issance, du 13 juin 1326 , par le-
Elle s'est opérée par le résulta t de de ux actes: le premi er, du 28 juillet
1292, le second d u 19 mai 1457, passés, lous les deux. enlre l' archevêq ue
d' Arles et le com te de Provence.
Pour bien comp rendre leur portée, il fa ut se sou venir de la di vision fa it e ,
par l'acte de 1223, des bordigues sur la tête des archevêqu es d'A rles, ell
deux classes; ·1° celles qui ava ient élé inféodées à ues ti ers par l' arche\'êq'Je ; 2° celles qu' il ava it retenues.
Les bo rdigues inféodées pal' lui sonl ra ppelées da ns une série d'actes
que no us n' indiquerons ici qu'a u po int de vue hisloriqu e et pou,' éclairer le
procès pa r cell e lumière nouvelle.
1 ° Le premier es t un acte dn 12 se plembre 1235 , pa r lequ el Berlrand de
Fos el Cécile Hu guelte ve nd ent à l'archevêque d'A rl es des pêcheries, usages
et droi ls qu' ils possédaient à Caront e à l' entrée du port de BOllC jusqu'au
ponl Saint Gini ez.
Il y est di t, par les vendeurs, que ce ll e venle n'es l qu' un ,retoul' J e
la chose aux: archevêqu es, parce qu' ils déclarent n' a voir jamais possédé ces
quel Rey mond Ga rini , reconualt possédel' su b dominio lI1'chiepiscopi: daus I.es
ea ux, soil da os les pêcheri es INAQUIS Selt PISCARIIS pontisinsulœ Sanet! GeneSt!.
la demi de la bordigne d'Engassier qui co nrron lc d'u u côlé avec la bonligue
de l' église de Saint Ginie.:: el du leva nt avec la ca ba ne Baussenqlte: • ab Ima
" parte cum burdigulo ecclesiœ Saneti Gene.::ii, et ab oriente e!lm cabanâ
,
" Baussen quâ..... ..
60 Le sixième est une sél'ie de règlements fails et publiés par l' arcbevêqu e
d'A rles, pour les bordigues de Martigues et de Ca ronte, depuis l' année 1285
j usqu es en l'année 13'10.
70 Le se pt ième , esl une enquNe fai te le 19 févri er 133:, SUI: les droils
qn e les archevêqu es d'Arles ava ient sur les bord igues ou pccberl',e ,., su: le
pont Saint Gioiez et dans r élang de Caron te. Elle en renferm e h Istonque
e t le détail.
80 Le huitième esl un ba il empbi téotiqu e, consenti le 28 mars 1 ~08 , par
'a rchevêque d'Arles à Salvador Turc, du lieu de Saint Giniez de Marligues,
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80-
de sept bordigues si tut'cs dans l' étang de Caronte, appelées H CA RD, Falcon ,
Gentil, Fauge, Bauge, d'au Bourguignon et Nadal.
Ces bordigues avaient fai t retour dans les mains de l'archevêqu e, par
l'abandon qu'en ava ient fait les premi ers preneurs emphit éotiqu es, qui les
avaient laissé se dégrader. et qui avaient encouru la commise ou soit
lelli' dépossession légale, en vertu d' un e sent ence définitiv e prononcée pal'
le juge de Salon.
Les bordigues retenues par l'archevêque et qui étaient restées dans ses
maius, consistaien t dans le surplus de celles de Martigues et de Bouc, qui
n'a vaient pas été inféodées , et notamm ent dans la bordigue et le canal
du Roi,
C'es t celle-ci qui va faire la mati ère de l'acte du 28 juillet 1292.
Voici à quell e occasion l'a''chevêqu e en fit le transport et la transm ission au co mt e de Prov ence,
Une fois établi dans l'Il e de St-Giniez en force du trait é dc 1223, le
COOlie de Provence, Raymond-Bérenger ou so n successeur Charles Il , Y
multiplia ses actes el chercha à s'agrandir,
Il s'empa ra du sol qui forme aujourd ' hui un e partie de la ville de Mart igues appelé Jonquières, et de plu s, d' un e bordigue joignant le terrai n de
Jonqui ères, Il avai t do nné à celle bordi gue le nom de BOTe/'igue du Roi,
L'a rchevêque attaq ua ce tte doub le usurpation par l' entremi se du pri eur
de St-Gini ez de Martigues,
Celui-ci demandait , 1 0 la restitution du quarti er de Jonquières (dimilti
a sacrâ regiâ majeslate locum in territorio dicli castr'i qui VIIlgariter appellatur JONQUERI.\ ),
Il demanda it, 2° la restitution de la bordigue du Roi , ( peteretjlls piscariœ constitutœ I~ SOLO SEU TERRITORIO Dlcn PRIORIS quam pücariam", voca lur
vulgariter DUROIGULUS REGIS) ,
Des amis com muns s'i nterposent , et les deux parties transigent ( amicoruln
communium intervenienle lraclatur ad scriplam concordiam seu TRANSACTIONEM ),
81 Le comte restitue le quarti er de Jonq"ières. Le prienr, au nom de l'église
d'Arles, cède et transporte au comte de Provence la bordigue du Roi ct
son cana 1.
Les termes de celle vent e, faite par l'archevêque, sont remarquables,
les voici;
• E converso prœdictus prior remisit, desempamvit prœ{atœ r'egiœ majes« tati et successoribus suis OMNE JUS ET DOMINIUM et actionem quod competit ,
« scu "campet cre posset prœdiclo priori, /lomine et pro par'le ccclesiœ suœ et
« eidem ecc/esiœ, IN PISeARlA P,"'DICTA se!! oc,:asione ips-ius, cedens et l1'olls« {ere/ls omnia jura, actiones, Teales, seu personales, utiles, seu dù'cctas,
« mirotas, setl Tei persecutorias 9"œ ejusdelll piscariœ nomine eidem priori et
« ejtls ecclesiœ competunt seu competere possunl , ET POTESTATB!I CONCESSIT idem
• prior, nomine quo supm memoratœ ,'egiœ majestati, PURGANDI , AMPLIANOl:
«( RE FI CI EK Dl PRtEDI CTUll nURDIG ULUM SIYE PISCA RIAM , ct omnia a lia in co [aciend'l,
• pel" quœ Tee/dilus et proventus dicti btlnliguli auge!'i, conservari et ampliaTi
« possinl, »
Et com me si la supéri orité du droit des archevêques d' Arles n'était
pas déja suffisa mm ent manifestée, le comte de Provence a soin de stipu ler qu e l' archevêque d'Arl es donnera sa ratification au transpo rt qui
lui est fait.
,
« Fuit etiam aclum inler partes, porte ce t acte en terminant , quod doml" nlls p1"ior {aciet et (acel'c promisit, cura bit et procumbit se {acturum quod
« abbas et conventus 1110ll tis majo1"Îs et ARCnlEPISCOPU3 Arelalensls lJrœd lcUt
« 011111ia et singula confirmabunt, et solenniter approbabllnt, »
Il résulte de cet acte des conséq ueuces décisives pour la qu estion de propri été de la bordigue du Roi et son canal au profit des boirs de Ga lliffet,
On voit d'abord la bordigue du Roi et son caoa l établts sur ua SOL a~par· pnons,
"
L' a~ chev éque n étatt
tenant yà l' archevêque CONSTITUTO INSOLO d',ct,
- , cl e 1a bor d·loU,
a e' mais il l' était eocore du SOL,
pas seulement propnéta,re
'
,
'été
c'est-à-dire du ca nal.
ilia transmet, cède et transporte au comte de Provence, en plerne propn ,
( omne jus et DOMINIUM et actionem IN PISCARIA PR"'DlCTA ).
�-
82
Il transmet aussi o1llntaJum, les actions mIELLE S (actiones reales) qui lui
appartiennen t sur la bordigue et le cana l ( quœ ejusdem piscariœ nomÎne competunt), Pourquoi J' action réelle, si le sol n' était cédé?
Enfin il concède le pouvoir de toucher au canal de la bordigue, de le repurger, aggmndir et réparer, PURGAND I, A~IPLI ANDI, reficiendi, Dernier signe
que le transport porte sur le canal.
En résultat, l'archevêque, vrai propriétaire civil du cana l et de la bordigue du Roi les transporte donc au comte de Provence, Celui-ci n'ob ti ent sur
eux d'autre droit que le droit qui lui est transmis; mais aussi il le possédera
au même titre , transmissib le et comme une propriété civile , el cn vertu du
mode civil d'acquérir, appelé transaction; et quand, enfin, nous "errons les comtes de Provence transmettre, à leur tour, aux auteurs de l'hoirie
de Galliffet ces mêmes choses, celle dernière transm ission s'expli quera par
la première, et aura le même caractère,
Ces résultats 6xés, voyons l'acte du 19 mai 1 ~57 qui achève la deuxième
transmission.
Avec le temps, les archevêques d'Arles se retirent du Mar tigues, des
étangs , des canaux et des bordigues qui leut restaient dans ce tte loca lité, Le
Roi Réné, eo 1 ~57 , les remplace. ~Iais c'est par un traité que ce changement s'opère, et ce traité est dans J'acte du 19 mai 1457.
Ce traité est un échange, dans lequel l'archevêque d'Arles cèùe au comte
divers objets, parmi lesquels figurent les bordigues non inféodées, retenues
encore par l'archevêque, et les étangs; et le comte de Provence à l'archevêque d'A rl es un péage annnel, Jans la ville d' Arles, plus q,û florins à percevoir
annuellemeut sur les terres d' Is tres,
Le caractère du transport de propriété opéré par ce t échange est tl'èsénergiquement marqué.
L'a l'chevêque 'lU ses mandataires donnent et livrent en échange (dant)
tradunt, remit/lm! plenariè) dabord les terres et domaines de Ferrières,
Saint Mitre , ........ . puis :
« Nec non unive!,sa et singula jura, actiones et juridictiones et DOM! 'lA tem-
-
83-
porales et TEMPORALIA qUa3 et quam pra3fatus archiepiscopus Arelatensis
• habet et habere in supra dictis AQUIS ET STAMNIS de Ma,·tico et de Gorrente
" ( Garante) et in aliis lacis BernfJ et insulœ Ma,·tici , qua lit ercumque et
" quandocumque, sive ex quacumque ca lJsà, dicto archiepiscopo perti" neant et pertinere possint aut debeant , sive ratione homagii, ant aloi
" quocumque jure, titulo, sive causa, cum omnibus suis singulis ju,'ibus el
« pertinentis suis, •
«
Le transport de propriété est enco re marqué "ers la 6n de J'acte par deux
traits nouveaux.
(1 y est dit que J'acte a été fait pour transporter la propriété: anima
transfigendi dominium et p/'oprietatem bonorum at rel'llm.
On y ajoute que J'usufruit y sera consolidé à la propriété: ususf/'uctus
consol'idetur l'nopn 1l!T ATI.
Enfi n, l' arohevêq ue garan tit de toule év iction universelle et particulière
( om"i evÎctioll.e univel'sah et pm·ticula,·i ) les ea ux, les étangs et les domaines qu'il avait SUI' les ea ux ( aqitas, stagna, aquarllmque DOM INIA salvare ,
sel'vare, sernperque defelldere) el qu'i l a transportées.
Cet acte, vrai titre de propri été encore, opère donc la transm ission
des canaux et ùes bordigu es des archevêques d'Arles au comte de Provence,
que l'acte de 1292 al'ait commencée.
En terminant so n examen, il faut rema rquer les stipu lations faites par
J'a l'chevêque d'Arles, dans J'intérêt des bordigu es qu'il avait inféodées.
Il ob tient du roi Réné que les droits de ceux qui les possèdent seront respectés. Il devait ce tte ga l'antie à ceux qui tenaient de lui.
A cct effet, le traité de 1457 porte: que ceux-ci seront pour les fruit s
qu'i ls retirent de leurs biens (pro (ructibus omnibus et bonis suis) exemr ts à
perpétuité de tout e charge,
Qu' ils peuvent aller et revenir pel' dictas aquas et stagna:
Enfin, qu'ils peuvent pêcher dans l' étang de Martigues, librement et
comme ils a vaient cou tum e de le faire (piscari valeant in stamno Mar/ico
libere et qu,emadmodum conslteverunt ).
�-
84 -
C'es t ainsi que se consomma la deuxième transmission, des archevêques
d'Arles aux comtes de Provence.
Nous allons voir maintenant la dernière, dont il nous reste à parler.
cL le port de Bouc, Toutes ces terres, \'ill e8 et domaines formaient la vicom té
de Martigues. Les lellres-pa tent es précitées, du 9 octobre 14·73 disaient :
• Quos qu idem baronias, castra , et quœcumqlJ e alia prœd icta cum su is
" distri ctibus , sicut prœfatur , per DO S in unum indissolubile corpus unita
ct in corpo ra La et seu co rpus unum ........ ln vice-comÎtalum qui Martici no-
IlL Troisième transmission des comtes souverains de la Provence, aux auteurs des hoirs de Galliffet.
Elle ,s' est opérée par l'effet du testament de Charles d'Anjou , dernier
comle, souverain de Provence, du 10 décembre 1.\,81 , en faveur de François de Luxembourg, son cousin.
Par ce testamen t, Charles d' Anjou fit pour héritier univ ersel le roi de
France Louis Xl, et lui transporta, pour l'unir au royaume de France, son
royaume de Provence.
Il fit en outre une quantité considérable de legs particuliers; et légua ,
nommément, la vicomté de Martigues à François de Luxembou rg.
Voici de quelles expressions il se sert:
« !lem pari ter LEGAY/T sive RE LI QUIT Francisco Domino de Luxembul""o
"' ,
• ejus consobrino carissimo, et suis hœredibus et successoribus quibuscumque,
« per in perpetuum, pro quamplur'ibus gratis et acceptis servi tiis, per ipsulll
fi Franciscum dominulll de Luxemburgo sibi omni tempore bellorum et pacis
« fideliter et curiosè prœstitis, item et in compensationem mullorum labo« rum quos ipse Franciscus Luxemburgo non sine magnis sumptib us in suo
« servitio toleravit, pro quibus recognovit et coufessus est idem dùminu s
« noster rex testator mu ltùm deberi, Y1CE-COAnIlTATUM MARTICI TOTUM cum om « nibus juribus , dominiis, pr'oprietatibus, r'edditibus, proverltibus ac ernolu-
mentis ipsius vice- comitalus. »
La vicomté de Martigues comprenai t, d'après les lettres roya les d'érection, du 9 octob,'e 14-75 , donn ées par le roi Réné à Charles d' Anjou, un
ensembl e fort étendu de villes, de terres, de domaines et de propriétés ; la
ville et la baronie de Berre, avec les villages de Lan çon et d' Ist res ; la terre
d'En tresens, la ville et la baronie de l'isle du Martigues, avec le vi llage de
Saint Mitre eL de Ferrières et de Fos, Carri , Rognac, les Pennes eLla Tour
85 -
(' minc appel/alul' cl'igimus el extollimus,
»
C'es t ce ll e vicomté qu i est l' objet du legs fa it à Luxembourg.
Le souverain l' a léguée cntière, sa ns exception (TOTUftI ) a"ec Lout ce qUI
la compose (cum omnib us ju)'ibus , DOMINIIS , PROPRIETAT IDUS ), La bordigue dl,
Roi et son ca nal y furent par là même compris.
Cela se voit encore tout aussi bi en par un e disposition subséquente du
même testament, au suj et du même legs de la vicomté de ~Jartigues,
Le tes ta Leu r y dél'cloppe sa premi ère pensée, Il lègue la vicomt é avec:
« \lem cum turribu s, forLaliciis, domibu8, œd iGciis, ne omnibus el sill" gularibus vassalis hominibus et frem inis, in eodem vice-comitis et locis
« ct termin is ejusdcm habitantibus et habitaturis ; •
« Item et cum -montibus planis , sil vis , nemoribu s ac ga rrigu iis , pratis,
« pascu is, devesi is ( lcs dcffens ) et vetatis, ac cum olll1libllSet singulis juribus
•
«
el perlinenliis suis;
« Item pariLer cum ~\QUI S, AQUAiDUCTIDUS, molend inis, furnis ; ET ALIlS UNIVERS'S et singulis )'ebus el BONrs ad diclulll vice-cornitatum pel'linCllliblis et
speclalllibus ac perlinel'e seu spcclm'e ]Jolentibus debelltibus modo quùcumque et quâcumque ra tione seu caùsâ: item CUlU omni juridictione allâ eL
bassâ, civili et crimina li mero et vincto impe rio , ac cum omnibus pertin ent,;;s, prœrogativi s servi tati bus , cens ibu s et se rviLiis, "
« Et demum GENERALITER cum omnibus ct singulis jUl'ibus REALIDUS et pCI'sonalibus, el ALIIS QUIBuscuMQaE, QU "'CU~IQUE ET QUALIACUMQUE SINT ET QUOCUM-
(1
QUE NOMIiŒ CENSEANTun.
«
«
«
«
«
«
«
»
Lps eaux (aquis), les canaux (aqllœductibus) s'appliquent très-évidcmment
au cana l el à la bord igue du Roi. - Cela ne resso rt pas moins encore de ces
mots qui embra ssent tout ce qui peut exister de domainc et GENKRALITER
QU~CUMQUE ET QUALIACUMQUE SINT ET QU~CUMQUE NOlllNE CE~SEA~TUR ,
�,
-
-
86 -
pUl'ement civil plus év id enl. Il faut, en terminant, rappeler un dernier trai t
qui le manifes tera touj ours mi eux.
Le tes tateur roya l , en faisa nt un hériter universel en la personne. de
Loui s XI , a soin de déclarer qu' il suit, en cela, la règle tracée par le droit
civil , ct empl'unt ée à la législation romaine, d'après laquell e le testam ent,
pour être va labl e, doit contenir une institutioo d' héritier.
Il le dit en ces lermes :
La lecture seule de celle pièce importaute le démontre.
Le tes tateur roya l, après avoir fait le roi de France Loui s XI, son héritier
universel, se préocupe encore du sort des legs nombreux qu' il a faits à di verses personnes, et en parti culi er à celui fail à Lux embourg, de la \' icomt é de
Martigues. Il ve ut qu'il s soi ent fid èlement exécut és: {( eœsolvi, cœœqui ,
compl~r·i
el adimplcri voluit ae ordinavit lit sllprà pel' eum legala, "elicta,
« disposila et DI·dinata. ))
Et par rapport à François de Luxembonrg et à la vicomté, il veut
que son béritier :
• Cœlera quœ ul suprà eidem Francisco lega vit sive )'el'iquit , acceptet ,
« ratificet et approbat ..... et INCOllllUTADILITER TENEAT AC ODSERVET ))
"
Il impose encore à son héritier Louis Xl l' ob liga tion de respecter tout ce
qui s' est co nsommé sous l'empi re des lois de son roya um e et de continu er
à faire jouir la Provence de ses priviléges, statuls, pactèS , co nv enti ons,
franchi,es, usages et coû lumes.
Suscipiat amabililer pal!'iam el terras adjacentes, ventlll etiam in pac<, lionibus, conventionibus, privilegiis, liberlatiblls, franchi.iis, slalltlis,
« capitulis, exemptionibus, ac prœrogativis; etiam et item in ttsibus, ri tibus.
" moribus, stilis ae lattdabilibus c01!suetudinis ..... suscipiat, habeat , manu
« leneat ac de{endat. »
En terminant., le comte souvera in de Prove nce no mme ses exécut eurs
testamentai res, et pour qu'aucun do ut e ne puisse s'élever SUI' la qu alit é de
l'acle testamen taire qu' il fai t, il le tetm ln e en disan t :
" Hoc es t au tem et esse voluit do minus noster Reœ testa tOI' , suum 'ultimu m
" leslamentum el suam ultimam vallin lalem siv e disposition em liualem om" nium regnorum , comitatuum , vice-comitatuum , baronias, terras et domi{( niorum , cœterorurnqu e bonorum, rerum , jurium, fortun arum el fa cultatu m
« suarum et suorum prœsentium et futurorum .... ))
Il veut en fin , qu'il va ill e à titre de leslamen t. à défaut , à tit"e de codicille,
ou de dona tion à cal/se de morl; et il casse et ré voqu e tous les taments antérieur s:
• irrilans penitus et annullans omnia alia les lamenta. »
Jamais acte CIVIL de disposition ne fut mi eux marqu é, et son caractère
«
87
1
" E l quit, liœreclis juslilulio est capul el {ondame/llum cuiuslibel les tamenti,
" 1I11:imœ t'ohmtatis et düpositionis finalis 110ster ,'ex testator ..... . (ecit, inse< tiluit et orclinavil liœ)'edem SIlUm universalem Luclovicllln dei gralriâ H'an« corum ,·egem. )) ( Remontrances de la nob lesse, p. 88 et suiv., où le testament de Charl es d'Anjo u est rap porté eu entier ).
Tel est le titre qui a fait entrer da os le domai ne de François de Lu xembourg, et plus turd dans ce lui de l'hoiri e J e Galliffet, le ca nal et la bordigue du ·Roi.
Pal' ce testament , ils sortirent du domaine de la couronne, posséd és, eo
pl ein e propl·iété. par Charles cr Anjou , dernier sou verain de Provence, pour
tomber dans les mains d' un simpl e particuli er.
Ce pa rti cul ier acq uit dooc légi timement celle propriété; par un moyen
du droit civil , le legs. La proprié té lu i fut transportée, el il la transmit
à ses successeurs.
Ava nt d'aborder l' énoncia Lion des titres qui ont fail arri ver plus lard à
la fami lle de Ga lliffet , la propriété directe de la bordigue du Roi el de son
ca nal , il n'est pas inu til e de montrer, avec qu elqu es détails nouvea ux, que
le ca nal et la borcl igue fUI'ent compris et embrassés pal' le legs de la vicom té
ùu Marti gues, fait à Lu xembourg, qu oiqu ' ils n'y soi ent pas désignés pal'
leur nom propre et parti culier.
Nous avo ns vu déjà, par les term es spécial/w eL par les term es génél'aliX du legs, qu e la bo rd igue du roi et son ca nal y étaient compris. Nous
rappelons maintena nt qu' ils étaient dans le domain e des comtes de Pro vence
dès-avan t le testament de 1 ~8 1 et au momenl de ce testament.
�88 -
Les actes suiva nts en font foi :
C'est dabord l'acte du 28 juillet 1292, pal' lequel l'archev êque d'Arle s
les transmet au co mte de Provence.
C'est ensu it e l'acle du 3 fév rier 1328 . renfermaut transaction entre l' archevêq ue d'Arles ct la rei ne de Prov ence Clémence. La plainte était de la
part de l'archevêq ue coutre la reine, de ce que les fermi ers de la bordigue
du Roi plaçaient , à l'entrée de sou cana l (in inlroitu canalis BW'diguli
Regii ) une panten ne ( espèce de fil et nuisible J laqu elle portait préjudice
aux bordigu es duJit archevêque (in prœjudicium bllrdiga(orum archiepiscopi )
et de ses vassaux ( et vassalorum Sllorum J. On transige en s'accorda nt que
ni les uns ni les autres ne pourrout se servir de ce fil et.
C'es t encore une informatiou prise, d'autorité du comte de Provence ,
le 15 octobre 13 31 . et une enquête reçue par le magistral délllgué par
l'autorité compétente , pour canstater les droits du so uv era in , comte de
Provence, sur la bordigue du Roi , supe)' facto l' ISCA RI JE DO!II NI NOSTRI RE~I S.
De nombreux témoins sont enteud~ s sur l' origine de celle bordi gue,
sa consistance, ses lim ites; SUI' les droits et sur les priviléges qui y sont
allachés « (u t informaret ipsum inquisitorem di ligenter DG PISCA RI A quam cua ria priefati Do mNI REGIS et comitis habet in dictâ insulâ Sancti Genezii, in
« quibus cousis tit, quali ter confrontatur et limitatur, de omnibus juribus ac
« pertinelltiis ac privilegiis ipsius PISCARUl.
On peut voir dans la pièce les dépositions précises de tou s les témoins.
C'est en6n l'ordonnance des commissaires nomm és par le comte de Prove nce, pour la conserva tion rle son grand bord'igue, du 1 q. mai 14·67. (Cette
ordonnance est cit ée daos l'a rrêt de 1ï90, p, 12 ).
Par où l'o n vo it très-clairement que, lorsqu e le testament de 1 ~81 a
transm is à Luxembourg la vicomté de Mart igues, avec tout ce qui en fai s~it
partie, le cana l et la bordigue.du Roi OIlt été transmis et légués, puisqu' il s
étaient partie intégrante de celle vicomté et en la p leine possess ion du
comte souverain de Provence.
Peu importe donc qu'ils n'ayent pas été désignés par leur nom propre
-
89-
et spécial. La disposition général e a suffi pour opérer la transmission en
force du legs.
Celle démonstration peut recevoir encore un nouveau degré d'évidence,
pal' une autre série de faits.
Dans le cuurs des années qui s'écou lèrent après la prise de possession de
la vicomt é de Martigues par Lux embourg, le domaine, comme on le verra
tout à l'h eure, quand nous nous occuperons des titres judiciaires, éleva des
prétentions sur celle vicomté. Luxembourg en fuI même dépossédé pendant procès, en vertu de la maxime de 1I0tre ancienne jurisprudence qu e:
le Roi ne plaidait jamais dessaisi; et il ne fut réintégré que par l'arrêt du
parlement de Paris, du 25 septembre 1568, dans la propriété de celle
vicomté.
Pendant le procès et la dépossession de Luxembourg, la vicomté de
Martigues fut remise, par lettres royaux du 9 octobre 1 ~~9 , au duc d' Astri ,
temporairement, et avec faculté par le roi de la reprenrlre et de l'enlever au
détent eur préca ire, quand bou lui semblerait.
A celle occasion , des procédures, des in ventai res et des descriptions
détaillées, firent Gonnaltre de qu els éléments se co mposaien t la vicomté de
Martigu es , et de quoi Luxembourg avait été dépouillé. On va y voir fi gurer
en détaille canal et la bord igue du Roi.
D'.abord, dans les leLlr es royaux du 9 octobre 1M9, le roi de France Henri,
en transportant la jouissa nce de la vicom té, s'ex prime en ces termes:
« Donnons notre vicomté, terre et seigneurie de Martigues et baronie
« de Berre, leurs appartenances et dépendances, ainsi qu' elles se comportent
• et étend ent de toutes parts , tant en justice mère, mixt e, impère, qu'eH
" rentes, prés, pâturages, garennes, bois tai llis, .... .. . ETA NGS, PÈCIlERIES,
« DOURDIGUE S, étan gs pour sel et à poisson . »
Ensuite, le 11 av ril 1550 , le commissaire Ju gouvernement accède SUI'
les li eux pour mellre le duc d'Astri en possession. On s'occupe d'abord de
la baronie de Berre, puis le 13 avril suivant a lieu la mise en possession de
la vicomté de Martigues.
�-
,
-91-
90-
Le commissaire, dans son procès-verbal, déclare avoir mis d'Astri : • en
« possession de la vicomté .... . Ensembla de tous les droits principaux et aca cessoire5, ses appartenances et dépCldances TANT EN LA MER ET EAU que des
« droits de la terre, c'est à savoir des PESQUERlES ... , ..
Enfin, le procureur du roi requiert le comm issaire de procéder 011 faire procéder il r estime et évaluation: " tant des maisotls et bâtiments que DOURDIGURS
ET PÊCHERIU.
L' inventaire se fait et il décrit et énumè l'e qe qui suit:
« Item auprès de Jonquières tme pêcherie dite LE GRAND BOURDIGUE avec la
« maison et limites, dans lesquelles personne n'ose pêcher, hormis le roi ou
« -ses fermiers.
• lIem un huitième au bourdigue d'Engassier.
a Item, un bourdigue du passage avec sa maison et limites, dedans lequel
« nulle personne n' Ôse pêcher, hormis le roi ou ses fermiers, et sans que
« nulle barque y puisse demeurer ponr y prendre port, mais seulement
" passer, et pour ce a été nommé le bourdigue de passage:
« Item, un bourdigue que r on appelle le Domergal avec sa maison et
« limites. »
Les experts uommés pour estimer la valeur et l'état de ces bordigues ,
achèvent l'opération en ces termes :
« Nous nous sommes transportés au pont du GRAND DOURDIGUE DO ROI: icelui
« visité et trouvé en mauvais ordre et en plusieurs parts rompus et corrom« pus, de peu de valeur; lequel nous avons estimé à la somme de trente« deux livres, en ce compris les piles.
« Aussi avons été au GRAND DOORDlGUE ....... avons visité les meubles, pan« tènes, rets, cornues ;
« Pareillement, avons été al] bourdigue du passage. "
De tous ces actes ressort la preuve éviden te que le legs fait à Luxembourg
comprenait le canal et la bordigne du Roi.
Cela est évident, puisque ce canal et celle bordigue sont repris sur lui pa r
le Roi de France, durant la période du procès.
Cela est évident encore, puisque la bordigue du Roi y est désignée, comme
une dépendance de la vicomté de Martigues, par le nom d'abord du grand
Bourdigue, qui est effectivement le nom qui lui convient , rpuisqu'i l est plus
graud que tous les autres; mais SUl;tout par le mot de Bordigue du Roi, qui
se trouve dans la description faite par les experts, quand ils disent: "nous
« nou s sommes transportés au pont du GRAND DOURDIGUE DU ROI. » Là en effet,
sur ce tte bùrdigue se trouve le pont estimé par les experts.
Cela est évident, enfin, par la réunion de ce double fait, que jusques au
testament de 1481 , cette uordigue el ce canal sont sur la tête de comte
de Provence; qu'après sa mort, ils sont sur la tête de Luxembourg; et
qu'ils y sont repris par le roi de France, durant la spoliation temporaire
dont Luxembourg fut atteint par rapport à la vicomté de Martigues .
Ainsi les hoirs de Galliffet ont mille fois l'a ison de présenter ce titre comme
titre décisif en faveur de leur droit de propriété; et il!' est à tous les
points de vue que nous venons de parcourir.
l~
On peut même dil'e ici que si jamais un titre f'Jt sacré, ce fut bien celui-ci;
et qu'il devrait l'être surtout pour l'Etat, l'adversaire des hoirs de Galliffet,
lequel a recueilli, dans la succession de Chades d'Anjou, dernier comte
de Provence, l'héritage qui lui fut laissé sous la condition expresse du legS'
fail à LuxeOluourg, de le respecter, et de lui maintenir tout son effet. Nous
avons vu les termes précis du testameut sur ce point.
Ajoutons encore Ull motif de plus; c'est que la réunion de la Provence à la
France a été opérée sous la condition que les droits antérieurement acquis
dans cetle province à des tiers , et fondées sur le droit public de la pl'ovince,
soit sur ses loi s, ses usages, ses coutumes et ses priviléges particuliers, seraient maintenus et respectés par la France. C'était la condition imposée par
le testam ent de Charles d'Anjou, qui instituait le roi de France Louis XI, son
héritier dans la propriété du com té de Provence. et qui la lui léguait; elle est
conçue en ces termes: "Patriam QC terras ipsas adjacentes lion so/mn illtuitu
« precium suarwn suscipiat amabiliter, VRRUM ETUl! IN SUIS PACTIONIDUS, CONet
VENTlùNIDUS, PRIVILEG IIS , LIRERTAT1DUS1 FRANcmSIIS, STATUTIS, CAPITCLlS, EXCEP-
C TJONIDUS RT pnmnOGATIVIS; ETIAM ET ITEM IN USIDUS, RlTIDUS, !IORIDUS , STiLiS , AC
�-
92-
-
« LAUDADILmus CONS01!TUDINIDUS, QUAS, QUA! ET QUOS ACCEPHRE , MTIFICARE. ·AP-
PRÜDARE AC CONFIRMARE DI,"NBTUR AC VELIT (Testament de Charles d' Anjou,
« derniërcomte de Provence) . •
Louis XII, dans le pacte solennel fait en juin 1 !f98 avec les dépnt és des
états de Provence, à Senlis, accepta celte condi tion et promit de l' exécut er.
Il adjoignit la Provence à la France:
«
93-
législation de l'ancienne monarcbie. Les lois qui oot été rendues en France,
depuis 1789, . ur le domaine et les aliénations qui ont pu eo être faites, sont
conformes. Elles répètent auss i que les aliénations consommées dans les pays
adjoi uts plus tard à la F,·snce, et consommées avant leur adjonctioo, soot régies et gouvernées par les lois alors en vigueur dans ces pays, ou par les
traités de réuoion.
SaliS p7"éjudicier IIi déroger à leurs dits priviléges, et en outre tous et
« chacun les dl·0itS, pj·iviléges , libertés et franchises, conventions, chapitres
« de pairo, LOIS, COUTUMES, DROITS, STATUTS, polices et man·ièrcs de vivre ès« dits pays........ qui leur ont été donnés , octroyés, confinnés et continués,
« tant par lesdits seigne!trs, ROIS, reines et comtesses d'iceux pays, qui cio devant ont été aua;dits pays, leurs lieutenants, gouverneul·s et gmnds séné-
La loi du 10r déc. 1790 porte, en elTet, dans son art. 37 : " Les dispositions
Il
comprises au présent décret ne seront exécutées, à l'égard des ~rovinces
• réunies à la France, postérieurement à l' ordonnaoce de 1566, qu en ce qUI
" concerne les ali énations faites depuis la date de leur réunion respective :
« chaux, NOUS LEUR AVONS DE NOUVEAU ET D'ADONDANT CONFIRMÉ , LOUÉ ET
Et celle du 14 veotôse an VII, art. 2, sur la même matiè,·e dit encore: «Eo
• ce qui concerne les pays réunis postérieurement à la publication de l'édit
« de fév rier 1566, les aliénations (aites avant les époques respectives des réu-
«
«
AP-
PR0UVÉ , CONFIRMONS, LOUONS ET APPROUVONS, POUR EN JOUIR PAR EUX et chacun
d'eux, tout ainsi et par la {orme et manière qu'ils ont pal· ci-devant dû• ment et J·ustement joui et usé, jouissent et usent , promettant en bon Ile {ai
« et PAROLE DE ROI . et jurant leur garder, observer et entretenir. (Ex trait
«
des archives déparrementales. ) •
Il avait été précédé de l'édit d'octobre 1486, ùonné par Charles VIII,
dans le· même objet etcooçu da os les mêmes termes. (lsambert, collect. Lois
ancùmnes, t. XI, p, 166. ) Il fut suivi de celui d'avril 1'" li, dooné par François 1er , coofirmatif des précédeots. (Recueil des traités, t. n, p. 55. - Noë
Gaillard, p, 128 . . - Isamber!., t. XII, p. 33). Et l'historien Bouche nous apprend, t. li , p. ~88, qu' il fut confirmé: " par Henri Il, l'an 154-7: par François
« Il, l'an 1560 ; par Heuri IV, l'an 159q, : par Lous X11\ , en son entrée dans la
« vi lle d·Aix, l'an 1622, et par ~ouis XIV so n fils, par leUres patentes du
« mois de mars 1660. •
«
C'est donc sous la protection de ces actes légis lati fs qu 'est placé le titre, la propriété des hoirs de Galliffet, et pourrait-on , aujourd ' hui, lui
contester d'être un titre vrai, translatif, irrévocable, un vrai titre de
droit civil?
La
législation moderne est d'ailleurs d'accord avec ce que proclame 1<1
•
«
«
«
«
les aliénations précédentes devant ét,·e ,·ég/ées se/on les lois lors en usage dans
ces provmces. »
nions, seront ,·églées suivant les lois, lors en lisage dans les pays réunis , ou
suivant les traités de paix Ott de .,.éunion. »
Sous quelque législation que nous oous placioos. le titre que produit l'boirie
de Galliffet te testament du comte du Maine, de 1481, es t donc uu
vrai titre d~ propriété: les lois de 1790 et de l'au VII , daos les articles
p,.écités, n'ayaot pas eu d'autre objet que de mainteuir celle transmISSion de
propriété qu'autorisaient le droit public et civil de Provence, au moment où
elle avait lieu.
En résultatdooc , quand même l' hoirie de Galliffet ne puiserait son droit qu.e
dans ce titre , ce Litre devrait être qualifié titre de propriété. A plus forte ration cela ùoit-il l' être, quand, subrogée aux droits du comte de Provence, elle
l'est encore par celui -ci même à tous les d,·oits qu'avaient primiti~ement les
nrchevêques d'Arles, et que leurs titres à la bordigue étaient aussI des donations , véritables titres de propriété.
Un dernier coup-d' œi l sur les titres qui ont fait arriver à la famille de Gal.
�-
94-
liJfet , le canal et la bordigue du Roi, est encore ici nécessaire pour achever
r historique de celte transmission,
Nous ne parlerons ici, et en ce moment, q ue)rès-rapidement de l'arrêt du
Parlement de Paris, du 25 septembre 1568, qui fi t triompher Sébastien de
Luxembourg, fils de François, légataire du comte de Provence, de toutes les
eutraves apportées à son droit.
Par cet arrêt , le droit de propriété sur la vicomté et ses dépendances, fut pleinement reconnu , et l'Etat fut condamné en ces termes, dans
sa pré te ntion~. :
• La Cour a condamné et condamne ledit Procureul'- Géneral à (aire , audit
« de LUaJembourg, réelle et actuelle delivrance du vicomté du Ma1'ti9u..es et de
• ses appartenancei , pour ell jouir par lui, doresnavant , comme de sa chose
• sans restitution de fruits pow' le passé! ))
Par cet arrê t, fut terminée et finie la spoliation dont Luxembourg avait
été \' objet ; et Sébastien de Luxembourg posséda comme fils du léga taire du
dernier souverain de la Provence, le canal et la bordigue du Roi, etles autres
énumérées dans la procédure de 1550,
De transmission en transmission, la vicomté de Martigues (érigée en principauté par lellres patentes de 1580) arriva des Luxembourg aux Vendôme; de
ceux-ci aux Villars; des Villars à la dam e de Choiseul veuve d'And igné ,
comte d e Vesun, et au comte de Vogué ( pour moitié à chacun d' eux y,
et de ceux-ci à la famille de Galliffet , sans rien perdre de ce qui la
constituait.
Le 16 mai 177'1, Louis-François de Galliffet acheta, par acte sous cette
date, la portion d'Éléonore de Choiseu veuve d'And igné , comte de Vesun,
et par un acte de licitation intervenu le 20 mai 1772, entre ledit marquis de
Galliffet et le comte de Vogué, le premier resta adjudicataire de la totalité
de ladite principauté au prix de 2,000,000 fI',
Dans ces derniers actes de vente , on trouve parmi les objets vendus el
achetés :
• La
GRANDE DOURDIGUE
dite
DU !lOI,
celle du passage de Bouc, le huitième
-
95-
• de celle d'Engassier ; le tiers du poisson d'été de la bordigue de la cabane
• Baussenque et de ce lle de Domergal.. , .. . ))
.
Rie n n'est changé: rien n'a péri dans ces transmissions, et la famille de
Galliffet reçoit tout ce que les archevêques d'Arles avaient transporté au
comte de Provence, et ce que ceux-ci avaient légué à Luxembourg,
Rarement on a rencontré une plus formidable union de titr.es; on ac~ord
plus complet ; IIll ensemble plus lumineux , et jamais propriété ne fut mIeux
démon trée,
'
,
Ici s'appliqueot, dans toute leur étendue, les principes de drOit exposés
ùans la première partie de ce mémoire,
,
Ils justifient les chartes concédées aux archevêques d Arles ; . leur efficacité; leur puissance et le transport de propriété sur les bordigues et sur
leurs canaux.
,
Ils justifient, enfin, le pouvoir des souverains Je la Provence; 1 efficacité du testament de U81 et le droit de propriété qu'il a fondé pour les
'hoirs de Galliffet.
Nous passons maintenant à la seconde subdivision des titres, celle des décisions judiciaires intervenues,
DEUXIEME S UBDn'lSIQN.
, "
'1 dt'Ct'ai7'es inte1'1Jenues ayant {'autOl'ité de la chose juge.,
Les d eCtswns)
1
~
" nvoquer par l' hoirie de Galliffet est l' arr~t rendu par le Parb 1568 au profit de Sébastien de Luœem1
t de Paris le 25 septem re
,
.81
b:;;, fils de Fr~nçois de LuooembOllrg, légataire , par le testement de l
,
de 10 vicomté de Martigues ,
.
.,
I. La premtere, al
�-
96-
Les circonstances qui l'ont précédé, les résistances dont l'arrêt fit triompher Sébastien de Luxembourg, les termes et les dispositions d~ l'arrêt, les
actes qui le suivirent, en font un titre décisif pour la propriété du ca nal et de
la bordigue du Roi, au profit de l'hoirie de Galliffet.
On va le voir par le détail de chacun de ces points.
Une sentence donnée au Irésor le 13 août 1503 avait dépouillé François de Luxembourg de la vicomté, sous prétexte , sans doute . de sa
domania lité.
Le 9 aotH 150-1- François avait obtenu des lettres royaux con tre celle sentence ; et engagé une instance d'appel , contre la sentence du 13 août 1503.
François de Luxembourg mourut. Sébastien , son fils, reprit l'instance. Il
obtin t même, le 6 mars 1566 , des lellres royaux aux mêmes fins que celles
obtenues par son père, et soutint que la vicomté de Martigues était un bien
patrimonial à lui légué par le dernier comte de Provence , et partant , qu ' il
n'avait rien Je domanial.
La réclamation de Sébastien fut jugée légitim e par le roi, avant de l' être
par le Parlement.
Le 3 mai 1568 , il Y eut , entre le roi de France et Sébastien, transaction
sur l'objet du procès, et échange fut fai t entre eux, de la vicomté de Mal'ligues avec le Juché d'Etampes.
Le 4 mai 1568 des lettres patentes furent données pal' le roi , aux fins
de l' homologa tion et de l'entérinement de celle transaction par le Parl ement de Paris.
Le Parlement joignit ces diverses demand es.
Sébastien de Lux embourg se trouva demandeur devant le Parlemen t de
Paris, 1 0 en rep rise du procès introduit ' pal' son père; 2° eu en térinem ent
des lettres royaux des 9 août 150.\. , et 6 mars.1566, et lellres patentes du ~
mai 1568 , et en restitution de la vicomté de Martigu es.
De son côté le Procureur-Général, dans l'intérêt du domaine, demand a
la péremption de lïnstance, et la confirmat ion de la sentence donnée au trésor le 13 août 1503.
Sur ce, le Parlement de Paris, vu toutes les pièces sus-citées et plusieurs
-
97-
.
aut"es, 1° déclara r instance introduite par Fran çois de Luxembourg , et
reprise par Sébastien , non pél'i mée.
2o Annu lla la sentence de 1503 , qui ava it dépou illé François ;
3° Ordonna qu e la vicomté de Ma rtigues serait restitu ée à ce derni er, sans
rest.itution de fruits pour le passé:
4° Et réserva au roi la facult é d' unir, comme frontièr e. au domaine de
la couronne, la vicomté du Martigues, en remboursa nt préa lablement, en
terres non domania les, audit Luxembourg, l' équivalent de ladit e vicomté.
Voi ci les termes de l'a .... êt :
" Notre dite Cour, par son arrêt, et en entérinant lesdites lettres du 6 mars,
n et sans avoir éga rd à la péremption d' instance, prétend ue par notre Pro• cureur-Général , a reçu et reçoit le dema ndeur à reprendre ledit procès
« par éc .. it au li eu de feu SOli pè"e, et y faisant droi t, amis et met l'app ellation
" et selltellce donnée par nos dits conseillers du trésor le 30· jour d'aoû.t
" '1503, AU NÉANT et émelldont le J·ugement, .a CONDAMNE 1IT CONDAMNE NOtRE DIT
« PROCUREUR-G\iNÉRAL A FAIRE , audit de Luœemboul'g mi ELLE ET ACTUELLE DÉU" VRANCE DU VICOMTE DE MARtiGUES ET SES APPARTENA NCES, pour en joui?' par lui
« doresénavant, comme de sa chose, et sa ns restitution de f"uits pour le passé .•
« Et néa nmoin s. a ordonné et ordonne que led it de Luxembourgsera tenu
" de laisse,' audit P.. ocu reur-Gé néra l ledi t vicomté et appartenances, Ioul es
.. les foi s et quant es qu' il plaira au roi le unir ct incorporer au domaine
" de notre co uronne, et à ce faire, en ce cas, dès à présent, comme dès lors
" a condam né ct co ndamne ledi t de Luxembou .. g, en le récompensant, par
« le roi, en autre héritage de parei ll e va leu r que se trouv era être lors ledit
" vicomté et en mêmes titres et qu alit és , autres toutefui s que led it du ché
« d' Etampes, el en terres non domaniales. »
Avant de tirer de celte décision les conséqu ences qui en résu lt ent, pour la
justification du droit de propri été sur le canal et la bordi gue d,] Roi , ajoutons
que la dernière partie de l'arrêt de 1568, celle qui eollcerne I~ ~éserve, fa,te
~u profit du roi , disparut, plus tard , à la suite de d,verses déCISions émanées
du Conseil-d'Etat et du Parlement de Paris.
�-
98 -
Le 9 ao~t 170 1, le duc de Vendôme , qui voulait disposer de certaines
fra ctions de la vicom té de Martigues , sans avoir à relfouter l'application
de la réserve, en obtint du roi le désistem ent,
L'arrêt rendu à cette date porte :
• Le roi , en son conseil , ayant égard à ladite requête, s'est désisté et désiste
« de la !'éserve et {acullê portée pm' l'arrét du parlement, du 25 septembre
Il 1568, à laqnelle, en tant que de besoin, sa majesté a renoncé et renonce,
• tant pour ell e que pour ses successeurs , imposant sur e~, silence perpétuel
« à son Procureur-Général et à tous autres; ce faisant a ordonné et ordonne
Il que le sieur duc de Vendôme, ses hoirs ou ayant ca use, demeureront pro,
u priétail'es incommutables de la principauté de Mm'tigues , circonstances et
• dépendarlces ( la vicomté avait été, dans l'intervalle, érigée en principauté),
• sans qu' ils y puissent être troublés ni inquiétés par qui que ce soit , sous
« prétexte de ladi te réserve , à peine de tous dépens , dommages et
« in térêts, •
Un second arrêt du Consei l,d'Etat , du 25 février 1702, confirma le précédent.
Des lellres patentes, pour l' exécution de ces deux arrêts, furent délivrées
le 26 avri l 170'2 au duc de Vendôme,
Et enfin, le Parlement de Paris, par arrêt du 5 ao~t 1702 , entérina les
lettres patentes du 26 avril 1702 et ordonna:
.. Que lesdi tes lettres seraient enregistrées au greffe de la Cour pour jouir,
• par l'impétrant, ses hoirs et ayant cause, de leur effet et contenu, et être
• exécutées suivant leur forme et teneur, »
Ce complémen t de r arrêt de 1568 une foi s indiqué, les conclusions à en
ti rer pour le droit de l'hoirie de Ga lliffet sont évidentes et décisives.
L'arrêt . en ordonnant la restitution et la délivrance réelle et actuelle de la
vicomté de Marligues et de ses appartenances, n'a rièn excepté: pas plus
les terres proprement dites, que les canaux des bordigues et les bordigues
elles-mêmes. Le canal et la bordigue dit Roi, y so nt compris deux fois ; la
première, quand l'arrêt ordonne la restitution de la vicom té, d'ont ils faisaient
-
99-
partie. La seconde, qnand il ordonne la restitution des appartenances de la
vicomté. Ce mot diltout. Et quand on se so uvient du délail de ces appartenances, donné dans la procédure de 1550 ; quand on y voit avec quel soin la
bordigue du Roi yavait été désigllée, la portée de l'arrêt acquiert un degré
d' év id ence irrésistible. Il a, pour l'hoiri e Ga lliffet, l' autorité de la chose jugée. L'Etat revendiquait, en 1568, le tout ; aujourd'hui il ne reve ndique
qu' un e parti e. Mais pOUl' celle partie, l'Etat renco ntre ici un obstacle invincible , la chose jugée. Les parti ef. sont les mêmes, la chose demandée aussi ;
les parties procèdent en la même qualité: c'est toujours l'Etat , diversement
représenté, mais tOlljours lui-même qui demand e: c'est toujours le propriétaire de la vicomté, en tout ou en partie, qui agit. Tous les ca ractères de la
chose jugée se rencontrent donc ici.
Remarquons, maintenant, tout e la force de ce document judicia ire du 25
septembre 1568. 11 fut rendu après de solennels débats, une longne spoliation
dont François de Lux embourg avait été victime. une résistance rigoureuse
du domaine de la couronne. Qui oserait en contester la gravité?
Enfin, il fut rendu en 1568, au moment où les vraies idées sur l'aliénabilité ou l'inaliénabilit é du domaine de la couronne étaient fi xées, vulgarisées e't
connues de tous.
On ne 6t pas non plus de distinctio n pour ce qui concernait les bordigues
établies dans des ca naux alimentés par les ea ux de la mer: On reconnut donc
1>1 vérité des prin cipes du droit plus haut exposés. On ne vit pas, dans ces canaux et ces bordigues, des propriétés insusceptibl es de propriété privée. Au
co ntraire , on les décla ra patrimonia les et privées. Luxembourg n'était qu'un
s'imp ie particuli er. Le domaine fut contraint de lui délivrer la bordiglJe du
Roi, pour en jouir comme de SA C/JOSE. Energique et mal e ex pression, qui dit
tout dans son lacon isme, et qui prouve bi en qu e nos pères sava ient marque,' d' un scea u ineffa ça ble l'empreinte de leurs pensées et de leurs décisions.
C'est donc LA CIJO SE de l'hoirie de Galliffet, qu e l'Etat lui dispute aujourd'hui, mais après qu'il a ,>té cond am né à la lui délivrer.
Celle délivrallce s'est en elfet opérée dès 1568; et jusqu'à ce jour, elle n'a
pas cessé un seu l moment de porter ses fruit s. Toujours la possession du canal
�-
-
100-
Dans les anciens principes du Jroit publi c fran çais , il Y avait celte différence énorme entre ces deux formul es, qu e la derni ère, celle de rétlnir, suppusait la domanialit é de la terr e ou de la cbose à l'occasion de la'1uelle la
réser ve avait eu lieu, tandis qu'au contraire, la première, celle d'unir et incorporer, ne la présupposait nullemenl.
" Le domaine, dit de Coriolis, Traité de l'administration de Provence, 1. 2,
{( p. 262. peut être augmenté en deux. mani ères : par la REUNION 0' ANCIENNES
• PAnTm s etp a rrU N l o~ DE NOU VELLE 3 PARTI ES. La différence entre ces dewD ffloyens
• est d' autant plus sensible, que la 1'6u"ion /l'est pas tant une augmenta/ion que
• le re /our d'une partie démembrée à son principe , au lieu que [union prou duit une augmentatioll vér itabla. Cette réunion s' opore de plein droit ; la
" partie qui se réunit entre dans sa situation naturelle, qui est de n'avoir
• qu'un seul êtrê avec le corps dont ell e avait été détachée pour un
« temps. Le retour des fi efs démembrés du domaine concédé ou pour un
" temps , ou pour un certain nombre de génération s, fournit un exemple
" de cette réonion, qui n'est, en quelque sorle, que la consolidation de
« l'usufruit à la propriété. Il n'e'l es t pas de mb ne cie l' o~ION , qui pro• duit uue augmentation véritabl e , el qui pent se faire ex pressément ou
el de la bordigue du Roi es t restée dans les maiu s des auteurs de l'hoiri e de
Galliffet et dans les si eunes , tant a été fort e et fécond e cell e parole de justice prononcée en plei n Parl ement de Paris, le 25 septembre 1568. Son retentissemen t sera puissa nt aussi en 1857 : et à travers les troi s siècles qu' ell e
a parco urus, elle ne manq uera ni d'effi cacité, ni de réalité, parce qu'ell e n'a
jamais péri.
Toutes ces conséqu ences ·ne so nt null ement affai bli es, p~ r la réserve contenue dans l'arrêt de 1568, que nous avons rapportée plus haut.
Au cootraire, si elle ex istait encore, et si ell e n'ava it pas été effacée pal'
les arrêts de 170 1 et 1ï02 , cités aussi plus haut , elle ne ferait qu e confirmer ce que nous avons dil.
C'est avec ra ison d'abord que nous faisons remarquer qu e celle réserve
n'existe plus.
Elle a été effa cée par les arrêts du Conseil-d' Eta t du 9 août 1701 et 25
fév rier 1702, où le roi a déclaré renoncer au droit qu'elle lui conféràit ,
et cela par deux fuis répétées. Il surfit de sc référer à leur di spositif.
Il faut en dire au tan t des letlres-patentes données le 26 avril 1702, pOUl"
ordonoer l' exécu tion des deux arrêts , et de l'arrêt du parlement de Paris ,
du 5 ao(1I 1702, qui a ordonné l'entérinement et l' exécution de ces lettrespatentes et arrêts.
L'autorité roya le, celle du Conseil-d'Etat , l'autorit é des arrêts du Parlement de Pa ris , s' opposeraien t donc à ce qu 'on pOt se prévaloir de cette réserve. Ils l'on t effacée; elle n'ex iste plus. Comment donc l' Etat pourrait-il
en argumen ter contre nous?
Mais , faisan t un instant abstraction de ce fait , en soi-m ême la réserv e ne
prouverait pas la qualité domaniale de la vicomté de Martigues , ni d'aucune de ses parties.
D'abord , qu' on le rema rque bien , l'arrêt ne dit pas qu' il réser ve au roi
la facu.lté J e réunir au domaine de la couronne la \' icomté du Martigues ;
maIs SImplement de r unir et de l' incarporer à ce domaine.
Entre ces expressions la différence est grande.
101
, tacilemen t.
" L" union ex presse s' opère par lettres-pat entes , qui s' ordonnent dans les
cas où le souverain le juge nécessaire. ))
•
Merlin , répert, VO Domain e public, § 3, dit au. suj et de la réunion et de f uIlion : " On sent la différence de l'un e à l'autre. La réunion n' est pas tant une
" augmentalion, que le retour d' une partie démembrée à son principe' au
« li eu que l'uniOll produit un e augmentation véritable.
.
" Aussi l'union ne se régit-elle pas par les mêmes prin cipes qu e la réulllon. •
A
,
En appliquant ces priucipes il l'arrêt de 1568, il faut donc conclure que la
réserv e de l'union qui s' y lrOllve, n'affJiblit en rien la portée de la déclsl~n ;
que bien loin de prou ver qll e l' ali&nation de la vicomt é n'eut pas été \rel te ,
elle prouv e au contraire qu'elle le fut , puisqu e l'unio~ au dom~lOe de la cou·
ronne, si elltl s'é tait jamais opérée, ne l'aurait pas faIt acqu érrr comme une
chose ayant toujours appartenu au domaine, mais bien comme une chose nou-
�-
-
102 -
puisque la chose domaniale fait toujours retour au domaine, sans recomper/se,
et que jamais l'Etat n'a à payer le prix de ce qu'i l a le droit de reprendre.
D' où suit encore celle dernière conséquence, que si l'arrêt impose à l'Etat
celte obligation pl'écise de récompenser, pour ce cas, Luxembourg ou ses
boirs, c'est un cas d'expropriation ordinaire pour cause d' utilité publique ,
qui est prévu, et non le cas ùe retour forcé au domaine de ce qui en serait
sorti illégalement.
D' où suit encore, que si la l'écompense ùuit consister en Lerres non domaniales, c'est qu e la vicomté de Martigues ne l' était pas, la récompense devllnt ùonuer une chuse éga le à celle dont Luxembourg serait privé.
velle, sur laquelle le domaiue n'aurait jamais eu de droits, ou aUI'ait légalement perdu ceux qu'il y avait eus.
Eo second li eu, le motif de l'arrêt sur cette rése rve d' union est facile à
iodiquer. Ce n'est pas parce que la vicomté avait été originairement domaniale , mais c'est parce qu'elle était considérée comme frolllière, que l'arrêt
la coutient. Le souverain , ou soit le Parlement , réserve comme mesure d' utilité publique, et comme un e espèce d'ex propriation rendue nécessaire pour
les intérêts gouvernemen taux, la fa culté d' unir ce pays frontière, pour un
cas donné, au domaine de la couronne.
C'est ce que nous apprennent 1e3 Remontrances de la noblesse, p. 167, où
l'arrêt du 25 septembre 1568 se trouve entièrement rapporté, et où l'analyse
et le sommaire de cet arrêt est ainsi donné: « Arrêt du Parlement de Paris
« du 25 septembre 1568" qui maintient M. de Luxembourg en la posses« sion de la vicomté de Martigues, léguée par Charles d'A njou, dernier comte
" de Provence: condamne M. le Procureur-Général de la vuider et désem• parer; sauf en cas que sa majesté la veuille réunir COMME FRONTIÈRE ,
« en le remboursant en terres de pareilles valeurs et qualités , non do• maniales. »
C'est ce qui se trouve encore dans l'arrêt du Conseil-d'Etat du 9 aoat 170t ,
où il est dit par le duc de Vendome, expliquant l'arrêt de 1568 et sa réserve ;
« lequel arrêt n'ellt d'autre motif que la situation de la principauté limitrophe
• de la mer Méditerranée. •
Il Yavait donc là lin intérêt de défense du territoire et de sÎlreté nationale, auquel l'arrêt avait pourvu . Mais rien de plus.
En troisième lieu , d'a près l'arrêt , si la réserve se réalisa it jamais, elle
était soumise à la condition « de récompenser Luxembourg en autres hé,.itages
• de pareille valeur que se trouvera alors être ladite vicomté, et en TBRRES
•
NON DOMANIALES.
1)
D' où résulte, très-clairement, que la réserve n'implique aucun caractère
de domanialité sllr la vicomté ùe Martigues, ni sur aucune de ses parties ,
103 -
. Enfin, ct pour dernière raisou, qui repousserait l'exception empruntée à
la réserve , nous dirions encore que la condition apposée par l'arrêt à la
réserve, ne se rencontrerait null ement ici; et que quand même on passeraIt
pardessus toutes les dirficultés que nous venons d'exposer, il en resterait
une dernière insurmontable: c'est que l'Etal n'offre rien en compensa lion de
ce qu' il veut nous enlever, qu' il ne présente pas Utl autre h~rit~ge ou une
autre terre lion domaniale, qui puisse ou qui pat récompenser 1 home de ~al
liffet, de ce qu'on veut lui ravir, en lui prenant le canal et la bordIgue
. du Roi .
.
,
t
Or comme cette condition est IOhérente a la réserve , et quelle en es
indivisible, ou il faudrait la remplir, ou il faut cesser d'argumenter de
)
la réserve .
11. La seconde décision judiciaire, ayant l' autorité d~ la chose jugé~, qUIII. . de
Galliffiet
voque l'h olne
, c'est l' arr~t du Consell-d
. . Etat dl' 25 .aOllt 1781
d é;
, t "ssi l'al-rêt de ce même Conseil, du 2 .. JUIllet 1856 , qUI en a onn
c es a~
d l'E
l'interprétation, à la sollicitation et sur la poursuite meme etai.
Voyons d'abord ce qui en est de l'arrêt du Conseil du 25 août 1781 : et,
avant tout , disons les circonstances qui l'amenèrent.
..
'
1
du
21
avril
1739
avait
établi
une
commIssIon
pour
Un arr ê l d U Consel,
1
�-
104
la vérifica tion des droits maritimes qui se percevaient sur les ports, quais,
Mvres , rades , rives et "ivages de la mer, sous quelques dénominations qu'ils
fussent perçus; comme aussi dans les ports, bordigues, madragues, gltideawv
et atttres pécheries et sun LES ÉTANGS SALÉS.
JI ordonna que ceux qui percevaieut oes droils, et les propriétaires de
ces pêcheries, représenteraient leurs litres,
Par un second arrêt du 26 octobre même année, composé de plusieurs
articles, il ful dit : art. ~ :
• Qu e MM. les commissaires doivent statuer sur la confirma lion sup1 pression, ou réunion au domaine desdils droits nu pêcheries. •
'
Et al·ticle ï :
• Qu e les propriétaires des pêcheries établi es avant le mois de mars 154\
• doivent y être maintenus, en justifiant de leur concession, ou eo prou~
1 vanl par titres que l'établissement des
pêcheries est antérieur à celle
• époqu e. "
La veuve du marécbal de Vi llars, propriétail'e alors de la principauté de
MartIgu es, réclama, par un mémoire détaillé, contre l'application de ces arrêts
qu'on voulait faire à ses bordigues du Martig'les el de Bouc.
Elle Sf, disait propriétail'e de ces bordigues el pêcheries. Elle invoquait
pour le prouver les titres de 122S, 1292, de H8!, de 1568, de 1701 et
i 702, plus haut rapportés. Elle excipait de la jurisprudence constan te du
domaine qui l'avait toujours affranchie des droits de confirma ti on. (V. son
mélO. au dossier, p. /r. , 5, 6, 8, 9 ell 0).
La commission fut lente li prononcer. La maréchale de Villars mourut. La
principauté fUlacquise pal' Ie marquis de Galliffet en 1772. Dans l'io-norance
oÙ' il était des fails antérieurs, sa défense fut incomplèle, et un pre;ier arrêt
interlocutoire ful rendu le 23 août 1778, qui ordonna une mesure préparatOIre concernant les hordigues du Martigu es et de Bouc.
Cet arrêt du 23 août 1778 prescrivit:
• Qu'avanl dire droil sur les demandes du marquis de Galliffet, et de ses
• emphytéotes propriétaires de bordigues dans la principauté de Martigue.,
• rI sera, aux frais du marquis de Galliffet, dressé par un ingén ieur un plan
-
105 -
« figuratif des bordigues et pêcheries ex istan tes dans ladite p"incipauté, et
•
•
.,
..
•
"
qu'il sera procédé à une enquête à l'effet de Constater l'utilité desdites
bourdigues et pêcheries , et les inconvénients dout elles sont susceptibles;
lors de laquelle pourruut, les parties, faire tels dires, ob,ervations et
produire tels titres qu'elles av iseron t bon être : pou~ ce, fail et rapporté,
être ordonné ce qu'il appartiendra, le tout aux frais du marquis de
Ga ll iffet. •
Aux termes de l'arl. 11 de l'arrêt du 26 octobre i 739, l'arrêt interlocutoire auraîl dû être signifié à l'avocat défenseur au Conseil; il ne le
fut , le 18 septembre 1778, qu'aux gens d'affaires du marquis de Galliffel ;
et celle circonstance permit à ce dernier de se pourvoir par opposition , en
temps utile, contre l'arrêt interlocutoire du 23 août 1778.
1\ le fit par Ilne requête qui con tint tOllt son système, et qu' il est impor tant de rappelrr ici .
1\ concluait: « à ce qu'il fut ordonné que les lettres-patentes du 9 octo« bre 1473, le testament du '10 aoOt1481, l'arrêt du Parlement de Paris,
« du 25 septembre 1568 ( suit le détail des titres ci-dessus énumérés ) leso quels déclarent les BORDIGUE S et LES EAUX DES ÉTANGS DE MARTIGUES appal·tetlir
« e11propriété ait prince du Martigues et il ses emphytéotes, Ensemble l'arrêt
« de règlement de la chambre des comptes d'Aix, du 9 aoOt 1568,
" HS16, 1526,1675 et autres. concernant lesdites bourd-igues et EAUX seront
« exécutés suivant leur forme et teneur. »
Mais celle conclusion générale, oÙ les bord-igues et les eauœ des étangs
de Martigues étaient si bien distin!(uées et séparées, étaient suivies de con-
clusions d'application.
II concluait à ce qu'il plût à sa maj esté.
• 10 En conséquence, déclarer que LE S EAUX, bonligues et pécheries de
• la principauté, ne sont pas suj ettes à la vérification ordonnée par lesdits
" arrêts du Conseil de i 739 ;
« 20 Mainteni .. et ga rd er le suppliant dans la PROPRIÉTÉ incomlllutable DES
• RAUl, sol et terrain des ETANGS énoncés et limités datlS ledit arrêt du 9 avril
�-
avec juridiction et directe, cmllm8 faisant partie de la pri,lcipauté
« de Martigues . »
« 3 0 Ensemble (da ns la propri été incommutable) des BOURDIGUES, pécheries
• et d,'oits IItiles qu'il a coutume et est en droit d'y percevoir, notamment
" des bourd igues nommées du Roi, du Passage, d' Istres, et d'un huilième
« de cell e d' EDgassier, et da ns le droit de percevoir des possesseurs des
• sept bui lièmes de ces bourdigues et des autres inf~od ées les cens et rede" vances et tous les dl'o its utiles auxquels il s sont assujetti s;
« f 568 ,
~o
Maintenir pareillemellt les possessellrs desdites bourdigues et péchel'ies
" DHS LEon PROPRIETE , pour cnjo uir sous les charges port ées par leurs aveux ,
« et reconnaissances et déclara tio ns, ')
Impossible de mieux marquer la dist in cti on entre la prétenti on du marquis de Ga ll iffet. , sur la prop ri été des eaux des étangs, et celle des BOR..
107
106 -
DIGUES.
Ces deux obje ts formen t deux cbefs dis tincts de réclamation .
/1 les désigne aussi sous des noms différents.
Quand il pa rle des eaux de,; étang;, il dit quelquefoi s les eaux, comme
dans sa conclusion généra le , et da ns le primo de ses conclu sions détaillées;
d'autres fois les eaux, sol et ten'ain des étangs, comm e dans la suite de
ses conclusions,
Mais quand il parle des bordigues, il ne les désigne que par ce nom ou
celui de pêcberies,
que l' édit du mois de juio 1668 se ra exécuté se lon sa form e et teneur ;
• en conséquence le \IAINT ENIR PARE ILLE!lB NT DANS LA PROPRIÉTÉ I NCOII!lUTABLE DES• DITS OBJETS, ENSEMBLE DANS TOU S LES DROITS qui lui sont att l'ibués pa'r
• les titres. ..
Le '13 aoÛt 1780 , le Conseil-cl'Etat rendit, conformément à l'avis des commissaires nommés par l'arrêt de 1739 , et sur la défense du marquis de
Galliffet , développée dans un mémoire imprimé, du 20 mars 1780, uu nouvel arrêt inter/ocutoire, qui ne fit pas droit encore à la demande, au fo nd,
mais qui modifia notablementl'in.erlocutoire ordonné par l' arrêt du 23 ao(lt
1778 .
,IoLe nouvel arrêt supprim a l' enquête orùonnée par le premi er.
2° Au li eu de se born er à faire vérifier l'utilité ou les inconvénients des
bordigues, il voulut que le l'apport futur indiquât les mo yens de préveni'r el
cl'empécher ces inconvénients, s' il y en ava it
.
0
3 11 ordonna, non pas comm e le premier , la simple visit e des bordi gues
et pêcheries , mais encore celle des EAUX et étWlg Sde Martigues. .
I, b Enfin , Il supprima l'obligation , pour le marquis de Ga lliffet , de pl'o ~
céder à ses frai s à ce lle doubl e opération , charge qu e le premi er _arrêt lUI
imposait.
C'é tai t un premi er pas vcrs le succès,
Voici le t ~x t e de l' arrêt :
k
LE 1'0
:l. l , "T:OO:T ES so~ CO,"SE IL confo rmément à l'<.wis dcsdits sieurs co lt1 l l1i:;sai r~s! nya nl
·U
lelllent
é~0ral'd au\. l'cj)résolltatio ns dudit sieu r de GalliO'ct co nt re Icchl .arrê t du
;\lIC 1
. .\ mgltrois àoùt mil sept cont soixu nlc-dix- huil, il ordo nné et ordonne qu'avant ra ll'e drOIt, JI ~(' I'iI
par le sieur intendant el commissaire départi en la gé n érati~é ~1 ' Aj x, o~ P:lI: telle au~r~ rH'.r~
~O IHIC qui sera pal' lUI déll!guéc, procédé, en présence du tl!t slcur de lJa Il Jfl~l, el Je:s ~1~I~ e~
pro pri6tairc$ des boul'dig ucs ou eux du ~ment appclés, en,. pl."éscncc aussI de ,t~l o nH: ~(,"1
(\e l'amirauté du Ma rtig ues, ou trllcs autres perso nnes qu Il Jugera à propos cl ) a pl~e1U ,.
procédé à unc visite dcs eaux et étangs dudil I,ieu ~c M ~rtigu esl ~li n s i que des "1 ~? u J'{h ~u('s
.
l,;o nstrUltes
sur jC(j'Il c\\ang,.\' j'e"'el
Il' de \'econnaltre SI lesdites bounhgues sont nt1l:S lbles .1 la
lèche el si elles peuvent portel' (Jill'Igue préjudice ta nt au porI de Bouc qu'au canal pa l'
[loquelles
, eaux de la Iller entrent dans ledit. étang; "
.
d' " l
, de. jll'CIIldlq UCl, au Il ca~) c,s m~)e~l ~
venir Oll empècher ledit préjudicr ; et cn conséquence au torise Sa Majes te ledtt SI('ur Ill t"l1Il
11 était impor tant de bien fixer celle langue ùes conclu sion; , pour comprendre plu s tard la langue de l'a rrêt défioit if du 25 août 118,1, qui auraà
statuer sur ces chefs de revenùi ca tion.
Le marquis de Ga ll iffet, après ce système général et absolu , en présentait un second, qu i était moi nsllne formul e de conclu sions subsidiaires qu' un
aspect nouveau ùe la questio n de pl'opriété: il concluai t encore:
«
..
«
" A ce que, dans le cas où sa majesté trouve l'a it qu elqu e difD cullé à
considérer le supplian t comm e aya nt eu de tout temp s la pTopriété PATRIMON IALE desdi tes eaux, étangs, bourdigues et pi!cheries, et qu 'ils eusse nt
fait, en quelque portion , partie du ùomaine des comtes de Pro vencE' ,
.\ .
,
• •
�-
108 -
.b ,_nt .ou celui qui sera pAf lui commis de sc faire assister de lelles perso.,n
' ce connaissa
, nt
'
es a
'lu al Jugera à propos de nommer, comme aussi de recevoir leurs dires el observations . ,
, amSI
. d G Il'''
.'lue ceIl es du Slcur e a lUel Cl aUires propri élaires desdiLes bourdigues ' don 1 et dli tou 1
II dressera procès-verbal ; pOUl' icelui envoyé au Conseil avec son a.vis el ~ommuni ué au
procureur
génél'al
de •Sa Majeslé . el auxdits
commissaires ' èlre par Sa St'l'«J'eslé or donn
q é ce
,.
.
,. '
qu . " apparLlendra.
Fau au Consml d ElaL du Roi ' Sa• MaJ'esl'
' 1'u 111 • le·1l li a
' Ve r~:H'IIes le
•
.
~
t' .y lO
LrelZe aouL m" sepL cenl quatre-vingl.
bordigues : du Passage , d'Istres ,
d'Engassier,
109 DU BOl,
et dans le huitième de celle
3° Il le renvoya à se pourvoir , ainsi qu' il appartiendra, pour la propriété deseaux.
4-0 Il mai ntint également les propriétaires des autres bordigues dans la
propriété d'icelles,
50 Enfin, il ordonna, pour la longueur , largeur et profondeur des ca-
Remarquons en passant que l'arrêt du t 3 avril 1780 contiuue à séparer,
comme l'avaien t fait les conclusions Galliffet , les eaux et étangs de Marligues
des bordIgues; et que la langue de l'arrêt est encore celle du marquis de Gal·
liffel, puisque les étangs y sont désignés par ces mots : visite des caux et
étangs dudit lieu de Martigues.
En exécution de l'arrêt du 13 avril 1780, la VISite ordonnée s'exécute
par l'intendant de .Ia province, Un plan est levé, L'é tang de Caronte, le port
ùe Bouc, les bordigues y figurent. Des mémoires sonl produilS par M, de
Galliffet, par les propriétaires des autres bordigues , par les pêcheurs de l'art
menu, le corps des capitaines de vaisseaux marchands, les syndics des constructeurs de navires, les consuls de Martigues et les députés des vi lles de
Berre et de Saint-Chamas; en un mot tout est dit, révélé, indiqué, dans cette
opération solennelle.
Un rapport du tout est dressé, le .\. décembre. 780 , el renvoyé au Consei l-d' Etat, pour y servir de base à l'arrêt attendu.
L'affaire ainsi instruite , le Conseil-d'Etat rendit , le 25 aoOI 1781 , sa décision définitive, en l'éla~ , d' une demande en intervention de la part de!
maires et r.onsu ls du Martigues, qui avaient réclamé le droit d' iutervenir
dans r instance engagée au Conseil , entre l'Etat et le marquis cie Ga ll iffel sur
la vérification des titres,
'
L'arrêt 1° repoussa, comme non-recevabl~, l'intervention des maires et
consuls du Martigues.
2° Il déclara maintenir le marquis de Gailillet dans la propriété des trois
naux des bordigues, des mesures diverses longuement énumérées,
Cet arrêt fut le triomphe complet du systême ùe M, de Galliffet; la demaude en vérifica lion des titres des bordigues n'avait abouti qu'à les déclarer des titres de PROPRIÉTÉ , à l'abri de toute critique et dignes de tous
les respects.
Il renvoya M. de Gall iffet à se pourvoir ailleurs que devant le bureau des
droits ma riti mes pour la propriété des eaux et étangs; mais cette question,
distincte de la première, laissa it à celle-ci toute sa portée et toute son
autorité.
Voici son texte.
LB ROI t=:TANT EN SON CONSE IL, faisa nt droit SUI' l'interlocutoire ordon né pal' l'arrêt de
sondit. conseil du 13 août 1180, sans s'arrêter à la demande des maire e l échevins, consuls
et communauLé des Martigues, aux Ons d'être reçus parties inlervenantcs, da ns laquelle Sa
Majeslé tes a déclarés non-recevables, a gardé et mainlenu , garde ct maintienlledil sieur
de Gallin'et dans la propriété des Irois bourdigues appelées du Passoge , d'lsLres, du Roi, el
dans un huitième de celle d'Engassier, sauf audit de Galliffet à se pourvoir ainsi qu'il
appaniendra, quan l " la propriélé des caux ; maintient pareillement Sa Majesté les propriétaires des aUIl'es bOUl'digues siluécs proche la ville des Mor'iigues CI du pori de Bouc,
n'ails la propriéLé d'icelles, à la charge néanmoins, 'l oq ue le ca nal de sor lie de la bourdigue
du passage sera prolongé, à partir de la cabane du passage, de cent toises,
:lUX
fmis des
propriétaires de ladite hOUl'digue, lesquels, ainsi que les propriélaircs de Goulesesquc ct dr
Na.viron , ne pourront prolonger la longueur des sèdes 3cluellcmcnl ex istantes du côte dudit
port de Bouc; el il ycrrel de constaler ladite longueur, ordonne Sa Majesté qu'il sera posé
des termes ou bornes donL sel'" dressé procès-verbal, et qu'expédition d'icelui sera remise
aux ojliciers municipaux de Marligues, à la charge, ~o que les propriél"ircs dr la hourdigue
�-
11 0 -
-
dc t\"a\' iron, ainsi que celle du sieur Couture, seront tenus de laisser à J'avenir des passagc:i
libres pour les pelils bàlimens plais, ap pellés bêles, lesquels passages ne seronl fermés que
par des "'1poulières; que les sildes el lambres des bourdigues , lanl de Bouc que de Marligues, prolongérs dans l'étang de Caroule, seront , en exécution des allcions réglcmen::; ,
l'Pll'tl nchées , aux [rais des propriétaires desdites bourdigues; 4.° que l'ancienne lal'geul' de~
("anau). du Passage, du Pouletet de ,'151e sol'3 rétablie aux frats des propriétaires, conformément
ct l'a\is de5 experts qui seront nommés à cel cfrct, dont sera dressé IH'ocès· vel'bal ; comme
"u>si que lesdils canaux du Ponlel el de l'Isle seronl creusés à la profondeur de cinq pied,
,Ians leur cenlre, de qualre pieds il deux loises de dislance de chaque côlé dudil poinl , el
t!C'-là, en ~lYa n ça n l vers les bords de trois, deux et un pied successivement ; ordonne Sa
.\l ajesté que la communauté de Martigues ser;) lenue de supporter les frais du Irava il néces+
.slire à cet effet, jusques el à concurrence de cc qui se tl'ouvera exceder la profondeur prcs+
l' Ii le par les anciens réglemcns, e l que le surplus desdils fl'ais sera il 1:1 charge des propl'iéI,-lires dcsdil.s canaux; ct en cl'qui concerne le ca nal de na\ igation do ~Jarl ig ues, à la sortie
du ponl- Ievis, ainsi que celui du passage de l'élang de Caronle, au
p Ori
de Bouc, ordon ne
Sa :\lajeslé qu'il sera don né a u ~d i t s deux. cana ux unf' profondeur de ci nq ~\ six pieds da ns
le centre, de cinq pieds à deux toises de chaq ue côté de ce point , ct de quatre, trois, deux.
.1
un pied progressivemenl ,
Cil aYa ll ~a n l
rers les bords; laq uelle profo ndeu!' sera égalemenl
observée dans les canau\ des Lambres, ainsi (lue dans le canal qui répond au chantier de
constTuction de Ferrières; el sero nt tenues les communautés de Martigues, Sai nl-Chamas,
Derre el autres communautés situées :iUI' l'étang de Berre, de contribuer enlr'elles aux frai s
c l dépenses à fai re, pour don ner auxdiiS deux canaux la profondeur prescrite ci- dessus,
au-delà de celle exigée par les allciens réglemens; co mme aussi de contribuer il J'aq'lIir
pour un quart à la dépense du CUl'emf' 11 1. Fail défenses Sa, Majesté au x ca pita ines rfP..,
/(u'lanes et autre" bdtimPllS de s'm'l'êter dans les ca'1G'uJ' d es bou:'I'd igu cs .. et p OUl' J'c:\é+
cution du pr~sen t arrèt, a comm is ct commet le sieu r intendant el commissaire dépa rti (' IJ
Pronnce, auquel Sa Majesté attribue lou tes cour, jurisdiction ct pouvoir, à l'ellet de nOIllIller telle personne qu'il jugera à propos, pOUl' yciller aux oU\Tagcs, fai re placer les bornes,
dresser procèg-yerbal dudil placemenl, el faire les all ires opéralions ci-dessus ordonnées;
nlLl'ibuant pareillement audit sieur intendant tout pouvoir pour adjuger lesdits ouvrages,
urrêler les corn pies de la dépense à laquelle ils auronl donn é lieu, fix er el réparlir ellll'e
lesdileS commu nalllés les sommes pour lesquelles elles doivelll y conlribuer, cl rendre exét:uloires contre I,..s habi tants d'icelles, les roles qui seronl al'I't.\ tés, sauf, après le para chèyement desdits ounagcs, à veiller pal' les maire et échevins de la ville de Martigues à l'entrc+
tien d'iceux, conformémenl aux anciens réglemcns, et sauf aussi pOUl' l'avenir Ics droits de
jUlisdiclion qui peuyenl apparlenir aux offi ciers de l'amiraulé sur les eaux el élangs donl il
,'agit. Ordonne Sa MajeSlé que le plan leYé en exéculion de ses ordres , desdiles eaux , élang
111 -
cl bourdigues, sera déposé au secl' tnrial de l'intendance d' Ai ~ , après neun moins qu'il aul':
"
ra l'hé par le sccrélaire d'Éla l du dépflrlement de la manne; ordonne en oulre que le
é
1 t counr 1.,
ele pa
procès-verbaux ci+dcssus ordonnés y seront pa l'ci ll c~ e nl d ~ pos ~' pour ~ u ou re.
,~ '
cas échéanl. Fail au Conseil d'É,"I , Sa Majeslé y Clant , lenu a Vers3llies , le Vlll gt-',IIl ~
août mil sepl cenl quat.rc-vingt- un ,
Sig n.é
t A C n0 1X DE CASTRI HS .
Ces fait, rappelés , il sera facile mainlenant de prouver que J'arrêt du 25
de l' hoiri e de Galliffet , J' aul onlé de la chose JUa oOt 1781 a , en 'a,'eur
"
gée conlre l' Elat , pour la qu estion parti culière de la pro priélé de la Bordi "'ue el du ca nal du Hoi.
d 1
~o\ un premi er point ùe vue , il est impossible de n' être pas frappé e a
. ,
conséqu ence générale qui en résulte.
Cet arrêt fut, à celte é poq ue, J' équi valent de ce qU,1 ':Ient de se pasd' Elat en 1856 pour les titres de 1hOll'le de Galhffet.
ser devant 1e C,onsel'1,
. " Is
Alors, comme auj ourd' h ui,'.ùn vérifia les tHl'es, Alol's, ce ~n t pour ~:::;o~e
' 1 ' ent de vra is ti tres de propr iété tIlcommutable, AUJouid bU I , ça
d '
,.
' ét ' l e des actes a mle al
'
po ur savoir s' ils avaient ce caractère , ou 5 Ils 0 alen qu
ê
énislra tifs, Aux deux é poqu es , le Con seil-d' Eta l ~ donn é I~~b:ir:esd : ~a~
ses. La question doil dooc à jamais êlre réso ~ e pour,
lus d'empire
liffel , autremenl il faudrait di re qu e la chose Jugée n a p
parmi nOli s.
chacune des d ispositi ons de l'arrêt
Nous aj outons maintenant que de
pou r le canal et la bordigue du
ressort J'autori té de la chose jugée ,
Roi
~t
«
d' abord commenl en d ouler, eo , présence
d
e ce
d' silif ' « a gardé
ISpO
. PROPRIETE
et mainte'lu , gal'de et maintient ledIt Steu.,- de Galliffet
OANS I.A
des u'ois bourdigues.
dé " C C'est la propriété
'é '
cr Ces termes sont CSll s,
Il n' es t pa s possible d qUlV OqU ,
l '
de la demande.
d I x lermes des conc USIOns
,
; ,
ensemble des
q ui y est reconnu e. Ils répon e n au,
. d' êl " ardé dans la PROPRIETE. ""
M. de Ga lli ffet demaod all
re 0'
1'1
qu' il avait produils el qu' il
• l ' Ils répond ent au x 1 res
'
bordigues et pc'; LCrtes .
. ,
'
.ale Ils sont uo débouprése nlait comme des titres de propnéle patnmoOl '
«
�112 tement des prétentions du domaine , qui depuis t 739 ava it nié celte pro priété,lIs condamnent donc toute néga tion de cette propriété aujourd'hui,
Oiraitc-on que celle propriété n'est qu'un usage , quelque chose de précaire, de révocahle, de momentané? mais ici les mots seuls condamneraiellt
la prétention , Jamais l'usager , le détenteur ré vocable n'a été qualifié de
propriétait'c: jamais du moins on n'a dit qu'il avai t la PROPRIETE de la chose, II
faut changer la langue ou admettre nos raisonnements, Et cela surtout peut-il
se supposer dans l'arrêt de 1781 , qui termine l'instance en vérification des
titres? S'il n' y avait eu qu'usage , que possession précaire , c'était le cas
de l'application des arrêts de t 739; le marquis de Ga lliffet aurai t subi la .uppression ou laréulliollau domaine, Le procès n'existai t que pour cela, L'arrêt du 26 octobre t 739 le disait nommément. Les commissa ires nommés
l'avaient été pour cet ohjet.
-
gues proprement dites ; ell e
!.Jles et indivisibles.
~ ' étend
113encore aux canauaJ qui cn so nt insépara-
Cela résulte de plusieurs côtés de l'arrêt et de plusieurs de ses dispoiitions.
O'abord, en padant des ob liga tions imposées pour l'agra ndissement de
ces canaux. comme pOUl' leur plus grande profond eur, l'arrêt distribue le
poids de celle charge. Il met ou laisse sur la tête des possesseurs des bordigues ce que les anciens règlements leur imposaient, et ce qu'il y a de nouvea u , il le fait supporter, soit à la comm un e de Martigues, soi t aux communes environnant l' étang de Berre.
Mais quelle qualification donue-l-il à ces possesseurs? il les appelle LES
PROPRIÉTAIRES DES DITS CANAUX. Voici le texte : "et le surplus de.dits frais ,
se ra à la charge des PROPRIETAIRES DESDITS CANAUX .
(1
Tout ce qui vient d'être dit , pal' rapport au dispositif cOllce rnant le marquis de Galliffet. il fautle répéter pour les autres propriétaires de bordigues,
Encore aussi l'an'êt les maintient dans la PROPRIETE d'icelles,
Or , comme ceux-ci ne tenaient leurs droits que des ventes ou des bau x
empbythéotiques , que les auteurs de Ga llilJet leur avaient consen tis . il ya
ici un nouvel argument à opposer au domaine, Le droit de propriété reconnu
prend là son véritable caractère, Si les auteurs de ces baux n'avaient p~ s
eu le droit vrai et absolu de propri été , ils n'auraient pas pli vendre, céder ,
aliéner ces bordigues, A l'Etat seul ce droit aurait appartenu. Le possesseur
n!vocablc d' une propriété ne peut la vendre. Et à leur tour, les détenteurs
n'auraient pas acq 'lis la propriété de ce que le non propriétaire leur aurait
transporté,
Si donc les déten teurs sont reconnus propriétaires et avoir un droit de
propriété, c'est qu'il leur a été transmis; c' es t que celui qui l'a transmis
l'avait "li-mêm e, et qu ' en vend ant , il n'a fait que retirer de son droit de
propriété ce qu' il pouvait obtenir,
Mais cette propriété, d'après l'arrêt de t 78 1, ne se borne pas aux bordi-
Impossib le donc de so utenir que les canaux ne sont pas, comme les bordigues, leur propriété, L'arrêt étentl la qualifica tion et le droit à l'une et
~ l' autre chose, parce que la bord igue sa ns canal n'est rien , et que
c'est la réunion de l'appareil de pêcbe et du cana l qui constitue la
bordigue.
.
Il prononce encore dans le même ordre d'id ées , quand , dans sa dISpositi on finale , il défend " aux capita ines des tartanes et autres bâtlment~, de
" s'arrêtel' da ns lescallauaJ des bordigues. " Pourquoi dire callauaJdes bord'gues,
sïls ne so nt pas une dépendance inséparab le de la bordigue? Si les deux
chosps ne sont pas unies ?
La même vérité ressort encore d'une disposition de l'arrêt, celle d'après
laqu ell e" les sëcles et lambres des bourdigues tant de Bouc que de Martlg,ues,
" prolongées dans l' étang de Caron te , seront , en exéwtwn des anc,en. reg/eu mellts , retranchés aux frais des propriétai res desd ltes bord Igues. »
Ce retour aux anciens 1'ègleme/lts est déciSIf.
D'après eux les canaux avaient I ~urs limites et leurs termes placés sur
les li eux . L' arrêt de règlement du 9 av ril 1568 , parle. ( p. 8 et 9) des
canaux et termes des bordigues.
Le plan cadast rai indique ces termes. Le plan levé en t 780, par M. de
�-
114 -
-
Plev ile, d'autorité de l'arrêl du 13 aoûl 1780 , montre aussi ces uorlles el
limites, Une longu e procéd ure faite le 7 janvier 1626 , par M. de Paule ,
conseiller au Parlement de Provence, les fixe aussi
C'est à ces règlements, que l'arrêt de ',781 ra mène les parties. Le marquis de Galliffet l'avait dema nd é expressémen t en ces term es: « que l'Mrêt
« de règlemeot de la cbambre des comp tes de Provence , du 9 avril 1568,
• 1516, ~ 526, 1675 et autres, fussent exécu tés su ivant leur forme et leneur.))
C'est dans ces limiles qu'i l déclare le droit de propri été. Donc, la bordigue
n'est pas, d'a près l'arrêt, le point seu l où est établi l'appareil de pêche ;
mais c'est cela , plus le ca nal dans et avec ses limitrs et ses termes.
Les sèdes et les lambres sont les rebords du ca nal rJ' une bordigue, Les sèdes
en sont la partie saillante el ex térieure non recouv erte pnr les ea ux. Les Lambres en sont la partie sous-marine et recouverte pao- les ea ux.
C' est à l'extrémité de ces sèdes et de ces lambres que sont les limites des
bordigues.
Donc l'arrêt de 178 1 , en ordonnant que l'excédant de ces sèdes et lambres
sera coupé et réd uit , confirme la pl'opri~t é de ce qui ne doit être ni co upé,
ni réduit. La décision a donc porté sur le ca nal de la bordigue du Roi , comme
su r la bordigue elle-même,
Nous ajouto ns. enfin, que l'arrêt a déciao'é et adjugé aussi, par là même,
la propriété des eaUID con tenues dans les cana ux. Celles~ci, com me les canaux , sont unl' partie inséparable et indivisible de la bordigue; et si on ne
peut concevoir celle-ci sans un canal , on ue peut co ncevoir les deux prem,ères choses sa ns des eaux . au sein desquelles elles so nt établies,
Vainement, pour le nier, dirait-on que l'arrêt du 2~ ao ût 1781 a renvoyé
le marquis de Galliffet à se pourvoir, ainsi qu'il ap par tiendra , pour .la propriété des ea ux , en disant :
• Saur audit de Galliffet à se pourvoir , ainsi qu'il appartiendra, quallt il
• la propriélé des EAUX; • et qu' il n'a pas ainsi adjugé les ea ux occupées par
le. bordigues,
Peu de mots sur6raieot pour dissiper l'équi\'oque,
115 -
Pour savoir ce qu 'a voulu dire l' arrêt , il raut voir ce que la partie demanderesse , le marquis de Galliffet, avait désigné par ce mot les eaux. L'arrêt
aura répondu en parlant la même langu e que lui.
Or, il "ésult e des conclusions prises lors de l' arrêt du 13 août 1780, que le
marqui s de GaliilTet , revendiquait la propri été, Iodes eaux, sol et terrains des étangs énoncés et limités dans ledit arrét du 9 avril 1568 , a'uec jul'idictioll et dù'ecte , comme (aisant partie de la principauté de Mal'tigues.
Qu'ensuite et 2" il revendiquait la propriété des bordigues , pécheries et droits
utiles .. " et cœtltra.
Que ces deux chefs de demande étaient distincts et uon confondus, soil par
leur nature, soit par leur objet, soit p~r leurs nom s.
Il résult e encore de ces conclusions que le marquis de Galliffet avait désigné les étangs revendiqués par ce mot uniqu e et isolé: LES EAUX.
Cela sc voit dan s celle partie de ses conclusions où il demande l' exécution
des arrêts de règlements de '\ 568 et autres" concernant, dit-il , lesdites bo)'l)
" digues et EAUX .
Là le mot EAUX est pris pour les étangs,
Cela se voit encore dans cette partie des conclusio ns où il demande qu' il
plaise à sa maj esté" déc/aI'el' en conséquence que les EAUX. bordigu es et pécbe" ries ne so nt p3S suj ettes à la vérification ordonnée, Il
Là le mot eallCD, désigne encore les étangs , par opposition au mot
bordigue.
Dès-lors , lo,'sque l' arrêt du 25 aot1t -178 '\ a dit : sa ur à se pourvoir,
quand à la propriété ùes EAUX, c' est comme s'i l avait dit : quand à la propriété
des étangs.
L'arrêt a suivi la locution abrégée de la requête et des conclu sions GallilTet. Dans sa bouche, l' ex p,'ession n'a pas changé de nature, Elle a la
même signification .
Tout cela est l'Igoureusement vrai, et par suite ne peut être sérieusement contesté.
Au surplus , l'arrêt du ·13 aoM '\ 780, avait déja lui-mémeemprunté celte
�-
116 -
formule,eL on voit qu'il avait parfaitement appliqué ce mot aux étangs et
non aux bordigues,
Il avait ordonné qu'i l serait procédé : « à ullev'isite des IAVX et éta ng dudit
" lieu de Martigues, ainsi q'Je des bou/·digues . .. . »
L'arrêt de t 781 , en renvoyant à se pourvoir pour les EAUX des étangs,
n'a donc rien réservé pour les eaux des bordigues. Il n'a pas mêlé les chefs
de demande. Il a adjugé en entier l'un des deux et a renvoyé pour l'autre,
La conséquence est irrésistible.
En voici une nouvelle preuve , emprun tée aux faits qui ont suivi ce renvoi
quant à la propriété des eaux.
En " 790, ceLte question de la propriété des eaucv , a été engagée devant
le Consei l-d'Elat : et tout à l'heure nous nous occuperons de la décision qui
y est intervenue. Mais ce qu'il faut noter et rema rquer pOU l' le moment présent, c'est qu'il était reconnu, par toutes les parties , que le renvoi n'avait
eu lieu que pour la propriété des eaux nOIl occupées par les bordigues. Cela,
était dit en termes formels dans le mémoire produit dans l'intérêt des marquis
et comte de Galliffet, de '1788 , intitulé Briève analyse, p, 4- et 5 , en ces
termes :
• La seconde question est de savoir si les sieurs de Galliffet sont pro• priétaires des étangs enclavés dans leur principauté, et un nombre infini
• de titres se réunissent en leur faveur .
u Celle question n'a été élevée que par le sieur da Galliffet. Ce qui y a
• douné lieu. c'est un arrêt du Conseil des dépêches , qui les a déclar és,
• et leurs vassa ux, propriétaires de toutes les borù igues qui sont dans ces
« élangs, parce que le bureau des v~rifica ti ons des droits maritimes était
« incompétent, et les a ,'envoyés à se pourvoir pour la prop1'iété DES BAUX NON
u OCCUPEES PAR LES BORDIGUES.
-
.
li
Si donc la question en 1790 était ainsi posée, c'est une pl'euve évidente
qu'en 178,' la propriété des eal/œ occI/pées pm' les bordigues avait été tranchée.
117-
On achèvera de se convaincre de celle vérité, quand on verra, tout à
l'heure, que l'instance de 1790 n'a plus porté que sur la propriété des
éta ngs:
Que les mémoires produits n' ont plus eu que celle qualification , le premier:
Mémoire pour prouver la propriété, en (aveur des princes du Martigues, des
étangs enclavés dans leur principauté;
Le second: Mémoi,'e sur la juridiction des étangs dl! Martigues ;
Que la décision in tervenue ne s'est plus occupée de cette prétendue réserve des eaux des bordigues et a résolu exclu sivement celle de la proprié té ,l es étangs .
Enfin, une dernière preuve peut encore ici être apportée; c'est celle que
nous fournit l' arrêt du 25 août 1781, dans la disposition qui concerne les particuli ers, propriétaires des bordigues, reçues par bail emphy théotique, et à
eux venues des auteurs du marquis de Galliffet..
Ceux-ci sont maintenus aussi et ga rdés dans la propriéte d'icelles; mais
sans aucu ne réserve, et sans aucun renvoi pour la propriété des eaux,
L'a rrêt qui a mentionné celui-ci pour le marquis de Galliffet ne le répète
pas, et ne le rend pas commun aux autres.
,
Cette différence est d'autant plus sai llante, que les termes de 1arrêt, par rapport au maintien dans la propriété, sont pareils, L'arrêt dit,
en effel :
« Maiutient pareillement , sa majesté , les propriétaires des autres bour• digues situées proche la ville de Martigues et du port de Bouc, dans
• la p"opriélé d'icelles:
Et la seule charge qui leur est imposée, est celle relati ve au prolongement ,
ou à la réd uction des sèdès et au creusemen t des canaux.
' 1 charge néanmoins,
L' arrêt ajoute en effet simplement ces mo t s : " a a
,
•
., 0 que le canal de sortie, .... et cœtera.
»
Pour ceux-ci, donc, l' att ribu lion ou la reconnaissance de propriété, aurait été complète. La propriété des eaux , ainsi que celle des canaux et
�-
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118 -
des bord igues , aurait été reconnu e; l'arrêt la leur aurait accord ée; et pour
le marq uis de Galliffet, il en aurait été autrement.
Mais celte anomali e et celle différence ne soot pas adm issi bles. Rien ne
l'explique. Rien ne l' aurait motivée en -1781. Les détenteurs de bordigues
n'étaient que les cessionnai res des auteurs du marquis de Ga lli ffet. Ils ne
pouva ient avoir plus de droits que lu i, La différence, dans la chose jugée,
à l' encon tre des uns et des autres, vient don c d' une autre cause . Ell e vient
précisément de ce que M. de Galliffet avait form é deux denJ3ndes distinctes : celle de la reconnaissance de son droit de propriété sur les eauro, c'es tà-di re les étangs du Martigues , ce lle de son droit de propri été sur les bordigues du Passage, d' Istres et du Roi: de ce qu' on lui adjuge la dernière, comme aux propriétaires preneurs empb ythéotiques , et qu' on lui
refuse la première,
Donc, il faut conclure que quant à la propriété des bordigues, la posilio o des parti es a été égale; et que de même qu e les particu li ers ont tO ll t
obtenu : bordigue, canal et eauro occupées par les bordigues : le marqu is de
Ga lliffet a tout obtenu aussi sur le chef de leur demande qui ptai t semblable
et de même nature:
Devan t le Conseil-d' Elat de 1856 , on avait prétendu le conlrai re. On
a va it dit que cette propriété , recon nue et déclarée par l'arrêt de 1781 :
était pourtan t une prop riété RÉVùCABLE; que r autorité publique avaIt , a
son égard un d,'oit de RÉVùCATION qu'il lui appartenait d'ea;ercer, nem dans
un but fis cal , et pot/!' réserver au trésor de /' Etat les {ruits de l' exploltatton ,
mais dans un bllt d'utilité publique .. .. , »
« Que la qua lification de propriétaire de bourdi gues n'a pas une autre por« tée ( p. 20 , mém. imprimé des in lervenants ). •
. ' . ?
Eh bien! ne répond le Conseil-d'Elat ? Fait-il celle absurde dlshncllOn .
Parle- t-i l de qrévocali on ? Annonce-t-I'1 un genre de Propriélé amomdn , dlfférent de la propriélé ordinaire?
.
.
.
N Il
t · et en prése nce de la consullalion Valtmesml qUI , p. 39 ,
1 u emen "
M de Ga lliffet et consorts y
disai l en pa d ant de 1arrêt de 178 1 , que .
C
ï d'Elat
. 't élé déclarés propri étaires dans le sem le plus large, le onsel 'é é ' l
la scinde pas ne
ava len .
't
e cel arrêt a pa rlé de la propn t ; 1 oe
'
1
donc telle qu' on l' a toureconnal qu
la d··
IVlse et Il e l'amoindrit pa·.. Il la proc ame
jours conçue et adm ise.
, té d
J
' mpossible toule tentativ e nouvelle a ce gar .
Repoussons onc comme 1 ê d 178\ et par celui de 1856 est la proLa propriété atlribu ée par l' arr t e
p1'Îété pleine, le domi/liwn , en un mo t.
Tout ce qu' on vient de voir déco uler de l'arrêt du 25 août 1781 , pa rait
encore plus vrai et plus décisif , quand on rapproche de ce t arrêt l'interprétation que lu i a donnée le Conseil- d'Etat le 24 juillet 18 56.
onde réponse donnée par le Conseil-d' Etat : l'arMaintenant , par la sec
é t d
condamné
la
pr
ten Ion u
'
l
en
!llus
évidemment
encore
rêt de 1856 a b
Nous nou s référons aux termes qui en ont été rapportés , par nou s ,
plus haut.
dO;:,~~:st à peser
Il en résulte qu e le Consei l-d'Etat , en '1856 , a pensé : que l'arrêt de
178'1, 10 avait eu pour but et pou.,. effèt de I"CconnaÎtl"C que le si eur de
Ga lliffet était PROPRIÉUIIlE :
0
2 Et propriétaire de f établissement de pêche appelé bordigue du Roi.
Ces deux solu tions sont décisi ves. Et d'abord , quant à la qua lité de
propriétaire, il n' est plus possible de dire que ce n' est pas le droit de propriété ordina ire qui est reconnu.
J ans ces mots si COl1\'ts et pourtant si substantiels : pro.
, .
E PÈCIIE appelé bordigue du RoI.
priétatre de LETABLISSEMENT D.
. d'é bl'
ment de pêcbe. Pourq uoi?
d'
l' êt ajoute celUI
ta Isse
Au mo t bol' Igue , arr é
n 178 1 l' arrêt avait attribué tout ce qll i était
parce que , dans sa pens e , e
nécessaire à cet établisse ment.
par l'appa reil de pêche : puis le sol
Le mot em porte donc le sol occupé
puis les eaux contenues dans tout
enfermé dans les sèdes et les lambres :
cet espace.
�-
-
120-
Tout cela est nécessaire pour con.tituer l'établisscmcnt de p~che, Enlevez
l'une de ces choses, et l'établissement n'existe plus. En effet , sa ns le sol,
où reposera l'appareil, où le poser? Sans un canal resserré et co nt enu par
des rebord. ou des SÈDES, co mment le poisson se prendra-t-il ? Sans les
eaUID , comment l'appareil pourra-t-il fonctionner : le poisson venir et les
sèdes servir?
Dans l'impuissance d'attaquer celte interprétation , si claire, faite pal'
le Conseil-ù' Eta t , dans son arrêt du 24- j uill et 1856, s'a tta cberait-'On à faire
remarquer que la formu le dans laquell e il l' a donnée est néga tive, en disant : «n'a eu poul' but et pour effet que de l'econnaitre,., ,» Au li eu de dire a
eu poUl' but et penil' effet de reconnaitre,
Celle observation aura it de la puérilité. Ell e sera it sa ns port ée, pui,qu e la
pensée du Co nseil n'en es t pas moins claire et précisE',
Mai s au su rplus, on co mprend pourquoi I ~ Consei l, dans la rédaction de
son arrêt , s'est ainsi ex pliqué, Le rédacleur a fai t par là allu sion à l' élendu e
immense des demandes co ntenuesda ns les co nclu sions du marqu is de Galliffet
en 1780, en ce qui concernait la propriété des étangs de Martigues. C'es t
par opposition à celle étendue de la demande princi pale, qu' il a pu dire
et qu' il a dit avec raison. que l'a rrêtll'a eu pour but et pour efTet que de
le reconnaltre propriétaire de l' établissement de pêche; le reste de sa demand e
n'ayant pas été admis.
Celle explication nous parait suffisante et décisive.
III La troisième décision judiciaire, ayant l'autorité de la chose jugée, pal'
rapport au canal et à la bordigue du Roi, es t dans l'arrêt du Canseil-d'Etat
du 21 décembre 1790 .
Voici les circonstances dans lesquelles il fuI rendu ,
Peudant que le marquis de Galliffet soutenai t , au Conseil-d'Etat, dans
J'instance en vérification de ses titres, qu' il était propriétaire des eaux et
121 -
étangs de Martigues, il exerçait . SUI' ces cauro , au Marli gues ct dans sa
principauté, les droit s qlle lui donnait cell e propl iélé.
.
'
Il en avait et il en co nservait la possession , C'était juste : c' étattloglqu e.
Des abus co nsidérabl ps se commettai ent dans la pêche sur les étangs.
Ces abus étaient la viu lation d' une foul e d'arrêts et des règlemenls, notamment
de celui du 9 av ril 1568,
Le marqui s et le co mt e de Ga liifTet , en qualité de propriétaires des eœu~
des étan gs, en demandèrent , par requ ête, la suppresSIOn au Parlemcn
de Pro\'ence.
Il s y joig nirent un système en tiel' de répression SUl' la form e des fil ets.
. ce qu ' on a dé'à
Leur requ ête doit être co nnu e. Elle met en rehef
J vu ,su r
. 'fi ca lion qu'ils donnalenl
la queslion de la propl'iélé des eal/ID, et sur 1a slgm
. .
êt
d
Parlement
du
'
1
5
Janvier
,
à ce mol. Elle est lout e entière Ùans l arr
u
,
1780 , qui la suivit.
S ur la requ ête, dit l' ar rtlt, présrn lée de la part de, ., ...
el
cOlltenant ?ule
aa
• taules les ealla! et" étangs de Martigues,
ointe de Valla ne , au-des,us d'Auguette et Mollenès, ( vers la tour du port
P
U
E LEon APPAR.
de Bouc ) JUSQU'AU FOND DE L' ÉTANG DE IIIARTIGUES OU DE DERR ,
•
,
d'
A
les
les
selcorn nIe représentant les ancie ns archevêques b r cl, arrêts
TIENNENT
suit le détail des a us et es
• o"neurs de Berre et. de Fos, , .. , . » Ici
.
qui les proscrivent. Puis la requête con tilln e :
"
'lé de la Cour pour
,. leur
· t . t recours al aulon
« 1\ importe que les su pp 1lan s alen
'èo l
en ce qui concerne les EAUX qut
" rnppeler les pêcheurs aux 1 0 es ,
cl 9
'i l ,\ 568
.
es aV I
,
u appm'ttellnent
, et les 0 bl 1'"0 er .'a se conformer aux , arrêts
.
.. 23 juin 16 \ 6 et 9 mal's 167 5.... (suivent les de\Htls ).
l '
qu' il
S . f à M le Procureur-Général ci e prend re telles conc USions d
"au
'.
..
t ublic à l' efTet d'em pêcher l' usage es
• croira nécessat res , pour 1mtérê p
"d
l "rande ruer ct 1I0l\S DES
« filets dits Trabacco , pour la pêche qui se faIt ans a 0
'
DE LA "ft1ER
DEPUI S L ENT REE
,
«(
(f
l
1
u
EAUX DES SUPPLIANTS.
"
_
.
C'est , on le voit , ( pour le dire en passa nt ) la même signification q
donnions plus haut au mot eallX,
ue oous
�-
122-
Sur celle requête , le t 5 janvier 1780 , le Parlement de Prov ence
rend it son arrêt.
L'arrêt reçut son entière exécution . Le magistral commis procéda à la
grande vérifica tion des fil ets; et on peul lire au dossier le volumineux procès-verbal qui en fnt dressé. ( II n'a pas moins de 158 pages d"impression ).
I! fut comm encé le 19 août 1780, et terminé le 7 mai 1781 .
Le grand intérêt de la non dépopulation des étangs fnt donc ainsi
satisfait.
de la propriété DES EAUX , non jugée par l'arrêt du 25 aOIH 1781 , et qui avait
5ervi de fondement anx déci sions du Parlement de Provence.
Deux genres d'adversa ires se levèrent, pour demander, au Conseil-dEtat,
la cassation des arrêts du Parl ement d' Aix, des 15 janvier , 23 février, 30
mai et2,t juillet 1780. Tous les deux , ils soulevèrent contre les marquis et
comte de Galliffet, la qu estion de la propriété des EAUX,
Ce furent, d' un part , les maire et consul de Martigues; les maire et consul
de Berre et de Saint-Chamas, et les corps des patrons pêcheurs de Mar-
Comme conséquences de ce premier arrêt, deux autres furent rendus par
le même Parlement , et toujours sur la demande ou sur rappel des marqui5
et comte de Galliffet ;
Le premier, le 23 février 1780 , qui condamna François Rippert, pour
contravention au règlem ent du 9 avri l 1568 , pour avoir pêché la nuit au
flambeau dans l'étang de Caronte. et à l'amende de 200 fr. à leur profit. .
Le second, le 2 \ juillet 1780, qui repoussa la prétention des pêcheurs.
de pouvoir pêcher en temps de mortalité de poisson " appelé la mar/égale ,
avec toute espèce de fil ets, malgré le texte du règlement de 1568 , qui , même
pour ce cas , avait tracé les espèces de filets à employer.
tigues:
Ce furent , d'autre part. le sieur Coulet, procurenr du roi près le siége
de l'amirauté de Martigues, et M, de Penthièvre, amiral de France,
Les -premiers se pourvurent en cassation dans leur intérêt propre et
personnel.
Les seconds, dans l'intérêt public. en se prévalant des dispositions de l'ordonnance de la marine de 1681, concernant la pêcbe,
Les premi ers conclua ient: ( p, 2 de l'arrêt imprimé J,
10 Les maires de Martigues et de St-Chamas :
Enfin, un dernier arrêt avait été rendu le 30 mai 1780 , par le Parlement ,.
CODcernant l'époque où la clôture des bordigues de Berre et de Martigues
devait être enlevée. Sur lademande du S'Coulet, procureur du roi près l'amirauté de Martigues, le li eutenant au siége de cette amirauté avait ordonné,
par ordonnance du 4. mars 1780 , que dès le premier-mars jusqu'au derni er
du mois de juin, les bordigues seraient décloses et ouvertes, Sur l'appel
émis par les marquis et comte de Galliffet , le parlement, en application de
l'arrêt du 9 avril 1568 , avait réformé la sentence et maintenu la règle pour la
cloture et la déclôture des bordigues , telle qu 'elle était portée au susdit arrêt de règlement de 1568.
C'est en cet éta t, que nous allons voir porter au Conseil-d'Etat, la question
123 -
•
"
•
«
"
•
•
«
•
,
• A ce qu 'il plut à sa majesté' , casser et annullel' les arrêts du Parlement ,
des 15 janvier, 23 février et 30 mai 1780 . le décret provisoù'e du 3 février
et l'arrét définit if du 21 juillet de la même année, comme contraires aux
lois générales du royaume et à la puissance publique; en conséquence.
maintenir et garder les habitants et communauté de Martigues, et autres
circonvoisines, ensemhle tous les sujets de sa maj esté , dans le libre ex erci ce de la pêche dans le GOLFE de Martigues, comme faisant partie des mers
publiques du royaume, en se conformant par eux aux loi. générales dc
police de l'ordonnance de 1&81 , arrêts et règlements postérieurs sur le
fait de la pêche. »
2 0 Le corps des patrons pêcheurs : ( p. 2 ),
Casser éga lement les mêmes arrêts.... .. Maintenir et garder lesdits pa" trons pêcheurs dans la liberté, droit et possession de naviguer et pêcher lie
•
�-
• brement dans LA MER de Mm'Iigues; en se confo nuant , pal' eux . aux dispo• sitions de l'ordonnance de \681 ......
• 3 févri er el l'an êt du 2 1 juillet 'i780 , ainsi qu e toul ce qui s'en était , ui \'i
«
ou avait pn s'en suivre.
La question de la propri été des EAUX était par là très- nettement engagée,
Les co mt e el marquis de Ga liilTel défend irenl les an'êls et le pnnclpe sur
Les second
Io Le duc de Penthièvre concluait ( page 3 de l'arrêl imprim é ) :
• A ce qu' illui fut donué acte de l' opposition qu'il déclarai l former. comme
• tier, non 01.... aux arrêls du parlement d' Aix, des 3 et 23 fév ri er fo t 2 1
" juillet \780. en ce qu' on pourrait en induire. con tre le duc de Penthièv re
« et les officiers de l'amirauté cie Martigues. que ces arrêts ;",a ient attribué
• au marquis ùe Ga lliffet . en sa qlla litp de seigneur dc ~Iartigues. la justice
• et la police sur les eaux de la mer de Martignes. qu'i ls 3yaient ant o« risé à faire marquer les fil ets des pêcheurs à ses armes. et qu'ils lui
• avaient attribué les amendes. ce faisant . ordonner qu e l' article 10 d.u titre
« le, . livre 1er • r article 5 du titre 2. livre 1 e,. et l' arti cle 1 e, du titre 1 0 ' .
o livre 1\ de l'ordonoance de la marine de 1681. ai nsi que l'a rrêtdu parl ement
li d' Aix. du 5 janvier 16 75 • el celui du conseil qui l'a vai t co nfirmé du .\ 0 fé• vrier 1679. seraient exécu tés suiva nt leur form e et teneur . en conséquen" ce . sans s'arrêterauxdits arrêls des 3 et 23 février et 30 /\lai et 2·1 juillet
« f 780. qui seraient cassés et annullés, Mainten ir et garder le duc de Pen • thièvre . et sous lui les officiers de l'amirauté de Marl igues. en la possessioll.
• jouissance et exercice de la haute justice ct de la police sU?' Ioules les EAUX de
• la mer de Marligues ; faire inhibitions et défenses audit sieur marqui s de
• Ga lliffet de faire marqu er à ses armes les fi lets employés à la pêche dans
• ces EAUX ; ordonner que les armes apposées à aucun desdits filets en se« ronl déta chées et en levées; maintenir encore le sieur duc de Penthièv re
" dans le droit et possession de percevo ir lui seul à son profit. exclusiv e" menl aud it sieur de Ga liilTet . toute, les ame ndes qni aura ient été ou pour• raient être prononcées à rai so n des délit s et contravenlions commis SU I' les
(( mêmes
1~ 5-
-
124 -
EAUX. »
2 0 Le S, Coulet. procureur du roi ( p, 1 ).
u A ce qu' il plut à sa majesté . casser el an nu ell er les arrêts rendus par le
• Parlement d' Aix. les 15 janvier . 23 février. 30 mai. le décret provisoire du
•
lequel ils étai ent fond és.
.
Leurs conclusions so nl rappu rtées p, 6 de l'al'l'êt co ntre le Sieur Cou let et
les maires des comm unautés el les patrons pêc heurs. et page 7 . eontre le
duc de Penlhi èv rc.
Ce lle première part ie du débat était entièrement étrangère à la propriété des bordigues. jugée au profit des sieurs de GaliilTet pal' 1arrêt du
25 aoûl 17 8 1.
.
Aucun mol ne s· y rappo rte. Aucun mol ne les embrasse. 00 ne s y occupe qu e des étangs. de celui de Caronte. ùu porI de Bouc. de l' élang de
.
•.
ls . MEI\ de Mar!lMartiaues ou soit de Berre, C'est ce qu ex pnment ces mo .
gues ."GOLFE de Martigues . C'est ce que M. de Penlbièv re désignait encore pins
.
.
lacon iquement par le mot les EAUX.
.
' l' arrêt qUI SUICe point est import anl fi retenir; et quand nous amverons a
vil ce débat. il faudra ap pliqu er so n dispositif à ce lle partie du débat. avec
le caractère que lu i assignen l ces conclu sio ns.
com
Une foi s enaagés dans la luLle. le procureur du roi. les maires des d munes de Ma~tigu es et d eSaint-Cham~s. el le corps des pêoheurs. éten Iren l
N et com me TIERS NON
leurs prétentions. Il s demandèrent par TIEIlf.E-OPPOS1TI O, •
OVIS. la rétraclation de l' arrêt du 25 aoÛ t 1781 .
Ils conclurent :
b . Î
~ ce qu' ill eur fui concédé acte de ce qu' en tanl que de esolll. 1 scon• vc rtissaient la dema nd e en cassation form ée par la précédente l:equè~ •
li contre l'arrét du Collseil-d'Etat du 25 août 1781 . rendu sur. avIS
e5
.
. . , députés pour la' vérifica tion des drolls maritimes. en
" sieurs comm lSStl ll es
,
,
l 't arl,At . ce faisanl leur donner acte DE LOPPOSITION
'u
U
TIERCE-OPPOSITION au( t
C
j
1
�-
126-
qu'ils déclaraient fONlier par la présente, comme TI ERS NON OUIS audit arrb;
" faisant droit sur LADITE OPPOSITION , ordonner que les bourdigues CO/lStl'l4it es
, sllr la mer 014 étang de Martigues seraient ddt'ruiles et supprimées comme
« nuisibles lant à la nav iga l,ion qu 'à la pêche, sur ledit élang , fai sant panie
1 de la mer Méditerranée; à quoi fair e le sieur de Galliffet et tous aulres pos1 sesseurs des aul,res bourdigues seraient tenus.
»
Ils conclurent encore subsidiairement à ce que diverses mesures d'exéculi oll
fu ssent prises ( voi r l'arrêt p. 4 ).
-
1
Par celle prétention, un secoud chef de demande s'ajoutait au premier ;
et le Conseil-d'Etat se trouvait ainsi investi de deux questions:
(c
(C
•
(C
«
«
1
•
"
f ° Celle de la propriété des eaux des étangs ;
•
2° Celle de la tierce-opposition contre l'arrêt du 25 août 1781 , c'est.àclire, de la propriété des bordigues.
C'est sur cette double question quele Conseil-d' Etat prononça le 21 décembre 'f 790 , par son arrêt définitif.
Il eul deux disposilions principales el distinctes,
Dans la première , il déclara que la propriété des eaux des étangs n'ap parlenait pas aux sieurs de Galliffet..
Daos la seconde, il confirma de nouveau , sur leur têle , la propriélé
des bordigues.
Voici son tex le :
Le roi étant en son conseil , en présence et de l'avisdesd its sieurs come missaires, faisant droit sur l'instance, a cassé et annu llé, casse etannulle les
« arrêts du Parlement d' Aix des 15 janvier, 3 el 23 février
30 mai et 21
« juillet 1786, ainsi que tou t ce qui s'en est suivi on pu s'ensu'ivre; condamne
« les sieurs de Galliffet à rendre les sommes qu'ils ont perçues en exécution
c desdits arrêts, et notamment à rendre à M. l'amira l les sommes qui leur onl
• été adjugées el qui auraienld<l être prononcées au profit dudit sieur amiral,
e aux termes de l'article 10 du tit. l, liv. l , de l'ordonnance de la marine ,
• de 1681 ;
ft
•
«
127-
" Ordonne sa majeslé qu e ladil e ordonnance sera exécutée se lon sa form e
et leneur dans les élangs de Caronle et de Berre et golfe de Martigu es; en
conséquence déclare que la pêche sera et demeurera libre dans lesd its étangs
et golfe, comme dans le reste de la mer, sans que les sieurs de Galliffet puissent y Pl'étendre, ni exercer AUCUNS DROITS AUTRES QUE C~UX RHSULTANT
DES TITRES DE CONCESSIONS DE LEUR S BORDIGUES. Veut au surplus , sa majesté , qu e l'arrêt de la chambre des comptes de Prov ence, du 9 avril
1568 , et les arrêts et règlemen ts rendus en conformilé , soient exécutés par
provision etjusqu'à ce qu'il en été au lrement ordonné, en ce qui ne sera pas
contraire à l'ordonnance de 1681,
• Sur les demandes des habitants de Martigues, Saint-Chamas et autres ,
CONCERNANT LEUR TIERCE-OPPOSITION A L'ARIŒT DU 25 AOUT 1781 , ellsembl~ sur
toutes les autres demandes respectives des parties, LBS MET HORS UR
COUR, sauf à être
ultérieurement pourvu, ainsi qu'il appartiendra ,
à la police de la navigat ion et des pêcheries dans les étangs de Berre et
•
" de Caron te.
C'est cet arrêt qui , selon les boirs de Galliffet , form e encore, à leur
profit, une troisième foi s . l'autorité de la chose jugée: et ce par deux
raisons:
1" Parce que dans le chef où les sieurs de Ga lliffet ont succombé, il
ne s'agissait que de la propriété des élangs et des eaux non occupées par
les bordigues.
20 Parce que dans le cbef où ils ont triomphé , il s'agissait précisément de
la propriété Je leurs bord'igues,
Qu'i lsoit vrai,d'abord , que la prem ière question résolue par l'arrêtsoit relative exclusivement à la propriété des eaux des étangs , cela résulte de plusieurs points insusceptibles de dou le.
C'était une question réservée et non jugée par l'arrêt du 25 aoM 17~ 'I , .
Elle fut résolue au profit des sieurs de Galliffet , par les arrêts du 15 Janvier
1780 et les suivants.
�-
-
128 -
00 se POlll'vUt en cassa tion contre ces arrêts. Dès ce moment la question fut
donc engagée.
Ma is évidemment le pourvo i en cassat ion se renfermait dans la chose jngée
pal' les arrêts du Parl ement et ne la dépassa it pas.
01', les arrêt du Parlement de janvier ., fév ri er , mai ct ju ill et 178 0 , ne
s'étaient occupés que des eaull? des étangs.
Impossible donc de rien in férer de ta cassa ti on obt enue, en dehors clu
point jugé, et de l'étendre aux eoua; des bordigues, dont il ne s'a gissait pas
Eu second lieu, les termes des concl usions prises indiqu ent fort bien qu'il
ne s'agissait qne des étangs.
Les consu ls de Martigues et d e Saint-Chamas, comm e les patrons pêcheurs,
demandaient la liberté de naviguer et pécher cl ans le GOLFE de Mart igl/es; dans
la MER de Martigues; et le duc ci e Penthièv re demandait la justi ce et la po lice
sur les eaux de la mer à Ma rtigues; il parlait des fil ets emp loyés à la pêche
da ns ces eal/x.
Le doule n'est do nc pas possibl e.
En troisième lieu , l'arrêt lu i-même s'ex pl iq ue très-clai rement et sa li s
ambiguité,
Il dit que l'ordo nnance de 168 1 sera exéc utée dans les étangs de Berre et de
CarO/lte et golfe de Ma rtigues, qu e la pêche sel'a libre dans lesdit s étangs
et golfe.
Il n'entend donc pas qu e ce soit dans les bordi gues. Il ne confond pas les
choses. Là il ne parle pas de cell es-c i, mais des étallgs.
Impossi bl e donc d'e n argumenter co ntre nous.
129-
dai t que les sieurs de Ga ll iffet dussent co nserver de droits sur ces étangs
et golfe.
SalIS que, dit-II, les sieurs de Gal/iITet puisse/lt y prétendre ni?J exercer
« aucuns droits, autres que CC lIX résultants des titres de concessions de leurs
« bordigues .•
«
Voi la bi en les bordigues , Iwrs droits et leurs titres de nou veau l'econuus
et proclamés,
Or , parmi ces droits et ces titres. le premier qui domine est celui qu i leur
a été reco nnu par l'a rrêt du 25 ao Ot 178 1 , c' est le droit de propriété.
L'arrêt du Co nsei l de 179 0 n'est donc , même dans cetLe prem ière partie,
que l'écho de celui de 178 1. Il est impossible d'en douter , en présence
de ces termes, et sur tout en prése nce d e ce ux qui vo nt sui vre, quaud
le Co nseit-d' Etat s' occupera de la tierce-opposition à l' arrêt du 25 août
1781.
Remarq uons surtout qu e la rése rve de droi t ci e propriété des bordigues
est faite ici, au profi(d es sieurs de Ga ll iffet, comme grevant les étangs; comme
en rctl'anchant toute la parti e occupée par les bordigues, et qu e l' arrêt les
présente co m'me un e fraction qui s'en détache pa l' le droit particulier qu i
les régi t.
Il dit ell effet que ce ux-ci pourront r prétendre et Y exercer, SUI' les étangs
de Berre, de Cm'o nte et go lfe de Ma rti gues, les d1'Oiis 1'éSlillollls de leurs titres.
Il ajoute qu e le règlement dn 9 avril 156 8 sera exécuté; et l' on sa it que
c'est ce règlement qui recollnait les lim ites des bordigues. Donc, les étangs ne
leur sont enlevés 'lue sa uf cette fracti on , qu e sa uf ce qui leur co mpète,
SUI' eux , que sauf les li mit es et les term es des bordi gues.
Donc, enfi n, et en dernière analyse, si l'arrêt de 179 0, dans ce tte première par tie, ne leur a rien allribué de nouveau , au moins il ne leur ~ ri en
enlevé de leurs droi ts antérieurs.
En quatrième lieu , l' arrêt lui-même a pris soin de di ssiper , sur ce po int,
tons les doutes.
En terminan t sa première di sposition , il a fix é lui-même ce qu'il enten-
Mais maintena nt, si l'on veut considérer un instant la cl euxième disposition de l'arrêt, celle qui concerne la tierce-opposition form ée contre l'arrêt du
•
�-
130-
il 5 août 1i81 , l'autorité cie la chose jugée va devenir bieo plus sa isissa nt e
et bien plus vive.
les tiers-opposants sont déboutés; les sieurs de Ga lliffet sont mi s sur la
tierce-opposition dirigée contre l' arrêt du 25 août 178 1 , 110115 DB COU R; et ce t
arrêt est de nouveau confirmé.
C'est donc cc qu'ava it jugé cet arrêt qui es t jugé de uouveau. Les sieurs
de Galliffet y sont de nouveau maintelluS et gardés dans la PROPRlETÉ de leurs
trois bordigues. Ce trouble nOU\'eau , celle all aq ue nouvelle n'a abouti qu 'au
même résultaI.
Remarquons que rette disposi tion se li e à la précédente, où les droits des
bord igues avai ent été maintenus et reconn u, . Dans celle-ci, ils le sont vis-à"is des particuliers intéressés au débat; da ns l'autre , ils r ava ient été vis-à-vis
J e la parti e publique, le procureur du ,'ai de l'amirauté et le dliC de Penthièvre,
amiral de France et ayant juridiction universelle.
La chose est donc jugée vis-à-vis de tOIlS.
[: arrêt , en finissant , repousse même les demandes subsidiaires des maire.
de Martigues et de Saint-Chamas , et des patrons pêcheurs, lesq uels réclamaient au moins des dispositions règlementaires et de police ponr la navigation et les pêcheri es ( v: p. 4 et 5 de l'arrêt imprimé).
Ille fait en di,ant : « Sauf à être u/térieu1"ement pOl/l'VU , ainsi qu'il appa1"• tiendra , à la police de la navigation et des pêclre/'ies dans les étangs de Berre
• et de Garonte. •
Mais celle réserve de règlement3tion ne détruit en rien le droit de propri été
reconnu sur les bordigues. En France, toutes les propri étés so nt so umi ses à
des lois de police. Celles-ci n'altèrent pas le droi t de propriété; ell es ne le font
pas perdre; elles règlent se ulement le mode de la joui ssa nce des choses.
Ainsi , pa r exemple, le propriétaire d'une maison est asservi par les lois de
police à disposer ses toi ls, ou l'écoulement de ses ca ux ménagèl-es sur la voie
publique de telle ou telle manière. Ainsi encore , la sai lli e des auvents, l' entr'etien du pavé, situé en face de chaque maison , l'élévation ou la largeur
•
-
131 -
des marches qui se rv ent à l'inlrod'l ctioll de nos demeures ' to ut cela et une
foul e de pre.;criptions semblabl es, acco mpagne en France l' exercice du droi t
de propri été, Di,'a-t-on poUl" cela que le droit de propriété cbange de Dature; que maître de ma maiso n , je D'en suis plus qu'un possesseur préca ire; qu ' on pourra m'évincer quand on le voudra; que si on veut ,
dans un but d'u tilit é pulJlique quelconque s' empa rer de ma propriété,
on se ra autorisé à ne pas m' en payer préalablem'lnt la va leur? Qu 'ou
pourra enfin me placer sous le rpgime du bon plaisir pour me dépouiller?
No n , sa ns doute.
On peut encore multiplier les exemples. Les propriétaires de champs et de
[onJ s de terres peuvent être asservis, par des lois de voirie, à établir des
fossés le long de leurs propriétés ; à planter des arb res pour l'ornement des
voies publiqu es qui les borde nt , à ne pas jete,' sur celles-ci des amas de
pierres ou des immondi ces, ou des eaux qui auraient leur écou lement aill eurs.
Dira-t-on que leur droit de propriété est alt éré ou changé pour cela? Non, sans
doute enco re.
Pourquoi donc le sou tiend ,'ait-on po ur les bordigues, parce que à leur occasion, il es t dit J ans l' a'Tê t de 1790, quele po uvoir royal, tout en reconnaissant
qu' ell es constitu en t nn vér itab le droit de propriété, se réserve de fa ire les
règlemen ts nécessai res pour la police de la navigatioll et des pêcheries de Berre
et de Garan te? Ce la ne peut pas avoir ici un e sign ifica tion différente de ce
qu e nou s avons vu plus hau t pour les maisons et les fonds de terre. On conçoit,
en elTet, qu e dans le mode J e joui ssance des bordigues, il y ait des règlements
de police à faire ou à restr eÎnd re. Ainsi, par exemple, le creuseme nt ou recurem ent des canaux peut intéresser le public. Les ea ux de la mer passa nt par
ces canaux pour se rendre à l' étang de Berre, dans la loca lité qui nous occupe,
et ces canaux, se rvant aussi de conducteur au poisson , pour all er de 1,1 mer à
l'étang, on comprend le droit à régleme nter cela pa,' des lois de police. Mais
le Jroit de propriété sur la bordigue est toujours intact , en ti er et compl et.
Il n'est pas changé. Il subsiste , comme quand il s'agit de nos maisons et de
nos fonds de terre.
L'arrêt de 1790 n'a ùonc émis ici qu'un principe orùinaire, commun, par-
�-
132 -
tout el toujours adm is. Ce n' es t pas une re,lriclion spécia le el par lic ulièreaux
bordigues qui. esl apport ée à leur. mani ère d'êlre .
. c'es·t
)a 1ègle 0 rd"maIre qUI.
.:
le~r est app,lIquée , et les propnétaires de ce genre de domaines n' ont jamais
pretend u qu li, ne fussent pas assen'is, comme toutes les autres propriétés ,
aux ,lOIS de police et de règlemen tation. Mais aussi il est impossib le. quand
\'Is-a-."Is des ~u tres espèces de propriété, ce droit de règlementalion ne peut
aller Jusques a en changer la nature et les principes, qu ' on fasse conlre les
bordigues une exception qu e rien ne légitime. et qu' on les range dans un
ordre d'idées et de principes exceptionnels et hOI's du droit comm un .
Ainsi s'achève notre démonstration sur l'autorité de la chose jngée. De
1568 à 178 1 , 1790 el à 1856 , chaq ue fois que noIre droit a été examiné , il a été reconnu . Chaqu e fois qu'on l'a nié il a été proclamé. Chaque
fois qu' on l'a déna turé, il a été défini . Ces examens, ces reconnaissances,
ces proclamations et ces définitions n.ons sont acquises. Elles so nt devenues
tout a~ t ant de Litres ajou tés aux prem iers. C'est un rempal·tqu e l'état ne peul
franchir et derrière lequel nous serons à l'abri de ses co ups, aujourd' hu i
comme autrefois, aujourd' hui comme touj ours. Nous ne revendiquons rien
de ce qUi a péri el de ce qui devail périr en 1790. Nous demandons ce qui
a survécu à tous les temps et à toutes les législations.
TROISIEllE
SUB DlVI S ION.
Décisions spéciales émanées des iuges domaniaux , - soumission des b01'digues
à l'impôt territorial.
. Il peut être encore utile de connaltre ce détail. II met dans un plus " ran d
Jour. le s Vé fi' tei
' dé"
" de
Ja d émontrées sur le vrai droit de propriété de l'hoirie
Galliffet sur le canal et la hordigue du Roi .
-
133 -
Tantôt nou s voy ions le domain e co nd amné par les arrêts du Conseild' Elat.
No us all ons le VO ir maintenant reconna issa nt et proclamant lui-même
notre droit de propriété, en présence et sur le vu des t.itres plus hau t
examinés.
Nous rapportons à cet. eITet, 10 une sent ence de Bonchard de Champigny,
intendant. de la province, qui , le '2 4 aoû t. 1646 , déclarait les bordigues de
~larligll es et. de 130uc exemptes du Ùroit. de joyeux avènemenl , il payer par
tous les détenteurs préca ires et. révocables de propriétés domaniales. «Tout.
• co nsid éré, dil la scnt euce, aya nt égard à lad it e requêle, du consentement
• du comm is à la rccell e desdil es taxes, acons déchargé. les propriétaires
• desdites bourdigues, s-ituées dans l' étang et canaux de Martigues, des taxes
• (ail es pa?' sa majesté sur iceux, pour misaI! de droit de confirmation dO
• à sa majesté à ca use de so n avènement. à la couronne, avec défense au
« commis à la recette desd ites taxes de faire aucune poursuite con tre les
« suppliants et leurs fermiers ... .. »
20 Un jugement du 19 fév riel' 1668, rendu par les commissaires du domaine . qui sur des assignalions données à la requête du procureur du roi
contre divers propriélaires de bordigues et le du c de Vendôme, d'avoir :
• à rapporter titre; va lables en ve'rtu desquels ils ont (ait cons/I'uire les DOURo DlG UES qu' ils possèden t sur le rivage de la mer , proche la ville de Marti• gues, CANAUX ET AUTRES OUV RAGES pour Y (aire ent?'e!' les poissons, aut.rement.
« et. à faute de ce fai re, que le tout. demeurera réuni au domaine; "
Lequel jugement. , sur la production des titres, produits aujourd' hui par
l' hoirie Galli tret, les met. hors d'instance sur la demand e en ces termes:
" Nous commissaires syndics, (aisant droit sur les "equéles des sieurs .... ,
• les " .VONS RENVOYÉS DI! LA DBMANDE DUDIT PROCUREUR DU ROI , ordonnons, néan• moins , qu' ils ne pourront. faire, à l'avenir, aucunes nouvelles dérivat.ions
" des p.a ux de la mer , qu'après en avoir obtenu la permission de sa
• maj esté .•
Celle décision reconnait , ( remarquons le en passant ) l'origine de la cons-
�-
-
J3.. -
truction des ca naux, telle que nous l'avons donnée nous-même, Elle l'attribue à la main de l'homme,
30 Une décisioll du 23 fév rier 1733, qui , semb lable à cell a du 24. août
164.6, les décbacge de tous d,'oits de confi rmation par ce grave motif : " les
« blll17digues élallt, et ayant toujours été DES BIENS PUREMENT PATRIMO"AUX, »
Voilà pour les temps anciens, Maintenant , pour les temps modernes ,
nous produisons :
10 La décision donnée le 26 nivose ant, par les administrateurs généraux du domaine national à Paris, touchant spéciaiement la bordigue du
Roi et les autres du marquis Je Galliffet, dont l'Etat s'é tait emparé, pal' suite
de l' émig ration de ce demier,
Ils la transmellent au citoyen Rippert, directeur de l'enregistrement el
des domaines à Aix ,
En réponse à un l'apport de ce fonctionnai l'e , qui avait résumé les objections et les argu ments qu' on sou leva it contre ce lle propri été.'
Elle est ainsi conçue :
de ce droit: ce qui n'est pas, D'aillenrs, ils ne peuvent réclamer d'autres
• droits que ceux allachés au territo ire sur leq uel leurs auteurs ont consenti
« à s'etablir, Les pêcheries subsistai ent avant ces établissemen ts, Elles ont
" été reconnues, et peut-être Mar tigues n'existerait pointsi l'échange n'eut
« point eu li eu, »
Signé DECIIUIP,
«
20 La décision de r ordonnatenr de la marine au port et al'l'onJiss~ment de
Toulon , du 2 germina l an 8, tran smise éga lem ent au même directeur Rippert, ainsi conçue :
«
J'ai reçu, citoyen, jointe à votre lellre du 29 v ent~se , la copie d' un
proc ès-ver ba l , e n date clu 16 thermidor an 3, relatif
" aux contestahons
élevées depu is lon g- temps entre les habitants dn Martigues et les proprlétairfls des bOUl'digues: et cell e de l'arrêté du dlrectOire exécu llf , du 29
germinal an (; ;' il ce sujet , je me suis convaincu, par la lecture ~e ces
es, que les droits de la république sont IOcontestalJles
, et. qne
pl'èc
. .
. .1arrêté
,
' ex écnt 1'f qui maintient les propriétaires dans leur JOUissance,
d U d IreClOll'e
met fin à toutes les co nt estations, Je vais donner des ordres en conséquence
' 'e de Inarin e , pour veiller à la sûreté de ces propriétés
au comm ,lssaH
,
bnaé
tional es , et empêcher que les fermiers de la république ne sOient trou 1 s
«
dans leurs possessions,
«
«
•
«
•
«
«
• Au citoyen Rippert , directeur ,
• No us avons, citoyen, exa miné le rapport qui était joint à votre lettrc,
" et autant qu'il est possibl e de juger la va lid ité des droit s dont on n'a
« pas les titres sous les, yeux , nous pensons qu e ceux de la république sont
• bien fond és,
«
"
•
"
•
•
«
«
• En effet , ils dérivent d' un acte authentique passé entra des personnes
qui pouvaient contracter, Ils sont co nfirm és par un e possession longu e et
constante, et reconnus par des jugements so lenn els, Les moyens que les
habitants cherchent à tirer de la féodal-il é et de la liberté de la p€che paraissent destitués de fondement. On ne voit aucune trace de féodalité dans l'acte
de 4223, C'est tout simplemen t une concession de fonds à titre d'échange ,
avec des clauses que les parties contractantes avaient bien certainemen t la
faculté de stipuler, ,1 l'égard de la liberté de la pêche, les habitants de
Martigues ne pourraient t'invoquer que dans le cas où ils seraient privés
135 -
•
•
1
»
'
encbères et l'adjudication faite pal' l'Etat, acquéreur du
3° la mIse aux
octobre 1826 et
J B. Vidal DU CANAL ET DOURDIGUES DE MOURGUES, les 2~
i ,leur.
1
13 mail8'l8 ,
,
'
,
arquer
dans
ce
tte
pièce,
Plusieurs choses so nt a lem,
,
B V'd l '
~'esl d'abord l'acquisition que l'Etat en avait faite du sleur'El, , la , 1:
,
e celui-ci avait élevées contre 1 tal, pour
la suite des réclama tions qud
t d Bouc avait occasionné à sou caoal.
préjudice que le recurage u PO:nO:RIÉTÉ doouée il la bordigue,
C'est ensuite la qualificatIOn de
l
'ndl'st'Inctement don, l
"
C'est celle aUSSl, de CANAL ou DOU~OIGU E de fl ourDues
•
�-
136137 -
néeà la bourdigue, dallstoule la procédlll'e, comme pour fair e entendre qu e
la bol/l'digue et le call1li sont une même chose,
C' est. enfin, le ca bier des charges drpssé le 3 octobre 1826 , pal' Ie directeur du domaine à Marseille, et approuvé par le préfet le 7 octou l'esuivant ,
d'a près lequel il e. l dit : • qu e l'adjudicataire en jouira el disposera , ainsi
que l'Etat et les PRÉCÉDBNTS PùSSESSEuns e ll avaiellt le droil , "
N'est-i l pas étrange de voir l'Etat ell e dom ain e contester aujourd'hui tout
ce qu ' ils reconnaissaient alors; savoi r : le droit de propriété privée sur un e
bordigue, l'identité de la bordigue avec le canal , les droits dcls précédents
, possesseurs, et enfin lout ce qui se plaide au nom de l'hoirie de Ga lliffet?
N'est-il pas étrange, surtout, de les voir contester ce qu e durantdes siècles
ils avaien t reconnu et avoué, et ce que les tribunaux avaient proclamé,
quant ils l'avaient pal' interva lle nié?
Ces aveux ne sero nt certain ement pas perdus pour l'hoiri e de Ga lliffel.
Pour ce qui concerne l'inscription au cadastre de la propri élé des Bordigues, les preuves so nt aussi abondantes, C'est un point insusceptible de
doule so us l'ancienn e législalion co mm e sons la nouvell e,
Voici qui le prouve :
C'est, 1 0 un ext rait du caclaslre de la vill e de Mar tigues, de l' année 1584,
2 0 Un certificat délivré pur les co nsu ls de Martigues, du ,II janvier
~ 727.
3° C'est uo arrêt de la Co ur des co mpt es de Provence, du 10 avril 1783,
qui soumet les bordigues à l'impol territorial , et à ce lui du cadas tre en
ces term es:
• La Cour a ordonné et ordonn e qu e les bourdigues près notre vill e de
« Martigues et du pOl't de Bouc, DElIE URE ItONT SUI' le cadasll'e de ladite commu• nal/té, pour y €lre imposées à LA TAILLE ; savoi r : les sèdes desdit es bourdi« gues cultivées ou cultivables, pour toute leur valeur, comm e lesa utres fond s.
« du terroir, et les pêcheries en lesdites bourdigues , pour la mOiti é de
• leurs valeurs, con form ément à la règle établi e par l'article 2 de notre
déclaration du 9 juillet 17. 5 , concel'O ant les moulins, le martinets
« et autres e(J'els de pareille nature, à l' effet de quoi a ordonné eL 01'-
«
t'
donne ...... , •
Sous la nouv ell e législati on , les bordigues sonL également portées au cadastre eL. frappées de l'impôt fon ciel' , 'co mme toqtes les autres propriétés immobilières. Nous en produisons di verses preuves,
1 0 L'ex trait de la matrice cadastrale: 2° un cerlifica t du maire de Martigu es ; 3° l' averti ssement annuell ement donué pour l' imposi tiou de la bordigue
du Roi , qlli s'élève à 2354 fI'. pa r année.
Et par ce dern ier trait, s'achève l'assi milation entière du droit de propriéLé
lUI' les bordigu es , au droit de propri été SUI' les immeubles.
TLlOlSIEME
PARTIE .
Les objections presentées par l'État.
Le système de l'Elat se divise en deux parties distinctes.
Il soutient, en premier li eu , que le droit réclamé par l'hoiri e de Ga lliffet, s'i l avait existé, aurait été abo li par les lois des 6 et 30 juillet 1 '193
et 8 frimaire an 2 , qui ont aboli, comme féodal, le droit exclusif de peche,
Il soutIent, en seco nd lieu, que les titres invoqu és et produits ne justifiènL pas même le droit revendiqu é,
Nous répondons qu e le système en droit est faux de tout point, et que le
système en fait est dépourvu de base sél·ieuse,
Nous allons le prouv er.
�-
138 -
-
139 -
La convention nationale, après avoir entendu le rapport de ses comités
d'aliénation et dumaiQes réunis, sur la pétition présentée par plusieuri
" habit an ts riverains de la Seine . qui demand en t la suppression du pri« vi lége exclusif de pêche .. ... passe à l'ordre du jour motivé sur les décrets
• des 6 et 30 juillet dernier, qui ont compris au nombre des droits féol
daux supprimés par la loi du 25 aoO t 1792, les droits exclusirs de pêcbe
" et de chasse.
1
§ le,.
Les objections en droit de ('État.
C'est dans'Ie texte des lois précitées , des 6 et 30 juillet 1793 et 8
frimaire ail '2, que l'Etat en établit la base et le fondement
Rappelons-en donc le tex te; et fixons-en la port ée et l'application. et l'on
verra desuite qu'elles sont étrangères à la matière qui nous occupe, et qui
eit so~mise au jugement du tribuual.
Voici leur texte;
•
•
•
•
•
•
«
•
•
1
•
•
•
•
•
Le décret du 6 juillet 1793 porte :
• La convention nationale, après avoir entendu so n comité de législation
sur la pétition du citoyen Cabar~t, tendant à (aire décreter l'abolition du
droit exclusi( de la péche, prétendu par les ci-devan t seigneurs, et la permission à clulcun de pécher le long de ses héritages , passe à l'ordre du jour,
motivé sur les articles '2 et 5 du décret du 25 aoOt derniel', le premier
portant q'Je toute propriété foncière es t réputée franch e et libre de tOU!
droits, tant féodaux que censuels, si ceux qui les réclament ne prouveot le contraire , dans la forme qui sera prescrite ci-après: l'autre,
que généralement tous les droits seigneuriaux ... . .... sont abolis sans indemnité ..... »
Le second, du 30 juillet suivant porte :
1 La convention nationale, après avoir entendu la lec ture d'une ùélibération prise par l'administration du département de la Charente, le 20 de
ce mois, qui réfère à la convention nationale la question de savo ir si le
droit de pêche est compris dans l'abolition généra le des droits féodaux,
et sur la proposi tion d' un membre passe à l'ordre du jour motivé
sur ce que les droits exclusifs de pêche et de chasse étaient des droits
féodaux, abolis par les lois précédentes comme tous les autres. •
La loi du 8 frim ai re an Il ( 28 novembre 1793 ) dit encore :
(1
La lecture seu le de ces textes , donne la conviCli on inébranlable que ce,
lois ont atteint et vou lu atteindre le droit exclusif de pêch e, réclamé par
les seign eurs , en verlu du droit féodal. à l'exclu sion des propri étaires des
fonds riverains.
Cela ressort clairempnt des termes de la pétition, sur laqlJelie intervint
le décret du 6 juillet, qui demandait que r 00 proclamât la permissicm à
clulcun de pécher le long de son héritage. Et de ce motir, donné par le décret,
que l'arti cle 2 du décret du 25 aoÛt 1792 y avait suffisamment pOlJrvu eo
décretaot : « Que taule propriété (oncière est "éputée (ranche el libre de tous
• d,·oiIS. tallt (éodauœ quo cCllsuels, si ceux qui les réclament ne prou• vent le contraire. »
D'où suit ce tte conséquence, qu e III décret a aboli le droit qu'un seigneur
non propri étaire, soit du cours d' ea u, soit du fonds rivcl ai n de ce cours
d'eau , voudrait réclam er ou réclamerait à l'avenir, au préjudice du propriétaire du fonds riverain du cours d' ca u.
Cela resso rt encore du tex te du deuxième Mcret , celui du 30 juillet ,
où le législateur assimile le droit de pêche, dont il s'y agi t, an droit exclusif de chasse, éga lement déclaré aboli, et qui s'exe rçait Cil vertu du
droit féodal , au profit des seigneurs sur des fonds dont ils ,,'étaient pa.
propri~taires .
.
. .
Cela ressort encore du décret du 8 frimaire an Il, plllsqu e CCliII- CI est
fond é exclus ivem ent slIr ce qu e les deux décrets précédents, ,Ie< 6e1 30 juillet
1793 a vaient déjà statué el prononcé sur la qu estion .
Enfin , cela est enseigné de la manière la plus précise par ~I erlin, qUElS-
�140
tion de droit , 1' 0 pêche. qui rapporte le texte des Jeux premiers décrets.
et qui , à leur occasion, dil pour les expliquer : • Le droit exclusif de la
• pêche ne peul être consid éré. relativemenl aux ci-devant seigneurs, que
• sous deux aspects : - ou comme une servilude exercée par eux sur les
• rivières non navigables, à l'instar du droit exclusif de la chasse, qu' ils
• exerçaient ci-d evant sur les terres à labour, les prairies, les bois, etc.,
• ou comm e un fruil de la propriété foncière des rivières non naviga• bles. . ........... Si c'est un droit de fief, la loi du \ 5 mars 1790 ne laisse
• aucun doute sur son abolition .•
• Si oous envisageons le droit de pêche sous le second aspecl, c'est-à• dire , comme un fruit de la propriété foncière des rivières non navigables ,
" propriétés que les ci-devant seigneurs prétendaient assez généralement leur
• appartenir , l'abolition de Ge droit ne sera pas moins facile à démontrer. •
Que faul-il conclure de cette première donnée? Que ces lois ne se sont
jl3s occupées d' un droit de pêche qui serait la conséquence d' un droit de
propriété ;
Qu'elles n'ont pas aboli un droil de pêche qui ne prendrait pas sa source
dans ledroit 'féodal;
Qu'elles onl respecté un droit de pêche qui viendrait. ou d'une œuv re
créée et réalisée, telle qu' un canal, par un particulier, ou d'un droit de
propriété qui aurait été établi par le souverain lui-même , sur ce même canai, au profit de ce particulier ;
Qu'enfin, ni de près ni Je loin, elles ne se sont occupées des établissements de pêcheries faits sur la mer, sur ses bords, on dans des canaux
d'eaux salées.
En cel éta t , une première réponse sc présente con tre l'Etat, à l'occasion
de ces Illis : c'est qu'elles sont entièmenl inapplicables ici , puisqu'il s'agit
d'une propriété , de celle du canal du Roi ; d'un droil de pêche qui s'exerc~
en vertu du Jroit de propriélé sur ce cana l ; d' un droil qui a pris sa source
ou dans la création du canal par les au teurs de l'hoirie de Galliffet, ou
dans le transport et l'aliénation qui en a été faite par le pouvoir souverain,
en force d' une législation qui le permettait.
-
141 -
Or , en tout c('ci la féodalité n'a que faire ; les lois destinées à la détruire
non plus. D' une part, les actes du pouvoir royal sonl incompatibl es avec l'id ée
de féoda lit é ! Ce que le souverain fail comme représentant héréd itaire de
la nation, comme législateur, comme monarque , est exempt de soi de toul
caractère féodal. On peut voir, sur ce point, la haute doctrine enseignée
par Merlin, 1'0 usage § 1. ques!. de droit. D'autre part, les créations que
le parti culier a pu faire dans son intérêt, et par le résult at de son travail
.ont aussi pures J e toul rep roche de féodalit é! Dans les deux hypothèses
donc , la cause ne peut être régie par les lois invoquées par l'Etat,
Pourt ant l'Etat insiste, et à la première objection, déduite de ces lois.
il ajoute qu'elles ont été déclarées applicables à des droits de pêche sur
des rivières navigables ou Aottables, QU'ON LES REVENDIQUAT soit à titre patrimonial, sllit à titre d' cngagistes et d'échangistes ; et qu e tel esl ravi; du
Consei l-d'EtaL du 30 messidor an 12 , eL tel encore un arrêt du Conseild' Etat du H avril 1810.
Nous ferons sur ces deux citations deux remarques décisives , qui montrerontl eul' inutilité dans la ca use.
La première , c'est que l' av is du Conseit-d'Etat du 30 messidor, et l'arrêt
du ,\ 1 avril 1810 , sont entièrement étrangers encore à la matière qui nous
occupe; qu'ils ne sont relatifs qu'aux droits de pêche prétendus sur une
riv ière navi gable ou flott able: qu'Ils ne concernent donc que le droit de pêche
fluviale, et qu'ils n' ont rien dit ni jugé pour les établissements de piche .maritime, qui onl leur législation propre et spéciale. Comment donc pourr3ll-on
-utilement en argumenter ici? On sait fort bien que la législation sur la pêche
fluviale et celle ~ur la pêche maritime ont leurs lois , leurs règles propres , leU!'
jurisprudence également spéciale.
.
Elles ne peuvent Jonc pas être confondues, et ce n'es t pas dans la première
qu' il faut chercher les règles de la seconde. A ce point de vue, peu Importerait l'opinion du Conseil-d' Etat de l'an 12et JelSIO , touc~a n,t les lOIS des
6 et 30 juillet 1793 , sur les droits de pêche fluvial e. Ce serait 1oplOlOn de ce
(onseil, sur les établissements de pêcherie maritime , qu'il faudrait recher-
�-
142
cher et produire, surtout eo présence de l'arrêt du 25 aotH 1781 , tic
ce m~me Consei l , et de l'interpré tation qu'il lui a Jonnée le 24 juillet
1856 ..
Cette première rema rqu e suffirait donc pour repousser r argument, comme
incoocluan t.
Mais la seconde va le détruire et l'anéa ntir comme opinion,
Depuis l'avis du Conseil du 30 messidor an 12 et l'am' t du 11 avri l 1810 ,
les points de vue ont bien changé sur ce tte matière; et la Cour de cassation
n'a pas hE'sité à déclarer, au co nlrai re, les droits de pêche ou aulres ,
acq'Jis antérieurement à 1566, sur les fl euves et rivières navigabl es ou
fl ottab les, à l'abri de toute év iction ou suppression: et cela, en se fondant
sur les lois du 15 avril 1829, articl e 83: sur l'ordonnance des Eaux,et-Forêts
de 1669, tit. 27, art. 41 ,e t sur l' éd it d' avril 1683,
L'article 83 de la loi du 15 avril 1829, sur la pêche fluvi ale, dit en
effet , que :
• Les droits ACQUIS antérieurement à la présen te loi , seron t jugés, en cas
• de contestation, d'après les lois e::vistan t at'ant sa promulgat-ion, »
Et par là elle a fait voir qu' il y avait des droits ACQUIS en cette ~atière ;
qu' ils étaien t dOllc en dehors de la suppress ion prétendue ; et que pour
juger ces droi ts acquis, il fallait les apprécier par les lois sous lesquell es
ils avaient pu s'acquérir,
Et l'ordonnance des Eaux-et-Forêts, à so n tour, a déciMé maintenus et
par consE'queot définitivement ACQUIS, les droits de pêche, ou autres, qu e les
particuli els peuven t y avoir, par titres e t possessions valables, en ces
termes:
Déc larons la propriété de tous les fl euves et riviè res portant bateaux
de leur fond s, sansal'tifice e t ouvra ges de mains, dans notre royaume et
telTes de notre obéissance, faire partie du domaine de noIre couronne,
nonobstant tous titres et possessions contraires, SAUF LES DROITS DE PÈCU. ,
moulins, ba,:s et autres usages que les particuliers peuvellt y avoi!' par titres
et possessions valables, AUXQUELS ILS SK R0~T MAINTENUS, •
Enfin r édi t d'a Hil 1683 porte formellement : • Nous avons , par ces pré«
•
•
•
•
•
-
143-
•
•
•
•
"
sentes , signées de nOIre main , confirmé et confirmons en la PROPRIÉTÉ,
possession et jouissance des iles, ilots, attérissements et accroissements,
DROITS DE rÉCII., baes, bateaux, ponts, moulins eL au tres édifices eLdroits
sur IfS rivlèl'es navi gables dans l' étendue de notre royaum e, pa ys, terres
et seign euries de notre ob ~ i ssan ce, tous les propriétail'es qui rapporteront
« des titres de propriété authentiques, raits avec les rois IIOS prédécesseurs en
• bonlle{orme, auparavant l'année 1566 ; c'est, à savoir : inféodations, con• tra ts d'ali énations et engagements, aveux et dénombrements qui nous
• auront été rendus, et qui auront été reçus sa ns blame, •
Le dernier article de cet édit confirm e même les simples possesseurs qui
rapporteront des titres authentiques de possess ion commencée sans vice avan t
le premier avril 1566 , cl con tinuée depuis,
L'édit de décembre 1693 fut co nçu dans le même sens et le même
esprit.
,
C'est en présence de ces tex tes de lois que la Cour de cassallon , par un
premier arrêt Ju 9 novemhre 1836, a, malgré le texte de l' av is du Conseil
du 30 th ermidor an 12 , admis comme legale, et a exa mlOé le mén te de
la prétention d'un particulier qui Cond ait sur sa rOSS.SSION, sa ~emaode en
maintenu e dans 'JO droit de celle nature, La Cour de cassatIOn ne 1a repoussée
rce que l'offre de la preuv e de sa possession ne remon tai t pas avan t
qu e pa
, , '
,
1566 , et ne s'a ppu ya it pas sur les litres eXigés par ces lOIS anCien nes,
Elle l'a fait en ces termes:
• Vu l'article 83 de la loi du 15 avril 1829 , qui , en abrogeaot loutes
• lois, ordonnances et arrêts du Consei l intervenus sur les matières réglées
te loi résen'e pourtant les droit s acqui;; antérieuremen t à sa pro• par cel
,
, è 1 10 '
« mulgalion, lesquels, en cas de contestation , seront jugés d opr s es IS
" alors eœistontes"", •
,
• Attendu qu'à la vérité , l'article 41 , litre27 ile l' ordonnance de 16~9, 10• voqu é par le demandeur, en dér.larant tous les fl euv es et rivières naVigables
• parties int égrantes du domaine de la couronne, ,ava it rés~rvé l e~ drOIts de
• pêche et aut res usages, qu e les particuliers pourrai ent y aV01racqms par titre,
« ou possessions va lables, mais que la disposition d e cette ordonnance ,
�-
144-
défin issa nt pas les litres et la possession va lable , pour faire mainlenir
les droilS déjà acqu is au mom ent de sa promu lga li ou, se trouve, quan l
à ce, pxp liq uée et complélée par cell e de l' édit de 1683, qu i déc/ara qu e
ces titres , ou cetle possession légitim e devront exister avant l'anllée 1566 ,
époque où a élé consacré définitiv ement le grand prin cipe de lïnaliéna bililé du domaine , el qui ajoute que la possession légiti me dev ra êlre
élablie par actes lels qu'inféoda lio n , engagemenls, co ntrats d'a liénation ,
al'eux ou dénomb remenls rendu s sa ns blame : qu'ain si , la preu\' e offerle
devai l êlre repoussée, soit parce qu'ell e se reporlait à un e époqu e où
la possession ne po uvait être acquisili ve d' un dr" il , soi t parce qu 'elle
ne s'appuyait pas sur des lilres desquels seu le on eut pu la t'aire résulter,
( Si rey 1836-1-8 08) , »
« Ile
•
"
«
•
«
•
«
,
«
«
«
C'est aussi en présence de ces lois , qu e par un second arrêt, du 21
mai 1855, la Cour de cassa lion a déclaré maintenir , et à tout jamais acquis,
un droit de cette nature, tra nsmi s sur les fl euves pal' nos anciens so uv erains,
La rubriq ue de l'arrêt es t ainsi rapport ée par Sirey 1855-1-1i6 1 :
Avan t l' édit de fév rier 4566, sur les gl'and s domain es, les biens et
« droils dépendan ts du domain e de la couronn e 0 11 de l'Etat , dont faisaient
« partie les fl euves et ri vières nav iga bl es , n'é laient pas frappés dï nalié« nabi lité, •
«
«
" En conséquence, de, drois de moulins ou de pêche, sur ces fl euves ou
ri vières , on t pu êlre concédés par le roi , à titre de p"opriété,
Et l'a rrêt adit :
• Vu l' ordonnance de 1566, sur les grand s domaines; celle des Eaux« el-Forêts de ,1669 ,a rl. >\. 1, tit, 27 :
« Aliendu ........ ,. le surplu s des motifs a déjà élé rapporté en ce mémoire, pages 59 et 60,
Nous avo us donc eu mill e fois raison de repousser l' argument de l'Etat,
pris des lois de 1793 , et de r av is du Conseil-d'E tat du 30 th erm idor an
12, La loi mieux étudiée, mieux connue et mieux appliquée, a fait entrer
la Cour de cassation dans la voie opposée où nous ve nons de la sui vre, Ce
-
n'cs t pas l' argum enta tion de
aba ndon ner aujourd' hui,
145 -
l'~:tat
qui pourrait II I l'obscurcir ni la fai re
L' élal , pourlant , ne se li enl pas pour convaincu, Il essaye d' uoe dernière au torité , po ur suppléer à la loi qui lui ma nqu e, Il invoq ue un arrêté
du di rectoire de 29 germina l an 6 , lequel , entre autres mot ifs, pour ne pas
perm ellre aux liers de soumissionn er , et à l' état d'aliéncl' les horr/igues et
madragu es comme immeubles lWtiD/laux , donlla révolulion avait mis l' Etat
cn possession , consid ère qu e le rlroi t exclusif de pêche se trou ve com pris
au nombre des droi ts suppr imés par la loi des 6 et 30 juillel 1793,
Mais ce derni er elTort n' aura abouli qu'à mieux constater toute l' étendue de
rerreur et de la confusion dans laqu elle on tombe ici,
Voici cI 'abord, el! {ait, une premièle observa tion , qui étai l présentée SUI'
cet arrêté, 'par la consull at ion de M, de Vatimesnil , p, H , et qu' il esl utile
de reproduire,
• Que le dirccloire, dit-il,aitj llgé co nvc nable de ne pas aliéner les bordigues
qui faisaient alors parlie du domaine de l'Etat, soil en vertu d'a nciens litres,
soit par sui te cie confisca lion : rien n'est plus sim ple ~ le Directoi re étail parfaitement matlre d'agir ainsi ; el même, à ce t éga rd , il élail d'acco rd avec
l' ordonnan ce de '168 1 qui , slatuant pour l'avenir et sa ns préjud ice des droits
acquis, ava it déclaré qu e désormais les concessi ons de bordigues n'a uraient
plus qll e Ic cal'actère de permissions,
, , '
« Le Directoire fait à l' égard des bordigues une observa tion trèS-Ju ste, savOIr:
f, Que pour le succès de ces établissements, il fa ut que celui qui les ex ploite
• n'ai t'point à cra ind re qu'on tende d'a ut res fi lets dans les ca naux où les
• bord igues se tro uvent ; d'où il suit qu e les nOIl-propriétaires de bordIgues sont
• privés de p€che dans une étendue limitée,
,
" '
'
« Lc Directoil'e recon nalt do nc le droil exclusrf des pl'OpnetCl11'es de bont.gues ; il ne veut pas en user à l' égard des bordigues qui lui appartiennent ,
parce qu' il juge convenable de favorisel' la liberté de la pêche, Rien de mieux ;
ce poi nt de vue peul être juste de la parI du gou vernement ; ~1 a l s " qu ant
aux particu li ers qui sont propriétaires de bordigues, en vertu de ti tres Irréfra-
�-
-
146-
ga bles et de j ugemen ts passés en force de chose jugée , comme l' est M. de
Gall iffet , co mment leur cont ester ce titre exclusif que le Directoire reconnalt
être de l' essence des bordigues?
« Ainsi , l'arrêté de l'an 6, loio d'être contraire à la cause de M. de Galliffet.,
tend à la fortifi er.•
Voi ci main tenant , en droit, ce que nons répondons encore, et ce qui
prouv e l' erreur ca pitale de tout e l'a rgumentation de l' Etat sur ce point , en
même tem p qu e l'inexactitude du motif em prunté à l'a rrêté dn 29 germ inal
aD 6. Les établissements de pêcheries , possédés à titre de prop,iétaires, ont
UDe législation propre el spécia le , qui a touj ours reconnu leur existence, soit avant , soit après les lois de jui ll et 1793 , soit aujourd ' hu i
encore. Elle est en pl eine vigueur. Les tribunaux et le gouvernemenl la recon naissent et l'app liqu ent ; et il n'est permis à perso nne , encore moins à
l'Etat , de la confondre av ec celle. qui concerne la- pêc he dan s les fl euves
ou rivières navigables.
Il suffi ra d'énumérer ici ces lois et ù' en reprod ui re le texte. Toutes, elles
prouveront que les lois de 1793 n'ont jamais fa it la législatiou de celle matière
el qu 'elles ne leur sonl pas appliq uées.
La première, est l'ordonnance de mars 1584 , arl. 84 et8 5. - L'article
84 porte: • pour pourvoir aux plaintes fai tes aux commissai res par nous
• dépu tés par nos provinces de pa rcs et pêcheries constru ites de nouvea u
« sur le bord et ès grèves de la mer, bays et embouch ure.s des riv ières contre
« la form e ancienne, avons ordonné que tous lesdits pm'cs et pêcheries, fa ites et
« construites depu is quarante ans , au bord et grèves de la mer et ri vières
« y entran t , seront démoli es et aba ttu es .. ..... »
Article 85 : " Et pour le regard de celles bâties précédent quarante ans,
" seront rétablies en leur premier état.. .. . ..
La seconde, est l'ordon nance de la marine, de 168 1 , qui dans l' article .. ,
til. 3 du liv. 5, reprod uit la dispositi on précédente de l' ordonnance de mars
1 !\ 8~ ; et qui, da ns le titre <l, intitulé des mad ragues et des bordigues , contient la législation ancien ne sur ce point. - On en a vu , plus baut , toute
J'économie da ns la consultation Va timesnil, p. 32 et sui v.; on y renvoit.
147 -
La troisième, est le décret SUl' la pêche marit ime ùu 8- 12 décemb re 1790,
qui a main tenu , en cette matière, to ute l'an cienne législation dans les terru es sui va nts .
" TOUTESLES LOIS, statuts et règlements su1'lapolice et les procédés de la pêche,
• particulièrement les règlements sur les faits et procédés de la pêche en
• usage à Ma rseille, autres qu e ceux du 29 décembre 1786 et 9 mars 1787,
• seront provisoirement EXÉCUT ÉS; l'assemblée se réservant , APRt;S LA . tVISION
« DESDITES LOIS, de fOl'ln er un nou vea u code J e pêche.
Ainsi les lois ancienn es, les arrêts du Con seil-d' Etat , tous les statuts et les
règlements sur les bordi gues son t main tenus. Ce n'est qu'ap rès leur révisioll
qu 'un nouveau code sera formé. Donc, tous les droits reco nnus et conservés,
SUI' les établissements de pêcberi es, par leurs dispositions, so nt aussi co nfirmés,
et bien loin ùe rien inno\' er, on co nserve.
Deux autres lois confirm èrent aussi la propriété de ces établissements sur
la tê'te de ceux qui les ava ient obteuus des anciens souv erains de la Provence , ava nt '11\66.
.
L' un e est la loi du pl'emi er décembre 1790 SUI' le domaine, art. 37, qUI
pOl'ta : « les dispositions comprises au présent décret, ne sel~o~ t exécutées.
« à l' éna rd ues provinces réun ies à la France pustérleurement a 1ordon nance
• de 1~ 6.6, qu ' en ce qlli concerne les aliénations failes depuis .Ia date ùe
• -leur réunion respective: les aliénations précédentes devant être REGLEES SUI-
t'ant les lois lol's en lisage dan s ces provinces; •
.
L'aut re est la loi du 1 ~ vent ôse an 7 , art 2 , qui disai t : « En, ce qUi
« co ncernc les pays réuni s pos téri eurement à la p'iblication de 1éd ,t de
.. fév ri er 1566 , les aliénations des ùomaioes, fait es ava nt les époq ues res" pec tives des réunion s , seront RÉGLÉES suiuant les lois lors e ll usage dans les
« pays "éunis , ou sui'vant les traités de pa,(1) ou de l'éumolt. "
.
.
Voilà donc la législation propre des établisse ment s de pêch,erl :~s et ho rdl g'J es, faits en Pro vence. avaot la réunion à la France , et ava ntl édit de 1566.
Elle renvoit aux prin cipes provença ux ancIens.
.
E
. 1 d't ? La loi du 1 ~ ventose an 7 , postérieure à celle de 1793.
,t 'lUI e l .
.
~ 3
i d
'c' étrangère? El
Comment ne -pas voir qu e celle 101 , de 1.9 , es onc l ,
n
�-
148-
-
pourra-t-on encore le nier, et ne pas reconnaltre que l'idée de la loi du 8-12
décembre 1790 , se complète par cell e du 1 .. ventÔse an 7 ? ! !
Faisons Ol:Jintenant uu pas de plus , et nous verrons qu 'à mesure quenou!
avançons vers notre époq ue , notre argumen tation devient encore plu!
pressante.
La révision des loi s sur la pêche maritime, a commencé de nos jouI'! ,
par le décret-loi du 9 janvier 1852 , sur l'exercice de la pêcbe cotière.
L'article 3 annonce des décrets qui régleront , pour chaque arrondissement ou sous-arrondissement Maritimes, • t 0 , 2 o " " " " 9 0 les conditions
• d'établissement des pêcheries . • - Mais l'article 24 final de cett e loi ,
maiutient encore les lois et règlements actuellement ex istants sur la pêche,
et par conséqnent sur les pêcheries, en ces term es:
" 1'Imtefois , ces lois et règlemellls ( alljourd' hui exis tants, sur la police de
« la pêche cotière , ou pêche dt. poisson et cl!. coquillagc à la mer, lc lon g
" des côtes , ainsi que dans la partie des fleuves , rivières, étallgs el canauw
• où les ca= sont salées ) CONTINUE RONT 1))'ovisoircment A inRE EXECUTES .• . .• •
• ju~q!i à la publicatioll des décrets ft intervenir, en conformit é dc art 3. »
r
Cela pourrait-il être , si les lois des 6 et 30 juillet 1793 avaient. aboli et
supprimé les établissemen ts de pêcheries?
Enfin, les décrets réglementaires rendus le 4 juillet 1853 , pour le premie r arrondissement maritime, Cherbourg; pour le 2", Brest; pour le 3 e ,
Lorient et pour le 4e Rochefort, renferment tous des dispositi ons qui maintiennent les établissemen ts de pêcheries, et qui s'arrêtent devant leUl!
titres.
«
•
"
•
"
Le titre 9 , art. 138 du 1er dit : « SOlit pl'ovisoù'cment maintenues les pécheries .. . .. établies en vertu d'autori sa tions régu lières, dont les détenteurs
se conrormeron t aux dispositions ci-après. - L'art. 139 dit : tous les détenteurs de pêcheries qui ne produiront pas DE TITRES. " El l'arlicle 142 :
Les commissaires de l'inscription mari time ti ennent un regislre sur lequel
sont consignés: ... . LES TITRES ou AUTOR ISATIONS et leur clate.
Les mêmes dispositions sout reproduites pour le deuxième arrondissement,
149-
Brest, tit re 9, ~r l. ,1H , 11.8 ; pour Lorient, arL 1V2 eL1~6 du til. 9 - el
pour Rochefort, til. 9, art. 128 et 132.
Cet ensem hle de dispos iti ons législati ves ex isterai t-il , si les lois de 1793
"vaient aboli les étaulissemen ts de pêcherie et leurs droits? Et avions-nous
torL d'ava ncer qu e celle matière a une législat.ion spécia le; que celle législa tion les reconnait . les maintient, les p"otége, s'incline devant leurs titi es;
et que c'est tout conrondre, tou t mêler , et nier même l' év idence, que d'argum enter des loi s de 1i93 , pour effacer un droit si clairement reconnu, SI
manirest ement protégc ct si énergiqu ement défini .
1\ ne l'este plus qu' un e loi à repousser, parmi toutes celles invoquées par
l'Etat. C'est cell e du premiel' mai 1822, titre 2, arl. 7, dont il essaye de raire
al·gum en t. Cet article est un de ceux qui composent la loi des finances et
d u blldget, pour l'exercice 1822. 11 6s t placé SOllS la rubrique des produits
affectés à l'ea:ercice 1822, et so us le § premier des dive1'S droits et perceptions.
Il port e: • les droits de pêche perçus sur les étangs salés qui communiquent
• avec la mer, et qui apparli ennen t au gouver nement, sont et demeurent
« sup primés; néanmoins, ceux de ces droits qui so nt aujourd 'hui perçus sous
« rorme de lic ence, continueronL à l'être jusques au premier janvier 1823 :
« et ceux qui sont enco re afferm és ne cesseront qu'à l'expiration des
« baux. »
« Les fermi ers seront admis à résilier , dès qu'i ls en auront rormé la
« demande .•
Il s'agit là de droits perçus par l'Etat SUI' les étangs sa lés, et affermés
pa dui . L'Etat a jugé convenable, en 1822, de renoncer , pour lui , àce reTenu.
Il l'a rai t très-légitimement : mnis en agissan t ainsi, il ne s'est pas occupé des
droits appa rt enant aux simp les particuliers sur ces étangs: encore moins des
bordigues et pêcheries, et de leu rs ca naux, qui ont lellr législation propre.
{Je tout quoi il résulte que ce ll e loi est étrangère li la question , eL inutile,
par conséquen t li in\'oquc l·.
�-
) 50
-
§ 11.
Les objections de l'État contre les titres.
J. La Charte de 920. - Le mémoire ùe l'Etat la repou sse comm e non
proban te, 1 0 parce que l'acte de 92 0 qui la suit , le breve, l'inventaire des
possessions de l'archevêq ue d' Arles: se rait du pape Céles tin III ; 2 0 parce
que la Charte ell e-m ême ne s'ex pliquera it pas sur les bordigues et sur ltour
nat ure. Ma is ces deux objections n'o nt ri en de so lide.
La première se dissi pe par la vue seule des deux ca l'lulaires , déposés aux
archil'es départementales. On y voit très-clairempnt ( et nous l' a vons vu de
nos yeux ) que l' acte Je 920, le breve , Il'est précédé d'a ucune bulle du pape
qui soit relati ve aux possessions de l' archevêqu e citées cl ans ledit b,.eve. _
Pour j ustifier ce fait , nous prod uisons un certifica t déli vré le 6 avril 1857 ,
à la préfecture de Marseille, qui l'att es te en ces te rm es : , No us, secrétai re« généra l de la préfectu re des Bouches-du-R11()ne , cel·tin ons qu ' il résult e de
• l'inspection des anciens ca rtulaires de l' archevêché d' Arles, co nse l'\'és aux
" Archives départ ementa les, que dans le litTe noir , folio cinquan te-un , et
" le livre li, folio qua tre vingt dix-neuf , rade de l' ann ée Il e"f cent vingt ,
« commençant par ces mo ts: breve de terris quas Manassés .... n 'es t précédé
• d'aucune bulle du pa pe qui soit relati ve aux possessioll s de l' archevêque ,
• ci tées ùans ledi t breve. - Eu foi de quoi nous avons délivré le prése nt cer« tificat, sur la dema nde de Me Taverni er, avoca t à Aix. _ Fait à Marseill e,
• le 6 av ril 1857, par M. le secrétaire -gé néral rempl issant les fonctions de
• préfet , le co nse iller de préfect'JI'e , signé FOUR NIER , ct plus bas, _ vérifié
« sur les carlulaires. L'archi viste du départ ement , signé DE R,CA RD.
La seconde obj ectio n n'es t pas plus séri euse. Les deux titres de 920 n'en
fout qu' un seul ; la charte de 920 et le breve de 920 se co mp lètent l'un par
l'autre; ils concouren t au même résultat. Le premier est donn é pour confir mer à l'al'chevêque omnes res quas Ros lagllus à predecessoribus et à 'lObis
151 -
ncquisivit. Leseco nd contient l' énumération et l'inv entaire de ces choses, Peu
impor te donc qu e l' énon ciation des pêcberies soit dans le premier ou dans le
.eco nd. La preuv e par titre est loujou rs fait e et parfaite, el en outre, il est
fa cile de l'oir qu e ces acles donnent la nature précise des droi ts de l'archevêqu e sur ces choses , puisqu ' ils in terviennent ad jus et PROPRIETiTEM pour
conférer le droit de PROPR IÉTÉ et qu e ce mot dit tout.
II. La Charte de 11 U . - Le mémoire de l'Etat obj ecte ici que l' acte se
tai t sur la nature du droit conféré sur les pêcheries. - C'est une erreUT
év ident e.
L'acte dit en eITet que c'es t une dOlla/ioll que l' acte renfe rm e , ou un e confirma tion de propriété (dona tio, seu huju s pri vilegii COllfirmatio ; confirmamw
libi DOM1NIUM ). La donation transfère la propriélé. C'est un mod e d'acquérir,
Le donataire devi ent propriétaire absolu, quand la donation n'est pas limitée,
La confirmation de la propriété est encore décisive. On ne peut rien dire de
plus fort.
.
L' Etat demande encore, à l' occasion de ce ti tre , pourquoi ce lle dona tIOn
ou ce tte co nfirmatio n dans la propriété déja existante sur la tête des arche,-êqu es.
. .
Nous avo ns déja fourni , à cet éga rd . depuis longtemps , les ex pll ca lrons
historiqu es de ce fait. On peut eo voir le détail aux mémoi res de 1849, p.
63 64 et suivantes, et de 1850. p, 39 et suiva ntes .... On y verra que le
bé~éfice eccl ésiastiqu e co mme le fi ef, constituait Ulle propriété d.éfiniti ve ,
héréditaire , transmissible. et qu e ces actes de confirmatIon en ét31ent la reconna issance la plus énergiqu e et la plus puissante.
III. Cbalte de 1223. - Pour toute obj ection , le mémoire de l'Etat se
borne à di re, qu e l' ac te n'énonce pas si les pêcheri es constitu ent des drOIts
de pnopriété fon cière.
Nous répondons qu'on se trompe étrangement , et qu e de deux cÔtés,
eelle vérité ressort incontestable et sai llante, D' une part, en elIet, l'archevê-
�-
152 -
que expose qu'i l ti ent les bordigues IN PROPRIETATE SUA : de l'autl'e, le comt~
de Prùvence LB SOUVERAIN, s'engage à ne leul' nuil'e en aucune espèce de manièl'e, lleCarcentur, minuallll,r, aul deleriorenlur , C'est donc d une propriété
ordinaire qu ' il s'agi t ici, elqui emporte le dominium tout en tiel' , avec l'obli ga tion pour le souveraill même, de le respecter,
IV, La Charte de 1292, - Le mémoire de l'état fait, à so n occasion , un
siogulier argument. L'acte, se lon lui , aurait réuni la bordigue du Roi au
domaine de la couron ne, - Mais qui peut en douter, puisqu e c'est le comte
de Provence qui l'acquiert ? L'observation n'a donc rien de neuf ni d'utile,
- Ce qu 'il faut remarquer, c'est que cett e réunion ne l'a ni détruile ni
supprimée : que les comtes de Provence l'ont possédée depuis lors : el qu' enfin
Ils l'ont de nouveau aliénée, en 1 ~8 1 , au pront des auteul's et de l'hoirie de
Galliffet. - Ce qu' il faut remarquel' encore, SUI' ce titre, et ce qui pal'3lt
échapper aux auteurs du mémoire produit pal'I' état, c'es t qu e si la bord igue
entre, par l' effet de cet actt!, dans le domain e des co mt es de Provence '
elle y entre en vertu du droit de propriété ordinaire des at'chevêques qu'i
la Ieur ont transportée, librement , volontairement , et à titre de propriété
pl'l\'ée,
V, L'acte de 1 q.57, - No us répétons, sur cet acte l'observation , qui
précède, le mémoi re de 1'E.lat n'ayant fai t aucune objeclion sur la seule
induction que nous ayons vo ulu en lirer,
VI. Le Testament J e i q.8 1, - Le mémoi t'e de l'Etat allègue ici qu e le
testament ne mentionn e pas la bordigu e du Roi par son nom spécial. _
Nous avons déjà répondu d'avance il celle objection, dans l' exposé cl es
tttl'es, nous y renvoyons, - Inutile de répéter ce qui a déjà élé dit.
VII. Acte,d u premi er juin 1379 et acte de 1550, - L'Etat se prévaut de cc
que le premlel' définit la bordigue : congregatio piscium artificialitel' (aCla , et
de ce que le second , da ns le procès-verbal d'estime Il'a pas compris les CG-
-
153 -
nat/aJ et lessèdes, - Mais qu' impol'tecelle définition ? Et qu' impol'te aussi celte
om ission? le tou t se trouve ex ubél'amm ent remplacé par ces mots de l'acte de
• 1550 : Le grand bourdigu e avec sa maison et LIMITES, dan s lesqu ell es pel sonne
« n'àse pêcher, horm is le roi ou ses fermiers;""", Item, un e bourdiguedu
rt passage avec sa maison et L!!IITES", Item un e bourdigue dite le Dommergal
« avec sa maison et limites » - \1 s'agi t donc là d'autre chose qu e d' une collection de l'osea ux el de pieux , il s'agit d' une propriété qui a ses limites,
pal' co nséqu ent tlD développement, une étendue matérielle , un ca nal , par
conséquent ; tell e qu 'ell e se co mporte aujourd' bai, En outre, si les estimateurs
de 1550 n'out pas eu soin de constater l' état matériel des ca naux, c'est que
par les règlements loca ux , leur profondeur était fixée ; que celle règle était
invariable et connue et devait servir de point de départ , pour j uger l' accomplissement ou le non-accomplissement des obliga tions imposées au détenteur ,
VIII. Les al'l'êts de 1781 ct ,1790, - Leur se ns, leur portée et les décisions qui y sont co ntenu es, ne sont pas même abordés par le mémoire de
l' Etat, - Nous renvoyo ns à ce q'J e nous avo ns dit dans l' ex posé des titres,
IX, La d é~is ion des domaines du 26 ni vôse an 4, - On allègue qu 'elle fut
rendue sa ns la co nnaissa nce des titl'es, Mais si , co mme on le prétend , la loi
de 1793 avait toul supprimé, l' admini stration des domaines aurait-elle ignoré
la loi ? Quant aux titres, ils étai ent co nnus du directeur loca l, le sieur Rippert , qui avait transmis SOIl 1'apporl sur les titres, - La décision rai sonne SUt'
l'acte de 1223 : sur l' absence ci e toute féodalité dans cet acte: elle parl e de
la possession longue eL COllslallte : des droit, reconn us pal' des jugemen/s solennels, On y argnmellte de ce que les pl!cltel'ies ex istaient avant la constructIon
de Martigues, Enfin , on y l'e pou s~e l'argum ent Bannai til'é de la publicité
de la pêche, - Que veut-on de plus? C'est un jugement émané du domaine, Il ne peut pas aujourd' hui le réformer, [1 a été rendu en connaissa nce de caUle,
�-
154 -
QU.H RI ÉME
PAI\TIE .
Possession trente fois trentenaire dtl Canal d de la 80rdigue du Roi
par les boirs de Galli D'el et leurs auteurs
ET PRE SCRIPTION.
Celte possession , qui remo nte au moins à 920 , forme à so n tour un titre,
et un titre des plus sacrés. Ell e a enge ndré la prescripti on. L' hoiried e Ga lliffet
l'invoque, et elle l'oppose forme llemen t il l'Eta t , parce qu ' ell e lui aurait acquis la chose litigie use , indépendamment des titres.
Inutile de rapporter ici les preuves de celle possession . Ell es sonl dan s la
série de tous les actes que nous avolls exposés. - 00 y renvoit. -II o' y a
plus qu' à se demander , en droit , si la prescription a pu s'acquérir ici
dès 920.
. Or, le doute n' est pas possible , après les profondes démonslrations qu e
nous avons fournies SUl' le droit qui régissait cell e époqu e , et qui a r~gi la
Francejusqu' à 1566.
Dans la première bypo thèse, la seul e vraie , dont nous somm es partis, le
canal é tant creusé de main d' hommes el étant 50 11 ouvrage, la prescription
de lrente ans en a acquis la proprié té. - Dans la seco nd e, les choses faisa nt
partie du domaiue de la couronn e, étanl aliénables jusqu ' en 1!S66 , elles ont
été prescriptibles. - L' éd il de 1668 constat e que le. prescription pouvait les
attemd re en Provence. On peut en voi r la preu l'e p. 51 du prése nt mémoire.
- Voir aussiles remonlrances de la noblesse , p. 229. 230 , 236. Les loi s du
premier décembre 1790 , art. 37 et du 14 ven tôse an 7, art. 2 , veu lenl que
- 1,,ce droit ancien soit appliqu é, et qu'il soil la règle, en pareille matière ( V. p.
5 \ et 52 du p" ésent mémoire ) quand il s'agi t de pays réunis à la France. Les ancienn es ordonna nces on t tou jours, su r la mati ère des pêcheries, consacré
la prescription. C'é tai l la disposition expresse de l'ordonnance de 158. , art.
84 et85, p ~ ,. nous citée plus haut. - C'est la disposilion expresse de celle
de 168 '\ , IiI'. 5, tit , 3: art. 4·, qui mainti ent les possesseurs pour les parcs
éta bli s avant 15U. - Mêmes disposilions maintenanll es possesseurs dans les
"ivières navigables, par la grande ordon na nce su r les Eaux-et-Forêts, til. 27,
art 4- 1; et par les déclara tiuns "oya les d'avr il 1683 ct décembre 1693 ,
( Néron, tom. 2, p. '183 et 25 1 ), pourv u que leur possession so it antérieure à
,1566. - Enfin. l'a rticl e 2. de la loi du premier décembre 1790 n'annu lle
que les ventes et aliéna/iolls postérieures à 1566; dans ce mot aliénatiOlls
est comp ri se cell e qui résul te de la prescription : el par là, il fai l bi en l'oir
que les aliénations par prescriptions an lérieures à 1566 sont mainlenues.
Ai nsi de tou t cÔté rev ient ce lle vérilé que la p" escription aurai t été acquise
au profit de l' hoiri e de Ga ll iffet et de ses au teurs, dans l'intervalle de 920 à
1566,e t qu'elle se se rait co nfirm ée par la possession de ·1566 à 1857, son point
de tlépa rt aya nt été léga l et uti le. - Jamais rempart plus solid e que celui- là.
.lamais possession plus so lennelle. A chaq ue siècle elle a triomphé. A cbaque
siècle elle a prot es té de ses dro it s ellcs a fait conS<lcrer. Ell e estdo nc devenue
un titre distinct el séparé des atllres. - Aussi, l'hoirie de Ga ll iffet lui a-t-ellc
conservé une place spéci~ l e dans sa défense .
CONCLU D à ce que, faute par l'Elat d'avoir reconnu le droit des deman- .
deurs, exposé dans le mémoi re adressé à M. le Préfet des Bouches-du-Rbone,
le 27 septem bre 1856, il plaise au tribun al faire droit;\ l' ex ploit in troductif
d' instance du 19 déc. 18~6 et aux présent es co nclusion s, et de même suile
dire, reco nnallre et décla rer qu e les boirs de Ga lliffet ont, en vertu de leurs
titres et de leu r possession, ou de cell e J e leurs aut eurs, trente foi s trentenaire ,
et de la prescription qui en résulte, un droit de propriété patrimonial et {>rivé sur
le ca nal dit du Roi et ses bords, ainsi qu e sur la bordigue élablie et existante dans le susdil ca nal ; di re encore qu' ils lui apparliennenl eL ne so n! pas
�-
156 -
uo e dépendance du domaine pub li c ; ordo nner qu' eo co nséqu ence l' Etat ait à
le, reconnaltre et co nsidérer comme de vrais et légit imes prop rié taires; enfin
faire inhibitions el défenses à l'Etat , en la perso ooe de M. le Préfe t du départpment , de les troubler daos leur possessio n et propriété du ca llal , de el de
la ses bords bordi gue du Roi , et en outre condamn er J'Etat aux dépens.
A. TAVERNIER père , Avocat .
Ancien B;itonnit> l'.
L. VIAL , Avoué .
MEMOIRE A CONSU LTER
POUR
M. LE MARQUIS DE VALORI
ET SES FILS
l mpr illlule Iu.r, 20, r ue du Collège, Aix.
�-
156 -
une dépendance du domaine public; ordonner qu' en conséquence l' Elal ail à
les reconnallre el considérer comme de vrais et légitimes propriétaires: en6n
faire inhibitions el défenses à l'Etat , en la personne de M. le Préfet du départpment, de les troubler dans leur possession et propriété du cana l , cie et cie
la ses bords bordigue du Roi , et en outre condamner l'Elal aux dépens.
A, TAVERNIER père, Avocat.
Anl'i en B;.ÎtollnÎ.'I'.
L. VIAL, Avoué.
MEMOIRE A CONSULTER
POUR
M. LE MARQUIS DE VALORI
ET SES FILS
Imprlmerle ILL', 20, rue du COllége, Aix .
�MEMOIRE A CONSULTER
POU R
M. LE MARQUIS DE VALORI
E'r SES FILS
________
O>O~~c=~------
M. le vicomte Henri de Valori, fils de M. le marquis de Valori,
baron de Châteaurenard , a publié, dans le courant des années 1857 et
1858, une histoire ou précis de la baronnie de Châteaurenard.
Épris des études historiques, il a aimé surtout les an tiq uités provençales, et parmi celles-ci, avec une prédilection bien légitime, les tl'adilions que l'histoire nous a transmises sur cette illustre baronnie, possédée en 1380 par son glorieux ancêtre, Gabriel de Valori, qui la reçUt
de la reine Jeanne, à tilre d'inféodation, et qu'auj ourd'hui M. le mal'quis de Valori, son père, possède encore, après six siècles.
Ce résum é. historique, brillant et animé, révèle dans son auteur l'art
d'écrire et la passion de bien faire; c'est aussi une œuvre de piété filiale
envers le manoir féodal enrichi de lant de souvenirs, qui méritaient
de ne pas mOlll"ir, et surtout à l'égard de ceux qui en ont fai t l'honneur
el la gloire.
Dans ces pages, où vit un si grand respect, du passé, un si gra nd amour
�-
4, -
du devoir, une si hant e int elligence de ce qui constitue la l'l'aie noblesse,
l'aut eur a nétri , en tcrm es gé néraux , l'usurpation qui se rait Jans le
monJe des titres nobiliaires, et il s'est plaint modestemen t, dans une
not e rejetée ù la fin de son réc it, tic ce que M. d'Aymar de Mon tsall ier,
membre du Corps diplomatique, <I,'ait prb, sans au cun droi t, le nom et
le titre de marquis rie Châteaurenard, en ayant soin d'éli miner son nom
patronymique, qui est d'Aymor.
Cette partie du remarquable écrit a fait surgir, de la part des membres de la famille d'Aymar de Montsallier, une incrimination et une
plainte contre l'historien.
Il leur a, disent-ils, tl'ès injustement dénié le droit de porter le nom
de Châteaurenard.
Ils revendiquent celui de le prendre toujours.
Ils demandent que la main de la justice efface ce que la mam de
l'histoire a écrit.
C'est à montrer que l'histOrien a eu raison, que ce mémoire est destiné. C'est à prouver que la bal'onnie de Châteaurenard n'a jamais appartenu aux d'Aymar de Montsallier, et que, par suite, ils ne peuvent
s'en dire ni baron, ni marquis, ni en porter le nom seul , comme
récemment ils ont voulu le faire, que ce mémoire est consacré .
C'est là son but, c'est son objet.
Rien de sacré comme la propriété d' un nom.
Rien ne touche plus à l'intérêt des famill es que sa conservation.
Rien ne serait plus fun este que la confusion en cette matièl'e.
Tout en n'étant pas un nom patronymique, Châteaurenard n'en est
pas moins une propriété à laquelle le possesseur a dro it de ten ir,
Les lois ramènent dans les limites du dro it ceux qui usurpent des
noms qUI ne leur appartiennent pas.
En défendant son écrit , M. le vicomte de Valori défend aussi sa famille contre une usurpation qui touche à ce qu'elle tient à honneur de
-0conserver seule, au nom que les siècles lui ont transmis et qui réveille les
souveni rs les plus atlachants, liés â la terre de Châteaorenard comme au
berceau de ses ancêtres ,
Quelques fait s qui ont amené plus directement le litige sont à exposer,
ava nt de fixer les questions qu i naissent de la contradiction soulevée par
la fam ille d'Aymar de Montsallier, tvntre M, Ic vicomte de Va lori ,
F~'TS.
M. le marquis de Valori apprit., il ya peu d'a nnées, que M, le comte
d'Aymar de Mon tsallier, membre du Corps diplomatique, prenait le
titre de marquis et le nom de Châteaurenard.
Il chargea M, le vicomte Henri de Valori, son fils, de l'éclairer sur
sa position, et, tout en lui faisant connaître son erreur, il lui proposa
toute espèce de transaction propre à ménager son amour propre et
compatible avec l'honneur el la délicatesse.
M. le vicomte de Valori apprit que M, le comte d'Aymal' de MontsaIlier ayait quelques relations suivies avec M. Borel-d'Hauterive, l'auteur et le publicateur de l'Annuaire de la Noblesse, à Paris, Il crut que
cet honorable int ermédiaire pouvait servir à amenel' une solution amiable. Il s'empressa de meUre à sa disposition les archives du marquis de
Valori, afin de l'éclaircI' SUl' l'erreur commise par M. d'Aymar de Montsallier.
M, Borel-d'Hauterive écrivait en efTet, le 15 juin 1857, au vicomte
de Va lori, en ces tel'mes :
..... Ectairé rar tcs documents que vons a,-cz eu ta bonle de me communiquer,
j'ai fait des recherches sur les droils de la famille Aymar au DOIll de Cbâteaurenard ... "
�-6 -
7Châteaurenard, le 22 juillet 1857.
Et plus bas il disait encore:
Une lettre signée Burel-d'Hauterive que j'ai reçue, Monsieur , m'a pprend qu'une
VOliS "fel cu l'obli gea nce de me com muniquer aussi les premiers degrès oc la
filiati on de la famill e Ayma r, dep"is Louis Aym aris, frère de Paul Aymaris, curé
d' Ansouis, ,'ers 1400, et père de Dominique Aymaris qui épousa, en 1470, Anne
(Brssonn e ~ j e crois). Ces cieux degrès ct ceux 1" de Guillaum e Ayma ris, marie, en
1494 , a" ec GuilielOelle (C haimr ?); 2" d'A ntoine Aymaris, nolaire de Perluis, marié
en -1528 , avcc Magdelein e (Roman)'?), ne me soot connus que par le lableau gé néa-
logique manuscrlt Gue vous m'avez monlrë.
N' aoriez-vous pas dans ''os archi ves d'autres pièces il l' appui de celle filialion?
Guillaum e Aymar ou Aymaris, reçu conseill er en 1554 est dil dans la maintenue
de Rober t de Briançon, fi ls de J ean Aymar et de Victoire d'Estienne ; cela ne concord e pas avec le lableau gènéalogique, où il es t dit fils d'Antoine Aymaris, nOlaire
de Perluis, el de Magdeleine Romany.
Si VOliS pouviez avoir l'obli geance de m'éclairer sur cc poinl, vous me rendriez
bien ser vice, et je vo us Qrierais d' user de moi , en relour, si vous av ez heioin de quelques recherches, notcs ou renseignements à Paris. Cela ne m'empêcherail pas de
vo us en co oser ver Une vi"c reconna issance.
Veuillez agréer, Monsieur le Vicomte, l'assurance de mes sentiment.! de haute
considéralion.
H . BOREL-D'HAUTERIVE .
Le vicom te de Valori crut alors qu'une ùémarche directe ùe sa parr.
yis-à-yis de M. d'Aymar de Montsallier, en supprimant les lent eurs
d'une négociation inlermédiaire, aboui irait à un résultat plus prochain .
Alors s'engagea, enlre ces deux personnes, la corr espondance suivante, dans laquelle quelques erreurs ùe fait , relalives aux anciens titres
se r~n co ntre nt , qui seront corrigées et relevées dans le c.ours du présent.
mémoire, etqui ne devaient pas empêcher la production de lettres, exprimant si bien les procédés délicats et honorables de la famille de Va lori.
Le22juillet 1857, M. le vicomte de Valori écri\'ait donc de Châteaurenard à Turin, à M. d'Aymar de Mon lsallier ce qui su it:
erreur involontaire \'OUS aulorise
acroire que vous ayez le
druit de pOfl er le Dom
de Cbâteaurenard, seigneurie qui a appartenu à la brancbe de "olre famill e dont
nous descendons par les femmes, el qui s'est éleinle dans la nOIre. J e dois, au res pect
que j'éprouve pour lou l cc qui louche aux droils de DoIre famill e , comm e à la baule
estime que j e professe pour voIre nom, qui s'esl allié au nOIre par le passé, de vous
éclairer sur une quesli on qu e le manqoe de lilres et le défaul d'arcbi ves a dû vous
rendr~ diflici l" à résoudre. J e comple, Monsieur, sur la distin clion qui doit êlre
propre â. vbs sentiments e l à volre naissance pour vouloir bicn me sui,'re avec bienvei llance sur le lerrain délica l où je vous prie de m'accompagner.
Avanl d'élablir la queslion de droil , je me permettrai , Monsieur, de vous faire
connailre un fail bistorique qui vous prouvera combien es l puissanl le souvenir bistorique qui se rattache, pour noos, au nom de Cbâteaurenard.
En 1380, le roi de Naples, Louis d'Anjou, comte de Provence, inféoda à mon an·
c~ tre, Gabriel de Valori, vice-roi de Naples ct de Calabre, la terre de CMleaureDard qui, alors comme de DOS j ours, D'élait et n'a j amais clé qu'uDe baronnie. Cette
lerre passa à ses 61s , Bartbélemy el Gabriel, et ell e ne sorlit de noire maison que
par écbange avec les seign euries d' Eguilles et de Mérargues. Vous voyez donc,
Monsieur, que nous avons raison CD désirant conserver, comme apanage à nous seuls
dévolu, le droit de porter le nom du Châ teau qui , le premier, nous a donné asile
lorsque nous avous élé proscrits de F lorence au qualorziéme siècle.
Voici, maintenant, la queslion de droit :
•
Cc fut en 1,,30 que François d'Aymar, frèr e lIln . de 61. de Montsalli.", votre an-
cêtre dir ect, acbela la baronnie de Châteaurenard, de François de Villeneuve, marquis
de Trans el des Arcs qui l'availlui-même ache tèe; celle terre resla dans la branche
ainée de la famille d'Aymar jusqu'en 1727. En celle année , Sexlc·Gabrielle d'Ay mar,
fille unique de Joseph à'Ayma r e l bériliere de sa branche, apporla la baronnie de
Châ teaurenard dans la maison
Thomasin , marquis ùe Sainl-Paul el ,'icomie de
oc
Reillaune.
Une clause form ell e du cOIl/l'at de mariage, qui e.,t so us mes yeux, {ut qu.le "am
de Chateaurenard serait toujou... ajouté à celui des descendants mdle. et {emelles de
Sexte Gabrielle.
Un même événemenl apporla la terre de Châleaurenard dans nolre famille: mon
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g rand- père, Louis-J[arie-Antoine, marquis de Val ori , d'Estilly ct de Lèeè, ayant
épousé )Jari e-Josephin e-Heurielle de Thornassin de Saint-Paul , beritière de sa famille en 1781, cl avec le même engagement par eonlral d'ajouter le nom de Châteaurenard il scs titres . C'cs t pour ce'a , Monsieur, indépendamment du droit, qu e
mon père ajoute touj ours dans les actrs publics le titre de baron de Châteaurenard a
celui de marquis de Des tilly ct de Léte , etc.
J(' ne VOIl S cn dirai pas plus long, Monsieur , car vous reconnaîtrez avec nous,
nous l'cs perons, qu e nous sculs, qui descendons des barons de Chilteanrenard et qui
possédons la baronnie par droit de naissance et de pussession, sommes autorisés il ell
port er le nom.
La question esl délicate ct le cas es t grave, puisque vous vous êtes fait dénommer
ai"si de puis quel'Iue temps; mais je crois qu'en agissant av ec loyautè ct cùurtoisie ct
eo vous entendant avec oous, vous pourrez concilier votre devoir avec celui de vos
interèls du monde ct de société.
Co n6ans dans la bonne vo lunté que nos procédés sollicitent, nous allendons, Monsieur , que vous vouliez bien nous faire co nnaitrc votre détermination .
Venillez agréer, Monsieur, l'ex pression de mes sentiments très- empressés .
A celle lettre pleine de courtoisie, M. d'Aymar de Montsallier répondit en ces termes;
Turin, 20 aoùt 1857.
D'après la lettre qu~ vous m'a vez écrite, Monsieur, il la date du 22 juillet dernier et qui@st arrivée à Turin pendant mon absence , cc qui a retard é ma réponse
jusqu'â cc jour, je l'ois qu e vous supposez qu'une erreur involonlaire m'autorise à
croire que j'ai le droit de porter le Dom de Châteaurenard, Cl que depuis quelques
années je me suis fait dénommer aiDsi. Malgré tout ce qu ~ celle suppositiou a
d'offensa nt pour mon caractère, surtout lorsqu'ell e es t jointe au soin que vous avez
cu de ne meUre sur l'adresse de votre lellre qu' une quali6 cation officiell e, 'lui s'appliquait aussi bien au deuxième secrétaire de la légation qu'à moi, je suis trop convaincu de votre loyauté, Monsieur, ct trop certain que vous regrellerez le procédé
quand vous connaitrez mes droits, pour ne pas entrer avec vous dans des explications que la posiûon exceptionnell e où vous vous trouvez vis à-vis de moi m'engage seule il vous donner.
Depuis la séparation de la branche d ~ la maison d'Aymar , dont mon frère et moi
somm es auj ourd'hui Il\S rrprésrnl:III IS , d'arec la \Iranchc ainl'C qui s'cst élcinlr dans
la ma bnn ùe Th omassin , lous mes an cêtre:; direc ts ont pOf te le nom de Ch.) lca urcnnrd , co nj oint emcnl n"t'c celui dr (\' A ~ mar dan s les adrs de la "il~ ci,-il e et ) depuis
mou arrière g r'lnd - p ~ re qui s'es t clabli par ma ria ge dans l' Agenais en 1ï23) n'o nt
été désignés dans les l'mpl ois publi cs ct dans la sociele qu e sous le nom de ChOtea u renard . J'ni ) entre les mll ins, tous les nelt's de hart <! rm~, co ntraIs de mariage, teS IJmc:nls, brevcts de grades mil it ni rrs, cie" etc. , qui leur so nl relatifs, Cl ils funl foi decc (lue je virns ci e dire: je p os~èdc ('n outre Lous 1('5 docunl rnts Il cce:,~air es pour êtahlir ma rllinli on , depuis Guill aumc d'''\J llwr: conseill er au parl ement ci e PrO\'c nce
155 4.
L'aut r ur de noire hranche. J oseph d'Ay mar, haron de Monlsa lli er, eta il I ~
cleuxième rlls Il e Franço i:'i cl' J\ )'1I13 r , pfl!sid ent il la Cou r des Comptes, le premier de
('n
notre nom qui nit r ns~c c1 é ln I ~'r re de Chàteanrcrwrd . J'n i , sous Ics JCux, le tcsla ll11'nt de cc Fran çois cl' A., mar , fait il Ai x, le 1er ja uvi er i 031 : il J es t qu alifie haron
de Ch;Heaurenard : il lcguc la terre de Chàlcaur enard à so n fil s aine, Jea n.François;
celle de Montsalli er à Jose ph , so n deuxième fil s, en le substituant lui ct ses descendants il son frère ct aux descendants de son frere,si ceux- ci meurent sa ns pos lerite :
la m6m e substituti on es t elablie en fa veur rlu troisième fil s, François-Féli x ct de ses
descendauls. Cc troisiéme CIls, qui ne laissa pas de postérité, etail , dil Roberl dans SOll
rlOb i/iaire de PTove"ce, co nou a la Cour so us le nom de marq uis de Châtea ure nard ,
Cl j'ajoute qu'il ne portait qu e ce oom dans les arm ces où il a scn i ri ng t-deux ans
Les trois CIls du premi er baron de Châteaurenard, de notre ma ison, portaienlaj outé il
celui de d'Ay mar ou lout seul , le nom de la terre possedee par leur perr. Le fils de
J oseph d'Ay mar s'a ppe ll e dans tous les actes Henri d' A)' ,na r, comte de Chàteaurenard, marquis de Mo nlsallier, cie: c'cst mon arri ère-grand-père cl il esl mor l li eutenant colonel rl e drago ns : mon g rand-père Joseph d'Ay mar esl cgalemellt dènommê
co mte de Chàteaul'enal'{l , marquis de Montsa lli ('r, il CS l mort brigadier des armè('~
du Hoi : les div ers hre vets de leurs grades, qu e je pOlsedc, ne dés ignenl l'u n el l'a u_
tre que par le nom de CbàleclUrcnard , el ils so nt ainsi nommés dans les Almanacbs de
Cour an.terieurs il la rév01utioo de 1789. ~l o n père, qui a épousé Sophie de Vill eneuve Ba rge munl , CIli e du Prefet de, Bouches-du-Rh6ne sous la Reslaura tion , n'a
étc connu qu e so us le num rlL' Châtea urenard ct il e,iste assez d ~ parents tl e ma mère
dans votre dCparl ement pour qu' il ,'ocs soit facil e d '~ tre Cd iClé à ce suj et ; en un mol,
~1 o u si eur , le nom de Châtea urenard appartien t à Ill on frère ct à moi par droit de
desc1)lld ance directe ct par u ne possession de près de deux siècles, possession publi-
�-
.fQ -
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qu e', non in terfOmpU l', gênèra le ,car Il'3 fcnllHl's so nt dés ig l:('es tOllt rs dans 1('$ actl'S de la "ic ci,'il c paf les noms dc d'A) Ill ..wd de
ChÙIt'311fCllan J ,
Cl in conl cstc(' mèll1 c
par la bran che aîn ée lorsqu cll e l' x is tait , ('ar ra i entre les Illili ns un e corres pundance
élahli e enlre mOIl arrii'rc-gra nd - pèl'e et di vers memhres Je la brclO che aill ee qui lui
dunnellt tous les noms ct titre de m ~11'qui s de Chàte311rènard - I\lo nlsalli cl' .
Depuis quc j'''li appr;s ) pa r ma tanlt' , Mme de Yill cll eu\'c , qu e \fOU S a\'iez uu
jour . (' hel la duchesse de Vicence, exprimé ùrs dOlltess ur Ill on droi t cl port er le nom
de ChàleJurrnanl , j'avais l'intcn:ion , -'Iousicur, si j'avais l ' h o lll1 (, lIr de \' OtiS r e ll cantrer! de VOU5 offrir de mcttre sous \'os )'eux mes :l rt.: hi" rs de fan lill r. Auj our(l'h ui, aprè-s la dcnegat iun absolu e qu e " OU5 "cm'l de me fai re par \'o tr c lell re', je n'ai
plu .;; qu'il attendre l'occasion de proll\'cr 1110 11 droit n'tlll c man ière {illi 111 (' perm ette
d l' ,Iëtruire compl ète llient cl pu hliqu C'Ill ClIt 1' 0pioion ('J' ru née que VOli S Illan ifcstrz à
('c t cgard: si ce tt e occasioll sc présentl' , j e ~ a sai!'.ira i av('c rm prcssc mt'Ill .
Ycui llez agréer, ) Ionsieur, l' l'x pressio n de mes se ntim ents très- clllprcsr és ,
CHATEAURENA HD .
La f1n de celle lettre respire l'aigreur . E lle a nn o n ~a it un esprit bien
éloigné de la conciliati on. E ll e se termin ait. pal' la signa ture de ChlÎ ler/Ul'el/(ll'd , et ce mot scul l'cs5emblait à un e provocation et ù un déf1.
Le ,-ico mt e de Val ori répondi t av ec la modérati on qu e donn e la co ns"iente de son droit el le calme qui dcva it acco mpagner la pl'O l'osilion de
tran:l3ction, dont il étai t porteur dc la part de M. le marquis Valor j, SOD
père _
Sa lellre, du 24 aoCi t '1857, est ainsi co nc: ue :
Châleaure nard, le 24 au ùl 1857.
Mo n ieur j ce sera it pourLanL a mOl de me pl aindre du peu
d e modération av cc I. quelle vo us répoll dez il une lellre où j e n'ai em ployc qu e des
fJ rm es d' un e polilesse pl eine de courloi, ie .
," o u:, \'OUS plaig nez,
J e suis offi cier, el j'avoue que j' iguorais q u' il y eû t deux secrélaires allacht's à
il -
voIre Il·gali on. Malgre cct incid ent , Monsieur , je n\' L1 ClJ nlÎ llu craj pas moins à
ag it' de la m ~ m e manière avec VOli S, ct je m'empresse de \'OLI S a\'rrtir qu' un e ordonnan ce ro)'alcc n parchemin , flu e rai sous les ycux , rendu c en faveur du rna rq ui~
de SI · Pau l de la maison de Thomassin. refu se il cc Françoi s d'.4 !fm ar , ci tc par VO LI S,
le litre de haroll de Chàlcaurcnanl, aHendu qu'il n'ava it jam ais elé mis en p oss('s~ j o n
léga le dudi tl icu. Vous apprccicrcz le fail comm e vous l' ent endrez, IUonsil' ur , mais
moi qui n'a i pris la plum e, nu nom de Ill on pèrt·, 'Ille pour essayer d'arranger a
l'ami :-a hl c un e f"l ffairc où, a van t fout, nous dc"ons, dans ,'o lre intérN cornill e dans le
no tre , évit er la co nfusion dC5 nOl1ls, j c me perm ets de \'OUSdemand er, tont en :lvouao t
qu e j e n'ai pas le droil de le faire, pourqu oi vous ne con ac re riez pa s le nom de
voire brancbe parl 'arldilion du nom de "o nlsallicr " ccl ui de Chàleaurenord , auq ucl
vous croyez avoir dc!7ô droits . Vous l'avouez dans vo tre leure du 2 0 aoùt , les ainés
de voire fam ill e vuus appelaient C"àlea urcnard- MonISalli er j pouretuoi ue l'crpCluezvous pas le fait ? Vous le \' o)'t'Z, :\l O Il ~ j c ur , nous n'avons qu'une chose à cœu r, c'est
rie concilier les droits cl l'amout' propre de chacun ; si, dans l'avenir, il surgissa it
de celle situation quelque éclal fàc heux , il vous seul la responsabilit é.
Rece vez . . Mousicm', l' assurancc de lUes sentiments tl'ès c1nprcsscs.
C'était pOll!' restet' sans regret que cette réponse fuI faite. Le parti dc
M. d'Aymar dc Mo nt sallier était pris. M. lc yicom lc de Va lOl'i feignit
de ne pas l'a perccvoir, mais loute pens~ e de transaclion était rejétée par
M. d'Ay mar de Mo nl allicr,
Aus i, le vicomte dc Va lol'i qni , dcpuis deux ans, al" uit , cn pOt't€'feuillc , l'hisloire dc la Baronnie de Châteaurenard , conc: ut- ill a pensée
de la publicr.
Il le f1t. il Lyo n, dans Ic rec ueil int itul é :a F RANCE lillél'a il'e, artist ique
el scientifique , puhlie sous la directi on dc M. Ad ricn Pcladan.
Le prcmicr nUllléro du rec ueil IleLti omadairc, qlli con lient la première pa"c de celte histoirc , parllt le 24 oc tobt'c 1Hil7. C'é tait un chapitre tI'h~rodnctiol1 , 50llS form e de lcttrc. Cc!.l c introdu ctio n est dédiée
en un paléograp he éminent , ~'1. le co mte Augusle <lc Baslanl , aut eu r
des Mon1/.menls el pcinlul'cs des J/Wl111ScrÎtS, qu i, llcp uis longtemps, n'a
�-
12 -
c<'5sé tl e guide!' de ses co nsei ls et dl' sa s(icncc le jeulI L' ulil elll' de la hnl'onnl C dc Ch;ileu lII'l'n ar'd. Il Csi l!lile ti c le l'CPl'O tlllil'c cn enli el'. L(,
yoici:
l'I!STOIRE DE L.\ n.\HO:-l ~ I E DE C H .\TE .\UI\E~AHD _
.uC t-otltlc.ion.
A :\lo :"(sIEuR
l K
COlIT E AUGliSTE VE BAST."nv ,
'I onsicllr Ic comte, en déroulant S,lU S lC's y cnx du leclrur 1""$ alllw lcs d'tille ha1'1I 1lllie cêlèhr ... , je n'ai pas cu la prèSOlllpl io n d'en èlre l'his((JI irll ; SO Il hiMoire sC'
troUl'ait tout enlicre dans le chartrier sëcu l:t irc et la vérité cn emanait él\' CC les rl ocumenLs les plus autb entiqu rs ct les plu s irrccusaL les . Dcux IH li lil's p~issa ll( s m'o nt
délermine â entreprcnrll'e une t"chc qu e nos archi\'cs m'ont rendue raci lc; le premier
a elc d' inli'resser le publi c poe le récit d'evenelUe nls impOrlau!s, ~i eo qu e loca lisés ct
sc li ant ctroitem ent à l'hi:; loirc gcnérale de Provenc ~ . L'orage ré,'oluti olloaire,
d'ai ll eurs, qui a passé sur \('s tours de Châleaurenard, en les rcuversant , pourrait
bien uu jour s'en preudre au charlrier de la nob le dem eul'e cl effa.:er ainsi jusqu 'au
souvenir de cc qui a été i g rand. Le seco nd motif a etc d'edairer l'opin ion au s uj el
ùe la rccenle usurpaliou du nom de CMteau renard et du lil re allac he il ce gralld
6ef; j e n'ai pas ,'oulu qu e l'i g noran~e fûl au se"';ce de la mauva ise foi,
Si \"OUS examin ez la question so us le premier point de vu c, vous sui,'I'C'z a\'cc
moi, ~Ioll s i c ul' , I c~ des linees glorieuses de ceUe puissa nl e scj g n e uri e ~ depuis So n
bercea u) qu i touche il l'antiquité, j usqli 'a nos jOli rs. Comme a rrhéo logue, vo us ad mirerez le tombeau 'fui a elc cO llstruit pour un tribun de Ju les Cesa r, cr cMl eau
commell cê en 700 et lermiu o en 1177 , C~ cloitre l'omal) élevé par un co mpa g non
de sa int Crsaire, et eo fin cett c inscriptio n qu 'un IroubtJdour a g ravcr sur la pierre, il
y a sepl siècles, ct donl .. ous lirl'z avec moi les ca racleres gO lhi'fu l's. Comme adorateur Ju passé, VOus \'crrez a\'cc joie dans ce livre les noms dc Ua,'molld -UérenO"cr
•
0
,
de la rcine Jeann c, de Benoit X III , la mâle ct intcrcssan te fi g uJ'e de Ta lln C'guy du
Cbàlel, le déyo ùlIlelil des sé!léehaux de Bea u vau Cl l' béroïsme de Chrislin e, comlesse
de Saut.
Voila pour la .. aleur historique de cet ouvrage . Qu ant il sa .. aleur morale, elle est
plus importanle eDcore; car j 'a i écrit ces pages pour défendre des droils aussi imprescriptibles ct beaucoup plus augus les que ceux des co nuaissances bislori'lu cs.
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13 -
En effet , Monsieur } nous \'ivons il lIn e ëpofJu c où plus qu 'à toui e au lre on ~e
li",e il un In,fi c sc~ nd ale u, cl d'a ulant plus '; Irange qu' il esl fail par ceux !ini professe llt les prin cipes al' rc lesqu els 0 11 a essa)'é depuis sni,an le ans de ~ aprr ct de
démolir Pau cÎcnnc no"\ esse Cl rn èmc d {~ nier so n cx is lcnC(': je "eux p:lrlrr du vo l
Cl
de l'usurpati on des noms
Cl litres.
Or
un nom cs t
la
pr opri été
la plus sacrèl'
l'l
la
plu s invi olab le, c'cst la seul r chose hors de comm erce; pour les uns, c'cs t
le surn om des v('rlu s gU<-' ITi ères ; \lou r les au tres, c'esl le sym bol e de l'homme
(PE lat , du sava nt , de l'art iste. Cr.l ui qui usurpe un nom rail donc un dommage il la sociélc, il co mlllet un acte au préjudi ce de la verite Cl ~e l'honn cur 1 c t
pourtant auj ou rd'hui rÎ ('fj n'cs t plus co mmUI). YO:Js trouve rrz , pour pcu que ,tOUS
cberchi ez, un nombre toujuurs croissant de Cl'S homm es va ins ct prtib qui, saisis rie
1" monomani e des distin ctions nohtli airrs, cacbcr. tl eur honorabl e, mais peu brillant
nom patron) miquc so us un lIom d'ap parat em pru nté à quelqu e ferme que leur O'l t
lëguée l'éco nomi e c Lle travai l de leurs pères, dont ils di ~;, il1lu l cnt ou reni clill e nom.
Bien plus, chose admi rab le il vo ir, les barons de la gra nd e croisad e du quatorzième
siècle elalent des pl'élenlions que n'o ut jamais monlrées les fil s des com pag lJous
d'arm es de Godefroi de Bouillon et de B.audouin de F laudres . Toulefois, qu' ils ne s'y
trom peut pas, le peuple qui bouore, aime la vraie ct anl iqu e nob lesse, n'a pour ccs
rëncgats, qui ne so nt ni peupl e ni nobles, qu'un souverain mépris .
Et c'es t ainsi que Paris c t nos petites villes d'arroud isscmenl voientlJ ailre cLaque
j our quelques nouvell es d)'uaslies d'ennohlis ùe par eux-meUl es. Mais si la manie des
d.istinctions nobi lia ires aUfrmentr en raison des proportions qu'oo peut leur assig ner
d'après le lI ombre des so ls vaniteux , dans ·cinquant e ans, la Fra nce ne sera plus
(U'UII imm ense Babel ci e noms nouveaux prccêclés de l 'a ri s~()c ra(iqu e particu le.
[ Si l:amour de brill er les aigui ll ollll c, pourquui Il e cherchent -i ls pas il s'elc\tcr, il
s'e nn oblir cie par rux - Illèmcs? Le titre ne fait pas l'homme; mais l' homm e fait 1('
titre ; un nOIll bien porte pendant plusieurs gcncrati ons ca r'lctërisc un e ral~e
nobi li.ire .
Le mODde conDaill essai-nt Vin cenl de Pau l, les Pascal, les Corneil: e,les Herschell ,
Iles Ca rr&cbc ct lçs Pa rm ent icr ; mais il nc saura jamais le nom de cct homme ohscur
. 1· d
'- 1 a senli le besoin de couvrir
sa nudilc d'ull man leau blaso nne,
qUI , p CIO e sou nC ... D ,
.
pour paraître av(.'c (Ieccnce aux ~' eu x de ses CO ll cllo~' ~ n s.
.
.
Cc dcpl orabl e exemple a èlc ",alh eureusemenl SUIVI par plUSieurs fannll es uobles,
qui unt cherche cil es-mèllles il déna lurer leur nom palrony mique~ en l'affublanl d~
.surn oms nouvra ux em pru nlés il des tilres qu' ils n'onl pas le drOit de porlcr ct qUi
�-
I ~-
è\'ciII Cll l lc $ouvr nir de fi cCs qu ' ils n'uutjanHlÎs possedes cl qui Il e )<.\ ur apparlicllllClll
pa~.
Or, de la n,liure du vo l dépend En gravitê : celui-Hl qui prend d'éHtl oril c privee
le Dom d'ml(' gr::md c race ou ce lui d'un fi ef illustre, es t plus co upahl c qu e tclui dont
nous parlions tout a l'hcure cl qu i s'est cnuolJli nu moyen d'une ferm e. Les lois an tiqu e:, d l' la monarchi e fra ll raÎ!'c etaient form ell es à cc suj et. Celui qui changeai'l SOIl
Dom pa trollymique OU qui prcfl nit le titre (rUn fier qui n'é tait pas le sien fI"fl Îl furfait
à (' honn eur .
C'est que nos pères , qui avaienl acq uis au prix d'un san g hërù rlilnirClll cnl rcr5c ,
le droit de porter ba nnière, voul aicnt (lu e cc souv enir de gloire' fùl res pectc- .
La noblesse, Monsieur le ra mIe, cSll a loi du san g; c'est l'hérédité naturell e il fous
les êt res . L' homme etant la plus noble des créa tuI'cs, a rie. avo ir la plus bell e part il
celte hêréd itc. Lui scul , il peut recevoir ct transmellre av ec le san g tout es les l'ertus:
la piété, la sagesse, le co urage ct le cl êvoùment , comme aussi il pent recevoir t' Il
partage et donnrr il s c~ enfa nts les tendances fatales au vi ce ct a l'iniquité.
Tou t hérite sur terrc. Le fil s hérit e de SO li père, les nations hcril cnt les lIll es cl es
au tres; l' bumanite a herit e du pécbé du premier père et des qual ités qu e la gn\ ce rlu
Trés-E1 aut a rell du es ioh"rellt es à sa nature . Le roi-martyr a recueilli la doubl e
palm e de saint Louis ct rie Louis XIV; Rome, l' béritage deSolYllle cl d' Athencs .
Sodome ne sera pas co nsumee, si parmi ses habitants il )' a cinq justes.
L' histoire du mood eesl un e immense géDéal ogie, ct, s'il oous était donn é de percer
cette ,-ou te de diamanl qui oous cache le ciel, nous trouverions p eut- ~ t re, là-h aut ,
uoe fi liation lll)'stique entre les anges.
Le Christ ,,'etait-il pas de la maison royal e de David ?
Adm irable el toul à la fois redoutabl e bienfait de Di eu, l' homme, el-t être crcé Cl
par co nséquent seco ndaire, à (lui le present seul appa rti ent , pourra étendre sa maiIl
sur les siècl es ii veni r ! Le père mérit era puur ses fil ~ et ses pet it- fi ls; la piété d'ou
aucêtre alli re ra la b"nédiclio ll de Dieu sur la pos térilé d' Abrabam ; le fil s d' un heros
sera munlre au doig t par ses co ncitoyens, cll a palri c s'inclin era dev;,l nt le sa ng qui
fui ," erse pour la dére ndre. Oh ! l' bomm e a bi en le senllm enl de ce lle puissance 'lu'il
a sur la deslioée de ses descend ants ! • Mes amis. disail un Helvéli ,'n film eux , il la
j ourll.ce de Sempach, avant de mourir pour vou Ss jc vo us reco mmand e ma remm c et
mes enfa nls. , El quand aban don naotl eurs caslels el leurs famill es , nos pères all ai enl
défen dre le sai nl lom beau, ils saraient bi en que leur san g verse pres du Golgolh a
serait fécond pour la poslérile.
Bi en plus, il y au ra éco nom ie et co mpensation pour les "erlu s et les crimes {l'un e-
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racc . ~I o ntm o rcn cy ser<l pris les armes à la main , comb<l tl<lnt co ntre SO li roi sous les
murs dc Caslelnaudéll'Y, il S(>1'3 condamn é à llI ort j mais après la se ntence rendut' , le
Pa rl emcnl en corps viendra ,!,'agc nouilla :lUX Ilicds du monnrqu e cL lui dire : .. Sire,
.grà cC' pour Hellri ; il il co nspiré co ntre ln couronne ùe France: IIln is Bourhard S UI'
les hnuteurs de Montmnrtf'C, Mn lhi ctl à Bouvin es; le grond Ann e illlX ri,' n ~c~ cie la
Proven ce, l'onl main tellu c c(>nt foi s. Sirr, gràce ! II Et !lllisluirc maud ira le rdnl ôme
rou g(' qui sr dressa ('IIII' C lïllll ~ trc l:o upaL le <:1 la c!()mell cc de Louis.
La nobl cs!'e, Monsieur , cilla ne ti c Di eu directe menl , tH l bien (' Ill' cmane (le lui
indirectemcnt p:"II' l'cntrellli . : c d,,!' r o i ~ de 1<1 terre,
Dan!' le premicr (';'\s, un homlll e surg it . il s'arme (l'un glaive rl s'rmpa rc d'ull e
porlion de la lerre : celle nobl esse e,t dilepar la grllce de D'-eu, parc" qu' il a plu au
Seigneur de reg ler ainsi le sort du mond c, et qu'ull flti t primo rdi al ne peul êlre .Iiscule. C(' règ lement divin est '11 inOi gë au crime orig in rl de l'hü11llll c? 11 ne nous
app3rtienl pas de raiso nner Slll' U:1 C qu cs ti oll qui cst hors de notre ':umpétcnce . Cc
quc Il O US pouvons affirmer, après n,'oir jeté Ic'i ) eux derri ère numi, c'cst <Iu'il es t Ult e
loi falale qui pousse les nalio11s les uoes vers les aulres j c'esl la loi de e0 11qu ~ l e .
Dans le second cas, les vcrlus crun e famille sont mises a rOl'dre d'un e nalion,
comllle les faits (ral'lnes d'un sold at sont lUis à l'ordre d'ull c armé!'.
Da ns la réun ion des bommes, si l'un d'eux sies t ra it remarqu er par so n courilge
ct sa grandeur d'àmr, par la noblesse e l la générosité de ses sentim ents ; si les actions
de sa vi e so 1111. pour allesler qu'il a mis eu pratique la Ill orale de sOu cœur , tous se
g roupent aul our de lui ; on le rechercbe, on l'bonore ; cl s'il a re ndu des services il
rEtat par SO Il épée ou son inlt:lligencc, on. le signa le d'un c manière qu elco nqu e à ses
concit oyens ; de DOS jours on le decore. De même les rois dc la tcrrc, en co nrèra nt la
nobll'sSCà une famill e, la décorent hércrlilairemenl , ct ceux qui usurp('ll t Ull no m ct
un titre ne font autre chose que de \'olcl' une decoratiofl ct la porter illéga lement ,
.111 scanda le de lous.
La noblesse est don c un e sublime garantie, Lasèe SUl' llll e so mme dl' ml'ril('S personnn eis cl sur d'imposantcs obli ga tions. li No bl esse ohli ge , ~ ditnn vieil adage. En
crfcl , cli c oblige, elle a oblige' ; cl c'es l pour cela que les champs de bataill e ,lu globe
f ont de vaste'!' tombeaux où les ge ntilshommes de tous les âges sc su nl co uche... cn
papnl la dime de leur \'a lellr . La tribu de Juda a été dccimce par k s Ilèehe, des
Philislins ; Annibal pUI envoyer il Ca rlba ge les anncaux de Irois mill e che"ali ers
romains; les bidalgos de l'éloge uni cbasse les Maures de l'Espag ne, ct, sous les
murs de Jérusa lem, comme so us les bastions de Schaslopol, la noblesse fra nçaise a
llequille ct aC(luillera louj ours la deite rlu'ell e a co ntractée ",'cc e ll e- m ~ m e.
�Le ro i Henri
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les dctcnl cl1l's de n Olll s C(
titre; qui II C leur appartenait'1I1 pas seraient ocgrades de noblesse, traités comme
fau ssa ires Cl punis de même.
Voi là, Mlln "icll l' le com le, les cO ll siil l!rations de la plus hau te impor tan ce qui m'ont
en couragé el qui ont p rê ~ id é â mun tra""il. Au mili eu de 10U S ces boulevcrsements,
de toul es ces c rrcu r~, de tanl de menso nges, il es t indispensabl e que la vcrite sc fa sse
jour, Cl il n' c~ ( pas plus permis de la celer qac dl' la dég oiser.
•
Il 3\' "it
donc raison lorsqu'i l décl<lrai l
qUf'
Non} je ne suis pa' de ceu't. qui croient a"eug lement :1 des pri"ilcgcs qui Ile sont
plu s; IIOS d roils poliliqu es 011 1 disparu dans la nu il du 4 aOllln8!) ; il ne II OUS O
'es ll'
plus que DOS sooven irs, noire nom. Vous qui ayez insulte à huit siècles de g loire c t
qui a,-ez cric: A mort les aristocrates! gard eZ- l'ons d'y toucher !
EtranO"c
o aberrati on de respril humain ! cc,; homm es oot travaill e un drmi-siècle il
dct ruire ct.! troph ée qu e nous av ions formé u\'rc des lances , des épées ct rlrs fl cul's
de lys ) ct à pein e s'est- il reroul e sous leurs effo r ts impi es, qu'il s Se so nt ru cs SHI' les
vêtements du mort, el qu 'il s sc les so nt partagés.
.h el-VOUS oublie les ras les républi cains de 1848" Vous so uvenez -vous de ces
cos llimes dorés, argen les , de ces. ccharpes de soie, de ces épées suspendu es inopinémeot au flan c de la jeuu esse de Ioules les écoles, landis qu' une borde dég uenillée
veill . it aux barri éres du Louvre pour l' amour de l'égalité cl de celle pauvre honleuse
qu'o o ap pell e la République?
Oui , la nobl esse du cœur el du lal enl eslla premi ère ; cl ic esl vraim enl par la
g râce de Dien, clic es lle rond emenl de la noblesse de race; mais nons n'avons pas
hésilé, en race de cerlaines doclrin es hisloriqu es aussi prélenlieuses qu e rausses, à
co nslaler un rail au" i ancien 'lu e le monde, sa yoir t' héréd ilé morale Cl la propriélé
d t~ la gloire et des verlu s . Amicus Plato" sed magis arnica verifa s.
Si soi xanle-sept ans so nl vcnus successivement jeter leu r pell etee de terre sur la
fosse des Ilrivilëges nobili ain!s, nous n'urlmetlrons jamais que la noblesse ail péri avec
5"S droil s poli liqu es . La nobl esse porle avec elle un prin cipe vilal ind es lru clible el un
cara clère inn effa ça bl e. Le développem ent des lumi cres de la raiso n, mêlées il ce lles
plus éclalalll,'s de l' th angi le, onl foodé un noul' el ordre de cboses. Soumi,ala eooscripli on Cl à l' impol , un MOllt more ncy pourra devcn ir capo ral de co ucerl avec le
fil s d' un de ses ram ili ers; mais so us ses humbl es galons, il sera touj ours, s'il le veut,
le premier baron chrétien.
VI CO " TB
Châle. urenard, le 13 oclobre 185ï .
DR
VALORI.
De semaine en semaine, le rcc ueil publiait les chnpill'cs de cell e 1115toire, qui pl'enantla légende d'abord , puis les récil S hi:;tul'iqll es ct les
trad itions justifl ées par les t il l'es, conduisait le lecteur dans les délnils ail imés de celle grand e baronnie. L'écrivain passait en revue les inscriptions ex islanl es sur les mllrs du château et chacun de ses possesseurs.
Il énumérnitles servi ces et ùonnaitla liste chronologique des iJarons de
Châte'lurennrd , depuis Lambcrl , dit Dodon en 880, jusqu':"! M. le
marquis de Valori , son père, en '1840. Il racontail , entre autres fail s,
Ip. passage de la baronnie de la reine Jeannc à Gabriel de Vnl uri , prince
dp. Cozenza, vice-roi de Naples en ,1380 ; son acquisilion pal' la famill e
d'Aymar d'AliJi , en ,1630; sa Iransmission , il Joseph E tienne de Thomassin , marquis ùe Saint-Paul en 1754, et son arrivée enfin dans les
mains dn marquis de Valori.
C'est à la fin et an terme de son récit, qu'au no dn 5 juin 1858, après
le tableau de tous les événemenls historiques qui ont illustré le chàlpau
de cette baronnie, les sièges qu'il a soutenus, les souverains qui l'ont
visité, les princes fu gitifs qui y ont reçu asil e, et dans le chapilre dernier, que l'hislorien mettait en note, a\1 bas de la page, les lignes suivan tes;
{( Lelecteur est à présent ù même d'apprécier les dr o il ~ de M. d'A."{( mal' de Monlsallier , membre du Corps diplomatique, qui a pris,
« sans aucun droit , les nom et tilre de marquis de CluÎleaurenard ,
« en ayant soin d'élim iner son nom palronym ique, qui est d'Aymar. »
Devant la publication de l'histoire de la Baronnie dc ChâlCattrCnarrl,
et à l'apparition de son premier numérJ, le vicomte de Valori en pré.v inl
M. Borel-d'Hauterive. Quand elle fnt termin ée, il lui annon~a le désir
de la publier et de la rec ueillir en un volume. En même lemps, co mm ~
ses relations avec cet intcl'médiaire honorable pouvaient encore lui fairc
espérer qlle M. d'Aymar de Monlsallier reconnailrait son erreur , il lui
�-
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donna ra,SlIr;lIlt e qlle les inl enlions dc M. le marquis de Va lori n'élaient
pas changées et qu'une Iransar lion sera il encore possible, el le pria même
de la lui proposer. Il n'y avail pas d'obslacle il nne Iransac li on, nulle récla mation ne s'élanl elevée de la pari de M. d'Aymar conlre la publicati on de reli e hiSloire, durantloul l' inlcrvallc éco ul é dn 24 octobre 1857
au J janvier 18:58.
M. Borel-d'Hau leri\"c s'acquilla exac lemenltlc cell e mission.
Yoici sa lellre du 26 juin '1558 au vicomle de Valori, qui le pl'onve ;
el \"oici en même temps l'adhésion cond il ionnel\e que M. le comle
d'Ay mat· de ~fonlsa lli e t' y avail donnée par sa leltre du HI juin 1858,
écrile deSainl-Pélersbourg à M. Borel-d'Hau lerive.
Paris, 26 juin 1858.
Monsieur le Vi co mte,
J'avais ru l' honn eur d'écrire, il y a un mois, uue leltre il M. le marquis Aymar
de Châtraureuard et de ~Ion t sa lli er , il Saint·Pétersbourg,car on m'avait dit an ministere que sa ,'euue il Paris n'était pas probable. Je viens en effet de recevoir avanlhier sa réponse, datée de Saint-Pétersbourg, 19 juin, où il me dil de lui envoyer
plusieurs ourragcs.
Quaut il la proposi tion que vous m'av iez prié de lui faire , il paraill'agréer compiétement; ,'oici , du reste, sa repODSe textuelle:
• Je suis lrés satisfait des dispositions que M. le marquis de Va lori aura it ~ c terminer, par un arrangement il l'amiable cntre lui ct moi , les difficullés qui onl été
soulevees l'an passe . Je ne saurais toutefoi s me prononcer au sujet du pilcte don t
les bases \'ous unt été indiqut!C's, sa ns avoir les renseignemenls ncccssaires pour me
rendre compte des conséquences qu'il en traîne rait. La concession qu e je ferai par
CCl acte m'impûserail l'obligation, ai nsi qu'à JUon frère el à ma mcrc, d'obtenir uu
jugemenl du Iribunal de première instance, pour la rectifi ca lion de nos actes de
l'ctaL civil , cbose (lui nécessi tera ma presence en France et qui en trainera peu t-Nre
bien des dom.rcbes cl une grande perte de lemps. J'iufligerais, en outre, une so rle
de blâm e à tout r ma ligne ascendau te.
L'engagem ent 'lue prend rait l'ar co ntre \1. le marq uis de Va lori es t-il de nature il
•
19 -
m'offrir UDe compensation analogue ct i'qu i\'alentc? Je ~(' !lui:,
léments suffisan ts; mais il me semhle que non!
('1)
jugC'r faule d'è_
Si M. le manluis de Valori voulait abandonner le litre oc baron de Cbâlraurrnard
qui, cn definitive, a peu d'importance à côte de so n Dom Cl de ses aulres titres, je
serai disposé a faire ce qu'il dés ire et a m'arranger, si j'obtiens du trihunal civil de
rectifi er mes actes de manière à ce qu e ces adcs cl mes nom inations offi ciell es me
désignen t marquis d'Aymar de Châteaurenard. L'abandon comp let que ferait M. le
marquis de Valori de la dénomination de baron de ChMeaurenard n'emp~ch e rait
pas son fil s d'étahlir par son ouvrage que ceUe baronnie leur a appartenu bien avant
o'enlrer dans ma famille, el !IU' il en es t aujourd ' hui possesseur.
Dans l'etai aeluel de noire législatiun, la renlrée en possrssion de la terre nc
donne pas le droit de reprendre le nom. Il me parail donc juste d'exiger un abandon
complet, en retour de la concession qu cjr ferai.
Quoi qu' il en soit , veui llez, je "ous prie, puisque M. le ,icomte de Yalori 'ous
a chargl1 de me faire coo uait rc ses intentions, lui donner de ma parlyassurancc qu~
je suis animé de disposilions co ncilian les, que je m'efforcerai de faire partagrr a ma
famille . S'il désire enlrer en relation direcle avec moi il cc suj el, j'en serai fort aise;
mais j e ne pourrais répondre il une leUre qui ne me serail pas adressee sous mon
nom de Châteaurenard. M. de Valori pourrait y j oindre, s' il le veul, le nom d'Aymar
ou faire des réserves; mais je considererai comme non-avenue toute lettre ne portant
que ma qualification officielle ou le nom de d' Aymar, sa ns celui de Cbâleaurenard. ,
Vous le voyez, monsieur le vicomte, les dispositions de ~1. le marquis d'Aymar
de .I\Iontsa llier sonl excell enles, et j'cs pere '1u'il vous scra facile de vous entendre
pour les délails et les bases de l'arrangement.
Veuilléz agréer, je VOliS prie, l'ass urance de mcs sent iments de parfaite consideration.
A. BOREL.D' f1AUTERIYE ,
Avocat a la Cour impérial e.
En répo nse h celle lellre, le ricom le de Va lori envoya il M. d'Aymar
le modèle de la transaclion que son pèl'c, le marquis de Va lori, proposa il
à ce derni er, dont voici la leneur :
Eulre d'une part:
àJ.le marquis de Va lori, clc. , chef cie nom Cl d'arnH.'s, Jes Iloms cl titl't's atlaches
�-
20 -
il la terre tic Chll tca uren: rd , représentant la branche ainée .l e la f"mill e d'A ymar du
chef de sa famill e bisaïeul e matern ell e Sexte-Gabriell e d'Ay mar ;
Et de l'a utre:
) 1. d' Al mar de Mo ntsallier, re présentallt la branch e cadelle de la famille d' Aym;l r ;
ri es t couvenu , cIC. :
) 1. d' Ay mar de Montsall ie r dés ira nt , par l'additi on du nom .l e Chateaurenard , il
so n nom patrony miqu e, consacrer le so uv enir d'uu fi ef qui a appartenu il la bral lche
aÎn cl', CLc . : de sa fa mill e.
11. le ma rqu is de l'a lori , baron de Ch,lIeaurenarrl , sa ns préjndi ce d'au cun de ses
droits personnrls , concède il M. d'Ay mar de Mo nLsa lli er le droit d'aj outer
le oom de Chàteauren. rd à sail nom patrony mique, il la conditi OIl formell e qu e le
I) ü lll de Châtea urenard ne scraj umais pris par l I. d'Aymar , sê parê du nom patron) llI ique , ct qu'il prendra il son cha i, la dénomiu ation d'Ay mar de Chàteaul'cnard
et ou de Chitteaul'enard-Moli lSallier.
La yiolation de celle clause annukl'ait le présent traité.
Par co ntre: M. de Valori décla re qu e ni lui , ni ses successeu,'s, Ile troubl era la
possession ai"si acquise par M. d'Ay mar de Mo nlsall ier .
Tout semblait donc marcher vers une pacificati on et devait la faire
espérer ; mais celle espéran ce s'évanouit bientôt. M. d'Aymar dc MonLsailier répondil , de Sa int-Pétersbourg, le ~ ao ut 1858 , la lettre suinnte:
Sa inl-Pétersbourg , 9 aoùl1858 .
110llsicur , j'ai dû fa ire part aux membres J e ma ramill e, qui port ell t comme moi
le 1I 0 m de Cbàtea urr llard, du cOlltenu de la lellre qu e vous m'avez fai t l'holln eur de
rn1ad rcsscr le 25 juiu derni er> Cl attend re de connaître leur o pinion p OUl' vous dOTi ~
ner ua e répollse au . uj el de la lransaction dont le projet était j oint il volre lellre.
J'di le reg ret d'avo ir il l'OUS dire qu e, d'après leur opioioll comme d'après la
mi enn e, je oc puis accepter l'arrangement que M. le marquis de Va lori me rait
l' bonneui' de me proposer par vo tre entremise. Cet arrangemenl part du principe
que Je prends le 11 0 01 de Chillea ure nard, et, aiDsi que je l' OUS l'ai déjà ceril, tous
Ill('!) nU C~ lres p at crn (' l ~ directs o nl porlé cc nom CL ont été desigués exclusivement
-
21 -
par lui , depuis plus d'uu siècle. Je ne saurais donc meUre ma :, ignalurc au bas d'un
acte qui serait la négation du passé de ma famille.
Au surplus, Monsieur, tous mes actes de l'ctat civil portent le nom de d' Aymar
en même tomps que celui de Chùteaurenard. Je tiens il honueur qu e 1'0 11 sache que
mon nom patronymique est d' Aymar. Cc nom se trouve dans la plupart tl e mes
actes publics; mon inlention est de veill er il ce qu'il ne soit omis daDs aU CUD,
Je vous prie d'ag"éer, Monsieur, l'expression de mes sentim ents Irs plus en)pressés.
CHATEAURENARD .
Du
~
aoùt 1858 au '15 dèccmbre suivant, M. le comte d'Aymar de
Mont sallier a gardé le silcnce et ce n'est qu'à cell e époque que, de concert avec sa famill e, rejetant toute pensée de tra nsaction, sans qu'aucun
nùllveau fait fùt sUl'venn , il a introduit en justice l'action dont il faut
maintenant faire connaÎt.re la nature et la forme.
Le 15 décembre 1858, il a été présenté pal' M. Guill ermain, avoué
près le tribunal civil de Lyon, à la requéte des membres de la famill é
d'Aymar, à M. le président du tribunal civil de cette ville, une requête
llinsi libellée:
A MODsieur le Présid ent du tribunal civil de Lyon,
Mme la comtesse d'Ay mar de Châteaurenard , demeuranl à Paris , l'ur CasimirPérier, 15; Mm e la marquise de LusignaD, née d'Aymar de Château renard , demeurant au chùleau de Xa intraill es (Lot-et-Garonne), ct M. le comle d' Ay mar de
Châteaurenard , demeurant il Chùteau-Cbuzac ( Lot-ct-Garonn e), ct M. le marquis
d' Av mal' de Cbâteaurenard , premier secrélaire d'ambassa de, offi cier de la Légiond' Honneur , actuell ement chargé d'affaires de France près la cour de Russie, demeurant il Saint-Pétersbourg (Russie) , lesquels agissa nt co nj ointement ct solidairement
font "' ecLion de dOlllicile ct constilution d'av oué en l'élud e el persOllne de Mc J .-B.
Gui llerma iu , av oué près votre tribunal , demeuranl il Lyo n, ru e de la Loge-duCbange, 4, ontl ' bouneur de vous exposer que M. le vicomte de Votori , demeurant
il Châteaurenard (Bouches-du-RhOue) , a, dans le co urant des anuées '1857 ct 1858 ,
publié dans le j ournal La F rance littéraire, qui sc public il Lyo n, et 'lui a poür gé-
�-
22-
raut el direc teur M. Adrien Pclad an, une séri e d'arti cles sur l'histoire tic la baronnie
de Cbâlea ure nard .
Ce ll e publi calion, pos lerieure il unr correspondance de ~l le vicomle de Valori ,
où il co nles lail dcjà il la famill e d'Aymar de Cilàleaureua rd le rlroil de porler cc
dernier nom, sembl e avo ir cu particulièrem enl pour hui Cl pour ob jel de juslifier
sa prélenli on à cel égard .
I! résulte, à (ra "ers l' ouvrage tout entier, une peusee de dêoigrcment el d'abais-
semenl syslémaliqu e des lI1 embres de la bran cbe de Ch~leaurenard, à laqu ell e apparlieunenll es ex posanls, el celle pensee prend un ca ra clére ,'érilabl emeol injuri eux dans certains pas'.lagcs Cl notamment dans celui du numéro du 24 octobre 185ï, commençanl par ces illOis: L e second mal.:, a ete d'éclairer l'opinion, el
se lerminanl par ce ux -ci : A-voir fOl'fail d l'honn ellr ; cl plus loin , daus celu i co mmençant par: De méme, les 1'ois de la terr e" el sc terminant par: El pU111s de
même . El da us celui du numéro du 6 juin 1858, commençanl par: Le lecleor esl
maÏ1llenanl à m~me; et finissant par : Nom patronym1'que, qui es t d'Aymm',
Des allégalions de celle nalure, susceptibl es de porler alleinle à l' honneur el à 1.
considéra lion des exposanls, auraienl pu êlre déférees il une aulre juridiclion que
celle qu'ils croien l devoir choisir , mais il apparl ienl il leur bon droil d'apporler
Ioule la moderaLion possibl e dans la poursuile de la réparalion qui leur es l due.
Ils lirenll e droil inco ul es lahle de porler le nom de eMleaureuard de leurs aulcurs,
qni onl sans inlerruplion porlé ce nOIl1 dans Ions les acles officiels el privés, landis
que l'exlin clion des represenlanls de la branche ain Cc a depuis longlemps définilivemenl con féré ce droil au profil des représenlanls de la branche cadelle.
La res ponsabi lil;' d'une puhlical ion fail e clans un journal pese, so ii sur l'au leur
de l'a rlicle, soit sur le géranl-d irecleur de ce j ournal. La dislance enlre le cl omicil e
ùes parlies, les a'-erlissell1 enIS déjà donnés amiahlemenl el sa ns effels, rend enl le
préliminaire ordinaire de conciliati on inutil e, et l'urgence à rintrodu cliou dc la d('mande résulle ri e l' inlenlion manifeslée de M. de Valori de publier, so us form e cie
volull1e, les arli cles conlenanl les passages allaqués.
E n co nséquence, les e' posa nl s vous l'rien l, M. le présidenl, de les auloriser à
assig ner, à brer délai , devanl voire Iribunal, M. de Va lori cl M. Peladau , ès-qualilcs,
a~x fins d'OUï: dire que défense es l faile à M. de V.lori de reproduire les passages
cl-dessus IOd"lnés dans la publicalion eo volume par eux annoncée des ar li cles du
journal La France lilléraire, faule de quoi il sera slalué, ordollne qu'à tilre de dommages-inlerNa, le jugemenl à inlervenir sera inséré dans le journal La France;
-23 qu'il sera, en Qu,rc, inséré, il quatre reprises différent es, dans deux j ournaux de
Lyon, dans 'lualre jnurnaux du Midi, dans six j ournaux de Paris, au cboix des
exposan ls; condalllner so lidairemenl MM. de Va lori el Peladan aux dépces de
l'jn ~ l ancc ct aux fra is dcsdilcs inserti ons, SOu s réscryes de co nclure il tous autres
dornrnages-inlérèls, cl cc sera justice .
Signé: CU lI. LERlIAIS.
Vu, oous, présid ent , aul o ri~o n s l' assigna lion requise il cillq jours francs, outre
les délais de dislan ce , aux fin s de la requêle.
Donné il LyvD, au Palais- de-Jus: icc , le 15 décembre 1858.
Signé: L.GR.'NGE.
Enregislre il L.l'0n , le 16 décembre 1858, l'cr u 3 fI'. 30 c.
Signe: D.sTRÉE.
"Le 20 décembre suivant, l'assignation à M. le vicomte de Valori, à
la requête des mêmes personnes, aux fins, y est-il dit, d'ouïr adjuger
cOl1joinlement avûc M. Peladan, assigné pal' exploit séparé, les conclusions lJl" ises lJU'r tes l"equérants, dans ta j'equète précitée qui servira de
libelle aux présenles.
Les plaintes de la famill e d'Aymar se réduisent donc à cell es-ci :
'10 L'histoire de la bal'o1Lnie de Chàteaurenal'd, dit-elle d'abord, semble avoir eu pour but ct pour oujet de justifier la prélention du yicomle
de Valori, manifestée par sa correspondance anl érieure, de contesler à
la Camille d'Aymar le (h'oit de porler le nom de Cluileaurenard;
2 0 Il Cil'cule, ajoule-t-elle, à travers l'ouvrage tout entier, une pensée
de dénigrement et J'abaissement systématique des mem bres de la branche de Cllâleaurenard, à laquelle ils appartiennenl ; celle pensée même
prend un caractère injurieux dans les passages du numéro du 24-octobre
1857, et dans la note du numéro du 6juin 1858;
5° Enfin, elle termine en alléguanl qu'elle a, sans inlerruplion,
toujours pOl'lé ce nom dans les acles officiels et privés, tandis que la
�~4, -
-
branche aill ee, qui s'cst éleintc depuis longtemps, a , depuis longtemps aussi, Iransféré ce droit HU profit des représentanl s de la branche
cadelle,
Ainsi il y a de la pari de la famill e d' Aymar de MOili sali ier une double prélenlion :
10 Celle de pouvoir porl er le nom de Chùl eaurenard , quoiqu'elle représente la branche cadell e;
.
20 Celle de faire dce lal'er éteint cl son ))l'O(lt cc dl'o lt-Ià conll'c la
branche ain ée, représenl ée par M . le marquis de Valori .
Ces dcux queslions prenn ent naturellement le pas SUI' la question relati ve au x expressions dc l' histoire ctau but de son ouvrage ,
Celui-ci aura eu raison, dans sa conclusion cl dans sa démonslration,
si la pl'étention des d'Aymar de Monl sallier est mal fond ée .
§
leT ,
Nature des propositions à examinCl' qui naissent de la demande ,
et de la résislance (lui lui est opposée.
ORDR E NATU REL DE L EUR EX AM EN ,
On peut les ram ener au x suivanles :
10 M. le 1I131'quis de Val ori a seul le droit de porter le lilre de
baron de CluÎ,teatwcnarcl et le nom de Châteaurenard ;
2° M. Je marquis d'Aymar de Montsallier n'a le droit de porter ni ce
tilre, ni ce nom ;
50 Si, contre tous les princi pes, il pouvait porter ce nom, il ne pourrait le porler seul, mais seulement avee l'adjoncti on d'Aymal" ou de
Mon/sal/iel" ;
-
25-
4° Jamais Ics demandcur; ne pOllrraienl prendrc le lill'Cdc IJwrqais
de Châteaurenard ;
5" L'é(Tit dll yiCOnil C Henri de Valori ne mérite auclln des reproch es qui lui sont adressés , et les demandes de la famill c d'Ay mar,
quant il cc, sont mal fond ées ,
§ II.
Premiere Proposition.
~I.
seul le droit de l,ol'lfw le Iilre de
CIIHEAUIIEV,\RD et d'rn porter le nOlll ,
le lIIaI'quis de ,rulol'i
il
IlARO,
ne
Pour Ic démontrer, il y a : 10 à établir les principes du droit qu i régissent cette matière; 20 il rechercher dans le fait et dans les lilres du
marquis de Valori l'application qui doit lui cn êll'e faite, et 50 enfin à
répondre auxobjeclions soulevées pal' M. le coml e d'Ay mar de Montsallier et notamment à celle tirée de l'extinction et de la perte prélendue
de ce droit par la branche ainée au profit de la branche cadelle de d'Aymal'.
1\'0 I.
Les 'JI'incl p es d" d,·olt.
On connait la grande question qui s'esi élevée louchant la d,isposi.
tion de l'article 9 de l'oru onnancc d'Henri Il , dite d'Amboise, du'
2B mars 1555, et louchant celle de l'article 21'1 de l'ordonnance
de 1629 ( Code M i c hal1~ ), concernanl les noms.
�-
26 -
On sa it qlle l'article ~l de l'ord onnance de 15:J!.i disail :
« Pour él'iter la supposi tio n du nom ct des :11'1 Il es , défellses so nt
« fai les il tout es p c rsonn r~ de chan ge r de nom sans al'o il' oht r nu de
« lellres de pcrm ission et dispense, il pei nr de mille livl'cs d'am end e,
" c1'être pUllies COII /lllf ('al!ssaires ct pl'i,-ées des deg rés r t privil éges de
" la nobl esse. »
On sait aussi que l'al't ick 2,1'1 de l'ordu nnan ce dc Hi2U disait:
« E njoignons aux ge nt ilshommes de signer du nom de lcul's famill es
« et lion de ('elui de leurs seigneuries, en tOIlS act es et cu ntrat s qu' ils
« feron t , il pei ne de null ité desdit s actt'S pt cc:ntrats. »
!\Iais snr la dernière, le rec uei l de Denisa rt , y" .Y OII1, apl'l'S avoi r •
l'appo rt é l'arli cle 2H , aj out e : tc Elle n'a. jumais (;t (; sltivic S ltI· ('('
tc lJo il1t . »
Sm la première, M. Merlin , Répertoire de jurispntdellce, VO Promesse de changer de 110111, 5° édil. , pag. 436 , sout.ient. qu'elle n'a
jamais eu force de loi , faute d'elll'eg istrement au Pal'lern ent de Pal'is,
et que même elle ne s'est pas tl'ouvée au dépôt des archives judiciail'es,
malgré les recherches qu'il en a fait faire.
D'autre part , cependant , la Cour de cassation , dans son arrêt du
13 jall\'ier 18'15, l'apport é par Merlin, eodem verbo, page 439, tient
cette ord onnance pour ex istant e.
Au mil ieu de ce contlit entre de si graves aut orit és, y a-t-il dans la
ca use nécessité de réso udre celle première question ? Faut-il ou non
examiner si ces disposit io ns ont eu force de loi ? Non . On peul laisser la
question entière et ne pas même s'en préoccuper, parce qu e à côté de
celte législation , en la supposant certaine et vraie , qui ne permettait les
changements de noms ou les aJditions de noms que sous la cundition
qu'elle indique , il Y avait un autre principe également admis et uni, ersellement co n sa r r ~, né de la législation féodal e, qui régit exc1l1siVlment la cause, et qui suffit pour l'éc.lairèr .
-
2ï -
~e t
autre principe, so rti tl e la législatio n ettles u,ages, éta it celu i- ci :
qu e tout posscs 'cur d'un fi ef pouvait prendrc le titre et le nom all aché à
ce fi ef, sans av oir ueso in ti c rcco ur ir à au cu nc aut orisa tio n. Cc droi t
éta it puiSé dans le seul fait de la possessi'ln dn fi ef. Il déco ula it du (h'oit
il la tcn·c. li cn étai t ind ivisible ct insé parab le. 11 éta it allaché à elle et
en sui\'uit lc posse,se ur.
Les aut orit és les plus grav es justifi ent cc princi pe.
Lo ~'se all , dans so n trai/(; des Ordres, cha r . IX, nO5'1, s'en exprime
en ces tcrmes, cn racolltantl'originc dc cet lisage:
« No us n'avl)ns pas seu lement en France ces di gmtés honoraires,
« épithi' tes et avan t-n ollls, '/}/(!Îs encore nOlis avons (les 1I 0ms hOllo « m ire.j, que nous 0plJe lons vul!}oirell/enl le nom de sei!JlIenrie on le
(( nom de guerre. Cal' ,o us prétex te qu e les ge nt ilshommes de F rance
« ont pris un titre d'honn eur de leurs seigneuri es, chose qu e ni les
« Grecs ni les Romains n'ont fait, comme j'ai dit ailleurs, ils se sont
« tanl pitt iL ce titre, qu'on ne les cannait lJlus lJar un mttre 110 111 , et
« eux -memes en leurs missives n'en signen t point d'autre, mème ln
« plupart le prennent ès-contrats publics et ès-actes de justice, [ais(( sant tout li làitle nom de leurs pères el ancètres, pour lJl'endre celui
« de lw rs terres . »
Le RilJertoire de j lt/'is71l'lule7ice, V ONo III , pag. 505, aj oute :
« La pl upart des aute urs réfèrent celte inno l'a ti on à l'hérédité des
« fi efs, époque, disent-ils, où les seigneurs 11ri/'ent les n01lls de leurs
" sei!Jlleuries ou leu/' imposèrent leurs 1I0ll1S 1JroPl'cs. » C'est l'opinion ou , si l'on veut, le systèmc ci e J ean du Tillet, gre.ffi er du Parl emen t
de Paris, qui dit qu c les nobles en France, en l'an 987 et SU
l la fin de
la lignée des Carlovingiens, s'allribuaielll des s W'/W 1I!S li cal/se de
{Cl/./'s.
fiels.
Le R ë~ej't o ire, co ntinnant, mon trc b pr ~,; rès de cct usage et cite les
histori ens qui en rende nt témoign age. Inutile d' insister .
�-.:28Aussi cc point tic dr0it esl-il incon teslé auj ourd 'hui el est-i l passé en
Jurisprudence.
Le prcm ier monument à citer es t l'arrèt tl e la Cou!' de N îmes, du
7 jui ll eI 182~), dans l'affair e de La Fare, (V. Si rey, 1850, 2-4 ).
- 29 Le Iroisième et le derni er r~t l'arrêt de la Cour de Paris, du 5 décembre 18;)7, uans l'affaire de Clerlllont-Tonnerre, où on lit enl re aulres
mOlifs, ceux- ci :
« Considéranl qu 'ainsi les ol'llonnance de 1555 el de
Il s'ex prime en ces lerm es :
1629, en Sl.lp-
« posant qu 'elles ai ent eu dans le lemps de lelll' publication force et
VI-
gueu!', et ql12il es aient co nserl"é leur autol'ité, serai en t sans applicalion
« à la ca use, puisqu'en unissanl, pOlll' co nslilu er lin nom palrony« mique, les noms de Clermo nl et de Tonnerre, les auteurs des appe« lanls ont rait tln e chose licite, co nform e à la loi féoJale, auto risée
« par l'exemple des plus grandes fam illes du pays, et qu e, d'au tl'e pari ,
« il est reconnu qu e non-sp ul emenl la formation ct l'usage de ce nOI1l
« n'ont pas so ul evé ti c l'éclamation , mais qu e le l'ail a élé accep té pa r
« tou l le montle, san ctionn é par l'a utorité royale, co n~acré par la Il'3« dition historiqu e.» (A nnuail'e de la noblesse de France, ann ée 1858.
par M. Borel-d'Haut.erive, pag. 583).
«
Atlcnùu, en dro il, que maigre la sollicilud e rle nos rois pour emp ~c h e r les famillL's de cbanger leur nom ou leur origin e, en prenant arbitrairement des noms
oou\'eaux, ou CD ajoutanl dcs nom s cil' seigneurie il leurs noms patronJmiqucs: , ou
cu ~ upprjmant ceux -ci, rusage n'avai t pas abso lum en t cessé d'ex ister; (Iu 'cn cffcl,
maigre l'ord onoao cc d'Amboise, de 1555 , qui déft'nd à toutes perso nnes de chaoger leur nom cl !purs armes sa ns Jellres de com mut ati on, l'usage prévalut enco re,
cl que Lou is XIII , par son ordo nnance de 1629 , arli cle 211, enj oig nil de nouveau il
tous genti lshomm es de sig ner du nom de leur famille, el non de celui de leurs seig neu ries, à peine de nullité des actrs ct contrats; cc qui n'int erdisait pas rigoureusement l'usage des surnoms lirés ùes seig neuries qu e les pères drs fam ill es T,obies
donnaie nt il leurs cnfa'lts, poun' u qu' ils les fi ssenl l'recéder du nom de fami ll e ;
qu'ainsi , on ne pourrait, sa us un e ex tens ion qu i n'est pas dans la loi, et contre un
usage universel, faire auj ourd' hui des défenses, ct inlerdire cc que le lég istaleur
d'alors ne co nlrariait pas; qu' il y a doue lieu de mainlenir la famill e Cabot
dans la possession du surnom de La Fare ; - Attendu que la nouvell e législa tion Cl cell e iOlermëdiaire Il'onl P U pour obj et, comm e les anciennes ordonnances ,
tombées en desu"t ud e, que d'empêcher de nouvea ux chan gemen ts ou addilions de
nom.. sans l'autorisation du souv erain , et qu'on ne sa urait, sans rël roaclivilC, les
appliqu er il tirs droi ls acq uis, main tenus d'ai ll eurs par la Cha rte constitutionnelle ,
Le second esl l'arl'êt de cassati on du 7 d écembr~ 1845, dan s l'affaire
Falletans ( Sir ~y, 1846, 1-81), qui dil encore :
{( Attendu qu'il est COll stant qu'on )Jo Lwail sou s l'ancienne législation
« ajouter sans mtlorÏlatim du roi à son nom patronymique celui du
" fief 'lue 1'011 avait aC'luÏl ..• »
Ce même principe fut proclamé par l'orateur du go uvern emet ,
M. Miot, co nseiller d'Elal, dans les motifs de la loi du '11 germinal
an XI, en ces term es:
« Ces smn ollls, dérivés presque généralement parmi la noblesse
« cles fiefs qu'elle )Josséclait, n'étaient d'abol'd qu'individuels. Ils ne
« fLlre nll'ée ll e m(~ nt
«
hérétlilaires, à ce qu'il paraît , que sous l>hilippe-
Auguste. })
Ri en donc n'est plus cerlain que le principe ici ex posé : le possesse ur du fi ef avait le droit. d'en pr è ndr ~ le tilre et le nom.
Celle base posée, voyo ns si en fait le marquis de Va lori n'a pas, par
suit e de ce principe, le droit de prendre seul le tilre de baron de Châteaurenard et le nOIll cie Chù tcaurcnard.
�-
30 -
No Il,
I.("s fih'C8 l'cl:lCi f s il ln "o;nunuissloll tic ln hnl'ouille de
Ch:•• cnu,·cnll,"d.
I l ne 5c r~ pas n é (' c5s a i r ~ de remon le l' ici ac-dcl;\ ti c l'époq ue où la
l'cine Jeann e inféoc!a à Gahriel de ValOl'i la ICIT cl b31'onnil' de Chàtealll'enard . Nous ne l'indiqu ons qu e pOli!' méllloirc, afin d'e xpliquel'
l' im jlortan ce qu e MM. de Val ori al tachent :1 ce nOlll,
Elle sc fil le 22 aOÙl -1580, dans les termes Suiyanl S:
Le nOlllbre de ses lImis dilllÎlJuant tous Ics jours, Cl la presen ce d'un serviteur
prudent riant nécessaire cn Prov encc, pour ces causes ct récapitulant les services
signalés, Irs périls de lous genres que son bien-a ime se rvil eu l' et pareul Gabriel de
Valori, prince de COlenza, lui a reod us cl endurés, suiv aoùn cela l'exemp le de son
illuslre ancêlre, le gra nd Erard qu i, à la balaill e de Tag li acozzo, avait sauvé le
sceplre de Charles d'Aojou, son prèdécesseu r, ell e lui donne, cede et transporl e les
châteaux el seigneuries de Châteaurenard, Rognonas, Eyrargucs, les îl es d'Amral
Cl de Barban, avec la coseigneurie de Noves et les droits de haul e, basse ct moyenne
j uslice, le droit de ballre monnai e en or, cuine et argent, etc,
La baronnie de Châteaurenard était encore, en 14·26, dans la possession de Gabriel de Valori Il , et dans cell e de Barthélemy Ile Va lori,
grand- maÎ lre de la maison de la reine Yo land e.
Eile en sorlil en 1427 et arri va, en 16'17, il la suite de div erses mutati ons, dans les mains d' Anloine de Vill eneuve, marquis de Trans eL des
Arcs.
E n 1630, ell c fut acq uise pat' F rançois rI 'Ayma r, et co mme c'est ici
que commence ulle séri e de fail s qu i on t un trait direct avec la qu est.ion
soulCl"ée par M. le comte d'Aymar de Moni sallier, c'est là qu 'il faut
marquer chacun de nos pas, et tout prée iser avec délail.
•
-
31 -
Le -14 novemlJ l'c -1650, FmllçoÎs d'Aymar, diso ns-nolis , achela, an
prix de -171 ,000 é('IIS, de ]" ran ~ ois de Vi lleneuvc, ln ba ron nie de Chùlea urcn ard,
Fmllçois d'Ay mar élait le ci nqui ème fil s de Gui llaum c I\yma r, tOI! seiller an Pal'i emcnt de Pr'ove nce ,
Il élai t né le 8 novembre 1574; ses fr éres élaientJose)Jh, .lelin-André, Honon: et Silo,1J '
I l avait épousé Ann e Il'Alb~', llame de Bres, el, de te mariage, il cu t
trois fils:
Jean François, l'aîné;
Jos c)Jh;
E l Fran('ois
Fr:lix '
,
E t deux filles: Françoise et Gabrielle,
Le 1er janvier 1631 , leslament de Fra11çois d'Aymar, par lequel il
fit, à ses deux filles, Françoise et Gabrielle, des legs particuliers, légua
à Jose)Jh , son deuxième fil s, la lerre, basl'ide et afinrt de Sf!inle- Cathel'ine el If! moitié de If! place de nlolt/sallier; à François-Félix, so n troisième fil s, la bastide, affart de terres, prés et vignes et tout le tènement
qu'il possède au terroir de Pertuis, quar ti er de Torvaniéres, et institua
pour son héritier uni versel de tous ses bien;; et notamment dans la baj'onnie de Clui/eaul'ellard , JEAN FRANÇOIS, son fi ls aîné.
Le testament s'ex prime, SUI' ce point, de la mlllliere suiva nte:
« Et en chacun ses autres biens, droits, n OIll~, actions, meub les, im
« meubl es et so n mouvant fief et même la « baronnie de Cluitef!urellf!rd,
« le testateur li insti tué, fait , inslitne et de sa propre bouche a nOlllmé pour
« so n héritil' univ ersel se ul et pOUl' le tout , Jean-Fml1!,ois, so n fil s aîné,
« et le substitue au xdils Jos eph-François-Félix ct aulrcs mâles qu' il
(1 pourrait avoir ... »
Il est évident de soi que la baronnie de Chüteaurenal'd passa à Je((l1François, auteur des Valol'i ;
�-
32-
Quc Joseph, au leu r des d'Aymar Monlsallier, n'o btintqlle la tcrre de
Mon lsallier ;
E t qu e, pal' suile , le nom el le titre de la baronnie ne se reposèrent
jamais sur la tête de JOSEPH , qui n'en a jamais port é ni le titre ni le
nom.
Dans ce même testamen t , du '1er janvier 163'1, il est importallt de
vo ir les litres qu e prJnd le testateu l', il est qualifi é ainsi qu' il suit: Messire Fral1çois d'A.!)lIlar, SIEUR ET BARON DE CH.H EAURf;NA I\Det autres places, co nseiller du Roi en ses conseils, et président en sa Cour des Comptes, aid es et finan ces en P I'QI'ence , fil s de feu M. Guill aum e d'Aymar,
virant co nseiller du roi ct doye n en la Cllur de Parl cmcnt de cedit
pays.
Le '18 janvier 1651 , Franl;ois cl'Ay mar mOlll'ut , peu cie jours apl'ès la
confcction de so n testament et l'achat cie la tcrre!
Dès ce moment ses dl'oits, ses biens et ses titl'es se divisèl'ent sur la
tête cles tl'ois fils cie François, mais dans la part qu'il leur avait faite.
A Jean-François, la baro nnie de Châteaul'enard et l'institution UnJycrse lle, et le titre et le nom de Châtea urenard.
A JOSEPH, la terre de Montsallier et le titre qui y était joint.
A François-Félix, la tCITe cie Pertuis.
un acte fort important, le testament de la clame d'A lby cie Brès, leu l'
Il1 l' re, en fournit la preuve.
Celle clame, qui avait surr éc u à so n épo ux, fit, le 27 oc tobre 1644, so n
testament ct le pm'ta ge de scs biens entre ses enfant, .
Elle se qualifiait , comme de rai so n, veuve de défunt Messire François
d' AY'I!w', sieur de Sainte- Catherine et .If!/onlsallier, bW'on dut/il Clui/eaurcilard.
Puis elle lèg ue à F/'{Inçois-Félix d'Aymar , son trùisième fil s, la so mme
de 30,000 lines, à Jose1JI! d'A!).mctr , son second fil s " 40 000 li vres , et
enfin elle insti tu e pour héritier uni versel Jean-François, son fil s ainé.
-::13Ce qn'il faut rem;\I'llu cr ici, ce sont les qualifications données par la
mère il ses enfan ts.
Qnand elle institue Jean Fnlll(;ois, elle lui donn e la qualit é de haron
de Clulteaul'cnanl , cn disant: " J'ai nommé par ce mème testament 50CI lenn el et ai instilué, de ma propre main , mon héritier nniverse l,
" M. Mc Jean-Fran ~o i 3 d'Aymar, baron de CluÎ/ ell'ul'enarrl et conseill cr dll Roi en la COLlr du Pal'i emcnt de ce pa ys .
Qlland ell e li'I;lIe;\ JOSEP H, sil n seeond fils, clic ne l'aplwlle qu e Sei1jnl'ur de Saintc-CallH'rine el de Montsall ier en res termes: " .le 1t' "lU'
à Joseph rl' Aylltar , SE IGNEU R DE MONTSALLlEIl ET nE S.\I :"TF.- C.\ T H ER INr,
IIIOIl sew1/d filoS, la .~Ollllli e de ... "
Suivons mainl ena nt la destin ée des trois fils de Franl;uis d'Aymar, hal'o n de Chàtea urenard
Fnlllçois-Féli;r, le Il'uisi(\me fils, esl mort sans postél'ite.
Joseph d' Aymul' ; seigneur de Monl salli er, l'si dCVPOlI le l'hpf de la
branclw carlell e des d'Ayma r .
Jl'(/'I1-Frnn fo is ,1' A!J'Iilnr , illstitu é par son père, le ,1er janvier '1651 ,
est devenu le chef de la I)ran r he ainé c des d' Aymard.
Jca n-Fran ~o i s se maria Cl épousa Franl;oise de Gro lée de Vircville;
leur contrat de Inari~ !;e c~ t du 'i7 fév ri cr '1647 .
Son p è r ~ y esl nésigné sous le nom de seigncur de Sainte-Ca th erine
('/ dc MO'Il/ sallicl' c/I)((r onde Châ/eaurenal'd .
[1 y prend lui-même la qualité de seignwl'ctuaroll dcChâ/ealircnard.
De ce mariage naquirent plusieurs enfants; quat re fill es:
N ano n,
Frant;llise,
Jeanneton ,
Gabrielle.
Quatre fil s:
f'ran çois, l'ainé,
�-
34 -
Jose ph ,
Sallveur,
El J ean-Fran ~ oi s,
Jcan-Fra1/çois fil, le ,15 !Ié('elllLI'c '16H2, so n 1 ('~ If1l1lelll.
li se qualifie ba/'o/l dr C// I; tell1t1'cna/'d,
llli'gue à ses fill('s des so mmrs d'aqrrnl ; il l'n l i'~n1l' aussi il sr, Irois
fils : .]O~(-1Jh , SaltvC1t/' el J('(I1,-VUl)/fois , pour 10l1S tlroil s dans so n hél'édit é; el il institu e, pOUl' son hériti er universe l, SOli fil s ai né F1'(/1I~'fJis
d'Aymar
,
, né le 7 nOl'cllIbrc '1647 , l' n ces lernw s :
« En tous er. L'haL'uli me" allires hiens, tlroils, nll iliS \'t ;!('tions, lIl eu« I/Ies el immeulJles Cil qu elqul' pari qu ' ils soienl assis el silués, jr, fai s
« r i instilue F/'((I/ çois d' A,Ij/Jw/" nWIl fil s ain é, "
La spigneul'ie cl baronni e de CIHîl eaul'enal'd pas~a donc' il "'1'(I1I('ui"
d'AYlllar, en vertu de l'e lle inslilntion uni versell r,
Franço is d' Ay/J/ar, ainsi inslitué pal' so n pi'l'e, (' Onlrll rla mal'iai(e , 1"
8 ma!'s Hi76 , al'PI' Th érèse de Nlllul'ei Punl evrs,
,
11 pr e n~ , dans cel aCle, la qualilé de b((/'O/I dr (;/II;INntrtl/((/'( / , ", la
donn e égal emenl il so n p(\ re, de qni illi en ll a hal'onn ie ,
De ce mariage naquirenl plusieul's enfanl s; deu\ fill es: Jeaune el
Calherine, etlrois fil s:
Joseph l'ainé,
Pierre ,
El Andre,
Par so n lestam ent, du 18 novembre 1684, il lègue des so mm es d'a l'ge nt à ses fill es et à ses fil s Joseph cl PiclTe, et f'lit son hérili er univ ersel
so n fil s aîné Jose))" d'Aymar,
11 prend, dans son testam ent, la qualité de Ilm'on de Châ teaurenard ,
qu'il avait rec ueillir dans la successi on de son pl' l'e ,
Le décès de Jean- Franr;ois d'Aymar, survenu le lendemain du Jo'ur
oÎl son testam ent avait élé fait , c'esl-à-c1ire le 19 nov embre 1684, mit
.]uSI'11"
35 -
d' Aymanl , l'institué, en possession dc la barunnie de Chùleilll-
renard ,
Le 20 juillct 16Hll, Jose1J" d'Aymar contracla mariagl' av ec FranI;oise de Tonduty, li prenu, uans Ic cllntrat, la qualil é de haron rl r
Chàleaurcnal'(l, ct il la donn c égal cmcnt il slln pèl'e,
De l'C mar iage naqu it ulle seide fill e, Sexie-Gaill'ietle d'Aymar, qui
eut pUlir parrains, ... sun uaptèmc, le n déce mlll'c '1700 , les procu l'eul',
dra pays ct co nsuls de la 1 ille d'Aix, l.'acte dl' naissant!' donn e, a so n
p:' rc, la qual ité dl' baron dl' Châteaurenard,
i': lI e fut mar iée du 1 il allt de so n père, en -1727, il J ea n-Lo ll i,;-CaIJl'ir l
de Thoillassi n, marqllis de Saint-Paul, vicoml e de Reillanne, Lal'uli de
RUg'na t 1'1 dc !"lIl'eaU, pl'ésid ent il morti er au Parlprnr.nt de Prul'cnl'!' ,
Vuici te qu c le vi('umte dl' Valori dit de 1\ )1' gi ll c dl' l'épL'ux de Se"tleGabrielle rl'A,ljllwr , au chapitre x et d('l'Ili er dl' su n réri l histlll'iqu l' ri e la
barunnir de Châteaurenard:
La maisu n de Thom3ssin
1" (
originaire du com té J e Bourgogne ,
ou cli c
po~sé
dail dcs fiefs Irès co usidérables, ava nlle douzième sicele, Cl le lilre de premier baron
chréticlJ du cu mlé. Lcs It'tlres pat entes de 1ï 5A, cl' il es pOUl' j cf('ctiun des rnal'(lui s al ~ ùe Sa iul -I'aul cl de Pt'Îni er Il e laissent auculi rloule ~111 suj el dr l'antiquité Cl ric
11illuslraLion des Thoma:'is in , qui occupèrent cn Frant hc-Comté, (' II All emagn e cl au~
p".l's-Ilo', les emploi, le, plus cu nsidérabl es, Sainl Berllard, il l'épuque de la deuxième croisadc,'ccri\'ai( à J ea n riC' Th (\ ma~s in , qui l'ass(, lllblail"'j~s '- ~l'~a ux . un e ICllre
qui commCli ce par ces mols: Johani antiqu.o el chrisfian,o haroJ11' Burgondiœ primo,
salu s et !tonus. Par lettres palCu(CS dépusées aux arcbives de Dijon , Hu g ues dl' Bourgogne lit don à Charl es de ThollJ:lss in , SO li g rllnd fau co llllier dl' la quatrièrnr partie
de la viii .. de Louvi ers. Mais 1:1 g loire princi pa lr de 1" lIIais ~Jn de' Thornas!'o in es t
d'a\ïlir form e la branche des Thomassin de Proven ce, qui Il e le cécle, I('~ Sabran ('1
les d' AguUl exce ptës, à aucunu maiso n de cettt~ pruvince J pour l'all cie nnelé, l' illustratinn , les alliances, les fiefs puissan ts qu'c li c a possèdés 1 ct :,urtout pOlir ayoir
aC<luis claos la magislrature le premier ran g enlre Ioul es les famill es de robe de
1
1
royaulIle, Ellc a fuurni
UII
nombre prodigieux d'officiers de juslice ,
il
savoir : six
�-
36 -
prèsident" à mortier au Parlrmf1nl de Provence, deux prèsidcnls aux ('. lIqu é t('~, un
a"ocat généra l au Parlement, qualrr avocats géneraux à la Cour ttes co mptes, Cl plu:.
"
"
de [\t'uf conseillers au Parlcml'nt.
«
"
Tel full 'épollx donn é il Se.r:te GnlJrielle d'Avm3 I'.
De cc mariage naquil Joseph-Etienne de Tholll;,ssin, cl. ("est sm' <:elui-ei que Joseph (l'Ayn/C!J' , ban)!l de Ch<i leaurellard, aprt's avoir penlu
sa fille Se:r.te-G(lbrielle Cl so n l-\endl'c JC(ûl-Lotû.,-(;nlJ/·iel de Thoma;;sin , marquis J e Sainl-Pau l, vi llt raire repllse r sa l'" rlulI l' el s,ln nom .
Ille fit par un acte solenn el de ,lonution, le 20 dél"' Il1!.re 17))4,
Joseph d'Aymar' y r.x pose qu e:
" Considéranl qu'à l'àge Ull il esl, acca blé ll' innl' milés, il 'n'esi pa,; l'n
« état d'avuir tout e l'allenti\ln nél'essa ire pOUl' l'ntlministr3lion dr 51''(( aIT(li rL's, il aurait rësolu de rern ellre t\lUS ses biells, meubles ct imml! lI« bles prése nt,;, so us l'cl'tainrs rése,'ves, pal' un e dOllatillll gé néral e,
« pure, simple el il'l'év()('ab!e entre vifs, il hallt (~I puissa nl :,eignclIl' i\'[ps« si re Joseph,Etienne de Thomassin, cheva li er, maquis de Sainl-Pau l,
« ri(,ol11te de Rei llanne , conseillel' Ilu roi en la C'Hl!' (\u Parl ement de
(, te pays de Pr'ovenre, fils de feu M. le présid ell l de Rei llanne el de
« fcne damc Gahrielle d' Aymar, fill e du donal ell1' . "
L'acte ajoute que cctt e résoluti on, commun iquée il Jo:>eph-Eti enn c de'
Thol11assin , a été acceptée et agréée pal' lui ,
.
Pui,: l'acte rait connailre qu e le Jonateur a c<lmll1uniqué aussi so n
dessein il Pierre d'Aymar', son rrère, le'luel l'approuve ct a Jonné pouvoir ail lieutenant de .iu ~e de la I)ar'onnie de Chùtcanrenard d'assister à
l'acte de dunation , Il'y consentir et de l'appronver, ct Il le dit Jans les
termes suivants:
« En même temps, leuit seiglleur aurait instruit , pal' I!\ll.re de sa vu« lonlé, et par un Mémoire contenant le projet du présent acte, Mes« sire Pierre d'Aymar, son frère, chevalier de l'ordre ro ya l el militaire
«
«
«
- 37 .le Sain l-Louis, rapilaine des vaisseallx du roi au déparlellll'ni J e
T"lilon , y rpsioan l, qui , approuvant le dessein de faire ladite donalill n, a fail pro(,lII'alion par acte Jn ~l du couranl, notaire Amiot, de
la vill e ùe Tuu l"n , il Me Dcnis Vicnry , lieulenant ri e .J'u"ede la baronnie d (~ Chill ealll'cnard , y ré,;idanl. au présenl , pOUl' y assister, y con'l' ntil', l'appr,,uver en s"n n()fl" cl y stipliler pOli" les ca uses conlenues
clans Il'd il arle.
~
Enfin , la donation esl ainsi formulée; le donatpUl' donne:
Tous ,;cs hirns im !lIellbles, qui co nsistent principalemenl en sa terre
« r t I,aronni c dc Chàtcallrenard , Rognonas, l'Olmc-d'Ampal et l'isle
« d,) Barhan, toutes les annexes et dépendances, avec lous les droits et
« t1rvoirs se igneuriaux qui y sont attachés et qui lui sont dus, \ri ens
" Bohles, an'ranchis de taille pal' compensai Ion, el hiens rotlll'iers, ch~
" Il'au x el aul.l'es bâtimenl s y élant, sans en ri en rxcepter, ~a maison
" d'habitation en la vil le d'Aix el. généra lemenl ton, les aulres biens qu i
« pr uv enl. appal'tenil' de présent audit ~e i g n e llr . .. »
«
Et à la cu ndition de porler' le nom et arme;; du donatcllI' :
Qu'ell conséquente, le dunataire sera tenu et obligé de portel' le
« num et arilles d'Aymar d'Alby, co nformément il ('e qui est porl é par
" le testament de Messire J ea n-Fran ~uis d'Aymar, aïeul dudiL seigneur
« donateur et bisaïeul dudit seigneur donataire. »
«
Suiv enl les rése rv es qu e se fail le dunal eur Lie pen;;ions, censes et
alltres choses pareilles,
El. l'acte se termine par le consenl.ement et l'adhésion du mandataire
dl' Pierre d'Aymar en ces lermes:
Lequel a approuvé et apill'o uve en tous ses chefs la donation géné« l'ale qui vient d'être faite l'i-dessus pal' ledit seigneur baron de Châ" Ica ul'enanl audit seigneul' Joseph-Etienne de Thomassin, vicomte de
«
�- 38" Bei llanne, av ec pl'olilesse qu e le sieur Pierre d'Aymar, so n constituant,
" n'y co ntreviendra jamais de son chef, et de plus cède et transport e
" aud it ~rig-nnpnr vicomte de Rei ll anne tl)U ~ ses dl'nit s et prétl' iltions,
« qu e ledit sieur so n co nstituant pouvait av oir, dérivant des tes taments
" l't ('o ntr'a ts de mal'iage de ses ayenls, père , mère et ayeulr .. , ))
C'est ainsi que pal' cet acte ri e donation, du 20 décemurp '1754, la hartl nnie de Chàtea urcllard a été transmise Slll' la tête de M. de Th omassi n, lIlarquis de Saint-Paul ic'est ainsi qu e cet act e a trallsfél'P il œ llli-ci,
avec le titre et le nOIll de Châteaurenard , tOIlS les dl'o it s qu 'y avait la
descendance masl'illinc de Frant:ois d'Aymal', acquéreur rie la haronn it'
en ·1630,
J useph d'Aymar, le donateur, décéda le 31 décemure 1760, âgé dc
85 ails. Il surv éc ut six ans à la donation qu 'il avait faite.
Pour sui vre jusqu'au mal'quis de Va lori la chaine des actes et dps
transmissions de la baronnie de (; hâtealll'ellal''' , il ne reste plus qu'à indiquer co mment , de Joseph-Eti enn e Thoillassin de Sa int-Pau l, ellc lui est
arri vée .
Peu de mots suffiront pour le faire.
Le 31 décembre '1756, Joseph-Etienn e de Thomassin, marquis de
Saint-Paul, baron de (; hàtea ul'enard , épousa Louise-José ph illc de
Marbœuf, fill e du CO llite de Marbœuf, go uv ern eur de Breta gne,
Les qualités qui lui so nt donn ées dans cet acte so nl celles-là même qui
lui assuruielilla donati on dn 20 décembl'e '1754 i il Yest appelé vicomte
de Rei llann e, marquis de Saint-Pau l, baron cie Cltàleat!/'cna/'d , seigne!!/'
.
de Roynon.as, l' Oll/w-d' Amllal et Hutl'es lieux.
Le co ntrat esl passé ell présence du roi el de la l'cin e, de Monseigneur
le Dauphin et de Madame la Dauphin e, de lout e la f,Jl ni lle royal e et de,;
plus hauts personnages de la Cour, Sa qualité de bal'uli de (;hàtea ure nard ne pouvait être plus solenn ellement anthelltiqnée, pllisqu e le co ntrat ful signé pal' le roi et par la l'eine, et pal' toute la fami lle royal e.
- 39 Dr ce Illariage naqu irent deux enfant s:
une fi ll e, JU''':IJhin e-lIen1"ielle i
Un fils, JI'sC)Jh- Aufju.\Ie .
./osi IJhine-lIel11"ielfe éponsa, en 1781 , Messire Louis-Mnre-Ant oin p.
de Va lor i, marquis d'Esti ll y et de Lécé.
Juseph-A1tfju..~fe de Thol/1.a ssin, 1/1.U1'quis de Sainf-P((ul, baron de
Chrifeaurenard , propriétaire de la baronnie de Châteaurenard, est
mort cn 1849, sans enfant s, lég uant tOIiS se,; biens à la maison de Va lori
et aveC' ellx la tpl'I'l' de Châteaurenard et le titre et le nom de Châteaurenarn ,
Celle maison de ValOl'i qui se composait , a\'ant le déc(\s de JosephAuyusfe , des nellx fi ls né3 du ma l'iage de José phine-Henrielle de
Thumassin avec Louis-Mare-Antoine de Va lori , marquis c1'Estilly,
savuir de Louis-Gob1"iel el d' Henri-Zozilile rie Valori , n'a plus eu
d'au tre représentant , au ll1"ment. de la murt de Joseph-Allguste et de
1' 011 \ erture de so n testam ent , qu e M. Henri-Zozime, marquis de Valori,
le père du vico mt e, aut eur de l'histoire incriminée et possesseur actuel
de la telTe de (;hâteanrenard,
Ainsi, à l'imitation de te qui s'était fait pl'écédemment , la terre et
l'ancien fief de Châtcaurenal'lJ, la baronnie de cc nom, après avoir été,
en 1580, dans la possession de Gabriel ri e Va lori , cn 1630, dans celle
des d'Aymar, en 1754 dans celle des Thomassin, est nrrivé aux Va lori,
qui la possèdent aujourd' hui avec le même droit qui la fit sU(,l'essivcmeot
passel' aux divers acqu éreurs que nous venons de nommer.
De quelque nature qn e soit le t.itre qu i la transfère, inféodation, achat
et ven te, donation, t.es tament , tous ces titres ont un e éga le puissance et,
de 1 j80 li nos jours, leur effi r.ac ité a toujours été la même.
�-
40 -
No III.
.lppll ~ n"on du p " ludpe d e droit ""'" r.. lf .. '" .. " ' tU.· .....
l\o us reprenons ici, apres avoir ex posé les principes et. les titres, la
question parti r ulièrr soulevée par M. le comLe d'Ay mar de Mo ntsall ier
et la proposition qu e nous lui opposons.
Et , Il cet égard , il est facile de se conva inCl'e qu e M. le marquis de
Va lori a seul le tlroit de port er le nom et le titl'e de Chàteaurenard .
Le droit de le port el' aya nt été, par l'ancien principe, ~ttac h é à la
possession de la terre, de très bonne heure et touj ours le possesseur de
la terre cl e Châteaurenard en a pris le ti tre de baron et en a porté le nom.
Cela existe ava nt l'acquisition de François d'Ay mar" en 1630 .
Cela se continue dans F"/"cLn çois d' Ay/I!U'r lui-même. On le vo it dall,;
les act.es qui lui sont personnels, son testament du1 er jan vicr 163 1, son
acte de décès du 18 janvier '163'1, dans le testament d'Anne d'Alhy, sa
femme, du 27 octobre 1644 , où elle SP- dit b31'IJll ne de Châteaurenard et
olt elle donne à son époux sa qualité de baron.
Cela se l'oit dans les actes de Jean- F r ançois d' Ay mm' : d'a bord , dans
son contrat de mari age, du 17 févri er '1647, avec Fran(:oise Grolée de
Vireville, puis da ns SOli testa ment du "5 décembre 1662.
Cela se vo it dans les actes de F'r anço-is cl' Aymar : d'abord , dans son
l'ontrat de mariage, du 8 mars '1676, avec Thérèse de iVl aurel-Pont evès,
puis dans so n testament du 18 novembre 1684, pu is dans son actc de
décés du 19 novembre 1684.
On retrouve le même fait dans les actes de ,fo scl1!l d' Ay mar, fi ls du
précédent : d'abord , daos son l'o ntrat dc mariage du 20 Jui llet 16ml av cr
Mari e-l<' rançoise de To nduty; puis dans la donati on du 20 décemlJ re
1754, par lui faite à J oseph-Etienne de T homassin , enfin clans son ac te
de décès du 31 décembre 1760.
-
\1-
La mèmc qun lil é l'lie lIl èlllC nem de baron tl l' Ch;il eallrenard S('
manifeslcnl dans Ir l'ontrat tic maria ge de .Joseph-E lir nn e Th omassin,
ma rqui s ti c Sai nl-l)all i. lei on peuL dire qu'i ls s'élèl'rnl il leur apogée .
Ils lui SOI;t rcconnus pal' le roi lu i-mêm e, qui signe son cont ra t. Cette
ci rco nstan l'c éqll il"autl rait il Llne co nce!'sion royale, si riéj il ce droit ne
lui avai t pas appar lenu ro mlllP arqn('reUl" el pussesseur du fi ef de Ch ,\teau renard.
Enfi n, des Thomas,in, en passan t sllr la lête des Valori, la te rre rie
Chàtcaurenard a conlinu é de leur maintenir cc droit , puisq u'il y e;;t
uni et insé parab le de la terre.
La conclusion ù tirer de CP qu i préri'de n'est dune pas seu lement
qu'au marquis de Val ori appartien Lle (\t'v it de p:)\'Ler le tiLr!' et le nom
de Châteaurenard , mais enco re qu e cc droit n'est qu'il lui seul.
L a raison décisive en est que la terre de Chàte3 m'en3nl es t posséMe par lui seul ; qu'il représente ceux qu i l'ont possédée avan t lui;
qu'il n, par la chaîne des lit res, succédé à leurs dl'oits, et que ces droits
ne se so nt répa ndus ni dissémi nés SUI' perso nne au trp qu e sur lui .
~o
IV.
Objection du cou. te d ''' y u la.· cie l1Jout!Jlulli," .",
Le coml e d'Ayma r ri e Mont salli er la présenl e Cil l'es l e r lll c~ da nt'
son ex ploit introdu clir d'inslnnce . Il dit : « Que l'cxlin("\ion des repré« senlanl s de la branche aîn ée a depuis longtemps défi ni ti vern ell t ("on« solidé cr. droit nu profi t ries représent an ts de la branche cadett e. ')
Cela l'eut di re, en IradlJ isant ces termes en langage plu. r lair, qu e
Sexte-Ga bri elle d'Ay mar ayant été l'IJ nique enfa nt de Joseph d ' A~' !llar ,
baron dc Chii teall renard, el n'ayan l pa,: Cil d' enfan l mùlr du nom
•
�-
4.'2 -
d'Aymar, le droil de pori el' le nom et le till'c J c ChàteaLll'enard a été
pel'du pOlir la hranchc HÎn!\e, ct qll'il a !\té Iransfcré il la branc he
cadell e, c'esl-i1-dirc all\ desccndanl s nHil es dc Jos('ph d'Aymar,
'seigneur de Montsallier, seco nd fi ls de F run l;o is d'Aymar, acqu él'cu l"
en '1650, de la baronnic de Chùteaurena rcl,
Mais celle objec ti on est fund ée SUI' un e doub le crrellr,
Il esl fau x (L,boni qu e le Ilroi l de la branchc aînée ai l péri il l'époqu e indiquée; il est faux ensuite qll e cc lh'oit ait ét!\ transféré il la
branche cadcll e,
C'éta it su us l'ancienne législation un e qu estion déballlle qu e ce ll e de
sa l"oir si la femme ou la mère pouraient co mmuniqu er il leurs maris
ou il leurs fils leurs nom et leurs armes, et si le roi pouvait , pal' des
lettres patenl es, autoriser cc tte transmission de noms, lorsqu'il existait
des màles de la fami llc.
On fai sait , d'après le Réper/oir e de Jurisp)'udence de Merlin , 1'0 Nom,
la distinction suivant e: On le pouvait, si la fam ille à qui le nom et les
armes appartenaient y co nsentait ; on ne le pouvait. pas, s' il y ava il,
des mâles intéressés qui s'y opposassent. On peul. voir dans Merl in ,
loco cilato , pag, 5'10, ,,0511 , les nombl'euses autor ités qu' il énumère.
D'Aguesseau avait fait un e plus large part aux femmes, dans son
célèbre réquisitoire du 13 avril Hj96 , en la cause de M, le duc de
Luxembourg , où il agite la question de savoir si la pa iri e a pu étre
lransporl ée pal' la femme au mari , Il accordait qu e la femme avait pu
transporl er à so n mari ln pl'op/'ié/(: de l'ofFce, ma is qu e la diglli/(: ne
puuvait êlre conférée que par le so uv erai n ( d'Ag uesseau , 38 e Pla;doyer, pag . 70ft et 721, to m, 5, éd it. in-fto).
Si Jonc nous avions à agiter celle question, il faudra il voir quel a été
l'elTel du contrat de mar iage de Sexte-Gavriel le d'Aymar, en 1727 ,
avec J ean-Louis-Ga briel de Thomas;:in, marquis de Saint-Paul, et ~o u s
laquelle des deux doclrines nous nous al r iterions,
-
/!3 -
:vIais (,(,\tc qll csli on ~e rail o i ~,)usc Cl inul ilr, Ce n'e 1 pas le co ntJ'at
de n~a J'ia ge dr '1727 qu 'il s'agi t d"lppréciel' dans ses cI'fI)IS, mai hi en au
c~n l J'aiJ'c l'ac le de dona tion du 20 décemhre '17:11, f"i l par Joseph
d Aymar il Josr.ph- Eli ell ile Thomassin, marlJu is de Sa int-Paul.
Or, il es t UIl C ('hose cprtaine , c'est qu e le droi t éta it enlier dan s I ~l
pel'so nn e de Joseph d'Aymar, Il l'a l'ait rcr; u enlier de son père ct dt' la
possessi,lI1 de la trrre ri e Châl ea ill'enard, Jusqu e-Iii il n'al'ait en rien
défailli , ni ne s'é tai l diminu é,
En second liell , il ,,'est pas moi ns ce rlain lJue Joseph Il'Ayll1al' li
donn!\ sa terre Cl so n nom il J oscph-l~ti enn e de Thomassin, Les terme
de la Jonation ont ailsoills, ils n'ewluenl ri en,
Enfin , il n'cst pas le moins du mondc dout eux qlle Joseph d'Ayma r,
'lui anrail pu r endre il lin liers sa lerl'e et sa haronn ie de Chàteu urenard et lransmell re il ce liers le droit d'cn porter le tilre elle nom, a pu
le faire par une donation au profit ùe Jose ph-Étienne de Thomassin ,
marqu is de Sainl-Paul, son petit-fils, et le fi ls même de Sexte-Gabrielle,
En agissa nt ainsi , le donateuJ' co ncentrait dans sa propre famill e le titre
et en cxcluait louj ours plus les descendants de Jose ph d'Aymar, seigneur ri e Montsall ier ,
La jurisprudence pr ove n ~a l e ne laisse aucun dout e SUI' ce point. Il
sufflt de consulter le Tra;/(: des SuccessÎol1S rle Mon trallon , co nse iller
au Parlemenl de Provence, Il professp. clairemen t qll e l'exercicè d'lin
pareil dro it es t très licil e et chaque jouI' consacré! Vo ici co mment il
s'ex prime all tit. 1, pag, '18l:1, so us la ruill'iqu e: De l'obtif/a/ion imposée
(1 l'hérit;er Je portel' le nom el les arm es du défunt.
« Cell e obliya/ioll, dit-i l , 'imposée pal' le tes/al e!!l', EST TRÈS LIC ITE,
« On l'infère de la loi lloc jure HI, Dig" de clo?1ut;on;bl/s, Les exem« pies en son/ forl communs en Provence"", " suiv en l les développements de celte doctrine,
M, Merlin, au Rp]lertuÏl'c de JtlrÎ,"]Jl'I!clel1ce ,
1' 0
Promesse de changer
�-
de 1/0111, nous fait rUllnailrc êgnlement un al'l'êt dul~arlell1ent de Paris,
<lu 1 j uin '1:J7H, (lui le jugea de même.
En ' oit i l'espl'!'c telle qu' il la rapp ol'te, pagc ,j5Iî:
" Le -18 <loti t '1:)76, actc notari é, pal' lequel Anto ine de Brianco urt
" de Bo uchal'anncs fait à Josias tl e Larne th , so nll evc u, donation entl'e(, , if" de ses terres de Bout hal'annes, Quincy, ClJurso n, Buez el Le'( fans, à la chargc ti c prendrc Ic nom et I('s armes de Boucha van nes.
« Ap rès la mort lill donat eur, Jean de Montm orency, hériti er ab
" il/lcslal des oiens donn('s, attaqlle la donatiun , et dit (ce so nt les
l' propres tcrmes dl' l'arrêt dont il s'agit ) 'Iu'il 1Je 1Jeul pr/'llielfre la
l' J//ltialioll dlll'fa; 11011t du donataire 1'/1 celui de BouChrl1'(/lIneS, sans
l' que, }JOli" cc fa;r e, Ic (/rIcndwr c!l,1 )iris lclffes de 111 ;Ilce,
,,;
« obscrvé les solennités en Ici cas requ;ses, aussi n'esl te changel, mcut du nom, ~;1101l aFn (le donner quelqlle couleur ù la donc!tion,
« L'arrêt ne nous retra ce pas la défense qu e le donataire opposait à
" te moyen ; mais voici ce qu' il prononce, en infirmant la sentente des
" premiers juges, qui avaient déclaré la donation nulle, so us prétex te
« qu'elle al'aitélé fait e la veille fie la mort du donat eur: la Cour met Les
« a/J/leUations et ce clont a été appelé au nëanl, et en émcndanl te ju( 1 gement, absottl le défcndeur cles fin s et conclusions dn demœncleur ;
l' et ,ma il/ lient L
ed;1 dé(cndwl' cL la posse,~sioll des terres et seign euries
(i de Bouclwval11/Cs, Quillcy, Coursol!, LlI (!11S cl Buez, leurs {/IJl)(I1'te« nances ct dr'1Jcnd(!1Ices, C!UX charges 1Jol'tees 1)(/1' le COl/ lrat de clona(, tion SUI' ce (ail le 18 aoù/ /[ï70, salls dC;1Iens, lant dc la cause lJrin" Ilule que de celle cl' appel,
Le droit exercé pal' Joseph d'Aymar n'est donc pas douteux .
11 y a plus encore. La donation du 20 décemore 1754 nous a révélé
un fa il bien grare : c'est l'accessioll et le consentemen t de Pierre d'Aymar, frère du donat eur, le se ul mâle de la famille d'Aymar alor3 vivant,
eu qui, au besoin , selon les dort ri ne, rapp ortées par Merlin, se se rait
k:j -
toncentré un ,Ii'oit d'lIPp"sit io n il la translali(J n du nom ct des arill es de
sa famill c, si clle al ait dl! s'o pérer ct ~; i clle s'é tait opérée par le mariage
ci e Sex le-(;a!JJ';e!le,
Joseph d 'A ~lmr amui t dont ici, par e~ ub é ran ('c, ajout é il so n acie
l'adhésion ti c la famill e intéressée; il aurait don né à so n co ntrat ce
degré tl e perfcc ti on rl onl il pOllvait sc passel'; et puisque ('clic préta ution
fut prise pal' lu i, qu uiq ue inuti le ct non cxigéc par la lui, on peut dir'e
auj olll'd'hui que ('c li c translation s'est opé réc :\l'CC toutcs Irs conditions
pl'o prcs il cmpéc hcr l'p'din cti on du droit et il le fairc reposel' SUI' la
tête de Joseph-É ti enn e de ThOI1lDssin.
Où donc cs t la lacu ne 1 Le droit ùst transmis; il a ton tinu é il l'i\TC,
La chaille n'cst pas hrisée et jamais la brandie eadett c n'a pu ri eTl recuei llir Iii où il n'cst ri en l'esté de l'ide cl d'inoccupé, J oseph-É tienn e J e
Thomassin a possédé la ten e et la baronnie depuis le moment de sa
ùonati on, Celle-ci nc s'est jamais reposp-e un instant sur la branche cadelle . D'où se rait venu son droit ?
Un autre motif repousse encore l'o bjec tion, Nous al'ons HI quc la
possession seul e du fief donnait le droit de portel' Ir. nom et le tit!'e.
En faisant abstraction de tout cc qui a été dit, le droit n'aurait donc
jamais péri ; il amai t VéCIl, indépendamment mêmc de la volonté du
ùonateul" pal' le fait se ul de la possession du fi ef.
Enfi n , il n'est pas pel'll,is d'omellre ici qu 'il tout él'énemen t , et au
besoin , le titre ct le nom auraient ét6 de nouveau acquis pal' ln signature
du roi au con t,rat de mariage de Joseph-Étienn e dc Thumassin, en '1756,
C'est une consécration de pins à ajo ut er à celles qui précèdent , et personn e ne pourra nier que le titre et le nom pris et dunn é dans un e circonstance aus, i solennelle, ne soit un nom légitim ement pris et léga lement acquis. .
NO liS ajoutons maintenant que le droit qu'on prétcnd éteint l'étai
S I peu , que Joseph-Étienne de Thoma:;:sin a l'ontinuc de le posséder
�- ~· 6 publiqu ement. On en a YU la prel1re dans ' on conlrat dc mariage cn
·17:Jt.Î. En voici un e nOllr cll e dans l 'a~l c (l'h ommage rail pal' lui au roi ,
enla COLir d e~ Compl es de Provence, le 8 juillel "76\ l' n sa qualilé de
scigneur, enlre aulres, de Chl;leewre/1nnl ; el l'ael e dit Irès nellelllent :
« qu'il a rail Iltllllll1age 3uroi Cl pr é l ~ sen.11ent de fid élil é enlre les Illains
" de Messirc Boisson , conseil ler du roi enla Cour, lJOIll' 1'IIis01l des
« lerr es ET SE (GNEU RI ES OE C HATEAU RENAIIO cl de Brès, qn' il possède
« 1)(0 ' ""ccession , donl il a promis le dénomhrement parliculi cr dans
« les qUaI'anl e jours .. ... ))
Inulil c de r'lppcler encore , après des ael es qui ont 1111 caraclèrc si
" l'ar e, ceux qui n'onl élé dan s la vi e privée de Joseph-Elienne de Thomassin que l'e... ercice jûurnalicr et quolidien de son dr oit. Nous cilon s
seulement, enlre mill e, l'acle de bail du '10 aoÙI '1762, dans lequel il
prend cl conlinue ~ prendre la qualilé de seigneur , 1)(/1'on de Château-
-
4.7-
mique de François d'Aymar, en 1630, ct de sa famiil e, ct qu e, comme
ils en desc endent , ils onl le droit de le porter ;
Ou bien, en SOl1t e n~nt que si le nom de Châteaurenard n'est pas le nOI1l
patronymique de Fran ~ oi s d'Aymar el de sa ramille , ils l'ont toujours
porté et qu'ils l'ont acquis pUI' prescription.
Il faut clone examiner chacunc de ces exceptions, et on verra bient ôt
que l'une et. l'autre lem' échappent et qu'ils ne peuvent ,'en préraloir.
Comm c n ~ on ~ pal' la première :
N" l.
Le
de 4::b:àtc:l".·cluu",1 Il ' :1 j:ullais été le IIOUI Ita"·o'I~' IUh.ll~
de ln f:unillc tte 1'.':11u;018 d'A.~' lUa .. , ni de lui-Illèlnc.
1l0IU
ren ard.
L'objeclion du comte d'Ay mar de Montsallier n'a don c aucun carac1ère sérieux , et elle ne peut ri en enlever ù la démonstration de la
prem ière proposi1ion.
Passons à la seconde,
III.
De tous les temps on a distingué le nom pCltrol1!)miqt!e du nom et litre
seignct!l'ial.
Voici comment deux jUl'iconsultes éminents de la capitale ont défini
l'un et l'autre ct di s tin ~ u é l'un de l'autre dans une consultation par eux
donnée, dans le procès de Clermont-Tonnerre, en 1857 .
Le premier, M. de Vatismenil , s'est exprimé de la sorte, il a dit :
« Le jugement allaqué a établi d'abord une distinction très juste
Deuxième proposition.
enLl'e le nom patronymique et le tilre seigneuriaL Le droit de porter
« un titre, un titre seigneuria l, est la conséquence de la possession du
« fief: c'est la Illarqne de la dignité dont le seigneur réodal est inresti ;
aussi n~ peut-il le conserver qu'au tant qu'il conserve le fier lui-même ;
« s'il perd le fier, il perd le litre. Le nom patronymiquc, loin d'élre ré« sel'l'é à celui des membres de la famille à qui le privi lége de la Œis« sance a rait r emellre l'exercice des droits seign euriaux, est la propriété cO~Jnllme de tou;: : il appartient aux aînés comme aux puînés,
«
.\1 . le comte d'Al mal' de nontsalliel' ct les membres de sa famille n'on!
le (h'oit de llol'tu ni le TlTIIE IIi le ""Olt de C"A'fMUIIE~AIID,
(C
Ils Ile peul'ent revenù iquel" en effet, ce clroit qu'en se rondant sllr
run e ùe, deux hases suivant es :
Ou en soutenant qlle le nom de Cluilcaul'clI(lnl élait le nom pall'ony-
(C
�-
IH -
-
I,D _
au'\ fi ls cO llllIIe all\ fi lles ; l' -('~ t un bi,' n 11I'l'C leUx , indépendanl de
« lous les cap rice,; rl r la rorlun e, qu'ils l'e(:oive nt de leur père av ec la
(( \'ie, <, 1 qu 'il,; Il!' pcul-eul pcr(h'c qu e par la mort. »
Le sccolld , M, D nf11 un', 11 dit av ec plus de c! t\\'cloppcmenl s :
« Si dans la branc hc dc la famill e de Clel' monl , ;) laqu cll e 3ppal'li cn" nenl Ics co nsl1 l1 an ls, on sr flil born é :i s'ap peler Cl cr'lll onl , sc igneur
(( (h' TO/ll/ err e, ou Clerillont, l'om le de T01w el'r e, l' in cor porat ion dl'
« deux noms ne sc serail pas l'pérée, Il n'v nurail cu dans crll c l)J'a nche
(( qu e le possessell1' du eo ml é de To nn cl'l'e qui allra il pu signcr CI['/' « 1/10111, co l/l l e dl' TOl/ lI l'I'r c, Si l'r possesseur avail élll l'ainé, les cadels
" n'au raie nt pas ell il' droil dc s'appclel' T onn erre; ct le jour 0 11 l'on
« aura il rendu le ('omit' dl' Tonne1'l'e , on sc sc rai l Irouvé rédu it i,
" porlr r Il' nOI11 dl' CI('J' l11onl , sans l'additi on du tilrc de ('oml e de
" Tonnerrc ni du nom cl c Ton ncl'l'c,
« Mais si, au co nll'airr , la branchc ù laquell e apparti enn pnl les co n" i'uil ants a fai t plu s qu e de portel' Ic ti lre de comte ùe T onn en e, si ell e
« a joinl le nom de T onncrre il celui de Clerm onl , en les mett ant sllr la
" même ligne, ccs deux noms so nt devenus indi visibles ; lelll' ensemble
« co nstilue le nom palronym ique dc ce Ue branche, et ce nom a Slll'« " éc u à l'aliénation du comté de To nn erre, pour vlI qu 'il l'époque où
" crlle bra nche a co mmencé il s'appeler Clerm onl-To nn clTe, elle flit
" propriétaire du comté de To nn crre, »
Voi('j co mment allssi le jugement du trihun al t il'il de la Seine, du
2,1 mai '185G, cl l'arrêt dc la cOll r de Pa l'is, du 5 décembre 1857, inl ervenus dans le procès de Clerill ont-Tonn en e, ont éla!>li celi e di slinction
entre le nom palronymique et le nom seigneurial.
Le premier a dit :
Lc secolld a dit égalemcnt :
« Co nsidé rant qu e les ac le, pu blics et prirés, les papi cl's d oml'~I ;
.. ques ct les mémoÎI'I'S du lemps all c;;lcnt qu e jusqu 'c n 1605 ('l' Il e
« fami ll e n'a ja mais cu rI 'anlrc nOIll qu e ('eilli ùe Clermonl ;
« Qu e si l'Ci'3 cell e épolJu!', l'ali leur des ap pela nl s, Cha rh', - llenri, y
« a mêlé le nom ùc T Ollnerrc, el' n'est pas commc élément d'lin nom
« pa tronymiq uc il co nstit ulcr, mais parc c qu e deI cnu proill'ié tair!' ,lu
« com lé dc Tonn errc, ct pa l' applicati on du droit féo lai, Ici qu c ran, it
« fait Ic plus co nslant usage , il ajoul ail il so n nom cclII i dl' la , ci« gnem ic don t son palrimoine s'élail acc ru, »
Ainsi donc ri en de plus cCI'tai n, le nom ]Jal r oll!}lIIique élait dislinct
du nom et titre se igneul"ial , L' un produisait dcs elTets qu e l'au lre nc
produisait pas, etréc ipl'oqu ement.
,
Co mpl élons la théoric du droit SUI' cc poinl et ajout ons cnco re un Irai l
à ce qui précède,
Le nom pa lronym ique pouva it se fo rmer aussi pal' la réuni on et l'incorporalion du nom seigncul'ial au nom de fami lle primi lif. C'étail , pal'
exemple, comme d ~n s le cas de l'espère déjà citée, lorsqu'au licu de sc
dire Clel'monl , comt e ou seigneur de Tonn erre, on anlit dil el signé
Clermont-To nnerrc, en supprimant le ti lrc seigneuria l, Cl en ne formanl
des deux qu 'un scul el même nom pall'onymi que,
Le même jurisco nsull e rl éjil cité, M, Dllfaurc, dans sa co nsull alio n,
aj oulait cnc" re aux idées par lui cXJlrimées SUI' la dilTérence enlre le
nom patronymique et le no m seignelll'ial , sa th éorie S UI' la rormalion dn
nom patronymique et 5111' ses co nditions :
Att endu en elTet , qu'à la différ;)nce du nom paironymiquc, pro« priélé inali énab le de lous les mcmbre> d' un e même ramill e, et qui se
" perpétue de génération en généralion , le lilre dc seigneuri e dépen-
(( Les seigneurs, ,lit- il , ava ient aulrerois l'usag(' de prend re pO Ul'
« nom palronymique le nom de lellr3 scigneuri es , Lorsqll'llIlC personne
(( devenait pl'opl'iélaire d'un fi ef, cli c ajoul ai t le nom de -Cl' fier il celui
«
«
« dant r,se nl iellcmcnt de la pos,e,sion du fi ef ,
« sc perrla it ,lI'CC lui .... , »
SI'
('OIN'na il ar c" lui ,
�-
(i0 -
que su n pere lu i al'ait laissé, ct les dell" noms ainSI réunis, ainsi in(e l'orporés, n'en fa isaient plus qu'un se ul pOlir l'avenir . Att estée pal' la
« tradit io n la plus inco nstcsta ble ct pal' la pal'nle des histori ens, cetl e
« co utum e a été tolérée d'ab ord , el ensui te approu\' ée pur la jurispru(, dence, et de nos jours la COllr de cas;n tion a déc laré, co mllle une
« ri'g le cert aine, qu' il était pel'ln j", so us l'ancie nne légis lati on, de chan(e gel' Cil nom patronymique so n titre seigneuri al, ct que le nom patro1< ny nlique nou\'ca u, ai n;;i adopté par le possesseu r du fi ef, c\ e' l'enait le
« elOrll patronYll1ique de;;" famille, transmissible de gé nérati on cn gé né1< ra tio n, sc co nse rvant même ap rès qu r le fi ef en étail so rt i. La seulr
(e co ndit ion exigée pour qu'un e semblab le modifica ti on fùt possible,
" c'étai t qu P. l'aut eur de 1;, modifi cati on , au moment où ill a conso m« ma it , filt propriétaire du fi ef dont il prenait le nom. »
Le passage l'apport é de M. de Va tismesni l reprodui t la même idée.
Et l'arrêt. de Paris, du 5 décembre 1857, préc it é, marqu e très bien
aussi, dans l'afl'aire Clerm ont-Tonn erre, comment et à qu elles condilions cell e inco rporati on du nom tle seigneurie au nom de famill e et
cette formati on du nom patronymique co mposé, pouvait s'opérer.
Il dit , après avo ir résumé les fa its qui établissent la réuni on en un
seul de ces deux noms Clerm ont-Tonnerre :
«
Considérant qu'en adm ettant qu e to us les membres de la fam ille
« de Clerm ont n'aient pas sc ngé à transform er leur nom patronymique,
1< et 'lue clans les ac tes, auxquels cel'tains d'entre eux ont pris part , on
" ne trollve qu e la signature Clermont seul e, il l'es te démontré que J(.
(, plus granu nombre allait ulle intention différilnte ..... »
Ainsi don c enco re, en pr:ncipe, le nom pall'o nymique pou vait se formel' par la réunion du nom de fami lle au nom de seigneurie, et qualld
ce nom patronymique ,'élait ainsi forln é , il pouva it prJduire tous les
effets du nom patrJnymique SImple.
Il était utile de fix er ces pr:ncipe3, par,c qll' i1 l' a être main tenalll
1<
-51 prouv é qll e jamais le nOIll de Chùl('anrenanl n'a été le nom patrunymi(lue de la fami lle d'Aymar ; et qu'il est l'esté nom et titre se igneurial.
Ici le l'etom l'crs le;; actes et les ti tl'es est forcé. I I fant y revenir punr
connaître de qllelle nature est le nom (l e Châteaurenard , pris par
Fran(;ois d'Aymar et par ses successeurs.
L'aut eur co mlllun , celui dont il falll né.:essail'ement parler , c'cst
Guillaum e Ay mar, co nseiller uu Parlement de l)rol' r nce, père des cinq
fils déjà nomm és, savo ir: de Joseph , né le 25 ma i '1556, dr Jean-rlndré,
né le '15 ao ùt 1561, d'Honoré, né le 19 j1lin 1564, de Sil vi, né le
5 fén iel' 1572, ct de FraI/rois, l'acqu éreur, en '1630, tl e la baronn ie
de Chfllealll'enard , né le 8 nOI'emb re 1574.
Dans ces cinq actes de naissan ce, GlIillaume est appelé simplement ,
dans le prem ier, Guiller1l1l: r1 illlUl'is, consiLiarii;
Dans le second , Egreyii vil'i Guillwn ni Ayma/"is, cOllsilil/r ii
pl'emœ cUl"iœ Pa/'lamenti ;
Slt-
Dans le Il'oisième co mme dans le précédent ; dans le quat ri ème de
méme, et dans le cinquième il n'est pas autl'ement qua lifié.
Ro bert de Bri anr:on, dans so n li vre intitulé l'Etat de la Provence,
au mot AimaI', t. 1, pag. 255, n'en pa rl e pas autl'ement. Il dit : « Les
« seigneurs de Ch<i tea ul'ena l'd et de Montsalier, du 1I0m d'Aill1a r, so nt
« issus de Guit/(I/l/lle .4i1l1(;)" qui fut re~ u co nsei ller ~ u Pal'lement de
« Provence, l'an 1551;, et qui mOlll'ut doyen de corps. Il fi]t marié
« av ec Antoinett e d'Etienn e, de la4uellc il eut ci nq enfants mA ies,
1( sav oir : J oseph , Ho noré, Jean-André, Silvi et Franr:o is d'Aima I'. ))
•
IJe nom patron ymique fut donc celui d'A ill/m', même d'après Je
gé néa logiste sur lequel s'appu yent MM. de Montsallier.
Et lorsqu e ces cinq enfants suivirent dans le lllonde la ca rri ère qu e
chacun ava it choisie, ils prirent chac un le titre seigneurial du fi ef qu'ils
possédai ent , ou n'en prirent au cun qlland ils n'en possédaient pas.
�-
52-
Le mêl\le au lt' UI' 1\' 11I'O \I\·c. li appell e l'ainé des r illq fil s Josep h
d'Ai mai', ..eif/netll' de II/ 01l/hw,)' ;
[[pnoré t1'Aimar, sc igneur de ]\fo nIsall iCI' ; Jeau-And ré, cOl/ seiller
au Parl eme nt de Tou louse; Sih,i , chrval icr de l'Ortirc dn Roi, et
Fr(/II ~' ois d'Ailnar, seigncur ti c Mon lsallicr cl de Sai lli e-Cathcrine.
J l\squ c-l il donc, ]lfls d'aul.rc nom palronynl iq uc <]uc (l'lui de d'AYllIa r.
IJ0rsqu'après l'acquisition de la baronnie de Ch:îl ea l.lrenanJ. l'a ile en
.!I);";O, Frol/çois d'Aymar fit SOI1 lestamenl , il ne prit pas rI'aul re nom
que celui de tI 'Ay mar, et d'autre tilre qu e celui ti c Bm'on de ChlÎwanl'c1/on /. On J'a HI plus haut ; il dit: {( .11essire François d'Aymar,
" siellr el I)((ron de ChlÎlraurenard. )) II ne prend le 1ilre de Châle:lurenard que comme litre de seigneurie ou de baronnie, il n'incorpore
pas celui-ci à son nom de ramille ct tous les de ux demeurent distincts.
La même observa tion est à raire sur son acle de décès du 18 janvier
165'1. Il y est. ainsi désigné : « Le 18 janv ier 11:;51 avons enseveli
{( Monsieur }'ran c;ois d'Aymar, président el sieu'r de Châteaurenard. ))
Le testament de son épouse, la dame Anne d'Alby, du 27 octobre
-1644, ne le l'appelle pas autl'ement; elle dit: (, Veuve de défunt Messire
François d'Aymar, sieur de Sainte-Calherine et Montsallier, baron de
Cltâtea ureI1Cl1"ll. ))
Jean-François, fils institué de F ranc;ois d'Ay mal' ]laI' le teslament du
premier jalll"ier 'I6fH, procéda de la même manière.
SOli contraL de mariage avec Fran çoise Grolée tl e Vireville, du 17
fé\Tier 1647, le qualifie ai nsi qu'il sui t: « J e an-l'ran~oi s d'Ay mar,
" seigneur ct baron de Chùteaurenard , )) Le méme acte redit encore le
nom de son pè,re FI'an {;.ois d'Aymar: « quand vivait. seigneur de Sainte« Catherine, Montsall ier et baron dudit Châteaurenard. ))
L'acte de naissance de son premier fils Joseph, du 7 novembre 1647,
distingue encore III nom de famill e du nom de la barll nnie; « François,
« dit-il , fils de M, Jeun-Frallçoi&d'Aymar, baron.de Châteaurenard.
- ,,3])ans ~on Icslaillen i du 15 décembre 1(l62, .lean-François ne se
donn c il IlI i-lIlème que les qualificalions suivantes : « Je soussigné JeanFran ~o i s d'Aymar-d' Alby, sieur de Brrs, b"1'01I de Châteaurenard, ))
TOlljours mèm c appellation, No us ne Il'oll\'ons ici qu'un e ;;cu le additi on, c'esl celle du nom d'A lli.'/, nu nom de sa mère, Celle-ci, dans
sonl.estamenl du 27 o!'tobre 1544, en l'inSlituanl héritier, l'n Ia it fait:
« il la charge de pori CI' pal' lui , et telui de ses enra nts Ill<Î les qu'il nom« mera , le nOIl1 cl arm es d'Alby. ))
C'est la seul e innovai ion ; mais elle est étrangère au sujet qui nous
occupe.
Jean-Fml/çois ne prit donc jamais le nom de Châteaurenard que
comme titl'e ct nom seigneurial. II ne l'unit jamais ct ne l'incorpora pas
au nom de d'Aymar ; il fit donc comme son père François,
François d'Aymar, fils institué par le testament de son père JeanFrançois, du 15 décembre 1662, n' inn ova pas non plus,
Dans son contrat de mariage avec Thél'èse de Muurel-Pontevès,
du 8 mars 1676, il est appelé: « Messire Fran~o i s d'Aymar-d'A lby,
« seigneur de Brès, baron de Châteaurenard )) et son père est appelé des mêmes noms et qualités.
Dans son testament du 18 novembre '1684, on le désigna ainsi:
Messire Fran~oi s d'Aymar-d'Alby, seigneur de Brès, baron de
« Chàtealll'enard, Rognonas et autres lieux, ))
Enfin, son acte de décès, du '1\:) novembre '1684, dit: « Obiit nobilis
' c Joannes Franciscus d'Aimar-rl'Alby, marohio, haro, prresen tis loci
« Castrirenardis. ))
Ajoutons encore que le testament de SOtl épol!se, Thél'èse de MaurelPontevès, du 17 juin '1701, le désigne SOUp les mêmes noms: {( veuve,
{( y est-il dit, de messire }'rançois d'Ayroar-d'A lby, seigneur ùe Brès,
« buron. tic Châteaurenard, "
(c
�-
5&. -
Dans celle générat ion, point d'incorporation rllcore des noms dr
seigncurie au nom de famille d'Aymar.
Joseph , fils institué du précédent , n'en fit pas davantage .
Le 20 juillet 1699, il con tracta mariage avec Marie-FI'an(;oisc de
Tonduty. L'acte le fait. connaitre en ces termes: ., Messire Joseph
" d'Aymar-rl'Alb y, cheval iel' , seigneur de Brès, bal',lO de ChlÎt eau" renard , de Rognonas. » Et son père y est désigné comme il l'ayait
été de SOli viyant: " Messi re François d'Aymar-d 'A lby, cheya lier, l'i« yant seigneur, baron desdifs lieux . »
L'act e de naissance de Sexte-Gabrielle, sa fill e, du 5 décembre 1700,
l'appelle « Fille de noble Joseph d'Aymar, bal'on de Chflteaurenard . »
Dans la donation du 20 décembre ,1754 de Joseph d'Aymar à Joseph- Etienn e de T homassin , marquis de Saint-Pau l, le premier ne se
don ne que les noms et qualit és parfaitement distinctes de: « Messire
« Joseph d'Ay mar-d'Alb)', baron de ce lieu, de Chùteaul'enard, de
« Rognonas. » Le même acte, quand il parle de Pierre d'Aymar, fl'ère
du donat eur, ne lui donne que le nom de Pierre d'Aymar, chevalier de
Saint-Louis, capitaine des vaissc(lttX du j·oi. Pas d'autre nom par CO Ilséq u<,nt que le seul nom patronymique d'Aymar.
Enfin, Joseph meurt le 31 décembre 1760, et son acte de décès
l'appelle: « No ble Joseph cI'Aymar-d'Alby, cheva lier, seigneur, baron
« de ce lieu de Chflteaurenard.
Dans le testament de son épouse, Marie-Françoise de Tondut )' ,
du 8 février 1656, celle-ci avait donné à son époux les qualifications
suivantes: « Messire Joseph r1'Aymar-d'Alby, cheval ier, haron de
Châteaurenard. »
Ainsi, après al'oir parcouru ce long espace de temps de 1630 an
31 décembre '1760, jour du décès de Joseph d'Aymar, il n'y a jamais
eu d'incorporation du nom patronymique d'Aymar avec le titre ct le
nom seigneurial ue Chât eaurenard. Ils ont toujours été distincts.
-
!St)-
Nous Allons voir qu'il en est de mème sur la tète de Jvseph-Etienlle
de Thoma8sin, marquis de Sn int-Paul , possesseur de la terre de Châteaurenarù et ùc la baronnie de ce nom, par l'acte de donation du
20 décembrr 1754. L'Ii aussi, il Ile prend que le titre seigneurial de
baron de Chàteaurenal'll.
Dalls son contrat de manage, du 5'1 décembre 1756, avec LouiseJoséphine de Marbœur, Joseph-Etienne de Thomassin est appelé vitomte de Reillanne, marquis ue Snint-Paul, baron de Clt lÎ le(!urcll(lrd.
Joseph-Auguste dc Thomas8in, son fil s, mort en 184!:l, n'a toujours
porté, comme son père, le titl'e de Baron de Châteaurenard, que
distinct et séparé de son nom patronymique de Thomassin.
Il en est de même du marquis de Valori , actuellement vivant et possesseur de la baronnie de Châteaurenard.
Le résultat est donc évident: Le nom patronymique a été celui de
d'A ymf)j', le nom et titre seigneurial a toujours été bm'on de Chûle(!l1rell(!rd.
En ou tre, il n'y a jamais eu d'incorporation du nom de la seigneurie
ou de la baronnie au nom patronymique, et la transformation du nom
d'Aymar en un nom composé, commme serait , par exemple, celui de
d'Aymar-Clulle(!1(1'en(!rd ou Châtc(!u"cl1(!rd-d'Aymar, ou !e mot tout
seul ChûleaUrell(!rd, ne s'est jamais fait e et n'a jamais même été tent ée,
ni par Fran~o i s d'Aymar, en '1630, ni par ses 8ucce:;seurs jUS(IU'à ros
lou rs.
. Cette Lase manquerait don t: aux d'Aymar-Mollt sall ier pour poU\-o:r
revendiquer le droit de s'appeler Châteaurenard , IHlis(IU'il est établi par
toutes les autorités, plus haut rapportées, que le nom patronymique seul
est comm un aux membres de tout e la famill e, et qu'au contr,lirc, par
rapport au titre et nom seigneurial , il est également aumis sans cont estation qu'il n'appart.ient et ne peut appartclù qu'au po~sesseur de l'ar.,'ien lief ou du moins qu'à celui qui l'a possédé,
�-
56 -
Or, dans la longuc sér ie ries acles qui yi Cnnenl d'èlrc parcourus, pas
un se ul inslanlla lerre de Chùl eau rena rd n'a élé p o~sé d ée par la uran chr
cadell e des d'Aymar, donl le chef a élé J OSEPH, d ~ lI~i (\me fil s de fl'3nçois d'Aymar, acqllérel1r de la baronnie dc Châleaurenard , en -1(;:;0.
En effel, du vivan l dc son pérc, Frr!l1 ("0 is-Joseph , ~o n dcuxil\ mc fils,
n'a jamais eu la posses -ion dc la baronni e, E lle élail e\l'Iusivcmen t SUI'
la lêle de son pèl'e, Les fil s peUl!ent bien héritcr de leurs pl\rcs, aprps la
mûri de ceux-ci, ma is a, ant cell e morl , les fils ne possi'de nl pa., encore,
ct leur espé rance, comme leur c'(pec lati ve, esttoul e dans Ir futur. Elles
peUl'enl donc s'éyanouir.
E t méme, il faut le (lire, cel le "érilé élait cncore moins con lestable
,ous l'ancienne législalioll , où le père pouvait ne faire 4u' un hérilier el
Ir choisir enlre scs enfants et rérlllire Ics autres il la légitime, cO lllme il
est adye nu précisémenl entre les trois enfanls de Franço is d'Aymar,
dc '16;;0. Jo se)) Il ne fut pas institué héritier par son père; FnmçoisFélix non plus. Ce fut J ean-l<' ran ço is, l'ainé, qui fut institué héritier,
notamm ent et J'un c manière ex presse , de la hal'Onnie dc Châl eaurenard , comme on l'a ,'u ci-dessus,
Dès-lors, il est très \Tai de dire qu e jamais Joseph n'a en la possession
du fi ef de Chàteaurenal'd, puisque du vivant de son père la possession et
la propriélé élaient il ce lui-ci, et qu e, dès l'inslant de la morl , r ll cs
ont passé à J can-Fran <:o i ~; le mort a saisi (!ireclementle vif.
Or Jean-Françoi.~ est nolrc auteur. Il rcprésen le la bran che ainée de
(l'Aymal', el Joseph l'e préscnl e la bl'anchc cadell e.
Donc, en derni er résultai , ni Joseph , ni scs dcscendanl , qui n'o nt
jamais possédé le fi ef, n'ont pu léga lement en prendre et en porter Ic
nom.
- Nous n1avons pas tout dit enco re. Le teslament de l<' ran ~ o i s d'Aymar,
"tIu ,le, j:mviel'16ii 'l, a pris soin rle donner il .Joseph sa part el sa porti on
dans SO li hérilage . Celle qu'il lui a donn ée, c'est la terre de Sa illle-
-
07 -
CI/lherùlC el ta moilié de tll plllce de Monlsallier , ainsi qu e le porl e lé
leslament préeité,
Voilù don c Joseph inresli de SO li vrai tilrp. Le voilù dans la vraie
possession de son fi ef il lui. Voil!l le seul li lre (IU'i l ail cu Ic drnit dc
porler, ct c'cst là que ses descendanl S doiv enl êlre ram enés.
Aussi l'uutcllr d<'jà cité, Robert de Brian çon , dans l'Élal de /a Prove1lcc, p.258, parle-t-il de Jose ph de ln mani&re sui van le: « .tuM'lll!
« d'Aymar, dil-il , seigneur de A1onlsallier, second fils de han(;ois et
« d'Ann e d'Alby, épo usa la fill e du seigncur de Quinso n, dn nom de
« Villardi , de la "ille d'A, ignon, de laqucll e il a des enfanls. »
Seiynettr de .lIonlsal/ier / Qu'on remarque bi en la chose, et Joseph
d'.'l,1f lllw '/ tout silllpl ement, pt sa ns aulre nom palron ymique. Ces 1)('('11ves, jointes à Ioul es Ics aulre~, ne so nt-ell es pas décisives?
Ce serail sans utilil é pOU!' elle, (lue la famille d'Aymar-Montsallier
exciperait de l'arrêt de la Cour de cassalion , du1 5 décembrc 1845, clans
l'affairc de fi'a IlClltll s (Sircy, 1846, ,1-81 ) , déjà cilé par nous, il l'ocrasion du prin cipe dc droil qu ' il a posé . Cet arrêt rcnferm e, au ronlr"il'c,
leur pr0Jlre co ndamnation . La Cour y a jugé qu 'il raul , pour a" oir le
droit de prendrc le nom de la lerre, l'ar oil' possédée soi l ù lilre de 1'1'0 priélairc, soit ù lili'e d'e llgagiste.
L'arrê tisle le fail d'a bord remarquer uans la ru brique de l'arrêl. Ellc
porte: « Celui donl la famill e a an ciennemenl ajoll lé Ù so n nom, co mille
« surnom ou qualificali on nobiliaire, le nom u'unr lerre dOl1t rlle (! fil
« /a pusses8ion so il à. litre de propriélaire, Soil li lilre (['el1ga9 ;,,'e, a le
« (1r'011. de co nsel'rer cc surn om, bien qu'il ail cessi de Ilosséder celle
« terre, et qu e, plus ancienn cmenl , ellc eùt déjù dOlln é son num il uoe
« /Iutre famill e,
Cela ressort encore du fail , puisllU'il ~ esl dil : " Longlclllps a'anl.
« '1668, la terre de Falletans avait été divisée en lr ~ la famill e tl e Fal« letans et la failli Ile Gal'llier, donl les membres araienl ~jnllté il leur
J)
�- 58« no m patronylilillue la qllalificali on nohilia ire dl' Falll'ians 0 11 rh' sl' i« <'"nenr dc Fall elans. »
Enfin. l'l'la l'Si prouv é pal' l'anét ll1 i-m0mc, qlli dil:
" Ali endu qll'i l est étal,li, pal' un e snilc d'<H'lcs l'cilionlani jllsqU('S en
" Hi4tl, lluCla ljualifi(,;ltion j.lUl'cmenl nobil ia irc dc Fn ll ,' lans on dc s~i
" ~neul' dc l'a ll elans, ajouléc par le sieur' Garn ie r il Icur IHlIll de la« ~!li ll c, li étl' porll' pal' rux , nOIl-se ul eme nt dcpuis ;)I1H7, li l'aisoll de
(, l'cI/ Cj Il!i ellleJ/ 1 cOl/senli ri l'un de leul's altleltl''' cie fa haul (', liIo~enll e
" 1'1 uasse juslir'(' de la seiUII(' uric des Frrllelltl18, muis même ante l' Ieurl'lIlenl il te ll c époqu e, li ca l/ se de la Jlosse,~sio /l qu'(//'ail la {'a//liff e des
hiells ('oisant lJarlÎe de lodile seilllleu.rie. ))
Nous répl\ lerons ici, au suj et dc l' ul'I'èt de la COllr dc Nil1le:i, du 7
jllill et ·182H (Sircy, '1850, 2-1t ) , les m ~ m es obSCl'I'alions. Cet arrêt,
commc le précéden l, n'a admis le ti ers il prendrc Ic nom du fief que
palTe qu 'il cn était devenu l'acqu érellr. La lec tllre selil c de l'arrêt le
démon ll'C.
Mais, co mme cette circonstan cc ne peut êlre misc en avant pal' les
d'Aymar-Mon lsallicr, ils sont sans droit à pl'cndre Ic nom d'un fi cf qu' ils
n'ont jamuis posséUé pendant un seul inslant de raison.
Celle premièrc exception, prise du nom patronymique, épuiséc, passo ns il la sccond r, t:ellc llui se rait basée SUI' la prescripti on.
~o
lI.
1..:\ p,·c~c,·il.tiOIl Ile .,ellt p:lS :u'oÎl" f ai t acqllé.·ho :uu: d \ \y'I':""
ltlollhmllic.", le 1l01l1 de tll .....·~ ."lllll·: l\' .\llIt.
Il Yaura, sll r t:C POilll , il cx pose r d'ab ord les pr'incip cs Cil malièrc dl'
lwe~rr iplion dc nom, ct ensuilc les ra ils dont la famill c d'Aymar-Monl_-all ier :ie propose d ' c ~ c ip e l' ,
-
!j\J -
Et d'ahonl , cn pl'inci pc, unc prerni(\rc cxce ption l? pOIiSSera Irs oemandeul's. Un n011l , ou un chan gement de nom , on un e addilion de nom.
ne pcut pas s'acqu éril' par la prescription.
Les nOllls sont. choscs hor.' d" comm cr('c. inaliénahles, el, par sui le,
impresc ript ihles.
Autrefo is, il n'y al'ait qu e dcU\ manières légales d'acqu érir un nom,
de le changer ou dc le m·J(lifi el'. C'était , (l'un c part, l'autorisati on du
prince; c'étail , d'aulre pari , la l'ègle dll droit féodal, ado ptéc par l'nsage et universe llemcnl pratiqu ée, llui aut orisai l Ic posscs-eur rl'un fi ef
d'en prend l'l' li) nom.
En dehors de cc_ deu:I\ modes, il n'y avail ri en ri e léga l, ricn n(' po ul'ait êlre acq uis par rapp ort au nom.
Que les ordonnanccs dc 'IJ,)5 el '1629 aient ou non forcc dc loi, le
principe qui ex igea it l'aul ol'isa ti on du prince, ù défaut de la possession du
ficf, était univ ersell ement admis, même avant ces oru onnan ces. L'orateur
du go uvern ement, M. Mio t, en présentanl la loi du 11 gC l'm inal an XI,
disait: « On tenail , cn principe, que le roi seul pouvait pCl'me llr'e le
« change ment ou l'addition d'un nom. "
La règle, née du droi t féodal, formant l'uni(lue exccplion il cc principe, a été suffisamillen t autorisée par nOliS, pour qu c l'on soit dispensé
d'y rcyenir ; cl cel.lc excepl ion élait la seul e.
lmpos~ ibl e done dc faire l'en lrer la pr e~!'I'i pli o ii parmi 11'5 Ill() ven, dl'
~c conslilner un nom.
Le prineipe auj ourd'h ui éc ril dans l'arlicle 222G du Codc Napoléon,
d'a pri's l e qll c l le~ choses qui ne s0l1 11JIlS dal1~ le COIIIJlIl' l'Cf so nl imprescriplibles, Cl d'après leqll el aussi, I1n nom ne peul pas être prestl'it,
ex ista it, élait éc ril dans loul rs les lois cl dans tOIiS I('s aulrul's.
Aus5i Merlin, Rrl,el'loÏ!'c, \,0 Pl'escl'i",io7l , scc li on III , ., l'l , le puset-il en ces Icrm es: t< A l'articl e nohlesse, §§ 6 cl 7, nons al'ons pa rI(·
t< uc la prcsc ripl ion, sui yanl le rapport qll'e ll (' a al'(,(, ccIII' mat it· rl'.
�-
60 -
« Les
IlIème" princillL'S doil'en l régler re lie ùes nOllls el des arlllcs.
« Il esl conslanl, en l'fI'cl, qu e ('è S objels 50111 hors dn ('o mnICI'('e; in"c~ ss ibl cs sans l'aul orilé dll prinl'e, ils ne 1)('wWlll l)((S (;Ire prescrils,
« pa rcr qll 'on ne l'enl presc rirc que cc qui peul élrc acqu is.
L'anc ien Drnizarl , \ ' 0 Nom, di sail aussi : « Le '//011/, Ics arilles r i le
« l'a ng des famil les ne II/m lll.' nt poi nl dans le ('omn1!'l'cr Cl ils "onl ina« lir nabl cs. ))
l\J. Tn)plong , ries Pre.w,/,i1Jliolls , 1. '1, n" 248, cnseignl' la lIlênH'
(iol'lrinc.
,. Ttllilefols , dil-il , parmi Ics (' hoses co rp orelles el incorporelles, il
(, {'.n l'si qu elqu es-Ilnes qlli , pal' ex('eplion , ne 50111 pas sllsecplibl es de
" pos:,c,;sion, anilllo domilli . Telles so nt , pal' e'\emple, cell es qlli ne
" sùnl pus dans le domaine public. Ainsi, quoiqu'on ait porté pcndant
« un lemps indéfini un num aulre qu e celni qu'on a dans so n ac le de nais« sancc , la possession en est inulil e, parte que les lois défend ent dc
{( ('hanger de nom sans l'an lorisation du go uv ern ement ; - arrêt de la
cc Cour de cassai ion, du 29 juin 1825. (Da lloz, 25, 1-551) . ))
Comme ann olation au bas d'nn arrêt de la Cou r Je cassation , du 16
mars 1841 , M. de Vi lleneuve a placé les observati ons suiva nl es, (lui
so nt en parfai lc harmonie al'ec ce qu e disen t I(>s aul eurs cités : « Bien
" qu'il soi l ('el'tain, dil-il , qu e la propriélé des noms ne s'élahlisse, en
cc généra l , qu e pal' un e longue possession et se co nso lid e cie plus cn pills
cc pal' les aeles d ~ l'élal cil'il , cepe ndant il ne nous p'lI·ail. pas qu'on ell
" doi\'e lIécessairelllllnt cOllclur'c que les règles orJ in aircs de la IH'esn ip" lion puissenl être appl iquées dans cell e lIlati(\re, du moins lor, qu' il sa" git d'acquér ir le nom d'au lrui : La possession du nom d' un liers, qllel{( que prulongée qll'on la supp ose) ne nous semble pas devoir en (,o u\Tir
cc l' usul·palion. (Sirey '18,1.1 , '1-552, 1101. 1. ) ))
Remarquons mainl enanl, pour en finir SUl' celle mat ière de l'imprescriplibilil(' de, nonB , qll e les arrêts, déja plusieufo fois par nous cités,
-
61-
de Nîmes, affaire Cf/ bOl-Laran' , de Cas,ation, affaire F((lIclons, ct de
Paris, afru ire CI,1'1110111- 1'ounel'rc, viennent lous co nfirmer nos prinripcs. Dans eharun dl' ('c~ 3\'1'èls" i l'on a pris' en co nsid éralion la posscs.si01l du nom , (·'est 'I"e ('elle posscssion al'ait so n poinl initial , so n poitll
cie déparl dans la posscssion primitivc du fi ef, qui avail créé le droit de
porler le nom. Dl' fa ~o n que ('es al'l'êls n'ont pas jngé,cn pl'inripe , qu' un
nom élniI1Jrpscr ip'ilile, maÎi; scul ement qu e le tlroil de le portel', de la
part de ('cux qui fi guraienl dans l'CS arrêls , prownait de l'acqu i<;ilion du
fi ef, el que la possession cI~ ('e fief avait aillorisé la PliS ession du nom
qui lui avail élé emprunlé.
On sent la (hfTérence énorlllc qu'il y a enlre les deux (':1 , cl il n'esl
pas né('essai re J' illsislcr plus longlemps pour la mclll'e cn sai ll ie.
La si mpl e lecture de l'arrél cl c Ni mes,du 7 juillet '182H (Sirey, ·18502-4 ), le démonlrc. Il en est J e même pour celui de cassation, du 15 lIéccmbrc 1845 (Sirey, 1846-'1-81 ), et il faut l'affirmcr encore pour celui
J e Paris, du 5 clécembre 1857, (Borel-d'Haulerive , p. ;)8:5) , puisque
cel arrêt est fond é d'une part sur l'idée qu e Charies-llenri avait commencé à posséder le comté de Tonnerre, en '1605; il en prendre le
nom seigneurial; que, durant cell e possession dans la perso nne de deux
des fil s du premier possesseur, dans la génération suil'ante etjusqn'en
'1681t , la Iransformali on Cl l'incorporai ion dn nom seignenria l au nom
palronym iqu e com posé s'étail opp r~e; et que, d'aulrr pari , cc nom paIronylllique composé al'ait pu profil er ù tous les memures ùe la famille ,
qu els qu' il;, fussenl. C'esi louj ours, on le l'oit, la pussession du fief qui en
est le point tle dépa rl , joint au principe du nom palronymique incorporé
an nom seigneurial , mais jamais l'acquisilion , pal' /J/'csrriplioll ou soit
pal' possession pure ct simpl e.
On objecterait l'a inemenl , co nlre l'es doclrines, l'opinion du Rr]lertaire tlej/lris)JI'Ullcl1cc, V O Prcscriplio1l, SllCI. 3, l'l., où al)l'ès al'oir
dil , comme on l'a \ u plus haut, qu e la preSl'l'iplion d'un nom n'est pas
�•
-
62 -
possible, l'aul eur aj oule ; « 'lais allire chose e, 1d' //w/']lCl', pal' la prcs« criplion , le nom Cl les armes d'un e perso nne; anlrp l' hosp est de les
"p()sst'dcr, so il depuis le même lemps qu't'lIr , soit, au moins, dcpui,
" un Icmpsim1llhnol'ial, 1l Celle dislin clion, cllire l'u''ltr]la/ion ella )JOSscssion d'un nOIl1 , l1Ionlrc hien él'iclemmenl la pl'nsée dr l'alllrlll', Il nr.
peul enl endre, pal' l'usurpa /ion, qu e l'appr(\hrnsion d'un lIom apparlenan t à un liers, el l'appl'éhrnsion qui ne repose S UI' auclln litrl' valab le,
cl pal' la lJosses~ioll qUl' t'c lic q,l i r epo~e SUI' un po in/ de' dr;1J1lr/ {,:gal,
Aulremenl , si l'aul eur al'a il enl enclu dire qu e la pussession, qu 'e lli'
quelle (ti/ , serail légitime Cl ulile, il aurail aussi co nsacré t'ell e de l'u~ur]la /ion, pOU/'l'U qu 'elle eùt la rlh-olution ùe IClllpS nécessaire, El pal'
lù, le Ri per/oirc se serai l mis en contradiclion manifcsle al' ec lui-même,
II faul dont' enl enu re ('cite dOl'irine , COlllllle les Co urs de Nimes, de
cassa ti'lIl ct de Paris l'onl entendue, ct n'admeurc la possession comme
un élémcn l de preuve et de litre qu e lorsqu'rll r a un poinl initial légitime qui la distingue de l'usurpation_
Nous ajoutons, maintcnant , comme le ccond principe de cettc maliêre, que s'il n'y ava it pas im]Jrcscl'i1J/ibililé en mati ùl'c de nom, la scul c
prescriplion dont il pitt êlre qnestion d'après les jurisconsull es el dont on
pùt sc préYa loil', serait la possession ou prescriplion illl'll! r> /IIol'ialc, c'eslil-dire, cclle où il n'apparai /mi/1)(rs du con/l'a ire,
Le R()Jcl' /oil'c de jlll'i"7J/'1ldfnCe le d é m on ll'~ en cl r u\ r ndroil S ri ifTérl'n ls : au mol Prcscrip/ion (dc nom;, secl. § (i, pag, 81)2, r i au mol
Iloblesse, § 7, pag_ ><142,
Au prem ier passage il dit : « aulre l' hose esl d'lI ' l1I'P CI' pal' la prcslTip« lion le nom el Ics armes d'un e personne , aulre chose est lie les possé« dc r, su it dcpuis le même lemps qn 'clle, SOil , au moins, dcpuis Lln lemps
« im1ltémuI'ial, »
Et alant , il avait dit: « il l'article llo/liesse, §: 1) el 7, nous avons.
" parlé de la presn iplion suivanlle rapporl qu'clic a al el' celle matière,
- 63« Les même, Jlrio cipps d[)i, ent régler ('die des noms el dcs arm e;;, »
B.CCOUI'OIl5 donc il l'al'lic1e 11I; bll"ç,~c, IIldiqué pal' Ic RI:)JCJ'/oire_ C'est là
que les pl'in l' ipcs tOllehant la presc riplion immémoriale 50nl posés ar
Loysc3u , Traitl: ries ()nln's, ('hap, 5, el adopl és pa l' le n r:prr/fJire comme
« CC que /'011 /'rouve Ile plus raisolln able clalls les éCl' i/,~ des ,inrisf'OllslIl/ e~ Ilui on //I'u':,,; cellc f)w/ù;re,» Or, ,-oici la conclusion il laquc llc arriv e Loysea u après un e longuc di sl' ussion :
r
J e suis biell u 'a ~co l'd , dil-il, qu e la nuLles"e, 0 11 pour micux dire
" l'illgénui lé, sc fa il l)I'ésulllcr aSSUrélll~1ll par le JlI oyen de la possession
" imm émoriale , QU,Ii JUR IS LOCU UA BETlJR, COJlllll e, cn cas sc mblable, dit
" la loi 'l, ' _ Duc/us {(lluœ, Dig_dr ligua quo /itliana 1'[ œs/iva; mais IL
" FA UT l'REN OItE C ARD E, 'Ille c'csr quand la possession es/ iillllu:moriall',
« c'es /-il-dire IIUallI1 il n'Il (1 -'lIi,'IOIRE, NI PI\IiUI"E, NI PAR CONS I~QUEè>lT
«
«
C ERTITUDE DU CON TI\AII\E, "
Celle cil'conslance qu'il n'apparaisse pets dl/. con/l'aire, pour cousti1uer la possessio n immémoriale, cst encol'e indiquée par tous les auteurs,
tels qu e COV_IRR UIlAS ct MYNSINGER, qui s'cn so n ~ occupés et qui sont
rés um és par Julicn, S/atu/s rlc Provence, l. 2, pag, 545, Ce demier
auteur, en les cilanl , dil: " COl'a l'l'uI' ias,sur le chap, Possessol' de l'c!}ulis
" .iuris, in-Go, § .I, no 7, ohscl'\-e qu e la posses5ion im mémoria le se proul-e
« pal' dcs léllloi ns qu i r1 éposenl l'ar oir' touj uurs ni Cl n'(wo il' jamais vu
« le l'oll/rail'r, cl l'avoir aussi ouï dire il dc plus ,lIlcicns Cl n',woù' pas
« en/el/dl! le l'oll/mire .. _Et Mynsingcr, Jalls ses Observa/iolls, l'enL '1,
" Ob,,!'r/) , 50, rap pol'I e qu esll il anl la ('omlllllllC l'esolutioll dcs dol' teul's,
" pour prollver la possc_<sion illllll élll oriale, il l'Si rcquis : ,10 que les lé.« moins soienl àgés de"" ; 20 fJlI 'ils disent lJue (''l'SI la co mmun e upinion
" el qu'il n'y CI poÏ/1I rie J/I/:Jll.oire cou/raire; 3"
; 40 que
" jamais il Il ',f} CI riel/ eu de cou/raire, "
Dlln od, Trai/ I: tl e~ rresCJ' ip/ifil' ,~, pag, 2 11 Cl 2-15, élablit les lIlêmes
JlI' IIl('lpeS ,
�-
6.!l -
- ' 65 -
Ce second prinripp e,t ~ussi rertain qu e le preillier,
Enfin , il en est un troi, ii' lIle 'lu'il fant enco re poser il côté des deux
premiers, c'est qll e si la prescription était adillise en cett e lIlatit\re, elle
dCITait réun ir les ca rarl l' reS de tout e presc ription , c'est-à-dire, qu'elle
dClTait rtrè fllnd éc sur une possession CONTIN UE c l. non EQU I VOQUE,
Cela n'a pas IJesoin de dénHlnstr,ltion,1I faut ou rejeter la prcsC ritlti on,
ou l'adm ellre ayec les ca ra tiè re, qu c lui assignent lcs lois,
Cela posé, l oyo n, le" actes eLles Litrcs ve rsés 3 11 procès par les demandeurs, et r~c h e rc h ons S'ilS pourrllnt éc happcr ;) l'a pplication ne nos
trJis principes.
Les titrese t arles yersés a1l Iwocès par eux so nt norn bl'pux. Ils so nl au
nomh re de trcnte-cinq. Pour les rés um er arec clarté et pour en fix er la
yalcur, il faut les di visCl' en quatre caté.gori es différent es :
•
.10 Prelllière catégo ri e. - Les titres et acLrs rclaLifs il Josep h rl'Aym,w',
seigneur de Monti'allicr, l'au Leur direct de nos adversaircs, celui dc
qui ils descendcnt. Ils e mbr~ssent une peri ode de Hi50 à '1723;
20 Deux ième ca tégo ri e. - Les tiu'es eLactes l'elatifs à Henry, fil s du
précédent, qui vont de '1725 il '1787, et dans lesqu els surgit , pour la
première fois le nom dc Châ/eallrenard ;
5" Troisièm e ca tégol'ie. - Les titre,; 0t actes de ·1787 ù nos jOli l'S, Oll
surgit un nouveau nom, celui d'A lby Cllli/erfU,rcnlll'd ;
4° Quatl'ii'1Jlr. eLdcrni(\re cat égo ri e. diqu e pouvoir ,'appliquer au li tige.
Le; titl'es ct ac tes flu e ri en n'in-
11 faut maint enant suilTe chacune de ces catégories, ct vo ir ce qui en
resulLc pour la justifi cation des prét entions des "llvI'rsa ires, ct pour le
drJil qu ' ils en alLend enl.
1'''F.MI~:tn: C,\T Er;[H\lE.
D~ns cell e pél'iode, qui comlllcnrc il -I(i,:;O ctll"i se tel'm ine il 1723, la
branchc de MOn lS:1l1lcr nc prelld jallif/is le nom de Chiitea urenanl .
. Aurun ac te nc le Illi don ne. C'e.;t un fait très l'C m31'1IU3blc ettl'('S' déCISif. On le ,'CITa LOllt il l'hl'"rc, (I":lntl nOlis rapproc heruns des fait s constat é~ les prillcipe, du tlroi t 1I111 ' UOliS a " on~ déjà pllsé",.
Cc, art es sc ~l éco ll1rO"eIl L l'II dem espèce". Les uns so nt fait ,; 1)01' lui,
les autres so nt faits IlO!!!' IUt et il .'0 11 {j('ca,.iun. Mais tant les uns qu e les
3utl'es s'absti cnn ent de lui donn er le nOIll de Chû/ealtrenurd .
I I est é,-idenL qu c durant Lou tc œth' péri odc, la bl'àoche ùe ~Io nt salliel'
respec te lc tilre de baroll de Châteaurena rd, et la possession de 1:1 b~
ronnie de cc nom pal' Fra/1('ois d'.\ymar, puis pal' ses ~lIccess c urs.
8 n voici la preuv e rlé ta illée :
L'ac tc du ·1'1 février 'l6::i 'l, qui con ti en t ccs,iun dc l'office dc conseiller li laCour des com pt es Cil fal'cur deJoseph ù'Aymar, pas,é en tl'e Anne
de Forbin CL Ann e d'A illy, n'appelle pas autrement celui-ci que de cc
nom simple : Jo.~ep h li' A.'Jmar, srigllfur de .Iton/sallier,
L'ac te di! .t:; oc tohl'C '165 '1, qui con tien t des lellres pat en tes pal' les(IUell cs l'llffi re''' la Cour dcs cu mple,;, résigné pal' Joseph d'Aymar, est
accordé il Jél'O l1lc-Hri!llo de Pau le, ne le désigne enCO l'e (lue SO llS ~e
nom cie .Joseph d'AYII/ar , "eiglleuJ' rie .IloH/sallie)' 1'/ de Sain/e- Ca /hel'm e,
Les Icll res dl' réll115sion puur un dUI'I , du ·15 oc tobre 1659, ne
Slln t accol'Clée,; cnr'IlI'!, qu'''' .Il)srp" d'.4.ljll/or, baron de .Ilon /~allie,..
�-
66 -
L e cùnll'~t de managc dc Joscph rI'Aymar, dll 7 'idulll'c Hi!i!), n,'
lui dùlln e pas d'alltre n01l1 et d'anlre qllalité que ('('lIr de .'ci!JlleurJe
llfoll /s(!/ /,:cr. E LpOlll'lanl , l' hll';c remarquable! il s,' dit fi \,; Je Messll'!!
François d' Aylllal', se i[/ Ileur c/ bar()// de Chli/euurclford. C<, It" (lPI~US~
tion l'si Ilit'n nl"r(l'l éc. Poul'quoi le /ils ne pn'no-i1 pas le lltrc dl' Chateallrenard (l'l'il donn e il Sl»l père:1 C'C:;tllll'il n'an il pa:, hél'ilé d<, la bal'lllinie.
L'm'l'pl .Ill U juin Hm8, qui déeharge .l e,; dl'Oih de rl'alldid Joseph
J' Aymar, WIJI/~ de .lIOIl/Mt/lier 1'/ de Sllilf /I' - Co/hcr;/I(', e"l au""i mu el
SUI' le nom de Chùleaul'en3rd.
Il faul l'l' marqucr en otilre qu c l'C" ades nl' "l' co ntenl enl pas de ne
pas donn cr 1(' nom dc Chùl eaurellard à Joseph d' Aymar, mais qu' ils I.'at~
tribuent el le donnenl lrès cX [lrc5sé menL il l'autrc branch e, uu SO it il
Frao t: ois d'Aymar, acquércur de la haronnie dc Chùlealll'cnanl, en
11);)0, eLÙ ses successeu rs.
Cellc circonstance l'Si prouvéc pa r quelqu es,unes des pil'ccs déjit cilées,
lIulamll1enl par celle rlu 7 octobrc '1659, conlrat de m3r'iage rie Joseph
d'Aymar; celle dn ·1'1 rérri er '165,1, cession d'office en favcur dc celuici; celle du 9 Juin '16H8, arrêt qui reco nnaiL la noblcsse de Joseph
cl ' Aymar.
1~ lI e pcul l'êtrc encurc pal' diverses aulres pièces qui sont versées au
llrucès pal' les demandeurs, lellcs qu e le L:)slanl entd e FnU/rois d'Aymar,
1
du 'le' juin Hl;)'I, l'ade (lu 5 juin '1668, porlant vcn lc pa!' l'' rall,:oise de
CI'olee, YCuvc de Jean-François d'Aytll31'-d'Alby, ilaro1f dc Châ/cau"ell(l/'(1 , dc l'oflîcc ue co nseill er du Pnrlement d'Aix, occupé par JcauFI'lt1!çois.
Enfin, lous œ s acle:; produil s par le::; dcmandeurs ("ollcordent avec
plu::icurs aulres qu e [lruduisellt les défendeurs, el donl il esl IClllpS de
l'a rler il cc point ùe \ lie particuli er,
Les l'uici;
-
6i -
Le 270elo"rc 1(H4 , la d~lne Anne ll'Alby, l'pousc dc FrI!11(·uis
d' Aymar, fai l '0 11 lestam en l, comme on a déjit vu, et clic dirféren·cie ses
troi, cnfanl s, el, surloul , cli c LIonne it Joscph lInc qualificalion ct un nom
ell oppOSilioli dirct le f1\W cclui allC)u el ses descen dant s pr'étendent aujourd' hui . E. ll e 1 ' 3ppl""~, en lui fa isant un legs, Jo ~e7)h (l'Aymar, sieu/'
de .i rolf/sol/ir/' Cl rlr SlIin/e-(;a/ llf'rinc , mou second fi/.~. 11 n'y a lit rien
qui ressemble il la pr61ellii on aClucllc , rt qui l'auLorisc; cL pourlaOI,
c'est la m('rc qui pal'lr r i qui ('onnait les l"I'ais noms de scs cnf~nl s 1 C'est
ellc qui , parlan l tIl' so n fil s ainé J ean-Frall c;ois, l'appclle .lelf'l-FrIlIl Çois
d'Aymar, baroll rladil Chri/I!lIl!rcn(lnl, et sa it fort bien lui allribuer sa
qualité . Pourquo I aUI'all-eli c agi alliremeni vis-il-vis dc Joseph , si ChAIC3urenard arail él(' so n nom , ou si les memill'es dl' la ram ille ti c FrIlllro is l'avaient ('omlnunémcnl porlé 1
Aut rc preuvc. C'est le lcstament dc Sil/li d'Aymar qui la fournira.
Ce Silvi est le quatrième fil s dc Gu illaume Aymar, n(\ 1 5 révrier 1572.
le rrère dl' François, dcvenu , par so n acqui sition dc 1();)0, propr iélaire
tle la baronni e tle Ch:ileaurenard , l'unclc, par co nséq up-nl , des lr'ois f1Is
de François.
Cc teslamenl, du10 avril '16;)9, ne uonn e il Joseph aucun c des qualificati ons el des noms prétendus, il porl e; (( J' inslillic r i nomm e mon
(( hériti ère universelle, la uem uisell e Blanche d'Aymar, ma fillc, el
(( venanl, ma fille , il décéder sans cnranls l é~i lim ese l nallirels, audil ('as,
(( je lui su bstilliC mes Iroi;; neIC!lX, qui son l : MM. Jran-Fran :;u:s
(( d'Aymar, consciller tllI roi el baron de Chùleaurenard , Cl Jo~ep" et
(( FI:lix cl' AYII/((1' , fil s d~ feu mon rri' l'c, Ic pr6sidl'nl Fran Îo is .... . ))
A insi encore, poinl lie nom de Chùleallrenal'll alll'ibllé par l'unclc au
ncveu. C'CSLle langage dc la ramill e mêm c. II nous rérèle la réril é sm'
ccll.e origine. C'rs l lin ,·ieux tém oin qui sc lève ici, de co nc crt avec la
l1Ii'rr, pour réduire les demandcurs ail si lenl'c.
�U ~sc{'nd on5
li8 -
mainl enanl aux !(,'néralion,; suil'anle i,
II11U 5
re1 r .llI\"l'rO!lS
les mêmes preuves.
Si, en cfl'el, les memures de la bl'anch e cadt'il e des d' Aymar, (,'l'si-ildire des descendanl s de J08 C7J!1 ll'Avmar , ava ie nt p Ir lé le nom dl' Cltfllea urenard , ù plus l'orl e ra iso n l'e nom aura il-il él(' porl(' pal' les IlIelllbres de la hran che ain ée, Cl lem anrail-il (' lé donn l' 1
TI n't' n esl ri l'II cepenllanl . Qnand J ean-Fran t;llis (l'Av rnal' li';.;ue, dans
son lL's lam elll du 1:1 décembre 1662, il ses flnalre fill es, il les ap pelle
si mplellleni : l'Ianll n, "Fral1l;oise, Jeann elo!l (' l Ga iJl'ie ll e d'A ylilar . Il Su n
sceond fils, " Jo seph rl'rl.lJlIlar, Illon sc,'ond lils;" les aull'I'S, " Sall\ !' lII'
" d'Aymar cl Jean-Fran çois (l'A.ljIlHlI', mes au lr!'s fil s; Il l'11' hérili l' r
inslilu é, « fra nC; llis d'.-I.IJ/J/ol', mon fi],; ainé . Il
Conc;oil-on qu e si les lIlem bres lie la bran(' hc l'adell e eusscnt porl é le
nom de Châleau renard , ce ux de la branche ainée ne l'eussenl pas r eC; u :'
Même ohserva tion pOUl' le leslamenll ie fran l;ois d' Aymar, du ·18 noyembre 1684· il ne dési"ne encorc ses enfanls qll c pal' le nom de
'"
.
d'Aymar.
Même remarqll e enco rc pour le leslament de Th ér(\se-Gauri elle de
Maurel-Ponlevès, yc uv e de François d'Aymar, l'ail pal' ell e le 17 juin
{JO'
I_
,
Elle li'gue: " A nobles Pierre el André d' Aymar-d'Alb,', ses dcu'\
« enfanl s mâles, la so mme de cinq mille livres. --_. »
Ell c ajolli e d'Alby , clu nom d'Ann e ri ' Alb y, épollse de ]<' ran <:o i,;
d'Aymar, en 1630; pOllrquoi n'allrait-elle pas ajoulé dc Châ leaurenard , si (·'ava
it élé un nom donn é il tOliS les lIl embres dc la famille?
,
TOUl serail dil , en fail , sllr l'cli e prelll iè rcealégo ri e des acles produits,
s'il n'y avait un e Ll erni èrc rcmarque il placc r so us les yell'\ de la justice,
el qui dén Oie les lendallces malheureuses de la fam ille de J oseph d'A ymar dc Monlsalli er, Cl so n go ùt pOUl' l'usllrpation cl es noms el des
tilres.
•
69 -
A cell e époque, elle rcspcele le nOli! de C h:îlcaurcnarcl , elle le laisse
aux membres de la bralll:he ainée, mais elle s'en dédollimage, en varianl
ses ti lres, ]laI' rapporl au fi ef LI e Mon lsallicr.
Tanlôl elle l'appell e Joseph d'Aymar, simplemenl spignel/./· de Monlsallicr (ucle du '11 or;lohrè 1566, 11 fév ri er ,16:',1,7 uetourc 1(59) ;
Tantôl elle l'appelle uoroll de Monlsallicr (arledu '1;; Oeloure 1659\ ;
Tantôl ell e l'appell e co~rn: (arl e du 9 jllin 'i698);
Tanlôl elle qualifie MARQUIS de Munlsalliel' (arle du 22 al l'il '1725), le
fils de Joseph.
Voi là le gO ùl de l'usurpalion des litres bien prouvé; , oilà les lendall ces de nos ad ve rsairrs L1an ~ la personn e de leurs aule urs. Voila qui
perm ellrait de llire qu 'ils n'ont point dégénéré !'!
A la Vél'ilé, l'usurpation esl relali veme nt inn u~ente , elle ne nous atteint pas; mais je ne promels pas que l'honneur LIes auteurs de la race
des Mo ntsallier ne souffre pas de celle pelite ranité si inco nstante, el si
peu diffi cile dans le choi x de ses litres.
OEUXIÈME C.HÉGOII IE-
.l..C8 tUrcs ct actes rclntifs il UE.~R' de iU outsnllie.· , duns lesqllels
MllrgU po .... ln P.·CHliè.·c fois le DOln de (;'U.TE .t.IlRJo:'~"lU.
Ils embrassenl dll 1725 à 1787.
SUI' (es tilres, il y a d'abo rd il fail'e remal'l\uer IIU'ils sonlles premiers
où la famill e de Monlsallier fasse invasion SUI' le nom de Châteaurenard.
En second lieu, il n'y a dans ces acl es ct till'cS ni unité, ni harlilonie;
�-
70-
-
le nOIll de Chùt eaur,'lIar,1 y est llr is lantôt comm e nom patronYlI/ique,
lallt6t comme tilre honorifique,
L ··s act cs où le 110m l's i pris ct donn é comme nom ]lIt/ron!/lniquc so nt
('l'UX dcs 22 <ll'ril1 725 ct 21 mars 1750,
Ceu\ où il est Jlris Cll mllle titre hOll oriFIfUc , e'csl-ù-dire c.omme
('vlIll c dl' (;/i ,ile([ /(renard , sll nt ceux du 13 décembre 1741 ; l'acle de
déd' :; d' Henri d'Aymar, du 29 aoôt 1768 ; le teslament (l c dam e de
Verduzo n , du 8 aITi l 1750 ; le cOlltral (le mar iage de !\'largucl' il e
d'Ay mar, ct te lui du '15 juin -1754, le con trat de mariage de Mal'ie-Ann e
d' Ayma l',
I~ nfin , il Y a enco re il fa ire remarqller qu e le actes personllels Ù
Il enr)' d'Aymar, le fil s de J ose ph d'Aymar ri e Monlsal lie r, où le nom
de Chùt ea u['('nard es t pris co mme nom patronymique, so nt bien réduit s
ct peu nombreux , II n'yen a qu e deux, le premier, c'est. son conIrat de mariage du 22 ani l 1725; le second , c'est so n testament du
2-1 mai <1750,
T ifr.. s ... . :lC'CIiIIi d e .. '8i i. nos jours , où slIrglt .1" IIOllvcau
Le premier ps t le leslam rnt de la dam e d'Alhy de Bres, veul e Je
FI'an l:ois u'Aymar , l'acquérellr de la uar'onni c ue Châleaurcnard ,
en 1650, testam ellt sous la datc uu 27 octohre 'IG4/j , dans lequel elle
institu e so n fil s ,h:AN-FRAN t; OIS, "li la chal'!Je dl' 1Jo1'Ler 1Jar lui el jJllr
" celui de S('~ Cllf'aIl/S m!ilcs qll' il llOl1Im el'O, L" NO M ET LES AlUIES
« Il'ALBY, eu nfol'mémcn t il la volonté de mondil l'l'ère, ))
Le seconJ e t l'acte Ju >]5 déce mbre 1662, contenant Il' teslamenl de
JEA I!I-FRAN ï OIS, pal'Iequ el, conrol'lnémentau testam cnt et il la volon lé d,'
sa l11(\re, il institue François d'Ayl1lar, so n fil s, dans Ics biens, nom et
arilles d'A lb y, en crs terlll es : « E t je le nomme aussi hériti er en la
" sUl' cession des biens de ilérunt M, flono/'!: d', lIuy , vil allt sieur de
« Bri's et conseiller du roi en la co ur ti cs co mptes, aides et fin ances de
« l'elle province, mon oncle, sui,'ant le cho ix qui m'a été donn é par
" défunt e dame Anne tI'Alby, dame de Brès, ma. mère, qui était sœur
« ct hériti(\re testamentaire d'icelUI, ùans son testament solennel
« tlu 27 octoure '1644 .... , el je charge mondil fit~ el hériliCl' et lous
" cru,Y" qlli seronl appelés après ltti en ladile slIcccss'ion de Brès, DF:
«
TH OISIÈME CATI~GOHŒ,
nom ~
celui d'A.I.n'l'-Ch.:it c nn,·cllnrd.
Cc nuuy ca u n011l d'Alby est pris dans une assez longuc séri e d'at tes :
dans eclui du :5 juillct '1787, du 2 se ptembre 1788, 11 octobrc 1791 ,
~2 novembre 1789, 5'1 avri l 181 5,29 juin 1825, 7 octobre 1849,
2 détembre 18'18, 2 sep tembre 1788,
Et il est bon de remarqu er que les Jo ~ eph d'Aymar de Mon tsallicr et
leur5 descendants n'ayaicnt nul droit à ce nom, La pr ~ lIve en est écrite
en loutes lettres ùans tous les actes l'er3és au pr0cès p HI' les défend eurs,
l' t ell e résulte nolamment des Irois aetes suivant s :
71 -
l'OI\T E R LES NOM ET ARMES D' ALBY, AINSI QUE JE FA IS" , ))
Lc Iroisièmc es t l'aete tle donation du 20 déccmbre '1754, par le(Iuel J oseph d'Aymar d'Alby, baron tl e Châteaurenard, en fai sa nt il son
pctit-fils, J oseph- Eti enn e de Thomassin , marqu is dc Saint-Paul, donation de tous ses biens, a so in de lui imposer l'o bligation dc porl r r les noms
et m'mes d'Aymar et D'ALBY, en ccs tJrm cs :
Le seigncur donala ire qui , en CO ItS(:qtWl/ce, ,~er(l le/iii cl obli!J';
de lJOrler les noms el ((rntes d'Aymar el D'A LB\' , co// (orll/ i ll/ PIII à ce qu i
" eSl7Jo l'lr: 1)ar le te~/a.lJlenl de ,lfessire Je(tn-Fra//roi" d' ,I,Ij,,/{/r , CV/I « ~eiller (!'U Parlemen./ , aïeul ll!!dii seigneur dOl/aleu r, el "i~aï('J!1 (lwlil
" seigneur dOlla/aire, "
D'où il suit que le nom d'A lby, res té dans la famill e ,t la ucsl' cndance de Fran ~o i s d'A ymar, de '16;)0, port é pal' l' ha tlln dr ses desl'('ll«
(1
�-
72-
dant s directs, n'a jamais appar tenu à l'antre branche, celle rle Joseph
rl 'Ay mar de l\1on:sa ll iel', exc lue formellement de ce nom , et n'a jamais
pu êtrr légalement pris par ell e,
Celle nouvell e uSllrpati on ajoutée il la précédent c n'a pas pourtant,
dans cell e péri ude, l'ail. cesser la co nfusion déjà signal ée entre le nom
)l olrollymique Chùleaurenard et le titre hOllol'i(lqtll,. Ici la méme confusi on se l'encontre cn('o re (];II1S les actes, et on voit év idemment que
celle fami ll e ne sait plus où pose r le pi ed avcc assurancc. E lle continue
tantôt à s'appeler d'. I,IjIlUlI'- Châlea //./ 'cllllrd, tanlôt il se tlire d'AymHr ,
COll/Ir de' C/II;leaul'cnard .
La prcmil' I'c de ccs appellat ions sc retrouve dans l'acte du
3,1 aoùl18 '!:1, dans des état s dc service dc '17,1" il '17:50, dans l'ael e
du 11 ot lobrp '17H1 , ùans cclui du 7 all ùt '1849, enfin dans l'acte
•
du 2 déccmh rp 1818,
Le scconrl sc manifestc dans les doléances de la nobl esse de
mars 1789 et 12 mars de la même année, tians l'acle du 5 juillet 1787,
clans l'act e enfin du 2 septembre -1788.
Ql! .\'I'R IÈ.\IE ET IlERXIÈRE CA'I'ECOI\ IE .
'l'Urt'" e' acfCIIii ..... i ne
~UllS
lu~.n· cll'
s'a ppliql'c,' :," liUgc.
l'ou lons sign aler pal' ces mol s les titres ct al'tes où la désiglla1ion esl tcllemsn l insuffisa nte qu'elle ne peut pHS s'a ppliquer, à moins de
doc lImenl s noul'caux , aux noms el. aux personnes en litige,
Ainsi, illilloi l'cunml. servir les états de servi ce du marquis de CluiIcaurcyllard ? Ce nom-Iii n'est pa5 celui du procès, qui est simplemcnt
Châteaurenard.
Il fallt cn dire autant des états de services du chel'elier de Château-
-73rennnl , l'ainé, (lu 4· janvier 1701 nu 15 janyi ~r 1762, el ti c cen\ du
(' hev Hli cr de Châ lea ilrcnaJ'd , Ic jcune , dc fév !'ier 1705 au ?i oclohre '172!l. A quelle hranche onl-il5 apparlcnu )
Il faut le dirc aussi du brcvct de capilainc, du ~'féHier 1742, pt du
brevct dc chevalie r de Sainl-L~uis, du 1er septemlJl'c -1748, donné~ ail
simr de C//{;,lclIurellard ? Quel esl-il ) de votrc branche ou de la nôtre 1
t:c lte rcv uc des litrcs produ its termin ée, ct les résullats de ('cs divel's
aftes pl'écisés, Ic momcnt est arrivé de leur appliquer l c~ principes de
droi t qu e nous avons posés plus haut , pour en appré('ier la nlcur ct
co nnaÎlI'c l'inOueocc qu e ces titres et actes peuvent exerccr' sur la caw:e.
01' il nc faudra pa ~ Ile longs effort s p01l1' démontrcr qu e l e~ !1 l1 an('~~
que nous y avons signal ées so nt lin obslac le in vi nl'iblc il cc qu r le, demandcurs en fassent so rtir' la justifi cation clc leurs prétenti ons.
Et (l'ahord , si notre prcmic r principc, pris de l'im1Jl'escl'iptib/lil f en
matière dc noms, est Vl'ai, ils doivent nécessairement sucrombcr. Dans
cell c hypoth èse, ils vie nn cnt sc briser co ntre une impossibilité légalc,
el., eussenl.-ils fourni Iln ensemble exempt de contradictions et un e possession qui ne lIl ontr<:! rait pas un point initinl co ntraire, ils n'a uront rien
fait, puisquc la loi n'admct pas la prescription en ccll e matière.
En seconlilicu , si, aband onnant pour un momc nt ('c lt C' l'i'gle si sill'c
et si b i ~ n autoriséc, nous supposo ns que la lJo.~scssiull 'Îlulll émul'illle peUl
être in voq uée pour justifier ct pour légi tim er la prise d'ull nom, cnco re
fauclra-t-il fluC la co nd iti ùn esse ntielle, que nOlis 3vons signalée plus
haut , accompagne ce lt e possession. Il faudra qu c les l'ails et lcs titres
invoqués ne foul'Il isse nt pas la preuv c dl! C0l111'Il i l'f de la proposi lion
allég uec.
Or, nous avons démon ll'é avec, la plus gran de cxubéran ce de preuycs
que, de 16:50 il '1725, jamais aucun membrc dc la famill c dc Joscph de
'Mont sallier , Cl que Joseph lui-même n'avait pris le nom de Chtileaure-
�-
-
H -
na ('(l ; qu e ('C nOIll av ail cté l'l~sc rv é Ù la br anche ainéc, et qu e la hra nc he
dc Joseph d'Aymar n'n\'ait pris qu e celui d l~ Mo nl sallicr. Qu ell e preuvl'
dUllc nc so rt- il pas de ce ll e longue période l'o nl n' l'asse rli on UP- nos adH I':;nires? Qnell c preu\" c dn colllruil'(, ne ft) ul'l1 i s~r.nl - i1 ~ pas eux- mêmes ?
Commenl relrou\" cr ici un e possessio n imlnl'mori all' qui manqu e du rarart l\ re principal que lui ass ignen t les jurisl'o nsnll l' ? Qllell e all omali e ?
Une possession qll i mon tre il so n orirl ill e l'o pposé dl' ('c f]u'ell p indiqll e ri
Sil (i"ll ! qu i sc co mpose ri e r1 c u ~ élémenls co nl radi cloires, alors qu'clic 11<'
(Ic H ai t en a\' oi r qu 'un selll 1 Quelle bizq rrcri(' ~ AloI'5 qll'i l faud rail que
la PUSs('ssilln sc pl' rdit dans la nuil du lemps; qU'llll la ,'il dans ('C nu age
Iclle qu 'c lic a l'oulu sc montrL' r aujollrd'hu i au gran d .\ our ; qu ' il ne rôt
pas possib le dl' la signaler alll rs av ec d'autres Irai ls, 0 11 l's t rérlu il ù troll\e l' des époqu es Iranc hées, diverses, opposérs ct en cllntraditlion ma nifesle cnt re elles . Diso ns-le donl' : il n'y a pas ici les élémenls de la possession immémori ale du nom de Ch âteaurenard ; et cc Illoyrn d'ac quérir le
tilre usurp é éc happe enco re an"\ demandeurs.
E n troisième lieu , ils so nt encorc co ndamll és pal' le Ir oisi~ m e prindpe
qu e nous avolls posé. Ils ne réun issent même pao dans leur possession
les deux carac tères qu i rl oi yen t touj ours acco mpagner Cl précéder la prescri pl io n, celu i de la posse,sion cOlll imœ ct celui de la possession 1101/
jllS(lil'i! IIos jours, louj oul's la même, cxenlpte dl' var iai ion. Or, rien de
pareil ne se renco lltre ici.
De plus, le nom de Châteallrenal"ll a .)Ié pris (l'un e lIluni(l re éqll ivoqu e. C'esl , tanl ôt ('omm c nom palrlJll,ljmiqtte , tanl ôt co mme CilTC h Ollori(iqtll' , Illais allquel des deux aviez- vo us des dl'oi lS? P orl el' l'un , pu is
l'autre, (' C ,,'est pas id entique, c'est. équi voqu e.
Enfin accllmuler louj ours Irs uns SUI' les autres les tilres et les noms
palronymiqu es ou honol'ifiques, ;;aisir Ile chaque ('olé {'e qui pla il, cc qui
sétluil ; il un jour donné, il point ma rqu é ct co mme il des repos calc ul és
d'anlllce, sr, gra ndir, s'élever et s'enrichir des noms d'a ulrui, c'est de
l'usurpa lil))l . Ce n'est pas de la possession. L'une est fl étrie et mérite de
l'élre. C'est celle-l à qui ressllrl des litl'es prod uits et qui seul e peul être
in voqu ée pal' les demandeurs. La possession respectable, capa ble de
fair e impression leur échappe, Ils ne peuvent s'en co uva'ir, ni s'cm défendre.
Ainsi, en résum é, l'imprescri ptibili té, les carac lères de la possession
immémor iale et les condilions de toute prescrip tio n so nt trois obstacles
qu e les demand eurs ne peuvent va incre el qui repoussent leurs prélenti ons.
4.
l qtticaql/ e.
Or, ici éyid cmmellt la posscssion n'e"t pas r0 1l1 i nue . Peillian i UII sil'd l',
de Hi50 à 1725, ils se so nt appelés de Monlsa l/icr De -172:1 il '1787, ils
se son t appelés de Chri leauJ'lnt llrd . De '1787 à nos JOUI" , ils sc so nt ap pelés d'II lu!)-CIIlÎlell nren ar d . II n'y a pas là d,~ co ntinu il é. L111'y a pas d'ulIil é. Il Ya change mell t, diyel"si lé, var ié lé, progrès, marche d' un poin t il
un aUlre, mais rien n'y es t co nlinH , ce qni est co nli nu est louj oul's le
même, P.st identique, L'eau es t cUlllinuc , quan d elle co ule toujours la
même. Si elle cesse, pOUl' reprendre, ell e ne l'est plus. La possession
conlinu e d' un nom se ra it celle qui , partant de '1630 , seserait con lin uée
75 -
Troisième proposition.
Si , c~ nlr(' lous les I,,'incipes, la famille d'Aymard-lIonlsallier pOU l'ail preodr(\ Ic nom de ehil lraurenal'd. elle ne poul'I'"il jamais le prendre <cIII ,
mais al'ce l'alljonclioll dc il' Ay mard-ehilleaurena rd-llonlsallicl',
Cell c propositioll est d'un e telle év idence , qu e sa dé monstrali on est
déjà en ;;erflle d;lns IOllS \es développl' menls qu i vienn ent d'être pa:ésent és.
�-
76 -
Que l'on fassc , cn efTet , abstra cti on de toutes Il~s rl'glcs posées par la
dlle triné cl la jurisp rud ence sur les nllms, les moyens de les acquérir ct
1c(ll'ui t de les por tel', ilnc faudrait jamais accortler aux demandcurs plus
qll' ils n'ont possédé, plus même qu e ce Gu ' il ~ l'0ssl\dent réc liCllIcn l en cc
mOlll enl.
La Iclll'C de Il'i . rI 'Ay mar-Montsal li cl' , uu!J août '18lî8, tlit que Icu l'
nom pa/rony/lliquc est d'A y/llal'd.l l njou te lIu' ilti clltll'a il ('è qu' ililc so it
jOJlHli., o/llis.
Il fnut ~!UJlC, dc Iou le néccssit é, que lui e t sa fam ille prennent co' nom,
qu'Ils le pJl'tent , ils nc peuvenl pas le répuui cr. Crst o'('lui , l' Il effct , de
la Imlllchc ainée, co mm e celui de la branchc ('ado' lI c,
CO[fillIent, Ms-lors, pourra icn t- ils port CI' Ic num dc Ch,\ teaur cnal'll
se ul ? [ls sunt cu nllamnés, en supposan t gratuitement qu'ils pui ssent
prendrc Ic nom dc Chûlea ul'Ilnard , il l'adjoindl'c il leur nom patronymique , et à sc présent cr dcvant le public aveo: cc nom co mposé dé cl'AyIII fl1'd- Chll/ caure Il cl/'Cl-M on/sallier ,
Autre prcuye, S'ils se rejettent uans la séri e des actes analysés dans
la letu'c du 20 aoûtŒ57, qu e renco ntrent-ils? Le no III co mposé: celui de
ChcileaUrCnal'cJ, COllj oinlcllwnt avec celui de d'A ymanl; ou bien celui
de d'Aymar, co mte cie Châteaurenard, mal'qnis de Mon/sallicr, ou bien
Clui 1eaUl'l'1/ anl-.I1on l sail icI' .
Aul rc preuy e cnfln. Oans l'exploit introouctif ue l'instance actuellc, du
20 décembre 18:i8, et dans la rcquêleen abrévialion de delai , du 1(, décemure précéuenl, présenl éc à M. le Président du trilJuna l ci,-i! ue Lyon,
les demandeurs, au premier pas qu'ils font sur le scuil des tribunau x,
semblent l'appelés Ù eux-mêmes, ct après a\'oir refusé L1nc transaction qui
ue c.ollsistai t pas il autre chose qu'à leu l' imposer l'obligation d'unir leur
nom il celui de Chùteaurenard d'un e manièrc habituellc et illdividucll c,
ils Ile font pas Hulre chose ct se qual ifient du nOIl1 composé de d'A ylflan l
de ChâICl/ II/ 'C 11UI'd , ct, qu'on le rell1al'qu c hil'n, cc n'l's t passe ul cmcn t
- n Ies <Iull'cS Illcmbre" de la famille de d'Aymard-Monlsalli cr qui agi""cnt
ain ~ i, c'est M, Ic ('omle rI 'Aymard-Mo!llsallicr lui-même,
Commcnl pÜlll'J'aienl-ils donc refu se r de subir, dans la vic civilc, le
nom cum posé qu 'ils prcnn cnt cux-mêmes dans les qualilés du pJ'olès?
On ne se désign e pas;\ la justice suus ries noms qu'on puisse rejeter il 1'0lonl é, el, aprl'S les avoir Ill'is, ils se lèvrnl ('oulre ('cux qui l'oudrairnt
les repousse r.
Faul-il maiul enaul raire rCJllal'fjuer toul cc qu'il y aurait d'anurmal
dans ('clic qnalifi calion (,olllposée t1 0nt il csl Irail é ici, sous Ccll c Iroisii' mc proposi lion J La chose peul encore êlrp ulilc, (' ;11', cn droi t slriet ,
t ~ n druil plll' (el il Csi hon d'y l'amene r les demand eurs), lenr nom seul ne
peut êlre qu e cclIIi d'Aymar de .Ilonlsallier, marquis ou l'o mle, cOlllme
illcur plaira , parce qu c c'eslle sc ul ficf qu'ils ai cnl possédé après la mort
de Jo seph , Icur autcur, qui en fut im'esti le premicr ; pal'CC que c'cst le
titre qui lui a été donné dans les act es et dans les écrits, et dans les lIlonuIlIICnt s des écriva ins qui se so nt occupés de la noblessc de Provence ;
parce qu'enfin la baronnie de Châteaurenard n'a jamais été possédée par
aucun des dcsccndant s dc Joseph , et qu'clic l'a été, aIl co ntraire, par les
membres de la branche ainée et par ce ux qui la rep résent en t.
§ V.
QUATRIEt\1E
.I:uuai8
I c~
PROPOSITION,
tlcu.audcllrs ne po ...·.. .: .icu .. s Ial. pele.'
lt' .'~RQL· .!!li
u.:
CU,,"TE ." l1ltEW"RD.
Ceci es t plUlôt une conséquence des démunslrations déjà fOllrnies,
.qu' une nouvelle proposition à établir.
Dans tout ce qui a été pI'0u\'é, examiué ct discuté, cn ne voii jamais
�- 78 un tilrc qu i dOllnc il UII Illemure de la ram ille de J ose p!1 d' Aymar de
]\f(l nl sallicr le ,ilre de I/wrqnis de Chûteaw·ellard.
Les dl'mand ellrs Il'Olit sur ce point ni tilrc, ni possession. Ils ne prodllisent au culle cOllcession ro yale qui la leur ait aLiribuér.
Ils ,.rr,lnl donc déclarés n'y aV'oir ancun dr oit.
§ VI.
-
79 -
Le troi i : Ul C, lIU C l'elle pcnsée prend lin fa radere inluri eux dans certains passages signa lés dans le lIuméro du 24 octobre 18))7, et dans
celui ou 6 ~ c pt é ruhr c '1858.
L'examen all.cntif de chaelln de crs !-;ri r rs en montrcra l'inutilil é et
l'injustife .
No 1.
P.-."Ulic.· reproc h e.
CINQU IF:ME PROPOSIT ION.
I..'rerlt du ,'lcOII.'.· dt" Vnlori ne lu é rite aucuil tics reproches fini
Illi 8011' :ldrC8sés.
Le dév eloppement de celle proposition trouycra sa place naturelle
dans la di sc ussion oral e qui aura li eu devant les tribunau x. On verra
bpau co~ p mieux alors la nature des gri ers argués co ntre l' flis/oire de la
baronnie de Chàteaurcll(/rd, publiée par la France littéraire, à Lyon .
Cepend ant on peut trÈ's bien, dès ce moment , repousser comme injustps et mal rond és les rrproc hes qui lui sont adressés llans l'ex ploit
iùtrod llctif rI ' instance.
Ces reproc hes son t au nombre de trois:
Le premi er co nsiste à dirc llue l'hisloire tl e la bctronn;e a eu pour but
de justifier la co rrespondan ce où le vico mte Henri de Valori co ntestait
il la brandi e cadell e des d'Aymar le droit de porler le nom de Châteaurenard ;
Le second , qu' il existe, à tra\'ers l'ouvrage tout entier, un e pensée'
continuelle dp. dénigrement et d'abaissement syôtématique des membres
de la Lranrhe il laqllc lle appartiennent Ics demandeurs;
Où serait l'injustice, je vous prie, si, cn rai l, il pouvait être ccrtain
qu e l'histoire de la baron nic de Château renard a cu pour hut de justifier
la co rrespondance du v i co mt ~ de Va lori ?
Quel tort particulier à repI'ocher au livre qui ne rùt pas, avant tout ,
mérit é par la t:o rrespo ndance?
E n olltre, quel tort il trouver <Ill lilre, s'il renferm e IInc jw,tificatiun
entière de la co rrespond ance ?
Ce rcproc he n'en est don c pas un. Il au rait fallu montrcr que les
pl'euves fournies par le li vre sont fvusses, Ironquées, altérées . En sc
taisant sur cc gri ef, qui n'existc pas, les demandcllrs ne disent ri cli
d'utile co ntre lui .
Mais, cn soi-même, la liaiso n du li vre avee la currcspllntlancc est unc
asserti on qui méco nnait les vrais motifs de la co mposition lill éraire dil
vicomte de VaIOl'i. Quc de raiso ns différen tes l'on l porté il la faire! C'est
le récit de toui ce qui s'est passé, dans le co urs des siècll's, au l"hâlca u dt'
cell e tcn'c, dans l"Cmanoir où ses ancêtres virenl le jour ; c'esll'histui rl'
de Icur dévo uement ct de leur fidé lité il leurs so uvera ins; c'cst lc tablea u
de leurs actions éclatantes; t'es t la rénnion d'une foul e de su uyenirs qu e
l'<ige actuel aurait perd us, qn' il ignorait même, parce fille le temps détruit.
�-
-
80-
tout, el qu' un e main pieuse a sauvés de l'oubli. Celle hislnirc est Ull hommaJ;r rendu am: étud es historiques. Elle honore eeluiqui l'a faite. On voit
qn'il comprend les besoins de son épo!jllt), el. sllrtout que la noblessc, à ses
yt'IIX , nr co nsislc pas dans l'oisivelé, mai s clans le laheur cl. les travaux
rl r l'int clli'''ence
aussi hien lluC dans les Irul'aux d' nne ('alTière utile.
Cl
,
C'e,1 un prélh'rmcnt fail Sil l' Irs plaisirs vains de l'c~i Sl cn('r. C'esl enfin
Ic culle ~ac ré du passe dansce qu'il a dc plus beau, la mémoirr tics aïeux
et Ic respect qui leur ('Si dù. Les dcmand eurs méconna isse nt donc cc l
ensembl e de l' érités dans leu!' pl'emiel' l'eproehe; el espérons pOUl' eux
lJlI'ils c(lm pl'ennenl mi c u~ qu' ils ne le dise nt ces senlimcnt5 délicals auxqu els le vicomte de Valol'i a ~ i hOllorablement obéi. li y avait pOlir lui ,
a\'ant la qn csli on Il'uitée dans la correspondance, un e qu esti on d'art, une
qu eslio n hislol'iquc, une q II cstion cie cu Itc em'el's les morl s; ne t ra r estisscz
donc ras ses pensées; laissez-leur Icms vél'JlaLles proportions.
No n.
Dellxlènle reproehe.
Quels son t donc les pal'Iics de cet écril qui pem ent ~"t)ir paru aux demandeurs cmprcinl cs d'ilne pensée de déni gremen t et d'abaisscmcnt syslématique lies memhres de la branche' il laqnelle ils aPral'licnnenl J Ce nc
peu t être que le chapitrc !x du précis histol'iq uc, où se trouv e raco nté,
llans le n° 55 du 20 mai 1808, ce qui concernc le l'cprochc de judaïsme
adressé .pendant longtemps à la famill e Aymar, dans la perso nne dc so n
aulcur primitif, Gui llaume.1ymal', primitivement appelé Ayma1"is; et où
se trouve cx po,ée la trahison et la li vraison du château dc la baronnie ,
faite par J oseph d'Aymar dc Montsallier , onclc de Jean - fran,oi s
d' Aymar, en 164~ , an marquis de Vignau, dans la guerre qui eut lieu en
131 -
ProrclI!'e ellire le:, lJo/"/emclI/o;/"('s l'I Ir go ur cl'nl'ur de la province,
sUlct du parlemen l Semes/I'e, el d(' l'inslII'l'ecli un qui la suiril .
Voici comment s'expl'ime 1(' viCOll1l c dr Valori
SUI'
,11 1
1., premirr point:
L~ ~'amillc Aymar, proprement A)'lIwr i!'i, a p0 1l1' au teur Gu ill aullle AJ maris, {lui
bnpllsc so us cc nom, prit II' nom d'A )' mar, lorsqu'il cut clé rCCLI conseill er au Par:
lement '. co 1554 . Celle ch:lrgc ennoblissait , Cl C't'SI pour ccla' ll"C' I(·s aulClIrs <lui
onl écn l s ur la n o bl c_~s(' ri., Prl)" ~II C(" Ids qu e Arlcff'ui ll l' ('1 Rohert de Urianron)
ra~porl e nl la nobl esse des AJlllars depuis ce Gu ill aume , hi cn ~u ' il ft'tl i,su cI 'AntolOC Aymaris, notaire à Pcrtuh. , cl dc ~hlgdcl('illc Ilonl:lill . . p{' r~o nnagc!:l porfaitcmcnt roturiers.
Dès qu e celte famille rul l'ntrl~(' dans la noùl rs!'<(', ail lHoH'n de:' t'l' II C robe t:llt,
. ,
cntrcpl'(:ndrc.dc g rand es fcchefl'brs su r so n origine, aG n de pou\'oir ~c purger
du soupç(ln rle Judaïsme qui planai l sur ell e Cl 'lui lui a ferme les pOl'll's de Mali"
jusqu 'cn 1751. Mais les recherches n'aboutirent qu'a conslat er (J' une mani ère cncore plus posi ti ve la roture de so n origine; Cilr les Sél\'3nts ct les anliquaires Jes
plus conSommés ne parvinrent qu'à lui trouver (llI alre gencraliûns de bourgeois,
hommes trl-s probes ct très hon nêtes, d'a illeurs , co mm e 110U 'I "apprt'nenl les actes
de l'élal civil.
r.
Il
•
Quant au soupço n dc ju~aïs l1le, cli c nc fut pilS plus h c ureu~e; car, maigre toute
sa faveur au . Parlement , il lui rut impossible d'('xpliCJucr comlllen! ils n'claient
pas co n., pris dans la I", e imposee, en 1510, par louis XII , sur lous les néoph) les
convertis. Cc ne fut qu'en 1751 qu'ellc fllt la\'ée de cc !lO Up ÇO Il , grùce il l'int rf\e nlion de mon bisaïeul , le marquis de Sai nt-Paul , do la maiso n cc Thoma3sin qui ·
pour (' honneur de !':a maiso n , alliée à la famill e A) lIIar, demanda cl obtint ceue:
far r ur du roi (ordonnnl1(,c roya le, 1754, signée Louis, cOfltrcsignê(' PhélipeêlUs. ).
Quoi qu'il Cil so it de ceile origine obscure, les descen dants de Guillaume Aymaris
ont toujours ,'ec u nohlemenl depuis environ tr uis siècles; ils sr sont alliësa dt S
famill es disling uées de Prol'ence, 001 occupe plusieurs empl uis au l'arlemenl el il
l'arm ée, ct on t rendu IClir memoire rccommandah le, non- seul ement pHI" cr U!' bell e
acquisition de la hnrOl1nic lie Chât eaurenard, mais encore par dc.:) IOl1d:1tions pieuses
el tou lcs so rtes de bonoes œuncs . Uctait aS5uri'menllc meilleur mOyC'1l de prouver
qu'i ls n'élaienl pas juifs de CŒur, s'ils avaient l'U le malheur d'être enta rhés d1is_
raé lisllJ(' !
1
�-
82 -
Yoi('i commenl il S'c\pl'iJlll' ~II mèmc l'iHip il I'C
SIII'
le sl' I'olili poi nt:
Sur crs elltrcfa itcs , l'onlrc de s'cmp:\frr de Lous Ic'~ li('\IX el ('().'l'';lIlS: apparle'nanl aux pad clIlcld ai rcs .. rri\'a au go uvl'rllrul' , qui cl;1 it alors Ir comt e dl Alais.
t::l'll1Î -c i, cn l1)m t' un peut hi en le crtJ ire, s:1isil :l\'C'C rlHpJ'C'~sl'nl(' I:III 'oçcas iol : dc !)'r lllparer oC' Chàlcauren;ud, <'1 il dirigra sur- le-champ dl'S Iro l.lpe~ de Ct' cô~c. La .IH·csi dcnt" ,l ' ArmaI' Ilt' fui pas illtimiclee pa r C(' lIt' nouvell l', l'l (' \l e !'IC prepara a une
\'i!!lIUfCtlSl: rc~isla n C(' . Il ) :l,ait (' II (,fret un g ran d intërl'l pour rh on n('u l' , hi('n plus
l
qU'-l' pour la fortulIl' de la famille trAJma r. il mOlltl'r f , claus reli t' o('('un' lIc<"<lu t' lI l'
,' I;Jit digne d' occupe!' le rang qu e l'acCJui~ il io l1 dl' ce ll e haronnip fil I1lClI'i l' ,'enait d"
lui donll "r : un r f('mllle fut ~O('n l c a la ha uteur cI /'s eir('oll:-,tnncc:,. Elle convo(t ua ",
ban et l'arrierc -han de ses \'<.lssaux, lit pl ace r dan ~ les cm hrasu r r!' ct ~ ur les platcfurmes du chàtt'a u toutc~ 11's pi ècl's dl:Ulill cric qui etaicnl ('Il Sli li pOl" oil'. I..t'S hrê che!l fUfrllt reparers , une six ième enceintc rut c lt'\' cc !'lUI' l' l'm pla Ce l11 ClI1 m~lllc du
cours <\clucl , de telle sor tc qu e la ri\'ièrr du Real furma un fO~!lé nalul'(,j qui \' int
ballrf' les lI ou\'eaux remparts, ct le vill age, rnfcrHl6 dilns \('s f()I·t if'i cal ions du sei"crneur , dcvint so lidain' de sa fortun e heureuse ou malhcureuse.
Les chemi ns fur ent coupes, Ics rues harricadées ; cnlill des munitions nombreuses
furl'n l introduitcs daus le donjon el cnsuile dis tribuccs aux s() ld al~ cl aux habitallts.
On le \'oil , la prcsid ente n' avait rien épargné pour lcnir longtemps.
0 ,., peudanl qu e la d"lIela in e prenail ces dispo,il ioll>, le co nseil de "ille s'élail assem bl é sous la prés id ence d' .\ndré de Vi ll ele, anc ieu ca pilaine au se", icc du roi , el de
sou lils llarc de Villèle, premier consul.
On ct él ihêrn sur les mesures il prC'n ~rc dans le cas où la prcmière l' nc('iole serait
jo rc~c, Cl Ali Jré tIc Villclc pnrlagra Ir!' défenseurs du \'illa gr l' Il deux handes, sous
les cO IIHnand elllc ll b de deux Iluta bl e:i : \('s sieurs Viear,)' r l Reginel!'.
A l' appel de la p l'c ~ id cnlc , I c~ "ÎlIgl-cinq gcnliisholllrnc,) du hall cLai ent accourus.
La g;lI'uiso ll !ll.! compusait de sept cen ts hornmes, dunl tro i ~ cents di.llls la fort eresse
cl cinq ce nls dam. la \' ille, plus un e cO lllpagnie de fr allcs-tireur:, qlle le go u,'crncur
de ~lonlélimarl, Viriville, lui ava it envoyée : ces til'aill l.! l\l's f'urcill ~c h c lonlJés sur les
nan cs du co teau , cach ès derrière les "rbres, En outre, Jose ph de ~Io nl snlli,'r, Il,,cle
du scigneur , vin t Sl' Jeter dans la pla cc; mais la prl'~e fl ce de rc t hf)mmc iU(' ptc el
presom plueuX rUlla c"u,e des plus grands malheurs,
Toul élaÎt ain!li prepare, lorsque le 'l U aoüt 1G1,9) les troupc:; du cUlitie dJAlais,
co mmandees par ) Icss irc Antoine de Tambunneau, llIartllli~ de Vignall, lil'utcnao (-
-
8:3 -
f'o\onnd de la t;l\:1leric Icgcl'" dl' France , Ilël,oudlil Slir la r oul e cie Saint-Andéol à
~ov('s. Vignau nt' s'ntl f' n(lnilllullpnH'1I1 n Hnc résistan ce de la part d'un châleau . . ommanclé l'al' un e (emme j il !'t'nvilnç<lil (ranquilll'Ill cnt) lorsqu 'il la h;lut cur dt· ~I),' '''s,
il fut assailli pill' un e troupe de c ~1\' al('ric ('olllmandéc par "ean dt' Mêscilbon; ks ca"alicrs parl emeniaires chnrgèrr llt les troupes royalislrs avt~c intrëpidité Cl 01' sc r('tirèrent qu 'ap rès leur avoir l'ail essuyer ulle per il' d {' lroi ~ cenIs htJ l1lm cs. Cd in cid C'lll
fit oU\'I'ir Il'S JCux au sieur de Vig nau, cl cc fut a"ec 111\0 ex trêiJlc prudence Cl hrau coup d'o l'clrc qu e SO li arrnê{', fomposéc dc li eux mill e ranlns!'il1!ô 1'1 mille cavalirfs )o
parut ~ Ilr les haul rllrs de Sain l · ~larlill.
I.e gell cral ca mpa sur ce llc montag ne , ct après avoir lco nn conseil avcc le!) oHi("ier .. , il C'lIvoy" 1111 mrs!'agrr pOlir parl ementer an'c les hahitants de 1" \'illf'. Mais il
ne put approcher drs murs; car .\o(lré de Villèle lui lit repondre par un rcu cff'
mousqucterÎr , ct les franrs-lircurs dt, Viri"ille ,'inrc'nt inqui ('ler les roya !isll's jUSqlW
dans leurs retrao chemc nts.
Le marquis de Vignau rut él rangem cnt surpris de trouver les chost's en CCl clat; cl
comprenaot q ue scs forces eta ient insuffisantcs, il envùYil dcmalltlr'r du secours au cOOlie
cilAlais, mais ccsecours de"int inutilr par la trahiso n de l'un drs dHclisc ursdu cbàleau.
COlllme la famille Aymar tic '1olllsallicl cxis te cncore, qu r la vl'ritê l's t un apnnage
de l' histoire, ri qu c d' ull aulre côlé nous ne voudrions pns èlrc aCCl1se d' ull jugcJI1t'nl
trup ~évere, nous repoussons la rC5po nsa bilitê du récit qui "a suivre, cl nous fell\'())'o ns le lecleur au manuscril du sieur J ose ph d' Aymar de Ilnis , proche parenl du
sieur de Montsa lli er ; c'est lui qui nous transmet SUf son co usin -germa in les dêl~ils
'lue nous l'apporto nsj \'oil il ccrlnin ement UII tcm oignagc irfécll ~ ahlc pour le kctcur.
Continuons.
P<,nd anl ce~ pr<'micrcs rlcmollslraliolls d' hoSlilil C, un conse il J c guel re ~'é l a il assemhlr dans la grand'salle tlu cbillea". Le sieu r de }Iolllsa ilier, s'ap puyanl ,ur CI'
qu' il élait le plus proche parent du seign eur cl sur so n àgt', rcrlama impéricusrmcnt
le ('ommandement clu château.
Cell e proposition rul mal ac('ueillit' pur (...10t de \'aÎllanlrs gells qui voya iclIl aiusi
l'autoritc passel' en tre les mains d' un homllle ql1i nl;wail jalUrlis fail la gurrrc. Au
surplus) les ge ntilshomm es du pays qui etaient accourus a\'cc joie pOUl' .lccomplir
1(~ lll' dev oir cu vers 1(' POSSèSs.ell r cl u fief, ne pou "aiell t Sl'r\' i r {lU 'a Vl'C rrg l'r I Suus le s
ordres (!'un ëtranger,dont hl oobl esse obscure datait d'hi cr.
La prê!-idc nt(' C'l le-nlt'mc "I~it d" cette opin iol); mais crai gnanl un éclat prejndi-
�ciê1hl(~ aux inlt'rèl:,
Jl' son
81. -
-
fils. (, Ile l'éda: ct Jose rll de Monb.lllil·r, t1 l'H'1I1I IlIaUre du
ch~' t('all, put Ir li,'rcrà loisir aux cnnrm is dr l'o n
11 ('\'CU.
I.es choses èta icnl cn CCl Ôl.ll , IÜl'sql1c le marquis de Vignil lJ nppril que 1\1o nl sallier CO lllmand ait : il ('II fuI rcn"lpli rlc joie. Il !)'ëcria : Qu 'il ne st' rait pas dit qu 'i l elH
fail UII lIIauvais parti il so n meill eur ami; qu'ils a\'aÎl' llll' lù cllsemble à l'acadcmÎc,
cie. Pui:, il clI\'oy<1
UI!
ll'ompcLl c à M. de Monlsallirr pour le prier de \'l'ni r cu nrcrcr
aycc lui . Cl' trompeur aurait él è accucilli co mme !)U II dc\'an cicr, si MO ll lsa lli rr
n'avait pa, dOlll1 6 au , se ntin ell es d{'s on!rcs secrets ct qui eta it'Il 1 étranges de la pari
d'un hom me qui SC' (li ~ ail so ldnt. Le IrOlllpcllc l'l'udit ro mpIt· cie ~ a mi,sion, Cl ~I. de
)l onl5allier monla il che"a l cl sc dirigea \'ers la porle de la vil le. C'es L alors qu ' il
ren co ntra Marc de Villèlc qui fil drs cfiorls inutiles pour s'o ppost'r il so n desse in, Lc
sieur de Monlsallicr conlinua SOD chem in l'I il promit au marquis ti r lui li,'rer le
cbàlea u, il cO lldilioll qu' il sera il il l'ahri du pillage cl qu e la garllison seraiL co nduilc
so us bonne l'scorie jusqu'à la rivière d,' Durance. El C'l's l aillsi, dil Jos" pb d'AJmar
de Hrès, ' lue Monlsalli er li vra la forl eresse au préjudi ce de so n lIe\'eu.
Pendanlla lI uil, des senlincll es déba ucbées pal' Mo nlsallier, li vrèrenl une polerne
au sieur tic Vigo~u, qui , au mépris du traite, livra la vill e cl le chàl eau à ses
soldols .
M. de Monlsall ier lui-mème ne ful pas épargne j car un so ldal du régimenl a)'anl
remarque, sur les épau les du li eutenant-co lonn el, uo grand manteau écarlate
brodé cu or, il sc j ela Sllr lui j lous deux roulerenl les marc hes de l' escalier eo sc
ballanl , elle maol eau resla aa so ldal, qui elai l le plos forl. !II. dc llrès assure que
cela fil heaucoup rire le général.
li n'y a qu e l'ignorane(! ('O LlIplèle des fail s hisluriqu es el cell e ue la généa logie des d'Aymar qui ait pu inspirer aux demandeurs un e susce plibililé pareille il eelle qll'ils monlrenl ici.
Aussi, Ioule la réponse il fournil' pour le vieom le de Va lor i ne consislera- I-elle que dans la juslifica tiol\ de, sourees où les faib raconlés onl
élé puisés el dans les preul'es légales qui les onl aUlhenliqués.
Expliquons-nous J'ahol'J SUI' le premier des r<!proche, ce llti du sou pcon de juclaislilc, donl le l' icomle de Valori a parlé, el qui, selon lui, a
fermé les porlrs de Malte à ce~lc famille jusqu 'en 17fî4.
8fi -
Ce fait est conslalé pal' un 31'l'êl du consei l du Roi, du 50 aoûl '1754,
qui fUI rendu sur la demande ue MM. Jose ph-I~li enne de Thomass in,
Ill:"'qnis de Sai nl-Paul cl Louis de Thomassin, mal'quis de Peynier.
Ceux-ci, en qualilé ue descendanl s, du culé malern el, de Gui ll aume
Aymaris, ct cn raiso n pl'éc isémcnl du reproche ùe judaïsme aùressé par
les c.mlemporains il la mémoire de Gui llaume, s'élaienl pOUI'I'US devant
le Hoi, cn so n c,onsei l, pour fairejnger ce prélenuu reproche, en lal'er la
fami lle, et ex poser il Sa Majeslé la séri e des lilres qui en prouva ienl la
fausselé. C'élait le moyen léga l d'oblenir juslice et Ile fair e lomber
l'o bslacle que ce reproche élevail con lre so n en trée dans l'ordre ucs Chevaliers de Malt e.
Une longue proùuClion ue pieccs est visée el analysée dans l'arrèl; on
y suit pas à pas, à tra vers les siècles, l'origine el la qualilé de chacun des
membres de la famill e, soit du côlé paternel venant des T homassin, soit
Ju co té maternel vena nt de Guillaume Aymaris; el le Roi en son co nsei l
décide que le reproche n'est pas fondé et le déclare injurieux cl calomnieux en ces terilles :
Ouï le rapporl, le Toi éla.nt en SOli cunseil, al/cndu que ledit sieur Joseph-Elienue
de Thomas5in, marquis de Sa inl-Pau l, consei ll er cn son Parlemenl de Provence, Cl
ledil Louis dc Thomass in, marquis de Peynier, prêsidenL â mortier cn son mêm e ParlemenL , sont issus CL.I escendanls en ligne directe de noble Jea n de Thumassin, capitaine des gens d' arm es du roi Rene, nalif de la l'ill e de Vézou l co llourgogne, fils
de nob le Huguenin de TbDlIlassin , seig ncll r de Jclly ~ originaire dudit comlë, et pareillement allcodu que ledi l marquis de Saint-Paul es l issu cl dc.scendanl en ligne
direcLe ,lu cù l" malernel de Louis Ay maris, babilalll de la ville .Ie Draguignan CD Provellce~ a décl arù Cl déclare injurieux ct ca lomnieux le s(Jl,Jp~:ou rèp:H1du sur le.!'di lus
famill es de Tbomassin ct de d'Aymar qui les ta xe d'odginc juil'e , sous préJcx te
qu'aucun des au leurs dcsdilr.s deux f~milll's auraien t clé compris dans la laxe imposée
co l'an mil cinq cent dix pal' le rùi Louis X II sur les juifs nou\'cll emcnL con\'erlis;
failtrès expresses inhibilions cl dcffeoses, Sa lUajesté, à loulepersollue d'imputer ladile origine, cn quclqur maniëre que ce puisse élre, auxdits sieurs leurs frères et
�-
86-
~œu r~ cl kur., dcsrcndnnls, les rcconnflÎl , Sa Maj('stl' , pour èlrt' noblrs J'c xtracl ioll (' 1
ffarm('!' , cl ('n consequence' " (,·~IL ct en tend f\lI 'ru't , 1rurs frrrcs Cl sœurs Cl leurs
flcsccndnnls jouis cnl dr Lous les rlroils, hOIllH'urs rI privil égcs allribués a la nobte;,e de la jo uissa nce desqu els t<,sd ilS so upfons répa ndu s s ur les famitles de ThollIilss in ct <l'Aynwr au raicnt pu les pri rrr j usqu'à nuj ourd ' h11 i, cl cc ci e la m ~mc mn lIière
qu e si Irsdilcs famill rs n'il \'ni cnl jamais élC soupço nnees de j ud aïslIlc. Perme l, Sa Maje-s h\ aU :Hlits sieurs de faire impri mer pl puh lipf ledit décfr l partoul où hcsoiu scra .
-Fail au cO llseit d'Elal rlu Roi, Sa ~'ajes(é)' c laul , I,'nu il V"rsa itl (', 1" 30 ao ùl17 M,
-S ig-ni':
Pn Hl lI> B \ VX .
Le \'irom tc dl' Y"lori Il'01 cl one été qu' his torien fid i' le, Lc fait du sllnpçon de judaï, n1r cst \'l'a i; le fait de la longue résistan cc op posée inutilcIII t'nt pal' Ic!' d'Ayma r SUI' ce point es t vrai en('o re ; enfin ce lui des effort s
de 'DL de Thomassin , cou ronn é par le succi's dans l'arrêt tlu eo nsei 1dn
Roi, c11l;;0 aoùl. '17::;4, a le mê me degré dc ccrti tud e ct cJ'auth enti ci té. En
quoi donc le vico mtc de. Valori a-t-il obéi il un e pensée de déni grcmcnt
et d'aua issemcnt ? Il a au con traire lavé définit.i vement vo tre autrUI' du
rep roche. Il a fait ronnai tl'c le doc um entjlll' icl illuc qui l'a cfTac é, 11 a signa lé il r otre all enti on la décision solcnn elle qu e yons ignol'iez, qu e
d'antres écriyains, qui s'occupaient de la noblesse ci e Provencc, alll'aient
con tinu,; d'ignol'er enc ore; et au lieu ti c dirc qu' il a abaissé ou dénigré
\'ot l'r auteur, clites plutôt qu'il l'a élevé, en lui restituant sa \Taic qualit é,
Comment, d'ailleurs, les demandeurs ne \'oient-ils pas qu'ils prêtent au
r ic omt e de Valori une pensée opposée à ses vé rita bles intérêt s d'honn eur ,
r t qu 'il ne pent. pas al' il' eue. Ce Guillaume Aymaris est du côlé mate rnel, par SUie G'Jbrirlle /)'AV11lm', fill e de J oseph , mariée aumul'qllis de
Tbomassin, un de ,.es au teu rs; a-t-il vou lu aussi l'abaisser et le dén igrer?
Lui , qui a pris la plum e pour honorer ses an cètres, les aura avili s t ! L'Ht-il abaissé et dén igré en parlant de son origine obscu re et rutul'i l' re? En
disant CJu'il descendail J'Antoine Aymaris, notaire il Pertuis, et dc Magd ' Icin~ Romain , prrsonnage;; parfait ement rotl1rirl's? Non, on ne verrn ,
- 87dans 1'~I' c u ti c tellr \,irité, qu c l'exprcssio n (l'un cœ ur vraim ent nohle.
Il ;'cnd avanl. tOllt h o rni1l~ l\e il la vérité; il ne pense pas qu c l 'o hs~ ul'ité
de l'origine, quanti ell e a touj ours l,té jointe il la prohité, tomme il le
dit des Daymar cnc'o l'p l'otur irrs, soit jamais un I' tùchc qui obscurcisse
l'éc lat plus vif qu e les L1 csrcndant s de ln r:\ ce auron t jeté Cl répillldu SU I'
clic ? Vrailr cnt, MM. de Mont sallicr voudrai r nt-ils établ il' (lue les fam illes Il'ont jamais ('o ll1 ll1encé? E t s' il fa llait un e satisfa cti on :'1 1'am oul' pl' Opl'C dc ln fam ill e tI'Aymar- Mo lltsa ll ier qui sc n it de C'lHnpensa tioll il la
premièrc vé rit é, ellc tl e\ ait la trouv er suffisant!' dau;; rcs mots du rérit
qui termin ent Ic passage in rriminé: ,( Qlloi qu 'il en soi t de rrll c ori« gine obscure, y est-il dit , les dcscendants dc Guil laum c Aymaris ont
« touj ours véc u noblement depuis envi ron troi.' si(\c1es ; il:; ,e son t nll iés
« à des familles distin guées dc Pro\'Cllce, ont occupé plusieurs emplois
« au Parlement ct il l'arm ée, et ont rendu leur mémo ire l'ecomman« dablc. Il
Si nous passo ns maintenant à la par tic du récit concern ant la trahisu n
fait e, en 1649, par Joseph de Montsallicr, nous nous co n\'aincrons encore qu e le vico mte dc Va lOl'i est resté ici dans les termes de l'exactitude
hiSlOl'iqn c la plus rigou reuse, et qu'i l n'a fait que ['épétr r ct que redire
cc qu'un histurie n, sOI,t i de la famill e des d'Ayma r, a racont é louc hant
l'un des sie ns.
Remarqu ons d'abord qu e le vicomt e dc Valori a eu ,:oill d' illdiqller
lu i-mème d'où est \'en ur la co nna issa n c ~ tl e ce fai t, Il indi que Joseph
d'Aylllar de BI'I~s, l'aut cur du manuscrit histuri 'lue ~() lI c crnaIH la baronnie de Châtea ul'cnard . E n ou trc, il le ra pport \' tel (lue cct Iw; turl en
l'a don lié lui-m6nw, il n'y aj uut c rien, Dès-I or.' , tOli t ,:c réduit il sa\'oir
si Joseph d'Aymar tl e Brès a parl é et é(' rit su r celle trahi;on, et si
le vicumtc de Va luri a eu juste , uj et d'ajouter fo i à ce r ~ei l.
Le doute il cet éga rd n'est pas possiule,
L'ull de nos auteur; provcnça ux , qui jouit d' ul1L' réputat ion d'exac-
�•
-
8~ -
- 8~ no 1\)52, l' hisloire de la bal'onnie de Chùte3ul'ellard ex isle !:O Il1I11 C un
document offert à la cmio:<ité IlIlbliqu e el. aux amateurs de l'antiquil é,
Or, c'est dans tel hislori en provenl;,al, Jo,w'1)h d'Aymar de Rn;,.,
(lue le vicom le de Va lnry a pu isé le récit !l,u' lui fail de la Irahi so n de ce
Joseph Montsa ll icr, dl! 16"~I, fl lI'a l'iLn ajoil l" il ep qu 'il ra co nl e, ct il
l'a suivi pas il pas,
D'où il faut l'ondure lIéc<'ssairement qu'il n'a SIII' (' C poinl , ('o mme
SUI' le premier, qu e répélé lin rait acquis a l'hisloil'p,
On pourrail au besuin, comme piéees juslificalives, joindl'e il la dérense du vieomle rl e Valory la copie cerlifiér conrllrme pal' le biblioth écaire de la ville d'Aix , dllrécil ex lrait de Jose ph rI 'Aymar de BI'ès, el la
comparaison enlre les deux !'éci lS montrerait l'int égril é du moderne
écrivain, el so n res prCI pOlir la Iradition , lelle qu 'pi le Ini a p.lé transmise,
titud l' ml\riléc, cn ce qu ; ('llnrCl'nr nos anl iql1il~ s IlI" )1cn(: ules,.M , Hou'\.\Iph eran , dans son livre' inlilulé les Rt/l's d'.1iJ', 0'/1 Recherches his100'ique" .Il/r l'anciel/ne ('(I)lila /e rie /a Prol'el1fP (Aix, Allhin, 1848),
11 pa l'i t'. dcu>( rois dl' l'hislni l'è Illannscrile de Ch,îlruu l'enard , pal' ce
Jtlse ph d'A.ymar de ]31'(\5, une pl'crnii'rc roi;; au IOllle 'l, palles 280 el
28,1, noie 2, (' Il l'e;; 1l' l'Ill l';; :
De cc II I' maiso n (Daimar-Albi ) élnicn l so rlis plusie ul's ma gis« 1l'ais .... , el qu elqu('s pel'so nn es de mél'ile, lels qu e J can-And l'é, ....
" el Joseph, seiilncur d,' Brès, second consul d'j ,i, en -1700, aule-ur
" d'lin o!fL'r(l !Je inlére"saJ/ 1demeuré malluscril , COIlICI1(/1I1 l'hislllh'c de
" la baroJ/llie rie Chrilca urenard depuis les lemps les plus rec ulés, " E l
à la nOi e il ajoule: «Joseph , né à Ai'\ le 26 0c lobre '16114" IJapl isé
« en 1660, ense l'eli , ;;ui l'ant ses in len lions, au cim eli ère de l'hôpilal
« Sa inl-Jacq ues, Nous 1Jossédoll s ulle copie de son ouvrage qui porl e le
« litre de RemG1'qu es chro/lo logiques el hislonques des ventes, ali énaI< lions, réunions ao domaine de Provence et aulres changemenls tic
1< main de la lerre el baronnie de Chàl eanrenard et de ses déprndances,
« On y Irou r e tlne roul e de tilres el de fails curieux et peu connus, ))
Et un e seco nde fois, au 10llle 2, page 53'1, au suj et de l'en lèvement
de Gabr ielle par d'Epernon, donl le cha pi lre IX du réc it du vicomte de
Ya k ri parle uus:<i, il dil pn noie 1 : « Cel cnlèl'emen t est aussI co nstal é
« dans les Rell/arqlles hisloriques el chrollolog'iques sur /11 boronn ie de
1< Chirleaure/lord, pal' Joseph Daimar, sirur de Brès, co usin germain
" de la demoiselle de Monl salli el', ))
En ollire de la ('opie de ce mannscril , qui esl en la posses;;ion de
M, Roux-Alph eran , il en exisle un e second e dans les manusc rits de la
grande bihliolhêq ll p. l égué~ à la ville cl' Aix pal' M, de Méjanes, un des
plus riches dépôts de li vres qu e les provincrs de France puissent posséder,
«
Là enc ore, dans la l'OlieClion inlilulée : JI1anuscrils de Peyl'esc,
Troisième reproche.
•
--.
Le reproche d'injure n',~s l pas mieux fond é qu c les précéden l:' ,
Dans aucun des passages incri minés dans le numéro 4· ti n 24 oclobre '1857, il n'y a ri en de direl' I con lr r I,'s deillandeurs. C'est un e
th èse gé néral e, plein e de chalcur el dl' juste av crsion co nlre les empi(\lements qu'on se perm el chaqu e jOllr a-l'éga rd des litrcs nJhiliaires. Les
demand eurs n'y sont pas nommés, el, en l'él'ilé, quand aUl' un e perso nne
n'est désignée, quand l'écrivain se 1ien l dans les halli ClII'S d'ull point dc
vue unil'ersel, celui- lit s'injurie lui-mêmr qui sr (' roil désigné el qui
s'applique les paroles qui lombenl de sa plnmc, A ce romplr I,·s moralisles del'ra ient s,' laire; les auleurs sa lyriqnes l'l'spcc tcr les l'ices dominanl s dl' leur époque, dans la l'rainlt' d'êlre poursllivis; les systrmcs
�~o
-
de ph il(lsu phiè ou de IIh~d l'ciOt' ne pourraiellt pas Il I(! IlH' ('t re d isl'llté~ ,
sans craint e' d'cncouri r Ics IlIèllles rcpr(lc h e~. Relllnl'quez, en ou tr~, qu'il
n'y a l'as même d'a llusion indil'cc tc qui désiglJ Cles (I r milnd curs dans le
t ilt' ,
(\
Ila' "O;;'}trc
L'allteur parle bien d'Iln e ric f l/lc Ilwrpl/lioll dt( IWIII de C/ui{l'ltttreliard, mais il n'ajoulc rie n qu i s'ap plique au\ yeu\ du puhlic ù ses adrersa ircs actuels. Le lec teu r" été laissé dans l'igwJI'a ncl' abs ulul' sur le
nom de celui ù (lui cc tt e usurpation était reprochée. L , ,Hlvi' rsai res
se uls ont cula cid de cctte phrase énigmalique.
Et qu'on ne (lise pas que le nlllnél'n:;{; d~ /,(1 l''JïlIICl' l itliraire, (Jaru
le 5 ju in '18;)8, a l'enfe rmé un e nniL' , ce lle qu e IIOll5 arons déjù rapportée plus hauI, qUI remplace la désignation qui n'a pas été fait e au nulllél'O 4, au 28 odobre .J857. En raisan t ce tt e objec tion, on oublierait
la distance qui sépare le numéro 4 ùu nUllléro 56, l'int ervall e dcs temps
éco ul és en trc l'un ct l'autre, le déraut de relati ons elltre eux, - on oubli erait., ce qUI est bien plus grav e encore, le si lence ga rd é depuis la
publicati on du numél'c 4 et ap rès le numéro :Jo, quoique l'intermédiaire
honorab le uont nous arons par lé ait été al'el'ti de la publi cation ; quoiqu e le nercu des demandeul's, M. de Bernède, fùt abonné il Lu Francc
fillhl/ire et qllc Mme d'Aymar, la mère ùes delllandf'urs, y flit abonnée
aussi, ct qu 'ils l'c(;ussenl , le:, uns et les aut l'es, les <lrtides qui y étaicnt
~on tcllu s, comme le proul'rnt les lettres de M. de berni'de aIl direc teur
de ce journal, clcs 25 juin, 6 juillet ct ,15 juillel '1858; un oublierait le
tOIi Illodél'l\ Illocle, te, ili olTensif de cette note. Chose sillguli l' re 1 la
seill e fui s qu e M. d'Aymal'-Mon tsallicr est désigné, il l'est sa ns aucune
obsenu ti on critiqu e, sans chalellr, ,ans au cun e vé hémence d'ex pression.
On dit de lui qu'il il l'ris, S(I/I ,\ IIllCUlI droil, le nom el le lilre dc marquis
~~ (
-
!H -
Ce n'est donc pas là une injure qu 'on puisse relever; c'est la plainte
la plus modérée qui puisse sortir de la bouche ll'un e persollne olTensée
par un procédé de cette nature .
En résumé, la justice trouvera le précis histori(llIl' Slir la barollnie
de Châ leaurenard ce qu'il eSl, une œUI're consciencieuse, pleine dc
vie, profondém en t ho nnête cl em preinte de l'r t espril de justice qui
peul s'indigner con tre le vice en général, mais qui respecte les perso nnes,
el qui sa it les comba llre avc~ des armes co urt oises . Le même au teur
avait. écrit, cn '1855, un Essni sur Ül noblesse ( Didot, 185:-;, Paris 1. On
retl'ouve là les mêmes itlées exprimées plus tard dans l'introduction
il l'histoire de la baronnie de Chât.eaurenard. Les demandeurs on t pris
pour eux un e thèse général e déjà yi eillc dans l'esprit du \i~omt e de Yalori, et par lui ex posée bien avant tout débat al ec eux. Il n'en faut pas
davantage pour les condamner.
Aix, le 6 Janvi er 1859.
.4-voca l, ancic n Bâtonnier de J'Ordre dl" :hoc,I(" prè..: la Cour iml~riak ('l'Ail: .
de CI/ lile nurenard , cllll!j(ln i .,oin ct'dilJlincr son Ill/Ill ]lalroll!}11liqnc, qui
e~l d'A ym(lr.
C'("t la scu le chose qui ,oit ditc, Cl elle es t l'fail' ! ct les
dl.'lI\ Irttl'l'" (lu 20 aoirt '1857 el H anùl 1H::S Cil con licl\ncli t la IlI'e(l\e.
Aix . - lmpl'imeric tir n~IIONDF.T·At:8IK , sur le Cours, ~5. - 1859.
�·MÉMOIRE
POUR
" "
L'ŒUVRE GENERALE
•
AIX
IMPRIMERIE ILLY. RUE DU COLL8GE.
186'2
20
�MEMOIRE
POUR
L'ŒUVRE GÉNÉRALE DE CRAPONNE
SUR
1° Le Rapport de M. l'Ingénieur en cbef du Département, du 24
. Janvier 1862 ,
ET SU R
2° Le Projet de Règlement d'administration publique du 27 Avril
1860 , pour le canal de Craponne,
SOUM I S A L ' ENQUtTE
DANS LES COMJIUNES ARROSRES PAR LE CANAL DE CRAPONNE.
OBJET ET BUT DE CE MÉMOIRE.
Après trois siècles d'existence, le canal de Craponne se voit mena cé
dans sa constituti on , et dans les règles qui lui servent de base. tes
ri chesses dont il a doté une partie de la Provence ne su ffisent pas
pour lui faire trouver grâce devant l'administration. Les statuts co ntenus dans les titres de 'H m et de 4583 , qui form ent la charte de
�-4la société civile de Craponne , connue sous le nom d'Œuvre générale
de Crapon ne, ne ~ uffi sent pas non plus pour faire croire à sa vitalité.
L'administration , qui n'ose plus aujourd'hui demander la déchéance
de la co ncession , l'a ile en 1554 à Adam de Craponne des eaux de la
DUI'a nce , veut cependant soumettre ce canal au régime qu 'elle aurait
eu le droit de cl'éel' pour lui , si la, déchéanoe avait été prononcée. A
défaut du principe qu'elle n'a pas pu obtenir, elle voudrait au moins
obtenir ses co nséquences.
Elle s'attribue la puissance d'interpréter la concession royale faite
en 1554 i Adam de Craponne. Elle y touche; elle y retranche; sans
se so uvenir qu e cette concession, antérieure à l'année 1566, co nstitue
une pro priété irrévocable, un droit définitif, qui n'a été soumis à aucune co ndition de révocation. Elle veut diminuer le volume d'eau attribué à Craponne, so umettre la régie du canal au contrOle habi tu el ,
ordinaire, quotidien des ingénieurs de l'administration; déplacer la
qualité de propriétaire; l'enlever aux propriétaires du canal; faire
de ceux-ci des instruments passifs , obligés de suivre les volontes et
les projets de tous ceux qui aspireront à faire du canal une œuvre
de canalisa ti on sa ns ombre, sans tache , sans aucune imperfection ;
soumet!re les propri étaires à subir et à supporter toutes les dépenses
entrainées par ces perfecti onnements inutil es qu 'il sera libre à l'administration d'exiger ; créer enfin dans le canal de Craponne une propriété d'un caractère exceptionnel, sa ns précédent aucun dans nos annales juridiques et administrati ves, où le droit de propriété serait dérisoirement reconnu en faveur des successeurs de Craponne , mais où
aucun des droits que donne la proprielé ne serait exercé; où l'administrati on deviendrait maltresse unique, absolue , créerait à plaisir les
charges les plus lourdes, et laisserait aux propriétaires l'unique avantage de les subir et de les porter , ou de périr et de succomber sous
leur poids.
Voilà ce que l'administration prépare pour l'avenir de l'Œuvre générale de Craponne. Voilà ce qu'elle vient d'annoncer publiquement ,
solennellement, à to utes les contrées que ce canal traverse, en mettant
1) -
à l'enquète un rapport de U. l'ingénieur en chef du département du
;M janvipr 1862 et un projet de règlement d'administration publique
pOUl' le canal , qu'elle se propose de faire convertir en décret impéri al.
En présence de ce dessein, tous les intéressés se sont émus. L'Œuvre de Craponne a délibéré le 5 mai 1862 de s'oppos,'r et de protester
avec énergie contre le dessein de l'administration . Elle a déposé dans
l'enquête sa protestation. Toutes les communes intéressées, tous les
arrosants ont fait aussi entendre leurs plaintes et leurs réclamations.
Mais ce t appel au droit, ce tte protes tation solenn elle de tant d' inlérèts
menacés et oompromis, ne suffit pas. Et un devoir plus grave est imposé à l'Œuvre générale de Craponne.
Elle veut le remplir dans le mémoire act uel.
En le publiant, elle se propose d'éclairer l'administration sur lo utes
les vi olations des droits et des titres qu'elle va réaliser pal' son projet.
Elle yeut lui montrer tout ce qu'il y a d'anormal , de choquant, d'injuste et de contraire à notre droit public dans l'acte qu'elle médite.
Elle veut exposer au grand jour le droit qui régit le canal de Crapon ne,
droit oublié, méconnu, sacrifié; les monuments législati fs et de juri sprudence qui le protègent ; les conséquences légales qui en résul tent
et l'opposition fl agrante qui se trouve entre elles et le projet de décret
impérial qu'on se propose de solliciter.
Cette marche est la seule propre à faire triompher sa cause. Ce n'est
qu 'en agissant, co mme nous venons de l'indiquer, qu e toutes les difficultés, dont l'administration ne se préoccupe pas, lui seront signalées;
qu'elle en pourra être frappée, et qu e ses idées pourront se modifier .
L'ex périence de chaque jour ne montre-t-elle pas que la vénté ne
doit jamais se lasser de réclamer ses droits? O,ue l'administration a ~u
se rendre souvent à l'évidence des motIfs qu on lUI opposalt ? Ou à
défaut, il existe un haut tribunal administratif , le conseil d'É tat , qui
Su it faire respecter les propriétés et mettre un frein aux tentatives hardies, aux entreprises illégales, aux violati ons des droi ts? N'avonsnous pas vu le co nseil d'État par so n arrèt du ·10 févfle~ 1859: rend~
au profit de l'Œuvre de Craponne, faire reculer l'admmlstratlon qUl
�-6-
-7-
déclarait déchue, ou qui menaçait de déchéan ce l'Œuvre de Craponne?
Cpt arrêt n'a-t-il pas dit qu'i l n'appartenait ni au ministre, ni au préfet,
d' interprêter la concession de 15M; que cela était réservé au pouvoir
sOllverain seul, jugeanL en Gonseil d'État? CeLte décision n'a-t-elle pas
suffi pour arrêter l'administration sur la pente malheureuse s\lr l aqu ell ~
elle roulait pousser l'Œuvre de Craponne ? Enfin n'avons-nous pas vu ,
da ns ces derniers temps , le souverain lui-même éco uler les réclamations respectueuses et libres qui lui étaient présentées; descendre jus·
qu 'à interroger, jusqu 'à scruter les plaintes, et rel ever ainsi de sa main
auguste des intérêts froissés , menacés et détruits ? Pourquoi ce qu e
d'autres ont fait avec succès , l'Œuvre générale de Craponne ne le tenterail-elle pas? Pourquoi surtout ne commencerait-elle pas le cours
de ses réclamations par l'exposé de slln droit et par la démonstration
des erreurs juridiques de l'administration. et de la fausse voi e dans
laquelle elle s'engage?
Qu'on se garde surtout d'accuser les intentions de l'Œuvre générale
de Craponne 1 Elle défend la situation que trois siècles d'existence et
de prospérité lui ont faite; J'énergie dans la défense n'est pas un acte
d'opposition; elle est encore moins un signe d'hostilité contre l'administration. C'esl le cri que pousse l'homme blessé; c'est la juste plainte
qui so rt de sa bouche. Mais ce n'es t un e offense pour personne. Bien
loin de là, c'est espérer en l'administration, c'e,t es pérer dans le pouvo ir, c'est les hon orer, dans toute l'étendue du mot, ' que de solliciter
d'elle et de lui ou la réparation du mal co mmis , ou la rétractation
d'un e erreur. Telle es t la pensée qui a inspiré ce mémoiré. C'est elle
qui en dominera tout l'ensemble. NoU,S tenions à inscrire ici celle vérité
avant d'en avoir ex posé aucune autre, pour que parfaitement rass urés
sur nos intentions, on ne pùt pas se méprelJdre sur le caractllre de
nos actes.
enfin montrer que le projet de déoret et de règlement qu'on veut lui
imposer, viole ce droit et toute la jurisprudence administrative; que,
par suite, l'opposition faite par l'ŒuV'l'e générale de Crap'onne, dans
l'enquête 'ouverte sur ce projet, est de nature à être écoutée et qu 'elle
doit triom~her par le rejet pur et simple de ce projet, les statuts et
les règlements e~istants dans l'Œuvre pouvant suffire à sa marche et
à la prospérité des contrées que le canal arrose.
'lous allons maintenant; 1° exposer l'historique des titres constitutifs de l'Œuvre de Craponne; 2° caractéri ser le droit qui la régit ; 3°
,
r
§I.
(:o .... t bllltorlqne des tUres eoolltftntlfll de l 'Œnv.'e géoé.'ale
de Craponne,
Le premier titre ~ raRP ~ler, ~t à ,prçdui~,e en entier, c'est le titre du
17 aoùt 1554" par leC{uel les présidents et maUres rationaux de la
Chambre des Comptes et archives de 'provence, autorisèrent Adam de
Craponne à prendre et à dériver de la Durance les ea ux nécessaires à
son canal.
En voici le texte précis;
" Les Présidants et Mestres Rationaux de la chambre des com ptes et arcbifs
du Roi, nosll'e sire et comte de PI'OV3nCe, Forcalquiel' et tel'res ajacentes,
l'ésidants a Aix, a tous ceux qui ces pl'ésanfes verront, salut . SçavoÎl' faisons
que veue au bureau de ladite chambre, la requeste a nous présantée par ADAlI
DE CRAPONNE, ESCUYER DE MONTPELLIER, HABITANT AU LIEU DE SALLOt'(,
tan-
dante afin de luy donner permission et licence de prendre partie de l'ea u en
la rivière de Durance, au tel-roir de Janson, et dudict terroir la dériver et conduire jusques au lieu et te.... oir de Saint-Chamaz, et pour ce faire. la passer ~ar
le terroir de la Roque, Sauvecanne, Mallemort, Allein, Lamanon Jusques au,loct
Sallon, et dudict Sali on pal' le terroir de Lançon et Cornillon jusques au terroir
de Saint-Cham.z, avec pouvoir et auctorité de faire tant audict lieu de Salon
qu'en autres lieux par le terro;,' desquels laaicte eau se dérivera et se poun-a
�-8conduire, moulins el autres angins à eau au prolliet dudict suppliant et
-9R
telle
censive qu'il sera avisé au prollict et commodité dudiol seigneur. Appointement de la susdicte cham,hre du pépultiesme juillet dernier passé, pOUl' communique,' ladicte requesle au prooureur dudiot seigneur en icelle diole chamore.
Response pal' ledict seigueur faicte en ladicte communication, roqué,'ant par
icelle les lieux ci-dessus ,'equis estre visités pal' un seigneUl' commissaire pour
l'oil' si ledict seigneur Roy ny la chose puhli'lue y au,'a auleun interetz app"lés
ceulx quy seront a appeller . Aultre l'equ esle pal' ledict de Crapon ne, pl'éSanlée
en ladite chambre, tandont afin de luy ajuger les fins et conclusions d'icelle
susdicte l'equeste. Aultre appointement de la snsdicle chamhre porlant commission à mestl'e J ean F"ançois, conseiller dn Roy , et mestre rational en icelle
pOUl' info"mer sur la comodité et ipcompdité de ladicte dérivation dudict jour
du susdic! mois de juillet. Procès-verhal, informa tions et procédures faicte. pal'
ledi t commissaire Iranspol'té
SUI'
les
lieux d~ la comodilé ou incomodité que
Saint-Chamaz pou,' la vuiùe,' a la ffiCl', et de laire et construire de ladicte eau
et partout le long de sondicl béaI et dérivation el en rel lieu que bon luy sem-
Jadicle eau se pourra conduire, moulins, ang;n d'eau , usages et
aullres utillités qu'il se pourra advise,' de fai" e a son proffict, et pour en jouïr,
user el disposer, tant pour luy que pou,' sesdict, successeurs quelconques, comme
de chose propre et pour le se",'ice et comodité desdi ctes commu naul és généra I ~ me nt et pal'liculièrement, et sans que lesdictes communautés et particuliers
hlera et
OQ
d'ice IJ e ne aultl'es ne puissent prendre de Pea u ne s'e n servi r sa ns le congé et
exp,'esse licence dudict de Craponne, et ce a pei ne de ci n~uanle livres
tournois, aplicables 1. moi lié au Rayet l'a ultre moiti é audict de Craponne,
pour cbascune fois qu'il sera conll'ave nu , sinon que aux li eux qu'aultrement
avoit esté accordé cl convenu par ledict.de Craponne, a ,la charge qu'iceUuy
Adam de Craponne se,·vi... au Roy pour ladicte pri se de ladicte eau un escu
sol de censive annuellement payable a chascune feste de 1. Toussaint, elc.,
pourra estre au Rayet a la chose puhlique, au.oy du faiet ulilJité et proflict
de l'eau que ladi cte dél'Î .alion pOl·tera aux man ~ns { et habitan!s de cbascuu des
lieux et lerroirs pa,' lesquelles I.dicte fau sera dériVlle Aullt'e et seconde
subjets ùudi ct seigneur qu e la présente licence et permission ils laissen t et souf-
requeste par ledit de Craponne présantée, tandante afin d'ohtonir 'Iadicte lic~n ce
quelco nques a l'ad,,eni,' plainement et paisiblement sa ns en ce luy {aire metlre
et permission. Conclusions prises pa~ le susdicl procureur du Roy sur 1" oommunica tion à luy faicte du susdicl procès-verbal , infvrmalions e l procédures
du susdict commissai.'e, pa,' lesquelles il n'empêche la licence et , dérivAt;on
ne so uffrir est l'8 faiet, mis ne don né auleun trouble, deslourncr, ernpescher au
avec les quall ités et conditions requises pa,' les manallS c t hahitants des susdicts
lieux, et a telle et certaine censive qu'il plaira a la susdicte chamhre arhitrer
au proffict dudict seigneu,' et sans préjudice de ses droits, e t considéré mesme,
l'augmen tation et accroissement proflict et utillité de lA chose publique, AvONS
DONNÉ ET DONNONS , par ces présantes, congé, authorité, poul'oir et licen ce audict
Adam de C"aponne suppliant, présant, stipuHant et acceplanl rO\ll' lui , ses héritiers et successeurs de prendre l'eau en ladicte rivière de Durance el faire la p"ise
escluse de ladicte eau au terroir de Janson pour ra conduire et déri;:er par un
béaI et fossé de la largeur et profondité que verra 1uy eslre nécessai ,'e p al' lediet
terroir et par les terroirs de la Roque et Saul'ecane, Valhonnelle, Mallemort,
Allein, L amanon jusques et . u-dedans du lerroir de S allou , et dudict Sallon
par les terroirs de Lançon et Cornillon jusques el au-dedans du terroir de
elc. SV
DO NNONS EN il AN OE1ŒN'T
pal' ces présentes a tous officiers, justi ciers e t
fl'ent pOUl' c n user ledi c t de Craponne suppliant, ses hél'itiel s el successeurs
con traiJ'e sin on en temps qu'ils se l'ait par nous con\·enu ou ordonn é sur Pex-
position par les pl-étendants et intéressés de laJic te liccl1ce.
«( Donné à Aix, so nbs nos signés et 5céel de nos armC!i, ce dix-sept JOUi' d'août
1554 . (Signé) H. ARBAUD, R. TGECU' ENES el Bo,ssol". "
Le deuxième titre de l'Œ uvre de Craponne es t la transàction du 20
octobre 1571, notaire Catrebards à Aix,
Par cet acte, une société civile est formée par les diverses personnes
à qui Adam de Craponne avait vendu, cédé, ou transporté les facultés
d'eau, d'usines et d'arrosage de son canal, à l'elTet d'entretenir, conserver et maintenir à perpétuité le canal qu'il avait crllé. Elle se charge
aussi à perpétuité de fournir à toutes les dépenses nécessaires, soit à la
prise, soit au canal, soit aux ponts et fossés communs" -, E,lIe prend
ainsi sur elle toutes les charges qu'Adam de Craponne s étaIt Imposées,
2
�-11-
10 De son coté, Adam de Craponne cède et transporte à cette société CIvile tous ses droits sur le canal et la substitue à sa personne ,
au li eu que sera avisé pal' le 2it de Cl'aponne, sans qu'il soit tenu de rien
Sur le premier point, la transaction de H>71 dit, p, 8 do l'imprimé:
l io ll à lad ite communiou, la SUSd ite sti pulation intenenante, les facul tés, com-
A cette ca use les susdites parties pour oLvier aux susdits inconvenien s, et
modi tés, droi ts, l'o isons et ac ti ons, profi ts e t émolu ments qu' il a de présent ~
à ce que chacun e d1ice1les pArties puisse à J'A\'enil' avoir d'eau à suffisance pOUl'
ou se pourrait faire à l'avenir pour raison de l'eau de DUI'ance, e t pal' le rnvyen
lous le ul's mo ulins. engins , facu1tés e t al'l'osages, suivant 1es quanti tés d'éau à
dudi l cauol lant fait
chacun es d'icelles pa"ties respec livement promises pal' ledit noble Ad.m de C,'.-
Cornillon et S'-Chamas , lIue par le moyen et constru ction des moulins et autres
ce fa~les ., d'uli bon et commun
engins, ain$Î comme sera avisé de faire par !"dill:! com munion au profit d1jcelle. }
c{
panne par le urs ac tes, ct conv-entions
accol'd,
p OUl'
SUL'
payer pour ledit ..... osage à lad il e cO llllllunion, et néanmoins ledit Dominicy
P rocUI'eur 6u:;ùit a cédé, remis e L transporté par '-er tu de la présente tran li ac-
qu'~
faire, tan t pOUl' l'arrosage desdits lerroirs de Confoux ,
eux : )em's hél'itiers e t successe ul's quelconqu es à l'a ''enir, se sont
associés et associent pal' l'el'fu du présent acte d'accord , à toujOU!" et perpé tuelleme nt en la meille ul'e forme et maniere que se lIeut f.ir e de droil, pou,'
Puis il termine, p, <14, par ces mots:
« Promettan t ledit Dominicy lesdits droits et facultés , noms, actions, pr06t,
désormais e nt,'" lenir la prise, grand canal, PO)ll~~.t foss~~ communs d esdil es
et émoluments dcs dits arrosages, engins et moulin s respectivement faire avoir
eaux de Durance nécessaires et à suffisan~e II0U)' toW I ~~ susditsengins,facuJtéset
et tcnir à ladile comm m1io n , ct lui ê tre tenu de tout e è \i cl ion eL garantie
arrosages, e t ce aux communs dép~ Qs des d\~s }assçciés, JeUl's hoir~ e~ successeul's
quelconques à l'avenir , suivant la cole ~ t 4~ pa\' lce'lt~ n\ que en sera ci-apr~s
fait, dit et déclaré, aux pa ~bes, qualités le t ,~ on~itjplls suiva'1tés, i'
Sur le seco nd point, l'acte dit, p, ,1 3:
r
Domilli cy son P,'ocu l'eUl' et moidit Notaire stipulanl PIl UI' lui , cie l'entrelienne-
!
1
" Item a été t,'a usigé, convenu et accordé, que 'ledit Mal lre Dominicy , Procureur e t au nom dudit Adam de Craponne, cn récompense de tous les frais ,
mises e t dépe ns qu e désormais co n'lieodroient faire pal' ladite communion ,
tan t pOU l' la facture et ent,'etènement desdites prises, grand canal et foss és
communs, sera te nu baiJJ er, céde l' el' reme ltre , comme pal' vertu de la presen te
transaction, cède et reme t el perpétuel leme nt 1,'an'po,'le ausdits associés el
communion susdits prése ns et stipulans lesdits associés pOUl' e ux el les leUl's ,
hoirs et successeurs quelconqu es, avec moidit Notaire, tan t pou ,' lesdi ls absens ,
que
p OUl'
générale et particulière de d,'olt et de f~il en forme: Et moyenant ladite cession el transport, c l icelui sortant son plein et entier efftt, el 110n autrement
la snsdi te co mmu nion et as,odés 8n t quillé et quittent ledit de Craponne, ledit
e t au nom de ladi te communion, tous e t chacuns les commod ités,
facu ltés, d,'oits , aC lions, raisons , profits et émoluffi6n ts d es arrosages , que ledit
Adam de Craponne a de présent , et que se pourront faire à l'aveni,' d e l'eau
de ladite prise 011 prises de Durance, et par ledit s,'and ca na l audit terroi,' de
Sauvecane, 1. Roque d'Antheron, la Rouyere , Valbonnelle, Mallemort , Allein ,
Senas, Lamanon , Salon , et jusques à la pal,tie dndit Pélissane , fors et excepté
la /acuil é de pouvoir a,'I'osCl' quatre soucheirades de pré au T enoir de Lamanon ,
me nl de lo ute la susdite prise, gnnd canal e l fos sés com muns, promettant
n'c n faire jama is ores c l pour l'a\'enir aucune pé titi o n ni demaude, )
Le surplus de l'acte renferme les statuts de l'Œuvre: le r,è~leme~t à
l'aide duquel le canal devra fonctionn er, son mode d admInistratIon ,
les cotisations à payer par chaque membre de l'Œuvre , le mode de
les établi r les voi es d'exécution pour les recouvrer, en un mot tout
ce qui cs~ nécessaire il la cons\it~tion de cetle gr.ande société, C'est
uri monument remarqu~bl e de la sa,gesse de nos pères, de leurs profondes prévisions sur toutes les nécessités de l'Œuvre de canallsa,IIOIl,
si glorieusement faite par Adam de Craponne, et de leur aphtude
créatrice; car s'il a fa llu à cet homme illustre du géIlle pour créer, Il
il a fall u encore à ses successeurs du génie pratique pour conserver ce
qu'il leur avait transmis, et pour le transmettre il leur tour aux Siècles
futurs dans toute son intégrité,
�- 12
Un trojsième titre, consti tutif de l'Œuvre, c'es t la transaction clu 16
février 1583, notaire Catrebards à Aix.
Pal' cet aote, un certain nombre de. particuliers de la ville d'Arles ,
associés aux fI'ères Raval, ce&sionnaires dl:l droit qu'avait eu Adam de
Crapollne d'agrandir le canal , de dériver d'nutres eaux de la Durance,
et quj les avaient en effet oonduites dans la ville d'Arles pour y ali menter des usines et y créer des arrosages . traitent avec les auteurs
de la transaction de 1571, transigent sur les difficultés que cette situation nouvelle pouvait faire naltre, s'unissent à eux, acce.ptent les règles
posées pa r celte charte et constituent, dans l'ensemble de l'Œuvre générale de Craponne, l' ŒuvTe dite d',ATles , comme la transacti on de
Hm constituait déjà l' ~uvl'e 4ile de, Salon. C'est-à-dire qne ces , de~x
bra nches principales du canal de Craponn e sont dès ce moment reconnues so us ces deux noms qu'e1ljls Gonservent en<lore aujourd'hu i.
L'acte dn 16 février 1 58~ Sil confond ,et s' unit à celui du 20 ~oto
bre 1571. Ils ne fqnt qu'ulJ, \,et le~ dHnx rbranches du canal sont so umises au même règlement que cont\)nait celte,demièlle transactl~n. Si
donc l'acte de 1583 n'çst pas un titre constitutif, dans ce sens qu 'il
n'a pas contenu le règlement du Qanal" il l'est dans ce sens qu'il est
constitu tif des règles intéri eures qui gouvernent les deux branches du
canal entre elles , qu 'il fixe exactement leur position, et qu 'il préyient
ainsi toute confusion et tout désordre dans ces deux natures d'associés.
L'énumération des titres généraux de l'Œuvre générale de Craponne
doit s'arrêter ici. Si l'on voulait entrer dans l'exposé des titres parhculiers, on n'eB finirait plus. Il. fa udrait surtout relever et suivre de
~ècle en siècle les nombreux arrêts du Parlement de. Provence qui 'ont
statué sur les difficultés diverses que durant le cours des siècles l'intérêt personnel a fait naitre. La oollection de ces arrêts form erait un
code précieux. Il faudrait aussi colliger les arrêts rendus par la co ur
impériale d'Aix depuis sa création jusqu'à nos jours. Il faudrait aussi
raconter les plus graves et les plus sérieuses délibérations de l'Œuvre
•
- 13 qUI, avec une sagesse rarement contestée, ont pourvu au x nécessités
quotidiennes de la marche d'une société si importante. Il faudrait surtout parler ici avec détail du rapport imprimé de la commission de
l'Œuvre de Craponne de 1-823, qui a répandu tant de jour sur la situation de l'Œuvre , qui a placé en regard des jouissances et des posses-sions les titres qui les autorisaient , qui a marqué en qu oi ces titres
étaient dépassés et ce qu'il faudrait faire pour ramener les possessions
aux titres. Jamais, mieux qu'à celte époque, l'Œuvre de Craponne ne
manifesta la vie et la force qui se trouvait en elle 1 Jamais un corps
ne montra mieux qu'il est maître de lui et qu'il peut se conduire luimême ! Jamais l'Œuvré de Craponne ne prouva mieux qu'elle n'a pas
besoin de tuteur, et que son œil vigilant suffit et peut suffire à ses
nécessités.
üo bten l(!) n s-no~l! donc d 'â voir , ~ar ce court exposé général , montré
que l'Œuvre de Cmpanne a dés droits sérieux et réels au respecl de
tous et à celui de l'administration . Non-seu1emdnt celte société possède
des \litres cOBstitl'l lirs co mpl ets ~' 'elltiers, sages et réglementaires, éprouvés par trois siècllls de prospérité, mais encore elle a sa jurisprudence
dans les arrêts du Parlement et dans ceux de la co ur impériale d'Aix.
Que lui faut-il de plus pour vivre? Et quel besoin a-t-elle des règles
nom-elles que l'administrati on veut lui imposer ?
Dans ces derniers temps, l'administrati on , en élevant la prétention
de faire prononcer la déchéance de la conGession de 1554 faite à Craponne, a donné naissance à une déoision remarquable d~ consèil ~'État,
qui doit trouver ioi sa place. Elle form e, en effet, un titre que 1administration ne saurait réouser, puisqu'il a rejeté la plus grave de ses
prétentions.
.
Le 19 mai 1856, M. le ministre de l'agriculture, du commerce et des
travau x publics, éorivait, dans une dépêche sous celte date, à M. le
préfet des Bouches-du-Rhône:
« Par applica ti ou des instructions contenues dans ma dépêcbe du 29'
�- 44août '1854, vous avez pris le 25 juill et derni er, un arrêté tendant ù
meUre l'Œuvre générale de Craponne en demeure de fournir dans un
délai de trois mois, la preuve qu'elle est eu mes ure de fon ctionn er d'un e
manière efficace, et en outre, de produire un rôle de distribution des
ea ux , app uyé sur l'encadastrement des surfaces arrosées' j ,
« En cas d'inexécution de ces clauses, votre arrêté porte, qUe la déchéance de l'Œ uvre pourra être prononcée à la dili gence de l'administration, et qu 'il sera pris par elle telle mesurf1 qu'il appartiell9ra. " . .
.. ... ... . .. . . ..... . ...... .. . . . . .. .. .. . .... ......
,
,
"
. .. . .. .
« J'ai reconnu par (lécision en date oe ce jour, que si l'Œuvre générale de Cra ponne n'a pas satisfait pour le 1" octobre prQchilin, à toules
les prescriptions contenues dans votre " I\\"rêté du 25 juillet dernier, la
déchéance devra 8t1'e prononcée pm' l' g,P.mil!fstra.tion, çon(ol'1némcnt à
la décision d~j 29 aotÎ,t 4854, et qu.'A devra être ppuml, immédiatement
par un règlement d'a,dministration puhl~\lu,e, ~
n;pa,r!j,l(on des eaUA
du canal el de ses dépendançes. 1) ,,'] ,r l "1'
L'Œuvre général e de C,aponne se ,pourvut dGva,nt le conseil d'État, _
contre la décision ministérielle du 19 mai 1856, pour incompétence
et pour excès de JiOt~vQÙ's.
Voici co mment le recueil des arrêts du conseil d'État , publié par
MM . Lebon et Hallays-Dabot, page 118, année 1859, ex pose les réclamations de l'Œuvre de Craponne, le système so utenu par M. le ministre
des travaux publics pour défendre sa décision , et final ement l'arrêt du
conseil d'État du 10 février ,1859 , qui refus e au ministre le droit d'interpréter la concession faite à Adam de Craponne, et qui déclare que
ce droit ne lui appartient pas.
m
-
15
usage rs e l un plan des surfaces al'I'osées ou arrosables par le ca nal, e t de fo urnir
la preuve qu'eHe es t en mesure de pourvoir il l'enlretie n e l à l'alim entation du
ca nal , et l'''' laque tl e noire ministre a déclAré que, si rOEuvre de Craponne
n'avail pa s obéi à celte in jon c lion avau t le 1" oclobre de lad il e année 1856, 1.
co ncession donl
eHé jouit,
co rn'me étant aux dl'oit s du sieul' Adam de CI'al'0DDe,
serait i:é \'ocJuée, et qu'il serail
POUl'VU
'par un- l'èglement d'administration pu-
blique ~ la dislribution des caux du caDal e t de ses dépendan ces;-
CeJaisant,
"dire qu'e n vertu de l'acté de concession passé, le 1'1 aoû t 15 54, au profi t du
sieur Adam de Craponne, par h Chambre des comptes et arcbives du roi en
P"o,"eOce, l'OEune de Craponne a le dl"Oit de dériVe!' de la Dur.nce Iou les les
eaux dont eHe pourrA avo ir be~oi n e t de disposer desdites eaux comme elle
l'ent e nd et sans Je
ontl"ô1e de l'administrati on ; dire , e n oull'e, (Jue, les ca naux
de èl'érÎ\'<'I tion ayant é<lé \constl'u-jt ~\pa\' lé sieur Adam de Craponne el ses successetll'S SUlJ 8es 1 let'l'aÎrts qUi leur appartenaient, l'OEuvre de Craponne est
. ujoul'd'hui P,'op,"iét àil"e d~ ces dD.ux ; de leu\' lit, de lem s francs-bords et de
tous les ouvl'.ges d'.rl qui en dé pendent; qu'. in si la concession d'e. u dont
jouit l'OEuHe dé O"' POllrl , eo verh de l'acte , sus\'isé du 17 août 1554, est
illimil ée e t il'févocalJle ; déci J,",,', eh éouséqu en ce, 'lue l'OEuvl'e ne peut ~ tre
d é possédét: de sa prise ù'ea u e t J e ses canaux de dé rivation gu e
pOUl'
ca use
d' utililé pubJîque e t Gonformément à la loi dn 3 mai 184 1 ;
« Vu les observ. de noire Min, des Il'av, pub"
le nd.n t à ce qu'il nous plaise,
alt.endu qu'en faisan t à l'OEuvre de Craponne les i ujoD ~ lions co~ t eD ~ e.s dans
la déc isio n allaquée, notre ministre a donn é l'interprétatIOn des dlsposlhons de
1'.cle du 17 août 1 554, e t qu'il nous appar tien t de connaltre en appel de cette
inl eqH'ét. tion
fond sur son
,'ecevoi7' le potl1'Voi de l'OEu,,,,e de Cr.poone; et slalu.nl au
~ou1'\'oi ,
dil'e qu e la concession des eaux de la Durance faite a,u
sie ur Adam de Craponn e, sqn aute ur, n'est ni illimilée, ni . . . il'l'é ~~cable; ~als
« Vu les requê tes ... pour l'admiuistration de l'OEuvre du ca nal de Craponne
(Bou cbes-du-Rh ône), poul'suites et dilige nces du sieur Gabriel P aya n, son syn-
qu'il nous plaise ann ul e r , - pour incompé tence
uoe d écision du 19 mai 1856, p.r laquelle noire
dic direc teur ... te ndant il ce
et excès de pouvoirs, -
Mio , des trav, pub. a enjoiot à l'admioistration de l'OEu,","e du canal de CrapODoe de produire un ~ Iat coostatant les quantit és d'ean distribu ées en lre les
u'i1 résulte, .u contraire, des dispositions de l'acle du 17 ao ut 1554, que 1ad-
~inistralion a le droit de détel'lnin er , d'après les besoins de l'OEuHe, la quan tité
c~lIe-ci sel'a admise à dé l'Îve l' de la Dura~~e, e t qu'en outre, la c,on-,
d0 0 t 1"1 S' Agi' t n'a e n' li e u que sous la co n,llllOo expresse que le sle
m
,
d1ea u qu e
"
cesS IOn
Ad am d e C l'apon llc e t ses successeurs en' useraien t daos l'iutér~1 t de• •l'agrlcul•
" d'ou' il suit qu'elle peut ê tre révoquée pa,' 1 ad mlblstrahoo
ture e t cl e l,·III dust l'le;
�-
16 --
- 17 10 canpl, (lI les conséquences qui en dé[Lvent par rapport au projet du
pOUl' ca use d'inexécution de celte condition; en couséqueo ce, maintenil' la
décision attaquée; -
ensembl", le l'apport de l' ingénieul' e n chef, en dale du 15
rrgl em ~n.\
que l'administration veut établir. rn
Depuis l'arrêt du C)@nseil d'État du dO février 1859, ~1. le ministre
n 'a lP S pl' voqué l'int~ rpr,e tatio\l du titre d~ 1554-; il n'a plus renouveléeses fn~naces de déchéance. ~l a laissé l'Œuvre généralo de Craponne
jov ir d 1 ,Ses dro~ts el açcomplir sa hienfaisante mission ,
Seulement, vers la fin d'avril 1862, l'administration a fait publier dans
'"
les co mm.unes traversées par le canal , le rapport de M. l'ingénieur en
chef du 2&, janvier 1862; et le projet de règlement d'administration publique du 27 avril 18601 ct une enquète a été ouverte dans ces diverses
commu
es, sur 1!J'contenu
dp.Tl ce deux pièces impor tantes.
-'-;))/1
f U
t'
i
féniel' 1858, auquel Dall'e minis Ire déclare se référer;
" Vu l'acle de concession des eaux de la Durance passé, le 17 aoûl 1554 ,
par la Chambre des comples et archives du roi en Provence, au profit du sienr
Adam de Craponne, et les h 'ansaclions de 20 oclobre 1571 el 16 fé"I'ier 1583;
" Considéranl qne, pour défendre au pourvoi de l'OEuvre d e C,'aponne, noIre
Min. des trav. pub. a soulenu qu'il résultait des dis positions de l'acte susvisé,
e n dale du
17 août 1554, que la concession dont jonit l'OEnvre de Craponne
n'est ni illimitée, ni irré"ocabIe; mais qu'il n'a pas form é devanL nous, à qui
seul il appa rtenait de la donner , une demande d'interprétation dudit acte, et
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(1
1
!
que, pal' sa décision attaqu ée, il s'est borné à e njoindre à l'administration de
'"
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LEfS JvaiUlr tex-ttlellement te'prb'duitM.'
dish,ibnées aux nsagers , avec nn plan des sn l'faces arrosées ou arrosables par
1
2s1df
le ca nal; 2' de justifier qu'elle est én mesure de ponrvoir à l'enh'elien el à
!'l o~Hh'l
l'OEuvre de Craponne: l ' de produire un élat conslatant Jes lquan(ités d' eau
l'alimentaI ion du canal, et à déclarer que si, dans nn délai déterminé, l'OEuvre
de C I'oponne n'avait pas obéi il
eu vertu de l'acle du
~ette
injonclio ,
i. ~o
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es ioJ do J t
~lIe
jouit
17 août 1554 serait révoquée, e t qn'il serait pouvu par
un règlement d'adminislration publique il la répartition des eaux en Ire les pro-
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projet ,de règlement.
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(l) rt ' sai t qùe le ha nal 'ile Craponne a été oonsl l'ui t
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Adam de Craponne,
pl'iél ai,'es et les usiniers; qu'ai nsi ]a décision de notre ministre n'est qu'uu acte
e n vel'tu d' uue èoneessioll 1\Ii le par les 'j>résiMnts et mallres rationaux de la
comminatoire e t de mise en demenre, qui ne fait pas obstacle à ce que, dans le
Glîo mbl'e de comtes
lié Provence,
Je 17 aoû t 1554 ,
cas où il serait donné suite il la déclaralion qu'elle con tien t , l'OEuvre de Cra-
-" Les ayot\t,,-cause' d'Adam de Craponn~ sont l'ep''ésentés aujourd'hui pal' un
ponne fasse valoir de van t l'autOl,il é compétente tous les dl'oils qu'elle croit lui
, c~l'Iain nombre d'Jsagers et arrosa nts réunis eu un e société civile désignée
appar tenir, et que, dès lo rs, ladite décision ne pe ut pas être attaq uée devant
nous pal' la voie contentieuse;
soule nom de 'l'OEu ... e générale Ile Craponne, laquelle est substitu ée à tous
Art. 1", L. requê te de l'administration de l'OEuvre du canal de Craponne
est rejelée. »
cess:ion~,
f(
Dans cette luite, c'est le droit de l'Œuvre de Craponne qui a triomphé. C'est le système du Il).inistre des travaux publics qui a été proscrit.
Inutile dE) le montrer en ce moment. Nous le ferons avec beaucoup
plus de fruit, lorsque nous exposerons tout à l'heure le droit qui régit
les droil s, co mme elle est soumise à Ioules les obliga lions l'ésult ant de la <onl
'I!J
1
1
If. 111
" Le tilre de 1554 est tl'ès-incomplet. Il aulorise seuleme-;'I Adam de C raponne
à constru ire le canal dont il s'agit et à dériver de la Durance les eaux nécessaires pOUl' l'. lime nter, Il assigne au ca nal un but d'utilil é publique. Sa destinaliol' ~st.de servir à l';,'rigatiou el 'à la' mise en jeu des usmes qni sel'ont établies SUI' sou cours. 11 désigne les territoil'es sur lesquels les eaux pou ....ont
être portées, mais il n/indique pas qnel est l e volume qui pellt être dérivé de
la purance. La Goncession à cet égard n'est pojnb difinie, mois 1'.dministratiolT,
3
�d'accord avec le conseil d'Etat,
li
-
18-
toujoUl's admis qu'en pareil cas, ' le gouver-
lIement a toujours le droit de limiter le volume concédé, aux besoins réels dès
leni toires pout· lesquels le cana l
0
été autorisé et construit. M . le mirilstre
des " 'ava ux publics l'a formellement d~cla\'é dans une Ilépêclle en 'da te du 19
ma, 1856.
1
« D 'autre put, ~e titre ne co ntient aucune disposition ayallt IraÎ Laux droi ts
nement suffisant
pOUl"
,t9 -
satisfail'e à tous les intérêts, surtout si l'on a soin d'em_
pêcher les pertes d'eau et les abus qui peuvenL exister enrore dan s certaines
localités.
,
.
« En fa iL le canal de Craponue ne dé,'ive j~mais
plus de 10 meLres cubes, c'est ce qu i
effectués il dive,'ses époques,
8
Cil
,
étiage de la Dm'Ance
\"',
été conslaté pa,' tous les jau geages
de contrôle et de surveillance que l'ad ministration doit conserver sur le caDal,
« Ainsi les ingénieurs des dépo,'temellts des Bouches,du-Rhône et de Vau-
pour eu ass urer le bon fonctionnement dans l'intérêt des usagers , et pour qu'il
cluse, prenant en considération les besoins du cana l el le volume effecti vemen t
aUeigne le but d' utilité publique eD vue duquel la concession a é té fai le. Cette
déri,'" en é tiage, ont~ils admis, dans le !"appod qu'ils ont présenté
double lacune dans le titre de concession demaude "à @tt'e comblée.
sultal du jaugeage de la Ducance, eu 1858, le volume de 10 mètres cubes par
SUi'
le ,'é -
" Toutes les eaux de la Durance , daDs les bas étiages, étant concédées, 11
"secoude, comme ~evap,l représenter la dolation nOl'male du canal de Craponne,
impOl'te en effet de définir exactemenele volulne d'eau attl-ibué au canal de
Or, ainsi que nous l'aV?llS dit ci· dessus, toutes les eaux disponibles de la Du-
Cnponue, pOUl' évite r toute contestalion a,,'ec les auths concessionnaires, Il
ran ce, en. élinge., sont concédées el
importe aussi de déterminer d' une manIère précise l es "bbligati6ns du conces-
plus de 10 metres qubes sans êtr~ da~s l~ néc,essil é de réduire d'autres Conces-
t
sionnaire, en ce qui touche Pentretien let l .lalim èntatio'n
du cana]
ét les
l'ègles
que l'administration devra obse<-ver, lors'lue à' d~fall l hdu 'concessiollna i\'e, . lle
sera appelée à pou t'voi t, d'office à cet entretien et à cé W l aliJ,~nlation. Pa,' ce
moyen on préviend ra toute difficulté avec le con'c essionnaire et toute hésitation
de la part de l'administration,
« L'OEuvre du canal de Craponne a compris elle-même l'utilité, et même la
nécessité, d'un pareil règlement, car le. membres qui composent cette société
.ont les plus inté,'essés au hon fonctionnement du canal, el ép,'ouveraient de
r;nndes perles , s'il cessait d'être hie~ entretenu et bien alimenté, t'OEuvre a
donc sollicité le règleme9 t et e n a posé les bases dans une délibération en date ,
du 26 février 1860.
e.
« Le projet de règlement que no us avons présenté le 27 avril 1860 et
t .. ,
'f,"
'
ui
q
cl'Jomt, satlS a,t a ceHe demande; t,outes ces dispositions se jus ti6ent
~'elles-mêmes, à la simple Jecture; un seul point a besoin de quelques explicahons.
" L'OEuvre a émis le vœu que le volume d'eau qu'elle pourra dériver de
la Durance, en étiage, soil fixé à 12 mètres cubes paf seconde. Nous proposon s
de limiter ce volume à 10 mètre. cubes.
« L'expérience démontre en effet que le volume de 10 mètres cubes es t plei-
00
ne saurait attribuer au canal de Craponne
sions postérie ures, Four ~dIlP\e'l un pareil parti, qui aurait pour effel de p,'iver certa ins territqires des al' 'osages dODt ils sonl en possession, il laudrait
évidell)menl '1u'il,fttt biel'. dém9n tré, et c'est,ce qui n'e ~is te pas, que le l'olume
de 10 mètres cubes par seconde est tout à fait insuffisanl ~ u canal de C,'aponne.
Nous espérons donc que POEuvI'e eHe-même el les autres intéressés au canal
reconn.ttront le bien fondé de noire proposition,
(, La limitatiou du volume dérivé de la .-iviè,"e n'a d'aille urs d'effet que pour
la saisoll d'éliage, qui dure peu, et en dehors de ce tte saison, l'OEuvre pourra
pren dre un l'olume plus grand, si elle le juge convenable, poUl' dessen'i,' largement tous les besoins,
« L e principal membre de l'OEul'I'e s'étanl troul'é, ell
1849 , dans l' impossi-
bili té de paye,' ses cOlisalions, l'OEuvre n'avait plus les moyens d'assurer l'entretien et l'alimentalion du canal. M, le p,'éfet fut alors dans l'obligation, pour
empêcher la ,'uine d' une fou le d'inlé,'êts, de placer le canal sous le séquestre;
ce séquestre, qui remon te à l'année 18 50, existe encore aujourd'hui; il est
adminis tré pa,'
1111
syndicat inslitué par a.... êté préfectoral et composé des maires
des communes intél'essées.
« Ce provisoire ne pellt dure,' indé6niment, Il importe d'y meUre 6n pour
rentrer dans une situation régulièl·e. Les circonstances qui oot nécessité Péta-
�-
20
- 21 -
blisseme nt du séquesll'e ont cessé, Les membres de l'OEuvre sont d'accord
CI'<1ponne, conce,lisionnail'c primitif dudit ca nal, seront enh'elenus constnmme nt
mA inle nan t et- d e m3nù e nt tous à l'entrer dans l'adrninish'O lion d\l cana), qui est
e n bOIl état , de manière que l'écoulement des eaux y soil toujours fa oile et
leu,' pro prié té. L e règleme nt uue fois fait permet de satisfaire à- cette demande ,
S\'II' .
sans dange r pou,' les intérêts gé néraux du p.ys , car si l'OEuvre néglige.it ou
refusai t d'entre lenir ou d'alim enter le canal convenablement, le r èglement
charge Padministl'atioo de po urvoir d'office, et _immédiatement à cet entretien
e t à celle alimentati o n , et ass ur e les ' JUoyens finan ciers de payer les dép ens es
qui se raient ainsi faites par ses ord l'cs.
" Le règlement répond clone à tous les besoins. Il clé6nit les droits clu concessio nnaire Ol\ cana ~ de Craponne sur les caux de la Durance , pal' l'appo l'~ a ux
au ll'cs concessionnaires de ceUe rivi èr e, ses ohligatious en ce qui ,ou che J'e ntretien e t l'alim en tation clu canal, les droits de con trôle et de surl'eillance de
l'adminisll'ati on po ur assurer d'une manièt'e régulière cet e ntreti en e t ce lt e alim entalion . Il pe:'met de
re~(J..e
à l'OEul'I"e, saqs
da~ger
raux du pays, 1 adnuUlstr. tlOn de son canal, de sa
1. libre disposition depui s
rouI'
le~ inté"ê ts
gé né-
ropri été do nt ell e n'a plus
1850, mais dans la possession plein e et e nti ère de
~ .q~f ll e la j~s ti ce veul qu'e lle r ent" e du mome nl que les circonstances qui on l
lusltfié 1. nllSe
SO UE
le séques tre n'existent plus.
" No us es péro ns dou c que tous les intéress és apprécie ront l e but et l'utilit é
du règle ment pro posé , et y do nneront le ur assentiment dans l'enquête à laquelle il sel'a soumis. })
M"'seille, le 24 janvi Gr
1862.
L'Ingénieur en chef
(Signé)
cl~,
dépm'lemen l ,
PERRIER .
«
Ces canaux sont.:
" l ' L e g.. and canal ~ de puis 1. prise
e~
OUl'an ce jusqu'nu point de partage
des b"anches de Salon el d'A,.]es à L amanon;
" 2 ' La branche de S alon, depuis Lamanon jusqu'au p oint de partage de
Tallaga l'd;
" 3' L. dérivatio n sur Pélissann e, Lançon et C ornillon , depuis T allagard
jusqu'à la Touloubre, sauf le tron ço n compris enl .. e le pont des Extrait s, p .. ès
de Salon , et r~nt.·ée du (e.... itoire de P élissanne, qui appartient en prop" e à la
1
,
ville de Salou ;
,
" 4' La dé .. ivalion de Tal hga rd" sur le moulin des Quatre-Tournants , jusques
1\1
1
e t y co mpris le fu ya nt de ce moulin ;
"
(
50 La dériv ation S UI' Istres,l Grans,
Miramas et Saint-Chamas, e ntre le
pont Pa .. ad is, su,' l~ b" an~he ~'A rles, et le point de part age de Canebière,
,
p" ès Grans.
j,
.« Le grand ca nal d e vra, c n oull'c, êtr e constammen t .aliment é d u vo lume
d 'ea u nécessa ire au x irl'iga tio ns e l à la mise en jeu des usin es
~
sans toutefois
po uvoir dépàsser, e n temps d'étiage, le volume fi xé par ] lad. 2 ci- après.
(( Ce vo lume sera dis tribué entre les memb,'es de POEuYl'e et les autres co ~
usagers, soit al'rosants, soit usiniers, conformément aux droits des parties.
cc L 'état d~s divers canaux désignés ci-dessus sera reconn u ann uellement et
plus so u,'ent , en cas d' urge nce ou d'accid ent , pal' Pingénie ur en ch ef du départem ent ou p al' un des ingé nieurs ordinaires so us ses ordres.
«( Les frais d'e nll'e licn , d'alimentation et (',eux de réparations , soil ordinaires,
l
Projet de règlement d'admioistratioo publique . pour compléter le titre
de la concession.
«
ARTICLE
PIIEOIlER.-L e canal de Craponne et autres ca naux qui e n dépcn;
dent, apparlenant à la société civile désignée sous le nom d'OEuvre gé nér ale
de Craponne, substituée aux droits comme a ux obliga tions du sieUl' Adam de
soit ex traordinaires, l'esteront entièrement à la charge de l'OEuvre , so us l'ésef\ es
des r edevances qui pourront lui ~tl'e du es pnr les autres pl'opl'iétaÎl'es usagel's,
dési.nés so us le nom de concessionnaires et {act'lltataires.
b
«( POUl' ce qui C01l ce rne cet entreti en , cette alimentation et les réparations ,
l'OEune demeure so umise au contrôle el à la surveillance de l'adm;nist.. ation.
« Si l es canaux oe son t pas constamment entretenus en Lon état d'écoulement
sur toute leur longueur , et suffisamment alimentés jusqu'à concun'en ce du vo-
�lume qu'ils doivenl recevOIr d'apl'ès leurs titres,
il Y sera pourvu d'office à la
diligence_ de l'administration e t aux frais de l'OEuvre, après une mise en de-
melll'e régulière.
23-
(( Il sera é tabli e n outre, à cô té des ,'ann es d'Adam, une déversoir en maçonne l'ie. Cet ouvrage aura 10 mètres tl e longu eur, et son couronnement. fail
Cil
pi el'res de tai ll e sera arrosé au n iveau du plan d'eau cOl'l'espondant au débit
" AR~. 2.-Le volume d'eau à dé";ver de la Drr.nce po ur ~Iimentel' Le
g"and canal demeurera fixé, pendant l'é tiage de la "ivie"e, il 10 mè tres cubes
, normal de Il 0 metre, cubes; m.is il pourra être surmonté de hausses mobi les
e n 1)!ancHd, en dehors dn te mps d'étiage.
pal' seconde, sous condi tion que les eanx anxquelles ent droi t les moulins de
" Dès qu e 'les eaux dé passeront, en temps d'étiage, la hau leur correspondan t
a,... osages
a u débit normal de 10 mèll'es cubes, lesd ites \'annes clevront être le,'ées par
dans le périmetre de la concession, sel'ont l'endnes dans la Dmance apres avo ir
les agents de l'OEllvre, pour rejeter dans la Durance le ,·olume excédant le
mis en jeu ces usines.
d ébit a utorisé, e t l'am ener les eaux au niveau fixé par ce débit. Les hausses
la Roqne e t de Mallemort, e t qni ne seraient pas utilisées Ilar les
" VOEuvl'e de Craponne es t auto";sée à mainteuir les trois prises qu'elle pos-
mobiles du déversoir devront en ontre être enlevées immédia tement.
sède sur la l'ive ga uche de la Durance eL qui son t désignées sous lei nom d ~ prisf'
" En cas deI r efu s ou de néglige nce de la part desdits agents d'exécuter ce lt e
du Bac, prise du Barcot et prise de Bergeire!. La p,1'~miè,r~ en aval du pont
manœuvre en temps utile, il y sera -procédé d'office, et aux frais de l'OEuvre,
suspendu de Cadenet et les deux au,tr~s en amQnt; mais qnelle~ que so ient
pal' un agent de l'adlninistrati6 n des , ponts et c1,.ussées, et ce, sans préjudice
celles de ces pdses qni fonctionnent, le volume total d,él'ivé, ,ç n lemps d'étiage
de l'applicatioll des dispositio ns pénales, s'il y a lieu, con tre qui de droit , ou
de la rivière, ne pourra dépasse,' le ,' ol"m~ ci-dFs,~,!
de tout e acti on cir ile qui pbu,,!ait êt\'e iutentée à l'OEuvre , à r aison des pertes
~~~.
" A ce t effet , la partie du canal située iDlm éc;lia t e~e nt ~n amont de la martellière de sûreté, en desso us de la prise en Durance dit e du Bac, sera dl'cssée
s ui ran t un profil r ég ulier,
SUI'
une longueur de 2 00 m etres , et garnie; daus celle
,
e t domma.es résultant de ce i·'ef'ù~ ou de cette \\égligence.
t
1
I( Cl
.
,
« ART. 4. - Les travaux prescri ts aux art. 2 et 3 CI-dess us, se"on t exécutes
l
,
,
. é d
1 déla l' d' un
sous la stll'v eillan ce des in génie urs,
Ils" devront eüe
t e l'mlQ sans e
étend ue, de diverses- chalnes de l'erré maçonné. Ces chalnes rég neront su,' le
an à daler de la notificaLion du déc;'et à intervenil'. A l'expiration du délai ci -
plafond et su,' les talus intérieurs; ell es auront un metre de largeur chaque et
de;sus, l'ingénie ur rédigera uo procès-verbal de T'ecolemeDt, aux frais de l'OEu-
seront espacées de 10 metres d'axe en axe.
" TI sera posé an milieu de ladite longu enr , co ntre l'un e des chalnes du perré
vre et en sa présence.
.
« Si les Il'avaux sont exécutés conformément aux dispositions preSCl'ltes, ce
ci-dessus prescrit, une éch elle gl'aduée en ceo tim cH res, indiquilof. d'une manière
procès-verbal se~a dressé en de ux expédi tions. L'une de ces expéd itions sera
parfaitement apparen te, de cinq centimetrp.s en cinq centimè tres, le débit du
déposée aux al'chives (le la préfecture , et la seconde sera transmise au ministre
canal correspondant aux diverses hauteurs d'eau. Le débit normal en temps
d'étiage sel'a marqu é e n caractère distinct de ceux qui désigne ront les autres
débits.
des [ra l'aux publics .
e _ L es dél,enses de toute nature faites chaque année pour frais
" A RT .~.
d
d'adminis l ra tion, d'entre tien , d',alimentation et de réparations du ca nal et e
" ART. 3.-Les vannes de décharge;, établies en aval de la prise du Bac ,
ses dépendances, seront répar ties en tre les membres dePOEuv .. e et les ~ utres
seront conservées dans leur emplacement ct leurs dimensio ns actuelles; ces
proprié taires usagers , dans la proportion fixée par les litres, ou encore d ap,rès
vannes sont au nombre de six, dont quah'e situées au lieu dit Ad'III et deux
les nouvelles bases de l' ti p.n'tition qui pourront être convenues enlre les pal'hes ,
au lieu dit Auddibram. Chacune de ces vannes a 1 mètre 20 centimetres de
ou 'lui seront arrêtées pal' les tribunaux compétents.
" Les rôles de répartition desdites dépenses serout dress és pal' le Il'ésOl'iel'
largeur, et son seuil est à 20 centimètres en conll'ebas du plafond normal du
canal.
de l'OEuvre et "endus exécutoires par le préfet .
�- 25 -
- 24.( Le l'ecouvl'eme nl s'eu opèrera de la m~m e m?llièl'e que celui des contri-
butions publiques, il 1. diligence du trésorier de l'OEuvre.
« ART. 6. -
Le préfet p" endra des arrêtés pour presc,'ire les mesures de
police qu'il jugera uliles et nécessait'es à la conse"vation du canal ct de ses
dép endances, el à la répressio n des abus ou pertes <\'e.u.
« ART. 7. -
Les réclama tions relatives à 1. confection des rôles ainsi que
les cou leslatioLls relatives à l'exécutioD des ll'avaux, seront portées devant le
blics,
-
Iransfe"t au profit de la Caisse des dépô ts et consignations de celles
de res valeurs qui sel'aient nominatives ou à ordre.
R IeC
« Cette somme de viogt mille f"ao cs form era le cautionnement de l'entre-
pri se.
(( Le p,'éfel poul'I'a en di spoS~ " , si cela est nécessaire , en tout ou en partie
pour les paiements des dépenses qu'il ferait faire d'office, en exécution du derniel' p~ l'ag l'ap~e de rart. 1 1er ci·dessus ; mais dans ce cas, l'OEuvl'e générale sera
conseil de préfectUl'e, conformément aux dispositions des lois Ides 28 pl~viôse
an \"11' el 14 floréal au x, ,. sauf recours au conseil d'Etat.
tenu e de complét er de nouveau ledit cautionnement à réquisition du préfet,
el , faut e par elle d'y ' salisfaire dans un délai de trois mois, il daler de la signi.
n ART . 8. - Les délits et contraventions seront constatés par d~ p'oc~,
verbaux dressés par les cond ucteurs des ponts-et-chaussées ou pal' tous ault'es
agents de police, ct se,'ont référés aux tribunau", com'pétents. ~
préfet sur tes memb,'es de l'OEuvre . »
" ART. 9. - Les hono"aires, frais de voyag~s t aut"es d:'iPenses qui seronl
dus aux ingénieurs employés en exécution du prés~nl décret: seront payés sur
les fonds des travaux, d'après les règlements qui seront faits conformément
awx dispositions du décret du 10 Illai 1854.
" ART. 10, - Le sy ndicat cha "gé par arrêlé du préfet, en dal e du 4 jan v'e" 1854, d'eutreteni,' et d/adminislrer p,'ovisbl,'ëmént le canal, Gont/nuera ses
fonctions jusqu'à ce que J'OEuvre générale de Craponne soit "entrée en possession de l'adminislration dudib canal. Celte ~entrée sera prononcée pal' arrêté du
pré~et; mais l'arrêté ne recevra son effet qu'après avoir été approuvé par le
m'filstre des travaux publics.
11. -
il se,'.
p,'oc~dé à l'a purement de sa com ptabilité, et les sommes "estant disponi~les dans
la caISse du recev eur de l'association , après que toutes les dépenses faites par
Ol'dre du syndical au l'ont été payées, seront vel'sées, SUl' un al'rêté pris pa,' M .
Je préfet , daos la caisse du tréso";e,' de l'OE uVl'e.
« ART.
" ART. 12. -
ficalion , elle y sera coolt'ainle au moyen d' un rôle rendu exécutoit'e par le
Dressé et présenté l'al' l'ingénieu,' eu cbef soussigné.
'1
.
b
Marse,lIe, 27 avril 1860.
,
,)
"
1 "
(Signé)
l'ERR IEII .
c l
Ces f!lits et ces dO/JUments rappelés, passons A la deuxième pensée
qui a inspiré ce mémoire. et l'oyons qu el est le droit qui régit l'Œuvre
de Craponne, quel es t son caractère, enfin, quelle est s.a nature juridique et s'il est permis d'y porter des atteintes_
Aussitôt que le syodicat au,'a cessé se. fonction s
1
§ II.
Natore et caractère dn droit qnl réCit et domine l'Œnft'e de
t::raponue.
L'OEuvre générale de Crapoone sera tenue avant d'ê tre
'
,
remise en possession de l'administration du canal, d e "el'Se l' dans la cajsse du
receveur général du départemeut des Bouc!'es"du-Rbône ulle somme de viDgt
mille francs en numéraire ou en rentes
SUr
l'État,
calc~lées
cODfo,'mément à
l'ordonnanoe du 15 janvier 1825, ou eu bons du Tréso,' ou Ruh'es effets pu-
Il Y a ici deux choses très distinctes à examiner. 1° le dr?i\ de
l'Œuvre sur son canal; 2° le droit de l'Œuvre sur les eaux qUi ~ alImentent c'est-A-dire sur la concession ou. la licence de 155&. qUi fuI
accordée' à A.dam de Ct-aponne par le pouvoir souverain. Le co.nttl et
,
�- 26 ses dépendances co nstituent au profit de l'Œuvre un e propriété particulière, patrimoniale, définiti ve et irrévocable. - La concession des eallx
de -f5!)~ constitue ~gal ement un e propriété in évot able; ene est eil outre
illùnme , et elle n'a d'autre mes ure q'ue lès hesoins auxquels elle aoit
Mtisfaire.
Ce que nous disons ici n'est que la ;eproductioll de la d~fense ou
du système qui fut plaidé au nom de l'Œu vre devant le conseil d~État
lors de l'arrêt du 10 février 1859.
•
Âutorisons maintenant ces di verses vérités et justifions-les.
l
l'
J'
t
<b10d-nflllû
U
~
1
t
Il.
r.
I
Droit de propriété pat1'i1noniale de l'(Eu1fre sur le canal et ses
dépl!ndances.
les \
Le droit de propriété de l'Œuvre sur la ~ri se,
JJnau\, leur lit,
les fra ncs-bords et tous lès ouvrages d'art qui eh dépeb'deht, \est évident
de sol.
•
Il 1
\1
Les terrains sur lesquels ils sont établis fure!)t acquis par Adam de
Craponne. Les canaux furent creùsés, et les œÛvres d'ah furent 20ns'truites par lui ou ses successeurs. Jamais l'État n'a fourni UDe obole
Dl pour les uns ni pour les autres.
En outre, depuis trois siècles, tout ce t ensemble a été entretenu
co nservé, maintenu dans un état parfait de fonctionnement, aux dépen ~
de ?raponne .et de ses successeurs, à l'aide de dépenses considérahles ,
répetées de SIècle en siècle, d'époque en époque. A ces' dépenses, il a
été ~ou\'vu par les deniers perSonnels et les co ti sations de chaque inté-l'esse dans ce grand s'ystème de canalisati on , et l'État n'y a jamais
pourvu.
La conséquence forcée de ces faits, c'est que l'Œuvre générale de
Craponne a sur ce canal et ses dépendances, un droit de propriété pa/ri.
-
~7
- ,
moniale, irrév~cilble et in s u ~ceptiql e dl< cqntrqdictioD . C'~s t en ore que
l'État .ne peut, ou soit l'adntinistra~ion 1 I~ lui, \!nl~ve~ directelllent ni
i ndir~ptel\lft~t, ni PW au cut\~ rpefour'1 ..rerdre ,çe canql ~nutile , on~reux,
écrasant pour les propriétaires, sans l'en exproprier pour cal,l~e d'utilité p yWi ~ u,e, et sans lu" ~ n [layer la va~e ur préalablement à toute dépos~essio n. Ef en ~résef/Fe de ce résultat auquel les principes du droit et
de la législation conduisent, on se demande avec étonnement comment
on avait pu pens r un insli,lnt à fair e prononcer 1\1 déch(jancll de l'Œuvre
de Craponn e, sans s~ préoccuper de la redoutable qu estion d'indemnité
qui devait suivre celte solution, au moin s en ce qui touchait les canaux,
leuD lit, les francs-bords et les œuvres d'art qui les accompagnent.
t
, \ \li\\)
~Q If'
\
Le droit
de l' (EuVI'e
SU?' a G
oncessi 'fi, des eaua; de 1554 çst également
1
j ~'H
tt 14 h~
un d1'oit de, pro1J1iiété
irrévocable quant à la concession , el illimité
)1 i lU Il 1 1
quant à la dé rwation.
j
Prouvons d' ~o rd <i[ue la co ncession consti tue un droit de propriété
ùTévoçable sur les eaux. - Nous prou.verons so us le n' 3 , qu'elle est
ILLIMIT EE.
Les termes du ti\re ~e 1554 sont ici à consulter en première ligne.
_ Si le PO\lvoir royal avait mis un terme au droit qu 'il conférait; s'il
avait io,séré dans l'a le lfne faculté de révocation ; si enfin il avait soumis
à un droit de retour, la"faculté Hu'il yonse~tait ~ tr"nspo~ter à Adam
de Crqpoone, il faudrait sans doute subir la loi qui l\li aurait été faite.
,Mais il es t probable que si. de pareilles limit~ avaient été apposées,. Adam
de Craponne aurait refusé le don des ea ux de la Durance qUI lUI au.raIt
été fait d'uue manière si parcimonieuse et entourée de,taot de réserves.
.En eITet, à celle époque de 1554, qui aurait consenti à créer pour
un autre que pour soi le canal de Craponne? A ne r avoir et à ne le
�- 28posséder que yiagèrement ? À enrichir l'État lui-même après quelques
anu ées de jouissance, de tout ce qu'aurait coûté' son établissement, sa
co nfection et son fopct~onnem ent? 11 est douteux qu'Adam de Craponne,
malgré son génie, son amour pour la France, et la générosité de ses
pensées, eùt poussé jusques-là l'abnégation et l'oubli de ses propres
intérêts. Quoi qu'il en soit, il faut bien qu'on se rende à l'évidence ; la
concession de 1554 ne co ntient ni faculté de révocation, ni droit de
retour, ni mème aucune faculté de rachat. Ce n'est pas pour une durée
plus ou moins longue qu'elle est faite. C'est pour toujours; c'est à
perpétuité. C'est pour créer personnellement à Craponne et à ses successeurs une so urce de reven us et de profils. que les eaux lui Ollt été
accordées.
Assuré que l'avantage et l'utilité publique de tous les pays qui allaient
ètre traversés par le canal, se reJ;lcontreraient exubéramment dans
l'œuvre entreprise, le Pouvoir royal C9'I1Sentit à ce pil,cte et au contrat
synallagmatique qu'il renferm.e. D'une part, Adam de Cra.po'Ilne s'engage à creuser et à établir son c~al,. à~n faire les frais, et à l'entre-.
tenir à perpétuité; d'autre part, le .P9uvOir ro~al S'el1gage à lui livrer
les eaux nécessaires, à protéger la perception des revenus qu 'il retirera
de son œuvre, et à maintenir à perpétuité les ea ux qu 'il loi li vre. Ces
choses ressortent de chaque parMe du titre de 1504, On va le voir.
Dans la l'equ~te de Craponne, rappelée par la concession royaJe,
que demande-t-il ? « La permission et licence de prendre pqrtie de l'eau,
en la rivière de Durance, au terroir de Janson, et dudit terroir la dériver
et conduire jusques au lieu et terroir de St-Chamas, et ppw; ce faire,
la passer par le terroir de Laroque, Saul'ecanne, Mallemort, Allein,
Lamanon, jusques audit Sallon , et dudit Sallon, par le terroir de Lan çon.
Cornillon, jusques au terroir Ile St-Chamas. avec pouvoir et autorité
de (aire, tant audit lieu de Sallon qu'en au Ires lieux. :pour le terroir
desquels ladicte eau se dérivera et se pourra conduire, mot.lins et
autres c1\gim à eau" AU PROFIT DUDIT SUPpLIANT. »
Dans la concession, que considère d'abo;rd le Pouvoir royal? L'utilité el l'avantage publics qui doit r\!ssortir d'une œuvre pareille. Oans
•
- ~9 et au nombre d\!s motifs qui se trouvent en tête dans la concession,
on lit celui-ci:
« Et cOllsidénj 1n~me l' wugmentation ~t acct'oissement, profit el
utilité de la chose publique. »
Enfin qu'accord!7-t-il? « Avons DONNÉ et DONNONS par ces présentes
congé, authol'ité, pouvoir et licence audit Adam de Craponne suppliant,
présent, STIPULANT ct ACCEPTANT JJowr ltti, ses héritiers et succeSSC1l1's,
de prendre l'eau en ladite rivi ère dEi Durance, et faire la prise écluse
de ladite eau au terroir de Janson, pour la conduire et dériver .. ... .
et de faire oonstruire de ladi-te eau ......... moulins, engins d'eau,
usages et au Ires utilités qu 'il se pOU1'fa adviser de FAIRE A 0 PROFIT,
et ]JOUI' en jouiT, user et disposer TANT POUR LUI QUE POUR LESDITS SUCCESSEURS QÙEIICONQUES, CO)lME DE CHOSE PROPRE , et pOUl' le sl7rvice dudites cormnunatbtés généralement et pa,.tiCtllièl·ement . ........ »
Nous avons eu raison de le dire; ce titre renferme un véritable
contrat synallagmatique. Craponne 'y- e'st dé laré par le Pouvoir royal
STIPULANT et ACCEPTANT pOUl' hli et ses successeUl'S. Chacune des parties
co ntractantes y souscrit des oblig.ations; Adam de Craponne celle de
faire un canal, le Pou·voir royal de donner les eaux ou de les laisser
prendre pour l'alimenter.
.
.
Il Y a donc ici dans les termes du contrat, dans .son esprIt, dans sa
nature, tout ce qui constitue un droit et un droit irrévocable, qlle n'altère aucune clause de retour, de rachat ou de révocation .
.
Cette vérité, prouvée par le titre de 1554 , l'est aussi par les principes du droit public de l'époque.
Le:; fl euves et rivières formaient, sous l'ancienne monarcbie et en
.1554, une partie importante du do~aine de la ,~ouronne;. ,et le ~ou
voir royal pouvait, en vertu du drOit pubhc de 1cpoque, aliener dune
manière irrévocable une partie de leurs eauIX.
Une foule de documents 'législatifs et d'autorités établissent la pre-.
mière de ces vérités. L'ordonnance des eau.:!: et forêts d'aoùt ,1669 le
déclare en term es formels et précis, dans l'article ~'I du titre 27 : « Déclarons, y est-il dit, l(! ]J1"opdélé de tous los peuves tt l'i'IJi8res portant
�-
30 -
,
bateau de leu,rs fonds, sans artil).ce et ouvrages de ma~ns, dans notre
royaome et terres i notre
obéissance,
(aire pal'tiç du domaine
de notre
(J)
JI Il
Li
.
1
dJ
cO/lun1f1Ie .. .... ) ,
L'édit d'avril
'1~Y83 ,
J
(lP
dit IHencore 1dans son préambule:
< JIComme
les
J1)
1
ï r.
g)'ands fi euves et les l'ivièl'es navigables appart'iennent en PLEINE PROPR I ÉT~ au(/; l'ois et au(/; souve1'al,'/ts,' pal' le seul 'citre de 'lem' so'uvel'U'ineté, tout ce qui se trouve renfermé dans leur ' lit nbus apphtient.
(Isambert, Co llection des loù anc:iennes), » 1
1
n
L'édit de décembre '1693 proclamait le même 'prin'cipe , en dIsant :
« Le d,'oit de pl'Opl' ù! t ~ qtlo nous avons Sllr tous le ' fieu'Ves et ,'1.vières
/Uœigà bles dl'r liott'e l'oyaume , é:tdnlr inconteslablement évab7~ ' pa,' les
lois de l'Étal, CO/Illne une stlit"f, if! 'MIe déti IbdQj)ite nécesslifre de' t IW'e
souvetaineté, les rois nos' prédéceSslîu rs bllloo l, avons'" ,!', {f amBert,
eodem. ) »
,'). 1 .lO( Il Il J" l'; )
,l!
lid;êmin~ ille t, IV, p, 162,,> préci.s~ jj.us.si"sil dMtriNe sur ,ee porint :
« C'est don\) au roi l séul .soliV8roinrdalls s onfino~ja1'l.me , dit~il. qu'apparti en~ la PROPRI ÉT É, III justice ,e la, poli€!l"de tOli tes les. Di.vières navigables.. ... c'est pourquoi elle SQ\1II appelliesnoyales )J
Un auteur moderne, M, Davie1, Traité d.es GOUTS d'eau, 1. l, p,25,
no 29, constate en ces term es ce point de dnoit public ancieQ : « La
grande révolution, opérée au moyen-âge , dilril , dans le dreit public
des nations européennes par l'établi ssement de la féodalité, devait, en
déplaçant la so uveraineté et en l'éri geant en patrimoine, inlervortir par
suite les principes sur le domaine des cours d'eé\ll,
« Ce ne fut plus pour le souverain un simple droit de garde et de
surveillance;, ce (ut un dl'o'Ît absolu de proY,1"ié té, de sorte que le roi
put aliéner à des particuliers ses aroits su~ l~s 5ivières, et leur permettr~ , ~oyennant fin ance; des étabÜssements 1 qUI q6~~ient ou même
suppnmalent enllèremen( l usage public, - LiVl'e des fiefs , IiI. LrI, Ordonn, de Philippe-le-Bel, 1292, - Saint-louis, 123'1, - Blakcslone,
Lois civiles , liv, l , ch , VII, n° 2, »
Enfin, il existe, sur cette matière, une savante dissertation dans la
Revue critique de jurisprudence, année 185:2, p, 744, où la vérité ici
!
f
- 31 exposée se trouve complètement démontrée, et dans laquelle l'auteur •
prouve , par des aperçus incontestables, qJe ' ce poi'nt de droit public
était vrai avant 1566 et qu'il a même coi{tinué de l'être aptès,
jusques en 1790, Sans suivre l'auteur de cette dissertation da'ù's'I\sbn
' dl,e vne,' 1e premIer
' nous SUUI
/yo 1
l,
"i
et nous nous
y arretons,
derm'è'r , pomt
,
Ajoutons
oue,
les
dorumen,ts
de
J
'
urisprudence
que
nous
aurons
tout
,
1 fi
\1 il,
,
"{
~ l'heure à cjt~r ~eront, ~utant de Gonfirmations nouvelles de la v~ i\é
que nous venons de justifler ,
Fa,i1\ons maintflnant un pas de plus et prouvons que les concessions
ou ali énq ti Q Q ~ (a itl\~ par les sou,verains, sans clause de révocq.t.i on ou
de re.,our, ~n 1 55~,, \ .s ur le~ eaUX des, fleu,ves et rivillres nav jgublel> et
,Qotlables, \ Mil.Ïen~ i irr~v,o.oab,\~s , par~, qu'à celte l\ppque le domaine de
1q"lhou,tGnne n'.él,<\it P<\5, jo,aJi.éllaQ\.e e ,qq'iluoe l'est devenu q\le par
l'édit de 1566, et seulement pour l'avenir,
"\
1 @n lsait que oetJ I6dil d'Onnélil <
1I1outills ,. au mois de féV~ier 111566 , a
UlBEqué lim e èrel1JJ0u\lell e ell' \leLqui r(lon\lel'nel , \Jali~natien des domaInes
d,e la OouFonne" O\l/I sait' eneôrej que jusqu"à, eette époque, 1er souverain
avait eu le droit personn el d en fai,r e des aliénati ons , et que ces aliénàtiQns étaient 'valables, On sait e nfin que c'est à partir de cette époque, qne le droit public fut changé et que oette loi constitu tionnelle de
la monarchie fut prohibitive des aliénations, autori sa la révocation de
celles qui auraien ~ ~té co nsenties , et ne les permit que pour des cas
exceptionnels et prévus,
Le texte de l'article 17 de l'édit de 1566 le prouve, n est ainsi
1
conçu ~
« l'es tertes d~manial es ne se pourront DOR ÉN Ar..\ NT a.liénel' par inféodations à vie', à long t~mps ou perpétuité, ou condition qu elle qu'elle
\'
1
t
soit: ains se pailleront à ferme à notre profi~ comme ~os autr~s erres
et droits' et de pareille façon sera usé des terres sUjettes à, : etour à
notre couronne ; et ce S/1!n$ pl'éjudtèc des :in(éoila/lOm déJa (attes ,
pour le regard desquelles enjoi gnons à no procureurs s'~nquénr b,en
et diligemment de la cause et forme, pour en faire telle poursUIte
.
�-
3~-
que de raiso n. » - Preuve certaine que ce qui est antérieur à l'édit est
maintenu et conservé, ét qu'il ne 'statue qu e pour l'avenir.
Les textes des lois modernes , et iJOtamment cl311e du ,1" décembre
1790 sur le domaÎne national, le confirm ent.
L'article >14 de cette loi porte : «( L'Assemblée nationale exempté de
toute recherche et confirme en tant qu e de bèsoin: ,l olos contrats
d'échange ..... 20 les ventes et aliénations pures et simples, sans fclause
de rachat, même les inféodations, dons e~ ooncessions à titre gratuit,
sans clause de reversion, pOltrvu que la date de ces alié)tations à llitre
Oné!'81a ou gmtuit, soit antérieure à l'ordonn/llllce de fém'ier 1566. »
L'artiole 23 de cette loi ajoute : « Tous contrats d'engagement de
biens et droits domaniaux postérie'urs à l'ordannance de 1566 sont
sujets à rachat perpétu el ; ceux d'une date an6él'ieure n'y seront assujettis qu'autant qu'ils en contiendront la clause ex presse. »
L'article 24, ajoute: «( Les ventes et aliénabions des domain es nationaux lJostérieures à l'ordonnance cie 1566 , seront réputées simples
engagements et comme telles perpétuellemept suj ettes à rachal. »
Enfin l'arti cle 4" de la loi du ·U ventose an m, sur la mème màtière, a enco re dit: «( Les aliénations du doma ine de l'État, consommées dans l'ancien territoire de la France, avant lil> publication de
l'édit de février / 566, sans clause de retour, ni réserve de rachat ,
nE.IlEURENT CONFIRMÉES .
La concession faite à Adam de Craponne a donc été maintenue ,
confirmée et sanctionnée par l'édit de 1566 et par les lois de 4790
et de l'an VII. Elle a donc constitué un droit irrévocable et une vÛitable propriété qu'Adam de Craponne a reçue et qu 'il a transmise.
Celte conclusion que nous tirons de nos prémisses, ce droit de propriété sur les eaux à dériver de la Durance es t incontestable, et la
législation et la jurisprudence vont nous venir en aide pour la j'UStifier,
D'abord, en soi-même, il ne peut pas être que la concession faite
par le pouvoir royal soit irrévocable et qu'elle ne co nstitue pas une
vraie p,'opriété dans toute l'étendue du mot. Peu importe qu'il s'agisse
- 33ici d'une portion d'eau à dériver de la rivière de Durance. Le droit
de la dériver el de la prendre constitue à lui &eul cette propriété. La
puissance de la déviver, le droit de repouSset tOllt obstacle, de vaincre
toute résistance quant il ce, le cauactérisent encore d'une maniè~e assez
sa i,Ll DO te. ,
"
La législation d'ailleurs est en parfait accord avec ce que le raisonnement permet de oonclure. EUe a élevé à la hauteur d'un droit de
puopriété ce droit de dérivation .
D'abord l'ordonnance de 4669 des eaux et forêts, que nous avons
déjà citée, titre XXV II, article 41, après avoir déclaré que les fleuves et
nivières fent partie du domaine de la Couronne, ajou te ces mots importants' «( SauL, les droits de pèche, moulins, bacs et autres usages
.que les ,particuliers peu'tilmt y avoir par ti/ns et possessions 'Valables,
auxquels ils seront maintenus. »
f L'édit d.lavrill 1683 "dit encore d'une manière plus précise et plus
déoisive :
I , , , ,.
«( Nous avons par Ices pvésentes confirmé et confirmons en LA PROPRIETE, pessession et ~ouissanee des isles, i,lo ts, atterrissements, accroissements, droits de pêche, péages, passages, bacs, bateaux, ponts, moulins et AUTRES édifices et DROITS sur les l'ivières navigables dans l'étendue
de notre royaume, tous les propriétaires qui rapport~ront des titres
de propriété authentique, faits avec les rois nos prédécesseurs, en bonne
forme, awparO/VlJJY/Jt /566, c'est à savoir, inféodations, con trats d'aliénation, etc. (Néron\ t. 11 , p. 183), »
Même disposition dans l'édit de décembre 1693: «( Disons, statuons
et ordonnons que tous les détenteurs, p!'opriétail'es ou possesseurs des
isles, ilI'Jts, atterrissements, acoroissements, alluvions, droits de pèche,
ponts, m0ulins,' bacs, coches, bateaux et DROITS sur les rivières de
notre royaume, qui rapporteront des !ttres de pr0'Prtété ou de possession avant le '1" avril 1566, y soient maintenus et conservés, comme
nous les y maintenons et conservons à perpétuité. (Néron, t. 11 , p.
251 ), »
Dans ces derniers temps, la question s'est présentée devant les tri5
�- 34 bu nanx et devant la Co ur de cassation, et c'est dans ce sens qu 'elle a
été résolue après une discussion des plus approfondies. Il s'agissait de
travaux exécutés par l'État dans la Seine, en aval du pont de Vernon ,
d'un barrage et d'un e écl use ~ui , commencés en 1848, ont été termi nés en '184.9. Ces travaux ont eu pour résultat de diminuer la force
motrice nécessaire au roulement de six moulins situés à Vernon , Les
propriétaires de ces moulins se sont plaints. Ils ont actionné l'État
crevant. le tribunal civil d'Évreux, pour les voir déclarer propriétaires
DES FO RCES MOTR ICES el des moulins dont s'agit, Ils s'appuyaient sur
des concessions de 11:>:28 et 1559, antéri eures à l'édit de
, 1566, et émanées
du pouvoir royal avant l'époque où le domaine de la Couronne fut
déclaré inaliénable. Ils ont tri omphé devant la Cour de cassation par
arrèt du 21 mai '1855 et devant la courl, de
Caen f par arrêt du 28 jan,
vie1' 1858. (Sirey, 1855-1-561, 1858-1-580).
Là ont été résolues et fixées les mêmes questions que nous exami1
.J1f'
JIJ
nons. La Pl'oJltiélé des (orees mot,'ices, empruntée aux eaux de la Seine,
,\ \\
\"
.
a été proclamée et reco nnu e, comme nous ou ons ici faire reconnaltre
i l ' \1 \
\
à l'Œuvre de Craponn e la propriété des eaux ,~ui alimentent son canal.
L'analogie est frappante et il ne peut pas s'en rencontrer de plus
grande.
L'arrêtiste résume ainsi qu'il suit dans la rubrique, les solutions
observées par la Co ur de cassati on :
« Avant l'édit de février 1566, sur les grands domaines, les biens
et droits dépendants du domaine de la couronne (ou de l'État) , dont
fa isaient partie les fleuves et rivières navi gables , n'étaient pas frapp és
d'inaliénabilité.
«( En conséquence, les droits de mo ul in tou de pêche) ~ ur ces fleuves
ou rivi ères, ont pû être concédés par le Roi, A. TITRE DE PRO PRIÉTÉ , »
Et la Cour de cassation, dans son arrêt du 21 mai 1855, a dit à
~on tour, en confirmant ce droit de propriété:
« Vu l'ordonnance de 1566, sur les grands domaines; celle de 1669 ,
sur les eaux et forêts, fl-rticle 41 , titre 27, et la loi du Hi septembre
1807 ;
\
- 35 « Attendu qu'avant l'édit de févri ~r 11>66 sur les grands domaines,
les biens et droits dépendants du domaine de la ,couronne n'étaient
pas frapp 6s d'inaliénabilité, et que l'arti cl e 1i de cet édit port,e form ellement qu'il ne dispose que pour l'a venir ;
« Attendu que l'article 41, titre 27 de l'ordonnance de 1669, en déclm'ant que la propriété des fleuves et riyières nav igables faisaipnt
parti e du domaine de la couronne, maintient implicitement les droi ts
de pêche, moulins et autres usages que les particuliers peuvent y al'o ir
par 1itl'es et possessions valables ;
,
« Attendu que les lois postérieures n'ont ri en changé m pu changer
aux dl'oils conférés irrévocablement en con(or1ll'ité des lois en vigueur
à l'époque où les concessions ~ht été (aites ; et que d'ailleurs, ces concessions ont été confirrhé~s p,a~ 'édit du mois d'av~il1683 et celui de
1693 , , , , ' , , ,
'" dans
"l ,l'espèce,
Il
1es deman deurs aV8len
' t asslg
' ne'
« Attendu cn fait," que
l'Éta t pOUl' les voù' d6Clal"el' p~opl'iétair:es des (orees motl'ices el des
Il ' "l'mtro'ductLOn
" ) de cette deman'de, devant l'auntouf.ins dont s'agit ; que
torité judiciaire était co'nforme apx prescripti ons de l'arti cle 47 de la
loi du 16 septembre 1807, , . .. .. ... »
"
Et la Cour de Caen, devant laqu elle la Co ur de cassahon Hait renvoyé l'affaire , a de nouveau , par son arrêt du 28 janvier 1858, reproduit littéralement les motifs donnés par la Cour de cassatIOn , , sur
l'irrévocabilité du droit confért) aux concessionnaires et sur le droil de
propriété qu i en résultait.
,
conseil
d'État
lui-même
admet
et
co
nsacre
le
meme
Au surp1us, le
.
d d' . .
"
Il 'uge depuis une série non mterrompue e eClSlOns sempnnCl pe. J '
' à 1 1>66
nt pas
blables, qu e les titres de concession antén eurs
, ne peuve
préalable.
ètre l' évoqu és, n'l modifiés sans une mdemmté
É
d
- ' nts'.
,
' été' é par le conseil d' tat ans les arre' ts ,U\va
C es t ce qUI a
Jug
8' " 23 ùt 1845
1837' 14 janvier 1839 ; '16 mars 1 .."';
ao
.
17
du
mars
. 30
'
1846 (id, p. 3'15) ; 5 juin 1846; 13 févner
(Lebon, p, 449) ,
mars
,
.
8~3) ' 7
1846 (id., . 82 et 329) ; 16 novembre 1850 (I~~, p. ".'
m~rs
'1861 (id ., p: 172). Peu importe que le conseil d Etat ne l'Ole dans 1 at-
�-
36-
teinte portée il des droits de cette nature, qu'une cause qui donne lieu
il une indemnité il fixer par les lJ:ibunaux administratifs (arrêt du conseil
d'État du 28 mai 185'2, Lebon , 1852, p. 197); il n'en consacre pas
moins, dans ce t arrèt même, le principe de l'indemnité pour toute concession antérieure il '1566 , qui se trouverait modifiée par les travaux
de l'administration.
Même doctrine dan,s les auteurs qui se sont occupés du droit administratif. ~1. de Cormenin, Droit administmti{, t. l, p. 517 note 1
(5m• éditiop) , s'en exprime en ces termes: « Quant aux usines qui justifiemiellt de leur établissement avant 1566, cette ancienneté vaudrait
titre pour elles, et elles lle pourraient être supprimées sans indemnité.
r. notammel}t ordon nan<;es 11 mai 1838 (J3erteau) et 14 janvier 1839
(ministre des travaux publics). » Et à la page 509, note 3, il ajoute:
« Il résulte d'un décret du 2;2 fructidor an Xli (archiv. ); qu e si des concessions de dérivation d'eau de tivières navigables ont été failes il titre
d'inféodation, si les concessio9!$ sont antél'iewres à l'6dit de 1566, qui
déclare inaliénables les propriétés puhliques et fiscales, les moulins et
les dérivations d'eau canalisées, qui en font partie intégrante, ne peuvent être considérés co mme des dépendances du domaine public. »
'\.1. Estrangi n, dans ses Anmotations sùr DubTeuil, législation des
eaux, t. f , p. 203, s'ex plique sur cette matière d'une manière très
précise; et il applique au canal de Craponne le bénéfice de ses observations. C'est ce qui nous déterminera à le citer. Il dit : « Il faut
distinguer les concessions antérieures ou posté1'ieuTes il 1566, et c'est
une distinction que la jurisprudence du conseil d'État n'avait pas encore
nettement posée lorsqu e M. Dubreuil écrivait son Analyse.
« Les usines antéri eures à 1566 ne peuvent être supprimées sans
indemnités (ordonn. 11 mai 1838, Berteau, et 14 mai 1839, ministTe
des tTavaux publics), tandis que dans les concessions d'usines postérieures à 1566, la clause de révocation, si l'intb'Bt public l'exige, est
sous-entendue; l'indemnité n'est du e qu'autant qu'elle a été réservée.
« Or, ce fut le n aoùt 15.1fl., qu'Adam de Craponne obt!nt des maiIres rationaux la permission de dériver l'eau de la Durance, réalisant
- 37ainsi celle qui avait été donnée à l'archevêque d'Arles, en 1167 , au
rapport de l'histori en 1;'apon (pièce 20 à la fin dm tome Il).
« Le canal fut commencé en 1554, l'eau y fut mise pour la première
fois le 15 mai 1557. Il fut perfectionné et l'eau y fut permanente le
30 avril 1559.
« La concession d'Adam de Craponne est donc antérieure à l'édit du
mois de février 1566, portant règlement général pour le domaine de
Sa Majesté.
« Le domai ne de l'État ne pourrait la révoquer aujourJ'hui sans
indemnité. Il ne peut donc l'anéantir indirectement par de nouvelles
concessions, et ces nouvelles concessions, il ne peut les faire que Sous
la réserve de la prû>{érence 'aux droits antérieurement acquis à l'Œuvre
de Craponne.
« Ainsi le décidenbtextu!illemen1 l'édit du préteur, Jlintel'prétation des
jurisconsultes romaim et' les constitutiens impériales . »
Rien donc n'est mieux établi el n'est moins contestable que le droit
de p,'op,'iét6 qui cdmpète à l'Œuvre de Craponne touchant la dérivation
des eaux de la Durance.
Et qu'on ne s'étonne pas de ce que la Cour de cassation a jugé par
so n arrèt du 2·1 mai 1855 cité plus haut. Les recueils de jurisprudence
so nt pleins d'exemples analogues. Qu'il nous soit permis d'en citer
quelques-uns em pruntés soit à la jurisprudence administrative du conseil
d'État, soit aux Cours impériales, soit à la Cour de cassatIOn elle-même.
C'est ainsi que par arrêt du 2:2 avril '1844, la Cour de cassation a
jugé et établi que le Canal du Midi, construit par Riquet, constituait
une propriété particulièTe. (Sirey, '1844-1-406.) .
. ..
On trouve ,dans les motifs de son arrêt des motifs qUi militen t pour
le canal de Craponne et qui établissent entre . cette espèce et la. notre
un caractère frappant de similitude. Il y est dit: « Que par sUite du
contrat synallagmatique forme entre le sieur Riquet, qui offrall d~ se
charger de la construction dudit canal des deux mers sous cert~nes
conditions, et le roi qui acceptait les offres dudlt Rlq~et, celUI-Ci esI
devenu adjudicataire dudit canal avec fief et péage, a la charge de
�-
38l'entretenir à perpétuité.... .. » Nous avons vu plu haut le caractère
du co ntrat synallagma tique intervenu en 1554- entre Adam de Craponne
el le roi de France.
C'est ainsi qu e, par arrêt du 5 mars 18:29, la Cour de cassation, au
sujet du canal de Briare, a fait la distinction entre les canaux de navigation construits par l'État et ceux co nstruits par les particuliers, et.
a déclaré les premiers appartenir à l'État et les seconds former la propriété de ceux qui les ont co nstruits:
« Attendu , y est-il dit, que s'il existe des ça nau;\ construits par l'État,
ou devenus par une ca use quelconque ~a proIlrié~é, il existe aussi des
canaux construi ts par des particuliers, à lellr proIl e çpll1pte et risqué, (onnant leur propriété; que, sans doute, les côna\.\ .. de la 'première E\Spèce font partie d,u domaine public li lIlaif" que , ceux de, la
seconde ne sont que des 1JTo'rlriétés pal·tîc,u,hèr·es, fJ 'evCes de la servitude
pet]Jétue/le de "ester en ce/' i tat et d~ dm'eT
,LJassa,ae à' to~;~eux
qu,i
1 ~l ') Ir \ f
f
le t'éclalllent, conformément aux règleme ts et aux tarifs. ( irllY , 1829HlM). »
C'est ainsi que dans le département des Bouches--dl!l-RMne, à l'occasion de la bordigue ou pêcherie et du canal du Roi, existant aux
Martigues, entre les eaux de l'étang de Berre et c~l] es de l'étang de
Caronte, ces deux étangs faisant partie de la mer et du domaine public, toutes les autorités, le conseil d'État d'abord, puis
les tribunaux
,
civils, savoir: le tribunal civil et la Cour impériale d'Aix, et la Cour
de cassation, ont déclaré ce canal et ses ea ux prises à' la mer ,
venues de la mer, et constamment renouvelées par les eaux de la
mer, constituer UNE PROPRIÉT~ PRIV~E , à l'abri de toute révocation .
L'importance de ce précédent commande quelques détails et une
citation circonstanciée qui permette d'en mesure~ toute la gravité.
Un arrèté du préfet du département des Bouches-du-RhOne du 4mars 1852., approuvé par le ministre de la marine le 19 mars suivant ;
« Considérant que le sieur de Galliffet, concessionnaire de bordigues à
- 39Martigues, a élevé des prétentionS il la propriété du canal dit du Roi ,
dans lequel une de ses bordigues Il été établie;
« Considérant q\le ledit ca nal est un e des co mmunications naturelles
qui relient le prand étang de Caronte et par suite la grande mer avec
la mer intérieure di te étan g de Berre; qu'il doit par conséquent être
considéré
comme un e dépendance de la mer;
,
« Considérant que la mer et ses dépendances sont essentiellement
dans le domaine public, et ne peuvent, à ce titre, être aliénées et devenir susce ptibles d'appropriôtion. ,)
Avait arrêté: « Article ·1'''. Il èst déclaré que le canal di! du Roi,
r'nellant en communication l'étang de Caronte et l'étang de Berre, est
uuè dépendanèe dd 1 mer, et qu'à ce filre il fait partie du domaine
public m~ritiine. 1) l
,,'
1
~I:ais sur le pourvoi du II\arquis de GaIli'ffet devant le conseil d'État,
"
,\
\ JUill
. , . " oJ' !l5
, qUl\ a cass é et annu~' é l' a~re'té
il est intervenu
, 1e 19
:\ 6" ' arret
,
préfeètoral pour e'x'èèi;\llile ' pà'ùvoirs; d'abord, parce qu'il n'appartenait
pas au préfet de /1xér les Yimltes" de la mer. Mais aussi parce que
c'était à tort que le préfet déclarait que ce canal ne pouvait pas ètre
une propviété privée: « ...... Considérant qu'il n'appartient pas ail
préfet de déterminer l'étend ue et les limi tes de la mer;
« Oonsidérant que l'arrèté précité, non-seule7llent ne contient aucune
1'I!serve des clTO'its que le mal'quis de Galliffet prétend avoù' à la propriJ/6 (i~t canal dit. Roi; mais qu'il est motivé au co~lt1'aire ~T ce qtœ
ledit canal ne pourrait pa1' sa nature êt1'e dellcnu lobJet d un drOIt
de propriété Jn'iv6e ;
,
.
« Que dès-lors ledit arr ' té es t entaché d'excès de pOUVOIfS. (Lebon,
185'6, p. 421.) »
Remarquons qul1, le même jour, .le conseil d'État rendit une décision
parellIe pour les étangs de Laroque et du Galéjeon (eodellt), et que, le
7 janvier 1858, il annula par les !Dêmes motifs un deUXIème arrêté pré·
fecto ral du 19 a.vril 1856, qui avait été pris pour les autres canaux
~xistallts dan.s rétang et sur les bords de l'étang de Caronte. Cetle
�-
46 -
-
annulation fut poursuïvie et obtenue à la requête des propriétaires d~_
ces canaux . (Lebon, -1858, p. 35).
Aux yeux donc du co nseil d'État, les ea ux de mer alimentanb un
canal o~ se trouve une pêcherie peuvent constituer une propriété l'rivée. Pourquoi donc les eaux de la Durance alimenl,iit lé c "al dé éraponne ne pourraient-elles pas constituer une propriété privée?
)1. le marquis de GallifIet n'obtint pas cette seule décision du con eil
d'État dul9 juin 1856. - Il fit rendre par le conseil d't tat un arrêt
du 2i1. juillet 1856, qui caractérisa ses titres au c nal J u oi ~t oui en
. il retourna dE)vant les t~ib' naux" ci il,l'
''' ,,,
· 1a nature. PUIS
pr éclsa
s, et
'par
jugement d~ tribunal ci.vi~ d'Àix du 4, aoùt 181>8, lpar rr , ~ la' cpur
Impéna).e d AIX dp 15 JUIl1 1859 et RiJ.r U?; ~lI;rèt de ca'ssati on II 2.~
décembre 1860, le canal du Roi et la bordif7pe )d~ t~1Oin urent 'a' ,,1 . q n' 111')(' 'Jo \
'
. Il . ' . '
cars
patnmolllale
Ivé du marou s e Ijallifret
1 é être la . pro~flété
! 1
Illf
1. \
U , ~lJ1Ul' 1) I~ () I II qt 1 f
ou de ses hOirs. Pour aPr~g~f' Il no s sulli a d,e rapporte iCI les mo'f d '
d
' l '1' . ,\,1"
0",
1 n ., tWH
II se l arrêt e la Cour e cassatIon ClU 6 d cembre 186~, oui ré- t'~ d
.
,
" . . 1 Ir l lip
t Il,'
sumen t 1es mo HS es premiers ]ue'es IOvesli et q)ll repoussent )e
'. /('contre
1
H,\ l ' , '
Î '1 1 lfJ
~ ")
pourvo I. que l'État aVaIt. d'mgé
1 arret de a cour impériale d'AI X
du 15 juin 1859.
!
1 li
,h IfI'
, , 1
« Àttendu, dit la Cour de cassation, que pour décider qu le h~ri
tiers de Galliffet étaient propriétaires de la bourdigue dite du' Roi et du
canal dans lequel elle est construite, l'arrêt s'est livré ~'I'e ailleh des
titres anciens et nombreux établissant que ladite' b6'urdigue ét 1e caltai
avaient le caractère ctUNE PROPRIeTe PRIVeE, frappée seulement d'une
servitude domaniale;
,,
« Que le moyen tiré par le demandeur WÉtat)' dès lais abci1itives 'de
la féodalité n'a aucun fond ement, puisqu'on ne saurait etivisager cb'IDme
féodale la faculté exclusive de pêche' dans les eaux d'un canal reoonnu
~tre une propriété privée. .. ....... »
Nous redirons, après tous ces détails, et à propos ùe ces décisions
judiciaires, ce que nous disions à propos des arrêts du conseil d'État
du 49 juin 1856 et 7 janvier 1858: Siles eaux de la mer, renfermées
dans le canal du Roi, ont pu être considérées comme une pl'opriété
j
,Il.'
il.1 ]Jl'ivée, pourquoi les eau:. de la Durance, dérivées dans le canal de
Craponne, ne poullraient-elles pas être considérées aussi comme une
propriété privée"
Termi,nons la série de nos analpgies par un dernier exe,lI)Qle.
Voici l'espèce:
Le sieur Letroadec était en possession d'une pêcheri e de saumons
établie depuis une époque très ancienne sur la ri vière de Trieux , au
lieu dit le Moulin de la Roche-Jagu et dans les limites de l'inscription
maritime
, lorsque le 16 juin 1855, le ministre lui notifia de démolir
c~tte pêcherie, comme étant nuisible à la reproduction du poisson.l
1 Il
R fu s. , t e ministre fit démplir la pêcherie le 3 décembre 1855. P'ourvoid~ sie~r "Letroadec clevant les tribunaux. Il se considère comme
exproDflé, et Ii demande 10,000 fr. pour le prix de sa propriété. Fo '
(JI l'
'
Ju gement
et ,)arrêt
contre
1,At'
LaI. 1,>1
L arrêt de la Cour de Rennes, du loi,
'
mars 1859, qui énumère les titres anciens de cette pêcherie, établit 1a
co~çl u siori' ~uivan\e, celle qu e n,ous avons intérêt surtout à relever ici :
« Considéran t, dit-il, qu'il suit de là que les pêcheries ont constitué
sou la protecti on de la ~o i DE HRITABLES PROPRIETI1S, et que par con$éq'{{~nt elles n'ont pu. &tl'8 dé tl'Uites par les dispositions nouvelles, sans
que leurs prop,riéta,ires aien t droit à un e juste indemnité. »
Et sur le pourvoi en cassati on, le pourvoi a élé rejeté par des motifs
identiques:
« Attendu, en droit, qu'aux termes de l'article 5i1.5, Code Napoléon.
nul ne peut être co ntrai nt de céder sa pl'opriélé, si ce n'est pour cause
d'utili té publique, et moyennant un e juste indemnité;
(, Atlendu, 6n fait, qu'il est constaté par l'arrêt, que l'établissement
de la pêcheri e remonte à une époque antérieure à 1Mil. ..... .... .. ;
que le décret du 9 janvier 1852 ne fait qu'attrihuer au ministre de la
marin e, dans un but d'utilité publique, le pouvoir de supprimer par
mesure de police les établissements de pêcherie qu 'il juge ne ?ouvoir
être maintenus-; mais qu'autre chose est le drOit de prescm e une
,
'
6
�-
42 -
mes ure réclamée par l'intérêl général , et œutrc celui d'enlever à 7111
parti UH61' la PROPRIÉTE qlti h.//i applJJT'/ient en vel't-u de titres rég'uliers
el du /ertte des lois et d'une possession plus que séculaiv6., ....... )'
(Sirey, 1860-1-257).
La co nolusion à tirer de ce qui précède, c'est que la concession des
eam faite à Adam de Craponne lui a transporté Ul1 véritable droit de
propriété sur les eaux ; qu'il ne peut pas en être dépoui.J1é, ou qu 'il
ne peut l'être que pour cause d'utilité publique, et après une juste el
préalable indemnité.
Nous avons ajo uté que la concession des ea ux était illimitée. C'est
ce que nous avo ns maintenant à prouver .
Voilà l'esprit du traité de Hî54. Et si maintenant nous passons à
son texte littéral, cette vérite devient bien plus saillante encore.
,
T
N° 3.
1
Lu cO)!Cession des eaux faite
1 Il
1 J
Ci Allain' de" C"clPoI1ne est illimitée.
1 ~
1
"
~
J
- 43dans son parcours un nombre considérable de communautés eV une
vaste étendue de terres. Les besoins étaient certains, mais ils étaient
in connus. Ils devaient s'accroltre, s'augmenter à mesure que le succès
couronnerait les eITorts de Craponne . Pourquoi donc aura it-il 1imité sa
demande? De son oôté, le pou"I'oir royal, représenté par les maltres
rationaux, que voulait-il? Que pouvait-il vouloir? La plus ample satisfaction des besoins des populations, l'entier et complet arrosement des
terres . Il n'avait pas de prévision ultérieure; ni de réserves pour
d'autres concessions. 1\ n'en annonce aucune dans le titre. Donc, des
deux côtés des parties contractantes, on n'a pu youloir d'un e autre
limite que celle que nous indiquons.
1
J
Il faut s'entendre SUr ce terme, pour éviter. les équivoques et les
erreurs. - Quand nous disons que la conoession a été illimitée, nous
vou lons dire que la quantité d'eau à dériver n'a pas été détl7l''IIlvf!l!e.
Xous ajoutons que c'est avec intention qu'il a été procédé ainsi en
,1554; et nous disons enfin qu'on a adopté pour la règl e à suivre
uniquement et excl usivement , pour le présent et pour l'avenir, les
hesoins, les nécessités des territoires qui devaient être traversqs par le
canal , de faço n ~ue rien n'arrêtât ~e développement progressif de l'agriculture, les amélioratIOns, les déf\'lchements des terrains et leurs conversions en terres arrosables. Il est impossible de ne pas admettre
ces vérités, ou de les contredire ' avec es poir de succès . Avant d'exi\mine~ le texte de la concession ou de la licence de 1554" on comprend
que la pensée, soit de celui qui demandait, soit de celui qui concédait ,
a dû être telle que nous l'établissons. C'était le premier canal d'irrigation qui se créait en Provence. Il emhrassait ou il devait emUrasser
Adam de Craponne, dans sa requète, demande: « Permission et licence de prendre PARTIE de L'EAU en la 1'ivière de Durance. » Mais
celte pm·tie qu e sera-t-elle? Il ne la limite pas. Au contraire, on va
voir l'indéfini qui accompagne sa demande. « Avec pouvoir et autorité, dit-il, de faire tant audit 11eu de Salon qu'en œU/1'es lie1IZ, par le
terroir desquels ladite ea u se dérivera et se pourm conduù'e, moulins
et autres engins. »
De plus, la procédure de comlllodo et ÏI!COI1Wwdo qui précède la
concession, qu 'indique-t-elle? quelque chose d'indéfini. Ce sont tous
les hesoins des habitants et des lieux et terroirs par lesqu els l'ea u doit
passer, qui so nt consultés. Le titre dit: « Vu le procès-verllal, information et proc{'dures faites par ledit commissaire, transporté sur Ips
lieux, de la co mmodité et inCO'n~modil é que poun-a ~ /re au Roy BI à
la chose p7tblique, aussi du fait utilité et profit de l'eau que ladIte déflvation porlera aua; manants et habit anis de chacun des lieua; et t el'1'O~"S
par lesquels lad'îte eau sera déri vée . »
,
Ici les observations se pressent. Qu'est-ce donc que l'inC011l11l01li/é
dont la demande peut être au Roi et à la chose publique ? si ce n'est
�-.\.4.le vo lume ind.éfinl, indéterminé à dériver de la Duranoe. On n'en entrerait pas d'Rlltre.
Q I1'es~cè que tl'es l d6rtb qué l'ulvli t'é è! profit que ladite eau portera
aux manants et habitants de è1!c/.C'un dfl$ lieUIe et tfiN'oirs? 51 ce n'est
toute J'éle ndue de ceS tè'trbirs, toœl les champs sans l exception, sans
limite,' qui se p'ourrortt arroser? auxquels J'eau pdurra s'appl1quer"?
C'e 1 donc tout cela qui a été entrevu, pesé, mesu'ré. - Mais tout
cela n'exclut-il pas une limite précise dans l'ea u à dériver?
'
,
Eufi,n , dans la pllrtie du dispositif du titre,
dit-on
autre
chose?
No n.
•
1
Biep, IOÎ{\ de là, le tex te est encore pl~ s large; Il y est di \: « Avons
donné po~voir et licence ..... .. de prendl'e l'EAU en ladite rivi ère de
r
' 1"1
~
f
I)1I~iln<;e . )~ 90, ne dit, on ne répète pas même c mot dont Cranonne
,
l
'P
l'l' 1 q,
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F
s'~tait sçni: partie de l'eat/. Qn nit d'une manière plus large, plus
.r( n 1 Jrl J
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éteQ,due, :, pren11'e l',ea~, Jc'est-A-dire
toute
c HeT qui'JUsera lnécessaire.
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l- jJ J,Jf,
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"
Cela resS€lrt eGcore lli\i Ui< \\e~ ):!lo!~ q\ui r.suÎv1ifnt: .\~ rJ t' o~r)n pondu ire
et dériver ...... et faire moulil,ls,,, engin$1d:ean, .llIlag~s et AU,TR~S t llilités qu'il se 1JOUJ'1'(.L é\dvi ~!l'. » Poi~lt ,de ,limites d~ n q r </,ppliqa tion ;
l'
1
donc, poi nt de limite dans II), d éri va tio~.
observation sur ces mots 1 « P011r le s/wvice et commod'i l é
DESDITES COàlMUNAllTÉS génémlement el pm·ticuliènmenl. » Si ce service
exige demain plus d'eau qu 'aujourd' hui, dans un siècle plus que le
premier jour du fonctionnement du canal , dans les temps Il venir
plus que dans I(moment présent ; tout est accordé. Y a-t-i l là un e
limitation ?
Après l'esprit et la lettre du titre, qu'o n co nsulle l'exécution qu'il a
reçue. Ce troisième moyen de connaltre la vérité concordera avec les
deux aulres. A chaque siècle, Il cbaque époque, quand les besoins ont
augmenté, quand de nouveaux champs ont été défri chés, qu e les procédés de l'agricullure ont été pIns éclairés, ou mieux dirigés, qu'on a
su tirer un meilleur parti de l'irrigation ; le volume des eaux dérivé de
la Durance a été /Iussi augmenté. L'État ne s'y est jamais opposé. Il
n'y a jamais mis obstacle. Or, que signifie ce silence, cette adhésion 1
~Iéme
-
45 -
C'est une interpréta ti on tacite du titre de 1!iM conforme à la notre.
Rien de plus, rien de moin s.
Si l'on veut même remonter à l'épÇlque de l583, alors que l~ frères
l{avel aggrancti,ent le canal , augmentèrent la dérivation , on verra un
fait d'ellécution hien décisif se réaliser, et cette circonstance est, à e~le
seule, tout un ensemble d'argument et une preuve victorieuse du caractère illimité de la co ncession faite il Craponne.
Recourut-on alors à une nouvelle concession ? Le pouvoir royal fut-il
de nouvea u sollicité ~ :Et voyons-nous se répéter ce qui s'était fait en
11î1î41 No n ; on agit en vertlu 'du droit que 'Cra'ponne avait 're~, qu'il
s'était réservé, q 'il n'a 11\1 pas trahsmis ilans la transactioh du 20
octoht~ )157)1. ' Et' cepJenda~t to Jl I ce nouveau territoire, oh ['eiRJ fut
conMile, n'élait 'pas coolpris âanslê' titre Jd~' ~ 554, a11 moins nomr/1ém' nt; il n'y était qu' implicitement par la généralité des cI'auses que
'1
" 01 l
} ,_. alrement
.
nous
y a..'0lb sft vues.
Il 'I.IL
mut "',
uonc neces
en conel ure'u'que '1e
titre 'étail illimi'fé. ttlltt\imè1'l't oh·'tl.'à.u'rail ' pàs -pu agir ainsi, dériver
M e plus grande mass~ d'eau : et pourvoir ainsi il. ces nouveaux besoins.
No us n'avons pas so us les yet'Jx les traités que les frères Ravel firent
avec la cilé d'Arl es . Mais ceux-ci, dans leurs engagements, agirent encore comme aITranchis de taule limite. Ainsi, dans le passé comme dans
les temps les plus rapprochés de BQUS, comme aujourd'hui, le titre de
.1554. a toujours été entendu, appliqué et interprêté comme nous le
faisons.
Concluons. - Les deux caractères de la concession que nous ayons
annoncés sont justifiés. Elle est irrévocable et à titre de propriétaire,
et eUe est illimitee.
Maintenanr que ces bases du droit de l'Œluvre générale de Craponne
sont solidemenl établies, examinons le projet de règlement auquel o~
veut la soumettre. On verra au grand jour qu'il ,~oltl et méconnrut
le droit qui la régit, qu'il lui enlève sa nature. propre pour I~I en
substituer une autre de conception nouvelle, enllèrement opposee, et
que ses ti tres la repoussent.
�-
4,6 -
§ III.
Examen d .. rapport et do projet de I·èglement.
Les réflelions que suggèrent la lecture et l'examen de ces deux
pièces sont graves. Elles inspirent aux propriétaires du canal une profond e tristesse. Ils y rencontTent à chaque pas la violation de leurs
droits. Ils essaieront ici de la signaler, en examinant la généralite des
dispositions du prùjel de règlement plustàt que les détails particuliers,
ou soit la co nvenance de telle ou ten e disposition prise en elle-même
et considérée à part du système général. Ce dernier mode d'examen
pourrait convenir, si l'Œuvre gén~rale reconÙiüssail à l'administration
le pouvoir qu'elle s'attribue de la réglémerile,r. 'Mais, c'e,st le premier
qUI seul doit être ici emplbyé el 'sui \:' 1 CÈdvre ' ~'én~ ale ne recon.
,
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naIssant pas ce po'uvOIr l'atlml IstratIon e li dëc arant et so utenant
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mcompé tént~ à cel égar a premIer che.
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N° '1.
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1
Incompétence de l'arlminist1'ation pOUl' réglelllent~r NEulJI'e,
Cette incom pétence résulte de deux causes di[ér~n tes : la première
l
c'est le titre de 1554, qui la fait naltre; la secondë, c'est l'arrêt du
conseil d'Etat du 10 févrièr 1859.
1
Le titre de 1tiM est uùe co ncession émanée du' pouvoir royal. Elle
se suffit à elle-mème. Elle est ebtiète, complète. n n'appartient pas à
l'administration d'y ri en retrabdh er, nI d'y rien ajouter. On comprendrait plustàt qû'elle en demandât la révobation, qu'o n ne comprend
qu'elle ait la prétention de la modifier. ' La co ncession, si en e existe,
doit exister comme elle est. Si elle n'existe pas, elle doit disparaitre.
Nous avons vu plus haut les racines profondes d'une concession royale
faite avant 1566, combien elle est forte, le droit qu'elle crée, la puis-
4,7 -
sance de résistan ce qu'o n peut lui emprunter, l'obligation où est l'Etat
d'acquiller et de compenser préalablement, par un e indemnité, toutes
les atteintes que le pouvoir compétent peut se croire obligé, dans
l'intérêt général d'y porter. Et après cela, il serait permis à l'administration de changer le régime que la concession royale a fait, a
créé à l'Œuvre de Craponne 1 D'une œuvre. toute }Jel"sonnellç à lai,
toule privée, elle ferait une œuvre publique, dont l'admioistraton
même ne lui appartiendrait plus et passerait dans les mains des fonctionnaires d'un aqtre ordre, des ingénieurs des ponts-et-chauss~es et
du préfet 1 Mais c'est le renv~rsement du titre de 1554" c'est la substitution 4'un nouveau à I~a,nci en . Et ~our tout cela J'administratiol,l, est
incompétent . te ~o uvo lr royal lUl·même ne pourraIt lIuJ ourd 4uI
revenir sUr ses Ras . ni m ~~ifier d.~ lit,re ,de 1pp4", sans êtr~ Qbl ~~,de
payer. au.x. prR~~ié\a ire~ , B <fan~l fP.u.t IEl pr:x d~ l.expropr/iÜlPll gu on
subIr
. eu Im ppr e p.\
-! elT~\fl
fW lune el',p~(l pn é)IIQl\
SQ.lt 'dlleur feraI!
l
fn[.lf) ··'HJ fa "Ii
,
h
recte, ou indirecte; qu on lf'\l'3lè'~\\1J~rpsq\l;m~nt m~ c (l~e> qU!an
m'en dépou ille d'un seul coup par un acte d autoflté, ou qu on me le
ravisse en me so um ettant à des conditions qui répugnent à mon tl(re,
qui le changent, qui m'écrasent ou péuvent m'écraser par les cba,~ges
qu'un au tre que mo i pourra m'imposer. Je cesse dès ce moment d etre
,
propriétaire, et dès Ce moment aIls l je s~is dépouillé .
Ajo utons 9ue cette jncompétence de. 1ad(llID I S~ralIOn es\ d autant
plus grande, qLl'ell ~ n'a pas même le prétexte de SIgnaler dans le htre
de 1554· une lacune regrettable. Les titres d ~ 1571, et '1583, qUl en
sont le )roduit naturel, en formentl ~ règlement Je plus C)omplet, le
plu> sale el 1d plus "dapté aux .
et au caractère patflmo1lI8!
de l'Œuvre de 'Craponn e. Là tout est prévu, tout est réglé , tout B&
mesuré! Ces ti tres ont reç!I' la sanction de l'autorjté a.ncIenne.' du Parlement de Provence. Ils ont Qté appl iqués pendant troIS SIècles. Ils
ont suffi à crée~ le~ magniftques ré ultals de la canlllIsatlon de Cr(\poone à enrichir des co ntrées arides, à les couvru d~ rI ches pIQdultS .
Faut-il encore ajo uter que la jurisprudence du Parleme~t de rro\'en~e
et cel le de la COllr impériale d'Aix ont donné à ces tItres les mtel-
néce~sités
�- !8 prétations que le cours des temps a pu rendre nécessaires? A cet
égard encore l'Œuvre de Craponne a ses règles détaillées. Que veut-on
de plus? L'Œuvre a ses règlements. Anéantir les précédents, en créer
de n 0 4Yeall~? On ne le peut. L'ŒuYre de Craponne constitue une
société oivile; el~e se compose des intéressés à son fonctionn ement.
Et l'administration peut-elle réglementer les sociétés civiles ? N'estelle pas incompétente pour cela '1 Qui oserait le nier ? Qui n'en
conviendrait pas?
•
Main tenant si du titre de 11)54, nous passons à l'arrêt du conseil
d'Etat du ,10 février 1859, l'incompéten ce de l'administration devient
tou t aussi saillante à un autre point de vue.
Cel arrêt a déclaré très-nettement qué l'interprétatîon du titre de
1554 ne pouvait être faite que par le SouveraiT1 . Pourquoi donc le
rapport et le règlement projeté se permettent-ils de la faire êt de" la
donner ? Ils sont évidemment incompétent 'pour cela. Pell ' importe
qu'cm se propose de provoquer pltls tard 'ul1' déoret qui conv l'ti sse le
projet en règlement d'administration publique. 1Tabt qùe l'ihlerprétation du titre ne sera pas donnée par le SC)llverain, bn aura omis la
formalité essentielle, le point de départ, la conditi6n sine quit non.
Remarqu ons en outre que cette interprétation est à elle seule un e
immense questi on. L'Œuvre de Craponne soutiendrait, si elle était
demandée, devant le pouvoir souverain, qu'el1e n'èst pas nécessaire,
que le titre est clair, qu'il est précis, sans ambage, et qu'il n'y a pas
lieu par conséquent de l'interpréter. l'Œuvre de Craponne soutiendrait encore que, fallut-il procéder à l'interprétation du titre, elle
devrait étre donnée dans le sens qu'elle lui attribué, d'une 'concession
illimitée, c'est-à-dire, mesurée sur les besoins des contrees parcourues
Far le canal. En résultat, un double lice d'incompétence fr~ppe le
projet : 10 Il interpréte le titre contrairement à la règle de compétence
é~bli e dans l'arrêt du 10 février 1859 ; 2 il n'y a pas en de pourvoi ,
DI de demande en interprétation du titre.
1
0
-
49-
No 2.
1)
1
1
1
~
Le projet .,de règle~(}nt viole le droit de propriété du canal et de la
concesswn. - Cf est une déchéanoe implicite de l'un et de l'autre.
1
Il est 'facile de fournir la preuve de cette double vérité en suivant
les di~po~itions de détail du projet.
,AiJil~i l'article 1" , établit la sup eri!) tendan ~e de l'administration sur
,
le canal en ces termes:
« ~our, ce,qtji cQilcerne /ce\ eptrljtien, cette alimentation et ses réparatlÇlnS, 1$uUI"e deme~e s01/!1n~,e aU cpllt?'ôle et à la swrvfillance de
l'administration.
, 1 fil
. ,
"
r
'1 II' ~i , les , çan~u~ n.e, son/." Il
nllpt,rQtenus cQI)&tamment el) bon, état
d'éÇ{)\lIlem.enl ~ tel1te )flu~ IGl)gp6u;r el sullisi)mment alimentés jusqu'à
conQuFenqe rl.\lpvj\\\ll1le \W'~\s, Aoi Ilnt ,Ilecev,oi!: d'après 11?iU1'S L'ill'es, il y
sera IlPUt:l!U d;Qffi ce 1\ la, <;I.ili gen ~ de ,l'il,dministration et aux frais de
l'(Euvre, aptès I,1 I).Q , mise en demeure régulière.
,« L'état dCli diye.r:s canaux 4ésigné,s, ci-dessus sera reconn u annuellement, et plus ;>ol),vpn}, en cas d'urgence ou d'accident, par l'ingénieur
en chef"qu ~~partement, ou par un des ingénieurs ordinaires sous ses
ordres . )1
L'a~ticl e 6 dit encore: « Le préfet prendra des arrêtés pour presQrire les mesures de police qu'il jugera utiles et nécessaires à la cons~ rl'ation du /janal l' t de ses d~p endances et à la répression des abus
ou p ~l'te~ d'(\l\u. )
,
L'urticle 8 ajoute: (1 Les délits e( contraventions seront cOJ;lstatés
par des Pl'oci)s-yerbaux dressqs par les conducteurs des pllnts-elrchaussées ou' par Les autres age"Qts de police, et seront déférés aU l tribonatjx
compétents. »
I:article 9 porte enfin : « Les honoraires, frais de voyage et autres
dépenses qui seront dus aux ingénieurs employés en exécution du pré7
�- 50 sent décret, seront payés sur les fonds des travaux, d'après les règleIllents qui seront faits, conformément aUl{ dispositions du décret du
10 Illiti • 8ti4·. »
roili! un s~s tèD!le complet d'asservisselIleat du cana,l il 1administra"
liQJ1. - Mais devant lui que devient le droit de proplriétM Il dtsparlllL
co mplètement. - Le premier droit du propriétaire, c'est d'administrer
sa chose, de la régler comme il le juge convenable, de Jlenlretenir
s ui vantl~ nécessités qu'il apprécie et qu'il juge lui-mème. Le premier
droit du propl'iétaire d'un canal d'irrigation est encore celui-là. Il a
intérèt il assurer le service du canal. Il en retire les profits; il est par
là même engagé il assurer so n foncmonnement. Le ti'tre de 1554 a
donné il A.dam de Ora ponne le droit dll netireI' l\l!l profits pepsonnel;
de son OlLL\Te. Il ne lui a pas donnée ponl', surveillant, pou~ perilltendant, ni l'admini stration,l\1i persol!ll!leJalulre que, lni"mèm6. Le prejet
confisque donc, dMls le droit de pDopri~té. SUIl le call~l, Ull ) des droits
les plus préCieux , celui d'en jouir' libvement - 1Re l'e\'{-pleiter oonform ement à son tiiJ'e, de veiller sur ' lui el d'être lér seult juge' tle ce qu'il
co nvient d'y faire. Que le projet s'exécNte, et ' Ge ' sera Jl'administration
qui deviendra la mattresse. Elle pourra à , plaisir multiplier ses exigences , requ érir des redressements, demande~ des améliovations, rechercher une perfection dans les voies et moyens que la pratique n'exige
pas, ne réclame pas et dont ell e peut se passer sans inconvénient pour
personne. Qui jugera de la prétendue nécessité ,? Si c'est l'administration, la voilà ellcore substituée au propriétaire. Si (l'es t le propriétaire,
à quoi bon le projet de règlement? Si c'est devant les tribunaux adm inistratifs qu'il faudra plaider, quelle série indé§nie, innombFable de
procès? Pourquoi !'enverser les règleB constituées cde la sooiété civile
de Craponne? Il Y a, pour rassurer, l'autorité sur la bonne administration de l'Œuvve, le droit des co-usagers et des intéressés aM canal.
Si l'eau promise n'est pas au canal, si ses rives ou ses francs-bords
laissent perdre les eaux, si les eaux promises ne sont pas introduites,
les Intéressés ont le droit œe réclamer devant les Iriblln!\ux civils. Leurs
titres passés avec l'Œuvro générale ou avec Adam de Craponne sont
-
51 -
debout. Ils militent pour eux. Ils en pourront réclamer l'exécution .
Or, voilà le contre-poids, la balance, la garantie donnée à tous , que
le canal fon ctionnera comme il le doit. Le droit dé superintendance
donné il l'adminisLration bouleverse tout\ change tout; et après s'~ lre
subslÎLllée au propriétaire, eUe se substitue encore aux co-intéTessés
et au;x ,tribunaux civils qui sont seals ici compétents pOur ordonner
l'exécution des titres.
Conçoit-on que le projet ait pu dire qu e l'administration jugerait si
les canaux sont s!JJ/liMmment IJJlùnent t!s du volume' qu'ils doùent recevoù' millant LEUns TITlIES? Elle jugf>ra donc aussi les titres passés aieC
les tiers. Elle les inte~prètera. Elle en fera son affaire propre. )Iais
s'il est une règle, toUjoufB ,respectée, c'est que toutes les qu estions de
titves, àe pl'opriétél GU d'usage, senl néservées aux tribunaux civils , pt
qu'elles restent ,étrangères à l'administration.
Cemme consé<ifl!lence Jda, ce droi\ œ(l l'admi nistration les articles 2 et 3
du projet presari~ent des travaux à e.'1:éclller et l'artiole 4 donne ulle
sanction. Il veut qu'uli pro<!ès-verbal de Técolement de Ges travaùx
soit dressé et qu'une expéditiQIil en soit laissée à la préfecture et J'autre
envoyée au ministre des travaux publics. C'est le derni er trait qui caractérise l'asservissement de nEu vr!} il l'administration. C'est un e dernière chaine qui unira la première à la seconde.
Tout ce qui vient d'ètre parcouru et tout ce que prescrit le projet,
n'est-ce pas une déchéance implicite qui est prononcée? Diso ns mieux :
c'est un système mixte entre celui de la déchéance et celui de la propriété. On nous laisse un nom, le titre de propriétaire; on nous en enlève
le bénéfice. No us supporterons toutes les charges, nous serons ou
nous pourrons étue écrasés par elles. Elles serout imposées sa ns notre
participation, et nous devrons toujours les subir. Nous ne serons don c
propriétaires que pour payer. Nous ne le serons plus pour administrer.
Évidemment l'auteur du projet de règlement s'est cru en face d'un
canal domanial , tel que serait paT exemple celui des AlpiMS, établi ,
créé par J'État, entretenu par ses deniers. On comprendrait pour nn
canal de cette nature les dispositions régl ementaires qu'on nous pro-
�- 52 pose. Ce droit absolu de l'administration serait la suite du droit de
l'État sur le canal. Mais là où l'État n'a rien fourn i , rien payé pOUl'
l'établissement du canal ; là où celui-ci s'est établi, conservé et maintenu par les sacrifices exclusifs du particulier qui l'a créé, on ne voi t
plus qu'une grave méprise dans l'application au profit de l'administration de ce droit exorbitant.
- 53 tence , qu'il a enrichi la Provence , qu'il a fon ctionné dans tous les
temps, bons, mauvais, calmes ou agités , de paix ou de guerre, de repos
ou de révolution , qu 'i1 est sorti toujours vainqueur des épreuves des
siècles , on nè croit plus à lui, à la solvabilité de ceux qui le possèdent ; il faut un cautionnement 1 Ne dirait-on pas qu 'il s'agit d'un e
cqnalisation à faire, d'un projet il exécuter, d'un e chose nouvelle et
qui doit se créer ? Il y a ici lieu donc d'être surpris. Mais la surprise
n'est pas le seul sentiment qu e cette mesure éveille. La conscience de
tous comprendra qu e c'est un e atteinte au droit de prop riété sur le
canal et sur la concession . Le titre de 1554 n'a pas so umis la concession à cette conditi on ; on ne peut pas l'y ajouter. Prescrire cette
mesure, c'est révoquer la oonces.ion èrl partie. C'est l'amoindrir, c'est
la charger d'un e co ntl ilion nourclle. C'est rétroagir sur un droit acquis.
QU& l'Œuvre accepte urie pareille modifièation, et de n10dificati on en
modification l'adminisbrati l!)n pourra touf chan gtlr, tout anéantir f Mais
comment ne voit-on pas ici tle cercle viciellx dans leq uel on lourne
constamment ? Si l'intérêt 1;énéral exigé un sacrifi ce, les prin cipes exposés plus haut disent c[ue ce sacrifice doit se payer préalablement.
C'est ce qu 'on a jugé dans tous les cas que no us avons parcourus.
L'administrati on serait donc (enue de nous indemn iser de to us les sacrifi ces qu'elle nous imposerait. N'est-ce pas prouver clairement qu 'elle
n'a pas le droit d'exi ger de nous ce qu'elle demande, puisqu'elle serait
tenue de nous en payer le prix 1
Que dire aussi de ce tte dispositi on fi nale co ntre lBS membres dB /'Œtlvt e, livrés à l'exécuti on du l'ole rendu exécutoù'c cont're eux, pour arriver à co mhler le défioit dans le cautionnement, et à laisser toujours
20,000 fI' . il la disposition de l'autorité? C'est aj outer au! charges que
les membres de l'Œuvre ont consenti ù s'imposer en y entrant. Ils ont
su qu'ils auraient des co tisations à payer, celles qui seraient : otées
par l'Œune. Mais ont-ils su que cette charge nouvelle leur , seraIt. Imposée? Y ont-ils co mpté? N'est-ce pas ajouter à leur ~acte cl ~dhés.lOn ?
Et l'administrati on a-t-elle le pouvoir de le faIre? SI eIle 1a aUJ ourd'hui sur un point, demai n elle peut l'avoir sur un autrè.
Il Y a encore dans ce même projet d'autres dispositions qui sout de
nouvelles atteintes au droit de propriété, et qui renferm ent une déchéance implicite. C'est l'article '12 qui présente ce caractère. Il porte:
•
1rl. I ~. - « L'Œuvre générale de Craponne sera tenu e, avant d'ètre
remise en possession de l'administration du canal, de verser dan s la
caisse du receveur général du département des Bouches-du-Rhone, un e
somme ~e vingt Qlille francs en numéraire ,0 U en renies sur l'État, calculées confo rm ément à l'o&donnance du Hi janvier 1825 , ou en bons
du Tréso~ ou auIres eU'els publics, avec tFansfert au puofit de la Caisse
des dépots el consignations de celles de ces valeurs qui seraient nominatives ou à ordre.
« Cette somme de vingt mille francs formera le cautionnement de
l'entreprise.
« Le préfel pourra en disposer, si cela es t nécessaire , en tout ou
en partie pour les paiements des dépenses qu'il ferait faire d'office,
en exécuti on du dernier paragraphe de l'article '1" ci-dess us; mais,
dans ce cas, l'Œuvre générale sera tenue de compléter de nouveau ledit
cautionnement à réquisition du préfet, et , faute par elle d'y satisfaire
dans ~n délai de trois mois, à dater de la signification , elle y sera
contramte au moyen d'un role rendu exécu toire par le préfet sur les
membres de l' Œuvre. »
Le titre de 1554 n'a pas soumis Craponne à cette précauti on , ni à
ce ll}oyen préventif ; et Adam de Craponne commençait un e œune éton.
nante pour son époque. Aujourd'hui qu e le canal a trois siècles d'exis.
,
�-
54-
,\ utres exemples encore d'empiètement de la part de l'administration
sur un terrain qui n'e t pas le. sien.
Poqrquoi l'article 1" dit-il: « Les frais d'entretien, d'alimentation
el ceux <Je réparations, soit prdinaires, soit eltraordinaire~, resteront
entièrem ent li la charge de l'Œuvre, S01/S l·ésel"ve des redevances qui
pOUl'l·ont h.i Ü,·e dt/es paT les mitres p1"oprit!-taù·e~ usag~1'S désignés
sous le nOIn de concessionnaiTes et (al7ultalains? ~) En quoi l'adminis ~
tration est-elle autorisée li organiser cc régime intérieur de l'Œuvre ?
Que lui importent ces redevances ? La société de Craponne a-t-elle besoin de sa réserve? Est-ce là un titre qu'elle crQit créer ou donner à
l'Œuvre sur ses membres? N'est-elle pas rt;lille, fois iJ;lcomp6tente pour
régler ce qui se lrQuv~ fix é., autorisé et c\ln~ac~é par les titrQs, les actes
et les co nventions intervenus 4e l'Œuvre \liUI ,conQessiÇll)na,ire$ et faoul~
talaires? ~'y a-t-il pas ici III Rreuve ~yidente d'uo empiètement?
M~mes observalipns sur l'article fi, ,Ipuclu).pt 11\ , I:~purtition des dépenses de toute naLure à faire, entre les, m i3mb,~s, de l'lEuv~e : ppurquoi le projet de règl ement s'"n pflioGcupe-t-i~? ~(! moindre inconv~l!lienl
de eel empiètement, c'est de créer sur ce pqint deux codes dilOCérents
pour les intéressés, le code administratif et rle code de 1571, conventionnel ; c'est de faire naHre la pensée de transporter devant les tribunaux administratifs les difficultés ou contestations qqi peuyent s'élever
sur ce pci,nl ; c'est d'élever autel contre autel.
N° 3.
Le projet de Tèglement pm·te atteinte au ca1"actère illim ité l1è la concession
d~
•
1554 .
En distinguant cette violation des droits de l'Œuvre gônérale de
Craponne, et en la séparant des précédentes, nous n'avons qu'un but,
celui de la rendre plus saillante et d'attirer sur elle loute l'allention .
- 55Au fond, c'est toujours une atteinte à notre droit. Mais ici elle est
si grave, qu·elle mérite un e note spéciale.
On a vu dans l'instance terminée par l'arrêt du· conseil d'État du
10 février -1859, que l'Œuvre de Craponne avait soutènu le caractère
illimité de su concession; qu 'elle avait énergiquement posé sa prétention à Cèt égard, et qu'elle l'avait posé en contradiction à celle du
ministre qui soutenait le contrairé.
Dans ce débat, qu'a fait l'arrêt du conseil d'É lal? Il a déclaré quê
la prétention du ministre n'était autre chose qu'une int~)'PréLàtion qu'il
faisait du litre, qu e ce droit ne lui compétait point, et qu 'il n'appartenait qu'ail Souverain cie la faire .
Le projet 's'aITranchit de cettè loi. Il continue l'interprétation du ministre. Il l'applique el la réalise n acte ert disant dans l'article 2: ( Lé
volume a'eau à dérivér de la Durand! pout alImenter le grand èa nal
demeure fixé pendan't 1 êtiagc tle la riVière à 10 mètres cubes par seconde, sous' condilion qo1é 1t:!s ea x auxqùelles ont droit les moulin's dé
Laroque et de Mallemort, ct qùi ne seraiènt pas utilisées par les arrùsages d811S le plSririlètre Ile la concession , seront rendues dans la Durance, après avoir mis' en jeu ces usines . »
Ce procédé es t illégal ; il es t contraire au titre de 1554; il est aussi
contraire à l'arrêt du -10 févri er '1859 du conseil d·État.
Ac tuellement I"Œuvre de Craponne emploie 42 mètres cubes d'eau
qu'elle dérive de la Durance. Elle s'est successivement élevée à ce
chilTre, il mesure du développement de l'irriga tion d~ns les co ntrées
que le canal arrose. Le projet n'accuse pas l'Œuvre de prendre inutilement les eaux. Il pourrait mème arriver, dans un avenir plus ou
moins long , que les besoins nouveaux exigeassent au-d ~là de ce qui
es t aujourd'hui consommé; et dans celte hypothèse, le titre de 1 55~
accorderait encore le droit de dériver ce qui serait encore néceSSaIre. Ou
es t donc la justice? 011 est le res pect des droits acquis ? Ne dépouille-t·on
pas l'Œuvre générale de ce qui lui appartient? Ne tarit-on pas pour l'avenir
encore la source des améliorations possibles ? De mème que nous avons
vu dans les exemples cités plus haut, des indemnités accordées par les
�-
36-
tribuoaux civils et administratifs pour diminution des forces motrices
d'une usine, de même l'État va s'exposer ici, pal' cette disposition, il
une indemnité immense pour la réduction et la privation des 2 mètres
cubes d'eau qu 'on veut supprimer. A-t-on réfl échi il pe qu'il va en coùter
à l'État, si celte action est introduite ? A-t-on supputé ceque ces 2 mètres
cubes d'eau peuvent arroser d'hectares, quels produits ils peuvent faire
na1lre, quelle perte par conséquent leur privation peut cntralner? Ce
n'est pas seulement à l'action de l'Œuvre générale de Craponne que l'on
s'expose; c'est aussi à celle des arrosants qni profitent de ces eaux et
qui ont traité avec l'Œune. Convient-il à l'État de bouleverser des contrées intéressantes et fertiles ? De les réd uire il form er des plaintes ?
D'avoir à payer des indemnités ? Est-ce sage? Est-ce prudent ?
. Le projet semble comprendre tout cela; aussi le rapport qui le précède essaie-t-il de motiver une mesure si grave et de la faire accepter.
Mais les motifs allégués ne sont pas plus acceptables que la mesure
elle-même.
Vous dites que 10 mètres cubes suffisent à tous les besoins . - ,Mais qui
jugera la qu es tion ? L'administration ne peut pas être juge et partie sur
ce point. Devant qui donc se portera cet immense procès? N'es t-on
pas effrayé par la pensée de tout ce qu'il entralnera de difficultés et
d'embarras? D'ailleurs, c'est précisément ce qu e le titre de 11î1î4 a voulu
prévenir. Il ne fixe pas de qUdntité, ni de 11IeSUI'e. TI accorde tout
ce qui 'est employé. Et c'est pour prévoir les débats sur ce point que
la concession a eu cette largeur .
Vous dites encore que le surplus des 10 mètres cubes est nécessaire
pour des concessions postérieures à celle de 11î1î4, faites sur les eaux
de Durance. - Mais la priorité est acquise à Adam de Craponne. L'État
n'a pas pu par des concessions postérieures réduire la première. Celle-ci
reste ou doit rester ce qu'elle était. On a vu plus haut la do ctrine précise de M. Estrangin qui condamne cette prétention, et qui dit bien
haut que le canal de Craponn e ne peut pas être privé de ses eanx par
des concessions survenues après 1534.
N'est-il pas plus rationnel de réduire, au contraire, les concessions
- 57postérieures ? Celles qui n'ont dû compter que sur ce que le canal de
Craponne ne prendrait pas? On n'a pas à craindre de celles-ci les mémes
con séquences qu'on aurait à redl)uter de l'autre. Là, pas de demandes
en indemnité possiLles. Par un Inot, on éconduirait toutes les prétentions. A choisir entre deux positions si différentes, on ne comprendrait pas pourquoi l'État préfèrerait porler atteinte à ce qui appaTtient
à J'Œuvre générale de Craponne.
On dit encore que cetle réduction ne doit s'op~rer que duran t l'étiage. - Mais, cetle durée dul-elle être courte, elle n'en constituerait
pas moins, et dans la saison où l'eau devient encore plus nécessaire, un
grave et immense préjudice pour l'irrigation. Mais que sera-ce si cette
saison de l'étiage , par le mouvement des eaux , se prolonge, del'ient
autre que ce qu'on a l'air d'indiquer ? Enfin , si cette réduction doil être
si peu de chose, pourquoi nous l'imposer ? Quel bien fera-t-elle aux
autres 1 Quel secours leur apportera-t-elle? Si c'est une chose inappréciable, autant vaut-il que rien ne soit changé?
Ainsi les motifs allégués ne peuvent pas justifier la mesure.
L'article 2, que nous exam ino n~, renferme enCOle une disposition
fort grave: c'est la condi ti on relative au retour dans la Durance des
eaux des moulins de Mallemort et de LlIroque.
Ce point a de la gravi té. Il mérite qu'on s'y arrête.
La disposition de l'article 2, relative aux eaux de fuite des moulins
de Laroque et de A/allemm·t, doit êlre examinée au point de vue du
fait et au point de vue du droit.
.\u poinl de Vlj e du fait, on dirait que le projet de règlement ne
co noait Pa~ les fails relatifs aux eaux de fuite de ces deux moulins,
ou qu ' ill e~ ouhlie pour se don.ner le plaisir dfl faire une menace inutile.
En effet précisons d'ab ord ce qui concerne le moulin de Laroque
et on verra qu e les eaux, soit avant le moulin , soit après lui , sont
entièrement consaorées à l'irrigation.
La prise d'eau du moulin de Laroque est il Puyberas, près la prise
d'Adam de Craponno ; le eam qu'elle dérive, avant d'arriver au
8
•
�- 58mo ulin , arrosent uue étendue de terrain assez considérable sur un
parco urs de <11500 mètres environ.
A p ~ès le moulin , cette irrigation est bien plus considérable encore.
Le béaI de fuite du mO,1,llin est établi a1:1 milieu de la plaine entre le
C8nq.1 d~ Craponne et la Durance. Il la traverse sur une longueur
d'envi ron 4,, 000 mètres. C'est là proprement ce qui s'appelle la fuite
du moulin . Il arri ve bien souvent qu o les arrosants de Lanoque absorbent toutes ces eaux de fuite.
Quand elles ne sont pas absorbées en entier par les arrosants de
Laroque, les ea ux sont utilisées et appliquées il l'irrigation !par les
habitants du hameau de la Royère c dans la commune de Charleval.
Ils en us!)nt en vertu d'un traité passé par le seigneur de Laroque,
alors qu' il fut deven u acqu éreur du moulin de Lar0!que q1:1e la C0mmune lui ava it vendu. D'après CIl traité 1les " habitants ,de la U0yère
obtinrenl le droit de se seIyir des eaux"sous ,la ,c0ndition d'entreténir
à perpétuité, en bon étal de fO lilctionnernent, 1I ~ Gansl de fuite du
moulin jusqu'au l'oudel dlldit 1 moulin, Ces oOFltlili0ns s'exécutent
encore et elles sont en pleine vigueyr.
1
Eniin ces mêmes ea LlX, lorsqu'elles sont abendantes , qu'elles dépassent les besoins de l'irriga tion de -ce hameau, et qu'il en reste, son t
transmises et_appliquées à l'irrigation par les particuliers de Mallemort
au quartier de Brame-Jean.
On comprend maintenant de so i que le canal de fuite finit et que les
eaux qu 'il porte s'é puisent, après l'application qui en est faite d'abord
dans le territoire de Mallemort par un parcours de 5,500 mètres;
ensuite dans la commune de Chadel'al qu'il trayeuse toute, et enfin
dans celle de ~fall emort où il aboutit. Que reSle-t-il donc d'inappliqué,
d'inu tile, de perdu pour l'irrigation ? Rien. C'est d'un e évidence incontestable.
L'Œuvre générale peut donc s'étonnèr à bon droit que des faits
aussi publics et aussi graves soient oubliés ou méconnus. Elle ajoute
en terminant sur ce point, que lorsqu e la saison d'arrosage a cossé,
les eaux de fuite du moulin de Laroque se rendent dans la Duran ce.
-
59-
Par leur niveau, ces eaux ne peuvent plus retourner au canal principal.
Que l'on jette les yeux sur la carte du département de M. Philippe
Matheron, et tous ces faits de localités et ces divers points vers lesquels les eaux se dirigent seront rendus sensibles à l'œil.
Maintenant pour ce qui concerne les eaux de fuite du moulin de
Mallemort, il y a encore des observations de fait décisives à préciser,
que la même carte rendra saisissantes.
On sait qu'Adam de Craponne construisit son moulin près de Pont.
Ruyal, à 100 mètres environ du canal, entre les limites d'Alleins et
de Mallemort. Les eaux de fuite de ce premier moulin vont faire tourner le moulin si'lué dans Mallemort. Et ici se renouvelle encore ce
que news avons vu plus haut pour le moulin de Laroqu e. Du premier
moulin al!l seoonci lés eaUK sont employées à l'irri gation , et il en e.t
de mème à parl"ir du mQùlin de Mallem0\"t.
:Entre les deubl mouliFls, la bief oa le béaI arrose, dans son parcours, une grande partie Elu vaste terroir de Mallemort, au point que
bien souvent le moulin situé clans l'enceintè de ~lall em o rt ne peo t
tourn er faute d'eau. Après le moulin de Mallemort , les eaux de fui te
arrosent, dans le territoire de la co mm une de ce nom, tous lés terrain s que la pente des lieux peut perm ettre d'arroser. Elles vont
ensuite aboutir dans le tefl1itoire de Sénas, où elles sont absorbées en
entier.
Que veut-on de plus? Y a-t-il, ou pourrait-il y avoir un emploi des
eaux plus conforme au but de la création du canal de Craponne?
Il Y a plus; il existe un titre dont la date remonte à l'année ·1650
ou 1660, par lequ el l'Œuvre général e de Craponne a cédé à M. de
tubièrcs, pl10priétaire du 'illoulln de Sênas, les eallx de fuite du moulin de Mallemort, soit pour les employer à mettre en mouvement le
moulin de Senas, soit pour les employer à l'irrigation ; le tout so us
la cotisation annuelle de Hi écus. L'Œnvre a eu incontestablement le
droit de disposer comme elle l'a fait. Elle était là dans l'exercice de son
droit. La co ncession de 151i4, dit que Craponne co nduira les eaux;
« en tel lieu que bon lui semblera et où ladite eau se pourra co n-
�- 60duire. Il Il est de plus de notoriété publique, qu'avant l'établisselllent
dn canal de Boisgelin dit des Atpines, une partie du territoire de
Séuil,s !lI notamment III domaine de la Bm'onne,.ie était arrosé par les
eaux. de Craponne. En 1780, lors de la conswuctiQn de ce canal, qui
sur Ce point venait inttlrceplcr la communication et priver <lU domaine
des eaux de Craponne, un quart de moulan d'eau de Bois!jelin lui
fut accordé pour compenser la perte qu'il faisait des eau.x dll Craponne.
Lors donc qu'aujourd'hui les eaux de la fuile du moulin de ~lall e
mort, après avoir arrosé, dans le territoirtl de cette. commune, ce qui
peut l'être, l'ont arroser dans le ter~itoire de ~énas, elles accolllplisselü et re/Dplissent Ilncore.le but d~ l' in ~tiLution du canal d~ Craponne.
d "
Enfin ici, Gomme plus ha;ul, en temps ,de plujor pu en piv\lr, ~a,Juite
du. mouJ,in de llallemort va d~gorger , iW I!?u.rap.ce, ,npn )Qin ,dl) moulin .
L'exposé seul du fait suffit donc pou~ çpndQmQ.Qr la ,1'~s tniçtio n Oll la
menace de l'article ~ dl) projet de tègl~rnent, ~~ais leAroit la condamne
bien plus encore.
)
d
A.dam de Craponn e a été le lI\ait,e, d'apr~ lia concession de Hi54,
d'établir les moulins de LarQque et de Ala11emo~1 dllns 1!I ,silu&\ion où
ils sont et de les alimen ter avec les eaux de la ~urance. Les canaux
de fu ite , comme les canaux d'arrivée, ont été abandonnés à sa
direction exolusive. Les eaux de ces canaux de fuite, quand elles servent à arroser et à meUre des usines en mouvement, rem pli ssent don c
leur destination. C'est notre situation. On vient de ~e voir. Mais notre
dro it irait plus loin encore. Quand m,ême ces eaux de fuite n'auraient
pas encore trouvé leur applicl\tion; quand il faudrait l'attendre du
temps, d'un plus grand progrès dans l'agri culture, de défrichements
non encore opérés, ou d'une plus grand e habileté dans l'art de ménager les pentes; quand, par suite de toutes ces causes, il Y aurail
suspension dans l'application de ces eaux, l'administration n'aurait pas
le droit de nous les enlever. Elles font partie de la concession .
Elles ont servi au jeu des usines et à l'irrigation. Le plus grand
- 61 dcveloppement, ou la plus grande utilité que l'on en peut retirer, est
un droit acquis à l'Œuvre, dont on ne peut la priver. Car si demain
des études neuvelles, des applications mieux faites, des théories mieux
combinées, nous donna ient le moyen de rendre actif de qui serait
aujourd'hui inaotif , il faudrait que nul obstacle ne nous arr6tàt dans
l'exercico de notre droit. Et c'est ce que l'article :2 du projet de règlement nous refuse implicitement, puisqu'il veut qu'on retranche il l'Œuvre générale ces eaux de fuite, si dès ce moment elles sont improductives. Par leur Mrivation de la Durance, par leur introduction dans
nos canaux et par leur application à nos premiers besoins, elles sont
devenues notre propriété; elles sont entrées dans notre domaine. Nous
pourrions attendre que lé temps et les circonstan ces nous permissent
de les appliquer, comme le ferait tout propriétaire d'une source qu'il
a chez lui , qu'il etnplo\è ou qu'il n'emploie pas, et qu'il se réserve
d'appliquer dans un temps ' Itlti! ou moins éloigné. NoIre situation est
entièrement semblablè: d'après la maxime: Aqua tngrèssa meum fundlbln mea est. ~I xi'ine aussi vraie pour une eau privée que pour un e
ea u publique à la déri vation de laquelle on a un titre irréfragable.
Pourquoi donc insistons-nous sur ce point 1 Pourquoi insistons-nous
sur une hypothèse qu i n'est pas la nôtre ? Pour montrer tout noIre
droit; pour faire voir tout ce qu'il est; combien il est méconnu; enfin
pour qu'on le respecte davantage. Il ne sera jamais inutile d'avoir
prouvé à l'administration que le fait et le droit se réunissent ici pour
condamnèr la disposition de l'article 2 du projet. 11 sera touJours utile
de lui -prouver qlle ce que nous faisons remplit le but de notre in~
titution, et que quand mème nous n'agirions pas comme nous le faisons, nous a1lriOl1S encore le droit de résister il ce qu'elle demande.
b
�-
6~-
Charge et "lnlûtiplicité des tl'avaux imposés par les al'tfcles .2 et
projet de l'èglement.
lr
du
Il suffit de signaler ces points, sa ns y insister , en détail. L'Œuvre
de Craponne est une société dans laquelle les revenus et profils doivent
compenser les charges. Si on rompt l'équilibre qui s'est établi entre
ces choses, on viole l'essence du contrat qui a réuni les associés. On
en change les bases. Or, c'est ce qu e fait le projet. JI multiplie les
travaux ; il redouhle d'exi gence quant à ce, sans examiner si les revenus so nt en proportion. t e luxe des travaux qu'il impose ri'esl ' pas
nécessaire. On comprendrait qu'on pùt l'imposer à l'État, si l'État était
propriétaire. Mais on ne peut pas en charger indéfiniment le particulier propriétaire d'UI) canal. Serait-li permis à l'a ~rn'ini s tra[i 'o'n ' d'ex igër
que téls et tels travaux fuss~nt réalisés ' dans un e propl'ié!é ' privee'!
Doit-il l'être ici de rendre la concession très onéreuse, alors qu 'ell e
a été affranchIe de toute charge quant à ces travaux. Pourrait-Il l'être
de faire périr le concessionnaire sous leur poids? Ne faul-il pas en
cette m,atlère prendre conseil du fait, ne pas courir après une perfech?n Ideale? Et Ici. encore, l'empiètement el l'inco mpétence de l'admillIstratlOn ne so nt-Ils pas évidents ?
•
§ IV.
RllpODse Inu objectloDs de ('''dmlnlstraCion.
L'admini s~ration invoque sans doute, à l'appui de so n projet, la lot
en forme dmstructlOl,I du 12-2.0 août 1790, qui charge les adminis-
trallons de département: « De rechercher et indiquer les moyens de
procurer le libre cours des eaux ; d'empêcher que les prairies ne soient
- 63submergées par la trop grande élévation des écluses, des moulins et
par les autres ouvrages d'art établis sur les rivières; de diri ger enfin
autant qu'il sera possible, toutes les eaux de leur territoire vers un but
d'uti lité générale, d'après les principes de l'irrigation. )) '
Elle invoque sans doute encore la loi du 1~ floréal an XI (~ mai
1803) , relatJve au curage des ca naux et rivières non navigables, dont
nous raPPellerons bientot le texte, dans ses articles 1 et 2.
Mais, quelques réfl exions qui vont sui vre, suffiront pour démontrer
qu'elle s'appuierait envain sur ces textes de lois pour légitimer son
proj et et 'le présenter comme le produit naturel de cette partie de
notre législation .
Il est évidlmt ~'abord que la loi du 12-20 aoùt 1790, in voquée pour
légitimer le prpjyt ~I'\ règlement dfl canal de Cra ponne, ne peut pas s'y
appliquer,
.
1
te l ~g i sléj f ur lui-U\~p1e a .Ilri s soil) de s'en expliqu e~. Cette loi ne
peut oo ncerner R\.lYles can~l1fl publics cI;~rrigation appartenant à ~'État,
et elle r e~ te fçrç~e,n \ é\r1)ngèrç !\UX canam; d'irrigation qui sont des
propriél lis l!riv~es.
L'a~Tè[é ,du Direçto ire du 19 ventôse an 1'1, co ntenant des mesures
pour assurer le libre ço ur~ des rivières et canaux navigables et flottables, fait en eJfyt cette distin cti on. près avoir reproduit en entier le
tex te précité de la loi du 12-20 aoùt 1790, et quelques autres, il considère :
« Qu'au mépris des lois ci·dessus, les rivi ères navigables et fl ottahIes., les cctna~/x d'ùTigat ion et de dessèchement , lant publics QUE
PRrnls, sont obstru és .... .... ~)
Puis, dans l'arti cle 1oc, il cbarge l'administration départementale:
« de faire procéder à la l'isite de foutes les rivières navigables et flottables, de tous les c ana~/x d'i1'rigation et de dessèchements GÉN€ IU.UX,
et d'en dresser procès-verbal à l'effet de constater: ,1°... .. 2° ..... ))
Dans les arti cles 3 et sui v., l'hrrêlé continue à ordonner pour ces
canauœ d:il'l'igation général/X des mesures dont l'administration e;!
chargée.
�-
6~
-
liais quand il a,rrive à $'expliquer sur les canaux d'irrigation prirés
ou pœl'ticuliel's, son langage change. Ce n'est plus l'administration qui
doit agir, ce sont les pnrtiCliliers propriétai'res de ces canaux .
L'article 11 dit, en eITot : « Las pl"opl'"iétail'os DE CANAUX de dessèchement PARTICULIERS ou n'IRRIGATION, ayant à cet égOJl'd les 1IIttmes
d"o its que la nation, IL LEUR EST RESERrll de se pout'voir en justice
réglée pour obtenir la démol ition de toules usines, écluses, batardea ux,
pêcheries, gords, chaussées, plantations d'arbres, filets dormants il
mailles ferrées, réservoirs, engins, lavoirs, abreuvoirs, prises d'eau, et
généra/ement de toule construction nuisible a·u libre COU1'S des eala et
non (ondée en droit. »
Ici, l'exclusion de l'administration est complète. Elle ne peut plus
rien requérir, rien ordonner, rien prescrire. La loi se repose sur l'in·
térêt du propriétaire du canal. C'est lui qu'elle charge de veiller à l'en·
tretien et il la conservation de sa chose.
Et remarquons qu'il en est ainsi, de quelque manière que ce canal
particulier ou privé d'irrigation s'alimente ; que ce soit par des eaux
dérivées d'un fleuve ou d'une rivière, que cc soit par des sources naturelles, que ce soit par des eaux de pluie, peu importe. La disposilion ne change pas . C'est au caractère de la propriété privée wu canai
qu'il s'attache, et ce caractère suffit pour rendre l'administration incom·
pétente à rien prescri re et Ir rien ordonner.
Rappro chons maintenant de ce texte décisif, emprunté à l'arrêté du
Directoire du '19 ventose an VI , le projet de règlement préparé pour
le canal de Craponne, et demandons-nous si ce texte n'est pas la
condamnation la plus énergique des desseins de l'administration. Le
doute ne peut pas un seul moment exister sur ce point.
Disons encore que le texte en tier de l'arrête démon tre aussi que la
loi du Hl-20 aoùt '1790 est ici inapplicable. L'arrêté le dit énergiquement, puisqu'il ne l'applique pas aux canaux particuliers d'irrigation
et qu'ils en sont exceptés.
L'intention du législateur de l'an 1'1 est tellement marquée, que l'exception faite po ur les propriétaires de canaux particuliers est res-
65treinte à ceux-ci, et que pour les canaux appartenant à des communes, l'/lrrêté rentre, au moins partiellement, dans le système général,
parce que les communes so nt en tutelle et sous la main de l'admirustration. Il est dit en eITet dans l'article 4;iL « Il est défendu aux
administrations municipales de consentir à aucun établissement de ce
genre dans les canaux de dessèchement, d'irrigation ou de naviga tion
appartenant aux communes, sans l'autorisation formelle el préalable
des administ1'ations centmles. )) Mais cette concession limitée aux communes ne fait que rendre plus saillante la position entièrement libre
du propriétaire d'un canal d'irrigation .
Enfin urt article de l'arrêté, l'article 13, parle encore pour les callaux
arti~ciels, c'est-à-dire, construits de main d'homme, qui sont ouverts
directement il la mer, de manière à repousser soit la loi de 1790,
soit l'action de l'administration .
« Il n'est 1'ien innové, dit-il, à ce qui s'est pratiqué jusqu'à présent
dans LE S CANAUX ARTIFICIELS qlli sont ouverts directement à la mer ... 1)
Cet article lai sserait donc le canal de Craponne hors des attein tes
de l'administration , puisqu'il réunit la double condition: qu'il est
arti~ciel, c'est-A-dire, fait de main d'homme, et qu'il va à la mer, et
qu'il aboutit à l'étang de Berre.
Le premier texte de loi sur lequel l'administration voudrait se baser
pour légitimer so n projet de règlement, ne peut donc pas lui servir
de point de départ légal.
Il en est de même de la loi du 14 floréal an XI. On va le voir.
Remarquons d'abord que la ligne profonde de démarcation, tracée
par l'arrêté du Directoire du 19 ventàse an VI, entre les canaux généraux d'irrigation publics, et les canaux d'irrigation particuliers et privés,
n'a été effacée, ni détruite par aucune loi posterieure, et surtout que
lorsque la loi du 14. floréal an IX a été promulguée, elle était, comme
elle est encore, dans toute ~a force, et que cette loi ne l'a pas détruite.
Elle porte: « Art. 1". - Il sera pourvu au curage des canaux el
rivières non navigables et A l'entretien des digues et ouvrages d'art qui
-
9
�-
66-
Y co rrespondent, de la manière prescrite par les anciens règlements,
ou d'après les usages locallx,
« Art 2, - Lorsque l'application des règlements 0U J'exécution du
mode consaoré par l'usage éprouvera des difficultés" ou lorsqne des
changements survenus exigeront des dispositions nouvelles, il y sera
pourvu par le go uvernement dans un règlement d'administration publique, rendu sur la proposition du préfet du département. de manière
que la quotité de la con tribution de chaque imposé soit toujours relative au degré d'intérèt qu'il aura aux travaux qui devront s'efl'ectuer, »
Évidemment celle loi ne détruit pas la distinction faite par l'arrêté
du '19 ventose an VI. Évidemment, elle ne détruit pas la réserve faite
par l'arlicle Xl de l'arrêté, La nature des choses a conduit ici le 1égislateur. Les canaux particuliers, laissés aux soins de leurs propriétaires par la loi de l'an VI, ne 'sont pas placés par la loi de l'an XI
so us la maiu de l'adminislration, L'ordre légal préexistant n'est pas
changé. Il aurait fallu qu'uu texte précis vint détruire ' le lext~ précéaent. Or ce texte n'existe pas, Donc la loi de l'an Xl doit être entendue
et appliquée non aux canaux pllffticulilYrs, constituant des propriétés
privées, mais excl usivement aux canaux généraux de l'État,
M, Davie), Tl'aité des COU1'S d'eau., t. li, p, 406, n° 831, ne fait pas
difficulté d'appliquer à ces canaux l'article 11 de l'arrêté du ,19 ventose an 1'1 : ({ Les propriétaires, dit-il, - des canaux d'irrigaliclll ont,
comme dit l'arrêté du 19 ventose an l'l, les mêmes droits sur leurs
canaux particuliers que la nation sur les canaux généraux, ))
Dans la pratique, on ne voit pas non plus la loi du 14 floréal an
Xl servir de texte et de base à des règl elIlenls administratifs pour des
canaux partiouliers d'irrigation. D'après la jurisprlldence du conseil
d'État, et vis à vis de ceux-ci, l'autorité administrative n'aurait qu'un
droit, celui d'empêcher, dans l'intél'êt de la salubrité publique, les
Inondations qui pourraient alleindre lés propriétés riveraines faute du
libre éco ulement des eaux, Mais l'immixtion dans le régime intérieur
du canal, mais des mesures prises par l'administration, préventives,
de précaution, quand il n'y a. pas inobqahon et arrê~ du libre cours
-
67-
des eaux d'un canal d'irrigation, on ne l'a jamais vu pour des canaux
d' irrigation formant des propriétés privées,
Nous en trouvons un exemple dans un arrêt du conseil d'État du
.24 janvier 1856, rendu au sujet du canal de la Durançole, canal d'irrigation et propriété particulière, destiné dans le principe à conduire
à Avignon les eaux de la rivière de Durance, Le conseil d'État n annulé les actes administratifs, les arrêtés et les règléments fails par le
préfet du département de Vaucluse ; et il l'a fait par les molif~ suivants:
« Vu les lois des 12-20 août 1790 et 28 septembre 1791, et le
décret du 25 mars 185'2;
« En ce qui touche l'arrêté relatif au cerage: - considérant qu'il
résulte de l'instruction que le canal de la Duranfo le (L été creusé de
lI~a.in d' hOln111e et est une 1Jropriété privée; qu e ce canal ne reçoit
que les eaux qui ont oté vendues à ses propriétaires en 1757 , par des
actes et con ven tions privées ;
« Considérant que le préfet de Vaucluse ue s'est pas borné, par l'arrêté attaqué, à ordonner le curage de ce canal pour assurer le libre
écoulement des ea ux, ainsi qu'il en avait le droit en rertu des lois et
décrets ci-dess us visés; que les meSlU'es qu'il a prescrites par les articles 5 et 6 de sail arrêté auraient pOUl' ,'ésultat de portel' atteinte ater
droits de prop,'iété des ,'equérants; que, d~s-Iors, il a agi en dehors
des pm!roirs qui lui sont atll'ibl!és en celle li.ati~t'e. ))
Remarquons que ce que le préfet de Vaucluse avai t prescrit par les
articles 3 et 6, ressemble parfaitement à quelques-unes des prescriptions co ntenues dans le projet de règlement préparé pour le canal de
Craponne, C'étaient, d'après l'arrèt, des travaux imposés aux propriétaires du canal tels que des rev~ tetnents en perrés maçonnés Slt1' les
deux {aces latoNûos dl! canal ; que le pla{ond seI'ait maçonné dans sa
travcnée cl. IIaqueduc du tl'OIL de La Ca/ade, et que {aute Pal' les propriétaires de se con{I)I'JIIel' œces cl-ispositions, la vanne servant d'introduction des eauro dans le canal s&rait ftmn ée:""
Si ces dispositions n'ont pu être légitimées par les lois précitées,
�- 68ni par la loi du 14 floréal an XI, comment celles que nous repousso ns avec énergie dans le projet de règlement pour Craponne pourrai ent-elles être admises?
Mais ce n'est pas tout ; la partie ultérie ure de l'arrêt du conseil d'Étal
vient enco re confirmer celle que nous venons de faire connat\r.e. Il continue en ces term es :
« En ce qui touche l'arrêté portant règleII\ent du régime hydrau- .
lique des usines et des--barrages d'irrigation: - Considérant qu'aux
termes de lois et décrets ci-dessus visés, il appartient au préfet, dans
\In but d'utilité générale et pour cause de salubrité publique, de prendre
toutes les mesures propres à empêcher les inondations qui p0161Taient
résultm' de la trop g1'ande élévation des écluses des moulins et des
altl1'es oUVl'ages d' m't établis sur les cours ~l' cau ; que si ce droit peut
s'exercer nonobstant les titres privés invoqués par les particuliers et
indépendamment des actions en dommages et intérêts qui pourraienJ être
intentés, il ne rés ulte pas de l'instruction qu.e/arrèté attaqué qui, sur
la demande du propriétaire du moulin de Caumont, a soumis les propriétaires du canal pour la copseryation de leur!) usin!js et de leurs
barrages d'irrigation, aux conditions d'un règlement administrl\tif, ait
eu pour cause un intérêt public; que dès-lors, il y a lieu d'annuler pour
excès de pouvoir, l'arrêté dont il s'agit. » (Lebon, 1856, p. 69 etsuiv,)
D'après l'arrêt, l'intél'êt public, qui seul aurait pu autoriser les mesures administratives, aurait donc été le danger des inondatio1lS, la
surélévation des écluses ou des ouorages d'a1't, qui pouvaient rejeter
les ea ux sur les terres, D'après lui , quand cet intérêt n'existe pas ,
l'autorité administrative est sans droit.
Que nous faut-il de plus· pour ' le canal de Craponne? Ce n'est pas
non plus, dans le projet de règlement, ce danger qui est dé tourné; ce
n'est pas lui qu 'on arrête, qu'on prévient, qu'on empêche; ce n'es t
pas de quoi le projet se préoccupe, C'es t l'immixtion dans le régime
de l'Œuvre, c'est la refonte de notre œuvre qu'on veut opérer et que
le projet opère, Les lois précitMs la proscrivent do no et le conseil
d'État la condamne,
- 69Nous pouvons maintenant aller plus loin et montrer, sous un autre
point de vue, la fausse application que l'on ferait de la loi du 14 floréal
an XI, si on l'invoquait pour justifier le projet de règlement.
Cette loi n'autorîse qu'une seule chose, savoir: des dispositions pour
le curage des canaua; généraux d'irrigatian , et pOU1' l'entretien des digues et ouvrages cl' art qui y correspondent. Voilà la limite bien tracée,
Elle n'autorise pas autre chose, Dès lors, le règlement préparé pour
Craponne serait encore mal obvenu, puisqu'il porte sur des points bien
différents; que ce n'est pas le curage du canal qu'il a eu en vile; ni
l'entretien des digues ; vu qu 'il organise un système entier, une manière
d'être, de vivre, de fonctionn er, pour le canal, toute différente de celle
qui a existé jusqu'à ce jour,
D'ailleurs, ceUe loi rend ob1igatoires les anciens règlements; elle prescrit à l'autorité de s'y conformer. - Elle dit : « Il sera lJOUrvtl,. , de la
ma'liiè're prescdte PAR LES AIiCfENS RÈGLEMENTS, ou d'apl'ès les usages
locaua;, » fci ces règlem ents existent; ce sont les titres de '157 1 et 1583,
lesquels sont en pleine vigueur depUIS trois siècles, n'ont jamais cessé
d'être appliqués, et tracent dans les plus grands détails non-seul ement ce
qui concerne lé cl6rage du canal, son entretien, celui des œuvres d'art
qui l'accompagnent, mais encore règle l'entière adm inistration de tout
ce qui s'y raUache, Si jamais ces anciens règlements doivent continuer
à être exclusivement appliqués, c'est bien ici, puisqu 'ils se présentent
avec le caractère solennel que les âges et l'ex périence de plusieurs siècles leur ont donn é, Les term es de la loi de floréal an XI proscrivent
don c les innovations nouvelles , Elle fait, elle-même, appel à nos titres;
il n'y a pl us qu'à les laisser appliquer , et elle défend qu e l'administration s'en écarte.
On peut citer, " l'appui de cette tb ès~, l'arrêt du conseil ~'État, du
~ avril 1847 ~es propriétaires des maraIS de Bordeaux), Il s expnrne
en ces termes: « Considérant que lorsqu'il existe d'an ciens règlements
ou des usages locaux, c'est par leur application qu'il doit être pourvu
au curage, d'après l'artlcle 1 ~' de cette loi ; que, dans l'espèce, SI le
conseil de préfecture avait eu connaissance du règlement de 1773, avant
�- 70de prendre son premier arrêté, ce conseil n'aurait pu l'épartir les frais
de curage entra les propriétaires riverains, sans que son arrêté encourut
l'annulation comme contl'aù'e à ce l'èglelllent ; qu'ain.si /e premier a1'r~lé
altaqud ne piiut subsister aujourd' hui que ledit l'èglement est pl'oduit, ...
(Ledru-Rollin, Col/ea lion des alTêlS du co nseil d'État, t. Il, J!l. 356). »
Quand tout cela est obligatoire, alors même qu'il s'agit de canaux
généraux appartenant à l'État, à combien plus forte raison Ilela l'est-il
quand il s'agit de canaux qui sont des propriétés privées, Si on redoute
les innovations pour le premier cas, combien plus les redoute-t-on pour
le second?
Ajoutons qu'on ne se sa uverait pas de nos réponses, en faisant remarquer que, d'après l'article 2, les règlements anciens et l'usage doivent oéder, quand l'ezéouti01~ j'enGonli'e des difficultés, ou quand des
changements survenus exigent des disposit'ùms nouvelles. Quand i\ s'agit
d'un canal , propriélc privée, cette question préjudicieUe, ne peut pas
ètre vidée par l'administration toute seule. Elle se~ait jl.\ge et pllrbie.
Il faudrait un e instance où ce point.. préliminaire serait déba,llu et fixé.
Il faudrait qu 'il fui jugé que les dispositions aucienHes sont insuffisantes; que cela fut jugé contradictoirement avec l'Œuvre de Craponne,
qu'elle eùt été entendue, les faits et les titres exposés; qu'en ,un mot
le procès eùt été instruit sur cet incident. Or, ici ri en de pareil n'a été
fait, ni lente. L'Œuvre de Craponne n'a pas été appelée devant un
tribunal adm inistratif à se défendre sur ce point. Elle n'a pas été
condamnée. Donç elle peut repousser l'allégation, comme inexacte,
comme mal fondée, so utenir hardiment qu e les règlements anciens sont
suffisants et qu'il n'est survenu aucun changement qui y nécessite des
additions.
Concluons qu e cette loi du 14. floréal an Xl est inapplicable au canal
de Craponne, et que quand mème elle pourrait y être appliquée, elle
condamnerait encore le projet de règlement, soit comme idée, soit
co mme application.
Que resterait-il donc en définitive à l'administration pour colorer ses
actes 7 Une dernière ressource; ce serait de dire qu'il y a intérêt
•
-
7,1 -
public indirect dans l'irriga tion que donne le canal de Craponne, et
qu'à ce titre elle est autorisée à s'immiscer. - ~Iais on a vu plus haut
que ee n'est pas cet intérêt indirect qui peut autoriser son intervention.
Toute société, toute entreprise qui s'adresse au public , à cc titre là
pourrait donc être go uvernée, régie, controlée par l'autorité administrative. Il y a bien peu d'entreprise particulière qui ne touche le public
et à l'intérêt général. Le canal de Craponne a créé une foul e d'intérêts,
et une foule de personnes intéressées à son fonctionnem ent. Ce sont
les tiers qui ont traité avec lui , et ce sont les titres dont ils sont porteurs qui ont créé les obligations respectives. Or, tous ces porteurs de
titres sont autorisés ù agir eux-mêmes, d'après le droit commun , et à
défendre leurs intérèts. Ils n'ont pas besoin de l'administrati on. Les
tribunaux civils sont encore le second appui de ces personnes intéressées. Il n'y a don c, sous aucun rapport, nécessité de faire intervenir
l'administration dans le règlement de l'Œuvre de Craponne, et l'intérêt
public indireèt dont il s'agit ici se trouve suffisamment sauvegardé par
les titres et par les tribunaux civils. L'accession de l'administration n.e
ferait que substituer une autorité inco mpetente à un e autorité légitime.
Arrivés au terme de cette longue exposition , rend ue nécessaire, par
les aotes de l'administration, qu'il a fallu examiner sous toutes leurs
faces, nous aimons à espérer que la voix de l'Œuvre générale de Cra~
ponne sera entendue, et que oelle du droit, des principes et de la l OI
que nous avons cherohé à faire parler bien haut préVIendra les mesures
qui menacent son présent et son avenir, et qui en seraient la rume.
Aiz , 25 mai 1862.
A. TAVEBNŒB père,
.lvocat prés la CODr Impériale d'lix, inciea BAloDDier.
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'
~
.
,
MEMOIRE
POUR
LES PROPRIÉTAIRES
DES MOULINS A FARINE BANAUX D'HYÈRES
Appelants du Jugement du t 9 Juillet t 8~9, rendu par le Tribunal civil de Toolon
CONTRE
LE SIEUR GIRAUD, MINOTIER,
ET LES COMMUNES D'HYÈRES ET DE LA CRAU
Appelées en garantie; Intimés.
-.----.) .
AIX
IMPRIMERIE ILLY > RUE DU COLLEGE>
'1860
20
�,
MEMOIRE
POUR
LES PROPRIÉTAIRES
DES MOULINS A FARINE BANAUX D'HYÈRES
Appelants du Jugement du 19 JuilletI8!i9, rendu par le Tribunal civil de Toulon
CONTRE
LE SIEUR GIRAUD, MINOTIER,
ET LES COMMUNES D'HYÈRES ET DE LA CRAU
Appelées en garantie; Intimés.
LA banalité conventionnelle des moulins à farin e d'Hyères, constiluée
en 1688 et ,1689, cntre cette Commune et des particuliers non seigneurs,
es t aujoUl'd'hui' co ntestée 'après près de deux siècles d'existence. Un
habitant, un seul habitant de l'un de ses quartiers, attaque sa légalité,
el veut se so ustraire il ses effets,
Nous publions ce mémoire, dans l'intérêt des propriétaires de ces
moulins, pour repousser cette agression et démontrer que cette banalité est légitime, légale et fondée en litre.
�-4Nous allons d'abord faire connaitre les faits, Oll les di,'isant par
époques, afin de mieux les fixer. Puis nous aborderons le récit de la
contestation actuelle, et enfin l'exposé du droit qui doit la régir .
PREMIÈRE ÉPOQUE. -
De 1458 à 1689.
Le 27 décembre H.58 , notaire Bruny à Hyères, il intervint entre
Jean Natte, simple particulier, et la commune d'Hyères, un co ntrat
important. Jean Natte s'engagea, sous diverses co nditions, il amener
sur le territoire de la Commune, les ea ux de la rivière de Gapeau ,
à y construire au moins deux moulins à farine, et à les meUre en
mouvement avec les eaux de Gapeau.
La dérivation de ces eaux fut opérée sur le territoire de Soliers, et
la prise y fut établie avec le consentement du sieur de Bellevale, alors
seigneur de Soliers. Plus tard, les difficultés qui s'élevèrent sur l'exécuti on de cette dérivation, firent la matière d'une transaction entre le
sieur Palamède de Forbin, seigneur de Soliers et la commune d'Hyères .
Elle fut signée le 10 avril 1477.
Pour donn er.plus d'importance aux cons·tructions déjà faites, et pour
les agrandir, PIerrre Natte, fils de Jean, s'associa le sieur Louis Ro~olphe de Limans; et les conditions de leur société furent réglées par
1acte du 31 Janvier '14·86 . Ces moulins furent leur propriété commun e.
Mais ces moulins une fois établis, il s'opéra bientOt des mutations
qUI pn déplacèrent la propriété et la firent arriver sur la tête de. la
l:o mmune d'Hyères. Jusqu rs lit, celle-ci n'avait eu que l'avantage d'avoir
fait créer des moulins sur son territoire, pour la co mm odité et l'utilité
de ses habitants. Plus tard, elle songea il les acquérir.
Par un premier acte du 18 septembre 1537, notaire Bruny, françois
de Forbin, qui avait acq uis du sieur de Limans la moiti r des moulins
que l'acte d'a ssociation du ~ 1 janvier '14.86 lui donnait, les revendit il
la commune d'Hyères .
Par un second acte du 22 novembre 1555, un représentant" de Jean
et Pierre Nalle vendit IL la Commune le restant desdits moulins, ou
soit l'autre moitié.
La co mmune d'Hyères jouit de ses moulins il farin e et les posséda
jusques en 16!é~, sans songer il s'en défaire et à les aliéner. Mais
en 1642, pressée par les dettes qu'elle avait contractées, elle voulut
les donner il ses créanciers en paiement de ce qu'elle leur devait. Ses
moulins, au nombre de quatre, fur ent es timés 64,857 liv. , et ses divers
créanciers fir ent option sur eux jusques à concurrence de cette somme.
Mais les créanciers ayant attaqué plus tard cette estimation comme exagérée, et un procès s'étant engagé sur ce point, il y eut le '19 janvier
·16n, notaire Baud oin il Aix , transaction qui mit fin au débat. La
co mmune d'Hyères reprit ses moulins , et fut de nouvea u déclarée débitri ce des 64,857 Ii v. Elle obtint de ses créanciers de les payer d'année
en année, par des paiements partiels de 2,000 li". , jusques à extinction
du capital dù.
Le 27 février 1647 , notaire Commandaire il Hyères, la Commune
arrenta ses quatre moulins à Vincent Terras, pour quatre années, au
prix annuel de 1,MîO écus, et autres diverses charges. Elle lui indiqua
il payer à ses créa nciers le prix de so n fermage; et , afin qu e les revenus des moulins fussent plus sùrs et plus importants, elle stipula dans
le bail qu'aucun hah itant de la ville ne pourrait aller faire moudre ses
grains il d'autres moulins , et détermina le droit de moulure il payer
aux fermiers au quinzain .
On retrouve la même stipulation dans un aulre bail il Barry , du Î
mars 1685, no t ~ire Massillon à Hyère .
�-6-
- 7-
tes moyens pris par la ville d'Hyères, pour se débarrasser de ses
delLes, furent insuffisants. Elle en avait contracté d'autres depuis 164.2 ;
et, semblable en cela à beaucoup d'autres communes de Provence, elle
fut l'objet comme celles-ci d'une mesure grave prise pal' le pouvoir
royal. Il ordonna qu'elles paieraient leurs delles.
Le 19 octobre '1680, arrèt du conseil d'Il tat qui nomme le sieur
Jlorant, ci-devant intendant de Provence, pour procéder à la liquidation
des dettes des communes de Provence.
27 février '1683, procès-verbal de vérification et de liquidation des
dettes de la commune d'Hyères.
10 juillet 1683, remise de l'état des dettes en cent et un articles:
vingt-quatre pour les delles anciennes, liquidées en 16~.2; soixante et
dix-sept contractées depuis.
21 octobre 1687, nouvel arrêt du conseil d'État. II ordonne le paiement des dettes de la ville d'Hyères, les énumère et les fixe il 1\,1\,9,082Iiv.
fi sols; prescrit le mode de paiement avec les deniers qui proviendront
de la vente de ses domaines, qui ne seront pas nécessaires', ainsi qu 'il
sera ordonné par le siour Lebret, intendant de la province; et ù défaut
d'enchérisseurs, par l'abandon desdits domaines aux créanciers, sur le
pied de l'estimation qui en sera faite par le sieur Lebret; réserve au
conseil du Roi la co nn aissance des difficultés, et enfin, déclare exécutoires en dernier ressort les ordonnances de M. Lebrel.
2 décembre 1687, ordonnance de M. Lebret, intendant de la province,
qui prescrit l'exécution cte l'arrêt du conseil. Il ordonne la vente des trois
moulins, les publications qui doivent précéder les enchères, la distri- ,
bution du prix aux créanciers, mais préalablement l'estimation des
experts; et à défaut d'enchérisseurs, l'abandon et l'insolutondation c1es
moulins aux créanciers.
Après ces actes de l'autorité so uveraine, agissant pal' elle-mème et
par ses délégués, voici les actes de la commune d'Hyères et ce qu'elle
fit pour sa libération:
Elle comprit l'intérèt qu'elle avait à constituer une banalité co nventionnelle qui donnât plus de valeur à ses moulins ; qui , pal' suite, fit
monter leur estimation à un e somme plus importante, et qui , dans les
deux hypothèses, cell e de l'enchère et celle de l'insolntondation, lui
permit de se libérer d'une plus grande partie de sa delle. Elle décréta
donc de créer ses moulins banaux, de les vendre comme tels, et de
garantir ainsi à ses acquéreurs la banalité conventionnelle, que la
plupart des communes constituaient autrefois en Provence, pour leur
propre libération, quand elles avaient des delles.
Comme il s'agissait ici d'une véritable convention et d'un traité qni
allait intervenir entre elle et ses créanciers, ou soit les adjudicataires
futurs de ses moulins, elle procéda avec mesure et maturité, et selon
les formes autorisées par le statut municipal de la Provence.
Dans une première délibération du conseil général de la communauté,
du 26 janvier 1688, il est exposé par le sieur lIIontanarq,. consul, que
les experts nommés pour procéder à l'estimation des biens de la communauté que la Commune doit aliéner, ont rédigé « et remis un rôle
contenant divers articles touchant la manière que la com'll~unauté doit
aliéner tant les moulins que les pesquiers ..... , ..... , requ érant le
conseil vouloir faire faire lecture desdits articles et délibérer sur iceux. »
Ces articles sont lus, et ils s'élèvent au nombre de 19.
Ils portent en ce qui co ncerne la banalité des moulins que la Commune veut créer, entre autres dispositions, les suivantes:
« 1°
QUE LES TROIS MOULINS SONT BANAUX ;
« 2° Que tous les pal,ticuliers habitants dudit Hy èns, à la réserve
des forains, ne peuvent aller moudl'e leurs blés et autres graills et légumes, ailleurs, à peine de confiscation d'iceux, {ors en cas de 'II~anque
d'eau, ou que /' écluse ou b.éal ne fussent pas répal'és en t'rois {ois 'vingtquatre heures ;
« 3° Qu'ils seront obligés de porter leurs gmins et légumes aux moulins , et en l'appol'ter leu1'S {m'ines à leul's dépens;
« 1\,0 Que le propriétain desdits 'IIWUlil1.-'i p1'endra le droit de mou/ul't
à mison d~t quin::ain, demeurant les quatorze portions franches auxdits
�-8 particuliers, il la l'olsen e des Dames religieuses de l'Ordre de SailltBernard dudit Hyères, qui ne paieront le droit de mouture que sur le
pied du vinglain ;
« 5' Que ledit droit de //loul'u!'e se'ra pris à l' endro'it 01~ le piquet
est établi, auquel les blés et autres grains et légumes seront peses,
avant que de les porler aux moulins et la farine ètre auss i pesée, pour,
en cas qu'il en manquùt, èlre rendu par le propriélaire ou fer mier qui
pourra ètre élabli de sa part , lequel sera obligé de tenir du blé en
farine audit piquet pour suppl éer audit manque , ... , , ....... ' , .. ;
«,'1:2' Qlb'il sel'a permis auœdils particuliers, après que les blés et autres
grains auron/ demew'é Irais (ois vingt-quatre heures aux moulins, sans
pouvoi!' (aù'e (aTine, d'aller moudl'e où bon leur semblent, et le proprié tain tenu à leur rendj'e le d1'Oit , s'il l'a exigé;
« ,13' Que le propriétaire desdits moulins ou fermi er sera obligé de
tenir de la lumière la nuil auxdits moulins pour la commodilé desdils
particuli ers qui voudront fair e moudre leurs grains;
« 18' Que lesdits moulins seront francs de lailles il l'avenir."", »
Après quoi, le procès-verbal de l'assemblée du conseil général continue en ces lermes :
« Sur quoi ledit Conseil, après avoir fait faire lecture du cahier remis
par Messieurs les ex perls qui procèdent à l'estimation des domain es de
la communauté, conlenant LES CONDITIONS qui doivent être inséTées
dans leur l'apport d'estime concernant les moulins, .~ DHIB e R~ que
lesdits aI,ticles qui composent ledit cahier , QUI DOlrENT A L'AVENIR ~TRE
OBsERrÉs tant par les créanciers qui (eront leun options SUT lesdits
dOlltaines, QUE PAR LES HABITANTS ET FOR11NS dudit Hy ères, se1'ont insérés au long ci-après; et OPINANT SUR ICEUX , A DtLlB~l\t ET APPROUVÉ
lesdits articles et CON DITIONS. »
Malgré cette première délibération et cette première approbation, le
conseil ayant ajouté il un article 14., concernant les arrosages du pays,
une disposition nouvelle; il est dit dans le procès-verbal: « Qu'au
sUI'plus des aU/l'es aI,ticies il sera délibé1'é au premier conseil »; sans
-9Joute pour .donner plus de solennité et de force à la créa tion de la
banalité, et pour l'entourer d'un e plus complète adbéiion,
C'est en eITet ce qui rut lieu et ce que prouve une deuxième délibération du conseil gé néral de la communauté d'Hyères, du 29 janvier
1688.
A ce conseil, dit le procès-verbal, «( a été représenté par le sieur
Mo ntanarq, consul, 'lu'en conse'luence de la délibémtion prise dans le
conseil GENERAL demicr ; i l a cOlnmuniqué le cahier des conditions de
l'estime des moulins et pesquiers, A TOUT AUTANT DE PERSO~NES QU'IL
LUI A ÉTÉ POSSIBLE, POUR PRENDRE LEURS RESOLUTIONS ET DIlLlBllRATIONS
SUR ICEUX, et comme il est nécessaire de les remettre à MM. les ex perls,
avec les délibérations qui seront prises sur iceux, afin qu'ils procèdent
à leur rapporl, il requi ert le conseil y délibérer, et nolamment sur la
francb ise des moulins et bornes de l'étan g;
« Sur quoi ledit conseil, après' ŒVOÙ' m1l1'ement examiné lesdits ar/icles et conditions pal' divcTSes con(érences, en con(ormité du précedent
conseil, EN .uPROU\'.\~T ICEUX ART ICLES ET CO'iDITIONS QUI ONT ÉTÉ INSÉRÉS A LI. FIN DUDIT CONSE IL et pour le plus gmnd avantage el ul ilité de
la c01nmunauté , .~ DÉLIBÉRÉ sur les seize et dix-septième articles dudit
cabier, que lesdils moulins seront donn és en paiement aux créanciers
francs et déchargés de la pension an nuelle de 26 charges blé , si tant
se mon le, que les héritiers de feu noble Élisée d'Arcussia, sieur d'Esparron, ayant droil et cause du sieur de Limans, élaient en coutume
de prendre des rentiers desdits moulins à farine, suivant l'indication
que la Commune en fai sait, laquelle pension ladite communauté continuera de leur payer, si mieux elle n'aime en payer le fonds, . , , ...
Lesquels moulins seront donnés aux créanciers francs de toutes censes
et direcle, el ont signé à l'original, . , , . , ... ' ...... »
Après l'enqu èle qui avail été ouverte et faite par le consul Montanarq,
et dont celui-ci rel1d compte dans le conseil général de la communauté
du lieu du 29 janvier 1688, les experts eux-mêmes, chargés de procéder à l'es timation des moulins , en avaient ouvert une autre, et ils
�-
10 -
la men tionnent dans leur rapport d'estime des quatre moulins du 31
janvier 1688.
Ce rapport, dans sa partie finale, s'exprime de la manière suivante:
« Vu nos mémoires et observations par nous faites à la visite des
susdits trois moulins, écluse et béaI ;
Ouï les sieurs consuls, ET "UTRES PARTICU LIERS DUDI'l' HYÈHES , en
toul ce qu'ils ont voulu nous din et !'cmont1'el', ET ENCORE SUR LES
CONDITIOt\S, PACTES ET F.!.CULT~S ET FRANCH[SES, auxquelles nous devons
aooù' égal'd à l'estime des domaines de lad'Ite comnmnU1t1é, qui doivent ètre insérés au présent rapport, pOUl' éviter à l'avenir procès et
contentions entre ladite communauté et les créanciers qui opteront SUI'
iceux, lesquelles CONDITIONS, pactes et facultés et fran chises, et nous
en ayant dressé un cahier, icelui représenté au co nseil général de la
communauté, aurait été approuvé par deux délibérations des 26 et 29
dudi t· mois de janvier, lesquelles nous ayant eté remises, et fait lecture
d'icelles, procédant à l'estime des susdits trois moulins, écl use et béaI et
ses dépendances, CONSlD~RE et cu éga!'d 1° que LES TI\O[S MOULINS SONT
BUI'..lUX; 2° q1te les habitants dudit Hy è!'es, à. la !'ésel've des forains,
ne peuvent aller moudTe leun bleds et autres gmins et légumes aille1t!'s,
à peine de confiscation d'iceux; 3° . ,., 4° ... , i)0 . .. , 6° .. . , 7° ... ,
8° ... , 9° ... , 10 ... , 11 ° ... , '12° ... , 13° ... , Ho ... , '1 i)0 . .. , 16° ... ,
0}70 ... , 18". .. (les mêmes clauses que celles ci-dessus indiquées dans
les délibérations du conseil général) , nous avons estimA et évalué les
susdits trois moulins, écl use et béaI et leurs dépendan ces, à la somme
de 183,408 liv., prix des moulins. »
Quant au quatrième moulin, dit le premier, les ex perts renvoient,
pal' divers motifs inutiles à l'appeler, so n estimation à la saison d'été:
« Pour le cas y échéant, dit le rapport, ètre donné avec les susdits
trois moulins, comme tous quatre également banaux, et le prix en ètre
d'autant augmenté. ))
(' Après cette longue procédure, les enchères ouvertes, il n'y eut pas
d'enchérisseurs; le procès-verbal du viguier de la ville d'Hyères, com-
-11mencé le z'l juillet 1688, fut clos et terminé le 26 aoùt suivant , sans
qu'aucun enchérisseur se fut présenté.
Alors commença la procédure en option. Elle fut ouverte par requête
à M. l'intendant de la province, par requète du 20 mars 1689 .
Celui-ci répondit par une ordonnance du même jour , et le 8 avril
suivant, les créanciers furent assignés pour faire leur option, se colloquer sur les biens estimés, et se payer de leurs créances par cette
insolutondati on, faite aux pactes, conditions et stipulations constatées
par les deux délibérations du conseil.
Et c'est ainsi que les moulins de la commune d'Hyères passèrent sur
la tête de ses créanciers et qu'ils lui furent vendus so us forme d'option
et de collocation, avec la banalité conventionnelle que la Commune y
avait établie dans son plus grand intérèt, et pour éteindre une plus
grande masse de ses dettes. )
§ II .
DE UX [IlME
ÉPOQUE. -
De 1689 à 1792.
Les créanciers, en pleine possession de- la banalité de leurs moulins,
n'ont jamais éprouvé dans cette période de la part de la ville d'Hyères
et de ses habitants, aucune opposition ni aucune contradiction à l'exercice de cette banalité. Ceux-ci en ont subi l'exercice, et les propriétaires
des moulins supporté les obligations sans aucun froissement ni réclamation.
Il n'y a eu qu'une seule question incidente, laquelle li laissé le principe de la banalité incontesté en soi, qui li surgi dans le cours de. cette
période, Il s'est agi de savoir si certams quartIers r~aux du terJ'Itolre
de la ville d'Hyères étaient ou non soumis à la ~anahté, et spéCialement
si les divers propriétaires habitants aux quartIers de la C!'au et de
CW'queimne y étaient englobés,
�-
12-
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13 -
Quelques détai ls sont ici nécessaires pour la saine inlellige nce de cp t
incident.
Divers habitants de ces quartiers avaient introduit furtivement des
fa rines étrangères dans le rayon de la banalité. Des interpellations leu!"
avalent été adressées, sans aucun effet. Les 3 janvier et 3 février 1727,
ils furent cités eu paiement du droit de mouture, pour les blés consommés depuis les interpellati ons à eux failes.
Les habitants ruraux firent défaut. - Réassignation. - Nouveau
défau!. - Puis, 13 décembre 1727, arrêt du Parlement de Proyence,
cbambre des requêtes, qui les condamne au paiement du droit , leur
fait inbibitions et défenses d'aller moudre leurs blés ailleurs qu'aux
moulins banaux, et qui ordonne la saisie de blés et farin es passés en
contravention .
17 juin 1728, signification de l'arrêt aux parties co ndamnées.
Cependant l a co m~un e d'Hyères, le 13 décembre 1827, émit appel
de cette déCISion, et 1affrure fut portée par évocation au Parl ement de
Grenoble. ~la is la Commune , co nvain cue qu e ,les quartiers de Crau
et d~ Carqueim1W devai.ent être so umis, co mme les outres, à la banalité, prit expédient de co nd amnati on par sa délibération du 20 décembre 1733, et le 11 janvier 1734, nouvel arrêt du Parlement de
Grenoble qui bomologua l'expédient et confirma l'arrêt de la Chambre
des requêtes du 13 décembre 1727.
Revenu e à d'autres sen timents, la commune d'Hyères se pourvoit de
nouveau devant le Parlement de Grenoble en restitution contre l'arrêt
du I I janvier 173~" homologatif de l'expédi ent qu'elle avait pri s le 20
décembre ,1733.
11ais le 13 aoù t 1737, derni er arrèt du Parlement de Grenoble qui
mallltlent les arrêts an téri eurs et qui déboute la Commune.
A.insi se termina l'incident ; et depuis, ces deux quartiers comme les
au tres, et comme la ville d'Hyères, ont respecté la banalité conventionnellemen t éLablie en '1688.
~
T ROI SIÈME ÉPOQUE. -
Ill.
De 1792 à nos jours.
la révolution de 1789 fit nattre quelques intentions d'opposition à
la banalité dans l'esprit de la com mune d'Hyères. Mais celle-ci n'y
persista pas, et il est évident par la nature de ses actes, qu'elle ne
vlwlut à cette époque que provoquer la liquidation pt le ra cbat de cette
banalité, ainsi qu'elle en avait le droit.
Voici en e[et ce qui se passa:
te .} décembre 1792, la Commune délibéra de signifi er aux propriétaires des moulins un acte ex trajudiciaire, pour leur déclarer: « Que la
municipalité forme d'avance opposition à tout article de bail qui aurait
le moindre rapport à la banalité; et enC01'e que sommation et interpellation leU?' sem (aile de représente'l' dans six mois comptables du
JOU)' de la date de l'exp loit. les titres en vertu desquels ILS ONT JOUI
JUSQU',l PRÉSENT DE LA BANALITÉ, à l'effet de procéder a la liquidation
de l'indemnité qui leU1' est résenée par l'article 24 de la susdite loi
(du 15 mars 1790) , dans le cas toutefois où les exceptions proposées
dans ledit article leur seront appl icables; avec déclaration qu'à défaut
par eux de faire ladite représentation et communication dans le su dit
délai, la municipalité se pourvo ira devant les tribunaux compétents pour
les faire déclarer définitivement déchus et en même tem ps la banalit(\
supprimée. ))
Le 18 décembre 1792, significati on de cettp délibération am propriétaires des moulins. Mais le même jour, une réponse protes tative de
ceux-ci fut insérée au bas de la significati on. - Et plus tard, le '15
juin 1793, communica ti on et signification des actes consti tutifs de la
banalité fut donn ée par acte ex trajudiciaire par les propriétaires des
moulins à la municipalité d'Hyères. A la suite de cette communication,
�, \
1
-
-14-
ils « somment,I'eq!âèrcnt et interpellent les citoyens et officiers n~ unicip aux
lie la comtnw~e li' Hy ères, de (aù'c lies proclama/io ns et lie prendr'e telles
autres mesures qu' ils j'ugeront nécessaires et convenables pOl6?' l'appele!' (L
tous les citoyens que let banalité des moulins n'a pas été abolie pa!' le
décret d·u 45 man 4190 ; que ce d'l'oit continue d'exister et qu'ils do'ivent tous se soul1ielt1'e à ladi te obligation, Jusqu'à ce q1te la commume,
au liési1' de la lor:, ait cm lievoi1' o((l'il' et effectuer ledit l'ac hat .. " »
L a commune d 'Hyèr es ne fit, après cet acte énergique des propriétaires des moulIns, 111 procéder à la liquidation et au rachat de la banalité, ni prononcer sa suppression par les tribunaux . Les titres constitutifs restèrent dans toute leur force . Elle les res pecta. Seulement ,
pendant le fort de la révolution " la b analité so mmeilla quelques temps,
à cause ?es Jours mauvais qUI s étment levés sur chacun, et qui relàchruent 1exercice ~.es drOlts les mieux établis. Puis elle reprit en 1807,
et, Jusques en '18û8, ~Il e n'a cessé d'ètre t n pleine vigueur, (l1'6tégée-pal'
SOl'H1f1gme et par la )unspTudence, sans rencontrer aucun e opposition.
Dans les premiers mO Is de 1858, le sieur Giraud , meunier, demeurant à la Crau , ayant fait à diverses reprises introduire des farin es
étrangères dans le rayon de la banalité, il y eut des procès-verbaux
nombreux rédigés, co ntre lui , poursuite et citation devant le juge de
pal: ,de la Ville d Hyères en condamnation à 200 fI'. de dommagesmterets. Devant ce magistrat , Giraud soutint que le tribunal d
..
't ' .
,
e paIX
e rut IDcompetent pour statuer sur le droit de banalité dont '1
t 1 con es
. 1 l' r
taIt a ega Ité, demanda son renvoi devant les tribunaux ci,'ils, et l'obtint
par Jugement du 29 avril 1858. Giraud avait soulevé pour la première
fOIS
de la prétendue ill égalité de la banalité" at 1'I demand . la questIOn
.
ail des Juges compétents pour en connaître et pour prononcer.
Les propnétalres des moulins banaux , devant celle résistance , ont
~ux-memes mvesli le tnbun al civil de Toulon de la question. Ils l'ont
ait par .exploll d~ :14 ~oùt 1858. Mms leur action a dû être double;
elle a du etre dlflgee d abord contre le sieur Giraud en condamnation ,
au prm~lpal , pour lUI faire subir l'effet de la banalité et en entendre
reconnmtre et prononcer la légalité. Elle a dû l'ètre en second lieu contre
- 15 la commune d'Hyères, qui, en 1688 et 1689, leur avait donné ou cédé en
paiement les moulins constitués banaux, aux fm s que celle-ci concourut
il repousser la prétention du sieur Giraud, et en cas de succombance,
aux fins de se voir condamner à relever et garantir les acquéreurs et
propriétaires des moulins. Et comme, dans l'intervalle de 1688 à '1858,
la r:ommune d'Hyères s'est décomposée en une seconde commune, celle
u1le de la e1'aU, celle-ci co mme celle d'Hyères a été appelée au procès,
aux mêmes fins et so us le coup de la même demande en garantie,
Devant le tribunal de Toulon, le sieur Giraud a plaidé l'illégalité de
la banalité des moulins d'Hyères et soutenu que les actes de ·1688 n'étaient pas le titre constitutif de la banalité; que ce titre n'était pas
prodùit; et que d'ailleurs, si c'étaient les actes de 1688 qui pussent en
tenir lieu, ces a~tes manquaient d'une condition essentielle; ils n'aurai ent pas été consentis et accompagnés du consentement lie tous les
habitants ; qu'en dernier résultat, la banalité réclamée n'était pas légale
et qu'elle était proscrite par l'article 24 de la loi du 15 mars 1790.
Les communes d'Hyères et de la Crau ont soutenu que, puisque la
banalité n'était attaquée qu e par un moyen pris dans la loi du 15 mars
1790 , elles ne deva ient aucune garantie; que cette loi était un fait de
prince, postéri eur à la vente par elles co nsentie, et que les communes
n'en devaient pas être tenues.
C'est ce do uble système qui a été co nsacré par le jugement du tribunal civil de Toulon du '19 juillet 1859,
C'est de ce jugement que les propriétaires des moulins ont émis
appel. Ils en demandent la réform ation à la Cour , parce qu'il renferm e les erreurs les plus graves , l'oubli le plus notable qui ait pu être
fait des principes du statut municipal provençal en matière de constitution
de banalités conventionnelles par les communes qui vo ulaient éteindre
leurs dettes, et enfin la plus fausse interprétati on des actes de ·1688. l e
propriétaires des moulins ont la plus ferme confiance dans leur appel,
et ils attendent la réformation du jugement de Toulon co mme la réparati on d'une énormité juridique.
Ils en disent autant de la disposition du jugement touchant la ga-
�-
rantie. C'est une décision erron ée qui oe résistera pas à l'examen, quan d
nous serons amenés il traiter cette ques ti on subsidiaire.
C'est pour aider à la solution des questions importantes du procès,
pour fi xer avec soin les nombreux points de doctrin e qui reviennent
dans celte discussion, pour rendre enfin la vérité plus saisissante, qu e
nous produisons ce mémoire. Il soulagera d'autant la mémoire de nos
juges, et les vérités que nous aurons prouvées resteront encore évidentes
après que nous aurons parlé durant les débats oraux de l'audience .
Inutile d'ajouter que le grand intérèt engagé dans ce procès, commandait aussi celte form e de défense. Les moulins ont été estimés, en
1688, 183,408 Ii I'. C'est sur ce prix primitif qu e les créanciers les onl
acceptés . lIais qui doute qu e ce soit la banalité qui en co nstitue la valeur
principale et dominante? Enlevez celle-ci; que reste-t-il aux créanciers? Rien ou presque ri en. Vo ilà la mesure de l'intérêt engagé . t es
créanciers combattent pour conserver ce qui leur a été do nn é en pai ement. Qui aurait pu croire que les communes d'Hyères et de la Crau
renieraient une cause aussi juste et ne repousseraient pas avec nous l'injuste agression il l'aide de laquelle elles voudraient trouver le secret d'avo ir
payé leurs detles sans ri en donner il leurs créanciers, ou tout au moins
avec une monnaie qui se serait évanouie en partie dans leurs mains ?
D~oit, justi ce, équité, tout milite pour la CHuse des propriétaires.
Démontrons-la avec détail.
17 (
,
DISCUSSION.
PREMIÈRE
PARTIE.
LA BANALITB DES MOULINS D' HYÈRES EST LÉGALE .
l. En matière de banalité, il est un principe universellement admis
et qui n'est plus contes té aujourd'hui par personne , c'est que toute
banalité co nventionnellement établie entre une communauté d'habitants
et un particulier non seigneur, avant 1790, est légale. Il n'y a eu
d'abolies, en celle matière, par les lois réunies des Hi mars 1790 ,
23 aoùt 1792 et 17 juillet 1793 , que les banalités seigneuriales et
r60dales. Telle ps t la décision d'un avis du Conseil d'É tat du 3 juillet
1806 (~lerlin , Quest. de droit v· Banalité, p. 420). - Telle est la jurisprudence de la Cour de Cassation fixée par les arrèts du Î frimai re
an XIII , 0 février 1816, ~O avril 1826, 31 mars 1813, ~O mai '1824,
16 novembre 1836, 9 avril 1844 (Dalloz, Rép. général v· Propriété
féo dale, p. 42.'1 à 424 ). - Telle est la jurisprudence constan te de la
Cour impérial e d'Aix justifiée notamment par ses deux arrêts du ,10
mai '18 19 pes fours de Valensoles - Recueil 18'19, p. 426), et par celui
ues fours d'A ubagne du 9 mai '1826 (Recueil ,1826, p. 322). - Telle
es t enun l'opinion des auteurs les plus accrédités ,. MM. Henrion de
Pansey, Biens co mmunaux , chap. IX , et Merlin, Quest. de droit y.
Banalité, p. t26 qui le cite.
Et tout ceci se résume par ce tex te de l'article 24 de la loi du 10
mars 1790, qui est devenu la loi de la matière, lequel texte dit :
3
�-
~8-
({ Sont exceptées de la suppression ci-dessus (prononcée par l'article
(23) el seront rachetables :
« l' Les banalités qui seront prouvées avoir été établies par une
convention souscrite entre une communauté d'habitants et un particulier non seigneur;
«
~o . . . • .
»
Il. Une seconde vérité qui doit trouver ici sa place, à coté de la
première , c'est que la ville d'Hyères, sa commune et son territoire
n'ont plus eu de seigneur depuis l'année 12ti7, et qu'à partir de cette
époque Hyères et ' son terroir ont été entièrement affran chis du régime
féodal et ont relevé directement du souverain du pays, c'est-à-dire du
comte de Provence.
Cette vérité est établie pal' tous les historiens proven çaux et notamment par deux des plus autorisés d'entre eux , par Honoré Bouche et
par César Nostradamus.
Le premier , dans son Histoire chronologique de Provence, t. Il ,
p. 273, le raconte en ces termes:
(~ Charles voyant que toul es c hos~s Juy avaient si heureusement succedé cn
Provence jusques alors, ayant le droit de son côté et le vent propice , il veul
enCQl'e pousser plus avant so n authorité; et ayant appris que ceux qui se
disoient en ce temps là seigne urs de la ville d'Hieres çl des i; les Sta:chades,
ou isles d'Or, sçal'oir un Roger d'Hieres, Bert,.and de Foz et Mabile fill e d' un
Amelin de Foz, Hugonne et J auff,.ed Yrat~, es toienl des usur pateurs, ou bien
bien leu,.s peres, de la ville et du châleau , et des isles d'Hie,.es, qui app. ,.t e·
noient de plein dro it aux co rn l es de Provence, et qu'il s avoient us urpez toutes
ce, places au tem ps du comte I1defon s, ayeul de sa femme, en aya nt chassé par
voie d'hostilité la garnison que le comte lldefon s y avait logée, les fit sommer
de luy remettre toutes ces places, autrement qu'il procederai t co ntr'eux, comme
contre de vrais felons et crimi nels de leze-majes té. Dequoy ces seigneurs épouvantez, par l'entremise des évèques de Nice et de Fréjus, el de qu elqu es se igneurs
seculiers de la province, après avoir "eçeu l'abolition dll crim e de leurs devan-
-
19-
ciers , ,:emi"ent au comte Charl es , estant alors en la ville de Tat'ascon celte
même année 1257, tous le. d"oits et toutes les pt'étentions qu'ils pouvaient
avoir SUl' la ville , le château elles isles d'Hieres , moyennant la somme de dix
mille sols de "evenu annuel, et sous d'autres conditions, amplement couchées
dans l'histoi,'e de Nostradamus. "
Le second, dans son Histoire et chronique de Provence, p. 22ti,
an née 12ti7, le dit encore en ces termes:
" Or ("am bien que Charles eust bien am plement vérifié l'expoliati on faite à
I1dephons du chasteau d'Y Ores et de ses appartenances et droicts, si qùil apparut
aux gens du Conseil, tant pal' la confession de Roger et de Bertrand que par
les témoignages produits et ouys de l'art et d'autre de leur félonie et rebellion :
si est- ceque préférant la cl émence à la rigueur, la paix à la guerre, et le pardon à la vengea nce, les afTaires fUl'e nt par telle manière composez:
" Que le chas teau d'Yères, le donjon et le fort , la ville, les isles, les droicts
et ap partenances tant en mer '1n'e n terre, pour les deux partz que Roger , Bertrand et Mabille y tenoient et po",édoien t : tout cela serait vendu et déclisné
à Charles, pOlir les jOllY" et posséder et les siens perpé tuellement à l'advenir
en plein fief.
.
" Qu'ava nt que Charles pent jouyr de la ville, chasteau, isles et autres drOlc tz
spécifiez, il serait ten u bailler en récompense à Roger, Bertrand et Mahille,
aut ant de terre et jurisdiction en Provence , quèlle peut valoir en revenll annuel, la somme de dix mille sols provençaux ql'ils tiendraien t sous la foy et
ho mmage des comtes, etc. etc. n
III. Ces deux vérités établies, nous disons, en premier lieu , que la
banalité des moulins d'Hyères est légale et maintenue par J'article 23
de la loi du 1ti mars 1790 :
'1 0 Parce qu'il existe une convention expresse de banalité stipulée
entre la communauté d'Hyères, et des particuliers non seigneurs, en
'1688 et 1689 ;
20 Parce que la forme qui a accompagné cette convention, était la
form e usitée , autorisée et consacrée par le statut municipal de la Pro-
�-
20-
vence, ainsi que le prouvent tOIlS les auteurs provençaux , et la jurisprudence de la Cour impériale d'Aix ;
3" Parce que la convention de 1688 n'a été viciée par aucune origine
autérieure féodale de. la banalité ;
Nous ajoutons, en second lieu , que les objections du jugement ne
peuvènt faire obstacle à notre proposition ;
Et, en troisième lieu, que les effets que les propriétaires des moulins d'Hyères réclamaient du sieur Giraud, intimé, étaient légitimes, et
qu'ils doivent être consacrés par la Cour.
Nous reprenons successivement ces divers points.
§ 1.
La convention de 1688 contient la stipulation expresse de la banalité
des moulim.
Nous accordons, sa ns difficulté, qu e celui qui prétend à la banalité
doit produire le titre qui la rROUI'E; que c'est la condition impérative
de la 101 anCIenne d'abord et puis de J'article 24 de la loi du 1tî mars
1790, qui n'a fait que la reproduire. ~lais tout de suite nous ajoutons
qu'il est satisfait à cette obligation par les appelants à J'aide de la productlOn de la convention intervenue en 1688 et 1689 entre la com munauté d'Hyères et les créanciers de cette communauté, auxquels elle a
donné ou cédé en paiement ses moulins, en les créant banaux.
Cette co nvention se compose ici d'éléments divers , et les preuves de
la stIpul atIOn se retrouvent, non pas dans un seul acte, mais dans
plusieurs qu'il ne faut pas séparer.
Les premiers, sont les deux délibérations du conseil général de la
communauté· des 26 et 29 janvier 1688 ;
Le second , c'est le rapport d'estimation des moulins du 31 janvier
1688 ;
-
21 -
Le troisième , c'est la collocation qui en 1689 a fait arriver dans les
mains des créancicrs ces m ~mes moulins.
Quant aux délibérations du conseil général des 26 et 29 janvier
1688 , cil es contiennent expressément la co nstitution de la banalité. Il
y est dit; « Que les wNicles q'ui composent le ca hiel' des experts estimants DOIVENT A t 'A \'EN IR €TRE oBsERrÉS TANT PAR LES CRÉANCIERS QUI
FERONT OPTION .. . QUE PAR LES HABITA NTS ET FORAINS DUDIT UY!\RES. »
Tous les mots de cette délibération sont importants; tous ils sont
décisifs. Pourquoi? Parce qu 'au nombre de ces articles qui doivent à
l'avenir faire la règle des babitants et des forains, sc trouve le premier où il est dit que; LEs MOULINS SONT BANAUX, et le second où il
est dit, que les habitants ne peuvent allel' moudre leurs blés et autres
gmins ailleurs.
Pourquoi encore décisifs, disons-nous ? Parce qu e ce n'est pas du
passé que J'on parle, mais bien POUR L'HE NIR ; qu'il s'agit, comme
dit le conseil, d'articles qui DOIVENT A L'AVENIR être observés tant par
les créanciers que PAR LES HABITA NTS. Et si c'est pour l'avenir que la
règle est faite, elle pst donc créée dès ce moment, dès cet instant
pour toujours.
Pourquoi encore décisifs? Parce que si on n'avait pas vou lu CRÉER
une banalité; il n'était pas nécessaire d'en faire une règle nouvelle ,
ni de statuer à nova. '
Pourquoi enlin décisifs? Parce que les articles, qui suivent les deux
premiers, organisent d'une manière complète la banalité, ne laissent
ri en d'incomplet, et présentent le code ou le règlement qui doit ètre
suivi pour l'exercice et la pratique de la, ba!'lalit~.
Remarquons enfin que ces deux délibérations du conseil sont produites et versées au procès.
Quant au rapport d'estimation du 31 jal11'ier 1688, il contien t aussi
comme éléments d'estimation , la série des mèmes articles votés par
le conseil général de la communauté. La banalité est donc entrée dans
J'estimation comme élément de valeur. Elle a donc été attachée à nova
aux moulins par le ex perts, lesquels ont agi ains i d'ordre et de la
�- 23 -
22 volonté de la communauté , dont en cela ils suivent les intentions for melles et authentiquement exprimées dans les deux délibérations du
conseil généraL
Ce rapport est encore produit et versé au procès .
. Quant à la collocation des créanciers sur les moulins et à l'acceplaI:.on par eux de la banalité, elles résultent de la requête présentée à
lmtendant de la province le 20 mars '1689 , de son ordolmance sous
cette date, de l'a signation du 8 avril suivant donnée au x créanciers
pour ~alre leur option , et de la possession de ces moulins par ces
créanCiers, ou leurs successeurs. L'acte spécial dressé en 1689 pOUf
constater cette optIOn a péf! dans l'insurrection et dans le sac et le
pillage qUi eurent lieu à Hyères et dans les archi ves de celle vill 1
6)5
1789"
e, e
~ :a~s. . ' aInSI que l'atteste un certiucat de la mairie d'Hyères
u
f1malre an IX. (V. la pièce au dossier).
, Il Y a donc ici littéralement la réunion des conditions exigées par
1article 2~ de .Ia loi du 15 mars 1790 . La convention souscTite est
dans ~a proposilion de banalité faite par la commune et dans son acceptatIOn par, les acquéreu;s. La comrn'unauté d' habitants, qui promet
la banalité , c est la Ville d Hyères, son conseil général stipulant pour
elle. Et enfin le pa1"t~cuher non seigneuT, qui reçoit la stipulation , ce
sont les créanCiers de la commune, qui se colloquent sur les moulins,
~t parmi lesquels ,aucun seigneur ne peut se trouver, puisque depuis
la nnée .1257, Il ~ en exi s~ai.t plus à Hyères , et que ce territoire était
libre , alllSI que 1atteste 1 histoire de Provence.
·"-près avoir vu la convention , voyons la form e sous laquelle elle a
été prise.
§ II .
La {orme sous laquelle s'est procluite celte convention de banalité
en 1688 est régulière et légale.
Une première remarque à faire ici sur la forme dont devait ètre revêtue une convention de banalité pour être valable, c'est que ni la loi
du 15 mars 1790 dans l'article 2~ par nous cité, ni aucun e des lois
postérieures à cette époqu e ne s'en sont expliquées . Elles n'ont rien
tracé , ni rien exigé sur ce point particulier. Elles n'ont pas dit de
quelle manière le consentement des communautés à l'établissement des
banalités devait être donné. La conséquence en est que la loi de '1790
s'est référée au droit commun ancien , suivi, professé et appliqué dans
les diverses provinces de la France où ces banalités se sont établies.
Elle a donc renvoyé au droit statutaire de chaque province sur ce
point.
C'est ce qu'enseigne Merlin , Répertoire VO Banalité: « Le n° 1 de
l'article 2.1. du titre Il de la loi du '15 mars 1790, dit-il , ne définit pas
ce qu'il entend par une convention souscrite entl'e une communauté
d'habitants et ltn particulier non seigneur . Il n'explique pas quelles
so nt les conditions requises pour qu'en matière de banali té, une convention soit censée avo ir été so uscrite par une communauté d'habitants .
Il (aut donc, pOlir déteT/niner ces conditions, nous reporter AU DROIT
COM M UN .. " ... ))
Partant donc de celle règle, nous disons qu'en Provence Je droit
commun distinguait , pour la forme de ces conyentions , deux espèces
de banalités: les banalités féodales, stipulées en faveur des seigneurs,
ct les banalités conventionnelles, établies par les communautés pour
l'extinction de leurs delles avec des particuliers non seigneurs, en aliénant leufs foufs ou leurs moulins. Chacune de ces banalités avait ses
�-
•
'24. -
règles propres, el elles ne se confondaient pas ni pour la faculté dEles racheter, ni pou r leur mode de co nstitutioll .
Expliquons-nous SUI' chacune d'elles.
Julien, Statuts t. Il , p. ~ 1 2, établi t lui-11Ième d'abord la distincti on
entre ces banal ités de la mani rre suivante: « No us distinguons, dit-il,
les banalités (éodales et celles que les co mmunautés ont imposé à
prix d'argent, ou pour des arrérages de droits seigneuriaux, ou q~l,'e /les
ont vendues en aliénant leurs (ours et moulins banaux'. Celles-ci, continue-t-il , sont perpétuellement l'ac hetab les en rembo ursant aux acquéreurs le prix de l'aliénation et leurs frais et loyaux co ùts. » L'auteur
cite à la p. '2~9 et 25 1 un arrêt du Co nseil de 1668 qui avait pour la
Provence confirmé ce principe.
Au con traire: « Les banalités féoda les, ajoute le même auteur au
n° 8, fa isa!l t partie des droits du fief ne so nt pas sujettes au rachat. »
De celle première différence, dans le lien qu'établissaient ces deux
banalités, l'essortait U1le différence capitale encore dans le mode et
da n~ la forme de leur établissement. On était plus sévère, plus ex igean t
et plus difficile pour les féodales. Les uns exigeaient le consent.ement
de to us les hab itants; les au tres se contentaient de la pluralité, des
deux tiers, par exemple. Mais po ur les ba nalités établies pal' les co mmunes pour l'eItinction de leurs dettes, la règle étai t toute opposée ,
le consentement du co nseil de la comm unauté suffisait pour la validité
de la convention.
Voici les preuves de cette double vérité.
Pour la première, Lalouloubre et Julien font conna itre leurs opinions sur le nomb re de voix nécessaires pour l'établissement des banali tés féo dales. - A cet égard La touloubre, Jurisprud. féodale, t. " ,
p. 265, n° "1 , dit : « Plusieurs auteurs croient que le consentement
unani me des déli bérants est nécessaire. Il en est d'autres qu i n'ex igent
que celui de deux tiers . Pastour , liv. l , lit. 5, n° 3, en parlant de banal ité établie en leur faveur, dit que la pluralilé suffit : cette opini on
solitaire ne doit pas prévaloir, et il semble qu e ]'on doit opler pour
celle qu i n'ex ige que le consentement des deux ti rr . lDespeisses ,
- 25 lom . 1Il , tit. 6, de la Justice ;- Bacquel, Des droits de justice, ch. XX IX,
n° 22 el 22; - Tron,çon , sur l'arl. 72, De la co utume de Paris; Legrand, Sur la coutume de Troyes, art. 6 !~ , n° 3~) . »
Et Julien, 1. Il , p. H 7, n° XI', dit enco re: « Plusieurs de nos aute urs es timent que la banalité peul être établie par convention en (aveur
du seigneur avec le co nsentement des deux tiers des habitants. C'esl le
sentiment de Bacquet, dans son Traité des droits de justi ce, ch. H I X,
n° 23; de Legrand , Sur la coutume cie Troyes, art. 6~, glos. un . n° 3~.
Mais quand on dit que le consen tement des deux tiers suffit. il ne suil
pas de là que la banalité puisse être établie malg;é l'autre tiers .. Comme
il s'agit d'un assuj ettIssement des personnes, et d une affa ire qUI to uche
tous les babitants eu parti culier , ut singulos, il faut le consen tement
exprès ou tacite de tous. C'est le sentiment . de Boutaric, dans son
Traité des droits seigneuriaux, tit. de la Ban altté, et de son Commentateur, pag. 339 et suiv . ; de Ferrière , dans ses Remarques sur le
(l'ai té des droils de justice de Bacqu et, chap. XX IX, n° 29 . Bertrand ,
vol. 1, cons. H.1, n° 16, observe que dans les cboses qui regardent
plusieurs person nes en particulier, le plus grand nombre ne peut n en
fa ire au préjudice des uutres . »
.
~[a i s il en était lo ut autrement pour la seconde catégon e des banalités, po Ill' celles établies par les communautés:. ali én ~ n t leurs fours et
moulins pour payer leurs dettes . La Simple dehbéralion du conseil de
la commun au té suffisa it , avons-nous di t, d'après le statut mUI1lclpal de
Provence.
. ~
~lo urg u es, da ns son Co mmentaire sur les Statuts de Proyence, p. 38/,
édit. de 16/r,2. enseigne: « Qu'en plusieurs bourgs et Villages de ce tte
provin ce, les fo urs et moulin s appartiennent aux seigneurs; en quelques autres lieux, les fo urs et moulins apparliennen l aux communautés ,
lesquelles les ont rend us banaux entre les habitants, J)(LI' les assemblées
DE LEUR CONSEIL.
)
'il"
0
1
Julien, dans son Co mmentaire sur les Statuts, t. Il , p. ~~v, n° û ,
ctablit aussi la règle sp ciale aux co mmun autés en ces termes: « Dans
un ]'leu , d't'l
1-1 " où il n'y a point de fo ur et de moultn banal
• , une
�- 26 -
- 27-
communauté d'habitants peut rendre ses fours et ses moulins banaux.
II J' a en Provence un grand nombre de banalités ainsi établies. Les
communautés en ont la faculté par le même droit q~! ' elles ont d'étabIi1'
des l'èves et impositions su,r les (ruits , denrées et marchandises dont nous
avons pal'Ié SUI' les Statuts concernant les 1'èves et impositions, sect. 11.
Alais elles ne peuvent pas établir des banalités de fours et de moulins
au préjudice des fours et des moulins déjà existants. C'est ainsi que les
arrêts du Parlement qui sont rapportés par Mourgues, p. 377 et suiv .,
l'ont jugé. Par ces arrèts, les délibérations des communautés qui avaient
établi des banalités au préjudice des moulins appartenant à des particuliers , ont été cassées. Il peut seulement être permis à la communauté, pour l'utilité publique, d'obliger le particulier qui possède le
four ou le moulin à le vendre, en l'indemnisant, comme il fut jugé
par l'arrêt du '12 février 16'15, entre la co mmunauté de Bm'joux et de
Bagnoly, rapporté par Mourgues, p. 378. )i
Julien complète sa do ctrine en renvoyant à ' la section Il , p. 341,
intitulée des Rèves et l1npositions , où il pose ce principe général au
n° 3: « Les communautés de Provence ont celle ('acull é pal' le dTOil
commun et nos lois m~micipales. La loi Vectigalia 40 Codice de vec/igalibm et commissis, autorise les communautés à établir les impositi ons
nécessaires pour subvenir à leurs besoins. . . . . . »
Puis précisant encore mieux la difficulté, il établit p. 338, no' 3 el
suiv. , que dans les assemblées des corps municipaux , la plu1'alité des
voix suffit pour créer ces impositions, et il ajoute: )i Suivant le droit
commun , les délibérations des corps et communautés son t prises à la
pluralité des voix, et la communauté est censée être où se trouve le
plus grand nombre; )i et au n° 6, il renforce ce qui précède en disant
encore: « Il convient que les affaires des communautés soient résolues
par un certain nombre de perso nnes établi par les règlements et par
les usages . Ceux qui composent le conseil de la communCLuté Tepl'ésentent le peuple et en ont lout le pOUVOiT; " CE)1 POPULI REPR/ESENTANT,
comme dit Cancerius, Val'iaT. reso lut. , part. III , chap. XIII , n° 334. :
CE l\:'EST QUE DAN DES CAS R.\RES ET EXTRAORDINAIRES QU'Ol\: ASSEMB LE
UN CONSEIL DE TOUS CHEYS D~ FAMILLE. Ces assemblées trop nombreuses
et tumuUueuses, ne sont guères propres à l'expédition des affaires,
et ces conseils n'ont pas lieu dans les grandes villes. »
Il faut encore citer ce dernier passage de Julien, p. 339, n° 5: » C'est
la règle de tous les corps que ce qui est fait par le plus grand nombre
dans les affaires concernant le corps, est censé fait par tous. La plus
grande partie est présumée la plus saine: elle a le droit de lout le
corps: règle qui a été sagement établie pour procurer l'expédition des
affaires et éviter des contestations interminables: Quod majo,. pan
wriœ elTecil, pro ea habetul' ac si omnes egerint, dit la loi 19, D. ad
7Ilunicipalem. La loi 160, § 1, D. de diversis l'egulis jU1'is, s'en explique aussi expressément: Re(ertul' ad universos quod publiee ~t pel'
majorem paTtem, et c'est la remarque de Grotius, dans son traité De
jU1'e belli et pacis, liv . lI , chap. Y, n" 17. Toutes les sociétés, (dit-il),
ont cela de commun qu e dans les choses pour lesq uelles chaque société a été établi e, le corps, et la plus grande partie au nom du corps,
oblige tous ceux qui le composent. )i
Rien de plus précis ni de mieux echainé que cette exposition de nos
anciens principes provençaux. L'établissement des banalités des fours
et moulins par les communautés était assimilé à une imposition de
rèves ou de fruits. Le conseil de la communauté pouvait le consentir.
Et ce n'est pas pour ce cas qu'étaient faites les assemblées de tous chefs
de famill e. On a vu qu'elles étaient réservées notamment pour le cas
de la constitution d'une banalité féodale, laquelle était irrachetable et
inextinguible, et qui , comme telle, sortait de la nature des affaires
ordin aires.
Latouloubre, dans sa Jurisprudence féodale , expose encore la même
doctrine. - Quand il parle des banalités féodales et seigneuriales et
irrachetables, t. Il, p. 262, nO' 1 à 6, il dit: « La convention passée
avec les habitants pour l'établissement de ce droit, n'est valable qu'autant qu'elle a été précédée d'une délibération prise dans un conseil général, composé des chefs de famill e. )i
}lais quand il parle des banalités établies par les communautés dans
�-
-
.2 8-
leur intérêt propre, il n'exige plus celle condition . Il dit, p. 282, n' 46 :
« Dans les lieux où la banalité n'est pas établie en faveur du seigneur,
les co mmunautés d'habitants peuvent rendre banaux leurs fours, moulins et pressoirs, sans le co nsentement du seigneur. Il Il n'exige ri en
de plus.
Le même auteur, au n' 11>7, enseigne aussi que si le seigneur avait
des moulins, fours ou pressoirs, il pourrait s'y opposer. « Un simple
particulier, dit-il, s'y opposerait avec succès. Alais la c01mnunauté
aurait le œroit de le contraind1'e à vend7'e le (am', mou/in ou pressoù·. Il
. Donc, le co nsentement de tous n'était pas nécessaire, puisqu'on pouvait
forcer la volonté de ceux qui possédaient les usines, et malgré leur
opposition, s'en emparer.
Après l'exposition de la do ctrine, voyons la jurisprudence suil'i e par
le Parlement. C'est un e seco nd e épreuve que nous ferons subir au
jugement. Le Parlement de Pro l'ence avait touj ours consid ré co mme
légal le mode suivi en '1688, par la co mmun aute d'Hyères.
Voici les arrèts qui l'attestent. - Le premier est celui du 30 juin 174.:;
rendu dans l'espèce suivante rapportée par Julien, t. Il , p. 252, n° 7 :
« Par un acte du 30 décembre 1667, dit cet auteur, les consuls de la
ville de Saint-Maximin avaient vendu un moulin à huile avec ce pacle,
qu'aucun hab itant ni autre personne ne pourrait à l'avenir co nstruirr,
ni établir d'autres moulins à huile, soit dans la ville ou au terroir d'icelle, et que lous les babitants et particuli ers serai ent tenus et obligés
d'aller faire triturer audi t moulin les olives qu'ils percevrai ent. dans le
terro ir. La Commune avait prétendu , après un e longue exécution de
celte vente, que la banalité n'était pas suffisamment établie. Mais l'affai re ayant été portée pardevant les juges ordinaires et par appel au
Parlement, il était intervenu un an'i!t le 30 ,juin 1745 , paT lequel
û avatt été Jugé que le mouli'/I était BAl'üL. La communauté de Saint)laximin n'eut alors d'autre voie pour s'affranchir de celle servitude
que celle du rachat, et elle en forma la demande le 3'1 juillet :1750 . »
'29 -
En voici un second: « Tel fut l'arrêt de la Cour des aides ùu 1,1 juin
174.0, en faveur de la co mmunauté de Grasse, pour qui je plaidais,
dit Julien, t. Il, p. 338 , n' III, contre plusieurs particuliers de ladite
ville. L'imposition en fruits avait été dél ibérée à la pluralité des voix .
Il y eut opposition à la délibération. Par l'arrêt l'imposition en fruits
fut maintenu e. >1
Troisième arrêt cité par le même auteur, qui ajoute: « La mème
question se présenta pour la communauté de Valrnsolle. Il s'était écoulé
plus de vingt ans depuis so n dernier cadastre; mais il y avait eu plusieurs instances en reco urs qui n'étaient pas terminées; on ne pouva it
délibérer de faire un nouveau cadastre. On délibéra à la pluralité des
voix une imposition en fruits. Il y eut plusieurs oppo itions à cette
délibération et la cause ayant été portée à l'audience de la Cour des
aides, par arrêt du 23 mars 1762, les opposants furent déboutés
de leur opposition, et la délibération portant l'imposition des fruits fut
confirm ée . »
On le voit clairement. Dans le premier arrêt, les consu/$ seuls avaient
co nstitué la banalité et elle fut lDaintenue. Dans les deux autres, l'imposition des fruits n'ayait été votée que par la pluralité des voix du
conseil des communautés; et elle fut aussi maintenue. C'est toujours
la règle posée par Julien qui est pratiquée.
Une autorité décisive, celle de l'assesseur aux Etats de Provence en
17ï6, vi ent enco re se joindre à celles qui précèdent. Dans un rapport,
resté célèbre, fait aux Etats de Provence assemblés, p. '166, l'assesseur
ass imilait les banalités créées par les communes pour augmenter leurs
rel'enus aux rèves et impositions en fruits. Il di sait : « Il y a des communautés dont les habitants, dans l'objet d'augmenter leurs revenus
co mmuns, se sont imposés anciennement la loi d'aller cuire leur pain
aux fours par eux établis ou achetés; le pl:od uit de ces banalités improprement dites, tient lieu c1 ces COllWl~tnau,t és d'une pal·tu des tmlles
ft charges q~( 'e llcs sont ob lig ées d'acquittcl' au ra! et au pays. UNE
BAiULl T€ nE CETTE ~;S l'ÈCE EST UNE l'RAIE TAILLE, UH RÈVE, UNE 1~I POSI
'fION SU R LES
cor;soMMATIONS,
QU'ELLE PEUT AUGMENTER OU DlJllNUER, OU
�- 30 FAIRE CESSER, SU ILINT LA SITUATION DE SES AFFA IIIES. 11 y a donc en
ProveDce, concluait - il, des espèces de banalités qui n'ont aucun
rapport avec les droits du Hef. ))
Ces principes étaient trop bien établis pour être méconnus depuis
la loi du 1ti mars 11790 ; et la Cour impériale d'Aix en a fait elle-mème
l'application dans un arrêt du '12 juillet 1821, monument remarquable
de sa sagesse, dans lequ el se trouve résumé, avec une précision heureuse, le point de droit ancien que nous élucidons.
Il s'agissait de la banalité établie par la commune de Senès et . par
elle cédée au sieur Gauthier d'Aiguines, le tout en vertu d'une simple
délibération du conseil de la communauté. On attaquait ce mode de
constitution comme insuffisant et illégal. La Cour répondit par notre
distinction :
« Considérant, dit-elle, que d'après le droit commun de la ci-devant
Provence, reconnue par les anciens souverains et par les l'ois de l' rance,
après la réunion à cè royaume, les communes ava ient le droit d'établir pour faire face leurs pressants besoins, ou pour le paiement de
leurs delles, des impositions en fruits, soit sous le nom local de rèves
soit à titre de banalité; et qu'ayant été ensuite autorisées et mèm~
contraintes par divers édits et arrêts du Conseil, A vendre même avec
franchise de taille leurs biens dont ·les rèves ou banalités faisai ent
partie pour acqui tter leurs delles, la commune de Senès a pu vendre
en 1665 avec cette franchise de taille, dont on ne peut dès-lors tirer
aucune induction, et dans le même objet , c'est-A-dire pour payer ses
dettes, A An tome Gauller d'Aiguines, son seigneur, qui ne les acquit
que comme créancier, et à la charge de payer en même temps d'a utres
créanCIers, les fours dont il s'agit;
« Considérant que les perceptions en fruits, sous le titn de )'èves
ou DE B!NALl'rgs, que les communes avaient le dl'oit d'établir PO!W
leurs besotlls, pouvatent i!tre établies par les conseils 1/lunicipatlx,
ad!ntm$t1'ateur~ ordmatl'es des biens des communes, ET N'AVA IENT PA S
BESOIN D'eTRE CON ENTIES PAR TOUS LE S HABITANTS, iL la diflërcnce des
a
•
31 banalités créées en (aveul' des seigneu)'s 'lui acaienl besoin de ce tOnsentement. ))
Ce qui augmente l'autorité de celle décision, c'est qu'il y eut pourvo i en cassation de la part de la commune de Senès, et que le pourvoi
fut rejeté et les motifs de la Cour reconnus parfaitement exacts. On
disait contre l'arrêt, au témoignage de Dalloz (Ré pert. général V Propriété féodale, p. 422) qui rapporte J'arrêt de cassation: « 1° .. .. ... 2° que la banalité avait été cédée au sieur d'Aiguines, par le conseil
et les syndics de la C01n1nunauté de Sen ès , ce qui ne suffisait pas, LE
co ' SENTE~IENT INDI\IDUEL DE TOUS LES HABITAi'iTS ÉTANT NÉCESSA IRE ; 3° ........ )) Mais
, la Cour de Cassation, le 20 mai 1824, rejeta le pourvo i en disant sur ce point particulier, confirmatif de la décision:
O
« Attend u, quant aux solennités de l'acte de 1665, qu'il a été passé
pa.)' les consuls de la commune de Senès et députés commis PAR DÉLIBERATION DU CONSEIL DUDIT LIEU, tant en leur propre et privé nom qu'au
nom de la communau té, ensuite de divers édits du roi et arrêts du
Conseil d'Etat ; qu e cet acte a été exécuté sans réclamation pendant un
siècle et demi, et que d'après cette exécution tacite et le principe in
anliquis omnia }J1'wsumuntttl' solenniter (a cta , le ti Ire de 1665 a pu
ètre considéré comme justifiant le caractère conventionnel de la banalité
litigieuse; qu'ainsi l'arrêt attaqué ne contient aucune fausse application,
ni violation des ar~. 23 et 24 de la loi du 15 mars 1790 , non plus
que des art. 5 de la loi du 25 aoùt 1792 et 1 de la loi du 17 juillet
,1793, aboli tives de la féodalité. ))
L'arrêt de la Cour de Cassation fut rendu sous la présidence de
~I. Hel1l'ion de Pansey, l'éminent magistrat, qui co nnaissait si bien
les principes de notre droit ancien, l'auteur fameux du li\Te si connu
Des dissertations (éodales.
_\ppliquons maintenant ces principes et ces autorités à la cause; ou
du moins rapprochons-les des faits qui y sont constatés par les actes,
et on verra que le mode d'établissement de la banalité en 1688, fut
�-
32-
entouré de plus de formalités encore que n'en exigeaient les autorités
précitées.
C'est d'abord dans deux délibérations (lu conseil GENERAL de la com- •
munauté des '26 et 29 janvier 1688 , que la banalité des moulins est
votée. - Nous disons co nseil genéral avec intention, pa.rce que c'est
la qualitlcation qui est donnée par la délibération du 29 janvier à celle
du 26, et à toutes les deux par le rapport d'estime dll 31 janvier 1688.
C'est donc un conseil renforcé; ce n'était pas le conseil ordinaire.
En second lieu, dans la délibération du 29 janvier, le consul Mont<lnarq fait co nnaitl'e: {( Qu'il a communiqué les cahiers des conditions
de l'estime des moulins à tout autant des personnes qu'-iJ lui a été
possible, POUR PRENDRE LEURS RÉ SOLUTIONS ET DEL/DERATION S SU R ICE UX. »
- Le co nsul a don c ouvert une enquète et recueilli les ?'ésolutions et
délibérations du public. Ce qui le prouve, c'est ce qu'il ajoute: « El
co mme il est nécessaire DE LES REMETTRE à AJAt. les experts avec les
délibérations qui y seront prises sur iceux .. ... , . . . . . . .. ff
En troisième lieu , les ex perts à leur tour , en procédant il l'estime
des moulins, avaient aussi ouvert une enquète. Ils le constatent en disant :
« Ouï les sieurs co nsuls et autres pal·ticuliers dudit Hy ères en tout ce
qu'ils ont voulu nous dire et ?'el1wntrer, et ENCORE sun LES CONDITIONS;
PACTES, FACULTÉS et fr anchises auxquelles nous devons auoù' 6ganl à
l'estime des dom.aines de ladite communauté . »
En quatrième lieu enfin, c'est en exécution de deux arrèts du co nseil
d'Etat, l'un du 19 octobre 1680, l'autre du 2 1 octobre 1687, et d'une
ordonnance du '2 décembre 1687 de l'intendant de la province, que
les moulins sont vendus, que la banalité est votée, et enfin , qu 'elle est
tran sportée aux créanciers de la Commune.
y eut-il donc jamais une plus grande solennité? N'ajouta-t-on
pas en 1688, pour la banalité des moulins d'Hyères, à ces form es si
simples de la délibération isolée du conseil municipal, qui était Ir droit
commun ~ une form e plus haute , plus grave, et qui fai sait reposer la
déltbératlOn non plus sur le vote du seul conseil municipal, mai s sur
l'assentiment de toute la communauté et sur celui de l'autorité souve-
-
33-
raine elle·même, agissant par le conseil d'État? Si la question de la
légalité de la forme suivie en 1688 s'était présentée sous notre ancienne
législation provençale, celle-ci eut été jugée exubérante. Elle doit l'être
encore donc aujourd'hui .
No us pouvons aller plus loin. maintenant, et nous devons faire connaître un second prinoipe consacré par le droit provençal, qui form e
le complément de notre ancienne législation sur ce point.
On tenl\it, pour les banalités établies par le conseil des communautés pour l'ex tinction de leurs dettes, que si quelque vice de (orme
s'était gli ssé dans l'acte constitutif de la banalité, ce vice était couvert
par l'exécution pendant trente ans, que les habitants avaient donnée
à la banali té. La possession seule ne pouvai t sans doute fonder légalement ces banalités; mais elle pouvait counir le manque ou le défaut
parti el de formalités dans le titre. - Voici les autorités qui l'attestent :
Latouloubre, n° k8, dit d'abord sur ce point: « Quoique la seule
possession ne suffise pas à une communauté pour s'arroger la banalité, cependant on peut s'en prévaloir s'il y a eu une prohibition à
laquelle les babitants aient acquiescé. Le titre défectueux peut ètre validé par un pareil acquiescement. (Arrêt du 30 juin 174:5 en faveur du
sieur de Carros, contre la communauté de Saint-Maximin). Des délibé·
rations particulières et constamment exécutées par les habitants furent
regardées comme un titre légitime d'établissement de la banalité.
Chorrier, dllns sa jurisprudence de Gui-Pape, sess. XII, cite un semblable arrêt du Parlement de Grenoble. » Et rien de plus rationnel!
puisqu'il ne s'agissait que d'un contrat ordinaire, qu'aucun vice d'ordre
public n'entachait, pourquoi le principe général de son acceptation tacite, de la renonciation par l'exécution à tout moyen de nullité, aurait·il
reç.u exception ? Pourquoi ce principe reproduit par l'article 1338 aurait-il
ici été mis à l'écart 1
Julien, t. 2, p. 252, en rapportant l'arrèt du 30 juin 1745, pour
5
�- 34les moulins de Saint-Maximin , cité plus haut, professe implicitement la même doctrine, puisque dans le récit du procès il dit: « Lél
communauté avait prétendu, apl'ès lune longue exécution de cette 'V~nle ,
qu e la banalité n'était pas suffisamment établie ..... . »-Et le même
auteur la professe ouvertement à la page 254. , où parlant de la vente
faite par la co mmune de Villecroze aux enchères de ses fours et de
ses moulins, par suite de la vérification de ses dettes et de quelques
nullités de form e qui avaient accompagné les ench ères et les actes d'aliénation, il dit: « Les nullités de form e n'étaient point couvertes par le
laps de trente ans, parce qu 'il fallait déduire les années où Bourgarel,
acquéreur des fours et des moulins, avait été consul et administrateur
dr la co mmunauté. »
L'arrèt de Senès du 12 juillet 18:2 1 de la Cour d'Aix, reconnatt aussi
le même principe; il dit : « Que dans le cas mème où le consentement
de l'universalité des habitants eut été nécessaire, il TlJsultetait ctt, moins
TAC ITE &lE l'iT et d'une 1nwnièn évidente, de l' exÎJcnlio n paisible et vololl toire que celte pel'ceplion de (ruits aurait uçue depuis deux siècles . »
Et la Cour de cassation, dan s. son arrêt du 20 mai 18:24 , co nfirmatif
de l'arrèt d'Aix , professe ou consacre la mème doctrine en disant: (, Que
/' acte de 1665 A llTll EXllCUTe SANS RÉC L.U1ATIOil' pMdctnt un siècle et demi,
et que d 'APR~ S CE TTE EXÉCUTION TACITE . . . . , le titre a pu ètre considéré
comme justifiant le caractère conventionnel de la banalité ...... »
Enfin, pour en terminer sur ce point, nous citerons encore un des
derni ers arrêts de la Cour d'Aix, confirmé en cassation, celui des fours
banaux de Castellanne, du '11 mars 18ti2, dans lequel, sur la question
du concours de tous les habitants à l'acte constitutif de la banalité,
et comme supplément à ce défaut de concours, la Cour dit: « Consirlérct1!1 que ce conlml pu.bliqtte1l!ent et Librement consenli a l'eClb une
exécution pleine et entière pendant pl'ès de deua; siècles, sans ' qu' aucune l'éclamation se soit élevée depuis 1659 jusques en 1812 .... »
Cet autre principe milite donc encore pour la légalité de la banalité
des moulins d'Hyères . On a vu dans l'exposé de fait, qu e la banalité
- 3ti n'a jamais été attaquée par la Commune et qu'elle s'est jusqu'à ce jour
exercée.
Remarquons , en term inant , que la loi du 1ti mars 1790, qui s'en
es t reférée au droit commun ancien pour les banalités conservées, c'està-dire, pour celles pures de toute féodalité, l'a accepté aussi bien dan s
le principe statutaire du droit provençal qui reconnaissait au conseil des
communautés le droit cie stipuler la banalité, que dans le principe subsidiaire que notre statut admettait encore touchant les vices de form e
inhérents au co ntrat de constitution . La loi de 1790 n'a relevé de l'exrcution donnée aux banalités , qu e pour les banalités féodal es et celles
qu'elle a supprimées. Pour les autres, elle a maintenu l'exécution
et tous ses effets. tes arrêts par nous cités les drmontreraient au
besoin.
Ce moyen tiré de l'exécution de la banalité , peut même revètir ici
un e form e plus ri goureuse et plus décisive. Il peut même dispenser
les propriétaires de prodnire leur titre et les autoriser à se renfermer
pour la preuve de leur droit dans les faits eux-mèmes d'exécution . La
loi du '1ti mars 1790 le dit expressément dans son art. 29, ainsi co nçu :
« Lorsque les possesseurs des droits conservés par les art. 9, 10 . . . .
et 24 ci-dessus, ne seront pas en état de représenter ce titre primitif ,
ils pourront y suppléer par deux reconnaissances conformes, énoncia-'
lives d'une plus ancienne , non contredites par des reco nnaissances
antérieures ....... pourvu qu 'elles soient so'utenues d'une possession
actuelle qui remonte sans interruption à 40 ans, et qu'elles rappellent
soit les conventions, soit les concessions mentionnées dans les articles. ))
Remarquons d'abord que l'arti cle 29 ne spécifie pas en quelle
l'orme et devant quelle autorité il faut que les reconnaissances de la
banalité aient étc passées. De là il suit qu'elles sont admissibles , soit
qu'elles aient été faites ou passées del'ant notaire, soit qu'elles aient
eu lieu en justice, soit enfin qu 'elles aient été faites par le corps municipal assemblé et dClibérant. Toutes les fois que la reconnaissance
de la banalité se trouve ainsi constatée, elle vaut. Il suffit que la re-
�-
36-
co nnaissance soit intervenue et faite pour servir de titre au créancier
de la banalité, pour qu'elle ait un caractère décisif de gravité, et qu 'elle
rentre éminemment dans la lettre et l'espri t de l'article 29 de ln loi
précitée.
Cela dit , nous trouvons la première recollnaissance de la banalitr
des moulins d'Hyères , dans l'eX'pédient de condamnation pris par la
commune d'Hyères, approuvé par la délibération de son conseil général
du ~O décembre 1733, et homologué par arrèt du Parlement de Grenoble du 10 février '1734. Voici dans quels term es est conçu cet expédient dont nous n'avons encore rapporté aucun détail : « Entre les
sieurs consuls et communauté de la ville d'Yeres appellants du jugemenl rendu par la Chambre des requettes du palais du Parlement de
Provence le treizième décembre mille sept cent vingt-sept, d'un e part ,
et les sieurs propriettaires des moulins bannaux de ladite ville intimés ,
d'autre, Appointé es t du consentement des parties, Out le procureur
général du roy qu e la Co ur a mis et met l'appellation el ce dont es t
appel au néant quant à ce, et par nouveau jugement a maintenu les
propriettaires des moulins dans le droit de bannalité sur tout le terri toire, avec defIenses à tous les habitans des quarti ers de la Crau et de
Carquerann e et tous autres d'aller moudre ailleurs qu 'auxdits moulins,
à peine de co nfisca ti on , à la charge d'exercer ladite bannalité auxdits
moulins et non ailleurs, et sera le droit de mouture payé au burea u
accoutumé, et pour le passé, a mis lesdits parti culiers hors de ro ur et
de procès, condamne lesdits consuls et communauté aux dépens qui
s~ro nt réglés sur simple notte, et sera l'amende restituée, etc. »
Le 20 décembre 1733 , le conseil général l'a pprouve en disan t:
I( Lequel ercpéd·ient ledit conseil a unanimement délibén! de l'of/h l',
,·ecevoiT et consentù'; donnant à cet ef/et, POUVOiT à MM. les consu ls
et au sieuq' BO~bt i llier , pTOCUTeUl' de la communaut é au pa;rlement de
(rl'eno b/e de le signer pour êt,·e l'mnis au gre f/e de tcbdite cou,·, p OUl'
en prendre un extrait et êtTe exécuté suivant sa (onne et tenelm'. »
Enfin le Parlement de Grenoble par son arrêt du 1 0 février 1734,
l'homologue et en ordonne l'exécution , et donne ainsi à la reco nnais-
-
37-
sance de la commune le plus grand ca ractère d'authenticité possible.
La deuxième reconnaissance est contenue : '1· dans les conclusions
de la commune d'Hyères rapportées dans l'arrêt de Grenoble du 13
80ùt 1737, qui maintient l'expédi ent de 1733, et d'a près lesquelles
celle-ci reconnaissait que la banalité appartenait aux propriétaires sur
la ville d'Hyères et demandait qu'elle y fut restreinte en ces termes :
« Que la banalité AP PARTENANTE AUX PROP RI ÉTAIRES DESDI TS MOULI NS
soit TeS /Teinte et limitée dans la riile d' Hy ères, avec défense de l'exercer
sur les habitants des villages et hameaux ... ... .. » Et 2· dans l'arrèt
du Parlement de Grenoble du 13 aoù t 1737 qui a ordonné: « Que
l"arrèt précédent de 1734 sera exécuté selon la forme et teneur, et en
cOllséquence a maintenu et 1Ilaintient lesdits propriétaiTtS des moulins
ba/iaux de la ville d'Hyères dont il s'agit dans leul's dTOits de banalité
sur tous les habita;nts de la ville et SUl' tous les habi tcmts dans les
/lwneaux aux quaTtiers la Cl'au, Carqueirane, Sigalou, Sauve-Bonne
et autres habitanls dans le territoire de ladite ville. »
~ ous ajoutons maintenant que les autres conditions prescrites par
l'arti cle 29 se renco ntrent ici. Premièrement, elles ont été et elles sont
soutenu es par une possession actuelle de la banalité qui remonte salls
interruption à 40 ans. Depuis 1807, époque de la reprise et du foncti onnement de la banalité, après la suspension qu'elle avait subie durHnt les jours mauvais, jusques à l'année 1838, moment où le pro ces
s'est élevé, nous avons plus de 40 années; nous en avons ~ \.
Ces reconnaissances rappellent en outre les convention. d'où est venue
la banalité; cela se vo it surtout dans l'arrèt du Parlement de Grenoble,
du 13 aoù t 1737, qui énumère fort en détail à la p. 18 v· et suiv.
les titres renfermant cette conventi on, et notamment le !"apport d'estime
des moulins du 54 j anvier 1688, qui à so n tour rappelle les deux
délibérati ons de la commune des 26 et 29 jan,ier '1688, et en outre
l'arrèt du Conseil d'Étal du 21 octobre '1687 ordonnant le paiement des
delles de la ville d'Hyères, et l'ord onnance de l'intendant de la province du :2 décembre sui vant rendu po ur son exécuti on. Et comme cet
arrêt co nfirme l'expédient de condamnati on pris par la commune du
�- 38'2 0 décembre 1733 et l'arrêt d'homologation du 10 février 1734, et
que du tout il ne fait qu'un e seule et même chose, le rappel de la
convention primitive fait pour et dans le second arrèt s'étend et s'unit
jusques à l'expédient et à l'arrêt de '173,ï.,
Enfin la condition que les deux reconnaissances soient énoncicttives
d'une plus ancienne, est remplie avec exubérance, puisqu'au lieu d'une
simple énonciation de reconnaissance, nous produisons les deux délibérations elles-mêmes de 1688, qui font bien plus que renferm er une
simple reconnaissance; et qui constituent et au-delà l'énonciation de
reconnaissance simplement exigée par la loi de 1790.
Ainsi don c par ce troisième moyen , puisé dans l'exécution de la
banalité, comme par k s deux premiers, les propriétaires justifient suffi samment la légalité cie leur banalité, et ils r H produisent le titre
démonstratif.
§ III .
Aucune OI'igi ne anté1'ieu1'e de banalite féodale n'a vicie la convenl iolt
de 1688.
l 'utilité de la démonstration de ce point nait de ce principe de droit
consacré par la jurisprudence, et notamment par les arrêts d'Aix , pour
les fours de Valensolle, du 10 mai 1819, et pour les fours d'Aubagne,
clu9 mai 1826 (Recueil des arrêts d'Aix , 1819, p. 4·20- eL1826, p. 322),
d'après lequel une banalité qui avait primitivement été établie par un
seigneur et il son profit, et qui par suite était féodale, n'avait pas cessé
d'être telle en passant par les mains d'une commune, malgré l'exercice
qu'elle en avait faiL. D'où ces arrêts ont conclu que la Commune, en
revendant à un particulier non seigneur, un e banalité primitivement
féodale, l'avait vendue avec la même nature qu'elle avait lors de l'acqui- ·
sition par elle faite du seigneur, sans qu'on pùt prétendre qu'elle s'était
éteinte par confusion .
- 39Or, il cet égard, nous disons que rien de pareil ne se rencontre ici .
Lorsqu'en 1688, la communauté d'Hyères (l constitué et vendu la banalité de ses moulins, aucun seigneur préalablement ne l'avait ni établie
ni possédée, aucun seigneur ne la lui a vendue. Un coup d'œil rapide
et rétrospectif sur tous les faits antérieurs à 1688 su(fit pour le démontrer.
En premier lieu, depuis l'année 121l7, il n'a plus existé de seigneur
dans la commune d'Hyères et son territoire. De plus, les moulins dont
il s'agit n'ont été construits par Jean Natte qu'après 14.1l8. Donc, il est
de toute impossibili té qu'il y ait jamais eu en 14118 ni depuis, aucune
impression de féodalité dans l'existence d'un e banalité seigneuriale.
En second lieu, l'acte du '27 décembre U1l8, notaire Bruny à Hyères,
entre Jean Nalle et la communauté d'Hyères, intervenu pour la construction des moulins, n'est qu'un traité il forfait passé par la Commune
avec cet entrepreneur, non seigneur et simple particulier, sans aucune
stipulation de banalité. l e jugement a établi fort au long dans ses motifs
cette vérité; ct nous ne pouvons mieux faire que de nous référer il ses
longues dédu ctions sur ce point. - Pas de trace de banalité seigneuriale.
En troisième lieu, l'acte du 3 1 janvier 1486 n'est qu'un acte de société pour l'achhement des moulins entre Pierre ~atte et le sieur de
Limans, sans aucune qualité de seigneur, agissant comme simple particulier. Cet acte règle uniquement la position des associés entre eux.
En quatrième lieu, les deux actes par lesquels la commune d'Hyères
acquit les moulins, émanent l'un , celui du 22 novembre 11l51l, de Pierre
Natte; l'autre, celui du 18 septembre 11l37, du sieur de Forbin , ayanlcause du sieur de Limans, simple parti culier pal' rapport à la commune d'Hyères , dont il n'était pas le seigneur, ct dont l'auteur avait
été associé en 14.86 avec Pierre Nalte, dans la propriété des moulins .
Par suite encore, rien de féodal dans cette origine.
En ci nquième lieu, l'acte du 19 janvier 164·7 n'est pas autre chose
que la restitution des moulins faite à la Commune par les créanciers de celte époque , qui les avaient pris , alors, sur le pied de
�-
40 -
64,857 liv., valeur qu'ils trouvèrent exagérée et dont ils ne voulurent
plus.
En sixième lieu, l'acte de bail des moulins du 26 février 1647, passé
par la Commune à Terras, pour quatre ans, stipule bien que le fermier
pourra exiger la mouture au quinzain; dit encore que les habitants
seront tenus d'aller moudre aux moulins, sans pouvoir aller ailleurs.
Uais c'est là un simple acte d'administration de la Commune, un
règlement par elle fait; mais ce n'est pas une banalité propremen1
dite, stipulée avec un tiers qui l'accepte, qui doit être perpétuelle ju squ'au racbat, et qui soit une vraie convention de banalité. Après quatre
ans, la règle doit finir, ou, pour recommencer, elle aura besoin d'une
nouvelle délibération. Il n'y a pas non plus là trace de seigneur. Terras
esl un simple industriel.
Mêmes observations sur le bail à Barry des moulins du 7 mars '168i>
par la Commune, pour quelques années.
Concluons qu'aucun vice originel de banalité féodale n'a entaché la
banalité conventionnelle de 1688, et qu'ainsi elle doit être maintenue:
1° parce qu'elle est justifiée par la production de la convention qui ra
créée; 2° parce qu'en la forme , elle a été constituée d'une manière
régulière, et conforme aux principes du droit commun proyença l :
3° parce que aucun vice antéri eur ne s'y est mèlé.
Voyons maintenant ce que sont les objections du jugement de To ul on ,
et si elles peuvent quelque chose contre des fails et des principes de
droit si bien établis.
§ IV .
Les objections du jugement.
Les, unes sont en (ait ; les autres sont en d1'oit. successivement.
Suivons - le
- ~1 I. Objections en (ait. - Elles consistent dans une fausse interprétation des délibérations des 26 et 29 janvier 1688 du conseil général
de la communauté d'Hyères. Le jugement dit à cet égard : « Que ces
délibérations n'ont pas créé la banalité des moulins au profit des acquéreurs; qu'elles supposent l'existence antérieure de cette banalité; qu'il
est dit, en effet, dans la délibération du 26 janvier 1688, que lesdits trois
moulins sont banaux, que les conditions de la banalité y sont énumérées
non comme une création nouvelle, résultat actuel de la délibération, mais
comme constatation d'un état de choses préexistant ; que diverses énonciations de baux desdits moulins, analysés dans le rapport d'estime du 31
janvier 1688, mettent ce point en pleine lumière; que notamment le bail
passé à la date du 7 mars 1685 au profit de Jean Barry, porte, entre
autres conditions, que tous les particuliers, manants et habitants dudit
Hyères seront obligés de faire moudre leurs grains auxdits moulins
so us peine de confiscation, et que le droit de mouture tant des grains
que des légumes sera pris par le fermier sur le pied du quinzain, les
quatorze portions demeurant franches aux particuliers: - Attendu'que ce
caractère se trouve reconnu ct officiellement constaté dans l'orddimance
rendue le :2 décembre 1687 par Pierre-Cardin Lebret , intendant de la
province, délégué par l'arrêt du conseil d'État précité pour procéder à
la liquidation des delles de la communauté d'Hyères et à la vente des
trois moulins; que dans cette ordonnance, lesdits tro is moulins sont
qualifiés de banaux . )}
Voici notre réponse:
L'argument du Tribunal est une véritable argutie. Si le premier des
articles mis en délibération en 1688 au lieu de dire: « Les '/Iloulius
SONT banu11.!.C » avait dit au futur: « SERONT banaull:, » la difficulté
n'existerait pas. Cela est évident de soi , puisque l'arti cle aurait regardé
l'avenir et constitué pour l'avenir une règle.
~lais si on veut y réOéchir et avec la plus légère attention consulter
la lettre et l'esprit de la délibération de 1688, on se convainGra que
l'ex pression qu'on relève ne peut pas avoir la portée qu'on lui donne.
6
�•
- 42Quant à la lettre, la délibération du 26 janvier est suffisamment explicite. Il y est dit ; « Que les articles qui composent le cahier des
experts DOI1"ENT à l'HENIR être observés tant pal' les créanciers qui
feront option, QUE PAil LES HABITANTS ET FOIIAINS DUDIT HYÈIIES. 1) Il Y
est dit encore que: « Ces al,ticles seront insérés ci-après. » Puis on
ajoute : « Qu'opina;nt SUI' iceux, le conseil a DeLIBeRe d'APPROUVER
lesdits al,ticles. »
Mais si c'est pour l' ib'venù' que ces règles DOI1"ENT être observées, la
banalité, qui est une de ces règles à venir, est donc créée. - Si on insère cet article dans la délibération, et si on opine et qu'on délibère
de les APPROUVER, on délibère donc sur la banalité à imposer aux moulins, à créer sur eux, et on l'impose et on la crée comme une de ces
lois qui doivent régir l'avenir. Inutile donc , quand on a parlé de
l'avenir et qu'on a entendu le régler, de dire qu'on n'a voulu parler
que du passé et constater un fait. On ne délibère pas sur un fait consommé pO)lr fixer son existence.
En outre, ce n'est pas le premier et le deuxième article seulement
qu'il faut considérer. C'est la série des dispositions règlementaires contenues dans la délibération qui doit être vue. Or, tous les autres articles
sont au futur. L'article 3 dit au futur: « Les habitants seront obligés
de porter leurs grains . . . .. . » L'article 4 : « Le propriétaire desclits
moulins prendm le droit de mouture.... .. .. » Le 5' : « Le droit
de mouture SERA PERÇU à l'endroit. ...... » ~fême rédaction au futur
des articles 6,7,8,9 , 10, H , 12, 13,14,15,17, 18 et 19. -Or,
comme tous ces articles sont liés d'une manière indivisible , qu'ils
constituent tous le règlement de la banalité, qu'ils en font partie intégrante, il faut bien en conclure que le premier est conçu virtuellement
dans le même sens au futur; et que tout cet ensemble est une véritable création.
Ce qui résulte si bien de la leUre de la délibération , ressort encore
tout aussi clairement de son esprit; et cette seconde épreuve qu'on
peut lui faire subir, n'est pas moins convaincante que la première.
Qu'a voulu en 1688 le conseil de la communauté? Vendre les mou-
- 43lins banaux, pour leur donner plus de prix. Mais s'il les a voulus banaux, il a dû les créer banaux, si déjà ils ne l'étaient. Autrement, le
conseil se serait contredit. Or, en fait, il est certain qu'avant 1688, les
moulins n'étaient pas banaux, et nous allons le prouver:
A cet égard , le jugemen t cite comme des indices d'une banalité préexistante diverses énonciation~ de baux desdits moulins, dit-il, qui se rencontrent dans le rapport d'estime du 34 janvief'l688, le bail du 7 mars
4685 à Barry , par exemple; nous ajoutons nous-mêmes celui à Terras
du ~6 février 1647; dans lesquels il est dit que les habitants porteront
leurs grains aux moulins, sous peine de confiscation, et que le droit
de mouture sera pris sur le pied du quinzain. - Mais l'illusion du
Tribunal est grande ici. Ce n'est pas une banalité qui est constituée par
ces baux. C'est un règlement temporaire, .pour la durée du bail; qui a
fini avec chacun des baux; qui a eu besoin d'être renouvelé à chaque
bail pour qu'il recommençùt, et qui n'a rien de commun avec la création
ùe la banalité conventionnelle votée en '1688, laquelle a eu des tiers
pour l'accepter, qui a été pm'p6tuelle dans sa durée et qui ne pourra
s'éteindre que par le rachat. Les baux de 1647 et '1685 sont de purs actes
intérieurs d'administration. En '1689, il ne restait plus rien de leurs
eITets, puisque les baux étaient ex pirés, le premier depuis très longtemps
et le second depuis le ~ mars '1689, et que la collocation des créanciers
n'a pris naissance qu'après avril '1689.
~lais enfin quand on supposerait que ces baux ont été la réalisation
de ce pouvoir que nous avons reconnu aux conseils des communautés
de leur imposer des rèves, et des perceptions de fruits , quelle conséquence à en tirer contre ce qui s'est fait en 1688 ? Aucune. Dès l'instant que ces délibérations ou ces stipulations étaient subordonnées à
la durée des baux, ceux-ci une foi s fini s, la commune pouvait les reco mmencer avec d'autres et les renouveler. Eh bien 1 en 1688 elle a
plus fait qu'elle n'avait encore fait. Elle a créé un état de choses perpétuel ; elle a fait un contrat avec des hers en vendant ses mouhns ;
elle les a créés banaux: pour l'avenir et pOUl' t01/g01l1'S dans les mams
de ses acquéreurs. Elle a créé il nova un état futur; et pour cela elle
�-44a vo té, délibéré, examiné et prononcé suivant les formes établies . Où
était l'obstacle à ce qu'elle agit ainsi ? Nulle part.
En voici une dernière preuve. - Les cours et les tribunaux ont eu
à examiner la question de savoir, si une commune qui avait acquis de
son seigneur une banalité féodale, ne pouvait pas la rendre dans ses
mains, pure et franche de toute féodalité , par ulle nouvelle création
qu'elle en ferait slle-même, en la stipulant de nouveau avec l'acquéreur
de ses moulins. Et les cours n'ont pas hésité à reconnaitre et à déclarer que' là où une commune aurait ainsi prooédé, peu importerait
l'existence de la première banalité , et que la seconde serait parfaitement licite et régulière. - La cour d'Aix a notamment posé ce principe dans son arrêt du 10 mai 1819 , en disant: « Considérant qu e
la banalité des anciens fours de Valensolle fut originairement établie
au profit du seigneur du lieu - ...... - Considérant que ce droit
de banalité n'a pas été établi ou constitué de nouveau au profit des
créanciers de la communauté . . . .. . - Considérant qu'aucun ass ujettissement nouveau de la part des habitants et résultant d'un e co nvention souscrite au profit d'un particulier non seigneur, n'ayant effacé le
vice originel de la banalité des fours de Valensolle , cette banalité a
été supprimée. »
Il est évident, par ces motifs , que si l'inverse avait été fait , la banali té aurait été légale.
Eh bien 1 il devrait à plus forte raison en ètre ainsi dans l'hypothèse
où la banalité aurait été imposée en 164.7 et 1685 comme rève et
comme imposition de fruits, pour la durée limitée des baux alors souscrits, parce qu'en 1688 une stipulation nouvelle, différente, expresse,
fa ite pour l'avenir et pour toujours , au profit des créanciers avec qui
la commune stipulait, aurait créé la banalité conventionnelle qui devait
régir l'avenir. Ce qui avait été fait en 164.7 et 1685 n'était pas un
obstacle à ce qui se faisait en 1688. Il n'y avait eu aucun e illégalité
dans ce qui s'était fait en '1 6!~ 7 et '1685. Au contraire le conseil de la
communauté avait usé d'un pouvoir légitime. En eut-il été autremen t
il était toujours libre à la communauté d'établir à nouveau une bana~
4.5 -
lité, de purger et de vider le passé. Le passé n'enchalnai t donc pas
l'avenir, et le Tribu nal s'est trompé gravement en concluant de ce qui
s'était fait à cette époque, qu'en 1688 la commune d'Hyères n'avait pu
ou n'avait pas voulu créer un e bana}iié.
Le second argument du jugement emprunté à l'ordonnance de l'intendant de la province du '2 décembre 1687, portant exécution de l'arrêt
du Conseil d'État dl! .21 octobre 1687 sur la liquidation des delles de
la communauté, n'a pas plus de valeur que le premier. Peu importe
que dans cette ordonnance l'intendant ait désigné les moulins à vendre
oomme banaux . Cela s'explique par les deux baux de 164.7 et 1685, et
par cette partie de l'ordonnance où il est dit que les experts consulteront les baux Il ferme passés jusques à présent. Mais cela ne peut pas
détruire les délibérations subséquentes et les articles qui ont créé la
banalité de 1688. L'intendant qui voulait que les moulins fussent vendus
comme banaux, a voulu et a consenti par là mème à ce que la stipulation de la banalité intervint dans la vente et les collocati ons de 1688.
Passons aux objections en droit.
II. Les objections en droit. - Elles sont toutes dans ce passage du
jugement où il est dit : « Que la banalité affectant tous les membres
de la commune, ut singuli, tous les habitants auraient dû être appelés
à contracter cette obligatÎon ; que le conseil de la communauté n'avait
pas qualité pour représenter tous les m embre~ d~ la commune pour
la création d'une pareille servitude; que sous 1anCienne Junsprudence
l'opinion la plus générale était pour la nécessité du conco urs individuel
de tous les habitants; que c'est le sentiment de presque tous les auteurs qui ont écrit sur la matière et notamment de Boutari c, Droits
seigneuriaux, p. 339 .... , et de Julien, Statuts, t. Il , p: 4.17 .... . ))
Cette théorie du jugemen t est d'avance démontrée fausse par tout
ce que nous avons établi touchant la forme des conven tions de banalités établies par les communautés pour le paIement de leurs dette .
Mais il faut ,"oir en détail les erreurs multipliées qu'elle contient.
�- 46Remarquons d'abord que le jugement reconnait , comme nous, que
sur la form e du contrat de banalité, c'est la loi ancienne qui forme la
règle et que la loi de '1790 ne l'a pas changée.
Mais à peine cette vérité a-t-elle été par lui reconnue que commence la
séri e de ses erreurs. D'abord il ne se donne pas la peine de discerner et
de distinguer dans notre droit provençal les deux règles diITérentes qui y
avaient été admises pour les banalités seigneuriales et féodales , et pour
les banalités constituées par les communes lors de la vente de leurs
moulins. Le tribunal de Toulon suppose qu'il n'y en a qu'une seule,
et il s'arrête exclusivement à celle relative aux banalités seigneuriales
et féodales , - Cette erreur est des plus graves. Là le jugement méconnait et viole non-seulement les doctrines des auteurs provençaux
que nous avons rapportées plus haut, et les arrêts du Parlement de
Provence, qui les uns et les autres avaient appliqué la règle opposée,
quand il s'agissait des banalités établies par les communautés en faveur de particuliers non seigneurs, pour le paiemen t de leurs dettes,
mais encore l'arrêt de la Cour d'Aix du 12 juillet 1821.
En second lieu, il cite la doctrine de Boutaric, - Mais ce n'est pas
là un auteur qui ait rés umé le droit provençal, ni écrit sur ce droit.
Il a écrit sur le droit suivi à Toulouse ; et il est singulier que le jugement recherche dans un auteur étranger à la Provence, notre droit statutaire et notre droit municipal. Ces points tiennent à notre droit public provençal. Il ne faut en rechercher les traces que parmi nous .
En outre, Boutaric, dans la règle qu'il a posée, n'a parlé que pour
les banalités seigneuriales . Le passage de l'auteur rapporté par le jugement lui-mème le prouve, Il suffit seulement de ne pas le scinder et
de ne pas séparer sa doctrine en deux . Il dit en effet à la page 339 :
« Il faut , dIsons-nous, nécessairement un titre pour la banalité. LE
TITRE DU SEIG NEU R POUR LÀ BA N À1.IT~, n'est autre qu'un acte ou contr'at
par lequel les habitants dament assemblés ... , s'obligent à moudre . ..
Il faut conclure, ajoute-t-il, que pour établir la banalité, tous les habitants doivent y consentir ..... » ~Iai s qu'importe la règle sui vie pour
ce cas partIculIer, quand il s'agit d'une banalité conventionnelle com-
-
/j,7 -
munale? Bou(aric ne contredit pas nos doctrines provençales, Il ne s'occupe pas du cas actuel. A quoi sert donc celle autorité?
Le jugement cite encore Julien, t. Il, p, 417. - Mais ce n'est pas
là que Julien s'occupe des banalités communales. Là il ne parle, comme
Boutaric, que des banalités seigneuriales, C'est à la page 425, et au
passage par nous plus haut rapporté, que Julien a donn é la règle qui
nous est propre et qui Il été suivie en 1688. - Par quel esprit d'aberration le jugement invoque-t-il pour l'opinion qu'il consacre, l'auteur
qui l'a le mieux ruinée et qui a le mieux établi les deux modes différents de constitution des banalités?
Après les deux auteurs si malencontreusement cités, le jugement
expose une théorie. Il dit, en l'affirmant hardiment : « Que le conseil
de la comrnuna~,té d' Hyères n'avait pas qualité pour r'epl'ésenter tous
les rnelnb?'es de la Commune . . » Mais nous répondons par la doctrine
contraire de Julien, t. Il, p. 339 : « Ceux qui composent le conseil de la
communauté représentent le peuple et en ont tout le pouvoir, vicem
populi r'eprœsentant, comme dit Cancerius, var'ia7'. ,'esolut., p. 3,
ch, XI/!, n° 334,. » Entre ces deux autorités, qu'on nous permette de
rejeter celle du tribunal de Toulon, et de préférer celle de notre grand
juriste provençal.
Enfin, le jugement descend en finissant à un dernier détail de fait.
Il ne trouve pas que les 7'ésolutions des particuliers sur les conditions
de l'estime recueillies par le consul Montanarq, soient quelque chose de
précis, et que le conseil, en 1688, ait réellement délibéré sur la banalité
11 établir. - Mais d'abord , le jugement ouhlie que ces ,'ésohttions des
pa1'ticulie1'S ont été recueillies par le consul , a~,près d'autant de personnes qu'il lui a été possible. Ce sont les termes de la délibération du
29 janvier. En outre, les experts, dans leur rapport du 31 janvier 1688,
disent qu'ils en ont fait autant, et que les consuls et AUTRES PARTICU LIERS ont été entendus en lout ce qu'ils ont VO!tl~b dire sur les COl'(DI TIONS, pactes et franchises qui doivent être ùl$érés au ]Jrésent rapporI. - N'es t-cc donc rien que cette masse d'adhésions et de 'résolutions
]Jw·ticulières ? La délibération à elle seule du conseil général suffisait.
�- 48~Iais ces adbésion de la population ne lui enlèvent rien; et elles ont
bien leur poids.
On ne s'explique pas non plus comment le premier juge a pu dire
que le conseil général de la communauté, dans ses deux délibérations,
n'avait pas voté la banalité, et qu'il n'avait délibéré que sur LES CONDITIONS qui devaient accompagner la vente des moulins. Quelle méprise 1 Quel oubli des termes mèmes des articles votés? Ils organisent
la banalité. Il est déclaré de plus que ces articles, ou soit ces conditiOI)S, doivent (Jtte observées à l'avenù' par les habitamts; et le conseil
n'aura pas voté la banalité qui était une des conditions de la vente 1
Pouvait-on s'expliquer plus clairement ? Et la nouvelle erreur du jugement n'est-elle pas saillante?
Le jugement se tait et n'a point d'objection contre le pnllClpe du
droit provençal qui déclarai t couverte par l'exécution, la nulli té en la
forme qui aurait pu accompagner la convention de banalité entre la
commwlauté et Un particulier non seigneur. - Mais si ce principe
doit prévaloir ici, comme il prévalait autrefois, toutes les précédentes
objections du jugement s'évanouissent, et nous sommes sur un terrain
où nous ne rencontrons plus d'obstacle pour obtenir la réformation
du jugement. Dans cette hypothèse, en effet, l'assentiment exprès de tous
les habitants aurait été remplacé par leur assentiment tacite. Le vice
de forme qui n'aurait pas pu être relevé avant 1790, ne pourrait pas
l'être davantage après. Le droit provenÇ<11, longtemps avant 1790, et
trente années après 1688, aurait couvert el éteint le moyen, ramené
les choses au point initial, tout comme si tout s'était passé comme on
l'exige ; et comme cette forme de J'assentiment tacite 6tait légale et
arlmise par le droit provençal, elle l'a été aussi et également par la
loi de 1790.
Cette lacune dans le jugement, prouve évidemment que le premier
juge s'est trouvé dans l'impuissance de repousser ce principe tiré dr
J'exécution.
-
49 -
Il n'a pas cru qu'il en fut de même pour l'argument déduit de l'al'.
ticle 29 de la loi du 1.'> mars 1790 et pour l'efficacité des diverses
reconnaissances de la banalité émanées de la commune. - Mais qu e
d'erreurs dans le peu de mots qu'en dit le jugement III - Dans la
première objection, il allègue que ces arrèts n'ont eu pour but et pour
effet que de Tepousser la prétention des habitants de la Crau et CaTqueirane 'lui soutenaient n'atl'e point soumis à la banalité. - Mais
on a vu au contraire que J'expédient délibéré le 20 décembre 1733 est
un e reco nnaissance entière et parfaite du droit de la banalité votée par
le conseil général de la communauté, au profit des propriétaires des
moulins, et que l'arrèt du 10 février 1734 n'a fait qu'homologuer cette
reconnaissance. y eut-il jamais un e reconnaissance plus caractérisée ?
- On a vu encore que dans les conclusions prises par la commune
lors de l'arrêt du 13 avril 1737, celle-ci s'empresse de reconnaitre le
droit de banalité sur la ville d'Hyères, et que l'arrêt le maintient et y
comprend même les quartiers du terroir. Il y a donc ici, avant l'arrêt,
un e reconnaissance du droit émanée de la commune et consignée dans
ses conclusion s. Il est de maxime que in judiciis quasi cO,ntrahitur.
tes aveux judiciaires étaient, autrefois, comme ils le so nt aujourd'hui
d'après les articles 13'16 et 131)6 du Code Napoléon, des titres décisifs :
et l'article 29 lui-même de la loi de 1790 n'a pas fait autre chose, en
co nsacrant les aveux ex trajudiciaires, que consacrer à (ol·tim'i ceux faib
en justice.
Peu importe que ces reconnaissances soient obvenues à l'occasion de
la résistance de quelques habitants des quartiers de la Crau et de Carqueirane; el cst-il moins vrai qu'elles ont eu lieu et qu'elles ont été
faites pour servir de titre aux propriétaires de la banalité 1
Le jugement ajoute que les jugements et arrèts anciens ne peuvent
avoi r aujourd'hui aucun empire, ni aucune force. - Mais qu'on
le remarque bien, ce so nt surtout les reconnaissances faites pur la Commune que nous invoquons; J'expédient de 1733, l'aveu contenu dans
les co nclusions de 1737, plutot que les arrêts de 1734 et 1737 , que
nous mettons en avant et qui en sont distincts. - De plus, l'erreur
7
�-
50 -
énoncée ici par le jugement est grave. Ce ne sont que les jugemrnts
et arrêts s'appliquant à des banalités supprimées qui ont perdu
par la loi de 1790 leur force et efficacité. Nous n'en voulons pour
preuves que l'article 23 et l'article 24, de cetle loi. Le prcmler dit bIen
que: « tous les droits de banalités ..... confinnés pa,· des Jugements
sont abolis.. ....•• ~Iais tout de suite l'article 21~ ajoute: « Sont exceptées de la suppre~sion ci-dessus et seront ,·achetables: 1 LES BA NALITÉS qui seront prouvées avoi r été établies par une convention prescrite entre une communauté d'habitants et un particulier non seigneur .•)
Et par là, l'article 24 qui maintient ces banalités, maintient aussi les
jugements qui les ont consacrées. Pourrait-il être qu'en maintenant ce
droit, on anéantit la puissance des jugements qui l'avaient reconnu ?
Le système de la loi est simple: Si banalité supprimée , tout tombe
avec elle. Si maintenue, tout reste, le titre, les reconnaissances et les
jugements avec leur force coercitive. Nous en donnerons pour preuve
l'article 29 . Si les reconnaissances valent, à (oTtioTi les jugements et
les arrêts.
Enfin, le jugement allègue que ces arrêts ne se trouvent pag da ns les
conditions des reconnaissances exigées par la loi. - Mais on a prouvé
le contraire en démontrant que les reconnaissances de la Commune ont
été faites pour servir de titre aux propriétaires, et que les conditions
tracées par l'article 29 se rencontrent ici. - A l'affirmation sans détail
du jugement , nous répondons par les détails que nous avons donnés
plus hau t sur ce point.
0
A cette série d'objections, le jugement en a ajouté plusieurs autres
qui sont sans objet et qu'il est inutile de discuter. Il établit, et il a pris
beaucoup de peines pour cela, que l'acte de bail du 26 février 1647 à
Terras, et l'acte du 27 décembre 1458 passé avec Jean Natte, ne sont
llas le titre constitutif de la banalité. - Mais là n'est pas la question
du procès . Le titre de la banalité conventionnelle stipulée par la Commune avec les acquéreurs de ses moulins, a toujours été dans les actes
de 1688 et 1689; ce sont ceux-ci qui ont été produits soit avant 1790, soil
-51depuis, comme la base et le titre mème de la banalité. Les arrêts de '1734
et '1737 en font roi. Et c'est sur eux que les plaidoiries et les débats
d'audience ont exclusivement porté devant le tribunal de Toulon, aux
audiences des '1 , :2 et 3 mars 1859. Ce n'est qu'après les plaidoiries, sur les désirs exprimés par le Tribunal, de connaitre les divers
titres visés par le rapport des experts du 31 janvier 1688 , que les propriétaires des moulins, pour éclairer cette partie du procès, et montrer
~
qu'aucune trace de féodalité ne pouvait se rencontrer
dans ces d·Ivers
litres, par un acte du palais du 29 mai 1859 , versèrent au procès tous
les titres qui y sont énoncés, qu'ils ont pu retrouver et qu'ils ont fait
déchiITrer. C'est parmi ces pièces que le Tribunal a choisi les delLx que
nous avons signalées plus haut, pour en conclure qu'elles ne contiennent pas stipulation de banalité, et qu'elles n'en sont pas le titre constitutif.
Nous serons d'accord avec le jugement sur ce point, par deux motifs
tous différents de ceux qu'il a donn és. Le premier, tiré de ce que le bail
de 1647 n'étant convenu que pour quatre ans, il serait absurde d'y chercher la banalité perpétuelle vendue aux acquéreurs des moulins; le
second , tiré de ce qu'il est inutile de transporter l'origine de la banalité en H,58, lorsqu'on la tro uve très nettement et très clairement
établie en 1688 .
On comprend donc que la discussion sur ce point très accessoire de
la cause soit close, et que nous la négligions par les moltfs que nous
venons d'en donner.
No us terminerons cette réponse aux objections du jugement de Toulon,
en rapllclant l'arrêt de la Cour d'Aix du 11 mars 1852, rendu dans la
cause des propriétaircs des fours et moulins banaux de Castellane, contre
la commune de ce nom.- Le jugement du tnbunal CIVIl de Castellane du
15 janvier 185 1, avait consacré les mêmes principes que celui de Toulon.
Il disait:
.
Htendu que les titres produits ne satisfont nullement aux eXigence
de:< ~rticles 24, et 29 du titre '2 de la loi des 15 et 28 mars 1790, et
qu'ils sont insuffisants pour établir la banalité prétendue; qu'aucun
�- 52d'eux en eITet ne fournit la preuve que les habit an ts de Cas tellane so ient
intervenus dans les conventions souscrites pal' son co nseil, ou aient
donné pouvoir à ce corps de les assujettir à la servitude qu'i 1 a créée
de sa propre autorité et en excédant ses attributions ; que la délibération du 9 octobre, où l'on voudrait (rouver une adhésion et un co nsentemen t émanés desdils habitants, constate seulement que quelques
habitants des lIla::ages ont comparu devant les délégués du consei l dp
la communauté, qu'il leur a été donné connaissance des charges que
la banalité à instituer allait leur imposer; mais qu'on ne voit nulle
part que les habitants convoqués aient débattu, et moins encore accepté
lesdites charges;
« Qu'il a été vainement excipé encore de la sanction qu'aurait donnée
il l'établissement de la banalité une exécution constante et unanime ,
prolongée durant plus de deux siècles; qu'une tell e possession e~ t sans
importance. et comme non-avenue en présence des dispositions de la
loi nouvelle, qui l'a proscrite en termes on ne peut plus form els, »
~ais la Cour a réformé ce jugement par les motifs suivants:
" Considérant que la banalité établie en 1639 pa,' la comm une de Castellane,
avai t pOUl' but de payer les dettes et les charges considérables qui grevaient
cette commune;
" Considérant qu'avant celte époque, il n'existait aucun e banalité dans la
commune de Castellane, soit féodale , soit conventio nn ell e, et que plusi eurs
particuliers étaient propriétaires de fours et de moulins à blé;
Considérant qu e c'est à la suite de lrois délibérations prises pal' le conseil
génàal de la commune, dont deux par les habilants résidant dans la ville même,
et le troisième par les habitants des cam pagnes ou hamea ux dits m.azages et sur
l'estimation el l'avis des experts qui avaient r eçu leur commission de l'intendant
»
de la province que la vente des moulins et fours hanaux a été opérée;
" Considé,'ent que dans la première délibération, en date du 2 févrie,' 1639,
le conseil extraordinaire, assemblé de l'aulorité et en la présence du viguier
pour le roi, se composait des trois consuls en exercice, des trois nouveaux
consuls nommés et de trente-deux chefs de famille; que dans la seconde délibération, du 2 octobre 1639, le nouveau conseil général, toujours en p,'ésence
-
53 -
el d'a utorité du ";guicl', sc compose des trois consu ls, de 38 chefs de famille,
et ~ue ce tte seco nde délibération est pri se en présencc de troi. experts nommés
pal' l'intendant de la p,'ovince, pOUl' procéder à l'estimation des biens et à la
collocation des créanei.rs, et que la troisième délihél'ation , à la date du 9 octobre
1639, es t prise à la sui te de l'assemblée des consuls des sept délégués de la
commun e et des habitants des hameaux, lesdit s habitants des hameeux convoqués
pour qu'ils donnassent leur adhésion aux deux délibérations prises par les
habitants de la ville;
" Considérant que les droits des hameaux furent disculés et appréciés, et
qu'il fu t ,'econnu qu'ils avaient la faculté d'avoir des fours , mais se ulement pour
leurs usages personnels;
" Considérant que la vente des fours et des moulins banaux aux créanciers
de la ville de Castellaue a eu lieu en 1639 avec la plus grande publicité
et la plus grande liberté de la pm't de toutes les parties contractantes,
puisqu'il résulte des docum~nts du procès que les habitants de Castellane avaient
pal' des pé titions pri. l'initiative au près du corps communal, afin de les mettre
en demeure de \'endre les fours et moulins pour délivrer les habitants des
charges qui les obéraient;
" Considérant que poUl' opé,'er avec plus d'ava ntage la yente des fours et
moulins lui appartenant, la commune avait elle-même, peu de temps avant la
1 vente, fait l'acquisition de divers particuliers des moulins que ceux-ci possédaient;
" Considérant que la vente des moulins a été profitahle à la commune de
Castellane, et que des réclamations n'ont jamais été présentées à cet égard, soit
au nom de la comm une, soit au Dom des habitants;
" Considérant qu'il s'agi t au procès d' une banalité pure, conventionnell e, uon
e ntachée de féodalité dans son origine, et qne les hanalités pures conventionnelles ont été maintenues pa,' les lois de 1790, 1792 et 1793 ;
" Considél'ant qu'il résnlte des faits et documents du procès que les moulins
"endus n'avaient jamais été banaux, n'avaient jamajs appartenu à des seigneurs;
q ue le contrat a été libre, volontaire, non entaché de féodalité; que cette
banalité esse ntiellement l'achetable a élé consentie sans opposition pal' le corp'
lllo ...1 de la comm nne et pa,' trois délibéJ'ations dans lesqnelles figul'ent un grand
nombre d'habitants de la ville et des hameaux ;
�-54" Considérant qu' il n'y a pas d'exemple dans l'ancien droit provençal d' un ..
banalité consentie avec une telle adhésion, et clu e non seul e ment des pétiti ons
ava ie nt étt! présentées par des habitants pOUl' mC((I'e en ùemeUl'c le corps (om munal, mais e ncore les intimés n'onl pas excipé (Pune protes tation émanée d'un
seul habitant de la commune;
« Considérant que ce contrat publique me nt et libre ment co nsenti a
reçu un e
es.écution pleine et eutière pendant pl'ès de deux si~c l es, sa ns qu aucune réclal
mation se soi t éle"ée depuis 1639 jusqu'e n 1812 . "
Remarquons que le pourvoi contre cet arrêt a été rejeté par arrêt
de la Cbambre des requêtes , du 16 novembre 181S2.
Tenez compte de quelques faits qui ont dans les deux cause$ lenr
physionomie particulière, vous trouverez au fond, dans cet arrèt , la
consécration de nos principes . L'identite s'aperçoit aisément. Il y a eu
pour nous comme pour Castellane: 1° divers actes de l'autorité souveraine pour détermin er le paiement des dettes Je la Commune par la
vente ;- 2° diverses délibérations du conseil général de la communauté;
3° les résolutions des particuliers recueillies par le co nsul Montanarq
auprès d'autant de personnes qu'il l'a pu ; 4° l'enqudte faite et recuc
aussi par les experts, qui a augmenté encore la masse des adhéren~s :
.'), l'absence de tout seigneur dans le territoire et de tous moulins antrri eurement venus de lui avec une banalité originaire féodale; 6° l'avantage
de la communauté à avoir établi cette banalité; 7° son exécution constante pendant un siècle et demi et les nombreuses reco nnai ssan ce~
émanées de la Commune ; 8° enfin, la défense fourni e par les pro priétmres devant la Cour, qui invoquaient la même série de principes, la
mème distinction entre le mode d'établissement des banalités seigneuriales
et celui des banalités établies par des communes pOUl' le paiement cie
leurs dettes, le tout constaté par le mémoire produit dans leur intérêt
par )1' Perrin , leur défenseur. - Tout cela est semblable et établit
l'analogie dan les deux causes.
Ajou tons encore un trait à ce qui précède, pour ètre complet et n'ètre
pas accusé de ne pas montrer tous les co tés de la cause. - Dans l'affmre des moulins de Castellanne, et pour obtenir l'ex tinction de la
- ::ilS banalité, on se prévalait cie l'arrèt de cassation du '16 novembre 1836
pour hl commune de Belgencier, où la banalité avait été attaquee clans
sa légalité, et où elle avait succombé. Mais voici la réponse que fai sait
ù celle objection M' Perrin, dan s son mémoire , p. 34, réponse qui
tire une grande autorité de l'arrêt de la Coor clu 11 mars 181S2 qui l'a
co nsacree: «No t!'e question, reprend le défenseur; ne fut pas traitée
ex professa devant celle Ceur. Le m.tif d.minant de l'arrèt fut que le
titre constitutif de la banalité par la commune était perdu s'il avait
jamais existé, et sur le tout n'était pas représenté. La Cour dit :
« Allendu que , dans l'espèce, on ne représentait ni titre primordial ,
« ni les reconnaissances au nombre prescrit par la loi, qui peuvent y
« suppléer; qu'il est également certain qu'aucune convention constitu« tive de banalité n'apparaissait so uscrite par les babitants envers un
« particulier non seigneur, ni mème envers qui qu e ce soit ; qu'en
« admettant que les consuls, syndi cs, ou officiers municipaux quelcon« ques pussent être assimilés à un particulier non seigneur, il n'est
« intervenu aucune convention souscrite par les habitants, par laquelle
« ils se so ient so umis au paiement ; qu'en ce cas, c'est ou, l'tlniversa« lité, ou au !nains une gmnde majoTité des habitants qui peuvent
« valablement se soumettre à une servitude qui frappe individuellement
« chaque père de famille. » Déjà ce dernier motif repo usse le système
absurde, en pareille matière, de la totalité cles consentements; il se
contente d'une grande majol'ité, c'est-à-dire de la plumlité, comme le
portent nos titres. Mais il est d'ailleurs certain que ce motif ne s'est
trouvé dans l'arrêt qu 'énonciativement et par sorabondance, et que la
question ne fut pas présentée à la Cour d'après le droit municipal de
.
la Provence. »
Assez donc sur le! objections de la commune, et, puisque nous les
avo ns toutes repoussées , voyons si la banalité maintenue la , prétention
du sieur Giraud peut n'être pas co ndamnée .
�-
56-
§ IV .
Les ef/cls de let betnetlil é.
La banalité des moulins d'Hyères une fois prouvée et reco nnu r légale, rien de plus simple que de s'entendre sur ses ell'ets.
Le premier effet d'une banalité de cette espèce, ou du moins l'un
de ses effets les plus importants, est de rendre illégal l'acte auquel le
sieur Giraud s'était liué, en contravention il la banalité. Il a, à diverses
reprises, et durant les mois de mars, avril et mai 1858, introduit dans
le rayon de la banalité des farines étrangères qui ont élé livrées à la
consommation des habitants d'Hyères sans payer le droit de moulure .
Cet acte était directement contraire à la banalité; il était le moyen
le plus propre à en empècher les effets et à l'anéantir. Car que serait
la banali té d'un moulin , si le territoire où elle existe pouvait ainsi
recevo ir les farines étrangères en exemption de tous droits ? Les habitanls so umis à ce droit, qui ont la faculté de faire sortir leurs grains
du rayon de la banalité, n'auraient qu'à les faire réduire en farin e au
dehors et à faire rentrer ensuite ces farines pour s'y soustraire ; ou
bien, si des étrangers pouvaient y introduire de's farines, celles-ci ven·
dues aux habitants dispenseraient ces derniers de faire moudre leurs
grains. Et de cette manière la banalité n'existerait plus que de nom.
C'est le cas de dire que celui qui veut let fin , 'veut les -moyens; et qu'une
banalité qui serait tenue de subir une pareille altération dans sa loi
constitutive serait anéantie.
Aussi ce point ne peut-il faire la moindre difficulté ici.
D'abord le jugement lui-même du tribunal de Toulon n'a pas contredit ce principe. Il ne dit ri en sur ce point. Il s'est borné à di scuter
la légalité de la banalité, sans répandre aucun doute sur l'effet que nous
signalons.
- 57 En outre, les arrèts de 1727, 173~ et 1737 obtenus par les propriétaires des moulins d'Hyères, sont intervenus précisément il l'occasion d'introduction de (etrines venues du dehors sans l'acquittement du
droit et les introducteurs ont été condamnés 11 en payer le droit de
mouture. Cette conséquence directe déduite par les parlements de Pro\ once et de Grenoble est virtuellement applicable à la cause. En main·
tenan t la banalité, la loi du 15 mars 1790 en a maintenu les litres
d'exécution et leur portée, avec leur autorité de chose jugée.
Enfin, en généralisant notre pensée, nous disons que celte loi de
1790 a laissé aux banalités conservées comme légitimes tous les effets
naturels que la doctrine et la jùrisprudence leur attribuaient.
01', voici à cet égard les principes universellement profe~sés, nonseulement par les auteurs provençaux, mais encore par les auteurs
étrangers à celle province. Ils s'accordent tous à dire que l'introduct\on des farin es étrangères ou du pain étranger est contraire à la banalité, prohibée par elle, et qu'elle ne peut ètre permise qu'en payant
le droit de mouture.
Julien, Statuts, t. Il , p. !l18, dit d'abord ; « Toutes ces banalités
so nt réputées réelles en Provence, parce qu'elles embrassent ou les
lil/i ls q~1i se consommenl detlls le lieu , ou ceux qu'on y recueille. »
Et à la p. H 9, il ajoute; « M. Decormis, t. l , col. 889, chap. J .U YIII ,
fait mention de l'arrêt du 2'1 février '1670, obtenu par l'abbé de Mont·
majour contre les forains de Miramas, lesquels , quoiqu'il parut par
leurs enquètes qu'ils n'avaient jamais payé aucun droit , HAIST PORTÉ
DU l'A IN ETRANGE Il 101'S de let c~dtl!re de leu1'S (onds ct de let l'éco lte des
fi·l!its. FURE~T CONDAM NÉS A PAYER LE DROIT DE BANALITÉ. Le même
~uteur, col. 890, cite un autre arrêt rendu en faveur du sieur du
Cannet contre les forain s du mème lieu. la date de cet arrêt est du
27 juin 1691. Un arrêt du 26 juin 1738 co ndamna les forains du
li pu ch! Saint·Vallier au paiement des droits de mouture et de fournage .
JI fut dit , par le même arrêt, qu'en payant par les forains ou leurs
fermiers 6 liv. 8 s. par livre cadastrale pour le droit de mouture et
de fournage, ils ne seraient pas soumis à moudre leurs grains et euire
8
�- 58 leurs pains aux moulins et fours de Saint-Vallier, pour les grains ct
pains qui seraient consumés par eux ou par ceux qu'ils emploieraient
à la culture des fonds et à la perception de leur fruits, ))
Deco rmis professe la même doctrine aux endroits cités par Julien,
Il est inutile d'en rapporter le texte, puisque Julien l'a analysé ,
Latouloubre, l. Il, p, 270, n° 18, dit aussi: « Le~ h6les ne pew'eut
pas dé bile1', dans le distj'ict de la banalité, DU rAIN QUI ArT ÉTE MOUl.U
el Clt1t AILLEURS QU'AUX MOULI NS ET FOURS BANAUX, , ' " ))
Yoilà pour les auteurs provençaux, - Voici maintenant les auteurs
qui ont écrit pour d'autres provinces,
])unod, des Prescriptions, p, 400, dit : .
" L e seigneur de la banalité ne peut. pas obliger ses su jels à moudre , cuire
ou pl'esser hors de la seigneurie. Il est tenu de les faire expéd ier, e n sod e
qu'après avo ir attendu un temps que l'on fixe commun éme nt il ,IÎn gt -q ua\rc
heut'es, ils peuvent aller ailleurs; et l'on fait cette difrérence en Ire le moulin et
le four d'une part , et le pressoir d'au lre, que la banaLiti! des f01l1's
tenant de ]a servitude
p e l'so nn e ll e, LE S BL t:S ET FARINE S
dans le te.,.ritoù'e y sont sujets,
QUANO MtAlE
QU1:
et moulins
se conS01111ncnt
ILS N'y SE RAIENT PA S CRU S ,
el
que celle des pressoit's étan t l'éelle , elle n'affecte que les f.. uit s des vignes du
territoire; mais eHe les affec te, quand même on e n tirel'a it ces fruits pOUl' les
consommer dehors. D'où J'on peut tirer ]a conséqu ence que si l'on abon nait les
banalités de fours et moulins, il n'y a que des rés idant. qui seraient sujets il
payer ce t abonnement, ruais que lei forains contribu el'aient aussi :t Pabonnement
de 10 banalité des pressoirs, ))
Denizart (collection en neuf volumes ), V Banalité, p , '150, n° '14"
renferme une doctrine complèle sur ce point, Il dit :
O
" L'effet du droit de banalité ne doit pas être rendu inutile pal' la liberl é
que se donner.ient des élrangers d'.pporter des farin es dans le lieu, On oblige
alors ces étrangers d'obtenir la permission du seigneur , e t de lui payer ,
pOUl'
l'obtenit', nn droit de mouture, La ques lion s'étant prêsent ée au conseil en 1774 ,
ell e y a été discutée, tant .vec l'inspectent' des domaines, qu'~ vcc 1., députés
-
"9
ë)
-
du co mmet'ce, ct jugée e n f.veul' du seigneur ayant moulin banal, le 25 janvier
1774, (Voyez le l'apport des agents du clergé "l'assemblée de 1775, l" 112), "
Nous pourri ons encore citer nespeisses, t, III, p, 229, n° 6, qui dit:
« Et ceux qui achètenl du pain hors du {1er pour leur! nourrit1tre el
de leu'/' (a'mille, ou poun l'ENDRE AUX IUBITANTS, SONT TENUS DE PUER
LE DROIT DE FOURlI'AGE, , , , , ) El Bacquet, des Droits de Justice, p , \.01 ,
et plusieurs autres, - Mais ce qui précède est suffisant.
Si tels étaient les e{fets non co ntestés de la banalité avant la loi de 1790,
il s doivent ici être consacrés au profit des moulins d'Hyères, cO,ntre le
sieur Giraud, La loi du Hi mars 1790 , en maintenant les banalités
qu'elle indique, n'a en ri en amoind ri leurs effets,-Il en est de même
de l'avis du conseil d'Étal du 3 juillet 1806, qui a déclaré que les banalités co nventionnelles conservées par cette loi , peuvent êt.,.e l'établies
par Inmsaction ou par jtlgenwnl , mais qui n'a ri en retranché aux p[ pts
qu'elles doiven t produire,
Au su rplu s, la question que nous examinons en ce moment a été
depuis longtemps résolue, comme on l'a l'li dans la doctrine de Denizart, y O Banalité, par l'arrèt du conseil d'État du 25 janvier 1774-, Les
circo nstan ces dans lesquelles il intervint en font un monument remarquable qu i s' harmonise parfaitement avec nos lois actuelles, puisqu'il
il été rendu so us l'empire de la Déclaration royale du .25 mai 1763,
('t de l'Édit de juillet '1764- , L'un et l'autre avaient proclamé, commp
nos lois ultérieures de 1790, la liberlé du commerce et la libre circulation des grains et farines, La déclaration du 25 mai '1763 avait dit,
article '1" : {( Permettons il tous nos suj ets de faire dans l'intérieur du
royaume, le commerce des grains, d'en vendre et d'en acheter ",; et
da ns l'article '2: (1 Permettons pareillement il tous nos suj ets de transporter librement d'une province du royaume dans une autre, toute es{( Défendon s pareil,
l)èce de b"rains et denrées , , , ; et dans l'article 3:
lement il tous 'nos suj ets qui jouissent des drOits de péage, passe.ge,
pontonage ou travers, il titre de propriété, d'exiger aucun desdits droits
su r le}' grains, (rl1'ines ou légumes qui circulent dans le royaume, , , 1)
�-
-
60-
- L'édit de juillet 1764 avait confumé la déclaration de .J763 et PU
avait ordonné de nouveau l'exécution en ces termes: « Notre déclaration du 25 mai 1763, co ncernant le libre transport des gra ins d ~ n s
notre royaume, avec permission d'en fa ire des magasins , ensemble les
lettres patentes interprétatives d'i celle du 5 mars dernier, seront executés selon leur forme ct teneur ; en conséquence, voulons qu 'il ne
puisse êlre donné aucune atteinte à ladite circulation dans l'intéri eur, , , ))
C'est dans ces circonstances qu 'un arrèt du Parlement de Paris du
13 mai 177'2, avait décidé que la banalité exislante dans le lieu dr
Longny, ne permettait pas l'introduction des farin es dans le district de
la banalité, sans l'acquittement du droit, et qu'on se pourvut en cassalion devant le conseil d'État, pour en obtenir l'annulation pour violation du droit qu'avaient ouvert la déclaration de 1763 et l'édit de
,176ft., Mais del'allt le conseil d'État, le principe de la banalité triompha
et il del·aitlriompher,-Voici l'arrêt en entier, tel qu'il a été rapporté
année 1775, vol. Rapp, de l'agence du clergé, - Pièces justificatives,
p, CCCCL\'\n , - (paris, Deprez, 1780, in-folio) :
61 -
donner '11t'il sem pel'mis au su.ppliant de continuer le commerce de fmine
dans la seigneurie de Longny, ainsi qu'il en a le droit, a'Ux termes de la
coutume du lieu, de la declamtion du 25 mai 1763 , de l'edit de juillet 1764
et des lettl'es patentes du 16 janvier' 1771 ; faire d~renses, tant audit sieur
.le Boisemont, qu'à tous aulres, de lroubler le "'ppliant dans ledit commerce
de farines, e t
d'EXrGER
DE
Lili,
A RAISON
IJUDIT COftl iUERCE,
AUCUN
~10uTurŒ; ordonner il cd effe t que l'arrê t qui interviendra, sera
tu ,
DROIT nE
publié e t
affiché dans la bal'Onnie de Longny, partout où besoin sera; el cependant,
dans le cas où il plairail à Sa Majesté, d'ordonner quant " pré,ent, que ladite
re(juête sera communicp.lée, ordonner par pro\'ision, e n all end:mt le jugement
du fond, que Je suppliant sera au torisé à cont inuel' son commerce de farin es
à Longny, où il a un magasin é tab li ; dans tons les cas, condamner le sieur
de Boisemont aux dépens, coût e t signification de J'arrêt à intervenir; par lequel
arrêt, Sa Majesté aurait ordonn é que la présente requête serait communiquée
au sie ur de Boisemont, pOUl' y l'épandre nans les délais du règlement,
pOl1l'
ce
fa it , ou faute de ce faire dans ledit délai, être pal' Sa Majesté statué ce qu' il
ap partiene],.a , loutes choses demeurant en étal; la significalion dudil arrêt fait e
audit sieur de Boisemont, cn son domi cile, pal' Desestre, huissier du Conseil ,
« Vu au conseil d'État du Roi l'instance pendan le en icelui entre J acq ues
le 12 sep tembre suivant; La req!t€te d" sieur de Boisemont, tendante à cc
PaI'y, meunie,' de Bretonce tles, et le siew' de Boisemont, seigneUl' de la ha -
qu'il plut à Sa Majesté lui donner acte de ce que, pour sa tisfaire audi t arrêt
l'on nie de Longny, l'arrêt rendu audit conseille 25 août 1772, sur la requête
soit communiqué du 25 août 1772, el pour réponse à la requête dudit sieur
dudit Pavy, y insérée, tendante à ce qn'il plut il Sa Majesté , cassel' et an nuler l'a,'rêt du Parlement de Paris du 13 mai 1772 , et à lui signifié le 22
Pary, qui y est in sérée, il emploie le cont en u en la p,'ésente requêle et aux
du même mois , ensemble tout ce qui s'en est e nsui\·j e t pourrait s'ensuivre; ce
et cooclusioos prises pal' ladite requête, dans lesquelles le sieur Pavy sera dé-
faisant, évoquer le tou t, circonstances et dépeudances, Q1'donner que la dticla -
claré uon-recevable, ou dont il sera débou té, ordan uer que l'arrêt du Parlem1ent
,'ation du 25 mai 1763 , l'edit du mois de jllillet 1764 et les lettres patentes
du 16 janvie,' 1771 , se,'ont e:réculés suivant leur for'm e et teneur; en
de Paris du 13 mai 17i2, sera exécul é selon sa forme et teneUl'; en consé-
co nséquence, déclarer nulle et de nul effet la saisie des farin es du suppliant ,
faile à la requête du prOCureur fi scal de la justice de Longny, pa,' proces-ve,'hal
du 4 mars derniel'; en accOt'der, e n tant que de besoin , main-levée au suppliant; ordonner cu ou tre que lesdites farines lui sel'ont l'cmises, à quoi faire
tout dépositaire contrai nt , mêrpe pal- co rps; faire défense audit sie ll!' de
Boisemont de fai,'e faire à l'a\renir, contre le suppliant , de pareilles saisies.
,e t pour l'avoir fail , le cond~mner à 2,000 liv, de dommages c l illté,'ê ts; or'~
Vièces
y joint es, et procédant au jugemen t de l'instance, sans s'arrêter aux 6ns
quence, faire défenses au sie,.r' Pavy et il tous allil'es de troubler le suppliant dans te d,'oit de banalité de ses moulins de Longny, et d:apportel'
audit lieu des far'ines pour' les y vend,'e, sans la permission du suppliant
Olt de ses p1'éposés, et SANS AVOlR PAY É LE J)ROIT DE MOUTURE; le condamner en
tels dommages-intél'êts qu'il appartiendra, arplicables aux pam'l'es de la paroisse,
el
aux dépens; ladite requê te, signi6ée audit Pa,'y Je 4
110\
embre 1772.
pal' Duba;l , huiss ie,' du Conseil; La requête de Pavy, lendante à ce qu'il plaise
il Sa Majest~ lui donner acte de ce que, pOUl' contredits à la production du
�62 -
- 63 -
sieur de Boisemont , c t pOUl' l'é po use à sa rc qu ~ le, s ignifiée Je 4 nO\lembre del-
pst libre non obstant la banalité. Seulement, le droit cie mouture doit être
acquitté, parce qu'il est clù en vertu d'une convention de la commune
J 'Hyères , très légitime, faite au trefoi s avec ses créa nciers, Si la banalité
Il 'existait pas et qu'un droit d'octroi fut constitué sur l'introduction des
farin es, le commerce en serail-il moins libre? Pourquoi clonc en serait-il
autrement quand , au lieu d' un octroi , c'est uue banalité? Ne suffit-il pas
que celle-ci soit légale, et reconnue par la loi , pour qu'elle produise
aussi ses effets? Ne perdons pas de vue que la banalité conventionnelle
de 1688 a été le paiement des sommes qui étaient dues par la communauté ; et enfin que le rachat peut la faire disparaitre, c'est-à-dire
que si le poids en paraissait trop gèl}ant à la commune, en payant le
prix du rachat , la banalité disparaitrait. La perception de ses frui ts
est donc digne d' intérêt et n'a ri en qui doive inspirer de la défaveur.
n ier,
il emploie le co ntenu en la prése nte requê te e t aux pièces y é non cées,
p rocédant nu jugeme nt de l'instance , adjuger ail s uppliant ses pl'éc(;de nt es
conclusio lls, e t condamner le sie Ul' de Boisemo nt nu x dé pens: lAdite requê le
si(Tj}ifiée audit sie u\' de Boisemont le 5 fén 'jer 1 7 7 3, par Trudo n , hui ss ic l' du
~
Co nseil : La requ ête du sieur de Boi se mont , te ndallte " cc qu'il l'Iut à, Sa
Majesté lui donner ac te de ce qu e, pour plus ample production , il emploie le
contenu en la présente requê le e t aux pièces
y joinl es; pl'océdallt au jugement
de J'i nstance, sa ns avoir égard aux couclusio ns du sie ur P a\' y, adju ge")' au s up -
pliant celles qu'il a ci- dC\'a nt p rises; ladite requê te signifiée audit p",y le 22
mars 17':'3, pal' Dubail , huissier du Consei l: l e memoire l"pnIM ~ p OUl' ledit
Pavy, signifié audit sieur de Boise mon t. Pal' Delanois, huissier du Conseil , le
8 février audit an:
le ménwi1'e
IMP RIll É
pour le sieur de B oisemont , signifié
audit Pavy, le 29 mars de la même année, par de No r ma nd y, huissier d u
Conseil. Vu en oult'e, tout ce qui a été dit e t écrit pal' les parti es, ain si 'I" e
les pièces p al' elles produites, ensemble l'avis, TA NT nes nBl'u1'i<s nu COMM ERCE,
que de l'ins pectent' des domaines de la co uronn e: O uï le I·.pport du sie ul'
ab bé T en 'ay, co nseille,' ordinaire, e t au Co nseil roya l , co ntrôleur gé néral dcs
finances;
LE
ROI EN SON CO ~ SE IL , a débout é e t deboute ledit P a l'y de sa de -
mande en cassa tion de l'arrêt du Parlement d e P aris, du 13 mai 1 772 , -- Fa it
au conseil d'État du Roi , tenu à Versailles , le 2 5 janvier 1 774, H UGliET DE !tONTAH RAN . »
Signé:
Cel arrêt juge donc la question, même pour J'époque actnellc, puisque
les principes de notre droit public d'auj ourd'hui, etaient déjà ceux de t'époque de 1774. , Comment en douter, lorsque ces principes sur la liberte du
co mmerce so nt compatibles avec l'existence des oct?'ois que les communautés peuvent établir et qu'elles perçoivent tous les jours, et avec les
douanes qui frappen t les premiers cbjets du commerce 7 Montesquieu,
Esprit des Lois, ii I'. xx , chap. XII , a dit excellemment avec celle supériori té de génie qui lui est propre: « La liberté du commerce n'est pas
une faculté accordée aux négociants de faire ce qu'ils ve ulent ; ce serait
bien plutàt sa servitude. Ce qui gêne le c01/wwl'fan l, ne gène 'pas pom'
cela le Celll1llel'Ce . » fi. notre tour, nous pouvons clire que le commerce
DEUXIÈME 'PARTIE.
LA G.\IUN1'I E SU BSIDI AIR E DUE PA t\ LES COMMUNES D'HYÈ RES E1' D E LA CRAU ,
En supp osant, co ntre toute attente, que le jugement fut confirmé sur
la première partie du procès, nul doute qu e le~ commun~~ ne dussent
garantie, C'est cette partie, purement hypoth ettque, qu Il nous faut
maintenant prouver, quelque espérance fondée que nous ay lons que la
Co ur n'aura pas mème à l'aborder.
En so i, la garantie serait due par deux raiso ns. - Premièrement,
parce qu'en 1688 la commune d'Hyères Il donné en paiement à ses
�-
64-
créanciers, représentes pal' les appelants, les moulins d'Hyères avec la
banalité, et que si ccux-ai en etaient évincés ils perdraient un e partie
notable de la chose, un droit qui y était inhérent et qui en au gmenta it singulièrement la valeur. Ils pourraient done dire à la commune
d'Hyères: Le co ntrat est résolu entre nous, reprenez l'OS moulin s et
rendez-nous notre argent ; ou au lien de cela: Indemnisez-nous de tout
ce que nous perdons. Il en est de ce cas co mme de celui de la l'ente.
Le droit ancien et le droit nou\'ea u accordent l'action en quan t i Illinol' ls,
et, en d'autres termes, la garantie . Les articles 1626 , '1641, 1643 et
'1644 du Code. apoléo n consacrent ces principes. El si l'on remarque
qu'en cette matière de garantie le délai , po ur l'intenter, ne co urt qur
du jour de l'éviction, on reconnaitra que les ap pelants seraient parfa itement dans les délais, puisque l'évicti on ne date que du jugement et
ré troactivement de la contradi ction élevée par l'inti mé.
te seconcl motif qui justifierait la garantie, vient de ce que la cause
cie l'éviction serait antéri eure à la vente ou à la cession cie 1688,
puisque le jngemen t a basé la déclaration cie l'illégalité cie la banalité
sur ce que le titre cie '1688 n'est pas constitué en fo rm e cie titre co nstitutif, et que la commune n'y aurait pas joint l'assentiment de tou~
les habitants. - Or, d'après la doctrine, le vendeur es t garant de toutes
les causes cI'éviction antérieures à la vente. (V. Troplong, Vente, nO' H 6,
!~23,
426 .1
}{ais c'est ici que le jugement nous arrête clans notre argumentati on ,
en posant un principe tout à fait contraire. 11 dit : « Que les demandeurs ne succombent point parce que la communauté cI'Hyères leur
aurait venùu un droit de banalité ineffi cace et invalicle au moment de la
vente desdits moulins en 1689, mais parce qu'ils ne reprocluisent pas
le titre constitutif pal' suite des prescription s nouvelles des lois de 1790,
179'2 et 1793; que c'est par un l'ait de pri1tce que le droit de banali té
se trouve auj ourcl'hu i infirmé entre les mains des pro priétaircs actuels. »
R.emarquons d'aborcl que le jugement est inexact dans le rap pel de
deux motifs qui l'ont cléterminé à inii rmer la banalité. Il n'en l'appelle
ici qu'un seul, et il en a clonné cieux cependant. t r dcux ième a été
- 61> pris de cc qu e l'acte de 1688 n'aurait pas été accompagné de l'a~sen
timent de tous les habitants, et il a form é de notre part la matière d'un
pnragraph c spécial.
Mais nous avons bien d'autres réponses à faire à une si inexacte
ilrgumentation , t es voici clans leur ordre naturel.
Il est cI'abord complètement inexact de dire que c'est ici un fait de
prince , ou soit les lois cie 1790, 1792 et 1793 qui font périr la banalite. S'il est un principe clepuis bien longtemps et dès l'origine reconnu,
c'est que ces lois n'ont supprimé , éteint et fait périr que les banalités
féodales et seigneuriales; et , qu'au contraire , les banalités purement
co nventionnelles entre une commune et un particulier non seigneur ont
eLé maintenues; que, quant à celles-ci, la loi nouvelle n'a rien innové,
et qu'elle s'est référée au droit ancien pour tout ce qui les constitue.
No us avons dans la première partie de ce mémoire posé ce principe
sans le démontrer. Il nous faut maintenant en fournir la démonstratio n, puisque le jugement le méconnatt et l'oublie. Nous l'emprunterons
au mémoire de ~lc Perrin, dans la cause des fours et moulins banaux
de Castellane, OÙ, comme nous , il discutait la questi on de garantie.
No us ne saurions mieux dire:
« No us disons, écrivait à cette époque l'habile rédacteur du mémo ire,
p. 20, qu e ces lois n'ont ri en prescrit de nouveau quant aux banali tés
purement conventionnelles , en faveur des particuliers non seigneurs.
Elles se sont bornées à supprimer les féodales, et les suspectes de ce
vice par la qualité memc de leurs propriétaires.
« Il est , en eITet, remarquable que la première suppression ordonnée l'a été dans la loi cI'abolition des droits féodaux, celle du 11> mars
'179'0, et parmi ces droits; par conséquent en tant que ces banalités
étaient féodales. t e préambule est ainsi conçu : « L'Assemblée natIOnale
« considérant qu'aux termes de l'article '1" de ses décrets des 4, 6, 7,
« 8 et 11 aoùt 1789 , le J'égime féo dal est entièrement détruit ; qu'à
« l'égard cles droits et devoirs féodaux ou censuels, ceux qui dépen« daient ou étaient représentatifs soit de la main-morte personnelle
« ou réelle, soit cie la servitude personnelle, sont abolis sans indem9
�- 66« nité; qu'en même temps, tous les autres droits sont maintenu s jus« qu'au rachat par lequel il a été permis aux personn es qui en so nt
« grevées de s'en affranchir, et qu'il a été l'dse-rvé de développer par
« une loi ]Ja!'ticuhère les ef/'e ts de la Mstj'uction du l'égirne (éodal ,
« aùu;i que la distinction des droits abolis d'avec les droits j'acheta« bles,' a décrété et décrète ce qui suit. » Puis l'article 23 du titre 2
porte: « Tous les droits de banalité de fours, moulins, pressoirs, bou« cheries, taureaux, verrat, forges et autres, ensemble, les sujeti ons
« qui y sont accessoires, ainsi que les droits de verte-moute et de ven t,
« le droit prohibitif de la quête, mouture ou chasse des meûniers, soit
« qu'ils soient fondés sur la coutume ou sur un titre acquis par pres« cription, ou confirmés par des jugements, sont abolis et supprimés
« sans indemnité, sous les seules exceptions ci-après , » Enfin l'article
24: « Sont exceptées de la suppression ci-dessus, et seront racheta« bles: i ° les banalités qui seront prouvées avoir été établies par un e
« convention souscrite entre une communaute d'habitants et un parti« enlier non seigneur ; 2° les banalités qui seront pro uvées avoir été
« établies par une convention so uscrite par une common(tJté d'habitan ts
« et son seigneur, et par laq uelle le seigneur aura fait à la commu« nauté quelque avantage de plus que de s'obliger à tenir perpétu elle« ment en état les moulins, fours ou autres ob jets banaux; 3° cell es
« qui seront prouvées avoir eu pour ca use une ~o n cess i o n faite par le
« seIgneur à la communauté des habitan ts, de droits d'usage dans ses
« bois ou prés , ou de communes en propriété. »
« Ainsi, la première exception de non-suppression fut en faveur des
banalités non féodales, et les deux dernières, en faveur de celle' qu e
les seIgneurs possédaient à juste titre.
, " Eh bien, voici la clé de toute la législation en celle matière: les
dispositions progressivement révolutionnaires qui ont suivi , ont anéanti
la se<;onde et la troisième exception en faveur des seigneurs, mais non
la premIère en faveur des simples particuli ers, La loi en haine de la
qualité des seigneurs, a fini par atteindre leurs banalités à titre onéreux, comme leurs rentes foncières,
- 67 « La loi du 21) aoû t 1792 commença par réduire les deux exceptions en leur faveur, Elle déclara supprimés sans indemnité tous les
dTOits (éoda11tt utiles, dans l'énumération desquels elle comprit les banal-it és, droits qui avaient été oonservés par l'article 24 de la loi du
15 mars 1790, s'ils n'étaient justifiés ]Jar /' acte prirn01'dial d'in(éodalion , de bail à cens, avoù' eu ]JOUI' cause une cession de (onds . Cela
ne s'appliquait qu'aux deux dernières exceptions de cet article 24,
« Enfin, la loi du 17 juillet 1793, porta : « Toutes les redevances
f( ci-devant seigneuriales , dl'oi ts (éodaux, censuels, fix es et casuels,
« lIu!me cew; conservés pal' le décret Wt6 25 aoi1,t dernier, sont suppri« més sans indemnité. » Ainsi achevèrent de disparaitre les deux dernières excepti ons de l'article 24 de la loi de 90 ; mais la première n'a
jamais reçu d'atteinte.
« De tout cela il résulte, qu e la loi nouvelle n'a supprimé que les
bilnali tés féodales., ou en faveur des seigneurs, encore qu'elles fussent
;\ titre onéreux ; mais non celles entre particuliers, et qu'elle les a laissé
suhsister telles qu'elles existaient auparavant , n'en ayant parl é que
pour dire qu'elles étaient maintenu es . C'est un principe auj ourd'hui
de toute certitude: Rép. de Merlin , VO Banalité; Favard, eodem; Henl'ion, Biens commun aux, p, 144; et entre les arrêts, voyez celui si
fo rmel de la Cour de Cassation du 5 février 1816, sur la banalité de
Sisteron, Sirey, 16-'1-1 56 : « Les banalités conventionnelles, a dit
« U, Henrion, se partageaient en deux classes: la premirre se compo«( sait dd celles qui appar tenaient à des seigneurs sur leurs vassaux pt
« censitaires; on les désignait sous le nom de banalités seigneuriales.
« Dans l'autre classe se plaçaient toutes celles qui appartenaient à des
« communes ou à des particuliers non seigneurs. - Les banalités
« seigneuriales, rappelées dans tous les titres de la seigneuri e, et par
« ce motif confon,iues avec les droits féodaux , ont péri comme eux
« dans le naufrage de la féodalité. - Quant aux banalités, purement
« co nventionnelles , la liberté des parties contractantes étant garantie
« par leur indépendance réciproqne. on ne pouvait supposer dans leur
« création , ni séduction, ni violence, ni abus de la puissance féodale,
�-
68-
« elles étaient par co n~équent hors de l'atteinte des lois aboli ti ves dl?
la féodali té. ))
Et plus bas, à la p. 4-6, ~Io Perrin ajoutait ;
« La loi n'a pas supprimé les banalités non féodales; elle les il ail
co ntraire laissées dans le domaine du droit commun; elle n'en a
parlé que pour dire qu'elle ne leur portait aucune atteinte. Par conséquent, impossible de s'appuyer sur cette loi pour en faire prononcer
la nullité; ce n'est qu'au droit commun seul , auquel elle a renvoyé,
qu'il faut recourir ; il faut un moyen que l'on eù t pu fair e valoir avant
elle. Donc elle n'a rien retranché de ce droit commun , elle n'y a rien ,
absolument ri en ajouté.
« Si d'après ce droit antérieur, la banalité non-féodale se trouve nulle,
la loi de 90 ne l'aura pas supprimée; c'est le droit antérieur qui ne la
reconnaltra pas. La loi de 90 n'aura pas eu besoin de la supprimer.
L'on ne supprime q'ue ce qui existe, ce qui est valable en soi d'après
la loi alors existante, et que veut détruire un changement rétroactif Je
législation.
.
il
« Ainsi il a fallu supprimer les banalités féodales, parfaitement l'alables d'après la précédente législation, et qui, sans la prononciation
de cette suppression , auraient continué de subsister pleines et entières.
« ~lai s cela n'était pas nécessaire quant aux non-féodales, pour les
vices desquelles suffisait le droit commun précédent.
« Et c'est ainsi que le texte de l'article 23 de la loi de 90, dans son
es prit , a été limité à la suppression sans indemnité des seul es banalités féodales.
« Ce fut l'objet unique de la loi ; le seul but que se proposa le législateur; nous J'avons prouvé pal' le préambule même de celle de 90 ,
par son article 2/!, par les lois qui ont suivi, par l'universelle doctrine,
et par la jurisprudence.
« Éco utons l'arrêt de la Cour de cassation du 7 frimaire an XIII
rendu à une époque où plus rapproché qu'aujourd'hui de cette l é(1is~
1ahon
. nouvelle, J'on était bien plus à porlée d'en saisir l'esprit et" le
hul. (, Attendu qu'après avoi r supprimé sans indemnité, par so n arti-
- 69« cIe 23, toutes les hanalités, la première de ces lois a déclaré rache(, tables celles établies par un e convention entre une commune et un
« particulier non seigneur - et qu e si l'article 1> de la loi du 21> aoùt
« 1792, paratt supprimer sans indemnité, toutes les banalités déclarées
« rachetables par J'article 24. ci-dessus, il est évident que cet article 1>
« n'a reellement entendu supprimer de ces banalités QUE CELLES SE I« G!\EUR!.UES, dont parlent les n" 2 et 3 de l'article 24, et non celles
«( du n° 1" fondées sur un e convention entre un particulier non sei)) gneur et une commune, puisque cet article 1> ne prononce de sup« pression sans indemnité que d'objets vraiment seigneuriaux. ) Mèmes
motifs dans l'arrêt du 5 février 1816, pour les fours de Sisteron, et
dans tous ceux rendus sur cette matière.
« Puisque leI a été au plus haut point de certitude, le seul but de
cette législation , nous avons eu raison de dir~ qu'il faut interpréter le
n° 1 de J'article 24, de la loi de 90, non comme le maintien sous telle ou
telle condition des banalités non-féodales, mais comme leur simple
renvoi au droit commun , et que par suite, la suppression sans indemnité de J'article 23 ne s'y applique dans aucun cas.
«( Le renvoi au droit commun existant pour la question de validité,
existe nécessairement aussi pour celle d'indemnité; il est pour le tout;
il Y a indivisibilité.
(, Ici la nullité ne proviendra plus de la loi de 90, mais de celle
antérieure qui aura exigé le concours de tous les habitants; mais cette
mème loi antérieure vous soumettait à le rapporter à mon profit ; elle
ne vous permettait pas de me payer avec le néant ; elle YOUS soumettait à la garantie ; donc vous me la devez. ))
Complétons cette démonstration, en montrant que la législation antéri eure à 1790 exigeait pour les banalités la production d'un titre cons~
titutif. C'était la règle, suivie même à l'égard des seigneurs. « JY~t1 ~ci
gneul' , dit Latouloubre, t. rr, p. 262, ne peut sc l'an'oger , S' IL N'A U!\
TITRE. ») Et pour les communes, il fallait aussi, au dire du même auteur, p. 283; UN T ITR E LÉGITIME D·ÉTABLlSSEME!\T. )) Julien, t. Il, p. '21>&.,
parlant d'une banalité étahlie par une commune envers l'acquéreur
�- 70 de ses fo urs et moulins, ajoute qu'il y arait des NU LLITe, E:'I LA ~'O I\ )I E
ET AU FOND dans les enchèl'CS el. les actes rl'aliéncMion . Enfin , n'est-i l
pas singulier que le jugement ait méconnu ce principe , lui qui, dans
la première partie de ses motifs, prétend qu e cc titre d'établissement,
d'après la doctrine de Boutari c et de Julien, devait ètre revêtu de l'assenti ment de tous les habitants? De telle so rte que, non-seul ement il fallait
un titre, mais enco re un litre revêtu de certaines conditions.
Cela posé, la loi de 1790 ayant renvoyé au droit ancien pour tout
ce qui concerne les banalités co nventi onnelles maintenues, il est illogique et contradi ctoire de dire qu e dans la ca use, c'est la loi de 1790
qui aurait fa it périr la banalité. Elle aurait péri , parce qu e le titre co nstitutif ex igé par la loi ancienne n'a urait pu être reproduit , ou parce qu e
la forme exigée par ce droit ne l'aurai t pas revêtu . Mais ce n'est pas un
principe nouvea u qui aurait amené ce résultat.
Supposo ns que la quêsti on se fuI soulevée so us l'ancienne jurisprudence; qu'un habitant eut soutenu que les titres de '1688 et 1689 ne
s'étaient pas ex pliqués suffisamment et qu'ils n'étaient pas le titre co nstitu tif, mais un e sim ple indica ti on d'une banalité préexistante. Si ce titre
cOlls.titu tif n'avait pas pu être produit, que serait-il arri vé? Que les tribunaux, appliquant le droit co mmun , auraient repoussé la banalité en
disant que le titre n'en était pas produit. Ç'aurait été là du droit co mmun, du dro it ordinaire; et parce qu 'on l'a dit ct fait en 18ti8, cela
ne fa it pas que ce soit du droit nouveau. C'est un e pure applica ti on
du droit ancien.
Supposo ns encore qu'au lieu de cette exception on eut fa it valoir la
seconde; celle empruntée au défaut d'accession au co ntrat de tous les
habitants. Ce serait enco re du droit ancien que l'on aurait appliqué,
et null ement du droit nouvea u.
Dès lors, pe u im po rte que le procès ne se soit élevé qu e de nos jours,
c'est toujou rs d'un vice inhérent au co ntrat qu 'il s'agit, et c'est toujours
la loi ancienn e qui le punit. Un vice inhér'ent au con/I'at, diso ns-nous;
et cela est incontestablement vrai, parce que si la Commune avait dit
dans sa déli bérati on du 2&. et du 29 janvier 1688 : « Les moulins seront
-
71 -
banaux il l'avenir , » au lieu de dire : « Les moulins sont banaux, »
le co ntrat aurait été considéré co mme le titre constitutif ; ou du moins,
on n'aurait pas pu dire qu'il n'était qu'énonciatif d'un e chose préexistante. C'est donc la faute de la communauté d'Hyères qui es t ici le principe de l'éviction . Elle ne s'est pas suffisamment expliquée; et c'est la
loi ancienne qui la punit, en privant l'acle de ses effets.
C' es t ~m vice inhénnt (tU contrat, sous un autre rapport encore,
parce que si la Commune ava it fait accéder tous les habitants, la forme
du contrat aurait été parfaite. On n'aurait pas pu dire qu'il manquait
de cette solennité. C'est donc la communauté qui a encore fa it faute,
et c'est la loi ancienne qui la punit.
Donc, sous qu elque rapport qu'on envisage l'objecti on du jugement,
elle est sans valeur réelle et surtout sans valeur juridique, puisque même,
en l'absence de la loi de 1790, le jugement aurait pu être le même el la
décision identique.
Maintenant, en dernière analyse, puisque c'est le droit ancien pur
qui a été maintenu touchant les banalités conventionnelles, c~mment
aurait-on jugé la questi on de garanlIe SI les proprIétaIres 1ava lent
dirigée contre la communauté? Elle eut été infailliblement accordée;
l'indemnité aurait été du e; le droit ancien l'accordaI t. Le drOIt nouveau ne la refuse donc pas davantage, parce qu'en renvoyant sur le
principal au droit ancien, il a à plus forte raison rel1Yoyé il ce mè me
'droit pour l'accesso ire.
Ce serait vainement que l'on essaierait de donner il l'argument du
. " ment une form e différente, en disant que l'article 2&, de la 101 de
Ju"e
d' .
'\t t
n90 a fait du titre val(t ble une condition, et que ce tte con Itlon n c a n
c'est hien la loi nouvelle qui agit et non le drO..
It ancien .
pas remp l 'e
l ,
Mais en répondrait avec avantage que ce n'est pas là un e condllIon nouvelle mais une simple application de la règle anCienne. Or , c~tte
a ppli ~al i o n doit avo ir lieu avec toutes ses conséquences, et ses accessoires
naturels, qui sont l'action en garanlIe et le drOlt il I mdemnllé en cas
d'éviction par la fante et le fait de la communauté.
�-72-
- 73 -
Enfin, ce serail encore tout aussi vainement LIu'on allèg uerait qu e la
loi de 1790 n'a pas renvoyé purement et simplement pour les banalités
maintenu es au droit ancien, et qu'au co ntraire, il l'a modifié en ce sens
que la possession du droit qui pouvait qu elque chose autrefois, ne peut
plus rien aujourd'hui.
Nous répondrions d'abord qu e cela n'est l'rai que pour l ~s banalités
supprimées co mme féodales, parce que pour celles-Iii tout a péri . Mais
que cela est faux pour les conventionnelles maintenues. la preuve en est
que l'article 29 permet qu'on se prévale de la possession il l'appui des
reconnaissances, et'qu'il exige même que la possession les accompagne.
.sous répondrions encore avec le mémoire Perrin, dans la cause précitée, que la possession serait encore utile pour co uvrir l'irrégularité
du titre et même pour opposer la prescription de l'action en nullité.
« la loi de '1790, disait-il, page &.9, a bien e. igé la preuve par titre,
comme l'avait fait le droit antérieur ; mais du moment qu'il est
représenté, elle a sur sa validité renvoyé il ce droit. Elle n'a don c exceptéaucune des ques tions qui se rattachen t à cette validité. Par exemple,
elle n'a parlé de la possession que pour le cas où le titre primordial a
disparu et se trouve remplacé par des reconnaissances; en tout autre
hypothèse elle se co ntente de la production de ce titre primordial ; elle
n'exige pas expressément que la possession l'ait entretenu. Croit-on
cependant qu 'a près sa promulga tion, il aurait suffi de présenter ce titre,
si cette possession ne l'avait pas accompagnée, et que les débiteurs de la
serv itude n'auraient pu faire valoir le non usage de 30 ans ! Donc cette
loi ne s'est pas occupée des ques tions de possession qui pouvaient se
rattacher au titre; elle les a toutes laissées dans Je domaine du droit
commun.
do ive, à cause de sa derectuosité, purement civile, participer au vice
même d!l la féodalité et II la peine qui n'a été destin re qu'à l'atteindre ~
Donc l'objection n'a pas de portée. »
« Allons plus loin , ajoutait-il, et supposo ns qu'en ceci elle nous eùt privé
, d'un moyen qu e nous aurions eu auparavant! Cetle ci rconstan ce changeraI-elle en rien la discussion de la garantie? Sera-t-elle capable de convertir une question de nullité orig'inaire de co ntrat, en un e suppression
de banalité complète, mais oppressive, et par conséquent un e suppression sans indemnité? Cela pourra-t-il faire que ce contrat ordinaire
Le rejet de la garantie blesserait dOlle tout il la fois la raison et l'équité. C'est une preuve que le tribunal de Toulon , en la rejetant , a
donné une fausse interprétati on de la loi.
N0l;ls répèterons en fini ssant ce que nous avons déjà dit ; nous espérons que la Cour n'aura pas même à examiner cette questi on de garantie
et à la résoudre, tant la première partie de la cause est exubérante
de preuves et de force, tant la légalité de la banalité des moulins
d'Hyères est évidente !
A. TAVERNi ER père, Avocal.
JllARGUERY , Avoué .
M. REYBAUD , Avocat-général , portant la Jlal'o le.
�MÉMOIRE
POUR
L'ŒUVRE GÉNÉRALE DE CRiPPONNE
et M. Le MAIRE
De la ville de Salon, intimés
SUR " 'APPEL
DU JUGEMENT DU TRIBUNAL CIVIL D'AIX , DU 24 JANVIER 1865
Coutre les Sieurs
TEISSIER et AMOUROUX.,
AppeIRut •.
IDÉE GÉNÉRALE DU PROCÈS .
L'ClEu vre de Crapponne el M. le Maire de la ville de Salon viennent défendre
devant la Cour , un jugement pal' eux. obtenu du Tribunal civil d'Aix . le 24
janvier 1865. contre l'appel émis pal' les sieurs Teissier et Amouroux.
Ce jugement les a maintenus dans le droit de verser les eaux du canal de
Crapponne dans le fossé de la Ganiglte, de les mêler avec celles de quelques
sources naturelles qui coulent dans ce fossé, et de les en dériver toutes ensemble
pour l'i rrigation des terres qui bordent la Garrigtle et de celles du territoirp de
Salon situées plus avant.
�-2Ce Jugement les y
il
- ~ -
main tenus en suite d'une possessiou qui se perd Jans la
nuit Jes temp'. et qui remonte à trois siècles; d'une possession exercée publi'Inement. paisiblement, au
l'U
et su de ceux qui se sont faits aujourd'hui leurs
adversaires, et à leur exclusio n ; réalisée enfin à l'aide d'ouvrages apparents en
maçonnerie. tels que prises, gorgues, aqueducs, martellières, multipliés
SUI'
tout
Ir parcours de la Garrigue , et incorporés dans ce fossé et sur ses bords.
Le Tribunal civil d'Aix n'a ainsi prononcé qu'après la procédure la plus complète, et les imestigations les plus entières.
A nous donc l'obli gation et le del oir de mettre surtout en saillie ce que le pl au
des lieux et les rapports de descente ont révélé à la justice de décisif et de
souverain dans la cause , et de montrer, qu'au lieu d'une lutte inspirée par
un e émulati on qui ne méritel'ait aucull intérêt , l'OEuvre de Crappon ne poursuit
ici, comme touj ours,
Ull
but nob le, élevé, du prem ierordl'e, d'interêt public, celu i
de donner et de maintenir à la conception de l'homme de génie qui créa son canal,
la plus grande utilité possible pour les populations agricoles qu'il traverse eLqu'il
a voulu enrichir ,
Un juge-commissaire est descendu deux fois sur les lieux ; il a décrit toutes les
œUlTes existantes sur le fossé de la Gan'igue ; un plan des lieux a été dresse
FAIT :
par l'homme de l'art , commis par la Justice , qui rend visible à l'œil ce que le
Le ruisseau ou fossé de la Gan'igue, qui existe dans le territoire de la com-
rapport écrit, raconte et fait connaître il l'intelligence. Enfi n des enquêtes et des
mu ne de Salon , descend du côté de Lamanon, traverse le territoire de Salon,
t'ontre-enquêtes ont été prises, et toute la réril é a été révélée à la Justice .
du nord au midi , et l'a se jeter dans la Toalo ubre, li reçoit dans son parcours les
Après un examen si complet et des investIgations si multipliées, l'OEuvre de
eaux de qu elques sources natu relles, peu impol'tantes, celles dites de Richebois, celles
Crapponne et la ùlle de Salon devaient croire le jugement émané du Tribunal h
des Bremonds, celles des Aubes. La première ne débite par seconde que 55 litres;
l'abri d'une contestation. La lecture seule de ses motifs suffit pOUl' le justifier.
la deuxième ne donne qu'un volume d'eau insignifiant, que l'expert choisi par la
Mais les sieurs Teissier et Amouroux, condamn és par ce jugement ont cru
pouvoir triompher de ses motifs, et conyaincre le premier juge d'erreur sm tous
Justice n'a pas pu apprécier; et enfi n la troisieme ne fournit que 24 litres d'eau
par seconde. (Rapport de descente p. 12 verso et 15, p, 12, et 10.)
les points du procès; à l'appui de leur appel, ils ont produit un mémoire
Ce ruisseau ou fossé de la Garrigue a deux parties bien distinctes; l'une
imprimé, qui a rendu celui de l'OEuvre de Crapponne nécessaire pour rétabli r
supérieure, l'autre inférieure. Il est, ùans sa première partie, l'ouHage de l'homme.
devant la Cour l'égalité des situations.
On l'a creusé prim itivement pour assainid a contrée, donner un libre cours aux eaux
Nous nous permetrons de signaler ici un caractere singulier qui distingue le
mémoire des appelants, et les conséquences de leur résistance au jugement.
de sources naturelles qui surgissa ient du sol sans aucun écoulement, puis inondaient les terres voisines. Mais daus sa seconde partie, il est l'ou l'rage ùe la na-
Il n'est pas une seule fois, dans le mémoire des appelants, fait mention du plan
tu re. C'est à son point de jonction avec le torrent de Talagard, dont le lit a été
des lieux., ni des faits qu'il constate, ni de ce que le rapport de descente lui donn e
creusé par les plu ies d'orage. Là le terrain étant plu s bas , plus profond, il
de force et de valeur. Et quant aux conséquences de la résistance des sieurs
fut choisi pour donner aux eaux leur écoulemen t vers la rivière de la Touloubre,
Teissier et Amouroux, elles ne ,vont pas à. lutre chose qu'à boul everser le sys -
On ne pouvait pas mieux. rencontrer que cette voie natul'elle. On s'en servit pour
teme d'irrigation usité depuis trois siecles il Salon, système qui enrichit cett e
)' jeter les eaull. de la Garri9""' et il parti r de
contrée et fait toute sa prospérité, et à. compromettre au premier chef le sucees
la Touloubre, c'est le lit du torrent de Talaga,.d , qui est le prolongement cL le
d'une entreprise qui tient aux intérêts généraux les plus graves.
complément du fossé de la Ga,.,.ig1.e .
•
Ci
point jusques li la ril'ière
ue
�-4-
-
Pu coup d'œil jele sur la carle du département dressé par le sieur Matheron ,
l~e ut-.oyer
I)O lio'lI ;
du département, montre ce détail et le fait toucher au doigt ,
C'est il quelques
c~m ts
mètres ell avant du pont d'Avignon que le torrent de
Talagard s'unit et se confond avec la Gan'igue,
!)-
quod mor/li ill l!ntel; tlO/l licet per aliquelll ;1/ loto vallato in (tt/un"/I
construi una'lll 1'eclu~am,
CUflH
lCl'râ, ueqtte ('wm {tutibus" Ineque aqucl/I1t p1'o--
, ",issam asst/mlCre lllli leum'e cilm e07lceSS(l, si ne prresentiilet consensu ipsorulH
«
cleputatorum ,
En remontant dans la plus haute antiquité, on trouve que les eaux du ruisseau
C'est aussi dans cette supplique des consuls 4ue se trouve rappelée la règle de
de la Garrigue , furent principalement affectées il l'irrigation durant la saison d'été,
1'195 touchant l'atTectation des eaux il l'irrigation de Pâques à St-Michel; il en
et qu'elles furent jugées insuffisantes pour fournir à la fois il ce genre de besoin
t'st parlé en ces termes :
at:ricole et à tout autre quel qu'il fut, Elles furent de Paques 11 St-Michel consacrées 11 l'irrigation , et de St-Michel à Paques l'irrigation fut interdite,
• Soient sinyulis mm;s constlfc" prœsentis loci Saloll is deputan dt/OS ad
c
aqllatores qui ClIl'am habent à (esto Paschre usque ad festum Sancli-Michaelis
On lit en effet dans un règlement fait en 1293, par l'Archevêque d'Arles, alors
«
detivm'e aquas (ontillnt cle Albis , de Besse,jtlxtd 1lecessilalent inhabitalltitl1lt.
seigneur de Salon , qui a formé depuis lors le statu t municipal de cette ville, la
c
modicà iUis datd l'ecunid, ct hoc solum ad adaquationem viridm'ionm. , ex-
disposition suivante :
c
CC'Jltis diebus veneris et Setbaui quibus "tuntll1' orlolani, •
e
Item statu'imus
qllOd
nemo adaquet in hieme, à (esto Beati Afichltelis 1lsque
e
ad {esl!!'nl Paschalis arbores vel vinea. de aqud (ontis De Albis nec de llq""i
e
Talagarni,
L'Archevêque fil droit à la supplique et par un statut du 22 juin 1521 , il fiL
les inhibitions demandées en ces termes:
«
Inhibente ontllibllS et singlltis prredictis ne a",odà in ullteà in discu"w a(1 Ult'
A (esto verô Paschalis ".que ad {estwm beati Michaelis possit quilibet ad
• (ont;"", p,'œdictamm de bedali cm',,"', aliquas resclusas lllpidell$ , terras, cel
• aquare de prwdictis aquis IlOrlos, arbores, viridaria et alia con(lteta de li-
• (I/steas, T'ropler qltaS disfllrstls dicUE aqttre divel'tatul' ci loco ad I<JCttm destinat ll11'
«
l 'cr d&putatos lJrl/de1l1es et in posteru1ll d~plltandos, mi1ltlsque' dictam aquam à
e
centid adaqlUltorum quos ol'dinare ad ada'luandllm a1l1watim volumlls pel'
c
«
ctlrïam nostram adprœsentationelll el re(flûsitiolllml probonl1l1 cast,'i S alonis
• (ontibus 1,,'œdictis p,'oven'ientem sibi apportare, ..ee in e01'U'" possessionibtls
c
habentium possessiones, qui adw/uare debent de a'luis prœdictis; et qui-
c
e
cumque prœdicta (regerit dabit dU<Js solidos et sex denarios 1"'0 prena q [loties
«
(regerit sltpra-dicta, •
• deputatoruDl el deputandorum, •
Existait-il à cette époque, comme il en a existé plus tard , sur le cours du
Cet statut fut renouvelé en 1565 et plus tard encore il fut maintenu et de nou-
ruisseau de la Ganigue, des moulins 11 farine' il est permis d'en douter, pnis-
veau publié le 22 juin 1521, Voici il quelle occasion: des abus s'étaient intro-
que le règlement de 1295 ne les nomme même pas et ne réserve pas pour eux
duits dans l'usage des eaux, An lieu de ne les prendre que des mains et de
spécialement les eaux qui sont enlevées 11 l'irrigation du 29 septembre au Jour de
licentid adaqualorum, les arrosants les prenaient sans ordre, hors de la présence
Pâques, Peu importe au surplus qu'il y en eut ou qu'il n'yen eut pas encor~,' ,
des deux députés il la distribution des eaux, ipsis insciis et non permittentibus,
comme l'expose la suplique adressée par les consuls de Salon à J'Archevêque d'Arles,
Ceux-ci demandèrent alors qu'il lui plût ordonnér de nouveau que personne ne
put dans tout le cours du ruisseau faire aucune recluse ou rebute avec terre ou
bâtons, ni prendre l'eau sans la
pr~sence et le consentement de$ députés
•
d l'irri•
qlâbtls cumqlte im1lliUB1'e sine mandato et expresso consensu prredictoruDl
Ce partage fait par le règlement de 1295 avait l'avantage de favonser
11ITI-
galion et de lui donner la priorité durant la saison d'été, non-seule~~nt sur le:
, qUI' pou val'ent exister
mou lms
,
, mais encore sur ceux qUI poumuent s etahltr plu,
tard,
�-- 6 -
-
Ce partage était raisonnable, puisque les eaux ne pouvaient satisfaire en même
temps aux besoins de ragricull ure et au fonc tionnemiut des usines .
Il étai t fait d'ailleurs dans un grand espri t d'éq uité. C'étai ent surtout le,;
l'aux d'hi rel' qui pouvaient permettre la mise en jeu des moulins. Celles d'été
dont le chi[Jre a été donn é pal' le l'apport de descen te, étaient mi lle foi s insuffisantes pour cet objet.
7 -
ri e cet acte soul il remarqu er. La première , par laquell e Adalll de Crappoone illlpose 11 Tripoly l'obli gatiun de n'employer et faire servir les caux concédées qu'"
l'irrigation ; il Y est dit : "et aussi
" lhpoty
Il e
a élt! de l)ache
P0ItI'''l! c01lvertir ladile e(w à autres "sages
• seulement., La seconde OÜ il est dit que:
«
'flIC
«
ledit AlIloine-hla,'c d"
'(tiC 1,oltr
arroser talll
Tripoly ne pOI<rm lJrcndre d'NI"
si ce ,,'est dcpl!is Ict demi-aura jusques" la demi-septemb,'c . •
Il est très facile aussi de conjecturer qne l'irrigation avec les eaux seul es du
Celle concession fut co nfirmép el rcconnue plus·tard dans la transaction du 20
ruisseau de la Garrigue ne pouvait pas être fort étend ue , 11 l'époque dont nou ~
octobre '157"1, passée entre les divers ayants-cause de Crapponnc, que celui-ci
parlons. Jamais le territoire de Salon n'aurait pu devenir ce qu'il est aujourd'hui ,
,ans une circonôtance heureuse, celle de la création du canal de Crapponne pal'
avait substitués il ses droits , et qui constitua l'OEu vre générale, ou soit la sociW'
ôivile de Crapponne.
\dam de Crapponne qui en conçu t la pensée , et qui dirigea surtout sur Salon
L'arrivée de ces eaux bien raisantes dans le quartier du Gresc à Salon , fut , pour
les eaux bienfaisantes qu'il em pruntait
a la
Durance.
Le '\ 7 août \ 55!., Adam de Crapponne, éwyer de Montpellier , hauÙant (tu
les riveraius arrosants des eaux de la Garrigue, l'occasion la plus heureuse d'aug-
de Salon, (termes de la concession) obtint des présiden ts et maitres ra-
menter leurs arrosages et de les aw'oÎtre. Ils la saisirent sans hésitation , et
voici ce qui aùvint :
tionaux de la Chambre des com ptes et archives de Provence, l'acte de con-
D'un commun accord entre les arrosants, les héritiers de Tripoly, concessioll-
œssion qui l'autorisai t à déri\'er de la Durance les eaux qu'il se proposait d'em-
naires du moulan , et l'OEuvre de Crapponne, les eaux concédées 11 Tl'ipoly fu-
ployer à la création d'une fou le d'usines sur tout son parcours, et 11 l'irrigation
rent dirigées et rejetées dans le ruisseau de la Gan·igue .. et les eaux propres
,les champs et des jardins de cette partie de la Provence qu'il habitait.
Je ce ruisseau jointes à celles de Crapponne furent déviées par les arrosants el
{iet!
La pensée de cet homme de génie fut si bien com prise par l'autorité royale
appliquées 11 l'irrigation. Le nombre des arrosants s'accrut ; non-seulement les
,le qui émanait la célèbre concession, qu 'elle lui donna la faculté' de condilire
terres riveraines, mais encore les terres plus éloignées des bords du ruisseau par-
l't amener ses eaux: «en lelliez. que bon lui semblera et où ladite eall se 1)0U/nt
ticipèrent au bénéfice des eaux, et la contrée commença alors à devenir ce qu'elle
«
conduire.. • et avec prohibition aux commu nau tés et aux particuliers de se
sen'ir des eaux que Crappoune amenerait sans sa permission et son consentement.
L'acte porte: • sans que le,dites communaulés
«
«
el particuliers d'icelles ni autns,
nepuisscl1lprendre de l'eau, ni s'en se)'v;,', sans le congé et expresse licellce d"dit
de Grapponne .•
est aujourd'hui .
Remarquons 11 ce propos, que le règlement de t 29:5, qui avaIt été renoU\'elé
et maintenue en 152 1, favorisait et légitimait cette heureuse innovation.
Durant la saison des arrosages, de Pâques à la Saint-Michel, les eaux du ruisseau étant a[Jectèes exclusivement et par priorité 11 l'irrigation , l'OEuvre de Crap-
Adam de Crapponne fit une foule de concessions dans le territoire de Salon .
ponne, les ayants-cause du capi taine Tripoly et les arrosants ne portaient pré-
11 faut, pour robjet du procès, concentrer notre attention sur celle qu'il fit au
judice 11 personne en jetant leurs nouvelles eaux dans la Garrigue et en le,
rapitaine Tripoly , par acte du 15 février t 562, d'un moulan d'eau pour les
reprenant pour arroser leul's fonds. Les moulins qui avaient pu s'établir sur
arrosages du quartier du Gres,; et Garrigue. 11 Salon . Deux clauses impor tantes
le cours du ruisseau n'avaient pas à soulTrir de ce nouvel état de choses. Al'an ~
�-8-
-
9 --
lui, ils ne pouraient , durant l'été, prendre les eaux du ruisseau pour leurs usines .
Après lui . ils ne pouvaient pas davantage les prendre, parccqu 'clles s'étaient
aw'ues des eaux nouvelles . Celles-ci comme les autres leur étaien t forcément
Au nombre des ouvrages en maçonnerie et en pierre de taille, pratiqués pour
amener les eaux de Crapponno aux. arrosants de Salon , il existait en 1770 .
comme il existe encore aujourd'hui au point marqué E sur le plan, une gorgue
elrangères .
Aussi ce nouvel établissement s'opéra-.-il sans aucune opposition. On peut
en pierre établie au pont d'Avignon, qui traverse leru isseau de la Garrigue.
Uléme dire que tout acte de résistance de la part des usiniers inférieurs, s'il ell
A cette époque cette gorgue eut besoin de réparation pour une fracture qui
avait existé , aurait été insensé. Ils n'al'aient en elTet qu'il gagner , à voir les
.'aux de la Garrigue s'accroître de celles du canal de Crapponne. Ils étaient
y avait été commise. L'OEuvre de Crapponne avait fait condamner la commune
de Salon par arrêt du 13 juin 1770, 11 payer les frais de cette réparation. Celle-
appelés à recueillir, d'aventure et de seconde main, le bénéfice du surabondant
ci s'était pourvue par opposition el par voie de réformation contre cet arrêt et
Jes eaux , il profiter de celles qui ne seraient pas utilisées par négligence ou par
par arrêt du 18 mai 1776, l'arrêt précédent du 13 juin 1770 fut réformé et la
tout autre motif, et à se faire un fond ou une masse d'eau sur laquelle
présent, ils
n'avai e n~
pu compter pour la saison même des arro-
jU SqU'~l
s~ges.
L'organisation de cet état de choses se fit sur des bases sûres eta l'aide de diver;
ou vrages de maçonnerie, don t tout il. l'heure nous donnerons le détail, sur divel
charge de la réparation fu t laissée à l'OEu l're de Crapponne.
L'OEuvre de Crapponne avait demandé que la commune de Salon supportât
eule cette dépense, probablement parceque les meuniers du moulin du Chàteauneuf avaient pratiqué rette ouverture pour se donner des eaUll.
l'oints du ruisseau de la GQ1Tig/le, Sur le bord gauche les eaux de Crap-
Mais l'arrêt de 1776, ni de près ni de loin , ne condamna l'OEuvre de Crap-
ponne furent amenées par des canaux conducteurs . Sur la rive droite des prises,
ponne à détruire ses ouvrages. Bien loin de là , il mit la charge de la répa-
des acqueducs. des martelières furent construits pour dériver les eaux et les
ration de celui-ci excl usivement sur elle. L'arrêt ne jugea que la seule questioli
appliquer à l'irrigation . Enfin quand des moulins furent établis sur le cours
de savoir à qui de la communauté de Salon ou de l'OEuvre de Crapponne incom-
de ce ruisseau notamment celu i du sieur Teissier
bait l'entretien des ouvrages qui facilitaient l'irrigation .
connu sous le nom du
moulin de Châleallneu(, des ouvrages furent faits qui eurent pour objet
d'assurer au profit des arrosants durant la saison d'été la éitablis sur les
On voit par là combien peu l'arrêt de 1776 fut un acte d'opposition a l'etat
de choses
préexistant.
,
eaux, et même l'impossibilité pour le moulin de Châteauneuf de recevoir une
En 1785 , et le 7 décembre, l'assemblée des États de Provence reconnut d'une
seule goutte d'eau, avant que les besoins des arrosallts ne fussent satisfaits.
manière solennelle le droit qu e l'OEuvre de Crappone s'était acquis sur le ruis-
Durant le cours des trois siècles qui nous séparent de cette époque. le sieur
seau de la Gan'igue, et lui donna un titre dont il lui importe auj ourd'hui, plus
Teissier n'a pu signaler qu'une circonstance à laquelle il a voulu donner l'ail'
que jamais , de se prévaloir. La création du canal de Boisgelin , ou soit des Al-
ou la couleur d'une opposition indirecte il l'œuvre que nous venons de voir
pines, en fot l'occasion . L'OEuvre de Crapponne craignant que le nouveau canal
réalisée; mais il suffit de la rappeler pour s'appercel'oir de son erreur , et combien il est malheureux dans son argumen tation .
ne vint jeter la perturbation clans ses arrosages et dans les nombreuses usine~
qu'elle possédait, fit entendre sa voix auprès des administrateurs de la province ,
réalisa une opposition
a la nouvelle dérivation , et
demanda nommément que la
�-
10 -
-
pl ,winœ fut tenue de ne jeter ses caux du canal de Boisgelin ni di,..clt lllenl ,
.. i i..direclement dans le l'OS$~ de la Garrigue.
Le plan des lieux nous montre le canal des Alpines, coulant parallèlement au
fossé de la Garrigue, et ne mêlant nullement ses eaux avec celles de Crapponne
Le 26 juillet 1785 il intervint entre les administrateurs de la province et
l'OEuvre de Crapponne un traité qui consacra t.outes ses demandes .
Il -
et de ce fossé.
[1
est construit en dehors et il en est complètement séparé.
importe
Une dernière reconnaissance du droit de l'OEuvre de Crapponne lui est venue
surtout de remarquer les moti fs qui furent donn és pal' la province pour légitimer
des propriétaires des usin es qui sont aujourd'hui existantes SUl' le cours de la
Garrigue.
[1
h' sacrifice qu'elle s'imposait ; .en voici quelques-uns:
• La nouvelle dérivation du canal de Boisgelin . n'a pas pOUl' objet, disait-on
dans le traité, de se mettre en concurrence avec les propriétaires de Crapponne ; il ne s'agit que d'imiter le bien qu 'a fait eet ancien canal . sans le con• trarier, ni disputer à l'OEu vre qui le régit, les avantages qu'elle en retire.
• Le pays doi t concourir, ajoutait-on , aux véritables intérêts du canal de
Crapponne, à If!!i il doit tant de ";chesses. II faut que ce canal subsiste, on
ne fait pas le bien en détruisant celui qui est fait. Les d"oits Itcqttis même 'l'm'
• la Settle possession sont ,·espectaùles. -
Notre entreprise est nouvelle, elle no
• doit pas entrer en opposition avec une entreprise ancienne, ntile et respectée.
• fI eut fallu abandonner la nouvelle dérivation plustôt que de détruire l'ancienne.
C'est en conséquence de ees motifs qu'il fut conl'enu :
• Que tant que le moulin des quatre tournants de Salon qui paye aussi une
• côte considérable à l'OEuvre ne sera pas possédé par la communauté, il ne
• lui sera départi ni à aucun particulier des eaux du canal de Boisgelin ,
«
qu'à condition que ces eaux ne pourront servir à des moulins à b~é qui
• seront prohibés, et qu'elles ne pottrront être j elt!es directement ni illdi" ecte11lel1 l
• dans le fossé de la Garrigue, ou dans la rivière de la Touloubre, sur lesquels
• se trouvent divers moulins à blé; qu'elles ne pourront être versées qu'au
• dessous desdits moulins, de- manière qu'ellles ne profitent jamais à des mou• lins à blé au détriment des quatre tournants ; que les eaux d'arrosage dudil
• canal et les égoulô d'icelles serout portés, si besoin est , li tmve-rs le rossé de la
Garrigne, sans qu'il$ l" .issent j amais y 10mber ......
Cet hommage ne fut pas sténle et ne fut pas seulement écrit dans les actes,
il fut inscrit dans le sol lui-même.
. C'est le moment d'en parler et de fournir àu moins sur le moulin de Châteauneuf appartenant au sieur Teissier , quelques détail .
Durant le cours des siècles qui s'étaient écoulés depuis t 293, et à des époques
que nous ne pouvons préciser, il s'était établi des usines sur le cours de la Garrigue , Le plan des lieux et le l'apport de descente n'en menti onne que deux ; le
premier celui dit de la Levade, situé dan la partie supérieure de la Garrigue,'
le second , dit de Châterltlnett{, établi et construit dans la partie du fossé de la
Garrigue formée pal' le lit du torrent de Talagcml .
Nous n'avons pas à nous occuper du premier , puisqu'il n'est pas l'objet du
procès actuel. Nous parlerons seulemen t du second , dont le propriétaire veu t
singulièrement accroître les droits, qu 'il veut enrichir des eaux de Crapponne el
dont il entend changer auj ourd'hui les conditions d'existence.
A cet égard , voici ce que le l'apport de descen te et le plan des lieux nous apprennent touchant ce moulin .
Le mou lin de Châteauneuf n'est pas établi sul' le lit du torrent formant le
prolongement de la GIt1TigtW Il est il 14:5 mètres de distance, et precédé d'un
ca nal d'amenée, construit de main d'homme, de toute cette longueur , qui sert à
dériver les eaux de la GlIi'l'ig ue et à les amener
SUI'
les roues dans la saison
d'hiver. A la tête de ce canal d'amenée se trouve une écluse destinée à recevoir
les eaux. Mais c'est là SUl' ce point, primitil'ement SUI' le plafond de l'écluse, el
plus tard presque il niveau de l'écluse, mais dans sa paroi latérale , que les arl'osants de l'OEuv re de Crapponne ont eu de tout temps un ouvrage destiné à. empêcher les eaux. de se diriger vers le moulin durant la saison des arrrosages . Cett p
�--
!~
-
ouverture est d ' igoée sur le plan des lieux par la lettre D_ Elle a été mesurée
jamais réclamé contre la situation qui lui était faite. 1\ l'a toujours acceptée
par M. le Juge-Commissaire dans son second awidit, du 9 mai 1862 ; illa décrit
cumme une loi impérieuse qu'il avait à subi r. Il a fait de même pour les pme,
en ces termes ;
• Cette ouverture est établie dans la paroi latérale de l'écluse et du côté de
éLaqueducs supérieurement établis sur tout le cours de la Garriglle.
• l'est. Elle est de forme rectangulaire, d'une hautenr de 75 centimètres et
possédé ont eu à subir aussi le résultat des irrigations, des prises, des aqueducs
d'une largeur de 54. Elle est munie 'de rainures taillées dans la pierre et pro-
construits pour les réaliser ; et les uns pas plus que les autres n'ont songé, avan t
pres à recevoir une vanne ou espacier. Le seuil de ce trou (ou de cette ou-
J'époqu e actuelle, de contester la loi qui leur était faite par le temps, le règle-
yerture) est 11 un niveau un peu supérieur à celui du fond de l'écluse .. _..
ments de 1295 et 152 1, et les nécessités de l'irria ation .
Nous en dirons autant pour le moulin de la Levade. Les propriétaires qui l'onl
Dans ces derniers temps lorsque les meuniers de ces moulins se sont permis de
Mais cette différence ne saurait être considérable_ •
Cette ouverture est destinée à empêcher les eaux de se diriger vers le mouli n
venir , dans la saison des arrosages, boucher les prises, détourner les eaux, détruire
tians la saison des arrosages. Toutes celles qui arrivent de la Ga1'riguJ) quand cette
les bâtardeaux qui avaient été fai t pour opérer l'irrigation, des poursuites ont ét~
ouverture n'est pas fermée , s'échappent par elle et retournent dans le lit de la
sur-le-champs dirigées par l'OEuvre de Crapponne contre les meuniers délin-
Gm-riglle pour aller servir aux irrigations .
quants devant la justice de paix en dommages -intérêts; et chaque fois ces
acte~
M. le Juge-Commissaire en a fait l'expérience, lors de son deuxième accédit
d'empiètement ont été reprimés. L'OEuvre de Crapponne a obtenu ainsi trois ju-
le 9 mai 1862 ; il a constaté: • que le trou étant débouché, il a donné passage
gements de condamnation, deux sous la date du 2 octobre 1850, un troisième du
«
à l'eau qui s'est renùue dans le canal qui sert à l'arrosage .. .•
29 obtobre 1851 ; et un e dernière poursuite dirigée contre le sieur Teissier ,
La vue du plan donne aussi la conviction que la pente est établie de manière que
par suite de deux procès-verbaux, l'un du 15 avril , l'aut,'e du 28 avril 1858.
J'écluse. fut-elle pleine, se \'iderait par cette ouverture_
se termina par le payement d'une somme de dommages-intérêts acquittée par le sieur
Elle est destinée à assurer et à garantir l'irrigation des fonds de quinze
Teissier lui-même. Ces jugements sont remarquables par leurs motifs. Nous ne cite-
particuliers arrosants , qui sont tous placés, sur le cours de la GmTigtte, infé-
rons que ceux de l'un d'entre eux; ils fon t voir la notoriété publique sur les fail,;
rieurement au moulin de Cbâteauneuf; et le mode usité par eux a touj ours con-
du procès actuel et la possession trois fois séculaire invoquée par l'OEuvre de
sisté à lai er ce trou ouvert durant la saison des arroseges . Par ce moyen, toutes
les eaux de la Garriglle leur arrivaient , et aucune fraction ne pouvait être di-
Crapponne et le Maire de la ville de Salon .
« Attendu , est-i l dit dans l'un des jugements du 2 octobre 1850 rendu contre
vertie pour le moulin de Châteauneuf.
, les sieurs Tbévenon et Laugier, que les eaux de la Gan-igue, réglementées par
Cette ouverture a dans la locali té un nom particulier . on l'a appelée pendan t
«
le statut local de 1295 , ayant touj ours force et exécution dans le territoire
longtemps le trou de Meyronnet. du nom du premier des propriétaires de Salon
• de Salon, sont attribuées am: besoins de l'agriculture pendant la saison d'été, de-
qui arrosait de ces eaux, et aujourd'hui le trou de Massot, parceque le sieur Massot
• puis Pâques jusqu'à St-Micbel , et aux besoins des usines pendant la saison
est le premier des arrosants qui en pro fite_
Le moulin de Châteauneuf ainsi asservi et dominé par l'ouvrage que nous ve-
• d'hyver, depuis Saint-M ichel jusques 11 Pâques.
« Attendu que ces eaux dans notre climat , pendant la saison d'été _ comme
nons de caractériser et par l'usage constant qui en a été fait, le propri étaire n ' :J.
• toutes les eaux de source en général, subissent une diminution considérable ;
�-
14 -
• qu'en cel état, il est certain en fait qu'elles étaient complètement absorbées,
I~ -
• prairies. vergers et jardins arrosables, tellement que le canal de Crapponne
intenta une action en complainte, mais il en fut débouté pal' jugement du 1~
aoùt 1845 . On y lit ce qui suit :
• est venu, il y a trois siècles, fomnir ses eaux pour le complément d'arl'o age'
• Attendu que le sieur Castillon n'est qu'un simple usager à redevance , ou
• sans pouvoir, de bien s'en faut, suffire aux besoins de l'irrigation des terres,
• de cette partie du territoire", •
• soit un preneur à l'égard de la commune de Salon , seule et véritable proprié-
• Que mieux encore, les eaux naturelles de la GltI'rigue, augmentée de celles
" taire des eaux de Crapponne servant à l'arrosage des propriétés de la ville et
• de Crapponue étant restées insuffisantes, la commune de Salon, dans l'in-
• à qu i le sieur Castillon paye le prix annuel de son arrosage, ce qui exclut de sa
• tèrêt de l'agriculture et pour l'irrigation des mêmes terrains imcomplètement
• part toute possession utile, légale, pour la pres(',ription; •
arrosés .par les deux espèces d'eaux aglomérèes, a acheté de l'alUne du canal
• Que s'il est vrai, ainsi que cela est convenu par l'OEuvre de Crapponne ou
des Alpines vers 1789, un supplément d'eau qui forme aujourd'hui la suf• fisance d'irrigation , " •
• par M, le Maire de Salon, qu e les eaux de Crapponne, avant le nouvel œuvre
• reproché, se dirigeaient par le fossé des Aubes, dans le canal du moulin de la
CI'lI}l-
• Levade, appartenant au sieur Castillon, qui se servait de ces eaux pour faire
a1'l'o-
• marcher son usine, quoique ne payant aucune rétribution, et à leur sortie du
• sages les ellux de {' œ "V,'c mélangées avec celles d;:s sO ,,,"ces d'A "ue ct de
Richebois. •
mou lin se rendaient dans les terres du demandeur, les dé(el1 dett"s el! chall-
• Altelldu que le (OSSé de III GlI,'/'iglte , sert depuis l'é(lIblissement de
l JOll !!e, ,'emon/lIllt à
trois siée/es e',v;roll, de (ossé
desti,,~ à
J'01'ter
(I!IX
• Que vainement les moulins de la GaiTigtte prétendent. cOlltrai"ement li la
• gell'll le COUl'S du (ossé d';"rigatiO I/ ,,'ont (ait '1,""ser de leUl' till'e , de leltr d" oil
• de 1,/,opr;etai!'es clwl'ges de la distri"uti6n des cati'" aux (Û'roSltrl/s,.. •
eaux de source leur arriveraient el! partie au moins, si elles n'é taient pas mé-
C'est en l'état de ces fai ls que le pro.:ès actuel est né. Voici les cu'constance,
qui l'ont amené.
• langées dans un ruisseau commun avec celles de Crapponne ; qu'en eITet les
Le 19 et 25 août 1859 , procès-verbal rédigé par les syndics de l'OEuvre
'l celle,
de Crapponne constatant que le sieur Amouroux , fermier du moulin de Châ-
• de la Garrigue, lISsignées aux o''I"osages trois siécles awpù"avant pa"le S(lItut de
teauneuf' a bouché et fermé au pont des Blasots les trous et voûtes d'arrosage
1295, ne satisfont pas il tous les besoins et son t suppléées à leur tOUl' par unI'
qui portent les eaux de Crapponne du fossé de la GaI"rigtte aux diverses propriété,;
• dérivation de J'œuvre des Alpines; d'où la démonstmtion que le. eaux de
inférieures des arrosants de Salon, et les dévien t par 'ce moyen au profit du
• ma/erialil!! des (aits co ils/anis et ,'econnus )lar toule III loclIlüli (le Salon, que le,
• eaux de Crapponne qui sont venues en supplément dans le j 6' siècle
som'ce , les premières d'Kes pa.' le titre et pm' la nat""e des choses, sont les premières absoruées et doivent l'it're cornpletemenl. .. •
moulin de Châteauneuf, et que le sieur Teissier a détruit un rebute
pratiqu é~
pour l'irrigation .
Avant ces jugemenls de 1850, 1851 etla poursuite de 1851, l'OEuvre deCrap-
8 Septembre f 859, ci tation contre les deux prénommés devant le Juge de
ponne et M. le Maire de la vi lle de Salon , ayant donné aux eaux de Crappolllle
Paix de Salon et condamnation au payement de 550 francs, " titre de dommage;-
'lui serl'aient a l'irrigation des propriété du maître du mouJin de la LeV(ule, ulle
intérêts.
"utre direction , qui leur al'ait fait éviter ce moulin, le propriétaire se plaignil et
IO Septembre, jugement du Juge de Paix qui se déclare incompétent à cau sr
de l'exception préjudicielle de propriété élrvée par le sieur Teissier , qui
p~~-
�-
-
16-
17 -
mo,IIin el lui
le premier canal conducteur est la Gorgue en pierre de taille qui est marquée
E sur le plan. Il traverse supérieurement le fos~é
'
.
, de la Garrlgue
,e t au pomt
16 Janl"Îer 1860 après le préliminaire de conciliation, ajournement donné par
E se trouve une martelliere destinée il. fournir à la Garrigue les eaux pour l'ir-
lend
«
que le Gallal de la Gm'rigtlC est
,/.Il e
dépcnd(1nce (k
SOli
npp"rtient (termes du jugement du 10 septembre 1859).
l'Œuvre de Crapponne devant le Tribunal Civil d'Aix , contre les sieurs Amo u-
rigation. On peut en donner il. volonté tout ce que le canal r.omporte.
roux et Teissier en payement de 400 francs de dommages-intérêts lJO'''' avoù'
Le deuxième canal d'écoulement est situé près la propriété Bonnot (p. 8 du
rapport).
'"dûme nt délollrn" (k s eaux d'a7Tosage qui
Grappo"'le et les avoù' mell ees au ntoltli"
(w
8071 1
la proprié!i! de l'Œuv1"e de
Le troisième est figuré sur le plan apres la lettre H.
CIUÜealtliC lI(.
Le quatrième est après le point G.
'1.7 AITil 1860 , jugement preparatoire qui sur la demand e de l'Œuvre de
Grapponne, ordonne que les lieux seront vus et dëcnts par un Juge-commis-
Le cinquième est apres le point K. Le rapport p. 9 rail voir l'importance des
27 Août t 86 0, accédit sur les lieux, rapport du Juge-Commissaire et levée
elfets de ce canal d'écoulement. Ils sont tels que les eaux du fossé en sont repoussées d'aval en amont il. 550 mètres.
Enfin le sixième et dernier est figuré sur le plan par la lettre N.
d'un plan figuratif , constatant toutes les œuvres pratiquées par l'irrigation , sur
le fossé de la Garrigue, la situation du moulin de Châteauneuf , l'eli.istence de,
~ur ces
des Aubes, des Brémonds et Ricbebois et le petit volume d'eau qu'clle,
tlébitent.
Voici la substance du rapport et du plan. Nous avons promis de l'analyser;
'1.'
OUVRAGES EN MAÇONNE RIE , PRATI QUÉS SUR LE BORD DROIT nE LA GARRIGUE.
POUR LA DÉRIVATION DES EAUX AU PROF IT nES ARROSANTS .
le moment de le faire est ,"enu . Nous le ferons en faisant connaître: t ' les
Ces ouvrages consistent en prises , acqueducs , martelières. - Nous ne nous
("anaux qui amènent les eaux de Crapponne dans la Ga1"Tiguc , et sur le bord
occupons en ce moment que de ceux qui sont supérieurs au pO lit d'Avignon près
~auch e
;
51' Les ouvrages en maçonnerie qui ont été co nstruits sur le bord droit
de la lettre E.
Ù,"
la Garrigue pour les irrigations, et par la déri vation des eaux , supéri eurs au
l,ant If Avignon;
5' Enfin les ouvrages particuliers au moulin de Châteauneuf , et ceux inférieurs au }JOllt d'Avignon;
La première prise est marquée F, la seconde est figurée par la lettre G.
Les points J et K sont des gorgues qu i prenent les eaux de la Garrigue et les
portent au -délà du canal des Alpines .
La troisième prise, lettre M, est destinée :\ porter les eaux de la Garrigue ùans
un acqueduc 11 85 mètres .
Le point L du plan figure l'aqueduc destiné à donner passage aux eaux dé-
t ' LES CA NAUX QUI AllIÈN ENT LES EAUX n E CRAPPONN E DA NS LE FOSSf:
DE LA GARRIGUE ET SU R LE BORD GAUC HE DE CE FOSSÉ.
Ces fossés ou canaux sont au nombre de six :
En partant du moulin de Châteauneaf et en remontant le cours de la Garriyue
rivées de la Carrigue par le point M.
Les lettres P., R. , S. du plan désignent trois autres aqueducs.
Enfin le plan fait connaître encore trois gorgues en pierres de taille, l'une un
peu avant la martellière E. traverse la Garriglleet porte les eaux dans la propriété
�-
18-
-
19 -
Dauphlll: l'autre, au point d'intersection des deux chemins d'Eyguières et des
devait donc être appelée au procès, L'OEuvre de Crapponne y était par suite de la
Rilsots : la troisième à 5ï mètres de la bastide Aubery , pour arroser les terrain,
supérintendance qu'elle exerce , aux. termes de ses constitutions, sur toutes les
du quartier de Blasot et les aires de Crau ,
eaux qui sont fournies par son canal , afin qu'elles ne soient jamais détournées
de leur destination primitive; et, dans l'hypothèse particulière, pour faire respecter
~ ' Ol' VI\AG&S INFÉRIEUOS AU PONT D' AVIGNON ET CEUX PARTICULIERS AU
la condition imposée à Tripoly , par Adam de Crapponne, do ne faire servir le"
eaux à lui concédées qu'à l'irrigation ,
MOULIl, DE CUATEAUNEUF ,
La cause reprise en présence de ces deux parties , il intervint le 18 juillet 1861
Au pon t d'Avignon, le plan et le rapport figurent, par la lettre E , la gorgu e
un jugement qui accueillant les fins prises par l'OEuvre de Crapponne et par
pn pierre qui , à r aide de la martellière fournit l'eau aux arrosages.
M. le Maire de Salon , les admit à la justification par toutes sortes de premes
La lettre D, fi gure l'ouverture existante sur la paroi latérale de l'écluse du
et même par témoins, que depuis plus de trente ans, ils étaient en possession
mllulin , do nt nous avons déjà parlé, et dont nous avons décrit l'elTel.
du droit par eux prétendu, Le jugement les admit à prouver:
Les lettres A et B fi gurent le commencement et la tète du canal d'amenée dn
• l ' Que depuis plus de trente ans les eaux de Crapponne ont jetées dan,
moulin de Châteauneuf.
La fi gure du fmoulin qui vient à la suite du canal d'amenée , dé.montre , qu'il
" la Garrigue;
• 2' Que les eaux réunies ont été déviées (et non point divisées comme le dit
n'est pas établi sur le cour s de la Garrigue. Il en est de même du canal de fuit €>
• constamment par erreur le mémoire du sieur Teissier) au profit des arrosants.
qui est le prolongement du canal d'amenée; il vient plus bas rejoindre la Gan'igue ,
• pendant l'été, au moyen d'ouvrages en maçonnerie ;
Les lieux ont donc été trouvés par le rapport descriptif tels qu'ils etaient
• 5' Que cet usage pendant ladite saison a été exclusif de celui des moulins:
commandés par la situation des parties au procès.
, Sauf la prem-e contraire.
Pour compléter la procédure, et mettre en présence du sieur Teissier et de
sa singulière préten tion tous les intéressés au procès , ['OEuvre de Crapponne
appela en cause M, le Maire de Salon .
Elle le fit par aj ournement à la date du 10 décembre f 860 ,
Cette qualité était ,essentielle au procès, La commune de Salon est aujourd'hui
1
Le 10 décembre 1861 , les enquêtes et contre-enquétes furent prises devant
,
M, de La Calade, Juge-Commissaire.
8 Janvier 1862 , jl]gement qui ordonne une prorogation d'enquAte , et qui
en outre : , autorise M, le Juge-Commissaire à faire
SUl'
la localité litigiense
propriétaire des arrosages qui avaient été vendus au capitaine Tripoly par Adam
, telle vérification supplémentair'e et à ordonner tels travaux qu 'il croira utile à
de Crapponne le 15 février 1 562 , et qui servent à l'irrigation des propriètés
, la manifestation de la vérité .•
bordant la Gm'1'igue et s'étendant vers la ville de Salon, C'est elle qui vend ces
arrosages aux possesseurs des terres et des jardins, en retire le prix et en perçoit
6 Mai 1862 la prorogation d'enquête s'est réalisée et le 9 mai 1862 , un nOIlveau procès-verbal de descente supplémentaire fut rédigé.
annuellement le produit. C'est elle, de concert avec les arrosants de l'œuvre
Voici la circonstance qui al'ait rendu nécessaire ce supplément de vérification,
de Crapponlle , ou de Adam de Crapponne lui-même . qui a fait ai nsi servir la
et le résultaI.. décisif pour l'OEuvre de Crapponne el M, le Maire de Salon qllïl
Glirrigue de fossé conducteur aux eaux de Crapponne pour les arrosages. Elle
produ isit :
�-
'!o-
.- 21 -
Un témoin de l'enquête , le sicur Charasse , le troisième entendu , avait déclaré
• de 75 centimètres et d' Ilne largeur de 54. Elle est munie de rainure tai llée,
dans sa déposition qu 'au milieu de l'écluse du moulin de Châteauneuf se trouvait
• dans la pielTc et propres 11 rccevoir une vanne ou espacie,'.
une ouverture, par laquelle durant la saison des arrosages passaiaient les eaux de IR
• Le sel'ü de ce trou est " lin nivea,"
tut
pe.. ""I,érie",' à celui du fond de
Ga/r'gue : que l'ouverture ainsi pratiquée empéchait les eaux de se diriger vers
• l'éclltse. Nous n'avons pn mesurer exactement la dilJérence entre ces deux
Ir moulin ; et qu'elle était ainsi maintenue ouverte par les eygadiers de Crap-
• ni l'eaux, à cause de l'eau et de la boue dont il n'avait pas été possible de sp
ponne tout le temps que durait la aison des arrosages .
«
Le sieur Teissier al'ait nié l'existence
~e
ce trou , ou soit de cette ouverture ;
débarrasser complètement , mais ceUe différence ne salirait être considérable .
" L'ot/vert''''e que n01ls venons de décri"e, était au moment de notre arrivée sur
• les lieux, bouchée avec de la maçonnerie du côté extérieur de la berge dt'
on comprend bien pourquoi.
Ce fut pour que M. le Juge-Commissaire put découvrir sur les lieux ce qu'il
• l'écluse. Nous avons .fait démolir cette maçonnerie, et le trou étant débouché a
en était , que l'autorisation lui fut donn ée de se livrer il telle vérification et 1\
• donné lJassage" l'eall qui ùst rcndue dans le canal, q,1i sert à l'arrosage du
tels travaux qu'il jugerait nécessaire.
• siellr Alassot. Il parait que cetle ouverture est celle dont ledit Massot, fesait
Or voici ce que constate le rapport supplémentaire. Il établit que l'ouverture
dout avait parlé le sieur Charasse ne s'est pas trouvée sur le plafond de
l'écluse, mais bien sur la paroi latérale de l'écluse, presque au niveau
d~
l'écluse; qu'elle était établie, de telle mani ère que par elle s'écha]!lait l'eau de
l'écluse ; et qu'enfin M. Teissier avait depuis un an ou deux, bouché cette
ouverture, subrepticement , et l'avait remplacée par un autre plus élevée, de
moindre dimeusion en hauteur et largeur.
Le mémoire du sieur Teissier a tellement dénaturé les faits sur tous ces
points que la citation d'une partie du rapport de M. le Juge-Commissaire devient
ici indispensable. Ce sera le cas de lui renvoyer ce qu'il a dit il son adversaires: qu'une cause qui se défend par de pareils moyens est une cause d'avance
cGndamnée,
Le rapport supplémentaire du 9 mai 1862, s'explique en ces termes :
«
«
L'enquête étant terminée, nous sommes retournés il l'écluse; mais l'opéra-
tion de déblaiement qui avait été elTectuée. nous a permis d'examiner une autre
• ouverture pratiquée dans la même écluse et dont plusieurs'témoins des enquétes
«
avaient eu l'occasion de parler . Cette ol>ve,·ture est établie dan s la pa1'oi larémle
• de L'écLuse el dt! côté de L'.st; elle est de forme rectangulaire , d'une hallleU1'
«
au trefois usage et qui se troure maintenant remplacée par un autre trou
«
placé il 22 centimètres au-dessus Je l'autre et qui a des dimensions moins con-
• sidérablès, puisqu e sa hauteur n 'e~ t que de 58 centimètres et sa largeur de 2ï .
« De plus, le t,·OUMassot actuel l'a en se rétrécissant il mesure qu'il traverse
«
l'épaisseur du mUI', tandis que l'ancien était aussi grand du côté extérieUl' que
• du rôté intérieur de la muraille.•
Armés de tous ces documen ts, de toutes ces preuves, d'une po session qui
remonte il trois siècles, et de tant d'ouvrages incorporés dans le sol, il n'a pas étb
difficile il l'OEuvre de Crapponne et à la ville de Salon de faire triompher leur
systême de prescription . et par jugement définitif du 23 janvier 1865, ils ont
été maintenus dans le droit de c1ériver durant la saison de l'été , de Pâques à la
St-Michel, les eaux réunies de la Carrig'ue et de Crapponne , pour les appliquer
'a l" Irnga
. t'on
l , et défenses ont'été faites an sieur Tei siel' de les détourner et de
les prendre pour le moulin de Châteauneuf.
C'est la réformation de Ge jugement qui e,t rl emand ée par le:; , ieur, Tei'sier et
'\m ouroux .
�-
22 -
-
~3 -
eaux de sources dont il parle sOlltla propriété de la communauté par deux cOté,
DISCUSSION.
Jitférents. D'abord ce Il'est pas aux riverains seuls qu'il accorde la faculté d'al'roser, mais à tous les membres de la communauté. Il dit: passit quilibet adaqua"e.
EII second lieu il exige encore que tou, ceux qui arroseront en obtiennent la
permissiùn des adaqualol'llnl, de licentiâ adaquatonm. q1l0s ordiuare ad adltqua1l-
Elle doit avoir tout naturellement deux parties distinctes . La première aura trait
Ilm/l
a"nualim voillmu~ per ct.,.ia", nostl·am. Tout cela est exclusif d'un droit
'econde concernera l'exécution du juaement, du 18 juillet 1861. et résumera
propre aux riverains. Tout cela présuppose lin droit différent, celui de la communauté.
le, preuves de prescription acquise et de ses conditions. Par la première , nous
Le document de 1521 met ceci dans un jour plus évident. Il se compose de
a,oud rons une r,ertaine série d'objections que le sieur Teissier a avancées ; par la
,Ieux parties; la supplique adressée par les consuls de Salon à l'Archevêque
" ,conde nous mettrons dans une telle évidence la preuve de la prescription , qu'ell€'
,l'A rles. où les faits sont racontés et diverses mesures solli citées , et les dispo-
" ce que nous appellerons les points préliminaires et dominants du procès : la
1
lie
pourra plus être GOntestée .
sitions réglementaires ordonnées par l'Archevêque d'Arles.
D'abord ce son t les consuLs lte la vïllc de Salon qui réclament et qui réclament
PREMlÈRE PARTIE .
Les points préliminaires et dominants du procès.
Ces (loints se réduisent à quatre : l ' à qui appartiennent les eaux de sourc~
Je la Garrigue et celles qui lui viennent du canal de Crapponne ; 2' à qui appartient le fossé de la Garrigue; 5' Que portent le statut de 1295, et celui de t 52 1;
~.
l'OOuvre de Crapponne et la ville de Salon sont-elles recevables dans lenr
a~tion ~
principalement tant en leur nom propre qu'au nom de toute la communauté ;
tam nominib1.ls eon<nt l'Topriis et 'l"'incipaliter quam nomi"e /wminum lolills 1'11;-
t'eni/ati•. Les réclamants sont désignés par leurs qualités publiques : ox park
j'I"uborllm Guillel",i de Nivellis, pontii R-u/fi,
CONSULES,
Ant01lii de Damo_ano
Accessori. Petri Servatoris Thesal/rm'i; , Philiberti de Cadelleto capitanei .
Ensuite ce soot les consuls qui nomment cbaque année les deux adaqualol'I'8
~hargés
de donner l'arrosage ; sownt sillgulis annis consules prœsentis loci Saloni.
deputare dllOs adaqualores , qui cl/!"am habenl ri (eslo Pascltœ
1/SIJ1«'
ad (est"'''
Beati Micltaclis der':vare a'l"as , j/lxla necessilatem inltabitantium.
§ 1. A
QUI .I.PPARTIENNENT LES EAUX DE SOURCE DE LA GARRIGUE ET C!LLES
QUI LUI VIENNENT DU CANAL DE CRAPPONNE'
En troisième lieu, les habitants sont imposés par les consuls pour cet objet.
L'acte dit en efTet en parlant des ada?'latores, modicâ jlli. datâ l'ew1liri .
1. -
Parlons d'abord des eaux de source d~ la Garrigue .
Les documents du procès, depuis la plus haute antiquité jusqn'à nos jours, I ~
attribuent li la GOffiffiunauté de Salon et en (ont la propriété exclusive de celle-ci.
En voici les preuves :
Le premier document li consulLer. c'est le statut d~ 1295 . Il prollve qu e 1f'S
La supplique demande ensuite que l'arrosage ne soit pas donné sans la l'n'ésence et le consentement, sille l'1"œsentiâ et consen.m ips01'lIm cleputatonm. , et l'ar-
chevêque prescrit dans le dispositif , que l'arrosage ne sera pas licite
~ne
ma n-
dalo et oX)Jresso consenw lJ1"edicIO,'mll deputatorllm .
Il ressort de cet acte que c'est la GOmmunauté encore qUI repurge chaque
�-
2! -
-
au née le fossé de la Garrigue et qui en paye les frais : et qu,la allll;S
Jllura expendulIlur
;'1
ellraliones prœdielonml val/ator",,, ,. en conséquence elle
, ollicite un statut qui prohibe de J'encombrer de tonte manière, en y jetant des
animaux, ânes, mulets, chevaux.
Enfin l'intitulé de ce document résume tous ces carractères en disant que ce
,ont des lettres patentes d'irrigation pour l'Il?I ivlmilé de Salon: liller," it-rigutionis
1"'0
25 -
si'll9uli~
biens de l'OEuvre pour se payer de leurs créances . MM . de Grasse et Leblanc de
Castillon sollicitent leur collocation sur les an osages qui se faisaient à Salon, en
vertn de l'acte du 15 février 1562, consenti 11 Tripoly et alors devenus la propriété de la commune de Salon. Comme membre de l'OEuvre de Crapponne, la
communauté était débitrice de ces créanciers, et poursuivie comme telle.
Un premier rapport d'experts du 24 juillet t 71 5 , estime ces arrosages à la
,miveTsitate Salon;, .
Il suit de cette pièce que c'est la communauté qui est propriétaire de ces eaux,
somme de j 5, 450 livres. Mais il y avait compris non-seulement les eaux fournies
par Crapponne , mais encore les eaux naturelles et de source de la Garrigue.
puisque c'est elle qui les distribue, qui les impose, qui nomme ceux qui doivent
la représenter dans la distribution , qui donne son eonmllement 11 l'irrigation par
Les créanciers se ravisent ; ils attaquent le rapport par le motif : • que le.
e
experts n'ont pas sépan! les eaux de8 arrosages de la Garrigue qtli appartien-
e
nent à la communauté. • Ils redoutent une revendication de la part de la
la personne de ceux quelle délègue , qu i repurge le fossé, qui fait chaque année
beauwup de dépenses pour cela.
D'ou venait lJ.!a communauté de Salon cette propriété ? De ces deux causes sans
~ommune
un nouveau rapport estimati f et la séparation des eaux propres à la communauM.
doute; premièrement elle avait dû être pri mitivement propriétaire des terrains où
naissaient les sources ; secondement, c'était elle qui avait assaini la contree en
l'reusant le fossé de la Garrigue, et qui avait retenu la pl'Opriété de ces sources
pour le plus grand avan tage de la communauté.
On sent d'ailleurs que le fait suffit ici, et que les actes précites nous montrant
la propriété de ces sources dans les mains de la commune, nous n'avons plus
rien à jnstifier.
Un nouveau rapport est ordonné. 1\ a lieu le 4 juin 17 t 6. Il constate l'opération en ces termes : • à cet elTet nous avons mesuré et examillé la quantité
«
des eaux qui viennent purement des sources, et qui se ramassent dans le
e
fossé de la Gan·igue. Sur quoi nous avons fait toutes les observations nécessaires
e
-desquelles en avons chargé nos mémoires pOlir pOllVoir «tire une jllste st}para-
e
tion des eallX lJropres à la communauté d'avec celles de Crapponne qu i se
«
mêlent dans ledit fossé de la Gm'figue lorsque nous l'avons parcouru ... •
Nous supplions la Cour de remarquer que de '293 à t 52 ' , le droit des habitants sur les eaux n'a pas changé. Ce ne sont pas les riverains seuls qui y ont
droi t. Ce sont tous les membres de la communauté. t 295 dit : quilibet pOSSit
adaquare. 1521 dit : j uxta ?!eeessitaiem inhabitantitllll , parceque les eaux sont
Plus bas il continue:
Deux siècles plus tard, nous voyons cette propriété des sources reconnu e à la
+:OInmune de Salon dans plusieurs actes solennels et authentiques .
En 17t~ les créanciers de J'OEuvre de Crapponn e se font colloquer sur le"
«
le tout par nous murement examiné, t/ison s qu,
• les eaux SCIlles pretent/Lw, l)1'ol)1"es à la
COlllllll'"C1 l1 té
vena1l t de8 so"rces ne se-
" "aient lJas sllffisantes pOU?' arrose'/' un tiers dudit t!!?'I'oir sans le secours de alles
e
il la communaulé , pour l'irrigation, et que chawn y a droit, sui vant ses besoins,
i uX/à neeessilalem inhabitantium .
de Salon qui ne devait rien sur ses biens personnels. Ils demandent
q tt'Î
y clécotLlent dtl (ossl! de Grapponne .•
Et plus bas ils termine en disant :
• CO'Jnmunau te,
«
avons déclaré que les eaua: propres à
III
de $alol1 procèdant de sources et valats confondus dans le Canal
, qui sert pour l'arrosage dudit quartier de la 'larrigtle, peuvent composer et
• faire suivant les observations ci-dessus par nous faites, le tiers des eaux qlll
e
arrosen t ledit quartier de la Garrigu,t , .. • (voir le rapport de 17 16 ).
�-
26-
-
27-
" tes . la communauté de Salon demanda l'annullation de cett e
Ces pl'em'es .al
coIl oca t·IOn, ou tout au moins qu'elle fut réduite aux arrosages du Gresc, objet
dans lequel on a jeté et conduit les eaux de la partie supérieure, parceque ce lit
de l'acte du 15 février 1562. Elle sollici ta le retranchement de ceux de la Gflrrigtle
une fuite aux eaux dont on voulait se débarraser et qu'il dispensa it de faire un
travail coûteux .
• attendu qu'ils ne sont nullement uj ets au payement des dettes de l'OEuvre de
• Crapponne, les ealtŒ qui cOlilent dans ce (osstirk la Garrigue procèdal1t ries SOll1'Ces
.. pl'opres à la c01n'Pntlonaule....
»
Le 25 avril 171i3 , la chose fut accordée a la communauté de Salon , elle ra-
de torrent était li un niveau très bas, et que lui seul il ouvrait un écoulement et
D'abord il est évident de soi que, puisque les eaux de source qui coulaient dans
ce fossé appartenaient a la commune de Salon, qu'elle seule en avait la disposition, et qu'elle les attribuait, moyennant une imposition, aux arrosants, c'est
cheta même les arrosages du Gresc, et un arrêt d'expédient consacra ces accords
elle qui en était le propriétaire. Il faut en dire autant pour l'époque où les eaux de
définitifs. (voir l'acte de 1755 .)
La propriété des sources fut donc reconnue solennellement. vis-a-vis des .:ré-
Crapponne qui lui appartenaient vinrent s'y jeter. Si le contenu était sa propriété,
anciers de Crapponne interessês a se faire payer ; vis-a-vis de la justice qui ordonna
une expertise pour les séparer; et vis-a-vis de tous les interessés quels qu'ils fussent
propriété des eaux repose toujours sur un sol qui 'sert à leur expansion .
•
A ce point de vue, tous les actes, tous les raisonnements qui on t prouvé la
11 lui contester cette propriété.
propriété des eaux à la commun~ de Salon prouvent sa propriété du fossé.
Depuis lors jusqu'a ce jour personne ne la lui a contestée et la destination de
ces eaux n'a jamais changé.
U. Parlons maintenant des eaux de Crapponne qui se jettent dans la I;arrigl<e,
Un mot suffit quant a ce, Elles étaient primitivement la propriété d'Adam de
Crapponne. Par l'acte du 15 février 1562 il les vendit et transporta a Tripoly . ..
De celui-ci ou de ses hoirs elles ont passé sur la tête de la commune de Salon ;
celle-ci, on vient de le voir, les a rachetées de MM. de Grasse et de Castillon, elles
sont a elles aujourd'hui sans contestation possible.
En rêsumé, ces deux espèces d'eaux sant a la communauté de Salon ; elles sont
sa propriété , et elle les affecte exclusivement a l'irrigation, durant l'été, de toutes
les propriétês du territoire, moyennant un prix qui lui est payé par les arrosants ,
11 qui elles les vend et les céde annuellement.
§. Il.
A QUI APPARTIENT LE FOSSÉ DE LA GARRIGUE ·
elle ne pouvait lui être reconnue sans le contenant; l'un emporte l'autre. La
Il n'y a pas même ici à. parler des riverains, ni à le leur attribuer. La preme
qu'il n'était pas à eux. c'est que les eaux ne leur appartenaient pas, et que leU!'
droit aux eaux n'était pas du à leur qualité de riverains, mais bien et uniquement
à celle de membre de la communauté . On se souvient de css mots généraux et
absolus des titres : qllilibel 110s.it adaq"a1'e. J"xla necessitalem inhabitantill1l'.
Une seconde circonstance prouve encore que le fossé est à la commune de Salon;
c'est l'existence des ouvrages nombreux de dérivation pratiqués sur ses bords pour
l'irrigation et pour l'amenée des eaux de Crapponne. Quel est le propriétaire qui
les eut soufferts ~ qui n'aurait pas réclamé ~ qui aurait hlÎssé ainsi grever sa pro.priété de cette foule de servitudes? cette situation singulière dénote donc que le
propriétaire du fossé, et de ses bords. c'est précisément celui qui a eu intérêt à
faire ces ouvrages. oul1 les laisser pratiquer par les arrosants. Ce propriétaire, c'est
la commune de Salon.
Une pièce versée au procès par le sieur Teissier, nous apprend que l'un des
Nous distinguerons ici la partie su périeure de ce fossé, de la partie inférieure.
ouvrages les plus importants pratiqués sur le fossé pour yamener les eaux de
On se rappelle que la dernière n'est pas autre chose que) e lit de torrent du Tal{lga1·d .
Crapponne, est dû à la commune de Salon qui l'a construit. C'est la gorgue ou
�•
-
28-
-
aqueduc en taille qui traverse le fossé au pont d'Avignon , lettre E, et qui fournit
la plus grande masse d'eau de Crapponee à la Garrigue. Parmi les pièces
visé~s
!lans l'arrèt de 177 6, ont lit celle-ci : • l'extrait de la délibération prise par le
• conseil de la communauté portant établissement de la gorgue ou aqueduc en
• taille près le pont d'Avignon
dll
2 septembre 1706 .• Puisque cet ouvrage im-
portant a été fait par elle, il est vraisemblable que les antres ont été faits par
elle. ou qu'elle les a imposés aux arrosants .
29 -
Après 1521, alors que les moulins de Châteauneuf et de la Cauquière eurent
été construits, nous voyons la commune se décharger rI 'une partie de ce recurage
sur les moulms, parceque ceux-ci se servent des eaux pendant les six mois d'hiver ,
Elle fai t ce recurage dans les proportions suivantes : t'un tiers pour elle; 2' un
lIers pour le moulin de Châteauneu[: 5' un tiers pour la Cauquière. Les anciens
comptes rle la commune de Salon sont pleins de documents à cet égard . Il serait
trop long de les rapporter ici : on les trouve mentionnés dans un ancien mé-
Remarquons que cette œuvre importante de l'aqueduc en pierres de taille a
moire qui fut rédigé pOU l' contraindre le propriétaire du moulin de la Cauquière.
été faite et délibérée avaut que la commune de Salon ne fut devenue propriétai re
à payer sa contribution. (Voir le mémoire) . Mais c'est toujours la commune
du moulin de Châteaneuf. Elle n'acquit le moulin qu'en 1708 d'un sieur Honoré;
qui a la haute main , qui fait repurger, et qui fait payer la part contributive
elle fit donc 1'0uITage en qualité de propriétaire du fossé.
des moulins. Ceux-ci profitant du fossé devaient une part dans le recurage.
On peut joindre encore à la circonstance des ouvrages établis sur le fossé
Quatrième et dernière preuve: le fossé de la Garrigue existe en 1295 , en
pour les arrosants des eaux naturelles de la Ga,.,';gue et des eaux de Crapponne,
\565, en t 521 et ces moulins n'ex istent pas encore. Ils ne sont pas nommés
une certaine nature d'ouvrages établis sur le même fossé au profit du canal des
dans ces actes . 1\ n'y a pour eux, ou relativement à eux, aucune règle. Les irri-
Alpines construit en 1783.
gations sont en pleine vigueur . A qui donc le fossé doit-il appartenir dès l'ori~ine?
Le rapport et le plan des lieu:t nous les font connnaitre aux points H, I, p, R
et S du plan.
Ce ne peut être aux propriétaires de mou lins qui n'existent pas.
De plus en t 7 '16 et 1755 , quand la commune de Salon se fait publiquement
On comprend très bien que la commune de Salon ait soufIert ces ouvrages pra-
après deux rapports solennels et après procès, déclarer et reconnaître proprié-
tiqués pour le supplément d'irrigation fourni aux babitants par le canal des Alpines:
taire des eaux , pourquoi les propriétaires des moulins se taisent-ils? C'est qu'il<
mais, vis-à-vis de tout autre, ces ou vrages viennent démontrer encore plus qu'il
ne sont ni propriétaires du fossé, ni propriétaires des eaux.
n'y a pas d'autre propriétaire du fossé que celui que nous indiquons. Quel est donc
Que dirons-nous maintenant de la partie inférieure du fossé de la Ga"'ig.u> .
Ta/agUl·cl.~
ce propriétaire singulier qui soufIre ainsi que tous les canaux d'irrigation emprun-
de celle qui est composée du lit naturel du torrent de
tent cette voie de la Carrigue pour arroser, et qui garde le plus profond silence ~
sieur Teissier aura-t-il le courage de dire que ce fossé est 11 lui ' ici il y aura
A aucune époque, les propriétaires des moulins n'ont demandé la destruction de
des réponses spéciales à lui faire et le rapport descriptif, ainsi que le plan . par-
ces œuvres. Ils n'en ont donc jamais eu la propriété .
leront pour nous et contre lui .
Troisième preuve de propriété pour la commune de Salon: le rewrage du f'ossi .
Là encore le
Le moulin de Cbâteauneuf est parfaitement. distinct du [ossé , Il en est séparp
et distingué , 1 par un canal d'amenée dont la tète A et B est marquée sur
0
En t 52 l, nous voyons par les lettres paten tes de l'Arcbevêque, ce l'ecu rage
fait par la commune. La supplique, où nous voyons figurer le Tr~sorieT , se plaint
de ce que ce recurage est très coûteux ; ptura expend'U1Ittlr in etlra/ione prcemissorum valJ.akJrum singutis anni• .
le plan ; 2' par un canal de fuite d'une longueur à peu près égale à celle du canal
d'amenée. Celui-ci a t 43 mètres de largeur ; l'autre en a tout autant. Ces dem
canaux spéciau:t ont été évidemment construits pour le moulin . Ils en forment
�-
50-
-5i -
une dépendance néc saire, un accessoire obligé et de toute certitude ils sonf
Tou~ les auteurs qui ont reproduit cette doctrine l'ont fait dans le même sens.
la propriété du sieur Teissier. Mais peut-il en dire autant du fossé de la GClr-
M. le président Cappeau, code rural. v' moulin, qui la résume, dit : • la p,.ise
riguB, ou SOIt de la continuation du torrent de Talagard ' Non sans doute ; il Y
• d'eau et le canal sont partie intègrante du moulin et appartiennent à son
aurait absurdité
a le
soutenir. Le fossé a préexisté au moulin; son assiette et
son lit ont été creusés par la nature. Ni le sieur Teissier, ni ses auteurs ne l'ont
" propriétaire. •
çréé. On voit leurs œuvres ; c'est une dérivatioll faite de main d'homme; c'est
Mais jamais on n'a étendu cette doctrine au-delà., etjusqn'au cours d'eau SUl'
lequel porte la prise.
un canai de fuite , également fait de main d'homme. Avant la dérivation , après
Nous en accorderons le bénbfice au sieur Teissier , s'il le veut; mais nous ne
le can al de fuite , comme durant tout l'intervalle du fossé, mesuré du canal d'a-
pouvons pa., le lui accorder au-delà de ses termes. Il sera donc s'il le veut,
menée à l'embouchure du Gallal de fuite dans la Garrigue, rien n'est l'ouvrage
censé propriétaire de la prise d'cau et de son canal
du propriétaire du moulin . JI n'a fait que profiter de l'état des lieux pour y cons-
et l'autre! au point marqué A B sur le plan . Sa propriété ne commence donc
truire son usine, comme elle y est établie. Donc ici pas plus que dans la partie
que là, en dehors du cours d'eau. Ce point est bien la lJI'ise d' CUl'; le r,anal qui
supérieure le fossé de la Gar-rigue n'appartient au sieur Teissier.
suit est bien son canal; le plan l'appelle canal d'amenée; nous y joignons encore
d'amen~e.
Or où sont rune
A défaut le sieur Teissier invoque une présomption d'après laquelle le [ossé
le canal de (llite. Mais hors de ces limites, même dans la doctrine d'Henrys, il
uevrait être réputé la dépendance du moulin, et ~on accessoire obligé. Mais ic.i le
n'y a plus lie présomption . Comment donc le sieur Teissier en invoquEl-t-il une
'ieur Teissier commet la confusion la plus grande qu'il soit possible. JI confond
pour toute la partie du cours d'eau de la Ga,..,.igue, où il n'a aucun ouvrage,
deux chose- distinctes : le cours d'eau de la Garrigue sur lequel la dérivation et
aucune prise d'eau et qui lui est entièrement étrangère, et qui n'est pas et ne
le canal de son moulin sont établis et cette même dérivation et ce canal; et il
peut pas être appelée son canal' On déclarerait absurde un propriétair'e de
applique au premier, ce que dans l'ancienne jurisprudence les auteurs avaient
moulin qui, parcequ'il aurait une prise sur un cours d'eau, se déclarerait pro-
admis pour le second seulement.
priétaire du cours d'eau tout entier. Que le sieur Teissier y prenne garde , il est
En eITet le premier auteur qui ait parlé d'une présomption en ces matières ,
Henrys, avait eu soin de réduire sa théorie à la prise d'eau du moulin et au canal
qui, de la prise amenait les eaux sur les roues . JI disait: • comme un moulin ne
• peut être moulin 8!tns sa prise (l'ea!l, il s'ensuit aussi que la 1Jrisc d'cati en est
• une partie nécessaire, une partie intégrante et presque la principale, puisqu e
• sans elle le moulin serait inutile . D'où il faut pareillement inférer que le béaI
• Otl
canal qui conduit l'cati au moulin n'est pas seulement un simple accessoire
• ou dépendance, mais plutât c'en est une portion inséparable, et qui prise
• avec les biiliments ne fait qu'une même chose, par conséquent que celui qui
• est propriétaire du moulin l'est aussi du béai ou canal qui conduit l'eau .
• (Henrys. recueil d'arrêts. tome 2, liv. 4 question 149.) •
dans 'une position pareille . Sa prétention produit le même effet.
Nous ajouterons maintenant, pour être complet, que la théorie d'Henrys, restreinte comme nous venons de le montrer , n'a pas même été admise sous la législation moderne par les auteurs les plus autorisés et dont les opinions font loi
parmi les juristes. M. Demolombe t. 1. p. 157 et suiv .. des servitudes. notamment, le comhat énergiquement pour la présomption de propriété du canal
d'amenée, quand ce canal traverse des fonds étrangers. M. Daviel est aussi de ce
sentiment, t. 2, n' 855 et suiv . Nous n'avons pas besoin de ce détail, notre premier argument nous suffit.
Enfin ceux-même qui admettent l'opinion d'Henrys pour le cantJ! d'Amellée,
�-
52 -
55
déclarent que ce n'est là qu'une présomption simple qui céde même à des pré,omptions contraires. Cassation 16 août 1858 (Sirey 1858-1-i 64 . Demolombe
1.
1. p. 159
Il''
150 , 15 t. )
d'Henrys ne porte jamais sur le cours d'eau, mais uniquement sur le canal
tf'amenée, et qu'ici Teissier en reçoit tout le profit.
QUE PORTENT L~ STATUT DE
q(~ibus IIturitur duntax at ortolani. Ainsi l'eau est seullmlent pour les vergers et
set<lement pour les jardins. Que reste-t-il donc en dehors? et. comment les moulins
Mais nous n'al'ons pas même besoin ici de ce principe, puisque la présomptioll
§. III.
eaux sont affectées seulement aux jardins : exceptis diebus vellcris et sabbati
1295
ET ' CELUI DE
1521
Al! SUJET
DES IRRIGAl'l OI'\S A F.\InF. DES EAUX NATURELLES DE LA GARRIGUE?
peuvent-ils y tr~lUver leur place?
Nous avons déjà dit qu'ils ne sont pas nommés dans ces actes, même pour la
saison d'hiver. Comment veulent-ils avoir eu une part dans la saison d'été?
Ajoutons que l'usage a toujours entendu les documents de 1295 et 152 l ,
comme nous venons de l'indiquer. Les jugements rendus
p~r
les divers ju ge~
Au milieu des erreurs et des inexactitudes commises par le sieur Teissier su r
de paix qui se ont succédés à Salon , et que nous avons l'apportés plus haut, en
sont la preuve la plus convaincante.
œ point, il faut faire un peu de lumière et de jour ; c'est le moyen de les dissiper.
Peu importe donc que durant la saison d'éte, la GaTliyl<e se remplisse des eaux
Un fait est, à ce moment, certain ; c'est que ces statuts accordent ~ tous,
de Crapponne ot des eaux de source. Le statut repousse les mouliniers; ils n'on t
l'iverains ou non, le bénéfice de l'irrigation. C'est la conséquence de ces mots :
rien ,à prendre dans la Garrigue. La commune de Salon peut donc les en ex-
quilibet possif. adaqua7'e du statut de 1~9·5.
c1ure.
Cela résulte aussi des termes de l'acte de 1521 où le caractère de l'irrigation
l'St précisé et où il est dit que la dérivation est faite j llxta neressitatem in/Utbitallh,,,,, suiraut les besoins de l'habitation enlierc.
§ 4.
LA COMMUNE DE SALON ET L' OEUVRE DE CRAPPONNE SONT-ELLES
RECEVABLES DANS L'ACTION INTRODUITE ~
Qu'en est-il maintenant de l'affectation absolue et exclusive des eaux pendan t
les six mois, de Pâques à St-Michel, à l'irrigation ~ la disposition est aussi précise
L'affirmative ne sau rai t être le moins du monde douteuse,
que possible, soit dans le statut de 1~95, soil dans celui de 1521 . Dans
D'abord en ce qui concerne la ville de Salon, plusieurs motifs le prouvent. Le,
le premier, les eaux ne peuvent être employées que de licentiâadaqllaton<m . 0 ..
eaux et le fossé de la Gm'rigue lui appartiennent; elle peut donc s'opposer à ce
ceux.-là ne sont chargés que de la donner aux arrosants . Donc tout autre
que le sieur Teissier les prenne sans droit. En second lieu le statut de j 295 et de
usage est exclu. Quels sont les usages autorisés ~ l'irrigation des jm'din s, des
1521, défendent â tous autres qu'aux arrosants de les prendre et de s'en servir.
"rl,res, des vergus, hortos, a"bores, vi"idaria et alia conSlleta , c'est-à-dire et les
La ville de Salon peut donc invoquer ce statut et le faire appliquer.
Quant
~L
l'OEuvre de Crapponne, elle est recevable il exiger que la commune
autres choses qu'on a coutume d'arroser. On ne rencontre pas nn mot qui permette
un autre usage durant ce temps .
de Salon ue laisse pas la condition imposée pal' Adam de Crapponne dall,
Le statut de 1521 est encore plus précis, s'il est possible. La suplique rapellc
l'acte du t 6 iévrier t 562, inutile et vaine. Tripoly n'a acheté les eaux ùe
le' fonctions des adaquatorC8 de Pâques à St- Michel, chargés de distribuer j'eau.
Crapponne que sous la condition qu'elles ne selont employées qu'à l'irrigation ,
et elle ajoute qu'i Is le font seulement pour l'arrosement des vergers; ethoc SOlÜIll
et qu'elles ne servirai0nt pas à faire concurrence au moulin des quatre tournant
<Id adaqllUtio.,em viridarion",, ; saur et excepté les vendredis et samedis où le&
établi à Salon et possédé en 1562 par Adam de Crappoune.
�-
;)4 -
-
55 -
L'OEurre générale de Cl'apponne a l'obligation de veiller il. J'exécntion de tontes
les conditions de cette naturc, qui tendent il. maintenir le canal de Crapponne
l " sa destination primitive; elle a la supérintendance sur tous les canaux où
l'eau de Crapponne coule. C'est la disposition formelle de l'acte du 20 octobre
l an~
~
1 . PREMlEI\ FAIT A PROUVER : QUE DEPUIS PLUS DE Til ENTE .I.NS
LES EAUX DE CRAPPONNE SONT JETÉES DANS LA GARRIGUE .
15i l , constitutif de l'OEulTe , homologué par les arréts du Parlement de Pro-
Su r ce point le système de l'appelant a été d'en finir au pl·us vite de celte
renee et loi appliquée sans contestation depuis lors . Ce point de droit est reconnu
Ilar la doctrine et par les arrêts de la Cour de Cassation (voir Estrangin sur
v~rité , en la reconnaissant page 10 et en passant outre tout de suite aux objections. Mais il est bon de voir comment ces eaux ont été jetées dans la I;ur-
Dubreuil t. 2, p. 480 et arrét de cassation du 20 janvier 1825 .)
riyue. La permanence, la régularité, et la publici té des moyens pris pour jeter
La Yille de Salon est recevable aujourd'hui à. poursuivre les contrevenants,
ces eaux, sont des circonstances importantes. Elles s'unissen t aux autres preuves.
l'omme elle l'était en 152 1 , lorsque les consuls sollicitaient de l'Archevêque
Elles les font déjà pressentir. Car on n'aurait pas pris tant de peine pour rien.
,rArles, la confirmation du statut de 1293 et quelques additions ases dispositions .
Le mémoire du sieur Teissier dit donc sur cette preuve, page 10, ces mots
Enfin l'OEurre de Crapponne et la ville de Salon sont évidemment recevables
11 formuler le système de l'acquisition de leurs droits par suite de la prescription .
significatifs: •
tOtl S
les témoins répondent u(fir:nalivement.
»
Prenons acte de
œt aveu qui nous dispense dc reproduire les témoignages des enquêtes.
LI Y a même ici chose jugée , puisque malgré les conclusions du sieur Tei5sier , ce
Nous ajoutons maintant que le rapport descriptif et le plan, et notre exposé
jugement a déclaré la demande en preuve de la prescription acquise, les faits
de fait, font connaître le nombre des canaux de Crapponlle conducteurs des eaux ,
côtés, pertinents et admissibles, et que de plus le jugement a été exécuté par lui .
la nature des ouvrages pratiqués pour les amener el notamment l'aqueduc en
pierre de taille qui traverse la Garrigue au pont d'Avignon et la marlellière E,
destinée à fournir les eaux. S'il faut en croire la pièce déjà citée par nous , ce
serait en 1706 qu e cet aqueduc aurait été construit par la ville de Salon.
DEUXIÈME PARTIE .
On aura aussi remarqué le nombre des canaux conducteurs qui sont si tués
sur tout le parcours de la Ga,.,·;gur. sur le bord Gauche.
Après l'examen de ce que nous avons appelé les points préliminaires et do-
On n'oubliera pas non plus que le rapport du 4 juin 171 6, par nous cité plus
minants du procès , il faut reyenir à la preuve de la prescription ordonnée pal'
le jugement du 18 juillet 1861.
haut , mentionne et rappelle en dét;ül ces canaux conducteurs , créés par la
main de l'homme et qui viennent aboutir 11 la Ga,·rigtle.
Le tribunal par son jugement définitif du 24 janvier 1865 a déclaré que
cette preuve avait éte complète.
On se souvi endra enfin de l'acte du 16 févri er 1562, qui peut faire penser que
c'est.u moins à cette époqu e que les eaux de Crapponne ont été conduites et jetées
On verra que les objections imaginées par le sieur Teissier pour la combattre
ùans la Gan·iglle, si déjà elles ne l'avaient pas été par Adam de Crapponne IUI-
n'en obscurciront ni la clarté, ni l'éclat. Le sieur Teissier rearettera lui-même
même; cal' c'est on 155!) qlle les eau.\: dérivées de la Durance par le grand canal
les allégations téméraires qu'il s'est permises et qui seront à bon droit relevées
contre lui
y furent permanentes,
~
POUl' détruire ce fait et les conclusions que l'on e t en droit d'en tirer , le sieur
�-
36 -
-
57 -
Tel:>sier oppose d'abord que peu importe ce jet des eaux; qu'il ne donne pas
L'appelant objecte encore qu e nous n'avons prescrit que le droit de jeter, d'apriJ,
le droit de prendre les eaux de la Ga·rrigue, ni même celles de Craponne, une
la ma~ime tant"1Ii Il/'escriplt<m qUlmt"m pOS8CSSJl111 . Pour le moment et sur cette
.
fOIS
. . . qu "1
pOUl' cela des ouvrages qui eussent séparé ces eaux ;
Jetees,
1 'audrait
l,
Q'Iua illg,'essa 'IIletl711 (und"", .nea est, c'est
qu ,autremen t d'ap' l 'es' la maxime
,
première preuve, nous n'en demandons pas davantage. Voilà un aveu précieux .
lui Teissier qui aurait le droit de les prendre.
de dévier toutes les eaux réunies . Notre preuve ne peut marcher que pal' prl)gl'ession.
Ainsi donc l'appelant se dit propriétaire du fossé de la Gm'rig!le. On a
VlI
Tout à l'heure nous vous prouverons que nous avons de plus prescrit le droit
plus haut qu'il ne l'était pas et qu'il ne pouvait pas l'être; qu'il était même
Enfin il prétend que l'OEuvre de Crapponne l'eut annexer le fossé de la Gan'igue
absurde qu'il se présentât comme tel. Notre démonstration sur ce point lui en-
il son œune et le soumettre à ses règlements. L'adversaire se trompe. L'OEuvre
lève donc son argument.
de Crapponne et la ville de Salon, l'une pour les eaux sorties de son canal. l'autre
Mais nous allons plus loin. et nOlis lui disons que le jet des eaux de Crapponne dans la Ga.'rigue est un point très important ; qu'il se lie forcément avec
les autres mis en preuve ; que pour pouvoir prescrire le droit de dériver les
eaux jetées, il faut commencer par établir qu'on les a jetées ; qu'il a donc tort de
dire li ce suj et ces mots qui ne signifient rien juridiquement : pet! impo,·te.
pOUl' celles-là, comme pour celles de la Gan·igue. veulent maintenir à l'irrigation
durant les six mois d'été les caux qui lui sont exclusivement affectées .
Pour cela ils ont plusi eurs arguments. Les premiers sont exposés dans les
points préliminaires plus haut traités; le second est dans la prescription acquise
et dans une possession qui se perd dans la nuit des temps . Voilà tout le procès
et il n'yen a pas d'autre .
Notre prétention a diverses branches. La première consiste li dire que depuis
plus de trente ans nous avons versé nos eaux; que par suite nous avons acquis
fe droit de les verser ; que nous avons acquis cette servitude sur la Ga,,,,igtte,
et qu'on est obligJ de souffrir cette servitude. Quant à la seconde, qui consiste
à dire que nous avons également prescrit le droit de deriver ces mêmes eaux ; ell e
viendra tout-a-l'beure ; nous n'y ferons pas défaut. Mais il n'est pas rationel de
dire que la première preuve fai1e est oiseuse et inutile; elle est au contraire
le fondemen t et l'origine du droit que nous prétendons avoir prescrit.
Nous en dirons autant des ouvrages que le sieur Teissier prétend que nous
aurions dû faire pour séparer les eaux de Crapponne de celles de la Gm",igtte .
lei même notre adversaire oublie le système qu'il a à combattre. Nous prétendons
dans la seconde preuve, que les eaux de Crapponne réunies à celles de la Garrigue
ont été déviées par nous également pendant plus de trente ans. Ce n'est donc pas
~ 2. DEUXIÈME FAIT A PROUVER: QUE DEPUIS PLUS DE 30 ANS LBS EAUX
:'l
RÉUNIES ONT ÉTÉ
déviées
AU PROFIT DES ARROSANTS , PENDANT L'ÉTÉ,
AU tlOYEN D'OUVRAGES EN MAÇONNERIE.
Nous avions ici deux choses à prouver: 1 la déviation depuis plus de trente
0
ans des eaux réunies au profit des arrosants ; 2' la déviation au moyen d'Ollnages en maçonnerie.
Nous rapportons aujourd'hui cette double preuve; on va le voir: et nous répondons il quelques objections présentées.
N' 1. La déviation depuis Illus de 50 ans des eaux /'é",ûe
al!
'P/'ofit
des a!Tosanls, pendant l'été .
des eaux de Crapponne séparées de celles de la Garrigue, qu'il s'agit, mais au
contraire des eaux réll1lies. A quoi bon des ouvrages pou r les séparer ?
Nous l'établissons ici , par l'intitulé de notre paragraphe, le texte précis dn
�-
38 -
39 -
jugement. Nous n'arions pâs à prouver, comme le suppose constamment le mé-
, fondues sont prises sur la rive droite par les propriétaires al'rosants au moyeu
ulOire du sieur Teissier , et très gratuitement, la division des ea ux , mais leur
" de prises en forme de trous de différentes formes, et qui la plupart sont éta.'Jli,
r1~v iatioll,
au profit des arrosants pendant l'été.
La preuve en est fournie au procès par plusieurs pièces authentiques, indé-
en maçonnerie. Les arrosants ont pour l'usage de ces eaux la priorité sur les
, mouliniers .»
pendamment mêmes des enquêtes et contre-enqu êtes. Nous voulons parler des
Le deuxième témoin dit : , del'tI'is un temps immemol'ial l'œuvre de Crap-
l'apports du 24 juillet 1715 et
«
f. juin 1716 , dont nous avons déjà fait connaître
l'objet et la disposition. A cetle rpoq ue la rille de Salon était déjà. depuis 'Plus d'ull
, ponne deverse ses eaux dans la GUI'l'igue, et il existe sur ce cours d'eau des
, ouvrages en maçonnerie établis pour l'usage des arrosants. ,
siècle, en pleine possession de déril'er au profit des arrosants ces eaux réunies .
La preure en est dans ce fait que dans la collocation l'apportée par MM. de Grasse et
Leblanc de Castillon, on avait compris les eaux de Cl'apponne, et celles de la
r;an'igue et que la Yille de Salon fil distraire de la collocation les eaux de la
(;an'ig ue, comme lui étant propres et personnelles, ayan t pour elle une toute
autre origine et ne procédant pas des eaux de l'œul're de Crapponne. La preuve
est encore dans celte circonstance fournie pal' l'acte du 25 aoû t 1755 , en suite
<' Il
"U
quel la \'iIle de Sal0l1 l'acheta de MM. de Grasse et de Casti llon, les eaux
lenues de Crapponne .
fi faut remarqu er au surplus que ces eaux avaient été comprises dans ces
rapports comme des eaux servant à l'arrosage,. qu'elles furent estimées sur
~e
pied et comme lelles. en face des actes qui établissaient le prix qui en était retiré
par la commune de Salon . Toules choses qui rendent insusceptible de doute la
Le quatrième témoin : , depuis
, sont versées dans le canal de la Garrigue pour le besoin des irrigations, et je
• crois que les arrosants pendant la saison d'été surtou t doivent prendre les
• eaux de préférence et à l'exclusion des propriétaires de mouli ns .
Le sixième témoin : , il est à. ma connaissance que depuis plu3 de 50 (ms
• suis moÎ-même propriétaire d'un terrain inférieur au moulin de Châteauneuf ;
• pour l'irrigation de ma propriété je prends à l'endroit appelé le trou M(lSsot
" (point D du plan) les eaux qui ont été versées dans la Gvrl'igue l'ers le pont
• d'Avignon et qui proviennent du canal de Crapponne. Ma prise d'eau consistr
• en un ouvrage en maçonnene, et connu , ainsi que je l'ai dit sous la dénomi, nation du trou de Massot ...•
Le septième témoin : "je possède une propriété dans le voisinage du château
de Richebois; pour arroser, je prends de l'eau au canal des Alpines, ou à défaut
Or , on comprend très aisément que ces eaux ainsi rachetées pal' la commune
C'est au surplus ce qu e les enquêtes démontrent. Nous commencerons par
l'enquête faite par les demandeurs. Voici ce qu'elle renferme quant à ce :
Le premier témoin de l'enquête dit: " il est il ma connaissance qu e depuis 'Pl".
, de 50 ans, les eaux de Crapponne dérivées du canal principal sont versées
, dans la Garrigue au moyen de rigoles qui viennent aboutir à la rive gauche
, de ce cours d'eau ; que les eaux de Crapponne et de la GaI'rigue ainsi con-
l e~
, eaux du canal de Crapponne ont été jetées dans celles de la Garrig ut. J(,
preul'e de la dériratioll de ces eaux réunies au profit des arrosants.
aient continué de serl'ir aux mêmes usages jusqu 'à ce jour .
tem.ps imn,l!morial les eaux de Crapponne
lin
, dans celui de la Ca''1'ig ILC, qui reçoit les eaux de Crapponne; dans la saison
" d'été, j'use de l'arrosage, sans me préocc.uper des besoins des usiniers infé, rieurs, et de manière à absorber les eaux de la Garrigue, si elles sont néces• saires pour l'irrigation de mon fonds ...•
Le huiti ème témoin : • deplds 1111 temps immémorial les eaux de Crapponne
" tombent dans le fossé de la Gat'rigue , et de Piques à St-Michel, elles sont la
«
propriété exclusive des arrosants . ,
Le neuvième témoin : " depuis
UII
lemps immémorirtl les eaux de Crapponnt'
,
�-
40-4 1 -
sont mêlées il celles de la Garrigue. En ce qui me concerne, j'en fais usagù
o
• pour l'irrigation de mes propriétés, elles sont dérivées au moyen de trous pratiquès dans les berges de la Garrigue, . .
o
• Pour dériver les eaux j'ai une martellière qui se compose d'une planche
»
Le dixième témoin: ,de tout te"'l's les eaux de Crappo nne ont été jetées dans
• la Garrigue où elles sont prises par les arrosants pour l'irrigation de leurs fonds.
Elle sont quelquefois insuffisantes et se trouvent ainsi absorbées entièrement
o
• j'arrose avec les eaux mêlées de Crapponlle it de la GmTigue et de Boisgelin .
«
, demeure dans le canal de Boisgelin . Quant aux eaux de la GmTigue, je le;:
, prends au moyen d'un syphon .•
La prorogation d'enquête et les deux nouveaux témoins qui la composent toutp
• il l'exclusion des usiniers. L'eau est dérivée par des martellières transversales . . •
Le onzième témoin : • de tOllt temps les eaux de Crapponne ont été mêlée.,
o
o
je les prends dans le fossé de la Ga1'l'igue au moyen des trous pratiqués dans
• les berges, d'autres usagers se servent pour barrer le co urs d'eau de mottes
• Je gazon . Près des cyprès cie M. Bounaud, il y a des montants en maçonneri e
o
sur lesquels on peut appuyer des planches transversales .
«
Le douzième tëmoin . • dl:puis (Ol't longtemps dans ma famill e nos propriétés
• sont arrosées des eaux de la Garrigue mêlées à. celles de Crapponne, nous
• avons toujours pris les eaux au moyen d'ouvertures pratiquées dans la berge
o du canal, »
Le treizième témoin:
0
j'ai des propriétés qui sont arrosées avec les eaux
• mêlées de Cl'apponne et de la Garrig ue et même de Boisgelin ,
o
entière, confirment ce qui précède, et y ajoutent des détails très curieux.
Le premier témoin dit: , Les arrosants voisins de la ville de Salon ne se
dans le fos é de la Gm'riglle avec celles des sources de Ricbehois.
• Comme arrosant, je me sers de ces eaux pour l'irrigation de mes propriétés ,
»
transversale mobil e, que l'on place à. volonté entre deux pierres établies ;1
o
servent pas des eaux de la Gm'rigue supérieure, ils prennent l'eau de Crap-
«
ponne il la martellière du pont d'Avignon (lettre E du plan) et la jettent, à CP
«
point dans l'écluse du moulin de Châteauneuf. Mais afin que cette usine ne
«
puisse s'en servir au préjudice des arrosants, j'avais soins au commencement
«
Je l'été de déboucher ull e ouverture placée à la partie inférieure de la paroi
«
de l'écluse et qui avait ll0"" effet de mettre cette ec/.t,~e complètement à sec. Le
o
trou qui est aujourd'hui bouché est celui que l'on aperçoit encore au-dessou,
«
de celui de M. Massot. A l'époqu e où j'étais eygadier, le trou supérieur qUl
«
sert actuellement à. M. Masso t n'existait pas, il faisait usage de l'olwe,·tll,"
o
inf. riel,re, la même qui 1IOUS servait à dessécher t'écluse. Cet orifice était com-
«
piètement engagé dans la vase. Il fallait l'écarter pour le découvrir. On le
• houchait au moyen d'u ne planche qui glissait dans des rainures, la fermeture
Le quinzième témoin: • il Y a sept ou huit ans que je ne fréqu ente plus le
, était complétée au moyen de morceau de sparterie ou d'herbes. Quelquefois
quartier de la Can·igue . Mais à. l'époque ou j'y allais plus souvent. j'ai tou-
, pour enlever la planche, il fallait la briser, Pendant les cinq ans que j'ai élé
• jours vu les eaux de Crapponne se del'erser dans le cours d'eau et servir tant
«
eygadier (de 1851 à.
«
il l'irrigation qu 'au mouvement des usines, à cette époque la culture marai-
, la saison des
«
chère élant moins dévelopée qu"a présent, les arrosages absorbaient moins
«
185~ ),
j'ai eu soin que ce trou restitt ouvert pendant toute
arrosa~es. Pell dant tOlite cette saison des lll'rosarltS l'écluse ttait
donc toujolw~ à sec 1Jendallt cette période, et le meunier qui s'appelait Louis
• d'eau . Les arrosages avaient la priorité cl' IIsuge su,' les llainiers. Mais il en
, Bernière , m'avait dit que ne pouvant faire trayailler le moulin , il se livrait à une
• restait toujours quelque peu pour ceux-ci , qui pouvaient de tetlll)S en temps
faire tourner leurs moulins... »
• autre industrie et vendait des fruits au marché. Lorsque les arrosan ts ayanl
Le seizième témoin : deplûs 4-0 am que je suis propriétaire dans ces contrées,
0
«
droit à. la martellière du pont J'Avignon ne la fermaient pas il temps, et lai '-
• saient ainsi inutilement arriver l'eau clans la GarrigllP inférieure , j'al'ai soiu
«
de dresser des procès-verbaux .. . .
�-
Le deu:u eme témoin reprudui t les mêmes détails; pour cette raison , nous ne
~3 -
• rant le cours dé la Garrigue j'ai vu quelquefois des planches transversales éta« blies par les arl'Oants. »
,'lI erons pas textuellement sa dépos1 tion.
Le treizième témoin : , il Y a 2/. ans que je suis entré comme meunier au
Si jamais preure a été fournie d'une manière complète et éclatante en justice .
"'t'$t bien celle-ci.
Nous ajoutons maintenant qu'elle est corroborée encore pal' les propres té-
«
moulin de Châteauneu f, et j'y ai passé deux ans, auparavant j'avais passé 18
«
ans à celui de la Cauquière. Ces mou li ns marchaient hiver et été , mais pal'
«
éclusées . Quelqu efois pendant les châleurs l'eau manquait complètement. Nous
moins que le sieur Teissier a fait entendre dans sa contre-enquête et dans la
, allendions alo,'s six helll'es du soi,· ct 'tIne {ois celle hetl"e arrivée , nous allio ns
prorogation qui l'a suivie.
«
boucher les trous des aI'I'osants. Daus la jOt!rnée nOlis laissious les arrosan t.
«
se sel'vi!' librement des
Yoici quelques détails qui le prouvent.
ec"•.t . Tel est l'usage que j'ai touj ours suivi sans qu 'il
, ait donné li eu à aucune réclamation.
Le 2' témoin de la contre-enqnête dit : • il Y a 66 ans que je vois fonctionn er
le moulin , hi l eI' et été; quand l'eau manquait au moulin , les meuniers allaient
• boucher les Irotts d'arrosage dans la pm·tie m])~rieu.re du cours de l,t Ganiyue;
• les al'I'osants de cette pm·tie dt! COIII'S (l'eat' débouchaient ces (mus, (do,'s qu'ils
• .,'apercevaient de letU' {el'lnelw" cl qtle l'eal' let.,. élait nécessaire. Si
o. tl
con-
• (l'a;''e ils eu avaient de reste, -ils la laissaie" t arriver at! moulin . .. .. Ma pro-
Pour comprendre toute l'utilité de ce témoignage en faveur de l'OEu vre Je
Crapponne, il faut que la Cour sâche, qu'en ver tu d'un arrété préfectoral du 1ï
avril 18 55 , reproduisant un e règle déjà ancienne portée par l'arrêté du 16 mai
'1812, les martell ières et ouvertures du grand ~anal de Crapponne doivent étl'l'
fermées de six heures du soir à six heures du matin , pour éviter les abus et
pertes d'eau durant la nuit.
• priété est au quartier des Blaseaux. L'eau se prenait autre fois au moyen d'une
Le premier témoin de la prorogation de con tre-enquéte, dit : • M. Massot
• large ouverture. Les meuniers ont bouché cette ouverture avec une pierre
• percée d'un trou , qui débite une quantité plus faible que celle qui passait au• paravant... Il existe en dessous du point qu'il vient de décrire deux pierres
• de taille destinées à appuyer une planche transversale. Il a toujours vu les
• pierres .. .
«
pour arroser , faisait usage d'une ouverture pratiquée dans la paroi latérale
, de l'écluse . Il ouvrait et fermait ce trou au moyen d'une vanne. D. Ne vous
«
était-il pas recommandé de surveiller les eaux afin qu'elles n'arrivassent pas
• au moulin de Châteauneuf au préjudice des arrosants ~ R. oui , Monsieurs.
»
, j'avais ordre d'établir un bàlardeau placé à quatre ou cinq cents pas en avant
Le dixième témoin : «j'ai une pnse d'eau qui est établie dans la berge
• même de l'écluse de .M. Teissier . . , • Et le même témoin , entendu dans la
• prorogation et qui y figure comme 2' témoin , ajou te : il y
(1
plu.s de 40 an s
• ? te j'arrose el1 prenant l'eall à l'écluse de ChâleattnCll{. . . "
Le douzième témoin : « afin rl'fivitel' les c/isCtlssions avec les arl'osants , les
«
meuniers n'allaient 1Jas botwher le long de la Garrigue les orifices de lCll1'S
• J,rises. Ils l,) faisaient seulement lorsqu'àprès des pluies l'eau étant trop abon-
• dante elle aurait pu portel' préjudice il. ces arrosants eux-mêmes. En parcou-
, de l'écluse de Châteauneuf , et je devais surveiller qu'un bàtardeau construit
• SUI'
le fossé de la Garl'igt!e fût main tenu jour et nu it pendant la saison des
" arrosages ... Il ex iste bien au-dessous de M. Massot des propriétaires qui arro«
sent, mais j'ignore où ils prennent leurs eaux.
Nos preuves et celles fournies pal' le sieur Teissier concordent donc parfaitement .
Voyons mainte~ant si cette déri vation a eu lieu au moyen d'oU\'rages en maçon-
nerie.
�-
, ro
1,4 -
-- 1.t) -
:? Dl ril'a'ion au moyen d'Olll'ragcs lm m.açonne,.le .
du double
, on t, eux ol los al'I'osants, IOUj 'lU i'S sCl'r i de cette oU I'crtu re pOtM' raii'e ll'ril"'1
les eaUll aux: inrérieurs, ct les en lever au moulin _
lapport descriptif des lieux rédigê par M. le Ju ge-commissaire, l'un du 27 août
Il résull.e de la un rait de la plus haute grav ite co ntre les prétentions du sieUl'
1S 60. l'autre du 9 mai 1862 , et du plan des lieux levé par le géomètre, commis;
Teissicr. Son usine porte, à l'entrée de so n canal, le signe de la servitude qui
Quant à ce qu'en disent les deux rap-
la grève, le signe de sa subordinati on aux arrosages ct la preuve irréfragable du
droit des demandeurs .
L. preu .-e de l'existence des ou.-rages en maçonnerie résulte:
2' Des enquêtes et contre-enquêtes. l')r~.
nous nous en rérerons
~\
j '
ce qui est conten u dans notre exposé de fait
Ceci devient d'autant plus grave, quer le sieur Tp,issiel' a cherché, il y a deux
'lui le:, résume, et à la vue du plan.
Quant au x enquêtes, l'oici l'énumération des témoins qui en parlent: dans
ans, à modifier subrepticement cet état, en bouchant cette ouverture de la paroi
l'enquête des demandeurs, ce ont les 1", 2' , 5' , 4' , 6', 10', Il ', 12' et
latél'ale, qui était presque au niveau du plarond de l'écluse, ainsi que le constate
dans la prorogation les 1" et 2'. Dans la contl'e-enquête du sieur Teissier, ce
le rapport du 9 Ulai 1862, et en la pl'atiquant à un point plus élevé_ Mais cettr
sont les 1". 2', 10', 12' et 14' témoins .
tent ative a été doublement inuli le, puisqu'elle n'a pas empêché M. le Juge-Com-
les effets de ces oUI-rages en maçonnerie, il est impossible d'élever le
missaire de déoouvrir celle fraude le 9 mai 1862 et de la constater, et que de
moindre doute. Ils ont été construits pour amener et pour produire la dérivation
plus elle a provoqué de la part des arrosants une instance devant le Ju ge dt'
.Ies eaux réunies de Crapponue et de la Gan'igue ,- ils n'ont servi qu'a cet usage.
Paix, qui a condamné le sieur Teissiel'. L'ouvertUl'e primitive était ·donc un obs-
Il est de ces rérités qui se comprennent et se prouvent de soi. Nous n'avons pas
tacle à ses prétentions ct le signe caraetéristique du droit des demandeurs.
~ur
hè,oin d'y insister. Par conséquent toute la série des oUl'l'ages existants supé-
POUl' attenuer l'object.ion , le Sieu r Teissier s'est av isé de dire que cet ouvrage
rieurement au pont d'A,ignon , lettre E du plan , fourn it un argument décisir à
n·.1 jamais servi qu'au sieur Massot, el que ce n'est que depuis quatre ans que
la cause de l'œ uvre de Crapponne et de la ville de Salon .
les quinze arrosants inrérieurs s'en serrent.
Remarquons d'abord qu'au pOlOt de vUP, général du procès, cet argument, s'il
Arrêtons-nons mantenant un instant sur l'ouvrage si caractéristique, appelé
IroIL tfe Massol
était vrai, ne sauverait pas le sieur Teissier. Il faudrait toujour qu'il s'inclinàt
et marqué lettre D sur le plan, après le pont d'Avignon .
au moins devant le droit acqu is par l'usage constant que le sieur Massot aurait
:\'ons amns ici il conrondre l'adversaire, et j'oserai dire à le cOUlTir de confu-
rait de l' ourrage. Celui-ci entendu deux roi s, d'abord comme 10' témoin de la
sion, par suite des témérités et des hardiesses qu'il s'est permises touchant ce
point du procès .
con t.re-enquête du sieu r Teissier, puis comme 2' tf\moin de la prorogation de
L'effet de cet ouvrage, par rapport au moulin de Chateauneuf , a été d'em-
contre-enquête, déclare: " 'I"e dept<ù 11/"s de 40 ans il arrose en prenant dr
«
pêcher les eaux d'arri,er à ce moulin durant la saison des arrosages et de les
, de l'écluse de
1éseryer exclusivement pour les arrosants inférieurs.
L'expérience faite le 9 mai 1862, par M. le Ju ge-Commissaire a démontré
que cette ouverture mise il. découvert a vidé l'écluse entière. Le 1" et le 2' témoin
tie la prorogation de l'enquête parlent dans le même sens, et apprennent qu'il se
l'eau à l'écluse de Ch<i.teauneur ; qu'il a une prise étahli e dan la berge même
•
~1.
Teissier ; qu'il y a deux ans M. Teissier fit exhausser le
, seuil de cette prise, mais que cela ne l'empêche pas d'avoir l'eau qui lui est
«
nécessaire... •
~Iais
en outre, il est inexact de dire, co mille l'avance
~1.
Teissier que celle
�-
'16 --
l'lise est particulière à M. Massot. Elle sert et elle a toujours 5el"l'i à tous les
lITo,anl5 inférieurs; et tous arrosent depuis un temps indélini ct qui remonte à
l'lus de :iO ans.
-
loi -
ajouté ces mots plus grares enCO i'e qu 'une cause qui sc défenda it par de pal'eil,
moyens, était jugée et condamnée d'avance.
Que le trou de Massot servit il. tous les arrosants inférieurs pour leur arrosage ,
Quel oubli de toutes les convena nces! Quel areuglement! Et quelle obstina-
,·'est ce qui est prouvé par les témoins suil'ants : le.4' de la prorogation de conl.re,'nquête ; le 14' de l'enquête, le 5' et 6' de la prorogation de contre-enquête,
tion i\ ne pas lire ce qui est écrit dans les enq uêtes et dan s les documents dli
procès !
l,' 1" de id., le 6' de l'enquête, les 1" ct 2' de la prorogation d'enqu ête ; ,"n
totalité huit témoins.
Quand l'hono l'abilité du syndic de l'OEuvre de Crapponne et celle de M. Ir
Que la date de leur joui ance par le trou de Massot remonte au-delà. de 50
ans, c'est ce qui est proUl'é par les témoignages suivants :
Le 5' témoin de la prorogation de contre-enquête dit : • que pelidall1111'H de
, ;;0
ailS
• parle de
;t
il a arrosé en prenant l'eau au trou de Masso t. Le 6' de l'enquête
pltlS
de ;;0
(LnS.
Le 2' de la prorogation d'enquête parle de 18 ~O
Mairc de Salon ne seraient pas notoires et publiques co mme elles le sont ,
'Iu'clles n'aurai ent pas dû les mettre à l'abri d'un excès de ce genre, M. Teissier
aurait dû se l'épargner , en présence de la découverte faite le 9 mai 1862.
par M. le Juge-Commissaire dans l'éclm,e du moulin de Châteauneuf. Ce magistrat n'a pas trouvé l'ouver ture au milieu de l'écluse, mais il l'a trouvée sur
la paroi latérale de l'écluse , et p,.csq"e
(,u
niveau de celle-ci. A l'épreuve , il
été constaté par ce même m~gistl'at , qu'elle vidait entièrement l'écluse. De
185 1. Le t" de la prorogation d'enquête parle de 185'\ il 1855.
;1
Reste le nom donné ~ cette ouverture appelée !?'ou de Massot . Mais cela
telle sorte que le témoignage du sieul' Charasse, a mis sur les traces de la dé-
;explique tout naturellement. On lui a donné ce nom parceque Massot est le plus
couverte de la vérité ; au lieu d'être a" milie" de l'écluse, l'ouverture est
rapproché et qu e les autres arrosants son t au-dessous ( 1" témoin de la proro-
la paroi latérale; et là elle produit exactement tous les elTets de l'autre. Il n')
gation de êontre-enquète) . Il est à la tète des arrosants ; son nom a été pns et
" donc eu de la part du témoin qu'un e erreur sur l'emplacement de l'ou-
appliqué. D'ailleurs ce trou s'appelait autrefois trou de Meyronnet , du nom du
vert ure; erreur insignfiante, puisque les elIets de la première ne pouvaient pas
possesseur de la terre aujourd'hui possédée par Massot (2' témoin de la pi'orogation d'enquête.)
Voilà bien des démentis donnés et prouvés contre l'assertiou du sieur Teissier.
En roici un beaucoup plus grave.
SUI'
titre plus grands qu e ceux. de la seconàe.
Remarquons de plus qu 'il serait fort possible que primitivement l'ouverture eCit
été placée au milieu, et que, de même qu'aujourd'hui M. Teissier l'a rejetée un
peu plus haut, de même 1\ une époque antérieure, le propriétaire du moulin l'cut
placée sur la paroi latérale de l'écluse.
[\ a fait écrire dans son mémoire que l'OEuvre de Crapponlle avait produit un
temoin qui se serait parjuré, le 5' de l'enquête , le sieur Charasse ; que ce témoin
'\lirait été produit en désespoir d~ cause pour tromper la Justice , en affirmant
qu'il y avait au milieu du plafond de l'écluse du moulin de Châteauneuf une ouverture qui vidait et empêchait les eaux d'arrirer au moulin de Châteauneuf. Il a
Voil11 le démenti grave et solennel que nous donnons à i\1. Teissier. Il est
malheureux: dans ses argumentations, parcequïl ne l'oit jamais qu'un point isole
des documents et qu'il n'en embrasse pas l'ensemble. Il est encore plus malheureux dans ses invectives, parceque l'intcrêt l'aveugle et le passionne.
N' 3.
R~pollse
à quelques objeetiolls présenMes .
Le mémoire du sieur Teissier a prétendu d'abord que le fait mis en preuve
�-
48 -
étatt t'aguI' el ills/'!fi.salll. Nous doutons que cel argument puisse séduire pcrsonue. Nous croyons même que le sieur Teissier lui-même n'a dans lui aucune
ronfianC<). Le fait ne Ilouvait pas être plus concluant. Dans tous les. cas c'est
!tien tard que l'observation arrive; il aurait fallu frapper d'appel Ic jugement du
18 juillet 1861 qui arait déclaré le'fail pertinent et admissible.
Le mémoire ajoute, page 17 que Ilas un seul témoin n'a fait de réponse di·
rl'cte sur la question posée. Pour réfuter l'objection , nous avons reproduit tex-
• t. 1, p. 92 , Iles servitudes, nous parait étre que les ouvrages doivent être
• présumés avoir été faits par celui dos propriétaires dans l'intérêt duquel ils
" sont établis: is (ee;t cui lJ1'odest; car c'est lui qui les a véritablement possédés,
« et l'ancienneté des travaux. n'est qu'un titre de plus en sa faveur . Cassation
,,22 octobre 1811, j. du palais
l. XII ,
p. 811; cassation, 6 juillet t 825 ,
• Lalouel. D. 1825, \, 556; cassation, 12 avril 1850, Nicoel, j. du palaist.
" LXXXVII ,
p. 255; cassation, 16 mars 1855, Vignare, Devill . 1855 , l , 621 ;
tuellement les dispositions ci-dessus; leur langage suffit et il ya dans l'argumenl
" Coquille. coutume de Nivernais, art. 2. chap. X ; Bourjon, droit commun de
qu 'il nous fournit une reponse décisive. Ions n'y ajouterons donc rien.
• la France des servit, sect. 5 , n' 14 ; Zacharire, t. 2, p. 56 note 5 ; Demante
L'II seul témoin a parlé, ajoute encore le mémoire, le sieur Charasse, le troisième
" cours analyt. t. 2, n' 1,95 bis.
»
de l'enquête, et il est contredit par tous les autres témoins. Ouïsur l'existence de
Le tribunal a donc invoqué un principe vrai. L'a-t-il bien appliqué' oui certai-
'om erture \\Iassot, ait mi/ic., de ['ér/use. Mais non , mille fois non sur l'ouverture
nement : qui peut en douter ? les ouvrages faits n'ont jamais pu servir au mOllli n
j{assot sur la paroi latérale de l'écluse, presq ue au niveau de l'écluse. On a l'II
de Châteauneuf, et ils lui sont tous contraires. I\s ont tous en pour but de lui
ue plus par l'expérience de M. le juge commissaire que cette ouvertu re existait et
enlever les eaux, de les détourner , de les faire servir 11 l'irrigation. Donc ces
qu'elle l'idait entièrement l'écluse . Que veut de plus M. Teissier? la condam-
onvrages n'ont pas été faits par le propriétaire de ce moulin, ni des autres; aucun
nation de son système est si bien écrite ici , qu'on s'étonne qu'jl trouve un e
difl'érence là où il n'yen a pas.
ddute ne peut s'élever sur ce point; c'est plus clair que la lumière du jour.
Nous ajoutons maintenant que le sieur Teissiel' se condamne lui-même dan ~
Sur les oUlTages en maçonnerie , le mémoi.'e excipe de l'arrét de 177 6, et des
son objection. Il veut que les ouvrages aient été faits par les arrosants riverains.
conclusions respectives. Mais l'arrêt de t 776 n'ordonne pas leur destruction ;
Donc ces ouvrages ont été faits pour la cause que l'œuvre de Crapponne et la
c'est tout ce qu'il faut. Il exonère seulement la commune de la réparation de
ville de Salon défendent. Donc ils peuvent être utiles il prescrire.
la fracture faite il la gorgue du pont d'Avignon ; sans dou te l'œuvre ùe Crap-
Il y a seulement ici une erreur de fait il relever. Ce ne .sont pas seulement les
)Jonne ne pût pas prouver qu'elle en était l'auteur. Mais nous ne demandons au-
riverains qui arrosent et qui ont fait les ouvrages; c'est toute la communauté lIe
cune réparation 11 M. Teissier. Le procès d'aujourd'hui n'a aucun rapport al'ec
celui de 1770 et de 1776. L'argument est donc nul.
Salon, et tous les habitants possesseurs de fonds dans son territoire. On a l'U qu e
Le sieur Teissier objecte encore que les enquêtes ne disent pas pal' q..; cos
oublié le quilibet possit adaqtlal'e; ni ces autre mots: juxta necessitatcm inhabita1l-
OUI rages
l'arrosage n'était pas prat ique par les seuls riverains, mais par tous. On n'a pas
en maçonnerie ont été faits, et que la maxime is {ecil cuit lJ1'odest ne peut
tiwnt; ni l'Universalité des habitants au nom desquels en 1521 les suppliques
l'as suffire, parceque ce sont les riverains qui son t censés avoir fait les oU l'I"agc,
pnur eux . Yoici notre réponse:
étaient présentées; ni l'unil'ersalité des arrosages constatée en 1715 et i 711; .
Fixons d'abord le droit. • La règle générale en pareil cas , dit M. DemolomiJe
Donc les ouvrages ont été faits par tous et pour tous les arrossants d'autre fois.
t~omme ils servent à. tous les arrosants d'aujourd'hui.
�-
-
51 -
50 -
mOltliniers. Le onzième: que d'autres usagers que lui s'en servent (des ouvrages)
Nous négligerons. en terminant cette revue des objections sur le deuxième
pour ban'er le COt,rs de l'cati, Le quinzième: que les arrosants avaient la priarri"'.
chef mis à preuve. les objections prises du règlement de 1295 et 152 1. Nous y
Le premier de la prorogation d'enquête et le deuxième de idem : que pendant
}oute la saison des arrosages, l'écluse était tOltjours à sec pendant cette pûriode.
arons suffisamment répondu dans la première partie, et nous passons au troi-
La seule objection faite par le sieur Teissier consiste il dire que, d'après les
"ii'me chef côté,
enquêtes, il est prouvé, que le moulin de Châteauneuf a fonctionné durant l'été,
~.
Ifl .
TROISIÈME PlUT A PROUVER : QUE CET USAGE PENDANT LADITE SAISON
et qu'il n'y a pas eu exclusion compléte de son mouvement. Mais ce que J'adver-
A ÉTÉ EXCLUSIF DE CELU I DES MOULINIERS.
saire laisse complétement de côté, ce sont les circonstances qui expliquent cette
singulière jouissance du sieur Teissier, Les voici fidèlement résumées;
Cette possession exclusive est prouvee au procès de diverses manières; il faul
les résumer.
D'abord le moulin n'a pu fonctionner qu'après que les arrosants avaient librement
1· elle l'est par les jugements de condamnalion rapportés et obtenus pal
!"OOurre de Crapponne, rappelés daus notre expose de faits . Ce sont les deux
.
,
et entièrement arrosé leu rs fonds; la preuve en est qu e jamais les arrosages n'ont
manqué. Peu importe donc que lorsque les eaux. auront été abondantes, le
jugements du juge de paix de Salon du 2 octobre 1850, celui du 29 octobre
moulin de Châteauneuf n'ait pas observé la défense du règlement de 1295 . Il
J 8 51, et celui de 1845, Rien de plus exclusi f que ces condamnations prononcées
suffit que les arrosants aient été servis avant. On a vu d'ailleurs par les dispositio ns
pour les atteintes portees accidentellement par le sieur Teissier et les meunier,
ci-dessus que lorsque les eaux n'étaient pas abondantes, elles étaient absorbées
par les arrosants.
aux droits des arrosants . Il faut y joindre la condamnation volontaire subie le 1l,
arril f 858 par le sieur Teissier lui-même,
En second lieu, l'oici comment le mou lin a pu avoir encore des eaux dans l'eté.
2' La seconde preuve de la jouissance exclusive contre le sieur Teissier, result(·
Le torrent de Talaga,'d en donne abondamment à la Gan 'igue en temps de pluie
de la nature de l"ouvrage, lettre D, du plan, dont le propre dans son fonctionnement
et d'orage; cela est prouvé par le dixième témoin de l'enquête, p, 57 de J'expé-
a éte d'enlever toutes les eaux au moulin de Châteauneuf durant les momentg
dition et par le deuxième témoin de la prorogation de la contre-enquête. En ces
d'arrosage,
circonstances donc l'arrosage n'était pas nécessaire, puisqu'il avait plu, Le moulin
3' La troisième preuve résulte des enquêtes. En elfet le premier témoin indique
que les arrosants avaierrt la priorité. Le troisième témoin dit que si les trou s n'é-
aurait profité des eaux de Talagard, c'est un rait qui ne peut rien attnbuer ,
En troisième lieu , il est prouvé par les témoins produits par le sieur Teissier
taient pas boucbés, le moulin était à abandonne'l'. Le quatrième dit que les an o-
que les meuniers pour se procurer les eaux agissaient
sants doivent prendre les eaux de preference et à l'excltttsion des propriétai,,.es d"
témoin de la contre-enquête dit qu'ils : faisaient cela . bien e"tendu, en cachette. Le
moulim. Le sixième ajoute que les arrosants absorbent toule l'eau en été, Le sep-
deuxième : que les arrosants qui débouchaient les trous fermes par les meuniers
tième qu'il use sans se préoccuper des besoins des usiniers et de manière à absor-
ne laissaient aller au moul in les eaux,que lorsq,,'ils en avaient de reste. Le douzième
ber les eaux de la t;arrigue, Le huitième que les eaux. de Pâques il St-Michel S01l '
qu'i ls ne bouchaient les prises que lorsque l'eall étant trop abondante, après les
la propriete exclusive des arTosants, Le neuvième que lors qu'en été les arrosanL~
pluies, elle atll'ait mû atlX prises. Le douzième témoin de !"enquête des demandeurs
Ilnt besoin de toute l'eau, ils l'absorben t complètement. Le dixième: que le caux
sont quelquefois insuffisantes, et se trouvent ainsi abs01'bées
à l'exclusion
de.
s",br~pticement.
Le premier
�52 -
-
,lit au,i : • quelquefois les meuniers, mais SlIbrepticement, bouchaient ces ouyertures: quand nous les découvrions, ils s'esquivaient ou cherchaient Il nier le
En quatrième lieu, il est proul'é par le treizième témoin de la contre-enquête
les meuniers ne prenaient les eaux qu'apl'ès 6 heures du soi'l' . c'est-a-dire
moment où les eaux de Crapponne ne coulaient plus dans la Garrigue, Im-
all
possible donc de se placer dans une position subordonnée plus complète et de
mieux marquer la possession exclusive des eaux par les arrogants durant la
)olll'll/ie. c'est-a-dire. durant le moment des arrosages ,
En cinquième lieu. les meuniers ne prenaient les eaux que lorsqu'il allaient
Mtruire les batardeaux. ( 1". :5'. 8' et 16' témoins de l'enquète.) Que prouvent
te>
Ce trait est caractèristique du peu d'importance de ce moulin de Châteauneuf. On
voit bien que cette usine ne doit travailler que six mois de l'année,
Remarquons encore que le fermier n'est chargé que du repurgement de l'écluse
(Olt.
'Jlh'
~5-
actes de violence · la jouissa~ce exclusil'e des arrosants, puisque sans destruc-
lion de leurs œUl'res, point d'eau pour le moulin .
Pour renforcer son exception . M, Teissier inl'oque encore le bail du moulin de
C:hâteauneuf de \79\ et la clause où il est dit que le moulin sera ouve1't toute
et du canal de fuite. preuve que le fossé de la (Jarrigue n'était pas à repurger
par le propriétaire du moulin ,
On sait comment ce repurgement s'est opéré dans les temps anciens . Nou~
J'avons déjà dit. Nous n'avons pas à y revenir.
M. Teissier essaie d'un dernier argument pour couronner tous les autres, Il prétend que l'usage des bâtardeaux et des rebutes quelquefois employés par les arro:;ants est condamné par le règlement de 1295. Nous nous bornerons sur ce poinl
il lui dire qu'il a mal lu et mal compris ce texte. et que la défense ne porte que
contre ceux qui font des rebutes pour enlever les eaux à qui elles sont dues, mais
qu'il ne les proscrit pas quand on les emploie pour faciliter l'irrigation et pour
réunir les eaux et les diriger vers les prises établies pour l'irrigation .
l'année. Mais sur ce point il faut d'abord remarquer deux choses décisives. La
première. c'est qu'à cette époque la commune de Salon était propriétaire tout à la
Terminons. L'OEuvre de Crapponne et la ville de Salon ont rempli les
COIl -
fnis du moulin de Châteauneuf. des arrosages de la ';m'rigue et de ceux de Crap-
<litions de l'interlocutoire. Elles l'ont fait d'une manière complète et exorbitante.
pon ne. Elle a donc cru pouroir se relacber de son droit. comme réunissant ce
Rien n'est plus clair maintenant que leur nroit ; les titres et la prescription l'éta-
,Iirerse qualités sur sa tête, et permettre l'ouverture du moulin pendant l'été.
blissent. La Cour le consacrera. Elles plaident l'une et l'autre pro
La seconde, c'est qu'on se trouvait en 179\ , à une époque de trouble. où tous
La vil/e cie Salon. pour empécher que ses arrosages ne diminuent et en cela elle
les propriétaires de l'OEuvre de Crapponne étaient en fuite et émigrés;
a une
défend un véritahle intérêt public; l'Œ!wre
de CraplJOnne ,
damna v italldo.
pour maintenir au
époque où la municipalité de Salon a l'oulu faire de la popularité, en ne pas suivant
pacte du 16 février 1562 son caractère. Et en cela ell e défend encore un intérêt
la règle usitée de tous les temps.
public. puisque tout ce qui concerne 1'00ul're de Crapponne et qui tend 11 la con-
En second lieu. on peut voil' dans ces expressions: mOlllinouvtl't toute Cannée.
plustôt une intention de le tenir ouvert, que la certitude matérielle qu'il l'ait été en
server dans ses droits. tend aussi li lui permettre de remplir le but d'utilité publique qui présida à la création de son canal.
réalité, et que l'ayant été, il ait travaillé. Une raison décisive de ne pas croire qu'il
M. Teissier au contraire plaide 1l"0 luero captatHlo . JI a achet6 . bon marchè ,
ail travaillé, ou qu'il dut travailler, c'est la minimité de la rente obtenue par ce
un moulin qui ne l'apportait qu'un très minime revenu , trois ou quatre cent
hail, La commune afferme moyennant la modique somme de 140 fran cs par an.
francs. parcequ'il n'allait que durant l'hiver . Il veut le convertir en une belle mi-
�-
54-
nNcrie, mais ce n'est qu'une usine sans eau la moitie de l'année . [] fait donc tout
ce qu'il peut pour lui assurer un moteur perpétuel.
~Iais enfin comme ce gain qu'il veul faire, il ne peut l'obtenir qu'en sacriliallt,
•
méconnaissant et violant les droits de ses adversaires , la Cour mettra un terme
à -es usurpations, en consacrant la double base sur laquelle l'epose le j ugemenl
Jout M. Teissier a eu la témérité d'émettre appel.
A. TAVERNIER Père, Avocat.
~IARTIAL
BOUTEILLE , Avocat.
ESTRA1\1GIN, Avoué.
~[!CHEL ,
Avoue.
~!.
DE GABRIELL L t" Al'oeat-Géneral, portant la parole_
•
.
~"'i'{.
Typ . Nico l, CO\lI'i, S!!.
--.
�
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Monographie imprimée
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Title
A name given to the resource
Mémoire pour M. de Galliffet contre M. le préfet des Bouches-du-Rhône
Subject
The topic of the resource
Droit des successions
Factums après 1789
Successions et héritages
Approvisionnement en eau
Droit foncier
Description
An account of the resource
Recueil des factums d’affaires défendues par Me Adolphe Tavernier
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tavernier, A.-A.
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES 7319/1
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Veuve Tavernier (Aix-en-Provence)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1849
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/201770458
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES-007319_Recueil-Galliffet-vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
116 p.
26 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
France. 18..
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/190
Abstract
A summary of the resource.
Mémoire pour M. de Galliffet contre M. le préfet des Bouches-du-Rhône
Ce document est un recueil d’affaires défendues par Me Adolphe Tavernier (1799-1882), docteur en droit, avocat à la Cour d’Aix et ancien bâtonnier, dont l’intitulé - Mémoire pour M. de Galliffet contre M. le préfet des Bouches-du-Rhône - correspond en réalité à celui de la première d’entre elles. Bien qu’un sommaire manuscrit fasse mention de neuf factums, ni la Supplique à sa Majesté Napoléon III Empereur des Français (1854) ni le second Mémoire pour l’Œuvre générale de Craponne (1862) ne sont contenus dans le document.
Les trois premiers factums sont liés à la question de la propriété d’un canal et de la bordigue qui y est établie. Des pêcheurs de Martigues ayant posé leurs filets dans le canal dit du Roi, M. de Galliffet a obtenu de la Cour royale, en 1845, que soit condamnée cette atteinte à sa propriété. L’administration est alors intervenue dans le cours du procès, demandant à ce que le canal litigieux soit déclaré dépendance du domaine public maritime, non susceptible de propriété privée et réservé au public pour la navigation et la pêche. Le Mémoire pour M. de Galliffet, contre M. le préfet des Bouches-du-Rhône (1849) est ainsi publié pour prouver contre les prétentions de la Préfecture, que les titres en vertu desquels il possède ladite bordigue (le terme désigne un appareil de pêche et, dans un sens plus large, le canal où il est placé et les bords du canal) sont de véritables titres de propriété, et non de simples actes administratifs. Le Mémoire à consulter pour M. de Galliffet, pour servir de réponse à une exception d’incompétence et au mémoire des pêcheurs de Martigues (1850) devait à l’origine être produit devant le Conseil de Préfecture des Bouches-du-Rhône. Il visait à établir sa compétence, à réfuter le mémoire des pêcheurs de Martigues, et à compléter la défense de Galliffet sur la propriété de la bordigue relativement au principe de l’inaliénabilité du domaine de la couronne (édit de Moulins de 1566). Enfin, la question de la propriété patrimoniale et privée du canal et de la bordigue qui y est établie, est soumise au Tribunal civil d’Aix par les héritiers de Galliffet qui souhaitent la faire juger contre l’État. Le Mémoire pour l’Hoirie de Galliffet contre l’État (1857) se place ainsi dans la continuité d’un précédent mémoire adressé au Préfet des Bouches-du-Rhône en 1856.
Le Mémoire à consulter pour M. le marquis de Valori et ses fils (1859) a pour objet une question patronymique. En effet, dans un précis historique sur la baronnie de Châteaurenard, le vicomte Henri de Valori (1833-1898), déjà connu pour un Essai (sur la noblesse et sa mission), flétrit l'usurpation des titres nobiliaires et se plaint, dans une note rejetée à la fin de son récit, de ce que M. d'Aymar de Montsallier ait pris sans aucun droit le nom et le titre de marquis de Châteaurenard. La famille d’Aymar de Montsallier, ayant porté plainte contre Valori, reproche à celui-ci de lui dénier le droit de porter ce nom et le caractère injurieux de certaines remarques. Ce mémoire tend donc à démontrer la validité des prétentions de Valori.
Le Mémoire pour les propriétaires des moulins à farine banaux d’Hyères, appelants du jugement du 19 juillet 1859, rendu par le Tribunal civil de Toulon, contre le sieur Giraud, minotier, et les communes d’Hyères et de la Crau, appelées en garantie ; intimés (1860) concerne la légalité des banalités conventionnelles. Celle des moulins à farine d'Hyères, constituée en 1688 et 1689, est en effet contestée par un habitant qui souhaite se soustraire à ses effets, ayant par ailleurs fait introduire à plusieurs reprises des farines étrangères dans le rayon de la banalité. Les propriétaires de ces moulins ont donc publié ce mémoire afin de démontrer que seules les banalités seigneuriales et féodales ont été abolies par les décrets des 15 mars 1790, 25 août 1792 et 17 juillet 1793, et qu’incidemment les banalités conventionnellement établies entre une communauté d’habitants et un particulier non seigneur, avant 1790, sont légales.
Pas davantage que les factums relatifs aux déboires de M. de Galliffet, ceux impliquant l’Œuvre de Craponne n’ont de rapport direct avec l’affaire du canal de Craponne (Civ. 6 mars 1876, De Galliffet c/ Commune de Pélissanne) à l’occasion de laquelle la Cour de cassation a rejeté l’imprévision en matière contractuelle. Ainsi, le Mémoire pour l’Œuvre générale de Craponne (1862) porte sur le rapport de l’ingénieur en chef du département du 24 janvier 1862, et le projet de règlement d’administration publique du 27 avril 1860, par lesquels l’Œuvre générale de Craponne estime que l’administration veut soumettre la régie du canal au contrôle habituel et ordinaire des ingénieurs de l’administration : « Obligés de suivre les volontés et les projets de tous ceux qui aspireront à faire du canal une œuvre de canalisation sans ombre, sans tache, sans aucune imperfection », les propriétaires seraient contraints de « supporter toutes les dépenses entraînées par ces perfectionnements inutiles qu’il sera libre à l’administration d’exiger », au risque de ne laisser à ceux-ci que « l’unique avantage de subir (les charges les plus lourdes) et de les porter, ou de périr et de succomber sous leur poids ». L’Œuvre générale de Craponne et les communes intéressées ayant fait entendre leurs plaintes dans une enquête jugée insuffisante, la publication de ce mémoire a pour but, selon ses auteurs, « d’éclairer l’administration sur toutes les violations des droits et des titres qu’elle va réaliser par son projet ».
Enfin, le Mémoire pour l’Œuvre générale de Craponne et M. le Maire de la ville de Salon, intimés sur l’appel du jugement du Tribunal civil d’Aix, du 24 janvier 1863, contre les sieurs Teissier et Amouroux, appelants (1863) a été publié en vue de défendre devant la Cour impériale d’Aix un jugement obtenu par l’Œuvre générale de Craponne et le maire de Salon, qui les a maintenu dans le droit de verser les eaux du canal de Craponne dans le fossé de la Garrigue, de les mêler avec celles de quelques sources naturelles qui coulent dans ce fossé, et de les en dériver toutes ensemble pour l’irrigation des terres qui bordent la Garrigue.
(Luc Bouchinet)
Pêches -- Martigues (Bouches-du-Rhône) -- 19e siècle
Titres de propriété -- Martigues (Bouches-du-Rhône) -- 19e siècle