Factums après 1789]]> Histoire]]> Jurisprudence après 1789]]> Biographie]]> prétendues lettres et plus précises puisqu'on comprend d'emblée qu'il y une erreur grossière sur le nom du Général Combe qui ne s'est jamais écrit Combes (élément mis en avant dans cette nouvelle version).

François Zola (1795-1847)

Si l'affaire Dreyfus est bien évoquée, c'est celle qui concerne François Zola et son cortège de sordides manœuvres pour le calomnier qui préoccupe J. Dhur. Une grande partie de l'exposé est la reprise du texte de la première version, seuls certains paragraphes ont été remaniés en plus des textes additionnels.

Emile Zola (1840-1902)

Pour cette édition, J. Dhur pouvait difficilement recevoir un parainnage moral et politique plus prestigieux que celui de Jean-Jaurès qui en rédige la préface. D'autant plus que l'homme politique, déjà connu pour son engagement auprès des luttes ouvrières, ne peut pas être accusé d'être un dreyfusard inconditionnel : tout au contraire, au début de cette affaire d'intelligence avec l'ennemi, il prend ouvertement position contre le capitaine condamné pour haute trahison mais qui échappe bizarrement à la condamnation à mort : une telle "clémence" ne doit-elle vraiment rien à l'influence du lobby juif ? Si la grandeur des hommes intègres est de reconnaître leurs erreurs, J. Jaurès en fait incontestablement partie : après quelques hésitations et devant l'évidence accablante que le procès n'a pas été mené de façon équitable ("les innombrables faux", il reviendra sur son premier jugement et prendra fait et cause pour Dreyfus.

Jean Jaurès par Nadar (1904)

Mais Jean Jaurès ne se limite pas à condamner les discours nationalistes et manipulateurs : peu importe si les témoignages s'appuyant sur des faux étaient ou pas de bonne foi, ce qui est inacceptable, c'est le fait que les autorités militaires aient refusé à Émile Zola et à son défenseur l'accès aux documents qui accablaient son père, et pour cause, ils les savaient inauthentiques. Et pour cela le Ministre de la Guerre, juges et autres fonctionnaires militaires devront rendre des comptes avec toute la sévérité qui s'impose (nous sommes encore loin du dénouement, ce n'est que sept ans plus tard, en 1906, que le dernier arrêt de la Cour de Cassation innocentera Dreyfus).

Ces affaires qui ont ébranlé la IIIe République et créé une fracture dans une société française tourmentée par antisémitisme et un nationalisme faciles auraient eu probablement un autre destin sans une certaine liberté de la presse, victime de tant de controverses et d'incertitudes politiques au cours du 19e siècle. Fin 20e siècle et début 21e siècle, les journalistes d'investigation paient régulièrement un lourd tribut en raison de leurs enquêtes : les régimes politiques les plus durs, comme les démocraties les plus fréquentables, développent toujours une profonde allergie à tous ceux qui s'obstinent à rechercher la vérité, à dénoncer les abus et à dévoiler le dessous des affaires.]]>
1899]]> fre]]>
Factums après 1789]]> Histoire]]> Biographie]]>
- dans sa première lettre au Procureur, J. Dhur fait référence à Ernest Judet "que je n'avais jamais vu avant le 14 décembre 1898, à l'audience de la 9° chambre correctionnelle"
- sa dernière lettre adressée au Procureur, et qui clôture l'ouvrage, est datée et signée : "Vendredi, 6 janvier 1899. Jacques Dhur"

Le texte de Félix Le Héno, connu sous son pseudonyme Jacques Dhur, a toutes les apparences d'une version préparatoire publiée dans une certaine précipitation, sans mention ni de l'éditeur ni de la date de publication (on sait juste qu'il sort de l'Imprimerie Kugelmann, à Paris) : dans une lettre datée du 23 décembre 1898, il annonce au Procureur qu'il va lui adresser un travail documenté.

Jacques Dhur (1865-1929)

Sans entrer dans le détail des affaires, un rappel des faits les plus récents explique la prise de position publique de J. Dhur : dans le Petit Journal du 23 mai 1898, M. Judet écrivait un article intitulé « Zola père et fils » où il racontait qu'en mai 1832, François Zola, « arrêté pour vol et malversation, avait subi une détention de deux mois ». Deux jours plus tard, dans l'édition du 25 mai, M. Judet, revenant à la charge, publiait sous le titre « Zola le récidiviste », un document qui, disait-il, apporte aux faits, dont la preuve existe, le témoignage autorisé du général de Loverdo. Émile Zola ne tarde pas à réagir et publie dans l'Aurore du 28 mai, une réponse indignée qui défend la mémoire de son père mort depuis 50 ans et cite de mémoire plusieurs journaux locaux (Le Mémorial d'Aix, le Sémaphore, la Provence) où son père est mis à l'honneur (brillant ingénieur en travaux publics, F. Zola est le concepteur du premier barrage à voûte d’Europe qui alimente en eau Aix-en-Provence).

Le Général Combe (1787-1837), statue de Denis Foyatier (1793-1863)

Face à tant d'injustice et de mensonges, Rhul décide d'enquêter sur cette affaire et de communiquer le résultat de ses recherches au Procureur. Quel peut-être le lien entre ces deux affaires pourtant distantes de plus de 60 ans ? Parce que contrairement à ce que pourrait laisser croire le titre du mémoire, le dossier traite bien de deux affaires distinctes annoncée dans l'intitulé des deux chapitres qui constituent l'ouvrage et qui semblent être mis en miroir : François Zola et l'affaire d'El-Ouffia pour le premier et Émile Zola et l'affaire Dreyfus pour le second.

Ce qui unit ces affaires ne doit pas être recherché sur le fond mais sur le procédé : toutes deux reposent sur de faux documents et de faux témoignages : il a été établi que la lettre apocryphe du Général Combe était un faux. C'est Émile Zola qui est en réalité visé à travers cette correspondance. La manœuvre, assez grossière et peu inventive, consiste évidemment à salir le père pour décrédibiliser le fils. Manœuvre peu surprenante, nous sommes en plein paroxysme de la campagne antidreyfusarde. Le début du second chapitre donne tout de suite le ton en citant le célébrissime "J'accuse...!", lettre dans laquelle Émile Zola prend la défense du Capitaine Dreyfus en appelant à la conscience de la plus haute autorité de l'État, Félix Faure, alors Président de la République.

J'accuse...! La Une de l'Aurore, n° 87 du 13 janvier 1898

En conclusion, et c'est l'aspect le plus grave pour l'auteur, cette affaire d'État fait de l'armée une véritable caste à part. On retrouvera cette dénonciation politique dans ses futurs choix professionnels : après la publication de ses écrits en faveur de Zola, il collaborera à l'Assiette au beurre, magazine satirique illustré français ayant paru de 1901 à 1936, peu avare de critiques envers le militarisme et marqué par un certain anticolonialisme et anticléricalisme. À partir de 1903, il dirigera Drames vécus.

Reste une question : pourquoi J. Dhur, qui connaît les démentis de Zola et la qualité de sa plume, se fait-il défenseur du défenseur ? Pour la bonne raison qu'il cherche moins à sauver Zola que l'idée qu'il se fait de la justice et de la vérité.]]>
1899]]> fre]]> France. 18..]]>